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CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS
OBLIGATOIRES
LA FISCALITÉ
AFFECTÉE
CONSTATS, ENJEUX
ET RÉFORMES
juillet 2013
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Le Conseil des prélèvements obligatoires est chargé
d'apprécier l'évolution et l'impact économique, social et
budgétaire de l'ensemble des prélèvements obligatoires, ainsi
que de formuler des recommandations sur toute question relative
aux prélèvements obligatoires (loi n°2005-358 du 20 avril
2005).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Les rapports
du Conseil des prélèvements obligatoires
Janvier 2013
Les prélèvements obligatoires et les entreprises
du secteur financier
Février 2012
Prélèvements à la source et impôt sur le revenu
Novembre 2011
L'activité du Conseil des prélèvements
obligatoires pour les années 2006 à 2011
Mai 2011
Prélèvements obligatoires sur les ménages :
progressivité et effets redistributifs
Octobre 2010
Entreprises et "niches" fiscales et sociales – Des
dispositifs dérogatoires nombreux
Mai 2010
La fiscalité locale
Octobre 2009
Les prélèvements obligatoires des entreprises
dans une économie globalisée
Mars 2009
Le patrimoine des ménages
Novembre 2008
La répartition des prélèvements obligatoires
entre générations et la question de l'équité
intergénérationnelle
Mars 2008
Sens et limites de la comparaison des
prélèvements obligatoires entre pays développés
Mars 2008
Les prélèvements obligatoires des indépendants
Mars 2007
La fraude aux prélèvements obligatoires et son
contrôle
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Le Conseil des prélèvements obligatoires est présidé par
M. Didier MIGAUD, Premier président de la Cour des comptes.
Il comprend :
M. Alain PICHON, président de chambre à la Cour des comptes,
Suppléant le Premier président de la Cour des comptes,
En sont membres :
M. François AUVIGNE, inspecteur général des finances,
M. Jean-Pierre BALLIGAND, co-président de l’Institut de la
décentralisation
M. Frédéric BONNEVAY, associé, conseil en stratégie économique
et financière chez Anthera Partners,
M. Michel BOUVARD, vice-président du conseil général de la
Savoie,
M. Michel BRAUNSTEIN, conseiller maître à la Cour des comptes,
Mme Anne-Marie BROCAS, inspectrice générale des affaires
sociales,
M. Éric CHANEY, chef économiste d'AXA,
M. Alain CHAPPERT, inspecteur général de l’INSEE,
M. Matthieu CONAN, professeur agrégé à l’université Paris-Ouest
Nanterre La Défense,
M. Dominique DULIN, conseiller à la Cour de cassation,
Mme Nathalie GUILHEMBET, directrice de l’audit et de la
stratégie à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale,
M. Philippe MARTIN, président de section au Conseil d'État,
M. Pierre MÉHAIGNERIE, ancien ministre, maire de Vitré,
M. Henri STERDYNIAK, directeur du département « économie de
la mondialisation » à l’Observatoire français des conjonctures
économiques,
M. Alain TRANNOY, directeur de l’école d'économie d’Aix
Marseille,
directeur d'études à l’École des hautes études en
sciences sociales,
M. Éric TROMEUR, directeur régional de l’URSSAF de Bretagne,
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
6
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Le secrétariat du Conseil des prélèvements obligatoires est assuré
par :
Mme Catherine DÉMIER, conseillère maître à la Cour des
comptes,
secrétaire générale
du
Conseil des
prélèvements
obligatoires,
Mme Jacqueline GUILLON, chargée de mission au secrétariat
général du Conseil des prélèvements obligatoires.
Le rapport, présenté par M. Jean-François JUÉRY, inspecteur des
finances, rapporteur général, a été délibéré et arrêté au cours de la
séance du 27 juin 2013.
Les études préliminaires au rapport ont été effectuées par :
M. Maxime BOUTRON, auditeur au Conseil d’État,
Mlle Justine COUTARD, inspectrice des finances,
M. Mohammed Adnène TROJETTE, auditeur à la Cour des
comptes
M. Christophe WITCHITZ, inspecteur des finances,
Avec la collaboration de Mlle Mariella MORANDI.
Ces études sont des documents de travail n'engageant pas en tant
que tels le Conseil des prélèvements obligatoires, sont consultables
sur le site internet de la Cour des comptes, rubrique CPO
.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
SOMMAIRE
INTRODUCTION
9
Chapitre I
La fiscalité affectée, aux contours mal définis, est une pratique ancienne conçue
pour être dérogatoire
11
I. L’affectation de prélèvements obligatoires est un phénomène ancien et diffus qui
contourne le principe d’universalité budgétaire…………………………………..…………
11
II. Bien qu’ancienne, la fiscalité affectée est néanmoins difficile à appréhender faute d’une
définition rigoureuse………………………………………………………………………..
21
III. Pour ses travaux, le Conseil des prélèvements obligatoires a arrêté une définition de la
fiscalité affectée……………………………………………………………………………..
37
Chapitre II
La fiscalité affectée a connu un développement intense ces dernières années et se
concentre sur un nombre restreint de secteurs d’activités
41
I. Les taxes affectées, dont le nombre est évalué à 309 et le rendement à 112 Md€ en 2011,
ont récemment connu une croissance soutenue…………………………………………….
42
II. La fiscalité affectée se concentre sur un nombre réduit de secteurs d’activités………….
50
Chapitre III
Le développement de la fiscalité affectée pose d’importants problèmes budgétaires et
économiques
61
I. Les travaux du Conseil ont principalement porté sur la fiscalité affectée « aux tiers
autres que la sécurité sociale et les collectivités locales » soit, pour 2013, 214 taxes d’un
rendement de 28 Md€……………………………………………………………………….
61
II. La multiplication des taxes affectées se révèle très coûteuse pour les finances publiques
63
III. La fiscalité affectée soulève également des problèmes économiques…………………..
85
Chapitre IV
Le foisonnement de taxes affectées traduit surtout des phénomènes
de débudgétisation
99
I. Les arguments avancés en cas d’affectation ne justifient pas, dans la plupart des cas, une
dérogation au principe d’universalité budgétaire……………………………………………
100
II. Dans les faits, le recours à la fiscalité affectée s’explique généralement par le souhait
de contourner les contraintes budgétaires…………………………………………………..
118
III. En dépit de progrès récents, l’encadrement budgétaire actuel s’avère insuffisant pour
corriger les inconvénients de la fiscalité affectée…………………………………………..
126
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
8
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Chapitre V
Une rationalisation de la fiscalité affectée s’impose
I. À titre préalable, la fiscalité affectée doit être mieux connue pour être mieux maîtrisée…
II. Le respect des principes budgétaires et fiscaux fondamentaux conduit à réaffirmer le
statut d’exception de la fiscalité affectée …………………………………………….……
III. La rationalisation de la fiscalité affectée doit se traduire par une ambitieuse stratégie
de rebudgétisation, séquencée dans le temps………………………………………………..
135
136
139
145
IV. La mise en oeuvre opérationnelle de la stratégie proposée par le Conseil des
prélèvements obligatoires conduit à distinguer deux mouvements de rebudgétisation ……
157
Conclusion
………………………………………………………………………….
167
Synthèse des propositions
………………………………………………………………
....
169
Annexe I : Lettre du Premier ministre………………………………………
.........................
171
Annexe II : Détail des évolutions proposées pour les taxes affectées relevant du périmètre
de la demande du Premier ministre …………………………………………………………
175
Annexe III : Liste des principaux audits d’entités financées par taxes affectées utilisées par
le Conseil des prélèvements obligatoires..…………………………………………………..
203
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Introduction
Le principe d’universalité budgétaire, dont découle le principe de
non-affectation des recettes, est inscrit en droit français depuis le XIX
ème
siècle. Malgré sa réaffirmation dans la loi organique relative aux lois de
finances (LOLF) du 1
er
août 2001, ce principe n’a pas fait obstacle à de
multiples affectations de ressources fiscales à des entités autres que l’État.
Loin d’être circonscrit, ce phénomène dérogatoire revêt aujourd’hui une
importance particulière.
Dans leurs rapports rendus publics en septembre 2012, l’inspection
générale des finances (IGF)
1
et le Conseil d’État
2
ont formulé plusieurs
propositions concernant les « agences » de l’État. Ces travaux pointaient
en particulier les importantes difficultés de gouvernance et d’ordre
budgétaire soulevées par les taxes affectées.
Dans le prolongement de ces travaux, la loi de programmation des
finances publiques (LPFP) pour 2012 à 2017 a prévu, en son article 21,
que le Parlement serait destinataire d’un rapport du Gouvernement sur les
impositions de toutes natures (ITN) affectées à des tiers autres que les
collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale. Le Premier
ministre a décidé de confier cette étude au Conseil des prélèvements
obligatoires par lettre de saisine du 23 janvier 2013.
Ses travaux, qui se sont échelonnés sur six mois, ont permis de
mettre en évidence l’ampleur du phénomène et ses effets.
Sur un champ
large, excluant néanmoins les « impôts sociaux
3
» et les impôts
affectés aux collectivités locales, le Conseil a recensé, en 2011,
309 taxes, pour un montant cumulé d’environ 112 Md€
.
Compte tenu de l’étendue du périmètre, il a concentré ses analyses
et propositions sur un champ progressivement restreint. Comme l’y
invitait le Premier ministre (
cf. annexe I
), le rapport général – même s’il
s’attache à définir et cartographier le phénomène d’affectation de manière
exhaustive – formule des constats et propositions précis sur un champ
plus réduit, constitué des «
taxes affectées à des tiers autres que la
sécurité sociale et les collectivités locales
». Constitué, en 2013, de
214 taxes bénéficiant à 453 entités, ce champ représente près de 28 Md€.
Il s’agit pour l’essentiel des taxes bénéficiant aux agences de l’État
1
L’État et ses agences
, rapport de l’IGF n° 2011-M-044-01, mars 2012.
2
Les agences : une nouvelle gestion publique ?
, rapport public annuel du Conseil
d’État, septembre 2012.
3
Cotisation sociale généralisée (CSG), contribution au remboursement de la dette
sociale (CRDS), forfait social.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
10
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
(14,6 Md€,
138
taxes),
aux
chambres
consulaires
(1,9 Md€,
6 taxes), aux organismes techniques ou professionnels (1,4 Md€,
66 taxes) et aux dispositifs de solidarité nationale (10 Md€, 6 taxes dont
la contribution au service public de l’électricité - CSPE -, le Fonds
national d’aide au logement - FNAL - ou le Fonds national des solidarités
actives - FNSA -).
Conformément
à
son
objet,
le
Conseil
des
prélèvements
obligatoires a apprécié «
l’évolution et l’impact économique, social et
budgétaire
4
» des taxes affectées, à partir d’analyses chiffrées et des
travaux d’évaluation disponibles. Sans chercher à stigmatiser la fiscalité
affectée ou à remettre en cause les politiques publiques ainsi financées
5
,
le Conseil a «
formulé des recommandations
» précises et opérationnelles,
qui paraissent s’imposer dans le contexte budgétaire actuel.
Dans un premier chapitre, le rapport revient sur les aspects
juridiques et historiques du recours à la fiscalité affectée, afin d’en définir
précisément les contours. Le deuxième chapitre décrit le phénomène
d’affectation de ressources fiscales et sa dynamique depuis 2007. Dans un
troisième chapitre, les effets induits par la fiscalité affectée, tant en termes
budgétaires, économiques que de gestion publique, sont étudiés. Le
quatrième chapitre analyse les principaux motifs de recours à ce mode de
financement et les tentatives d’encadrement dont il a fait l’objet jusqu’à
présent. Enfin, un cinquième et dernier chapitre expose des pistes de
réformes visant à rationaliser la pratique de la fiscalité affectée.
4
Cf. la loi n° 2005-358 du 20 avril 2005 tendant à créer un Conseil des prélèvements
obligatoires.
5
Compte tenu du nombre important de taxes affectées et des entités bénéficiaires, il
n’a pas été possible de procéder à un audit de chacune d’entre elles. Afin d’établir des
constats objectivés et de s’appuyer sur des exemples précis, le Conseil a utilisé
l’ensemble des travaux d’audit et d’évaluation récemment conduits par le Parlement,
la Cour des comptes, l’inspection générale des finances etc. La liste de ces rapports
est mentionnée à l’annexe III.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Chapitre I
La fiscalité affectée, aux contours
juridiques mal définis, est une pratique
ancienne conçue pour être dérogatoire
I
-
L’affectation de prélèvements obligatoires est
un phénomène ancien et diffus qui contourne le
principe d’universalité budgétaire
A - Le principe d’universalité budgétaire, qui est l’un
des fondements du droit budgétaire, fait l’objet d’une
contestation ancienne
1 -
Afin de permettre au Parlement de contrôler l’allocation
et le bon usage des deniers publics, le principe d’universalité
budgétaire prévoit l’affectation des ressources fiscales
au budget général de l’État
Comme l’enseignent l’histoire de la fiscalité et la science
administrative
6
, l’institutionnalisation de l’impôt a joué, en France, un
rôle central dans la construction de l’État, en lui donnant les moyens de
financer ses interventions. L’organisation de l’impôt a toutefois évolué :
lorsqu’ils apparaissent, au XIII
ème
siècle, les premiers impôts nationaux
étaient en effet affectés au financement d’une dépense précise,
particulièrement la guerre
7
. Ce n’est que progressivement qu’a émergé
6
Introduction au droit fiscal général et à la théorie de l’impôt
, Michel Bouvier, 2012.
7
Il en va ainsi du premier impôt permanent dont le régime est connu avec précision :
la taille royale, créée par ordonnance royale du 3 novembre 1439, avec le
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
12
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
l’idée d’impôts visant à financer l’ensemble des dépenses de l’État, sans
affectation précise. Ce changement de conception de l’impôt traduisait,
d’une part, la volonté de doter l’État central de ressources pérennes et
stables permettant de financer des interventions croissantes et, d’autre
part, de légitimer le prélèvement, désormais soumis à l’accord des
représentants de la Nation. En France, le principe du consentement à
l’impôt est établi dès le 17 juin 1789 par l’Assemblée nationale qui
décrète que «
toute levée d’impôts et contributions de toute nature qui
n’auraient pas été nommément, formellement et librement accordés par
l’Assemblée cessera entièrement dans toutes les provinces du Royaume
».
Les grands principes du droit budgétaire, en particulier les
principes d’universalité et d’unité budgétaires, traduisent juridiquement
ces conceptions
;
ils ont été validés par le Conseil constitutionnel à
plusieurs reprises.
Le principe d’universalité budgétaire
prévoit que l’ensemble des
recettes de l’État couvre l’ensemble de ses dépenses. Il a été reconnu
implicitement par les deux premiers règlements généraux sur la
comptabilité publique
8
, puis reconnu explicitement par le décret du
10 juin 1856 déterminant le mode de présentation du budget de l’État
9
. Le
principe d’universalité budgétaire se décompose en deux principes
complémentaires : d’une part, les dépenses et les recettes de l’État ne
doivent pas être contractées, afin que l’autorisation du Parlement ne se
fasse pas sur un solde, plus difficile à interpréter ; d’autre part, les recettes
ne doivent pas être affectées à certaines dépenses, afin que l’autorisation
ne porte pas sur une autorisation de dépense indéterminée.
S’il peut paraître en première analyse comme peu transparent pour
le contribuable,
le principe d’universalité budgétaire repose sur une
double logique juridique et économique :
rhombus5
du point de vue juridique, le principe d’universalité apparaît
comme le fondement de la démocratie budgétaire.
Il permet en
effet au Parlement, chargé de l’allocation et du contrôle des deniers
publics, de décider et de contrôler leur utilisation. En ancrant l’idée
que le citoyen contribue à l’ensemble des dépenses de la Nation, il
participe par ailleurs au renforcement de son consentement à
l’impôt;
consentement des États généraux réunis à Orléans, qui est affecté à la mise en place
de la première armée régulière française.
8
Ordonnance royale du 31 mai 1838 et décret impérial du 31 mai 1862.
9
«
Le budget englobe la totalité des charges et des ressources de l’État
».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
13
rhombus5
du point de vue économique, il permet au Parlement de répartir de
manière optimale la ressource fiscale. En période de crise
budgétaire,
le
principe
d’universalité
est
particulièrement
important : il garantit en effet que chaque politique publique
contribue, quel que soit son mode de financement, à la réduction
de la dépense publique de la manière la plus conforme aux choix
collectifs et à l’intérêt général.
Le principe d’unité budgétaire
, pour sa part, établit qu’un même
document,
annuellement
présenté
au
Parlement,
doit
regrouper
l’ensemble des recettes et des dépenses de tous les services de l’État.
Les grands principes du droit budgétaire
10
ont eu pour
conséquence de faire du Parlement le détenteur de l’autorité
budgétaire et fiscale.
L’article 34 de la Constitution confie ainsi au
législateur le soin de fixer les règles concernant «
l’assiette, le taux et les
modalités de recouvrement des impositions de toutes natures
».
2 -
Le principe d’universalité budgétaire a été rapidement
interprété de manière souple
Dès le XIX
ème
siècle, le principe d’universalité budgétaire a très
rapidement dû être assoupli du fait des choix d’organisation effectués par
l’administration. En effet, si la règle de non-affectation interdit, au sein
du budget général de l’État, l’affectation d’une recette à une dépense, elle
ne s’oppose pas à l’affectation d’une recette à un tiers. Le principe
d’universalité n’avait ainsi pas pour vocation d’empêcher l’apparition de
personnalités morales distinctes de l’État dotées de ressources propres. Le
droit budgétaire a donc dû composer, dès le XIX
ème
siècle, avec les deux
phénomènes de décentralisation et de « démembrement
11
» de l’État, qui
organisent le transfert de certains pouvoirs de l’État vers des personnes
morales de droit public distinctes.
10
Ces principes budgétaires ne sont pas propres à la France (
cf. infra
). Aux États-
Unis, ils peuvent être rapprochés du slogan né dans les années 1750 chez les
indépendantistes des Treize colonies : « Aucune taxation sans représentation ».
11
Ce
terme juridique n’a aucune connotation négative.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
14
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
La décentralisation territoriale a
débuté au cours de la monarchie
de Juillet, lorsqu’a été décidée l’élection des conseils municipaux et
généraux
12
puis l’élargissement de leurs compétences
13
. S’administrant
elles-mêmes et gérant leurs propres affaires, les collectivités locales se
sont progressivement vues attribuer la personnalité morale
14
.
Pour sa part, le phénomène de démembrement de l’État, qualifié
d’« agencisation » par les deux rapports récents précités de l’IGF et du
Conseil d’État
15
, a débuté au lendemain de la Révolution française,
lorsque la Constitution du 5 fructidor an III a assoupli la loi Le Chapelier.
C’est alors que naissent les premiers établissements publics ; constituées
autour d’une mission spécialisée et dotées d’une autonomie de gestion,
ces entités sont créées pour mettre en oeuvre des politiques publiques
nouvelles ou pour spécialiser des services publics. Ainsi sont apparues les
« agences » de l’État, que l’IGF a définies, dans son rapport précité,
comme les entités, dotées ou non de la personnalité morale, qui respectent
les deux critères suivants :
rhombus5
elles exercent des missions de service public non marchand ;
rhombus5
un faisceau d’indices indique qu’elles sont contrôlées par l’État
16
.
Une fois accordée une autonomie juridique aux agences et aux
collectivités locales, la question de leur autonomie financière s’est
rapidement posée
17
. Dans un pays comme la France, où le Parlement
dispose, en vertu de la Constitution, d’un monopole en matière de
création d’impôts, seule l’affectation de ressources fiscales permet de
conférer une autonomie financière.
L’affectation est donc inévitable dans
un pays où le pouvoir fiscal est centralisé ; on trouve ainsi, depuis
longtemps, des affectations externes au budget de l’État.
12
Lois du 21 mars 1831 et 22 juin 1833.
13
Loi du 18 juillet 1837 pour les attributions des communes et loi du 18 mai 1838
pour celles des conseils des départements et d’arrondissements.
14
Loi du 18 juillet 1837 pour les communes, puis loi du 10 août 1871 pour les
départements.
15
Cette terminologie, récente, n’était pas employée au XIXème siècle.
16
Par exemple, l’État est majoritaire à leur conseil d’administration, ou nomme leur
dirigeant, ou dispose d’un droit de veto, etc.
17
Celle-ci ne va toutefois pas de soi : les collectivités territoriales n’ont ainsi pas
bénéficié de l’autonomie budgétaire entre 1862 et 1892. Leurs dépenses et leurs
recettes étaient intégrées dans les budgets annuels soumis au Parlement. De même, les
« quatre
vieilles » (aujourd’hui la taxe d’habitation, la taxe foncière sur les propriétés
non bâties, la taxe foncière sur les propriétés bâties et l’ex-taxe professionnelle) ont,
au départ, constitué des impôts d’État.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
15
Encadré 1 : Quelques exemples anciens d’affectations
square4
l’article 21 de la loi du 9 avril 1898 relative aux chambres de commerce et
d’industrie dispose qu’«
il est pourvu aux dépenses ordinaires des chambres de
commerce et des bourses de commerce au moyen d'une imposition additionnelle au
principal de la contribution des patentes, conformément à la loi du 23 juillet 1820,
à l'article 4 de la loi du 14 juillet 1838 et à l'article 38 de la loi du 15 juillet 1880
sur les patentes
» ;
square4
la loi du 23 octobre 1913 affecte à l’office de la propriété industrielle le produit de
différentes taxes sur les registres de commerce, sur les brevets d’invention et sur les
marques de fabrique ;
square4
la loi du 31 juillet 1917 transfère les « quatre vieilles » aux collectivités locales.
L’ordonnance du 7 janvier 1959 les autorisera à majorer éventuellement, dans la
limite de 20% un taux fixé ;
square4
l’article 119 de la loi du 31 décembre 1921 affecte à la réunion des musées
nationaux le produit de la taxe d’entrée dans les musées.
Ces pratiques d’affectation, presque aussi anciennes que le
principe d’universalité budgétaire, ont cependant toujours fait l’objet de
critiques de la part de la doctrine juridique. Dans un célèbre ouvrage de
finances publiques publié en 1952
18
, Julien Laferrière et Marcel Waline
consacraient ainsi un chapitre à la «
crise du droit budgétaire
», dont
l’une des caractéristiques était le recours trop fréquent à des affectations :
«
la règle de l’universalité budgétaire est battue en brèche par la
multiplication des budgets industriels ; celle de la non-affectation des
recettes est méconnue de plus en plus fréquemment ».
La contestation de l’affectation repose généralement sur trois
critiques :
rhombus5
d’une part, l’affectation n’étant pas annuellement réexaminée par
le Parlement, elle porte atteinte au contrôle de ce dernier sur les
ressources et les dépenses publiques. En déconsolidant certaines
recettes et dépenses du budget général, elle nuit par ailleurs à la
clarté des comptes publics. Ce risque apparaît manifeste dans les
cas où les affectations ne semblent
justifiées par aucun motif autre
que la volonté de financer certaines politiques publiques. Ainsi, la
loi du 28 février 1923 attribue au « compte des alcools » le produit
de la surtaxe temporaire perçue sur les huiles et les essences de
pétrole importées en France. L’article 3 de la loi du 16 avril 1929
affecte pour sa part la surtaxe sur les charbons au relèvement des
retraites servies par la caisse de retraite des ouvriers mineurs ;
18
Traité de science et de législation financières
, Julien Laferrière et Marcel Waline,
LGDJ, 1952.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
16
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
d’autre part, elle limite les marges de manoeuvre du législateur, en
rigidifiant l’emploi des ressources publiques ;
rhombus5
enfin, et surtout, elle entraîne un risque de gaspillage des
ressources publiques, déjà souligné par Laferrière et Waline :
«
C’est ce caractère indéterminé du rendement de la recette
affectée qui la rend critiquable du point de vue financier ; la
recette risque en effet, si elle s’élève rapidement ou si elle dépasse
les prévisions de l’autorité budgétaire, de procurer à l’affectataire
des ressources hors de proportion avec ses besoins ou avec l’aide
que l’autorité budgétaire pensait devoir raisonnablement lui
accorder compte tenu de la situation financière générale de
l’État
».
Les taxes parafiscales, qui se sont fortement développées au milieu
du XX
ème
siècle, illustrent parfaitement cette ambivalence des pouvoirs
publics envers la fiscalité affectée.
Créées par voie réglementaire, les taxes parafiscales permettaient à
l’État de contourner en grande partie les prérogatives du Parlement,
détenteur du pouvoir fiscal. Leur développement, en dehors de tout cadre
juridique, a été particulièrement dynamique après la seconde guerre
mondiale
19
.
B - Les tentatives de rationalisation de la fiscalité
affectée ont jusqu’à présent échoué
1 -
L’ordonnance de 1959 a cherché à rationaliser la parafiscalité
en lui donnant une assise juridique
Plus de vingt ans après l’apparition des premières taxes
parafiscales, leur régime juridique est organisé
par l’ordonnance du
2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. Son
article 4 autorise ainsi le Gouvernement à établir, par décret en Conseil
d’État, des «
taxes parafiscales, perçues dans un intérêt économique ou
19
Selon Francis Quérol, qui a consacré un ouvrage à la parafiscalité (
La Parafiscalité
,
Francis Quérol, CNRS Droit, 1997), l’émergence des premières taxes parafiscales
remonte à 1935 et se développe rapidement après la seconde guerre mondiale. Il
s’agissait alors de remédier aux dérèglements économiques liés à la reconstruction en
permettant à des organismes, moyennant perception de prélèvements, de gérer au
mieux la pénurie. Avant que le régime soit organisé dans sa forme connue par
l’ordonnance organique du 2 janvier 1959, les taxes parafiscales étaient réparties en
trois groupes distincts et hétérogènes : les taxes parafiscales d’ordre économique ; les
taxes parafiscales de nature sociale ; les taxes destinées à assurer le financement
d’organismes divers.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
17
social au profit d’une personne morale de droit public ou privé autre que
l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics
administratifs
». L’ordonnance prévoit également que «
la perception de
ces taxes au-delà du 31 décembre de l’année de leur établissement doit
être autorisée chaque année par une loi de finances
». Dans un tel cadre,
il est donc possible au pouvoir réglementaire de créer des taxes en
s’exonérant d’une autorisation préalable par le pouvoir législatif.
De manière paradoxale, en définissant le régime de la parafiscalité,
l’ordonnance organique de 1959 était en soi une première tentative de
rationalisation de celui-ci. L’ordonnance organique tentait également de
donner un cadre juridique contraignant aux affectations de recettes
fiscales. Son article 18 prévoyait ainsi que «
dans tous les autres cas,
l’affectation est exceptionnelle et ne peut résulter que d’une disposition
de loi de finances, d’initiative gouvernementale. Aucune affectation n’est
possible si les dépenses résultent d’un droit permanent reconnu par la
loi
».
Ce
cadre
initial
s’étant
rapidement
révélé
insuffisamment
contraignant pour limiter le foisonnement de taxes parafiscales, le
législateur a cherché à le renforcer :
rhombus5
les taxes parafiscales ont fait l’objet, à partir de 1978
20
, d’un
recensement annuel annexé au projet de loi de finances (PLF),
comprenant les principales données et informations relatives aux
taxes parafiscales et à leur utilisation ;
rhombus5
le décret n° 80-854 du 30 octobre 1980 relatif aux taxes
parafiscales prévoyait leur caducité au-delà de 5 ans. Il rendait
nécessaire l’adoption d’un nouveau décret pour que les taxes
continuent à être perçues, afin que ne soient pas perpétués des
prélèvements ayant perdu leur raison d’être.
En dépit de ces tentatives, le régime de la parafiscalité est resté
insatisfaisant :
rhombus5
l’encadrement
juridique
était
insuffisant.
L’intervention
du
Parlement se limitait ainsi à autoriser chaque année, par un article
unique, la simple poursuite de la perception des taxes existantes ;
20
Article 81 de la loi de finances pour 1977.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
18
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
les taxes parafiscales étaient par ailleurs juridiquement fragiles
.
Établies par voie réglementaire, elles étaient en effet plus
facilement contestables devant les juridictions administratives
qu’une imposition de toutes natures (ITN) établie par voie
législative. Si la jurisprudence avait mis en place des critères de
distinction entre taxes parafiscales et ITN, leur maniement n’était
pas toujours évident
21
. Par ailleurs, les taxes parafiscales
généraient un important contentieux communautaire en matière
d’aides d’État
;
rhombus5
elles étaient enfin faiblement contrôlées, ce qui pouvait contribuer
à une mauvaise efficience de la dépense publique. Chaque année,
la Cour des comptes constatait ainsi des dysfonctionnements au
sein des établissements affectataires. Par exemple, en 1998, la
Cour avait pu constater, à propos de l’Institut technique des
céréales et des fourrages et de la société Unigrains, que
l’abondance des ressources d’origine parafiscale avait conduit,
d’une part, à la constitution d’une trésorerie pléthorique et, d’autre
part, à accorder des aides étrangères à leur objet, dans une grande
opacité.
La tentative de rationalisation poursuivie par l’ordonnance
organique de 1959 a donc eu des résultats contrastés.
2 -
La LOLF de 2001 a supprimé le régime de la parafiscalité
Les
difficultés
soulevées
par
les
taxes
parafiscales
ont
progressivement fait émerger un consensus en faveur de leur suppression.
Alors que l’on comptait 77 taxes parafiscales en 1980, elles n’étaient plus
que 41 en 2002, pour un montant total de 2,8 Md€.
La disparition du régime de la parafiscalité est actée par la LOLF.
L’article 63 de la loi organique prévoit ainsi qu’à défaut de dispositions
législatives particulières, les taxes parafiscales peuvent être perçues
jusqu’au 31 décembre 2003. L’article 67 prévoit quant à lui leur
disparition définitive au 1
er
janvier 2005. La disparition des taxes
parafiscales s’est traduite, au cas par cas, par une « fiscalisation » des
taxes parafiscales, par leur rebudgétisation ou leur suppression,
généralement compensée par une dotation budgétaire, ou, dans le secteur
agricole, par leur transformation en cotisations dites « volontaires
obligatoires » (CVO).
21
Ainsi, un prélèvement destiné à contribuer par le financement d’actions excédant
l’intérêt économique ou social propre d’un secteur d’activité particulier, à la
réalisation des objectifs généraux d’intérêt national de la politique économique du
Gouvernement, constitue une imposition de toutes natures (CE, Ass, 26 octobre 1990,
Union fédérale des consommateurs).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
19
Plus généralement, la LOLF a également cherché à rationaliser la
fiscalité affectée en reconnaissant son caractère dérogatoire et en
cherchant à encadrer les affectations, notamment dans l’article 2
(
cf. chapitre IV
).
C - À l’étranger, l’affectation de ressources fiscales à
des tiers dotés de la personnalité morale est une
pratique globalement peu développée et très encadrée
L’examen, dans les principaux pays de l’OCDE, de l’ampleur des
affectations de ressources fiscales et de ses modalités montre que le
principe d’universalité budgétaire est assez strictement respecté.
Quelques traits saillants de cet examen peuvent être mis en avant
(
cf. encadré 2 ci-après
) :
rhombus5
le principe d’universalité budgétaire est généralement prévu par
une norme juridique d’un niveau élevé (notamment en Allemagne
et en Italie, où le principe est d’ordre constitutionnel) ;
rhombus5
les dérogations au principe d’universalité sont possibles, mais
encadrées : ainsi, soit les affectations de recettes doivent être
justifiées (par exemple, par un lien entre la dépense et la recette,
comme en Allemagne), soit le recouvrement reste une prérogative
d’une administration d’État (comme en Italie) ;
rhombus5
les affectations internes au budget général de l’État sont souvent
privilégiées aux affectations à des tiers dotés de la personnalité
morale ; en d’autres termes, les affectations bénéficient moins à
des entités dotées de la personnalité morale qu’à des politiques
publiques. De telles pratiques sont particulièrement courantes dans
les pays anglo-saxons, où les agences ne sont pas dotées de la
personnalité morale mais constituent une modalité d’organisation
de l’administration, sous le pouvoir hiérarchique du ministre
22
;
rhombus5
en cas d’affectation, des modalités de contrôle de la ressource
existent. Celle-ci peut soit faire l’objet d’une retenue forfaitaire et
de mesures de régulation budgétaire (États-Unis), soit être
réexaminée
annuellement
(Royaume-Uni)
ou
régulièrement
(Allemagne). Dans certaines agences suédoises percevant des
quasi-redevances,
le
contrôle
est
maximal :
ainsi,
l’entité
affectataire ne reçoit pas directement le produit de la taxe, mais
une subvention budgétaire calculée à partir des coûts de revient des
services produits.
22
Cf.
Étude des stratégies de réforme de l’État à l’étranger
, rapport n° 2010-M-098-
02 de l’inspection générale des finances, avril 2011.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
20
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Encadré 2 : Le principe d’universalité budgétaire
dans quelques pays de l’OCDE
1/ En Allemagne
, le principe d’universalité budgétaire a une valeur constitutionnelle
(article 110 de la Loi fondamentale). La Cour constitutionnelle a précisé en 2004 que
le principe de non-affectation, bien que découlant du principe d’universalité, n’avait
cependant pas la même valeur constitutionnelle et qu’il pouvait y être dérogé par la
loi. En application de cette jurisprudence, la loi budgétaire annuelle peut prévoir des
« taxes spéciales » (
Sonderabgaden
) sous cinq conditions :
square4
les contribuables doivent former un groupe homogène et doivent être distingués
du reste de la collectivité par des intérêts communs et d’autres circonstances de
fait ;
square4
un lien doit exister entre les personnes redevables de la taxe et l’objet pour lequel
la taxe est levée ;
square4
une responsabilité collective pour la réalisation de la politique financée doit
pouvoir être reconnue ;
square4
le produit de la taxe doit être utilisé à des fins d’intérêt collectif ;
square4
l’intérêt de la taxe doit être régulièrement réexaminé, afin de s’assurer que sa
justification soit toujours d’actualité.
2/ En Italie,
le principe d’universalité a également une valeur constitutionnelle
(article 81 de la Constitution). La loi peut néanmoins affecter des recettes fiscales à
des personnes morales autres que l’État, sans qu’un lien entre le secteur assujetti et la
politique menée par l’affectataire soit exigé. Ainsi, une contribution sur les primes
d’assurances incendie, responsabilité civile, vol et autres risques a été affectée au
fonds de solidarité pour les victimes d’extorsion et des pratiques usuraires
,
géré par le
ministère de l’intérieur. Des affectations au sein du budget général sont en effet
possibles (la « redevance RAI », due par chaque détenteur d’un poste de télévision,
est ainsi affectée au financement de la télévision publique).
Si des affectations à des tiers dotés de la personnalité morale existent, elles n’ont
cependant pas nui au caractère centralisé du recouvrement. Ce dernier est en effet
assuré l’
Agenzia delle entrate
, sur le fondement de conventions triennales signées
avec l’affectataire. Ces conventions sont le résultat d’un effort de simplification de
l’administration fiscale italienne, consacré par la fusion en 2001 de tous les services
de recouvrement (douaniers, territoriaux, etc.) au sein de cette entité.
3/ Au Royaume-Uni et aux États-Unis,
l’universalité apparaît plus souple, comme
en témoignent les modèles de
Consolidated Funds.
Au Royaume-Uni, des comptes
spéciaux (
Trading Funds
)
peuvent être créés par des administrations dispensant des
services ; les
Appropriation-in-aid
permettent, pour leur part, l’affectation de recettes,
fiscales ou non-fiscales à un ministère ou autre personne publique en vue de la
réalisation d’une politique particulière. Aux États-Unis, les fonds spéciaux
(
Earmarked Funds
)
sont votés par le Parlement en vue de réaliser des projets,
programmes ou prêts et qui peuvent alimenter n’importe quelle administration ou
personne morale, y compris de droit privé comme des entreprises ou des organisations
à but non-lucratif. L’affectation n’a pas été définie juridiquement et aucun critère ne
semble préalable à l’examen d’un
Appropriation Act,
sinon le passage devant
l’
Appropriat
ion
Committee
qui
décide seulement de l’opportunité de le transmettre au
Congrès.
Les États-Unis et le Royaume-Uni relèvent d’un modèle qui peut être qualifié de
« semi-affectation » :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
21
square4
d’une part, les revenus fiscaux transitent systématiquement par le
Consolidated
Fund
avant leur affectation aux fonds spéciaux ;
square4
d’autre part, certains liens subsistent avec le budget général, prenant notamment
la forme de mesures de régulations budgétaires. Les États-Unis prévoient ainsi
une retenue systématique de 5% des montants affectés en tant que participation
au financement de l’État fédéral, et les sommes non utilisées pour l’année fiscale
en cours peuvent être réaffectées. Au Royaume-Uni, les affectations sont
soumises au même principe d’annualité que les dotations budgétaires, sauf
disposition législative contraire ;
square4
enfin, les affectations sont essentiellement internes, les agences n’ayant
généralement pas de personnalité morale. Elles peuvent représenter une
part
importante du budget général : en 2012 aux États-Unis, les affectations à plus de
300 fonds s’élevaient à 1 700 Md$, dont près de 900 Md$ de recettes fiscales,
représentant ainsi près de la moitié du budget fédéral ; au Royaume-Uni, 50 Md£
(60 Md€), composés à 80% de ressources et à 20% de subventions, étaient
affectés à des comptes spéciaux en 2011.
4/ En Suède
, pays très « agencisé » (99% des agents publics travaillent pour des
agences), les affectations de ressources fiscales ont été simplifiées. En 2011, le
gouvernement et le parlement ont par exemple décidé d’uniformiser les modes de
financements de l’agence en charge des transports. Certaines missions de l’agence
étaient en effet financées par des contributions (transports aériens et maritimes) et
d’autres par des taxes (transports ferroviaires et routiers). Les activités de l’agence
sont désormais toutes rémunérées sous forme contributive : il revient à l’agence de
déterminer les coûts de ses prestations, qui doivent être équivalents au coût de ces
activités. Les contributions recouvrées par l’agence sont ensuite versées à l’État et
l’agence reçoit chaque année une dotation équivalente à ses services.
II
-
Bien qu’ancienne, la fiscalité affectée est
néanmoins difficile à appréhender faute
d’une définition rigoureuse
Bien que l’affectation de ressource fiscale soit une pratique
ancienne,
il n’existe aucune définition juridique de la notion de taxe
affectée
dans la Constitution, dans la LOLF, dans le code général des
impôts ou dans une loi de finances.
Juridiquement, deux critères semblent pourtant pouvoir définir une
taxe affectée à partir des deux éléments qui,
a priori
, la caractérisent :
rhombus5
son caractère ITN, au sens de l’article 34 de la Constitution ;
rhombus5
son affectation, en dehors du budget général de l’État, à une entité
dotée de la personne morale.
Ces deux critères sont toutefois insuffisants pour appréhender, de
manière satisfaisante, l’ensemble du champ de la fiscalité affectée.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
22
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
A - Les taxes affectées n’ont pas nécessairement le
caractère d’imposition de toutes natures
1 -
Une taxe affectée devrait théoriquement être, en premier lieu,
un prélèvement entrant dans la catégorie des ITN
A priori
, une taxe affectée devrait entrer, tout d’abord, dans la
catégorie des ITN, au sens de l’article 34 de la Constitution.
Juridiquement, une ITN ne fait pas l’objet d’une définition
« positive » précise ; elle constitue une
catégorie résiduelle au sein des
prélèvements obligatoires. Elle n’est, en effet, définie que par opposition
aux diverses autres formes de prélèvements.
Ainsi, une ITN n’est
(
cf. encadré infra
)
:
rhombus5
ni une redevance,
c’est-à-dire une contribution trouvant une
contrepartie directe dans une prestation fournie par l’entité
affectataire ;
rhombus5
ni une cotisation sociale
, laquelle ouvre droit à des prestations ;
rhombus5
ni un prélèvement sur recettes
, lequel ne peut bénéficier qu’aux
collectivités locales et à l’Union européenne ;
rhombus5
ni une contribution obligatoire
, généralement versée par un
secteur d’activité économique pour des actions communes.
Encadré 3 : La distinction entre les ITN et les autres formes
de prélèvements
1/ Une taxe affectée se distingue d’une redevance pour service rendu
, qui se
caractérise pourtant également par son affectation au producteur de services :
une redevance est demandée à des usagers
, ce qui implique d’identifier le bénéficiaire
du service. Si un service, même dirigé vers une personne déterminée, est assuré dans
l’intérêt général, alors il ne peut donner lieu à la perception d’une redevance
23
. Il ne s’agit
pas non plus d’une redevance lorsque ce n’est pas l’usage du service qui rend exigible le
paiement
24
;
une redevance doit trouver sa contrepartie directe dans les prestations fournies par le
service ou dans l’utilisation de l’ouvrage. Selon les termes de la jurisprudence
traditionnelle, «
constitue une redevance pour service rendu, toute redevance demandée
à des usagers en vue de couvrir les charges d’un service public déterminé ou les frais
23
Il en va ainsi pour les droits acquittés en cas de contrôle médical des demandeurs de
titres de séjour
(CE, 2/1 ssr, 30 mars 2000, 205266, GISTI, Rec. p.122).
24
Par exemple, s’agissant de la « redevance » pour enlèvement des ordures
ménagères, si l’assiette est le nombre de mètres-cubes d’eau potable consommés et
facturés par la régie des eaux à ses usagers, il ne s’agit pas, juridiquement, d’une
redevance (
CE 6 mai 1985, Commune de Pointe-à-Pitre, T. p.557).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
23
d’établissement et d’entretien d’un ouvrage public, et qui trouve sa contrepartie directe
dans les prestations fournies par le service ou dans l’utilisation de l’ouvrage
»
25
.
C’est un point fondamental de distinction avec la taxe qui, elle, n’a pas de
contrepartie équivalente.
Concernant le montant de la redevance, celui-ci ne devait pas excéder manifestement le
coût du service rendu par l’établissement (le Conseil d’État a toutefois aujourd’hui une
vision plus souple, le montant d’une redevance pouvant excéder le coût de revient de la
prestation sans qu’elle ne devienne une imposition
26
).
2/
Une taxe affectée se distingue d’une cotisation sociale,
qui présente une
contrepartie directe par le financement des prestations auxquelles elle ouvre droit
27
. À
l’inverse, si le versement est sans effet sur la prestation, il a le caractère d’une ITN
28
. La
CSG a ainsi été qualifiée, dès sa création, d’ITN par le Conseil constitutionnel
29
.
3/
Une taxe affectée se distingue d’un prélèvement sur recettes.
Celui-ci, qui consiste
à dériver une partie des recettes de l’État vers d’autres bénéficiaires en opérant une
soustraction du montant correspondant sur ses recettes brutes, ensuite retracée dans une
comptabilité extrabudgétaire, est envisagé de manière restrictive à l’article 6 de la
LOLF ; il ne peut exister que pour deux bénéficiaires : l’Union européenne et les
collectivités territoriales. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a jugé qu’il n’était pas
une recette affectée
30
.
4/ Une taxe affectée se distingue plus difficilement de certaines contributions
obligatoires
.
Cette catégorie, qui ne fait pas l’objet d’une définition juridique rigoureuse,
regroupe les contributions qui doivent être versées, le plus souvent par des entreprises
appartenant à un même secteur d’activité, pour l’organisation de leur profession ou au
bénéfice de leurs salariés. Si ces prélèvements étaient versés sur une base volontaire et
sans intervention de la puissance publique, ils ne constitueraient pas des ITN mais des
versements volontaires d’une nature privée et relevant de rapports de droit privé, comme
le sont par exemple les cotisations versées à une association sportive. Cependant, lorsque
l’État appose son
imperium
pour rendre ces contributions obligatoires, cette intervention
rapproche ces prélèvements des ITN.
2 -
Toutefois, le critère d’ITN doit être relativisé
L’idée selon laquelle une taxe affectée est nécessairement une
imposition de toutes natures doit néanmoins être relativisée. D’une part,
25
CE, Ass, 21 novembre 1958, Syndicat national des transporteurs aériens, Rec.
p.572.
26
La fixation du montant peut tenir compte de l’avantage économique procuré à
l’utilisateur du service ou de l’ouvrage et dans tous les cas, les montants doivent être
fixés selon des critères objectifs et rationnels respectant le principe d’égalité et les
règles de la concurrence (
CE, Ass, 16 juillet 2007, Syndicat national de défense de
l’exercice libéral de la médecine à l’hôpital, 293229, Rec. p.349).
27
Décision du 13 août 1993, n°
93-325 DC, loi relative à la maîtrise de l’immigration
et aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour des étrangers en France.
28
CE 6 octobre 1999, Caisse nationale d’assurance-maladie des professions
indépendantes, 200241, Rec. p.300.
29
Décision n°90-285 DC du 28 décembre 1990, Loi de finances pour 1991.
30
Décision du 29 décembre 1982
, n° 82-154 DC, loi de finances pour 1983
.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
24
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
comme indiqué
supra
, les ITN n’ont pas de définition propre
« positive » ; elles ne se définissent que par la négative (« elles ne sont ni
des redevances, ni des cotisations sociales, etc. »), ce qui n’est pas
satisfaisant conceptuellement. D’autre part, en pratique, la frontière entre
ITN et certaines catégories de prélèvements peut être délicate à tracer, en
particulier pour les redevances et les contributions obligatoires.
Concernant les redevances, la distinction avec les impositions de
toutes natures n’est pas toujours évidente,
d’autant plus que certaines
taxes s’intitulent improprement « redevances »
; il est ainsi parfois
nécessaire d’attendre une prise de position du juge constitutionnel ou
administratif. La jurisprudence administrative ou constitutionnelle peut
cependant être évolutive, comme le montre l’exemple des
contributions
perçues par les agences de l’eau (intitulées « redevances » par la loi du
16 décembre 1964), ou des « redevances » d’assainissement (
cf. encadré
4 ci-dessous
).
Encadré 4 : Des qualifications juridiques fluctuantes : le cas des agences
de l’eau et des redevances d’assainissement
1/ Les contributions perçues par les agences de l’eau ont vu leur qualification
juridique évoluer au fil du temps :
le Conseil d’État, dans un avis rendu le 27 juillet 1967, a tout d’abord considéré que
les redevances créées par la loi du 16 décembre 1964 n’étaient assimilables ni à des
impôts, ni à des taxes parafiscales, ni à des redevances pour service rendu, ni à des
taxes syndicales. Il s’agissait d’un nouveau type de redevances créé par le législateur,
sui generis
;
par la suite, le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État ont considéré que les
redevances perçues par les agences de l’eau devaient être rangées parmi les ITN
31
;
ces redevances ont ainsi été transformées et sont présentées parmi les ressources
fiscales affectées, depuis l’adoption de la loi n°2006-1772 du 30 décembre 2006 sur
l’eau et les milieux aquatiques.
2/ Les redevances d’assainissement illustrent également la difficulté à distinguer
entre taxe et redevance selon l’existence d’une contrepartie
:
le Conseil d’État les a dans un premier temps regardées comme des taxes
32
au motif
que les personnes négligeant de se raccorder devaient acquitter une somme au moins
équivalente au montant de la redevance ;
une décision ultérieure du Conseil constitutionnel sur la loi relative au prix de l’eau
en 1984
33
a conduit le Conseil d’État à distinguer entre les propriétaires bénéficiant du
raccordement, assujettis à une redevance et les autres, assujettis à une taxe.
31
Décision n°82-124 L du 23 juin 1982, cons 2 et .CE, Ass, 20 décembre 1985, SA
Établissements Outters, 31927, Concl Psd Martin, Rec. p382, RJF 2/86 n° 194.
32
CE, Sect, 21 novembre 1975, Sté la grande brasserie moderne, Rec. p.584.
33
Décision n° 83-166 DC du 29 décembre 1983.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
25
Concernant
les
contributions
obligatoires,
particulièrement
hétérogènes
, toutes ne se distinguent pas aisément des ITN
:
rhombus5
comme pour les redevances, la jurisprudence peut être évolutive.
Ainsi,
dans une décision de 2011
34
, le
Conseil constitutionnel a
jugé que la contribution versée par les associations de gestion et de
comptabilité à l’ordre des experts-comptables n’était pas une ITN.
Dans un cas similaire, le Conseil d’État avait, à l’inverse, jugé
qu’une contribution annuelle destinée à assurer le fonctionnement
du conseil national de la formation médicale continue était une
imposition
35
.
La
motivation
du
juge
administratif
ou
constitutionnel étant en outre parfois succincte, l’utilisation de la
jurisprudence ne permet pas d’opérer des distinctions certaines ;
rhombus5
l’exemple des
cotisations volontaires obligatoires (CVO),
en
vigueur dans le secteur agricole, soulève par ailleurs d’importantes
difficultés d’analyse.
Les
CVO
sont
des
cotisations
que
les
organisations
professionnelles les plus représentatives de la production agricole peuvent
être habilitées à prélever sur tous les membres de leur profession
36
. Bien
que de droit privé, ces cotisations possèdent un caractère obligatoire car
elles font l’objet d’un arrêté de reconnaissance conjoint du ministre de
l’agriculture et du ministre de l’économie et des finances.
D
ans une décision récente
37
, le Conseil constitutionnel a jugé que
les CVO ne constituaient pas des impositions de toutes natures,
en
considérant que leur objet - le financement de l’organisation d’une
activité privée - rendait difficile une telle qualification.
