S
CIENCES
P
O
:
UNE FORTE AMBITION
,
UNE GESTION DEFAILLANTE
Rapport public thématique
Novembre 2012
Cour des comptes
Sciences PO – novembre 2012
13 rue Cambon 75100 PARIS CEDEX 01 - tel : 01 42 98 95 00 - www.ccomptes.fr
SOMMAIRE
DELIBERE
.........................................................................................
7
INTRODUCTION GENERALE
.......................................................
9
CHAPITRE I - UNE ARCHITECTURE INSTITUTIONNELLE
ET UNE GOUVERNANCE ATYPIQUES
.....................................
13
I
- L’architecture institutionnelle de Sciences Po : un legs de l’histoire
....
13
A - Le fruit d’un compromis
......................................................................
14
B - La FNSP et l’IEP, deux entités distinctes mais fortement imbriquées . 16
II
- Une gouvernance complexe
...............................................................
22
A - Des instances nombreuses
.................................................................
22
B - Un exécutif unifié
................................................................................
25
III
- Une organisation source de dysfonctionnements et aux perspectives
incertaines
...............................................................................................
26
A - Les difficultés liées à l’organisation de Sciences Po
............................
26
B - Sciences Po et l’Etat
............................................................................
30
C - L’initiative d’excellence « Sorbonne Paris Cité »
.................................
30
CHAPITRE II - UN DEVELOPPEMENT RAPIDE ET DES
INNOVATIONS NOMBREUSES, MAIS A UN COUT ELEVE .33
I
- Un développement rapide des activités de formation et de recherche 33
A - Un effectif étudiant doublé en moins de dix ans
................................
34
B - Le développement du site parisien et des campus en région
.............
43
C - La croissance du potentiel de recherche
............................................
46
II
- Un budget en constante progression financé par l’Etat et
l’augmentation des droits d’inscription
....................................................
52
A - L’augmentation continue et importante des charges
........................
52
B - Les modalités de financement de l’institution
....................................
55
C - Le coût d’un étudiant à Sciences Po
....................................................
59
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4
CHAPITRE III - UNE GESTION MARQUEE PAR UNE
FRAGILITE FINANCIERE ET DE NOMBREUSES
ANOMALIES
...................................................................................
67
I
- Une situation financière toujours fragile
.............................................
67
A - L’analyse financière de la fondation
...................................................
67
B - Le risque lié à une gestion de la dette mal maîtrisée
.........................
70
C - Le financement par les collectivités territoriales
................................
72
II
- Une gestion défaillante des personnels
..............................................
74
A - Une masse salariale non maîtrisée
.....................................................
75
B - Les enseignants-chercheurs : un système peu transparent de
décharges de service et de compléments de rémunération
....................
81
C - La rémunération des cadres dirigeants de la FNSP : un système
opaque qui doit être réformé
..................................................................
89
D - Le cadre législatif et réglementaire des organismes à but non lucratif
..................................................................................................................
93
III
- La gestion des achats
.........................................................................
96
A - Le non-respect de l’ordonnance du 6 juin 2005
.................................
96
B - L’utilisation excessive de cartes bancaires
..........................................
97
IV
- La mission « Lycée pour tous »
..........................................................
98
A - Les objectifs de la mission
...................................................................
99
B - Un coût important financé par la fondation sans son accord
...........
100
CONCLUSION GENERALE
........................................................
103
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
..................................
111
ANNEXES
.....................................................................................
115
REPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES
CONCERNES
................................................................................
129
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Les rapports publics de la Cour des comptes
- élaboration et publication -
La Cour publie, chaque année, un rapport public annuel et des
rapports publics thématiques.
Le présent rapport est un rapport public thématique.
Les rapports publics de la Cour s’appuient sur les contrôles et les
enquêtes conduits par la Cour des comptes ou les chambres régionales des
comptes et, pour certains, conjointement entre la Cour et les chambres
régionales ou entre les chambres. En tant que de besoin, il est fait appel au
concours d’experts extérieurs, et des consultations et des auditions sont
organisées pour bénéficier d’éclairages larges et variés.
Au sein de la Cour, ces travaux et leurs suites, notamment la
préparation des projets de texte destinés à un rapport public, sont réalisés par
l’une des sept chambres que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour des comptes, ainsi que des chambres régionales des comptes, et
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L
’
indépendance
institutionnelle
des
juridictions
financières
et
statutaire de leurs membres garantit que les contrôles effectués et les
conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique que toutes les constatations et appréciations
ressortant d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes les
observations et recommandations formulées ensuite, sont systématiquement
soumises aux responsables des administrations ou organismes concernés ;
elles ne peuvent être rendues définitives qu’après prise en compte des
réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des responsables concernés.
La publication dans un rapport public est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte que la Cour se propose de publier aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses accompagnent toujours le texte de la Cour.
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication.
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Tout contrôle ou enquête est confié à un ou plusieurs rapporteurs.
Leur rapport d’instruction, comme leurs projets ultérieurs d’observations et
de recommandations, provisoires et définitives, sont examinés et délibérés de
façon collégiale, par une chambre ou une autre formation comprenant au
moins trois magistrats, dont l’un assure le rôle de contre-rapporteur, chargé
notamment de veiller à la qualité des contrôles. Il en va de même pour les
projets de rapport public.
Le contenu des projets de rapport public est défini, et leur élaboration
est suivie, par le comité du rapport public et des programmes, constitué du
premier président, du procureur général et des présidents de chambre de la
Cour, dont l’un exerce la fonction de rapporteur général.
Enfin, les projets de rapport public sont soumis, pour adoption, à la
chambre du conseil où siègent en formation plénière ou ordinaire, sous la
présidence du premier président et en présence du procureur général, les
présidents de chambre de la Cour, les conseillers maîtres et les conseillers
maîtres en service extraordinaire.
Ne prennent pas part aux délibérations des formations collégiales,
quelles qu’elles soient, les magistrats tenus de s’abstenir en raison des
fonctions qu’ils exercent ou ont exercées, ou pour tout autre motif
déontologique.
*
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site Internet de la Cour des comptes et des chambres régionales et
territoriales des comptes :
www.ccomptes.fr
. Ils sont diffusés par
La
documentation Française
.
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Délibéré
La Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil réunie en
formation ordinaire, a adopté le présent rapport sur « Sciences Po : une
forte ambition, une gestion défaillante
»
.
Le rapport a été arrêté au vu du projet communiqué au préalable
aux administrations et organismes concernés et des réponses adressées en
retour à la Cour.
Les réponses sont publiées à la suite du rapport. Elles engagent la
seule responsabilité de leurs auteurs.
Ont
participé
au
délibéré :
M. Migaud,
Premier
président,
MM. Descheemaeker,
Bayle,
Bertrand,
Mme
Froment-Meurice,
MM. Lévy, Lefas, Briet, présidents de chambre, M. Braunstein, président
de
section,
remplaçant
M.
Durrleman,
président
de
chambre,
MM. Pichon, Babusiaux, présidents de chambre maintenus en activité,
MM. Richard, Gillette, Monier, Thérond, Mme Lévy-Rosenwald,
MM. Duchadeuil,
Paul, Lebuy, Lafaure, Frangialli, Mmes Dayries, Ratte,
Ulmann, MM. Gautier (Jean), Diricq, Mme Malégat-Mély, MM. Martin
(Christian), de Gaulle, Prat, Guédon, Baccou, Chouvet, Mme Démier,
MM. Clément, Le Mer, de Nicolay, Guillot, Ecalle, Ortiz, conseillers
maîtres.
A assisté et participé aux débats, sans prendre part au délibéré,
M. Johanet, Procureur général. Il était accompagné de M. Gilles Miller,
avocat général.
A été entendu
en son rapport, M. Bertrand, rapporteur général,
assisté de MM. Clément, conseiller maître, Mme Bossière, auditrice, et
M. Robert, rapporteur
.
***
M. Gérard Terrien, secrétaire général, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
Fait à la Cour, le 20 novembre 2012.
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8
Le projet de rapport soumis à la chambre du conseil a été préparé,
puis délibéré le 1
er
octobre 2012, par la troisième chambre de la Cour des
comptes, présidée par M. Lefas, président de chambre, et composée de
MM. Duchadeuil, Frangialli, Gautier, Mmes Seyvet, Moati, MM. Sabbe,
Rousselot, de Nicolay, conseillers maîtres et Marland, conseiller maître
en service extraordinaire, ainsi que, en tant que rapporteurs, M. Clément,
conseiller maître, Mme Bossière, auditrice, M. Loïc Robert, rapporteur à
temps complet, et, en tant que contre-rapporteur, M. Blairon, conseiller
maître en service extraordinaire.
Le projet de rapport a été examiné et approuvé, le 12 octobre
2012, par le comité du rapport public et des programmes de la Cour des
comptes,
composé
de
MM. Migaud,
Premier
président,
Johanet,
Procureur général,
Descheemaeker, Bayle, Bertrand, rapporteur général
du comité, Levy, Lefas et Briet, présidents de chambre.
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Introduction générale
Sciences Po
1
est le nom générique de l’ensemble formé par deux
personnes morales distinctes, l’une de droit privé, la Fondation nationale
des sciences politiques (FNSP), et l’autre de droit public, l’Institut
d’études politiques (IEP), qui ont été créées en 1945 pour succéder à
l’Ecole libre des sciences politiques.
Etablissement autonome et sélectif, dont la vocation est
d’« assurer une formation initiale et continue en sciences sociales visant à
la compréhension du monde contemporain », Sciences Po a beaucoup
évolué au cours des dix dernières années. Le nombre d’étudiants en
formation initiale a été multiplié par deux et l’augmentation du nombre de
places s’est accompagnée d’une internationalisation des cursus et du
développement d’antennes délocalisées en région. Des innovations ont été
conduites, notamment la création d’une voie d’accès spécifique pour des
étudiants issus de lycées relevant de l’éducation prioritaire. Sciences Po a
également diversifié ses activités de recherche et renforcé son corps
académique.
Dans le même temps, le budget de la FNSP a crû de 78,7 M€ à
127,1 M€, la croissance des charges étant financée essentiellement par
l’évolution de la dotation publique et par l’augmentation des droits
d’inscription. La subvention versée à la FNSP par le ministère de
l’enseignement supérieur et de la recherche est ainsi passée de 47,7 M€
en 2005 à 63,6 M€ en 2010, soit une hausse de près d’un tiers. En
ajoutant la prise en charge de la rémunération des enseignants-chercheurs
affectés directement par l’Etat à l’IEP, soit 11 M€ en 2010, l’effort
financier de l’Etat atteint 74.6 M€ cette même année. Durant la même
période, le produit des droits d’inscription a progressé de 9,9 M€ à
27,9 M€.
Ces évolutions ont apporté une visibilité importante à Sciences
Po. Elles conduisent cependant aujourd’hui à s’interroger sur son
positionnement face aux mutations de l’enseignement supérieur et de la
recherche, alors même que la tentation de ses dirigeants est forte de
présenter l’institution comme se situant à un point d’équilibre entre les
différents modèles propres au système d’enseignement supérieur français
1
L’appellation Sciences Po est désormais une marque internationale, déposée auprès
de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) par la Fondation nationale des
sciences politiques
(
FNSP) sous le numéro 1114856, enregistrée le 6 janvier 2012 (le
dépôt d’origine datant du 21 novembre 2007).
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10
et comme se tournant simultanément vers des modèles étrangers,
notamment anglo-saxons.
Cette question est d’autant plus délicate que, si l’institution a
beaucoup changé, elle ne s’est pas transformée en profondeur : son
architecture et son mode de gouvernance très particuliers n’ont pas
fondamentalement évolué depuis 1945. Depuis son origine, la Fondation
nationale des sciences politiques (FNSP), fondation de droit privé, se
caractérise par la stabilité de son objet et gère administrativement et
financièrement l’Institut d’études politiques de Paris (IEP), chargé de la
mission d’enseignement et à ce titre intégré au service public de
l’enseignement supérieur. L’IEP a vu, en revanche, son statut évoluer :
entité de l’Université de Paris à sa création, tirant les conséquences de
l’éclatement de celle-ci en 13 universités, il s’est transformé en 1969 en
établissement public à caractère scientifique et culturel, puis en 1985 en
grand établissement.
Sciences Po se positionne aujourd’hui dans un environnement qui
n’est plus seulement national et souhaite jouer un rôle de premier plan
dans la concurrence que se livrent les grandes universités mondiales.
Mais, dans le même temps, l’établissement reste attaché à un statut et à
une
architecture
conçus
pour
préserver
un
modèle,
notamment
pédagogique, qui le range bien davantage dans l’univers des grandes
écoles et de leurs classes préparatoires.
Son statut particulier lui a longtemps permis d’anticiper les
évolutions de l’enseignement supérieur, en matière d’autonomie de
gestion, d’ouverture à l’international et de mesures en faveur de l’égalité
des chances. Il ne l’a pas empêché de s’inscrire dans le mouvement de
recomposition de l’enseignement supérieur amorcé par la loi de
programme n° 2006-449 du 18 avril 2006 pour la recherche et par le
programme des investissements d’avenir : Sciences Po appartient au pôle
de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) Sorbonne Paris Cité et,
à ce titre, participe au projet d’initiative d’excellence (IDEX) qu’il a
contribué à élaborer en 2011.
Pour
autant,
la
stabilité
de
l’architecture
institutionnelle
d’ensemble a maintenu l’établissement à l’écart d’autres modifications
qu’ont connues récemment les établissements universitaires, à la suite de
la mise en oeuvre de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux
libertés et responsabilités des universités (LRU), et en particulier du
passage au régime des responsabilités et compétences élargies (RCE).
Le décès du directeur de l’IEP et administrateur de la fondation au
cours de l’instruction, le 3 avril 2012, a affecté le fonctionnement de
l’institution. Par un arrêté du 5 avril 2012, pris par le recteur de
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INTRODUCTION
11
l’académie de Paris, le directeur des études et de la scolarité a été nommé
administrateur provisoire de l’IEP de Paris.
Le contrôle réalisé par la Cour d’octobre 2011 à juin 2012 a porté
sur les années 2005 à 2010.
La procédure de contradiction a été marquée par des violations
répétées, sous forme de divulgations de documents ou d'informations, de
la stricte confidentialité qui, dans l'intérêt même de l'organisme contrôlé
et des personnes concernées, doit, à ce stade, entourer ses échanges avec
la Cour, conformément aux dispositions du code des juridictions
financières
et de l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
Le présent rapport rappelle dans son chapitre I l’architecture et la
gouvernance particulières de l’ensemble composé de la fondation
nationale des sciences politiques et de l’institut d’études politiques.
Le
chapitre II analyse le développement important qu’a connu Sciences Po et
ses conséquences sur le budget de l’établissement. Les risques financiers
et les nombreuses anomalies constatées dans la gestion de Sciences Po
font l’objet du chapitre III.
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Chapitre I
Une architecture institutionnelle et une
gouvernance atypiques
I
-
L’architecture institutionnelle de Sciences Po :
un legs de l’histoire
Sciences Po constitue un ensemble original dans le paysage
français de l’enseignement supérieur. Cette originalité ne provient pas de
son objet, puisque l’établissement a pour fonction principale d’assurer des
missions d’enseignement et de recherche. Elle découle de la singularité de
son architecture institutionnelle, de son mode de gouvernance et de son
projet pédagogique, qui sont un legs de son histoire particulière.
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COUR DES COMPTES
14
A - Le fruit d’un compromis
La création de deux entités et le choix de confier la gestion de
l’Institut d’études politiques (IEP) à la Fondation nationale des sciences
politiques (FNSP) résultent à l’origine d’un compromis trouvé en 1945
entre les représentants de l’Etat et ceux de l’Ecole libre des sciences
politiques
2
. Les premiers souhaitaient en effet insérer la formation des
futurs hauts fonctionnaires dans le cadre du service public de l’éducation,
alors que les seconds avaient la volonté d’assurer une grande autonomie
de gestion à l’institution succédant à l’Ecole libre des sciences politiques,
vis-à-vis de l’Etat comme de l’Université de Paris.
A cette époque, en effet, les établissements d’enseignement
supérieur ne jouissaient d’aucune véritable autonomie, et les responsables
de l’Ecole libre des sciences politiques entendaient que soit préservé ce
qui fait historiquement son succès et son efficacité, notamment la forme
de l’enseignement et le caractère propre du diplôme, la diversité et la
spécificité du corps enseignant, la liberté de recrutement et de gestion de
ses collaborateurs. De ce fait, le modèle pédagogique de Sciences Po
repose sur un enseignement pluridisciplinaire, décloisonné, assuré en
petits groupes, pris en charge en grande partie par des intervenants
extérieurs qui ne sont pas maîtres de conférences ou professeurs des
universités, mais praticiens du domaine dans lequel ils enseignent.
Par ailleurs, le choix d’organisation retenu était lié à la volonté
de concilier le projet originel des fondateurs de l’Ecole libre, qui
supposait une structure qui ne soit pas rattachée à l’université, avec la
nécessité de disposer du support juridique d’un établissement public
d’enseignement supérieur permettant de délivrer des diplômes reconnus
par l’Etat et de bénéficier de personnels enseignants-chercheurs ainsi que
du soutien financier de l’Etat.
L’organisation et la gouvernance particulières de Sciences Po
sont le fruit de ce compromis.
Dans ce cadre, l’indépendance de Sciences Po repose sur :
-
la liberté du projet pédagogique (carte des formations, choix
des enseignements, choix des enseignants) ;
-
la propriété de biens immobiliers mis à la disposition de l’IEP
pour l’exercice de sa mission d’enseignement ;
2
Dans la négociation, MM. Michel Debré et Jean-Marcel Jeanneney représentaient
l’Etat, MM. Jacques Chapsal, Roger Seydoux et André Siegfried représentaient
l’Ecole libre des sciences politiques.
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UNE ARCHITECTURE INSTITUTIONNELLE ET UNE GOUVERNANCE
ATYPIQUES
15
-
le statut de droit commun des salariés de la fondation, qui ne
relèvent pas du statut de la fonction publique.
Cependant cette indépendance ne s’étend pas au domaine
financier, puisque la fondation est financée majoritairement par l’Etat.
De l’Ecole libre des sciences politiques à Sciences Po
•
ordonnance n° 45-2284 du 9 octobre 1945 : création de la fondation
nationale des sciences politiques ;
•
décret n° 45-2286 du 9 octobre 1945 : création de l’Institut d’études
politiques de Paris ;
•
convention du 27 octobre 1945 entre l’Université de Paris et la
FNSP, confiant la gestion administrative et financière de l’IEP à la
FNSP ;
•
décret n° 69-55 du 18 janvier 1969 : l’IEP devient établissement
public à caractère scientifique et culturel (EPSC). Le décret prévoit
que sa gestion administrative et financière continue d’être assurée
par la FNSP ;
•
décret n° 85-497 du 10 mai 1985 : transformation de l’IEP en grand
établissement ;
•
loi n° 98-54 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d’ordre
économique et financier : la disposition prévoyant que l’IEP est
géré par la FNSP est insérée dans l’ordonnance de 1945 ;
•
codification
et
abrogation
de
l’ordonnance
de
1945
par
l’ordonnance n° 2000-549 du 15 juin 2000 relative à la partie
législative du code de l’éducation.
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16
B - La FNSP et l’IEP, deux entités distinctes mais
fortement imbriquées
1 -
Deux entités distinctes ayant des objets complémentaires
La Fondation nationale des sciences politiques (FNSP) a été
instituée par l’ordonnance n° 45-2284 du 9 octobre 1945, dont les
dispositions principales sont devenues les articles L. 621-2, L. 758-1 et
L. 758-2 du code de l’éducation. Son objet est de « favoriser le progrès et
la diffusion, en France et à l'étranger, des sciences politiques,
économiques et sociales » (art. L. 621-2).
La fondation est un établissement
sui generis
au sens où aucun
élément de son statut ne permet de la qualifier clairement. L’ordonnance
de 1945 évoque seulement un « établissement » - qui n’est pas qualifié
d’établissement public -, doté de la personnalité morale sous le nom de
« Fondation nationale des sciences politiques ».
