C
OUR DES
C
OMPTES
Les finances publiques locales
g
Avertissement
Synthèse
du
Rapport public thématique
C
ette synthèse est destinée à faciliter la lecture et
l’utilisation du rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations, des collectivités et
des organismes concernés figurent à la suite du
rapport.
octobre 2013
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
L’évolution d’ensemble des finances des collectivités
locales .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
2
L’évolution des finances locales par catégorie
de collectivités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .15
3
La qualité et la fiabilité de l’information financière
locale
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .23
4
Les premiers effets de la réforme de la fiscalité locale
pour les finances des collectivités locales
. . . . . . . . .29
5
Les dépenses de personnel des collectivités locales
.33
6
L’accès au crédit des collectivités locales
. . . . . . . . .39
Conclusion
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .43
Orientations et recommandations
. . . . . . . . . . . . . . . . . .47
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
3
3
Sommaire
La Cour présente pour la première fois un rapport public consacré aux finances locales, comme
elle le fait chaque année pour l’État et pour la sécurité sociale ainsi que pour les finances publiques
prises dans leur ensemble.
Une telle publication se justifie pleinement : la dépense des administrations publiques locales
représente plus de 20 % des dépenses des administrations publiques, la dette locale contribue à près
de 10 % de la dette publique française, les collectivités territoriales réalisent plus de 70 % de l’in-
vestissement public et les transferts financiers sous toutes formes de l’État aux collectivités territo-
riales atteignent 100 Md€.
L’appréciation des finances des administrations publiques locales participe du diagnostic de la
situation d’ensemble des finances publiques. Le respect des engagements européens de la France les
concerne au même titre que l’État et la sécurité sociale. Le présent rapport s’inscrit ainsi dans la
perspective de la nécessaire participation des collectivités territoriales au retour à l’équilibre des
comptes publics.
Cette question renvoie à celle de leur gouvernance. Il n’existe aucune disposition législative per-
mettant de fixer des objectifs d’évolution des dépenses opposables aux collectivités prises individuel-
lement ou dans leur ensemble. Le dispositif permettant d’associer les collectivités territoriales à la
définition de leur contribution au redressement des finances publiques reste à construire.
Le présent rapport croise une approche globale à partir de données nationales agrégées et une
approche locale à partir des examens de la gestion réalisés par les chambres régionales des comptes.
Pour ce faire, la Cour et les chambres régionales des comptes ont constitué une formation commune.
Ce rapport résulte ainsi de travaux effectués sur la base d’enquêtes conduites auprès des adminis-
trations centrales et d’échanges avec les quatre grandes associations d’élus locaux. Cette publication
repose également sur les renvois de rapports d’observations rendus par les chambres régionales des
comptes. Ces renvois ont concerné 118 collectivités.
Le présent rapport comporte six chapitres. Les trois premiers relèvent d’une approche transver-
sale, le premier présente une appréciation d’ensemble des équilibres macro-économiques des finances
locales. Le deuxième examine les équilibres financiers au sein de chacune des catégories de collecti-
vités. Le troisième traite de la qualité et de la fiabilité de l’information financière locale.
Les trois chapitres suivants relèvent d’une approche thématique. Le quatrième présente les pre-
mières conséquences de la réforme de la fiscalité locale. Le cinquième analyse les déterminants de la
dépense de personnel. Le sixième est consacré à l’accès aux financements bancaires et
obligataires.
g
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
5
5
Introduction
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
1
L’évolution d’ensemble
des finances des
collectivités locales
7
Les finances locales
en 2012
L’analyse selon la
comptabilité nationale
En leur qualité d’administrations
publiques locales (APUL), les collectivi-
tés territoriales et les établissements
publics de coopération intercommunale
contribuent au solde global des adminis-
trations publiques et à l’endettement
public de la France.
Les dépenses des collectivités terri-
toriales et de leurs groupements repré-
sentent plus de 90 % de celles des
APUL. En 2012, le déficit des adminis-
trations publiques locales (3,1 Md€) a
doublé mais il reste peu élevé. Il repré-
sente 1,3 % des dépenses du secteur,
3 % de l’ensemble des déficits publics et
0,15 point de produit intérieur brut
(PIB). La dégradation du solde des
administrations publiques locales est
imputable à une progression des
dépenses (+ 7,2 Md€, soit + 3 %) supé-
rieure à celle des recettes (+ 5,6 Md€,
soit + 2,4 %).
La
dette
des
administrations
publiques locales atteint 173,7 Md€ à la
fin de 2012, en augmentation de
7,1 Md€ par rapport à 2011. Progressant
de 4,2 % en 2012, elle représente 9,5 %
de l’ensemble de l’endettement public et
8,5 points de PIB (contre 71 points de
PIB pour l’État et 10,3 points de PIB
pour la sécurité sociale).
La loi du 31 décembre 2012 de pro-
grammation des finances publiques
pour les années 2012 à 2017 fixe des
objectifs généraux pour les finances
publiques et définit une trajectoire
d’évolution des dépenses et des recettes
des différents sous-secteurs d’adminis-
tration publique. Le déficit des adminis-
trations publiques locales en 2012
(- 0,15 point de PIB) est conforme à ce
qui était envisagé par la loi de program-
mation. Toutefois, les tendances respec-
tives de l’évolution des recettes et des
dépenses des APUL rendent incertaine
la perspective d’un strict équilibre en
2015 et celle d’un excédent en 2016 et
en 2017.
8
L’évolution d’ensemble des
finances des
collectivités locales
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’analyse à partir de la
comptabilité publique
Les finances locales peuvent égale-
ment être appréciées à partir des
comptes des collectivités territoriales et
de leurs groupements à fiscalité propre
dont les balances comptables des seuls
budgets principaux sont agrégées au
plan national par la direction générale
des finances publiques (DGFiP). Plus
étroit que le champ des APUL, ce péri-
mètre permet de rendre compte, de
façon plus spécifique, de l’évolution des
finances des collectivités locales et de
leurs groupements.
Au niveau du « bloc communal »,
l’analyse conduite sur les budgets princi-
paux des collectivités se heurte à
l’absence de fiabilité des données comp-
tables afférentes aux flux croisés qui
permettrait l’agrégation des opérations
entre les communes et les groupements
à fiscalité propre. Elle s’effectue en
conséquence sur la base de données
comprenant
des
doubles
comptes
n’ayant pu être éliminés.
En 2012, les recettes totales hors
emprunts des collectivités territoriales et
de leurs groupements se sont élevées à
208 Md€ pour un montant de dépenses
totales hors remboursement d’emprunt
de 210 Md€, en hausse de 2,8 % par rap-
port à 2011. L’effort d’équipement
(52,6 Md€) a été globalement maintenu.
Il est principalement porté par le secteur
communal.
9
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution d’ensemble des
finances des
collectivités locales
Avec une progression de 3,2 %, les
charges de fonctionnement (157,7 Md€)
ont augmenté plus rapidement que
les
produits
de
fonctionnement
(188,2 Md€) dont l’augmentation est
restée limitée à 1,7 %. En conséquence,
l’épargne brute (30,5 Md€) a reculé de
5 %.
La faible progression des produits
de fonctionnement résulte notamment
de la stabilisation en valeur des dota-
tions
et
participations
de
l’État
(60,8 Md€) et de la progression modérée
(+
2,5
%)
des
recettes
fiscales
(112,9 Md€). Au sein de celles-ci, la fis-
calité directe (72,2 Md€) a cependant
progressé de 4 % tandis que la fiscalité
indirecte (41,1 Md€) est restée atone
(- 0,1 %).
L’augmentation des charges de
fonctionnement résulte notamment de
la croissance des dépenses de personnel
(+ 3,3 %) dont le montant (54,8 Md€)
représente 35 % du total. Après une
hausse de 2,4 % en 2011, cette progres-
sion manifeste les difficultés de maîtrise
de la masse salariale. Les dépenses
sociales des départements (28,2 Md€)
ont progressé de 5,6 %. Les achats de
biens et de services (30 Md€) ont cru,
pour leur part, de 2,8 %. Les charges
financières (4,5 Md€) ont augmenté de
5 %.
Au 31 décembre 2012, l’encours de
la dette (mesurée sur un périmètre plus
étroit que celui de la comptabilité natio-
nale) s’élevait à 132,9 Md€, en progres-
sion de 4 % par rapport à 2011.
Toutefois, de façon globale, la capacité
de désendettement de l’ensemble des
collectivités et groupements, mesurée
par le rapport entre l’encours de la dette
et l’épargne brute, demeure satisfaisante
(4 années).
Les perspectives
d’ensemble des
finances locales
Les perspectives pour
2013
Dans le cadre de l’effort de maîtrise
des dépenses, un certain nombre de
dotations de l’État, constitutives de
« l’enveloppe normée » des concours
financiers et d’un montant global de
50,5 Md€, ont été gelées en valeur
depuis 2011. Le gel de ces dotations, qui
représentent un quart des ressources des
collectivités locales (hors emprunt), a
été reconduit en 2013.
En ce qui concerne la fiscalité, les
taxes « ménages » devraient principale-
ment continuer à évoluer en 2013 sous
l’effet de l’augmentation des bases avec
stabilisation des taux. S’agissant de la fis-
calité économique, les notifications de
cotisation sur la valeur ajoutée des entre-
prises (CVAE) transmises aux collectivi-
tés au mois de mars 2013 (16,3 Md€)
traduisent une augmentation inattendue
par son ampleur du produit distribué en
2013
(+ 7,5
%).
Cette
évolution
moyenne masque de fortes variations
selon les collectivités. S’agissant de la fis-
10
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution d’ensemble des
finances des
collectivités locales
calité indirecte, l’évolution du marché
immobilier demeure incertaine en 2013.
Différents facteurs ne laissent pas
augurer un ralentissement spontané de
la dépense des collectivités. Si les effec-
tifs des collectivités tendent à se stabili-
ser, les instruments de la maîtrise de la
masse salariale ne sont pas généralisés et
les bénéfices attendus des mutualisa-
tions de services ne sont pas encore per-
ceptibles.
L’évolution des dépenses d’inter-
vention des collectivités territoriales
dépend pour l’essentiel de celles des
départements dont la hausse représente
72 % de l’augmentation totale observée
en 2012. Compte tenu de l’augmenta-
tion des dépenses au titre du revenu de
solidarité active (RSA) et de la poursuite
de la montée en charge de la prestation
de compensation du handicap (PCH), le
rythme de croissance des dépenses d’in-
tervention des collectivités locales ne
devrait pas connaître un ralentissement
significatif en 2013.
La maîtrise des dépenses de person-
nel et la mutualisation des services
constituent des sources majeures d’éco-
nomies. D’autres pistes existent. La
rationalisation du patrimoine immobilier
et les dépenses d’entretien (qui repré-
sentent un enjeu de 3 Md€) sont des
sources d’économies potentielles. Il en
va de même d’une politique d’achat plus
efficiente en ce qui concerne les charges
de gestion courante (29,7 Md€ en 2012).
Une meilleure coordination et une ratio-
nalisation des interventions écono-
miques des différents niveaux de collec-
tivités (5 Md€ en 2012) pourraient
réduire les dépenses les moins utiles tout
en renforçant les actions les plus struc-
turantes.
