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COUR DES COMPTES
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QUATRIEME CHAMBRE
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PREMIERE SECTION
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Arrêt n° 67631
CENTRE HOSPITALIER DE MONTLUÇON
(ALLIER)
Appel d’un jugement de la chambre régionale des
comptes d’Auvergne, Rhône-Alpes
Rapport n° 2013-470-0
Audience publique du 11 juillet 2013
Délibéré du 15 juillet 2013
Lecture publique du 12 septembre 2013
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DES COMPTES a rendu l’arrêt suivant :
LA COUR,
Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2012 au greffe de la chambre
régionale des comptes (CRC) d’Auvergne, Rhône-Alpes, par laquelle M. X, comptable
du CENTRE HOSPITALIER DE MONTLUÇON (Allier) du 1
er
mars 2005 au 31
décembre 2007, a élevé appel du jugement n° 2012-0016 du 11 octobre 2012 par lequel
ladite CRC l’a constitué débiteur du centre hospitalier précité de la somme de 25 500 €,
augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 31 mars 2011 ;
Vu le réquisitoire du Procureur général près la Cour des comptes n° 2013-34
du 24 mai 2013 transmettant à la Cour la requête précitée ;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance, notamment le
réquisitoire du procureur financier près la chambre régionale des comptes d’Auvergne
du 24 mars 2011 ;
Vu le code de la santé publique ;
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Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives
à la fonction publique hospitalière ;
Vu la loi n° 94-628 du 25 juillet 1994 modifiée relative à l’organisation du
temps de travail, aux recrutements et aux mutations dans la fonction publique ;
Vu le décret n° 2002-9 du 4 janvier 2002 relatif au temps de travail et à
l'organisation du travail dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du
9 janvier 1986 susvisée ;
Vu les décrets n° 2002-1244 du 7 octobre 2002 et n° 2003-968 du 9 octobre
2003 relatifs à la réduction du temps de travail des personnels médicaux,
pharmaceutiques et odontologiques des établissements publics de santé ;
Vu le décret n° 2002-1358 du 18 novembre 2002 portant création d'un
compte
épargne-temps
pour
les
personnels
médicaux,
pharmaceutiques
et
odontologiques des établissements publics de santé ;
Vu le décret n° 2004-73 du 19 janvier 2004 relatif au financement par le
fonds pour l'emploi hospitalier du compte épargne-temps des personnels médicaux et
non médicaux exerçant dans les établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du
9 janvier 1986 susvisé ;
Vu le décret n° 2008-455 du 14 mai 2008
relatif aux modalités
d'indemnisation des jours accumulés sur le compte épargne-temps des personnels
médicaux, pharmaceutiques et odontologiques des établissements publics de santé ;
Vu l’instruction budgétaire et comptable M21 applicable aux établissements
publics de santé ;
Vu l’article 60 de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 modifiée ;
Vu le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement
général sur la comptabilité publique, en vigueur au moment des faits ;
Vu le code des juridictions financières,
Vu le rapport de M. Roch-Olivier Maistre, conseiller maître ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 475 du 28 juin 2013 ;
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Entendu, lors de l’audience publique de ce jour, M. Roch-Olivier Maistre,
en son rapport, M. Christian Michaut, avocat général, en les conclusions du ministère
public, l’appelant, informé de l’audience, n’étant ni présent ni représenté ;
Entendu, en délibéré, M. Philippe Geoffroy, conseiller maître, en ses
observations ;
Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes
d’Auvergne, Rhône-Alpes a constitué M. X débiteur envers le centre hospitalier de
Montluçon de la somme de 25 500 €, augmentée des intérêts de droit, pour avoir
procédé en 2005 au paiement de mandats collectifs correspondant à l’indemnisation de
jours non pris de réduction du temps de travail (RTT) acquis au titre de l’année 2004 par
des médecins hospitaliers ;
Sur le défaut de pièces justificatives
Attendu que le jugement entrepris a prononcé le débet à raison du défaut
d’une pièce justificative suffisante à l’appui des mandats litigieux ;
Considérant que le jugement entrepris ne précise pas quelle serait la
justification qui ferait défaut ; que, comme le soutient M. X, il n’est pas établi qu’une
réglementation aurait imposé, en l’espèce, des pièces justificatives supplémentaires ;
que le comptable est ainsi fondé à soutenir que le reproche d’avoir manqué au contrôle