La notion de fondation, jusqu’alors définie essentiellement par la
jurisprudence, a été précisée par la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 sur le
développement du mécénat, comme « l’acte par lequel une ou plusieurs
personnes physiques ou morales décident l'affectation irrévocable de
biens, droits ou ressources à la réalisation d'une oeuvre d'intérêt général et
à but non lucratif ». La FNSP, qui a affecté à la réalisation de son objet
principal, susceptible d’être qualifié d’intérêt général, les biens lui
appartenant, et en particulier ses immeubles, entre donc dans cette
catégorie.
La FNSP a indiqué à la Cour qu’elle estimait ne pas être une
fondation reconnue d’utilité publique (FRUP)
3
. Elle est pourtant inscrite
sur la liste des fondations reconnues d’utilité publique tenue par le
ministère de l’intérieur
4
. Aux termes de l’article L. 758-2 du code de
l’éducation, elle peut recevoir des « libéralités testamentaires et entre
vifs », exonérées de toute perception au profit du Trésor public. A la
différence de la plupart des fondations, toutefois, elle ne dispose pas
d’une dotation financière significative, et une part déterminante de ses
ressources provient des subventions de l’Etat. Disposant de propriétés
immobilières importantes, qui lui apportent une indépendance pour la
réalisation d’une partie de ses missions, elle ne s’est engagée que
3
La « note juridique sur le statut et la gouvernance de Sciences Po » transmise à la
Cour par Sciences Po au cours de l’instruction définit pourtant la FNSP comme une
« Fondation de droit privé reconnue d’utilité publique instituée par l’ordonnance
n° 45-2284 du 9 octobre 1945 ».
4
Elle est inscrite sur cette liste sous le numéro 75.020.0141.
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UNE ARCHITECTURE INSTITUTIONNELLE ET UNE GOUVERNANCE
ATYPIQUES
17
récemment
dans
la
constitution
d’une
dotation
financière
(« endowment »
5
) qui n’atteint en 2012 qu’un niveau très modeste
(0,5 M€).
Pour sa part, l’Institut d’études politiques (IEP) a été créé par
décret du 9 octobre 1945 comme une entité de l’Université de Paris, pour
exercer les missions d’enseignement relevant de la Fondation nationale
des sciences politiques (FNSP), celle-ci assurant « l’organisation
matérielle ainsi que la gestion administrative et financière de l’Institut
d’études politiques de Paris »
6
. Par la suite, le décret n° 69-55 du
18 janvier 1969 a rendu l’IEP autonome : l’institut est alors devenu un
établissement public à caractère scientifique et culturel (EPSC), statut
créé par l’article 3 de la loi n° 68-978 du 12 novembre 1968, dite loi
Edgar Faure, d'orientation de l'enseignement supérieur. Le décret
n° 85-497 du 10 mai 1985 relatif à l’Institut d’études politiques de Paris a
confirmé cette autonomie en l’érigeant en « grand établissement », au
sens de l’article L. 717-1 du code de l’éducation
7
.
L’article 2 du décret du 10 mai 1985 prévoit que l’IEP de Paris a
pour mission « d’assurer une formation initiale et continue en sciences
sociales visant à la compréhension du monde contemporain. Il prépare
notamment les étudiants aux carrières de la fonction publique, à la gestion
des entreprises publiques et privées, aux activités de communication et
d’études. Il délivre un diplôme propre et, lorsqu’il y est habilité, des
diplômes nationaux de troisième cycle ». Le même article, en son alinéa
2, précise que l’IEP « exerce ses activités en liaison avec les services de
documentation et les centres de recherche de la Fondation nationale des
sciences politiques ».
La répartition des rôles entre l’IEP et la FNSP peut être déduite
de la lecture de leurs statuts respectifs. La fondation a un objet large,
5
L’Université Harvard, université privée la plus riche du monde, dispose d’un
endowment
estimé en 2009 à 26 Md€, dont les revenus lui assurent 40 % de ses
ressources annuelles.
6
Convention signée entre la Fondation nationale des sciences politiques et
l’Université de Paris le 27 octobre 1945, article 1
er
.
7
Un « grand établissement » est un établissement public à caractère scientifique,
culturel et professionnel (EPSCP), respectant les principes généraux d’autonomie et
de démocratie s’appliquant aux universités, mais dérogeant à la plupart de leurs règles
d’organisation et de fonctionnement habituelles. L’article L. 711-1 prévoit que les
règles particulières régissant les grands établissements sont adoptées par décret en
Conseil d’Etat. Aujourd’hui, la catégorie des « grands établissements » comprend des
établissements aussi divers que le Collège de France, le Muséum national d’histoire
naturelle, l’Institut de physique du globe de Paris, ou encore l’Université Paris
Dauphine. Les dispositions de la loi relative aux libertés et responsabilités des
universités ne s’appliquent aux grands établissements que s’ils en font la demande.
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repris de celui de l’Ecole libre des sciences politiques. Elle accomplit ses
missions de trois manières :
-
en développant une activité pédagogique visant à former des
cadres, tant pour la fonction publique que pour la sphère
privée ;
-
en finançant et en soutenant l’activité d’unités de recherche qui
lui sont rattachées ;
-
en assurant le développement d’un centre de documentation
dans le domaine des sciences humaines et sociales.
Pour l’exercice de son activité pédagogique, la fondation
s’appuie sur l’Institut d’études politiques (IEP). En revanche, elle prend
en charge directement les autres activités - recherche et documentation -
relevant de sa mission générale.
2 -
Des liens de plus en plus étroits
L’imbrication des deux entités, historiquement forte du fait des
missions complémentaires qu’elles exercent, a été confirmée à plusieurs
reprises sur le plan juridique. Ainsi, le décret du 10 mai 1985 a défini les
organes de gouvernance de l’IEP (en particulier les rôles respectifs de son
directeur, du conseil de direction, du conseil scientifique et de la
commission paritaire) en maintenant le lien qui l’unissait à la fondation. Il
a précisé, en outre, que « la Fondation nationale des sciences politiques
individualise dans son budget et ses comptes, établis conformément aux
règles du plan comptable général, les recettes, les dépenses et les
documents comptables de l’Institut d’études politiques de Paris ».
Le caractère indissociable des deux entités a été confirmé par des
textes placés de plus en plus haut dans la hiérarchie des normes : la
gestion administrative et financière de l’IEP a été au départ confiée à la
FNSP aux termes d’une simple convention, puis en application d’un
décret simple du 18 janvier 1969, d’un décret en Conseil d’Etat du
10 mai 1985, enfin d’une disposition législative. En effet, l’article 74 de
la loi n° 98-54 du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d’ordre
économique et financier a inscrit dans l’article 2 de l’ordonnance du
9 octobre 1945 un alinéa ainsi rédigé : « elle [la Fondation] assure la
gestion administrative et financière de l’Institut d’études politiques de
Paris. Elle fixe notamment les moyens de fonctionnement de l’institut et
les droits de scolarité pour les diplômes propres à l’institut ». Ces
dispositions ont été insérées dans le code de l’éducation (art. L. 758-1).
Il résulte de cette organisation que l’IEP est un établissement
public qui n’a pas de budget propre, qui ne rémunère pas d’agents et dont
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toute la gestion administrative et financière est assurée par une entité
extérieure
─
la fondation
─
, qui fixe les grandes orientations et prend les
décisions stratégiques relatives à Sciences Po au sein de son conseil
d’administration. Le budget de l’Institut d’études politiques (IEP) n’est
qu’une
subdivision
du
budget
de
la
fondation, ses
personnels
administratifs sont salariés de la fondation, et les biens utilisés pour sa
mission d’enseignement (notamment les biens immobiliers) sont ceux de
la fondation.
En dépit de ces singularités, l’IEP a une existence juridique
propre et possède des instances de gouvernance qui se prononcent sur
certaines questions, telles que les modalités de sélection des étudiants,
l’organisation et le contenu des enseignements, la pédagogie ou la vie des
étudiants. Toutefois, il présente la particularité de ne pas disposer de
moyens propres pour exercer ses missions, dans la mesure où la gestion
administrative et financière de Sciences Po relève de la compétence
exclusive de la FNSP. Ainsi, par exemple, les enseignants-chercheurs
sous statut public intervenant à Sciences Po sont officiellement affectés à
l’IEP et rémunérés directement par l’Etat, mais sont en réalité gérés par la
FNSP.
3 -
La souplesse de gestion associée à l’environnement de droit
privé de la fondation
Outre son indépendance, condition jugée indispensable pour
préserver son modèle pédagogique, Sciences Po entend également
préserver son environnement juridique, considéré par ses dirigeants
comme plus souple que celui des universités. Dans la mesure où l’IEP de
Paris est géré, aux plans administratif et financier, par la FNSP, toutes les
règles qui s’appliquent au fonctionnement de l’ensemble sont des règles
de droit privé. Le droit privé régit en conséquence toutes les fonctions
support liées à la gestion de l’établissement : ressources humaines,
immobilier, comptabilité, commande. Dans tous ces domaines, la gestion
de l’IEP par la FNSP soustrait l’établissement aux règles applicables aux
personnes publiques : le droit public n’y est appliqué que d’une manière
résiduelle.
Les personnels
Les salariés de la FNSP sont des contractuels de droit privé,
soumis au code du travail et à des accords d’entreprise. Cette particularité
permet à la FNSP de recruter sous statut de droit privé des personnels
administratifs, ainsi que des enseignants-chercheurs, et de compléter la
rémunération des enseignants sous statut public, affectés à l’IEP et
rémunérés directement par l’Etat, par des contrats de droit privé. L’IEP
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peut ainsi bénéficier à la fois des personnels de la FNSP et des
fonctionnaires qui lui sont affectés, sans pour autant être contraint,
comme les universités par exemple, par un plafond d’emplois et un
plafond de masse salariale.
L’immobilier
Historiquement, la Fondation nationale des sciences politiques
(FNSP) a été créée pour gérer le patrimoine de l’ancienne Ecole libre des
sciences politiques, principalement le bâtiment du 27, rue Saint-
Guillaume. Sciences Po bénéficie aujourd’hui d’un patrimoine propre qui
s’est fortement accru depuis 1945 grâce aux dotations budgétaires
publiques et qui lui permet de ne pas dépendre de locaux appartenant à
l’Etat.
La comptabilité
La FNSP a une comptabilité privée relevant du plan comptable
général. Elle n’est donc pas soumise aux règles de la comptabilité
publique, et n’est pas astreinte au principe de séparation de l’ordonnateur
et du comptable. La FNSP peut lever des fonds privés et effectuer des
placements financiers susceptibles d’améliorer ses ressources propres,
sans avoir l’obligation de déposer ses fonds au Trésor public.
L’acquisition de biens et services, la construction et la
réhabilitation d’immeubles
Jusqu’en 2005, la FNSP a échappé aux règles du code des
marchés publics en ce qui concerne l’acquisition des biens et services, la
construction et la réhabilitation d’immeubles, et à l’application de la loi
n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à
ses rapports avec la maîtrise d’oeuvre privée. Toutefois, à compter de la
publication de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux
marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non
soumises au code des marchés publics, la FNSP
s’est trouvée
de jure
placée sous le régime prévu pour les organismes de droit privé satisfaisant
les conditions énumérées à l’article 3.I.1° de l’ordonnance.
L’architecture
juridique
et
organisationnelle
retenue
pour
Sciences Po s’est donc renforcée depuis 1945, mais elle n’a jamais varié
quant à ses principes directeurs. Elle a permis à la fondation, héritière de
l’Ecole libre des sciences politiques, de conserver une maîtrise complète
sur l’ensemble des missions concourant à la réalisation de son objet
social, y compris l’enseignement, tout en s’appuyant sur un établissement
public pour bénéficier des prérogatives normalement réservées à cette
catégorie d’organismes. Sciences Po a en outre bénéficié à la fois d’un
soutien financier majoritaire de l’Etat et du concours de personnels
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relevant du ministère chargé de l’enseignement supérieur, sans être
soumis pour autant aux contraintes des organismes publics.
Le réseau des IEP de province
A l’origine, les l’Instituts d’études politiques (IEP) de province
formaient un réseau organisé sous l’égide de la Fondation nationale des
sciences politiques (FNSP) et bénéficiaient du soutien matériel et
financier de la fondation. Ce réseau a aujourd’hui beaucoup perdu de sa
vitalité et le développement récent des IEP de province s’est fait en réalité
sans lien avec celui de Sciences Po Paris et de ses campus délocalisés,
même si la fondation met toujours trente-neuf salariés à la disposition de
ces IEP.
Les Instituts d’études politiques (IEP) de province
Le statut de l’IEP de Paris est très différent de celui des huit IEP de
province : les IEP de Strasbourg (créé en 1945), Bordeaux, Grenoble, Lyon,
Toulouse (créés en 1948), Aix-en-Provence (créé en 1956), Lille et Rennes
(créés en 1991).
Conformément aux dispositions de l’article L. 621-1 du code de
l’éducation, «
les Instituts d’études politiques ont pour mission de compléter
l’enseignement des sciences sociales, administratives et économiques donné
par les universités
». Tous les IEP sélectionnent leurs étudiants à l’entrée et
délivrent un diplôme propre conférant le grade de master. Cependant, à la
différence de l’IEP de Paris, qui s’est rapidement autonomisé, les IEP de
province sont adossés à une université et sont gérés selon les règles du droit
public.
Leur statut est fixé par le décret n° 89-901 du 18 décembre 1989
modifié relatif aux Instituts d’études politiques, qui prévoit que les IEP
constituent, soit des instituts internes à une université, soit des établissements
à caractère administratif rattachés à un établissement public à caractère
scientifique, culturel et professionnel. Lorsque les IEP ont le statut
d’établissement public administratif « rattaché », les modalités d’organisation
sont fixées par une convention passée avec l’université de rattachement.
Six des huit IEP de province (Aix-en-Provence, Lille, Lyon, Rennes,
Strasbourg, Toulouse) organisent depuis juin 2008 un concours commun
d’admission en première année. La taille des IEP de province est nettement
inférieure à celle de l’IEP de Paris. Celui qui comptait, en effet, plus de 8 000
étudiants en formation initiale en 2010-2011, alors que les effectifs des IEP
de province sont compris entre 1 100 et 1 800 étudiants.
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22
II
-
Une gouvernance complexe
La
dualité
institutionnelle
de
Sciences Po
entraîne
une
complexité particulière de la gouvernance de l’ensemble constitué par la
Fondation nationale des sciences politiques et l’Institut d’études
politiques de Paris. Chacune des deux personnes morales dispose, en
effet, de ses instances propres, ce qui rend nécessaire la mise en place de
mécanismes de coordination et de mise en cohérence efficaces. Les
directions centrales de Sciences Po bénéficiant d’une grande liberté
d’initiative, la question de la capacité des instances statutaires à contrôler
leur action est donc essentielle.
A - Des instances nombreuses
1 -
Le conseil d’administration de la FNSP
Les dispositions statutaires de la FNSP
8
prévoient que celle-ci est
gérée par un conseil d’administration composé de trente à quarante
membres :
-
six
professeurs
d’université
ou
d’un
établissement
d’enseignement supérieur ;
-
un représentant du CNRS ;
-
deux membres des grands corps de l’Etat ou secrétaires
généraux ou directeurs de ministère ;
-
quatre personnalités choisies en fonction de leur activité
politique, économique ou sociale, parmi lesquelles trois
représentants des organisations syndicales ;
-
le directeur de l’ENA et le directeur de l’IEP ;
-
dix à quinze membres représentants des auteurs de libéralités ;
-
cinq représentants élus du personnel de la fondation.
La loi du 2 juillet 1998 a par ailleurs prévu que, lorsque le
conseil d’administration examine le budget de l’Institut d’études
politiques de Paris et fixe les droits de scolarité pour les formations
8
Les règles de gouvernance de la FNSP, issues de l’ordonnance de 1945 et
complétées par la loi du 2 juillet 1998, ont été inscrites dans le code de l’éducation.
Elles ont été approuvées par son conseil d’administration à l’occasion de la séance du
2 décembre 2001. Ces règles sont complétées par un décret du 22 mars 1946 et par un
décret du 28 décembre 1972, modifié par des décrets du 15 mars 1996 et du
26 mars 1999.
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menant à des diplômes propres de l’établissement, cinq représentants des
étudiants élus au conseil de direction de l’institut y participent avec voix
délibérative.
La composition du conseil d’administration de la FNSP diffère
de celle d’un conseil d’administration universitaire. La représentation des
personnels de la fondation est beaucoup plus réduite que dans une
université, et la représentation des étudiants n’est pas prévue, sauf pour
les séances consacrées au budget ou celles prévoyant la fixation des droits
de scolarité. En outre, dix à quinze membres du conseil représentent les
« auteurs de libéralités », constituant ainsi une catégorie propre.
Ni le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, ni
le ministère chargé du budget, tutelles de Sciences Po, ne disposent de
représentants au sein du conseil d’administration, alors que l’Etat est le
financeur majoritaire de la fondation.
Le conseil d’administration doit se réunir au moins une fois par
semestre
9
. Les statuts prévoient que les élections de son président et de
l’administrateur sont acquises à une majorité qualifiée des deux tiers, tout
comme
les
délibérations
portant
sur
d’éventuelles
modifications
statutaires. Le conseil d’administration est appelé à délibérer sur
l’ensemble des questions budgétaires, financières et de personnel de la
fondation
.
Enfin, le décret statutaire du 22 mars 1946 prévoit que « les
règles relatives à l’administration et au fonctionnement de l’établissement
fixées par le présent décret ne seront modifiées qu’après avis du conseil
d’administration de la fondation ».
2 -
Les instances statutaires de l’Institut d’études politiques (IEP)
L’article 3 du décret n° 85-497 du 10 mai 1985 prévoit que l’IEP
est dirigé par un directeur et administré par un conseil de direction, et
qu’il comporte une commission paritaire et un conseil scientifique.
Le conseil de direction se prononce sur les statuts de
l’établissement, qu’il arrête à une majorité des deux tiers, et sur les
décisions visant à nommer le directeur ou à mettre fin à ses fonctions
(articles 1
er
et 4 du décret). Par ailleurs, « il détermine la politique
générale de l’établissement, notamment en approuvant le contrat
d’établissement. Il fixe les conditions d’admission des élèves et
9
En pratique, le conseil d’administration s’est réuni quatre fois en 2006, trois fois en
2007, trois fois en 2008, quatre fois en 2009, trois fois en 2010 et trois fois en 2011.
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l’organisation des études ainsi que les conditions de recrutement des
chargés d’enseignement. Il arrête les règles intérieures de l’institut. »
(art. 5 du décret). Il est composé majoritairement de représentants élus
des enseignants et des étudiants, en nombre égal, ainsi que de 12 % au
plus de représentants élus du personnel de la fondation, et de membres de
droit et de personnalités extérieures (art. 6 du décret).
Il convient de souligner la grande continuité qui caractérise la
fonction de président du conseil de direction, puisque son titulaire, par
ailleurs membre du conseil d’administration de la fondation, occupe cette
fonction depuis 1988.
L’article 7 du décret prévoit qu’un conseil composé des
enseignants-chercheurs affectés à l’établissement est consulté sur les
recrutements et les nominations dans les conditions prévues par le décret
n° 84-431 du 6 juin 1984 relatif au statut des enseignants-chercheurs de
l’enseignement supérieur. Ce conseil est souvent dénommé « conseil de
l’article 7 ».
L’article 8 du décret prévoit par ailleurs l’existence d’une
commission paritaire : « La commission paritaire est consultée, dans les
conditions prévues par les statuts, sur les questions concernant la
pédagogie et la vie de l’établissement. […] Elle est composée en nombre
égal de représentants élus des personnes qui assurent un enseignement et
des étudiants ». Cette commission joue le rôle dévolu au conseil de la vie
étudiante dans les universités.
Enfin l’article 10 du décret prévoit que « le conseil scientifique
peut être consulté sur les questions concernant la liaison entre
l'enseignement et la recherche ». Il est composé, selon les modalités
prévues par les statuts de l’établissement, des enseignants-chercheurs et
enseignants affectés à l’établissement, de membres de droit, de
personnalités désignées en raison de leur compétence, de représentants
des chargés d’enseignement, désignés pour trois ans, de représentants des
services d’études et de recherche, et de représentants des étudiants de
troisième cycle élus pour un an.