Porté essentiellement par le secteur
communal, en raison du repli de l’inves-
tissement des départements et de la
stagnation de celui des régions, l’effort
d’équipement des collectivités devrait se
poursuivre avec l’achèvement des opéra-
tions liées au cycle électoral des com-
munes.
Les perspectives au-delà
de 2013 en ce qui
concerne les recettes
En février 2013, le Gouvernement
avait annoncé la réduction des dotations
de l’État de 1,5 Md€ en 2014 et de
1,5 Md€ supplémentaires en 2015. Les
modalités d’application de la baisse des
dotations ont fait l’objet d’un groupe de
travail au sein du Comité des finances
locales qui a formulé des propositions.
Ces propositions ont été reprises par le
Premier ministre, le 16 juillet 2013, à
l’issue d’une conférence sur les finances
locales. Le projet de loi de finances pour
2014 en assure la mise en œuvre.
La baisse des dotations, sera répartie
au
prorata
des ressources totales des dif-
férents niveaux de collectivités territo-
riales. Elle sera en 2014 de 840 M€ pour
le bloc communal, 476 M€ pour les
départements et 184 M€ pour les
régions. Au sein du bloc communal, la
11
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
répartition entre groupements et com-
munes s’effectuera au
prorata
des
recettes réelles de fonctionnement ce
qui fera supporter 70 % de la baisse aux
communes et 30 % aux intercommuna-
lités. Aucune des modalités ainsi envisa-
gées ne prend véritablement en compte
les marges de manœuvre financières
dont dispose chacune des catégories de
collectivités.
Les départements ont demandé l’oc-
troi de ressources nouvelles pour finan-
cer la part non compensée des trois
allocations universelles de solidarité,
laquelle tend à croître fortement. Le
Premier ministre a annoncé qu’un fonds
de compensation de 830 M€ sera mis en
place, à compter de 2014, au bénéfice
des départements par transfert de frais
de gestion de taxes locales aujourd’hui
perçus par l’État. Par ailleurs, les dépar-
tements seront autorisés, pour une
durée de deux ans (2014 et 2015) à rele-
ver le plafond de perception des droits
de mutation à titre onéreux à hauteur de
4,5 % au lieu de 3,8 % aujourd’hui, soit
une hausse potentielle de près de 20 %
des droits de mutation. Ce relèvement
est susceptible d’apporter des ressources
d’environ 1,2 Md€ aux départements. Le
projet de loi de finances pour 2014 pré-
voit la mise en œuvre de ces mesures.
En ce qui concerne les régions, le
Premier ministre a annoncé, le 16 juillet
2013, le renforcement de l’autonomie
financière des régions avec l’attribution
de ressources plus dynamiques, dans le
cadre de la réforme du financement de
l’apprentissage. Des dotations budgé-
taires aux régions seront remplacées par
de la fiscalité transférée. Le projet de loi
de finances pour 2014 prévoit un trans-
fert de ressources fiscales à hauteur de
901 M€ en remplacement d’une partie
de la dotation générale de décentralisa-
tion
formation
professionnelle
(DGDFP).
Les nouvelles ressources fiscales
accordées aux départements et aux
régions auront pour effet d’atténuer la
portée de la baisse des concours finan-
ciers prévue dans le programme de sta-
bilité de la France. Elles correspondent à
un transfert de l’effort d’ajustement
budgétaire sur le contribuable (national
ou local) par l’intermédiaire d’un prélè-
vement accru sur les recettes fiscales de
l’État et de la création d’impositions
locales nouvelles.
Les perspectives au-delà
de 2013 en ce qui
concerne les dépenses
La croissance de certaines charges
des collectivités locales résulte pour par-
tie de décisions prises par l’État. Au
regard de l’objectif de maîtrise des
dépenses locales, celui-ci devrait faire en
sorte de réduire l’impact de ses décisions
sur l’équilibre financier des collectivités.
L’État pourrait ainsi contribuer à
faciliter la maîtrise des dépenses des col-
lectivités territoriales en étant plus atten-
tif à la question du coût des normes
qu’il édicte et à celle des conditions de
leur application. Une réduction signifi-
cative du stock en vigueur et une dimi-
L’évolution d’ensemble des
finances des
collectivités locales
12
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
nution du flux des normes nouvelles
contribueraient au ralentissement de la
croissance des dépenses locales. L’État
pourrait
également
encourager
la
recherche d’une meilleure efficience de
l’investissement local en favorisant le
recentrage des dépenses sur les actions
prioritaires.
Au-delà de ces mesures, le freinage
de l’évolution des dépenses locales,
notamment salariales, est nécessaire.
Un dispositif de
gouvernance insuffisant
Les moyens de gouvernance globale
des finances publiques locales qui per-
mettraient d’avoir des instruments com-
parables à ceux existant pour l’Etat et la
sécurité sociale sont limités ou indirects.
La loi organique du 17 décembre 2012
relative à la programmation et à la gou-
vernance des finances publiques ne crée
pas de véritable encadrement pour les
finances locales. Elle indique simple-
ment que la loi de programmation peut
comporter des règles ayant pour objet
d’encadrer les recettes, les dépenses et le
solde ou le recours à l’endettement de
tout ou partie des administrations
publiques. Ces règles n’existent que très
partiellement aujourd’hui.
Jusqu’à présent, les lois de program-
mation définissent, en ce qui concerne
les APUL, des objectifs de solde sur la
base d’une trajectoire de recettes et de
dépenses, dans un exercice qui est prin-
cipalement de prévision, faute de pou-
voir s’appuyer sur des outils de prescrip-
tion. Néanmoins, elles fixent un cadre à
l’évolution de l’enveloppe des concours
financiers de l’État.
Le rapport annexe à la loi de pro-
grammation pour 2012-2017 prévoit qu’
« un pacte de confiance et de solidarité
sera négocié avec les collectivités territo-
riales afin notamment de déterminer les
modalités, à partir de 2014, de participa-
tion des collectivités territoriales à l’ef-
fort de redressement ». Un tel pacte est
très utile, la France étant amenée à pren-
dre des engagements pour l’ensemble
des administrations publiques, dont il
est essentiel que l’État soit en mesure de
garantir l’effectivité, y compris donc leur
respect par les collectivités territoriales.
La gouvernance globale des finances
locales mériterait d’être renforcée. Les
dispositions de la loi organique permet-
tent d’envisager de poser dans la loi des
règles plus contraignantes en matière
d’évolution attendue des recettes et des
dépenses du secteur public local. Une
instance nationale pourrait être le cadre
permanent d’association des collectivi-
tés territoriales aux mesures de redresse-
ment qui se traduiraient par des engage-
ments fermes et réciproques de l’Etat et
des collectivités territoriales. Le « Haut
conseil des territoires », dont la création
est prévue par la loi de modernisation
de l’action publique territoriale et d’af-
firmation des métropoles, pourrait
remplir ce rôle.
L’évolution d’ensemble des
finances des
collectivités locales
13
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution d’ensemble des
finances des
collectivités locales
Eléments de
comparaisons
internationales :
Allemagne, Italie,
Royaume-Uni
Au-delà des différences d’organisa-
tion, la question de la maîtrise des
dépenses publiques conduit ces pays à
mettre en place un cadre à l’intérieur
duquel se déploient les relations finan-
cières entre l’État et les collectivités ter-
ritoriales. Ce cadre favorise une gouver-
nance
d’ensemble
des
finances
publiques en y intégrant systématique-
ment les finances des administrations
publiques locales, et pose des limites
contraignantes à l’exercice par les collec-
tivités de leur « autonomie fiscale ».
Un pouvoir fiscal et un
recours à l’emprunt
encadrés
En Italie et en Allemagne, l’État,
central ou fédéral, conserve un pouvoir
fiscal prépondérant. Au Royaume-Uni,
l’autonomie fiscale des Gouvernements
régionaux et des collectivités locales est
très faible. Au Royaume-Uni, comme en
Italie, le recours à l’emprunt des collec-
tivités territoriales pour financer leurs
investissements est soumis à des dispo-
sitions législatives contraignantes.
Des budgets locaux sous
surveillance
Au Royaume-Uni, l’attribution des
dotations d’État est suivie au moyen
d’outils de pilotage, préalablement
négociés entre le directeur du Trésor et
les
secrétaires
d’État
des
Gouvernements régionaux. Des pla-
fonds de dépenses sont fixés pour trois
ans. En Allemagne, la loi fondamentale
affirme le principe d’une responsabilité
conjointe face aux engagements euro-
péens en matière budgétaire, et instaure
par ailleurs, entre l’État fédéral et les
Länder, une clé de répartition d’éven-
tuelles sanctions imposées par l’Union
européenne. La responsabilité conjointe
de l’État italien et de ses collectivités ter-
ritoriales a été inscrite dans la constitu-
tion après la ratification du traité sur la
stabilité, la coordination et la gouver-
nance au sein de l’Union économique et
monétaire (TSCG). Cependant ce prin-
cipe avait été affirmé, dès 1998, par la loi
créant un pacte de stabilité interne
auquel sont soumises toutes les collecti-
vités.
Une consolidation compta-
ble pour le seul Royaume-
Uni
Au Royaume-Uni, la direction du
Trésor effectue une consolidation des
comptes préalablement certifiés d’envi-
ron 1500 entités considérées comme
publiques dont de très nombreuses col-
lectivités territoriales.
15
2
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
Les finances des
communes et des
intercommunalités
Compte tenu des limites actuelles du
dispositif de centralisation des comptes
locaux, une présentation agrégée de
l’évolution de l’ensemble constitué par
les communes et les établissements
publics de coopération intercommunale
n’est pas possible. Cette carence est
regrettable dans la mesure où seule une
telle présentation permettrait d’en ren-
dre compte de façon pleinement cohé-
rente eu égard aux interpénétrations
entre les deux niveaux.
Les finances communales
En 2012, les charges de fonctionne-
ment des communes ont progressé plus
rapidement que les recettes correspon-
dantes, entraînant un léger recul de
l’épargne brute. L’effort d’équipement,
qui a été soutenu, a été financé par un
recours accru à l’emprunt. La capacité
moyenne de désendettement des com-
munes, bien qu’en légère dégradation
par rapport à 2011 demeure cependant
globalement satisfaisante.
Cour des comptes
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Source : Cour des comptes - données DGFiP
En M€
2010
2011
2012
2012/2011
Produits réels de fonctionnement
74,16
76,61
77,88
1,7 %
Charges réelles de fonctionnement
62,42
63,82
65,30
2,3 %
Epargne brute
11,74
12,79
12,58
- 1,6 %
Recettes réelles d’investissement
(hors emprunts)
10,92
10,88
10,99
1,0 %
Dépenses réelles d’investissements
(hors emprunts)
21,70
22,95
23,68
3,2 %
Encours de la dette
59,35
60,04
61,50
2,4 %
Ratio de désendettement
4,95
4,60
4,80
L’évolution des finances communales 2010-2012
16
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
Pour 2013, les communes sont
confrontées à une incertitude sur l’évo-
lution de leurs recettes. Toutefois, la
réforme de la fiscalité locale de 2010
leur a conservé une part prépondérante
de fiscalité directe qui est peu sensible à
la conjoncture et se caractérise par le
dynamisme des bases. Les charges de
fonctionnement devraient progresser à
nouveau, notamment la masse salariale
qui constitue le premier poste de
dépenses. Au regard des perspectives
limitées de progression des ressources
de fonctionnement, la croissance des
dépenses devrait induire une nouvelle
baisse de l’épargne brute. L’achèvement
des investissements pour la fin du man-
dat électoral pourrait entraîner une
légère hausse de ces dépenses. La
détente des conditions de financement
par l’emprunt pourrait y contribuer.