Cependant, l’exclusion du champ de la fiscalité affectée des CVO
n’est pas satisfaisante
.
En effet, une partie des anciennes taxes
parafiscales, qui avaient un objet proche de celui des CVO (à savoir,
assurer
la promotion d’un secteur de production), ont été compensées,
lors de la suppression des taxes parafiscales, par des ITN. C’est par
exemple le cas des contributions affectées aux centres techniques
industriels (CTI) ou aux comités professionnels de développement
économique (CPDE).
34
Décision du 28 décembre 2011, n° 2011-645 DC, loi de finances rectificative pour
2011.
35
CE, Ass, 3 juillet 1998, Syndicat des médecins d’Aix et région et autres.
36
Articles L. 632-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime.
37
Décision n° 2011-221 QPC du 17 février 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
26
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Dans ce contexte, il apparaît légitime de s’interroger sur la
pertinence de la frontière qui sépare, juridiquement, les CVO et les taxes
bénéficiant aux CTI et aux CPDE.
Au-delà des contributions obligatoires, d’autres formes de
prélèvements, dont le statut juridique n’est pas toujours stabilisé,
semblent ne pas pouvoir être exclus du champ des impositions de toutes
natures
(
cf. encadré 5 ci-après
)
:
rhombus5
les dispositifs
sui generis
qui combinent un prélèvement fiscal et
un investissement ou une dépense obligatoire pour un employeur :
la participation des employeurs à l’effort de construction,
couramment appelée le « 1 % logement » ; la participation des
employeurs au développement de la formation professionnelle
continue ; la taxe d’apprentissage ;
rhombus5
le fonds de garantie des dépôts.
Encadré 5 : Quelques contributions obligatoires s’apparentant à des ITN
1/
L
a participation des employeurs à l’effort de construction, couramment
appelée le « 1% logement
38
»
, est un versement assis sur la masse salariale que les
employeurs versent aux organismes constituant l’union d’économie sociale pour le
logement (UESL). Il a été qualifié par le Conseil d’État d’
« investissement
obligatoire, à la charge des employeurs occupant au minimum dix salariés
39
».
L’objet principal de cette participation n’étant pas de procurer des ressources à une
personne publique, mais d’obliger les employeurs à engager des actions en faveur du
logement de leurs salariés, il ne s’agit pas, au départ, d’une imposition. Pour la
cotisation (non affectée), prévue par l’article 235 bis du code général des impôts
lorsque les employeurs n’ont pas procédé à ces investissements, le Conseil
constitutionnel
40
a en revanche confirmé sa nature fiscale.
38
Il est né dans les années 1940 de l’initiative volontaire de groupements
d’entreprises désirant faciliter le logement de leurs salariés. Le taux est fixé, depuis
1992, à 0,45 % de la masse salariale.
39
CE, 2/6 ssr, 21 janvier 1983, Confédération générale des cadres et autres, 23439, T.
p. 605.
40
Décision n° 2010-84 QPC du 13 janvier 2011.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
27
Une question demeure cependant quant à la partie « investissement » du dispositif.
D’une part, si les collecteurs agréés sont regroupés au sein de l’UESL
41
, l’affectation
relève de dispositions législatives et réglementaires (codifiées au code de la
construction et de l’habitation). Un décret est ainsi prévu tous les trois ans pour
décider de la répartition des sommes ; les marges de manoeuvre des employeurs-
investisseurs sont donc réduites. D’autre part, l’État opère un prélèvement sur la
collecte des sommes reversées ensuite à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine
(ANRU)
42
et à l’agence nationale de l’habitat (ANAH)
43
.
Il y a donc lieu de se
demander si le 1% logement ne peut pas, dans sa globalité, être qualifié de taxe
affectée.
2/ La participation des employeurs au développement de la formation
professionnelle continue
44
, soulève la même difficulté d’analyse : ainsi, lorsqu’un
employeur n’a pas opéré les versements à l’organisme collecteur ou a opéré un
versement insuffisant, le montant de sa participation au financement de la formation
professionnelle continue est majoré de l’insuffisance constatée.
3/ La taxe d’apprentissage
, assise sur les salaires, possède également un caractère
dual, bien que différent. En application des articles L. 6241-2 et suivants du code du
travail, une part de son montant, déterminée par décret, est versée au Trésor public. Le
solde peut être versé de différentes manières : lorsqu’il emploie un apprenti,
l’employeur apporte un concours financier au centre de formation ou à la section
d’apprentissage où est inscrit cet apprenti ; les concours financiers apportés aux écoles
d’enseignement
technologique
et
professionnel
sont
exonérés
de
la
taxe
d’apprentissage ; il en va de même pour les employeurs relevant du secteur des
banques et des assurances où existaient, avant le 1
er
janvier 1977, des centres de
formation qui leurs étaient propres. Il s’agit donc d’un prélèvement fiscal avec des
investissements exonératoires.
4/ Le fonds de garantie des dépôts (FGD)
, qui est une personne morale de droit
privé, gère trois mécanismes de garanties, ayant pour objet d’indemniser des
déposants en cas d’indisponibilité de leurs dépôts ou de faillite de leur banque. En
application de l’article L. 312-7 du code monétaire et financier, le FDG est alimenté
par les ressources financières que procurent les établissements de crédit adhérents
(certificats d’association émis par le fonds ; emprunt ; cotisations dues par les
établissements de crédit affiliés à un des organes centraux mentionnés à l’article
L. 511-30
45
).
Ces cotisations, qui n’ont jamais été qualifiées par un juge, présentent néanmoins des
similitudes avec des contributions obligatoires. En effet, ces cotisations n’ont pas
seulement pour objet de financer l’organisation d’une profession mais visent
également à assurer la stabilité financière en réduisant le risque de
bank run
.
41
Article L. 313-17 du code de la construction et de l’habitation : l’UESL est une SA
coopérative à capital variable.
42
Article R. 313-19-4.
43
Article R. 313-19-5.
44
Articles L. 6331-1 et suivants du code du travail.
45
Il s’agit de Crédit agricole SA, de l’organe central des caisses d’épargne et des
banques populaires, et de la Confédération nationale du crédit mutuel.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
28
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
B - Ces taxes ne sont pas toutes affectées à des entités
dotées de la personnalité morale
1 -
Une taxe affectée devrait théoriquement abonder une entité
dotée de la personnalité morale
Lorsqu’une imposition est instituée, sans précision quant à son
affectation, elle relève du budget général de l’État. À l’inverse,
l’alinéa 2
de l’article 2 de la LOLF prévoit qu’une affectation de taxes bénéficie « à
un tiers » ; il implique donc, en théorie, que l’affectataire soit une entité
dotée de la personnalité morale.
En pratique, l’exigence posée par la LOLF est majoritairement
respectée, la plupart des affectataires étant dotés de la personnalité
morale. Ceux-ci peuvent avoir des statuts juridiques très différents. La
grande
majorité
est
constituée
par
des
établissements
publics
administratifs comme par exemple l’Agence de financement des
infrastructures de transport de France (AFITF), affectataire de la taxe due
par les concessionnaires d’autoroutes ou de la taxe poids lourds, ou des
chambres consulaires, qui bénéficient de taxes additionnelles à la
contribution
économique
territoriale
(CET).
On
trouve
quelques
établissements publics industriels et commerciaux, comme l’agence de
l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), affectataire de
la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), des groupements
d’intérêt public (GIP), comme le centre national de gestion (CNG), ainsi
que des autorités publiques indépendantes (API) telles que l’autorité des
marchés financiers (AMF). Les CTI ou les CPDE, affectataires de taxes
fiscalisées à la suite de la disparition des taxes parafiscales, sont pour leur
part des personnes morales de droit privé
46
.
2 -
L’exigence de la personnalité morale est cependant
aujourd’hui affaiblie
Dans les faits, cependant, une affectation peut désormais bénéficier
à une entité sans personnalité morale.
D’une part, certaines entités non dotées de la personnalité morale
bénéficient de taxes affectées. Dans la pratique, ces entités sont adossées
à un établissement public afin de pouvoir affecter directement une recette
à une dépense
:
46
Ils sont des établissements d’utilité publique, dotés de la personnalité civile en
application des articles 1 de la loi n° 78-654 du 22 juin 1978 et L. 342-1 du code de la
recherche.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
29
rhombus5
l’autorité de contrôle prudentiel (ACP), autorité administrative
indépendante (AAI) non dotée de la personnalité morale, voit ainsi
ses frais de contrôle collectés par la Banque de France
47
;
rhombus5
la Caisse des dépôts et consignations (CDC), qui a le statut
d’établissement public, permet également des adossements. Le
fonds national de solidarité active (FNSA), qui finance le revenu
de solidarité active (RSA), est ainsi géré par la CDC, celle-ci
percevant les recettes affectées au fonds
48
;
rhombus5
plus récemment, l’article 40 de la loi de finances pour 2013 a
prévu qu’une fraction de la taxe sur les transactions financières
(TTF) serait affectée au fonds de solidarité pour le développement
(FSD), fonds sans personnalité morale mais adossé à l’Agence
française de développement (AFD), qui a un statut d’établissement
public.
D’autre part, l’abondement, par des ressources fiscales, de certains
comptes spéciaux ou de budgets annexes de l’État présente des
caractéristiques proches de ce qu’il est convenu aujourd’hui d’appeler des
« taxes affectées ». À titre d’exemple, la contribution à l’audiovisuel
public est ainsi affectée aux différentes entités composant le le service
public audiovisuel
via
un compte de concours financier.
C - En raison de leur nature particulière, les taxes
perçues pour les collectivités locales et les impôts
« sociaux » relèvent d’un autre champ d’analyse
À l’inverse, deux types d’impositions, présentant la double
caractéristique d’être des ITN et d’être « affectés » à des entités dotées de
la personnalité morale, nécessitent un traitement spécifique en raison de
leur nature particulière : il s’agit, d’une part, des impôts perçus pour les
collectivités locales et, d’autre part, de trois impôts « sociaux » (la CSG,
la CRDS et le forfait social).
Les taxes perçues pour les collectivités territoriales répondent,
pour leur part, à l’exigence constitutionnelle d’autonomie financière des
collectivités territoriales fixée par l’article 72-2 de la Constitution ; leurs
ressources propres doivent constituer ainsi une part déterminante de
l’ensemble de celles-ci. Dès lors qu’une imposition de toutes natures
entre dans le ratio de ressources propres des collectivités territoriales, il
est donc difficile de parler d’exception aux principes budgétaires et
47
Article L. 612-20 du code monétaire et financier.
48
Article L. 226-24 du code de l’action sociale et des familles.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
30
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
d’affectation, car il ne serait pas possible de les remplacer par des
dotations budgétaires.
Concernant certaines taxes perçues par la sphère sociale, celles-ci
peuvent être analysées comme des « impôts sociaux », soulevant d’autres
problématiques que celles de la fiscalité affectée. En première analyse, il
n’existe pas, à l’inverse des collectivités territoriales, de principe
constitutionnel d’autonomie des caisses de sécurité sociale ou de
contrainte sur l’origine de leur financement
49
. Ainsi, rien n’interdit à
l’État de financer largement la protection sociale par l’intermédiaire de
dotations budgétaires. En 1990, avant la création de la CSG, les
financements publics sous forme de dotations budgétaires représentaient
environ 17% des ressources de la sécurité sociale. En outre, il a été
décidé, à plusieurs reprises, d’alléger le poids des cotisations sociales et
de les remplacer par des ITN, moins distorsives.
Dans les faits, l’affectation d’ITN aux organismes de sécurité
sociale a pris deux modalités différentes :
rhombus5
certaines ressources ont été affectées dès leur création aux
organismes de sécurité sociale. Il s’agit, par exemple, de la CSG
50
,
de la CRDS
51
, mais également d’une vingtaine de taxes dont les
montants sont relativement faibles
52
en comparaison des deux
premières taxes
53
;
rhombus5
à l’inverse, d’autres ressources ont été affectées, ultérieurement à
leur création, à ces organismes pour des raisons essentiellement
budgétaires. Il s’agit, par exemple, des fractions de taxe sur la
TVA brute collectée par les fabricants de lunettes.
Bien que le Conseil constitutionnel ne se soit pas encore prononcé
sur ce point, les possibilités d’une remise en cause trop radicale du mode
de financement des organismes de sécurité sociale semblent limitées
.
En
49
Les deux grands principes de la protection sociale française, lesquels ont plus une
dimension historique que juridique, révèlent surtout le choix d’un modèle davantage
bismarckien que béveridgien ; ils établissent une gestion paritaire des différentes
caisses par les partenaires sociaux et un financement par des cotisations sociales,
ouvrant droit au bénéfice de la protection.
50
Créée par la loi n° 90-1168 du 29 décembre 1990 de finances pour 1991.
51
Créée par l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de
la dette sociale.
52
Entre 2 M€ pour la contribution salariale sur les
carried-interests
prévue à l’article
L. 137-18 du code la sécurité sociale et 2,6 Md€ pour le prélèvement de 2 % sur les
revenus du patrimoine et les produits de placement et contribution exceptionnelle
prévue à l’article 1600-0 F bis du code général des impôts.
53
En 2013, 91,9 Md€ pour la CSG et 6,8 Md€ pour la CRDS.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
31
effet, les différents types de ressources fiscales affectées à la sécurité
sociale n’ont pas la même portée historique, financière et symbolique :
rhombus5
la CSG et la CRDS traduisent le choix politique, historique et
financier
explicite de modifier le mode de financement originel de
la protection sociale tout en préservant son autonomie. Elles
peuvent être qualifiées « d’impôts sociaux » ou, par analogie avec
les collectivités territoriales, de « quasi ressources propres » de la
sécurité
sociale
pour
lesquels
il
paraîtrait
historiquement,
politiquement et même constitutionnellement difficile de les
remplacer par des dotations budgétaires. Ces deux impôts,
caractérisés par une assiette très large et des produits significatifs,
se distinguent donc des autres taxes affectées aux organismes de
sécurité sociale qui pourraient sans difficulté être remplacées par
des subventions du budget général de l’État ;
rhombus5
le forfait social
54
apparaît, pour sa part, comme un prélèvement
complémentaire aux cotisations sociales ;
rhombus5
les autres taxes perçues par les caisses de sécurité sociale sont soit
des fractions d’impôts nationaux (par exemple, la TVA), soit des
impôts spécifiques, frappant les contribuables bénéficiant de la
capacité contributive la plus élevée (par exemple, la fiscalité sur
les
stock-options
). Elles pourraient donc être perçues directement
par l’État, tout comme la contribution sociale de solidarité à la
charge des sociétés (C3S)
55
; leur caractère de taxe affectée ne fait
donc aucun doute.
54
Créé en 2008 par l’article 13 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de
financement de la sécurité sociale, le forfait social est une contribution patronale
basée sur des rémunérations directes ou indirectes non soumises aux cotisations
sociales mais qui sont imposées à la CSG. Il s'applique lorsque les bénéficiaires de ces
rémunérations sont des résidents français assujettis à un régime obligatoire
d'assurance-maladie.
55
Instituée par la loi n° 70-13 du 3 janvier 1970, la contribution sociale de solidarité à
la charge des sociétés (C3S) est, depuis son origine, un prélèvement exclusivement
affecté aux organismes de sécurité sociale. Elle avait, dès son origine, pour but de
compenser l'amenuisement des ressources des régimes des travailleurs indépendants
résultant du développement de l'emploi salarié. Contrairement à ce qui s’est produit
pour la CSG, aucun débat de fond n’avait vraiment été conduit, à l’époque, sur une
éventuelle évolution du modèle de la protection sociale engendrée par cette taxe ; par
ailleurs, dans le cas où une clarification des relations financières entre l’État et les
organismes de sécurité sociale interviendrait, cette imposition pourrait être remplacée
par d’autres taxes affectées ou par des dotations budgétaires. Dans ce contexte, le
Conseil des prélèvements obligatoires a conclu au rattachement de la C3S au
périmètre des taxes affectées.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
32
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Par convention, le Conseil des prélèvements obligatoires a
choisi d’exclure du champ de ce rapport les taxes perçues pour les
collectivités
territoriales,
ainsi
que
les
trois
impôts
sociaux
(CSG, CRDS et forfait social)
.
D - La connaissance des taxes affectées demeure par
ailleurs limitée
1 -
Récemment renforcée, l’information du Parlement et du citoyen
en matière de taxes affectées pourrait encore être améliorée
L’absence de définition juridique ou administrative précise des
taxes affectées a pour conséquence de rendre leur recensement et leur
suivi complexe.
L’existence de nombreux documents de suivi des taxes affectées
traduit cet éclatement de l’information. Le Conseil des prélèvements
obligatoires a ainsi relevé au moins six sources d’information différentes
(
cf. encadré 6 ci-après
)
.
Encadré 6 : Les différentes sources d’information en matière de taxes affectées
square4
l’article 51 de la LOLF
dispose que le Gouvernement communique chaque année,
avec le projet de loi de finances, «
une annexe explicative comportant la liste et
l’évaluation, par bénéficiaire ou catégorie de bénéficiaires, des impositions de toute
nature affectées à des personnes morales autres que l’État
».
Dans la pratique, ce
recensement des taxes affectées est effectué dans la partie VII du premier tome de
l’évaluation, dites des « voies et moyens » ;
square4
l’annexe budgétaire relative aux opérateurs de l’État
, dite « jaune » opérateurs
56
,
comporte, depuis 2011, un tableau de synthèse retraçant, à partir des informations du
« voies et moyens », les montants prévisionnels et exécutés des principales taxes
affectées aux opérateurs de l’État ;
square4
les taxes affectées à « certaines dépenses » de l’État
via
des budgets annexes ou des
« comptes spéciaux »
57
sont mentionnées en loi de finances parmi l’ensemble des
recettes versées aux comptes spéciaux (notamment au
tableau de l’état A
concernant les comptes d’affectation spéciale
). Elles ne font, en revanche, pas
l’objet d’un recensement synthétique ; ainsi, leurs prévisions et leurs exécutions de
recettes sont respectivement récapitulées dans les projets annuels de performances
(PAP) et dans les rapports annuels de performances (RAP) des comptes spéciaux
concernés ;
56
Depuis le projet de loi de finances pour 2007, conformément aux dispositions de
l’article 14 de la loi n° 2006-888 du 19 juillet 2006 portant règlement définitif du
budget de 2005, le PLF de l’année est accompagné d’un «
rapport récapitulant, par
mission et programme, l’ensemble des opérateurs de l’État ou catégories
d’opérateurs et les crédits ou les impositions affectées qui leur sont destinés
».
57
Par exemple, la contribution à l’audiovisuel public, à travers le compte de concours
financiers « Avances à l’audiovisuel public ».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
33
square4
le
« rapport sur les prélèvements obligatoires et leurs évolutions »
, prévu par
l’article 52 de la LOLF et joint chaque année au PLF, présente la répartition des
prélèvements obligatoires par catégorie d’administrations publiques. Il retrace
également la liste des impôts et taxes constitutifs des prélèvements obligatoires, au
sens de la comptabilité nationale ;
square4
la comptabilité des affectataires
doit traduire le versement d’une taxe à une entité ;
square4
enfin, les documents retraçant les comptes de la sécurité sociale
, en particulier le
rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale et l’annexe 6 au projet de
loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) prévue par la loi organique relative
aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS)
58
.
Les « voies et moyens » constituent la principale source
d’information en matière de taxes affectées
. Cette annexe budgétaire a,
ces dernières années, connu des progrès constants, tant dans son contenu
que dans sa présentation. Par exemple, le mécanisme de plafonnement
fait l’objet, depuis 2013, d’une présentation commentée. Le document
budgétaire communiqué au Parlement répond ainsi aux exigences de la
loi organique, limitées à la production d’une liste annuelle de taxes
affectées, tout en apportant des éléments qualitatifs pour une meilleure
compréhension du phénomène d’affectation.
Cependant, l’information que ces différentes sources contiennent
en matière de fiscalité affectée apparaît encore fragile :
rhombus5
il n’existe aucun recensement exhaustif de l’ensemble des taxes
affectées
. À titre d’exemple, le « jaune » opérateurs
recensait
seulement 32 affectations à des opérateurs en 2013, contre 92
bénéficiant à des organismes divers d’administration centrale dans
le « voies et moyens ». Même au sein du « voies et moyens », qui
est la source d’information la plus complète, certaines taxes ne
sont pas recensées : c’est ainsi le cas de la taxe bénéficiant au
Centre national de gestion (CNG – 10 M€) ou de la CSPE
(3,7 Md€ en 2013), pour laquelle seule figure la fraction affectée
au médiateur national de l’énergie (7 M€, soit moins de 2 ‰ du
produit total de cette taxe). Par ailleurs, faute d’avoir pu être
déterminés, les montants exécutés ou prévisionnels de certaines
taxes ne sont pas précisés (quinze taxes en 2013) ;
58
Loi organique n° 2005-881 du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la
sécurité sociale.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
34
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
les données ne sont pas homogènes
entre elles
. En effet, selon la
source des données comptables, celles-ci peuvent relever d’une
comptabilisation des encaissements – c’est notamment le cas des
taxes recouvrées par la direction générale des finances publiques
(DGFiP) ou les douanes – ou d’une comptabilisation des droits
constatés – par exemple lorsque les URSSAF détiennent le pouvoir
de recouvrement ;
rhombus5
les données présentées dans les différents documents ne sont
pas toujours cohérentes et fiables entre elles.
Ces incohérences,
qui portent aussi bien sur les montants exécutés que sur les
montants prévisionnels, sont parfois significatives
59
;
rhombus5
au sein d’un même document, les données ne sont pas
cohérentes entre elles
. C’est en particulier le cas du « jaune »
opérateurs, qui comporte à la fois un tableau de synthèse retraçant
les montants prévisionnels et exécutés des principales taxes
affectées et, pour certains opérateurs, des informations comptables.
La comparaison de ces deux informations fait parfois apparaître
des écarts significatifs (
cf. tableau 1 ci-dessous
).
Tableau 1 : Quelques écarts de montants de taxes affectées en exécution
pour l’année 2010 au sein du « jaune » opérateurs 2012
Montant de taxe affectée
apparaissant en exécuté
dans la partie de
synthèse (M€)
Montant de taxe affectée
apparaissant dans les
éléments comptables
(comptes financiers, M€)
Écart
(M€)
Écart
(%)
AFITF
549
852
- 303
-36 %
France Agri Mer
116
33
83
252 %
OFII
129
92
37
40 %
ANTS
164
181
- 17
-9 %
ONCFS
70
77
- 7
-9 %
Fonds de
solidarité
1 478
0,1
1 477,9
NS
ONEMA
123
0
123
-
INPI
170
195
- 25
-13 %
Source : «
Jaune
» opérateurs 2012.
59
Par exemple, pour l’année 2011, tandis que le «
jaune
» opérateur (page 259)
mentionne, pour FranceAgriMer, un montant de 32 M€ de recettes affectées au
compte financier voté, les voies et moyens (page 141) indiquent 118 M€ de taxes. Les
prévisions pour 2012 divergent aussi (108 M€ dans le «
jaune
», 120 M€ dans les
voies et moyens). De même, en 2013, la taxe hydraulique affectée à Voies navigables
de France est évaluée à 138 M€ par le « jaune »
opérateurs
(page 302) et les voies et
moyens (page 145), mais à 175 M€ par le rapport sur les prélèvements obligatoires
(page 61).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
35
rhombus5
enfin,
certaines sources de données manquent de fiabilité,
en
particulier
la
comptabilité
de
certains
affectataires
et
la
comptabilité nationale (
cf. encadré 7 ci-dessous
).
Encadré 7 : Les difficultés posées par la comptabilité des affectataires et
par la comptabilité nationale
1/ La
comptabilité de l’ensemble des affectataires est, dans la pratique,
difficilement exploitable
. D’une part, l’information n’est pas toujours disponible
pour les administrations de tutelle (c’est notamment les cas des entités privées, sans
tutelle de l’État, ou encore des chambres consulaires), et n’est pas toujours
directement exploitable. D’autre part, les montants de taxes affectées ne sont pas
directement traçables dans les comptabilités de certaines des entités bénéficiaires, en
particulier les agences de l’État :
les données ne sont disponibles qu’à condition qu’un comptable public tienne la
comptabilité de l’agence ; ce n’est pas toujours le cas (par exemple, Pôle emploi n’a
plus de comptable public, alors que l’agence nationale pour l’emploi – ANPE – en
avait un) ;
dans le cas où un comptable public est présent, le système d’information de la
DGFiP permet des extractions sous réserve que le comptable public saisisse, en fin
d’exercice, des données du bilan et du compte de résultat de l’établissement ;
cependant, chaque année, plus de 20 % des comptables publics ne renseignent pas ces
informations
;
enfin, faute de compte dédié pour l’enregistrement des taxes affectées, les écritures
comptables ne sont pas enregistrées de manière harmonisée entre agences.
2/ La comptabilité nationale, qui suit les prélèvements obligatoires (PO), présente
des insuffisances importantes.
Au-delà des critères d’appartenance au groupe des
PO, qui sont toujours sujets à interprétation, l’institut national de la statistique et des
études économiques (INSEE) ne suit pas de manière fine et régulière les taxes
affectées. Ainsi, sur une liste de 223 taxes affectées, l’INSEE n’a pas été en mesure
d’indiquer si 117 de ces taxes, pourtant recensées dans le « voies et moyens », étaient
des PO. Par ailleurs, il n’existe pas de base de données permettant de suivre, année
après année, l’évolution, détaillée par PO, des montants financiers.Au total, aucune
série longue n’est disponible, ni en périmètre constant ni en périmètre courant, qui
permettrait de connaître les montants des recettes prévues et exécutées par taxe.
Aussi, bien que l’information à destination du Parlement et du citoyen en matière de
fiscalité affectée soit conforme à la législation en vigueur, et qu’elle ait progressé
récemment, la qualité de cette information ne permet pas une connaissance fine du
phénomène d’affectation de taxes. L’objectif de court terme, fixé par la loi organique,
d’élaboration des documents budgétaires a pris le pas sur celui, essentiel, de maîtrise
et de mise en perspective de l’information.
2 -
Le manque de maîtrise de l’information résulte en grande
partie d’une gouvernance éclatée
Au-delà de l’absence de définition des taxes affectées, trois autres
facteurs expliquent les difficultés à disposer de données exhaustives et
fiabilisées concernant les taxes affectées :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
36
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
d’une part, l’éclatement de la gouvernance de ces taxes empêche
une
maîtrise
centralisée
de
l’information
fiscale.
Plus
généralement, plusieurs services administratifs élaborent des
documents de synthèse spécifiques à un ou plusieurs secteurs,
selon des périmètres et des méthodes de comptabilisation propre ;
rhombus5
d’autre part, la consolidation menée par le ministère du budget
pour l’élaboration des documents budgétaires repose quasi
exclusivement sur une démarche déclarative des ministères de
tutelle ou, dans certains cas, des affectataires ;
Encadré 8 : La procédure de recensement des taxes affectées
Depuis l’exercice 2012, dans la perspective du débat budgétaire de l’automne, le
ministre chargé du budget lance annuellement une campagne de recensement et de
prévision des taxes affectées par voie de circulaire. Cette circulaire, adressée aux
ministres, fournit des instruments communs de recensement ; les ministères doivent
par ailleurs vérifier et amender, si nécessaire, les listes des impositions et des
affectataires, de manière à en garantir l’exhaustivité, préciser les fondements
juridiques et mentionner les dernières données d’exécution et les données de prévision
pour l’année à venir. Pour le recensement établi pour le PLF 2013, la circulaire du
4 juillet 2012
60
précise, en outre, que les données quantitatives s’entendent hors
plafonnement et qu’elles doivent être accompagnées d’éléments d’explication
qualitatifs. Enfin, la circulaire demande aux ministères de transmettre ces
informations, par courrier électronique, en juillet.
Dans la pratique, la collecte d’informations peut s’avérer complexe, notamment en
raison du nombre important de taxes et d’affectataires (
cf. infra
). Selon les ministères,
les informations recueillies sont soit centralisées par la direction des affaires
financières, soit directement envoyées par les services au ministère du budget ; en
outre, certaines données ne sont parfois pas connues par les ministères, mais par les
affectataires eux-mêmes. Enfin, le calendrier d’élaboration des « voies et moyens » ne
coïncide pas nécessairement avec celui de la production des informations
quantitatives. C’est singulièrement le cas pour les comptes sociaux et pour ceux des
collectivités territoriales, dont les données ne parviennent au ministère du budget
qu’au début de l’automne.
Une fois ces informations collectées, la direction du budget procède à plusieurs
vérifications avant de finaliser le document budgétaire. Ces vérifications sont
indispensables, les données collectées étant souvent incomplètes, non exhaustives ou
imprécises (ainsi, certaines réponses ne précisent pas si le montant communiqué
correspond au produit net des frais de recouvrement éventuellement perçus par les
services de l’État).
Au total, l’élaboration des « voies et moyens » s’appuie sur un ensemble de tableaux
transmis au ministère du budget dans des formats très hétérogènes, le modèle adressé
par voie de circulaire n’étant pas toujours repris dans la réponse.
60
Circulaire NOR BUDB1227882C.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
37
rhombus5
enfin, le recouvrement des taxes n’est pas centralisé, la DGFiP ou
la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI)
ne disposant pas d’un monopole du pouvoir de recouvrement des
taxes affectées. Par exemple, les redevables de la taxe sur les
services de télévision (TST) remplissent une déclaration conforme
au modèle agréé par le Centre national du cinéma et de l’image
animée (CNC), la lui transmettent par voie électronique et, selon
les dispositions de l’article L. 115-10 du code du cinéma et de
l’image animée, «
acquittent la taxe auprès de l'agent comptable
»
de l’établissement. Le fait que le recouvrement soit opéré par
l’affectataire, et non par un service de l’État, augmente les
asymétries d’informations entre l’État et les bénéficiaires de taxes
affectées et, in fine, nuit à la maîtrise de l’information.
III
-
Pour ses travaux, le Conseil des prélèvements
obligatoires a arrêté une définition
de la fiscalité affectée
En l’absence d’une définition et de critères juridiques précis
permettant de définir de manière satisfaisante le champ couvert par les
taxes affectées,
le Conseil a arrêté, pour le présent rapport, sa propre
définition de la fiscalité affectée.
À partir de l’analyse juridique développée précédemment, il a ainsi
constaté qu’il existait
trois groupes distincts de prélèvements,
qui
n’étaient d’ailleurs pas nécessairement des ITN :
un premier ensemble est constitué de prélèvements perçus par
une entité sur un fondement constitutionnel ou historique, sur
lequel il est impossible ou difficile de revenir par une loi de
finances. Il s’agit des collectivités territoriales, affectataires sur
fondement constitutionnel, et du secteur social, affectataire pour
des raisons historiques et politiques d’impôts « sociaux », en
l’espèce la CSG, la CRDS et le forfait social ;
un deuxième ensemble est constitué de prélèvements perçus par
des tiers autres, dotés de la personnalité morale, c’est-à-dire, en
pratique, les agences de l’État, les agences locales ou les chambres
consulaires ou des organismes professionnels au sens large (CTI,
CPDE, offices agricoles). Leurs modalités de financement par
taxes affectées ne résultent d’aucune exigence juridique ;
un troisième ensemble est constitué par de prélèvements perçus
par des entités qui ne sont pas dotés de la personnalité morale, ou
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
38
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
par des affectations « internes » à l’État via des comptes spéciaux
(budgets annexes, comptes d’affectation spéciale, comptes de
concours financier).
Au sens du présent rapport, on qualifiera de « taxe affectée »
une affectation relevant des deuxième et troisième catégories.
A - Afin de clarifier le concept de taxes affectées,
le Conseil propose une définition « positive » fondée
sur quatre critères simples
Dans ce cadre, le Conseil propose
une définition « positive » des
taxes affectées
. Selon cette définition, une taxe affectée respecterait
les
quatre critères suivants
:
rhombus5
elle est soit une imposition de toutes natures, c’est-à-dire un
prélèvement obligatoire qui n’ouvre droit ni à une contrepartie
équivalente, ni à des prestations sociales ; soit, de manière plus
marginale, une contribution rendue obligatoire par un acte
législatif ou réglementaire ;
rhombus5
elle est affectée à une entité, dotée ou non de la personnalité
morale, et non au budget général de l’État ;
rhombus5
elle finance une mission d’intérêt général ;
rhombus5
sa suppression ou son remplacement par une dotation budgétaire
sont possibles constitutionnellement.
Cette définition, qui vise à rassembler sous un vocable unique les
divers
dispositifs
existants,
n’est
toutefois
qu’une
définition
administrative, qui ne doit pas nécessairement donner lieu à la création
d’une nouvelle catégorie juridique.
B - Dans les faits, le champ couvert par la fiscalité
affectée apparaît très large et hétérogène
Dans les faits, cette définition conduit à distinguer
sept blocs de
taxes affectées
:
rhombus5
les ITN affectées au sein du budget de l’État, mais hors du budget
général (budget annexe, compte d’affectation spéciale, compte de
concours financier) ;
rhombus5
les ITN affectées à des agences de l’État, non nécessairement
dotées de la personnalité morale ;
rhombus5
les ITN affectées à des chambres consulaires ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
39
rhombus5
les
prélèvements
affectés
aux
organismes
techniques
et
professionnels (notamment les CTI, les CPDE, les ordres
professionnels, les interprofessions agricoles), qu’ils soient ou non
des ITN (comme les contributions volontaires obligatoires) ;
rhombus5
les ITN affectées aux organismes de sécurité sociale, pouvant être
remplacées par des subventions budgétaires (ce qui exclut donc la
CSG, la CRDS et le forfait social) ;
rhombus5
les dispositifs péréquateurs et de solidarité nationale, tels que la
CSPE, le FNAL ou le FNSA ;
rhombus5
les contributions rendues obligatoires par l’État et les prélèvements
sui generis
, comme le « 1 % logement », la taxe d’apprentissage,
les prélèvements de formation professionnelle.
L’ensemble formé par les taxes affectées constitue donc un
ensemble relativement hétérogène.
Graphique 1 : Le champ retenu pour les taxes affectées
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Chapitre II
La fiscalité affectée a connu un
développement intense ces dernières
années et se concentre sur un nombre
restreint de secteurs d’activités
Afin de présenter une cartographie complète de la fiscalité affectée,
telle que définie dans la première partie de ce rapport, les informations
disponibles ont été collectées, fiabilisées et analysées.
Les taxes affectées ont d’abord été analysées du point de vue de
leurs bénéficiaires
: elles ont ainsi été ventilées par affectataires ; leurs
principales caractéristiques et leur dynamique ont également été étudiées.
Elles ont ensuite été analysées du point de vue des assujettis, en
particulier des principaux secteurs d’activité économique concernés
.
Les taxes affectées ont ainsi été ventilées par secteurs d’activité, puis le
poids de cette fiscalité a été, pour chaque secteur d’activité, précisé par
rapport à l’ensemble des prélèvements obligatoires.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
42
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
I
-
Les taxes affectées, dont le nombre est évalué
à 309 et le rendement à 112 Md€ en 2011, ont
récemment connu une croissance soutenue
A - L’examen des taxes affectées révèle un paysage
composé pour l’essentiel de taxes de petite taille,
représentant plus de 5 % de PIB
1 -
Avec 309 taxes et un rendement de 112 Md€ en 2011, la fiscalité
affectée constitue désormais une importante catégorie
de prélèvement
En 2011, sur un champ excluant les taxes perçues par les
collectivités locales et les trois impôts « sociaux », le nombre de taxes
affectées, telles que définies précédemment, peut être évalué à 309 – dont
56 CVO. Ces taxes sont principalement concentrées dans le champ des
agences
de
l’État
(138 taxes),
dans
la
sphère
professionnelle
(66 taxes) et dans la sphère sociale (49 taxes) – (
cf. tableau 2 ci-dessous)
.
Toutefois, le décompte arrêté par le Conseil est probablement
en
deçà du nombre réel de taxes affectées
: ainsi, l’annexe budgétaire des
« voies et moyens », qui constitue la principale source d’information
utilisée pour ce recensement, regroupe parfois différentes taxes sous une
même appellation. Par exemple, alors que les agences de l’eau perçoivent
dix contributions, le document budgétaire les regroupe en trois catégories.
Tableau 2 : Nombre de taxes affectées et d’affectations (2011)
Catégories d’affectataires
Taxes affectées
Affectations
Réaffectations internes à l'État
11
11
Agences de l'État
138
142
Agences locales
9
10
Chambres consulaires
6
6
Organismes techniques et professionnels
66
73
Organismes de sécurité sociale
49
NC
Dispositifs de péréquation et de solidarité
6
7
Contributions rendues obligatoires par l'État
24
NC
Total
309
NC
Source : Voies et moyens ; Conseil des prélèvements obligatoires.
NB : Le nombre total de taxes affectées est inférieur au nombre d’affectations,
lorsqu’il est connu. En effet, une taxe peut être affectée à plusieurs affectataires
(par exemple la taxe sur les locaux à usage de bureaux, affectée à la région Île-
de-France, à la Société du grand Paris, à l’union d’économie sociale du
logement et à l’État).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
43
Tableau 3 : Exemples de taxes affectées
Catégories
d’affectataires
Nom des taxes affectées
Réaffectations
internes à l'État
Contribution à l'audiovisuel public
Contribution annuelle des distributeurs d'énergie électrique en basse
tension
Contribution supplémentaire à l'apprentissage
Taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d'immatriculation des
véhicules
Agences de l'État
Contribution de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi
Contribution des organismes de protection sociale complémentaire à la
couverture universelle complémentaire du risque maladie
Contribution solidarité autonomie
Redevances pour pollution de l'eau, modernisation des réseaux de
collecte, pollutions diffuses, prélèvement sur la ressource en eau,
stockage d'eau en période d'étiage, obstacle sur les cours d'eau et
protection du milieu aquatique
Taxe annuelle sur les locaux à usage de bureaux, les locaux
commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement
annexées à ces catégories de locaux perçue dans la région Île-de-France
Taxe due par les concessionnaires d'autoroutes
Taxe générale sur les activités polluantes
Taxe sur les éditeurs et distributeurs de services de télévision
Taxes spéciales d'équipement
Agences locales
Taxe additionnelle à la taxe sur les installations nucléaires de base
Taxes sur les nuisances sonores aéroportuaires
Versement de transport dû par les entreprises de plus de 9 salariés
implantées (IDF)
Versement de transport dû par les entreprises de plus de 9 salariés
implantées en province
Chambres
consulaires
Taxes additionnelles sur la cotisation sur la valeur ajoutée des
entreprises (CVAE) et sur la cotisation foncière des entreprises (CFE)
Organismes
techniques et
professionnels
CVO agricoles
Taxe pour le comité professionnel des stocks stratégiques pétroliers
Taxes affectées aux CTI et aux CPDE
Organismes de
sécurité sociale
Contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité des
sociétés
Contribution sociale de solidarité des sociétés
Contribution sur les contrats d'assurance en matière de circulation de
véhicules terrestres à moteur
Contribution tarifaire d'acheminement
Droits de consommation sur les alcools
Droits de consommation sur les tabacs
Fractions de TVA affectées aux organismes de sécurité sociale
Prélèvement de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de
placement et contribution additionnelle
Taxe sur les salaires
Taxe sur les véhicules de société
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
44
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Catégories
d’affectataires
Nom des taxes affectées
Taxes sur les primes d'assurance automobile
Dispositifs de
péréquation et de
solidarité
Contribution additionnelle aux prélèvements sociaux mentionnés aux
articles L. 245-14 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale (affectée au
fonds national des solidarités actives)
Contribution au service public de l'électricité
Contributions additionnelles de 1,1 % au prélèvement de 2 % sur les
revenus du patrimoine et les produits de placements
Cotisation des employeurs au fonds national d’aide au logement
Contributions
rendues
obligatoires par
l'État
Participation des employeurs à l'effort de construction (1% logement)
Participation des employeurs au développement de la formation
professionnelle continue
Taxe d’apprentissage
Source : Voies et moyens ; Conseil des prélèvements obligatoires.
NB : Pour permettre le suivi d’un périmètre constant de taxes, la fraction de TVA affectée au
compte de concours financiers « Avances aux organismes de sécurité sociale », ultimement
affectée aux organismes de sécurité sociale, n’a pas été regroupée avec les réaffectations
internes à l’État.
En 2011, le montant recouvré des taxes affectées est estimé à
plus de 112 Md€.
Tableau 4 : Produits des taxes affectées
(En M€)
Catégories d’affectataires
2007
2008
2009
2010
2011
2012 (p)
2013 (p)
Réaffectations internes à l'État
3 691
4 215
4 132
4 175
4 918
4 974
5 302
Agences de l'État
10 506
10 548
11 465
12 386
13 833
13 996
14 628
Agences locales
5 524
6 609
6 602
6 890
7 671
7 635
7 885
Chambres consulaires
1 624
1 688
1 758
1 799
1 848
1 947
1 913
Organismes techniques
et professionnels
868
937
822
811
834
1 048
1 355
Organismes de sécurité sociale
41 739
46 620
47 234
48 932
54 059
57 691
58 660
Dispositifs de péréquation
et de solidarité
3 563
4 259
5 960
6 872
8 364
9 038
9 982
Contributions rendues obligatoires
par l'État
16 727
16 915
18 498
19 295
20 518
20 688
21 014
Total
84 243
91 791
96 472
101 160
112 045
117 016
120 739
Source : Voies et moyens ; Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : L’année 2007 est choisie comme année de référence pour les travaux du Conseil des
prélèvements obligatoires car elle voit se stabiliser, après l’entrée en vigueur de la LOLF,
la
documentation budgétaire; les chiffres produits avant 2007 n’étant ni exhaustifs, ni totalement
fiables, ils ne sont pas utilisés pour les analyses quantitatives du Conseil.
Elles apparaissent principalement concentrées dans la sphère
sociale :
les
taxes
affectées
aux
organismes
de
sécurité
sociale
représentaient, en 2011, près de la moitié des montants totaux (48 %). Les
contributions rendues obligatoires par l’État représentaient, pour leur part,
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
45
18 % (20,5 Md€). Plus de 12 % (13,8 Md€) des taxes sont affectées aux
agences de l’État.
Les taxes affectées sont donc une catégorie de prélèvement dont le
poids macroéconomique, loin d’être négligeable, est comparable à celui des
taxes sociales ou des taxes constitutives des ressources propres des
collectivités locales.
Elles représentent, en 2011, 5,2 % du PIB.
Tableau 5 : Poids des taxes affectées par rapport à d’autres catégories
de prélèvement (2010)
Md€
Part de PIB
Impôts « sociaux » (CSG, CRDS, forfait social)
88,3
4,6 %
Taxes constitutives des ressources propres des
collectivités locales
106,2
5,5 %
Taxes affectées (champ retenu par le CPO)
101,2
5,2 %
Cotisations sociales
231,3
11,9 %
Prélèvements sur recettes
74,0
3,8 %
Ensemble des prélèvements obligatoires
822,1
42,5 %
Source :
Voies et moyens ; Rapports sur les PO et leurs évolutions ; INSEE ;
Conseil des prélèvements obligatoires.
2 -
Prises individuellement, ces taxes apparaissent
généralement de taille modeste et présentent des coûts de
gestion importants
Si les taxes affectées constituent une catégorie significative de
prélèvements, elles sont, prises individuellement, de petite taille. La
ventilation des taxes en fonction de leur rendement financier laisse en effet
apparaître un nombre important de « micro taxes ». Ainsi, en 2011,
29 taxes (soit près de 10% des taxes affectées) possèdent individuellement
un rendement financier annuel inférieur à 0,5 M€, soit un rendement
cumulé inférieur à 14,5 M€ ; 81 taxes ont pour leur part un rendement
individuel inférieur à 5,5 M€.
Tableau 6 : Ventilations des taxes par rendement (2011)
Rendement r (M€)
Nombre de taxes
Produit maximum (M€)
r
0,5 M€
29
14,5
0,5 M€
r
1,5 M€
11
16,5
1,5 M€
r
2,5 M€
16
40,0
2,5 M€
r
5,5 M€
25
137.5
Total (r
5,5 M€)
81
208.5
Source : Voies et moyens 2013.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
46
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Tableau 7 : Exemples de « micro-taxes »
Taxe
Affectataire
Montant
(2013, M€)
Redevances biocides
Agence nationale de sécurité
sanitaire, de l'alimentation, de
l'environnement et du travail
2
Droit progressif sur l’enregistrement
des produits homéopathiques
Caisse nationale d’assurance maladie
2
Droit sur l’enregistrement des
médicaments traditionnels à base de
plantes
Caisse nationale d’assurance maladie
2
Taxe spécifique pour la chambre
nationale de la batellerie artisanale
Chambre nationale de la batellerie
artisanale
2
Taxe sur les prémix
Caisse nationale d’assurance maladie
< 0,5
Taxe et prélèvements spéciaux au
titre des
films pornographiques ou
d’incitation à la violence
Centre national du cinéma et de
l’image animée
0,05
Taxe due par les concessionnaires
de mines d’or en Guyane
Conservatoire de la biodiversité en
Guyane
< 0,5
Contribution spéciale versée par les
employeurs des étrangers sans
autorisation de travail
Office français de l'immigration et
de l'intégration
2
Contribution perçue au profit de
l’institut national de prévention et
d’éducation pour la santé
Institut national de prévention et
d'éducation pour la santé
< 0,5
Source : Voies et moyens ; Conseil des prélèvements obligatoires.
Les coûts de collecte et de recouvrement des taxes affectées sont
d’autant plus importants que leur rendement est modeste.
Les taux
d’intervention des administrations fiscales, c’est-à-dire le rapport entre les
coûts de la collecte et du recouvrement et les masses financières collectés,
varient en effet dans des proportions importantes en fonction de la
ressource fiscale recouvrée. Cette variabilité des coûts de collecte tient à la
fois aux caractéristiques de l’assiette, au degré de complexité du
recouvrement et à la « taille de l’impôt ».
Ce dernier élément joue un rôle particulièrement important dans les
coûts de recouvrement et de gestion. Ainsi, la direction des grandes
entreprises de la DGFiP a montré que les deux tiers des taxes affectées
qu’elle recouvrait avaient des coûts de gestion très élevés par rapport à leur
produit (
cf.
tableau 8 ci-dessous
).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
47
Tableau 8 : Mise en relation des opérations d’encaissement et des recettes
associées aux 60 taxes affectées recouvrées par la direction des grandes
entreprises de la DGFiP (en M€)
Tranches de
recettes
Nombre
de taxes
Recettes
2012
Opérations d'encaissement
Ratio opérations
d'encaissement
sur recettes
Montant
en %
Nombre
en %
De 0 à 1
20
5,02
0,06 %
1 122
2,15 %
42,8
De 1 à 10
14
55,03
0,70 %
6 043
11,59 %
21
De 10 à 100
15
515,09
6,57 %
7 024
13,47 %
2,6
Plus de 100
11
7 266,48
92,67 %
37 962
72,79 %
1
Total
60
7 841,62
100,00 %
52 151
100,00 %
-
Source : Direction des grandes entreprises – DGFiP.
À partir de cette analyse, la DGFiP a mis en évidence que les vingt
taxes dont le produit est inférieur à 1 M€ ont procuré moins d’un millième
du total des soixante taxes affectées, alors qu’elles ont nécessité 2,15 % des
opérations. En retenant comme unité le nombre d’opérations nécessaires
pour encaisser les taxes de plus de 100 M€ de produit, la DGFiP conclut
donc à ce que la charge de collecte est près de 43 fois plus lourde pour les
taxes au rendement le plus faible.
Au-delà du produit très modeste de certaines taxes affectées, deux
autres constats peuvent être dressés :
rhombus5
les volumes financiers apparaissent très concentrés : en 2013, 78 %
des taxes représentaient 10 % du rendement total ; à l’inverse, un
peu moins de 10 % des taxes représentaient plus des trois quarts des
volumes financiers ;
Tableau 9 : Ventilation des taxes affectées en fonction de leur rendement
prévu en 2013
(En M€)
1
er
décile
2ème
décile
3ème
décile
4ème
décile
5
ème
décile
6ème
décile
7
ème
décile
8ème
décile
9
ème
décile
Seuil du décile
ε
ε
2
10
20
48
108
200
499
Volume
financier cumulé
du décile
ε
22
128
298
669
1 524
3 297
7 165
18 430
Source : Voies et moyens ; Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : Pour les deux premiers déciles, le rendement individuel de chaque taxe n’est pas
toujours chiffré par les voies et moyens car inférieur à 500 000 €.
rhombus5
pour certains affectataires, le nombre de taxes perçues est
particulièrement important.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
48
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Tableau 10 : Exemple d’entités affectataires de plus de quatre taxes (2013)
Affectataires
Nombre de taxes affectées
Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés
22
Office français de l'immigration et de l'intégration
12
Caisse centrale de la mutualité sociale agricole
12
Agences de l’eau
10
Fonds de solidarité vieillesse
8
Centre national du cinéma et de l'image animée
5
Agence nationale des titres sécurisés
5
FranceAgriMer
5
Centre national pour le développement du sport
4
Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de
l'environnement et du travail
4
Source : Voies et moyens ; Conseil des prélèvements obligatoires.
