R
APPORT PUBLIC THEMATIQUE
Paris, le 28 novembre 2013
L’accueil des enfants de moins de trois ans
:
une politique ambitieuse, des priorités à mieux cibler
La Cour et les chambres régionales des comptes consacrent un rapport à l
a politique d’accue
il des
enfants de moins de trois ans. Celle-ci poursuit trois objectifs : soutenir la natalité,
encourager l’emploi des
femmes et favoriser l’égalité
des chances
par le développement de l’enfant
. Elle contribue depuis plusieurs
années à maintenir dans notre pays un niveau de fécondité et un
taux d’activité professionnelle des femmes
supérieurs à la plupart
des pays de l’Union européenne.
Si
l’Etat en fixe les orientations générales, cette politique
publique est largement décentralisée. Son
financement est en grande partie assuré par la sécurité sociale,
mais sa mise œuvre relève principalement de
l’action
des trois niveaux de collectivités territoriales : région, département et bloc communal
–
bien que pour
celui-ci cette compétence demeure facultative. La p
résente enquête porte sur l’accueil des jeunes enfants en
crèche, auprès d’assistants maternels ou de salariés à domicile et à l’école préélémentaire.
1)
L’
offre de garde est très développée mais connaît
d’importantes disparités
territoriales et sociales
Au 1
er
janvier 2012, la France compte 2,4 millions d’enfants de moins de trois ans.
La part de ceux
bénéficiant d’une place d’accueil est passée de 47,7
% en 2006 à 52,2 % en 2011
, du fait d’une augmentation
notable de la capacité d’accueil (de 131
600 places).
Le coût global pour les finances publiques de cet accueil est estimé, en 2011, à 13,95
Md€
, répartis entre
la branche famille de la sécurité sociale (73 %), les collectivités territoriales (17 %)
et l’Etat
(10 %). Entre 2006
et 2011, ce coût a connu une hausse globale de 19,2 % (+ 2,25
Md€), principal
ement supportée par la
sécurité sociale (+ 1,75
Md€).
Pour les modes de garde extérieurs à la famille
n’impliquant pas l’arrêt ou la
réduction de l’activité professionnelle, l’augmentation des dépenses publiques s’élève à 28,2
%, alors que le
nombre de places agréées progresse de 11,7 %. Cette situation appelle une meilleure maîtrise des dépenses.
Malgré un effort financier soutenu et le
développement des capacités d’accueil,
de
fortes disparités territoriales subsistent et
l’accès des familles les plus modestes à un
mode de garde demeure difficile. Ainsi, fin
2011, la capacité d’accueil (exprimée en
nombre de places pour 100 enfants de
moins de trois ans
–
source CNAF) varie
dans un rapport de un à trois selon les
départements.
A ces disparités territoriales s’ajoutent
des disparités sociales : 64 % des ménages
les plus aisés font garder leur enfant, contre 8 % des familles les plus modestes. La Cour et les chambres
régionales des comptes observent que les dispositifs fiscaux sont globalement plus favorables aux ménages
les plus aisés, de même que le complément de libre choix du mode de garde, insuffisamment modulé.
2)
La coordination des acteurs est insuffisante
Le pilotage national de la politique de la petite enfance est, en pratique, partagé entre
l’Etat
et la sécurité
sociale. Le systè
me d’information de la branche famille de la s
écurité sociale comprend une cinquantaine
d’applications nationales, pour certaines anciennes
, et présente de nombreuses lacunes. Les indicateurs de
suivi ne permettent pas un pilotage précis et réactif et rendent
l’
évaluation difficile.
Au plan local, l’éclatement des compétences entre la CAF, le département et le niveau communal nuit à la
cohérence de cette politique. L’intercomm
unalité,
territoire pertinent pour l’évaluation des besoins et
qui
pourrait favoriser une rationalisation des équipements d’accueil de la petite enfance, est rarement dotée de
cette compétence.
Le pilotage est également rendu plus difficile par une connais
sance encore trop lacunaire de l’offre et des
besoins exprimés par les familles.
La
gestion des effectifs n’anticipe pas assez les évolutions futures
, et la progression des effectifs
diplômés ne tient
pas suffisamment compte de l’augmentation du nombre de places d’accueil ouvertes depuis
2006. Les gestionnaires d’établissements d’accueil collectif connaissent des difficultés croissantes de
recrutement
du personnel le plus qualifié, ce qui peut limiter la capacité d’accueil des structures.
3)
Des
pistes d’améli
oration existent
La Cour et les chambres régionales des comptes estiment souhaitable que les aides accordées et la
tarification tiennent mieux compte du niveau de ressources
des familles, d’une part, et
du coût du mode de
garde pour la collectivité
, d’aut
re part.
Le choix du type d’établissement, la détermination de sa capacité, de sa situation géographique, de son
organisation, ou encore son taux de fréquentation, constituent
d’autres
leviers
d’efficience
. Les crèches
familiales et les lieux dédiés à l’ac
cueil des enfants de deux ans, dont le coût de revient par place est
sensiblement
inférieur à celui d’un établissement classique
, devraient être mieux soutenus.
La mise en œuvre
de la prestation du service unique reste à optimiser : sa contribution aux objectifs de
mixité sociale dans les équipements n’est pas avérée et ses principes de tarification à l’heure ont pour effet
pervers de provoquer des écarts significatifs entre les heures facturées et les heures réalisées. Ces écarts, de
12,5 % en moyenne, sont en augmentation depuis 2006 et représentent une charge pour la branche famille,
qui finance ainsi des heures de fonctionnement durant lesquelles aucun service n’est effectué.
L’information des familles, notamment à travers le site
www.mon-enfant.fr, devrait être améliorée, tout
comme la transparence dans l’attribution des places en crèche et la gestion des listes d’attente.
L’importance
des listes d’attente
est
d’autant plus surprenante que les taux d’occupation réels des structures restent
souvent insuffisants : pour un établissement sur deux, ce taux est inférieur à 70 %, alors que
l’on estime que
huit établissements sur dix ont
une liste d’attente
.
Enfin, les besoins spécifiques des familles comme
l’accueil des enfants dont les parents ont des horaires
atypiques, l’accueil d’urgence et l’accueil des e
nfants en situation de handicap ne sont pas suffisamment bien
pris en compte.
La Cour formule 15 recommandations, parmi lesquelles :
cibler les dépenses sur les territoires prioritaires ;
déplafonner le barème national des participations familiales ;
faire évoluer les
aides accordées aux familles afin qu’elles tiennen
t mieux compte de leurs revenus
et du coût respectif des modes de garde ;
r
enforcer le pilotage de la convention d’objectifs et de gestion Etat
- CNAF ;
inciter les établissements publics de coopération intercommunale à se doter de la compétence
« petite enfance », en particulier dans les zones rurales ;
rationaliser la gestion des ressources humaines, en adaptant la formation et en engageant une
réflexion sur les exigences de qualification ;
développer des lieux d’accueil spécifiquement dédiés à l’accueil des enfants âgés de deux à trois
ans, ainsi que les crèches familiales ;
améliorer le site www.mon-enfant.fr et son opérationnalité vis-à-vis des familles ;
r
enforcer la transparence du processus d’attribution des places d’accueil
en formalisant les
procédures d’admis
sion et en les rendant publiques.
Lire le rapport
Contact presse :
Ted MARX - Directeur de la communication - Tél : 01 42 98 55 62 -
tmarx@ccomptes.fr
Denis GETTLIFFE - Responsable des relations presse - Tél : 01 42 98 55 77 -
dgettliffe@ccomptes.fr
Suivre la @Courdescomptes