Pour 2014 et au-delà, la diminution
des dotations de l’État en 2014 et 2015
constitue un facteur supplémentaire de
contrainte financière. Les modalités
retenues pour la baisse des dotations
font supporter aux communes une
réduction de 588 M€ des dotations de
l’État qui constituera une contrainte
significative. Celle-ci sera cependant
atténuée par la dynamique spontanée de
la fiscalité communale. La diminution
des dotations en 2014 sera concomi-
tante de la montée en puissance du
fonds de péréquation intercommunal et
communal (FPIC). Pour les collectivités
prélevées, l’effet négatif sur les res-
sources s’ajoutera à l’impact de la dimi-
nution des dotations et se traduira par
une contrainte budgétaire renforcée.
L’ajustement est susceptible de porter
d’abord sur la dépense d’investissement,
traditionnellement plus faible en début
de mandat. À l’inverse, pour les collecti-
vités bénéficiaires, le renforcement de la
péréquation horizontale constituera un
facteur d’accompagnement de la baisse
des dotations.
Les finances
intercommunales
L’augmentation du périmètre de l’in-
tercommunalité a un impact sur le
volume de leurs recettes et de leurs
dépenses. Bien qu’en progression sensi-
ble, les premières ont augmenté moins
vite que les secondes en 2012, ce qui a
entraîné une stabilisation de l’épargne
brute. Les intercommunalités ont néan-
moins
continué
d’accroître
leurs
dépenses d’investissement en recourant
plus fortement à l’emprunt. Leur dette
s’est fortement accrue.
17
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
En Md€
2010
2011
2012
2012
Produits réels de fonctionnement
21,95
23,06
24,26
5,2 %
Charges réelles de fonctionnement
17,20
18,01
19,23
6,8%
Epargne brute
4,74
5,05
5,02
- 0,5 %
Recettes réelles d’investissement
(hors emprunts)
2,92
3,26
3,21
- 1,7 %
Dépenses réelles d’investissements
(hors emprunts)
7,69
8,49
9,00
6,0 %
Encours de la dette
18,19
19,30
21,21
9,9 %
Ratio de désendettement
3,83
3,82
4,22
L’évolution des finances des groupements à fiscalité 2010-2012
Source : Cour des comptes - données DGFiP
En 2013, la structure de finance-
ment des intercommunalités leur assure
une base fiscale dynamique, comme en
2012. À cet égard, les notifications de
CVAE pour 2013 sont, pour les groupe-
ments à fiscalité propre, en augmenta-
tion de 9,5 %. Cette forte progression
s’ajoutera à l’accroissement spontané
des autres composantes de la fiscalité
directe. Pour autant, la forte hausse de la
fiscalité s’accompagne, au sein des inter-
communalités, d’une forte croissance
des
dépenses
de
fonctionnement,
notamment de personnel. Les premiers
éléments recueillis sur les budgets adop-
tés en 2013 montrent que les intercom-
munalités entendent poursuivre leur
effort d’investissement qui devrait se
traduire par un recours accru à l’em-
prunt et par une hausse de l’endette-
ment.
Pour 2014 et au-delà, les perspec-
tives des intercommunalités dépendent
de la baisse des dotations de l’État et de
la montée en puissance du fonds de
péréquation intercommunal et commu-
nal. En ce qui concerne la répartition de
la diminution des concours de l’État, les
intercommunalités supporteront 30 %
de la baisse de l’effort demandé au sec-
teur
communal,
soit
252
M€.
L’évolution de leurs ressources, qui
connaît un rythme plus élevé que celui
des communes, contribuera à atténuer
l’impact de cette réduction des concours
de l’État.
D’une manière générale, la baisse
des dotations de l’État, calculée au pro-
rata des ressources totales des diffé-
rentes catégories de collectivités territo-
riales, ne prend pas en compte les capa-
cités contributives de chacune de ces
catégories. Une autre clef de répartition,
prenant en compte des marges de
manœuvre budgétaires du secteur com-
munal, aurait été préférable. Cette solu-
18
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
En Md€
2010
2011
2012
2012/2011
Produits réels de focntionnement
60,56
63,14
63,57
0,7 %
Charges réelles de fonctionnement
52,86
54,32
56,02
3,1 %
Epargne brute
7,70
8,82
7,56
- 14,4 %
Recettes réelles d’investissement
(hors emprunt)
3,27
3,11
3,02
- 2,9 %
Dépenses réelles d’investissement
(hors emprunt)
12,14
11,70
11,44
- 2,2 %
Encours de la dette
29,74
30,46
31,07
2,0 %
Ratio de désendettement
3,86
3,45
4,11
L’évolution des finances départementales 2010-2012
Source : Cour des comptes - données DGFiP
tion alternative aurait préservé les res-
sources fiscales de l’État et aurait consti-
tué une meilleure incitation au freinage
des dépenses.
Les finances
départementales
Les produits de fonctionnement des
départements sont en faible progres-
sion. Alors que la fiscalité directe s’est
accrue, la fiscalité indirecte a diminué en
raison du fort recul des droits de muta-
tion à titre onéreux qui n’a été que par-
tiellement compensé par la progression
des autres taxes indirectes. Ces évolu-
tions mettent en évidence les effets,
pour les départements, de la réforme de
la fiscalité locale de 2010 qui s’est tra-
duite par un fort recul de la part de la
fiscalité directe dans leurs ressources et
les expose davantage à la volatilité du
produit des droits de mutation à titre
onéreux.
19
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
La hausse des charges de fonction-
nement
des
départements
résulte
notamment de la forte croissance des
dépenses sociales (+ 5,6 %). Les frais
d’hébergement dans les établissements
sociaux et médico-sociaux et les aides à
la personne représentent en effet plus de
50 % des charges de fonctionnement
des départements en 2012. La dépense
au titre du revenu de solidarité active
(RSA) a progressé de 5,2 % en 2012
pour atteindre 8,2 Md€. La dépense au
titre des allocations versées aux adultes
handicapés (ACTP et PCH), qui repré-
sente 2 Md€, a progressé de 8,1 % en
2012. La dépense consacrée à l’alloca-
tion personnalisée d’autonomie (APA)
des personnes âgées s’est élevée à
5,5 Md€, en progression de 3 %. La
dépense de frais d’hébergement en éta-
blissements des enfants, des personnes
âgées et des adultes handicapés admis à
l’aide sociale (11,6 Md€) a fortement
augmenté (+ 6,5 %).
Les
dépenses
de
personnel
(11,5 Md€), qui représentent 20,5 % des
dépenses des départements, ont pro-
gressé de 2,6 %. Les autres postes de
dépenses ont connu une évolution plus
modérée.
La plus forte croissance des charges
par rapport aux recettes a entraîné une
baisse de l’épargne brute des départe-
ments. Pour la troisième année consécu-
tive, l’ajustement budgétaire s’est réalisé
au moyen d’un recul de l’investissement.
En 2013, la progression des res-
sources sera tributaire du dynamisme de
la fiscalité et notamment de l’évolution
des droits de mutation à titre onéreux
pour lesquels les premières données dis-
ponibles laissent entrevoir un risque de
réduction sensible.
Au total, la croissance moyenne des
recettes de fonctionnement ne devrait
pas être en 2013 très différente de celle
constatée en 2012. La contrainte budgé-
taire pour les départements les moins
riches peut être desserrée par le renfor-
cement de la péréquation. Celle-ci sera
cependant en recul en 2013 en raison de
la diminution des ressources du fonds
de péréquation des droits de mutation à
titre onéreux. Financé par un prélève-
ment sur la Caisse nationale de solidarité
pour l’autonomie (CNSA), un fonds
d’urgence de 170 M€ a été mis en place
pour corriger des déséquilibres finan-
ciers ponctuels.
Les charges de fonctionnement
devraient continuer à croître à un
rythme soutenu compte tenu de la crois-
sance tendancielle des dépenses sociales.
Plusieurs facteurs y contribueront plus
particulièrement. Le montant du RSA a
été revalorisé de 1,75 %. Par ailleurs ce
taux a été augmenté de 2 % supplémen-
taire en septembre 2013, dans le cadre
de l’objectif de revalorisation de 10 %
en cinq ans fixé par le Gouvernent. La
Caisse nationale d’allocations familiales
(CNAF) prévoit une croissance du
nombre
d’allocataires
(+ 4 %).
La
hausse des autres dépenses sociales
devrait se poursuivre, de même que celle
de la masse salariale, pour partie en rai-
son de l’augmentation du SMIC au
1
er
janvier 2013 et de la revalorisation
des cotisations à la Caisse nationale de
20
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
retraite des agents des collectivités
locales (CNRACL).
Compte tenu du recul prévisible de
l’épargne brute, les dépenses d’investis-
sement seront à nouveau fortement
contraintes.
Pour 2014 et au-delà, les perspec-
tives des départements dépendent de la
baisse des dotations de l’État en 2014 et
2015 et des décisions prises pour assurer
le financement des allocations univer-
selles de solidarité.
L’effort demandé aux départements
au titre de la baisse des dotations de
l’Etat (476 M€) soulève la question du
caractère soutenable de la baisse des
dotations pour les plus fragiles d’entre
eux au regard des difficultés de nature
structurelle qui les caractérisent. L’octroi
de nouvelles ressources fiscales en
réduira cependant l’effet. Le projet de
loi de finances pour 2014 prévoit le
transfert aux départements d’un mon-
tant de 830 M€ de recettes fiscales de
l’État. La répartition de ce fonds sera
effectuée selon des critères péréquateurs
se rapportant aux ressources et aux
charges des départements. Par ailleurs, le
relèvement de 20 % du plafond des taux
des droits de mutation à titre onéreux,
qui peut constituer un effet d’aubaine
pour les départements les mieux dotés
en ressources fiscales, a pour effet de
faire porter sur le contribuable l’ajuste-
ment budgétaire en faveur des départe-
ments. Dans le rapport public annuel de
février 2013, la Cour avait préconisé une
autre orientation fondée notamment sur
un échange de ressources fiscales entre
le secteur communal et les départe-
ments.
Les finances
régionales
En 2012, les charges de fonctionne-
ment des régions ont augmenté plus
rapidement que les produits. En raison
de ce décalage, l’épargne brute a reculé.
Les investissements sont restés stables
et très proches du volume annuel des
trois dernières années. En dépit d’une
stabilisation des nouveaux emprunts,
l’encours de la dette a augmenté.
