Chambre régionale des comptes d'Aquitaine, Poitou - Charentes
3, Place des Grands-Hommes - CS 30059 - 33064 Bordeaux Cedex
2
ème
section
Jugement n° 2015-0015
Audience publique du 20 MAI 2015
Prononcé du 22 JUIN 2015
LYCEE
DE
L’IMAGE
ET
DU
S
ON
D’ANGOULÊME –
GRETA DE LA CHARENTE
(016 071 397)
Exercices : 2008 A 2011
République Française
Au nom du peuple français
La Chambre,
Vu le réquisitoire n° 2014-0041 en date du 11 septembre 2014, par lequel le Procureur financier a
saisi la Chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de
monsieur Jean-Christophe X..., comptable
du Lycée de l’image et du son d’Angoulême
et du
GRETA de la Charente, au ti
tre d’opérations relatives
aux exercices 2008 à 2011, notifié le
23 septembre 2014 au comptable concerné ;
Vu les comptes rendu
s en qualité de comptable du Lycée de l’image et du son d’Angoulême et du
GRETA de la Charente par M. Jean-Christophe X...
au titre des exercices 2006 à 2008 jusqu’au 3
septembre 2008 et par M. Hervé Y... au titre des exercices 2008 à 2011, à compter du 4
septembre 2008 jusqu’au 31 décembre 2011
, ensemble le compte annexe du GRETA de la
Charente ;
Vu le procès-verbal de remise de service de M. Jean-Christophe X..., comptable sortant de
fonction, entre les mains de M. Hervé Y..., comptable entrant, établi le 4 septembre 2008 ;
Vu
l’article 60 de la loi de finances n° 63
-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu
le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité
publique et le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et
comptable publique ;
Vu le décret n° 2008-228 du 5 mars 2008 relatif à la constatation et à l'apurement des débets des
comptables publics et assimilés ;
Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de
l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de l’art
icle 90 de la loi
n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 ;
Vu la nomenclature budgétaire et comptable M14 ;
Vu l’
Instruction n° 97-113-V1
du 13 novembre 1997 sur l’installation des comptables publics
non
centralisateurs, principaux et secondaires, formulation de réserves sur la gestion de leurs
prédécesseurs ;
Vu le rapport de M. Thierry MOUTARD, Premier conseiller, magistrat
chargé de l’instruction
;
Vu les conclusions du Procureur financier ;
2
Vu les pièces du dossier ;
Entendus
lors de l’audience publique du
20 mai 2015, M. Thierry MOUTARD, Premier conseiller
en son rapport et M. Benoît BOUTIN Procureur financier en ses conclusions ;
Entendu en délibéré M. Laurent ROULAUD, Premier conseiller réviseur, en ses observations ;
Sur la présomption de charge n° 1
, soulevée à l’encontre de
M.
Jean-Christophe X...
, au titre
de l’exercice 2008
:
Considérant que par le réquisitoire susvisé, le Procureur financier a saisi la Chambre régionale des
comptes d’
Aquitaine Poitou-Charentes, de la responsabilité encourue par M. Jean-Christophe X...