B - Les taxes affectées sont des prélèvements
particulièrement dynamiques
1 -
Leur dynamique apparaît relativement importante
au sein des prélèvements obligatoires
Sur un périmètre constant, constitué de l’ensemble des taxes
affectées systématiquement présentes entre 2007 et 2013, leur croissance
apparaît relativement dynamique,
la plupart des catégories d’affectataires
voyant leurs ressources augmenter de manière significative. C’est en
particulier le cas des taxes affectées aux agences de l’État (+ 33,0 %), aux
organismes techniques ou professionnels (+ 44,5 %) et aux dispositifs de
solidarité nationale (+ 85,7 %).
Tableau 11 : Croissance des taxes affectées entre 2007 et 2013
(périmètre constant
61
)
Catégorie d’affectataires
Croissance totale
Croissance annuelle
moyenne
Réaffectations internes à l'État
+ 17,5%
+ 2,7%
Agences de l'État
+ 33,0%
+ 4,9%
Agences locales
+ 42,7%
+ 6,1%
Chambres consulaires
+ 17,8%
+ 2,8%
Organismes techniques et professionnels
+ 44,5%
+ 6,3%
Organismes de sécurité sociale
NS
NS
Dispositifs de péréquation et de solidarité
+ 85,7%
+ 10,9%
Contributions rendues obligatoires par l'État
+ 28,4%
+ 4,3%
Total
+ 35,3%
+ 5,2%
Source : Voies et moyens ; Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : Compte tenu des nombreuses modifications d’affectations sur le champ de la
sécurité sociale, il n’est pas possible de calculer une évolution à périmètre constant
pour cette catégorie d’affectation.
61
Périmètre constitué des taxes présentes toutes les années entre 2007 et 2013.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
49
Par ailleurs, par rapport à l’ensemble des prélèvements obligatoires,
les taxes affectées croissent de manière très dynamique.
Ainsi, sur un
périmètre constant excluant la sécurité sociale, la fiscalité affectée connaît,
entre 2007 et 2011, une croissance près de quatre fois plus importante que
l’ensemble des prélèvements obligatoires (+ 27,6 % pour la première,
contre + 7 % pour les seconds).
Tableau 12 : Croissance des taxes affectées (périmètre constant
62
) et des
prélèvements obligatoires (2007-2011)
Catégorie d’affectataires
Croissance totale
2007-2011
Croissance
annuelle moyenne
2007-2011
Taxes affectées (hors sécurité sociale)
+ 27,6%
+ 6,3%
Ensemble des prélèvements obligatoires
+ 7,0%
+ 1,7%
Source : Voies et moyens ; Rapports sur les prélèvements obligatoires et leurs
évolutions ; Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : L’année 2011 est la dernière année connue pour les prélèvements obligatoires.
Certaines taxes apparaissent, à ce titre, particulièrement
dynamiques :
rhombus5
les dix taxes les plus dynamiques, en valeur relative, connaissent
ainsi une croissance comprise entre 10 M€ et 4,55 Md€ sur la
période 2010 à 2013 ; cinq de ces taxes concernent des agences de
l’État ;
rhombus5
les dix taxes les plus dynamiques, en valeur absolue, connaissent une
augmentation cumulée de 12,2 Md€ sur la période 2010 à 2013.
2 -
La dynamique des taxes affectées apparaît souvent mal
appréhendée par les administrations
La dynamique des taxes affectée reste mal appréhendée par les
administrations, comme le montrent les difficultés pour celles-ci à établir
des projections d’évolution des rendements. Ainsi, en 2011, plus du tiers
des taxes ont ainsi connu un rendement sensiblement différent de celui qui
était anticipé ; 48 taxes ont été surévaluées (ou sous-évaluées) de + 10 %
(respectivement de -10 %).
62
Périmètre constitué des taxes présentes toutes les années entre 2007 et 2013.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
50
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Tableau 13 : Écart entre le prévisionnel et l’exécution (nombre de taxes)
Écart entre le
prévisionnel et l’exécuté
inférieur à -10 %
Écart entre le prévisionnel
et l’exécuté compris entre -
10 % et +10 %
Écart entre le prévisionnel
et l’exécuté supérieur à
+10 %
2007
9
78
12
2008
7
98
10
2009
7
100
15
2010
11
89
16
2011
21
89
27
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Plusieurs raisons peuvent expliquer cette difficulté à évaluer les
rendements prévisionnels :
rhombus5
pour les micro-taxes, les assiettes restent mal connues et les
évolutions erratiques ;
rhombus5
la collecte de taxes par les bénéficiaires eux-mêmes introduit une
asymétrie d’informations avec les administrations de tutelle, qui se
traduit notamment par des difficultés à anticiper les montants
collectés ;
rhombus5
enfin, les modifications fréquentes, au cours de l’année, des assiettes
et des taux introduit une volatilité non négligeable.
II
-
La fiscalité affectée se concentre sur un nombre
réduit de secteurs d’activité
A - La majorité des taxes affectées ne pèse pas sur un
seul secteur d’activité
L’examen des taxes affectées permet de distinguer, selon les
caractéristiques des assujettis,
deux ensembles distincts de taxes
:
rhombus5
un premier ensemble rassemble des taxes affectées ayant pour
spécificité de ne reposer que sur un seul secteur d’activité
économique, au sens de ceux qui sont recensés par sections dans la
nomenclature
statistique
nationale
d’activités
élaborée
par
l’INSEE
63
. Cet ensemble de taxes peut être qualifié de
« fiscalité
affectée sectorielle » ;
63
Il s’agit de la nomenclature d’activités française révision 2 (NAF rév.2, 2008), qui
s’est substituée depuis le 1
er
janvier 2008 à la NAF rév.1 datant de 2003.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
51
rhombus5
un second ensemble résiduel comprend, pour sa part, les taxes
affectées reposant sur l’ensemble des secteurs d’activité. Il peut être
qualifié de
« fiscalité affectée non spécifique ».
Si la majorité du nombre de taxes affectées relève de la fiscalité
affectée sectorielle (70 % du nombre de taxes affectées), les volumes
financiers de la fiscalité affectée non spécifique s’avèrent majoritaires, avec
un rendement de 66,5 Md€ sur 112 Md€ pour la même année 2011 (soit
59 % du rendement total des taxes affectées).
Tableau 14 : Répartition du nombre de taxes et des rendements respectifs
de la fiscalité affectée sectorielle et de la fiscalité affectée
non spécifique (2011)
Ensemble
Part du nombre de taxes
sur le nombre total de
taxes affectées (%)
Part du rendement sur le
rendement total de la
fiscalité affectée (en %)
Fiscalité affectée sectorielle
69 %
41 %
Fiscalité affectée non spécifique
31 %
59 %
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
La fiscalité affectée non spécifique apparaît prépondérante pour la
majorité des affectataires, à l’exception toutefois des organismes de
sécurité sociale, qui bénéficient assez largement d’une
fiscalité affectée
sectorielle.
Tableau 15 : Ventilation du rendement des taxes affectées sectorielles et
des taxes affectées non spécifiques par affectataires (2011)
Catégories d’affectataires
Part du rendement de
la fiscalité affectée non
spécifique
Part du rendement total
de la fiscalité affectée
sectorielle
Taxes affectées au sein du budget de
l'État
72 %
28 %
Taxes affectées à des agences de l'État,
des agences locales ou des organismes
professionnels et du monde consulaire
65 %
35 %
Taxes affectées au secteur social
43 %
57 %
Contributions rendues obligatoires par
l'État et prélèvements
sui generis
95 %
5 %
Total fiscalité affectée
59 %
41 %
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Le secteur social représente d’ailleurs 68 % du rendement de la
fiscalité affectée sectorielle.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
52
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Graphique 2 : Ventilation du rendement recouvert par la fiscalité affectée
sectorielle par catégories d’affectataires (2011)
21%
2%
6%
3%
68%
ITN affectées au sein du budget de l'État
ITN affectées aux agences et aux organismes professionnels
ITN affectées au secteur social
Contributions rendues obligatoires par l'État et prélèvements sui generis
Contribution au service public de l'électricité
Source : Conseil des prélèvements obligatoires
B - Certains secteurs apparaissent plus spécifiquement
assujettis
1 -
Le secteur financier, l’industrie pharmaceutique, l’agriculture
et les transports supportent près de la moitié
du nombre de taxes affectées sectorielles
La
ventilation
64
des
taxes
affectées
par
secteurs
d’activité
économique indique que
quatre secteurs concentrent 45 % du nombre
total de taxes affectées :
le secteur financier,
l’industrie pharmaceutique,
les transports et l’agriculture, avec pour chacun des trois premiers secteurs
concernés entre 15 et 20 taxes spécifiques. Ces secteurs représentent ainsi
exactement les deux tiers du nombre des taxes affectées en 2011 :
rhombus5
l’agriculture constitue un cas à part du fait de la multiplicité des
CVO (au nombre de 56 pour l’année 2011) qui, ajoutées aux autres
taxes affectées sectorielles, élèvent le montant total de ces dernières
auxquelles le secteur est assujetti à 72 ;
64
Cette ventilation a été réalisée en fonction de la nomenclature d’activités française
révision 2 de l’INSEE et des indications sur les assujettis figurant au sein de la base
légale de chacune de ces taxes.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
53
rhombus5
vingt taxes affectées sont spécifiques à l’industrie pharmaceutique :
il
s’agit
essentiellement
de
droits
d’enregistrement
sur
les
médicaments et les dispositifs médicaux mis sur le marché français,
ainsi que de contributions diverses dont doivent s’acquitter les
laboratoires, les grossistes et les entreprises exploitant des
médicaments bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché ;
rhombus5
sur les quinze taxes affectées spécifiques au secteur des activités
financières, douze concernent exclusivement le sous-secteur des
assurances ;
rhombus5
enfin le secteur des transports
65
concentre pour sa part seize taxes
affectées sectorielles, reposant pour un tiers d’entre elles sur le
nombre de passagers (droits de francisation et de navigation, taxe sur
les billets d’avion) et prenant la forme, pour les deux autres tiers, de
prélèvements hétérogènes (fiscalité écologique à l’instar de la taxe
sur les nuisances sonores aéroportuaires, taxes de régulation, etc.).
En termes de rendement financier, cinq secteurs concentrent 33 %
du total de la fiscalité affectée, pour un montant agrégé de près de 40 Md€
en 2011 : l’assurance, l’industrie pharmaceutique, la production et la
distribution d’électricité et de gaz, la fabrication de boissons et la
fabrication de produits à base de tabac.
Tableau 16 : Ventilation du rendement des taxes affectées (principaux
secteurs d’activités, 2011)
Secteur d'activité (définition INSEE)
Rendement de la
fiscalité affectée en
2011 (en M€)
Part du rendement de la fiscalité
affectée dans l’ensemble de la
fiscalité affectée (en %)
Activités financières et d'assurance
6 849
6%
Fabrication de boissons
5 752
5%
Fabrication de produits à base de tabac
14 791
13%
Industrie pharmaceutique
4 439
4%
Production et distribution d'électricité,
de gaz, de vapeur et d'air conditionné
4 800
4%
Toutes entreprises (fiscalité spécifique)
66 476
59%
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Au sein de la seule fiscalité affectée sectorielle, ces cinq secteurs
(assurance ;
industrie
pharmaceutique ;
production
et
distribution
d’électricité et de gaz ; fabrication de boissons et fabrication de produits à
65
Catégorie
ad hoc
créée à des fins de lisibilité, qui agrège trois divisions au sein de la
section « transports et entreposage » de la nomenclature INSEE : transports aériens,
transports par eau, transports terrestres et par conduites, mais qui exclut de son
périmètre les activités de poste, de courrier et d’entreposage.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
54
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
base de tabac), dont certains sont plutôt délocalisables, sont à l’origine de
près de 80 % du rendement total.
Graphique 3 : Ventilation du rendement des taxes affectées sectorielles par
secteurs d’activité économique (2011)
15%
10%
12%
Agriculture, sylviculture et pêche
Activités financières et d’assurance
2%
2%
5%
Transports
Industrie pharmaceutique
Fabrication de produits àbase de tabac
32%
Fabrication de boissons
Télécommunications
5%
Eau, déchets, dépollution
10%
Santéhumaine et action sociale
Electricitéet gaz
3%
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Note de lecture : Par souci de lisibilité, il n’est pas fait mention des secteurs pour lesquels
le rendement de la fiscalité affectée est de 0 ou 1 % dans le rendement total de la fiscalité
affectée sectorielle.
2 -
Pour six secteurs d’activité, les taxes affectées représentent un
poids significatif par rapport aux prélèvements obligatoires
qu’ils acquittent
Le poids de la fiscalité affectée sectorielle a été rapproché, à partir
des données collectées auprès de la DGFiP et de l’agence centrale des
organismes de sécurité sociale (ACOSS), des prélèvements obligatoires
génériques de ces secteurs (
cf. graphiques suivants
).
En première analyse
66
, plusieurs constats peuvent être établis :
66
La fiscalité affectée comporte à la fois des taxes acquittées directement par les
entreprises et des taxes acquittées par le consommateur. D’un strict point de vue
économique, la problématique de « l’incidence fiscale » (
cf. chapitre III
) rend cette
distinction artificielle ; néanmoins, elle peut ponctuellement soulever des problèmes
d’interprétation des ratios calculés dans cette partie dans des cas où l’essentiel de la
fiscalité est supporté par le consommateur. De ce fait, les ratios ne suffisent pas à
démontrer d’éventuelles situations de « surfiscalisation », qui doivent être étayées par
un examen sectoriel plus détaillé excédant les prérogatives du Conseil.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
55
rhombus5
la fiscalité affectée sectorielle ne représente qu’une part très
marginale (entre 1 et 6 %) de la somme des prélèvements
obligatoires et de la fiscalité affectée sectorielle pour les secteurs
suivants : activités créatives, artistiques et de spectacle ; activités
immobilières ;
imprimerie
et
reproduction
d’enregistrements ;
production de contenus ;
rhombus5
elle représente une part substantielle mais minoritaire (entre 10 et
40 %) de la somme des prélèvements obligatoires et de la fiscalité
affectée
sectorielle
pour
les
télécommunications,
le
secteur
financier et les transports ;
rhombus5
le poids de cette fiscalité affectée sectorielle varie en revanche entre
50 et 70 % pour les secteurs suivants : agriculture, sylviculture et
pêche ; industrie pharmaceutique ; organisation de jeux de hasard et
d’argent ; programmation et diffusion ; production et distribution
d’électricité
et
de
gaz ;
production
et
distribution
d'eau,
assainissement, gestion des déchets et dépollution.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
56
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Graphiques 4 et 4 bis : Parts respectives de l’IS, de la CET, des
cotisations sociales et de la fiscalité affectée sectorielle concernant treize
secteurs d’activité sur l’ensemble des prélèvements obligatoires génériques
+fiscalité affectée sectorielle acquittés en 2011
67
20%
54%
66%
20%
12%
21%
6%
6%
4%
27%
3%
Activités
financières et
d’assurance
Industrie
pharmaceutique
Imprimerie et
reproduction
Agriculture,
sylviculture
et pêche
Activités
créatives,
artistiques et
de spectacle
Activités
immobilières
74%
5%
6%
54%
4%
3%
89%
4%
83%
10%
5%
20%
4%
Part de la CET dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
Part de l’IS dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
Part des cotisations sociales dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
Part de la fiscalitéaffectée sectorielle dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
67
Il convient toutefois de noter que la fiscalité affectée sectorielle reposant sur les
secteurs de fabrication de boissons et de tabacs ne saurait être comparée aux
prélèvements obligatoires acquittés par ces secteurs puisque cette fiscalité affectée, de
par sa nature, est directement acquittée, pour la quasi-totalité, par le consommateur
(fraction de TVA, droits de circulation et de consommation) et non par les entreprises
du secteur.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
57
55%
67%
52%
48%
17%
38%
9%
14%
12%
7%
6%
10%
5%
1%
3%
33%
Production
(cinéma,TV,
radio,
musique)
Organisation
de jeux de
hasard et
d’argent
80%
1%
60%
43%
Eau, déchets,
dépollution
16%
2%
Programmation
et diffusion
23%
5%
27%
Electricité
et gaz
13%
Transports
Télécoms
29%
24%
Part de la CET dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
Part de l’IS dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
Part de la fiscalitéaffectée sectorielle dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
Part des cotisations sociales dans la somme PO génériques+fiscalitéaffectée sectorielle acquittée en 2011
Source : DGFiP, ACOSS, calculs du Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : Par souci de simplification, ces prélèvements obligatoires génériques ont été
calculés comme la somme de l’impôt sur les sociétés (IS)
68
, de la contribution économique
territoriale (CET)
69
et des cotisations sociales
70
à la charge de l’employeur.
3 -
Pour certains secteurs économiques, les taxes affectées peuvent
représenter une charge fiscale supplémentaire significative par
rapport à la production et à la valeur ajoutée
Afin de déterminer des situations où le poids de la fiscalité affectée
augmente de manière significative la charge fiscale pesant sur un secteur
68
L’impôt sur les sociétés mentionné dans les graphiques ci-dessous est calculé net des
imputations et a fait l’objet de requêtages et restitutions par la DGFiP : la cotisation
ainsi présentée comprend l’impôt net sur les sociétés, la contribution sur les bénéfices et
la contribution sur les revenus locatifs.
69
La contribution économique territoriale a été calculée pour chaque secteur à partir des
données de cotisation foncière des entreprises (CFE), frais compris et d’imposition
forfaitaire sur les entreprises de réseaux (IFER), frais également compris, transmises par
la DGFiP et issues des rôles généraux de CFE-IFER 2011, ainsi qu’à partir des
montants de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), frais compris,
acquittés et de dégrèvements pour plafonnement à la valeur ajoutée (PVA) obtenus par
simulation.
70
Les cotisations sociales à la charge de l’employeur recouvrées par l’ACOSS figurant
dans ces mêmes graphiques recouvrent l’ensemble des cotisations sociales du régime
général et de l’assurance chômage à la charge de l’employeur.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
58
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
d’activité,
deux ratios de fiscalisation ont été calculés pour chaque
secteur d’activités.
Un premier ratio de fiscalisation a été calculé rapportant, d’une part,
la somme des prélèvements obligatoires tels que définis précédemment
71
et
de la fiscalité affectée sectorielle et, d’autre part, sa production (c’est-à-dire
son chiffre d’affaires) pour l’année 2011 :
rhombus5
le ratio moyen de fiscalisation, pour l’ensemble des secteurs
d’activité économique, est de 11 % ;
rhombus5
l’industrie pharmaceutique, le secteur financier, la production et
distribution d’eau associée à la gestion des déchets et à la
dépollution ainsi que la programmation et la diffusion se
caractérisent par une pression fiscale relativement supérieure à la
moyenne : leur ratio de fiscalisation avoisine en effet 20 % ;
rhombus5
les activités immobilières, artistiques, créatives et de spectacle, de
production, l’agriculture et les télécommunications se caractérisent
par une pression fiscale relativement inférieure à la moyenne (ratio
de fiscalisation inférieur à 10 %) ;
rhombus5
les autres secteurs sont dans une situation intermédiaire : tel est le
cas
pour
l’imprimerie
et
la
reproduction
d’enregistrements,
l’organisation de jeux de hasard et d’argent, la programmation et la
diffusion et les transports (ratio de fiscalisation entre 10 et 20 %).
71
Impôt sur les sociétés, contribution économique territoriale et cotisations sociales.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
59
Graphique 5 : Ratio de fiscalisation par rapport à la production (par
secteurs d’activité économique, en % pour l’année 2011)
2 %
24 %
17 %
1 %
11 %
5 %
18 %
21 %
8 %
9 %
9 %
18 %
3 %
Programmation et diffusion
Télécommunications
Organisation de jeux de hasard et d’argent
Production (cinéma, radio, TV, musique)
Transports
Electricitéet gaz
Eau, déchets, dépollution
Activités financières et d’assurance
Activités créatives, artistiques et de spectacle
Agriculture, sylviculture et pêche
Imprimerie et reproduction d’enregistrements
Activités immobilières
Industrie pharmaceutique
Source : INSEE, DGFiP, ACOSS, calculs du Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : Le ratio de fiscalisation rapporte le poids des principaux prélèvements obligatoires
(IS+CET+cotisations sociales+fiscalité affectée sectorielle) à la production.
Un second ratio de fiscalisation rapportant, cette fois-ci, la charge
fiscale (somme des prélèvements obligatoires et fiscalité affectée
sectorielle) à la valeur ajoutée du secteur d’activité concerné confirme les
constats précédents en les amplifiant :
rhombus5
la moyenne de ce ratio de fiscalisation s’élève à 32 % ;
rhombus5
la programmation et diffusion constitue le secteur où la charge
fiscale résultant de ces deux agrégats est la plus significative par
rapport à la valeur ajoutée, avec un ratio de fiscalisation de la valeur
ajoutée de 61 % ;
rhombus5
les secteurs suivants se caractérisent également par un ratio de
fiscalisation élevé rapporté à la valeur ajoutée : l’organisation de
jeux de hasard et d’argent, le secteur financier, l’imprimerie et
reproduction
d’enregistrements,
la
production
et
distribution
d’électricité et de gaz et les transports (entre 25 et 50 % de ratio de
fiscalisation) ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
60
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
les activités immobilières, artistiques, créatives et de spectacle,
l’agriculture et les télécommunications se caractérisent à l’inverse
par une pression fiscale relativement inférieure à la moyenne (ratio
de fiscalisation inférieur à 10 %).
Graphique 6 : Comparaison du ratio ((IS +CET+cotisations
sociales+fiscalité affectée sectorielle) / (valeur ajoutée par secteurs
d’activité économique), en % pour l’année 2011)
20%
6%
61%
34%
46%
20%
49%
30%
3%
2%
39%
8%
Activités financières et d’assurance
Activités immobilières
Agriculture, sylviculture et pêche
Activités créatives, artistiques et de spectacle
Imprimerie et reproduction d’enregistrements
Organisation de jeux de hasard et d’argent
Télécommunications
Production (cinéma, radio, TV, musique)
Eau, déchets, dépollution
Electricitéet gaz
Programmation et diffusion
Transports
Source : INSEE, DGFiP, ACOSS, calculs du Conseil des prélèvements obligatoires.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Chapitre III
Le développement de la fiscalité affectée
pose d’importants problèmes
budgétaires et économiques
Ce troisième chapitre du rapport porte sur les effets des taxes
affectées sur les finances publiques, tant au regard du pilotage –
notamment budgétaire – des politiques publiques qu’au regard de
l’objectif de maîtrise des dépenses publiques.
Conformément à la lettre
du Premier ministre, le champ d’investigation retenu ne porte pas
sur l’ensemble de la fiscalité affectée
.
I
-
Les travaux du Conseil ont principalement
porté sur la fiscalité affectée «
aux tiers autres que la
sécurité sociale et les collectivités locales
» soit, pour
2013, 214 taxes d’un rendement de 28 Md€
Dans sa lettre, le Premier ministre invitait le Conseil des
prélèvements obligatoires à circonscrire ses travaux aux «
tiers autres que
les collectivités locales et la sécurité sociale
», ce qui correspond pour
l’essentiel aux agences de l’État, aux organismes professionnels et
consulaires et aux dispositifs de solidarité nationale (
cf.
encadré
9 ci-dessous
).
Conformément à cette demande, le Conseil des prélèvements
obligatoires a donc choisi, en méthode, de privilégier ce champ pour
établir ses constats et ses propositions.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
62
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Encadré 9 : Périmètre relevant de la demande du Premier ministre
Le périmètre, défini par la commande du Premier ministre, des «
tiers autres que les
collectivités locales et la sécurité sociale
» pourrait se composer des catégories suivantes :
square4
les agences de l’État :
comme l’a montré le rapport de l’IGF consacré aux agences de
l’État, l’établissement d’un tel périmètre n’est pas simple, en raison du foisonnement
des entités et des périmètres administratifs. Les définitions, critères et modes de suivi
des trois principaux périmètres administratifs – opérateurs de l’État, organismes
divers d’administration centrale (ODAC) et entités dotées d’un comptable public
(EDCP) – présentent d’importantes insuffisances. Dans ce contexte, l’IGF a choisi,
par convention, d’utiliser le terme générique d’ « agence » pour qualifier les
différentes entités, qu’elles soient ou non dotées de la personnalité morale, qui sont
contrôlées par l’État et qui exercent une activité de service public non-marchand. Ces
entités, dont les activités, les statuts, la taille et les relations entretenues avec l’État
composent un ensemble très hétérogène, étaient en 2010 au nombre de 1244 -, 1101
étant dotées de la personnalité morale ;
square4
les organismes techniques ou professionnels
(CTI, CPDE, ordres professionnels,
offices agricoles percevant des CVO) ;
square4
les organismes consulaires
(chambres de commerce et d’industrie ; chambre des
métiers et de l’artisanat ; chambres d’agriculture) ;
square4
les dispositifs de péréquation et de solidarité nationale
(FSA, FNAL, CSPE etc.) ;
square4
les bénéficiaires de contributions
sui generis
telles que la taxe d’apprentissage, la
formation professionnelle ou le « 1% logement » ;
square4
les agences locales
.
Le Conseil des prélèvements obligatoires a concentré ses analyses sur les quatre
premières catégories de bénéficiaires de taxes affectées.
En effet, les contributions
sui
generis
mériteraient des développements propres en raison de leur spécificités (collecte,
objet, fonctionnement). Ils ont par ailleurs fait l’objet d’un nombre important de rapports
d’évaluation, constatant généralement leur inefficience et la grande complexité de leur
gouvernance
72
. Par ailleurs, la dernière catégorie (celle des agences locales) s’inscrit dans
la problématique des collectivités locales, non traitée par le Conseil.
Il serait utile que des travaux ultérieurs puissent être conduits dans
les sphères locales et sociales, ainsi que parmi les contributions
sui
generis
, dans la mesure où ces ensembles constituent l’essentiel du
périmètre de la fiscalité affectée.
Le champ privilégié par le Conseil des prélèvements obligatoires
pour ses analyses et propositions représente, en 2013, 453 entités et près
de 28 Md€ de rendements fiscaux prévisionnels :
rhombus5
89 agences ;
72
Cf. par exemple
Pour une réforme de la taxe d’apprentissage
, Rapport
d’information fait au nom de la commission des finances du Sénat, M. François
Patriat, mars 2013.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
63
rhombus5
386 établissements consulaires (163 chambres de commerce et
d’industrie ; 111 chambres des métiers et de l’artisanat ;
112 chambres d’agriculture) ;
rhombus5
74 organisations techniques ou professionnelles ;
rhombus5
4 dispositifs de péréquation ou de solidarité nationale.
Tableau 17 : Champ d’investigations privilégié par le Conseil des
prélèvements obligatoires (2013)
Nombre d'entités
Nombre de taxes
Montant (Md€)
Agences
89
135
14,6
Chambres consulaires
286
6
1,9
Organismes professionnels
74
67
1,4
Dispositifs de solidarité
4
6
9,9
Total
453
214
27,9
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
II
-
La multiplication des taxes affectées se révèle
très coûteuse pour les finances publiques
Connaissant un développement très important ces dernières années,
ces entités sont, pour une part significative d’entre elles, désormais
financées par taxes affectées. En effet, cette modalité de financement a
été appréhendée comme un instrument de renforcement de leur autonomie
de gestion.
Du point de vue des finances publiques, l’affectation de ressources
fiscales à de telles entités ne va toutefois pas de soi ; en effet, il n’y
a
priori
aucune raison pour que l’évolution du rendement d’une taxe et
l’évolution des besoins d’un organisme soient corrélées dans le temps.
Dans ces conditions, l’affectation de ressources fiscales constitue un
mécanisme asymétrique pour l’État :
rhombus5
en cas de rendements insuffisants
pour assurer la couverture des
dépenses, l’État joue le rôle «
d
’assureur en dernier ressort » : il
intervient en effet
en complément des taxes affectées, par le biais
de versement de subventions d’équilibre ;
rhombus5
en cas de taxe dynamique, avec des rendements élevés,
les
opérateurs bénéficient de surplus de ressources par rapport à leurs
besoins, au risque d’introduire une forme de pilotage par les
recettes, les incitant à augmenter leur périmètre d’intervention ou à
constituer des réserves financières inemployées ;
Dans les faits, un faisceau d’indices montre que les dynamiques
d’évolution des taxes ne sont pas toujours maîtrisées : en moyenne, la
fiscalité affectée se traduit par un surcroît de dépenses, même si
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
64
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
ponctuellement des dotations d’équilibre doivent être versées par l’État.
Au total, la mécanique de l’affectation des ressources fiscales apparaît
défavorable aux finances publiques ; elle tend à exonérer certaines
agences de l’objectif de maîtrise des finances publiques.
A - L’absence de maîtrise de la dynamique des taxes
affectées rend ce mécanisme de financement
défavorable aux finances publiques
1 -
L’évolution des dépenses des bénéficiaires de taxes affectées
apparaît très dynamique, notamment par rapport
aux autres dépenses publiques
Sur le champ restreint d’affectataires tel que défini précédemment,
les informations disponibles montrent que la fiscalité affectée a crû de
manière très significative depuis 2007, surtout si la dynamique est
appréciée sur un périmètre courant, c’est-à-dire prenant en compte les
créations de taxes (par exemple, + 39 % pour les agences de l’État, soit
près de + 6 % par an).
Tableau 18 : Croissance des taxes affectées sur le périmètre
correspondant à la demande du Premier ministre (périmètre courant)
Montant des taxes
affectées en 2013 (M€)
Taux de croissance
2007-2013 (%)
Taux de croissance annuel
moyen 2007-2013 (%)
Agences de l'État
14 619
+ 39,1%
+ 5,7%
Chambres consulaires
1 913
+ 17,8%
+ 2,8%
Organismes techniques et
professionnels
1 355
+ 56,1%
+ 7,7%
Dispositifs de péréquation
et de solidarité
9 982
+ 180,1%
+ 18,7%
Total
27 869
+ 68,3%
+ 9,1%
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Sur le champ des opérateurs de l’État, soit une sous-catégorie des
agences de l’État qui fait l’objet d’une grande attention de la part des
tutelles et du Parlement
73
, les taxes affectées ont augmenté, entre 2007 et
73
Les
opérateurs de l’État
, au nombre de 560 en 2012, n’ont pas de définition
juridique. Ils font l’objet depuis 2007 d’un recensement annuel par la direction du
budget dans un « jaune budgétaire » annexé au projet de loi de finances. Une entité
dotée de la personnalité morale, quel que soit son statut juridique (GIP,
association,…), est présumée appartenir au périmètre des opérateurs de l’État dès
lors qu’elle répond cumulativement à trois critères : une activité de service public ;
un financement assuré majoritairement par l’État ; un contrôle direct par l’État.
Ils se distinguent de la
catégorie des organismes divers d’administration centrale
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La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
65
2012, de manière particulièrement dynamique (+ 25 %, soit + 4,5 % par
an). Cette croissance
est d’autant plus frappante lorsqu’elle est comparée
à l’évolution des crédits budgétaires alloués à l’ensemble des opérateurs
(+ 13 % sur la même période, soit + 2,4 % par an) (
cf.
tableau 19
ci-après
).
Tableau 19 : Évolution des moyens financiers alloués aux opérateurs
(périmètre constant, prévisionnel, Md€)
2007
2008
2009
2010
2011
2012
Croissance
totale
(2007-2012)
Croissance
annuelle
(2007-2012)
Crédits de
paiement
35,29
37,69
37,26
40,06
40,44
39,82
+ 12,84 %
+ 2,44 %
Taxes
affectées
7,92
7,73
8,94
8,87
9,77
9,86
+ 24,49 %
+ 4,48 %
Total
43,20
45,42
46,20
48,93
50,21
49,69
+ 15,02 %
+ 2,84 %
Source : IGF.
Note :
Les données prévisionnelles, plus fiables que les données d’exécution, ont été
retenues ; les données relatives aux opérateurs ont été fiabilisées et complétées afin
de pouvoir être analysées : un champ d’opérateurs a été défini de manière à
neutraliser la volatilité du périmètre (il s’agit du groupe d’opérateurs présents en
2012, soit 560 entités) ; les transferts de personnels et de crédits entre l’État et les
opérateurs ont été neutralisés, les données manquantes ont été complétées,
principalement par régression linéaire.
(ODAC)
. Ces derniers, qui étaient 825 en 2010, sont suivis par l’INSEE, à partir de
données transmises par la DGFiP, en vue de l’établissement des comptes nationaux.
Ils sont «
des organismes auxquels l’État a donné une compétence fonctionnelle
spécialisée au niveau national. Contrôlés et financés majoritairement par l’État,
[ils]
ont une activité principalement non marchande
».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
66
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
En considérant les 18
74
opérateurs ou catégories d’opérateurs
recensés dans le « jaune » opérateurs comme recevant des taxes affectées
chaque année de 2007 à 2012
75
,
le montant prévisionnel des taxes
affectées à des opérateurs s’élève ainsi en 2012 à 8,6 Md€.
Onze
opérateurs
76
ont vu leurs recettes fiscales augmenter de 1,5 Md€, soit
88 % de la hausse totale des taxes affectées à champ constant
. Seuls
deux opérateurs sur dix-huit voient leurs taxes affectées diminuer de 2007
à 2012
77
.
Deux autres constats peuvent être par ailleurs formulés :
rhombus5
d’une part, le dynamisme des taxes affectées est allé croissant sur
la période, au fur et à mesure du renforcement de la contrainte
budgétaire
78
: celles-ci augmentent ainsi de + 5,4 % par an entre
2010 et 2012, contre + 3,9 % par an entre 2007 et 2010. une telle
évolution suggère que des ressources fiscales ont pu être affectées
de manière à limiter les effets de la consolidation budgétaire en
cours ;
74
Les opérateurs peuvent ne recevoir des taxes affectées que certaines années et pas
d’autres. Ainsi, chaque année, la liste des opérateurs recevant des taxes affectées peut
évoluer.
Les 18 opérateurs (ou catégorie d’opérateurs) recevant une recette fiscale
chaque année de 2007 à 2012 sont : l’agence de l’environnement et de la maîtrise de
l’énergie (ADEME), l’agence de financement des infrastructures de transport de
France (AFITF), l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé
(AFFSAPS) devenue agence nationale de sécurité du médicament et des produits de
santé (ANSM), les agences de l’eau, l’agence nationale de l’habitat (ANAH), l’agence
nationale pour la gestion de déchets radioactifs (ANDRA), l’agence nationale des
titres sécurisés (ANTS), le conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres
(CELRL), le centre national de la cinématographie et de l’image animée (CNC), le
centre national pour le développement du sport (CNDS), l’établissement public de
sécurité ferroviaire (EPSF), le fonds CMU, le fonds de solidarité, le fonds national de
promotion et de communication de l’artisanat (FNPCA), l’institut national de l’origine
et de la qualité (INAO), l’institut national de la propriété industrielle (INPI), l’office
national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) et voies navigables de France
(VNF).
75
Les « jaunes » ne recensent pas toutes les taxes affectées, notamment lorsqu’elles
ont un faible rendement.
76
Il s’agit de l’ADEME, les six agences de l’eau, l’ANTS, le CNC, le fond CMU et le
fond de solidarité.
77
Il s’agit de l’ANAH et de l’ONCFS.
78
La seconde loi de programmation des finances publiques, en date du 28 décembre
2010, associe les opérateurs à l’effort de l’État en matière de budget et d’emplois : à
compter de 2011, les opérateurs doivent réduire leurs effectifs de 1,5% par an, et leurs
dépenses de fonctionnement de 10% sur le prochain triennal.
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LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
67
Tableau 20 : Taux de croissance annuelle des moyens financiers alloués
aux opérateurs (crédits de paiement et taxes affectées, périmètre
constant, %)
2007-2012
2007-2010
2010-2012
Taux de croissance annuelle (CP et TA)
+ 2,84 %
+ 4,24 %
+ 0,77 %
Dont taux de croissance des CP
+ 2,44 %
+ 4,32 %
-0,30 %
Dont taux de croissance des TA
+ 4,48 %
+ 3,85 %
+ 5,43 %
Source : IGF.
Note :
Les données prévisionnelles, plus fiables que les données d’exécution, ont été
retenues ; les données relatives aux opérateurs ont été fiabilisées et complétées afin
de pouvoir être analysées : un champ d’opérateurs a été défini de manière à
neutraliser la volatilité du périmètre (il s’agit du groupe d’opérateurs présents en
2012, soit 560 entités) ; les transferts de personnels et de crédits entre l’État et les
opérateurs ont été neutralisés, les données manquantes ont été complétées,
principalement par régression linéaire.
rhombus5
d’autre part, si on la compare à l’évolution du budget général de
l’État, la croissance des taxes affectées aux opérateurs apparaît
encore plus dynamique ; elles
augmentent ainsi
beaucoup plus
vite que les dépenses budgétaires de l’État
(+ 4,5 % pour les
taxes affectées, contre + 1,2 % pour les dépenses de l’État).
Tableau 21 : Évolutions des moyens alloués aux opérateurs et du budget
général de l’État (périmètre constant)
En Md€
2007
2008
2009
2010
2011
2012
Croissance annuelle
(2007-2012)
Budget général
de l’État
227,05
227,66
229,93
234,08
242,76
241,01
+ 1,20 %
Moyens alloués
aux opérateurs
(CP et TA)
43,20
45,42
46,20
48,93
50,21
49,69
+ 2,84 %
Dont taxes
Affectées
7,92
7,73
8,94
8,87
9,77
9,86
+ 4,48 %
Source : IGF.
Note :
Les données prévisionnelles, plus fiables que les données d’exécution, ont été
retenues ; les données relatives aux opérateurs ont été fiabilisées et complétées afin de
pouvoir être analysées : un champ d’opérateurs a été défini de manière à neutraliser la
volatilité du périmètre (il s’agit du groupe d’opérateurs présents en 2012, soit
560 entités) ; les transferts de personnels et de crédits entre l’État et les opérateurs ont
été neutralisés, les données manquantes ont été complétées, principalement par
régression linéaire.
Le budget général de l’État a également été retraité de manière à
obtenir un périmètre constant sur toute la période.
Au total, l’affectation semble déconnecter, en moyenne, le besoin
des affectataires et l’évolution de la ressource,
induisant une forme de
pilotage par la recette
. L’évaluation des effets des affectations de taxe
sur la gestion des affectataires nécessiterait un examen approfondi de
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La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
68
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
leurs activités, ce qui excède la mission assignée au Conseil des
prélèvements obligatoires. Toutefois, certaines corrélations simples – qui
mériteraient donc des investigations statistiques et économétriques
complémentaires – tendent à montrer, en première analyse, que
l’évolution des taxes affectées peut sensiblement modifier la gestion des
entités affectataires. Ainsi, une agence dont les taxes affectées
augmentent semble voir ses dépenses croître tendanciellement, comme
l’illustre en première approximation le graphique 7 ci-dessous :
Graphique 7 : Corrélation entre la croissance des dépenses des
opérateurs
79
et la croissance des taxes affectées (2007-2012)
-50,00%
50,00%
150,00%
-50,00%
150,00%
Croissance des TA
Croissance des Dépenses
Source : IGF.
2 -
L’évolution des effectifs et des masses salariales des
affectataires apparaît également très dynamique
Concernant les emplois, les opérateurs bénéficiant de taxes
affectées voient
leurs effectifs augmenter deux fois plus vite
que ceux
qui n’en bénéficient pas (
cf.
tableau 22 ci-dessous
). L’évolution des
effectifs de l’État est, pour sa part, négative sur la période (-5,8 %).
79
Il s’agit des 18 mêmes opérateurs (ou catégorie d’opérateurs) que précédemment.
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La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
69
Tableau 22 : Évolution des effectifs des opérateurs selon leur modalité de
financement et de ceux de l’État (titre 2 et titre 3, 2007-2012)
Évolution des effectifs (%)
Opérateurs bénéficiant de taxes affectées
+ 10,4 %
Opérateurs ne bénéficiant pas de taxes affectées
+ 4,1 %
État
- 5,8 %
Source : IGF.
Note :
Les données prévisionnelles, plus fiables que les données d’exécution, ont été
retenues ; les données relatives aux opérateurs ont été fiabilisées et complétées afin
de pouvoir être analysées : un champ d’opérateurs a été défini de manière à
neutraliser la volatilité du périmètre (il s’agit du groupe d’opérateurs présents en
2012, soit 560 entités) ; les transferts de personnels et de crédits entre l’État et les
opérateurs ont été neutralisés, les données manquantes ont été complétées,
principalement par régression linéaire.
La même dynamique est observable en matière de masse
salariale et de rémunération
. Sur un échantillon d’agences pour
lesquelles les données comptables et physiques étaient disponibles, la
croissance moyenne des dépenses de personnel entre 2008 et 2011 s’élève
à 17 % pour les agences financées par taxe affectée, contre +10 % pour
les agences non financées par taxe affectée et -2 % pour le budget général
de l’État.
Ces évolutions résultent pour une large part des variations du
nombre d’effectifs, mais également de l’évolution de la masse salariale
par tête, à hauteur de +14 % pour les agences, soit 2 points de plus que
pour les agences non affectataires et 5 points de plus que pour le budget
général de l’État (
cf.
tableau 23 ci-dessous
).
Tableau 23 : Croissance de la masse salariale des agences (2008-2011)
Agences financées
par taxe affectée
Agences non
financées par taxe
affectée
Budget
général de
l’État
Nombre d'agences
14
26
-
Croissance moyenne de la
masse salariale globale
2008-2011
+17 %
+10 %
-2 %
Croissance moyenne de la
masse salariale par tête
2008-2011
+14 %
+12 %
+9 %
Source : IGF, à partir de données de la DB et de la DGFiP.
Note : Calculs portant sur un échantillon de 40 établissements pour lesquels les données
relatives au nombre d’ETP et à la masse salariale étaient disponibles sur la période
considérée. Les données retenues pour l’État sont celles du budget général.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
70
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
3 -
La forte croissance des fonds de roulement des affectataires
peut indiquer un excès de financement
L’affectation de ressources fiscales est également un facteur
favorisant l’augmentation des fonds de roulement
(
cf. encadré 10
ci-dessous
)
.
Encadré 10 : L’analyse du fonds de roulement
1/ Trésorerie et fonds de roulement
Deux données financières font l’objet depuis peu d’une plus grande d’attention, à
la fois de la part des administrations de tutelle et des parlementaires
80
: la
trésorerie et le fonds de roulement
(FdR). Ils peuvent être des indices d’un
surfinancement des établissements :
square4
la trésorerie
, qui se compose des disponibilités immédiates de l’établissement, peut
être problématique à double titre: d’une part, si son niveau est trop élevé, elle
traduit l’existence de fait d’une avance de trésorerie de l’État ; d’autre part, si
celle-ci n’est pas centralisée auprès du Trésor, elle pèse sur la propre trésorerie de
l’État
;
square4
le FdR
81
,
qui doit être suffisamment élevé pour financer l’activité de
l’établissement, ne doit néanmoins pas être constitué au détriment de la trésorerie
de l’État.
2 / Le calcul et le recours au FdR
Le FdR se calcule à partir de la balance générale des comptes comme la somme des
ressources stables de laquelle on retranche les emplois stables et les actifs immobilisés
bruts.
Puisqu’il finance l’actif circulant, le FdR doit être comparé aux charges décaissables,
non exceptionnelles, de l’établissement. Il peut ainsi être exprimé en jours par le
ratio « FdR / charges décaissables x 360 », ou en mois par le ratio « FdR / charges
décaissables x 12 ». Au-delà de sa valeur, régulièrement située entre un et trois mois, il
importe également de surveiller son évolution et sa cohérence par rapport aux autres
opérateurs du même secteur.
Il est possible d’avoir recours au FdR dans deux situations :
square4
pour financer le compte de résultat, ce qui constitue
une alerte sur la capacité du
cycle d’exploitation courant à s’autofinancer ;
square4
à l’inverse, un apport structurel au fonds de roulement peut parfois être un
indice
de surfinancement de l’opérateur
.
80
Ainsi, le « Jaune » opérateur présente, depuis 2011, un recensement de
l’endettement et des engagements hors bilan des opérateurs (article 107 de la loi
n°n°2009-1673 du 30 décembre 2009 portant loi de finances pour 2010).
81
Le FdR correspond à la différence entre les ressources stables de l’établissement et
ses immobilisations. La relation entre trésorerie et FdR est plus immédiatement
donnée par la relation : Trésorerie = FdR – Besoin en Fonds de Roulement.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
71
3 / Analyse du fonds de roulement
Il est d’usage de considérer qu’un FdR doit permettre de financer entre 60 et
90 jours d’activité d’un établissement
. Dès lors, un établissement peut être sur-
(respectivement sous) financé dès lors que son FdR est supérieur (respectivement
inférieur) à ce seuil.
Certaines agences possèdent un fonds de roulement négatif, ce qui signifie que
l’établissement finance une partie de ses immobilisations par des ressources
d’exploitation (supposées financer les emplois du cycle d’exploitation) ou des dettes à
court terme. Sauf rares exceptions liées à l’activité de l’établissement, un fonds de
roulement négatif n’est pas le signe d’une très bonne santé financière.
Source : IGF.
Ainsi, sur un échantillon constant de 17 agences bénéficiant de
taxes affectées, et de 321 agences n’en bénéficiant pas, le taux de
croissance des fonds de roulement des premières est deux fois supérieur à
celui des secondes (+ 49 % contre + 24 % sur la période 2006-2010).
Tableau 24 : Impact des taxes affectées sur l’évolution des fonds de
roulement (périmètre constant)
(En M€)
2006
2007
2008
2009
2010
Évolution
2006-2010 (%)
FdR des agences financées
par des taxes affectées
928
1 043
1 082
1 273
1 382
+ 49 %
FdR des établissements non
financés par des taxes
affectées
8 270
8 940
9 223
10 973
10 468
+ 24 %
Source : IGF, à partir des données DGFiP.
Note : L’analyse porte sur un échantillon de 17 agences bénéficiant de taxes affectées
entre 2006 et 2010, et sur 321 agences n’en bénéficiant pas sur la même période.
Par ailleurs, les agences financées par taxes affectées semblent plus
fréquemment disposer d’un FdR élevé. Alors que seulement 89 agences
sur les 1244 dénombrées par l’IGF dans son rapport sont financées par
taxes affectées, et que celles-ci ne représentent que 20 % du poids total
des agences, l’analyse des vingt-cinq plus importants FdR supérieurs à
trois mois d’activité montre que :
rhombus5
treize d’entre eux (soit plus de la moitié) relèvent d’agences
financées par taxes affectées ;
rhombus5
sur les dix fonds de roulement les plus importants, sept sont
financés par taxe affectée (
cf.
tableau 25 ci-dessous
).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
72
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Tableau 25 : Les 25 fonds de roulement supérieurs à trois mois d’activité
les plus importants (31 décembre 2010)
Organismes
FdR 2010 (en
mois d'activité)
Poids du FdR
(€)
Financement
par taxe affectée
Centre national du cinéma et de l'image animée
13,06
465 384 005
Oui
Établissement public du musée du Louvre
13,84
159 126 336
Non
Fonds de financement de la protection
complémentaire de la couverture universelle du
risque maladie
23,30
126 801 171
Oui
Agence de l'environnement et de la maîtrise de
l'énergie
5,43
117 991 289
Oui
Institut national de la propriété industrielle
9,56
80 435 458
Oui
Centre des monuments nationaux
15,72
75 170 389
Oui
Agence nationale de l'habitat
4,99
72 775 093
Oui
Établissement public du château, du musée et du
domaine national de Versailles
17,20
49 631 713
Non
Office national de l'eau et des milieux aquatiques
7,91
48 384 571
Oui
Agence nationale des fréquences
16,94
39 153 362
Non
Université de Toulouse III
4,39
34 706 162
Non
Office national des anciens combattants et
victimes de guerre
5,31
34 553 953
Non
Fonds de solidarité
7,36
34 264 904
Oui
Musée Rodin
38,20
28 720 636
Non
Université d'Artois
15,89
27 547 964
Non
Agence de l'eau Artois-Picardie
5,84
27 304 221
Oui
Établissement public du musée d'Orsay et du
musée de l'Orangerie
14,56
26 367 483
Non
Centre national du livre
12,61
24 018 505
Oui
Collège de France
34,93
23 414 370
Non
Chancellerie des universités de Paris
29,22
20 546 876
Non
Office national de la chasse et de la faune sauvage
5,22
20 524 420
Oui
Institution nationale des invalides
10,33
17 908 485
Non
Assemblée permanente des chambres d'agriculture
8,43
17 344 108
Oui
Centre national d'enseignement à distance
4,66
17 322 798
Non
Centre national de gestion des praticiens
hospitaliers et des personnels de direction de la
fonction publique hospitalière
9,01
16 962 186
Oui
Source : IGF, à partir des données de la DGFiP.