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
21
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
2010
2011
2012
2012/2011
Produits réels de focntionnement
21,77
22,16
22,50
1,5 %
Charges réelles de fonctionnement
16,26
16,71
17,16
2,7 %
Epargne brute
5,51
5,46
5,34
- 2,1 %
Recettes réelles d’investissement
(hors emprunt)
2,14
2,11
2,26
7,4 %
Dépenses réelles d’investissement
(hors emprunt)
8,49
8,55
8,48
- 0,9 %
Encours de la dette
16,86
17,99
19,13
6,3 %
Ratio de désendettement
3,06
3,29
3,58
L’évolution des finances régionales 2010-2012
Source : Cour des comptes - données DGFiP
Les régions ont été particulièrement
affectées par la réforme de la fiscalité
locale consécutive à la suppression de la
taxe professionnelle. Depuis 2010, elles
ont pratiquement perdu leur pouvoir de
modulation de taux et, pour l’essentiel,
elles ne disposent plus que de ressources
fiscales nationales non modulables ou
très faiblement modulables et d’imposi-
tions économiques locales dont elles ne
fixent plus les taux. En conséquence, le
gel des dotations de l’État, qui se pour-
suivra en 2013, constitue pour les
régions une forte contrainte. Celle-ci
sera renforcée par le gel, à partir de
2013, des dotations de compensation de
la réforme de la taxe professionnelle
versées par l’État (DCRTP). L’atonie de
la ressource fiscale est de nature à
réduire davantage encore leurs marges
de manœuvre budgétaires en dépit de
l’augmentation inattendue du produit de
la CVAE que les régions recevront en
2013.
Les régions devraient rester sou-
mises à une pression à la hausse de leurs
charges, portée par la compétence trans-
port,
et
particulièrement
par
les
dépenses en faveur des transports
express régionaux (TER). Les dépenses
de personnel devraient également conti-
nuer à croître en partie sous l’effet de
l’augmentation du SMIC au 1
er
janvier
2013 et de la revalorisation des cotisa-
tions à la CNRACL. L’examen des bud-
gets primitifs des régions pour 2013
indique que celles-ci devraient maintenir
un même volume de dépenses d’inves-
tissement qu’en 2012.
22
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’évolution des finances
locales par catégorie de
collectivités
Pour 2014 et au-delà, les perspec-
tives des régions dépendent de la baisse
des dotations de l’État en 2014 et 2015
et des décisions qui seront prises en
matière de fiscalité régionale. La réparti-
tion de la réduction des dotations se tra-
duira, pour les régions, par une réduc-
tion de 184 M€ en 2014.
L’effet de cette réduction sera atté-
nué par l’octroi de ressources fiscales
plus dynamiques ainsi que l’a annoncé le
premier ministre le 16 juillet 2013. Ce
réaménagement interviendra dans le
cadre de la réforme du financement de
l’apprentissage. À compter de 2014, la
compensation financière des transferts
de compétences intervenus en matière
de formation professionnelle, allouée
sous forme de crédits budgétaires, sera
en partie remplacée par les frais de ges-
tion actuellement perçus par l’État au
titre de la taxe d’habitation, de la cotisa-
tion foncière des entreprises (CFE) et de
la cotisation sur la valeur ajoutée des
entreprises (CVAE), ainsi que par une
fraction supplémentaire de taxe inté-
rieure sur la consommation des produits
énergétiques (TICPE). La part de la
dotation générale de décentralisation
formation professionnelle (DGDFP)
ainsi remplacée par des ressources fis-
cales représentait 901 M€ en 2013. A
compter de 2014, lui seront substituer
des ressources fiscales à hauteur de
601 M€ au titre du transfert des frais de
gestion précités et à hauteur de 300 M€
au titre de la TICPE. À l’avenir, le trans-
fert des frais de gestion sera indexé sur
l’évolution moyenne de ces frais, corré-
lée aux impôts locaux auxquels ils se
rapportent. Des mesures complémen-
taires pourraient être introduites au
cours de la discussion parlementaire du
projet de loi de finances pour 2014.
Le surcroît de dynamisme fiscal
accordé aux régions le sera au détriment
du budget de l’État qui se privera ainsi
des ressources futures liées à la progres-
sion de la fiscalité transférée. Compte
tenu de la situation budgétaire de l’État,
un autre choix pourrait être effectué :
celui de mieux répartir la fiscalité locale
existante entre les différentes catégories
de collectivités territoriales.
23
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
3
La qualité et la fiabilité de
l’information financière
locale
La nécessité d’une
mise en cohérence
du cadre budgétaire
et comptable
Aux termes de la Constitution « les
comptes des administrations publiques
sont réguliers et sincères. Ils donnent
une image fidèle du résultat de leur ges-
tion, de leur patrimoine et de leur situa-
tion financière ». La Cour des comptes a
pour mission de s’assurer du respect de
cette exigence, « soit en certifiant elle-
même les comptes, soit en rendant
compte au Parlement de la qualité des
comptes [de celles] dont elle n'assure
pas la certification ». La fiabilité et l’au-
ditabilité des comptes publics est égale-
ment une obligation découlant d’une
directive du Conseil de l’Union euro-
péenne du 8 novembre 2011.
Le respect de ces dispositions
contribue à la mise en œuvre des lois de
programmation des finances publiques.
Elles s’appliquent au secteur public
local. La qualité et l’exhaustivité de l’in-
formation ainsi que sa lisibilité sont éga-
lement indispensables à l’exercice de la
démocratie locale pour des raisons de
transparence financière et pour éclairer
les différents choix de gestion.
Le système français est complexe.
Pour le secteur local, il repose sur une
multiplicité de comptabilités et il doit
concilier les logiques budgétaires et
comptables. Cette conciliation entraîne
une multiplication d’écritures d’ordre
qui affectent la lisibilité des comptabili-
tés. En outre, elle ne se traduit pas par la
production d’un compte unique : des
états financiers distincts sont établis par
l’ordonnateur (le président de l’assem-
blée délibérante) et par le comptable
public. Ni l’un, ni l’autre de ces docu-
ments n’offre à lui seul une information
complète
sur
la
situation
d’un
organisme.
24
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
La qualité et la fiabilité de
l’information financière locale
L’éboration et la
présentation des
budgets : des
améliorations à
apporter
Le calendrier et la
présentation du budget
Acte de prévision et d’autorisation,
le budget est le premier instrument
d’une maîtrise des finances locales. Le
débat d’orientation budgétaire (DOB)
qui doit se tenir dans les deux mois pré-
cédant l’adoption du budget, devrait
fournir une information appropriée
pour éclairer les choix proposés à l’as-
semblée délibérante. Cette information
demeure parfois incomplète.
Les règles de présentation des bud-
gets locaux laissent ouvertes un certain
nombre de facultés. Leur mise en œuvre
peut cependant, dans certains cas, alté-
rer la lisibilité des budgets, ou rendre
difficile leur agrégation. Tel est le cas en
l’absence de budget annexe individualisé
ou, à l’inverse, lorsque ces budgets
annexes sont multipliés à l’excès.
À l’exception des régions, la présen-
tation des budgets par fonctions
demeure limitée. Les difficultés d’articu-
lation entre les systèmes d’information
de l’ordonnateur et du comptable limi-
tent les rapprochements et les vérifica-
tions nécessaires à la présentation des
états financiers. Au-delà de la correction
de ces défauts, un chantier plus ambi-
tieux devrait être engagé, visant à ce que
les grandes collectivités puissent donner
une présentation de leurs budgets en
mode LOLF.
Les annexes aux documents budgé-
taires prévues par la loi ne sont pas tou-
jours correctement établies. En outre,
elles sont peu lisibles. Afin d’y remédier,
une revue de ces documents est en
cours au niveau national.
La sincérité des prévisions
des recettes et des
dépenses
La
qualité
des
prévisions
de
dépenses comme de recettes, condition
centrale de la sincérité des budgets, fait
l’objet d’observations récurrentes des
chambres
régionales
des
comptes
notamment en ce qui concerne la pro-
grammation des opérations d’investisse-
ments. Ces situations pourraient être
évitées par une dissociation entre les
autorisations de programme et les cré-
dits de paiement (AP/CP).
De même, les rapports d’observa-
tions des chambres régionales des
comptes constatent encore fréquem-
ment des situations dans lesquelles il
n’est pas procédé à une correcte intégra-
tion des « restes à réaliser » (RAR), c’est-
à-dire les dépenses engagées non man-
datées et les recettes certaines n’ayant
pas fait l’objet de l’émission d’un titre,
pour la détermination du résultat de
l’exercice.
25
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
La qualité et la fiabilité de
l’information financière locale
Les comptes : une
qualité à renforcer,
des réformes à
conduire
Le suivi de l’exécution budgétaire et
l’enregistrement des opérations doivent
permettre de rendre des comptes régu-
liers et sincères et de disposer d’une
connaissance précise du patrimoine
comme des engagements de chaque col-
lectivité. L’enregistrement des opéra-
tions découlant de l’exécution du bud-
get, tant au compte administratif de la
collectivité qu’au compte de gestion du
comptable, doit satisfaire au respect des
principes d’une comptabilité en droits
constatés : il en est notamment ainsi en
ce qui concerne la séparation des exer-
cices et la constitution des amortisse-
ments et provisions.
Des manquements ou des anomalies
affectant le rattachement à l’exercice
sont encore fréquemment constatés. Il
en va de même en ce qui concerne les
dotations aux amortissements des
immobilisations. Une méconnaissance
des principes de constitution de provi-
sions a également pu être observée. Des
imputations comptables erronées sont,
par ailleurs, régulièrement relevées par
les chambres régionales des comptes.
Au sein de l’ensemble des collectivi-
tés et de leurs établissements publics,
des écritures comptables retracent les
différents transferts intervenant soit
entre un budget principal et des budgets
annexes, soit entre des communes et
leur groupement. La réalisation de tests
sur les données comptables centralisées
par l’administration met en évidence
l’absence de fiabilité des écritures cen-
sées rendre compte de ces mouvements.
Une incertitude sur la répartition des
charges de personnel au sein du bloc
communal en résulte. L’appréciation de
la richesse des collectivités peut être
faussée.
Les défauts de fiabilité affectent éga-
lement les opérations de bilan et le hors
bilan. La connaissance par les collectivi-
tés de leur patrimoine apparaît, le plus
souvent, comme lacunaire. Les anoma-
lies concernent aussi bien le patrimoine
immobilier que les créances détenues
par les collectivités. Par ailleurs, le recen-
sement des engagements hors bilan est
insatisfaisant. L’information actuelle-
ment délivrée dans les annexes budgé-
taires est présentée de façon complexe,
elle n’est pas exhaustive et ne fait pas
l’objet d’une validation externe. Il est, en
outre impossible d’en effectuer une cen-
tralisation
informatique
au
niveau
national.
Des évolutions sont néanmoins en
cours et l’amélioration de la qualité des
comptes locaux fait l’objet d’attentions
renouvelées.
