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Rapport d’observations définitives
REGION HAUTE-NORMANDIE
VOLET « DEVELOPPEMENT DURABLE »
(Seine-Maritime)
Exercices 2006 et suivants
Observations délibérées le 27 février 2015
SOMMAIRE
SYNTHÈSE
...........................................................................................................................
1
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
................................................................................
2
I - RAPPEL DE LA PROCÉDURE
........................................................................................
2
II - LE CONCEPT DE DÉVELOPPEMENT DURABLE
.........................................................
3
III - LA STRATÉGIE NATIONALE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE ET SA
DÉCLINAISON LOCALE
...............................................................................................
4
A - La stratégie nationale 2003 – 2008 et sa déclinaison locale
...................................................
4
B - La stratégie nationale 2010 – 2013 et ses développements
....................................................
5
C - Vers une stratégie nationale de la transition écologique et énergétique
..............................
5
D - Le rôle spécifique de la région en matière de développement durable
.................................
6
IV - LA STRATÉGIE RÉGIONALE EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
.........
7
A - Le choix de ne pas se doter d’un projet territorial de développement durable
....................
7
B - Une stratégie qui s’est construite autour du schéma régional d’aménagement et de
développement du territoire
........................................................................................................
8
V - LES DONNÉES RÉGIONALES
......................................................................................
10
VI - LES AXES DE LA POLITIQUE RÉGIONALE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE
.......
10
A - La lutte contre le réchauffement climatique repose sur le développement du transport
ferroviaire et le soutien de la filière énergie
............................................................................
10
1 - Les déplacements
..............................................................................................................................
10
2 - Du soutien à la filière des énergies au plan climat énergies
...............................................................
12
3 - La qualité de l’air
................................................................................................................................
18
4 - Le schéma régional du climat de l’air et de l’énergie : une démarche obligatoire pour un schéma
coproduit avec l’État
...........................................................................................................................
19
B - La biodiversité : une stratégie en construction
.....................................................................
23
1 - Éléments de cadrage et d’actualité
....................................................................................................
24
2 - La stratégie régionale de la biodiversité
.............................................................................................
25
3 - La mesure de la biodiversité : l’observatoire de la biodiversité de Haute-Normandie
........................
25
4 - Le schéma régional de cohérence écologique : la trame verte et la trame bleue
...............................
27
5 - La reconquête et la valorisation du patrimoine naturel, des habitats, des paysages
..........................
28
6 - La gestion globale de la ressource en eau
.........................................................................................
30
7 - L’éducation à l’environnement et les comportements éco citoyens
....................................................
31
C - L’épanouissement de tous les êtres humains
........................................................................
32
D - La cohésion sociale et la solidarité
.........................................................................................
33
E - Une exemplarité limitée et insuffisamment formalisée
.........................................................
34
1 - La formation du personnel aux enjeux et techniques du développement durable
..............................
35
2 - La maîtrise des consommations d’énergie
.........................................................................................
35
3 - Les déplacements et le transport
.......................................................................................................
37
4 - Les déchets
........................................................................................................................................
39
5 - La politique d’achats
...........................................................................................................................
39
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
1
SYNTHÈSE
La région Haute-Normandie poursuit l’ambition de devenir une éco région. Elle a
cependant fait le choix de ne pas se doter d’un projet territorial de développement durable
mais, en s’appuyant sur le schéma régional d’aménagement et de développement territorial,
elle tente d’orienter chacune de ses actions afin de les rendre éco compatibles.
Au titre de la lutte contre le réchauffement climatique, elle s’est dotée d’un plan
climat dès 2007, avant même que la loi ne le rende obligatoire. Si ce plan a permis d’insuffler
une réelle dynamique de changement, y compris en interne, les défauts de sa conception
l’ont privé de l’essentiel de ses effets. Faute d’objectifs et d’indicateurs de suivi, elle a
d’ailleurs été dans l’incapacité d’en évaluer pleinement le degré de mise en oeuvre.
Conformément à la loi, elle a adopté, en mars 2013, un schéma régional du
climat de l’air et de l’énergie qui doit permettre à la Haute-Normandie d’atteindre les objectifs
fixés par l’État et l’Union européenne de réduire, d’ici 2020, les consommations d’énergie et
les émissions de gaz à effet de serre de 20 %, de respecter les normes européennes de
qualité de l’air, et de porter la part des énergies renouvelables à 23 %, et d’ici 2050, de
diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre. Pour atteindre ces objectifs, le
schéma définit un scénario nécessitant un véritable changement de modèle, mobilisant de
très nombreux acteurs.
Mais, alors que la loi lui assigne le rôle de chef de file, vingt-quatre mois après
l’adoption du schéma, la mobilisation des acteurs s’est réduite à une unique réunion de
présentation du schéma et des indicateurs de suivi. Une gouvernance plus dynamique reste
donc à mettre en place.
La région s’est également dotée d’un nouveau plan climat, ambitieux et conforme
aux exigences de la loi. Mais là encore, son succès dépendra de la mobilisation des acteurs
publics et privés susceptibles de solliciter les dispositifs mis en place, mobilisation dans
laquelle la région devra s’investir pleinement.
Au titre de la préservation de la biodiversité, la région a, de plus, commencé à
construire une stratégie régionale. Son engagement en faveur d’une plus grande
connaissance de la biodiversité l’a conduite à créer avec ses partenaires, un observatoire
régional de la biodiversité. Cette démarche permet de fédérer un réseau d’acteurs,
d’accroître
la
connaissance
des
espèces
locales
et
de
les
partager,
préalables
indispensables à toute action concertée.
La région vient également d’adopter, conformément à la loi, un schéma de
cohérence écologique qui doit permettre de répondre à la fragmentation des milieux naturels
et des paysages en construisant une infrastructure écologique propice au développement
des espèces. Ce schéma devra lui aussi faire l’objet d’une vulgarisation et d’un
accompagnement des collectivités concernées pour que les objectifs qu’il contient soient
atteints. Là aussi, la région devra assumer sa mission de chef de file.
L’engagement de la région au titre de l’épanouissement des êtres humains et de
la cohésion sociale et territoriale est moins novateur, à l’exception de sa politique de soutien
des territoires qui lui permet par exemple de soutenir les projets les plus vertueux et
d’accompagner les collectivités désireuses de se doter d’un projet territorial de
développement durable.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
2
Enfin, en interne, la région a principalement axé ses efforts sur la maîtrise des
consommations d’énergie tant au siège que dans les lycées. Les résultats obtenus sont
jusque-là peu probants. Une méthodologie moins empirique tend à se mettre en place et
devrait permettre d’en améliorer l’efficacité, principalement dans la gestion des locaux
administratifs, hors établissement scolaires. La région a également achevé l’aménagement
du pôle régional des savoirs qu’elle présente comme une opération exemplaire. Si elle a
permis de réunir plusieurs associations jusque-là dispersées et de réaliser d’importantes
économies d’échelle, les performances énergétiques de ce bâtiment sont encore éloignées
de ce qu’il est permis d’attendre d’une telle opération et en tout état de cause, ne
correspondent pas aux objectifs que la région fixe généralement à ses partenaires.
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
1. Animer les instances de pilotages indispensables à la mise en oeuvre effective des
schémas adoptés et principalement du SRCAE et du SRCE.
2. Adopter pour chacune des cinq finalités du développement durable des objectifs clairs et
engageants.
3. Procéder à l’évaluation régulière des stratégies adoptées.
I -
RAPPEL DE LA PROCÉDURE
La chambre a inscrit à son programme de travaux l’examen de la gestion et des
comptes de la région Haute-Normandie. Cet examen de gestion comporte trois volets : la
situation et les perspectives financières de la région, les actions régionales en faveur du
développement durable et le contrat de projets État-région. Chacun de ces trois volets fait
l’objet d’un rapport distinct. Le présent document porte sur les actions régionales en faveur
du développement durable.
Par lettres en date du 24 janvier 2013 et du 17 avril 2013, le président de la
chambre en a informé Monsieur Alain Le Vern, président du conseil régional de
Haute-Normandie depuis le 30 mars 1998. Suite à la démission de celui-ci à compter du
30 septembre 2013, le président de la chambre a informé son successeur, Monsieur Nicolas
Mayer-Rossignol, élu président le 14 octobre 2013, des contrôles engagés.
L’entretien de fin de contrôle, prévu à l’article R. 241-8 du code des juridictions
financières, a été proposé à Monsieur Le Vern et à Monsieur Mayer-Rossignol, ainsi qu’à
Madame Emmanuèle Jeandet-Mengual, qui a assuré l’intérim de la présidence entre le
30 septembre et le 14 octobre 2013. Cet entretien a eu lieu le 7 juillet 2014 entre Madame
France Burgy, directrice générale des services de la région, mandatée par Monsieur Le Vern
et par Monsieur Mayer-Rossignol pour les représenter, et le rapporteur.
Lors de sa séance du 10 septembre 2014, la chambre a arrêté ses observations
provisoires. Celles-ci ont été communiquées dans leur intégralité à Monsieur Le Vern et à
Monsieur Mayer-Rossignol. M. Mayer-Rossignol y a répondu par un courrier enregistré au
greffe de la chambre le 22 décembre 2014 et par différentes pièces enregistrées le 3 février
2015.
Après avoir entendu le rapporteur et pris connaissance des conclusions du
procureur financier, la chambre a arrêté, le 27 février 2015, le présent rapport d'observations
définitives.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
3
Le rapport a été communiqué au président de la région Haute-Normandie en
fonctions et, pour la partie le concernant, à son prédécesseur en fonctions au cours de la
période examinée. Ce rapport, auquel est jointe la réponse de M. Mayer-Rossignol qui
engage la seule responsabilité de son auteur, devra être communiqué par le président de la
région Haute-Normandie à son assemblée délibérante lors de la plus proche réunion suivant
sa réception. Il fera l'objet d'une inscription à l'ordre du jour, sera joint à la convocation
adressée à chacun de ses membres et donnera lieu à un débat.
Ce rapport sera, ensuite, communicable à toute personne qui en ferait la
demande en application des dispositions de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
II -
LE CONCEPT DE DÉVELOPPEMENT DURABLE
L’expression développement durable, utilisée par la grande majorité des acteurs,
est la traduction de l’anglais
sustainable development
utilisé par Madame Gro Harlem
Brundtland, chef du gouvernement norvégien puis présidente de la commission mondiale
pour l’environnement et le développement à l’ONU, dans son rapport «
Notre avenir à tous
»
paru en 1987 et ayant servi de base à la conférence de Rio de 1992. Ce rapport définissait le
développement durable comme «
le développement qui répond aux besoins des générations
du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs.
»
Cette définition a d’ailleurs été reprise dans la charte de l’environnement adossée à la
constitution française.
Bien que parfois décriée, cette expression est maintenant popularisée et
porteuse de sens pour le plus grand nombre. Elle sera donc utilisée dans le présent rapport.
Le développement durable est une notion qui dépasse très largement les enjeux
strictement environnementaux et tend également à orienter les politiques publiques vers
l’épanouissement des êtres humains, l’équilibre des territoires,… et revêt à cet égard une
dimension santé, éducation, emploi, culture, etc. Cette définition a été précisée par l’État
lorsque celui-ci a défini, en 2003, sa stratégie nationale de développement durable. Et en
2004, elle a acquis le rang de norme constitutionnelle avec l’adoption de la charte de
l’environnement qui prévoit à son article 6 que «
Les politiques publiques doivent promouvoir
un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de
l'environnement, le développement économique et le progrès social.
»
La loi du 12 juillet 2010
1
lui a ensuite assigné un contenu sous forme de cinq
finalités : «
L'objectif de développement durable, (…), répond, de façon concomitante et
cohérente, à cinq finalités :
1°
la lutte contre le changement climatique ;
2°
la préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources ;
3°
la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations ;
4°
l'épanouissement de tous les êtres humains ;
5°
une dynamique de développement suivant des modes de production et de
consommation responsables.
»
1
Codifiée à l’article L. 110-1
du code de l’environnement.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
4
III -
LA STRATÉGIE NATIONALE DE DÉVELOPPEMENT DURABLE ET SA
DÉCLINAISON LOCALE
En réponse aux engagements pris à Rio lors du sommet de la terre, la France a
commencé dès 1996 à élaborer une stratégie nationale de développement durable. Ces
engagements ont été renouvelés en 2002 lors du sommet mondial sur le développement
durable de Johannesburg, et une stratégie nationale de développement durable (SNDD) a
été adoptée le 3 juin 2003 par le comité interministériel pour le développement durable. Avec
cette première stratégie nationale, assortie de programmes d'actions et comprenant des
objectifs concrets et chiffrés, l’État entendait se donner les moyens de dépasser le simple
exercice de réflexion sans objectif opérationnel.
Cette stratégie nationale a ensuite été actualisée à plusieurs reprises. Elle est en
cours de réorientation vers la transition écologique et énergétique.
Entre temps, la France a modifié sa constitution en adoptant la charte de
l’environnement, le 28 février 2005, faisant ainsi gravir un échelon juridique aux enjeux
environnementaux et liant désormais l’environnement au développement économique et au
progrès social. Ce faisant la France s’est alignée sur un corpus juridique européen déjà très
complet, la prise en compte des enjeux environnementaux ayant été inscrit dans les traités
avec l’adoption de l’acte unique européen (1986).
A -
La stratégie nationale 2003 – 2008 et sa déclinaison locale
La stratégie nationale adoptée le 3 juin 2003 s'articulait autour de six axes,
recouvrant au total dix programmes d'actions assortis d'objectifs, de plans d'actions et
d'indicateurs de suivi. Elle s’est accompagnée de la création d’un commissariat général au
développement durable.
Cette stratégie nationale a ensuite été déclinée par l’adoption d’un plan climat
(2004), d’une stratégie pour la biodiversité (2004), d’une politique énergétique (2005), etc.
L’État n’étant pas le seul acteur du développement durable, il est rapidement
apparu nécessaire de définir un cadre permettant de préserver la cohérence d’action des
administrations publiques locales et notamment des collectivités territoriales. La circulaire du
13 juillet 2006, toujours en vigueur, incite les collectivités territoriales à se doter d’un projet
territorial de développement durable, projet pouvant prendre la forme d’un agenda 21.
L’agenda 21 local est une démarche volontaire qui vise à décliner, au niveau local, les
principes fixés en juin 1992 lors du sommet de la terre de Rio de Janeiro. L’agenda 21, du
latin
agere
agir et 21 pour 21
ème
siècle, signifie «
ce qui doit être fait pour le 21
ème
siècle.
»
La circulaire du 13 juillet 2006 définit également un cadre de référence
2
contenant les cinq finalités du développement durable et s’accompagne d’un outil
méthodologique, élaboré avec le concours de collectivités volontaires.
Selon le cadre de référence, un projet territorial de développement durable (ou
agenda 21) exige une méthode et un contenu. La méthode, comporte cinq exigences :
-
une stratégie d’amélioration, qui implique de disposer d’un état de référence,
de se fixer des objectifs clairs et engageants au regard des enjeux du territoire
et des finalités du développement durable et d’agir pour améliorer ses
méthodes de travail ;
-
la participation des acteurs, et plus précisément des habitants et des usagers,
permet de rendre compte de la complexité des systèmes local et global qui
intéressent un territoire
3
. Il convient donc de repérer les acteurs, de les
mobiliser dans la durée et de leur rendre compte des actions engagées ;
2
Actualisé en août 2013.
3
La conférence de Rio a aussi débouché sur un accord international : «
l’action 21
» qui rappelle la nécessité de la participation
des acteurs. Au niveau européen, la convention d’Aarhus du 25juin 1998 porte sur l’accès à l’information, la participation du
public au processus de décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
5
-
l’organisation du pilotage, qui passe par un portage politique au plus haut
niveau, une animation des instances mises en place et éventuellement des
actions de formation, et un affichage clair des choix opérés par ces instances ;
-
la transversalité, qui permet de combiner l’efficacité économique, le progrès
social et la protection de l’environnement ;
-
l’évaluation, qui suppose de définir une méthode associant les acteurs, de
clarifier les objectifs et de rendre compte des résultats.
Quant au contenu, il porte sur les cinq finalités du développement durable
définies par le code de l’environnement.
B -
La stratégie nationale 2010 – 2013 et ses développements
Une nouvelle stratégie nationale, intitulée «
vers une économie verte et
équitable
» a été adoptée le 27 juillet 2010. Ce changement de stratégie est intervenu
notamment parce que l’implication des différents acteurs dans la précédente stratégie fut
jugée trop timide. Au surplus, sous l’effet de la reconnaissance quasi unanime des causes
du changement climatique, des orientations du Grenelle de l’environnement en France et de
la crise économique et financière mondiale, les mentalités avaient évolué.
La nouvelle stratégie nationale comporte neuf défis : 1/ une consommation et
une production durable ; 2/ la société de la connaissance ; 3/ la gouvernance ; 4/ le
changement climatique et l’énergie ; 5/ le transport et la mobilité durables ; 6/ la conservation
et la gestion durable de la biodiversité et des ressources naturelles ; 7/ la santé publique, la
prévention et la gestion des risques ; 8/ la démographie, l’immigration et l’inclusion sociale ;
9/ les défis internationaux.
