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COMMUNIQUE DE PRESSE
Le 13 janvier 2016
ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LA DÉPARTEMENTALISATION DE MAYOTTE
Une réforme mal préparée,
des actions prioritaires à conduire
La Cour des comptes rend public un rapport thématique consacré à la départementalisation
de Mayotte.
Mayotte est une île de l’archipel des Comores, rattachée à la France depuis 1841. Collectivité
territoriale de la République, puis collectivité d’outre-mer, elle est devenue Département
de Mayotte le 31 mars 2011.
Mise en oeuvre dans un contexte socio-économique préoccupant, marqué par une forte
démographie et une importante immigration irrégulière, cette départementalisation rapide a été
mal préparée et mal pilotée. La situation financière du Département et des communes de Mayotte
est dégradée. Le manque de clarté des perspectives financières dans lesquelles s’inscrit
cette évolution institutionnelle complique encore la situation.
Les préalables identifiés dès 2008 dans le « Pacte pour la départementalisation » n’ont pas été
remplis en temps voulu : alignement de la réglementation et de la législation applicables, passage
à la fiscalité de droit commun, problématiques foncières, notamment.
Face à l’urgence de répondre aux besoins d’infrastructures de base (eau, assainissement, habitat,
constructions scolaires) et aux problèmes sociaux que connaît l’île (aide sociale à l’enfance,
chômage, notamment), le Département et l’État doivent dresser des priorités claires
et entreprendre sans délai la mise en oeuvre des mesures appropriées.
Un contexte sociodémographique et économique extrêmement préoccupant
Estimée à 220 000 personnes au 1
er
janvier 2014, la population de Mayotte pourrait atteindre 500 000
habitants en 2050. Elle est très jeune et composée à 40 % d’étrangers, pour l’essentiel d’origine
comorienne. L’ampleur de l’immigration irrégulière représente à Mayotte un défi spécifique pour
l’ensemble des politiques publiques, de même que le taux de chômage, qui s’élève à plus de 36 %.
Si le nouvel aéroport de Pamandzi, comme les investissements importants prévus en faveur du port de
Longoni, présentent des opportunités de développement, ils ne peuvent à eux seuls résoudre ces
problèmes, d’autant qu’ils devront faire l’objet d’un suivi rigoureux et être accompagnés d’investissements
dans les infrastructures.
Une réforme mal préparée
Les réformes qui auraient dû constituer des préalables à la départementalisation sont encore loin d’être
toutes achevées. L’identification des bases comme des redevables de la fiscalité directe locale (en
particulier la taxe d’habitation) n’est pas achevée. En dépit des efforts accomplis par l’État, l’application à
Mayotte des textes législatifs et règlementaires souffre de retards importants.
Le Département lui-même n’a pas encore atteint le niveau d’organisation et d’efficience nécessaire pour
prendre en main l’ensemble de ses compétences, alors qu’il cumule celles d’un département et d’une
région d’outre-mer.
Des risques financiers qui pèsent sur l’avenir
Pour les collectivités mahoraises, le passage à la fiscalité de droit commun constitue un profond
bouleversement, mal anticipé. L’État a d’abord garanti leurs ressources au niveau de 2012, avant de
revenir sur cet engagement fin 2014, laissant inachevé le schéma de financement du Département et des
communes, s’agissant notamment de la répartition de l’octroi de mer. Les communes, dont la plupart ont
fait l’objet d’une saisine de la chambre régionale des comptes par le préfet, sont dans une situation
budgétaire difficile, alors même que, faute de maîtrise de leurs ressources fiscales, elles n’ont pas de
visibilité sur leur financement futur.
Par ailleurs, l’effort global de l’État en faveur de Mayotte est en augmentation sensible, passant de
680 M€ en 2010 à 889 M€ en 2014, sans que cette augmentation soit toujours liée au changement de
statut. L’État paraît ainsi engagé dans une logique de rattrapage avec les autres départements d’outre-
mer, sans l’avoir réellement programmée en termes budgétaires.
Des actions prioritaires à conduire
Le Département de Mayotte souffre de retards importants en matière d’accès à l’eau, à l’assainissement,
et de résorption de l’habitat insalubre. Étant également devenue « région ultrapériphérique de l’Union
européenne » à l’occasion de la départementalisation, Mayotte a désormais accès aux fonds structurels
et d’investissements de l’Union européenne. Cela représente une opportunité pour le développement de
Mayotte, pour peu que le Département se mette en état d’ordonner ses besoins et de les planifier
rigoureusement.
Dans le domaine social et éducatif, la Cour observe que l’aide sociale à l’enfance, la montée en charge
du RSA et les besoins en matière d’enseignement et de constructions scolaires sont primordiaux et
nécessitent une attention particulière.
Conclusion et recommandations
Face à l’ampleur et à la gravité des enjeux auxquels est confronté le Département de Mayotte, la Cour
souligne l’état d’impréparation dans lequel la collectivité se trouve pour assumer ses nouvelles
compétences, alors qu’elle n’exerce déjà pas ses missions de manière satisfaisante. Elle recommande au
Département et à l’État de mettre en oeuvre, de manière concertée, organisée et progressive, les
réformes qu’elle a identifiées comme nécessaires.
Lire le rapport
CONTACTS PRESSE :
Ted Marx
Directeur de la communication
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tmarx@ccomptes.fr
Denis Gettliffe
Responsable des relations presse
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dgettliffe@ccomptes.fr
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