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APPORT PUBLIC THEMATIQUE
Paris, le 25 novembre 2013
L’autonomie fiscale
en outre-mer
Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Saint-Barthélemy,
Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna
La Cour consacre un rapport à l’autonomie
fiscale de ces six territoires qui
nonobstant le statut
spécifique de la Nouvelle-Calédonie
ont en commun, pour
l’exercice
de nombreuses compétences, un
régime institutionnel de large autonomie. Cette particularité constitutionnelle les différencie des autres
collectivités de la République, y compris des départements et
régions d’outre
-mer.
Leur autonomie fiscale
s’étend de la création d’impôts
aux modalités de leur administration. Elle permet
aux six collectivités de fixer le niveau de leurs prélèvements fiscaux, dans le respect d
es règles d’équilibr
e
budgétaire et des obligations liées à l’exercice des
compétences étatiques qui leur ont été transférées.
1)
Une fiscalité et des contextes atypiques
Les taux des prélèvements obligatoires sont inégaux mais significatifs, tout en restant inférieurs de 10 à
15 points à celui constaté en métropole (45 % en 2012). Si les taux sont faibles à Saint-Martin et
Wallis-et-
Futuna, ils sont sensiblement plus élevés dans les quatre autres collectivités (30 % et plus), notamment en
Polynésie (36 %) et Nouvelle-Calédonie (31 %).
Cette fiscalité représente 80 % des recettes réelles de fonctionnement du budget des collectivités
concernées. Le complément provient de
l’Etat, sous forme de
dotations de droit commun, de participations
spécifiques et de mises à disposition gratuites de personnel. Celles-ci concernent notamment
l’éducation
en
Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française,
où cette compétence a été transférée, mais sans qu’aient été
encore transférés les personnels,
de sorte que l’Etat continue à financer directement
90 % de la compétence
Au total, les dotations budgétaires versées en 2011
par l’Etat
ont représenté une participation de 422
M€
au financement des six collectivités. Mais, au-delà de ces dotati
ons, l’effort global de l’Etat
est plus important :
en 2011, il représentait une contribution de 1,3
Md€
en Nouvelle-Calédonie, soit 18 % du PIB, et de 1,5 M
d€
en Polynésie française, soit 34 % du PIB. Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna mises à part, les quatre autres
collectivités ne financent ainsi
qu’entre 53
% et 65 % de leurs dépenses publiques.
Hormis Saint Barthélemy et la Nouvelle-Calédonie, les collectivités connaissent, à des degrés divers, une
situation financière dégradée. La maîtrise insuffisante des charges de personnel
ainsi qu’une
trop grande
sensibilité des recettes fiscales aux aléas de la conjoncture en sont généralement
à l’origine.
Le poids des
charges de personnel a entraîné une forte croissance des dépenses de fonctionnement, particulièrement en
Polynésie française.
2)
Une fiscalité insuffisamment adaptée aux besoins des territoires
Les impôts indirects représentent, en moyenne pondérée, plus de la moitié des impositions.
S’il n’y a
quasiment pas d’imposition directe à Saint
-Barthélemy (
en raison d’une exonération d’impôt sur le revenu
après cinq années de résidence) et à Wallis-et-Futuna, la fiscalité indirecte atteint 60 % en Polynésie et
connaît un niveau plus équilibré en Nouvelle-Calédonie (52 %) et à Saint Pierre-et-Miquelon (55 %). Tous ces
territoires ont conservé des droits de douane importants.
Dans les collectivités où elle existe, l’
imposition des revenus des particuliers est très inégale, de même
que l’imposi
tion sur les sociétés. La patente et les droits de licence existent partout. L
’imposition du
patrimoine est généralement faible, en raison notamment des nombreuses exonérations instaurées, et les
plus-values échappent largement à la taxation.
De manière générale, l
’articulation entre les d
iffé
rentes fonctions de l’impôt est insuffisante
. Le rendement
fiscal notamment
, fonction première de l’impôt
, est réduit par de nombreuses dépenses fiscales décidées
pour soutenir le développement économique. En Polynésie française, le dispositif local de défiscalisation a
réduit
les produits de l’impôt sur les bénéfices d’un tiers
entre 2007 et 2011. En Nouvelle-Calédonie, des
mesures analogues ont diminué de 25
% le rendement de l’impôt sur le revenu
des personnes physiques. La
fiscalité est peu mobilisée à des fins de redistribution et les nombreuses exonérations nuisent à la
progressivité de l’impôt
. Hormis à Saint-Pierre-et-Miquelon, la place des impôts progressifs est très réduite :
seulement 11 % de la fiscalité totale en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
Enfin, la fiscalité locale est peu développée dans ces territoires et répond mal, particulièrement en
Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, aux besoins de financement des communes et
intercommuna
lités, notamment en matière d’investissement.
3)
Les voies d’une fiscalité plus performante
L’alourdissement de la fiscalité
ne suffira pas à faire face aux tensions budgétaires croissantes que ces
collectivités connaissent, à
l’exception de Sai
nt-Barthélemy et de la Nouvelle-Calédonie. Une meilleure
maîtrise de la dépense publique apparaît également nécessaire, parallèlement à une sollicitation fiscale plus
performante.
Quel que soit leur
mode d’organisation, l’insuffisance des moyens d’administration
et de recouvrement de
l’impôt
est souvent
pénalisante, du fait d’une
évaluation déficiente des bases taxables, ou de cadastres et de
fichiers immobiliers non actualisés. La complexité des règles ne favorise pas le civisme fiscal. Les obligations
déclaratives, peu contrôlées, sont aussi peu respectées. Le rendement des contrôles fiscal et douanier pâtit
également de la relative faiblesse des moyens qui leur sont consacrés.
En fonction des situations économiques locales, les systèmes fiscaux doivent évoluer pour devenir plus
efficaces, moins dépendants des cycles économiques et plus équitables, en tenant compte du niveau de
prélèvements obligatoires déjà atteint et des dépenses publiques à financer. La Polynésie française et la
Nouvelle-Calédonie, qui ont la charge des systèmes de protection sociale, sont particulièrement concernées
par ce double impératif.
De manière générale, trois orientations sont suggérées aux autorités des six collectivités :
assurer une part plus significative des impôts directs dans les prélèvements obligatoires ;
recourir d’avantage à l’imposition du patrimoine, en particulier foncier, afin de réduire la sensibilité
des recettes fiscales à la conjoncture économique ;
accroître la part des impôts progressifs dans les prélèvements.
En outre, la Cour et les chambres territoriales des comptes formulent six recommandations portant sur
l’assiette et le recouvrement de l’impôt, les dispositifs fiscaux et les statistiques économiques et fiscales.
Lire le rapport
Contact presse :
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