3 -
La gouvernance de la recherche
La recherche relève à Sciences Po de la compétence de la FNSP
et est encadrée par deux types d’instances : des instances de direction
d’une part, et des instances de concertation d’autre part, qui fonctionnent
de manière collégiale mais qui ont également un pouvoir de décision. Une
difficulté provient de ce qu’une partie de ces instances relève de la FNSP
- le conseil d’administration, la commission paritaire du personnel
scientifique dite « commission des chercheurs » - et l’autre partie de
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l’Institut d’études politiques de Paris (IEP) - le conseil scientifique et le
conseil dit « de l’article 7 ».
A côté des organes statutaires ont été créées deux instances
informelles.
Le « bureau scientifique », coprésidé par le président du conseil
scientifique et par le président du « conseil de l’article 7 », a pour
principale mission d’aider à la conception et à la mise en oeuvre de la
politique scientifique de l’établissement. Cette instance, où l’ensemble
des composantes de la communauté académique de Sciences Po est
représenté, sert d’espace de réflexion et d’orientation de la politique de
recherche. Ce bureau a fait l’objet de critiques lui reprochant de vider de
leur sens certaines institutions statutaires, telles que le « conseil de
l’article 7 ».
Un « sénat académique » réunit enfin, une à deux fois par an,
l'ensemble des chercheurs et enseignants-chercheurs de Sciences Po, pour
débattre
collectivement
des
grandes
questions
scientifiques
de
l’établissement. Ce sénat, qui reste une instance informelle et se réunit
peu souvent, n’apparaît pas comme une institution forte, en mesure de
contrebalancer les pouvoirs des instances de direction.
B - Un exécutif unifié
Conformément aux dispositions du décret n° 72-1266 du
28 décembre 1972 modifié, l’administrateur de la FNSP est désigné par le
ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche, sur
proposition du conseil d’administration de la fondation. L’administrateur
siège au conseil d’administration avec voix délibérative. Le directeur de
l’IEP est, quant à lui, nommé par décret du Président de la République,
sur proposition du conseil de direction de l’IEP, et a également voix
délibérative au conseil d’administration de la Fondation nationale des
sciences politiques (FNSP).
Quand les deux responsabilités sont exercées par la même
personne, la nomination de l’administrateur-directeur est donc le fruit
d’un consensus entre le Gouvernement, le conseil de direction de l’IEP et
le conseil d’administration de la FNSP. L’administrateur-directeur siège
avec voix délibérative au conseil d’administration de la fondation et
assiste au conseil de direction de l’IEP. Il est ainsi censé assurer la
continuité entre la politique pédagogique de l’établissement, sa stratégie
de recherche et la gestion des moyens qui leur sont alloués.
L’administrateur de la fondation dirige également l’ensemble de
ses services. Dans l’exercice de ses missions, il s’appuie sur un exécutif
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collégial comprenant un comité de direction générale, qui réunit les
directeurs adjoints de l’Institut d’études politiques (IEP), et un comité
exécutif (« comex »), composé de l’ensemble des « cadres dirigeants » de
la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP).
Les fonctions d’administrateur de la fondation et de directeur de
l’institut ont presque toujours été confiées à une même personne. Ce
cumul de fonctions n’est pas une obligation imposée par les textes, mais a
été la règle depuis 1945, car l’établissement y trouve des avantages
pratiques
10
. Il permet, en effet, d’atténuer les effets négatifs de la dualité
des organes de décision et de l’absence de compétence de l’IEP en
matière de recherche. En revanche, il place structurellement l’exécutif en
position de force par rapport aux instances délibérantes, puisque
l’administrateur-directeur dispose d’une vision d’ensemble sur le contenu
des délibérations des conseils de l’IEP et de la FNSP. Cette situation peut
conduire à des dérives si les instances collégiales de la fondation,
notamment le conseil d’administration, ne jouent pas pleinement leur
rôle.
III
-
Une organisation source de
dysfonctionnements et aux perspectives incertaines
A - Les difficultés liées à l’organisation de Sciences Po
1 -
Une structure séparant l’enseignement et la gestion
Le schéma retenu pour l’organisation de Sciences Po est
complexe et suppose des mécanismes efficaces de coordination entre les
instances délibératives de l’IEP et de la FNSP pour assurer la cohérence
du pilotage de l’institution. L’Agence d’évaluation de la recherche et de
l’enseignement supérieur (AERES) en 2008 et la Cour lors de son
précédent contrôle, qui portait sur les années 1998 à 2002, ont, en effet,
déjà souligné les difficultés et les risques entraînés par les décisions prises
au sein de l’IEP, lorsque leur impact en termes de moyens n’est pas
simultanément appréhendé de façon précise par la FNSP.
10
Les deux fonctions ont cependant été dissociées pendant une brève période, entre
1947 et 1950. Il convient également de rappeler qu’à l’origine, la FNSP comptait
également un secrétaire général, essentiellement en charge de la recherche et des
Presses. Cette fonction a été scindée en 1991 avec la mise en place d’un directeur
scientifique et d’un directeur administratif et financier.
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Or, à cet égard, la forte dichotomie institutionnelle entre le
pilotage pédagogique, d’un côté, et la gestion administrative et financière,
de l’autre, ne peut être entièrement comblée par le cumul des fonctions de
directeur de l’Institut d’études politiques (IEP) et d’administrateur de la
FNSP : une coordination reposant sur une seule et même personne est par
nature fragile.
Cette analyse a d’ailleurs été reconnue par le président de la
fondation lui-même, lors de la séance du conseil d’administration du
11 mai 2010. Avant d’inviter ses collègues à ouvrir le débat sur la
présentation du directeur de l’IEP consacrée aux « actualités de l’IEP de
Paris », il précisa en effet que « c’est la première fois depuis près d’un
quart de siècle que revient en discussion devant lui l’évolution générale
de l’institut au point de vue de l’enseignement. Habituellement, le conseil
traite très peu des problèmes de l’IEP. Il me paraît bien qu’une fois par an
nous fassions le point sur l’évolution de l’institut ».
Cette formulation met particulièrement en lumière les limites de
l’article L. 758-1 du code de l’éducation, aux termes duquel la FNSP
« assure la gestion administrative et financière de l’Institut d’études
politiques de Paris », dès lors que le conseil d’administration de la
fondation peut être ainsi amené à constater de lui-même qu’il se tient à
l’écart de l’examen des conditions de mise en oeuvre de la mission
d’enseignement.
La rénovation de la bibliothèque
La lecture du procès-verbal de la séance du conseil d’administration
de la fondation du 13 octobre 2009 offre un bon exemple des difficultés de
cette organisation. Parmi les points discutés par le conseil d’administration
lors de cette séance figurait la question du financement des opérations de
rénovation des salles de bibliothèque du 27, rue Saint-Guillaume. A cette
occasion a été présenté un projet de restructuration, projet lourd puisque cette
opération visait à réaménager en totalité la bibliothèque pour un coût annoncé
de 6,9 M€. Le conseil d’administration a alors été appelé à se prononcer sur
l’emprunt qui devait être souscrit pour financer l’opération, d’un montant de
5,2 M€, les travaux ayant commencé à l’été 2009. Plusieurs membres du
conseil d’administration se sont alors émus du fait qu’ils n’étaient saisis que
du projet d’emprunt, sans avoir été dûment informés du lancement de
l’opération pour en valider le principe, le programme et le coût d’objectif. Le
président du conseil d’administration a reconnu à cette occasion que les
membres du conseil n’avaient pas été suffisamment informés. Cet épisode
atteste la difficulté à assurer la bonne information de l’ensemble des
instances dirigeantes de Sciences Po et conduit à s’interroger sur la capacité
de contrôle du conseil d’administration de la fondation.
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28
2 -
Le sens et l’intérêt de la construction FNSP-IEP en 2012
A l’occasion d’un débat sur la politique scientifique de Sciences
Po, qui s’est tenu au conseil d’administration du 5 mai 2009, différents
intervenants ont évoqué les caractéristiques propres de la structuration
organique de Sciences Po, l’identité profonde de la Fondation nationale
des sciences politiques (FNSP), et le sens qu’il convient de donner à la
singularité qui consiste à confier la gestion d’un établissement public à
une fondation de droit privé.
De l’avis de certains de ces intervenants, Sciences Po ne pouvait
être une université, parce que l’établissement a une vocation beaucoup
plus large. Pour d’autres, la fondation ne pouvait être confondue avec
l’Institut d’études politiques
de Paris (IEP), car elle est nationale et a, à ce
titre, une responsabilité particulière à l’égard des autres IEP. Enfin, un
membre du conseil a mis l’accent sur le fait qu’une particularité forte de
l’établissement est le grand nombre des intervenants extérieurs, qui
prennent en charge 93 % des cours assurés à Sciences Po : cette
différence essentielle avec le fonctionnement des universités impose donc
de mettre en place des structures de coordination
ad hoc
entre chercheurs
et enseignants, dans la mesure où, contrairement à la plupart des
établissements d’enseignement supérieur, le lien entre l’enseignement et
la recherche n’est pas assuré organiquement.
A cette occasion, le directeur de l’IEP a vigoureusement plaidé
pour une imbrication toujours plus forte entre la FNSP et l’IEP, tout en
précisant que, selon lui, « les travaux portés par une communauté
académique qui, progressivement, s’est constituée, avec des débats, et des
débats durs - et c’est heureux qu’il y en ait eu -
est la bonne politique
pour que nos deux institutions, Fondation nationale des sciences
politiques et IEP, ne guignent pas telle ou telle place dans les
classements, ce n’est pas le sujet, mais continuent de jouer un rôle dans
notre pays, en Europe et par le monde. C’est bien l’objet social de la
Fondation nationale des sciences politiques ».
Pourtant, le contexte dans lequel a été élaborée à l’origine cette
construction juridique complexe a aujourd’hui beaucoup évolué et la
question du statut de Sciences Po mérite de ce fait même d’être examinée.
Ainsi, le statut de « grand établissement » conféré à l’IEP lui permettrait
désormais à lui seul, sans recourir à l’intermédiaire de la fondation, de
mettre en place des dérogations importantes au droit commun des
établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel
(EPSCP) :
sélection
à
l’entrée,
diplômes
d’établissement,
droits
d’inscription propres, etc.
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29
De même, l’adoption de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007
relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) donne
aujourd’hui aux établissements d’enseignement supérieur les moyens
d’une autonomie de gestion, sans qu’il soit besoin de mettre en place une
articulation semblable à celle qui prévaut entre la Fondation nationale des
sciences politiques (FNSP) et l’Institut d’études politiques (IEP). Ainsi,
l’avantage qu’apportait à Sciences Po le statut de fondation pour la
gestion de ses immeubles n’existe plus par rapport aux universités, qui
peuvent désormais bénéficier de la dévolution de leur patrimoine. Plus
encore, le passage au régime des responsabilités et compétences élargies
(RCE), que la loi du 10 août 2007 a mis en place, permet aux universités
de gérer globalement leur masse salariale, ce qui n’est actuellement pas
possible dans l’ensemble formé par l’IEP et la FNSP, puisque les
fonctionnaires affectés à l’IEP continuent d’être rémunérés directement
par l’Etat.
Aujourd’hui, Sciences Po estime surtout que son statut particulier
lui permet de bénéficier des facilités apportées par ses propriétés
immobilières et de la souplesse de gestion qu’offre le droit privé, tout en
ayant un large accès aux financements publics.
Or, cette architecture présente des inconvénients majeurs parmi
lesquels on peut mentionner :
-
la difficile coordination entre instances de gouvernance de
l’IEP et conseil d’administration de la fondation, qui entraîne la
faiblesse du contrôle réel que ceux-ci exercent sur la gestion de
l’établissement ;
-
la difficulté de développer une politique scientifique cohérente
entre
l’IEP
et
la
FNSP,
l’un
étant
responsable
de
l’enseignement, l’autre de la recherche, contrairement à
l’organisation mise en place par les établissements les plus
réputés dans le monde ;
-
l’impossibilité de gérer globalement la masse salariale des
enseignants-chercheurs, une partie d’entre eux étant rémunérée
directement par l’Etat et l’autre par la fondation ;
-
le flou juridique régnant quant aux règles de droit applicables
aux deux entités qui composent Sciences Po, source de dérives
dans des domaines essentiels ;
-
l’impossibilité d’un contrôle exercé par l’Etat, qui est tenu dans
l’ignorance des principales décisions de gestion, alors qu’il est
pourtant le principal financeur des activités de Sciences Po.
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30
B - Sciences Po et l’Etat
Lors de son précédent contrôle portant sur les années 1998 à 2002,
la Cour avait relevé que la Fondation nationale des sciences politiques
(FNSP) ne disposait pas d’une dotation financière suffisante pour assurer
son fonctionnement, à la différence de la plupart des fondations. Elle
ajoutait que « les fondations peuvent bénéficier de subventions de l’Etat,
des collectivités locales ou de leurs établissements publics, mais si elles
se trouvent entièrement financées par des fonds publics, elles deviennent
alors des établissements publics déguisés. Une certaine autonomie
financière paraît donc devoir accompagner l’autonomie de gestion, faute
de quoi l’Etat ou le juge administratif pourrait être tenté de redéfinir la
nature juridique de l’organisme ».
Certes, l’établissement a beaucoup augmenté sa part de ressources
propres entre 2001 et 2010. Il n’en reste pas moins dépendant
majoritairement des subventions publiques, au point que l’Institut
d’études politiques (IEP) et la FNSP sont qualifiés d’ « opérateurs de
l’Etat » dans les documents budgétaires du ministère chargé du budget,
notamment dans les projets annuels de performances et les documents
budgétaires de synthèse annexés aux projets de loi de finances
(« jaunes »)
11
.
Cette dépendance financière à l’égard de l’Etat est confirmée par le
fait que la FNSP est considérée comme un organisme divers
d’administration centrale dans la comptabilité nationale, mais aussi dans
la comptabilité générale et budgétaire de l’Etat. A ce titre, elle est
valorisée au compte général de l’Etat pour une valeur d’équivalence de
29 M€ et sa dette est intégrée dans la dette de l’ensemble des
administrations publiques françaises, ce qui justifie que l’arrêté du
28 septembre 2011 fixant la liste des organismes divers d’administration
centrale ayant interdiction de contracter auprès d’un établissement de
crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois mentionne
explicitement la FNSP parmi les entités concernées.
C - L’initiative d’excellence « Sorbonne Paris Cité »
Sciences Po a souhaité s’inscrire dans la dynamique de
regroupement des établissements d’enseignement supérieur et de
11
Le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et
comptable publique prévoit que ses dispositions sont applicables aux personnes
morales de droit privé après avis conforme du ministre chargé du budget, si leurs
statuts le prévoient. L’Etat devra se poser la question de l’inclusion de Sciences Po
dans le champ d’application de ce texte.
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31
recherche, engagée à la suite de la loi de programme du 18 avril 2006
pour la recherche et du lancement du programme des investissements
d’avenir à la fin de l’année 2009.
Le pôle de recherche et d’enseignement supérieur (PRES)
« Sorbonne Paris Cité », créé le 10 février 2010 sous la forme d’un
établissement public de coopération scientifique (EPCS), réunit l’Institut
d’études politiques (IEP), quatre universités
─
Sorbonne Nouvelle Paris
III, Paris Descartes Paris V, Paris Diderot Paris VII et Paris Nord Paris
XIII
─
et trois établissements d’enseignement supérieur à statut
particulier, l’Institut national des langues et civilisations orientales,
l’Institut de physique du globe de Paris et l’Ecole des hautes études en
santé publique de Rennes.
La convention qui lie ces établissements donne notamment pour
mission au PRES de coordonner les politiques de formation et de
recherche des établissements membres. Elle prévoit la création de masters
communs à Sciences Po et aux facultés de droit du PRES, d’une
préparation aux concours de l'Ecole nationale de la magistrature ainsi qu'à
l'examen d'entrée du Centre régional de formation et d'aptitude à la
profession d'avocat. Une coordination des formations doctorales, le
lancement d’appels d’offres communs et la mise en place de dispositifs
partagés d'accueil des étudiants, enseignants et chercheurs étrangers sont
également envisagés.
Les membres du PRES ont présenté un projet d’initiative
d’excellence (IDEX) dans le cadre des appels d’offres organisés au titre
du programme des investissements d’avenir. Après avoir été rejeté lors de
la première vague d’appels d’offres, le projet « Sorbonne Paris Cité » a
été retenu dans le cadre de la seconde vague. Il vise à donner naissance
d’ici à quatre ans à une nouvelle université de près de 120 000 étudiants,
l’« Université Sorbonne Paris Cité ».
Malgré le décès du directeur de l'IEP, qui s'était fortement
impliqué dans son élaboration, une convention de préfinancement à
hauteur de 11,9 M€ a pu être signée en mai 2012. Si l’IDEX aboutit, elle
pourra bénéficier du produit du placement d’une dotation non
consommable de 800 M€, soit un financement estimé à 245,3 M€ sur la
période de dix ans envisagée dans le projet. Conformément aux clauses
figurant dans la convention de préfinancement, la convention définitive
devait être signée avant le 4 novembre 2012. Celle-ci ayant été validée le
24 octobre 2012 par le conseil d'administration du PRES, après
approbation des instances dirigeantes de chacun de ses membres, le
président de Sorbonne Paris Cité est désormais habilité à la signer.
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32
Ce projet pose manifestement la question du positionnement de
Sciences Po au sein de l’IDEX « Sorbonne Paris Cité » et du statut de la
FNSP dans la future configuration du PRES, si ce nouvel ensemble devait
devenir organiquement une confédération universitaire unifiée, ainsi que
le projet de l’IDEX l’a clairement indiqué.
Or, alors même que, comme les autres membres du PRES,
Sciences Po s’est engagé dans le cadre de ce projet, devant le jury de
l’IDEX, à une gouvernance unifiée du nouvel ensemble universitaire à
l’horizon 2016, il est apparu lors de l’audition des dirigeants de Sciences
Po devant la Cour qu’ils paraissaient en fait peu convaincus de l’intérêt et
de la faisabilité du projet d’ « Université Sorbonne Paris Cité ».
L’ambiguïté de cette position, qui paraît privilégier un simple accès aux
financements IDEX par rapport à l’engagement pris lors de la
présentation du projet IDEX, et qui pose le problème de la compatibilité
entre la convergence statutaire que suppose une gouvernance unifiée avec
les autres membres du PRES et, par ailleurs, la volonté de Sciences Po de
conserver son organisation actuelle, doit être particulièrement soulignée.
______________________
CONCLUSION
_____________________
En
définitive,
la
dualité
organique
sur
laquelle
repose
l’architecture institutionnelle de Sciences Po entraîne des difficultés de
pilotage nées de la séparation entre les missions de gestion et
d’enseignement d’une part, et entre les missions de recherche et
d’enseignement, d’autre part.
Cette situation a entraîné la mise en place d’une gouvernance
atypique, mais surtout de modalités de coordination et de pilotage
insuffisamment efficaces. Sciences Po est également caractérisé par la
faiblesse des organes de contrôle, tant internes qu’externes. Sur ce
dernier point, l’absence totale de capacité d’information de l’Etat par le
biais d’une représentation auprès des instances statutaires de la
fondation,
alors
même
qu’il
la
finance
majoritairement,
est
particulièrement critiquable.
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Chapitre II
Un développement rapide et des
innovations nombreuses, mais à un coût
élevé
Depuis dix ans, Sciences Po a évolué de manière importante
en
développant l’ensemble de ses activités, qu’il s’agisse de la formation
initiale - le nombre de ses élèves ayant été multiplié par deux -, de la
formation continue, de la recherche ou de la documentation.
Ces développements, ainsi que les nombreuses innovations qui
ont été engagées, ont eu un coût d’autant plus important que le modèle
pédagogique de l’établissement suppose des charges de fonctionnement
plus élevées que celles des universités, ce qui oblige l’Etat, principal
financeur, à s’interroger sur la soutenabilité financière à moyen et long
terme de l’institution.
I
-
Un développement rapide des activités de
formation et de recherche
Sciences Po occupe une position particulière dans le paysage de
l’enseignement supérieur. Dans le champ de la formation initiale, au-delà
de sa filière de préparation aux concours administratifs, l’Institut d’études
politiques (IEP) peut être considéré comme une alternative aux grandes
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écoles, avec lesquelles il partage son modèle de sélection à l’entrée et de
pédagogie en petits groupes. La multiplication par deux du nombre
d’étudiants sur la dernière décennie a cependant transformé la dimension
de l’établissement, dont les effectifs se rapprochent désormais davantage
de ceux d’une petite université. Dans le domaine de la recherche en
sciences humaines et sociales, l’établissement se pose également en
concurrent des établissements universitaires
.