La mise en oeuvre de cette nouvelle stratégie s’est notamment concrétisée par
l’adoption de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour
l’environnement (Grenelle 2) dont le champ est très large : bâtiments et urbanisme,
transports, énergie et climat, biodiversité, risques, déchets et santé et gouvernance. Cette loi
crée notamment l’obligation faite aux régions d’adopter un schéma régional du climat, de l’air
et de l’énergie. Même si c’est la plus symbolique, cette loi n’est pas la seule mesure de mise
en oeuvre de la stratégie nationale de développement durable. On peut également citer la
feuille de route économie bas carbone 2020, le plan national vélo de janvier 2012, le plan
écophyto 2018, etc.
La stratégie nationale a ensuite été mise à jour par l’adoption de stratégies
sectorielles. Ainsi, le défi 6, a été actualisé en 2011 par l’adoption d’une stratégie nationale
pour la biodiversité. Plus récemment encore, l’État s’est doté d’une stratégie nationale sur
les perturbateurs endocriniens.
C -
Vers une stratégie nationale de la transition écologique et énergétique
4
Depuis 2012, ainsi que le reconnaît la Région, l’État a renouvelé son approche
du développement durable en recentrant son action sur la transition écologique. Il a ainsi mis
en place une conférence environnementale annuelle dont l’objet est de débattre du
programme de travail du gouvernement en matière de développement durable. Cette
conférence doit permettre de trier et d’isoler les sujets prioritaires pour relever les principaux
défis écologiques, de convenir des objectifs à poursuivre, des concertations particulières à
mettre en oeuvre et des mesures à prendre sans attendre, et de faire un bilan des
réalisations.
4
Cette nouvelle stratégie, intitulée «
stratégie nationale de transition écologique vers un développement durable » a été
adoptée par le conseil des ministres le 4 février 2015.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
6
Réunie une première fois en septembre 2012, elle a abouti à une «
feuille de
route
» de cinq objectifs déclinés en 84 mesures. À sa suite, un débat national sur la
transition énergétique a été organisé en régions et une synthèse identifiant quinze enjeux a
été présentée en juillet 2013 par le conseil national du débat. En 2013, la conférence a
ouvert cinq nouveaux chantiers : l’économie circulaire, les emplois et la transition écologique,
la politique de l’eau, la biodiversité marine, la mer et les océans et l’éducation à
l’environnement et au développement durable.
Une «
stratégie nationale de la transition écologique vers un développement
durable
» est désormais annoncée et présentée comme devant succéder à la stratégie
nationale de développement durable.
Plus récemment, un projet de loi sur la biodiversité a été présenté
5
puis un projet
de loi relatif à la transition énergétique
6
. Ces deux projets ont été déposés et font l’objet
d’examen par le Parlement.
D -
Le rôle spécifique de la région en matière de développement durable
Comme l’illustre la succession d’engagements internationaux, de stratégies et de
normes, la prise en compte des enjeux du développement durable au niveau local nécessite
une approche renouvelée et élargie de l’action publique, seule manière d’appréhender la
complexité du sujet. Et, devant l’urgence climatique désormais avérée, il ne s’agit pas
seulement d’ajuster la façon de concevoir l’action publique mais véritablement de changer de
paradigme pour infléchir les tendances lourdes du modèle actuel.
Le rôle d’une région en matière de développement durable est différent de celui
d’une collectivité du «
bloc communal
» ou d’un département. Cette spécificité tient d’abord
au fait que les principales compétences d’une région (transport ferroviaire, formation,
développement économique) s’inscrivent naturellement dans les objectifs du développement
durable, soit qu’elles permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre et la
consommation d’énergie (finalité 1), soit qu’elles contribuent au développement personnel et
professionnel de ses habitants (finalités 3 et 4).
Ensuite, et bien qu’elle ait acquis d’importantes fonctions de gestion, la région a
pour rôle de se projeter à moyen et long terme et, au travers des différents schémas qu’elle
doit adopter, de mettre en place un cadre stratégique dans lequel les autres acteurs,
personnes privées et publiques, doivent s’inscrire. Chargée de veiller à l’adoption de ces
outils mais également à leur mise en oeuvre, la région peut inciter et accompagner
financièrement les acteurs. Elle doit également assurer le suivi de ces schémas pour
s’assurer que les orientations stratégiques sont respectées et que les objectifs sont atteints.
Mais ce rôle est rarement exercé en autonomie, la région formant, dans de nombreux
domaines, un binôme avec l’État. Le rôle de la région a néanmoins été conforté par la loi de
modernisation de l’action publique et d’affirmation des métropoles
7
. Son rôle de chef de file
est ainsi renforcé en matière d’aménagement et de développement durable du territoire, de
protection de la biodiversité, de climat, d’air et d’énergie. Mais cette qualité n’a vocation qu’à
coordonner l’action des collectivités territoriales et de leurs établissements publics.
Enfin, comme toute collectivité, la région se doit d’être exemplaire dans sa
gestion interne et respecter les objectifs qu’elle édicte.
5
Conseil des ministres du 26 mars 2014.
6
Conseil des ministres du 30 juillet 2014.
7
Loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
7
Pour autant, même en mettant en oeuvre les obligations prévues par la loi, dont
la complexité est soulignée par la région Haute-Normandie, la collectivité régionale n’a pas
nécessairement de stratégie globale de développement durable parce que les décisions
qu’elle est amenée à prendre, si elles doivent logiquement être articulées entre elles,
peuvent
poursuivre
des
objectifs
divergents.
La
finalité
d’un
projet
territorial
de
développement durable est précisément d’articuler toutes ces actions et de fixer pour
chacune des cinq finalités, des objectifs clairs et engageants, compatibles avec les
orientations du SRADT.
IV -
LA STRATÉGIE RÉGIONALE EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT
DURABLE
A -
Le choix de ne pas se doter d’un projet territorial de développement
durable
La région Haute-Normandie estime que toutes ses actions ont toujours été
construites selon les exigences du développement durable. Lorsqu’à la suite du sommet de
Rio de 1992, la possibilité a été donnée aux collectivités territoriales d’adopter un projet
territorial de développement durable (ou agenda 21), elle a donc préféré poursuivre ses
orientations plutôt que de se doter d’un projet territorial de développement durable qui,
estimait-elle, n’était pas susceptible de lui apporter une réelle valeur ajoutée et serait venu
concurrencer le SRADT en cours d’adoption.
Cette posture ne l’a pas empêchée de prendre des décisions novatrices et
parfois originales, dépassant le cadre de ses compétences principales. C’est ainsi qu’elle a,
par exemple, créé dès 1996
8
, l’agence régionale de l’environnement (AREHN) en
association avec les deux départements et avec le soutien de l’État et l’Union européenne
9
.
L’AREHN entretient un important fonds documentaire, intervient dans l’éducation à
l’environnement, fédère les associations et alimente un observatoire régional du
développement durable. Enfin, elle accompagne les acteurs et les territoires désireux de
s’engager dans une démarche de développement durable. Elle perçoit de la région une
subvention annuelle de plus de 800 000 €.
De même, la région a, dès 2005, mis en place une aide financière à la réalisation
d’agendas 21 locaux. Puis, à compter de 2008, elle a mis en place une politique de
contractualisation avec les territoires (pays ou agglomérations) dont une des priorités
consistait à réduire les consommations énergétiques fossiles et à favoriser l’efficacité
énergétique des bâtiments publics.
Au cours de la période récente et de manière constante, la région a exprimé son
souhait de «
devenir une des premières éco région de France
10
.
» Elle range désormais sous
ce label toute une série d’actions, sans que le concept d’éco région n’ait été clairement
défini.
8
Une première association a été créée en 1982 sous le nom de centre régional d’information et de documentation en
environnement de Haute-Normandie ; la région, sous statut d’établissement public à cette date, était également à l’origine de sa
création.
9
Outre la région et les deux départements, les membres de l’association se répartissent entre communes et EPCI, CESER
Haute-Normandie chambres consulaires, universités, établissements publics, associations professionnelles, associations et
particuliers. Son actuel président est M. David Cormand, conseiller régional.
10
Cf. débat d’orientation budgétaire 2014.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
8
La région est donc dans une situation apparemment paradoxale puisqu’elle ne
cesse de réaffirmer son engagement en faveur du développement durable, incite les
collectivités territoriales et les intercommunalités à se doter d’un agenda 21 et oriente leurs
investissements vers une plus grande sobriété et efficacité énergétique mais a fait le choix
de ne pas se contraindre elle-même en se dotant d’une stratégie propre de développement
durable. Elle a ainsi choisi de concentrer ses efforts sur les compétences de son coeur de
métier (transport, formation, développement économique), chaque compétence contribuant à
construire par strates successives une politique régionale de développement durable qui,
elle-même, s’inscrit dans les orientations nationales et internationales.
B -
Une
stratégie
qui
s’est
construite
autour
du
schéma
régional
d’aménagement et de développement du territoire
La région Haute-Normandie a adopté son schéma régional d’aménagement et de
développement du territoire (SRADT) en décembre 2006. À cette époque, la loi prévoyait
que le schéma exprimait les orientations fondamentales de la région en matière
d'environnement, de développement durable, etc. Le SRADT permettait donc de jeter les
bases d’un projet territorial de développement durable.
Depuis, la loi a renforcé cet objectif puisque le SRADT fixe désormais les
orientations fondamentales, à moyen terme, du développement durable du territoire régional.
Entre les deux versions, le concept de développement durable, appréhendé de manière pluri
dimensionnelle inclusive, est donc devenu l’objectif central : toutes les politiques de
développement doivent désormais être durables. Le SRADT est ainsi devenu l’outil du
développement durable et peut naturellement constituer la base d’un projet territorial de
développement durable de la région. Et, bien qu’adopté sous l’empire de la précédente loi, le
SRADT haut-normand a effectivement été présenté comme tel : «
Construit sur les valeurs
d’une politique durable, le SRADT constitue un projet global prenant en compte
l’interdépendance des phénomènes et respectant les critères du développement durable.
»
Mais même si son contenu couvre les cinq finalités du développement durable, le
SRADT ne constitue pas un projet régional de développement durable, principalement parce
qu’il ne contient que des orientations stratégiques, orientations qui, pour une grande part
d’entre-elles, nécessitent la mise en oeuvre de compétences excédant celles de la région.
Au surplus, le SRADT ne définit pas les moyens nécessaires à la mise en oeuvre
de ses orientations et ne contient aucun objectif clair et engageant. Pour cela, il renvoie à
d’autres outils (schémas, plans, contrats, etc.). En revanche, le SRADT repose sur un
diagnostic et résulte d’une longue procédure de concertation, même si celle-ci est
principalement centrée sur les personnes publiques. De même, le SRADT est régulièrement
évalué.
Pour ces différentes raisons, le SRADT ne répond donc pas à toutes les
exigences d’un projet territorial de développement durable. Au mieux, il en constitue le socle.
Le contenu de ce projet est donc à rechercher dans les différents outils thématiques adoptés
par la région.
Suivant une approche chronologique, le principal outil susceptible de constituer
un élément de ce projet territorial est le contrat de projets État – région 2007-2013, complété
du contrat 276
11
.
11
Convention conclue entre la région Haute-Normandie et les départements de l’Eure et de la Seine-Maritime.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
9
Comme la chambre l’a déjà souligné
12
, le contrat de projets, parce qu’il a été
négocié au moment même où la région adoptait son SRADT, a permis de mettre en oeuvre
une partie des orientations du schéma. Ainsi, le volet «
développement portuaire
»,
financièrement le mieux doté, contribue au développement du transport maritime et fluvial et
à la connexion des deux grands ports maritimes au réseau ferré national permettant ainsi le
transit des marchandises par un moyen faiblement polluant, comparativement à la route. Le
volet déplacements du contrat, second par ordre d’importance financière, vise à développer
le transport en commun et l’inter modalité. Enfin, le troisième le mieux doté est le volet
environnemental qui contient une action visant à «
mettre en oeuvre le plan climat
» et qui
vaut engagement de la région à se doter d’un tel plan et à le mettre en oeuvre
13
. Au-delà des
trois plus importants volets, le contrat permet de financer des actions en faveur de
l’innovation, la santé, l’agriculture et la forêt (avec des actions très orientées vers une
approche environnementale de ces activités), le sport et la culture, la transition économique,
l’emploi et les territoires.
Construit en miroir du contrat de projets pour pallier le désengagement de l’État,
le contrat 276 permet de financer des thématiques variées avec une forte dominante
environnementale notamment en faveur des modes de déplacement non polluants et des
économies d’énergie. Il pallie l’absence de volet territorial du contrat de projets et ce faisant
jette les bases d’une politique de soutien au développement des territoires infra régionaux.
Le contrat 276 est donc un outil majeur à partir duquel sont négociés les contrats de
territoires. À ce titre, il est l’instrument d’une solidarité territoriale régionale (3
ème
finalité du
développement durable) et un levier de lutte contre le réchauffement climatique (1
ère
finalité),
le soutien régional étant systématiquement éco conditionné. Ainsi, le soutien régional
(25 M€) au projet de construction du grande stade du Havre a été conditionné au respect
des normes de très haute performance énergétique (RT 2005 – 20 %)
14
.
Si globalement, leur contenu est conforme aux objectifs du développement
durable et mobilise des financements importants (1,066 Md€ pour le contrat de projets et
1,232 Md€ pour le contrat 276), le contrat de projets et le contrat 276 ne portent que sur une
petite partie des actions régionales en faveur du développement durable, dont certaines, la
plupart de celles du contrat de projets, relèvent principalement de la compétence de l’État.
Le CPER et le contrat 276 seront suivis du plan climat énergie territorial, du plan
régional pour la qualité de l’air, et du schéma régional pour le climat, l’air et l’énergie. Et,
pour balayer la totalité des finalités d’un projet territorial de développement durable, il
convient d’y ajouter le schéma régional des transports et des infrastructures, le plan régional
des formations, le contrat régional de développement économique et d’autres actions encore
qui ne sont pas inscrites dans un document de programmation.
Tout cela constitue un ensemble très diversifié, difficile à mettre en perspective
pour tracer les contours d’une politique régionale de développement durable, ce que la
région n’a jusque-là jamais fait. Le seul exercice de mise en perspective est le rapport
annuel sur la situation au regard du développement durable (adopté depuis 2010) dont la
portée est par définition limitée.
La politique régionale de développement durable apparait donc morcelée,
l’articulation des actions régionales s’opérant de façon ponctuelle, au gré des décisions de
l’assemblée délibérante et de son exécutif. La région partage ce constat mais indique qu’elle
est attentive à la mise en cohérence de ses politiques, volonté illustrée par l’évaluation du
SRADT et le rapport annuel d’activité.
12
Rapport d’observations définitives sur le contrat de projets 2007 – 2013. www.ccomptes.fr.
13
Une convention conclue avec l’ADEME par la région et les deux départements, en marge du contrat de projets, est venue
compléter le dispositif et réaffirmer l’engagement des collectivités signataires, soulignant un peu plus la dimension
environnementaliste du contrat.
14
Le stade Océane serait le premier stade à énergie positive notamment grâce aux 1.500 m² de capteurs photovoltaïques
(source : stadeoceance.com).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
10
V -
LES DONNÉES RÉGIONALES
Fruit d’une collaboration région – État, les premiers indicateurs régionaux du
développement durable ont été publiés en 2011 et actualisés en 2013. Présentés selon les
huit défis de la stratégie nationale de développement durable, ils ont été déclinés à l’échelle
des trente territoires sur lesquels s’applique un schéma de cohérence territorial. Cette
somme d’informations, ainsi que les données et études collectées par l’observatoire du
climat et de l’énergie, est à la disposition des collectivités et établissements publics de
regroupement qui souhaitent s’engager dans un processus de développement durable. Une
synthèse régionale a également été publiée.
VI -
LES AXES DE LA POLITIQUE RÉGIONALE DE DÉVELOPPEMENT
DURABLE
A -
La
lutte
contre
le
réchauffement
climatique repose
sur
le
développement du transport ferroviaire et le soutien de la filière énergie
Selon le rapport sur la situation de la collectivité au regard du développement
durable, les objectifs de la politique régionale conduite pour lutter contre le changement
climatique sont les suivants
15
:
-
réduire les consommations énergétiques ;
-
diminuer les émissions de gaz à effet de serre ;
-
prévenir et/ou réduire la pollution atmosphérique et en atténuer les effets ;
-
développer la production d’énergies renouvelables ;
-
promouvoir les modes alternatifs de déplacements ;
-
faire baisser la facture énergétique des ménages ;
-
limiter les impacts des constructions de bâtiments sur l’environnement ;
-
améliorer la gestion des déchets et leur réduction à la source ;
-
valoriser les connaissances et sensibiliser les hauts-normands aux questions
énergétiques et au changement climatique ;
-
transmettre aux générations futures des ressources énergétiques et un
environnement de qualité.
Si la politique de lutte contre le changement climatique est par nature
multifactorielle, il pourrait néanmoins être utile de hiérarchiser les objectifs pour mieux doser
les actions régionales et éviter tout risque de dispersion.