Le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) fournit
un exemple caractéristique de cet effet d’entraînement sur les dépenses :
entre 2007 et 2011, ses ressources ont crû de 46 %, conduisant à une
accumulation de réserves budgétaires et à une augmentation exponentielle
de son fonds de roulement (
cf.
encadré 11 ci-après
).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
73
Encadré 11 : La dynamique des recettes et du FdR du CNC
entre 2007 et 2011
Entre 2007 et 2011, les ressources du CNC ont augmenté de 46 %, ce qui est lié à la forte
progression des taxes affectées
, et plus particulièrement de la taxe sur les services de
télévision (TST). Les taxes affectées et autres produits de gestion sont passées de 528 M€ en
2007 à 841 M€ en 2011, ce qui correspond à une hausse de 59 % sur la période considérée. Au
sein des taxes affectées, la TST a connu une évolution particulièrement dynamique,
puisqu’elle est passée de 328 M€ de rendement en 2001 à 631 M€ en 2011, sous la double
influence d’un élargissement de l’assiette et de l’augmentation du rendement de cette
assiette
82
.
L’évolution de la trésorerie et du fonds de roulement de l’établissement depuis 2007
montre que la progression des ressources tirées des taxes affectées s’est directement
traduite par une accumulation de réserves budgétaires
. Le CNC dispose d’une trésorerie
de plus de 820 M€ au 31 décembre 2011, dont une part substantielle est immobilisée pour
garantir le financement de dépenses d’intervention et d’investissement. Parallèlement, le fonds
de roulement net global (FRNG) du CNC a considérablement augmenté, passant de 297 M€
en 2007 à 800 M€ en 2011. Calculé en jours de dépenses, après neutralisation de l’effet des
provisions, il est en augmentation régulière depuis 2008 et représente, en 2011, plus de 5 mois
de fonctionnement de l’établissement (
cf.
graphique ci-dessous
).
Graphique 8 : Évolution du fonds de roulement du CNC, en milliers d’euros et en jours
de dépense
0
100 000
200 000
300 000
400 000
500 000
600 000
700 000
800 000
900 000
2007
2008
2009
2010
2011
-100
-50
0
50
100
150
200
Fonds de roulement net
global (échelle de gauche)
Fonds de roulement hors
provisions en jours de
dépense (échelle de droite)
Source :
Cour des comptes
, La gestion et le financement du Centre national du cinéma et de
l’image animée,
octobre 2012.
Les chambres de commerce et d’industrie (CCI) bénéficient
également de taxes affectées dynamiques, qui leur permettent de dégager
en 2011 un bénéfice net de 115 M€ sur la seule section du service général
– alimentée à hauteur de 62 % en moyenne par les taxes affectées –
(
cf. tableau 26 ci-après
).
82
Entre 2008 et 2011 notamment, les recettes issues de la TST « distributeurs » ont
mécaniquement bénéficié des effets cumulés de la croissance du marché des
communications
électroniques
et
du
développement
massif
des
formules
d’abonnement intégrant les services de télévision.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
74
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Cette situation d’aisance financière se matérialise notamment au
travers de l’abondance des fonds de roulement de la plupart des CCI en
2011 :
rhombus5
les CCI territoriales ont un fonds de roulement moyen de 221 jours
d’activité, soit 7 mois d’activité ;
rhombus5
les CCI régionales ont un fonds de roulement moyen de 194 jours
d’activité, soit plus de 6 mois d’activité ;
rhombus5
toutes catégories confondues, 98 chambres, soit 64 % des
153 structures, ont un fonds de roulement supérieur à 150 jours
d’activité, dont 39 chambres avec un fonds de roulement excédant
300 jours d’activité, ce qui correspond à près de 10 mois d’activité.
Encadré 12 : Ressources affectées et situation financière des CCI
Les chambres de commerce et d’industrie bénéficient également de taxes pour frais de
chambres de commerce et d’industrie dont le rendement est très dynamique.
La disparition de la taxe professionnelle (TP) sur laquelle la taxe additionnelle pour frais
de CCI (taxe additionnelle à la taxe professionnelle - TATP) était calculée a conduit à
asseoir les ressources fiscales des CCI sur deux nouvelles contributions :
square4
la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises (CFE), pour une fraction
égale à 40 % de la somme des produits de l’ancienne TATP ;
square4
la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), pour
une fraction égale à 60 %. de la somme des produits de l’ancienne TATP.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Tableau 26 : Situation financière des CCI en 2011 (en €)
Total des CCI
Service général
Formation
Ports
Aéroport
PEEC
Aménagements
Divers
Total des
produits
3 875 251 704
2 051 924 640
1 320 492 685
451 506 070
438 645 554
2 565 719
49 118 483
191 238 203
Dont taxe
affectée
1 265 394 650
1 272 393 132
0
0
0
0
0
0
Part TA/Total
Produits
33 %
62 %
0 %
0 %
0 %
0 %
0 %
0 %
Total des
charges
3 715 222 348
1 937 448 738
1 300 205 508
457 285 282
431 824 650
2 034 663
43 242 581
173 433 410
Charges
d'exploitation
3 422 585 886
1 827 962 550
1 274 727 080
406 985 972
370 417 127
1 913 969
37 291 327
128 432 897
Dont Charges
de personnel
1 666 944 304
742 589 946
615 714 305
153 018 758
123 936 664
444 812
4 328 509
32 597 198
Charges
financières
131 665 334
31 508 913
4 772 290
25 061 699
28 044 747
87 446
2 403 446
40 887 586
Charges
exceptionnelles
146 923 244
73 185 046
20 573 948
23 664 832
27 616 679
33 248
2 791 465
3 062 482
Résultat net
160 029 356
114 845 821
19 917 257
-5 779 213
6 820 904
531 056
5 875 902
17 804 792
Contribution
au résultat
-
72 %
12 %
-4 %
4 %
0 %
4 %
11 %
CAF
410 811 202
144 024 337
59 374 524
87 784 089
65 637 007
-247 599
11 674 889
42 757 552
Contribution à
la CAF
-
35 %
14 %
21 %
16 %
0 %
3 %
10 %
Source : Direction du budget à partir des bases de données comptables de la DGCIS.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
76
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Tableau 27 : Fonds de roulements par type de CCI en 2011
Type de CCI
Fonds de roulement net
disponible (en €)
Fonds de roulement en
jours d’activité
ACFCI
8 888 644
118
CCIT – Moyenne
12 913 914
221
Maximum
206 876 583
710
Minimum
-6 524 567
-286
CCIR – Moyenne
2 825 691
194
Maximum
6 644 272
495
Minimum
0
0
GROUP – Moyenne
1 071 256
168
Maximum
3 624 669
466
Minimum
48 197
2
Source : Direction du budget, DGCIS, calcul du Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : La valeur minimale et la valeur maximale sont calculées indépendamment pour
le fonds de roulement net disponible et pour le fonds de roulement en jours d’activité. Il
ne s’agit donc pas nécessairement de la même entité pour les deux valeurs présentées,
par ligne.
Graphique 9 : Répartition des CCI en fonction de leurs fonds de
roulement en 2011 (en nombre de jours d’activité)
39
59
28
18
9
Moins de
30 jours
Entre 90 et
150 jours
Entre 30 et
90 jours
Entre 150
et 300 jours
Plus de
300 jours
Source
:
DB, DGCIS, calculs Conseil des prélèvements obligatoires
.
4 -
À l’inverse, dans les situations où le rendement des taxes
est insuffisant, l’État est contraint de verser ponctuellement
des subventions d’équilibre
Si,
en
moyenne,
les
ressources
affectées
apparaissent
particulièrement dynamiques, il existe des situations où le rendement de
la taxe est insuffisant pour couvrir les dépenses de l’affectataire. En cas
de rendements insuffisants pour assurer la couverture des dépenses, l’État
intervient en complément par le biais de versement de subventions
d’équilibre.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
77
Ainsi, outre la contribution exceptionnelle de solidarité, le fonds de
solidarité est financé par une fraction des droits de consommation sur les
tabacs – remplacée en 2013 par un prélèvement de solidarité sur le
patrimoine et les revenus de placement – et une subvention d’équilibre de
l’État, qui joue un rôle croissant de variable d’ajustement. Cette dernière,
votée chaque année en loi de finances en fonction des dépenses du fonds,
représente plus de 45 % de ses dépenses. Cet exemple témoigne de ce
que, loin de constituer un outil d’autonomisation de l’opérateur, la
ressource fiscale affectée – tout particulièrement la fraction des droits à
tabac et le prélèvement de solidarité sur le patrimoine et les revenus de
placement – répond surtout à un objectif de rendement budgétaire.
Loin d’être un cas isolé, le financement par crédits budgétaires, en
complément de ressources fiscales insuffisamment dynamiques, concerne
la plupart des agences de financement – l’agence de financement des
infrastructures de transport de France, le fonds CMU
83
, le fonds de
solidarité – mais également des établissements tels que l’agence nationale
pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), l’institut national de
recherches archéologiques préventives (INRAP), voies navigables de
France (VNF) ou encore l’office national de la chasse et de la faune
sauvage (ONCFS) (
cf. encadré 13 ci-dessous
).
Encadré 13 : Les ressources perçues par l’office national de la chasse
et de la faune sauvage
Si les ressources de l’établissement ont augmenté de plus de 30 % entre 2004
(91 M€) et 2012 (119 M€), les redevances cynégétiques, qui représentaient 86,7 % des
recettes en 2004, n’ont cessé de diminuer, et leur proportion, en 2011, est tombée à moins
de 60 %.
Connaissant une trajectoire inverse, la subvention pour charges de service public,
inexistante jusqu’en 2003, s’est considérablement accrue, passant de 0,33 M€ en 2004 à
39,2 M€ au budget primitif de 2012, soit une croissance exceptionnelle parmi tous les
opérateurs de l’État.
Or, cette augmentation n’est pas justifiée par une évolution des activités de l’Office dans
des proportions similaires. En effet, leur analyse entre 2006 et 2011 montre une relative
stabilité du coût des missions d’intérêt général par rapport aux missions proprement
cynégétiques.
Les motifs de l’augmentation de la subvention pour charge de service public sont en réalité
de trois ordres :
square4
le règlement des contentieux avec les fédérations de chasse ;
square4
l’augmentation très sensible des dépenses de personnel ;
square4
la baisse du produit des redevances cynégétiques consécutive à la diminution régulière
du nombre de chasseurs.
Source : Référé de la Cour des comptes du 27 juillet 2012 sur la gestion de l’ONCFS.
83
Avant la LFSS 2013.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
78
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
B - Les taxes affectées offrent une importante
autonomie de gestion aux agences bénéficiaires qui peut
nuire à l’exercice de la tutelle
1 -
L’affectation affaiblit les pouvoirs de contrôle du Parlement
et des administrations de tutelle
Outre ces difficultés de pilotage budgétaire, l’affectation de
recettes engendre un affaiblissement concomitant du pouvoir du
Parlement et de celui de la tutelle.
En
premier
lieu,
l’entorse
au
principe
d’universalité
budgétaire
prive le Parlement d’une partie de son pouvoir de décision et
de contrôle en matière budgétaire, comme l’a relevé, en 2011, le rapport
de la mission d’évaluation et de contrôle sur le financement des politiques
culturelles de l’État par des ressources affectées
84
. L’article 47 de la
LOLF permet aux parlementaires de déposer des amendements de crédits
susceptibles de moduler à la hausse ou à la baisse la dotation budgétaire
de chaque programme, dès lors que le plafond de la mission qui englobe
le programme concerné n’est pas dépassé. Or, il est beaucoup moins aisé
d’adapter les financements des entités affectataires de ressources fiscales.
Le rapport rappelle ainsi que les entités financées par ressources
affectées rentrent dans le champ de l’article 40
85
de la Constitution. Par
conséquent,
il est impossible au Parlement de minorer directement les
recettes du bénéficiaire, sans les compenser ou les « gager », sous
peine d’irrecevabilité des amendements.
Le rapport conclut donc, à ce
propos, que : «
sauf appui ou initiative de l’exécutif
86
, l’affectation de
ressources fiscales à des organismes tiers peut constituer une sorte de
cliquet anti-retour quant au niveau de financement de la politique
publique concernée, et partant, quant au niveau de la dépense publique
».
84
Rapport d’information déposé en conclusion des travaux de la Mission d’évaluation
et de contrôle sur le financement des politiques culturelles de l’État par des ressources
affectées, présenté par MM. Richard Dell’Agnola, Nicolas Perruchot, et Marcel
Rogemont, octobre 2011.
85
Article 40 de la Constitution : «
Les propositions et amendements formulés par les
membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour
conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou
l'aggravation d'une charge publique
».
86
Le Gouvernement n’est pas soumis à l’article 40 et peut donc déposer et défendre
des amendements induisant des pertes de recettes pour une personne publique, sans
être soumis à l’obligation de compenser celles-ci.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
79
En deuxième lieu, certaines taxes laissent une marge de manoeuvre
importante à leurs affectataires,
en cantonnant le Parlement à un rôle
d’encadrement :
rhombus5
les établissements publics fonciers (EPF), qui perçoivent la taxe
spéciale d’équipement (TSE), ne sont pas habilités à en voter le
taux, mais leurs conseils d’administration arrêtent le produit
attendu global annuellement, qui est réparti entre les quatre taxes
auxquelles elle se rattache
87
. L’administration détermine ensuite le
taux d’imposition qui en résulte. Même si le produit de la TSE est
plafonné dans la limite de 20 € par habitant, la plupart des EPF
disposent donc de marges de manoeuvre importantes ;
rhombus5
un mécanisme proche prévaut pour les ressources affectées aux
agences de l’eau. Transformées en impôts en 2006 (
cf. supra
), les
contributions perçues par les agences voient leurs assiettes et
plafonds fixés par le législateur ; il revient cependant aux comités
de bassin
88
de définir la politique de zonage et d’adopter des taux.
En troisième et dernier lieu, l’affectation directe de ressources
fiscales
ôte à la tutelle une partie de ses leviers d’action
à l’égard des
bénéficiaires de taxes affectées.
De nombreux rapports ont souligné
89
, de manière concordante, que
si l’exercice de la tutelle par les administrations avait progressé, il restait
encore insuffisant.
L’État peine à définir une stratégie claire pour ses
agences et à piloter les politiques publiques conduites
. Le rapport de
l’IGF sur les agences de l’État de 2012 a ainsi relevé les difficultés de
gouvernance et de pilotage des tutelles à l’égard des agences de l’État
(
cf.
encadré 14 ci-dessous
).
87
Le produit de la TSE est réparti entre les taxes foncières, la taxe d’habitation et la
CFE proportionnellement aux recettes que chacun de ces taxes a procurées l’année
précédente à l’ensemble des communes et de leurs EPCI situés dans le ressort de ces
établissements.
88
Le comité de bassin est une assemblée qui regroupe les différents acteurs des
bassins hydrographiques français (Adour Garonne, Artois Picardie, Loire Bretagne,
Rhin Meuse, Rhône Méditerranée, Seine Normandie, Corse) pour élaborer une
politique de gestion de l’eau au travers des schémas directeurs d’aménagement et de
gestion des eaux (SDAGE). L’agence de l’eau est l’organisme exécutif chargé de
mettre en oeuvre cette politique ainsi définie.
89
Cf. par exemple, pour le ministère de la culture, l’audit de modernisation
Rapport
sur la tutelle et le pilotage des opérateurs au ministère de la culture
, inspection
générale des finances et inspection générale de l’administration des affaires
culturelles, n° 2006-M-80-01, avril 2007 ; pour les ministères sociaux, cf. l’audit de
modernisation
L’adéquation missions-moyens de l’administration sanitaire et sociale
,
inspection générale des finances et inspection générale des affaires sociales, n° 2006-
M-065-01, avril 2007.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
80
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Encadré 14 : Les difficultés de la tutelle de l’État sur les agences
L’État s’est progressivement doté d’outils destinés à renforcer son pilotage stratégique sur
les agences. Une circulaire du Premier ministre du 26 mars 2010 relative au pilotage
stratégique des opérateurs de l’État a demandé aux autorités de tutelle de «
déterminer
avec précision les objectifs de politique publique assignés aux opérateurs de l’État et
d’évaluer régulièrement les résultats obtenus à l’aide d’indicateurs d’efficacité
».
Plusieurs outils ont alors été mis à disposition des tutelles: « rendez-vous stratégiques »,
« contrats de performances », lettres de mission, rapports annuels normés, guides d’auto-
évaluation, rémunérations variables des dirigeants.
Pourtant, le rapport de l’IGF sur les agences de l’État a relevé que ces outils n’avaient été
que partiellement mis en oeuvre et sous-employés lorsqu’ils étaient effectivement utilisés :
square4
seulement 40% des opérateurs disposaient d’un contrat de performance en 2012, avec
de grandes différences d’application en fonction du ministère de tutelle ;
square4
dans les faits, la contractualisation se révèle souvent décevante : les indicateurs suivis
dans les contrats sont encore très nombreux, à l’image des contrats du conservatoire
du littoral, de l’office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) et de
l’agence de l’eau Loire Bretagne, qui comprennent respectivement 49, 58 et 24
indicateurs ;
square4
ces contrats font l’objet d’un suivi très faible, voire nul le plus souvent ;
square4
65% des dirigeants avait reçu une lettre de mission pour l’année 2011 et seuls 57%
d’entre eux avaient disposé d’une part variable de rémunération au titre des
performances réalisées durant l’année 2011.
De plus, la plupart des contrats de performance ne comportent pas d’objectifs quant aux
moyens financiers. Ainsi, ces dispositifs de gouvernance se révèlent souvent
chronophages pour la tutelle et peu incitatifs pour l’agence.
Par ailleurs, l’absence de
perspectives pluriannuelles ne les intègre pas assez aux objectifs budgétaires qu’ils sont
censés poursuivre.
Source : Rapport de l’IGF sur les agences de l’État, mars 2012.
Dans le cas où l’agence est bénéficiaire d’une taxe affectée, ces
difficultés dans l’exercice de la tutelle sont considérablement renforcées :
rhombus5
pour modifier une affectation de recettes, une disposition
législative est nécessaire, ce qui constitue une procédure beaucoup
plus contraignante qu’un ajustement de dotation budgétaire en
cours d’année. Les ressources fiscales affectées bénéficient
de
facto
d’une
« sanctuarisation »
;
rhombus5
par ailleurs, les ressources fiscales affectées tendent à apparaître
comme
des
« ressources
propres »
pour
les
organismes
affectataires,
bien plus que comme des ressources publiques
à
part entière. En témoigne l’exemple de l’ACP dont le recensement
des ressources dans l’annexe budgétaire sur les API pour 2013
90
ne
fait apparaître aucune ressource publique, mais 164 M€ de
90
Rapport sur les autorités publiques indépendantes, annexé au projet de loi de
finances pour 2013.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
81
« ressources propres » en 2011, correspondant aux droits et
contributions pour frais de contrôle ;
rhombus5
enfin, les taxes affectées peuvent apparaître comme
les ressources
mutualisées d’un secteur d’activité, sur l’utilisation desquelles
la tutelle a peu d’emprise
(
cf. infra
).
2 -
La prise en charge du recouvrement par les agences peut
amplifier les difficultés de pilotage sans nécessairement
rendre la collecte plus efficiente
Sur un échantillon de 138 taxes ou fractions de taxes affectées, il
ressort d’une analyse produite par la direction du budget à la demande du
Conseil des prélèvements obligatoires que la majorité des taxes sont
collectées par les administrations fiscales et douanières :
rhombus5
76 taxes, soit 55% de l’échantillon, sont collectées exclusivement
par des administrations de l’État (67 par le réseau de la DGFiP ;
9 par le réseau de la DGDDI) ;
rhombus5
62 taxes font l’objet d’un recouvrement spécifique : ainsi, 36 taxes
sont collectées par les affectataires eux-mêmes, 10 sont collectées
par des organismes tiers
91
et 16 taxes font l’objet d’un
recouvrement éclaté
92
.
Les modalités de recouvrement ne sont pas une problématique
anodine. En effet, au-delà de la question du coût de la collecte,
l’attribution du recouvrement des taxes à leurs affectataires a des effets
contrastés en termes de gestion publique :
rhombus5
en rapprochant l’organisme affectataire de ses contribuables – qui
sont également ses usagers dans certains cas – ce mécanisme de
collecte directe peut améliorer l’information de l’agence ;
rhombus5
à l’inverse, en augmentant les asymétries d’informations entre les
tutelles et les affectataires, la prise en charge de la collecte par
l’affectataire amplifie les difficultés de pilotage. En effet, la
collecte par l’affectataire tend à priver la tutelle d’informations
budgétaires et financières essentielles.
91
Par exemple, l’autorité de sûreté nucléaire pour le compte de l’agence nationale
pour la gestion des déchets radioactifs, ou l’ACOSS pour le compte de la caisse
nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
92
Par exemple, la taxe sur les produits de la mer au profit de FranceAgriMer est
collectée par la DGDDI pour les produits importés et par l’affectataire pour les
produits de la pêche débarqués en France.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
82
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Faute de contre-expertise des administrations de tutelle, la collecte
peut encourager, de la part des affectataires,
des comportements de
sous-estimation volontaire en cas de fort dynamisme de leurs recettes.
La Cour des comptes a ainsi relevé, dans son rapport d’août 2012 précité,
que la fiabilité des prévisions de recettes du CNC s’était dégradée à
mesure de l’augmentation des ressources de l’établissement, avec une
sous-évaluation systématique du produit des ressources fiscales depuis
2009 dans les documents budgétaires initiaux (
cf.
encadré 15 ci-dessous
).
Encadré 15 : Les écarts entre prévisions et réalisations de recettes
fiscales du CNC
Entre 2008, première année de mise en oeuvre de la TST « distributeurs » et 2011, l’écart
entre les recettes effectivement perçues par le CNC et les recettes initialement envisagées a
atteint 310 M€ dont 260 M€ imputables à la seule TST.
L’ampleur des écarts entre prévisions et réalisations de recettes apparaît d’autant plus
préjudiciable qu’entre 2008 et 2012 les documents mis à disposition du Parlement et du
public par le CNC ne comportaient aucune indication sur les sous-estimations de recettes
fiscales, y compris de manière rétroactive.
Les données budgétaires communiquées au public dans les bilans annuels du CNC, tenant
lieu de rapports d’activité de l’établissement, reprenaient entre 2008 et 2010, les chiffres
prévisionnels de la loi de finances initiale (LFI) ou du budget primitif, et non les chiffres
réalisés. Ces écarts étaient d’autant plus critiquables que le CNC disposait des chiffres
définitifs de perception au moment de l’élaboration du bilan (mai n+1).
Toutefois, le CNC a tenu compte des observations formulées par la Cour pour l’élaboration
du bilan 2011, en mai 2012. Le produit des taxes et les dépenses de soutien y sont désormais
présentés en exécution et non plus sur la base des prévisions budgétaires initiales.
Depuis 2008, les incertitudes pesant sur les recettes fiscales affectées au CNC ont réduit la
fiabilité des prévisions budgétaires de l’établissement, créant un véritable effet d’aubaine.
Source
:
Cour des comptes
, La gestion et le financement du centre national du cinéma et de
l’image animée,
octobre 2012.
La collecte d’une taxe par son affectataire soulève ainsi
d’importantes difficultés de pilotage pour ses tutelles, sans être
nécessairement
plus
efficiente
qu’en
cas
de
collecte
par
une
administration de l’État.
Certains organismes, qui recouvrent directement les taxes qui leur
sont affectées, mettent en évidence des coûts de collecte faibles, bien
inférieurs aux frais génériques de 4 % prélevés par la DGFiP. Il convient
cependant de nuancer une analyse fondée sur la seule comparaison des
coûts de collecte des affectataires et des frais de gestion prélevés par les
administrations fiscales :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
83
rhombus5
les frais de gestion perçus par les administrations fiscales sur les
rendements des taxes affectées ne répondent pas à une évaluation
précise des coûts réellement supportés par l’administration ; il
s’agit d’un prélèvement forfaitaire, dont le montant peut varier en
fonction de paramètre extra-fiscaux ;
rhombus5
plus largement, les frais d’assiette et de recouvrement sont
difficilement comparables aux coûts de collecte des agences, qui
n’effectuent souvent qu’une partie des missions de recouvrement
En effet, le recouvrement forcé incombe fréquemment aux
comptables de la DGFiP, même lorsque les taxes sont recouvrées
par leurs affectataires
93
. À ce titre, l’instruction des contentieux
auxquels donnent lieu les taxes affectées peuvent représenter un
surcoût conséquent. En 2012, la DGFiP a ainsi reçu plus de 3 600
réclamations au titre de la taxe additionnelle à la cotisation sur la
valeur ajoutée des entreprises (CVAE), affectée aux CCI ;
rhombus5
enfin, les coûts de collecte et de recouvrement des agences restent
mal connus ; les coûts qui semblent maîtrisés sont ceux de taxes
d’un rendement important, reposant sur un nombre limité de
contribuables. Dès lors que la taxe est d’un rendement plus
modeste, ou présente une forte complexité, les coûts de collecte
sont plus importants, comme pour les taxes affectées collectées par
les administratiuons fiscales (
cf. supra
).
93
L’exemple des taxes affectées aux centres techniques industriels (CTI) en
témoigne : si la plupart d’entre elles sont recouvrées par les centres techniques ; à
défaut de paiement 30 jours après la réception d’une lettre de rappel motivée, un titre
de perception est établi par le directeur du CTI, visé par le contrôleur d’État et rendu
exécutoire par le préfet du département. Le recouvrement de ce titre de perception est
effectué par les comptables des finances publiques, selon les règles applicables en
matière d’impôts directs. Les comptables chargés du recouvrement des taxes affectées
aux CTI peuvent disposer de plusieurs instruments, parmi lesquels une hypothèque
légale sur les biens immeubles du contribuable ou la procédure de l’avis à tiers
détenteur.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
84
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Encadré 16 : Quelques exemples de coûts de recouvrement de taxes
par des agences
1/ La caisse de garantie du logement locatif social
La CGLLS, qui a perçu en 2012 plus de 370 M€ de taxes, a un coût de collecte compris
entre 0,07 % et 0,23 % du rendement des cotisations et prélèvements collectés. Ce coût
d’apparence faible s’explique par la conjonction de plusieurs éléments :
square4
il s’agit du coût de collecte et d’une partie du coût de recouvrement forcé, les frais
d’assiette étant exclus, de même que les coûts de contrôle puisque le contrôle est
assuré par la mission interministérielle d’inspection du logement sociale (MIILOS) ;
square4
les procédures sont entièrement dématérialisées avec un mécanisme de télé-
déclaration et de télépaiement ;
square4
le nombre d’assujettis est relativement restreint, puisque les organismes redevables
sont environ 800, et bien connus des services de la caisse.
2/ Les agences de l’eau
Les agences de l’eau perçoivent onze redevances (plus de 2,1 Md€ en 2012), pour
lesquelles le coût de collecte annuel s’établit en moyenne pour l’ensemble des six agences
de l’eau à 1,48 %. Il convient cependant de relever une forte dispersion des coûts de
collecte d’une agence à l’autre : les taux d’intervention s’échelonnent ainsi, en 2012, de
0,97 % pour l’agence de l’eau Seine-Normandie à 2,23 % pour l’agence de l’eau Loire-
Bretagne.
Ce coût inclut les coûts salariaux chargés correspondant à la gestion des redevances, aux
contrôles de déclaration, de recherche de nouveaux redevables, de mesure de redevances
et d’indemnisation forfaitaire des distributeurs d’eau. Par ailleurs, les agences de l’eau ont
mis en place une mutualisation de la perception de trois redevances dont elles sont
affectataires, concernées par un taux unique sur l’ensemble du territoire métropolitain.
3/ Le Centre national de gestion
La contribution des établissements de santé et médico-sociaux au budget du CNG, d’un
montant de 10 M€ en 2012, a pour assiette leur masse salariale. Son taux est fixé chaque
année par arrêté des ministres en charge de la santé et des affaires sociales
94
. Ce dispositif
présente plusieurs inconvénients :
square4
son recouvrement est coûteux : deux agents du CNG y travaillent et ont dû, du fait de
la spécificité de l’assiette de la contribution, constituer un fichier spécifique des
établissements ;
square4
le dispositif est également complexe pour les établissements : ceux-ci doivent
produire chaque année auprès du CNG une déclaration de leur masse salariale,
validée par l’agent comptable ;
square4
les taux sont déterminés très tardivement dans l’année, et changent sensiblement tous
les ans : le taux au titre de l’année 2008 (0,009%) a été fixé le 27 juin 2009 ; le taux
pour 2009 a été fixé à 0,03% par arrêté du15 octobre 2009 ; le taux pour 2010 a été
fixé à 0,02% par arrêté du 29 décembre 2010.
Source : Conseil des prélèvements obligatoires ; IGF, rapport sur les agences de l’État
(2012).
94
Article 116 de la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique hospitalière.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
85
Ainsi, aucun élément probant ne permet d’établir un éventuel
surcroît d’efficience en cas de collecte d’une taxe par son affectataire lui-
même.
III
-
La fiscalité affectée soulève également des
problèmes économiques
Compte tenu de son poids dans les prélèvements obligatoires, la
fiscalité affectée constitue un élément important du système fiscal
français, pouvant avoir des effets significatifs sur sa compétitivité.
De nombreux facteurs contribuent à la compétitivité d’un système
fiscal :
la lisibilité et la simplicité des règles fiscales conjuguées à leur
visibilité, c’est-à-dire à la sécurité juridique que leur confère la stabilité
des textes ; la facilité du recouvrement de l’impôt ; le très faible poids des
coûts de conformité pour l’usager, notamment ; le caractère distorsif
95
des
impôts, tant au niveau microéconomique qu’au niveau macroéconomique.
L’analyse économique de la fiscalité affectée doit par conséquent
également porter sur ces facteurs.
Il ressort de cette analyse qu’à certains égards, la fiscalité affectée
semble incarner certaines des limites du système fiscal français.
A - En contribuant à la faible lisibilité du système fiscal
ou en perturbant certains équilibres concurrentiels, les
effets microéconomiques de la fiscalité affectée peuvent
être importants
1 -
La fiscalité affectée contribue à la faible lisibilité et à
l’instabilité du système fiscal
En première analyse, la fiscalité affectée se caractérise par une faible
lisibilité d’ensemble et par une forte complexité, qui peut aller à
l’encontre de l’objectif de clarté et d’intelligibilité de la norme fiscale
pour les assujettis.
Plusieurs éléments concourent à la complexité de la fiscalité
affectée :
rhombus5
la multiplication des entités de recouvrement des taxes affectées
induit, pour les entreprises assujetties, une complexité de gestion ;
95
Les effets distorsifs de la fiscalité sont explicités au B – 1
infra
du présent chapitre.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
86
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
les bases juridiques des dispositifs de taxation affectée sont
dispersées dans de nombreux codes
96
;
rhombus5
enfin, et surtout, la norme en matière de fiscalité affectée apparaît
volatile et changeante
(
cf. encadré 17 ci-dessous
).
Encadré 17 : Quelques exemples de modification de normes fiscales
1/ Les dépenses de promotion de l’industrie pharmaceutique
Créée par la loi du 19 janvier 1983, la taxe sur les dépenses de promotion, dont doivent
s’acquitter les entreprises qui exploitent en France une ou plusieurs spécialités
pharmaceutiques donnant lieu à remboursement ou inscrites sur la liste des médicaments
agréés à l’usage des collectivités, a été refondée dans sa forme actuelle par la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2003. Depuis lors, cette taxe a déjà connu quatre
types de modifications substantielles :
square4
sur les taux applicables aux différentes tranches (la tranche étant constituée par le
rapport entre l’assiette définie pour la taxe et le chiffre d’affaires hors taxes de
l’entreprise considérée) ;
square4
sur le niveau de l’abattement forfaitaire : fixé à 2,5 M€ depuis la loi du 13 août 2004,
il avait été modifié par la LFSS pour 2003 (0,5 M€), puis à nouveau par la LFSS
pour 2004 (1,5 M€) ;
square4
des éléments de définition de l’assiette : la LFSS pour 2012 a étendu l’assiette à
l’ensemble des publications dans la presse médicale, la LFSS pour 2013 l’a quant à
elle étendu aux dépenses d’organisation et de participation aux congrès
pharmaceutiques ;
square4
des éléments de nature plus technique, tels que l’appréciation de l’assujettissement
pour des exercices comptables dont la durée est supérieure à 12 mois.
2/ La contribution au fonds CMU
Dans le secteur des assurances, la taxe affectée au fonds CMU illustre l’instabilité des
taux. Ainsi, avant d’être remplacée par une taxe sur les cotisations d’assurance afférentes
aux garanties de protection complémentaire en matière de frais de soins de santé, la
contribution au fonds CMU, créée en 2000, a changé trois fois de taux : 1,75 % entre 2000
et 2005, 2,5 % entre 2006 et 2008, 5,9 % entre 2009 et 2011, 6,27 % depuis le 1er janvier
2011.
96
Ainsi, les contributions à la charge de l’employeur ne sont pas toutes codifiées au
sein du code général des impôts mais dispersées entre divers articles du code de la
sécurité sociale (contribution sur les avantages de pré-retraite d’entreprise,
contribution sur les indemnités de mise à la retraite, contribution sur les stock-options,
cotisation des employeurs au fonds national d’aide au logement), du code du travail
(contribution annuelle au fonds de développement pour l'insertion professionnelle des
handicapés, contribution de 0,1 % assise sur les rémunérations retenues pour l'assiette
de la taxe d'apprentissage, financement des congés individuels de formation des
salariés sous contrats à durée déterminée), du code de la construction et de
l’habitation (participation des employeurs à l’effort de construction), du code général
des collectivités territoriales relativement au versement transport, voire dans certains
cas du code de la propriété intellectuelle (redevances perçues à l'occasion des
procédures et formalités en matière de propriété industrielle) ou du code du
patrimoine si elles sont soumises à la redevance d’archéologie préventive.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
87
La complexité fiscale est préjudiciable pour les entreprises car elle
induit, d’une part, des coûts fixes parfois importants
(coûts de gestion
résultant de la pluralité de taxes et de collecteurs ; coûts d’adaptation aux
normes nouvelles
97
)
et, d’autre part, elle perturbe la visibilité requise par
les entrepreneurs pour investir.
L’instabilité de la norme fiscale est
d’ailleurs d’autant plus préjudiciable que le cycle d’investissement est
long.
La fiscalité affectée, par ses modifications de forme autant que de
fond, d’assiette autant que de taux, s’avère par conséquent de nature à
perturber le processus de décision des entreprises.
2 -
La fiscalité affectée peut également perturber certains
équilibres concurrentiels
Les effets microéconomiques de la fiscalité ne sont pas simples à
appréhender. Ils varient fortement en fonction de plusieurs paramètres, au
nombre desquels l’on retrouve essentiellement :
rhombus5
l’intensité concurrentielle du secteur ;
rhombus5
l’existence d’une concurrence internationale ;
rhombus5
le degré de flexibilité des prix, qui peut être faible en cas de
régulation sectorielle ;
rhombus5
le niveau des marges des entreprises dudit secteur ;
rhombus5
les élasticités-prix de la demande et de l’offre et l’existence
d’éventuelles substitutions.
En fonction de la configuration de chaque secteur, les effets de la
fiscalité diffèrent. En particulier, l’incidence fiscale
98
, c'est-à-dire
l’identification de qui,
in fine
, supporte la taxe affectée, peut être
différente. La taxe peut ainsi être principalement supportée par le
consommateur,
via
une hausse de prix, soit par les entreprises du secteur
assujetti (celles-ci pouvant être contraintes de réduire leurs marges, de
97
Par exemple, pour les entreprises du secteur financier, des coûts d’adaptation
informatique résultant de l’incorporation de la norme fiscale. Au-delà des coûts
informatiques, une taxe complexe peut également induire du contentieux. Tel est le
cas, à titre d’exemple, dans le secteur des assurances, de la taxe spéciale sur les
conventions d’assurance (TSCA).
98
L’un des premiers enseignements de la théorie de la fiscalité est que celui qui
assume réellement le coût de l’impôt n’est pas nécessairement celui qui verse
physiquement la contribution (lorsqu’un tel cas est avéré, il s’agit d’une situation
d’incidence fiscale) ; la contribution est, en effet, généralement supportée par
l’assiette la moins mobile. Par exemple, il est établi que les cotisations sociales à la
charge des entreprises sont,
in fine
, supportées par le salarié
via
une rémunération
moindre que ce que lui permettrait d’espérer sa productivité.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
88
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
moins investir ou de délocaliser), soit partagée entre le consommateur et
l’entreprise.
Comme pour la fiscalité de droit commun, les effets de la
fiscalité affectée ne sont donc pas univoques
; ils varient en fonction
des caractéristiques sectorielles. Le tableau 28 ci-après présente, de
manière stylisée, ces principaux effets micro-économiques :
Tableau 28 : Impacts théoriques de la fiscalité affectée en fonction
des caractéristiques des secteurs assujettis
Cas types correspondant à des situations existantes
Caractéristiques sectorielles
Effets
Intensité
concurrentielle
Concurrence
internationale
Régulation
des prix
Niveau
des
marges
Élasticité-
prix de la
demande
Incidence
fiscale sur le
consommateur
Impact global de la
fiscalité affectée sur
le secteur
Très faible
Faible
Forte
Élevé
Très
faible
La fiscalité se
répercute
automatiquement
sur le
consommateur
Les effets sectoriels
sont limités ; les
consommateurs ne
réduisant pas leur
consommation, les
marges sont
maintenues
Moyenne
Faible
Faible
Faible
Moyenne
La fiscalité se
répercute
partiellement sur
le consommateur
Pour maintenir ses
marges, le secteur
réduit son niveau
d’investissement
Forte
Faible
Moyenne
Élevé
Faible
Le
consommateur
ne subit pas de
hausse de prix, la
fiscalité étant
absorbée par une
baisse des
marges
Les effets sectoriels
sont importants :
baisse des marges,
moindre
investissement
Forte
Forte
Faible
Faible
Faible
La fiscalité se
répercute en
grande partie sur
le consommateur
Les effets sectoriels
sont limités jusqu’à
un certain
point (encouragement
à la délocalisation ;
moindre
investissement)
Forte
Forte
Forte
Moyen
Forte
(positive)
Les effets sont
limités sur le
consommateur
Les effets sectoriels
sont importants :
baisse des marges,
moindre
investissement,
délocalisation
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : Le tableau a été construit à partir d’une analyse des effets microéconomiques de la fiscalité
affectée observés sur des cas réels. L’analyse a porté sur les secteurs suivants : électricité et gaz ;
assurances ; transports ; industries pharmaceutiques ; télécommunications.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
89
Dans les faits, la fiscalité affectée a les effets microéconomiques
suivants :
rhombus5
ponctuellement, la fiscalité affectée permet de corriger des
situations de surprofit d’entreprises bénéficiant de rendements
importants résultant d’une trop faible concurrence sectorielle.
C’était probablement le cas du secteur des télécommunications
avant l’attribution d’une licence à un nouvel opérateur ;
rhombus5
compte tenu des assiettes taxées (
cf. infra
), dans la plupart des cas,
la fiscalité affectée pèse directement sur le consommateur. C’est
par exemple le cas de la CSPE (près de 4 Md€) ou de la plupart des
contributions perçues par les agences de l’eau (2,3 Md€), qui sont
directement facturées au consommateur ;
rhombus5
pour les secteurs où la concurrence est forte, elle peut, à partir d’un
certain niveau, avoir des effets sectoriels significatifs : baisse des
marges, incitation à la délocalisation, baisse des investissements ;
rhombus5
enfin, le choix de certaines assiettes est parfois susceptible de
générer des distorsions de concurrence. Le cas le plus significatif
en la matière est celui de la TST « distributeurs » dont sont
redevables depuis la loi du 5 mars 2007 les opérateurs de
communications électroniques.
Encadré 18 : Problématiques fiscales liées à la TST « distributeurs »
La TST « distributeurs » a été assise sur la seule part des offres intégrées correspondant aux
services de télévision, sur le modèle de la TVA réduite à 5,5 % applicable à la part des
abonnements
triple play
supposée représentative du service d’accès à la télévision.
Or, dans le cas de la TVA réduite comme de la TST « distributeurs », les opérateurs
commercialisant des offres de télévision non composites dans une offre forfaitaire ont mis en place
des stratégies d’optimisation fiscale visant à valoriser, au titre de l’accès aux services de
télévision, la part la plus importante possible de leurs produits d’abonnement.
Une telle stratégie permet de minimiser l’assujettissement. Les fournisseurs d’accès internet ont
ainsi bénéficié d’un avantage concurrentiel, jusqu’à la loi de finances pour 2011 qui a étendu
l’assiette à la totalité du prix de l’offre, diminué d’un abattement de 55 %, afin de conserver le
niveau d’assiette précédemment enregistré et de sécuriser les recettes du CNC. La modification de
la TST « distributeurs » est cependant affectée d’une incertitude puisqu’elle a fait l’objet d’une
notification à la Commission européenne le 26 octobre 2011, pour une décision toujours en
attente.
Dans la version actuellement en vigueur, la TST « distributeurs » emporte deux effets principaux
sur l’équilibre concurrentiel :
square4
des phénomènes d’optimisation fiscale de la part de certains acteurs, puisqu’il est toujours
possible à des opérateurs de minorer l’assiette imposable en décomposant leur offre de
manière à facturer l’accès à la télévision pour un prix quasi symbolique ;
square4
des effets de seuil : l’imposition étant progressive par tranches de chiffre d’affaires (dernière
tranche à 530 M€ dans la version en vigueur), la contribution est mécaniquement non
proportionnelle et s’exerce au détriment des contributeurs les plus importants.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
90
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
B - Du point de vue macroéconomique, la fiscalité
affectée présente les mêmes limites que la fiscalité
de droit commun
1 -
La théorie économique enseigne que certains impôts
sont plus distorsifs que d’autres
L’analyse économique suggère que la fiscalité, à moins d’être
forfaitaire
99
, est par nature distorsive, c’est-à-dire qu’elle modifie les
comportements microéconomiques des agents ainsi que les prix relatifs
entre les biens et les services. Dans le cadre théorique d’une économie de
marché « parfaite », où l’ajustement des prix relatifs conduit à une
allocation optimale des facteurs de production, les impositions non
forfaitaires
biaisent
alors
les
décisions
de
consommation,
d’investissement et d’épargne des agents économiques, et engendrent une
perte de leur bien-être. Par ailleurs, dans une situation de libre circulation
des capitaux et, de manière croissante, de la main d’oeuvre qualifiée, ainsi
que de concurrence fiscale entre les pays, régions ou localités
,
les
distorsions résultant de la fiscalité sont accrues
100
.
Cette approche de la fiscalité doit cependant être nuancée.
D’une part, toutes les taxes ne sont pas distorsives de la même
manière ou avec la même intensité, comme le montrent des travaux
récents de l’OCDE
101
. Ainsi, les taxes sur les facteurs de production
« travail » et « capital » sont plus distorsives que les taxes assises sur la
consommation, elles-mêmes moins distorsives que les taxes assises sur
l’énergie ou le foncier (
cf. tableau suivant
).
99
C’est-à-dire non proportionnelle à une assiette d’imposition donnée.
100
Des limites demeurent toutefois à cette concurrence fiscale : toutes les assiettes ne
sont pas mobiles ; la comparaison entre les niveaux de taxation pratiqués par des pays
distincts pour une imposition donnée sur une même assiette est parfois peu aisée pour
les agents économiques du fait de la difficulté à déterminer les taux effectifs
d’imposition.
101
A titre d’exemples dans la littérature récente sur les liens entre fiscalité et
croissance économique : OCDE,
Tax and economic growth
, 2008 ; OCDE,
Objectif
croissance
, 2009 ; OCDE,
Tax policy reform and economic growth
, 2010.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Tableau 29 : Classement des assiettes sur lesquelles repose la fiscalité affectée par degré et nature de la distorsion engendrée
Catégorie d’imposition
Assiette classée par ordre
décroissant de distorsion
Niveau de
distorsion
Nature économique de la distorsion
Imposition sur les
entreprises
Capital
Très élevé
Très défavorable sur l'activité à moyen terme (alourdissement direct du coût du capital, d’où un
effet à la baisse sur l’intensité capitalistique, diminuant ainsi la productivité du travail et au
final les salaires et l’offre de main d’oeuvre)
Travail
Très élevé
Très défavorable sur l'emploi à moyen terme en réduisant le volume d’heures travaillées (sur la
demande de travail : alourdissement direct du coût du travail et substitution de capital au
travail ; sur l’offre : risque de trappe à inactivité et réduction de la participation au marché du
travail, surtout dans le cadre d’une économie ouverte)
Chiffre d’affaires
Élevé
Préjudiciable à l'activité et à l'emploi à moyen terme (alourdissement du coût du capital et du
travail au prorata de leur poids dans la production)
Bénéfice
Élevé
Préjudiciable à l'activité à court terme (réduction de la rentabilité du capital et des capacités
d'auto-financement) et à long terme
via
une baisse de la productivité (décisions non optimales
d’allocation des facteurs de production ; augmentation des coûts de conformité ; réductions des
incitations à investir dans les projets risqués, du fait d’une espérance de rendement plus faible)
Imposition sur les
revenus (patrimoine,
produits de placement)
Épargne financière
Élevé
Préjudiciable à l’activité à moyen-long terme (réduit l’investissement et l’entreprenariat
via
une baisse du taux d’épargne et du financement de certaines entreprises (notamment les très
petites et moyennes entreprises), ce qui est de nature à réduire la croissance potentielle)
Imposition sur la
consommation
Consommation des ménages
Moyen
Ne biaise pas les comportements à court terme mais est défavorable pour le pouvoir d’achat
des ménages en pénalisant la consommation ; a des effets indéterminés sur l’épargne (baisse de
l’épargne pour maintenir son niveau de consommation ; encouragement à l’épargne en cas de
choix de baisser son niveau de consommation) ; à moyen terme, défavorable pour la
compétitivité et l’emploi
via
l’augmentation du coût du travail (transmission
via
le jeu des
négociations salariales, - le taux de chômage influe la vitesse de transmission)
Impositions spécifiques
Consommation ou production
générant des externalités
négatives
Faible
Pèse sur le coût des consommations intermédiaires ou sur le pouvoir d'achat des ménages ; à
l’inverse, améliore le bien-être collectif en réduisant les externalités négatives
Foncier
Faible
Pèse pour une faible part sur le coût du capital (cas de la fiscalité foncière sur les entreprises)
Prélèvement forfaitaire
Faible
Ne pèse quasiment pas sur les facteurs de production
Autres
Dépend de
l'assiette
Dépend de l'assiette
Source : OCDE, Conseil des prélèvements obligatoires.
Note de lecture : Ce tableau ne porte pas sur l’ensemble des assiettes taxables. En effet, toutes les bases taxables existantes n’étant pas l’objet de
taxes affectées, ce tableau ne renseigne que les assiettes concernées, dans les faits, par une taxe affectée. Ainsi, les taxes sur les successions et sur
les transactions notamment ne sont pas référencées dans ce tableau..
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
92
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
D’autre part, il convient de rappeler que l’analyse d’un système
fiscal ne saurait se réduire à la description et la mesure de ses incidences
perturbatrices sur les comportements des agents économiques. En effet, la
fiscalité peut être utilisée pour corriger des
défaillances de marché
.
En
corrigeant des externalités ou en finançant des biens publics qui ne
seraient pas naturellement produits par le marché, la fiscalité permet de se
rapprocher de l’optimum social. Par ailleurs, la structure de la fiscalité,
notamment la composition des bases d’imposition retenues, ne constitue
pas l’unique facteur de décision des agents économiques : ainsi, la
géographie conditionne les choix de localisation des activités
102
, ainsi que
la lisibilité, la stabilité et la simplicité de la norme fiscale.
2 -
Si la fiscalité affectée hors sécurité sociale n’apparaît pas plus
distorsive que la fiscalité de droit commun, elle en renforce les
défauts
L’analyse des assiettes sur lesquelles repose la fiscalité affectée hors de la
sécurité sociale
103
montre qu’elle est assez comparable à l’ensemble de la
fiscalité française.
La fiscalité affectée n’est donc pas particulièrement
plus distorsive que la fiscalité de droit commun.
Graphique 10 : Ventilation des taxes affectées sur l’ensemble du
périmètre étudié hors sécurité sociale par types d’assiette
(en %, en 2011)
7%
6%
Foncier
7%
11%
Prélèvement forfaitaire
5%
3%
60%
3%
Travail
Externalités négatives
Consommation
Chiffre d’affaires
Capital
Autres
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
102
Cf. le modèle « coeur-périphérie » de Paul Krugman en 1991.
103
C’est-à-dire principalement de la fiscalité affectée à des agences ou à organismes
professionnels, au sein du budget de l’État ou sous forme de prélèvements
sui
generis
.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
93
Cependant, la fiscalité affectée contribue aux deux principaux
défauts du système fiscal français tels que récemment établis par un
rapport de la Cour des comptes
104
:
d’une part, en raison de son poids, la fiscalité affectée alourdit un
taux de prélèvements obligatoires qui est d’ores-et-déjà le plus élevé de
l’Union européenne, après le Danemark.