Le
renforcement
du
contrôle
interne
est
fréquemment
observé. Un outil de mesure de la qua-
lité comptable a été mis en place par la
direction
générale
des
finances
publiques qui opère des contrôles régu-
liers sur ce point. Le cadre normatif de
la comptabilité publique locale a connu,
dans les deux dernières décennies, des
26
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
évolutions importantes qui concourent
à l’amélioration de la sincérité des
comptes.
Des réformes de plus grande
ampleur sont cependant nécessaires
dans trois domaines : le réexamen de
l’articulation budgétaro-comptable dans
le système local, la présentation des états
financiers et la certification des comptes
des grandes collectivités et des établisse-
ments publics de coopération intercom-
munale les plus importants.
La Cour estime nécessaire d’ouvrir
un débat sur la question de l’extension
au secteur public local de la distinction
entre comptabilité budgétaire et comp-
tabilité générale sur le modèle de l’État.
Ce débat devrait permettre de mieux
cerner les avantages et les inconvénients
d’une telle option au regard de ceux du
système actuel. Par ailleurs, il convien-
drait d’envisager la conception d’un jeu
unique d’états financiers, à partir de l’in-
formation détenue par l’ordonnateur et
de la reddition des comptes par le
comptable public.
De même, le moment paraît venu
d’envisager d’aller vers un plus haut
niveau d’exigence de fiabilité des
comptes et de l’information financière
en ce qui concerne les très grandes col-
lectivités – celles dont le budget se chif-
fre par milliards ou centaines de millions
d’euros : régions, départements, métro-
poles, communautés urbaines, commu-
nautés d’agglomération et grandes villes
(plus
de
50
000
habitants).
L’engagement d’une démarche expéri-
mentale prévue par le projet de loi de
développement des solidarités territo-
riales et de la démocratie locale adopté
en conseil des ministres le 10 avril 2013
paraît ouvrir une voie prometteuse si la
disposition était effectivement adoptée
par le Parlement.
Une centralisation
nationale des
budgets et des
comptes perfectible
La centralisation au niveau national
des budgets, des comptes administratifs
et des comptes de gestion des collectivi-
tés territoriales, de leurs groupements et
de leurs établissements publics doit pou-
voir fournir une information agrégée de
nature à permettre de porter un diag-
nostic complet sur ce secteur des
finances publiques, pris en lui-même et
dans une optique comparative avec les
autres secteurs des finances publiques.
Des marges importantes d’amélioration
existent en ce domaine.
La centralisation des données des
budgets et des comptes administratifs
tenus de façon autonome par chaque
organisme n’est pas aisée. La centralisa-
tion de ces documents est réalisée par
les services préfectoraux. Seule une
transmission numérique de ces informa-
tions, en cours de développement, facili-
tera leur remontée et leur exploitation au
niveau national.
La qualité et la fiabilité de
l’information financière locale
27
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Dans ces conditions, l’agrégation
nationale
des
données
financières
locales repose sur la seule centralisation
des comptes de gestion des comptables
publics, effectuée par la direction géné-
rale des finances publiques. Portant sur
des données insuffisamment homo-
gènes et manquant, sur certains points,
de fiabilité, cette agrégation aboutit à
des restitutions utiles mais qui ne peu-
vent, en l’état, permettre d’accéder à une
vision exhaustive et fidèle de la situation
financière du secteur public local.
En outre, une amélioration de l’in-
formation financière nationale serait
souhaitable en prenant en compte les
éléments d’actif et de passif ainsi que les
engagements hors bilan du secteur
public local et en améliorant le suivi
infra-annuel des recettes et des dépenses
budgétaires.
La qualité et la fiabilité de
l’information financière locale
29
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
4
Les premiers effets de la
réforme de la fiscalité
locale sur les finances des
collectivités locales
Une réforme d’am-
pleur soumise à de
fortes contraintes
La taxe professionnelle a été rempla-
cée par contribution économique terri-
toriale (CET), composée d’une cotisa-
tion foncière des entreprises (CFE) et
d’une cotisation sur la valeur ajoutée des
entreprises (CVAE). La CFE est perçue
par les communes et les intercommuna-
lités. La CVAE est répartie entre les
régions, les départements et le secteur
communal. Les collectivités territoriales
n’ont pas de pouvoir sur le taux de la
CVAE dont le produit est rattaché aux
collectivités locales où l’activité est réali-
sée. Des impositions forfaitaires sur les
entreprises de réseau (IFER) ont égale-
ment été créées.
Afin de compenser les pertes de
recettes liées à la suppression de la taxe
professionnelle, le « panier de res-
sources » des différentes catégories de
collectivités territoriales a subi d’impor-
tants aménagements à compter de 2011.
Les départements ne conservent du
schéma de départ que la taxe foncière
sur les propriétés bâties, les régions ne
conservant aucun des impôts originels.
En outre, deux mécanismes de com-
pensation ont été créés pour les collecti-
vités perdantes à la réforme. Le premier,
la dotation de compensation de la
réforme de la taxe professionnelle
(DCRTP), relève du budget de l’État. Le
second, le fonds national de garantie
individuelle de ressources (FNGIR)
opère des compensations horizontales
par catégorie de collectivités territo-
riales.
D’application immédiate en 2010
pour les entreprises, la réforme ne s’est
appliquée aux collectivités locales qu’en
2011 après avoir bénéficié en 2010 d’un
dispositif
transitoire.
L’entrée
en
vigueur de la réforme pour les collectivi-
tés territoriales a été complexe en raison
des difficultés résultant de la territoriali-
sation de la CVAE qui ont été aggravées
par des contraintes liées aux systèmes
d’information relatifs à la fiscalité
directe locale. Les modifications législa-
tives ont eu un impact important sur le
processus de calcul de la DCRTP et sur
la stabilisation du dispositif de compen-
sation. Il en est résulté pour les collecti-
vités territoriales une perte de clarté
affectant la prévision budgétaire, qui
s’est prolongée jusqu’en 2013.
30
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les premiers effets de la réforme de
la fiscalité locale sur les finances
des collectivités locales
Un effet différencié
sur les ressources
des collectivités
locales
Si les effets de la réforme de la fisca-
lité locale consécutive à la suppression
de la taxe professionnelle ne peuvent
être entièrement appréciés en raison du
caractère différé d’une partie d’entre
eux, de premiers constats peuvent être
effectués.
En premier lieu, les ressources terri-
toriales appartenant au périmètre de la
réforme ont sensiblement progressé
entre 2009 et 2012. La réforme a en
outre apporté une plus grande spéciali-
sation fiscale. Le bloc communal enre-
gistre une augmentation du poids des
taxes « ménages », à l’inverse des
régions. La structure de la fiscalité
directe des départements a moins évo-
lué. La réforme a maintenu l’autonomie
financière des collectivités locales au
sens des dispositions constitutionnelles.
En second lieu, la réforme induit
une différenciation des situations entre
catégories de collectivités et entre col-
lectivités au sein d’une même catégorie.
La mise en place de la DCRTP et de la
garantie individuelle de ressources a
substitué des dotations à des recettes fis-
cales. Cette substitution affecte diffé-
remment les trois catégories de collecti-
vités ainsi que les collectivités au sein
d’une même catégorie. En incluant la
DCRTP dans le panier des ressources
fiscales, cette dotation représente 6 %
des ressources fiscales des régions, 4 %
de celles des départements et 3 % de
celles des communes et intercommuna-
lités. Toutes choses égales par ailleurs, la
part de la DCRTP, dont le montant ne
sera définitivement gelé qu’en 2013,
constituera une plus grande contrainte
pour les régions et les départements que
pour le secteur communal.
La réforme a eu pour conséquence
de réduire la part de la fiscalité directe
dans les ressources des collectivités ter-
ritoriales. C’est tout particulièrement le
cas pour les départements pour lesquels
la part de la fiscalité directe est devenue
inférieure à celle de la fiscalité indirecte.
S’agissant du secteur communal, la fisca-
lité directe demeure très largement pré-
pondérante. Celui-ci conserve ainsi une
capacité importante d’agir sur les taux
de la fiscalité locale à l’inverse des
régions pour lesquelles ce pouvoir a pra-
tiquement été supprimé. La possibilité
d’agir sur les taux a également été
réduite pour les départements.
La réforme a également pour effet
de différencier les situations indivi-
duelles au sein de chaque catégorie de
collectivités. Pour les régions, les garan-
ties de ressources se concentrent princi-
palement sur cinq d’entre elles. En
outre, la part de ces dotations, qui sont
figées, dans les recettes de fonctionne-
ment est parfois élevée, ce qui réduit la
base dynamique des ressources des col-
31
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les premiers effets de la réforme de
la fiscalité locale sur les finances
des collectivités locales
lectivités concernées. Pour les départe-
ments, les garanties de ressources sont
concentrées sur 23 d’entre eux. Comme
pour les régions, la part que représen-
tent ces dotations figées dans les res-
sources de fonctionnement des départe-
ments est variable et peut être impor-
tante. Pour le bloc communal, les garan-
ties de ressources représentent une
moindre part des recettes de fonction-
nement. Mais la réforme a profondé-
ment modifié la structure des ressources
des anciennes intercommunalités à taxe
professionnelle unique. Le secteur com-
munal est globalement moins affecté par
la réforme que les départements et les
régions.
33
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
5
Les dépenses de personnel
des collectivités locales
L’accroissement des
dépenses de per-
sonnel et les diffi-
cultés de l’analyse
de ses causes
Des dépenses de rémuné-
rations dynamiques
La rémunération du personnel
représente environ 35 % des dépenses
de fonctionnement des collectivités ter-
ritoriales (52 % pour les communes
mais 20 % pour les départements, les
régions et les groupements de com-
munes). Les trois quarts de ces dépenses
relèvent
du
secteur
communal.
L’accroissement des dépenses de per-
sonnel des collectivités depuis 12 ans
(+ 5,3 % de variation moyenne annuelle
en euros courants) tient aux transferts
liés à la loi du 13 août 2004 (2
ème
vague
de décentralisation), mais aussi aux
choix de gestion des collectivités. Les
communes, qui n’ont pas fait l’objet de
transferts de compétences de l’État, ont
connu un accroissement moyen annuel
de 3,2 % de ces dépenses au cours de la
période considérée,
La loi de programmation des
finances publiques pour les années 2012
à 2017 a fixé à 2,5 % en valeur la crois-
sance annuelle de la masse salariale En
2012, l’accroissement des dépenses de
personnel en 2012 est resté supérieur à
2,5 % et à l’accroissement de 2011 dans
toutes les catégories de collectivités,
mais les départements sont proches de
l’objectif que fixe la loi de programma-
tion. Des différences marquées entre
collectivités existent néanmoins
Dans les régions, les dépenses de
personnel ont augmenté de 3,5 % en
moyenne annuelle de 2009 à 2012. Cet
accroissement global masque des diffé-
rences marquées entre régions. Dans les
départements, les dépenses de personnel
se sont accrues de 2,4 % en moyenne
annuelle de 2009 à 2012. La diversité est
plus accentuée que pour les régions.
Dans les communes et leurs groupe-
ments, les dépenses de personnel ont
augmenté globalement de 3,0 % en
moyenne annuelle de 2009 à 2012. En
2012, ces dépenses ont progressé de
3,5 % pour le secteur (mais de 8,7 %
pour les groupements).