En tout état de cause, l’action régionale suit principalement deux axes : le
transport et l’énergie.
1 -
Les déplacements
La politique régionale en faveur du transport ferroviaire et routier constitue le
premier pilier de la lutte contre le réchauffement climatique. Comme la chambre l’a
récemment souligné
16
, cette politique est une de celles qui est financièrement la plus
importante. Mais, sur ce point, la Haute-Normandie ne se distingue pas des autres régions.
15
Le PACER, adopté en octobre 2014, reprend la plupart de ces objectifs.
16
Rapport d’observations définitives sur la situation et les perspectives financières.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
11
En décembre 2006, la région a d’abord adopté un plan régional de
déplacements, document de planification des transports ferroviaire et routier. Co produit par
la région et les deux départements, il faisait très largement référence aux enjeux du
développement durable et notamment aux enjeux climatiques liés aux émissions de gaz à
effet de serre. Il a été construit sur la base d’un diagnostic adopté au terme d’un large
processus de concertation qui a vu la mise en place d’un comité de pilotage associant les
principales intercommunalités de la région, l’organisation de conférences territoriales des
déplacements réunissant des usagers, des collectivités territoriales, des transporteurs et une
enquête auprès de nombreux élus de la région.
Ce plan traçait des perspectives de long terme (2020) et contenait cinquante-cinq
actions à réaliser sur une période identique à celle du CPER (2007-2013), ce dernier en
finançant certaines (les liaisons ferroviaires entre Paris et la Normandie, la réouverture de la
ligne Rouen Évreux, le développement de l’inter modalité etc.). Ces actions n’étaient pas
toutes d’une grande précision et certaines étaient difficilement évaluables, parce que
rarement
accompagnées d’un budget et d’indicateurs. De plus, les actions devaient être
mises en oeuvre par la région et par chacun des deux départements mais aussi par des tiers
(ex : AOTU
17
, exploitants de réseaux,…), ce qui ne facilitait ni leur suivi ni une éventuelle
évaluation.
Ce plan répondait donc à plusieurs exigences d’un projet territorial de
développement durable : une stratégie d’amélioration, la participation des acteurs, la
transversalité. Il a cependant été peu mis en oeuvre puis a été absorbé par le schéma
régional des infrastructures et des transports adopté en décembre 2009 pour la partie
ferroviaire et par les programmes de développement et de modernisation des itinéraires pour
la partie routière.
Adopté en décembre 2009, le schéma régional des infrastructures et des
transports s’inscrit, comme le veut la loi, dans la logique du SRADT dont il constitue le volet
transport. Le SRIT 2009 est donc un outil de prospective à moyen long terme et non un plan
d’action, même si certaines de ses orientations sont assez précises (par exemple, le SRIT
prévoit la connexion des infrastructures routières structurantes et à ce titre liste les chantiers
à réaliser comme la liaison A28 – A13 et les accès directs au pont Flaubert). Il ne comporte
pas de calendrier daté ni de budget, sauf pour les opérations déjà engagées.
Il repose sur un diagnostic complet intégrant les enjeux environnementaux,
économiques et sociaux et a donné lieu à une large concertation, prévue par la loi
elle-même. Il est composé de vingt-neuf orientations réparties en quatre axes :
-
faire rayonner la Haute-Normandie à l’échelle européenne : une région
ouverte ;
-
améliorer les liaisons entre la Haute-Normandie et les autres régions : une
région charnière ;
-
améliorer le maillage des infrastructures intra régionales : une région
partenaire ;
-
contribuer à l’amélioration des politiques de la mobilité : une région
coordinatrice.
Il reprend toutes les actions d’ores et déjà financées par le contrat de projets
2007-2013 et notamment le projet ATOUMOD porté par la région qui consiste à permettre
aux usagers du TER et des transports en commun urbains de voyager avec un seul et
unique titre. C’est sur la base du SRIT qu’ont été engagées d’autres actions telle que le plan
gare adopté en 2012.
17
Autorités organisatrices des transports urbains.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
12
Selon la région, la fréquentation des lignes régionales de TER était en
augmentation de 5 % en 2012 et constante en 2013, avec 8,5 millions de voyageurs TER
pour 254 millions de kilomètres parcourus, signe que la politique mise en oeuvre rencontre
un réel succès. En revanche, le trafic de marchandises demeure profondément déséquilibré,
la part modale de la route étant en augmentation depuis 2007 (74,2 % en 2012 contre
72,6 % en 2007
18
) malgré les interventions régionales en faveur du développement du
transport ferré et fluvial notamment via le CPER.
Le SRIT devait être piloté par un comité de pilotage annuel présidé par le
président de la région et réunissant notamment RFF, SNCF les grands ports maritimes les
départements, l’État. Mais plus de quatre années après son adoption, ce pilotage n’a pas
encore été mis en place, la région indiquant que le pilotage s’est organisé opération par
opération, les plus importantes ayant des modalités de suivi particulières : débat public pour
la LNPN
19
, démarche Vallée de la Seine, suivi du CPER.
2 -
Du soutien à la filière des énergies au plan climat énergies
Depuis les années 2006-2007, la région construit une politique ambitieuse de
l’énergie qui l’a conduite à se doter d’un plan climat énergie territorial dès 2007, avant même
que cela ne soit rendu obligatoire par la loi
20
. Ce plan a constitué la base de la politique
énergétique régionale. Avant lui, un certain nombre de dispositifs épars permettaient d’aider
les particuliers qui s’équipaient de panneaux solaires thermiques (2002) et de subventionner
les collectivités et les EPCI désireux de réduire leur facture d’éclairage public (2004).
a -
L’initiative du CESER
Parmi les initiatives préalables à la définition d’une politique énergétique
haut-normande se trouve un rapport adopté le 15 janvier 2007 par le conseil économique
social et environnemental régional de Haute-Normandie, intitulé «
Les énergies en
Haute-Normandie
–
bilan
et
perspectives
stratégiques,
économiques,
sociales
et
environnementales
».
Dans
cet
avis,
le
CESER
recommandait
de
positionner
la
Haute-Normandie en chef de file de la production d’énergie dans le but de diversifier le
bouquet énergétique en augmentant la part de l’énergie renouvelable et ainsi sécuriser
l’approvisionnement. Le CESR défendait également l’idée d’une région exemplaire pour
l’utilisation des énergies dans les domaines du
transport, du logement, de l’aménagement
du territoire et des espaces urbains, des bâtiments publics et privés, des équipements
collectifs, etc.
En soulignant ainsi le retard pris par la Haute-Normandie et l’absence de vision
stratégique de la région sur la question des énergies, le CESER a contribué à jeter les bases
d’une politique régionale de maîtrise des dépenses d’énergie et de développement des
énergies renouvelables. Ses propositions ont d’ailleurs opportunément nourri le diagnostic
préalable au schéma régional d’aménagement et de développement du territoire.
18
Source : évaluation n°7 du SRADT.
19
Ligne nouvelle Paris-Normandie.
20
La réalisation d’un bilan des émissions de gaz à effet de serre et d’un plan climat territoriale n’ont été rendues obligatoires
que par la loi du 12 juillet 2010 (Grenelle 2).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
13
b -
Le plan climat énergie territorial : une initiative fortement encouragée par
l’ADEME
(1) L’adoption précipitée d’un plan climat sans véritable contenu
Les travaux du CESER, relayés par le SRADT, sont intervenus dans un contexte
favorable qui voit l’ADEME soucieuse, en Haute-Normandie comme dans d’autres régions
21
,
de mettre en oeuvre les conclusions de l’évaluation du plan climat national, et de proposer
d’utiliser le CPER pour inciter les régions à se doter d’un plan climat. Mais, pour ne pas se
limiter à inscrire une enveloppe permettant seulement la préparation et l’adoption d’un plan
climat, ce qui aurait renvoyé sa mise en oeuvre à la génération suivante de CPER, et comme
il n’était plus temps de réfléchir au contenu de ce plan, la région et l’État sont convenus
d’inscrire une action intitulée «
mettre en oeuvre le plan climat haut-normand
» et de doter
cette action d’un budget régional de 11,4 M€ auxquels venaient s’ajouter 9,2 M€ de
l’ADEME. À la même époque, la région concluait avec les deux départements
hauts-normands le contrat 276 dont une partie au moins
22
recoupe les orientations du futur
plan climat.
Le plan climat disposait donc d’un budget avant même d’être doté d’un contenu.
Le contenu opérationnel ne sera adopté qu’en décembre 2007, soit douze mois
après l’engagement pris par la région au titre du CPER, après une étape intermédiaire ayant
vu l’adoption de «
pistes d’actions envisageables
» par l’assemblée régionale.
Au final, il apparaît que le plan climat a été adopté et construit sans véritable
diagnostic et au terme d’une concertation réduite aux services régionaux. La région
reconnaît ces lacunes mais objecte que le SRADT et le rapport du CESER reposaient
eux-mêmes sur des éléments de diagnostic et ont donné lieu à une intense concertation. Elle
ajoute qu’à cette date aucun guide méthodologique n’avait encore été publié par l’État et que
ce n’est qu’en 2009 qu’un tel guide a été publié par l’ADEME. Ce dernier argument contredit
le principe d’autonomie des collectivités locales, pourtant revendiqué par la région
notamment pour justifier son choix de ne pas se doter d’un projet territorial de
développement durable.
Le plan climat a ensuite été mis à jour à plusieurs reprises, par ajout de
nouvelles actions et suppressions de celles qui ne donnaient lieu à aucune application, qui
créaient un effet d’aubaine, ou dont le dispositif faisait doublon avec un autre, ces nombreux
ajustements démontrant rétrospectivement que l’absence de diagnostic et de concertation se
sont finalement révélés pénalisants, comme le confirmera plus loin l’évaluation de ses effets.
21
Comme par exemple en Picardie ou en Nord-Pas-de-Calais.
22
Axe C : un territoire régional à gérer de manière performante et durable, doté d’un budget global 143,5 M€, partagé entre les
trois collectivités.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
14
(2) Le contenu du plan climat
Le plan s’articule autour de huit thématiques
23
: améliorer la performance
énergétique des bâtiments, développer les énergies renouvelables, encourager un
aménagement économe du territoire,
favoriser une mobilité durable, promouvoir la
reconversion technologique et écologique du tissu économique, adapter les compétences,
quantifier pour agir, sensibiliser et informer. Dans sa plus récente version, il comporte
cinquante-sept actions
24
. Résultat d’une préparation chaotique, le contenu des actions est
assez imprécis tant dans les modalités d’intervention que dans les moyens d’y parvenir.
Ainsi, le plan climat contient des actions qui rappellent simplement des obligations : élaborer
un schéma régional des transports et des infrastructures, élaborer un schéma régional du
climat, de l’air et l’énergie, élaborer un bilan des émissions de gaz à effet de serre etc., ces
actions ayant été ajoutées au fur et à mesure de leur entrée dans le droit positif. De même
un grand nombre d’actions (33 sur 57) figurant au plan climat énergie sont des actions
financées, en tout ou partie, par le contrat de projets État – région et/ou par le contrat 276,
tous deux conclus début 2007. Certaines thématiques, comme « développer les énergies
renouvelables » sont même exclusivement composées d’actions financées par ces deux
contrats. La présence de ces actions au sein du plan climat n’est pas critiquable puisque par
nature elles y ont leur place. Cette inscription ne leur a cependant pas apporté de valeur
ajoutée
mais visait à les articuler entre elles pour les mettre en cohérence
. Ce faisant, la
région multiplie les supports de communication et augmente la portée des politiques
régionales. La même critique pourrait être faite à l’endroit des actions concernant la mobilité
durable, la plupart de ces actions ayant déjà été adoptées via le plan régional de
déplacements, fin 2006.
En dépit de leur rattachement budgétaire au contrat de projets, au contrat 276, à
l’appel à projets énergie ou au droit commun, les actions du plan climat ne sont pas dotées
d’un budget prévisionnel chiffré. Au fur et à mesure de leur avancement, les fonds mobilisés
seront indiqués
a posteriori
sur chacune des fiches action mais aucun bilan global de
l’exécution financière du plan climat n’a été réalisé et le bureau d’études chargé de son
évaluation n’a pas été en mesure d’évaluer le budget total mobilisé.
Enfin, les actions ne comportent ni objectif clair et engageant, ni indicateurs
d’évaluation. Au gré des mises à jour annuelles, une dizaine d’actions sur les cinquante-sept
ont cependant été dotées d’indicateurs d’évaluation mais très rares sont ceux qui ont été
renseignés.
Pour autant, même affecté de ces lacunes, le plan climat a eu le mérite de lancer
une réelle dynamique de changement à une époque où les initiatives locales d’envergure
n’étaient pas nombreuses.
(3) Deux
actions
parmi
d’autres :
l’observatoire
climat-énergie
de
Haute-Normandie et l’appel à projets énergie
L’observatoire climat-énergie de Haute-Normandie (OCEHN) a été créé en 2010
et financé par le CPER 2007-2013 au titre de l’action 5.5. «
Mettre en oeuvre le plan climat
haut-normand
». C’est une des actions du plan climat régional. Il associe les signataires du
CPER ainsi que l’ADEME et l’association Air Normand.
Cette initiative n’a rien d’original, elle a été dupliquée dans toutes les régions à
l’initiative de l’État (ADEME et DREAL). Son utilité n’en est pas moins réelle.
23
Sept en 2007, la huitième thématique «
promouvoir la reconversion technologique et écologique du tissu économique
» est
apparue en 2011.
24
41 actions en décembre 2007.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
15
L’observatoire climat-énergie a trois objectifs :
-
améliorer la connaissance de la situation énergétique et climatique régionale
(études, indicateurs, bilans chiffrés, analyses...) et de son évolution et faire
partager cette connaissance pour aider la mobilisation et la décision des
acteurs régionaux ;
-
développer les échanges et la concertation avec l'ensemble des acteurs
régionaux (conférence annuelle, ateliers thématiques, diffusion des travaux de
l'Observatoire) autour des sujets énergie-climat pour faciliter et démultiplier les
actions de chacun ;
-
accompagner
les
politiques
énergétiques
et
climatiques
locales
en
développant des outils d'aide à la décision (diagnostics, planification,
programmes d'actions, recensements...) qui anticiperont ou permettront
d’accompagner les mutations énergétiques et climatiques de la région.
La gouvernance de l’OCEHN est assurée par un comité de pilotage dont le rôle
est de valider les activités de l'observatoire et son programme d'actions, et par un comité
technique, instance de suivi et de validation intermédiaire comprenant l’ensemble des
représentants des membres fondateurs. Une cellule, composée de deux animatrices (région
et DREAL) est chargée d’animer l'observatoire ainsi que le réseau d’acteurs, et d’assurer
l'exécution et le suivi du programme annuel.
L’OCEHN s’appuie sur un portail Internet qui sert à publier les études réalisées
par ses membres et ses propres études. L’OCEHN a notamment publié plusieurs bilans du
climat de l’air et des énergies en Haute-Normandie ainsi qu’un inventaire énergétique et des
émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques. Le site Internet permet
également d’accéder à une base de données permettant de connaître les consommations
d’énergie, les émissions de gaz à effet de serre et les polluants atmosphériques par
territoires (région, département, pays et EPCI). À cet égard, cette structure informelle
participe à l’indispensable vulgarisation des enjeux de la lutte contre le réchauffement
climatique et au partage des données entre les acteurs.
L’OCEHN est également chargé du suivi des indicateurs du SRCAE mais cette
mission suppose le renouvellement de l’engagement de ses financeurs
25
.
L’appel à projet «
énergies
» devait faire de la région Haute-Normandie un
territoire d’excellence dans le domaine énergétique, soutenir l’innovation et favoriser la
conversion technologique et écologique de l’économie régionale.
Dès l’origine, l’appel à projet énergie a été conçu pour couvrir trois exercices :
2011, 2012 et 2013, et mobiliser 150 M€ sur la durée de la mandature. En dépit de son
prolongement en 2014 pour une quatrième année, il n’a pas suscité l’engouement attendu.
Ce demi échec est sans doute dû au contexte économique, peu porteur d’innovation et
d’investissements, mais aussi à un portage politico administratif brouillé. Selon le bureau
d’études chargé d’évaluer le plan climat, il apparaît que l’appel à projets a d’abord été conçu
comme un outil de développement économique
26
sans lien évident avec le plan climat, pour
ensuite constituer un outil de financement parmi d’autres de ce plan. À l’origine, nombre de
correspondants régionaux de l’appel à projets énergie étaient distincts de ceux en charge du
plan climat.
25
Les collectivités signataires ont renouvelé leur engagement ; la convention pourrait être signée prochainement, sous réserve
de l’accord de l’État et de l’ADEME.