A - Un effectif étudiant doublé en moins de dix ans
1 -
La croissance et l’internationalisation des effectifs
Sciences Po s’est lancé dans une politique de croissance à partir
des années 2000, à un moment où il comptait un peu moins de 4 000
étudiants inscrits en formation initiale. Entre 2005 et 2011, cet effectif est
passé de 4 923 à 8 539 étudiants.
Tableau n° 1 :
Evolution du nombre d’étudiants inscrits en
formation initiale
Source : comptes financiers, tableau des effectifs – calcul Cour des comptes
A la différence de la plupart des universités, les étudiants de
master sont plus nombreux que ceux du « collège universitaire »
12
, des
12
Le collège universitaire correspond au premier cycle universitaire.
2004-2005
2009-2010
Evolution
2005/2010
2010-2011
Collège universitaire
1 410
3 457
145,2%
3 837
Première année
408
1 319
1 472
Deuxième année
543
1 170
1 221
Troisième année
459
968
1 144
Master
2 550
3 495
37,1%
3 947
Doctorat
583
581
-0,3%
524
Préparations aux
concours
380
282
-25,8%
231
Total formation initiale
4 923
7 815
58,7%
8 539
Etudiants étrangers en
échange
647
1 295
100,2%
1 471
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35
procédures d’admission permettant d’accueillir de nouveaux étudiants
directement en 4
ème
année.
L’augmentation du nombre d’étudiants est encore plus forte si
l’on prend en compte les étudiants étrangers qui viennent passer un
semestre ou une année à Sciences Po. L’établissement a, en effet,
développé une stratégie de recrutement international qui absorbe des
moyens financiers importants. La direction des affaires internationales et
des échanges - composée de 36 agents en 2011 - a mis en place une
organisation très structurée de chargés de mission, qui ont pour tâche de
faire la promotion de Sciences Po dans des lycées cibles à l’étranger. Par
ailleurs, l’envoi systématique de tous les étudiants de troisième année à
l’étranger permet à Sciences Po d’entretenir des partenariats conclus avec
plus de 400 universités étrangères.
En 2011, l’établissement comptait ainsi 35 % d’étudiants
étrangers et 7 % de binationaux parmi ses étudiants.
Un peu plus de la
moitié des étudiants étrangers viennent suivre un cursus diplômant ; le
reste effectue des séjours d’études dans le cadre d’accords d’échange.
L’augmentation du nombre d’étudiants étrangers a modifié
l’offre de formation et a conduit à une internationalisation croissante des
cursus sous plusieurs formes :
développement des enseignements de
langues vivantes, création de masters spécifiques entièrement en anglais,
mise en place de 23 doubles diplômes avec des universités étrangères,
formation des personnels administratifs en contact avec les étudiants à
l’anglais, etc.
Depuis plusieurs années, l’établissement est soucieux de ne plus
apparaître comme un complément de formation ou une préparation à
l’Ecole nationale d’administration (ENA) et cherche à poursuivre son
ouverture internationale, tout en promouvant ce qu’il appelle le
« positionnement en propre » de ses programmes.
Pour atteindre cet objectif, Sciences Po, qui s’était déjà adapté à
l’architecture européenne du LMD
13
, a de nouveau réformé son
organisation pédagogique. L’établissement fonctionnait depuis sa création
de façon centralisée, avec des directions académiques dotées d’importants
effectifs. La direction des études et de la scolarité (DES) concentrait
notamment un éventail de fonctions très larges, dont l’accueil des
étudiants, la gestion des admissions, de la scolarité et des différentes
13
Dans le cadre de l'harmonisation des cursus d'enseignement supérieur au niveau
européen, le cursus universitaire français s'organise désormais autour de trois
diplômes : la licence, le master et le doctorat
(LMD). Cette nouvelle organisation a
été mise en place en France à partir de l’année 2002. En 2006, l’ensemble des
universités et grands établissements français avaient adopté cette architecture.
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formations, la gestion de la vie étudiante, de l’orientation et de l’insertion
professionnelle, le recrutement et la coordination des vacataires
enseignants et le programme « diversité et égalité des chances ».
En 2009, les trois premières années ont été rassemblées en un
« collège universitaire », dirigé par un doyen s’appuyant sur les directeurs
des sept campus de Sciences Po. L’établissement a créé un diplôme
d’établissement («
bachelor
») délivré à l’issue du collège, pour faire
reconnaître la valeur du premier cycle. Ce diplôme ne donne pas une
équivalence à la licence, mais vise à être identifié à l’étranger et à donner
aux étudiants - notamment étrangers - une option de sortie au terme des
trois premières années de formation.
Des « écoles professionnelles » regroupant un ou plusieurs
masters ont été progressivement créées. Dirigées par des directeurs
disposant d’une autonomie de gestion accrue, elles visaient à donner à la
carte des formations une visibilité plus forte sur le plan international, tout
en permettant une meilleure articulation avec les secteurs professionnels
concernés. L’école de journalisme a été créée en 2005, suivie par l’école
de la communication en 2007, l’école de droit et le département
d’économie en 2009, puis l’école des affaires internationales en 2010.
Cette rapide expansion, qui a changé l’image et l’organisation de
Sciences Po, devrait se stabiliser dans les années à venir. Le programme
pluriannuel de recrutement adopté par le comité exécutif en décembre
2010 limite, en effet, à 1 500 étudiants le nombre de nouveaux entrants en
première année pour les cinq années à venir, avec pour objectif de
stabiliser le nombre d’étudiants inscrits en formation initiale autour de
10 000, hors étudiants étrangers en échange.
La formation continue a également connu un fort développement
sur la même période. Le nombre de stagiaires est passé de 5 081 en 2005
à 6 079 en 2010, le chiffre d’affaires de cette activité étant porté de
5,7 M€ à 10,5 M€ avec le développement de formations longues au tarif
plus élevé. Conformément aux dispositions du décret n° 85-1118 du
18 octobre 1985 « relatif aux activités de formation continue dans les
établissements publics d’enseignement supérieur relevant du ministre de
l’éducation nationale », la marge éventuelle sur coûts complets dégagée
en fin d’exercice est affectée en totalité au développement de la formation
continue.
2 -
Un établissement attractif
Il existe aujourd’hui quatre procédures d’admission en première
année de collège universitaire :
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MAIS A UN COUT ELEVE
37
-
la procédure d’admission générale,
-
la procédure d’admission internationale,
-
la procédure « convention éducation prioritaire
14
»,
-
et la procédure d’admission en double diplôme.
La procédure d’entrée au niveau bac + 1 a été supprimée en 2008
pour limiter les entrées aux premières années des niveaux L, M et D.
L’entrée en master se fait par deux procédures, l’une nationale (sur
examen écrit et oral), l’autre internationale (sur dossier et entretien).
Les taux d’admission sur la période 2005-2010 calculés par
Sciences Po montrent que l’augmentation du nombre de candidats a suivi
l’augmentation des places à l’entrée : selon les chiffres de l’établissement,
le taux d’admission est resté globalement stable en 1
ère
année
15
et a
légèrement augmenté en master, passant de 13 % à 19 %. La procédure
d’admission internationale (1 050 admis en 2010 en collège universitaire
et en master) laisse, en revanche, apparaître des taux d’admission
beaucoup moins sélectifs, compris entre 30 % et 40 % des candidats selon
les années.
L’attractivité de Sciences Po réside dans la valeur de son diplôme
et dans le fait qu’un étudiant, une fois entré, a de grandes chances de
l’obtenir. Compte tenu de la sélection effectuée à l’admission, le
pourcentage de redoublants est faible, compris entre 3 % et 6 % selon les
années.
L’enquête nationale conduite par le ministère de l’enseignement
et de la recherche en 2010 montre, par ailleurs, que le taux d’emploi des
diplômés des universités pour l’année universitaire 2007-2008 est de
91 %, trente mois après l’obtention du diplôme. L’étude conduite par
Sciences Po sur le devenir de ses diplômés 2010 indique pour sa part que
leur taux d’insertion professionnelle est de 92 %, douze mois seulement
après l’obtention du diplôme. Sciences Po comptabilise, toutefois, les
diplômés en stage parmi ceux exerçant une « activité professionnelle » :
hors stages, le taux d’emploi des diplômés 2010, douze mois après le
diplôme, est ainsi plus proche de 85 %, les situations de stage ou de
recherche d’emploi apparaissant plus nombreuses pour les masters
14
Cette procédure est ouverte aux élèves des établissements d’enseignement
secondaire situés en zone d’éducation prioritaire (ZEP) ayant conclu une « convention
éducation prioritaire » avec Sciences Po.
15
Entre 9 % et 11 % des candidats ayant retiré et rempli un dossier ont été admis
selon les années pour l’entrée en 1
ère
année sur examen, entre 21 % et 22 % pour la
procédure « mention très bien » (qui permet à certains étudiants ayant obtenu une
mention très bien au baccalauréat d’être dispensés de l’examen écrit), et entre 14 % et
17 % pour la procédure « conventions éducation prioritaire ».
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38
« Affaires
internationales »,
« Affaires
publiques »
ou
« Droit
économique ».
Sciences Po conserve, par ailleurs, de très bons résultats aux
concours de recrutement de la haute fonction publique. Cependant, les
effectifs de son année de préparation aux concours administratifs sont en
diminution, et 75 % de ses diplômés s’orientent désormais vers le secteur
privé.
Le salaire annuel moyen à la sortie a augmenté pendant la
période récente, passant de 33 068 € bruts pour les diplômés 2007 à
40 020 € bruts pour les diplômés 2010 : il convient toutefois de préciser
que ces données sont d’origine déclarative et ne permettent pas de tirer
des conclusions définitives, que seule une étude comparative avec les
diplômés des principaux établissements d’enseignement supérieur
français serait susceptible d’atteindre.
3 -
L’objectif de diversification sociale du corps étudiant
La diversification sociale du corps étudiant est un élément
essentiel du projet de l’établissement. En 2001, Sciences Po a notamment
lancé les « conventions éducation prioritaire » (CEP), qui ont bénéficié
depuis à 860 étudiants. Dans le cadre d’un bilan des CEP réalisé en 2011,
un chercheur au centre d’études européennes de Sciences Po a conduit
une enquête spécifique sur l’insertion des jeunes diplômés de 2006 à 2011
entrés à l’Institut d’études politiques (IEP) par cette voie. Selon cette
enquête,
le destin professionnel de ces étudiants est semblable à celui de
leurs camarades en termes de taux d’insertion, de niveau d’emploi occupé
et de salaire à la sortie
16
: ces étudiants présentent, en effet, sur le marché
du travail les mêmes diplômes que ceux qui ne sont pas passés par cette
filière.
Sciences Po s’est également donné pour objectif plus général
d’augmenter la part de boursiers parmi ses étudiants. En 2004, la réforme
du système des droits de scolarité, qui assure une corrélation entre le
montant des droits et les revenus du foyer de rattachement des étudiants,
s’est accompagnée de l’attribution aux étudiants boursiers d’un
complément financier égal à 50 % du montant des bourses de l’Etat
délivrées par le centre régional des oeuvres universitaires (CROUS). A la
rentrée 2009 ce complément a été porté à 75 % du montant des bourses
du CROUS.
16
Le taux de réponse au questionnaire (52 %) impose cependant une certaine
prudence dans l’interprétation des résultats.
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MAIS A UN COUT ELEVE
39
Dans le cadre du contrat quadriennal 2009-2012 conclu avec le
ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, Sciences Po
s’est engagé à accueillir 30 % de boursiers d’ici à 2012. L’examen
simultané des bilans de l’aide sociale réalisés par Sciences Po et des
données émanant du CROUS montre que l’établissement compte en
réalité 23 % de boursiers du CROUS en 2010-2011, auxquels s’ajoutent
3 % d’étudiants étrangers recevant une bourse de Sciences Po. Ces taux
sont, en outre, calculés par rapport aux seuls étudiants soumis aux droits
de scolarité (7 306 en 2010-2011), dont le nombre est inférieur au nombre
total d’étudiants inscrits en formation initiale (8 539). Même si une
progression a été enregistrée par rapport à l’année 2004-2005 - Sciences
Po ne comptait alors que 17 % de boursiers parmi les étudiants soumis
aux droits d’inscription -, il apparaît donc que l’objectif de 30 %
d’étudiants boursiers n’était pas atteint à la fin de 2011.
Par ailleurs, l’analyse de l’origine socio-professionnelle des
étudiants montre que la proportion d’étudiants en collège universitaire
ayant un parent cadre ou exerçant une « profession intellectuelle
supérieure » a augmenté au cours de la période récente, en passant de
58,5 % en 2005-2006 à 63,5 % en 2010-2011. Il convient cependant de
préciser que la nomenclature des catégories socio-professionnelles
(CSP)
17
, utilisée dans le cadre de l’enquête annuelle SISE
18
du ministère
de l’enseignement supérieur et de la recherche, reste globale et justifierait
la production de données plus fines.
Tableau n° 2 :
Origine socio-professionnelle des étudiants entrant au
collège universitaire (Parent 1) en %
Source : Sciences Po, réponse à l’enquête « SISE » du ministère de l’enseignement supérieur et
de la recherche
17
La nomenclature des « catégories socio-professionnelles » (CSP) a été définie par
l’INSEE en 1954, et remplacée depuis par la nomenclature des «
professions et
catégories socio-professionnelles » (PCS). Le « Parent 1 » représente le parent de
référence du foyer.
18
Système d'information sur la scolarité des élèves et étudiants du supérieur.
Année
1- Agriculteurs
2 - Artisans,
commerçants
3 - Cadres et
professions
intellectuelles
supérieures
4 - Professions
intermédiaires
5 - Employés /
ouvriers
8 - Sans
activité
professionnelle
9 - Non
renseigné
2005-2006
0,90%
6,60%
58,50%
20,10%
7,50%
0,90%
5,50%
2006-2007
1,00%
7,00%
57,60%
16,10%
9,40%
2,30%
6,70%
2007-2008
0,80%
8,30%
58,10%
15,20%
8,40%
2,20%
7,00%
2008-2009
0,50%
7,70%
62,10%
11,80%
9,10%
2,60%
6,30%
2009-2010
0,50%
6,90%
63,00%
12,20%
8,10%
2,40%
6,90%
2010-2011
0,50%
8,30%
63,50%
11,50%
8,40%
2,10%
5,70%
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40
Les tableaux transmis par Sciences Po montrent par ailleurs que
l’augmentation totale du nombre de boursiers en collège universitaire
s’est surtout faite au bénéfice de boursiers originaires de la catégorie
socio-professionnelle
« cadres
et
professions
intellectuelles
supérieures »
19
.
Tableau n° 3 : Origine socio-professionnelle des étudiants
boursiers du collège universitaire (Parent 1) en %
Source : Sciences Po
En sens inverse, la proportion d’étudiants issus de la catégorie
socio-professionnelle « cadres et professions intellectuelles supérieures »
tend à se réduire légèrement pour les étudiants entrant en première année
de master, comme cela ressort du tableau ci-après.
19
La notion de catégorie socio-professionnelle (CSP) - particulièrement dans ce cas -
ne recoupe que partiellement l’échelle des revenus. La CSP « cadres et professions
intellectuelles supérieures » comprend notamment les cadres de la fonction publique,
les professeurs de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur, les
médecins, les ingénieurs et cadres d’entreprise, les professions libérales et les
professions de l’information, des arts et des spectacles.
2006-2007
2007-2008
2008-2009
2009-2010
2010-2011
Agriculteurs, exploitants
3%
2%
1%
1%
1%
Artisans, commerçants et chefs d'entreprise
7%
6%
7%
8%
8%
Cadres et professions intellectuelles supérieures
24%
26%
28%
30%
35%
Professions intermédiaires
24%
25%
21%
21%
20%
Employés, ouvriers
29%
28%
30%
28%
27%
Sans activité professionnelle
7%
7%
8%
8%
7%
Non renseigné
6%
6%
5%
4%
2%
Population boursière
382
516
678
796
936
Effectif Collège
2 140
2 750
3 170
3 450
3 830
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Tableau n° 4 :
Origine socio-professionnelle des étudiants entrant en
master (Parent 1) en %
Source : Sciences Po, réponse à l’enquête « SISE » du ministère de l’enseignement
supérieur et de la recherche
Dans l’ensemble, la composition socio-professionnelle du corps
étudiant de Sciences Po reste proche de celle des classes préparatoires aux
grandes écoles (CPGE) et des grandes écoles.
Tableau n° 5 :
Origine socio-professionnelle des étudiants français en
2011-2012 en %
Source : ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, « Repères et
références statistiques sur les enseignements, la formation et la recherche – Edition
2012 »
4 -
La hausse des droits de scolarité
En 2003-2004, Sciences Po a mis en place des droits
d’inscription modulables en fonction du revenu des parents des étudiants.
Jusqu’à la rentrée 2009-2010, il n’existait qu’un seul barème composé de
huit niveaux, pour des droits allant de 0 à 5 300 € calculés sur l’ensemble
Année
1 –
Agriculteurs
2 - Artisans,
commerçants
3 - Cadres et
professions
intellectuelles
supérieures
4 - Professions
intermédiaires
5 - Employés
/ ouvriers
8 - Sans
activité
professionne
lle
9 - Non
renseigné
2005-2006
1,50%
8,30%
57,20%
16,10%
8,20%
1,40%
7,40%
2006-2007
1,20%
7,30%
55,20%
16,40%
7,90%
1,30%
10,80%
2007-2008
1,10%
7,80%
52,10%
16,40%
8,40%
1,20%
13,10%
2008-2009
1,00%
7,40%
52,50%
15,70%
8,70%
1,40%
13,40%
2009-2010
1,00%
7,60%
55,30%
15,50%
8,90%
1,70%
10,00%
2010-2011
1,10%
8,30%
54,10%
14,20%
8,80%
1,70%
11,90%
Agriculteurs,
artisans,
commerçants et
chefs d'entreprise
Cadres et
professions
intellectuelles
supérieures
Professions
Intermédiaires
Employés
Ouvriers
Retraités
et inactifs
Non
renseigné
Universités
9,2%
30,6%
12,7%
12,2%
10,4%
13,2%
11,7%
Grands établissements
8,7%
36,2%
12,5%
10,3%
11,3%
13,3%
7,8%
CPGE
10,9%
50,9%
12,7%
9,4%
6,3%
6,3%
3,4%
Universités de technologie et
INP
10,3%
48,0%
12,9%
7,4%
6,9%
9,2%
5,2%
Autres formations d'ingénieurs
non universitaires
11,8%
47,1%
11,1%
6,4%
5,1%
7,2%
11,3%
Ecoles de commerce, gestion,
vente et comptabilité
14,9%
37,9%
7,2%
6,0%
2,2%
4,7%
27,1%
Ecoles normales supérieures
8,0%
55,9%
9,7%
5,5%
2,5%
4,5%
14,0%
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des revenus familiaux de l’année n-1. Une commission de suivi social
pouvait être saisie pour réexaminer le montant des droits d’inscription en
cours d’année en cas d’événements particuliers affectant les revenus du
foyer (décès, chômage, divorce, retraite…).
Cette modulation des droits d’inscription s’est accompagnée d’un
dispositif de solidarité destiné aux étudiants boursiers du CROUS.
Ceux-ci sont exonérés de droits d’inscription et peuvent recevoir une
bourse complémentaire de scolarité, financée sur fonds propres. Depuis
2007, les étudiants de l’Union européenne peuvent bénéficier de ce
dispositif pendant un an. Les étudiants étrangers non éligibles aux bourses
du CROUS peuvent quant à eux postuler à la bourse Emile Boutmy, mise
en place en 2004 sur les fonds propres de Sciences Po (42 étudiants
concernés en 2010-2011).