à raison
de l’absence de recouvrement d’une créance détenue par le L
ycée
de l’image et du son
d’Angoulême (LISA) à l’encontre du Centre national pour l’aménagement des structures des
exploitations agricoles (
CNASEA) devenu l’A
gence de service et de paiement (ASP) ;
Considérant que lors de la remise de service du 4 septembre 2008 susvisée entre M. Jean-
Christophe X... (comptable sortant de fonction) et M. Hervé Y... (comptable entrant), la situation du
compte
« 468614 Charges à payer CAE »
présentait un solde anormalement débiteur de 2 659,81
€
; que l’état de développement de ce solde indiquait qu’il s’agissait d’une
subvention accordée par
le CNASEA au LISA et non recouvrée ; que le successeur de M. X... a reclassé une partie de cette
recette à hauteur de 2 628,56
€
au compte
« 4684141 Produits à recevoir CAE »
; que le montant
à recouvrer s’élève donc finalement à ce montant
;
Considérant qu’en application de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée et des articles 11
à 13 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité
publique alors applicable, les comptables publics, responsables du recouvrement des recettes,
sont tenus d’
exercer des diligences adéquates, complètes et rapides en vue du recouvrement des
titres exécutoires qu’ils prennent en charge
;
qu’à défaut, ils engagent leur responsabilité
personnelle et pécuniaire ;
Considérant qu
’il est co
nstant que la créance litigieuse est née entre le 1
er
janvier et
le 3 septembre 2008, alors que M. X... était en fonction
; qu’en effet,
M. X... indiquait que le solde
du compte
« 468614 Charges à payer CAE »
était normalement créditeur au titre de l’exercice
2007
; que son successeur constatait l’existence de cette créance
au moment de son entrée en
fonction le 4 septembre 2008 et formulait des réserves à ce propos ;
Considérant qu’il est également constant que cette créance n’a pu être rapprochée d’aucun
contrat, ni d’aucun document permettant d’en attester l’origine
; qu’
il était ainsi impossible de
procéder au recouvrement de la somme auprès du débiteur ;
Considérant que faute d’identification possible de
la créance, son recouvrement doit être considéré
comme irrémédiablement compromis au moment de la remise de service du 4 septembre 2008,
même si la prescription de la créance est intervenue plus tard, au cours du premier semestre
2012 ;
qu’en effet, l’absence de recouvrement n’est ici pas liée à l’absence de diligences
complètes, rapides et adéquates avant l’arrivée de la prescription de la créance, mais à
l’impossibilité de telles diligences du fait de l’absence d’identification des créances à recouvrer a
u
moment de la prise en charge de celles-ci par M. X... ;
qu’il appartenait à celui
-ci de vérifier la
présence de ces éléments avant la clôture de sa gestion
; que ne l’ayant pas fait, il a manqué à
ses obligations telles qu’elles résultent des articles 11
à 13 du décret n° 62-1587 du 29 décembre
1962 susvisés ;
C
onsidérant qu’en application du paragraphe III de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée
et de
l’article 21 du décret n°
2008-228 du 5 mars 2008 susvisé
, la responsabilité d’un comptab
le
ne peut être mise en jeu à raison de la gestion de ses prédécesseurs que pour les opérations
prises en charge sans réserve lors de la remise de service
ou qui n’auraient pas été contestées
par le comptable entrant dans un délai de 6 mois
; qu’en outre, selon les termes de l’instruction
n° 97-113-V1 du 13 novembre 1997 susvisée,
« les réserves ne peuvent en aucun cas être
générales. Elles doivent être motivées et concerner des opérations précises (…)
» ;
qu’en
3
l’espèce, M.
Y... a émis des réserves sur la créance litigieuse rédigée comme suit :
« Compte
468614 solde créditeur 2 659,81
€
. Absence de liste détaillant solde (noms, date des contrats) de
sorte que l’apurement est compromis
»
; que ces réserves, étant suffisamment précises et
détaillées, excluent la prise en charge par M. Y... de la gestion de son prédécesseur dans la
présente situation ;
Considérant qu’il convient ainsi, en application de l’article
60 de la loi de finances du 23 février
1963 susvisée, de vérifier si le manquement de M. X... a ou non causé un préjudice financier à la
collectivité ;
qu’en l’espèce, l’absence d’encaissement de la créance litigieuse est bien constitutive
d’un préjudice puisque l’établissement doit constater qu’il n’a pas en caisse, ni en résultat cumulé
au bilan, la ressource correspondante ; que
l’apurement du compte
« 4684141 Produits à recevoir
CAE
» par
des sommes constitutives d’un trop perçu de l’ASP est sans incidence
, leur
encaissement étant sans lien démontré avec le paiement de la subvention du CNASEA ;
Considérant
que si, dans sa réponse faite en cours d’instruction, M.
X... invoque les difficultés
rencontrées à l’époque par le poste comptable dont le transfert était en cours, ces éléments
ne sont pas suffisants pour établir l’existence d’une circonstance constitutive de la force
majeure qui serait de nature à l’exonérer de s
a responsabilité ;
Considérant que le lien entre le manquement du comptable à ses obligations et la survenue
du préjudice est direct, puisque ce dernier résulte bien de l’inaction initiale en recouvrement
n’ayant pas permis d’identifier les créances en c
ause ;
Considérant
qu’il y a
, dès lors, lieu de constituer M. Jean-Christophe X..., débiteur du LISA
pour la somme de 2 628, 56 euros ;
Considérant qu’aux termes du paragraphe VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée,
« les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en
jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics »
; qu’en l’espèce la
date à retenir est celle du 23 septembre 2014, date de notification du réquisitoire ;
Considér
ant qu’aux termes du paragraphe IX de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée, aucune remise gracieuse totale ne peut être accordée à M. Jean-Christophe X... ;
q
u’une somme au moins égale à 3 pour mille du cautionnement du comptable, soit 411 eu
ros,
devra être laissée à sa charge en cas de remise partielle ;
Sur les présomptions de charge n° 2 et n° 3, soulevées
à l’encontre de M.