26
Piloté par la direction de l’économie.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
16
La première édition couvrait un périmètre étendu
27
et, étant destiné à susciter les
initiatives les plus innovantes, permettait de financer tous les projets d’investissement ou de
recherche ayant un lien plus ou moins fort avec la problématique de l’énergie. Toutes les
entreprises, groupements d’entreprises, associations pouvaient donc se porter candidates à
condition d’être implantées ou de s’implanter en Haute-Normandie. Et logiquement, puisqu’il
s’agissait surtout d’innover, aucune exigence de performance n’était exigée. Pour autant, le
faible niveau d’exigence à l’éligibilité du projet n’a pas empêché la région d’être sélective lors
du choix des projets retenus. Ainsi, le premier millésime de l’appel à projets a conduit la
région à retenir un tiers des projets déposés en 2011, pour un financement total de 10,2 M€.
La région a ensuite fait le choix de resserrer l’appel à projets sur quatre des sept
lots de l’édition précédente. Trois lots ont donc été retirés : les actions collectives de
conversion technologique et écologique de l’appareil productif haut-normand (faute de
candidats), le traitement thermique et énergétique des logements sociaux (les bailleurs
sociaux ont d’autres sources de financement), enfin, la performance énergétique des
bâtiments publics (avec l’entrée en vigueur de la RT 2012 le 1
er
janvier 2013, les objectifs
sont devenus le droit positif). Les décisions prises en 2012 procèdent à un rééquilibrage des
lots «
investissement
» et «
recherche développement innovation
».
Le cadre juridique n’a pas été modifié pour l’édition 2013 et son prolongement en
2014, mais la priorité a été donnée aux projets concourant à organiser une filière industrielle
de l’énergie éolienne en mer, d’une part, et à l’essor de l’éco-mobilité d’autre part.
La
première
priorité
décline
un
des
objectifs
du
contrat
régional
de
développement économique
28
qui consiste à faire de la Haute-Normandie la première région
éolienne de France. Cette priorité vient en appui de l’appel à projets pour la construction de
champs d’éoliennes en mer, lancé par l’État en 2011 et en 2013 et qui a permis d’attribuer
les champs éoliens de Fécamp (498 MW) et du Tréport (500 MW), et celui de
Courseulles-sur-Mer dans le Calvados (500 MW) pour la région Basse-Normandie, soit pour
les deux régions un potentiel de 1 500 MW installés. Cependant, les opérateurs retenus pour
les trois champs attribués étant différents
29
, aucune coopération interrégionale n’est
envisagée, au risque d’une mise en concurrence des initiatives régionales. La région
Haute-Normandie souhaite donc profiter de cette occasion pour structurer la filière, de la
conception jusqu’à l’assemblage et l’entretien, filière dont elle espère la création de 3 000 à
4 000 emplois pérennes et 2 000 emplois de plus durant la phase de chantier. Ainsi, trois
cents entreprises régionales ont été identifiées par les organismes consulaires et pourraient
capter le marché national mais également le marché britannique. Pour accompagner le
développement de cette filière, la région s’appuie sur le comité régional de l’éolien en mer,
structure de pilotage et de concertation informelle réunissant les représentants de l’État, de
la région et des industriels lauréats de l’appel à projets, qui permet à la région de rester
actrice de l’appel à projets lancé par l’État. Au-delà, elle entend poursuivre ses efforts
d’investissements engagés au fil des contrats de plan (modernisation et d’adaptation des
ports et des infrastructures de liaison) et adapter son offre de formation aux nouveaux
besoins de la filière. À cette fin, un travail de définition des besoins est mené avec le
rectorat, Pôle emploi, les missions locales etc. La région souhaite enfin capitaliser sur
l’expérience des deux champs éoliens. Elle a donc très récemment lancé une étude sur le
potentiel haut-normand dans le domaine des énergies marines renouvelables, dans le but de
trouver des débouchés à la filière éolienne.
27
La recherche, le développement et l’innovation dans le domaine des grands équipements de recherche ; le soutien aux
investissements des entreprises dans les énergies de demain ; les actions collectives de conversion technologique et
écologique de l’appareil productif haut-normand ; les aides au plan de formation des salariés ; le traitement thermique et
énergétique des logements sociaux ; la réhabilitation énergétique des logements communaux sociaux ; la performance
énergétique des bâtiments publics.
28
Contrat adopté en mai 2011.
29
Areva et GDF SUEZ en Haute-Normandie, Alstom en Basse-Normandie.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
17
La seconde priorité vise à consolider le soutien de la région Haute-Normandie à
l’éco mobilité (ou, à l’industrie automobile, selon le point de vue adopté) et notamment à
mettre la région en capacité de répondre à l’appel à manifestation d’intérêt baptisé
«
dispositif d’aide au déploiement d’infrastructure de recharge pour les véhicules hybrides et
électriques
» lancé en janvier 2013 par l’ADEME et financé par les investissements d’avenir.
Très concrètement, la région cherche à mobiliser différents territoires. Si elle réussit à
fédérer suffisamment de partenaires (intercommunalités, syndicats mixtes chargés de la
distribution d’électricité), la région portera la candidature de la Haute-Normandie auprès de
l’ADEME, le but visé étant d’installer 300 bornes, soit 600 points de recharge sur le territoire.
Cette orientation a récemment été complétée par le dispositif d’aide au
développement de l’électro mobilité adopté par l’assemblée régionale le 7 avril 2014 et qui
permet d’aider les particuliers à acheter un véhicule électrique (aide de 5 000 € pour un
véhicule 100 % électrique) et d’aider les entreprises (PME et ETI), les professions libérales,
entreprises agricoles, associations et établissements d’enseignement ainsi que les
collectivités territoriales à acheter des véhicules 100 % électriques et à s’équiper de bornes
de recharge. L’aide aux particuliers, plafonnée à 150 unités par an, a connu un vif succès.
Au 30 novembre 2014, l’appel à projets énergie a mobilisé 37,4 M€, soit 25 % de
l’enveloppe nominale, et a permis de financer quatre-vingt-cinq projets. L’objectif des
150 M€ est donc loin d’être atteint mais le solde permettra d’aider les entreprises de la filière
éolienne à s’installer en Haute-Normandie.
c -
L’évaluation du plan climat
Le plan climat énergie est arrivé à échéance fin 2012, soit à la date à laquelle les
principales collectivités territoriales sont tenues d’en adopter un, en respectant les exigences
fixées par le code de l’environnement, c’est-à-dire un plan s’appuyant sur un bilan des gaz à
effets de serre, donnant lieu à une concertation élargie, définissant des objectifs chiffrés,
comprenant un programme d’action en phase avec les engagements nationaux et
internationaux et enfin, mettant en place un dispositif de suivi et d'évaluation des résultats.
Au surplus, en adoptant le 18 mars 2013 son schéma régional du climat, de l’air
et l’énergie (SRCAE), et en faisant le choix de dissocier les deux outils
30
, la région devait
logiquement procéder à son actualisation si non à sa refonte, pour l’adapter aux orientations
du SRCAE
31
. Ce choix, parfaitement légitime, l’a ensuite conduit à procéder à l’évaluation du
plan climat 2007 avant de lancer le processus d’adoption du nouveau plan. Dans cette
perspective, elle a fait le choix de procéder à son évaluation avant de lancer le processus
d’adoption du nouveau plan climat.
Le bureau d’études chargé de cette évaluation a notamment cherché à mesurer
l’imprégnation des services régionaux par une «
culture énergie
» et à chiffrer les effets du
plan climat sur la consommation d’énergie et sur le volume d’émission des gaz à effet de
serre.
Sur le premier point, la conclusion indique que «
l’appropriation opérationnelle de
la stratégie climat énergie de la région apparaît comme difficile pour la plupart des services :
la
juxtaposition récente de plans, mesures et outils sur ces thèmes a créé une confusion au
sein des équipes peu initiées sur ces sujets. Un manque de compréhension sur l’articulation
entre les PCE, SRCAE, APE et le débat sur la transition énergétique a été identifié. Cette
superposition d’outils créé un besoin de clarté et de cohérence au sein de la région et
engendre un impact négatif au niveau opérationnel.
»
30
Le nouveau plan climat aurait pu être adopté en même temps que le SRCAE et constituer ainsi son volet opérationnel.
31
Le PCET doit être compatible avec le SRCAE.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
18
Sur le second point, le rapport d’évaluation indique que pour les vingt-deux
actions dont les effets sur le climat ont pu être évaluées, il ressort qu’elles ont permis de :
-
économiser 77 gigawattheures par an ; la consommation annuelle de la
Haute-Normandie, tous secteurs confondus, est de 128 600 gwh par an
(source : SRCAE) ; l’économie annuelle réalisée correspond donc à 0,06 % de
l’énergie consommée chaque année ;
-
éviter l’émission de 15 300 teqCO²/an, soit l’équivalent des émissions
moyennes de 1 760 personnes en France ;
-
produire 32 gigawattheures par an d’énergies renouvelables (équivalent au
dixième de la production de la plus petite tranche de la centrale thermique du
Havre).
Les effets du plan climat énergies, mesuré sur ces vingt-deux actions,
apparaissent donc très modestes. Exprimer ces performances sur la totalité de la durée du
plan (2008 – 2012), comme le fait la région, plutôt que sur une année, comme a choisi de le
faire la chambre, permet certes de chiffrer la totalité des effets du plan mais ne change rien à
l’analyse de ses effets sur le climat, l’air et l’énergie.
3 -
La qualité de l’air
a -
Les effets de la pollution de l’air
Selon le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, la
pollution atmosphérique est à l’origine de 42 000 décès prématurés par an en France.
Depuis l’entrée en vigueur de la législation sur les particules en 2005, les valeurs limites
(annuelles et journalières) sont régulièrement dépassées dans plusieurs zones du territoire
national. L’État est sous la menace d’une condamnation lourde de la Cour de Justice de
l’Union Européenne. Une procédure de contentieux européen a en effet été ouverte par la
Commission européenne pour les particules «
PM10
» dans plusieurs zones du territoire
national.
Publié en septembre dernier par le ministère de l’écologie, du développement
durable et de l’énergie, le bilan national de la qualité de l’air 2012 constate une amélioration
de la qualité de l’air par rapport à l’année précédente, même si de fortes disparités persistent
selon la période de l’année et le territoire considérés, comme l’a illustré l’épisode estival de
pollution à l’ozone survenu en juillet dernier.
b -
Les moyens de préserver la qualité de l’air : une compétence partagée
La première étape consiste à mesurer la qualité de l’air. C’est à cette fin que
l’État et les régions ont favorisé le maillage du territoire national par des associations
chargées de réaliser des prélèvements quotidiens de façon à tenir la population et les
pouvoirs publics informés de la qualité de l’air. Ainsi, la région subventionne l’association Air
Normand
32
et finance différentes études portant sur le sujet.
Le plan régional pour la qualité de l’air a été introduit par la loi sur l’air et
l’utilisation rationnelle de l’énergie du 30 décembre 1996 (loi LAURE) et le décret
n° 98-362 du 6 mai 1998. À cette époque, il était é laboré par les services de l’État et devait
fixer les orientations permettant de prévenir ou de réduire la pollution atmosphérique ou d'en
atténuer les effets. Le premier plan régional pour la qualité de l’air haut-normand a été arrêté
en décembre 2001. La loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité a ensuite
transféré cette compétence aux régions. Les régions normandes, toutes deux concernées
par des problématiques communes liées à l'estuaire de la Seine et constatant le caractère
interrégional de la pollution atmosphérique, ont alors décidé d’élaborer un plan basé sur un
diagnostic commun.
32
180 000 € par an.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
19
Sur le plan opérationnel, le principal outil, et le plus contraignant pour les
populations, est le plan de protection de l’atmosphère (PPA) qui définit des actions
sectorielles adaptées au contexte local pour se conformer aux normes de la qualité de l’air et
pour maintenir ou améliorer la qualité de l’air existante. Élaborés dans toutes les
agglomérations de plus de 250 000 habitants, et dans les zones où les valeurs limites sont
dépassées ou risquent de l’être, les PPA relèvent de l’autorité du préfet.
En
Haute-Normandie,
trois
PPA
ont
été
adoptés
en
2007
pour
les
agglomérations suivantes : Rouen, Le Havre et la zone industrielle de Port Jérôme.
L’évaluation réalisée en 2011 a conclu à la nécessité de les réviser. Le préfet s’orienterait
vers un PPA unique pour la région mais ce plan est toujours en préparation.
Au-delà de ces outils, il va de soi que la qualité de l’air dépend des
comportements de chacun et des initiatives que peuvent prendre notamment les collectivités
pour réduire les émissions de polluants.
c -
Le plan régional haut-normand pour la qualité de l’air
Le plan régional pour la qualité de l’air haut-normand de 2001 contenait
trente-deux orientations articulées autour de quatre thèmes (développer la surveillance et la
mesure de la qualité de l’air, améliorer les connaissances sur les émissions et leurs impacts,
réduire les émissions et renforcer l’information). Le suivi de la mise en oeuvre du plan
régional pour la qualité de l’air devait être confié à un comité de pilotage et de suivi mais il
n’a jamais été mis en place.
En tout état de cause, huit ans après son entrée en vigueur, le plan n’a pas
permis d’atteindre les objectifs de qualité fixés. Ainsi, la pollution s’était accrue pour le
dioxyde de soufre (SO2), le dioxyde d’azote (NO2) et les particules fines (PM10 et PM 2.5),
elle était restée stable pour l’ozone (O3) et le benzène, et enfin, avait reculé pour les métaux
toxiques et le monoxyde de carbone (CO).
Le plan régional pour la qualité de l’air 2010-2015 contenait douze orientations.
Ce plan visait à identifier pour chaque secteur d’activités polluant (aménagement du
territoire, agriculture, industrie, transport des marchandises ou des personnes…) les moyens
d’observer, rechercher et alerter, d’anticiper, intégrer et piloter et enfin de communiquer,
sensibiliser et former. Par exemple, en matière d’aménagement, l’anticipation passe par la
limitation de l’étalement urbain ou la promotion de l’aménagement d’éco quartier
33
.
Ce plan a été adopté alors que se profilait le schéma régional du climat de l’air et
de l’énergie qui contient lui-même un volet air. Ceci explique pourquoi son suivi a été reporté
sine die
, en attendant l’adoption du schéma régional du climat de l’air et de l’énergie, qui a
d’ailleurs repris l’essentiel de son contenu.
4 -
Le schéma régional du climat de l’air et de l’énergie : une démarche
obligatoire pour un schéma coproduit avec l’État
a -
Le cadre normatif
La région Haute-Normandie a adopté son schéma régional du climat de l’air et de
l’énergie le 18 mars 2013. Ce schéma a été institué par la loi du 12 juillet 2010 (dite
Grenelle 2) et codifié à l’article L. 222-1 et suivants du code de l’environnement qui décrit la
procédure d’élaboration à suivre ainsi que le contenu du schéma.
33
un éco quartier est conçu de telle sorte que les déplacement en voiture individuelle sont limités au profit des transport en
commun et des modes non polluants, ce qui limite d’autant les émissions de polluants
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
20
Adopté au terme d’une procédure très largement ouverte à la concertation des
autres collectivités et de la population, le schéma régional du climat de l’air et de l’énergie
est un document d’orientation, non prescriptif. Il entretient néanmoins avec les principaux
documents d’urbanisme et de panification
34
un rapport de compatibilité. Il contient un
schéma régional de l’éolien identifiant les espaces favorables au développement de l’éolien
terrestre, dont la portée est prescriptive puisqu’elle empêche le développement de projets
d’implantation d’éoliennes hors de ces zones.
Élaboré sur la base d’un diagnostic, le schéma fixe des orientations à l’échéance
2020 et 2050 pour atténuer les effets du changement climatique et s’y adapter, et pour
améliorer la qualité de l’air.
Les orientations du schéma doivent permettre d’atteindre les objectifs fixés par le
paquet climat à l’horizon 2020 (3 x 20 : - 20 % de consommation d’énergie, - 20 % des gaz à
effet de serre en , 23% d’énergie renouvelable), de respecter les normes européennes sur la
qualité de l’air (respect des seuils pour tous les polluants et - 40 % des émissions de NOx et
- 30 % de PM 2,5) et de satisfaire aux engagements pris par la France de diviser par 4 ses
émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 par rapport à 1990.
b -
Des objectifs qui supposent un changement de modèle
Le schéma régional du climat de l’air et de l’énergie de Haute-Normandie
propose deux scénarios, un scénario tendanciel et un scénario volontariste. Le premier est
construit sur la base des tendances actuellement constatées principalement en matière de
progrès technique, ainsi que les évolutions réglementaires prévisibles. Il a une fonction
repoussoir puisqu’il démontre qu’en se limitant aux tendances actuelles les objectifs ne
seront pas atteints. A contrario, il souligne la nécessité de changer de modèle de société
pour atteindre ces objectifs. Le scénario dit SRCAE est donc le seul qui permet d’atteindre
les objectifs nationaux (3x20, facteur 4 et qualité de l’air), à l’exception toutefois de la part de
production d’énergie renouvelable, la Haute-Normandie étant dans ce domaine trop éloignée
de cet objectif pour pouvoir l’atteindre. La région rappelle à cet égard que la
Haute-Normandie n'est pas naturellement pourvue en grandes ressources renouvelables lui
permettant, par exemple, de s'appuyer sur une production hydroélectrique importante
comme dans d'autres régions et qu’elle possède en revanche de fortes activités industrielles
qui induisent d'importantes consommations énergétiques.
