COMMUNIQUE DE PRESSE
Le 23 octobre 2014
ENTITES ET POLITIQUES PUBLIQUES
LA GRANDE VITESSE FERROVIAIRE
Un modèle porté au-delà de sa pertinence
La Cour des comptes rend public un rapport thématique sur la grande vitesse ferroviaire.
Le succès technique et commercial du TGV est certain
, au moins jusqu’à
une date récente,
et les voyageurs qui l’empruntent apprécient sa rapidité
. Mais, au-delà de ce constat, il convient
d’évaluer son
apport réel pour la collectivité dans son ensemble.
Au terme de son enquête, la Cour considère que le choix de nouvelles lignes à grande vitesse
ferroviaire pour assurer le transport en commun des voyageurs sur grande distance doit être
entouré de plus de garanties de pertinence et de rentabilité.
Un choix systématique de la grande vitesse ferroviaire
Le développement du TGV s’est
opéré en substitution des trains à grande distance classiques
Intercités. La préférence française avérée pour la grande vitesse a abouti à un système peu cohérent,
où les rames de TGV desservent 230 destinations et passent 40 % de leur temps en moyenne sur les
lignes classiques, ce qui nécessite en outre un parc important de rames.
Sur certaines liaisons,
les principales conditions de pertinence d’u
ne ligne à grande vitesse (LGV) ne
sont pas remplies, à savoir : connexion de bassins de population importants, durée de trajet à grande
vitesse comprise entre 1h30 et 3h, peu ou pas d’arrêts intermédiaires, grande fréquence de circulation,
ta
ux d’occupation des rames élevé
et bonne articulation avec les autres modes de transports.
Le processus de décision qui conduit à créer de nouvelles lignes comporte en effet de nombreux biais
favorisant le choix de la grande vitesse : les schémas directeurs deviennent en pratique contraignants,
les hypothèses de trafic et la valorisation du temps gagné sont trop optimistes, des annonces
prématurées tiennent lieu de décision, les acteurs locaux poussent le projet mais
l’appel aux
collectivités territoriales pour le financement implique des contreparties coûteuses, le plan de
financement de la ligne intervient beaucoup trop tardivement. Enfin,
l’atout
environnemental du TGV en
exploitation, les effets sur les territoires et le développement économique des zones desservies doivent
être relativisés.
Il s’ensuit que
la rentabilité socio-économique des lignes à grande vitesse est systématiquement
surestimée.
Un modèle à bout de souffle, au coût devenu non soutenable
Depuis 2008, la fréquentation du TGV connaît une stagnation, qui se reflète dans celle du chiffre
d’affaires de l’activité TGV au sein de la SNCF
. De plus, la rentabilité des lignes diminue au fil de
nouveaux projets de plus en plus coûteux. En outre, l
a concurrence d’autres modes de transport
(autocar, covoiturage) se développe.
La SNCF est par ailleurs confrontée à l’augmentation de ses coûts
, en raison de
l’accroissement
des
péages (+8,5 % par an en moyenne sur la période 2007-2013) mais aussi de celui des coûts hors
péages (+6,2 % par an sur 2002-2009), y compris celui de la masse salariale.
Dans ce contexte, la marge opérationnelle de l’activité TGV s’est sensiblement dégradée, de 29
% du
chiffre d’affaires
en 2008 à 12 % en 2013.
De son côté, le haut
niveau d’endettement de Réseau F
erré de France (RFF)
l’empêche de financer de
nouvelles lignes par emprunt. Par ailleurs, l
a suspension de l’écotaxe, dont l’Agence de financement
des infrastructures de transport de France (Afitf) devait recevoir le produit, prive cette dernière de
ressources, alors qu’elle n’a déjà pas été en mesure d’honorer ses engagements budgétaires en 2013.
Le financement des projets de LGV
déjà décidés n’est donc pas assuré.
Recommandations
La Cour formule huit recommandations visant notamment à :
1.
mieux intégrer la grande vitesse aux choix de mobilité des Français, en insérant le TGV
dans une offre tirant parti de l’ensemble des moyens de transport et en levant les
restrictions à la concurrence des modes de transport longues distances routiers ;
2.
restreindre progressivement le nombre d
’arrêts sur les tronçons de LGV et de dessertes
des TGV sur voies classiques et extrémités de lignes, en ne conservant que celles
justifiées par un large bassin de population ;
3.
assurer la transparence des données de la SNCF, en particulier la fréquentation par ligne ;
4.
faire prévaloir l’évaluation socio
-économique des projets de LGV annoncés ;
5.
ne décider du lancement des études préliminaires qu’après :
-
la définition d’un plan d’affaires pour la ligne, associant le gestionnaire d’infrastructure et
le ou les opérateurs ferroviaires ;
- la prise en compte par une décision interministérielle formelle des perspectives de
financement du projet d’infrastructure et la répartition entre les acteurs (État, RFF,
éventuellement collectivités territoriales) ;
6.
veiller
au paiement par l’Afitf
de ses engagements financiers vis-à-vis de RFF et clarifier
rapidement la question des ressources de cette agence ;
7.
concentrer en priorité les moyens financiers sur l’entretien du réseau par rapport aux
projets de développement et
améliorer le pilotage de la prestation d’entretien du réseau
ferroviaire par le gestionnaire d’infrastructure ;
8.
veiller à ce que la définition des futurs ratios d’endettement du gestionnaire d’infrastructure
conduise effectivement à ne pas financer des projets non rentables.
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