Jean-Christophe
X...
, au titre de l’exercice 2008
:
Considérant que par le réquisitoire susvisé, le Procureur financier a saisi la Chambre régionale des
comptes d’
Aquitaine Poitou-Charentes, de la responsabilité encourue par M. Jean-Christophe X...
à raison de l’absence de recouvrement d’une créance de 700
€
détenue par le
Groupement
d'établissements publics locaux d'enseignement (GRETA) de la Charente contre la société
DOMOFORM et matérialisée par un titre de recettes du 19 novembre 2007 ;
Considérant que par le même réquisitoire, le
Procureur financier a saisi la Chambre régionale des
comptes d’
Aquitaine Poitou-Charentes, de la responsabilité encourue par M. Jean-Christophe X...
à raison du paiement irrégulier par le GRETA de la Charente des mandats n° 278 du 6 juin 2008,
334 du 11 juillet 2008 et 392 et 403 des 21 juillet et 25 août 2008, relatifs à des heures
supplémentaires au bénéfice de M. Jean-Marie Z..., pour un montant total de 13 524,07
€
;
Considérant qu’il résulte des articles D. 423
-10 et D. 423-
11 du code de l’éducation que le GRETA
est géré sous forme de budget annexe d’un établissement suppor
t du groupement
; qu’au moment
des faits, le GRETA de la Charente avait le collège Pierre BODET pour établissement support ;
Considérant que Jean-Christophe X... était comptable du collège Pierre BODET et donc du
GRETA de la Charente entre le 1
er
janvier 2008 et le 3 septembre 2008 ; que par ordonnance
4
n° 2014-0126 du 8 octobre 2014, le président de la Chambre régionale des comptes
d’Aquitaine,
Poitou-Charentes, le déchargeait de cette gestion
; que l’ordonnance visait les comptes annexes
de l’éta
blissement ;
Considérant qu’un comptable ne peut voir engagé
e sa responsabilité personnelle et pécuniaire
pour un manquement survenu à une période pour laquelle il a obtenu décharge de sa gestion ;
Considérant ainsi
qu’il n’y a pas lieu à statuer sur la responsabilité de M.
X
....
Par ces motifs,
DÉCIDE :
En ce qui concerne M. Jean-Christophe X...
Article 1 : Au titre de
l’exercice 2008
(présomption de charge n° 1)
M. Jean-Christophe X... est constitué débiteur du L
ycée de l’image et du son d’Angoul
ême
pour la somme de 2 628,56
€
(deux mille six cent vingt-huit euros et cinquante-six centimes),
augmentée des intérêts de droit à compter du 23 septembre 2014.
Article 2 :
Au titre de l’exercice 2008
, (présomptions de charge n° 2 et n° 3)
Il n’y a pas lieu à statuer sur ces présomptions de charge.
Article 3 : La décharge de monsieur Jean-Christophe X... ne pourra êt
re donnée qu’après
apurement de la somme à acquitter, fixée ci-dessus
Délibéré le vingt mai deux mille quinze par M. Jean-Claude WATHELET, Président de section,
MM. Dominique FERRARI et Laurent ROULAUD, Premiers conseillers.
En présence de Mme Nathalie DOUBLET, greffière de séance.
Nathalie DOUBLET,
Greffière de séance
Jean-Claude WATHELET,
Président de séance
En conséquence, la République mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de
mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République
près les tribunaux de grande instance d’y
tenir la main, à tous commandants et officiers de la
force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-14 à R. 242-16 du code des juridictions financières, les
jugements prononcés par la chambre
régionale des comptes peuvent être frappés d’appel
devant la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, et ce selon
les modalités prévues aux articles R. 242-17 à R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé
de deux mois po
ur les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être
demandée après expiration des délais d’appel, et ce dans les conditions prévues à l’article R.
242-26 du même code.