Le scénario SRCAE dessine donc «
un futur pour la Haute-Normandie lui
permettant de contribuer à la hauteur de ses potentialités aux objectifs nationaux
» :
-
en matière de consommation d’énergie (par rapport à 2005), l’objectif est de
- 20 % en 2020 et de - 50 % en 2050. Pour que cet objectif régional soit
atteint, chaque secteur devra y contribuer à hauteur de ses capacités
c'est-à-dire en fonction des gisements d’économies existants. Ainsi, l’industrie
devra réduire ses consommations de 30 %, le résidentiel de 20 %, le transport
de voyageurs de 23 %, etc. ;
-
les émissions de gaz à effet de serre, l’objectif est de - 23 % en 2020 et de
- 75 % en 2050 ;
-
la production d’énergie renouvelable, l’objectif est d’atteindre 16 % de la
consommation finale en 2020 (50 % pour l’éolien terrestre et maritime
35
et
40 % pour la biomasse
36
).
34
Plan climat, schéma de cohérence territoriale, plan local d’urbanisme, plan local de l’habitat, plan de déplacement urbain…
35
La méthode utilisée permet de « normandiser » la production des deux sites normands d’éolien maritime, soit 4 620 GWH en
2020 sur les 13.449 GWH attendus, soit 34 %.
36
Bois-énergie et méthanisation.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
21
Le SRCAE décline ensuite ces objectifs dans chacun des secteurs, en
distinguant les objectifs à 2020 et les conditions d’atteinte du facteur 4 en 2050. Par
exemple, dans le domaine du transport de voyageurs, le SRCAE fixe à l’horizon 2020 les six
objectifs suivants :
-
densifier et renforcer la mixité des zones stratégiques du territoire régional, qui
permettra de lutter contre la dispersion de l’urbanisation, et la spécialisation
qui va avec, qui entraine de nombreux déplacements. Au final, il s’agit de
s’orienter vers une multi polarisation du territoire : développement des bourgs
ayant une gare TER, maintien des équipements publics et des commerces
etc., la distance moyenne pour les achats et les loisirs étant réduite de 5 % ;
-
augmenter de 20 % l’usage des transports en commun dans les connexions
avec des zones denses, pour diminuer la dépendance à la voiture individuelle
(dans les zones les plus denses, 83 % des trajets s’effectuent en voiture ou
deux roues contre 17 % en transport en commun). Pour cela, il faudra
augmenter et améliorer l’offre, mais aussi agir sur le choix des lieux
d’implantation
des
«
générateurs
de
déplacements
»
et
enfin
réduire
l’attractivité de la voiture dans les zones bien desservies en transport en
commun ;
-
accroître les modes doux (marche à pied et vélo), pour que la dépendance à
la voiture trouve des solutions, notamment sur les courtes distances
(inférieures à 3 km). L’objectif 2020 est de passer de 24 % à 30 %. Mais le
développement de l’infrastructure cyclable ne dépend pas de la région
elle-même mais principalement du bloc communal, même si la région
subventionne ces travaux ;
-
encourager le développement des nouvelles mobilités et l’évolution des
comportements de mobilité, l’idée étant que les technologies doivent
permettre
de
réduire
les
déplacements
(visioconférence,
télétravail,
enseignement à distance) mais aussi de développer le covoiturage pour les
déplacements domicile travail et doubler le nombre de passagers par voiture
(10 % en 2005 contre 20 % en 2020) ;
-
encourager les progrès technologiques, et notamment développer le réseau
des
points
de
recharge
des
véhicules
électriques
sans
lequel
le
développement de la voiture électrique sera entravé, et inciter les
gestionnaires de flottes de véhicules à convertir celles-ci ;
-
réduire la surexposition à la pollution routière des personnes les plus
sensibles et prendre des mesures complémentaires car la réduction des
émissions ne suffira pas à elle seule, dans certaines zones urbaines, à passer
sous les seuils minimums.
En complément de ces six objectifs, le SRCAE pose les conditions d’atteinte du
facteur 4 en 2050. Il indique que dans le domaine des transports de voyageurs, le niveau de
rupture d’avec les pratiques antérieures est plus lourd que celui exigé par les objectifs à
2020 : rupture sur les formes urbaines, rupture comportementale (nouvelle culture de la
mobilité), rupture technologique. Pour cela, le SRCAE indique qu’il convient dès à présent de
rompre avec l’étalement urbain, de travailler de manière forte sur les comportements et la
promotion de nouvelles mobilités, et enfin de promouvoir la recherche et le développement
de véhicules plus performants.
Ces orientations sont enfin complétées par une boite à outils qui décrit les
actions à entreprendre pour atteindre ces objectifs.
La même démarche est déclinée pour le transport de marchandises, le secteur
du bâtiment, l’agriculture, l’industrie. S’y ajoute la définition d’objectifs en matière de
développement des énergies renouvelables et en matière d’adaptation au changement
climatique.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
22
c -
Un pilotage à construire
Le SRCAE est un document d’orientation. Il doit donner lieu à des décisions de
mise en oeuvre multiples et variées, coordonnées entre-elles pour ne pas se neutraliser. Les
parties prenantes étant très nombreuses, pour que la Haute-Normandie ait une petite chance
d’atteindre les objectifs du SRCAE, il est indispensable qu’un pilotage énergique dépassant
la simple information des acteurs,
soit mis en place rapidement, pilotage que seul le couple
État région peut assumer.
Or, vingt-quatre mois après la mise au point du schéma, une seule réunion a été
organisée pour mobiliser une partie de ce que le SRCAE dénomme «
les acteurs identifiés
en région
» : organisations professionnelles, chambres consulaires, syndicats, collectivités
territoriales, établissements d’enseignement et de recherche… Cette réunion a été l’occasion
de rappeler les enjeux et les objectifs du SRCAE et de leur présenter les indicateurs de suivi.
Pour la phase opérationnelle, la région mise principalement sur les programmes
opérationnels des fonds européens, sur les actions inscrites au CPER, ainsi que sur les
plans climat adoptés ou en voie de l’être par les collectivités soumises à cette obligation.
La région reconnaît que la mobilisation des acteurs est insuffisante et explique ce
retard par l’organisation du débat sur la transition énergétique ainsi que par les effets
attendus de la réforme territoriale qui remet en cause le périmètre du SRCAE mais
également la répartition des compétences entre collectivités.
Aussi fondées soient-elles, ces raisons ne peuvent justifier le peu d’initiatives
prises pour vulgariser le contenu du SRCAE et mobiliser les acteurs concernés par ce
changement de paradigme que suppose le scenario SRCAE. Dans ces conditions, la
chambre se demande dans quelles conditions la Haute-Normandie pourra, d’ici 2020,
atteindre les objectifs fixés par le SRCAE.
La chambre recommande la mise en place d’une gouvernance plus dynamique
du SRCAE.
d -
Les fonds du FEDER seront mobilisés pour financer la transition énergétique
La région Haute-Normandie est en passe de devenir autorité de gestion des
fonds FEDER, FSE, FEADER et FEAMP
37
. Le programme opérationnel FEDER FSE adopté
par l’assemblée régionale le 7 avril 2014 comprend 5 axes. L’axe 2 s’intitule «
soutenir la
transition énergétique de la Haute-Normandie
», dans le but de favoriser la production et la
distribution d’énergie provenant de sources renouvelables, d’une part et de soutenir
l’efficacité énergétique, la gestion intelligente de l’énergie et l’utilisation des énergies
renouvelables dans les infrastructures publiques, d’autre part. Il est doté d’une enveloppe de
40 M€. L’axe 5 est également conçu pour accompagner les orientations du SRCAE puisqu’il
vise à soutenir le développement d’espaces urbains durables (quartiers urbains innovants,
transport alternatif à la voiture, requalification des sites délaissés). Il est doté d’un budget de
25 M€.
Bien qu’opportunément fléchés sur des thématiques conformes aux objectifs du
SRCAE, ces fonds ne pourront être utilisés que si se manifestent des porteurs de projets
ayant les capacités financières adéquates. Le semi échec de l’appel à projet énergie
démontre qu’il ne suffit pas de cofinancer des actions pour que les porteurs se déclarent. Là
encore, l’implication de la région sera primordiale pour susciter les projets et accompagner
leurs porteurs.
37
Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, doté de 588 millions d’euros de crédits pour la période 2014-2020 :
369 M€ pour le développement durable de la pêche, l’aquaculture et des zones côtières dépendantes de ces activités
(216 M€ sur la période 2007-2013) et 86,45 M€ pour les départements d’outre-mer (source : MEDDE).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
23
e -
La mise en oeuvre du SRACE par la région : le plan de l’air du climat et de
l’énergie régional (PACER)
Le rôle de la région ne se limite pas à fixer le cap en adoptant le SRCAE. Elle est
aussi concernée par sa mise en oeuvre et par l’adoption d’un plan climat puisque la loi lui fait
obligation d’en adopter un. Elle aurait pu adopter ce PCET régional en même temps que le
SRCAE
38
; elle a fait le choix au contraire de disjoindre les deux exercices, pour se donner le
temps d’évaluer le PCET 2007 avant de se lancer dans sa réécriture. Elle a également fait le
choix d’étendre son plan climat à la problématique de la qualité de l’air
39
, adoptant en cela
une démarche pionnière encore peu répandue. Le plan climat régional s’appellera donc le
PACER.
Le PACER de Haute-Normandie, adopté le 13 octobre 2014, comporte
quarante-huit actions réparties en quatre blocs : observation – sensibilisation – pilotage,
collectivité exemplaire, adaptation et politiques publiques. À la différence du précédent
PCET régional, les actions du PACER contiennent toutes un ou des objectifs clairs et
engageants, qui plus est fixés à l’horizon 2020, soit le terme du PACER qui est aussi la
première échéance du SRCAE. Chaque action prévoit également les modalités de sa mise
en oeuvre ainsi qu’un budget prévisionnel en distinguant les dépenses supplémentaires
induites, quand elles sont identifiables. Enfin, la grande majorité des actions est assortie
d’indicateurs conformes aux objectifs fixés.
Quant au contenu, il prolonge les orientations adoptées entre 2007 et 2012 mais
avec des ambitions rehaussées pour tenir compte du scénario SRCAE. La région promeut
par exemple la rénovation des bâtiments ayant le label «
effinergie plus
» en construction
neuve et celle des bâtiments basse consommation en rénovation. Elle entend également
limiter l’étalement urbain et favoriser la rénovation des logements et envisage pour cela de
créer une structure de tiers financement qui permettra de financer les travaux de rénovation
thermique des logements, le financeur se faisant rembourser sur les économies d’énergie
réalisées. Cette dernière action, est sans doute la plus originale même si elle a été mise en
oeuvre dans d’autres régions et qu’elle figure dans le projet
de
loi relatif à la transition
énergétique pour la croissance verte. Enfin, il convient de souligner l’élargissement du
PACER au soutien du développement de l’agriculture biologique, conséquence logique de la
prise de compétence «
gestion des fonds européens
».
B -
La biodiversité : une stratégie en construction
«
La biodiversité, contraction de biologique et de diversité, représente la diversité
des êtres vivants et des écosystèmes : la faune, la flore, les bactéries, les milieux mais aussi
les races, les gènes et les variétés domestiques. Nous autres, humains appartenons à une
espèce – Homo sapiens – qui constitue l’un des maillons de cette diversité biologique. Mais
la biodiversité va au-delà de la variété du vivant. Cette notion intègre les interactions qui
existent entre les différents organismes précités, tout comme les interactions entre ces
organismes et leurs milieux de vie. D’où sa complexité et sa richesse
40
. »
38
Comme le prévoit l’article L. 222-2 du code de l’environnement.
39
Avec le soutien de l’ADEME. La région s’est portée candidate à l’appel à projet AACTAIR (aide à l’action des collectivités
territoriales et locales en faveur de l’air) de l’ADEME qui permet d’accompagner les collectivités dans la mise en oeuvre et
l’évaluation d’actions ou expérimentations innovantes qui concourent à l’amélioration de la qualité de l’air extérieur et la qualité
de l’air intérieur.
40
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
24
1 -
Éléments de cadrage et d’actualité
La nécessité de préserver la biodiversité est apparue dès le sommet de la Terre
de Rio de Janeiro (1992). Une convention sur la diversité biologique a été conclue à cette
occasion, amorçant une prise de conscience très progressive de la nécessité de mieux
connaître la diversité des espèces et des écosystèmes, et de les protéger. Cette convention
a été ratifiée par la France en 1994. Mais ce n’est qu’au début des années 2000 que des
indicateurs de mesure de cette biodiversité ont été adoptés (sommet de Johannesburg,
2002) et que l’Union européenne s’est fixée pour objectif d’enrayer la perte de biodiversité
d’ici 2010.
Cette première stratégie européenne (2001) a permis de mettre en cohérence et
de compléter un arsenal varié de directives
(directive oiseaux, habitats, qui conduiront au
réseau Natura 2000, directive sur l’eau…) existantes, ces directives laissant aux États le soin
de prendre les mesures permettant de décliner cette stratégie. C’est ainsi que la France a
adopté une première stratégie nationale de la biodiversité en 2004 dont les objectifs visaient
à renforcer la capacité des acteurs publics et privés à agir ensemble pour la biodiversité, aux
différents niveaux territoriaux, à mobiliser et utiliser les données, informations relatives à la
biodiversité afin de les rendre accessibles au plus grand nombre, et à faire face à
l’émergence de questions nouvelles, notamment relatives au changement climatique et aux
services rendus par les écosystèmes.
Constatant le peu d’effet des mesures prises, l’Union européenne a, dès 2006,
renforcé ses outils en adoptant un plan d’action en faveur de la biodiversité.
En 2009 et 2010, les lois dites Grenelle 1 et Grenelle 2 fixèrent des objectifs à
l’État en matière de biodiversité : stopper la perte de biodiversité (trames vertes et bleues,
création d’aires protégées - terrestres et marines, lutte contre les espèces envahissantes …),
restaurer la qualité écologique de l’eau, une agriculture et une sylviculture durables, et enfin,
une gestion intégrée de la mer et du littoral.
En 2010
41
à Nagoya, les 193 États signataires de la convention sur la diversité
biologique constatèrent également leur échec à enrayer la perte de biodiversité, et
actualisèrent leurs engagements (horizon 2050) en adoptant enfin des objectifs : les objectifs
dits d’Aichi (Japon).
La même année, la France se dota d’une stratégie nationale de
développement
durable. La stratégie nationale de la biodiversité, adoptée en 2004, en devint le volet
biodiversité (défi n° 6 «
conservation et gestion durable de la biodiversité et des ressources
naturelles
»). Elle mit également en place un comité de révision de cette stratégie
42
, comité
qui fit le même constat de l’échec des politiques de préservation de la biodiversité, ce qui
conduisit la France à redéfinir sa stratégie pour la période 2011-2020. La nouvelle stratégie
comporte désormais vingt objectifs et réserve aux initiatives locales et citoyennes une place
prépondérante. Le projet de loi sur la biodiversité, adopté par le conseil des ministres du
26 mars 2014, vise notamment à traduire cette stratégie dans le droit positif.
En 2011, l’Union européenne s’est dotée d’une nouvelle stratégie «
la
biodiversité, notre assurance-vie, notre capital naturel – stratégie de l’UE à l’horizon 2020
».
Cette dernière prend place dans la stratégie 2020. Elle comporte six objectifs :
-
conserver et régénérer la nature (les sites Natura 2000 doivent maintenant
être restaurés) ;
-
préserver et améliorer les écosystèmes et leurs services (préserver et
améliorer les services écosystémiques, comme par exemple la pollinisation
des cultures par les abeilles) ;
-
assurer la durabilité de l’agriculture et de la foresterie (mise en place de plans
de gestion des forêts) ;
41
Année de la biodiversité.
42
Ce comité a réuni plus de 100 associations ou réseaux.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
25
-
garantir une utilisation durable des ressources de pêche (gestion des
ressources : directive-cadre «
Stratégie pour le milieu marin
») ;
-
lutter contre les espèces allogènes envahissantes (définir une stratégie
européenne, aujourd’hui inexistante) ;
-
gérer la crise de la biodiversité au niveau mondial (respecter les engagements
pris par l’UE dans le cadre de la convention pour la diversité biologique).
Cette longue énumération des stratégies et des outils mis en place au niveau
international et national illustre le peu d’effet de ces actions sur la préservation et la
restauration de la biodiversité. Elle illustre également la complexité qui caractérise le cadre
politique et juridique dans lequel l’action régionale doit s’inscrire.
2 -
La stratégie régionale de la biodiversité
Dès 2010
43
, la région indiquait s’être dotée d’une stratégie régionale de la
biodiversité qu’elle déclinait en cinq axes :
-
développer la connaissance et notamment les indicateurs de la biodiversité
(observatoire régional de la biodiversité) ;
-
élaborer un schéma régional de cohérence écologique et une stratégie de
création des aires protégées ;
-
définir une stratégie régionale de création d’espaces protégés ;
-
lutter contre les espèces exotiques envahissantes ;
-
promouvoir l’éducation à l’environnement.