A la rentrée 2009-2010, ce système a été modifié pour les
nouveaux entrants. Il existe dorénavant deux barèmes différenciés en
fonction du cycle d’étude auquel s’inscrit l’étudiant (collège universitaire
ou master). Cette modification s’est accompagnée de la création de deux
nouvelles tranches :
-
une tranche supérieure pour les familles dont les revenus
dépassent 200 000 € annuels ;
-
une tranche supplémentaire de gratuité pour les foyers dont les
revenus annuels sont inférieurs à 12 333 € par part. Une famille
composée de deux adultes et deux enfants, disposant de 3 parts
fiscales, est donc exonérée de droits en deçà d’un revenu
mensuel net de 3 000 €.
Les étudiants ayant leur résidence fiscale dans l’Espace
économique européen (EEE) acquittent leurs droits selon les mêmes
modalités que les étudiants français. Les étudiants étrangers, dont la
résidence fiscale est située hors de l’EEE, acquittent en revanche les
droits de scolarité maximum. Pour l’année universitaire 2012-2013, le
barème des droits de scolarité va de 0 à 9 800 € pour le collège
universitaire, et de 0 à 13 500 € pour le master.
Les droits d’inscription constituent désormais la principale
ressource propre de l’institution. Partant d’un niveau de 9,9 M€ en 2005,
ils représentent 27,9 M€ en 2010, soit 21,7 % des ressources totales de la
FNSP.
Le montant des bourses versées par Sciences Po a augmenté en
valeur absolue sur la période. Cependant, la proportion des droits
d’inscription consacrée à l’ensemble des mécanismes de redistribution a
diminué sensiblement, passant de 42,7 % en 2004 à 18,9 % en 2010 : les
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droits d’inscription restent partiellement un outil de redistribution, mais
ils sont surtout devenus d’abord un outil de financement majeur de la
formation initiale.
Tableau n° 6 : Evolution du pourcentage de redistribution des droits
de scolarité (en milliers d’euros)
Source : document « Sciences Po en chiffres 2010-2011 »
A la fin de l’année 2011, la réforme des droits d’inscription n’a pas
encore produit tous ses effets financiers, le barème de 2009 n’étant
appliqué qu’aux étudiants nouvellement inscrits.
B - Le développement du site parisien et des campus en
région
L’immobilier est un enjeu important pour Sciences Po du fait de
l’augmentation de ses effectifs étudiants ces dernières années et de son
implantation principalement parisienne, caractérisée par un coût au m²
élevé.
Dans un contexte d’accroissement des effectifs, la stratégie
déployée par Sciences Po a visé deux objectifs principaux : la
rationalisation des implantations et la diminution de leur nombre, d’une
part, l’acquisition de surfaces pour réduire la part des surfaces louées,
d’autre part. Cette stratégie a été complétée par le développement de sites
délocalisés, les campus en région ayant permis d’absorber une partie de
l’augmentation des effectifs.
1 -
L’évolution des implantations à Paris
Pour son site parisien, Sciences Po a mené une politique visant à la
fois à augmenter ses surfaces pour répondre au besoin né de
l’augmentation des effectifs et à rationaliser ses implantations pour
remédier aux difficultés liées à l’implantation sur de nombreux sites. Le
choix de maintenir un campus urbain au coeur de Paris, pour des raisons
de visibilité et d’attractivité, s’est donc accompagné d’une volonté de
2003
2010
Budget
prévisionnel 2011
Droits de scolarité
4 577
27 873
32 000
Total bourses sur fonds propres
1 954
5 261
4 904
Ratio bourses/droits de scolarité
42,7%
18,9%
15,3%
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rationalisation du nombre des implantations et d’une optimisation des
surfaces occupées, en saisissant des opportunités de vente, d’achat et de
location sur un marché immobilier tendu.
Tableau n° 7 : Evolution du campus parisien et du ratio au m²
Source : Sciences Po
Le ratio m²/étudiant du campus parisien a eu tendance à baisser sur
la période. Il peut être rapproché et comparé à celui des universités
parisiennes en sciences humaines et sociales (SHS)
20
.
Tableau n° 8 :
Ratio m² / étudiants dans quelques établissements
parisiens
Source : rapport Larrouturou
Entre 2005 et 2010, la Fondation nationale des sciences politiques
(FNSP) a réalisé trois opérations immobilières majeures. En 2005, elle
s’est portée acquéreur de l’immeuble situé au 13, rue de l'Université, qui
abritait les locaux de l’ENA. La même année, elle a procédé à la vente de
deux appartements situés sur le boulevard Saint-Germain. En 2009, elle a
pris à bail l’ancien siège de l’Ecole nationale des ponts et chaussées
(ENPC) au 28, rue des Saints-Pères (10 188 m²). Avec l’achat en mars
2011 des locaux situés au 9, rue de la Chaise (1 645 m²), qu’elle louait
auparavant, la FNSP est aujourd’hui propriétaire de 22 260 m².
20
Rapport à la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche remis par M.
Bernard Larrouturou en février 2010 :
Pour rénover l’enseignement supérieur
parisien. Faire de Paris la plus belle métropole universitaire du monde, c’est
possible !
Données 2008.
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Nombre de sites parisiens
39
37
40
33
27
25
Campus parisien (en m²)
37 468
37 153
37 398
36 340
45 653
44 738
Effectif étudiants Paris
4 292
4 742
5 642
6 202
6 652
7 286
Ratio m²/étudiant Paris
8,73
7,83
6,63
5,86
6,86
6,14
Ratio
m²/étudiants
2,02
3,7
2,29
2,67
6,17
Paris
Dauphine
Université
Paris 1
Paris 2
Paris 3
Paris 4
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A la suite de ces opérations, le nombre de sites en location a
diminué, mais non leur surface totale, puisque Sciences Po avait 32
locations en 2005 pour 16 458 m² et louait 21 sites pour 24 123 m² en
2010. Les petites superficies ont été abandonnées au profit de bâtiments
plus importants afin de rationaliser les espaces et de favoriser la mixité
entre
étudiants,
enseignement,
recherche
et
administration.
L’établissement est donc passé, sur la période, de 39 sites à 25 sites de
superficie comprise entre 1 000 m² et 10 300 m² pour le campus parisien.
2 -
La création des antennes en région
La croissance des effectifs étudiants s’est accompagnée de la
création de nouveaux campus en région, destinés à accueillir les étudiants
du collège universitaire, notamment ceux admis par la procédure
internationale. Chacun de ces campus est rattaché à une aire géographique
et offre des enseignements de langues et de civilisation en rapport avec la
région du monde concernée : le campus franco-allemand de Nancy a été
créé
dès
l’année
2000,
les
campus
est-européen
de
Dijon
et
ibéro-américain de Poitiers ont été créés en 2001 et le campus
Moyen-Orient-Méditerranée de Menton a été mis en place en 2005. Entre
2005 et 2010, deux nouvelles antennes ont été créées : le campus Europe-
Asie du Havre en 2008, enfin le campus nord-américain de Reims en
2010.
L’essor des campus en région n’a pas remis en cause la
prédominance du campus de Paris
21
, Sciences Po ayant simultanément
augmenté son implantation immobilière dans le VII
ème
arrondissement.
L’institution envisage toutefois d’accroître à moyen terme les effectifs de
certains campus récents comme Menton, Le Havre ou Reims, en y
redéployant les effectifs du premier cycle parisien.
21
Un programme « Europe-Afrique » y a été déployé en 2011.
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Tableau n° 9 :
Evolution des effectifs des campus à Paris et
en
région
Source : Sciences Po – étudiants inscrits en formation initiale y compris étudiants
inscrits en troisième année, hors étudiants en échange
Le développement de ces antennes délocalisées, qui sont une des
composantes de la stratégie d’internationalisation de Sciences Po, s’est
fait par négociation directe entre ses dirigeants et les collectivités
territoriales concernées, sans lien avec les IEP de province, sans prise en
compte de la répartition nationale des établissements universitaires, et
sans l’accord du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
C - La croissance du potentiel de recherche
1 -
Le renforcement récent du corps des enseignants-chercheurs
Sciences Po a longtemps été considéré principalement comme une
école de formation des cadres de l’Etat et des entreprises. La dimension
« professionnalisante » des masters et la volonté de conserver une
gouvernance exempte des lourdeurs universitaires ont longtemps incité
l’établissement à conserver un corps réduit d’enseignants-chercheurs
permanents. C’est progressivement, sous l’impulsion des deux derniers
administrateurs de la fondation, que la recherche est devenue un axe
stratégique de l’institution. Face au poids grandissant des classements
universitaires
internationaux
qui
se
fondent
sur
la
recherche,
l’établissement a cherché à rehausser ses résultats dans ce domaine, en
mettant en place une stratégie résumée par l’Agence d’évaluation de la
recherche et de l’enseignement supérieur (AERES) comme « le passage
de la grande école à l’université spécialisée et sélective »
22
.
Une nouvelle politique scientifique a été élaborée, visant à
augmenter le potentiel de recherche de l’établissement en s’appuyant sur
22
AERES,
rapport d’évaluation de l’IEP de Paris
, juillet 2008.
2004-2005 2005-2006 2006-2007 2007-2008
2008-2009 2009-2010 2010-2011
Paris
967
1202
1534
1970
2278
2481
2702
Nancy
181
216
257
296
309
295
314
Dijon
121
125
122
136
153
161
157
Poitiers
141
150
160
191
214
235
260
Menton
32
69
118
115
126
146
Le Havre
40
98
159
175
Reims
83
TOTAL
1410
1725
2142
2751
3167
3457
3837
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un corps académique renforcé. Un plan de recrutement de trente
enseignants-chercheurs supplémentaires a notamment été mis en place à
compter de 2007. Pour autant, l’essentiel des heures de cours délivrées
aux étudiants, en formation initiale comme en formation continue, reste
assuré par des vacataires qui ne sont pas des chercheurs.
La
place
nouvelle
donnée
à
la
politique
scientifique
et
l’augmentation des effectifs ont rendu nécessaire une meilleure
structuration de la communauté académique et la mise en place
d’instances où les orientations de la recherche puissent être débattues
collectivement. La gouvernance de la recherche est en effet marquée à
Sciences Po par une grande dispersion des organes statutaires. La
politique scientifique est une compétence exclusive de la Fondation
nationale des sciences politiques (FNSP), et le conseil de direction de
l’Institut d’études politiques (IEP) n’intervient pas dans son élaboration, à
l’exception de ce qui touche à l’école doctorale : cette séparation n’a pas
contribué à clarifier la gouvernance de la recherche. Au sein même de la
FNSP, il n’existe pas d’instance statutaire collégiale chargée de définir les
priorités de la politique scientifique : cette mission est répartie entre de
nombreuses
entités
relevant
à
la
fois
de
la
FNSP
(conseil
d’administration, commission des chercheurs) et de l’IEP (conseil
scientifique, « conseil de l’article 7 »,
conseil de l’école doctorale).
Sciences Po a cherché à améliorer le pilotage de la recherche en créant
des
instances
de
gouvernance
informelles
(bureau
et
« sénat »
académique) et en regroupant le personnel académique en champs
disciplinaires. Cinq départements de recherche ont ainsi été créés, en
science politique, histoire, économie, sociologie et droit. Chaque
département est constitué des enseignants-chercheurs et chercheurs
permanents de l’établissement qui évoluent dans la discipline concernée.
Le dispositif de recherche de Sciences Po s’articule aujourd’hui
autour de quatre unités mixtes de recherche
23
, quatre équipes d’accueil
24
23
Les unités mixtes de recherche (UMR) sont des centres de recherche gérés à la fois
par un établissement d’enseignement supérieur et par un grand organisme de
recherche (en l’occurrence, le CNRS) dans le cadre d’un contrat d’association à durée
déterminée renouvelable.
24
Les équipes d’accueil (EA), qui forment une part importante des unités de
recherche en sciences humaines et sociales, ne sont pas reconnues par le CNRS. Il
s’agit le plus souvent de groupes de petite taille, reconnus seulement par le ministère
de la recherche et financés par leur université. Sur 1 500 unités de recherche purement
universitaire, 1 000 sont des unités sciences humaines et sociales, principalement des
équipes d’accueil (EA). Elles regroupent environ 16 000 enseignants-chercheurs.
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48
et une unité mixte de service
25
.
L’établissement s’est également doté en
2009 d’un laboratoire de moyens numériques, le
« Médialab », où sont
regroupés tous les nouveaux moyens de communication et de production
de données afférentes aux technologies de l’information et de la
communication
26
.
2 -
La réforme de l’école doctorale
A partir de 2008, l’établissement a engagé une réforme visant à
mieux encadrer les doctorants, à les intégrer à la communauté
académique de l’établissement et à financer davantage de thèses. A cet
effet,
des indicateurs relatifs au taux de réussite des doctorants ont été
identifiés. L’école doctorale a également décidé de faire évoluer l’esprit
du doctorat pour atténuer la séparation entre masters recherche et masters
« professionnalisants », en développant un parcours « PhD » sur cinq ans,
de Bac + 3 à Bac + 8, en économie, en droit, en histoire, en sociologie et
en science politique, adossé à des débouchés professionnels.
Si le nombre d’étudiants inscrits en doctorat est resté stable sur la
période, le nombre de thèses soutenues par an a augmenté, passant de
46 en 2005 à 86 en 2010. La durée moyenne de préparation des thèses
reste néanmoins de 6,3 ans sur la période 2005-2010, ce qui est long,
même en tenant compte du fait que l’objectif d’une durée de trois ans est
fréquemment dépassé en sciences humaines et sociales.
Le second objectif de la réforme était de permettre que la
majeure partie des thèses soient financées : en 2009, dernière année
connue, le taux de couverture des allocations accordées atteignait 80 %
des doctorants éligibles à un financement triennal et 50 % du nombre
total de doctorants. Sciences Po a augmenté le nombre de bourses de
thèses financées sur fonds propres, en passant de deux bourses par an en
2004 à dix en 2009. Le montant total de ces bourses ne représente
toutefois que 390 000 € en 2009, soit 17 % du total des bourses allouées.
L’objectif de l’établissement est de progresser encore, au rythme de deux
bourses par an jusqu’en 2015.
25
Ce sont le Centre d’études et de recherches internationales (CERI), le Centre de
recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF), le Centre de sociologie des
organisations (CSO), l’Observatoire sociologique du changement (OSC), le Centre
d’histoire de Sciences Po (CHSP), l’Ecole de droit, le Centre des études européennes
(CEE), le Département d’économie et le Centre de données socio-politiques (CDSP).
26
Cf.
annexe 2 :
les laboratoires de recherche de Sciences Po
.
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MAIS A UN COUT ELEVE
49
3 -
Des conditions matérielles favorables pour les chercheurs
La FNSP consacre des moyens humains, matériels et immobiliers
très importants à la recherche, et les chercheurs de Sciences Po
bénéficient de conditions de travail que l’on rencontre rarement dans les
universités françaises de sciences humaines et sociales.
Tableau n° 10 : Moyens alloués aux laboratoires
Source : Sciences Po – tableau septembre 2010
Le personnel d’appui à la recherche (administratifs et ingénieurs
d’études) est en nombre plus important que dans la plupart des
laboratoires de recherche en sciences humaines. Le taux d’encadrement
est pratiquement toujours supérieur à une personne d’appui pour quatre
enseignants-chercheurs ou chercheurs. Chaque laboratoire bénéficie d’un
poste de secrétaire général ou d’un directeur exécutif de catégorie A,
grâce au double apport du CNRS pour les unités mixtes de recherche et
des personnels administratifs d’appui à la recherche sous contrat FNSP.
La différence est encore plus grande pour les équipes d’accueil.
Celles-ci sont habituellement très peu dotées en personnel d’appui dans
les établissements d’enseignement supérieur. Or, à Sciences Po, le centre
d’histoire de Sciences Po (CHSP) dispose de sept personnels d’appui à la
recherche ; le centre des études européennes (CEE), qui est une jeune
équipe d’accueil, bénéficie tout de même de six personnels d’appui.
Tous les enseignants-chercheurs et chercheurs bénéficient d’un
bureau - ce qui est loin d’être le cas pour les autres universités de la
capitale -, la plupart d’entre eux étant fournis par l’établissement. Seul le
centre de sociologie des organisations (CSO) est installé dans des locaux
appartenant
au
CNRS. L’Observatoire
français
des
conjonctures
Surface en m²
Nbre
académiques
Nbre
administratifs
Ratio
administratifs/
académiques
Dépenses
totales 2010
en k€
OFCE
1 055
35
18
0,51
4 742
CEVIPOF
898
24
16
0,67
3 346
CERI
2 159
59
22
0,37
6 531
CSO
199
19
7
0,37
1 093
OSC
528
10
6
0,6
939
CHSP
381
13
7
0,54
1 465
CEE
1 166
22
6
0,27
3 553
Ecole de droit
170
11
5
0,45
2 945
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50
économiques (OFCE) se trouve aussi dans une position particulière,
s’étant vu dès l’origine affecter des bâtiments de l’administration.
La situation immobilière des centres de recherche de Sciences Po
se rapproche donc plus de celles des unités de recherche universitaires en
« sciences dures » que de celles prévalant dans les sciences humaines et
sociales.
4 -
Une recherche plus visible dans le paysage de l’enseignement
supérieur
a)
L’évaluation des centres de recherche par l’AERES
La dernière campagne de l’Agence d’évaluation de la recherche et
de l’enseignement supérieur (AERES) date de 2008, année au cours de
laquelle cinq centres de recherche ont été évalués : le CERI, le CHSP, le
CEVIPOF, l’OSC et le CSO. Quatre des cinq unités de recherche ont été
notées « A
+
» par l’AERES. Seul le CHSP a été noté « A ».
A cette époque, le centre des études européennes (CEE) n’était pas
encore une équipe d’accueil séparée du centre de recherches politiques de
Sciences Po (CEVIPOF), et ni l’école de droit ni le département
d’économie n’existaient.
b)
La place de Sciences Po dans les classements internationaux
Sciences Po ne figure pas parmi les 500 premières universités du
classement général établi par l’université Jiao Tong de Shanghai, ni dans
le classement du
Times Higher Education
.
Cependant, depuis une dizaine d’années, le bureau d'études
britannique Quacquarelli Symonds établit un classement mondial des
universités. Le classement publié en 2011 place Sciences Po au 201
ème
rang mondial général et au 59
ème
rang pour les universités en sciences
sociales.
Le classement plus détaillé qui a été publié en 2012 met
l’établissement à la 20
ème
place en sciences politiques et à la 73
ème
place
en sociologie.
c)
La montée en puissance du département d’économie
Créé en 2009, le département d’économie est une équipe d’accueil
qui réunit une quinzaine d'économistes. Ceux-ci conduisent des
recherches à la frontière scientifique entre différents domaines en
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MAIS A UN COUT ELEVE
51
conjuguant les approches théoriques et empiriques. Les champs de
recherche ont en commun un fort intérêt pour les questions de politiques
publiques. Le département d’économie est un domaine où Sciences Po a
très rapidement augmenté ses capacités de recherche, en recrutant en trois
ans sept nouveaux professeurs et six jeunes assistants
ou
associate
professors
, ce qui lui a permis de se faire en quelques années une place
parmi les départements d’économie français.
Le rapport Bosquet-Combes-Linnemer
27
, réalisé en 2010 pour la
direction générale de la recherche et de l’innovation du ministère de
l’enseignement supérieur et de la recherche, classe ainsi le département
d’économie de Sciences Po au 7
ème
rang de la production française,
malgré sa taille réduite, derrière l’Ecole d’économie de Toulouse, l’Ecole
d’économie de Paris, le CREST-ENSAE, l’Ecole Polytechnique, HEC,
ainsi qu’Aix-Marseille université. Ce département figure, par ailleurs, à la
3
ème
place des établissements universitaires français dans le classement de
la base RePEc
28
, derrière l’Ecole d’économie de Toulouse et l’Ecole
d’économie de Paris.
La qualité des professeurs du département d’économie est
également perceptible par les résultats obtenus lors des appels à
candidatures pour des financements européens. Sciences Po souligne ainsi
que quatre professeurs recrutés depuis 2008 ont bénéficié d’un
ERC
29
Starter Grant
ou d’un
ERC Advanced Grant
. On constate toutefois que
ces professeurs enseignaient auparavant à l’Ecole d’économie de Paris ou
à l’Ecole Polytechnique : si de nombreux assistants ou
associate
professors
viennent de l’étranger, la composition de l’équipe des
professeurs confirmés au sein du département d’économie s’est faite en
majorité par transfert d’autres établissements de recherche français.