34
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les dépenses de personnel des
collectivités locales
Une stabilisation des
effectifs à confirmer
La question des effectifs constitue
un enjeu majeur, même si leur évolution
n’est pas la seule explication à la pro-
gression de la masse salariale. Les don-
nées sur les effectifs des collectivités
locales sont disponibles tardivement :
mi-2013, seules les données complètes
sur les effectifs de 2010 étaient publiées,
de premiers éléments étant cependant
disponibles sur 2011. Les effectifs phy-
siques de la fonction publique territo-
riale (hors emplois aidés) ont connu une
forte progression depuis 2004 (19 %),
due pour moitié aux transferts de com-
pétences. Toutefois, ils augmentent peu
en 2010 par rapport à 2009 (+ 18 000) et
diminuent même (- 4000) en équiva-
lents-temps-pleins (ETP). Ce coup de
frein n’a cependant pas infléchi l’aug-
mentation des dépenses.
L’augmentation des effectifs est res-
tée élevée pour les groupements à fisca-
lité propre (+ 5,8 %). Néanmoins, le sys-
tème d’information ne permet pas d’éta-
blir ce qui revient, dans cette augmenta-
tion, à l’exercice de nouvelles compé-
tences transférées par les communes, ni
d’effectuer les corrections liées aux
mises à disposition de personnel des
groupements au profit des communes
ou inversement.
En 2010, les taux d’administration
de la fonction publique territoriale, en
équivalents-temps-pleins pour 1000
habitants, restent très hétérogènes sur le
territoire lorsqu’on les examine par
département. De même, les dépenses de
personnel des collectivités (par habitant)
sont très diversifiées selon les départe-
ments ou les régions.
Les outils de connaissance
et d’analyse des dépenses
de personnel
L’analyse des facteurs d’évolution
est complexe en raison des limites des
données dont disposent les pouvoirs
publics et des difficultés à appréhender
les conséquences des différents modes
de gestions locaux.
Au plan national, pas moins de sept
entités recueillent ou publient des don-
nées sur la fonction publique territoriale
et les collectivités locales. Alors que
selon les années, quatre à six rapports
fournissent des informations utiles sur
les dépenses de personnel et les effectifs
des collectivités, il n’existe pas de dispo-
sitif public permettant la compréhen-
sion globale des déterminants des
dépenses de personnel des collectivités.
Les données disponibles présentent
des lacunes persistantes. La difficulté du
recueil d’informations tient notamment
au nombre d’employeurs. Si les données
sont désormais fiables pour les effectifs
globaux, les contrôles de cohérence
qu’effectuent la direction générale de
l’administration et de la fonction
publique et l’INSEE montrent que les
collectivités fournissent des éléments
qui restent largement perfectibles,
35
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les dépenses de personnel des
collectivités locales
notamment sur les filières et les cadres
d’emploi des agents. Les informations
sur les composantes de la dépense de
personnel (traitement brut, primes, coti-
sations, etc.) et sur leur évolution, sont
inexistantes de même que celles concer-
nant la distinction entre les effets de car-
rière et les effets de structure sur l’évo-
lution du salaire moyen.
Les données sur les flux d’entrée
dans la fonction publique territoriale,
ainsi que sur les promotions, la forma-
tion et les absences au travail sont
publiées avec un décalage de trois ans.
Leur fiabilité est de surcroît très incer-
taine. Deux éléments restent très mal
appréhendés par le dispositif public
d’information : le degré d’externalisa-
tion de la gestion de services, notam-
ment du fait des délégations de services
publics et les flux croisés d’agents entre
les communes et leurs groupements.
De nombreux mouvements d’agents
sont susceptibles d’intervenir entre les
communes et le groupement auquel
elles appartiennent, ce qui se traduit par
des flux financiers croisés entre collecti-
vités. Les dispositifs de recueil d’infor-
mations appréhendent très mal ces
mouvements. Les données sur les
dépenses de personnel sont ainsi enta-
chées d’une incertitude de l’ordre de
quelques centaines de millions d’euros.
Une nécessaire maî-
trise des dépenses
de personnel
Si les dispositions législatives et
réglementaires constituent un des déter-
minants de la dépense de personnel des
collectivités locales (comme de tout
autre type d’employeur public voire
privé), les décisions propres aux collecti-
vités locales contribuent, pour une large
part, à l’augmentation des dépenses.
Les effets des mesures
nationales
Une part de l’augmentation des
dépenses de personnel des collectivités
locales est liée à la politique de l’emploi
public. La commission consultative
d’évaluation des normes (CCEN) estime
globalement à 230 M€ en 2011 et à
1 087 M€ en 2012, les coûts induits,
pour les collectivités territoriales en
année pleine, par les textes qui lui ont
été soumis au titre de la fonction
publique territoriale (modification du
taux de cotisation employeur à la
CNRACL ou relèvement du SMIC par
exemple).
La Cour a cherché à estimer, pour
2012, la part de l’augmentation des
dépenses de personnel qui relève de la
politique nationale de l’emploi public.
36
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Sur la base des éléments que les admi-
nistrations ont fournis à la commission,
en 2012, les mesures décidées au niveau
national représenteraient plus de 40 %
de l’augmentation des dépenses de per-
sonnel des collectivités locales.
Les dépenses de personnel des col-
lectivités sont aussi contraintes par l’ef-
fet de mesures législatives ou réglemen-
taires de natures très diverses. L’actualité
récente en fournit plusieurs exemples :
la réforme des rythmes scolaires, l’abro-
gation de la journée de carence ou
encore les contrats d’avenir.
Les leviers propres aux
collectivités locales
Une part importante des décisions
concernant leurs dépenses de personnel
relève cependant des collectivités terri-
toriales elles-mêmes. Les collectivités
locales disposent de leviers multiples
pour contrôler les dépenses de person-
nel. Les effectifs constituent un élément
déterminant de l’évolution de la masse
salariale, mais de nombreuses autres
décisions des assemblées délibérantes
influent sur cette dépense. Les marges
d’inflexion restent significatives s’agis-
sant du temps de travail, des régimes
indemnitaires ou de la prévention de
certaines absences pour raisons de
santé. L’optimisation de l’organisation
peut aussi fournir des pistes d’écono-
mies.
Une variation des effectifs de la
fonction publique territoriale de 1 %,
soit environ 18 000 agents, représente
une dépense de 560 M€ environ. De
nombreuses collectivités ont vu leurs
effectifs augmenter depuis quelques
années et leurs dépenses s’accroître plus
rapidement que les effectifs. Toutefois,
devant les contraintes qui pèsent sur
leurs ressources, celles-ci se fixent de
plus en plus fréquemment un objectif
de croissance limitée de la masse sala-
riale.
L’évolution de la masse salariale est
affectée par le rythme de déroulement
des carrières : celui-ci est aujourd’hui
très favorable pour les fonctionnaires
des collectivités territoriales. En effet,
dans de nombreuses collectivités, les
avancements d’échelon se font systéma-
tiquement à l’ancienneté minimale. De
la même manière, les collectivités choi-
sissent fréquemment d’ouvrir les pro-
motions à l’ensemble des agents suscep-
tibles d’être promus. Des irrégularités
ponctuelles mais néanmoins coûteuses
ont été observées par les chambres
régionales des comptes. Celles-ci ont
également constaté une croissance des
dépenses liées à des régimes indemni-
taires onéreux voire irréguliers. De
même, l’augmentation des heures sup-
plémentaires apparaît peu maîtrisée.
L’évolution des dépenses de person-
nel tient également au temps de travail
des agents, la durée annuelle étant fré-
quemment inférieure à la durée régle-
mentaire : une remise en ordre s’impose
en ce domaine. Une meilleure préven-
tion et un meilleur suivi des absences
pour raison de santé pourraient égale-
ment offrir des marges d’économies. De
Les dépenses de personnel des
collectivités locales
37
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
nombreuses collectivités pourraient
progresser dans la maîtrise des dépenses
de personnel en adoptant des mesures
d’organisation et en améliorant la ges-
tion
prévisionnelle
des
ressources
humaines.
Dans le secteur communal, la
mutualisation des services au sein de
l’intercommunalité constitue une piste à
développer. Jusqu’à présent, le dévelop-
pement de l’intercommunalité, s’il per-
met une prise en compte accrue des
besoins, n’a pas été générateur d’écono-
mies, bien au contraire. Une mutualisa-
tion forte serait de nature à favoriser la
maîtrise des effectifs, au moins à moyen
terme, notamment par la constitution de
services communs. Dans la pratique, les
expériences de mutualisation de services
demeurent limitées.
Les collectivités devraient néan-
moins être conduites à développer de
telles mutualisations, sous la contrainte
budgétaire croissante et en raison des
dispositions législatives prévoyant la réa-
lisation d’un schéma de mutualisation au
sein des intercommunalités. À cet égard,
la Cour estime que la constitution de
services au niveau des groupements
(services communs ou services corres-
pondant aux compétences transférées)
est seule susceptible de permettre réelle-
ment des gains de productivité à
l’échelle de l’ensemble intercommunal.
L’objectif
d’une
stabilité
de
ces
dépenses en volume sur une durée plu-
riannuelle à définir à l’échelle de chaque
ensemble intercommunal pourrait être
recherché et encouragé.
Les dépenses de personnel des
collectivités locales
39
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
6
L’accès au crédit des
collectivités locales
L’évolution de
l’offre de crédit
En 2011, le contexte du finance-
ment des collectivités locales s’était
tendu, en raison de la diminution de l’of-
fre, de la dégradation des conditions
financières des prêts bancaires et de leur
inadéquation en termes de maturité aux
besoins. À l’inverse, l’année 2012 est
marquée par une détente progressive
sur le marché du crédit à moyen ou long
terme.
Les
emprunts
nouveaux
(17 Md€)
ont
été
majoritairement
contractés en direct auprès des banques,
de la Caisse des dépôts et consignations
(CDC) sur fonds d’épargne, de la
Banque européenne d’investissement
(BEI). Les collectivités ont également eu
recours de façon plus importante au
marché obligataire.
L’accès aux financements à court
terme pour les besoins de trésorerie est
resté difficile. Cependant, au cours du
second trimestre, une détente progres-
sive s’est amorcée.
Un nouveau
contexte marqué
par de fortes incer-
titudes
La recomposition de l’offre
de financement
Le marché de l’offre bancaire aux
collectivités locales est en profonde
recomposition en raison du retrait de la
Banque Dexia Crédit Local de France et
de l’arrêt des financements exception-
nels du Fonds d’épargne. Les prêts de
La Banque postale, en partenariat avec la
Caisse des dépôts et consignations dans
le cadre d’une co-entreprise, devraient
représenter à terme une part significa-
tive ; ceux-ci bénéficieront des finance-
ments de la Société de Financement
Local (SFIL) à travers sa filiale (la Caisse
française de financement local), nouvel
établissement contrôlé par l’État auquel
Dexia a cédé une large partie de son
encours de prêts aux collectivités
locales.