En réalité, cette stratégie régionale n’a jamais été formalisée par une délibération
du conseil régional. Au mieux, l’assemblée régionale a été destinataire d’éléments
d’informations concernant les grands axes de cette politique présentés soit dans le rapport
annuel sur le développement durable, soit dans le rapport accompagnant le projet de budget
primitif. Un conseil d’orientation de la stratégie régionale de la biodiversité
44
a bien été créé
en janvier 2012 à l’initiative conjointe de l’État et de la région, mais ses travaux n’ont pas
encore permis d’élaborer un projet de stratégie régionale susceptible d’être soumis au
conseil régional. Par stratégie régionale, il faut donc principalement entendre un ensemble
d’actions déclinant la stratégie nationale de la biodiversité et mises en oeuvre sur le territoire
de la région, ce qui n’enlève rien à l’intérêt de ces actions. Le rôle de la région est cependant
nettement moins moteur que ne le laissent entendre les rapports sur le développement
durable, la région étant même absente de certaines actions telle que la lutte contre les
espèces exotiques envahissantes
45
pourtant présentée comme un axe de la stratégie
régionale. La région a d’ailleurs confirmé «
le caractère inachevé de la démarche.
»
Le projet de loi sur la biodiversité prévoit d’ajouter au code de l’environnement
des dispositions obligeant les régions à adopter une stratégie régionale de la biodiversité,
tenant compte de la stratégie nationale
46
. Si ce texte était adopté en l’état, la stratégie
régionale serait définie par la région seule et non plus en partenariat avec l’État.
3 -
La mesure de la biodiversité : l’observatoire de la biodiversité de
Haute-Normandie
Les principaux acteurs font unanimement le constat d’un besoin d’approfondir les
connaissances et l’expertise en matière de biodiversité.
43
Rapport annuel sur le développement durable.
44
Prévu par la loi du 12 juillet 2010. Il est composé de soixante-neuf membres répartis en cinq collèges : collectivités locales,
État, organismes socioprofessionnels et usagers de la nature, associations oeuvrant pour la préservation de la biodiversité,
personnes qualifiées.
45
Mais cette lacune devrait prochainement être comblée.
46
Cf. article 4 du projet de loi.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
26
La stratégie nationale de la biodiversité adoptée par l’État en 2004 comportait la
création d’un observatoire national de la biodiversité. Cet observatoire n’a été créé qu’à partir
de 2009 - 2010. Il s’est réuni pour la première fois le 17 mars 2011 et a publié ses premiers
indicateurs de mesure de la biodiversité en mai 2012
47
. Avant même la création de cet
observatoire, l’État a créé le système d’information sur la nature et les paysages (SINP),
base de données permettant de faire un état des lieux et de suivre l’évolution de la
biodiversité. Le SINP
48
est piloté par la DREAL et alimenté localement par un réseau
d’acteurs (collectivités, universités, associations, particuliers…).
Comme bien d’autres régions, la région Haute-Normandie ainsi que les deux
départements hauts-normands, ont souhaité s’associer à cette démarche
49
en créant
l’observatoire de la biodiversité de la Haute-Normandie (OBHN)
50
. En substance, la mission
de l’OBHN consiste d’une part à rassembler des données fiables, objectives et
représentatives de la biodiversité haut-normande, ce qui suppose de créer les conditions de
collecte de cette information (protocole de collecte et formation des acteurs du réseau) et sa
remontée vers l’observatoire, et d’autre part, à les partager avec les acteurs du réseau. Ces
données doivent servir à alimenter le SINP, et à renseigner des indicateurs locaux
complémentaires.
En 2012, l’OBHN a produit six indicateurs (évolution de l’occupation du sol ;
évolution de la surface artificialisée ; évolution de l’agriculture biologique ; évolution de la
surface toujours en herbe dans la surface agricole utile ; évolution des aires protégées ;
fragmentation des espaces naturels) et a conclu des marchés de prestations intellectuelles
pour la construction de vingt autres indicateurs sur la diversité biologique de la flore
régionale et des mammifères haut-normands
51
. Il a également fait réaliser différentes études
sur les oiseaux communs, les papillons et les amphibiens. Toujours en 2012, l’observatoire a
lancé une consultation publique pour le lancement d’un suivi scientifique des libellules afin
de mesurer à moyen terme l’évolution de ces communautés en Haute-Normandie d’une part,
et l’état de conservation des zones humides d’autre part.
L’observatoire réunit aujourd’hui, autour de ses quatre membres fondateurs que
sont l’État, la région Haute-Normandie et les départements de l’Eure et de Seine-Maritime,
douze membres adhérents tels que par exemple le conservatoire d’espaces naturels de
Haute-Normandie, le grand port maritime du Havre ou le groupe mammalogique normand.
L’OBHN dispose d’une équipe restreinte de trois permanents et utilise pour l’essentiel les
locaux et les moyens de la région. Ses coûts de fonctionnement (0,56 M€) et de recherche
(1,340 M€) sont partagés pour moitié entre ses membres fondateurs, d’une part et l’Union
européenne, d’autre part.
L’observatoire a ainsi permis de créer un réseau d’acteurs institutionnels et
associatifs dont l’activité est complémentaire.
47
http://indicateurs-biodiversite.naturefrance.fr/
48
Pour le contenu et le mode opératoire, cf. circulaire du 11 juin 2007.
49
Ainsi que le prévoit l’article L. 411-5 du code de l’environnement.
50
La création de l’OBHN était inscrite au SRADT 2007 et financée par le CPER 2007 - 2013 – La convention constitutive a été
signée le 2 mars 2011.
51
Cf. OBHN, rapport d’activité 2012.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
27
4 -
Le schéma régional de cohérence écologique : la trame verte et la trame
bleue
L’érosion de la biodiversité trouve en partie son origine dans la fragmentation des
milieux naturels et des paysages, qui isole les populations animales et végétales et empêche
les espèces d’accomplir leur cycle de vie. Un des objectifs de la stratégie nationale pour la
biodiversité consiste à «
construire une infrastructure écologique incluant un réseau cohérent
d’espaces protégés
», c'est-à-dire à définir, à préserver et à remettre en état une trame verte
et une trame bleue qui chacune permettent aux espèces de se déplacer pour trouver un
environnement vital adapté. Ces dispositions, introduites par les lois adoptées à la suite du
«
Grenelle de l’environnement
»
52
, prévoyaient la mise en place de cette infrastructure dès
2012.
La première étape de ce processus consiste à identifier les trames vertes et
bleues existantes ou potentielles, puis dans un second temps à définir un plan d’action
stratégique. C’est l’objet du schéma régional de cohérence écologique
53
qui est «
élaboré,
mis à jour et suivi conjointement par la région et l’État en association avec un comité trame
verte et bleue
54
créé dans chaque région
». Le schéma «
prend en compte les orientations
nationales pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques [élaboré
par l’État]
(…) ainsi que les éléments pertinents des schémas directeurs d'aménagement et
de gestion de l'eau (…). »
Il est soumis à enquête publique. Il est enfin
« soumis à
délibération du conseil régional et adopté par arrêté du représentant de l'État dans la
région.
»
L’adoption de ce schéma a été présentée dès 2010 comme un élément de la
stratégie régionale de la biodiversité. Il n’a finalement été adopté que le 13 octobre 2014 par
l’assemblée régionale. Mais ce retard trouve, en partie, son explication dans la parution
tardive du décret précisant son contenu
55
.
Durant la phase de concertation, la région et l’État (DREAL) ont élaboré un guide
d’application des trames vertes et bleues à destination des maires pour leur expliquer les
enjeux de la démarche ainsi que leur contribution attendue à la préservation des trames et
des réservoirs de biodiversité. Ce guide aborde le sujet de manière très pragmatique et
concrète. Il contient des fiches pratiques décrivant ce que peuvent faire les maires aussi bien
lorsqu’ils élaborent des documents d’urbanisme que dans la gestion quotidienne de leur
commune. Ce guide sera diffusé prochainement.
Au-delà de ce premier outil à disposition des maires, la chambre estime que la
mise en oeuvre effective du plan d’action stratégique du schéma demandera de la part de la
région un investissement important non seulement pour le faire connaitre mais également
pour accompagner la multiplicité des acteurs susceptibles d’agir pour préserver les trames
existantes et restaurer celles qui sont dégradées. Selon, la région, un appel à projets sera
lancé prochainement. La chambre rappelle cependant que son succès dépend moins de la
région que du dynamisme des territoires.
52
La loi de programmation dite Grenelle 1 indiquait que ce réseau devait être mis en place en 2012.
53
Le principe du schéma de cohérence écologique a été proposé par le groupe de travail
Biodiversité
du Grenelle de
l'Environnement en 2007, étudié par un COMOP Trame verte et bleue, puis retenu par la loi de programmation « Grenelle I »,
puis juridiquement traduit et décliné par le projet de loi dit Grenelle 2 (étudié en 2009) qui a confirmé la trame verte et bleue
comme nouveau facteur de mise en cohérence des politiques d’aménagement du territoire en France.
54
La composition du comité est arrêtée conjointement par le président du conseil régional et le préfet de région pour une durée
de six ans.
55
Cf. décret n° 2012-1492 du 27 décembre 2012.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
28
5 -
La reconquête et la valorisation du patrimoine naturel, des habitats, des
paysages
La stratégie régionale de la biodiversité, telle que présentée par la région,
comporte un volet visant à «
définir une stratégie de création des aires protégées
. » Ce volet
est la traduction locale de la stratégie nationale définie à l’article 23 de la loi du 3 août
2009 (Grenelle 1) et par une circulaire du 13 août 2010, stratégie nationale dont le but est de
placer 2 % du territoire terrestre métropolitain sous protection forte, à échéance 2019. À
cette fin, le préfet de Haute-Normandie s’apprête à placer sous protection neuf biotopes. La
région de son côté apportera son soutien à la création de trois projets de réserves naturelles
régionales.
Au-delà de ces éléments d’actualité, la région lutte, depuis longtemps, contre la
perte de biodiversité et la protection des espaces naturels. Elle le fait principalement par
l’intermédiaire de plusieurs associations auxquelles elle apporte son soutien financier. Ce
soutien est inscrit au contrat 276 conclu avec les deux départements haut-normands. Ainsi,
l’action C-3 « soutien aux structures chargées de l’information et de la sensibilisation au
développement durable et à la gestion des milieux naturels » engage la région pour 13,2 M€,
l’Eure pour 2,3 M€ et la Seine-Maritime pour 1,5 M€. En soutenant des associations dont le
rayonnement s’étend sur plusieurs régions, la région intervient sur des problématiques qui
dépassent le cadre géographique de la seule Haute-Normandie, ce qui est un point
évidemment positif.
a -
Le conservatoire botanique national de Bailleul
Association dont la mission consiste à développer les connaissances sur la flore,
la
phytosociologie
et
les
habitats
naturels,
spécifiquement
sur
les
territoires
du
Nord-Pas-de-Calais, de la Haute-Normandie et de la Picardie, le conservatoire assure la
collecte et l’exploitation d’informations sur les végétaux et leurs habitats, mais également la
conservation d’espèces menacées et mène des actions de sensibilisation auprès des
aménageurs, des scolaires ou du grand public. Il est agréé «
conservatoire botanique
national
» par le ministère de l’écologie depuis 1991, comme huit autres en France.
La convention conclue entre la région et le conservatoire décrit les engagements
pris par ce dernier en contrepartie du financement régional : connaissance et inventaire de la
flore et des habitats naturels et semi-naturels, conservation in situ et ex situ de la flore de la
région Haute-Normandie, appui scientifique et technique auprès de l’État et des collectivités
territoriales. En réalité ces trois missions sont celles qui figurent dans le code de
l’environnement
56
, les conservatoires botaniques nationaux étant des opérateurs de l’État
financés par les collectivités locales
57
. La région n’a donc pas la main pour réorienter les
interventions du conservatoire. La convention annuelle stipule d’ailleurs que le bénéficiaire
s’engage sur un programme annuel d’actions, normalement joint à la demande de versement
de la première fraction (60 %) de la subvention. La subvention (54 617 €) est donc attribuée
avant même de connaître le détail des actions que le conservatoire entend réaliser.
Les données collectées par le conservatoire sont principalement exploitées et
diffusées via l’OBHN.
56
Article L. 414-10 du code de l’environnement, modifié par la loi du 12 juillet 2010 dite «
Grenelle 2
».
57
À la différence de la région Nord-Pas-de-Calais, des départements du Nord et du Pas-de-Calais et de la commune de
Bailleul, la région Haute-Normandie ne siège pas au conseil d’administration du conservatoire.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
29
b -
Le conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres
Établissement public national chargé de protéger le littoral, le conservatoire s’est
associé aux deux régions normandes avec lesquelles il a créé le syndicat mixte littoral
normand dont la vocation est d’organiser, sur les rivages normands, la sauvegarde et la mise
en valeur des espaces naturels les plus remarquables et les plus sensibles. Le syndicat
mixte exerce donc des compétences analogues à celles du conservatoire national. Il est
avant tout un outil permettant de flécher les financements des deux régions. Une convention
pluriannuelle a été conclue en 2011 avec le conservatoire. Elle prévoit qu’au titre du
fonctionnement, chaque région normande verse au syndicat mixte une subvention de
360 000 € et que le conservatoire met à sa disposition deux agents ainsi qu’un budget
d’environ 160 000 € permettant le fonctionnement d’une équipe de quatorze personnes.
c -
Le conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie
Le conservatoire est une association
58
dont la mission est définie par le code de
l’environnement
59
, qui consiste à assurer la gestion écologique des sites naturels dont il est
propriétaire ou dont il a la maîtrise d’ouvrage, et de rechercher la maîtrise foncière ou
d’usage d’espaces naturels constituant des enjeux forts pour le patrimoine naturel de
Haute-Normandie.
Il bénéficie chaque année d’une subvention régionale (371 000 € en 2012)
couvrant son fonctionnement général. Cette subvention n’est associée à aucun objectif
précis. En sus d’une subvention de fonctionnement, le conservatoire reçoit le soutien de la
région dans sa politique d’acquisition foncière. En 2011, la région a ainsi participé à
l’acquisition de la ferme du Héron (226 767,60 €). Comme pour le conservatoire de Bailleul,
le programme annuel de travail est joint à la première fraction de la subvention, preuve que
le programme n’est pas négocié avec la région.
d -
L’association AQUACAUX
L’association
60
AQUACAUX a implanté des activités d’aquaculture marine sur un
ancien dépôt de carburant de l’OTAN désaffecté, situé sur la commune d’Octeville-sur-Mer.
Depuis, elle y a développé des actions de préservation de l’environnement via des chantiers
d’insertion. Elle est également chargée d’entretenir un linéaire côtier d’une vingtaine de
kilomètres situé entre Sainte-Adresse et Saint-Jouin-Bruneval.
Elle reçoit chaque année une subvention régionale de l’ordre de 45 000 €.
Comme pour les conservatoires, le programme annuel d’actions est défini et remis à la
région postérieurement à la signature de la convention. Outre un bilan d’activité de l’année
précédente, joint au solde de la subvention, l’association s’est engagée, depuis 2013, à
transmettre le résultat de ses observations à l’observatoire de la biodiversité et à céder ses
droits sur ces données.
e -
L’association
Centre
d’hébergement
et
d’étude
sur
la
nature
et
l’environnement (le CHENE)
Cette
association
61
poursuit
deux
objectifs :
éveiller,
sensibiliser
à
la
connaissance et à la protection de la nature, d’une part, et accueillir, soigner et relâcher tout
animal sauvage en détresse (phoques, hérissons, goélands et chevêches), d’autre part. Elle
intervient auprès des scolaires et entretient pour ses actions d’éducation à l’environnement,
un musée de la nature. Pour sa mission de sauvegarde des espèces menacées, elle
entretient un centre de soins où sont accueillis les animaux blessés (1 500 par an).
58
Il existe 22 associations régionales de ce type et 9 départementales ; elles sont regroupées au sein de la fédération des
espaces naturels.
59
Article L. 414-11.
60
61
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
30
Pour la période 2012-2014, l’association recevra une subvention de 285 000 €,
soit en moyenne 95 000 €/an.
Ces quelques exemples illustrent l’implication surtout financière de la région
Haute-Normandie mais aussi son positionnement singulier vis-à-vis de stratégies à la
définition desquelles elle est peu associée.
6 -
La gestion globale de la ressource en eau
À titre liminaire, il faut rappeler que la politique de l’eau réserve une place
mineure aux régions, les principaux acteurs étant l’Office national de l’eau et des milieux
aquatiques (Onema) et les agences de l’eau ainsi que les syndicats de bassins versants.
L’implication de la région est donc exclusivement financière via le soutien qu’elle apporte à
ces derniers. Selon le rapport annuel sur le développement durable, cette intervention vise
à maîtriser les ruissellements et l’érosion, prévenir les pollutions, soutenir l’acquisition de
connaissances sur l’estuaire de la Seine, et valoriser l’expertise scientifique et technique
régionale sur les problématiques littorales.
a -
La gestion des bassins versants
Pour lutter contre les inondations, la région apporte son soutien aux collectivités
chargées de la gestion des bassins versants. Cette politique a été engagée au titre du CPER
2000-2006, et s’est poursuivie au CPER 2007-2013. Le dispositif, formalisé en juin 2003,
part du constat que la Haute-Normandie est régulièrement touchée par des problèmes liés
au ruissellement, à l’érosion et aux inondations et que la prévention de tels évènements
passe par le développement de techniques alternatives de maîtrise des ruissellements par
infiltration qui permet au surplus d’épurer les eaux ruisselantes.