27
La publication d'articles de recherche en économie en France en 2008 : disparités
actuelles et évolutions depuis 1998
.
28
La base « Research Papers in Economics » met à disposition en ligne les travaux
d’économistes du monde entier. RePEc constitue aussi des classements pour les
institutions et les auteurs en fonction du nombre de leurs publications dans la base.
29
L’European Research Council est l’organisme qui met en oeuvre le programme
Idées du 7
ème
programme-cadre de recherche et développement technologique (2007-
2013) de l’Union européenne en soutenant les recherches individuelles menées dans
tous les domaines par des équipes nationales ou transnationales en concurrence à
l'échelon européen.
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52
II
-
Un budget en constante progression financé
par l’Etat et l’augmentation des droits d’inscription
A - L’augmentation continue et importante des charges
1 -
L’augmentation du budget de la FNSP
Entre 2005 et 2010, les volumes financiers retracés dans les
comptes de la fondation ont progressé de manière importante. Les charges
ont en effet augmenté de 61,4 %, passant de 78,7 M€ à 127,1 M€, et les
produits de 62,1 %, passant de 79,2 M€ à 128,3 M€
30
.
Tableau n° 11 : Dépenses de la FNSP par rubriques, 2005 – 2010 en
milliers d’euros et en % d’évolution
Les dépenses de masse salariale - personnels et vacataires - ont
notamment enregistré une croissance soutenue. Elles constituent 59 % des
dépenses de fonctionnement de l’institution en fin de période, et forment
de loin le premier poste de dépenses, alors même que le budget de la
Fondation ne supporte pas les dépenses de masse salariale des
30
Les comptes de la Fondation assimilent les notions de charges et de dépenses, d’une
part et les notions de produits et de recettes, d’autre part.
Evolution des dépenses par rubriques
2005
2010
∆
05-10 en%
∆
05-10 en K€
Personnel
39 060
60 048
53,7%
20 988
Enseignement (rémunération vacataires)
9 355
15 315
63,7%
5 960
Ressources documentaires
1 219
1 466
20,3%
247
Bourses et aide sociale
3 259
6 691
105,3%
3 432
Locaux
9 144
15 241
66,7%
6 097
Fonctionnement
9 688
14 398
48,6%
4 710
Amortissements sur investissements
3 858
6 002
55,6%
2 144
Subventions versées
1 016
3 884
282,3%
2 868
Charges exceptionnelles et divers
1 622
3 917
141,5%
2 295
Charges à payer sur fonds affectés
525
171
-67,4%
-354
Total des dépenses
78 746
127 133
61,4%
48 387
Structure des dépenses par rubriques
2005
2010
Personnel
49,6%
47,2%
Enseignement (rémunération vacataires
11,9%
12,0%
Ressources documentaires
1,5%
1,2%
Bourses et aide sociale
4,1%
5,3%
Locaux
11,6%
12,0%
Fonctionnement
12,3%
11,3%
Amortissements sur investissements
4,9%
4,7%
Subventions versées
1,3%
3,1%
Charges exceptionnelles et divers
2,1%
3,1%
Charges à payer sur fonds affectés
0,7%
0,1%
Total des dépenses
100,0%
100,0%
Source : FNSP, comptes financiers
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enseignants et enseignants-chercheurs du ministère de l’enseignement
supérieur et de la recherche. Les dépenses de personnel hors vacations ont
progressé de près de 54 %, tandis que les dépenses liées aux heures de
vacation ont augmenté de plus de 63 %.
Ces
évolutions
reflètent
le
développement
de
l’activité
d’enseignement, qui est assurée à plus de 90 % par des vacataires, dans
une
période
caractérisée
par
l’évolution
importante
du
nombre
d’étudiants : la progression des effectifs étudiants en formation initiale a
été de près de 59 % sur cette même période et celle du chiffre d’affaires
de la formation continue a atteint 85 %.
Les dépenses de locaux, qui constituent le deuxième poste de
charges, correspondent aux dépenses de location, d’entretien, de
maintenance et d’exploitation : elles ont progressé de 66,7 % sur la
période. La fondation consacrait à ces charges 15 M€ en 2010, contre
9,1 M€ en 2005 : cette évolution est en grande partie liée à celle des
effectifs étudiants et s’explique donc également par la dynamique de
l’activité d’enseignement.
Les dépenses de fonctionnement
31
, qui constituent le troisième
poste de charges de la fondation, ont progressé de 48,6 %, soit un rythme
de progression plus faible que les autres dépenses, en passant de 9,7 M€ à
14,4 M€. Elles constituent, néanmoins, en 2010 encore 11,3 % des
dépenses totales de la fondation contre 12,3 % en 2005.
Le budget consacré aux bourses et à l’aide sociale a plus que
doublé, mais sa part dans le total des dépenses de la fondation n’a que
faiblement progressé, passant de 4,1 % à 5,3 % entre 2005 et 2010, soit
respectivement 3,3 M€ et 6,7 M€.
Les « charges exceptionnelles et divers » enregistrent enfin
l’augmentation la plus dynamique, du fait de l’évolution de la dette de la
FNSP, qui se répercute sur les charges financières.
Entre 2005 et 2010, la structure des dépenses de la fondation n’a
été que marginalement modifiée par les évolutions constatées ci-dessus.
Les parts respectives des dépenses de personnel et des charges de
fonctionnement apparaissent très légèrement en retrait dans le total des
charges, mais représentent encore respectivement 47,2 % et 11,3 % des
charges du compte de résultat. Les parts respectives des dépenses de
rémunération des vacataires et de locaux ont, en revanche, progressé,
31
Les dépenses de fonctionnement retracent les rémunérations de prestations de
services, les missions et réceptions, les dépenses informatiques, les dépenses de
reprographie, de postes et télécommunication et les « autres achats ».
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passant de 11,9 % et 11,6 % à 12 % et 12 % du total des charges. Ces
quatre postes de dépenses représentent plus de 82 % des charges en 2010.
2 -
L’augmentation très soutenue des dépenses d’enseignement
La présentation par missions des comptes de la fondation permet
d’appréhender l’origine des principales augmentations de charges.
Tableau n° 12 : Dépenses de la FNSP par missions en milliers d’euros
et en % d’évolution
Les dépenses d’enseignement ont progressé de manière plus
soutenue que les autres, passant de 51 % à 59 % du total des dépenses de
la fondation, conséquence logique de l’évolution importante du nombre
d’étudiants sur la période.
En neutralisant les dépenses consacrées à la formation continue,
l’augmentation des dépenses liées exclusivement à l’enseignement en
formation initiale est encore plus forte, comme le montre le tableau
ci-après.
Dépenses par missions
2005
2010
∆
05-10
Enseignement
39 802
74 796
87,9%
Recherche
25 775
39 071
51,6%
Documentation
8816
12 544
42,3%
Coopération
3372
NS
NS
Publications et diffusion
980
722
-26,3%
Total
78 745
127 133
61,4%
Structure des dépenses par missions
2005
2010
Enseignement
51%
59%
Recherche
33%
31%
Documentation
11%
10%
Coopération
4%
NS
Publications et diffusion
1%
1%
Total
100%
100%
Source : FNSP, comptes financiers
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Tableau n° 13 : Dépenses d’enseignement hors formation continue en
milliers d’euros et en % d’évolution
Ce retraitement permet de dresser un parallèle entre le nombre
d’étudiants inscrits à Sciences Po en formation initiale, qui a progressé de
59 % de 2005 à 2010, et l’évolution des coûts de la fonction
enseignement de la fondation, qui a été supérieure à 90 % pour la même
période, ce qui révèle une diminution de l’efficience de la gestion.
L’effort financier consenti pour accompagner l’augmentation des
effectifs étudiants s’est doublé d’une progression importante des moyens
financiers consacrés aux autres activités de la FNSP : les dépenses de la
fondation ont évolué également à un rythme très soutenu pour financer les
activités de recherche (+ 52 %) et de documentation (+ 42 %).
B - Les modalités de financement de l’institution
1 -
Le financement de la fondation
Pour soutenir le rythme d’évolution des charges, les produits de la
FNSP ont également enregistré une progression très forte, de 62,1 % entre
2005 et 2010.
2005
2010
∆
05-10
Enseignement
39 802
74 796
87,9%
Dont formation continue
6 104
10 643
74,4%
Enseignement hors FC
33 698
64 153
90,4%
Source : FNSP, comptes financiers
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56
Tableau n° 14 : Evolution des produits de la FNSP en milliers d’euros
et en %
Le poste « subventions publiques structurelles » regroupe les
subventions versées par le ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche. Pour les exercices 2005 à 2008, il s’agit de la subvention
principale de fonctionnement et de subventions versées au titre du contrat
quadriennal (enseignement et recherche). Pour les exercices 2009 et 2010,
ces différentes subventions sont intégrées dans la dotation globalisée de
fonctionnement. L’ensemble de ces dotations progresse de 33,3 % entre
2005 et 2010.
Cette évolution très soutenue s’est faite pour partie dans un cadre
contractuel, l’Etat ayant accepté de financer le développement de
l’activité décidé par le conseil d’administration de la Fondation nationale
des sciences politiques (FNSP). La dotation a été actualisée en 2009 à
l’occasion de la préparation du contrat 2009-2012, puis revalorisée de
manière importante chaque année.
La fixation de la dotation a été décidée selon une procédure
dérogatoire et sans véritable négociation. La direction générale de
l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle a ainsi précisé à
la Cour que « c’est sur instruction écrite émanant du directeur de cabinet
du Premier ministre ou du secrétaire général de l’Elysée que le ministère
a aligné sa dotation sur les demandes de l’établissement ». Une procédure
contractuelle avait été formellement mise en oeuvre, mais l’allocation des
Evolution des recettes par rubriques
2005
2010
∆
05-10 en %
∆
05-10 en €
Subventions publiques structurelles
47 719
63 617
33,3%
15 898
Subventions diverses
5 342
9 333
74,7%
3 991
Ressources propres
23 382
53 441
128,6%
30 059
dont droits de scolarité
9 874
27 873
182,3%
17 999
ressources propres hors droits
13 508
25 568
89,3%
12 060
Produits financiers et exceptionnels
2 737
1 957
-28,5%
-780
Total recettes
79 180
128 348
62,1%
49 168
Structure des recettes par rubriques
2005
2010
Subventions publiques structurelles
60,3%
49,6%
Subventions diverses
6,7%
7,3%
Ressources propres
29,5%
41,6%
dont droits de scolarité
12,5%
21,7%
ressources propres hors droits
17,1%
19,9%
Produits financiers et exceptionnels
3,5%
1,5%
Total
100,0%
100,0%
Source : FNSP, comptes financiers
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57
moyens financiers à la fondation a en fait présenté de 2009 à 2012 un
caractère discrétionnaire.
Dans un courrier adressé le 29 juillet 2009 par le secrétaire général
de la Présidence de la République à la ministre de l’enseignement
supérieur et de la recherche, il est ainsi indiqué : «
[…] Après avoir
analysé la situation et compte tenu de la spécificité de Sciences Po Paris
et de l’originalité de sa stratégie et de sa politique, je vous propose
d’accorder à l’Institut d’études politiques de Paris les subventions qui
sont demandées par son directeur, monsieur Richard Descoings : 2009 :
59,4 M€ ; 2010 : 63 M€ ; 2011 : 66 M€ ; 2012 : 68 M€ […]. »
Les subventions diverses sont constituées des subventions versées
par les autres ministères et par les collectivités territoriales, de fonds
étrangers et d’autres subventions diverses. Elles sont passées de 6,7 % à
7,3 % des produits de la fondation, progression liée à l’augmentation des
contributions des collectivités territoriales pour le financement des
campus en région.
Le ressources propres ont fortement augmenté pendant la période
sous revue, passant de 23,4 M€ à 53,4 M€. De 30 % en début de période,
elles ont été portées à 42 % du total en 2010.
Cette augmentation est constituée à 60 % par celle des droits de
scolarité, qui représentaient 9,9 M€ et 12,5 % du total des produits en
2005, contre 27,9 M€ et 21,7 % en 2010.
Les autres ressources propres ont également progressé de manière
significative, passant de 13,5 M€ et 17,1 % des produits de la fondation à
25,6 M€ et 19,9 %. Elles sont constituées des recettes de formation
continue (de 5,1 M€ à 8,7 M€), de la taxe d’apprentissage (3,6 M€ en
2010), des prestations de service (2,4 M€ en 2010), des différentes formes
de mécénat (le mécénat et les partenariats institutionnels ont progressé de
118,4 %, passant de 1,4 M€ à 3 M€, et le mécénat des particuliers est
passé de 0 à 1,8 M€).
Cette évolution très rapide des ressources propres est en grande
partie liée à la progression des droits de scolarité qui, sous l’effet des
deux réformes successives mises en oeuvre par l’établissement, ont été
multipliés par trois, contribuant à hauteur de 18 M€ à l’augmentation
globale des ressources propres qui atteint 30 M€.
La stratégie de diversification de ses ressources a également
conduit l’établissement à mettre en place en 2008 un fonds non
consommable («
endowment »
). Ce fonds a atteint un niveau de
capitalisation de seulement 531 683 € au 31 octobre 2011, sans atteindre
l’objectif de rendement qu’il s’était fixé, à savoir 3 % hors inflation.
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58
2 -
Le financement de la recherche
Les dépenses affectées à la « mission recherche » dans la
répartition analytique des charges de la FNSP ont fortement augmenté,
mais un peu plus lentement que le budget total de la fondation, car elles
ne sont pas directement liées à la croissance du nombre d’étudiants. Elles
représentent 39,1 M€ en 2010 (soit 30 % du budget de fonctionnement de
la FNSP), contre 25,8 M€ en 2005 (soit 33 % du budget de la FNSP). En
incluant les rémunérations prises en charge par le ministère de
l’enseignement supérieur et de la recherche et par le CNRS, le budget
total de la recherche est de 50,8 M€ en 2010.
Le passage à une dotation globale de fonctionnement fongible a
permis à Sciences Po d’affecter au développement de la recherche une
part
croissante
de
la
subvention
de
fonctionnement
attribuée
annuellement par le ministère.
Tableau n° 15 :
Subvention publique affectée à la recherche en
milliers d’euros
Source : Bilan financier de l’activité de recherche transmis par Sciences Po – calcul
Cour des comptes
32
La mobilisation plus importante de la dotation globale de
fonctionnement en faveur de la recherche s’explique en partie par le
transfert progressif de la rémunération des ATER
33
, moniteurs et
doctorants contractuels de l’Etat vers la FNSP (0,96 M€ en 2010), mais
également par la hausse des droits d’inscription, qui a permis de financer
une part croissante des activités de formation.
En
intégrant
les
subventions
fléchées
(OFCE
et
contrat
quadriennal), on constate ainsi qu’entre 2005 et 2010 la subvention
structurelle affectée à la recherche a augmenté de 52 %. Sur les 13,5 M€
d’augmentation des ressources de la recherche entre 2005 et 2010, 9,1 M€
32
La FNSP ne retient pas, dans sa comptabilisation des ressources de la recherche, les
subventions de l’école doctorale, qui sont incluses dans le budget de l’IEP. En
revanche, le budget analytique de la « mission recherche » comprend les dépenses de
l’école doctorale.
33
Attachés temporaires d’enseignement et de recherche.
2005
2010
Subvention MESR (hors subventions fléchées OFCE)
43 735
59 420
Subvention MESR affectée à la recherche (hors école doctorale)
13 992
23 126
Subvention affectée à la recherche/subvention publique totale
32,0%
38,9%
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MAIS A UN COUT ELEVE
59
proviennent ainsi de la croissance des subventions publiques structurelles,
même si leur part dans le budget de la recherche baisse légèrement,
passant de 81 % à 77 %.
Tableau n° 16 : Structure du financement de la recherche en milliers
d’euros
Source : Sciences Po, direction financière – calcul Cour des comptes
L’établissement a également cherché à développer ses ressources
propres, dont la part reste encore modeste dans le budget de la recherche.
Les ressources du mécénat et des partenariats se sont accrues, passant de
2,1 M€ en 2005 à 5,8 M€ en 2010. Parmi elles, les fonds provenant de
l’Agence nationale de la recherche (ANR) ont augmenté (0,5 M€ en 2010
contre 0,2 M€ en 2006), mais cet apport qui nécessite de se soumettre à
des procédures d’appel à projets demeure modeste, tout comme les
subventions de l’Union européenne (notamment du « programme-cadre
de recherche et de développement » de l’Union européenne ou PCRD),
qui sont passées de 0,2 M€ à 1,5 M€ entre 2005 et 2010. Les autres
ressources propres sont passées de 2,1 M€ à 2,3 M€.
Dans le cadre des procédures d’appels d’offres ouvertes au titre des
investissements d’avenir, Sciences Po a également été retenu en 2011
pour l’équipement d’excellence (EQUIPEX) « Données, infrastructures,
méthodes d’enquêtes en sciences humaines et sociales » (DIME-SHS) et
pour le laboratoire d’excellence (LABEX) « Laboratoire interdisciplinaire
d’évaluation des politiques publiques » (LIEPP).
C - Le coût d’un étudiant à Sciences Po
L’évaluation du coût d’un étudiant soulève des questions
méthodologiques. Il convient en effet de raisonner en coût complet, et les
comparaisons
entre
établissements
d’enseignement
supérieur
sont
difficiles en raison de la multiplicité des données et des sources
d’information.
2005
2010
Evolution
2005/2010
Subvention structurelle (hors école doctorale)
13 992
23 126
65,30%
Base recherche
(subvention OFCE + contrat quadriennal)
3 979
4 196
5,50%
Total subventions publiques structurelles affectées à la recherche
17 971
27 322
52%
Total ressources de la recherche
22 146
35 642
60,90%
Part subventions publiques/ressources totales
81,10%
76,70%
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60
1 -
Le coût moyen par étudiant
Le calcul réalisé annuellement par le ministère de l’enseignement
supérieur et de la recherche à partir du « compte de l’éducation
34
» permet
cependant d’approcher la « dépense intérieure d’éducation » annuelle
(DIE) pour l’enseignement supérieur, ainsi que la dépense moyenne par
étudiant dans les principales filières de formation que sont les universités,
les classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) et les sections de
techniciens supérieurs (STS)
35
.
Ce calcul, publié dans un recueil annuel intitulé «
L’état de
l’enseignement supérieur et de la recherche
», intègre l’ensemble des
dépenses publiques et privées d’enseignement et des activités liées :
oeuvres
universitaires,
administration,
fournitures,
bibliothèques
universitaires et rémunérations des personnels. A partir de 2006, sont
également comprises les dépenses de fonctionnement et d’investissement
de la recherche universitaire, ainsi que l’ensemble des coûts des
bibliothèques. Les dépenses de formation continue ne sont, en revanche,
pas intégrées.
Le compte de l’éducation permet également d’identifier les
apports
respectifs
des
différents
financeurs
(Etat,
collectivités
territoriales, entreprises, ménages, etc.).
34
Système d’information sur les flux monétaires concernant le domaine de
l’éducation.
35
Les données relatives aux grandes écoles sont englobées dans la dépense intérieure
d’éducation mais ne sont pas individualisées.
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MAIS A UN COUT ELEVE
61
Tableau n° 17 : Evolution du coût moyen par étudiant entre 2007 et
2010 en euros courants
Source : « L’état de la recherche et de l’enseignement supérieur en France » n° 2,3,4,5 – calcul
Cour des comptes
36
Afin de disposer d’un ordre de grandeur permettant de comparer le
coût d’un étudiant à Sciences Po aux moyennes nationales, il est possible
d’estimer dans une première approche ce coût à partir du budget global de
la Fondation nationale des sciences politiques (FNSP), qui inclut
l’ensemble des dépenses d’enseignement, de recherche, de documentation
et d’administration de l’établissement. La méthodologie adoptée est alors
la suivante :
-
au budget annuel de fonctionnement de la FNSP (hors OFCE)
37
est
ajoutée la masse salariale des fonctionnaires rémunérés directement
par l’Etat ;
-
de ce budget sont retirées les dépenses de formation continue ;
36
Les dépenses des IUT sont intégrées depuis 2008 à celles des universités.