Le taux de la France est ainsi
plus de quatre points supérieur à la moyenne de l’Union ;
Graphique 11 : Poids des prélèvements obligatoires en 2010 (% de PIB)
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
50
France
Allemagne
Royaume-Uni
Zone euro
UE 27
Source : Eurostat.
d’autre part, la structure du système fiscal français s’avère
précisément déjà plus distorsive que celle de la moyenne de l’Union
européenne (UE). En effet, les taux implicites d’imposition du capital et
du travail, qui sont les assiettes les plus distorsives, sont sensiblement
supérieurs en France, alors que la consommation apparaît moins taxée
que dans le reste de l’Union (
cf. graphiques suivants
). Parce qu’elle est à
l’image de la fiscalité de droit commun, la fiscalité affectée contribue
donc à la faible compétitivité du système fiscal français.
104
Les
prélèvements fiscaux et sociaux en France et en Allemagne
, Rapport public
thématique, Cour des comptes, mars 2011.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
94
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Graphique 12 : Comparaison des taux implicites d’imposition du travail
salarié
105
entre la France, l’Allemagne et l’UE
Source : Cour des comptes, Rapport sur les prélèvements
fiscaux et sociaux en France et en Allemagne, 2012.
Graphique 13 : Comparaison des taux implicites d’imposition
du capital
106
entre la France, l’Allemagne et l’UE
Source : Cour des comptes, Rapport sur les prélèvements
fiscaux et sociaux en France et en Allemagne, 2012.
105
Le taux implicite d’imposition du travail salarié est égal au ratio des recettes
fiscales des prélèvements assis sur le travail salarié rapporté au revenu total des
salariés, toutes cotisations incluses.
106
Le taux implicite d’imposition du capital est égal au ratio des recettes fiscales des
prélèvements assis sur le capital (en stock et en revenus) rapporté à l’ensemble des
revenus tirés du capital (entreprises et ménages).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
95
Graphique 14 : Comparaison des taux implicites d’imposition de la
consommation
107
entre la France, l’Allemagne et l’UE
Source : Cour des comptes, Rapport sur les prélèvements
fiscaux et sociaux en France et en Allemagne, 2012.
3 -
Une restructuration de la fiscalité affectée pourrait avoir des
effets macroéconomiques non négligeables
Compte tenu des enjeux économiques qui viennent d’être exposés,
le Conseil des prélèvements obligatoires a demandé à la direction
générale du Trésor de simuler les effets macroéconomiques (notamment
sur la croissance et sur l’emploi) de
deux scénarios de réforme
:
rhombus5
l’existence d’une part significative de dépenses inefficientes
108
financées par taxes affectées (
cf. infra, chapitre 4
) suggérait,
comme première simulation, de réduire symétriquement le poids
de la fiscalité affectée et le niveau de dépenses financées, par
exemple de 5 ou de 10% ;
rhombus5
l’existence de taxes affectées pesant sur des assiettes distorsives
suggérait, comme seconde simulation, de mesurer les effets
résultant du basculement de ces impôts vers des assiettes moins
distorsives.
107
Le taux implicite d’imposition de la consommation est égal au ratio des recettes
fiscales des prélèvements assis sur la consommation rapporté à la consommation des
ménages.
108
C’est-à-dire de dépenses dont la contrepartie en termes de production de biens
publics est faible.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
96
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
La première simulation, portant sur les effets macroéconomiques
d’une diminution de 5 % ou de 10 % de la fiscalité affectée, s’est avérée
techniquement
impossible
à
réaliser.
En
effet,
les
modèles
macroéconomiques standards comme « Mésange », modèle utilisé par la
direction générale du Trésor, ne permettent pas de simuler finement la
baisse d’une dépense publique inefficiente, toute baisse de la dépense
publique ayant, par hypothèse de construction du modèle et quelle que
soit l’efficience de celle-ci, un effet récessif. Or, les effets de la réduction
d’une dépense inefficiente sont plus complexes à appréhender : outre une
baisse de la consommation publique, ayant à court terme un effet récessif,
celle-ci entraîne une baisse de la pression fiscale qui, d’une part,
augmente le pouvoir d’achat des ménages et stimule la consommation
privée, et, d’autre part, stimule à moyen terme la croissance potentielle
par effet de substitution
109
. D’autres effets macroéconomiques peuvent
ponctuellement intervenir, mais nécessiteraient une analyse taxe par
taxe
110.
La seconde simulation, portant sur une substitution d’assiettes, a en
revanche pu être réalisée par la direction générale du Trésor. Elle
démontre le caractère bénéfique des effets sur l’activité et l’emploi d’une
modification de la composition de l’assiette des taxes affectées, en
privilégiant les taxes les moins distorsives au détriment des taxes les plus
distorsives.
109
Une dépense inefficiente étant remplacée par une autre l’étant moins.
110
Par exemple, une réduction de la CSPE pourrait avoir des effets positifs sur le
solde commercial en réduisant les incitations à l’importation de technologies
fabriquées dans des pays tiers (éoliennes au Danemark et en Allemagne ; panneaux
solaires en Chine).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
97
Encadré 19 : Méthode utilisée pour la simulation
La direction générale du Trésor a réalisé ses simulations sur un périmètre excluant les taxes
affectées aux organismes de sécurité sociale (en particulier, les taxes ayant une finalité
comportementale, telles que les taxes portant sur les alcools et les tabacs, ont un caractère
distorsif recherché ; modifier leur assiette reviendrait à changer substantiellement leur finalité,
voire à les rendre inopérantes). Le périmètre utilisé pour la simulation représentait ainsi, en
2011, un volume de taxes affectées de près de 60 Md€, dont 39 Md€ portaient sur des assiettes
particulièrement distorsives (taxes sur le capital, le travail et la production).
Sur ce périmètre, les taxes les plus distorsives ont été réduites de 6 Md€ (soit
10 % du périmètre). Cette baisse a été répartie uniformément sur chacune des assiettes
distorsives, c’est-à-dire au prorata de leur poids réciproque.
Tableau 30 : Simulations effectuées sur les assiettes les plus
distorsives au sein du bloc de fiscalité affectée examiné
Assiette les plus
distorsives
Montant recettes
avant transfert (Md€)
Poids des recettes
avant transfert (%)
Baisse des
recettes
(Md€)
Taxe sur le capital
3,4
9 %
1
Taxe sur le travail
33,9
87 %
5
Taxe sur la
production
1,8
5 %
0
Total
39,1
100 %
6
Source : Direction générale du Trésor.
Pour compenser cette baisse de la fiscalité, les taxes les moins distorsives (prélèvements
forfaitaires sur les ménages et les entreprises, fiscalité portant sur des externalités négatives
etc.) ont été augmentées du même montant. Cette augmentation a été proportionnelle au poids
de chacune de ces assiettes avant le transfert.
Tableau 31 : Compensations effectuées sur les assiettes les moins distorsives au sein du
bloc de fiscalité affectée examiné
Assiette les moins
distorsives
Montant recettes avant
transfert (Md€)
Poids des recettes
avant transfert (%)
Augmentation des
recettes (Md€)
Taxe forfaitaire sur
les ménages
3,6
47 %
3
Taxe forfaitaires sur
les entreprises
0,8
10 %
1
Taxe sur certains
revenus du
patrimoine des
ménages
0,5
6 %
0
Fiscalité écologique
2,9
37 %
2
Total
7,7
100 %
6
Source : Direction générale du Trésor
.
Un basculement, pour un montant de 6 Md€, des taxes affectées les
plus distorsives vers les taxes affectées les moins distorsives, aurait des
effets significatifs par rapport à une situation sans changement d’assiette :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
98
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
la modification de la composition de l’assiette des taxes affectées
aurait un impact positif sur l’emploi dès le court terme. Dès la
première année, près de 14 000 emplois seraient ainsi créés, 25 000
à horizon 3 ans et environ 50 000 à horizon 5 ans ;
rhombus5
l’effet sur l’activité apparaitrait à moyen terme. En effet, les
réductions de taxe sur le travail mettent du temps à manifester
leurs pleins effets sur l’activité, car la baisse du coût du travail ne
se transmet que progressivement aux coûts de production des
entreprises. Parallèlement, l’effet de la baisse des taxes sur le
capital et sur les prix de production apparaît avec un certain délai.
Si l’impact sur le PIB est légèrement récessif la première année
(-0,04 pt de PIB), il devient positif dès la 3
ème
année (+ 0,01 pt de
PIB) ;
il atteint près de 0,2 point de PIB à horizon 10 ans.
Tableau 32 : Effets du basculement de 6 Md€ des recettes des taxes
affectées les plus distorsives vers des assiettes moins distorsives
Effets
Macroéconomiques
1 an
3 ans
5 ans
10 ans
PIB en volume (en %)
-0,04
+ 0,01
+ 0,08
+ 0,18
Emploi salarié créé (en nombre)
+ 14 000
+ 25 000
+ 34 000
+ 48 000
Source : Direction générale du Trésor.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Chapitre IV
Le foisonnement de taxes affectées
semble traduit surtout des phénomènes
de débudgétisation
Les deux premiers chapitres de ce rapport ont montré, d’une part,
la difficulté à circonscrire de manière précise le champ de la fiscalité
affectée et permis d’établir, d’autre part, un phénomène de foisonnement
du nombre de taxes affectées, sans logique apparente.
Avec un poids
équivalent, en 2011, à 5,2 % de PIB et à 10 % des prélèvements
obligatoires
111
, les taxes affectées ne peuvent plus être considérées comme
un phénomène limité.
Par ailleurs, il apparaît aujourd’hui que la fiscalité affectée s’avère
particulièrement coûteuse pour les finances publiques. Compte tenu des
enjeux qu’elle soulève et
d’un contexte contraint pour les finances
publiques, il apparaît indispensable :
rhombus5
d’établir des critères objectifs permettant de justifier ces
affectations de ressources fiscales ;
rhombus5
de s’interroger sur les objectifs poursuivis lors de la création d’une
taxe affectée.
111
Ces chiffres correspondent au périmètre large tel que défini dans le chapitre I de ce
rapport ; pour le périmètre correspondant à la demande du Premier ministre
(agences de l’État ; organismes consulaires ; organismes techniques et professionnels
et dispositifs de solidarité nationale), les taxes affectées représentent environ 3,0 % de
PIB et 1,2 % des prélèvements obligatoires.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
100
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
I
-
Les arguments avancés en cas d’affectation
ne justifient pas, dans la plupart des cas, une
dérogation au principe d’universalité budgétaire
Comme
indiqué
précédemment,
le
principe
d’universalité
budgétaire est l’un des principaux fondements de la démocratie
budgétaire. En effet, son contournement se traduit,
de facto
, par
l’affaiblissement du contrôle du Parlement sur les ressources et les
dépenses publiques. Parce qu’il est une atteinte au fonctionnement même
de la démocratie, son contournement ne doit pouvoir être justifié que par
des arguments suffisamment forts et pertinents.
Dans les faits, les arguments avancés pour justifier la fiscalité
affectée reposent soit sur des principes issus de la théorie économique,
soit sur des considérations de bonne gestion publique.
L’examen et l’analyse de ces différents arguments révèle que les
justifications au contournement du principe d’universalité sont limitées.
Le recours à la fiscalité affectée peut répondre à la poursuite de certains
objectifs, sans que la nécessité de l’affectation ne soit démontrée.
A - D’un point de vue économique, le principe d’une
affectation peut se justifier s’il permet d’accroître
le consentement à l’impôt
Selon la typologie, devenue célèbre, de l’économiste britannique
Richard Musgrave
112
, une politique économique peut poursuivre trois
objectifs distincts :
rhombus5
la stabilisation du cycle économique (conduite de politiques
contracycliques lissant les effets du cycle économique, dans une
logique keynésienne) ;
rhombus5
la redistribution (réduction des inégalités et meilleure répartition
des richesses).
rhombus5
la correction de défaillances de marché (en particulier, la réduction
des externalités négatives) ;
En tant qu’instrument de politique économique, tout impôt peut
ainsi viser, en plus de sa fonction première de financement des politiques
publiques, un objectif de correction d’une défaillance de marché ou un
objectif de redistribution (l’objectif de régulation du cycle économique
112
Richard Musgrave,
The Theory of Public Finance
. A Study in Public Economy,
1959.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
101
par la fiscalité étant moins évident, la politique budgétaire étant
probablement plus efficace pour l’atteindre).
Dans ce cadre théorique simple mais robuste, l’affectation d’une
ressource fiscale en dehors du budget de l’État ne peut se justifier, d’un
point de vue économique, que si cette affectation rend l’impôt plus
efficace, c’est-à-dire si elle facilite l’atteinte de ses objectifs.
1 -
Le consentement à l’impôt n’est amélioré que si la ressource
prélevée finance directemement et exclusivement des actions
profitant aux contributeurs
Parmi les facteurs qui concourent à l’efficacité de la fiscalité,
l’amélioration du consentement à l’impôt
113
joue théoriquement un rôle
important.
En première analyse, le constat fait par l’assujetti de la
nécessité de payer une contribution devrait être plus important lorsque
l’impôt est fléché sur une dépense bien identifiée :
rhombus5
l’affectation faciliterait le contrôle de l’emploi et de l’efficacité de
la dépense ;
rhombus5
lorsqu’il existe par ailleurs un lien entre les assujettis et la nature
de la dépense, le consentement serait particulièrement fort, la
dépense contribuant au financement d’une politique bénéficiant
indirectement aux assujettis et non à une communauté plus large de
bénéficiaires.
Dans les faits, les effets de la fiscalité affectée sur le consentement
à l’impôt ne sont pas simples à établir ; ils ne sont ni univoques, ni
exempts de difficultés.
En premier lieu, le renforcement du consentement à l’impôt
suppose
a minima
qu’un « lien » existe entre les assujettis et les missions
accomplies par l’organisme affectataire. Or, ce lien peut fréquemment
s’avérer très ténu, voire inexistant (
cf. infra
), si bien que le seul objectif
valable, bien que parfois lointain, demeure celui de financement d’une
politique publique. Même quand ce lien existe, il n’apparaît pas toujours
très convaincant, comme en témoigne le cas des prélèvements sur les
paris sportifs ou les jeux en ligne affectés au Centre national de
développement du sport :
113
L’article 14 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789
dispose que : «
tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs
représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en
suivre l’emploi et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée
».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
102
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
le lien entre le sport de haut niveau, qui est
de fait
l’objet du
prélèvement, et le sport amateur, qui en bénéficie, n’apparaît pas
évident ;
rhombus5
les assujettis ne sont pas nécessairement informés de la destination
de leur contribution ;
rhombus5
enfin, les jeux font l’objet de nombreux prélèvements bénéficiant
au budget général qui ne semblent pas moins bien acceptés que ces
prélèvements spécifiques.
En second lieu, même lorsqu’il existe un lien entre les assujettis et
la
nature
des
dépenses
financées,
l’affectation
peut
soulever
d’importantes difficultés d’acceptabilité. Si les cas de contestation d’une
taxe affectée sont limités, il n’en demeure pas moins que certaines taxes
peuvent faire l’objet d’une véritable « guérilla contentieuse » (
cf. encadré
20 ci-dessous
).
Encadré 20 : Quelques cas de contentieux en matière de fiscalité affectée
1/ Dans le secteur pharmaceutique :
L’un des exemples les plus emblématiques est celui de la taxe sur les dépenses
de promotion reposant sur l’industrie pharmaceutique affectée à la Haute
autorité de santé (HAS). Les entreprises du secteur considèrent non seulement
qu’elle n’a pas d’effet régulateur, mais que les faiblesses rédactionnelles de la
base juridique sur laquelle elle est instituée aboutissent à rendre l’assiette
illisible. Ainsi, selon le secteur,
la qualité des visiteurs médicaux visés, la
définition des sal
aires à prendre en compte comme celle des dépenses
externalisées ne font pas l’objet d’une interprétation définitive en l’absence de
toute circulaire d’application des textes en vigueur, ce qui conduit à une
contestation systématique de tout nouveau motif de redressement dans le cadre
des contrôles et à de nombreux contentieux.
Ces arguments n’ont toutefois pas
été retenus par la Cour de cassation. Toujours selon le secteur,
certaines règles
actuellement appliquées sont économiquement contestables, car il engendrerait
des situations qualifiées de doubles taxations sur les salaires.
2/ Dans le secteur des télécommunications :
Un autre cas symptomatique d’une très faible acceptabilité d’une taxe affectée
demeure celui de la taxe sur les services de télévision (TST) « distributeurs
»,
ce
qu’illustre
notamment
la
plainte
exprimée
par
un
opérateur
de
communications électroniques à la Commission européenne en août 2011
relativement
au
financement
des
régimes
d’aide
aux
industries
cinématographiques et audiovisuelles. Les modifications apportées à l’assiette
de la taxe (
cf. infra
) attestent ainsi de ce que le lien économique entre la
diffusion des contenus et la taxation correspondante est bien moins clair que
pour les autres taxes affectées au CNC.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
103
La logique d’extension de la TST « éditeurs
» à des secteurs économiques qui
présentent une proximité économique moins immédiate avec les aides
déployées par le CNC est donc fragile, ce que relève la Cour des comptes dans
un rapport récent
114
:
« outre le défaut de stabilité du cadre fiscal qui en résulte,
force est de constater, s’agissant de la part de la taxe appliquée aux opérateurs
de communications électroniques, que le lien entre le fait générateur de la
taxation (l’activité de distribution de contenus numériques relevant de
catégories extrêmement diverses), l’assiette de la taxe (le chiffre d’affaires
résultant des abonnements aux services de communications électroniques), et
son objet (le financement de la création cinématographique et audiovisuelle)
apparaît à bien des égards moins évident que pour les taxes affectées d’origine
plus ancienne » ; « l’affectation au CNC de l’intégralité du produit de la
taxation des opérateurs de communications électroniques revient à conférer au
Centre une prérogative discutable, dès lors qu’en l’espèce il ne saurait se
prévaloir d’être à lui seul concerné par la diffusion sur internet de contenus
faisant l’objet d’un soutien public. »
.
Cette taxation apparaît d’autant plus fragile que seuls 20 % des 1,2 Md€ de
fiscalité spécifique au
secteur des télécommunications financent directement le
secteur
(au
titre
de
sa
régulation
par
l’autorité
de
régulation
des
communications électroniques et postales -ARCEP-) ; 80
% financent les
budgets des collectivités territoriales (communes et départem
ents pour l’IFER
sur les antennes, régions pour l’IFER cuivre, même s’il ne s’agit pas là de
fiscalité affectée), le financement du cinéma et des ayants droit
(taxe sur les
vidéogrammes et la vidéo à la demande), le financement du cinéma et de la
télévision à travers la TST « distributeurs », et le financement de la fin de la
publicité sur France Télévisions via la taxe « télécoms ».
La généralisation de cette logique de taxation affectée dont la charge repose sur
des assujettis n’ayant pas (ou peu) de lien
avec les actions financées paraît par
conséquent à la fois économiquement peu justifiable et de nature à générer des
contentieux ; elle présente une faible acceptabilité par les redevables et
se
manifeste par un moindre consentement à l’impôt en général.
En troisième et dernier lieu, le consentement à l’impôt est à
l’inverse particulièrement fort dans les cas où le prélèvement sert à
financer exclusivement des actions bénéficiant aux assujettis, par exemple
pour des secteurs d’activité qui n’arriveraient pas à s’organiser
naturellement ou pour lesquels le contribuable national ne consentirait pas
volontiers à l’impôt car n’en bénéficiant pas directement
115
.
114
Cour des comptes,
La gestion et le financement du Centre national du cinéma et de
l’image animée,
octobre 2012.
115
Fourniture de biens publics sectoriels ayant pour objectif de favoriser le
développement du secteur assujetti et dont les retombées économiques sont positives
pour le secteur et génèrent une croissance de ce dernier; actions de recherche,
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
104
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
L’industrie
manufacturière,
d’une
part,
et
l’agriculture,
la
sylviculture et la pêche, d’autre part, se caractérisent par l’existence de
nombreuses taxes affectées au rendement variable, qui financent
directement des activités de promotion, de recherche et d’innovation dont
les retombées sont visibles pour le secteur. Tel est également le cas pour
les CVO.
Le consentement à l’impôt peut y être fort
116
, et la logique
d’affectation détient dans ce cas précis une certaine légitimité.
Généralement bien acceptés, ces prélèvements soulèvent néanmoins trois
problématiques différentes :
rhombus5
d’une part, ils peuvent contribuer à l’existence d’une forte pression
fiscale sur certains secteurs d’activités ; rien ne permet par ailleurs
d’indiquer qu’ils financent des dépenses efficientes ;
rhombus5
les assujettis et les bénéficiaires étant les mêmes, la ressource
prélevée peut perdre, aux yeux des assujettis, son caractère de
denier public. Dans ce contexte, l’agence affectataire peut, sans
que l’État ne puisse réellement peser sur ses décisions, financer des
politiques inefficientes voire contraires aux objectifs poursuivis par
l’État, comme l’a montré l’inspection générale des finances au
sujet de la caisse de garantie du logement locatif social
117
(CGLLS
cf. encadré 21 ci-après
) ;
d’innovation,
de développement, de formation ou de promotion au profit de certains
secteurs d’activité, autrefois financées par les taxes parafiscales.
116
Le cas des CVO, qui génèrent un abondant contentieux, montre cependant que
l’amélioration du consentement à l’impôt n’est pas automatique.
117
L’État et ses agences : le cas des agences de financement
, rapport IGF n° 2011-M-
044-04, février 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
105
Encadré 21 : La caisse de garantie du logement locatif social
La CGLLS est un établissement public administratif (EPA) et une institution financière
(IFS) créée par la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au
renouvellement urbain. Fondées sur un principe de solidarité entre bailleurs sociaux, les
activités de la caisse sont principalement financées par des cotisations prélevées sur les
organismes de logement social. Le produit de ces taxes affectées a connu une évolution
particulièrement dynamique au cours des dernières années, sous l’effet de modifications
paramétriques (plus de 35% entre 2007 et 2012).
D’un budget annuel de 287 M€ en 2012, et disposant d’un plafond d’emplois de
30 agents, la CGLLS est investie depuis sa création d’une double mission :
square4
garantir à titre subsidiaire les prêts consentis par la caisse des dépôts et
consignations aux organismes constructeurs de logements sociaux, lorsque les
collectivités territoriales refusent d’octroyer leur garantie ou sont dans l’incapacité
de le faire ;
square4
contribuer, via la distribution de subventions, à la prévention des difficultés
financières et au redressement des organismes HLM et des sociétés d’économie
mixte (SEM) en difficulté.
La CGLLS est par ailleurs chargée pour compte de tiers de gérer le fonds de péréquation
alimenté par le prélèvement sur le potentiel financier des organismes d’HLM.
Tant pour ses missions de garantie que d’aide aux organismes en difficulté, le rôle de la
CGLLS ne favorise pas l’émergence d’un secteur du logement social plus efficient.
1/ Concernant l’activité de garantie
, le positionnement et le rôle de l’établissement
soulèvent d’importantes questions :
square4
avec moins de 4 % des flux annuels de garantie, le rôle de la caisse n’est en rien
systémique pour le financement du logement social ;
square4
à aucun moment, la caisse ne procède à une évaluation de l’opportunité de l’octroi
de sa garantie. Aucun élément objectif ne permet donc d’indiquer que la caisse
garantit des opérations justifiées au regard des objectifs de l’État en matière de
logement social, et que son action présente une efficience suffisante. La CGLLS
joue donc, pour cette partie de son activité, le rôle d’une agence « transparente »,
sans valeur ajoutée ;
square4
en outre, du fait de l’application des règles prudentielles et de la très faible
sinistralité de son activité de garantie, la caisse dispose d’un niveau de fonds
propres disproportionné au regard des risques, historiquement proches de zéro
(479 M€ de fonds propres fin 2010, et un portefeuille de 720 M€, pour un encours
de garanties de 3 Md€) ;
2/
Concernant l’attribution d’aides aux organismes en difficulté
, les pratiques de la
CGLLS ne permettent pas une bonne régulation du secteur :
square4
il n’existait pas, jusqu’à présent, d’outils de pilotage formalisés entre la tutelle et la
CGLLS autres que la lettre de mission : aucun contrat d’objectifs et de
performance n’avait été signé. De manière globale, les objectifs du projet annuel de
performance (PAP) irriguent peu l’activité de la CGLLS, dont les missions et la
stratégie apparaissent sans lien avec les priorités dégagées par le document
budgétaire. Ainsi, les aides ne sont pas perçues comme un levier d’incitation au
regroupement et à la mise en réseau des organismes de logement social, alors qu’il
s’agit d’un des objectifs généraux de l’État, en matière d’économie du logement
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
106
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
social. Cette discordance est problématique et pose la question du pilotage de
l’établissement par les tutelles et de l’autonomie de la caisse par rapport à l’État
;
square4
la CGLLS est administrée par un conseil d’administration composé de représentants
de l’État et de représentants des fédérations d’organismes HLM, assisté de
plusieurs comités. Les aides sont gérées de manière paritaire, les dossiers de
demandes d’aides sont instruits et proposés à la CGLLS par les fédérations. Les
représentants des fédérations sont en outre majoritaires au sein du comité des aides.
La caisse assure ainsi un soutien inconditionnel des organismes du secteur, dans une
logique
de
secours
mutuel,
et
n’a
pas
vocation
à
sanctionner
des
dysfonctionnements
118
.En facilitant le maintien de petites structures, faibles et éclatées,
cette activité de garantie s’avère ainsi contraire aux objectifs généraux poursuivis par
l’État en matière de consolidation du secteur du logement social.
Compte tenu de sa gouvernance et de son mode de fonctionnement, la CGLLS ne
constitue donc pas un levier efficace permettant le regroupement et la concentration du
secteur du logement social, alors qu’il s’agit de l’un des objectifs prioritaires de l’État. À
l’inverse, l’attribution d’aides à des organismes HLM en difficulté peut, lorsque celles-ci
sont distribuées de manière automatique, être un frein à la restructuration du secteur en
facilitant le maintien en activité de structures n’ayant pas la taille critique.
Source : Rapport de l’IGF sur les agences de financement, 2012
119
.
rhombus5
enfin, ces prélèvements posent, plus généralement, la question de
la place de l’État dans le fonctionnement des marchés et
l’organisation des secteurs d’activités économiqu
es
: dès lors que
les entités affectataires ne remplissent pas des missions de service
public, la justification à l’existence d’une taxe affectée et à
l’intervention, certes indirecte, des pouvoirs publics peut en effet
être débattue (
cf. l’exemple du fonds national de promotion et de
communication en faveur de l’artisanat -FNPCA- dans l’encadré
22 ci-après
). D’un strict point de vue économique, il serait plus
satisfaisant de laisser les secteurs d’activité s’organiser librement
pour financer, sous forme de cotisations volontaires, des actions
dont ils pourraient par ailleurs évaluer plus facilement l’efficacité.
118
Cf.
Les dispositifs de contrôle des acteurs du logement social
, rapport de la
mission commune de l’IGF et du CGEDD, n° 2010-M-045-01, octobre 2010.
119
L’État et ses agences : le cas des agences de financement
, rapport de l’IGF
n° 2011-M-044-04, février 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
107
Encadré 22 : Le fonds national de promotion et de communication en
faveur de l’artisanat (FNPCA)
Créé en 1997, le fonds national de promotion et de communication en faveur de
l’artisanat (FNPCA) mène des campagnes de communication nationales destinées à
améliorer l’image de marque de l’artisanat (« L’artisanat. Première entreprise de
France »), ainsi que des activités de
sponsoring
(en particulier, de l’équipe de France de
handball).
À la fois opérateur de l’État et organisme divers d’administration centrale (ODAC), le
FNPCA est un établissement public administratif dirigé par les acteurs et les
représentants du monde de l’artisanat. Financé par une taxe additionnelle à la taxe pour
frais de chambres des métiers (TFCM) prélevée sur les entreprises du secteur, le
FNPCA a vu ses ressources augmenter de manière régulière depuis sa création ; il
dispose d’environ 10 M€ de budget en 2012 et bénéficie d’une situation financière
confortable.
La stratégie du FNPCA est exclusivement tournée vers un objectif de notoriété de la
« marque » artisanat auprès des artisans et du grand public. L’établissement ne se
donne pas d’objectifs en matière d’amélioration du recrutement, d’information sur
l’orientation professionnelle, de formation ou de création d’entreprise, enjeux pourtant
essentiels pour le développement des entreprises de l’artisanat.
Le pilotage de l’établissement par l’État est particulièrement faible, aussi bien dans le
fonctionnement courant de l’établissement que dans la définition de ses orientations
stratégiques. La nature des activités du fonds (achats d’espaces publicitaires,
sponsoring
, etc.), qui le situe aux confins des missions de service public, conduit à
s’interroger sur la pertinence de la présence de l’État dans une telle entité.
Source : Rapport de l’IGF sur les agences de financement, 2012
2 -
Dans une logique redistributive, l’affectation peut être
justifiée si elle est circonscrite à une même communauté
d’assujettis et de bénéficiaires
Certaines taxes affectées ont été justifiées par des considérations
redistributives. Elles permettraient ainsi de financer plus efficacement un
système de péréquation au sein d’un groupe d’assujettis appartenant à une
communauté plus ou moins importante. Il peut s’agir de l’ensemble de la
communauté nationale, comme dans le cas de la CSPE, ou de groupes
plus restreints représentant, par exemple, un secteur d’activité ; tel est le
cas, également, de la taxe sur les spectacles bénéficiant à l’association de
soutien pour le théâtre privé.
La péréquation constitue un objectif économique plus légitime
pour justifier une taxe affectée, sous réserve qu’elle soit opérée au sein
d’un groupe restreint et bien identifié d’assujettis et de bénéficiaires. En
effet, il n’existe pas de réelle justification économique à ce que la
solidarité nationale soit supérieure dès lors qu’elle serait financée en
dehors du budget général de l’État. Par ailleurs, dans un État centralisé
comme la France, il existe un consensus fort pour considérer que la mise
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
108
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
en oeuvre de la solidarité nationale est une prérogative de l’État
républicain.
Au total, les affectations de ressources relevant d’une logique
péréquatrice ne semblent justifiées que lorsqu’elles portent sur une
communauté circonscrite avec précision.
3 -
La correction d’externalités négatives ne justifie pas
nécessairement une affectation
L’affectation ne semble pas non plus renforcer l’efficience d’un
impôt ayant pour objectif de corriger des défaillances de marché. Ainsi,
en matière de fiscalité « pigouvienne
120
», la correction de l’externalité
peut être atteinte sans affectation des ressources fiscales :
rhombus5
d’une part, il apparaît assez illogique d’affecter une taxe à une
entité dont l’objectif est, en général, de financer des politiques
publiques qui en feront diminuer le rendement ; une telle modalité
de financement ne permet pas, en effet, de financer de manière
durable des politiques publiques (sous réserve que celles-ci soient
efficaces) du fait de la volatilité des ressources ainsi affectées ;
rhombus5
d’autre part, elle peut placer l’entité affectataire en situation de
conflit d’intérêt : dans le cas où celle-ci mène des politiques
efficaces, elle devra alors faire face à une diminution de ses
ressources et a donc un intérêt à ce que l’efficacité de ses actions
reste limitée ;
rhombus5
enfin, il n’y a aucune raison pour que le montant nécessaire à la
politique
conduite
par
l’entité
affectataire
corresponde
au
rendement de la taxe.
De ce fait, il existe peu de justification économique à l’idée selon
laquelle une taxe écologique modifie les comportements de manière plus
efficace lorsqu’elle est affectée plutôt que lorsqu’elle abonde directement
le budget général.
Par ailleurs, il doit également être relevé que, dans les faits, les
taxes affectées environnementales visent le plus souvent à générer du
rendement sur des pollueurs plutôt qu’à influencer directement leurs
comportements. À cet égard, les taxes énergétiques, qui s’appliquent aux
secteurs de production et distribution d’électricité et de transports, visent
120
La fiscalité « pigouvienne », du nom de l’économiste britannique Arthur Pigou,
vise à remédier à une imperfection de marché en faisant payer les responsables
d’externalités négatives, comme par exemple des pollueurs ; l’externalité ne transitant
pas par un prix de marché, il s’agit alors,
via
la taxation, d’amener les pollueurs à
prendre en compte l’ensemble des coûts résultant de leur activité (« internaliser les
externalités de leurs activités ») et/ou de les inciter à modifier leur comportement.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
109
à faire payer les pollueurs sans chercher à véritablement influencer la
quantité de pollution en raison de la faible élasticité de leurs
comportements. De même, la logique « pigouvienne » de la taxe générale
sur les activités polluantes, ou des contributions perçues par les agences
de l’eau, peut être contestée : pour la première, ses taux ne sont pas
suffisamment élevés pour modifier les comportements en profondeur ;
pour la seconde, de nombreuses exonérations bénéficient à certains des
principaux pollueurs.
B - Du point de vue de la gestion publique, le principe
de l’affectation peut se justifier dans des situations de
quasi-redevance ou pour des fonds de garantie
Le développement de la fiscalité affectée a accompagné le
mouvement d’ « agencisation » de l’État. En effet, depuis une trentaine
d’années, le recours à des modes de gestion publics alternatifs s’est
développé, sous l’influence du
New Public Management
et des modèles
étrangers, notamment anglo-saxons et suédois. La multiplication des
« agences », dont le périmètre recouvre des statuts juridiques divers, a été
relevée par plusieurs rapports récents, de l’IGF et du Conseil d’État
notamment.
L’émergence de ces entités, réputées plus souples, plus réactives,
mais aussi plus transparentes que l’administration, s’est accompagnée de
la volonté de les doter d’une plus grande autonomie. À l’instar de la
personnalité morale, le financement par ressources fiscales affectées a été
appréhendé, en France, comme un instrument de renforcement de
l’autonomie des agences.
Cependant, ces modalités de gestion et de financement des
politiques publiques ne sont justifiées, du point de vue de la gestion
publique, que si elles font la preuve de leur efficience. À ce titre, quatre
justifications principales sont généralement avancées :
rhombus5
l’autonomie de gestion conférée par l’existence de ressources
fiscales serait susceptible d’améliorer l’efficience de la politique
publique ainsi financée. En particulier, l’affectation offrirait aux
affectataires une forme de prévisibilité de leurs ressources et
« sanctuariserait »
certaines
recettes,
face
aux
velléités
de
redéploiements de l’exécutif au sein du budget général ;
rhombus5
l’affectation de ressources fiscales serait une condition nécessaire
permettant de garantir l’indépendance des autorités de régulation
ou de contrôle ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
110
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
elle permettrait de mettre à contribution les usagers dans les cas de
prestations ou de services rendus par l’affectataire ;
rhombus5
enfin, l’affectation permettrait de préserver les ressources de
certaines politiques publiques.
Dans les faits, et sous certaines réserves, seules les
deux dernières
justifications sont réellement convaincantes.
1 -
La dérogation au principe d’universalité budgétaire ne semble
pas améliorer l’efficience de la gestion publique
Les agences financées par taxes affectées n’ont, jusqu’à présent,
pas totalement fait la preuve de leur efficience. Une revue des rapports
d’audits et d’évaluations des agences financées par taxes affectées semble
en effet témoigner de la perfectibilité de leur gestion.
Encadré 23 : Présentation de la méthode retenue pour synthétiser les
audits et évaluations réalisés sur les agences dotées de taxes affectées
Il apparaît difficile d’analyser chaque agence financée par taxe affectée, puis de se
prononcer sur l’efficience des dépenses ainsi financées ; une telle démarche
supposerait en effet d’auditer l’ensemble des agences de l’État et des organismes
professionnels ou consulaires bénéficiant de recettes fiscales affectées.
Pour autant, l’évaluation de l’impact économique, social et budgétaire des taxes
affectées suppose d’apprécier l’efficience des dépenses induites par ce mode de
financement. Le Conseil des prélèvements obligatoires s’est donc employé à
recenser les rapports d’évaluation et d’audit réalisés par les différents corps
d’inspection et de contrôle (contrôles parlementaires, Cour des comptes, Inspection
générale des finances, Inspection générale des affaires sociales, Inspection générale
de l’administration, Contrôle général économique et financier, Conseil général de
l’environnement et du développement durable etc.) sur les agences et organismes
bénéficiant de taxes affectées.
Cette revue a ensuite donné lieu à une cotation synthétique de l’efficacité et de
l’efficience des différents organismes, selon une méthode inspirée du rapport du
comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales de juin 2011. Une
telle évaluation, réalisée à partir de travaux produits par des auditeurs différents est
en effet possible, la plupart des audits étant désormais fondés sur une méthodologie
commune, formalisée depuis plusieurs années
121
.
121
Cf. par exemple
Guide méthodologiques pour les audits opérateurs
, inspection
générale des finances, Contrôle général économique et financier, inspection générale
des affaires sociales, mars 2009 ;
Guide méthodologique : Analyse de l’insertion
d’une agence dans sa politique de rattachement
, guide IGF n° 2011-M-044-02,
février 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
111
Une grille d’évaluation a ainsi été définie afin de pouvoir attribuer un score à chaque
agence, en fonction de différents critères (1 indiquant un résultat non satisfaisant,
2 un résultat moyen et 3 un résultat satisfaisant) :
square4
le pilotage par la tutelle
:
existe-t-il un contrat d’objectifs et de performance ou tout autre document
formalisant la stratégie et les objectifs de l’agence ? – score 1 ou 3.
les objectifs de l’agence sont-ils jugés pertinents ? – score de 1 à 3 ;
l’exercice de la tutelle est-il satisfaisant ? –score de 1 à 3
square4
l’efficacité de l’intervention
:
l’agence remplit-elle ses objectifs ? – score de 1 à 3 ;
existe-t-il des doublons avec d’autres structures – score de 1 à 3 ;
square4
l’efficience de la gestion
:
les dépenses sont-elles en adéquation avec les besoins de la politique ? – score
de 1 à 3 ;
ses coûts de gestion ont-ils augmenté ? – score de 1 à 3.
L’analyse des rapports a porté sur 36 agences ou groupe
d’agences, représentant 9,8 Md€ de taxes affectées
, soit plus de 70 %
de la fiscalité affectée aux agences. Elle fait apparaître des problèmes
concordants d’efficience de la gestion publique au sein des entités dotées
de taxes affectées
,
(
cf. encadré 24 ci-dessous
).
Encadré 24 : Principales critiques recensées dans les audits d’entités
bénéficiant de taxes affectées
En raison d’une absence de stratégie globale, du foisonnement d’agences et des difficultés
à exercer une tutelle stratégique, d’importants problèmes d’efficience de la gestion
publique se posent désormais. Parmi les inefficiences recensées lors de cet examen des
audits des entités bénéficiant de taxes affectées, les points suivants peuvent être relevés :
square4
dans certains champs de politiques publiques, les acteurs apparaissent nombreux et la
répartition des compétences n’est pas toujours suffisamment précise pour éviter des
frottements ou des doublons. Dans certains ministères fortement démembrés, les
fonctions de conception de politique publique et d’exécution ne sont parfois pas
clairement dissociées, ce qui peut conduire à des conflits institutionnels, à des
doublons ou à des inefficiences de gestion ;
square4
certaines agences poursuivent des objectifs différents de ceux de leur ministère de
rattachement ;
square4
certaines agences chargées de politiques d’intervention agissent selon une logique « de
guichet » contraire à la logique de performance qui a justifié leur création. Certaines
agences ne présentent ainsi aucune valeur ajoutée par rapport à une administration
traditionnelle ;
square4
la gestion n’apparaît pas toujours efficiente et les coûts de gestion ne sont pas toujours
maîtrisés (politique salariale ; politique immobilière ; coûts de fonctionnement). Par
ailleurs, les agences de petite taille n’ont pas la taille critique suffisante leur
permettant d’exercer leur mission de manière efficiente ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
112
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
square4
certaines agences n’exercent manifestement pas de mission de service public, ou de
missions relevant de l’État. Leur existence, ou tout du moins l’implication de l’État
dans leur gestion, ne semble pas être de bonne gestion publique ;
square4
les agences « transparentes »
122
dotées de la personnalité morale posent d’importants
problèmes de gestion publique. En dérogeant aux principes d’unité et d’universalité
budgétaires, elles peuvent être à l’origine de phénomènes de débudgétisation massifs.
La synthèse des « scores » permet de mettre en évidence certaines
difficultés récurrentes
(
cf. tableau 33 ci-dessous
)
.
D’une manière
générale, si la proportion de contrats d’objectifs et de performance (COP)
apparaît satisfaisante, les scores des autres critères d’efficience sont jugés
peu satisfaisants ou moyens. À titre d’exemple :
rhombus5
pour 28 entités, bénéficiant de 8,6 Md€ de taxes affectées,
l’exercice de la tutelle est jugé insatisfaisant ;
rhombus5
l’existence d’importants doublons et de redondances est constatée,
de manière affirmée, pour 15 entités, bénéficiant de 3,5 Md€ de
taxes affectées ;
rhombus5
pour 20 entités, bénéficiant de 8,5 Md€ de taxes affectées,
l’adéquation entre les dépenses et les besoins de la politique est
jugée insatisfaisant ;
rhombus5
pour 18 entités, bénéficiant de 4,7 Md€ de taxe affectées, la gestion
est évaluée comme insuffisamment efficiente.
122
Dans le cadre de leur activité contentieuse, les juridictions administratives,
notamment les chambres régionales des comptes et la Cour des comptes, peuvent être
conduites à qualifier de « transparents » des organismes de droit privé, le plus souvent
des associations, dénués d’autonomie de décision et constitués pour échapper aux
règles du droit public.
L’IGF a, pour sa part, défini les agences transparentes de la manière suivante :
square4
l’établissement a pour mission principale le financement d’interventions ou
d’investissements pour le compte de l’État ;
square4
il est contrôlé par l’État ;
square4
il est financé en grande majorité par dotations budgétaires ou taxes affectées ;
square4
il ne dispose d'aucune autonomie dans la prise de décision : soit l'État prend un
engagement directement auprès du bénéficiaire final de l’intervention, et il
délègue le rôle de payeur à l'établissement ; soit ce dernier s'engage auprès du
bénéficiaire final, mais au nom de l'État et dans les conditions préalablement
définies par l'État, sans qu’il ne puisse en rien les modifier (l’établissement agit
ainsi en tant que mandataire d’une mission qui lui a été confiée par l’État). Dans
les faits, un établissement agit de manière mécanique.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Tableau 33 : Synthèse des audits et évaluations réalisés sur les agences dotées de taxes affectées
Critères
Score 1
Score 2
Score 3
Nombre
d’entités
Rendement
des taxes
affectées
(2011 – M€)
Nombre
d’entités
Rendement
des taxes
affectées
(2011 – M€)
Nombre
d’entités
Rendement
des taxes
affectées
(2011 – M€)
Pilotage par
la tutelle
Existence d’un COP
18
5,8
-
-
16
3,9
Pertinence des objectifs
assignés à l’agence
17
3,7
15
5,8
3
0,3
Exercice de la tutelle
28
8,6
7
0,6
1
0,7
Efficacité de
l’intervention
Atteinte des objectifs
13
2,9
17
2,7
5
3,7
Existence de doublons et de
redondances
15
3,5
14
5
6
0,7
Efficience de
la gestion
Adéquation entre les
dépenses et les besoins de la
politique
20
8,5
15
1,4
0
0
Maîtrise des coûts de gestion
18
4,7
13
1,6
2
3,4
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Lecture du tableau
: (2
ème
ligne) 17 entités, dont le rendement des taxes affectées atteint 3,7 Md€ en 2011, sont dotés d’objectifs jugés
peu pertinents par les rapports d’audits et d’évaluation qui leur sont consacrés (score de 1) ; 15 entités, dont le rendement des taxes
affectées atteint 5,8 Md€ en 2011, sont dotés d’objectifs jugés moyennement pertinents (score de 2) ; 3 entités, dont le rendement des
taxes affectées atteint 291 M€ en 2011, sont dotés d’objectifs jugés pertinents (score de 3).
Note : Le nombre total d’agences n’est pas identique d’un critère à l’autre, certains audits ne renseignant pas tous les items.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
114
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
2 -
L’indépendance d’une entité n’implique pas nécessairement
de la doter de ressources fiscales affectées
L’idée selon laquelle il conviendrait de doter une autorité
indépendante ou un régulateur de ressources fiscales propres est
généralement justifiée de deux manières différentes :
rhombus5
ce financement pourrait accroître l’indépendance du régulateur en
le dotant de ressources non directement contrôlées par le pouvoir
politique ;
rhombus5
en cas de financement par dotation budgétaire, le consentement à
l’impôt serait faible, le contribuable national pouvant refuser de
financer la correction d’une défaillance de marché dont il n’est pas
responsable.
Toutefois, ces deux arguments n’apparaissent pas totalement
justifiés :
rhombus5
d’une part, le lien entre la taxe affectée et l’indépendance de
l’entité bénéficiaire n’est pas établi
. Sur un échantillon de
43 AAI et API, seules 6 sont financés par taxe affectée
123
. Toutes
les autres sont financées pour l’essentiel par subventions ou
dotations de l’État, sans que ce mode de financement ne mette en
péril leur indépendance. L’exemple des autorités juridictionnelles,
telles que le Conseil constitutionnel, le Conseil d’État ou la Cour
des comptes, tend également à accréditer l’idée selon laquelle
l’indépendance de l’entité n’est pas corrélée à sa source de
financement. Le statut juridique et la gouvernance de l’entité
paraissent
ainsi
davantage
en
mesure
de
garantir
son
indépendance que ses modalités de financement ;
rhombus5
d’autre part, le contribuable national bénéficie de l’action du
régulateur, ce qui en théorie peut justifier sa contribution
. Par
exemple, dans le cas d’un monopole, le contrôle du régulateur
permet, s’il est efficace, des prix moindres qu’en l’absence de
régulation et une meilleure qualité de services ; l’action du
régulateur
bénéficie
donc
également
au
contribuable-
consommateur. De même, dans le cas où la régulation vise à
préserver un bien public, comme la stabilité financière, le
contribuable bénéficie également de l’action du régulateur.
123
Les six AAI ou API financées par taxes affectées sont : l’Autorité de contrôle
prudentiel (ACP), l’Autorité de régulation des activités ferroviaires (ARAF),
l’Autorité des marchés financiers (AMF), le Haut conseil du commissariat aux
comptes (H3C), la haute autorité de santé (HAS) et le Médiateur de l’énergie.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
115
Enfin, l’affectation de ressources fiscales à une entité n’est pas
exempte d’ambiguïtés sur son indépendance : elle pourrait ainsi
renforcer
les phénomènes de
« capture du régulateur ».
Comme l’a montré
l’économiste George-Joseph Stigler dans sa théorie de la régulation
124
, un
secteur économique, qui a toujours intérêt à maintenir une faible intensité
concurrentielle (résultant d’un fonctionnement oligopolistique) pour faire
monter les prix et écarter les nouveaux entrants, tire en effet un avantage
de la création d’un régulateur spécialisé : si les entreprises arrivent à «
capturer » le régulateur - en lui faisant admettre leurs impératifs, leurs
contraintes sous la forme de règles d’organisation du marché, etc. -, le
marché fonctionnera comme un cartel, dont le coût est
in fine
supporté
par le contribuable, et sans risque qu’un membre du cartel ne joue les
passagers clandestins. Ces phénomènes de capture peuvent être rendus
possibles
de
plusieurs
manières
différentes
125
:
conflits
d’intérêt
individuels résultant de la porosité entre les fonctions de régulateurs et de
régulés, connivence intellectuelle ou idéologique, biais cognitifs du
régulateur, etc.
L’affectation d’une ressource fiscale peut constituer un facteur
renforçant le risque de capture du régulateur, en le faisant dépendre des
ressources mises à sa disposition par les régulés. En lieu et place de
l’indépendance recherchée, c’est bien à une dépendance accrue que le
régulateur s’expose par rapport aux régulés, surtout si le rendement de la
taxe affectée est directement corrélé à la santé économique du secteur
(en étant assise, par exemple, sur le chiffre d’affaires).
Un exemple récent illustre la pertinence de cet argument : les
mutations d’importance apportées à la fiscalité affectée pesant sur
l’industrie du médicament suite à l’affaire « Mediator ». En effet, afin de
pallier les dysfonctionnements de gouvernance de la chaîne du
médicament mis en exergue par ce scandale sanitaire, le législateur a
décidé d
e mettre fin à l’existence de taxes affectées à l’agence
française de sécurité sanitaire des produits de santé (
AFSSAPS) dans
le cadre de la LFSS pour 2012,
au nom du principe de séparation de
l’organe de contrôle et des entreprises du secteur
. Dans l’étude
d’impact, il était en effet indiqué que le précédent mode de financement
de l’AFSSAPS était de nature à
« induire un doute quant à
l’indépendance de l’agence vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique et des
dispositifs médicaux »
.
124
G-J. Stigler, «
The Theory of Economic Regulation
», Bell Journal of Economics,
volume 2, 1971.
125
Bertrand du Marais,
Crise de la régulation ou « capture du régulateur » ?
, Revue
d’économie financière, 2009.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
116
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
3 -
Si la mobilisation des ressources provenant de l’usager peut
justifier l’affectation, elle fait basculer la contribution dans un
système de quasi-redevance
Le principe d’une affectation a également été avancé pour justifier
un financement à moindre coût, pour le contribuable national, de
certaines activités pour lesquelles il existe
un lien direct entre le service
rendu par l’opérateur et sa rémunération.
Les droits et taxes perçus
par l’agence nationale des titres sécurisés (ANTS) pour la fabrication et la
délivrance de papiers officiels entreraient, par exemple, dans cette
catégorie
126
.