Le soutien régional permet de financer les études, les travaux d’ouvrages
hydrauliques ainsi que les acquisitions foncières nécessaires à ces travaux. Au titre des
deux CPER, la région s’est engagée pour 8 MF (1,22 M€) et 9 M€. Cet engagement
contractuel est abondé chaque année par des crédits de droit commun (0,86 M€ en 2014).
Le territoire est maintenant maillé d’ouvrages structurants. La région souhaite
désormais faciliter les travaux qui permettront la constitution d’un établissement public
territorial de bassin et l’adoption d’un SAGE (schéma d’aménagement et de gestion des
eaux). Là aussi, la région pourrait intervenir en appui de l’agence de l’eau Seine-Normandie.
b -
L’étude des problématiques fluviales et côtières
(1) Le soutien au GIP Seine-Aval
Le GIP Seine-Aval a été créé en 2003 dans le but de mieux connaître les
différents écosystèmes du bassin versant de la Seine, pour mieux les protéger contre les
effets de l’urbanisation et de l’industrialisation (morcellement, imperméabilisation des sols,
ruissellement des contaminants vers l’estuaire…). Regroupant l’État et ses établissements
publics (agence de l’eau Seine Normandie, les grands ports maritimes), les principales
collectivités territoriales
62
et l’union des industries chimiques de Normandie, le GIP est
essentiellement chargé de réaliser des études et de mettre en place les outils permettant le
partage du résultat de ces études avec les acteurs du territoire. Les premières études ont été
entreprises dès 1995. D’autres recherches sur le fonctionnement de l’estuaire, ont été
financées par le CPER 2000-2006 : «
programme Seine aval et Marelle
63
».
62
Les deux régions normandes, trois départements, la CREA et la CODAH. La région est avec l’agence de l’eau de Seine-
Normandie, le premier contributeur au GIP.
63
Action n° 36 dotée de 26 MF (3,96 M€) soit 12 MF p our la région et 14 pour l’État, et visant à « mieux connaître pour mieux
gérer
le fonctionnement de l’estuaire et de la baie de Seine ».
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
31
Son action contribue notamment à mieux comprendre l’apport des espèces à
l’équilibre des milieux naturels. Ainsi, le programme Seine-Aval, constitué de quatre
recherches dont la plus récente vise à reconquérir l’estuaire de la Seine, permet d’analyser
les risques chimiques et environnementaux liés au changement climatique et à observer
l’état de l’estuaire. Cette quatrième phase du programme Seine-Aval (2007-2012) a donné
lieu au financement par le GIP de trente-deux projets de recherche, soit un investissement
de 4 M€. Le GIP a également réalisé des études visant à identifier les cours d’eau les plus
imprégnés par les contaminants chimiques. Ce diagnostic a contribué à la préparation du
plan régional santé environnement 2010-2013.
(2) Le programme interreg LICCO
La région Haute-Normandie participe financièrement au programme «
interreg
LICCO
» qui porte sur l’évolution de la bande côtière du littoral, de part et d’autre de la
Manche
64
.
Littoraux et changements côtiers (LiCCo) est un projet partenarial transmanche
qui accompagne les populations côtières pour comprendre, se préparer et s’adapter aux
effets du changement climatique, de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion sur leur
littoral. Plusieurs organismes partenaires du Devon, du Dorset et de Normandie travaillent
ensemble sur ce projet européen porté par l’Environment Agency.
7 -
L’éducation à l’environnement et les comportements éco citoyens
Les bienfaits de la biodiversité sont mal connus du grand public mais
aussi des
décideurs. L’éducation à l’environnement est donc un élément déterminant de la
préservation de la biodiversité. Les actions d’éducation à l’environnement reposent sur
plusieurs dispositifs.
a -
Le programme écocitoyenneté
Ce
programme
vise
à
promouvoir
des
pratiques
respectueuses
de
l’environnement, à sensibiliser et à former les citoyens. Ces actions sont principalement
destinées aux jeunes en formation.
Le programme fonctionne sous la forme d’appel à projets. Il a mobilisé
430 966 € en 2011 sous forme de subventions à sept associations différentes et
366 980 € en 2012 pour huit associations différentes. En 2013, quatre associations ont été
subventionnées pour 99 965 €.
Les associations lauréates se renouvellent assez peu mais cette inertie
s’explique par le fait que certains programmes sont biannuels et aussi parce que les
associations susceptibles de répondre à ce genre de programmes ne sont pas nombreuses.
Outre l’AREHN déjà évoquée et dont l’activité est plus diversifiée, une des plus
importantes oeuvrant dans ce secteur est l’association CARDERE (centre d’action régionale
pour le développement et l’éducation relative à l’environnement) créée en 1986 à Darnétal et
désormais implantée à Rouen, le Havre et Dieppe. Ses activités se sont depuis étoffées ainsi
qu’en atteste sa grille tarifaire et son rapport d’activité 2011-2012
65
qui recense neuf
domaines d’activités : animations scolaires, classes d’environnement, loisirs éducatifs et
culturels, formations pédagogiques, chantiers nature, valorisation de sites naturels,
conception
d’outils
pédagogiques,
diffusion
de
ressources
et
enfin,
évènements
environnementaux.
64
65
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
32
Selon ce bilan, le programme éco citoyen, au titre duquel l’association est
soutenue par la région, aurait permis d’organiser vingt-quatre jours de formation et deux cent
soixante-quatre jours d’animation pour 10 871 participants. Mais, la région n’est qu’un
financeur parmi d’autres
66
, CARDERE étant progressivement devenu un prestataire au
service des collectivités (CREA, Département 76, ville du Havre…), ou de l’État et dont les
interventions peuvent consister à former les agents de ces collectivités
67
.
b -
Les chantiers « jeunes bénévoles » de restauration environnementale
Le dispositif permet de financer des associations qui organisent des chantiers de
jeunes pour entretenir les espaces publics (berges, chemins, ouvrages…), planter des
arbres, etc. En 2011 et 2012, la région a mobilisé 75 000 € pour une quarantaine de
chantiers ayant employé plus de 600 jeunes.
c -
Les établissements du développement durable
En 2005, sous l’impulsion de l’académie de Rouen, a débuté le projet
«
établissements du développement durable
». Un établissement du développement durable
est un établissement scolaire (lycée, CFA, collège, école élémentaire...) qui s’est engagé en
signant une charte dont le contenu rappelle les caractéristiques d’un agenda 21, à concevoir
et mettre en pratique des actions diversifiées
68
mais concrètes, favorisant ainsi l’adoption par
la pratique de comportements collectifs et individuels respectueux de l’environnement.
La démarche ne concerne pas seulement la région puisque la plupart des
collectivités gestionnaires s’y sont également engagées. La Haute-Normandie apparaît à la
pointe de cette démarche puisque 110 établissements sont engagés, dont 45 lycées
haut-normands et un centre de formation pour adultes, soit plus d’un tiers des lycées. Au
niveau national, en 2011, 3 000 établissements étaient engagés dans cette démarche, soit
5,5 % du nombre total d’écoles, collèges, lycées publics et privés. L’engagement donne lieu
à une labellisation, de niveau 1 pour les établissements ayant confirmé leur engagement, de
niveau 2 pour les établissements maitrisant la démarche et de niveau 3 pour les
établissements exemplaires. Fin 2013, la Haute-Normandie comptait plus de cent
établissements labellisés en niveau 1 ou en niveau 2, toutes catégories confondues, du
primaire au lycée.
C -
L’épanouissement de tous les êtres humains
Troisième finalité du développement durable, l’épanouissement de tous les êtres
humains donne lieu à une implication moins originale de la part de la région
Haute-Normandie. Selon le rapport annuel sur le développement durable, les actions
conduites par la région au titre de cette finalité visent à offrir à chaque Haut-Normand des
solutions de formation, d’insertion et d’évolution professionnelles adaptées, à permettre à
tous les Haut-Normands d’accéder à la création culturelle et au patrimoine régional, à
promouvoir la pratique du sport sur tout le territoire et enfin à faire de la culture et du sport un
facteur de cohésion sociale.
S’inscrivent dans cette finalité, plusieurs des compétences traditionnelles de la
région, telles que la formation professionnelle et l’éducation, la culture et le sport.
66
L’association CARDERE a reçu de la région en 2011, une subvention de 252 624 € pour son programme biennal de
développement des pratiques régionales d’éducation à l’environnement pour un développement durable et 134 747 € en 2012
pour un programme annuel d’animations.
67
CREA par exemple.
68
Ces actions peuvent toucher aux questions sociales, environnementales, économiques et citoyennes.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
33
La formation représente plus de la moitié du budget régional (26 % pour
l’enseignement et 24 % pour la formation professionnel), ainsi que l’a déjà souligné la
chambre
69
. Mais, sur ce point, la région ne se distingue pas des autres régions. Certains
résultats de cette politique sont modestes, étant précisé que la part de l’action régionale est
difficile à évaluer s’agissant de politiques impliquant un grand nombre d’acteurs. Ainsi, en
2011 et 2012, 10 % des sortants du système secondaire étaient sans qualification, alors
qu’ils n’étaient que 4,8 % en 2007 et 2008
70
. De même, le taux de bacheliers poursuivant
vers l’enseignement supérieur n’a pas réellement progressé depuis 2007. D’autres sont plus
encourageants, tel que le taux de réussite au baccalauréat qui ne cesse de progresser quel
que soit la catégorie (professionnel, général ou technologique).
La politique régionale de formation s’accompagne d’une démarche concertée
conduite avec les branches professionnelles, démarche qui permet de recenser et d’anticiper
les besoins de formation des branches. Cette négociation est conduite en collaboration avec
l’État. Dans le bâtiment, par exemple, la convention a permis de rappeler les objectifs du
plan climat énergies de 2007 ainsi que les engagements du Grenelle de l’environnement,
illustration d’une bonne articulation entre deux pans de l’action régionale.
Dans le domaine du sport, la politique régionale consiste avant tout à cofinancer
les équipements sportifs et à veiller à ce que le maillage territorial permette à tout un chacun
de pratiquer le sport de son choix. Même si cette orientation contribue aux finalités du
développement durable, elle n’a rien de particulièrement originale, et n’a pas encore réussi à
faire décoller la pratique sportive. Ainsi, le nombre de sportifs licenciés est passé de
366 753 en 2007 à 376 576 en 2013, même s’il est vrai que la pratique sportive dépend
d’une multitude d’autres facteurs dont la proximité avec des évènements sportifs à forte
audience.
Dans le domaine de la culture, outre une politique classique de soutien financier
des équipements culturels, la région a mis en place la carte région, dispositif qui permet aux
lycéens et aux apprentis d’acheter des livres et du matériel scolaire, et d’accéder aux
cinémas et autres loisirs. Selon le rapport 2011 sur le développement durable, 71 617 cartes
auraient été attribuées (81 107 en 2007) pour une dépense régionale de plus de 4,7 M€. Le
23 juin 2014, le conseil régional a reconduit le dispositif en le dotant d’un budget prévisionnel
de 6,1 M€ et a étendu son utilisation en vue de faciliter l’accès des jeunes aux soins.
Est en revanche, plus novatrice, la volonté de la région de faire de la culture et
du sport un facteur de cohésion sociale. Cette orientation conduit la région à demander aux
partenaires culturels de «
s’engager dans une action volontariste en faveur de la conquête
de nouveaux publics et du croisement des publics, notamment par le biais de rencontres et
d’ateliers de sensibilisation et d’action artistique, culturelle ou pédagogique.
» Cette exigence
ne dépasse cependant pas la négociation de la convention de financement et n’est pas
mesurée ex post. La région a néanmoins ouvert différents chantiers d’évaluation des
politiques culturelles subventionnées principalement dans le domaine du spectacle vivant,
qui devraient lui permettre de réaliser ces évaluations.
D -
La cohésion sociale et la solidarité
Quatrième finalité du développement durable, la cohésion sociale et la solidarité
sont
des
thèmes
plus
éloignés
des
compétences
régionales
traditionnelles.
En
Haute-Normandie,
l’action
régionale
s’appuie
sur
l’aménagement
du
territoire,
le
développement économique, la formation professionnelle des jeunes et des adultes
demandeurs d’emploi.
69
Rapport d’observations définitives sur la gestion de la région Haute-Normandie « situation et perspectives financière »,
chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie.
70
Source : suivi évaluation n°7 du SRADT.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
34
La politique d’aménagement du territoire repose principalement sur les contrats
de territoires conclus avec les structures intercommunales et dont les projets cofinancés sont
éco conditionnés. Pour la génération 2007-2013, la région a consacré 262 M€ au
cofinancement des 1 500 projets retenus sur un financement total de 2,4 Md€ (soit un ratio
de financement de 11 %).
Le but des contrats de pays et d’agglomération est d’engager une dynamique sur
chaque territoire en impliquant directement les acteurs locaux, en intégrant les dimensions
économiques, sociales, environnementales, foncières, éducatives, culturelles et sportives de
la vie locale dans un programme d’actions à long terme
71
. Le conseil régional a décidé, le
23 juin dernier, de poursuivre cette politique sur la période 2014-2020. Cette délibération
précise que le contenu des nouveaux contrats sera conforme aux schémas régionaux
(SRCAE) et au nouveau plan climat, et articulés avec les fonds européens et le CPER.
Cette politique de développement des territoires est complétée par le schéma de
cohérence régionale de l’aménagement numérique (SCORAN) adopté en juillet 2012, en
partenariat avec l’État et dont le but est d’offrir d’ici 15 ans un accès très haut débit, ainsi que
l’ont fait la plupart des régions françaises. En Haute-Normandie, elle a été complétée par un
plan «
très haut débit 276
», par lequel la région s’est engagée à financer les projets
d’ingénierie et de développement du très haut débit (30 % des études et 20 % des travaux).
Dans le cadre de la coopération 276 et du contrat de projets État – région,
celle-ci contribue chaque année à l’effort de modernisation de nouvelles structures d’accueil
pour personnes âgées et handicapées. Chaque opération donne lieu à l’élaboration en
partenariat avec les équipes et les familles, d’un projet d’établissement et d’un projet de vie
pour les résidents. Une attention particulière est portée aux clauses sociales et
environnementales, à la formation et à la qualification des personnels ainsi qu’au
développement de services de proximité.
C’est également au titre de la cohésion territoriale que la région incite les
collectivités à se doter d’un agenda 21, et anime le réseau des correspondants. La réunion
des correspondants, une fois l’an, permet de faire le point sur l’avancement des agendas 21
(280 communes concernées par l’adoption d’un agenda 21 communal ou supra communal,
soit 60 % de la population de la région
72
) et d’aborder un sujet particulier («
l’agriculture
périurbaine durable
» en 2011). Cette démarche a également conduit à développer
73
des
indicateurs territoriaux du développement durable (à l’échelle d’un EPCI ou d’un pays), ce
qui a sans aucun doute facilité les initiatives locales.
S’inscrit également dans cette finalité, les actions en faveur de l’économie
sociale et solidaire (ESS) qui permet à la région de financer les projets de création et
reprises d’entreprises du secteur de l’ESS. L’aide régionale porte parfois sur des montant
conséquents (ex : SCOP AMGE : subvention régionale pour la reprise d’une société par ses
salariés).
E -
Une exemplarité limitée et insuffisamment formalisée
La cinquième finalité du développement durable vise à mettre en place au sein
de la collectivité elle-même une dynamique de développement suivant des modes de
production et de consommation responsables.
71
Ibidem.
72
Source : indicateurs territoriaux du DD. Données 2011. À la même date, 54 % de la population française résidait dans une
commune concernée par un agenda 21.
73
Partenariat région, AREHN, INSEE et DREAL, déjà évoqué.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
35
1 -
La formation du personnel aux enjeux et techniques du développement
durable
Les actions de formation du personnel du conseil régional sont nombreuses et
répétées, et portent aussi bien sur la sensibilisation aux enjeux du développement durable
que sur les techniques de mise en oeuvre telle que l’application des critères d’éco
conditionnalité applicables dès qu’une aide financière régionale est sollicitée.
Il est cependant difficile de mesurer le niveau de connaissance et d’imprégnation
des agents aux enjeux du développement durable. La région n’a d’ailleurs pas été en
mesure d’apporter d’éléments sur ce point.
2 -
La maîtrise des consommations d’énergie
a -
L’entretien et la maintenance des services régionaux
La région souhaite optimiser la gestion de son siège
74
en agissant sur les
équipements du bâti et sur l’organisation du travail des services pour faire évoluer les
comportements et réduire ainsi les consommations d’énergie mais aussi les déchets. Elle a
donc procédé à différents travaux : changement de fenêtres, régulation du chauffage de la
rue couverte, raccordement au réseau de chaleur, suppression de la climatisation,
virtualisation des serveurs etc.