40
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’accès au crédit des collectivités
locales
La production de la co-entreprise
LBP- collectivités locales financée par la
SFIL/CAFFIL devrait atteindre un
volume de 5 Md€ par an en rythme de
croisière. Il faudra sans doute attendre la
fin de l’exercice 2013 pour porter une
première appréciation sur la montée en
puissance de ce nouvel acteur du finan-
cement des collectivités locales.
Le problème des emprunts
structurés
Depuis le début des années 2000,
une part croissante de l’endettement des
collectivités locales a été contractée sous
la forme d’emprunts dits « structurés ».
Un rapport du Gouvernement a
recensé 1 478 collectivités concernées
avec un encours d’emprunts les plus ris-
qués de 14 Md€, soit 9 % du total de la
dette des collectivités locales. Dans l’en-
cours de celles-ci, les emprunts structu-
rés à risques représentaient 18 % en
moyenne.
Diverses solutions ont été envisa-
gées pour régler les problèmes rencon-
trés. Elles se heurtent toutefois aux
situations les plus obérées. La difficulté
de trouver une solution globale tient à la
complexité et à la diversité des contrats,
mais aussi aux montants des indemnités
dues dans certains cas de refinancement.
Depuis plusieurs années, des possibilités
de sécurisation de certains emprunts
sont apparues. De nombreuses collecti-
vités ont ainsi procédé à des réaménage-
ments de leur dette.
Différents rapports ont par ailleurs
préconisés d’autres voies allant de l’apu-
rement du stock existant sous l’égide de
l’État à la prise en charge des pertes
financières constatées par chaque collec-
tivité concernées. Un fonds de soutien
de 50 M€ a été créé par la loi de finances
rectificative pour 2012. Si un tel fonds
peut avoir une utilité pour contribuer à
régler la situation de petites collectivités
locales, il n’est pas à la hauteur des
enjeux financiers du problème pris dans
son ensemble.
Ainsi que l’avait recommandé la
Cour, la loi du 26 juillet 2013 de sépara-
tion et de régulation des activités ban-
caires a instauré un dispositif interdi-
sant, pour l’avenir, aux collectivités
locales de souscrire des emprunts à
risques.
Un certain nombre de collectivités
ont opté pour la voie contentieuse. Le
nombre d’assignations a progressé au
premier semestre 2013. Dans un juge-
ment du tribunal de grande instance de
Nanterre, les stipulations d’intérêt ont
été annulées en raison de l’absence du
taux effectif global (TEG) dans la
confirmation des conditions essentielles
des contrats entre les parties. Cette déci-
sion a été frappée d’appel. Elle laisse
ouverte plusieurs questions qui sont fac-
teurs d’incertitude.
Dans un communiqué de presse en
date du 18 juin 2013, les ministres char-
gés de ce dossier ont réaffirmé la
volonté du Gouvernement d’apporter
une solution pérenne et globale au pro-
41
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’accès au crédit des collectivités
locales
blème des emprunts structurés les plus
sensibles. Un nouveau fonds de soutien
pluriannuel est proposé dans le projet de
loi de finances pour 2014. Il sera doté de
moyens significatifs, notamment par une
contribution du secteur bancaire. Le
Gouvernement soumet également au
Parlement une disposition législative
permettant d’assurer la sécurisation juri-
dique des contrats ayant omis une men-
tion explicite du taux effectif global.
La solution ne saurait aboutir,
cependant, à dégager de toute responsa-
bilité les collectivités ayant souscrit ce
type d’emprunt à risques, quel que soit
le rôle des banques dans cette affaire.
Le nécessaire renforce-
ment de l’information
financière
Entre 2010 et 2013, les annexes des
états financiers ont été modifiées afin
d’améliorer les informations relatives à
la dette des collectivités territoriales.
Toutefois ces documents sont perfecti-
bles, notamment en ce qu’ils ne sont pas
harmonisés entre les différents niveaux
de collectivités. Par ailleurs, un projet est
à l’étude afin d’adapter les exigences
d’information au risque encouru.
En outre, le cadre normatif applica-
ble aux comptes des collectivités territo-
riales devrait évoluer suite à l’avis de juil-
let 2012 du conseil de normalisation des
comptes publics, afin de prévoir, ainsi
que la Cour l’avait recommandé, le pro-
visionnement, dans certaines condi-
tions, des risques financiers liés aux
emprunts structurés.
Les perspectives
2013 et au-delà
D’une façon générale, l’offre de cré-
dits devrait permettre de couvrir les
besoins de 2013. L’amélioration consta-
tée depuis le deuxième semestre 2012
devrait se poursuivre. Depuis le second
semestre 2012, il est constaté, une pour-
suite du mouvement d’allongement de la
durée des prêts, engagé fin 2012. En
outre, Le Fonds d’épargne géré par la
Caisse des dépôts et consignations et la
Banque européenne d’investissement
mettent en place des dispositifs permet-
tant de pallier les carences du marché
sur les prêts de long terme (supérieurs à
20 ans). Les conditions de taux des prêts
de moyen ou de long terme, se déten-
dent. Pour les prêts à court terme (infé-
rieurs à 1 an), la production bancaire
demeure marginale au regard des enga-
gements. La Banque postale devrait
assurer la couverture d’une majorité des
besoins en ce domaine.
À terme, le paysage des prêteurs au
secteur public local, déjà transformé
suite au plan de résolution de Dexia et à
la montée en charge de la Banque pos-
tale et des établissements spécialisés
(SFIL et CFFL) devrait encore s’étoffer.
En effet, la création d’une agence de
financement des collectivités locales
42
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L’accès au crédit des collectivités
locales
apparaît constituer une perspective
quasi certaine. La loi du 26 juillet 2013
de séparation et de régulation des activi-
tés bancaires autorise cette création.
Outre les règles normatives auxquelles
l’établissement sera soumis pour son
fonctionnement, sous le contrôle de
l’Autorité de contrôle prudentiel et de
résolution (ACPR), il devrait, pour
atteindre ses objectifs de production et
de prix offrir un niveau de garantie jugé
suffisant par les marchés, en l’absence
de garantie de l’État. Le mécanisme de
garantie solidaire des collectivités mem-
bres de l’agence et simultanément
emprunteuses constituera un point clef
de la réussite du projet. Il en va de
même de la constitution des fonds pro-
pres et des réserves de liquidités dont les
niveaux seront appréciés par l’Autorité
de contrôle prudentiel et de résolution
ainsi que le marché.
Cette création ne devrait pas inter-
venir avant l’exercice 2014. Son activité,
dans un premier temps, devrait proba-
blement se limiter à des montants peu
importants. Il restera à voir sur la durée
si l’inclusion d’un tel établissement spé-
cialisé dans le monde bancaire français
est de nature à apporter une réponse
adéquate aux attentes qui n’auraient pas
pu être satisfaites par ailleurs.
Au-delà, force est de constater une
évolution vers un empilement des dis-
positifs publics. Ces derniers comporte-
ront, en effet le Fonds d’épargne sur les
enveloppes dédiées décidées par le
Gouvernement, l’ensemble constitué
par La Banque postale, la SFIL et la
CAFILL ainsi que la future agence de
financement des collectivités locales.
Leur coexistence ne garantit pas a priori
l’usage au meilleur coût, pour le contri-
buable, des deniers publics engagés
directement sur fonds propres et indi-
rectement dans les mécanismes de
garantie mis en place ou à mettre en
place. De plus, il est important de s’assu-
rer de la bonne allocation des ressources
aux investissements locaux.
43
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Conclusion
L
’appréciation des finances locales ne peut faire abstraction de leur participation aux équi-
libres globaux des finances publiques.
Dans le contexte particulier des engagements de la France tendant à réduire les déficits et l’en-
dettement publics, il apparaît plus que jamais nécessaire d’apprécier la situation et les perspectives
financières des collectivités territoriales dans un cadre plus large tenant compte de la nécessité de
mieux conjuguer les efforts de l’État et des administrations locales pour parvenir à une réduction
durable de la dépense publique.
L’organisation décentralisée de la République et les principes constitutionnels de libre admi-
nistration et d’autonomie financière des collectivités territoriales rendent peu aisée la définition d’ob-
jectifs financiers (dépenses, recettes, solde) présentant un caractère contraignant pour les collectivités
territoriales et leurs groupements.
Une gouvernance financière permettant à l’État d’assumer pleinement les responsabilités qui
découlent des engagements européens de la France reste à construire en ce qui concerne le secteur
public local. Un tel dispositif devrait associer les collectivités territoriales à la définition des objec-
tifs financiers qui les concerne et permettre de veiller à leur respect Dans le contexte présent, leur
participation à l’effort de redressement des comptes publics est appelée à se renforcer. À cet égard la
fiabilisation accrue des données financières agrégées des collectivités locales constitue un accompagne-
ment technique nécessaire afin que celles-ci puissent servir de base à un diagnostic partagé par l’en-
semble des parties prenantes.
Les collectivités territoriales ne sauraient s’exonérer des contraintes qui résultent du rétablis-
sement de l’équilibre des comptes publics.
À cet égard, les décisions annoncées par le Premier ministre et mises en œuvre par le projet
de loi de finances pour 2014 aboutissent à transférer sur l’État et sur les contribuables une partie
de l’effort demandé aux collectivités locales.
La baisse des concours de l’État pourrait s’accompagner d’une hausse des impôts locaux qui
réduirait les capacités contributives des ménages et des entreprises dans un contexte où le taux glo-
bal des prélèvements obligatoires est déjà très élevé. La hausse du plafond applicable aux droits de
mutation est de nature à réduire la capacité contributive des redevables (pour une recette escomptée
de 1,2 Md€). Parallèlement, l’État verra ses recettes diminuer d’environ 830 M€ pour les seules
44
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Conclusion
annonces concernant les départements tandis que les transferts de fiscalité envisagés pour les régions
se traduiront par une diminution de la croissance spontanée de ses recettes fiscales. Ces chiffres sont
à mettre au regard de la baisse des dotations de 1,5 Md€ en 2014.
C’est pourquoi, ainsi que la Cour l’a déjà indiqué, une diminution modulée des concours
financiers en fonction des marges financières des différentes catégories de collectivités aurait été pré-
férable du point de vue du redressement des finances publiques prises dans leur ensemble. Cette
option reste encore possible pour 2015.
La réforme de la fiscalité locale de 2010 n’est pas stabilisée.
Cette réforme a fait naître de fortes incertitudes quant au montant des ressources fiscales de
remplacement, à leur localisation, à leur dynamisme et à la compensation des pertes éventuellement
subies au-delà de l’année 2011. Elle fait également apparaître une différenciation croissante dans
l’évolution des catégories de collectivités territoriales pour lesquelles le degré de contrainte financière
est différent. De ce point de vue, une distinction doit être faite entre le secteur communal (les com-
munes et leurs groupements) d’une part, et les départements et les régions, d’autre part. Ces diver-
gences d’évolution entre catégories de collectivités sont à apprécier au regard de la dynamique de leurs
recettes et de leurs dépenses.