L’affectation de la ressource versée par l’usager peut se justifier,
car il introduit l’opérateur dans une logique de performance et limite la
charge fiscale du contribuable national. Si le principe de l’affectation est
justifiable, il soulève en revanche une problématique juridique : en effet,
il interroge sur la distinction entre redevance et imposition de toutes
natures.
Comme indiqué
supra
,
la frontière entre redevance et ITN
affectée peut être difficile à établir
, dans la mesure où la redevance pour
service rendu se caractérise précisément par «
son affectation au
producteur de service
». Par ailleurs, les contradictions entre la
sémantique et le droit conduisent à créer une certaine confusion sur la
nature des contributions : ainsi, certains prélèvements, pourtant qualifiés
de « redevance » dans leur nom, sont en fait juridiquement des ITN ; à
l’inverse, certains prélèvements, qui sont juridiquement des impôts, sont
néanmoins perçus en échange d’un service rendu. La distinction
fondamentale s’opère en termes de compétences : la redevance relève du
pouvoir réglementaire, en application de l’article 4 de la LOLF
127
, tandis
que la taxe relève de l’article 34 de la Constitution.
126
Droit de timbre sur les cartes nationales d'identité ; droits de timbre sur les
passeports sécurisés ; taxe perçue à l'occasion de la délivrance, du renouvellement, du
duplicata ou du changement d'une carte de séjour ou équivalent prévu par les traités
ou accords internationaux, taxe pour la gestion des certificats d'immatriculation des
véhicules ; taxe sur les titres de voyage biométriques délivrés aux réfugiés et aux
apatrides titulaires d'une carte de résident.
127
L’article 4 de la LOLF dispose que «
la rémunération de services rendus par l'État
peut être établie et perçue sur la base de décrets en Conseil d'État pris sur le rapport
du ministre chargé des finances et du ministre intéressé. Ces décrets deviennent
caducs en l'absence d'une ratification dans la plus prochaine loi de finances afférente
à l'année concernée
».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
117
Il semble ainsi nécessaire de s’interroger sur la nature de certaines
ressources affectées, qui s’apparentent dans les faits à des quasi-
redevances.
4 -
L’objectif de sanctuarisation d’une ressource ne justifie pas
l’affectation, sauf dans les cas de mécanismes assurantiels
Enfin, certaines affectations ont pu être justifiées par le souhait de
sanctuariser des moyens alloués à des politiques publiques.
Dans ce
cadre, l’affectation permet, d’une part, de préserver les moyens
d’éventuels ajustements budgétaires et, d’autre part, de donner aux
assujettis la garantie que les prélèvements auxquels ils sont soumis leur
seront restitués.
Ce motif n’apparaît, dans son principe, ni justifié, ni
justifiable.
En effet, il est problématique de vouloir sanctuariser des
ressources et rigidifier la dépense publique, à une époque où les enjeux en
matière de consolidation appellent une plus grande flexibilité budgétaire.
Par ailleurs, de tels motifs, qui constituent un outil de contournement des
principes des finances publiques, nuisent à la bonne gestion des deniers
publics ainsi qu’à la lisibilité et à la sincérité des finances publiques
(
cf. supra
).
En revanche, l’objectif de préservation d’une ressource peut être
justifié dans les cas où les pouvoirs publics souhaitent mettre en place
des
mécanismes assurantiels
permettant de mutualiser les risques, en
particulier pour un groupe bien identifié de bénéficiaires :
rhombus5
pour être efficaces, de tels mécanismes supposent en effet le
versement régulier de provisions ; par ailleurs, les provisions
pouvant parfois constituer des montants importants, ils doivent
pouvoir être isolés afin de ne pas financer une action contraire à
leur objet ;
rhombus5
par ailleurs, l’affectation permet également de circonscrire le rôle
et la responsabilité de l’État, celui-ci n’ayant pas nécessairement
vocation à être un assureur en dernier ressort universel.
Comme mécanisme de ce type, on trouve, par exemple, le fonds de
garantie des victimes d'actes terroristes et autres infractions, financé par
des contributions assises sur les contrats d'assurance, ou le fonds national
de garantie des risques agricoles, financé par des contributions
additionnelles
aux
primes
ou
cotisations
afférentes
à
certaines
conventions d'assurance.
Si le principe d’une affectation peut se justifier pour ces
mécanismes assurantiels, il doit cependant être strictement encadré :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
118
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
d’une part, l’affectation n’est réellement justifiée que si la
contribution
traduit réellement
une mutualisation du risque
en
reposant sur les éventuels bénéficiaires du fonds. Sans remettre en
question l’existence du fonds national de garantie des risques
agricoles, on peut toutefois s’interroger sur le fait que son
financement repose sur des taxes assises sur des contrats de droit
commun ;
rhombus5
d’autre part, l’affectation ne doit pas empêcher les pouvoirs publics
de s’interroger, régulièrement
, sur l’efficacité du dispositif, sur
son calibrage et sur sa pertinence
, comme le montre l’exemple
de la CGLLS (
cf. encadré 21
).
II
-
Dans les faits, le recours à la fiscalité affectée
s’explique généralement par le souhait
de contourner les contraintes budgétaires
A - L’affectation a souvent répondu à des motifs
d’ordre budgétaire
1 -
Dans les faits, le recours aux taxes affectées poursuit surtout
un objectif de financement de politique publique
Un faisceau d’indices indique que les créations de taxes affectées
ont principalement poursuivi, pour une large partie d’entre elles, un
objectif de rendement budgétaire :
rhombus5
l’examen des travaux préparatoires, des exposés des motifs et des
débats en commission des finances de l’Assemblée nationale et du
Sénat des lois de finances initiales (LFI) et des lois de finances
rectificatives (LFR) votées entre 2004 et 2013 révèle, la plupart du
temps, l’invocation
d’un motif unique permettant de justifier la
taxe : la nécessité de financer une montée en puissance des
dépenses ou de compenser un transfert de charges
. Aucun débat
ne semble s’établir quant à la nécessité de recourir à une taxe
affectée plutôt qu’à un financement par dotation. Il n’y a pas de
discussion
comparative
entre
les
différentes
modalités
de
financement d’une politique publique. Ainsi, la plupart du temps,
l’exposé des motifs du projet d’affectation repose sur une exigence
de financement et de rendement ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
119
rhombus5
entre 2004 et le vote de l’article 46 de la LFI pour 2012
128
,
instituant le plafonnement des taxes affectées (
cf. infra
), quatre
prises de position de parlementaires hostiles aux affectations de
taxe ont été recensées, sur les 38 cas identifiés d’affectations.
La
mise en place du plafonnement des taxes affectées a, en revanche,
conduit à des débats très précis relatifs à l’opportunité de placer
telle ou telle affectation dans son champ et avec quel plafond. Le
Parlement se trouve ainsi saisi, de manière croissante, de la
question des affectations de recettes à des tiers ;
rhombus5
une ventilation des taxes par objectif économique poursuivi montre
que
la logique subventionnelle est largement majoritaire
(
cf. encadré 25 ci-après pour l’explication de la méthodologie
d’analyse retenue
)
.
Ainsi, 86 % des recettes
affectées aux
agences, aux organismes techniques ou consulaires ou à des
dispositifs de péréquation semblent principalement viser un
objectif de rendement (contre 17% un objectif de correction
d’externalité et 8% un objectif redistributif) ;
Encadré 25 : Méthode d’analyse des objectifs économiques poursuivi par
chaque taxe affectée et du lien entre les assujettis et les bénéficiaires
de la taxe
1/ Méthode générale d’analyse
Il a été procédé à une double ventilation des 309 taxes affectées, au sens retenu par le Conseil
des prélèvements obligatoires, afin de déterminer :
square4
le principal objectif économique assigné à la taxe (financement d’une politique ;
redistribution, ou péréquation ; correction des défaillances de marché) ;
square4
l’intensité du lien entre les assujettis et la politique financée par l’affectataire, suivant une
typologie simple (lien « élevé », « moyen » et « faible »).
Pour conduire cette analyse, une méthode dite de faisceau d’indices a été utilisée :
square4
l’examen de la base légale sous-jacente à l’instauration de la taxe, qui en explicite
l’assiette, le taux, la ou les finalités ainsi que les différentes catégories d’assujettis ;
square4
l’examen de l’exposé des motifs des projets de lois de finances, voire des débats en
commission des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ;
square4
enfin, en cas d’affectation à un organisme affectataire clairement identifiable (agence,
chambres consulaires, organismes professionnel), l’examen des missions incombant à ce
dernier, par l’analyse des statuts, de la loi l’instituant ou de toute autre source
d’information (rapport annuel, audits d’évaluation, etc.).
Comme toute classification reposant en partie sur une appréciation qualitative, cette double
classification présente des limites, qu’il convient d’exposer (
cf. ci-dessous
) ; néanmoins, elle
fournit des résultats qui apparaissent suffisamment robustes pour être restitués compte tenu de
la netteté de ses conclusions.
128
Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
120
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
2/ Limites méthodologique
Concernant la ventilation par objectif économique, deux difficultés d’analyse se posent : d’une
part, l’identification d’un objectif économique précis peut être rendue complexe en raison de
l’ambiguïté initiale, dans bien des cas, de l’intention qui a motivé le législateur dans leur
création ; d’autre part, certaines taxes se caractérisent par la poursuite de plusieurs objectifs
économiques :
square4
c’est le cas de la CSPE, qui participe du développement du marché de l’électricité en
finançant les énergies renouvelables, mais qui poursuit parallèlement un objectif de
péréquation ;
square4
de même, les contributions versées par les établissements de crédit au fonds de garantie des
dépôts peuvent à la fois répondre à un objectif de correction d’une défaillance de marché
(en l’espèce, la protection du bien public « stabilité financière ») ainsi qu’à un objectif de
redistribution (solidarité sectorielle en cas de crise bancaire) ;
square4
les droits de consommation, d’accises et les fractions de TVA brutes collectés sur les
alcools et les tabacs, relèvent à la fois d’un objectif de rendement mais en même temps de
la fiscalité comportementale.
Néanmoins, l’examen des bases juridiques sur lesquelles sont assises chacune de ces taxes, ainsi
que l’analyse des missions confiées aux organismes affectataires, permet de distinguer, de
manière suffisamment claire, l’objectif économique principal qu’elles poursuivent.
Concernant l’estimation du lien entre les assujettis et la nature des missions de l’affectataire, la
principale limite réside dans le caractère qualitatif de cette ventilation. Néanmoins, le fait que
les cas parfaitement évidents (c’est-à-dire les cas binaires où soit le lien est indiscutable soit,
inversement, totalement inexistant), soient majoritaires (75% des volumes financiers en jeu)
permet de conclure à la pertinence de la méthodologie de classification.
rhombus5
l’examen du lien entre les assujettis et la nature de la mission
financée par l’affectataire est en général faible,
ce qui est
également un indice du caractère « subventionnel
»
des taxes
affectées. Ainsi, les taxes affectées pour lesquelles il existe un lien
fort entre les assujettis et les missions financées ne représentent
que 14 % du rendement total de la fiscalité affectée ; à l’inverse,
les taxes pour lesquelles le lien est particulièrement ténu ou nul
représentent 48 % du rendement total.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
121
Graphique 15 : Répartition du volume financier des taxes affectées par
degré d’intensité du lien entre secteur assujetti et missions de
l’affectataire (en %, 2011)
Elevé
14%
Moyen
38%
Faible
48%
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Note : L’analyse porte sur l’ensemble de la fiscalité affectée, soit 309 taxes en 2011.
Certains cas illustrent à ce titre
l’absence de tout lien économique
entre le secteur assujetti et les missions de l’organisme affectataire :
rhombus5
c’est par exemple le cas des prélèvements sur les paris sportifs ou
les jeux en ligne affectés à l’Institut national de prévention et
d’éducation pour la santé (INPES) ;
rhombus5
c’est également le cas de l’affectation des prélèvements sur les
mises engagées dans les jeux de cercle en ligne au Centre des
monuments nationaux, en charge de la politique monumentale
nationale.
Dans ces deux exemples, le lien entre la dépense et la ressource
s’avère inexistant et ne semble avoir de motivation autre que l’allocation
d’un financement donné à une politique publique.
2 -
Les affectations se sont parfois accompagnées d’opérations
de débudgétisation importantes
Par ailleurs, le fait que des affectations de ressources fiscales à des
opérateurs
aient
souvent
donné
lieu
à
des
phénomènes
de
« débudgétisation » semble confirmer les analyses précédentes.
En entraînant des transferts de charges et de recettes aux opérateurs
ou aux agences de l’État, les affectations induisent en effet une certaine
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
122
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
opacité dans les circuits de financement
qui facilite le contournement
du contrôle du Parlement sur les dépenses publiques
. Par exemple :
rhombus5
la CGLLS
s’est ainsi vu transférer depuis 2009, par trois lois
successives, une partie du financement de divers dispositifs
autrefois financés par l’État, dont certaines aides à la pierre et
l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU)
129
;
rhombus5
l’Agence de financement des infrastructures de transport de
France
(AFITF)
constitue
également
une
forme
de
débudgétisation particulièrement massive, pointée dans le rapport
de l’IGF sur les agences de l’État de 2012. L’agence vote en effet
des autorisations d’engagement sans qu’aucun plafond n’ait été
défini en loi de finances, alors que ses ressources, pour partie
constituées de taxes affectées
130
, sont limitées. Il en résulte une
trajectoire financière insoutenable, puisque 21 Md€ d’engagements
ont été contractés par l’AFITF et ne sont pas couverts par des
recettes prévisionnelles d’ici 2014 (
cf. encadré 26 ci-après
) ;
Encadré 26 : L’AFITF
En charge de financer la participation de l’État aux projets d’infrastructures de
transport,
l’AFITF constitue une forme de débudgétisation particulièrement
massive
.
L’agence vote ainsi des autorisations d’engagement sans qu’aucun
plafond n’ait été fixé par la loi de finances. L’AFITF procède en effet à des
augmentations en cours d’année
du montant des autorisations d’engagement
qu’elle accorde ;
cette politique est notamment à l’origine de l’absence de maîtrise
des engagements qu’elle contracte au nom de l’État. Les nouvelles autorisations
d’engagement sont votées sans que celles-ci n’ai
ent été ni autorisées, ni limitées,
par le Parlement qui n’en est pas même informé. À titre d’exemple, l’AFITF a
adopté au cours du conseil d’administration
du 7 septembre 2011 une décision
budgétaire modificative de 3 Md€ d’autorisation d’engagement destinés à financer
le dispositif de collecte de la future écotaxe poids lourds
, organisé sous la forme
129
La loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 a transféré la mission de distribution des
primes à l’amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale
(PALULOS) ; la loi de finances pour 2011 prévoit la création d’un « fonds de
péréquation », indépendant de la CGLLS mais géré par elle, qui finance les aides à la
pierre et l’ANRU. Parallèlement, les crédits budgétaires versés à l’ANRU ont été
supprimés ; la loi de finances rectificative pour 2011 a mis en place le fonds national
d’accompagnement vers et dans le logement (FAVDL), dont la gestion est également
confiée à la CGLLS, qui finance par le produit des astreintes que l’État est condamné
à verser en cas d’inexécution dans les délais des règles issues de la loi sur le droit au
logement opposable (DALO).
130
La taxe due par les concessionnaires d’autoroutes et une partie des amendes
forfaitaires des radars automatiques, qui seront prochainement complétées par la taxe
poids lourds.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
123
d’un partenariat public-privé. Ces 3 Md€ correspondent au
x loyers budgétaires
cumulés, versés sur la durée du partenariat (11 ans).
Cette débudgétisation concourt à la formation d’une trajectoire financière
insoutenable.
En effet, tandis que l’AFITF vote régulièrement de nouvelles
autorisations d’engagement qui
ne sont pas limitées, ses crédits de paiement sont en
revanche annuellement liés au niveau des recettes.
L’écart entre les engagements
et les dépenses ne cesse ainsi de croître : 21 Md€ d’engagements ont été
contractés par l’AFITF et ne sont pas couverts en crédits de paiement d’ici
2014.
Source : Rapport de l’IGF sur les agences de l’État, 2012.
rhombus5
les affectations sont enfin ponctuellement
utilisées pour assurer le
financement de dépenses de l’État
, comme par exemple la prime
de Noël dont la charge financière est régulièrement transférée au
fonds de solidarité (
cf.
encadré 27 ci-dessous
).
Encadré 27 : Les débudgétisations permises par le Fonds de solidarité
Le fonds de solidarité a été fréquemment utilisé par l’État, en marge de sa mission de collecte
de la contribution exceptionnelle de solidarité et de financement du régime des chômeurs en fin
de droit, comme un moyen de recourir à des mécanismes de débudgétisation :
square4
il offre la possibilité de créer de nouvelles allocations en cours d’année, dont les crédits
n’ont pas été prévus en loi de finances, en mettant à la charge du fonds leur financement :
l’allocation pour les bénéficiaires du contrat nouvelle embauche (CNE) qui seraient
privés d’emploi a été mise à la charge du fonds en 2005, sans avoir été budgétée ;
l’indemnisation des intermittents du spectacle par l’allocation de professionnalisation et
de solidarité (APS) et l’allocation de fin de droit (AFD) a été mise à la charge du Fonds
de solidarité par un amendement au projet PLF pour 2007 pour un montant de 46 M€
sans prévoir de recettes supplémentaires ;
de manière récurrente, l’État demande au Fonds de solidarité d’assumer la charge du
paiement de la « prime de Noël »
131
. Celle-ci n’est jamais incluse dans les crédits du
programme 102 « accès et retour à l’emploi », mais le Fonds de solidarité la prend
habituellement en charge sur ses reliquats de crédits et par un prélèvement sur son fonds
de roulement en procédant à une décision budgétaire modificative ;
square4
il permet également de financer le régime de solidarité par un mécanisme de cessions de
créance assez peu respectueux des principes budgétaires. Ainsi, en 2007, le Fonds de
solidarité s’est vu attribuer par l’État en loi de finances une créance d’un montant de
770 M€ que celui-ci détenait sur l’Unédic à l’échéance du 1
er
janvier 2011. L’État a
demandé au Fonds de procéder au recouvrement de cette créance au cours de l’année
2008, ce qui a permis d’éviter un déficit du Fonds sans procéder à une subvention de
l’État et sans dégrader le solde d’exécution budgétaire.
Source : Rapport de l’IGF sur les agences de l’État, 2012.
131
Il s’agit d’une aide exceptionnelle forfaitaire versée en fin d’année civile aux
bénéficiaires de minima sociaux. Depuis 2012, celle-ci est à la charge du FNSA.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
124
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
B - Un trop faible encadrement budgétaire a favorisé le
foisonnement de taxes affectées
Fréquemment motivée par des raisons d’ordre budgétaire,
l’affectation de ressources fiscales a, en outre, été facilitée par un
encadrement juridique et budgétaire jusqu’à présent peu contraignant.
1 -
La LOLF encadre paradoxalement davantage les affectations
internes à l’État que les affectations à des tiers dotés
de la personnalité morale
Tout en supprimant la parafiscalité, la LOLF prévoit un mécanisme
d’affectation relativement souple. La loi organique instaure ainsi deux
encadrements distincts en différenciant, d’une part, la réaffectation de
taxes établies antérieurement au profit de l’État et, d’autre part, la
création
ex nihilo
de taxes affectées. Ainsi :
rhombus5
en application de l’article 36, l’affectation de taxes initialement
établies au profit de l’État ne peut résulter que d’une disposition de
loi de finances ;
rhombus5
l’article 2, alinéa 2, prévoit qu’une taxe nouvellement créée ne peut
être affectée «
à un tiers qu’à raison des missions de service public
confiées à lui
». La création de l’imposition, qui peut être prévue
par une loi ordinaire, doit ensuite être autorisée par la loi de
finances de l’année.
Les conditions prévues pour l’affectation d’une ressource fiscale
sont donc relativement souples ; en particulier, la condition de « mission
de service public » fait l’objet d’une interprétation large du juge
constitutionnel.
Le faible encadrement de la loi organique en matière d’affectation
a d’ailleurs conduit l’État à se contraindre lui-même. Ainsi, la circulaire
du Premier ministre du 4 juin 2010
relative à l’édiction de mesures
fiscales et de mesures affectant les recettes de la sécurité sociale a
demandé aux ministres de ne plus insérer des dispositions fiscales dans
les lois ordinaires et d’opposer un avis négatif du Gouvernement à tout
amendement qui tendrait à en introduire. De même, la récente circulaire
du Premier ministre du 14 janvier 2013 relative aux règles pour une
gestion responsable des dépenses publiques exige qu’aucune nouvelle
dépense ne soit financée par une augmentation de recettes «
quel que soit
leur affectataire, qu’il s’agisse de l’augmentation de taxes existantes ou
de la création de nouvelles taxes
. ». La circulaire précise d’ailleurs que
«
s’agissant des agences de l’État, cette règle est cohérente avec la
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
125
programmation des finances publiques qui repose sur une réduction en
valeur absolue des taxes affectées en 2014 et 2015
».
À l’inverse, les affectations internes à l’État, prévues à l’article 16
de la LOLF
132
, ont en revanche été paradoxalement durcies :
rhombus5
l’article 18 a restreint la possibilité de recourir à des budgets
annexes
, en comparaison de ce que prévoyait l’article 20 de
l’ordonnance de 1959.
S’il est ainsi exigé, comme auparavant, que
l’entité bénéficiant d’un budget annexe soit dépourvue de la
personnalité morale, ceux-ci sont réservés aux seules opérations
résultant de leur activité de production de biens ou de prestations
de services, et donnant lieu au paiement de redevances. Sont donc
écartées,
a priori
, les activités industrielles et commerciales du
secteur public qui donnent lieu au paiement d’un prix. Sont surtout
écartées des budgets annexes les activités financées principalement
par des taxes ;
rhombus5
le même durcissement des conditions de création a été opéré
pour les comptes spéciaux.
L’article 21 prévoit en particulier que
pour les comptes d’affectation spéciale, les recettes particulières
soient «
par nature, en relation directe avec les dépenses
concernées
», alors que l’article 25 de l’ordonnance organique
n’exigeait pas un tel lien. Le fonds national pour le développement
du sport (FNDS), alimenté par un compte d’affectation spécial
sous le régime de l’ordonnance de 1959, a ainsi été recréé comme
établissement public pour cette raison (il est affectataire du
prélèvement sur les paris sportifs et d’une fraction du prélèvement
sur les jeux de la Française des jeux).
2 -
La norme de dépenses, en imposant une contrainte forte sur
les crédits du budget général, a favorisé le développement des
taxes affectées et la débudgétisation corrélative
de certaines dépenses
La norme de dépenses, en imposant une contrainte forte sur les
crédits du budget général, a favorisé le développement des taxes affectées
et des phénomènes de débudgétisation. En effet, parce qu’elles ne
transitent pas par le budget général, les dépenses financées par taxes
affectées n’étaient pas, assez logiquement, prises en compte dans la
norme de dépense. Dans ce cadre budgétaire, il existait donc un biais
132
L’article 16 de la LOLF dispose que les affectations à certaines dépenses doivent
prendre la forme de budgets annexes ou de comptes spéciaux.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
126
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
important puisque l’État était incité à financer par taxes affectées des
dépenses nouvelles, sans effet visible sur la norme de dépenses.
Encadré 28 : Les normes de dépenses
La France s’est dotée, depuis 2004, de deux normes de dépenses, applicables à
l’État :
square4
la norme « zéro volume »
, créée en 2004, fixe un objectif de croissance
annuelle en euros courants du budget général de l’État égal à l’inflation hors
remboursements et dégrèvements d’impôts ;
square4
la norme « zéro valeur »
, créée en 2011, impose une contrainte supérieure, à
savoir la stabilisation en euros courants des dépenses. Elle s’applique au
même périmètre que celui de la norme « zéro volume », dont sont exclues les
charges d’intérêt et la contribution de l’État au compte d’affectation spéciale
« Pensions ». Cette norme suppose donc que soient réalisées annuellement en
volume des économies au moins égales à l’inflation.
La norme avait été initialement conçue pour s’appliquer sur des
dépenses ;
elle n’avait donc pas vocation à porter sur des ressources
.
S’appliquant sur le budget général de l’État, la norme induisait ainsi une
contrainte différenciée sur les agences, selon qu’elles sont financées par
subventions pour charges de service public, c’est-à-dire par crédits
budgétaires (sous norme), ou par taxes affectées (hors norme).
III
-
En dépit de progrès récents, l’encadrement
budgétaire actuel s’avère insuffisant pour corriger
les inconvénients de la fiscalité affectée
L’encadrement des taxes affectées s’articule aujourd’hui autour de
trois axes complémentaires, inscrits dans la charte de budgétisation
annexée à la LPFP pour 2012-2017 :
rhombus5
le
plafonnement des taxes affectées
à des opérateurs, permettant
d’écrêter les taxes dont les rendements sont supérieurs aux besoins
prévisionnels ;
rhombus5
l’inclusion dans la norme « zéro valeur »
des taxes qui sont
plafonnées en lois de finances ;
rhombus5
la fixation d’un
objectif global de baisse des taxes plafonnées
(- 265 M€ en 2014 et – 465 M€ en 2015).
Par ailleurs, il importe de souligner que ces mécanismes
d’encadrement s’articulent avec des mécanismes plus traditionnels de
régulation budgétaire en cas de fonds de roulement manifestement
excessifs :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
127
rhombus5
des prélèvements sur fonds de roulement
– exceptionnels ou
récurrents – et, symétriquement, de versement de soultes aux
opérateurs ;
rhombus5
des réductions, lorsqu’elles existent
,
des dotations budgétaires
versées à l’agence
; si l’agence maintient ses dépenses, cette
moindre ressource l’oblige à réduire son fonds de roulement.
A - L’encadrement budgétaire des taxes affectées
s’articule autour de la mise sous norme et du
plafonnement, avec une ambition croissante depuis 2008
L’encadrement budgétaire actuel des taxes affectées se décompose
en deux principaux dispositifs complémentaires, l’intégration dans la
norme « zéro valeur » et le plafonnement des rendements.
1 -
Certaines taxes affectées sont désormais prises en compte
dans la norme de dépense
Les affectations de taxes sont, depuis la LFI pour 2008
133
, prises en
compte dans la norme d’évolution des dépenses de l'État, qui prévoit que
les dépenses de l’État en valeur se stabilisent (« zéro valeur »).
L’inclusion de ressources dans une norme d’encadrement des
dépenses n’allait pas de soi, intellectuellement ; elle était en revanche
indispensable pour éviter que l’affectation de ressources fiscales n’ait
pour objet de contourner la norme de dépense. Cette mise sous norme des
ressources
fiscales
avait
également
pour
objectif
d’harmoniser
l’encadrement budgétaire pesant sur les agences, quel que soit leur mode
de financement, en faisant supporter la même contrainte aux ressources
fiscales affectées qu’aux subventions pour charges de service public.
Le périmètre de la norme « zéro valeur » a fait l’objet, en 2009,
d’un élargissement consacré par l'article 5 de la LPFP pour les années
2009 à 2012
134
. Alors que le périmètre de la norme était initialement
cantonné au flux de taxes affectées, il inclut désormais l’ensemble du
« stock » des contributions et taxes affectées à des tiers et faisant l’objet
d’un plafonnement limitatif à l’article 46 de la LFI pour 2012
135
(
cf. infra
). Le dispositif d’encadrement actuel lie donc étroitement
l’inclusion dans la norme et le plafonnement des taxes affectées.
133
Loi n° 2007-1822 du 27 décembre 2007 de finances pour 2008.
134
Loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour
les années 2009 à 2012.
135
Loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
128
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Par ailleurs, cet élargissement du périmètre de la norme s’est
accompagné d’un basculement progressif d’une logique d’encadrement
de la dépense des entités bénéficiaires de taxes affectées à une logique
d’encadrement de leur ressource. La priorité est désormais d’assurer un
pilotage par la maîtrise des ressources allouées aux agences et aux autres
organismes bénéficiaires de taxes affectées.
2 -
Le plafonnement constitue désormais le dispositif pivot de
l’encadrement budgétaire des taxes affectées
Le plafonnement des taxes affectées, prévu par l’article 46 de LFI
pour 2012, n’est pas identique pour toutes les entités auquel il s’applique.
Il peut prendre deux formes :
rhombus5
un
premier
groupe
d’entités
ne
subit
qu’un
simple
encadrement du rendement des taxes qui lui sont affectées.
Il
consiste à fixer un plafond égal au rendement prévisionnel de la
taxe ; dès lors que le rendement s’avère supérieur au plafond
prévisionnel, le montant excédentaire fait l’objet d’un reversement,
par l’entité bénéficiaire, au budget général de l’État.
A priori
,
le
plafonnement
ne donne donc lieu à aucune économie ;
rhombus5
un
second
groupe
d’entités
connaît,
au
contraire,
un
écrêtement du rendement des taxes qui lui sont affectées :
le
législateur fixe alors un plafond délibérément inférieur au
rendement prévisionnel de la taxe plafonnée. Le montant écrêté est
automatiquement versé au budget général de l’État.
La fixation des plafonds, et des écrêtements qui en résultent le cas
échéant, a été la résultante de négociations budgétaires, sur le même
modèle que celles qui ont cours pour l’attribution des subventions. En
2012,
31
entités
ont
été
plafonnées ;
la
plupart
d’entre
elles
(23 entités) ne devaient subir aucune perte de recettes par rapport au
rendement prévisionnel de leurs taxes affectées, le montant plafonné étant
calé sur le rendement prévisionnel des taxes.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
129
Graphique 16 : Présentation schématique du mécanisme de
plafonnement en LFI 2012 et de son rendement prévisionnel au mois
de janvier 2013
1
23 entités
18 entités
sous plafond
8 entités
écrêtées
partiellement
ou totalement
95 M€
31 entités
(3 013 M€)
(
1 901 M€
)
RENDEMENT
PRÉVISIONNEL
3 entités
sous plafond
=
RENDEMENT
PRÉVISIONNEL
PLAFOND
DISPOSITIF EN PLF 2012
BILAN DES ECRÊTEMENTS
RENDEMENT
PRÉVISIONNEL
RENDEMENT
PRÉVISIONNEL
5 entités
au-delà du
plafond
RETOUR DANS LE BG
DE L’ÉTAT
102 M€
10 entités
Écrêtement
96M€
ÉCRÊTEMENT
(sur les 8 entités)
23 entités
(
1 901 M€
)
(
1 161 M€
)
(1 067 M€)
Écrêtement
6 M€
5 entités
au-delà du
plafond
PLAFOND
(sur les 8 entités)
Source : Conseil des prélèvements obligatoires.
Note
: Il s’agit d’entités bénéficiaires de taxes affectées ou de catégories d’entités,
comme dans le cas des centres techniques industriels (CTI). Ainsi les centres
techniques industriels de la mécanique, qui regroupent 5 entités distinctes, sont
comptabilisés pour une catégorie. En outre, les rendements indiqués portent sur la
totalité des ressources fiscales affectées par entité, même lorsque l’une de ces
ressources n’est pas écrêtée.
Dans les faits, le dispositif de plafonnement mis en place a
finalement permis, en 2012, l’écrêtement effectif de dix entités
bénéficiaires de taxes affectées, pour un rendement estimé à 102 M€ à la
fin du mois de janvier 2013, contre les 95 M€ prévus initialement. Près de
la moitié de ce rendement est lié à l’écrêtement de la fraction distributeurs
de la taxe sur les services de télévision (TST) du CNC, qui atteint 50 M€.
L’écrêtement réalisé sur les huit entités représente en moyenne
12 % du rendement prévisionnel des taxes plafonnées qui leur sont
affectées. Il représente une diminution des ressources globales des entités
concernées comprise entre 1,4 % et 5,1 %. La plupart des écrêtements
sont, en valeur absolue
,
inférieurs à 10 M€
,
à l'exception de l'écrêtement
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
130
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
des ressources du CNC (celui-ci, portant sur la TST distributeurs, atteint
70 M€) et de la Société du grand Paris (36 M€).
Le dispositif de plafonnement a été élargi en 2013 à treize
nouvelles taxes pour un rendement prévisionnel de 151 M€. L’écrêtement
réalisé devrait représenter 3 % des rendements des taxes concernées. Sur
ces onze nouvelles entités plafonnées, seules trois catégories d’entités
voient leur rendement prévisionnel écrêté – les chambres de commerce et
d’industrie de région (à hauteur de 19 M€), les chambres régionales de
métiers et l’artisanat (à hauteur de 6 M€) et la CGLLS (à hauteur de
33 M€).
B - Cet encadrement reste cependant trop étroit pour
contrôler les évolutions de la fiscalité affectée et limiter
les pratiques de débudgétisation
Le plafonnement est une évolution positive, qui traduit le souhait
de mieux contrôler des ressources et des dépenses publiques jusqu’à
présent peu concernées par la consolidation budgétaire. Toutefois, le
dispositif est utilisé de manière peu offensive ; il reste largement en deçà
des enjeux soulevés par la fiscalité affectée.
1 -
Les exceptions au plafonnement étant libellées en des
termes peu restrictifs, le dispositif ne porte que sur un
périmètre restreint de taxes affectées
L’objectif poursuivi, inscrit dans la charte de budgétisation,
annexée à la LPFP, est de plafonner à terme toutes les taxes affectées à
des tiers autres que les administrations de sécurité sociale et les
collectivités territoriales, à l’exception :
rhombus5
des taxes répondant à une logique de redevance pour service
rendu ;
rhombus5
des taxes répondant à une logique de pollueur-payeur ;
rhombus5
lorsque le montant recouvré par l’organisme est en rapport avec le
coût encouru à cause du fait générateur de la taxe.
Ces trois critères représentent de fait un périmètre très large de
taxes affectées. Ils se révèlent donc peu discriminants et laissent, au
contraire, une large part aux négociations politiques lors des débats
budgétaires.
Par ailleurs, les taxes affectées les plus dynamiques ou les plus
importantes en volume ne sont pas nécessairement plafonnées.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
131
En outre, ces critères semblent interprétés de manière assez
aléatoire, puisque :
rhombus5
en ce qui concerne la logique de redevance pour service rendu, la
redevance d’archéologie préventive affectée à l’INRAP a pourtant
été plafonnée en 2013 par exemple ;
rhombus5
en ce qui concerne la logique de pollueur-payeur, la TGAP
affectée à l’ADEME est plafonnée depuis 2012.
Si le nombre de taxes affectées plafonnées s’est accru en 2013, il
demeure encore largement minoritaire. Le dispositif du plafonnement
pour l’année 2013 porte sur un total de 57 taxes affectées à 41 entités ou
groupes d’entités :
rhombus5
le plafond global porte sur 5,4 Md€ de rendements prévisionnels,
sur un total d’environ 19 Md€ de rendements prévisionnels en
2013 pour l’ensemble des taxes affectées aux agences, aux
organismes professionnels et consulaires, soit moins d’un tiers ;
rhombus5
le rendement du dispositif est assez faible, puisqu’il représente
102 M€ en 2012 et 151 M€ prévisionnels en 2013 ; soit 3 % du
rendement prévisionnel des taxes plafonnées et 0,8% du rendement
prévisionnel de l’ensemble des taxes affectées bénéficiant aux
agences, aux organismes professionnels et consulaires.
Par ailleurs, les taxes qui étaient d’ores et déjà plafonnées en LFI
2012 ont vu leurs plafonds évoluer de manière plus ou moins
discrétionnaire.
Enfin, le plafonnement des taxes affectées se heurte à deux limites,
qui reflètent les rapports de force et les asymétries d’information existant
entre certaines agences et leurs tutelles :
rhombus5
la sincérité des informations
délivrées par les opérateurs sur les
rendements prévisionnels et effectifs des taxes, lorsqu’ils en
assurent la collecte et n’ont pas de comptable public. La définition
du plafond s’effectuant en fonction des prévisions de rendement
fournies par les affectataires, ces derniers ont tout intérêt à
surévaluer les prévisions pour éviter un écrêtement ; pour l’heure,
il n’existe pas de contrôle
a posteriori
sur les ressources fiscales
perçues par les agences ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
132
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
le poids de l’opérateur et sa capacité d’influence
dans les
négociations budgétaires et les débats parlementaires. Certaines
agences jouissent en effet d’une capacité d’influence qui leur
permet d’échapper au plafonnement ou de limiter son impact. Dans
le cas du CNC, celui-ci a été jusqu’à présent associé de manière
marginale aux efforts de maîtrise des finances publiques, en dépit
du dynamisme marqué de ses ressources (
cf.
encadré 29 ci-
dessous
). Il a, en outre, bénéficié pour l’année 2013, d’un
traitement particulier, consistant à le déplafonner, en contrepartie
d’un prélèvement exceptionnel sur fonds de roulement de 150 M€.
Il est ainsi substitué au dispositif pérenne du plafonnement un
prélèvement exceptionnel – et donc ponctuel.
Encadré 29 : La contribution du CNC à l’objectif de maîtrise des
finances publiques
Face au dynamisme des ressources du CNC, le législateur a opéré, depuis 2011,
plusieurs prélèvements sur le produit des taxes affectées au profit du budget
général de l’État. La loi de finances pour 2011
136
a institué un prélèvement
exceptionnel de 20 M€, versé en deux virements de 10 M€ le 1
er
juillet et le
31 décembre 2011.
Le président de la commission des finances du Sénat, avait même présenté un
amendement à la loi de finances rectificative pour 2011, visant à créer un
prélèvement pluriannuel sur le budget du CNC, égal à 10 % du montant des
ressources affectées au centre, afin que l’établissement contribue à la trajectoire
de résorption du déficit sur la durée couverte par la dernière LPFP (2011-2014).
À l’issue de la discussion parlementaire sur le plafonnement du produit des taxes
affectées aux opérateurs de l’État dans le cadre de la LFI pour 2012, pour le
CNC, seul le produit de la TST distributeurs a été finalement plafonné, à hauteur
de 229 M€, aux termes de la LFI pour 2012.
L’article 28 de la loi de finances initiale pour 2013 prévoit un prélèvement
exceptionnel de 150 M€ sur le fonds de roulement du CNC. Dans l’exposé des
motifs, il est indiqué qu’il s’agit de la contribution du CNC à l’effort de maîtrise
des ressources extrabudgétaires des opérateurs.
2 -
Le dispositif ne permet pas d’améliorer l’efficience de la
dépense publique
La mise sous norme et le plafonnement n’apportent qu’une réponse
partielle aux questions d’efficience de la dépense publique soulevées par
les taxes affectées.
136
Article 35 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
133
D’une part, le dispositif d’encadrement des taxes affectées ne place
pas les entités bénéficiaires dans la logique de performance prévue par la
LOLF (la « justification au premier euro
137
»). En effet, le dispositif ne
renforce pas les leviers des tutelles ou du Parlement pour contrôler les
dépenses de l’affectataire et ne permet pas à ces derniers de s’assurer de
leur efficience.
D’autre part, loin de limiter l’affectation de ressources fiscales,
le
plafonnement risque au contraire de sanctuariser les taxes affectées,
y compris lorsque les taxes sont distorsives ou qu’elles financent des
entités inefficientes. En effet, lorsqu’il est assorti d’un écrêtement des
rendements
fiscaux,
le
plafonnement
représente
un
vecteur
de
financement du budget général pour l’État, sans que ce dernier n’assume
la responsabilité de la pression fiscale. Loin d’apporter une solution aux
dérives de l’affectation, le plafonnement peut donc inciter à maintenir une
taxe ou une agence, même si celle-ci est inefficiente.
Aucun mécanisme ne prévoyant de limiter dans le temps les
affectations de taxes ou d’en revoir, à échéances régulières, la pertinence,
le plafonnement semble ainsi renforcer « l’effet de cliquet » de
l’affectation, rendant difficile la transformation de ressources fiscales
affectées en crédits budgétaires.
3 -
Le dispositif de contrôle est insuffisamment contraignant pour
éviter de nouvelles opérations de débudgétisation
Enfin, comme le relève le rapport de la Cour des comptes dans son
dernier rapport public annuel
138
, deux cas récents d’affectation, prévus en
loi de finances initiale pour 2013, montrent que le dispositif reste
insuffisamment contraignant :
rhombus5
l’AFITF se verra ainsi affecter, à partir d’octobre 2013, la nouvelle
taxe sur la circulation des poids lourds, pour 400 M€ de ressources
nouvelles en 2013 ;
137
Introduit par la LOLF, le concept de « justification au premier euro » (JPE) traduit
l’abandon de la distinction de l’ordonnance de 1959 entre les « services votés »,
reconduits chaque année sans être examinés, et les « mesures nouvelles ». Désormais,
les crédits du budget de l’État sont examinés et votés au premier euro chaque année,
et doivent donc ainsi être justifiés.
138
Rapport public annuel 2013 de la Cour des comptes
, La situation d’ensemble des
finances publiques (à fin janvier 2013).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
134
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
la vente de quotas carbone, considérée comme un prélèvement
obligatoire en comptabilité nationale, sera affectée à l’ANAH, à
hauteur de 600 M€, à partir de 2013. Parallèlement, le prélèvement
de 400 M€ sur les ressources d’Action logement dont bénéficiait
l’ANAH sera versé au FNAL.
Ces deux exemples montrent à la fois que le plafonnement n’a pas
empêché les affectations nouvelles et que ces dernières n’ont pas été
incluses dans la norme. Ainsi la Cour signale que «
l’affectation d’impôts
nouveaux à des organismes publics a permis à l’État de réduire ou de
stabiliser ses propres dépenses tout en augmentant les dépenses
publiques dans les domaines concernés
».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Chapitre V
Une rationalisation de la fiscalité
affectée s’impose
Le principe d’universalité budgétaire a été fortement contourné ces
dernières années, avec la multiplication du nombre des taxes affectées et
de la croissance des volumes financiers en jeu. Loin d’être une simple
question juridique, le développement de la fiscalité affectée soulève des
difficultés, nombreuses et concrètes :
rhombus5
l’évolution de la taxe et des besoins de l’affectataire n’ayant
aucune raison d’évoluer symétriquement, l’affectation nuit aux
finances publiques. Les constats établis dans le troisième chapitre
de ce rapport chiffrent de manière précise l’ampleur de ces
problèmes budgétaires ;
rhombus5
la tutelle et le contrôle des affectataires par l’État sont affaiblis
,
faute de levier financier ; le contrôle du Parlement est également
limité, en l’absence de réexamen annuel de l’affectation ;
rhombus5
des entités financées par taxe affectées ont tendance à perdurer,
même lorsqu’elles sont inefficientes ;
rhombus5
les
affectations
ont
pu
encourager
des
opérations
de
débudgétisation
massives,
dont
la
régularisation
dans
les
prochaines années contraindra significativement les marges de
manoeuvre budgétaires ;
rhombus5
compte tenu de leur ampleur, les affectations réduisent les
possibilités d’arbitrage entre les différentes politiques publiques.
Dans un contexte où les finances publiques sont durablement
contraintes, la ressource fiscale ne peut plus être utilisée de manière
inefficiente. Si le plafonnement mis en place par la loi de finances initiale
pour 2012 est une évolution satisfaisante, il ne répond que de manière
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
136
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
limitée aux enjeux soulevés par la fiscalité affectée. Dans ce contexte, une
stratégie de rationalisation de la fiscalité affectée s’impose
139
.
Cette stratégie doit poursuivre quatre principaux objectifs :
rhombus5
objectiver, par des critères simples, les cas dans lesquels des
affectations de taxes sont justifiées ;
rhombus5
traiter le « stock » d’affectations, afin de rationaliser le paysage
actuel et de s’assurer de l’évolution maîtrisée des ressources ;
rhombus5
encadrer les éventuelles affectations qui perdureraient ;
rhombus5
contraindre les créations de nouvelles affectations, de manière à
limiter le risque d’un éventuel nouveau foisonnement.
I
-
À titre préalable, la fiscalité affectée doit être
mieux connue pour être mieux maîtrisée
A - L’information à destination du Parlement et des
administrations doit être fiabilisée et enrichie
Bien que l’information à destination du Parlement et du citoyen en
matière de fiscalité affectée soit conforme à la législation en vigueur et
qu’elle ait récemment progressé (
cf. chapitre 1
), ce phénomène reste mal
connu. Faute de définition et de réflexion précise sur son objet, la fiscalité
affectée reste en effet mal appréhendée. Par ailleurs, la qualité de
l’information ne permet pas une connaissance fine du phénomène
d’affectation de taxes. Les données collectées ne sont pas toujours
fiabilisées ; elles manquent parfois de cohérence et d’homogénéité ; elles
ne sont pas exhaustives. Surtout, elles ne sont pas mises en perspective :
ni le Gouvernement, ni le Parlement, ne disposent d’un instrument
permettant son pilotage.
Le recueil et le retraitement manuel des données transmises par les
ministères et les affectataires confortent l’idée que la conception du
rapport « voies et moyens » se fait de manière artisanale, avec des
moyens extrêmement limités. Par ailleurs, le seul objectif de recensement,
fixé par la loi organique, à ce document budgétaire apparaît en deçà des
enjeux soulevés par la fiscalité affectée. En effet, ce document ne
constitue pas, à proprement parler, un instrument de pilotage de la
fiscalité affectée.
139
Les propositions suivantes portent sur le périmètre de la demande du Premier
ministre (
cf. supra
).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
137
La maîtrise de la fiscalité affectée passe, de manière préliminaire,
par un renforcement de la connaissance de ce phénomène.
Proposition n° 1 : Disposer d’un véritable instrument de pilotage
de la fiscalité affectée, en professionnalisant la collecte des
données et en enrichissant les annexes budgétaires
D’une part, il conviendra de clarifier le concept de fiscalité
affectée, de manière à faciliter le travail de suivi des administrations.
À
ce
titre, les critères d’identification proposés par le Conseil des prélèvements
obligatoires, dans la première partie de ce rapport, présentent des pistes
qui gagneraient à être approfondies par les administrations.
D’autre part, afin de disposer d’une vision globale et précise sur les
taxes
affectées,
l’État
devra
professionnaliser
la
collecte
et
la
consolidation de données, aujourd’hui encore produites de manière très
artisanale. Une telle démarche suppose :
rhombus5
la mise en place d’un système d’informations dédié à la
centralisation des données
140
, ce qui permet de limiter le nombre
d’erreurs résultant des saisies manuelles, de limiter les doubles
saisies et de réduire la charge des agents responsables de la
collecte d’informations ;
rhombus5
la création d’une vraie base de données, permettant d’analyser
l’évolution, sur plusieurs années, des taxes affectées sur un
périmètre constant ;
Enfin, il conviendra d’enrichir le rapport des « voies et moyens »,
de manière à rendre ce document moins descriptif et à en faire un réel
instrument de pilotage des taxes affectées à destination du Parlement.
De
même, les informations en matière de fiscalité affectée présentes dans les
rapports annuels de performance pourraient également être complétées.
140
Farandole, l’application de saisie budgétaire commune au ministère du budget et
aux ministères dépensiers permet, entre autres, la production des documents
budgétaires tels que les projets et rapports annuels de performances, mais elle ne
dispose pas de module dédié à l’élaboration de la partie VII du tome I des voies et
moyens.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
138
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Encadré 30 : Pistes d’évolutions des « voies et moyens »
Pour devenir un instrument de pilotage de la fiscalité affectée, les voies et
moyens pourraient comprendre :
square4
la notion de taxe affectée et les critères de recensement ;
square4
les règles en matière de fiscalité affectée ;
square4
les principales évolutions du périmètre de recensement des taxes affectées
(créations, suppressions, modification de l’affectation) et, par conséquent,
une présentation pluriannuelle à périmètre constant ;
square4
les caractéristiques des taxes (type d’assiette, secteur assujetti, etc.) ;
square4
les montants affectés par bénéficiaire (le document actuel est centré sur le
produit par taxe et non par affectataire) ;
square4
les
éventuels
phénomènes
de
«
sous-affectation
»,
c’est-à-dire
les
mécanismes budgétaires qui consistent à affecter une recette à un
organisme qui en reverse tout (cas des entités non dotées d’une personne
morale, par exemple) ou partie (par exemple le versement au centre
national de la propriété forestière d’une fraction de taxes affectées aux
organismes consulaires) ;
square4
des analyses synthétiques réalisées avec une profondeur historique
suffisante et un périmètre stabilisé, permettant d’apprécier l’ampleur des
affectations de taxes.
B - Chaque année, le Parlement doit pouvoir voter les
affectations de ressources fiscales
Au-delà
de
la
connaissance
quantitative
du
phénomène
d’affectation, il importe, dans l’attente de la mise en oeuvre de la
rationalisation proposée ci-dessous, que le Parlement reprenne le contrôle
de la fiscalité affectée
via
une soumission de ces ressources au principe
d’annualité budgétaire.
Proposition n° 2 : Prévoir chaque année, en loi de finances initiale,
une autorisation d’affectation pour l’ensemble des taxes affectées
Ainsi, le Parlement pourrait voter, chaque année en loi de finances
initiale, la liste des ressources fiscales affectées en dehors du budget
général de l’État. En ancrant dans le débat parlementaire le vote
périodique de l’ensemble des ressources affectées, une telle mesure
faciliterait le réexamen périodique du bien-fondé des affectations ; il
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
139
donnerait au Parlement un réel levier pour maîtriser une ressource qui,
aujourd’hui, échappe largement à son contrôle.
