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COMMUNIQUE DE PRESSE
Le 25 janvier 2017
ENTITES ET POLITIQUES PUBLIQUES
L’ETAT ACTIONNAIRE
L’État est
-il un bon actionnaire ? Pour répondre à cette question par une démarche résolument
pragmatique, la Cour des comptes a examiné les participations publiques dans les entreprises,
sur la période 2010-2016. Elle a considéré
l’État actionnaire
au sens large :
l’Agence
des participations de l’État (APE), la Caisse des
dépôts et consignations (CDC) et Bpifrance.
Les participations publiques dans les entreprises constituent en France, de longue date,
un moyen très développé
d’intervention dans l’
économie. La
présence de l’État comme
actionnaire d’entreprises ne
se justifie pas seulement par des raisons patrimoniales
ou financières, mais aussi par des motifs de politiques publiques. Il en résulte
des contradictions entre des objectifs multiples,
que l’État
a du mal à surmonter.
Les constats effectués par la Cour montre
que l’
État peine à être un bon actionnaire.
Malgré d’indéniables progrès, des faiblesses chroniques demeurent
, notamment en matière
de gouvernance. L
’actionnariat public se révèle rarement le
moyen le plus adapté pour contrer
la perte de compétitivité et la désindustrialisation
de l’économie français
e. En outre, les besoins
financiers croissants des entreprises publiques vont peser lourdement sur les finances
publiques dans les prochaines années.
La Cour invite à clarifier les objectifs poursuivis, à engager des transformations profondes
dans la gouvernance et à limiter les interventions au capital au strict nécessaire.
Un ensemble vaste et hétérogène, des défis majeurs
L’actionnariat dans les entreprises est, en France, un outil de politique publique fortement utilisé
, dans un
très large éventail de secteurs, pour une valeur globale
d’environ 100 Md€ à
la fin de 2015, tandis que
l
es 62 participations cotées valent 77,4 Md€ à la fin de 2016. L’APE est le principal actionnaire, suivi par
la CDC et Bpifrance. Dispersé et mal connu, c
e portefeuille hétérogène doit plus à l’histoire qu’à une
quelconque logique de constitution. À l’excep
tion de celui de Bpifrance, il est peu mobile.
Dans un contexte de concurrence accrue, les défis sont aujourd’hui considérables pour les entreprises
concernées, qui doivent faire preuve d’agilité stratégique. La responsabilité de l’État actionnaire est
d’anticiper et d’accompagner ces transformations
, ce qui est possible, comme le montrent les exemples
de La Poste et
d’Orange.
Une situation financière préoccupante
Les performances financières des entreprises à participation publique ont été contrastées entre 2010 et
2015, mais la Cour constate
une nette détérioration globale pour les entreprises relevant de l’APE
(la plus
importante partie
du portefeuille de l’État a
ctionnaire). Malgré les bons résultats des secteurs de la
défense, de l’industrie et des télécommunications
, l
’APE
a enregistré en 2015 une très lourde perte
(10,1
Md€),
liée aux difficultés structurelles du système ferroviaire et des
grands opérateurs de l’énergie
.
Le bilan d’ensemble sur la période 2010
-2015 est globalement déséquilibré pour les finances publiques.
Les besoins financiers des entreprises
dans lesquelles l’État possède des participations
sont très lourds
et, à court te
rme, il ne paraît pas possible d’assurer ces recapitalisations
autrement que par une
amplification du programme de cessions ou une mise à contribution du budget général.
Les contradictions de l’État actionnaire
L’État est un actionnaire atypique, exerçant différents rôles, tous légitimes.
Il doit concilier de nombreux
objectifs, souvent contradictoires,
avec ses propres intérêts patrimoniaux ou avec l’intérêt socia
l des
entreprises qu’il détient
. Cette situation crée des tensions permanentes
et des difficultés chroniques, qu’il
peine à surmonter
. Ces tensions se manifestent principalement dans les secteurs où l’État est
l’
actionnaire dominant ou exclusif : transports ferroviaires, énergie nucléaire et audiovisuel public.
Le
cadre budgétaire, qui distingue opérations en capital et dividendes, est inadapté à l’activité de gestion
d’un portefeuille de participations, et n’en favorise pas une gestion dynamique
.
Des progrès de gouvernance notables, des carences persistantes
La Cour constate l’absence de
définition rigoureuse des raisons justifiant une intervention publique en
fonds propres, et de répartition claire
des rôles entre l’APE, la
CDC et Bpifrance. Des progrès de
gouvernance ont été accomplis, mais des carences subsistent, particulièrement quand
l’État est
actionnaire exclusif ou majoritaire, comme en témoignent des défauts de surveillance lourds de
conséquence, notamment dans la filière nucléaire avec Areva.
Si les améliorations constatées sont réelles, l’État n’est pas parvenu à maîtriser suffisamment les
contradictions auxquelles il a à faire face, ce qui l’affaiblit lui
-même. Il lui arrive encore souvent de faire fi
de l
’autonomie de gestion des entreprises
publiques. La Cour établit la nécessité de faire évoluer
profondément les pratiques de l’État actionnaire
, car la puissance publique est à la fois trop présente
dans la gestion et trop peu vigilante comme actionnaire.
Recommandations
La Cour formule quinze recommandations répondant à trois priorités :
-
fixer des objectifs stratégiques clairs
et s’y tenir,
notamment par des doctrines
d’intervention
coordonnées entre les trois principaux actionnaires publics et une redistribution des participations
de
l’APE vers Bpifrance
;
-
encadrer davantage l’exercice de la fonction d’actionnaire
, en garantissant
l’autonomie des
entreprises, en transformant le statut des établissements publics ferroviaires en société, en
adoptant un code de gouvernance pour les relations avec les actionnaires publics et en
transformant l’APE en agence autonome
;
-
limiter les interventions en capital au strict nécessaire,
en
redimensionnant le portefeuille
pour mieux
l’adapter aux objectifs poursuivis
. La Cour propose de choisir entre une réduction des
taux de participation sans diminution de
l’influence et
des droits de gouvernance, et un
resserrement significatif du périmètre
de l’État actionnaire
.
Lire le rapport
CONTACTS PRESSE :
Ted Marx
Directeur de la communication
T
01 42 98 55 62
tmarx@ccomptes.fr
Denis Gettliffe
Responsable des relations presse
T
01 42 98 55 77
dgettliffe@ccomptes.fr
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