Mais, dès lors qu’il s’agit de mesurer l’impact de ces travaux sur la
consommation d’énergie des immeubles, la région se heurte à une absence d’outils fiables
de mesure.
La région a été en capacité de fournir des données relatives aux fluides
(chauffage, électricité, gaz et eau) sur la période 2008-2012, mais ces données sont
globales, elles portent sur l’ensemble des services hors établissements scolaires, soit
actuellement plus de 49 000 m², et ne sont pas comparables entre elles puisqu’elles
concernent des surfaces différentes en raison de l’évolution du patrimoine occupé.
Les consommations de chaleur du siège font toutefois exception puisque cet
ensemble immobilier est raccordé au réseau de chaleur du centre hospitalier de Rouen.
Entre 2008 et 2012, l’évolution des consommations de chaleur semble démontrer que les
travaux réalisés sur l’hôtel de région ont produit des effets puisqu’entre ces deux dates, le
nombre de kilowattheures a légèrement diminué (- 3,6 %) alors que la surface à chauffer est
passée de 10 054 m² à 13 455 m². Le ratio chauffage était donc de 105 kwh en 2008 et de
75 kwh en 2012
75
, soit une baisse de 28 %.
Mais, pour apprécier la performance énergétique globale de cet ensemble
immobilier, il convient d’y ajouter la consommation d’électricité, or elle est inconnue. On peut
cependant se faire une idée, certes, très imprécise, de ce qu’elle représente en divisant la
consommation globale par la surface occupée : 3 692 798 kwh en 2012 pour 49 279 m², soit
75 kwh/an/m², résultat qu’il faut ensuite multiplier par 2,58 pour obtenir l’énergie primaire
76
,
soit 193 kwh par an et m². Au final, l’hôtel de région présenterait un bilan énergétique
approximatif de 268 kwh en 2012. Le même raisonnement n’est malheureusement pas
transposable à 2008, le nombre précis de m² occupés n’étant pas connu avec précision.
L’évolution tendancielle des consommations électriques ne peut donc être appréciée.
74
L’hôtel de région est un ensemble immobilier constitué de trois bâtiments (bâtiment Schumann, bâtiment Gambetta et
bâtiment Fontenay), soit 13.455 m².
75
La rigueur des deux années est comparable : DJU moyenne 2008 : 234 ; DJU moyenne 2012 : 236. Source :
www.infoclimat.fr.
76
Coefficient de conversion qui permet de prendre en compte l’énergie nécessaire à la production et à l’acheminement de
l’électricité. L’électricité est la seule énergie qui est affectée d’un tel coefficient. Pour les autres l’énergie primaire est égale à
l’énergie finale.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
36
La région ne dispose donc pas des moyens de suivre l’évolution de ses
consommations de fluides et de mesurer complètement l’effet des travaux réalisés sur ces
consommations.
Dans le cadre de la récente réorganisation des services techniques, la région
indique qu’elle a créé un poste de chargé de gestion énergie
77
. De cette façon, elle devrait
s’orienter vers une approche plus professionnelle de la question.
b -
Le pôle régional des savoirs
Cette opération est présentée par la région comme emblématique de son
engagement en faveur d’une gestion optimisée des ressources financières couplée à une
approche durable de la gestion immobilière. L’aménagement de l’ancienne école normale
d’instituteurs pour y accueillir certaines associations financées par la région devait non
seulement permettre de regrouper des associations susceptibles de travailler ensemble, de
les installer dans des locaux plus fonctionnels, de les décharger des tâches de maintenance,
mais aussi de réaliser des économies d’énergie et de tester des équipements nouveaux
(solution énergétique mixte (géothermie et gaz + 216 m
2
de panneaux photovoltaïques),
voire novateurs (pose d’une membrane climatique couvrant la cour intérieure et pouvant
s’adapter à la luminosité ambiante en laissant filtrer plus ou moins de lumière selon
l’ensoleillement
78
).
Selon la région, le regroupement des associations lui a permis de réaliser une
économie globale de fonctionnement de 917 500 €. Cette somme correspond aux
économies réalisées par les associations (loyers et charges de fonctionnement), économies
qui viennent en déduction des subventions qu’elle leur verse. Le premier objectif est donc
atteint.
En revanche, s’agissant du fonctionnement énergétique du bâtiment, la région
affiche un bilan énergétique de 232 kwh par an et par m², soit une performance assez
modeste pour un immeuble rénové dans sa totalité. Même si l’objectif principal de cette
rénovation n’était pas de faire de cet immeuble un bâtiment à basse consommation
énergétique, il est néanmoins surprenant que la consommation d’énergie primaire, et par
ricochet, la durée d’amortissement des équipements, n’ait pas constitué une priorité du
projet. Dans ces conditions, l’opération ne saurait être présentée, sur le plan énergétique,
comme une opération vertueuse.
77
Fonction qu’elle contribue à financer dans le cadre de sa politique de soutien aux territoires… les cordonniers sont
décidemment les plus mal chaussés.
78
Assez développée en Allemagne pour couvrir des stades, cette innovation technique est peu utilisée en France. La région
Haute-Normandie fait donc office de pionnière en France.
Energie secondaire
ou finale
Energie primaire
Electricité
962 419
2 483 041
Gaz
449 625
449 625
Géothermie
104 220
104 220
Déduction production
phothovoltaïque
-13 103
-13 103
TOTAL
1 503 161
3 023 783
TOTAL par m²
pour 13 028 m² SHON
115
232
PÔLE RÉGIONAL DES SAVOIRS
Année 2013
Bilan énergétique en KWh
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
37
c -
L’optimisation des consommations énergétiques des lycées
À la différence de l’approche empirique retenue pour les services, l’optimisation
des
dépenses
énergétiques
des
lycées
est
plus
structurée.
Les
consommations
énergétiques de chaque établissement ont été diagnostiquées et le système de chauffage
est entretenu par un prestataire intéressé à sa performance
79
. Cette prestation donne lieu à
un rapport annuel, exploité par le bureau d’études assistant à maîtrise d’ouvrage de la
région. Les lycées sont également intéressés aux économies d’eau et d’électricité (50 %), ce
qui incite les chefs d’établissement à mettre en place des démarches de sensibilisation
incitant la communauté éducative à adopter des comportements vertueux. Selon la région,
de 2010 à 2012, 47 établissements ont bénéficié de cet intéressement.
2008
2009
2010
2011
2012
évo l / n-1
Eau (litres)
419 180
419 674
431399
420 473
nc
Electricité (KWH) énergie finale
42 511000
42 053 000
43 864 000
43 110 000
nc
Electricité (KWH) énergie primaire
109 678 000
108 497 000
113 169 000
111224 000
C o nso mmatio n d'énergie
po ur le chauffage (KWH )
2007-2008
2008-2009
2009-2010
2010-2011
2011-2012
évo l / n-1
Consommation de gaz
76 557 000
97 707 000
84 216 000
81314 000
78 379 000
2,4%
Consommation de fioul
1491000
1545 000
1757 000
1773 000
1414 000
-5,1%
Consommation de bois
2 374 000
2 737 000
2 798 000
3 458 000
3 367 000
41,8%
Consommation de chaleur (réseaux
de chaleur urbains)
8 976 000
9 844 000
9 461000
8 798 000
8 116 000
-9,6%
T o tal chauffage
89 398 000
111833 000
98 232 000
95 343 000
91276 000
2,1%
nb de m²
1438 286
1452 988
1447 075
1458 778
1460 216
ratio chauffage KWH au m²
62,16
76,97
67,88
65,36
62,51
T o tal chauffage et électricité
primaire
199 076
220 330
211401
206 567
nb de m²
1438 286
1452 988
1447 075
1458 778
1460 216
ratio (chauffage et électricité) KWH
au m²
138,41
151,64
146,09
141,60
Source : région HN
état de consommation des fluides
Sur la période 2008-2012, les consommations pour le chauffage des
établissements scolaires, exprimées en KWH / m², sont en très légère augmentation (les
hivers 2008 et 2012 présentent la même rigueur).
Le ratio chauffage et électricité primaire
évolue également légèrement à la hausse, de même que les consommations d’eau.
Globalement, sur la période considérée, les résultats ne sont pas probants. La région a
d’ailleurs indiqué qu’elle envisageait de revoir sa politique de fourniture de chaleur pour faire
baisser les prix.
3 -
Les déplacements et le transport
La question des déplacements du personnel est présentée par la région comme
étant une action majeure de son engagement en faveur du développement durable.
79
Le titulaire du marché s’engage sur une cible de consommation et est rémunéré en fonction des performances atteintes
(pénalisé en cas de dépassement, intéressé en cas d’économies).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
38
Comme évoqué au titre de la lutte contre le réchauffement climatique, la région a
adopté un plan de déplacement en fin d’année 2009, avec deux ans de retard sur l’objectif
mais ce retard s’explique par le choix de s’associer à la ville de Rouen, au CCAS de Rouen,
Rouen habitat et le CHU et de bâtir un plan de déplacement commun (dit inter-entreprises),
dans le but évident d’identifier les interactions et de rechercher des synergies. Cette mise en
commun s’est cependant limitée à la phase de diagnostic et à la signature d’une convention
relative à l’utilisation du site de covoiturage créé par le département de Seine-Maritime.
Le diagnostic du plan de déplacement faisait le constat que le personnel
travaillant à l’hôtel de région réside majoritairement, et en moyenne, entre 4 et 10 km, quel
que soit le mode de déplacement utilisé et que 62 % des agents de l’hôtel de région utilisent
la marche ou le vélo, 14 % les transports publics, 23 % un véhicule terrestre à moteur
80
dont
une petite partie en covoiturage
81
.
Schématiquement, le plan d’action vise d’une part à insuffler et pérenniser une
dynamique « plan de déplacement » de trois façons :
-
promouvoir et informer sur les modes alternatifs de déplacements : informer
sur les coûts réels et complets de l’usage de la voiture (coût, temps de trajet,
stationnement, accidentologie) ;
-
coordonner et manager le plan de déplacement : montrer l’exemple au plus
haut niveau, créer un pilotage inter structure, évaluer le plan de déplacement ;
-
communiquer à l’extérieur sur la démarche plan de déplacement ;
-
rechercher des partenariats, notamment pour mutualiser les actions.
Et d’autre part, à améliorer et rationnaliser les modes de déplacement :
-
modes motorisés : optimiser les capacités de stationnement, renouveler les
flottes de véhicules et former à l’éco conduite ;
-
transport en commun : aider financièrement les agents à souscrire un
abonnement et améliorer le cadencement des lignes ;
-
modes doux : améliorer le réseau des pistes cyclables, améliorer l’accueil des
cyclistes sur chaque site et développer les flottes de vélos ;
-
covoiturage : adhérer à la démarche lancée par le département 76 et inciter
les salariés au covoiturage professionnel ;
-
services : proposer une alternative au déjeuner à la maison et développer la
visioconférence.
Au total, le PDE est ambitieux : il contient quarante-trois actions. Il s’est
accompagné de plusieurs conventions dont la principale porte sur les tarifs négociés dans
les transports de l’agglomération de Rouen (CREA) pour les abonnements souscrits par les
agents de la région, et la compensation prise en charge par la région.
80
34 % des automobilistes résident à moins de 10 km de l’hôtel de région.
81
C’est entre 21 km et 30 km que le nombre de co-voitureurs est le plus important.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
39
Le suivi et l’évaluation de ces actions sont malaisés car aucun objectif clair et
engageant n’a été adopté et surtout les données de suivi sont parcellaires. Des quelques
données disponibles, il est néanmoins possible d’extraire les tendances suivantes :
-
le remboursement de la moitié des frais de déplacements domicile-travail en
transport en commun a connu un certain succès puisqu’entre 2008 et 2012, le
nombre d’agents en ayant bénéficié a plus que doublé (de 198 à 402). Ce
droit, institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, est
maintenant connu des salariés, d’autant qu’il est ici plus attractif qu’ailleurs
puisqu’il s’applique sur des tarifs négociés avec la CREA et son délégataire,
ce qui a pour effet de réduire le reste à charge payé par les salariés. La région
a également fait le choix d’appliquer ce dispositif à la location de bicyclettes
mises à disposition par les collectivités territoriales (Cy’clic, VELOR) ;
-
l’aide forfaitaire à l’achat de bicyclette a bénéficié à 106 agents et a été
complétée par la création d’une flotte de trente bicyclettes dont six à
assistance électrique, destinée aux déplacements professionnels ;
La gestion du parc automobile a également conduit la région à renouveler celui-ci
par des véhicules diesels dans le but de limiter le coût de fonctionnement, et à y introduire
deux véhicules électriques. Entre 2008 et 2012, le nombre de kilomètres parcourus a baissé.
Pour les véhicules de tourisme, il est passé de 488 050 km à 372 274 km entre 2008 et
2012, soit une baisse de 23 %. En y incluant les véhicules utilitaires, dont le nombre de
kilomètres est en hausse, la baisse pour l’ensemble est de 20 %. Cette diminution débute en
2010, elle est donc corrélée à la mise en oeuvre du plan de déplacement. La région a
également mis en place des formations à l’éco conduite et, en dépit de l’augmentation
significative de ses effectifs, a conservé les mêmes capacités de stationnement à disposition
de ses salariés. Aucune facilité d’accès aux aires de stationnement n’a cependant été
octroyée à la petite minorité de co-voitureurs (18 en 2013).
Ces données, très incomplètes, ne donnent qu’une vue partielle de la mise en
oeuvre de ce plan qui jusque-là, n’a fait l’objet d’aucun suivi centralisé. Cette lacune a
cependant été corrigée puisque le PACER 2015-2020 doit permettre à la région de relancer
le plan de déplacement et de mieux suivre ses effets.
4 -
Les déchets
Le tri sélectif des déchets de bureau a été mis en place et, depuis 2012, la région
est en capacité de mesurer le volume de déchets collecté à l’hôtel de région.
Pour les lycées, une étude visant à identifier les marges de progrès a été
conduite et des préconisations ont été adressées aux établissements. Cette action visait
principalement à réduire le montant de la redevance spéciale d’ordures ménagères. Devant
le peu d’efficacité de ces mesures, la région envisage de ne plus prendre en charge la
redevance spéciale payée par les établissements.
5 -
La politique d’achats
L’article 5-I du code des marchés publics impose la prise en compte d’objectifs
de développement durable lors de la détermination de la nature et de l’étendue des besoins
à satisfaire, avant tout appel public à concurrence ou toute négociation non précédée d’un
appel à la concurrence.
Après avoir créé un service achat centralisé, la région vient de se doter d’un
guide d’achat responsable dans lequel elle rappelle les exigences du code des marchés
publics et leur articulation avec les enjeux du développement durable. Cette démarche vient
conforter une politique d’achats durables conduite dans de nombreux domaines : fournitures,
denrées alimentaires, entretien des espaces verts, construction etc. Les critères
environnementaux et sociaux sont généralement pris en compte dès la formalisation des
besoins et la préparation des appels d’offres. De nombreux exemples permettent d’illustrer
ces pratiques tel que l’achat, depuis 2008, de papier fabriqué à base de fibres recyclées.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Basse-Normandie, Haute-Normandie sur la Région
Haute-Normandie – volet « développement durable »
40
* * *
Jusque-là, la région Haute-Normandie avait fait le choix de ne pas se doter d’un
projet territorial de développement durable (ou agenda 21) mais d’assumer ses compétences
en prenant largement en compte ces exigences, et d’adopter tous les outils que la loi lui
demande d’adopter, au risque d’une stratégie morcelée et peu autonome puisque réduite
aux outils coproduits avec ou sous l’influence de l’État.
Aujourd’hui, contrainte par la loi de se doter d’outils stratégiques et opérationnels
couvrant les deux premières finalités du développement durable
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, elle se trouve démunie
pour les deux autres finalités sur lesquelles elle a pourtant un rôle à jouer. Le SRADT ne
peut pas pallier cette lacune puisqu’il est dénué d’engagements clairs mais il peut
chapeauter le tout et donner de la cohérence et de la clarté à l’ensemble. Quant à la
cinquième finalité, elle pourrait faire l’objet d’un projet d’administration dont le contenu serait
la déclinaison logique des quatre autres en adaptant le fonctionnement de la collectivité à un
environnement financier contraint. Cette réflexion stratégique pourrait enfin être l’occasion de
prioriser ses actions afin d’éviter toute dispersion des moyens.
Mais, au-delà, il apparaît indispensable et urgent que sur les deux premières
finalités, la région assume pleinement son rôle de chef de file et mobilise rapidement les
acteurs concernés par le schéma régional du climat de l’air et de l’énergie et par le schéma
régional de cohérence écologique. Sans une gouvernance vigoureuse, qu’elle est seule à
pouvoir exercer, il est à craindre que les résultats soient une nouvelle fois éloignés des
objectifs.
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Schéma régional du climat de l’air et de l’énergie et plan climat pour la lutte contre le réchauffement climatique ; stratégie
régionale pour la biodiversité et schéma régional de cohérence écologique pour la préservation de la biodiversité des milieux et
des ressources.