II
-
Le respect des principes budgétaires et fiscaux
fondamentaux conduit à réaffirmer le statut
d’exception de la fiscalité affectée
Le chapitre IV de ce rapport a montré que les créations de taxes
affectées avaient souvent répondu à un objectif de financement de
politique publique. En l’absence de logique apparente permettant de
conclure à un développement maîtrisé de la fiscalité affectée, il convient
de s’interroger sur les motifs qui pourraient justifier que certaines
ressources soient de fait sanctuarisées en dehors du budget général de
l’État et soumises à un contrôle parlementaire limité.
Une telle interrogation conduit, en fait, à s’interroger sur la nature
et le rôle de l’impôt, c’est-à-dire sur la logique fiscale par rapport à la
logique budgétaire.
Cette réflexion doit permettre de clarifier le statut des ressources
aujourd’hui considérées comme des taxes affectées et de prévoir leur
évolution.
A - L’impôt doit répondre à une logique fiscale et à une
logique budgétaire
1 -
La logique fiscale, fondée sur l’absence de contrepartie
au prélèvement, permet de définir le champ de l’impôt
Comme l’a rappelé le chapitre I de ce rapport, un impôt est
complexe à définir ; il n’est finalement qu’une catégorie juridique
résiduelle, qui comporte des prélèvements n’étant ni des redevances, ni
des cotisations sociales, ni des prélèvements sur recettes.
Au-delà de cette difficulté à approcher le concept d’impôt, celui-ci
possède une logique qui le distingue des autres formes de prélèvements :
la logique fiscale est, en effet, fondée sur l’absence de contrepartie directe
au versement de la contribution.
En voulant donner aux assujettis la garantie que les prélèvements
auxquels ils sont soumis leur seront restitués, certaines affectations
conduisent donc à un dévoiement de la logique fiscale.
À ce titre, deux catégories d’affectation méritent d’être examinées :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
140
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
d’une
part,
certains
prélèvements
affectés,
qui
mettent
à
contribution les usagers, relèvent davantage de la catégorie des
redevances que de celle des impôts ;
rhombus5
d’autre part,
les ressources fiscales affectées à certaines entités, en
permettant une mutualisation volontaire des ressources au sein
d’un secteur, s’apparentent de fait à des contributions volontaires.
Au total, il apparaît que l’existence d’un lien direct entre la levée
de la ressource et sa contrepartie est difficilement compatible avec la
logique
fiscale et
qu’elle
relève
plutôt
d’autres
catégories
de
prélèvements, telles que les redevances et les contributions volontaires.
2 -
La logique budgétaire, fondée sur le principe d’universalité
budgétaire, implique que les affectations soient des dérogations
devant être justifiées
La logique budgétaire, pour sa part, repose sur le principe
d’universalité budgétaire, qui prévoit par principe une affectation de
toutes les ressources fiscales au budget de l’État.
Le principe d’universalité budgétaire ne signifie pas, cependant,
qu’aucune affectation ne soit possible ; celle-ci peut se justifier dès lors
qu’elle rend le prélèvement plus efficient, soit économiquement, soit du
point de vue de la gestion publique.
Le chapitre IV de ce rapport a examiné les différents motifs
généralement avancés pour justifier une affectation de ressources ; il
conclut que celle-ci se justifie, sous les réserves précédemment indiquées,
dans les cas limités suivants :
rhombus5
lorsqu’elle renforce manifestement le consentement à l’impôt ;
dans les faits, ces situations correspondent à des prélèvements qui
sont opérés sur un groupe restreint d’assujettis et qui leur
bénéficient exclusivement ;
rhombus5
lorsqu’elle est économe des deniers publics, notamment en mettant
à contribution l’usager ;
rhombus5
lorsqu’elle permet de préserver des ressources destinées à un
mécanisme assurantiel.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
141
B - Le croisement des logiques fiscale et budgétaire
permet de clarifier le statut des taxes affectées
1 -
Les cas où une affectation apparaît justifiée sont limités
Le croisement de ces deux logiques permet de circonscrire les cas
où les affectations apparaissent justifiées :
rhombus5
contrepartie de la production d’un service directement rendu par
l’affectataire, sous la forme de droits ou de quasi-redevances ; dans
ce cas, le montant de la contribution perçue par l’affectataire doit
pouvoir s’apprécier sur des bases objectives ;
rhombus5
financement, au sein d’un secteur d’activité, d’actions de
mutualisation ou de solidarités sectorielles ; pour ces affectataires,
dont les missions sont éloignées du service public, la contribution
n’a pas de logique fiscale et le rôle de l’État n’est pas justifié. Dès
lors, une évolution de ces taxes vers une forme de contribution
volontaire apparaîtrait souhaitable ;
rhombus5
financement de fonds d’assurance ou d’indemnisation, pour
lesquels la constitution de réserves financières par des cotisants sur
une base régulière apparaît nécessaire.
2 -
À terme, une clarification du statut de ces prélèvements
affectés sera nécessaire
Cette typologie devrait conduire, à terme, à clarifier le statut de ces
différents prélèvements. En particulier, le statut d’impôt attribué à des
prélèvements s’apparentant en réalité à des quasi-redevances ou à des
contributions volontaires n’apparaît pas satisfaisant. En effet, les logiques
de
redevance,
de
mutualisation
sectorielle
et
de
contributions
assurantielles n’ont pas vocation à passer par un véhicule fiscal.
Proposition n° 3 : Clarifier, à terme, le statut des quasi-
redevances, des prélèvements sectoriels et des contributions
assurantielles
Concernant
les
prélèvements
finançant
des
actions
de
mutualisation au sein d’un secteur d’activité
, la taxe affectée constitue
une alternative commode à une contribution volontaire, surtout dans des
secteurs économiques où les contributeurs sont nombreux et peu réceptifs
à la coopération, en ce qu’elle permet de bénéficier d’une caution
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
142
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
législative, et bien souvent des moyens de l’administration fiscale ou
douanière pour procéder à un recouvrement efficace.
Le statut d’impôt de ces contributions n’apparaît pas satisfaisant.
L’intervention de l’État dans l’organisation des secteurs d’activité
soulève en effet d’importantes questions sur sa place dans l’économie.
Elle peut également contribuer à la marge à des situations où la pression
fiscale pesant sur certains secteurs d’activité est importante ou, le cas
échéant, au financement d’actions sectorielles communes inefficientes.
Une première option pourrait consister à transformer les actuelles
taxes affectées bénéficiant à des secteurs d’activité en contributions
volontaires obligatoires, sur le modèle du secteur agricole. Comme l’a
établi le premier chapitre, la frontière séparant les CVO des taxes
affectées aux CTI et aux comités professionnels de développement
économique CPDE semble peu pertinente, ces différents organismes
relevant d’une logique d’organisation sectorielle. Le recours aux CVO
reviendrait à rétablir un des moyens de financement initial des centres
techniques, en vigueur entre 1948 et 1959, avant que lui soit substitué une
taxe parafiscale.
Une telle évolution nécessitera cependant que soit clarifié le statut
juridique des CVO en droit communautaire (
cf. encadré 31 ci-après
).
Encadré 31 : Le statut des CVO
Les CVO constituent la principale source de financement des interprofessions agricoles.
L’intitulé paradoxal de ces prélèvements reflète l’ambiguïté de leur statut juridique. La
loi du 10 juillet 1975
141
relative à l’organisation interprofessionnelle agricole permet la
reconnaissance
par
arrêté
interministériel
du
groupement
des
organisations
professionnelles
les
plus
représentatives
d’une
filière.
Les
accords
que
les
interprofessions sont susceptibles de conclure, et le prélèvement des cotisations destinées
à les financer, peuvent ensuite être rendus obligatoires par arrêté interministériel pour
tous les acteurs de la filière
142
, dès lors qu’ils sont conformes aux objectifs définis dans
la loi.
Le terme
« volontaire » fait référence à l’accord interprofessionnel dans lequel les
organisations professionnelles s’engagent, de leur propre initiative, à mettre en
place une contribution
. Le terme
« obligatoire » rappelle que les dispositions de cet
accord sont étendues, généralement, à tous les membres concernés de la filière
, qui
ont alors l’obligation de s’en acquitter. L’arrêté de reconnaissance du ministre rend
obligatoire la cotisation prélevée ; pour autant, les ressources qui en résultent ne sont
jamais à la disposition des pouvoirs publics.
Dans une décision récente
143
, le Conseil constitutionnel a cependant jugé qu’elles ne
constituaient pas des impositions de toutes natures, en raison de leur objet, financer
l’organisation d’une activité privée.
141
Articles L. 632-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime.
142
Y compris les non adhérents d’une organisation membre de l’interprofession.
143
Décision n° 2011-221 QPC du 17 février 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
143
La Cour soulignait toutefois, dans son rapport public annuel de 2007 que «
les CVO
constituent un prélèvement obligatoire et l’État, qui leur confère ce caractère, doit en
garantir un emploi régulier, même si les interprofessions ne sont pas des établissements
publics sous tutelle
». Les CVO ont d’ailleurs fait l’objet de rapports successifs de la
Cour des comptes
144
, qui en a souligné l’ambiguïté et l’instabilité juridique. Elle avait
notamment relevé :
square4
le risque lié à l’absence de notification à la Commission européenne ;
square4
le flou de la rédaction de certains accords ;
square4
l’absence d’utilisation d’une partie des CVO collectées, venant abonder sans
nécessité les réserves financières déjà élevées des interprofessions agricoles.
L’instruction interministérielle du 15 mai 2007 a toutefois répondu à plusieurs des
observations de la Cour, en améliorant les procédures de prélèvement des CVO,
notamment :
square4
en imposant que les accords interprofessionnels détaillent de manière exhaustive les
actions financées par les CVO et se rattachent directement aux actions notifiées à la
Commission européenne ;
square4
en prévoyant la vérification des actions effectivement financées par CVO et
l’appréciation par l’administration de la cohérence du taux de cotisation avec la
nature des actions envisagées.
La
notification
des
CVO
à
la
Commission
européenne
est
intervenue
le
7 novembre 2008. La décision de la Commission européenne
145
confirme le caractère de
ressources publiques des CVO, au motif essentiel que ce type de cotisations nécessite un
acte d’autorité publique pour produire tous ses effets. La Commission a également
constaté que le financement de ce régime ne soulève pas d’objections du point de vue de
sa conformité avec le principe de non-discrimination et les règles de l’organisation
commune de marché (OCM). Elle a autorisé un régime-cadre d’aides financé par des
CVO jusqu’au 31 décembre 2013.
Cependant, par une décision du 29 juin 2011, la Commission a considéré que les CVO
prélevées au cours de la période 2004-2008 constituaient des taxes parafiscales et que les
actions financées par les CVO, étant sous le contrôle de l’État, constituaient des aides
d’État. La France a introduit un recours le 20 février 2009 contre la première décision de
la Commission, en faisant valoir qu’il s’agissait de cotisations de nature privée, et un
second recours en annulation le 9 septembre 2011, contre la dernière décision de la
Commission. Le Conseil d’État a posé une question préjudicielle à la Cour de justice des
communautés européennes le 28 novembre 2011, afin de déterminer si la décision
d’extension d’un accord interprofessionnel et l’institution d’une CVO était ou non
relative à une aide d’État
146
.
144
Rapport public annuel de 2007 sur le contrôle des interprofessions agricoles ;
rapport public de février 2008 sur les suites données aux observations et rapport
public annuel de 2010 sur les cotisations volontaires obligatoires prélevées par les
interprofessions agricoles.
145
Commission européenne, C(2008) 7846, Décision relative aux actions conduites
par les interprofessions, 10 décembre 2008.
146
La question est la suivante : «
l’article 107 du traité sur le fonctionnement de
l’Union européenne, lu à la lumière de l’arrêt du 15 juillet 2004 Pearle BV e.a.
(C-345/02), doit-il être interprété en ce sens que la décision d’une autorité nationale
étendant à l’ensemble des
professionnels d’une filière un accord qui, comme l’accord
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
144
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Au-delà des incertitudes existantes sur les conséquences en droit
communautaire de ces contributions, il importe de souligner que l’objet
de ces organismes relève d’une logique d’organisation sectorielle.
Une alternative à la transformation en CVO pourrait ainsi être, à
terme,
le remplacement des taxes affectées par des contributions
volontaires.
Cette évolution aurait le mérite de clarifier le statut de ces
taxes « sectorielles », conçues par les centres eux-mêmes comme des
droits de tirage individuels sur des prestations collectives, et de
responsabiliser ces organismes à l’égard de leurs ressources. L’État
n’ayant pas vocation à opérer une mutualisation forcée des moyens des
entreprises, un financement assuré par une cotisation volontaire, de nature
privée, impliquera, pour les cotisants rassemblés en professions, de
décider de leur emploi, sans que l’État en définisse l’utilisation. Une telle
évolution aurait également pour conséquence de transformer le statut des
affectataires, un contrôle de l’État n’étant plus pertinent.
Concernant les « quasi-redevances », leur transformation en
redevances aurait l’avantage de :
rhombus5
clarifier le champ de la fiscalité affectée ;
rhombus5
responsabiliser les agences prestataires de services à l’égard de
leurs usagers sans mobiliser le vecteur fiscal ;
rhombus5
renouer avec la logique économique qui prévaut dans un système
de redevance, en lien avec le service rendu.
Une telle transformation supposerait d’analyser précisément
chacune de ces ressources sous le prisme des critères dégagés par la
jurisprudence, afin d’assurer la sécurité juridique d’un financement par
redevance.
conclu au sein du comité interprofessionnel de la dinde française (CIDEF), institue
une cotisation dans le cadre d’une organisation interprofessionnelle reconnue par
l’autorité nationale et la rend ainsi obligatoire, en vue de permettre la mise en oeuvre
d’actions de communication, de promotion, de relations extérieures, d’assurance
qualité, de recherche, de défense des intérêts du secteur, ainsi que l’acquisition
d’études et de panels de consommateurs, est, eu égard à la nature des actions en
cause, aux modalités de leur financement et aux conditions de leur mise en oeuvre,
relative à une aide d’État ?
».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
145
III
-
La rationalisation de la fiscalité affectée
doit se traduire par une ambitieuse stratégie de
rebudgétisation, séquencée dans le temps
Dans le contexte budgétaire actuel, une rationalisation du champ
de la fiscalité affectée ne peut être qu’ambitieuse. Afin que le législateur
puisse opérer des choix et répartir cette ressource au mieux de l’intérêt
général, la fiscalité affectée doit ainsi faire l’objet d’une refonte fondée
sur la réaffirmation du principe d’universalité budgétaire. Le budget
général ayant vocation à recevoir l’ensemble des taxes et à financer toutes
les politiques publiques,
la fiscalité affectée ne peut donc être, par
principe, qu’une exception.
Proposition n° 4 : Rebudgétiser les taxes dont l’affectation n’est
pas justifiée
Le principe d’universalité budgétaire doit désormais être respecté
de manière rigoureuse. Il doit ainsi conduire, à terme, à rebudgétiser les
taxes qui ne correspondraient pas aux cas où une affectation peut se
justifier
(quasi-redevances ;
mutualisation
sectorielle ;
cotisation
assurantielle)
.
Une fois le rendement de la taxe réaffecté au budget
général, il n’y a plus de lien entre la taxe et l’entité, ce qui doit faciliter la
« justification au premier euro » de chaque dotation budgétaire et, le cas
échéant, permettre des économies budgétaires.
Plusieurs critères, non cumulatifs, permettent d’identifier les cas où
la dérogation au principe d’universalité budgétaire et l’affectation sont
manifestement injustifiées :
rhombus5
la taxe possède une logique subventionnelle et pourrait être
remplacée par une dotation budgétaire sans effet sur les actions
conduites par l’affectataire ;
rhombus5
elle est d’ores-et-déjà plafonnée ;
rhombus5
des dotations budgétaires sont perçues par l’affectataire, en plus
des ressources fiscales affectées, le plus souvent pour équilibrer
son budget ;
rhombus5
l’affectation a poursuivi un objectif de contournement des
contraintes budgétaires ;
rhombus5
la taxe affectée est un
impôt « de droit commun », national ou
local, sans lien avec l’activité de l’affectataire.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
146
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Déclinée de manière opérationnelle, la stratégie de rebudgétisation
pourrait s’organiser autour des préceptes suivants.
A - Si le principe d’une rebudgétisation doit être
rapidement décidé, celle-ci peut intervenir selon
un calendrier séquencé
Afin que la rebudgétisation soit effective, elle doit être à la fois
transversale et séquencée dans le temps.
Proposition n° 5 : Échelonner les opérations de rebudgétisation en
fonction des contraintes juridiques ou techniques qu’elles peuvent
soulever
D’une part, afin de ne pas cristalliser les oppositions individuelles
ou sectorielles, le principe d’une rebudgétisation doit être rapidement acté
pour l’ensemble des bénéficiaires de taxes affectées qui ne respecteraient
pas les critères précédemment mis en avant. D’autre part, le calendrier de
la rebudgétisation doit être échelonné en fonction des contraintes
techniques que peuvent poser certaines affectations :
rhombus5
dans les cas où les taxes sont collectées par l’affectataire (ou par un
tiers autre qu’une administration centrale de l’État), il convient de
s’interroger sur l’opportunité de confier la collecte à l’État
(
cf. infra
) ;
rhombus5
certaines taxes soulèvent une complexité juridique ou technique
particulière : par exemple, certaines d’entre elles déclenchent des
aides automatiques ; d’autres peuvent financer des structures
faisant l’objet d’un contentieux en cours, notamment du fait de
doutes sur leur compatibilité avec le droit communautaire ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
147
rhombus5
plus généralement, pour certains bénéficiaires de taxes, le principal
enjeu, au-delà des modalités de leur financement, porte sur
l’efficience de la politique suivie, parfois sur l’existence même de
cette politique ou sur la pertinence de la structure ou de son statut
juridique. Une rebudgétisation différée peut donc également se
justifier en cas de nécessité d’une réforme structurelle dépassant la
seule
problématique
du
financement
de
l’affectataire.
En
particulier, une réflexion sur le statut de certaines agences doit être
conduite. Comme le recommande le rapport de l’IGF sur les
agences de l’État de 2012, le recours au statut de service à
compétence nationale (SCN) permet de créer des structures, sans
personnalité morale, dédiées à une activité, dans des conditions
engendrant moins de frais de gestion et un contrôle accru de
l’administration
sur
les
politiques
menées.
Ce
statut
est
particulièrement bien adapté pour les agences de financement ou
les agences menant des interventions de guichet.
Encadré 32 : Avantages du statut de SCN par rapport
à celui d’établissement public
Il existe plusieurs avantages potentiels du recours à un SCN plutôt qu’à un
établissement public dans un certain nombre de cas :
square4
l’absence de personnalité morale et le rattachement du SCN aux services de
l’État peut constituer un atout pour la structure, qui peut disposer de ce fait
d’une légitimité accrue vis-à-vis de ses partenaires par rapport à celle d’un
établissement public distinct agissant pour son compte et engageant sa
personnalité juridique propre ;
square4
par ailleurs, le SCN présente des avantages en matière de mutualisation des
fonctions support (gestion des ressources humaines, services informatiques,
comptables et logistiques, achats…), puisque celles-ci sont assurées en
premier ressort par le ministère de rattachement. La transformation d’une
structure d’administration centrale en SCN n’entraîne pas, contrairement à
celle en établissement public, la création d’un fonds de roulement et
n’induit pas de coût de démutualisation ;
square4
enfin, d’un point de vue budgétaire, le statut de SCN facilite l’association de
ces structures aux efforts de rigueur (diminution des dépenses de
fonctionnement, respect des plafonds d’emploi). Leurs crédits et effectifs
leur sont délégués par leurs structures de rattachement ; ils n’ont ainsi pas la
possibilité de contourner les plafonds.
La prise en compte de différentes contraintes peut conduire à
séquencer les opérations de rebudgétisation :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
148
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
un premier groupe de taxes pourrait rapidement faire l’objet d’une
rebudgétisation dans une prochaine loi de finances. Ce groupe
serait constitué de taxes pour lesquelles une rebudgétisation dans le
budget général de l’État ne soulèverait pas de difficulté majeure ;
rhombus5
les autres taxes pourraient être rebudgétisées ultérieurement, une
fois procédé aux réformes nécessaires.
B - Plusieurs modalités de rebudgétisation
peuvent être envisagées
Proposition n° 6 : Envisager des rebudgétisations sous forme de
compte d’affectation spéciale ou de comptes de concours financier
Cette rebudgétisation peut néanmoins intervenir selon plusieurs
modalités différentes. La forme la plus simple de rebudgétisation consiste
en une affectation au budget général du produit de la taxe et au versement
d’une subvention pour charge de service public à l’ex-affectataire.
Toutefois, d’autres modalités de rebudgétisation peuvent être envisagées
(
cf. encadré 33 ci-après
) :
rhombus5
la création d’un compte d’affectation spéciale, lorsqu’un lien entre
la dépense et la recette existe ;
rhombus5
la création d’un compte de concours financiers, sur le modèle de ce
qui a été fait en 2012 pour les organismes de sécurité sociale.
En effet, pour certaines dépenses pour lesquelles on souhaiterait
politiquement
ou
techniquement
aménager
les
modalités
de
rebudgétisation,
une voie intermédiaire
entre la rebudgétisation et le
statu quo
peut être envisagée sous la forme d’une affectation interne au
budget de l’État. Cette solution, qui présente l’avantage de maintenir le
lien entre la recette et sa destination, permettrait également d’améliorer le
contrôle du Parlement sur ces dépenses et d’assurer un encadrement
budgétaire renforcé :
rhombus5
les budgets annexes et comptes spéciaux sont répartis en missions
et programmes dans la loi de finances et assortis d’obligations en
termes d’information proches de celles du budget général (projets
et rapports annuels de performance) ;
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
149
rhombus5
ils sont soumis à des règles budgétaires et comptables particulières,
qui se révèlent contraignantes : par exemple, si les comptes
d’affectation spéciale ne sont pas soumis à la norme de dépenses,
ils sont toutefois équilibrés en recettes et en dépenses par le
mécanisme de plafonnement des dépenses par les recettes, en vertu
de l’article 21 de la LOLF.
Encadré 33 : Caractéristiques des budgets annexes
et des comptes spéciaux
Les budgets annexes et les comptes spéciaux constituent des exceptions au principe
de non affectation du budget, puisqu’ils permettent d’affecter une recette à une
dépense particulière. Ils sont toutefois rassemblés avec le budget général dans la loi
de finances et constituent à ce titre un « aménagement » du principe d’unité.
Si leur nombre a considérablement diminué depuis la Seconde Guerre mondiale, la
LOLF en a maintenu la possibilité pour limiter les débudgétisations et le recours à
la création d’établissements publics, qui offrent moins de transparence et
d’informations au Parlement.
1/ Les budgets annexes
L’article 18 de la LOLF les a réservés aux services de l’État non dotés de la
personnalité morale et réalisant une production de biens ou de services donnant
lieu au paiement de prestations.
Demeurent seulement deux budgets annexes : celui des contrôle et exploitation
aériens et celui des publications officielles et information administrative. Seule la
loi de finances peut créer un budget annexe et lui affecter des recettes.
Les budgets annexes sont régis par des règles de présentation et de fonctionnement
particulières, reflétant leur activité économique et commerciale :
square4
ils comprennent une section des opérations courantes et une section des
opérations en capital ;
square4
ils fonctionnent avec des crédits limitatifs – qui ne peuvent être dépassés au-
delà du montant autorisé en loi de finances – auxquels s’applique la
fongibilité asymétrique ;
square4
ils sont présentés en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, et
sont répartis en programmes. Chaque budget annexe est assimilé à une
mission et fait l’objet d’un vote.
Leur comptabilité doit se rapprocher du plan comptable général. Ils doivent être en
équilibre comptable et affecter à leur désendettement les surplus de recettes
constatés au cours de l’exercice.
2/ Les comptes spéciaux
La LOLF a rationalisé les comptes spéciaux en en restreignant le nombre de
catégories à quatre, dans son article 19 :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
150
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
square4
les
comptes d’affectation spéciale (CAS)
concernent des opérations à
caractère définitif. Ils peuvent être d’une certaine importance financière
(pensions, participations financières de l’État) ou bien plus mineurs, mais
concerner
un
secteur
particulier
(services
nationaux
de
transport
conventionnés de voyageurs, engagements en faveur de la forêt dans le cadre
de la lutte contre le changement climatique). L’article 21 de la LOLF oblige à
ce que les recettes soient «
par nature, en relation directe, avec les dépenses
concernées
» ;
square4
les
comptes de commerce
«
retracent les opérations de caractère industriel
ou commercial effectuées à titre accessoire par des services de l’État
». La loi
de finances fixe un plafond de découvert et les prévisions de dépenses sont
évaluatives. Ils concernent, par exemple, des opérations de gestion de la dette
et de la trésorerie de l’État, les armées (approvisionnement en produits
pétroliers) ou les établissements pénitentiaires (cantine et travail des détenus
dans
le
cadre
pénitentiaire,
régie
industrielle
des
établissements
pénitentiaires) ;
square4
les comptes d’opérations monétaires
, et notamment le compte d’émission
des monnaies métalliques et celui des opérations avec le Fonds monétaire
international (FMI) ;
square4
les comptes de concours financiers
(CCF), qui regroupent les comptes de
prêts retraçant les opérations de prêts réalisées par l’État (il s’agit surtout de
prêts à des États étrangers réalisés dans le cadre de la politique commerciale
ou d’aide au développement) et les comptes d’avance retraçant les avances
faites par l’État à des collectivités, organismes ou personnes privées.
Les comptes spéciaux sont créés par la loi de finances. Ils ne peuvent comprendre
de dépenses de personnel. Les comptes dotés de crédits sont présentés par
programmes, gérés comme ceux du budget général. Pour les autres comptes, la loi
de finances fixe un plafond de découvert. Chaque compte est voté séparément et
est donc assimilé à une mission.
Compte tenu des spécificités des différents budgets annexes et
comptes spéciaux, seules deux formes de dispositifs présentés ci-dessus
pourraient être envisagées :
rhombus5
les CAS, qui permettent d’associer une recette particulière à une
dépense déterminée. Les CAS ayant vocation à se voir affecter des
recettes qui seraient «
par nature, en relation directe avec les
dépenses concernées
», ce dispositif ne pourrait bénéficier, sauf à
modifier la LOLF, qu’à un nombre restreint de cas particuliers ;
rhombus5
les CCF, et plus particulièrement les comptes d’avance, qui
permettent de retracer les avances faites par l’État à des tiers.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
151
C - Dans l’attente de leur rebudgétisation, les taxes
devraient faire l’objet d’un contrôle budgétaire
systématique
Pour les taxes n’étant pas rebudgétisées rapidement, en raison des
contraintes techniques précédemment explicitées, il existe un risque non
négligeable de
statu quo
.
Afin de limiter ce risque, il conviendrait, dès le prochain PLF, de
prévoir, d’une part, un contrôle du Parlement sur ces ressources fiscales
affectées et, d’autre part, d’acter très clairement le principe d’une
rebudgétisation.
Proposition n° 7 : Plafonner systématiquement les taxes dont la
rebudgétisation a été différée
Dans l’attente de leur rebudgétisation, le groupe de taxes n’étant
pas immédiatement plafonné pourrait être soumis au contrôle du
Parlement
via
un plafonnement systématique.
Ainsi, le plafonnement
pourrait devenir la règle
et concerner l’ensemble des taxes non
immédiatement rebudgétisées, y compris celles soulevant des difficultés
techniques.
Afin d’arrêter le principe d’une rebudgétisation, deux options
peuvent être envisagées.
Une première option pourrait consister à affecter ces taxes à
un CCF, ayant vocation à avancer aux affectataires le montant des taxes
qui leur était alloué. Une telle démarche aurait l’avantage d’acter,
juridiquement, le principe d’une rebudgétisation, tout en maintenant
temporairement un lien formel entre la taxe et son affectataire. Un compte
d’avance global, avec différents programmes, pourrait être créé à cet
effet :
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
152
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
la LFI pour 2013 a prévu la mise en place d’un compte de
concours financier spécialement dédié aux affectations de taxes
aux régimes de sécurité sociale, de manière à ce que les transferts
de TVA aux régimes soient désormais des transferts de TVA nette,
sans aucune référence spécifique à des recouvrements sur des
secteurs particuliers
147
;
rhombus5
dès lors que l’État avancerait aux agences concernées leurs
ressources, un tel compte serait juridiquement conforme à la
LOLF.
Cette solution intermédiaire constituerait une voie de transition,
avant une rebudgétisation des taxes affectées, permettant de les isoler
provisoirement au sein du budget de l’État. Toutefois, le risque existe
qu’une fois mise en oeuvre, une telle solution perdure dans le temps. Par
ailleurs, elle est complexe à mettre en oeuvre.
Proposition n° 8 : Prévoir, dans le prochain projet de loi de
finances, une rebudgétisation à effet différé pour les taxes non
immédiatement réaffectées au budget général
Une seconde option, plus satisfaisante, consisterait à prévoir, dans
le prochain PLF, que les taxes non immédiatement rebudgétisées le soient
avant une échéance fixée à l’avance (par exemple, le 1
er
janvier 2016)
148
.
L’inscription dans la loi d’une rebudgétisation à effet différé aurait
l’avantage d’être simple tout en lui conférant une contrainte juridique.
Cela implique néanmoins de la part du Gouvernement et du Parlement
une vigilance et une fermeté face au risque que certains secteurs aient le
temps de s’organiser pour contester cette rebudgétisation.
147
L’article L. 241-2 du code de la sécurité sociale modifié prévoit l’affectation à la
caisse nationale de l’assurance maladie des montants de TVA nette encaissés par
l’État à compter du 1er janvier 2013. Cette fraction s’applique aux encaissements de
taxe sur la valeur ajoutée, nets des remboursements et restitutions y afférents.
L’objectif du compte de concours financiers est de retracer les avances à l’ACOSS de
cette fraction des encaissements nets de TVA budgétaire.
148
Légistiquement, cette proposition pourrait prendre la forme d’un article dans le
PLF : «
les taxes affectées mentionnées en annexe de la présente loi de finances seront
réaffectées au budget général avant le 1
er
janvier 2016
».
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
153
D - La collecte doit être organisée par l’État,
sauf si l’affectataire est plus efficient
Le recouvrement de ressources fiscales par son affectataire met les
tutelles en situation d’asymétrie d’information et peut donner à
l’affectataire le sentiment que la ressource fiscale constitue une ressource
propre.
Proposition n° 9 : Confier la collecte des taxes aux administrations
de l’État, sauf si la collecte par l’affectataire s’avère plus efficiente
Le recouvrement ne doit donc pas, par principe, être effectué par
les organismes eux-mêmes mais par une administration de l’État, sauf s’il
est démontré que le recouvrement est effectué de manière plus efficiente
par l’entité. Un tel examen nécessitant des travaux complémentaires, il
pourrait contraindre à retarder certaines rebudgétisations.
Proposition n° 10 : Rendre obligatoire le transfert annuel des
bases fiscales aux tutelles techniques et financières en cas de
maintien d’une taxe affectée ou du maintien de sa collecte par une
agence
À défaut de recouvrement par une administration de l’État, la
transmission annuelle des bases de données de recouvrement aux tutelles
techniques et financières doit être rendue obligatoire. Une telle
transmission permettra à l’administration centrale de disposer d’un
pouvoir de contre-expertise des prévisions de produits établies par les
organismes bénéficiant de taxes affectées, et partant d’améliorer
l’information du Parlement et la sincérité des prévisions budgétaires.
E - Dans les cas où une taxe affectée est maintenue, des
modalités de contrôle strictes doivent être
mises en place
Pour les ressources qui resteraient affectées, un contrôle de leur
évolution apparaît nécessaire, afin de limiter le risque de dépense
inefficiente ou une pression fiscale excessive.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
154
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Proposition n° 11 : Mettre en place des instruments de contrôle
budgétaire
pour
maîtriser
l’évolution
des
ressources
qui
resteraient affectées
Parmi les instruments de régulation, le plafonnement des
affectations et la mise en place d’un contrôle financier approfondi
peuvent être envisagés.
Le plafonnement deviendrait ainsi la règle, et
non l’exception
.
F - La suppression de certaines taxes de petite taille à la
collecte coûteuse, ou de certaines taxes particulièrement
distorsives, peut être envisagée
Proposition n° 12 : Envisager la suppression de certaines « micro
taxes » ou de certaines taxes particulièrement distorsives
Le faible rendement d’une taxe, son coût de collecte élevé ou son
caractère distorsif ne sont pas les seuls éléments d’analyse permettant de
justifier la suppression d’une taxe. En effet, certaines taxes, d’un faible
rendement, peuvent se justifier en raison de leur caractère symbolique
particulier ; de même, certaines taxes sont délibérément distorsives (par
exemple, les taxes comportementales).
Dans un souci de simplification, la suppression de certaines taxes
pourrait cependant pouvoir être envisagée ; par exemple, une suppression
pourrait intervenir lorsque :
rhombus5
d’une part, les taxes ont un caractère purement subventionnel ;
rhombus5
d’autre part, que leur rendement apparaît insuffisant, ou que leur
coût de collecte est disproportionné, ou qu’elles sont distorsives
149
.
Une telle évolution devrait néanmoins se faire à coût constant pour
les finances publiques : les taxes ainsi supprimées, qui seraient
remplacées par des dotations budgétaires, seraient en effet soit gagées par
des économies réalisées sur la mission budgétaire de rattachement, soit
149
Par exemple, l’IGF recommandait en 2012 la suppression de la contribution des
établissements de santé et médico-sociaux bénéficiant au centre national de gestion
(10 M€) et son remplacement par une dotation de la CNAM en raison du coût de
gestion de cette taxe (source :
L’État et ses agences : le cas des agences
de la santé et
du secteur médico-social
, rapport IGF n° 2011-M-044-03, février 2012).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
155
financées par des augmentations de taxes bénéficiant au budget général
de l’État.
G - Une rebudgétisation ambitieuse invite à repenser
la norme de dépense
La stratégie de rebudgétisation décrite ci-dessus aura des effets
contraires sur la norme budgétaire
:
rhombus5
la partie non efficiente des dépenses discrétionnaires des entités
aujourd’hui financées par taxes affectées serait plus facilement
réduite en cas de rebudgétisation. Pour cette catégorie de dépenses,
une rebudgétisation permettrait donc de réduire la contrainte pesant
sur la norme ;
rhombus5
inversement, une rebudgétisation des dépenses de guichet
automatiques, souvent dynamiques, augmenterait la dépense prise
en compte par la norme. Pour que l’objectif fixé par la norme soit
maintenu, la dynamique des dépenses rebudgétisées devrait être
compensée par des économies sur d’autres postes budgétaires.
En cas de mise en oeuvre de la stratégie de rationalisation proposée
par le Conseil des prélèvements obligatoires, des effets se feront
nécessairement sentir sur la norme.
Proposition n° 13 : Mettre en cohérence la norme de dépense avec
la stratégie de rebudgétisation proposée
Pour être un plein instrument de maîtrise de la dépense publique, la
norme gagnerait à s’appliquer sur une assiette aussi large que possible,
comprenant des dépenses pilotables par l’État. Pour autant qu’elle soit
souhaitable, une rebudgétisation importante nécessite donc de repenser la
norme budgétaire en fonction de la nouvelle assiette de dépenses sur
laquelle elle s’appliquera.
H - À moyen terme, une modification de la LOLF
permettrait de mieux encadrer les affectations externes
au budget général
La multiplication du nombre d’agences ou d’entités financées par
taxe
affectée
ne
s’explique
pas
seulement
par
le
mouvement
« d’ agencisation » de l’action publique, par la recherche d’une plus
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
156
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
grande efficience des politiques publiques ou par des justifications de
nature économique. Il apparaît en effet que le développement de la
fiscalité affectée s’explique, en grande partie, par un environnement
juridique, budgétaire et comptable favorable.
Fréquemment motivée par des raisons d’ordre budgétaire,
l’affectation de ressources fiscales a, en effet, été facilitée par un
encadrement juridique et budgétaire peu contraignant. En particulier, la
LOLF prévoit un encadrement assez souple du recours à la fiscalité
affectée, qui contraste avec les contraintes dont elle entoure les
affectations internes au budget de l’État.
Proposition n° 14 : Modifier l’article 2 de la loi organique de
manière à limiter les possibilités d’affectation externe au budget
général
Une modification de l’article 2 de la LOLF pourrait être envisagée,
afin de circonscrire plus précisément les dérogations au principe
d’universalité budgétaire, aujourd’hui limitée de manière peu restrictive
«
à raison des missions de service public
» des tiers affectataires.
Celle-ci pourrait permettre de faire du principe d’universalité
budgétaire la règle, en encadrant très strictement le « flux » de taxes
affectées
150
. Une telle modification supposerait toutefois de s’interroger
plus largement sur les autres types d’affectations de ressources fiscales, à
la sécurité sociale et aux collectivités locales.
Par ailleurs, la LOLF pourrait également être complétée afin de :
rhombus5
prévoir un vote annuel des taxes affectées en dehors du budget
général (
cf. supra
) ;
rhombus5
rendre obligatoire la création d’éventuelles nouvelles affectations
exclusivement en loi de finances.
150
Légistiquement, ce principe pourrait se traduire par une modification de l’article 2
alinéa 2 de la LOLF aujourd’hui rédigé ainsi :
« Les impositions de toute nature ne
peuvent être directement affectées à un tiers qu'à raison des missions de service
public confiées à lui et sous les réserves prévues par les articles 34, 36 et 51
. ».
Un
élément de phrase pourrait ainsi être ajouté pour préciser après «
missions de service
public confiées à lui » « et sous la condition que… »
.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
157
IV
-
La mise en oeuvre opérationnelle de la
stratégie proposée par le Conseil des prélèvements
obligatoires conduit à distinguer deux mouvements
de rebudgétisation
A - Les taxes affectées entrant dans le périmètre de la
demande du Premier ministre ont fait l’objet d’une
analyse détaillée
À partir de la liste des taxes affectées aux agences de l’État, aux
chambres consulaires, aux organismes techniques et professionnels et aux
dispositifs de péréquation, le Conseil des prélèvements obligatoires a
cherché à traduire, de manière opérationnelle, les effets de sa stratégie de
rationalisation de la fiscalité affectée. Chaque taxe et chaque affectataire
ont ainsi fait l’objet d’un examen précis :
rhombus5
les objectifs poursuivis par la taxe ont été analysés, à partir des
critères précédemment établis (logique « subventionnelle » de la
taxe ; quasi-redevance ; mutualisation sectorielle ; mécanisme
assurantiel). La logique subventionnelle de la taxe a, en particulier,
été objectivée par un faisceau d’indices
151
;
rhombus5
les taxes finançant des politiques en marge des compétences de
l’État ont été identifiées (celles-ci peuvent relever des prérogatives
des collectivités locales ou des organismes de sécurité sociale ;
conformément à la lettre du Premier ministre, le Conseil n’a pas
formulé de recommandation à leur sujet) ;
151
Des dotations budgétaires sont perçues par l’affectataire, en plus de ressources
fiscales affectées, le plus souvent pour équilibrer son budget ; la taxe est d’ores-et-
déjà plafonnée ; l’affectation a poursuivi un objectif de contournement des contraintes
budgétaires ; la taxe affectée est un impôt « de droit commun », sans lien avec son
activité.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
158
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
rhombus5
les difficultés juridiques ou techniques qui pourraient contraindre
une rebudgétisation rapide ont été recensées. Au-delà des
situations dans lesquelles l’impôt présente intrinsèquement une
complexité importante, il s’agit, pour l’essentiel, de situations où la
collecte est réalisée par l’affectataire ou par un tiers
152
et, surtout,
de situations dans lesquelles la problématique principale est
davantage celle d’une refonte de politique publique (voire de
l’existence de l’agence) que celle de ses modalités de financement.
Pour formuler un tel diagnostic, les audits mentionnés pour
l’examen de l’efficience des dépenses financées par taxes affectées
ont été utilisés (
cf. annexe III
).
Cette analyse a permis de répartir les taxes affectées en cinq
groupes
153
(
cf. annexe II
):
rhombus5
le
premier groupe
est constitué des taxes pouvant être rapidement
rebudgétisées ;
rhombus5
le second groupe
est constitué des taxes ayant vocation, après
réforme structurelle ou clarification des modalités de leur collecte,
à être rebudgétisées au budget général. Dans l’attente de leur
rebudgétisation, elles peuvent faire l’objet d’un plafonnement ;
rhombus5
le troisième groupe
est constitué des taxes pouvant faire l’objet
d’une rebudgétisation plus souple
via
un compte spécial ;
rhombus5
le quatrième groupe
est constitué des taxes restant affectées mais
étant plafonnées (taxes affectées aux agences relevant d’une
logique de quasi-redevances ou assurantielle, taxes affectées aux
organismes techniques ou professionnels)
;
rhombus5
le cinquième groupe
est constitué de taxes pour lesquelles des
propositions d’évolution ne sont possibles qu’après clarification du
rôle de la structure ou de son positionnement par rapport à l’État.
Parmi les taxes analysées par le Conseil, certaines d’entre elles
doivent être mentionnées, en raison des problèmes particuliers qu’elles
soulèvent :
rhombus5
certaines affectations présentent une sensibilité particulière
;
leurs enjeux impliquent néanmoins qu’elles doivent faire l’objet, à
moyen terme, d’un traitement adapté, le
statu quo
actuel n’étant
pas satisfaisant ;
152
Pour ces affectataires, un examen de l’opportunité d’un transfert de la collecte à
une administration fiscale doit donc être entrepris.
153
Afin de ne pas rigidifier la liste des taxes dont la suppression serait envisageable et
de laisser au Gouvernement et au Parlement toute latitude en la matière, le Conseil n’a
pas souhaité faire de propositions de suppression de taxes affectées.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
159
Encadré 34 : Le CNC, les agences de l’eau et les chambres consulaires
1/ Le CNC
, qui bénéficie de six affectations selon l’annexe budgétaire des
« voies et moyens », est probablement l’affectataire qui soulève le plus de
difficultés politiques : d’une part, le CNC est emblématique des dérives
engendrées par la fiscalité affectée, cet établissement ayant connu une
augmentation de ses ressources de près de 250 M€ en 3 ans ; d’autre part, la
politique qu’il finance bénéficie de relais institutionnels et médiatiques
puissants. Les difficultés posées par le CNC sont également techniques :
square4
les taxes qu’il perçoit ne relèvent pas toutes de la même logique ; si la
TST « distributeurs » possède une logique « subventionnelle », il n’en
est
pas
de
même
des
cotisations
versées
par
les
entreprises
cinématographiques, qui relèvent d’une logique sectorielle ;
square4
le CNC collecte certaines des taxes qui lui sont affectées ;
square4
certaines taxes déclenchent automatiquement des aides, et ne peuvent
donc pas être rebudgétisées mécaniquement, sans une évolution des
modalités d’intervention de l’établissement ;
square4
enfin, comme le soulignait le rapport précité de la Cour des comptes, le
secteur du cinéma bénéficie d’un financement abondant via une
multitude de guichets (SOFICA, collectivités territoriales etc.) et
d’obligations juridiques d’investissement (diffuseurs).
Dans ce contexte, il apparaît important, avant de modifier les modalités de
financement du CNC, de remettre à plat ses modalités d’intervention et de les
articuler, plus généralement, avec les autres dispositifs publics en faveur du
cinéma. Dans le schéma esquissé par le Conseil des prélèvements
obligatoires, ne resteraient à terme affectées au CNC que ses taxes
« historiques » (cotisations des professionnels et taxe sur le prix des entrées
aux
séances
organisées
dans
les
établissements
de
spectacles
cinématographiques). Dans l’attente de la mise en oeuvre de ce schéma,
toutes les taxes affectées du CNC seraient plafonnées.
2/ Les agences de l’eau,
dont l’origine remonte aux années 1960, bénéficient
de plus de dix contributions pour un rendement total particulièrement
important et dynamique (plus de 2 Md€ par an, + 17% depuis 2007). Alors
que les enjeux judiciaires de la politique de l’eau sont particulièrement
importants en droit communautaire, celle-ci a été jugée inefficace et
inefficiente par de nombreux rapports d’évaluation
154
. En dépit des montants
considérables alloués aux agences, la qualité des eaux reste insuffisante ; les
agences allouent leurs aides de manière automatique, selon une logique de
guichet ne visant pas à l’efficience ; l’État ne pèse que marginalement sur
leurs décisions ; d’importantes inégalités de pratiques apparaissent d’un
bassin à l’autre ; la forte croissance des taxes affectées pèse sur le pouvoir
154
Cf. par exemple
Rapport public annuel : Les instruments de la gestion durable de
l'eau
, Cour des comptes, 2010.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
160
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
d’achat du contribuable local ; enfin, les contributions perçues par les
agences ne s’inscrivent pas dans une logique pollueur-payeur.
Au-delà de ces critiques traditionnelles contre la politique des agences, des
difficultés techniques justifient que leurs ressources ne soient pas
rebudgétisées immédiatement : d’une part, la fiscalité affectée aux agences
est complexe (plus d'une dizaine de taxes avec un pouvoir de taux local) ;
d’autre part, la gouvernance des agences repose sur un équilibre subtil au sein
des comités de bassin, où l’État est minoritaire. Par conséquent, l'enjeu est
davantage celui d'une restructuration de la politique de l’eau et de l’existence
des agences dans leur forme actuelle, que des modalités de financement.
Dans l’attente d’une telle réforme, les contributions pourraient être
plafonnées afin de réduire la pression fiscale locale ; à moyen terme, une fois
restructurée la politique de l'eau, une rebudgétisation au sein du budget
général peut être envisagée, la politique de l’eau étant une prérogative de
l’État
155
.
3/ Les chambres consulaires
soulèvent d’importantes difficultés pour les
finances publiques (leurs ressources, particulièrement dynamiques, ont
augmenté de 18% depuis 2007) ; faute d’une comptabilité analytique et d’une
présence de l’État au conseil d’administration des chambres, l’utilisation de
ces ressources affectées, qui ont vocation à financer leurs seules missions
d’intérêt général, est mal connue.
À moyen terme, les taxes perçues par les chambres étant des impôts locaux
(TA-CVAE et TA-CFE), il pourrait être envisagé de les transférer aux
collectivités territoriales ; symétriquement, l’État réduirait ses concours
financiers aux collectivités territoriales d’un même montant, et verserait aux
chambres consulaires une subvention budgétaire pour leur permettre
d’assurer leurs missions d’intérêt général. Une telle évolution impliquerait
néanmoins de rénover la gouvernance des chambres, de leur donner une
visibilité pluriannuelle sur ces ressources budgétaires et de mettre en place
une comptabilisation analytique de leurs activités.
rhombus5
certaines entités pourraient voir leur statut évoluer
pour gagner
en cohérence, en particulier les « agences de financement » ou
agences « transparentes » ;
155
Cette rebudgétisation serait conforme aux orientations communautaires dès lors
qu’elle continuerait, au sein du budget général, de financer l’ensemble de la politique
de l’eau.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
161
Encadré 35 : L’évolution des agences qualifiées de transparentes
Si le Conseil n’a pas procédé à un recensement de toutes les agences
transparentes (
cf. supra pour la définition de ce concept
), il propose néanmoins
quelques évolutions pour des cas recensés par l’IGF dans son rapport précité
sur les agences.
1/ L’AFITF
, qui finance la part « État » des infrastructures de transport, est
une agence transparente dont l’existence sous forme d’établissement public et
le financement par taxes affectées ont contribué à une impasse budgétaire
massive (
cf. supra
). Par ailleurs, l’AFITF bénéficie pour une large part de
recettes affectées transitant par un CAS et de dotations budgétaires – ses
ressources affectées ont donc un caractère subventionnel important. Enfin, la
problématique
de
l’AFITF
s’inscrit
plus
largement
dans
celle
des
investissements en matière d’infrastructures de transport
156
qui se caractérise
par une faible prise en compte de l’évaluation socio-économique et l’absence
d’une hiérarchisation entre les différents projets d’investissement.
Dans ce contexte, une évolution de l’AFITF pourrait être envisagée à moyen
terme : d’une part, l’agence pourrait être transformée en un SCN doté, le cas
échéant, d’un comité de gestion qui rassemblerait, en plus des tutelles
administratives, des élus et des personnalités qualifiées ; d’autre part, une
rebudgétisation des taxes affectées à l’AFITF permettrait au Parlement de
reprendre le contrôle des engagements de cette entité. Cette rebudgétisation
pourrait, si la LOLF était modifiée, prendre éventuellement la forme d’un CAS
ad hoc
moins contraignant quant à l’équilibre prévu par l’article 21 de la LOLF
entre les recettes constatées et les dépenses ordonnancées.