Un réexamen d’ensemble de l’allocation des ressources fiscales sera inévitable à terme dans la
mesure où la réforme de 2010 aboutit à une situation instable comme l’attestent les demandes de
ressources nouvelles exprimées par les départements et les régions. Les ajustements ponctuels desti-
nés à satisfaire une partie de ces demandes seront inefficaces en termes de redressement des finances
publiques dès lors qu’ils seront effectués au détriment des ressources nécessaires à l’État et qu’ils
réduiront l’incitation à la maîtrise globale des dépenses. Ils seront, en outre, insuffisants pour résor-
ber les divergences d’évolution entre catégories de collectivités. Dès lors, une réallocation des ressources
fiscales entre ces dernières, établie sur la base des compétences exercées, serait à envisager.
En tout état de cause, dans un contexte de forte contrainte budgétaire pour l’État, les situa-
tions différenciées entre collectivités au sein d’une même catégorie devraient être atténuées par un ren-
forcement sensible de la péréquation « horizontale ». Les dispositifs existants pour le bloc commu-
nal et les départements devraient continuer d’être renforcés. S’agissant des régions, le mécanisme
embryonnaire qui existe n’est pas à la hauteur d’un véritable objectif de péréquation et serait à
développer. L’accroissement du rôle de la péréquation horizontale est rendu plus nécessaire encore
par la baisse des dotations de l’État en 2014 et 2015.
45
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Conclusion
Les collectivités locales doivent rechercher des pistes d’économies.
Le freinage des dépenses de fonctionnement est nécessaire. L’examen de la situation finan-
cière des collectivités locales en 2012 met en évidence la poursuite d’une hausse tendancielle des
charges de fonctionnement que la contrainte budgétaire n’a pu que freiner. C’est notamment le cas
en ce qui concerne les dépenses de personnel compte tenu du glissement vieillesse technicité (GVT)
qui caractérise la fonction publique territoriale, de l’octroi de régimes indemnitaires en progression
constante ou d’une durée du travail parfois inférieure à la durée légale.
Des marges d’économies permettant de ralentir l’évolution des charges existent également dans
d’autres domaines, la gestion du patrimoine, les aides aux entreprises ou l’organisation des services
publics locaux par exemple. Des propositions en ce sens ont été faites par la Cour dans son dernier
rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques de juin 2013.
Les efforts de mutualisation des moyens entre collectivités locales qui ont été entrepris n’ont
pas encore donné tous les résultats qu’on en pouvait attendre. Leur poursuite doit être une priorité
nationale en même temps que locale : s’agissant du bloc communal, seule une mutualisation porteuse
d’économies d’échelle en même temps que d’amélioration du fonctionnement des services publics est
de nature à permettre une évolution maîtrisée des coûts de ce secteur et elle doit pouvoir être appré-
ciée dans une vision agrégée des finances du groupe constitué par l’intercommunalité et ses communes
membres.
Au-delà des efforts qui peuvent être entrepris dans le cadre actuel, il importe que le nouvel
acte de décentralisation intègre explicitement un objectif de rationalisation et d’efficience de l’exer-
cice des compétences par les différents niveaux de collectivités. Le besoin de clarification des compé-
tences et de coordination des acteurs est aujourd’hui une condition parmi d’autres, mais essentielle
de l’assainissement des finances publiques de la France. Une organisation plus rationnelle et plus
efficace devrait permettre des économies importantes sans remettre en cause les services fournis à la
population.
Récapitulatif des orientations
et recommandations
47
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Orientations à moyen terme :
Pour l’État :
–
définir une trajectoire de mise à
niveau du système financier et compta-
ble public local afin de permettre de
répondre pleinement aux dispositions
prévues par la directive du Conseil de
l’Union européenne du 8 novembre
2011 sur les exigences applicables aux
cadres budgétaires des États mem-
bres ;
–
mettre en place l’agrégation des
comptes locaux notamment pour les
intercommunalités avec une agréga-
tion des comptes du groupement et
des communes membres, et pour ce
faire :
•
clarifier et fiabiliser la comp-
tabilisation des flux croisés au sein
d’une même entité, entre budget prin-
cipal et budgets annexes, et entre les
collectivités territoriales et les établis-
sements publics locaux, en particulier
les communes et les groupements dont
elles sont membres ;
–
étendre le champ d’application
et fiabiliser le processus de centralisa-
tion nationale des comptes locaux
(données relatives au bilan et au hors
bilan).
Pour l’État et les grandes collecti-
vités territoriales ou établissements
publics de coopération intercommu-
nale :
–
ouvrir un débat sur le choix
entre le maintien du système budgé-
taro-comptable actuel et l’évolution
vers un système qui, comme pour
l’État, distinguerait comptabilité géné-
rale et comptabilité budgétaire ;
–
mettre en place, dans un
cadre défini par la loi, une expérimen-
tation, sur la base du volontariat, de
dispositifs visant à s’assurer de la régu-
larité, de la sincérité et de l’image fidèle
des comptes des collectivités et établis-
sements publics de coopération inter-
communale les plus importants, coor-
donnés par la Cour des comptes.
48
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Récapitulatif des orientations
et recommandations
Les recommandations de la
Cour :
En ce qui concerne la trajec-
toire de l’ensemble des finances
locales :
–
préciser, en application de
l’article 4 de la loi organique du
17 décembre 2012 relative à la pro-
grammation et à la gouvernance des
finances publiques, les règles d’enca-
drement des dépenses, des recettes et
du solde des administrations publiques
locales justifiées par les engagements
de
redressement
des
finances
publiques pris dans le programme de
stabilité de la France ;
–
décliner les règles ainsi posées
dans un pacte de gouvernance des
finances locales élaboré au sein du
Haut conseil des territoires ou de tout
autre instance équivalente ;
–
mettre en œuvre, pour 2015,
la baisse des concours financiers de
l’État selon une logique de péréquation
entre les catégories de collectivités et
au sein de celles-ci ;
En ce qui concerne la qualité de
l’information financière et compta-
ble :
Pour l’État en association avec les
élus locaux, définir une trajectoire de
progrès ainsi qu’il suit
:
–
améliorer la lisibilité et l’intel-
ligibilité des états financiers des CEPL
en éliminant les informations inutiles
ou redondantes, en simplifiant et
modernisant leur présentation et en les
complétant dans les domaines où ils
sont insuffisants ;
–
renforcer la fiabilité de l’in-
formation
financière
des
CEPL,
notamment en ce qui concerne les
obligations de recensement exhaustif
de leurs actifs et de leurs passifs et de
production d’informations détaillées
sur leurs engagements pluriannuels ;
–
ouvrir
le
chantier
de
construction d’un compte financier
unique, sous l’égide du comité relatif à
la fiabilité des comptes locaux, et en
s’appuyant sur les possibilités offertes
par la numérisation et la dématérialisa-
tion des comptabilités.
Pour les grandes collectivités et
EPCI :
–
mettre en place les moyens et
les procédures d’un contrôle interne
comptable et financier approprié, en
s’inspirant des meilleurs pratiques des
collectivités les plus avancées en ce
domaine.
En ce qui l’allocation des res-
sources :
–
réexaminer l’allocation des res-
sources fiscales entre catégories de col-
49
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Récapitulatif des orientations
et recommandations
lectivités territoriales afin de doter cha-
cune d’une base suffisamment assurée
sur la durée au regard de leurs charges,
cette réallocation étant neutre pour
l’Etat ainsi que pour la sécurité sociale
et ne devant pas alourdir la fiscalité
locale prise dans son ensemble ;
–
renforcer les dispositifs de
péréquation « horizontale » afin de
limiter les disparités de situation entre
collectivités appartenant à une même
catégorie.
En ce qui concerne la maîtrise
des dépenses de personnel :
–
confier au futur Haut conseil
des territoires ou à toute instance équi-
valente, l’élaboration, dans le cadre
contractuel des finances locales pro-
posé par ailleurs par la Cour, d’engage-
ments réciproques entre l’État et les
collectivités territoriales portant sur les
objectifs de maîtrise des évolutions de
la dépense afférente à la fonction
publique territoriale ; fonder ces enga-
gements sur un bilan partagé établis-
sant les raisons des variations obser-
vées des dépenses de personnel et les
contributions respectives de la régle-
mentation et de la gestion locale.
S’agissant de l’État :
–
prendre en compte l’objectif
de maîtrise des dépenses de personnel
dans les collectivités territoriales à l’oc-
casion de toute décision concernant le
point d’indice, de toute modification
d’une grille indiciaire, de toute mesure
relative au statut d’un corps ou concer-
nant un avantage catégoriel ou spéci-
fique ;
–
rendre obligatoire dans la loi,
pour les collectivités les plus impor-
tantes, en introduction au débat
d’orientation budgétaire, un rapport
portant notamment sur les engage-
ments pluriannuels en matière de
structure et d’évolution des dépenses
de personnel et des effectifs ;
–
créer une incitation financière
au sein de l’enveloppe des concours
financiers de l’État en faveur de la
mutualisation effective, et mesurable
dans ses effets, des services entre
communes et groupements ;
–
bâtir un système d’informa-
tion complet sur l’évolution des effec-
tifs par niveau de collectivité et sur les
différents éléments d’évolution de la
masse salariale.
S’agissant des collectivités terri-
toriales et des groupements :
–
prendre
sans
tarder
les
mesures nécessaires pour assurer le
respect de la durée légale du temps de
travail et la réglementation sur les
régimes indemnitaires ;
Récapitulatif des orientations
et recommandations
50
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
–
renforcer la gestion prévi-
sionnelle des emplois et des compé-
tences et user si nécessaire de l’ensem-
ble des leviers de contrôle des
effectifs ;
–
compléter les bilans sociaux
de toutes indications sur le respect des
temps de travail réglementaires et sur
le
programme
de
lutte
contre
l’absentéisme ;
–
lorsqu’une mutualisation est
engagée, vérifier après deux ou trois
ans, qu’elle se traduit par une écono-
mie sur les budgets de fonctionnement
agrégés du groupement et des com-
munes membres et mesurer celle-ci.
En ce qui concerne l’accès au
crédit des collectivités locales :
–
prendre dans les meilleurs
délais les mesures règlementaires d’ap-
plication de la disposition nouvelle
introduite par la loi de séparation et de
régulation des activités bancaires enca-
drant pour l’avenir la capacité des col-
lectivités territoriales et de leurs grou-
pements à contracter des emprunts au
regard des risques que ceux- ci peuvent
présenter ;
–
adapter les exigences en
matière d’information et de données
des états financiers sur la dette, en les
modulant selon le seuil démogra-
phique des collectivités et des établis-
sements publics locaux concernés et
en simplifiant ou en aménageant les
états qui peuvent l’être eu égard à la
nature des emprunts concernés ;
–
mettre en œuvre les recomman-
dations issues de l’avis du CNoCP du
3 juillet 2012 concernant le provision-
nement des risques financiers pris
pour les emprunts structurés ;
–
pour les collectivités les plus
importantes, enrichir les documents
présentés lors du débat d’orientation
budgétaire d’un rapport sur la stratégie
de gestion de la dette et sur les résul-
tats obtenus au cours du dernier exer-
cice ;
–
mettre en place des statis-
tiques globales au niveau national sur
la dette des collectivités locales
(notamment en termes de maturité et
d’exposition au risque de taux) à partir
des états financiers exigés de celles-ci.