de la production des justifications manque en droit ; qu’il convient donc d’infirmer le
jugement en ce qu’il a fondé la charge sur ce motif ;
Sur l’existence de textes qui autoriseraient la dépense
Considérant toutefois que, sans fonder le débet à ce motif, la chambre
régionale estimait dans le jugement entrepris que le comptable ne pouvait, en l’absence
d’une disposition législative ou réglementaire prévoyant l’indemnisation de jours de
RTT acquis en 2004 au bénéfice des personnels concernés, procéder auxdits paiements ;
que cet élément était également contenu dans le réquisitoire du procureur financier du
24 mars 2011 susvisé ; qu’au surplus le comptable manie un moyen en ce sens ; que ce
grief a donc été soumis à la contradiction des parties, en première instance comme en
appel ; qu’ainsi, et sans autre formalité, la Cour, statuant en appel, est fondée, sans
manquer au principe du contradictoire, à examiner s’il y eu ou non manquement à ce
motif ;
Attendu que le requérant, tout en reconnaissant qu’aucune loi ni aucun
règlement ne prévoyait l’indemnisation, au bénéfice des médecins hospitaliers, des jours
de RTT non pris en 2004, fait valoir que certains textes pouvaient utilement fonder les
mandats collectifs, en particulier le décret du 19 janvier 2004, la loi du 25 juillet 1994
modifiée et l’instruction comptable M21, susvisés ;
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Considérant que les sommes versées en vue d’indemniser des agents publics
au titre de jours de RTT non pris sont un élément de leur rémunération qui comme tel
doit être prévu par un texte exprès ;
Considérant que les différents textes évoqués par l’appelant ont trait aux
modalités de financement des comptes épargne-temps et ne comportent aucune
disposition qui autoriserait l’indemnisation de médecins hospitaliers au titre de jours de
RTT non pris ; que si les décrets des 7 octobre 2002 et 9 octobre 2003 susvisés ont
prévu un dispositif transitoire d’indemnisation de jours de RTT non pris au bénéfice des
agents de la fonction publique hospitalière, respectivement au titre des années 2002 et
2003, ce dispositif n’a pas été reconduit pour l’année 2004 ; que par ailleurs ni le code
de la santé publique susvisé ni aucun autre texte général n’autorise le conseil
d’administration ou le directeur d’un établissement public hospitalier à instituer un
dispositif d’indemnisation de jours de RTT non pris au bénéfice des agents concernés ;
qu’ainsi, au moment des paiements, les mandats litigieux étaient dépourvus de base
juridique ;
Considérant qu’en application de l’article 60 modifié de la loi du 23 février
1963 susvisée, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable se trouve
engagée dès lors qu'une dépense a été irrégulièrement payée ;
Considérant que, pour apprécier la validité des créances, il appartient aux
comptables d'interpréter conformément aux lois et règlements en vigueur les actes
administratifs qui en sont l'origine ; qu’en application des articles 12 et 13 du décret du
29 décembre 1962 susvisé, il revenait à M. X de constater le défaut de base juridique de
la créance et, en présence de sommes non dues, de surseoir au paiement des mandats
litigieux ;
Considérant qu’il résulte de l’ensemble des éléments ainsi rappelés qu’il y a
lieu, par ce motif substitué au précédent, de confirmer que M. X est mis en débet des
deniers du centre hospitalier de Montluçon pour la somme de 25 500 €, augmentée des
intérêts de droit calculés à compter du 31 mars 2011, date de notification du réquisitoire
du 24 mars 2011 susvisé ;
Par ces motifs,
DECIDE :
Article 1
- Le jugement n° 2012-0016 du 11 octobre 2012 est infirmé en ce
qu’il a prononcé le débet à raison d’un défaut de contrôle des justifications.
Article 2
- Le débet prononcé à l’encontre de M. X, pour une somme
de 25 500 € augmentée des intérêts de droit calculés à compter du 31 mars 2011, est
confirmé.
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Fait et jugé en la Cour des comptes, quatrième chambre, première section.
Présents :
M. Bayle,
président,
MM. Ganser,
Lafaure,
Vermeulen,
Vachia,
Mmes Gadriot-Renard, Démier, MM. Rousselot et Geoffroy, conseillers maîtres.
Signé : Bayle, président, et Le Baron, greffier.
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la Cour des
comptes.
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous les
huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution ; aux procureurs
généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y
tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte
lorsqu’ils en seront légalement requis.
Délivré par moi, secrétaire général.
Pour le Secrétaire général
et par délégation,
le Chef du Greffe contentieux
Daniel FEREZ