37
Les dépenses liées à l’OFCE (4,7 M€ en 2010) ont été exclues du calcul en raison
du positionnement particulier de cet organisme de recherche.
Année
2007
2008
2009
2010
(provisoire)
Dépense moyenne par étudiant en €
10 150
10 790
11 260
11 430
CPGE
13 880
14 510
14 850
15 240
Universités
8 970
9 400
10 220
10 180
STS
13 360
13 220
13 730
13 800
Part financée par le MEN et le MESR
par étudiant en €
64,9%
soit 6587 €
64,6%
soit 6970 €
64,2%
soit 7229 €
63,5%
soit 7258 €
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62
-
le total obtenu est divisé par le nombre d’étudiants présents sur
l’année civile
38
. Les étudiants étrangers en échange ne sont pas
comptabilisés, car ils sont réputés remplacer les étudiants de Sciences
Po effectuant leur troisième année à l’étranger
39
.
Tableau n° 18 : Coût moyen par étudiant à Sciences Po entre 2005 et
2010 en euros courants
Source : comptes financiers 2005-2010 de la FNSP – calcul Cour des comptes
Selon cette première approche, le coût moyen d’un étudiant à
Sciences Po en 2010 s’établirait à 15 143 €
40
. Il serait donc supérieur de
près de 50 % à celui d’un étudiant en université, où l’encadrement
pédagogique est en moyenne nettement moindre, et comparable à celui
d’un étudiant en classe préparatoire aux grandes écoles (CPGE), où
l’encadrement est supérieur.
Toutefois, l’une des particularités de Sciences Po par rapport aux
universités est de ne pas occuper un bâtiment mis à disposition par l’Etat.
La charge financière liée aux emprunts (1,9 M€), le coût des locations
(10,7 M€) et les amortissements immobiliers (3,2 M€) se répercutent
ainsi sur son budget de fonctionnement. Même si la FNSP a hérité des
bâtiments de l’Ecole libre des sciences politiques, amortis depuis
38
Pour passer de l’année universitaire à l’année civile, le nombre d’étudiants de 2010
est obtenu en proratisant les étudiants inscrits en 2009-2010 à hauteur de 6/10
e
et les
étudiants inscrits en 2010-2011 à hauteur de 4/10
e
. Une proratisation semblable est
appliquée pour les autres années.
39
La réponse communiquée par Sciences Po au cours de la phase d’instruction
indique, en effet, que « l’année à l’étranger est bien équilibrée pour Sciences Po. En
effet, si cette 3
ème
année se déroulait à Sciences Po, nous organiserions des
enseignements et développerions des services pour 1 190 étudiants. Dans le système
actuel, nous accueillons à la place de nos étudiants un nombre identique d’étudiants
d’échange auxquels nous offrons des enseignements en moindre quantité. »
Par
ailleurs, certains étudiants en échange ne viennent que pour un semestre à Sciences
Po, et ne peuvent donc être comptabilisés pour une année entière.
40
Avec les dépenses de l’OFCE, ce coût moyen est porté à 15 728 €.
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Dépenses de fonctionnement de la
FNSP
78 746 000
89 718 000
95 564 000
105 680 000
114 317 000
127 133 000
Dépenses de l'OFCE
4 106 000
4 312 000
4 557 000
4 581 000
4 521 000
4 742 000
Dépenses de formation continue
6 104 000
6 522 000
7 580 000
9 162 000
9 306 000
10 643 000
Dépenses hors OFCE et formation
continue
68 536 000
78 884 000
83 427 000
91 937 000
100 490 000
111 748 000
Rémunération fonctionnaires
9 355 000
10 195 000
11 066 000
10 958 000
10 941 000
10 982 000
Nombre d'étudiants
5 029
5 396
6 113
6 970
7 530
8 105
Coût moyen par étudiant en €
15 488
16 508
15 458
14 763
14 798
15 143
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63
longtemps, le coût de fonctionnement supplémentaire induit par le
développement immobilier de Sciences Po doit être pris en compte dans
l’approche du coût moyen.
En sens inverse, il convient de relever que, si le calcul précédent
du coût de l’étudiant de Sciences Po inclut les bourses allouées sur les
fonds propres de l’établissement (6,7 M€ en 2010), ainsi que la
rémunération de 39 salariés mis à disposition des IEP de province par la
FNSP (2,5 M€), il n’inclut pas les dépenses d’investissement en matériel
(3 M€ en 2010), ni surtout les dépenses des oeuvres universitaires
(bourses allouées aux étudiants, hébergement, restauration) et la quote-
part des dépenses d'administration centrale, qui ne figurent pas dans le
budget de la FNSP et qui - à la différence du calcul du coût de l’étudiant
en université - ne sont donc pas prises en compte.
2 -
La dotation du ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche par étudiant
Rapportée au nombre d’étudiants inscrits, la dotation globale du
ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (subvention et
rémunérations) est en diminution sur la période, en conséquence de la très
forte croissance des effectifs de l’institution.
Tableau n° 19 :
Evolution de la dotation publique structurelle par
étudiant à Sciences Po entre 2005 et 2010 en euros
Source : comptes financiers FNSP 2005 à 2010 – calcul Cour des comptes
Elle reste néanmoins supérieure de près de 20 % en 2010 à la
dotation moyenne nationale qui s’établit à 7 258 €
41
. Cet effort de l’Etat
est d’autant plus notable que Sciences Po dispose par ailleurs d’autres
sources de financement, les droits d’inscription étant devenus une source
de financement importante de la formation initiale.
41
Cf.
tableau
n° 17.
La
dotation
par
étudiant
des
universités
de
droit-économie-gestion et de sciences humaines et sociales est en outre inférieure à
cette moyenne.
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Subvention MESR hors subvention
fléchée OFCE
43 735 000
45 399 000
47 793 000
49 623 000
55 698 000
59 420 000
Rémunérations MESR
9 355 000
10 195 000
11 066 000
10 958 000
10 941 000
10 982 000
Nombre d'étudiants inscrits
5 029
5 396
6 113
6 970
7 530
8 105
Dotation par étudiant
10 557
10 303
9 628
8 692
8 850
8 686
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64
3 -
La méthodologie retenue par Sciences Po
Sciences Po calcule un coût global par étudiant de façon différente,
en incluant les dépenses de fonctionnement de la FNSP, ainsi que les
rémunérations versées par le ministère de l’enseignement supérieur et de
la recherche et le CNRS. Par ailleurs, l’établissement ne comptabilise pas
les étudiants présents sur l’année civile de la même façon, ce qui donne
un nombre d’étudiants très légèrement supérieur (5 090 étudiants en 2005
et 8 230 en 2010
42
). Par-delà ces différences d’approche, ce calcul
présente l’intérêt de mesurer de façon homogène l’évolution du coût d’un
étudiant sur longue période.
Tableau n° 20 :
Evolution du coût global par étudiant calculé par
Sciences Po entre 2000 et 2011 en euros
Source : document « Sciences Po en chiffres 2010-2011 »
Ce tableau fait apparaître sur longue période une hausse du coût
par étudiant entre 2000 et 2006, suivie d’une diminution jusqu’en 2009 et
d’une stabilisation, ensuite. Si la multiplication par deux du nombre
d’étudiants s’est faite à coût moyen équivalent en euros courants entre
2000 et 2009, l’inflation cumulée sur la période entraîne que le coût
moyen a en réalité diminué d’environ 19 % en euros constants. Les
économies d’échelle restent cependant limitées, et le coût moyen tend à
remonter en 2010 et 2011, à la suite des dépenses importantes réalisées
par la FNSP.
Dans le contexte budgétaire difficile qui caractérise actuellement
l’enseignement supérieur, il convient de maîtriser cette tendance à la
hausse du coût moyen observée en 2010 et 2011 ce que prévoyait
explicitement le projet d’établissement « Sciences Po : Objectif 2013 »
43
.
42
Sciences Po exclut du calcul les étudiants effectuant leur troisième année à
l’étranger et inclut les étudiants étrangers en échange présents en collège universitaire
et en master. Par ailleurs, les effectifs sont retraités en année civile en retenant un
semestre de chaque année universitaire concernée.
43
«
Sciences Po : Objectif 2013 » : « Le coût par élève est aujourd’hui d’environ
16 000 € par an, la progression de l’investissement envisagé en euros constants sur 5
ans en fonction des objectifs ainsi définis porterait ce coût moyen à 18 000 € par an. »
Les chiffres diffèrent là encore légèrement du calcul précédent mais la tendance
globale reste identique.
Année
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Budget
prévisionnel
2011
Budget global/étudiants
en €
17 258
17 708
17 116
15 720
16 840
18 228
19 325
18 627
17 928
17 031
17 535
17 695
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Tableau n° 21 :
Le coût par étudiant selon les prévisions du projet
d’établissement « Sciences Po : Objectif 2013 » en milliers d’euros
Source : document « Sciences Po : Objectif 2013 »
Si la stratégie de Sciences Po a pu être dessinée à coût croissant
en 2008, lors de l’adoption de ce projet d’établissement, la négociation du
nouveau contrat quinquennal doit amener désormais à inverser cette
trajectoire, en intégrant les contraintes fortes qui pèsent sur le budget de
l’Etat afin de rétablir l’équilibre des comptes publics. Des gains
d’efficience sont devenus impératifs.
Le coût moyen par diplômé
Sciences Po retient également une autre approche fondée, non plus sur la
comparaison du coût par étudiant, mais sur la comparaison du coût par
diplômé. L’établissement indique ainsi que le coût d'un diplômé de Sciences
Po serait inférieur à celui d'un diplômé d’université, selon le calcul suivant :
« Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche indique que le
coût annuel d’un étudiant inscrit à l’université est de 10 220 €. Les données
fournies par la DEPP dans son dernier rapport (RERS 2011) indiquent que
(hors IUT et professions médicales) : sur les 680 000 étudiants inscrits en
licence (cycle de 3 ans), 121 000 sont diplômés par an, soit un coût total par
diplômé de 57 400 € ; sur les 374 000 étudiants inscrits en master (cycle de 2
ans), 96 000 sont diplômés par an, soit un coût total par diplômé de 39 800 €.
Donc le coût post-bac d’un diplômé de l’université à bac+5 (master) est d’un
peu plus de 97 000 € (dont la majeure partie est financée par l’Etat).
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66
En ce qui concerne Sciences Po, en prenant les données les plus
désavantageuses émanant des tableaux du relevé d’observations provisoires
44
,
à savoir 15 100 € de coût total, dont 8 400 € de subventions publiques
structurelles, le même calcul donnerait les résultats suivants :
-
sachant qu’un élève du collège universitaire met en moyenne 3,2 années
pour être diplômé, le coût total pour un diplômé est de 48 320 € dont
26 900 € pour la collectivité publique ;
-
sachant qu’un élève de master met en moyenne 2,5 années pour être
diplômé, le coût total pour un diplômé est de 37 750 € dont 21 000 €
pour la collectivité publique ».
Cette approche ne tient pas compte du fait que les étudiants de Sciences
Po ont été sélectionnés à tous les niveaux d’entrée, ce qui ne peut que jouer
en faveur d’un faible taux de redoublement et d’un taux important de succès
au diplôme. Contrairement à la méthode mise en avant par l’établissement,
l’obtention du diplôme à Sciences Po ne peut donc être comparée aux
résultats d’obtention du master en université.
______________________
CONCLUSION
_____________________
Sciences Po a développé l’ensemble de ses activités, tant en
formation initiale qu’en formation continue et en recherche. Ces
transformations l’ont progressivement rapproché, en termes de volume
d’activité, du format d’une petite université.
Pour autant, l’établissement a conservé son modèle pédagogique
qui le range plutôt dans la sphère des classes préparatoires et des
grandes écoles. Le coût induit par ce développement a été essentiellement
supporté par l’Etat, qui finance à plus de 50 % l’établissement, et par les
élèves et leurs familles, du fait de l’augmentation importante des droits
d’inscription.
Le contexte actuel de très fortes tensions sur les finances publiques
doit conduire l’Etat à s’interroger sur ces évolutions et sur leur
soutenabilité financière.
44
Ces données ont été modifiées par la suite pour tenir compte des remarques
intervenues dans le cadre de la contradiction.
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Chapitre III
Une gestion marquée par une fragilité
financière et de nombreuses anomalies
I
-
Une situation financière toujours fragile
Malgré
le
soutien
constant
de
la
puissance
publique
et
l’augmentation importante des droits de scolarité, le développement de
l’institution a suscité des besoins de financement qui ont rendu sa
situation financière particulièrement fragile jusqu’en 2009
45
.
Le redressement opéré en 2009 et 2010, essentiellement grâce à
l’augmentation des droits d’inscription, est néanmoins menacé par des
choix de gestion qui constituent aujourd’hui des facteurs de risques.
A - L’analyse financière de la fondation
1 -
Le bilan de la fondation : accroissement de la dette et des
actifs immobilisés et faiblesse des fonds propres
Les comptes financiers de la fondation font apparaître une forte
augmentation - de près de 35 % - du total du bilan entre 2005 et 2010
(
cf.
annexe n° 3).
Le haut du bilan a augmenté sous l’effet des politiques
d’investissement immobilier de la fondation, qui l’ont notamment
45
Cf.
annexes 3 et 4 : bilan et compte de résultat de la FNSP 2005-2010.
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68
conduite à faire l’acquisition de nouveaux locaux, à investir dans
l’aménagement et la réhabilitation de ses actifs et à consentir
d’importantes dépenses informatiques.
En outre, l’accroissement du volume des recettes nécessaires pour
financer l’activité courante a entraîné une croissance des créances
d’exploitation. Enfin, l’augmentation très importante de l’encours des
valeurs mobilières de placement résulte des placements réalisés
notamment en 2005, 2006 et 2010, exercices au cours desquels la
fondation a contracté des emprunts bancaires pour le financement d’une
importante acquisition immobilière. La FNSP a ainsi augmenté ses
ressources stables, ce qui lui a permis d’améliorer sa situation de
trésorerie qui, en fin de période, permettait d’assurer la couverture des
besoins financiers de 38 jours de fonctionnement. La situation financière
de la fondation a donc été rétablie par l’amélioration du résultat net et par
le renforcement des ressources stables.
Au passif, la valeur des capitaux propres a faiblement augmenté
sur la période (+ 14,1 %), passant d’un peu plus de 25 M€ à 29,3 M€, soit
un rythme inférieur à l’accroissement des dettes (+ 32,5 %).
2 -
Les résultats de la fondation se sont améliorés en fin de
période
a)
La fragilité du résultat d’exploitation
La fragilité du résultat comptable est liée à celle du résultat
d’exploitation, qui a été négatif à trois reprises sur les six exercices de la
période analysée par la Cour, en 2005, 2006 et 2008 (
cf.
annexe n° 4).
Cette fragilité n’est pas liée à l’atonie des produits : ceux-ci ont
progressé de manière vigoureuse - de 62 % sur six exercices -, grâce en
particulier au soutien de l’Etat et à la politique d’augmentation des droits
de scolarité.
Elle résulte essentiellement de la progression très soutenue des
charges, en particulier de personnel (+ 62 % sur la période) et de gestion
(services extérieurs, autres services extérieurs, autres charges de gestion
courante, qui représentent plus de 35 % de l’augmentation totale des
charges). Cette absence de maîtrise des charges a conduit à plusieurs
reprises la fondation à enregistrer une évolution des dépenses plus rapide
que celle des recettes.
Le redressement du résultat d’exploitation en 2009 et en 2010 est
dû principalement aux ventes et produits (grâce à la hausse des droits
d’inscription), et au léger ralentissement de l’évolution des charges de
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UNE GESTION MARQUEE PAR UNE FRAGILITE FINANCIERE ET DE
NOMBREUSES ANOMALIES
69
personnel (celles-ci ont augmenté de 9,8 % en 2009 et de 8,9 % en 2010,
après des augmentations à deux chiffres en 2006 et 2008). En 2010, ce
tassement est néanmoins compensé par une hausse sensible des dépenses
de services extérieurs, en raison de l’augmentation des charges locatives.
b)
Un résultat financier grevé par l’endettement de la fondation
Le résultat financier est resté en déficit constant à compter de
l’exercice 2006, du fait des remboursements d’intérêts liés aux emprunts
bancaires contractés pour les acquisitions immobilières réalisées par la
fondation. A structure d’endettement constante, les intérêts comptabilisés
en charges au compte de résultat devraient néanmoins progressivement
diminuer, puisque la volonté de maintenir des échéances constantes sur
toute la durée du prêt a conduit à mettre en place des mécanismes
d’amortissement progressif.
Au total, la politique d’endettement de la fondation maintient une
pression sur le résultat comptable, et les résultats financiers devraient
durablement contribuer négativement à sa constitution.
c)
Le résultat exceptionnel
Le résultat exceptionnel est alimenté en grande partie par la
quote-part de la subvention d’investissement virée au compte de résultat.
En 2006, année de vente des appartements appartenant à la fondation et
de la réalisation d’importants produits sur cessions d’éléments d’actifs,
les produits exceptionnels ont enregistré une progression importante, mais
non pérenne, en passant de 947 000 € à 3 338 000 €.
Sur l’ensemble de la période analysée, le résultat exceptionnel a
contribué positivement à la constitution du résultat. Sans sa prise en
compte, seul l’exercice 2009 aurait été bénéficiaire, ce qui confirme la
fragilité financière de la fondation et sa difficulté à dégager un résultat
positif à partir de son fonctionnement courant.
3 -
L’amélioration de la capacité d’autofinancement, du fonds de
roulement et de la trésorerie
La capacité d’autofinancement est passée de 3,7 M€ en 2005 à
7,4 M€ en 2009 et 6,7 M€ en 2010. Le fonds de roulement net global, qui
avait diminué jusqu’en 2008, s’est redressé nettement en 2010. La
trésorerie nette est quant à elle toujours restée supérieure à 9 M€ (sauf en
2005 et 2006, du fait du traitement comptable d’un emprunt particulier,
traité comme une ligne de trésorerie en phase de mobilisation).
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B - Le risque lié à une gestion de la dette mal maîtrisée
La politique d’investissement de la fondation a été concentrée sur
les dépenses liées à des opérations visant à accroître ou à améliorer son
patrimoine immobilier. Pour financer ces dépenses, qui lui ont permis
d’augmenter la valeur de ses actifs immobilisés, elle a eu recours à
plusieurs emprunts.
1 -
Les emprunts contractés par la fondation
Pour financer ses dépenses d’investissement, la fondation a
contracté six emprunts différents sur la période 2005-2011 :
- Le 15 décembre 2005, la FNSP a contracté un emprunt de 25 M€
sur 30 ans à taux fixe et amortissement progressif auprès de Dexia Crédit
Local. Cet emprunt a été mis en place dans une période très favorable : le
taux appliqué (3,8 %) n’appelle pas de commentaire particulier.
- Le 15 décembre 2005, la FNSP a également signé un contrat
portant sur un montant de 15 M€, amortissable sur une durée initiale de
32 ans. Cet emprunt est, en revanche, plus complexe que le précédent. Il
comprenait une première tranche, dite phase de mobilisation, du
21 novembre 2005 au 1
er
novembre 2007, pendant laquelle la fondation
pouvait lever les fonds quand elle le souhaitait, en une ou plusieurs fois,
sans amortissement, les intérêts étant indexés sur l’EONIA, taux
interbancaire au jour le jour utilisé en général pour calculer les intérêts
dus sur les lignes de trésorerie. La deuxième tranche correspondait à la
phase d’amortissement, dont l’emprunteur pouvait choisir les conditions
(jusqu’à 35 ans, à taux variable indexé sur l’Euribor
46
à 1, 3, 6 ou 12
mois, au choix de l’emprunteur, avec une marge de 0,19 %, ou bien à
taux fixe sur la base d’une cotation proposée par la banque au moment de
la mise en place de la tranche). Cet emprunt a donné lieu à un tirage de
21 M€ en 2006 lors de la phase de mobilisation. Les conditions
financières
relatives
à
cet
emprunt
apparaissaient
favorables
à
l’emprunteur, notamment du fait de sa souplesse de gestion (mécanismes
d’indexation variés) et de sa marge faible. Le 15 janvier 2008, ce contrat
avec Dexia a été modifié par avenant pour transformer l’index de
référence et passer d’un taux variable Euribor 1 mois à un taux fixe de
4,99 %, ce qui a supprimé le risque de taux.