2/ Concernant le fonds CMU et le fonds de solidarité
, qui ont pu être
ponctuellement bénéficiaires de dotations d’équilibre versées par l’État, un
rattachement sous forme de SCN est également envisageable, conformément
aux recommandations de l’IGF (le fonds CMU pourrait ainsi être rattaché à la
DSS ; pour sa part, le fonds de solidarité pourrait, par exemple, être rattaché à
la DGEFP). Un CAS pourrait éventuellement être constitué pour chacune de
ces deux structures.
rhombus5
la question du maintien de certaines entités,
dont l’existence
même a pu être contestée, doit être posée ;
Encadré 36 : La CGLLS et le FNPCA
1/
La question de l’opportunité du maintien de
la CGLLS
a été soulevée dans
des audits récents, en raison de doutes sur l’utilité de sa mission de garantie et
de la difficulté, pour l’État, à mettre en adéquation la politique d’aide aux
offices en difficulté de la CGLLS avec ses propres objectifs en matière de
156
Cf. par exemple
Mission d’évaluation des partenariats public-privé (PPP)
, rapport
n° 2012-M-027-02 de l’inspection générale des finances,
décembre 2012.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
162
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
logement social (
cf. supra
). Au-delà de l’évolution de ses modalités de
financement, l’État devrait donc s’interroger sur les objectifs qu’il souhaite
assigner à cette structure, dont le budget s’élève à près de 350 M€. Plus
généralement, l’État devrait s’interroger sur les modalités de financement de la
politique du logement, particulièrement complexes.
Plusieurs scénarios d’évolution peuvent être envisagés pour la CGLLS ; par
exemple :
square4
une suppression de l'entité, dont le stock résiduel de garanties pourrait être
géré (en extinction) par la caisse des dépôts. Symétriquement, les
cotisations prélevées sur le monde HLM pourraient être affectées à
l’ANRU et la taxe sur les plus-values de cession d’immeubles (TVI)
rebudgétisée ;
square4
une suppression de l'activité de garantie et une évolution, hors de la tutelle
de l'État, de l'activité d'aide (logique de contribution volontaire, avec
néanmoins un contrôle sous forme de plafonnement) ; parallèlement, la
TVI serait rebudgétisée.
Quelle que soit l’évolution retenue pour la CGLLS, la TVI, qui est une taxe
de « droit commun » pourrait être, pour sa part, rebudgétisée rapidement.
2/
La nature des activités du
FNPCA
(achats d’espaces publicitaires,
sponsoring
, etc.), qui le situe aux confins des missions de service public,
conduit à s’interroger sur la pertinence de la présence de l’État dans une telle
entité – voire sur son existence même. Dans ce contexte, l’État pourrait :
square4
soit chercher à rapprocher le fonds d’une entité appartenant à la sphère de
l’artisanat (en particulier, l’agence pour la création d’entreprises (APCE),
qui exerce déjà une mission d’information, notamment auprès des jeunes,
sur les possibilités de formation et de création d’entreprises, ou
l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat
(APCMA), qui exerce également une mission de communication) ;
square4
soit désengager l’État de cette activité, en supprimant le fonds et la taxe
dont il bénéficie.
Dans un premier temps, la taxe bénéficiant au FNPCA pourrait être
rapidement rebudgétisée compte tenu de ses faibles enjeux budgétaires et de
son plafonnement.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
163
rhombus5
enfin, certaines entités conduisent des politiques publiques aux
frontières des missions de l’État,
ce qui interroge davantage sur
le rôle de l’État en leur sein que sur les modalités de financement
de ces structures. Ainsi, pour la CNSA, la question de son
évolution en organisme de sécurité sociale peut être posée. Dans le
cas où celle-ci deviendrait la 5
ème
branche de la sécurité sociale, un
maintien de la structure se justifierait ; dans le cas contraire, un
compte spécial pourrait être créé pour rassembler les différentes
sources de financement allouées par l’État à la dépendance. Pour
les établissements publics fonciers (EPF), la question du rôle de
l’État par rapport aux collectivités locales se pose également, ainsi
que celle du contrôle de la dépense de ces entités, dont la
dynamique
est
très
importante
depuis
2007
(+ 100% depuis cette date, avec plus de 440 M€ de taxes affectées
en
2013)
157
.
Pour
ces
deux
types
d’affectataires,
une
rebudgétisation ne peut pas être envisagée à court terme, une
réflexion préalable sur le rôle de l’État devant être conduite ; tout
au plus, pour les EPF, un plafonnement décliné par établissement
peut être envisagé à court terme.
B - Une réforme en deux étapes doit permettre de
rationaliser de manière ambitieuse mais réaliste la
fiscalité affectée
La première étape
de la réforme consisterait à rebudgétiser
rapidement plusieurs taxes et à généraliser, sans difficulté majeure, le
plafonnement :
rhombus5
33 taxes, d’un rendement agrégé total de plus de 2,2 Md€,
pourraient ainsi être rapidement rebudgétisées.
Ces taxes
affectées à des agences de l’État ne soulèvent pas de difficultés
particulières quant à leur rebudgétisation rapide, la plupart d’entre
elles étant par ailleurs déjà plafonnées ;
rhombus5
la
généralisation
du
plafonnement,
pour
les
taxes
non
immédiatement rebudgétisées, se traduirait pour sa part par le
plafonnement de 127 nouvelles taxes (dont les 32 TSE perçues par
des EPF et les 56 CVO), pour un rendement total de 5,9 Md€.
157
Le plafonnement actuel, prévu par le CGI dans la limite de 20 € par habitant,
semble insuffisamment contraignant pour limiter la pression fiscale locale.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
164
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Une deuxième étape,
qui interviendrait après des analyses
complémentaires approfondies et des réformes juridiques, techniques et
organisationnelles, consisterait à achever la rationalisation de la fiscalité
affectée
(
cf. tableau 34 ci-après
)
:
Tableau 34 : Synthèse des évolutions proposées
Mesures
Nombre de taxes concernées et montants
Court terme
Remplacement
de la taxe par une
dotation
budgétaire
square4
33 taxes
square4
2,2 Md€
Plafonnement
square4
127 nouveaux plafonnements
square4
5,9 Md€
Moyen terme
Remplacement
de la taxe par une
dotation
budgétaire
square4
42 taxes
square4
13,9 Md€
Rebudgétisation
via
un compte
spécial
square4
5 taxes
square4
6,2 Md€
Ressources restant affectées mais
étant plafonnées
square4
135 taxes
square4
3,3 Md€
Taxes pour lesquelles la question
de l’affectation, de la
rebudgétisation ou de la
suppression ne peut être
déterminée qu’après réforme
square4
3 taxes et les TSE
square4
3,1 Md€
Source : Conseil des prélèvements obligatoires
rhombus5
l
es
taxes
pour
lesquelles
la
dérogation
au
principe
d’universalité budgétaire n’est pas justifiée
158
ont vocation,
après réforme structurelle ou clarification des modalités de leur
collecte, à être remplacées par des dotations budgétaires. Il s’agit
de 32 taxes affectées à des agences de l’État (5,6 Md€), de 6 taxes
affectées à des chambres consulaires (1,9 Md€) et de 4 taxes
affectées à des dispositifs de solidarité (6,3 Md€) ;
rhombus5
5 taxes sont affectables à un compte spécial
(6,2 Md€)
159
;
158
Conformément aux critères précédemment définis, il s’agit des taxes n’entrant ni
dans une logique de quasi-redevance, ni de ressource sectorielle, ni de cotisation de
type assurantielle.
159
Pour la CSPE, un rattachement à un CAS est envisageable dès 2014.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
165
rhombus5
les autres taxes restent affectées mais sont plafonnées
: il s’agit
pour l’essentiel des taxes affectées aux agences relevant d’une
logique de quasi-redevances ou assurantielle (67 taxes, pour un
rendement de 2 Md€) et des taxes affectées aux organismes
techniques ou professionnels (68 taxes, 1,3 Md€).
Conformément à
l’évolution décrite précédemment, ces ressources perdraient à
terme leur caractère fiscal et deviendraient, selon les cas, des
quasi-redevances, des contributions obligatoires ou des cotisations
assurantielles ;
rhombus5
enfin, la question de l’affectation, de la rebudgétisation ou de la
suppression de certaines taxes ne peut être tranchée qu’après une
clarification du rôle de l’affectataire ou de son positionnement par
rapport à l’État. Pour certaines de ces taxes, un plafonnement peut
néanmoins être temporairement envisagé.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Conclusion
L’affectation de ressources fiscales est une dérogation au principe
d’universalité budgétaire qui peut, dans certains cas, être justifiée par des
motifs économiques ou des impératifs de bonne gestion publique. Tel est
le cas des quasi-redevances, des ressources répondant à une logique de
mutualisation sectorielle ou s’apparentant à des cotisations assurantielles.
Le récent foisonnement des taxes affectées montre cependant que
l’affectation n’a répondu, dans la plupart des cas, à aucun de ces motifs. Il
s’explique principalement par le souhait de contourner les contraintes
budgétaires, traduisant ainsi des phénomènes de débudgétisation.
Compte tenu de son ampleur, la fiscalité affectée se révèle
coûteuse pour les finances publiques. Son évolution dynamique rend ce
mécanisme de financement particulièrement inflationniste ; par ailleurs,
son absence de contrôle par le Parlement porte non seulement atteinte au
fondement de la démocratie parlementaire mais s’oppose également à la
nécessité d’une gestion rigoureuse des deniers publics, particulièrement
en période de crise budgétaire.
Dans ce contexte, une réforme de la fiscalité affectée est
indispensable, sans qu’elle implique nécessairement la remise en cause
des diverses politiques publiques qu’elle finance. Le Conseil des
prélèvements obligatoires recommande ainsi la mise en oeuvre rapide
d’une rationalisation de la fiscalité affectée, fondée sur une réaffirmation
du principe d’universalité budgétaire. Si l’affectation peut être justifiée
dans certains cas, une stratégie de rebudgétisation, déclinée de manière
opérationnelle en deux étapes, est indispensable. Sa mise en oeuvre
permettra de mieux cadrer avec le financement des politiques publiques,
de renforcer le rôle du Parlement et de donner à l’État un levier efficace
pour réaliser des économies.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Synthèse des propositions
Proposition n° 1
: Disposer d’un véritable instrument de pilotage de la
fiscalité affectée, en professionnalisant la collecte des données et en
enrichissant les annexes budgétaires
Proposition n° 2
: Prévoir chaque année, en loi de finances initiale, une
autorisation d’affectation pour l’ensemble des taxes affectées
Proposition n° 3
: Clarifier, à terme, le statut des quasi-redevances, des
prélèvements sectoriels et des contributions assurantielles
Proposition n° 4
: Rebudgétiser les taxes dont l’affectation n’est pas
justifiée
Proposition n° 5
: Échelonner les opérations de rebudgétisation en
fonction des contraintes juridiques ou techniques qu’elles peuvent
soulever
Proposition n° 6
: Envisager des rebudgétisations sous forme de compte
d’affectation spéciale ou de comptes de concours financier
Proposition n° 7
: Plafonner systématiquement les taxes dont la
rebudgétisation a été différée
Proposition n° 8
: Prévoir, dans le prochain projet de loi de finances, une
rebudgétisation à effet différé pour les taxes non immédiatement
réaffectées au budget général
Proposition n° 9
: Confier la collecte des taxes aux administrations de
l’État, sauf si la collecte par une agence s’avère plus efficiente
Proposition n° 10
: Rendre obligatoire le transfert annuel des bases
fiscales aux tutelles techniques et financières en cas de maintien d’une
taxe affectée ou du maintien de sa collecte par une agence
Proposition n° 11
: Mettre en place des instruments de contrôle
budgétaire pour maîtriser l’évolution des ressources qui resteraient
affectées
Proposition n° 12
: Envisager la suppression de certaines « micro taxes »
ou de certaines taxes distorsives
Proposition n° 13
: Mettre en cohérence la norme de dépense avec la
stratégie de rebudgétisation proposée
Proposition n° 14
: Modifier l’article 2 de la loi organique de manière à
limiter les possibilités d’affectation externe au budget général
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Annexe I
Lettre du Premier ministre
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
172
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
173
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Annexe II
Détail des évolutions proposées pour
les taxes affectées relevant du périmètre de la
demande du Premier ministre
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Tableau 35 : Évolutions envisageables pour les agences de l’État
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Agence de
financement
des
infrastructures
de transport de
France
Solde des produits des
amendes forfaitaires
des radars
automatiques non
affectés au CAS
"Contrôle de la
circulation et du
stationnement
routiers"
article 24 de la
loi n° 2011-
900 du 29
juillet 2011 de
finances
rectificative
pour 2011
204
x
x
x
Agence de
financement
des
infrastructures
de transport de
France
Taxe due par les
concessionnaires
d'autoroutes
article 302 bis
ZB du code
général des
impôts
564
x
x
x
Agence de
financement
des
infrastructures
de transport de
France
Taxe forfaitaire sur le
produit de la
valorisation des
terrains nus et
immeubles bâtis
résultant de la
réalisation
d'infrastructures de
transport collectif en
site propre ou
d'infrastructures
ferroviaires hors Ile-
de-France
article
1531
du code
général des
impôts
NS
x
x
x
Agence de
gestion et de
recouvrement
des avoirs saisis
et confisqués
Part du produit de la
vente des biens
confisqués lorsque
l’agence est intervenue
pour leur gestion ou
leur vente
article 706-163
de la loi 2010-
768 du 9 juillet
2010; art. 75
de la LFI pour
2011
NS
x
Agence de
l'environnement
et de la maîtrise
de l'énergie
Taxe générale sur les
activités polluantes
article 266
sexies du code
des douanes
499
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Agence de
services et de
paiement
Taxe sur la cession à
titre onéreux des
terrains nus ou des
droits relatifs à des
terrains nus rendus
constructibles du fait de
leur classement
article 1605
nonies du code
général des
impôts
20
x
Agence
nationale de
l'habitat
Taxe annuelle sur les
logements vacants
article 232-I et
suiv. du code
général des
impôts
21
x
Agence
nationale de
sécurité
sanitaire, de
l'alimentation,
de
l'environnement
et du travail
Redevances biocides
(Rémunération due au
titre de l'autorisation de
mise sur le marché des
substances et produits
biocides )
article L. 522.8
du code de
l'environnement
1
x
x
Agence
nationale de
sécurité
sanitaire, de
l'alimentation,
de
l'environnement
et du travail
Fraction de la taxe
additionnelle à
l'imposition forfaitaire
des entreprises de
réseaux des Stations
Radio
article 235 ter Z
du code général
des impôts
2
x
Agence
nationale de
sécurité
sanitaire, de
l'alimentation,
de
l'environnement
et du travail
Taxe perçue lors de la
mise sur le marché de
médicaments
vétérinaires, ainsi
qu'une taxe annuelle
pour certaines
autorisations ou
enregistrements
article L. 5141-
8, D 5141-55 à
D 5141-61 du
code de la santé
publique
6
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Agence
nationale de
sécurité
sanitaire, de
l'alimentation,
de
l'environnement
et du travail
Taxe pour l'évaluation
et le contrôle de la
mise sur le marché
des produits
phytopharmaceutiques
et à leurs adjuvants
mentionnés à l'article
L. 253-1 du Code
rural et de la pêche
maritime et aux
matières fertilisantes
et supports de culture
mentionnés à l
article 130
de la LFI
2007
11
x
x
Agence
nationale des
fréquences
Fraction résiduelle
non affectée à
l'ANSéS de la Taxe
additionnelle à
l'imposition forfaitaire
des entreprises de
réseaux des Stations
Radio
b du III de
l'article
158 de la
loi n°
2010-1657
du 29
décembre
2010 de
finances
pour 2011
2
x
Agence
nationale des
titres sécurisés
Prélèvement sur les
Droits de timbre au
titre des délivrances
payantes de cartes
nationales d'identité
article 134
LFI 2009
13
x
x
Agence
nationale des
titres sécurisés
Prélèvement sur les
Droits de timbre au
titre des délivrances
de passeports
sécurisés
article 46
LFI 2007
et article
64 LFI
2009
108
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Agence
nationale des
titres sécurisés
Taxe perçue à
l'occasion de la
délivrance, du
renouvellement, du
duplicata ou du
changement d'une carte
de séjour ou équivalent
prévu par les traités ou
accords internationaux
article 77 LFI
2011
15
x
x
Agence
nationale des
titres sécurisés
Taxe pour la gestion
des certificats
d'immatriculation des
véhicules
article 135 LFI
2009
43
x
x
Agence
nationale des
titres sécurisés
Taxe sur les titres de
voyage biométriques
délivrés aux réfugiés et
aux apatrides titulaires
d'une carte de résident
article 77 LFI
2011
1
x
x
Agence
nationale pour
la gestion des
déchets
radioactifs
Taxe additionnelle à la
taxe sur les
installations nucléaires
de base - Recherche
article 43 V de
la LFI 2000 et
article 21 de la
loi n°2006-739
du 28 juin 2006
119
x
x
Agence
nationale pour
la rénovation
urbaine
160
Prélèvement
temporaire (2011-
2013) sur la fraction
"SGP" de la Taxe
annuelle sur les locaux
à usage de bureaux, les
locaux commerciaux,
les locaux de stockage
et les surfaces de
stationnement annexées
à ces catégories de
locaux perçue dans la
région Ile-de-France
article 31 de la
loi n° 2010-
1658 du 29
décembre 2010
de finances
rectificative
pour 2010,
article 210
alinéa VII de la
LFI 2011
95
x
160
En cours de rebudgétisation.
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Agence pour
la mise en
valeur des
espaces
urbains de la
zone dite des
"50 pas
géométriques"
en
Guadeloupe
Taxe spéciale
d'équipement
article 1609 C
du code général
des impôts
2
x
x
Agence pour
la mise en
valeur des
espaces
urbains de la
zone dite des
"50 pas
géométriques"
en Martinique
Taxe spéciale
d'équipement
article 1609 D
du code général
des impôts
2
x
x
Agences de
l'eau
Redevances pour
pollution de l'eau,
modernisation des
réseaux de
collecte,
pollutions
diffuses,
prélèvement sur la
ressource en eau,
stockage d'eau en
période d'étiage,
obstacle sur les
cours d'eau et
protection du
milieu aquatique
articles L213-10,
L213-10-8 et
L213-10-10 à
L213-10-12 du
Code de
l’environnement
; Articles L213-
10, L213-10-1 à
L213-10-4 du
Code de
l’environnement;
articles L213-
10-5 à L213-10-
7 du Code de
l’environnement
1800
x
x
x
Agences de
l'eau
Taxe pour
prélèvement sur la
ressource en eau
articles L213-10
et L213-10-9 du
Code de
l’environnement
342
x
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après réforme
structurelle
Association
pour le soutien
du théâtre
privé
Taxe sur les spectacles
article 77 de la
LFR n°2003-
1312 du 30
décembre 2003
6
x
x
Autorité de
contrôle
prudentiel
Contributions pour frais
de contrôle
article L. 612-20
du code
monétaire et
financier
163
x
x
Autorité de
régulation des
activités
ferroviaires
Droit dû par les
entreprises ferroviaires
pour l'Autorité de
régulation des activités
ferroviaires
article 21 (§ II)
de la loi n°2009-
1503 du 8
décembre 2009
relative à
l'organisation et à
la régulation des
transports
ferroviaires
11
x
x
Autorité des
marchés
financiers
Droits et contributions
pour frais de contrôle
article L. 621-5-3
et D. 621-27 et
suiv. du code
monétaire et
financier
81
x
x
Caisse de
garantie du
logement
locatif social
Cotisation additionnelle
versée par les
organismes HLM et les
SEM
article L. 452-4-1
du code de la
construction et
de l'habitation
140
x
x
x
x
Caisse de
garantie du
logement
locatif social
Cotisation versée par
les organismes HLM et
les SEM
article L. 452-4
du code de la
construction et
de l'habitation
70
x
x
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Caisse de
garantie du
logement
locatif social
Taxe sur les plus-
values de cession
d'immeubles autres
que les terrains à
bâtir
article 1609
nonies G du
code général
des impôts
120
x
x
Caisse
nationale de
solidarité
pour
l'autonomie
Contribution
solidarité
autonomie
article L.14-
10-4 du code
de l'action
sociale et des
familles
2446
x
x
x
Centre des
monuments
nationaux
Prélèvement sur les
jeux en ligne
instituée par la loi
n° 2010-476 du 12
mai relative à
l’ouverture de la
concurrence et à la
régulation du
secteur des jeux
d’argent et de
hasard en ligne
article 47 de
la loi n°2010-
476 du 12
mai 2010
relative à
l’ouverture à
la
concurrence
et à la
régulation du
secteur des
jeux d’argent
et de hasard
en ligne
(article 302
bis ZI du
code général
des impôts)
8
x
Centre
national de la
chanson, des
variétés et du
jazz
Taxe sur les
spectacles de
variétés
article 76 de
la LFR
n°2003-1312
du 30
décembre
2003
24
x
x
Centre
national du
cinéma et de
l'image
animée
Cotisations
(normale et
supplémentaire) des
entreprises
cinématographiques
article L.
115-14 et L.
115-15 du
code du
cinéma et e
l'image
animée
8
x
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Centre
national du
cinéma et de
l'image
animée
Taxe et
prélèvements
spéciaux au titre
des
films
pornographiques ou
d’incitation à la
violence
article L.
116-2 à L.
116-4 du
code du
cinémae et de
l'image
animée
0,05
x
x
Centre
national du
cinéma et de
l'image
animée
Taxe sur le prix des
entrées aux séances
organisées dans les
établissements de
spectacles
cinématographiques
article L.
115-1 à L.
115-6 du
code du
cinéma et de
l'image
animée
133
x
x
x
Centre
national du
cinéma et de
l'image
animée
Taxe sur les
éditeurs et
distributeurs de
services de
télévision (TST) -
Fraction
Distributeurs
article L.
115-6 à L.
115-13 du
code du
cinéma et de
l'image
animée
247
x
x
x
Centre
national du
cinéma et de
l'image
animée
Taxe sur les
éditeurs et
distributeurs de
services de
télévision (TST) -
Fraction Editeurs
article L.
115-6 à L.
115-13 du
code du
cinéma et de
l'image
animée
300
x
x
x
Centre
national du
cinéma et de
l'image
animée
Taxe sur les ventes
et les locations de
vidéogrammes
destinés à l'usage
privé du public
(taxe vidéo et
VOD)
article L.
116-1 du
code du
cinéma et de
l'image
animée
30
x
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Centre
national du
livre
Taxe sur l'édition
des ouvrages de
librairie
article 1609
undecies à
quindecies du
code général
des impôts
5
x
Centre
national du
livre
Taxe sur les
appareils de
reproduction ou
d'impression
article 1609
undecies à
quindecies du
code général
des impôts
29
x
Centre
national de
gestion
Contribution des
établissements de
santé et médico-
sociaux
article 116 de
la loi du 9
janvier 1986
10
x
x
Centre
national pour
le
développement
du sport
Contribution sur
la cession à un
service de
télévision des
droits de
diffusion de
manifestations ou
de compétitions
sportives
article 302 bis
ZE du code
général des
impôts
41
x
Centre
national pour
le
développement
du sport
Contribution sur
les mises jouées
sur les paris
sportifs en ligne
de la Française
des jeux et des
nouveaux
opérateurs agréés
article 1609
tricies du
code général
des impôts
31
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Centre national
pour le
développement du
sport
Prélèvement
complémentaire
2011-2015 au
prélèvement sur les
jeux de loterie
exploités par la
Française des jeux, à
l'exception des paris
sportifs, en vue du
financement des
enceintes sportives
destinées à accueillir
"l' UEFA Euro
2016"
article 1609
novovicies du
code général
des impôts
24
x
Centre national
pour le
développement du
sport
Produits des jeux
exploités par la
Française des Jeux
article 1609
novovicies du
code général
des impôts
174
x
Chambre nationale
de la batellerie
artisanale
Taxe spécifique
pour la Chambre
nationale de la
batellerie artisanale
article 93 de
la LFI 1985
1
x
x
Conservatoire de
l'espace littoral et
des rivages
lacustres
Droit de francisation
et de navigation
articles 223 à
226 du code
des douanes
37
x
Conservatoire de
l'espace littoral et
des rivages
lacustres
Taxe sur les
passagers maritimes
embarqués à
destination d'espaces
naturels protégés
article 285
quater du
code des
douanes
2
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Établissement
public
administratif
chargé de la
gestion du
fonds pour
l'insertion des
personnes
handicapées
dans la
fonction
publique
Contribution des
employeurs
publics au fonds
pour l'insertion
des personnes
handicapées dans
la fonction
publique
(FIPHFP)
article 36 de la
loi n°2005-102
du 11 février
2005 pour
l'égalité des
droits et des
chances, la
participation et
la citoyenneté
des personnes
handicapées
149
x
x
x
Établissement
public de
sécurité
ferroviaire
Droit de sécurité
article 3.1 de
la loi n°2006-
10 du 5 janvier
2006 relative à
la sécurité et
au
développement
des transports
17
x
x
33
Établissements
publics
fonciers
Taxes spéciales
d'équipement
article 1607
bis, 1607 ter,
1608, 1609,
1609 B,
1609C,
1609D, 1609 F
du code
général des
impôts ; article
L321-1 et
L324-1 du
code de
l'urbanisme
442
x
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Fonds de
financement de
la protection
complémentaire
de la couverture
universelle du
risque maladie
Contribution des
organismes de
protection
sociale
complémentaire
à la couverture
universelle
complémentaire
du risque
maladie
article
L.862-4 du
Code de la
sécurité
sociale
2004
x
x
x
Fonds de
financement de
la protection
complémentaire
de la couverture
universelle du
risque maladie
Prélèvements
sur les droits de
consommation
sur les tabacs
article 575
du code
général des
impôts
361
x
x
x
Fonds de
solidarité
Contribution de
solidarité en
faveur des
travailleurs
privés d'emploi
article L.
5423-26 et
suivants du
code du
travail
1385
x
x
X
Fonds de
solidarité
Prélèvement de
solidarité sur le
patrimoine et les
revenus de
placement
article 575
du code
général des
impôts
143
x
x
X
Fonds de
solidarité pour
le
développement
Majoration de la
taxe de
l'aviation civile
(au titre de la
contribution de
solidarité sur les
billets d'avion)
§ VI de
l'article 302
bis K du
code général
des impôts
178
x
Fonds de
solidarité pour
le
développement
Fraction de la
taxe sur les
transactions
financières
I de l'article
22 de la LFR
2005
60
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Fonds national de
promotion du
commerce et de
l'artisanat
Majoration de
10% du montant
maximum du
droit fixe de la
taxe pour frais
de chambres de
métiers
article 1601
A du code
général des
impôts
10
x
x
Fonds national
pour l'archéologie
préventive
Redevance
d'archéologie
préventive
article
L524-1 et
suiv. du
code du
patrimoine
25
x
x
Fonds national de
garantie des
risques agricoles
Contributions
additionnelles
aux primes ou
cotisations
afférentes à
certaines
conventions
d'assurance
article 1635
bis A et
1635 bis
AA du
Code
général des
impôts; Art
L361-5 et
L362-1 du
Code rural
et de la
pêche
maritime
102
x
x
FranceAgriMer
161
Taxe au profit de
l'établissement
national des
produits de
l'agriculture et
de la mer
(FranceAgriMer)
sur le lait et les
produits laitiers
(anciennement
perçue par
ONIEP - non
codifiée)
article 25
de la loi
n°2005-
1720 du 30
décembre
2005 de
finances
rectificative
pour 2005
15
x
161
Rebudgétisation en cours (2013).
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
FranceAgriMer
Taxe au profit de
l'établissement
national des
produits de
l'agriculture et de
la mer
(FranceAgriMer)
sur les produits
de la mer
(anciennement
affectée à
l'OFIMER)
article 75 de
la LFR pour
2003 n°2003-
1312 du 30
décembre
2003
5
x
FranceAgriMer
Taxe d'abattage
article 1609
sepvicies du
code général
des impôts
84
x
FranceAgriMer
Taxe au profit de
l'établissement
national des
produits de
l'agriculture et de
la mer
(FranceAgriMer)
sur les céréales
(anciennement
perçue par
ONIGC)
article 1619
du code
général des
impôts
23
x
Haute autorité
de santé
Fraction de 10%
de la taxe sur les
dépenses de
promotion des
médicaments
article L. 245-
5-1 à L. 245-
5-6 du code
de la sécurité
sociale
16
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Haute autorité
de santé
Fraction de 44%
de la taxe sur les
dispositifs
médicaux
article L. 245-
6 du Code de
la sécurité
sociale
10
x
Haute autorité
de santé
Taxe sur les
demandes
d'inscription, de
renouvellement
d'inscription ou
de modification
d'inscription d'un
médicament
mentionné à
l'article L. 5121-8
sur la liste des
spécialités
pharmaceutiques
remboursables
articles L.
5123-5 et L.
5211-5-1 du
code de la
santé public
4,62
x
Comité de la
protection des
obtentions
végétales
Taxes de
protection des
obtentions
végétales
article L. 623-
16 du code de
la propriété
intellectuelle
0,33
x
x
Institut de
radioprotection
et de sûreté
nucléaire
Contribution
annuelle au profit
de l'Institut de
radioprotection et
de sûreté
nucléaire
article 96 de
la loi N°2010-
1658 de
finances
rectificative
du 29
décembre
2010
48
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Institut national
de la propriété
industrielle
Redevances perçues
à l'occasion des
procédures et
formalités en matière
de propriété
industrielle ainsi que
de registre du
commerce et des
sociétés, établies par
divers textes
articles L.
611-1 à L.
615-22 et L.
4111-1 à L.
4111-5 du
code de la
propriété
intellectuelle
179
x
x
Institut national
de l'origine et
de la qualité
Droit sur les produits
bénéficiant d'une
appellation d'origine
ou d'une indication
géographique
protégée
article L642-
13 du code
rural et de la
pêche
maritime
4
x
x
Institut national
de prévention
et d'éducation
pour la santé
Contribution perçue
au profit de l'Institut
national de
prévention et
d'éducation pour la
santé (INPES)
article 1609
octovicies du
code général
des impôts et
Art. L. 2133-1
du code de la
santé publique
0,39
x
x
Institut national
de prévention
et d'éducation
pour la santé
Prélèvements sur les
jeux d’argent inscrits
aux art. L 137-19 à L
137-22 du Code de
la sécurité sociale
article L. 137-
24 du code de
la sécurité
sociale
5
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Institut national de
recherches
archéologiques
préventives
Redevance
d'archéologie
préventive
article L524-1
et suiv. du
code du
patrimoine
49
x
x
Office français de
l'immigration et de
l'intégration
Contribution
forfaitaire
représentative des
frais de
réacheminement
article L. 626-
1 du
CESADA
1
x
Office français de
l'immigration et de
l'intégration
Contribution
spéciale versée par
les employeurs des
étrangers sans
autorisation de
travail
articles
L.8253-1,
R.8253-1,
R.8253-8,
R.8253-11,
R.8253-13,
R.8253-14 et
D.8254-11 du
Code du
travail
2
x
Office français de
l'immigration et de
l'intégration
Prélèvement sur les
droits de timbre au
titre des demandes
de naturalisation,
les demandes de
réintégration dans la
nationalité française
et les déclarations
d'acquisition de la
nationalité en raison
du mariage
article 958 du
code général
des impôts
4
x
x
Office français de
l'immigration et de
l'intégration
Droit de visa de
régularisation (par
prélèvement sur les
droits de timbres)
article L. 311-
13 (§ D de
l'article) du
CESADA
13
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Redevance
perçue à
l’occasion de
l’introduction des
familles
étrangères en
France
article R 421-
29 du
CESEDA
1
x
x
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Taxe applicable
aux demandes de
validation d'une
attestation
d'accueil (par
prélèvement sur
les droits de
timbres)
article 1635
bis-0 A du
code général
des impôts
7
x
x
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Taxe applicable
aux documents de
circulation pour
étrangers mineurs
(par prélèvement
sur les droits de
timbres)
article 1635-0
bis du code
général des
impôts
5
x
x
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Taxe de
renouvellement
(et fourniture de
duplicatas) du
titre de séjour
(par prélèvement
sur les droits de
timbres)
article 1635-0
bis du code
général des
impôts
61
x
x
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Taxe due par les
employeurs de
main-d'oeuvre
étrangère
permanente
article 1635-0
bis du code
général des
impôts
26
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Taxe due par les
employeurs de
main-d'oeuvre
étrangère
saisonnière
article 1635-0
bis du code
général des
impôts
2
x
x
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Taxe due par les
employeurs de
main-d'oeuvre
étrangère
temporaire
article 1635-0
bis du code
général des
impôts
1
x
x
Office
français de
l'immigration
et de
l'intégration
Taxe perçue à
l'occasion de la
délivrance du
premier titre de
séjour
(par prélèvement
sur les droits de
timbres)
article 1635-0
bis du code
général des
impôts
43
x
x
Office
national de la
chasse et de
la faune
sauvage
Redevances
cynégétiques
article L423-27
du Code de
l’environnement
69
x
x
Office
national de
l'eau et des
milieux
aquatiques
Contributions
financières des
agences de l'eau
à l'ONEMA
articles L. 213-
9-2 §V, L 213-5
du code de
l'environnement
150
x
x
x
Office
national de
l'eau et des
milieux
aquatiques
Redevance pour
pollutions
diffuses
article L. 213-
10-8 (§ V) du
code de
l'environnement
41
x
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Offices de l'eau
(DOM)
Redevances pour
pollution de l'eau,
redevance pour
modernisation des
réseaux de collecte,
redevance pour
pollutions diffuses, taxe
pour prélèvement sur la
ressource en eau, taxe
pour stockage d'eau en
période d'étiage, taxe
pour obstacle sur les
cours d'e
article L. 213-
13 et L. 213-
14 (§ II)
2
x
x
x
Société du Grand
Paris
Imposition forfaitaire sur
le matériel roulant
circulant sur le réseau de
transport ferroviaire et
guidé géré par la RATP
article 1599
quater A bis
du code
général des
impôts
60
x
Société du Grand
Paris
Fraction résiduelle non
affectée à la Région IdF,
l'UESL, et la part fixe
Etat, de la Taxe annuelle
sur les locaux à usage de
bureaux, les locaux
commerciaux, les locaux
de stockage et les
surfaces de
stationnement annexées
à ces catégories de
locaux perçue dans la
région Ile-de-France
article 31 de la
loi n° 2010-
1658 du 29
décembre
2010 de
finances
rectificative
pour 2010
168
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Agences
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafonnement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un
CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Société du Grand
Paris
Taxe spéciale
d'équipement pour la
région Ile-de-France
article 1609 G
du code
général des
impôts
117
x
x
Voies navigables
de France
Taxe sur les
titulaires d'ouvrages
de prise d'eau, rejet
d'eau ou autres
ouvrages
hydrauliques
destinés à prélever
ou à évacuer des
volumes d'eau
article 124 de
la LFI 1991
149
x
x
Fonds de garantie
des assurances
obligatoires de
dommages
Contributions assises
sur les primes ou
cotisations nettes
d'assurance des
risques de
responsabilité civile
résultant d'accidents
causés par les
véhicules terrestres à
moteur et des
remorques ou semi-
remorques des
véhicules
article L 421-1
à 421-7 du
code des
assurances
85
x
x
Fonds de garantie
des victimes d'actes
terroristes et autres
infractions
Contributions assises
sur les contrats
d'assurance
article R 422-
4 du code des
assurances
282
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Tableau 36 : Évolutions envisageables pour les organismes consulaires
Court terme
Moyen terme
Nom de la taxe
Référence juridique
2013
(p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafon-
nement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affectation
à un tiers
Versement
d’une
dotation
budgétaire
Plafon-
nement
Création
d'un CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Chambres
régionales de
métiers et de
l'artisanat
Taxe additionnelle à la
cotisation foncière des
entreprises pour frais de
chambre régionale de
métiers et d'artisanat
article 1601 du code
général des impôts
264
x
x
x
x
Chambre de
métiers et de
l'artisanat
d'Alsace
Taxe pour frais de
chambre de métiers et de
l'artisanat - chambre de
métiers d'Alsace
loi n°48-977 du 16 juin
1948 relative à la taxe
pour frais de chambre
de métiers applicable
dans les départements
du Bas-Rhin, du haut-
Rhin et de la Moselle
9
x
x
x
x
Chambre de
métiers et de
l'artisanat de
la Moselle
Taxe pour frais de
chambre de métiers et de
l'artisanat - chambre de
métiers de la Moselle
loi n°48-977 du 16 juin
1948 relative à la taxe
pour frais de chambre
de métiers applicable
dans les départements
du Bas-Rhin, du haut-
Rhin et de la Moselle
7
x
x
x
x
Chambres
départementa
les
d'agriculture
Taxe, additionnelle à la
taxe foncière sur les
propriétés non baties,
pour frais de chambres
d'agriculture
article 1604 du code
général des impôts
297
x
x
x
x
Chambres
régionales de
commerce et
d'industrie
Taxe additionnelle à la
cotisation foncière des
entreprises pour frais de
chambres de commerce
et d’industrie de région
article 1600 (I et II) du
code général des
impôts
517
x
x
x
x
Chambres
régionales de
commerce et
d'industrie
Taxe additionnelle à la
cotisation sur la valeur
ajoutée des entreprises
pour frais de chambres
de commerce et
d'industrie de région
article 1600 (III) du
code général des
impôts
819
x
x
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Tableau 37 : Évolutions envisageables pour les organismes techniques et professionnels
Court terme
Moyen terme
Nom de la taxe
Référence
juridique
2013 (p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafon-
nement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affecta
tion à
un
tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Comité professionnel de
développement des
industries françaises de
l'ameublement et du bois
(CODIFAB) ; institut
technologique FCBA ;
centre technique de la
mécanique (CETIM)
Taxe pour le
développement
des industries de
l'ameublement
ainsi que des
industries du bois
Article 71 A de la
LFR du 30/12/2003
pour 2003, modifié
par l'article 44 de la
LFI pour 2005 et
par l'article 109 de
la LFI pour 2007
17
x
x
Comité professionnel de
développement cuir,
chaussure, maroquinerie
(CTC)
Taxe pour le
développement
des industries du
cuir, de la
maroquinerie, de
la ganterie et de la
chaussure
Article 71 B de la
LFR du 30/12/2003
pour 2003, modifié
par l'article 44 de la
LFI pour 2005
13
x
x
Francéclat
Taxe pour le
développement
des industries de
l'horlogerie,
bijouterie,
joaillerie,
orfèvrerie et arts
de la table
Article 71 C de la
LFR du 30/12/2003
pour 2003, modifié
par l'article 44 de la
LFI pour 2005 et
par l'article 110 de
la LFI pour 2007
14
x
x
Comité de
développement et de
promotion de
l'habillement (DEFI)
Taxe pour le
développement
des industries de
l'habillement
Article 71 D de la
LFR du 30/12/2003
pour 2003, modifié
par l'article 44 de la
LFI pour 2005
10
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Nom de la taxe
Référence
Montant
2013
(M€ p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafon-
nement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affecta
tion à
un
tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Centres techniques
industriels de la
mécanique (CETIM,
CTDEC, CTICM,
CETIAT, Institut de
soudure)
Taxe pour le
développement des
industries de la
mécanique et de la
construction
métallique, des
matériels et
consommables de
soudage et produits
de décolletage, de
construction
métallique et des
matériels
aérauliques et
thermiques
Article 71 E de
la LFR du
30/12/2003
pour 2003
70
x
x
Centre d'étude et de
recherche de
l'industrie du béton
(CERIB) ; centres
techniques de
matériaux naturels de
construction
(CTMNC)
Taxe pour le
développement des
industries de
matériaux de
construction
regroupant les
industries du béton,
de la terre cuite et
des roches
ornementales et de
construction
Article 71 F de
la LFR du
30/12/2003
pour 2003
16
x
x
Centre technique de la
conservation des
produits agricoles
Taxe pour le
développement de
l'industrie de la
conservation des
produits agricoles
Article 72 de la
LFR du
30/12/2003
pour 2003
3
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Nom de la taxe
Référence
Montant
2013
(M€ p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafon-
nement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affec
tatio
n à
un
tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Comité professionnel
des stocks stratégiques
pétroliers
Taxe pour le
comité
professionnel des
stocks
stratégiques
pétroliers
Loi 92-1443 du
31 décembre
1992
731
x
x
Centre technique
interprofessionnel des
fruits et légumes
(CTIFL)
Taxe affectée au
centre technique
interprofessionnel
des fruits et
légumes (CTIFL)
Article 73 de la
LFR du
30/12/2003
pour 2003
17
x
x
Interprofessions
agricoles (56 organismes
en 2013)
Contributions
volontaires
obligatoires
Arrêtés
interministériel
s, en
application des
articles L. 632-
1 et suivants du
code rural et de
la pêche
maritime
363
x
x
Conseil national des
barreaux
Contribution pour
l'aide juridique
Article 1635
bis Q du code
général des
impôts
60
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Court terme
Moyen terme
Nom de la taxe
Référence
Montant
2013
(M€ p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais
plafon-
nement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Affec
tatio
n à
un
tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un CAS
Évolution à
déterminer
après
réforme
structurelle
Haut conseil du
commissariat aux
comptes
Contribution
annuelle acquittée
par les personnes
inscrites comme
commissaires aux
comptes et droit
fixe sur chaque
rapport de
certification des
comptes
Article L 821-5
du code de
commerce
-
x
x
Fonds d'indemnisation
de la profession d'avoués
près les cours d'appel
Droit affecté au
fonds
d'indemnisation
de la profession
d'avoués près les
cours d'appel
Article 1635
bis P du code
général des
impôts
41
x
x
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Tableau 38 : Évolutions envisageables pour les dispositifs de solidarité nationale
Court terme
Moyen terme
Nom de la taxe
Référence juridique
Montant
2013
(M€ p)
Statu
quo
Rebud-
gétisation
Affectation
mais plafon-
nement
Réforme
structurelle
(structure /
politique
publique)
Statu
quo
Affectation
à un tiers
Rebud-
gétisation
Plafon-
nement
Création
d'un CAS
Évolution à
déterminer
après réforme
structurelle
CSPE
Contribution au
service public de
l'électricité
article 5 de la loi du 10
février 2000 relative à la
modernisation et au
développement du service
public de l'électricité
3691
x
x
CSPE - Médiateur
national de l'énergie
Contribution au
service public de
l'électricité
article 5 de la loi du 10
février 2000 relative à la
modernisation et au
développement du service
public de l'électricité
7
x
x
Total CSPE
3698
Fonds de garantie
des dépôts
Contribution au
fonds de garantie
des dépôts
0,8
x
x
Fonds national d'aide
au logement
Cotisation des
employeurs (FNAL)
article L834-1 du code de
la sécurité sociale
2749
x
x
x
Fonds national d'aide
au logement
Droits de
consommation sur les
tabacs
article 54-1 de la loi n°
2007-1822 du 24 décembre
2007 portant loi de
finances pour 2008
170
x
x
x
Total FNAL
2919
Fonds national des
solidarités actives
Contribution
additionnelle aux
prélèvements sociaux
mentionnés aux
articles L. 245-14 et
L.245-15 du Code de
la sécurité sociale
article L262-24 du Code de
l’action sociale et des
familles, art.3 de la loi n°
2008-1249 du 1er
décembre 2008
généralisant le revenu de
solidarité active et
réformant les politiques
d’insertion
1482
x
x
x
Fonds national des
solidarités actives
Contributions
additionnelles de 1,1
% au prélèvement de
2 % sur les revenus
du patrimoine et les
produits de
placements
article 3 de la loi n° 2008-
1249 du 1er décembre
2008 généralisant le RSA
er réformant les politiques
d'insertion
1882
x
x
x
Total FNSA
3364
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
Annexe III
Liste des principaux audits d’entités financées par
taxes affectées utilisés par le Conseil
des prélèvements obligatoires
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
204
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Tableau 39 : Liste des principaux audits d’entités financées par taxes
affectées utilisés par le CPO
Organisme
Auteur
Date
Titre du rapport
Montant de la taxe
affectée (€, 2011)
Agence de
financement des
infrastructures de
transport de France
IGF
2012
L'État et ses agences: le cas des
agences de financement
696 000 000
Agence de
l'environnement et de
la maîtrise de l'énergie
IGF
2011
RGPP ADEME
479 000 000
Agence de services et
de paiement
IGF
2010
RGPP agence de services de
paiement
6 000 000
Agence nationale de
sécurité du
médicament et des
produits de santé
Sénat
2003
Contrôle portant sur l'AFSSAPS
- rapport d'information de M.
Gouteyron
75 000 000
Agence nationale de
sécurité sanitaire, de
l'alimentation, de
l'environnement et du
travail
Sénat
2007
Rapport d'information sur le
dispositif des agences en matière
de sécurité sanitaire
16 000 000
Agence nationale pour
la gestion des déchets
radioactifs
IGF
2008
Le financement de l'Agence
nationale pour la gestion des
déchets radioactifs
120 000 000
Agence nationale pour
la rénovation urbaine
Cour des
comptes
2012
La politique de la ville: une
décennie de réformes
95 000 000
Agence nationale pour
l'amélioration de
l'habitat
Cour des
comptes
2011
Les aides à la pierre
19 000 000
Agence pour la mise
en valeur des espaces
urbains de la zone dite
des "50 pas
géométriques" en
Guadeloupe
IGF
2008
La zone dite des 50 pas aux
Antilles
2 000 000
Agence pour la mise
en valeur des espaces
urbains de la zone dite
des "50 pas
géométriques" en
Martinique
IGF
2009
La zone dite des 50 pas aux
Antilles
2 000 000
Agences de l'eau
Cour des
comptes
2010
Rapport public annuel : Les
instruments de la gestion durable
de l'eau
1 961 000 000
Association pour le
soutien du théâtre
privé
Inspection
générale de
la ville de
Paris
2005
Audit de l'ASTP
6 000 000
Autorité de contrôle
prudentiel
Cour des
comptes
2011
La mise en place de l'autorité de
contrôle prudentiel
163 000 000
Autorité des marchés
financiers
Cour des
comptes
2009
Rapport public annuel: autorités
de contrôle et de régulation du
secteur financier
81 000 000
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
LA FISCALITE AFFECTÉE, CONSTATS, ENJEUX ET RÉFORMES
205
Organisme
Auteur
Date
Titre du rapport
Montant de la taxe
affectée (€, 2011)
Caisse de garantie du
logement locatif social
IGF
2012
L'État et ses agences: le cas des
agences de financement
373 000 000
Centre des monuments
nationaux
Cour des
comptes
2010
Le centre des monuments
nationaux depuis 2003
10 000 000
Centre national de
gestion
IGF
2012
L'État et ses agences: le cas des
agences de santé
10 000 000
Centre national de la
chanson, des variétés
et du jazz
Assemblée
nationale
2011
Financement des politiques
culturelles de l'État par des
ressources affectées
24 000 000
Centre national du
cinéma et de l'image
animée
Cour des
comptes
2011
Financement des politiques
culturelles de l'État par des
ressources affectées
815 000 001
Centre national du
livre
Cour des
comptes
2012
Contrôle des comptes et de la
gestion 2002-2009 du centre
national du livre
39 000 000
Centre national pour le
développement du
sport
Cour des
comptes
2011
Contrôle du CNDS: exercices
2006-2010
265 000 000
Conservatoire de
l'espace littoral et des
rivages lacustres
Cour des
comptes
2013
Gestion du conservatoire de
l'espace littoral et des rivages
lacustres
42 000 000
Établissement public
administratif chargé de
la gestion du fonds
pour l'insertion des
personnes handicapées
dans la fonction
publique
Cour des
comptes
2006
La mise en place du fonds pour
l'insertion des personnes
handicapées dans la fonction
publique
188 000 000
Fonds de financement
de la protection
complémentaire de la
couverture universelle
du risque maladie
IGF
2012
L'État et ses agences: le cas des
agences de financement
1 930 000 000
Fonds de solidarité
IGF
2012
L'État et ses agences: le cas des
agences de financement
1 504 000 000
Fonds national de
promotion du
commerce et de
l'artisanat
IGF
2012
L'État et ses agences: le cas des
agences de financement
10 000 000
Fonds national pour
l'archéologie
préventive
Assemblée
nationale
2011
Financement des politiques
culturelles de l'État par des
ressources affectées
27 000 000
FranceAgriMer
IGF
2011
Audit RGPP : FranceAgrimer
118 000 000
Haute autorité de santé
IGF
2012
L'État et ses Agences: le cas des
agences de santé
33 300 000
Institut national de la
propriété industrielle
IGF
2009
RGPP Opérateur : INPI
175 000 000
Institut national de
prévention et
d'éducation pour la
santé
Cour des
comptes
2011
La prévention sanitaire
5 000 000
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013
206
CONSEIL DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
Organisme
Auteur
Date
Titre du rapport
Montant de la taxe
affectée (€, 2011)
Institut national de
recherches
archéologiques
préventives
Assemblée
nationale
2011
Financement des politiques
culturelles de l'État par des
ressources affectées
57 000 000
Office français de
l'immigration et de
l'intégration
Sénat
2012
Rapport d'information sur l'OFII
155 000 000
Office national de la
chasse et de la faune
sauvage
Cour des
comptes
2012
Gestion de l'Office national de la
chasse et de la faune sauvage
70 000 000
Office national de l'eau
et des milieux
aquatiques
Cour des
comptes
2013
Rapport annuel 2013 : l'ONEMA
172 000 000
Voies navigables de
France
IGF
2009
RGPP Opérateurs: Voies
navigables de France
138 000 000
Conseil des prélèvements obligatoires
La fiscalité affectée : constats, enjeux et réformes - juillet 2013