46
L’Euribor est la référence de l’intérêt de l'emprunt pendant des durées d’une
semaine et de un à douze mois sur le marché interbancaire de la zone euro 12. Il est
calculé par une moyenne des taux des transactions pratiquées par un panel de
banques.
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71
- Le 27 octobre 2006, l’administrateur de la fondation a signé un
nouveau contrat avec Dexia. Ce nouvel emprunt porte sur un montant de
15 M€ et présente deux particularités. D’une part, il vise à refinancer à
hauteur de 15 M€ le contrat précédent, qui est réduit d’autant. D’autre
part, il présente des caractéristiques d’indexation très particulières qui
sont analysées dans le sous-titre suivant.
- Le 29 octobre 2009, l’administrateur de la fondation a contracté
auprès de la banque CIC un prêt de 5,2 M€ sur 10 ans à taux fixe de
3,85 %. En 2011, la fondation a par ailleurs contracté deux nouveaux
emprunts pour un montant total de capital emprunté de 8,8 M€ (deux
emprunts de 4,4 M€) sur 30 ans à taux fixe auprès de la Caisse des dépôts
et consignations à 3,86 % et du CIC à 3,78 %. Ces trois derniers contrats
n’appellent aucun commentaire particulier, car il s’agit d’emprunts très
classiques et simples, dont les modalités sont représentatives des
conditions de marché de l’époque où ils ont été signés.
Les emprunts contractés par la FNSP génèreront un besoin de
financement annuel lié aux annuités de la dette de près de 4 M€ par an
jusqu’en 2020, date d’amortissement de l’emprunt contracté en 2010 pour
financer les travaux de la bibliothèque.
L’ensemble de ces opérations a fait l’objet, au mieux, d’une
consultation
du
conseil
d’administration
sur
les
principales
caractéristiques des emprunts à souscrire : la séance du conseil du
4 octobre 2005 a été, par exemple, l’occasion d’une longue discussion sur
les caractéristiques des emprunts à souscrire pour le financement de
l’opération d’acquisition des anciens locaux de l’ENA, rue de
l’Université. En revanche, l’opération de refinancement de 2006, qui a
conduit la fondation à la souscription d’un emprunt risqué, n’a donné lieu
à aucune délibération du conseil d’administration.
2 -
La présence d’un emprunt structuré risqué
L’emprunt de 15 M€ contracté auprès de Dexia en 2006 est
caractérisé par une grande complexité, mais aussi par son mode
d’indexation. Il est, en effet, composé d’une phase de mobilisation d’une
année, du 1
er
novembre 2006 au 1
er
novembre 2007, indexée sur le T4M
(taux moyen mensuel du marché monétaire), majoré d’une marge de
0,19 %.
Au-delà
de
cette
date,
le
contrat
prévoit
une
phase
d’amortissement qui est décomposée en trois phases successives. La
première phase dure trois ans, jusqu’au 1
er
novembre 2010, et prévoit une
indexation à taux fixe de 3,41 %. La deuxième phase dure 16 ans, jusqu’à
la date du 1
er
novembre 2026, phase pendant laquelle le taux proposé est
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de 3,41 %, sauf si la différence entre le CMS
47
EUR 30 ans et le CMS
EUR 1 an est supérieure ou égale à 0,20 %. Dans le cas inverse, le taux
appliqué s’établit à 4,95 % -5*(CMS 30 – CMS 1). La dernière période
d’amortissement prévoit le retour à un taux fixe simple de 3,41 %.
Il s’agit d’un emprunt dit « structuré », car il mêle un financement
bancaire et une série d’options, permettant de conditionner les modalités
d’indexation, en l’occurrence en fonction de l’écart entre les taux à long
terme (30 ans) et à court terme (1 an), raison pour laquelle ce type de
produit est également appelé « produit de pente ». Comme tous les
emprunts structurés, il repose sur un mécanisme en deux phases : une
phase dite bonifiée par rapport aux taux de marché, et une seconde phase,
beaucoup plus longue, caractérisée par une exposition à des modalités
d’indexation plus ou moins risquées. Dans ce cas précis, le taux bonifié
n’est maintenu dans la deuxième phase que si l’écart sur le marché entre
taux court et taux long est supérieur à 0,20 %
48
. Si tel n’est pas le cas, le
taux pratiqué est dégradé.
Ce produit est d’autant plus risqué que le contrat intègre, dans la
formule de calcul, un coefficient multiplicateur (ici égal à 5) qui agit
comme un levier amplifiant considérablement la dégradation du taux en
cas de réalisation du risque précité. Dans la charte élaborée en 2009 pour
caractériser les produits risqués souscrits par le secteur public local
(cotation dite
Gissler
), un tel produit a une cotation 3E : il est classé dans
la catégorie des produits spéculatifs et dangereux.
Cet emprunt apparaît comme un produit complexe, risqué et peu
lisible pour des gestionnaires insuffisamment avertis.
C - Le financement par les collectivités territoriales
Les campus en région représentaient 13,7 % des dépenses de l’IEP
en 2010 contre 7,5 % en 2005. Cette augmentation correspond aux
ouvertures des nouveaux sites (Menton en 2005, Le Havre en 2008 et
Reims en 2010). Les données comptables font par ailleurs apparaître un
surcoût des campus délocalisés entraîné par les frais de structure
nécessaires pour accueillir de faibles effectifs : ils représentent, en effet,
avec 976 étudiants, 12,4 % du total des étudiants de l’IEP.
Ces campus présentent la particularité d’avoir été financés en
partie grâce au soutien des collectivités territoriales. Celles-ci ont, en
47
Le CMS (
Constant Maturity Swap
) est un index usuel sur les marchés de taux qui
sert de référence pour les cotations de taux fixes. A titre d’exemple, le CMS EUR
20 ans est le taux d’un emprunt en euros, amorti
in fine
, sur une durée de 20 ans.
48
Soit 20 points de base.
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effet, mis à disposition à titre gracieux des locaux rénovés et adaptés aux
besoins de l’institut. En outre, elles participent au financement du
fonctionnement courant de ces antennes.
Tableau n° 22 : Budgets des campus en région en milliers
d’euros et en % d’évolution
Source : FNSP - Comptes financiers
Ces participations proviennent de communes, de communautés
d’agglomération, de départements, de régions et de chambres de
commerce et d’industrie. Elles ont été motivées par la volonté de ces
collectivités d’attirer sur leur territoire l’antenne d’un établissement
d’enseignement supérieur prestigieux, pensant que cette implantation
favoriserait leur attractivité. Elles ont pris la forme de conventions
conclues avec la fondation, qui, au mieux, sécurisent les financements sur
trois exercices. Les contreparties à ces financements sont en général
formalisées de manière très souple et consistent souvent en la mise en
place d’un premier cycle, dans le développement d’actions d’animation
de la vie culturelle et intellectuelle locale dans les domaines de
compétence de l’établissement, et dans la contribution active à des actions
valorisant l’attractivité du territoire.
En revanche, au-delà de la période contractuelle, l’engagement des
collectivités territoriales n’est pas garanti, ce qui expose la fondation à
une perte de ressources susceptible d’affecter son compte de résultat.
Cette éventualité d’un désengagement de certaines collectivités n’est pas
une hypothèse d’école, comme le montrent plusieurs exemples récents.
Le conseil général des Alpes-Maritimes s’est ainsi engagé à favoriser
l’ouverture du site de Menton à hauteur de 0,3 M€ la première année en
2005, puis à 0,4 M€ en 2006 et à 0,5 M€ en 2007, avant de réduire sa
Evolution des dépenses par sites
2005
2010
∆
05-10 en %
∆
05-10 en K€
Nancy
1 092
2 623
140,2%
1 531
Poitiers
1 316
2 277
73,0%
961
Dijon
1 188
1 853
56,0%
665
Menton
539
1 867
246,4%
1 328
Le Havre
0
2 483
2 483
Reims
0
1 474
1 474
Total dépenses de fonctionnement
4 135
12 577
204,2%
8 442
Evolution des recettes par sites
2005
2010
∆
05-10 en %
∆
05-10 en K€
Nancy
1 213
1 801
48,5%
588
Poitiers
1 006
1 632
62,3%
626
Dijon
882
964
9,3%
82
Menton
998
1 046
4,8%
48
Le Havre
0
1 638
1 638
Reims
0
1 106
1 106
Total recettes de fonctionnement
4 099
8 187
99,7%
4 088
Solde recettes - dépenses
-36
-4 390
12027,1%
-4 354
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contribution à hauteur de 0,4 M€ en 2008, puis à 0,1 M€ en 2009 et à 0 €
en 2010. A Poitiers, la subvention de la région est passée de 0,457 M€ en
2009 à 0,4 M€ en 2010. A Reims, la participation de la ville est passée de
0,45 M€ en 2009 à 0,197 M€ en 2010, ce qui a toutefois été compensé par
les contributions du département et de la région, à hauteur de 0,196 M€
chacune.
Les collectivités territoriales ne sont pas investies de compétences
particulières en matière d’enseignement supérieur et de recherche : elles
ne sont pas tenues de mettre en place ces soutiens financiers et peuvent
décider de ne pas renouveler leurs engagements contractuels au-delà de la
période des contrats en cours. Cette situation fragilise le financement des
centres en région ouverts par Sciences Po, dont 43,4 % des ressources,
soit un peu plus de 3 M€, provenaient en 2010 de financements publics
locaux.
Par ailleurs, la comptabilité analytique de la fondation ne fait pas
apparaître de recettes en provenance du ministère de l’enseignement
supérieur et de la recherche pour le financement des centres en région.
Bien que cette présentation fasse accroire que le ministère ne participerait
pas à la prise en charge du coût engendré par la scolarité des 976
étudiants inscrits dans ces centres
49
et ne financerait que les étudiants
suivant leur scolarité à Paris, l’attribution de la dotation globale de
fonctionnement prend bien en compte l’ensemble des étudiants de
Sciences Po.
II
-
Une gestion défaillante des personnels
Le statut de Sciences Po permet à la FNSP de recruter des
contractuels de droit privé, tout en bénéficiant de l’apport de
fonctionnaires de l’Etat. Sciences Po dispose ainsi d’un personnel
enseignant et de recherche qui relève de deux catégories distinctes,
regroupées
sous
la
dénomination
de
« personnel
académique
permanent » :
-
le personnel enseignant et de recherche sous statut public,
constitué des enseignants-chercheurs affectés à l’IEP et des
chercheurs du CNRS affectés aux laboratoires de recherche de
la FNSP. L’IEP n’étant pas soumis au régime de responsabilités
et compétences élargies (RCE) mis en place par la loi du
10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des
universités (LRU), puisqu’il n’en a pas fait la demande en tant
49
Sur les 3 837 étudiants du collège universitaire.
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que grand établissement, la rémunération du personnel
enseignant sous statut public continue d’être servie directement
par l’Etat ;
-
le personnel enseignant et de recherche recruté sous contrat de
droit privé, composé essentiellement de professeurs, de
professeurs
associés,
d’
associate
professors
,
d’assistant
professors,
de directeurs de recherche, de chargés de recherche
et
de chargés d’études, qui sont recrutés et rémunérés
directement par la fondation. De nombreux enseignants
vacataires interviennent par ailleurs à l’IEP.
Sciences Po emploie également des personnels administratifs
relevant de trois catégories :
-
des salariés recrutés sous contrat de droit privé, qui représentent
la grande majorité du personnel administratif ;
-
des agents de la fonction publique affectés à l’IEP, peu
nombreux ;
-
un petit nombre de fonctionnaires en détachement, issus de
différents ministères (25 en 2010).
Dans la comptabilisation de ses effectifs permanents, la FNSP ne
retient pas les fonctionnaires et les enseignants rémunérés directement par
l’Etat, sauf lorsqu’ils bénéficient d’un contrat complémentaire passé avec
la fondation. Il y a donc des chevauchements possibles entre la
comptabilisation des effectifs par la FNSP, d’une part, et celle des
fonctionnaires sous statut public, d’autre part.
A - Une masse salariale non maîtrisée
1 -
Un taux d’encadrement administratif élevé
L’institut d’études politiques de Paris (IEP), qui est géré
administrativement et financièrement par la Fondation nationale des
sciences politiques (FNSP), n’est soumis, ni à un plafond d’emplois, ni à
un plafond de masse salariale, contrairement aux autres établissements
publics d’enseignement supérieur. Cette particularité a permis à Sciences
Po de conduire une politique de recrutement et de revalorisation salariale
soutenue tout en augmentant de façon importante le nombre de ses
étudiants.
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Tableau n° 23 : Evolution des personnels permanents de la FNSP en
effectifs réels
Source : Sciences Po – calcul Cour des comptes
La FNSP comptait 686 salariés financés sur son budget en 2005 :
elle en compte 909 en 2010 (+ 32,5 %). La majorité des recrutements a
porté sur des personnels de soutien, dont le nombre est passé de 590 à
764. Dans le même temps, la masse salariale globale de la FNSP est
passée de 48,42 M€ en 2005 à 75,36 M€ en 2010, soit une augmentation
de 55,7 %.
Jusqu’en 2011, la classification des postes budgétaires de la FNSP
ne permettait pas de distinguer dans la masse salariale les dépenses
afférentes au « personnel académique » de celles qui sont affectées au
personnel administratif. Il n’est donc pas possible d’étudier de façon
détaillée l’évolution de chaque catégorie de salariés sur la période
2005-2010. Les chiffres des perspectives d’exécution 2011 révèlent
cependant
l’originalité
de
Sciences
Po
par
rapport
aux
autres
établissements d’enseignement supérieur : la masse salariale liée à
l’enseignement et à la recherche - « personnel académique » et vacataires
enseignants, soit 30,43 M€ - est faible par rapport au poids des fonctions
support (52,65 M€).
2005 2006
2007
2008 2009
2010
Evolution
2010/2005
2011
Personnel administratif
590
622
644
712
753
764
29,49%
793
Personnel académique
96
105
117
109
134
145
51,04%
155
Total
686
727
761
821
887
909
32,51%
948
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77
Tableau n° 24 : Evolution des dépenses de personnel
50
entre 2005 et
2010 (en milliers d’euros)
Source : comptes financiers 2005-2010 de la FNSP – calcul Cour des comptes
La croissance de la masse salariale (+ 55,7 %) a largement répondu
à l’augmentation du nombre d’étudiants en formation initiale (+ 59 %
entre 2005 et 2010). Les dépenses liées aux enseignants vacataires, qui
assurent l’essentiel des heures de cours en formation initiale, ont
notamment doublé.
La FNSP met en avant le fait que ses autres dépenses de personnel
ont augmenté légèrement moins vite en pourcentage que le nombre
d’étudiants, et que la part de la masse salariale dans les dépenses de
fonctionnement est restée stable sur la période et a même légèrement
diminué en 2010. Ces arguments doivent toutefois être replacés dans le
contexte des autres établissements d’enseignement supérieur.
Les données de l’Observatoire des universités
51
font état d’un taux
d’encadrement moyen, dans les universités, d’un personnel de soutien
pour 28,8 étudiants en 2009-2010. Ce taux descend même à un personnel
de soutien pour 39,5 étudiants dans les universités spécialisées en lettres
et en sciences humaines et sociales. A Sciences Po, le taux d’encadrement
administratif est bien supérieur, même s’il a baissé entre 2005 et 2010 :
un personnel de soutien pour 8,3 étudiants en 2005 et un personnel pour
10,2 étudiants en 2010. Même en décomptant les 39 salariés mis à
disposition des IEP de province par la FNSP, ce taux reste d’un personnel
de soutien pour 10,8 étudiants.
50
Les dépenses de personnel comprennent également les dépenses liées aux vacataires
enseignants, que la FNSP comptabilise en tant que « dépenses d’enseignement ».
51
Données de l’Observatoire des universités figurant sur le portail d’aide au pilotage
de l’enseignement supérieur (PapESR).
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Evolution
2005/2010
Dépenses de personnel
39 060
42 493
45 148
48 715
53 741
60 048
53,7%
Dépenses d’enseignement
(vacataires enseignants)
9 355
11 239
12 079
13 671
15 132
15 315
63,7%
Dont formation initiale
1 472
1 356
1 436
1 967
2 508
2 967
101,6%
Dont formation continue
7 883
9 883
10 643
11 704
12 624
12 348
56,6%
Total personnel et enseignement
48 415
53 732
57 227
62 386
68 873
75 363
55,7%
Total dépenses de
fonctionnement
78 745
89 717
95 565
105 681
114 318
127 133
61,4%
% personnel et enseignement sur
dépenses de fonctionnement
61,50%
59,90%
59,90%
59,00%
60,20%
59,30%
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La pédagogie en petits groupes, le développement des campus en
région et la présence de nombreux étudiants étrangers rendent sans doute
nécessaire la présence d’un personnel plus nombreux qu’un établissement
de grande taille implanté sur un site unique. Sciences Po met également
en avant le fait que les universités sont sous-dotées en personnel et qu’un
soutien administratif important lui a permis d’offrir de bonnes conditions
de travail à ses chercheurs, de multiplier ses partenariats à l’international
et de trouver de nouvelles sources de financements (mécénat, taxe
d’apprentissage, etc.)
Il n’en demeure pas moins que l’écart avec des établissements
universitaires
de
taille
semblable
pose
question.
L’université
Paris-Dauphine, grand établissement également, pratiquant la sélection à
l’entrée et ayant un modèle pédagogique qui a des similitudes avec celui
de Sciences Po (cours en petits groupes), avec un nombre d’étudiants un
peu inférieur (7 930 étudiants inscrits en formation initiale en
2009-2010), a un personnel de soutien pour 19 étudiants. Le taux
d’encadrement à Sciences Po est resté proche de celui d’une grande école,
alors que ses effectifs atteignent désormais la taille d’une petite
université.
2 -
Des conditions de rémunération plus favorables que dans la
fonction publique
A la présence d’un personnel administratif nombreux s’ajoutent
des
mécanismes
de
revalorisation
salariale
qui
ont
contribué
progressivement à déconnecter la rémunération des salariés de la FNSP
de celle de la fonction publique. La rémunération annuelle brute moyenne
des salariés de Sciences Po a, en effet, progressé de 18,1 % entre 2004 et
2009, alors que le salaire brut moyen des agents de la fonction publique
n’a augmenté que de 13,2 %
52
.
Cet écart risque encore de se creuser avec les effets de la
politique salariale de l’Etat, marquée notamment par le gel du point
d’indice de la fonction publique depuis juillet 2010 et la réduction des
effectifs.
52
Insee,
Les salaires des agents de l’Etat
, années 2004 à 2009, les chiffres pour 2010
n’étant pas encore disponibles.
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Tableau n° 25 :
Evolution de la rémunération moyenne brute
des
salariés de la FNSP entre 2004 et 2010 (euros courants)
Source : Sciences Po – calcul Cour des comptes
La croissance de la rémunération moyenne s’explique en premier
lieu par la diminution des emplois les moins qualifiés et l’augmentation
du nombre de cadres. Les différentes directions de Sciences Po ont en
effet procédé au recrutement de 150 chargés de mission entre 2005 et
2010, et les cadres représentent désormais 50 % du personnel
administratif. Leur présence assure des capacités de pilotage importantes
à l’établissement, mais implique nécessairement des salaires plus élevés.
En second lieu, la grande majorité des salariés de la FNSP étant
des contractuels de droit privé, leurs conditions de rémunération sont
fixées par des accords collectifs qui ont institué plusieurs mécanismes de
revalorisation automatique des salaires. L’accord sur les classifications,
rémunérations et carrières du 29 mars 2000 définit les modalités
d’évolution de la rémunération de l’ensemble des salariés à l’intérieur
d’une grille salariale unique
53
. A chaque poste correspond une cotation,
qui est multipliée par une valeur de point : le point a une valeur maximale
et une valeur minimale, ce qui donne pour chaque type de poste une
rémunération minimale et une rémunération maximale.
La valeur du point
est réactualisée deux fois par an, en prenant notamment en compte
l’évolution du point de la fonction publique.
Cet accord a également institué une augmentation annuelle à
l’ancienneté
et
une
augmentation
au
mérite.
Le
montant
de
l’augmentation annuelle à l’ancienneté est de 1,5 % du salaire mensuel
brut du salarié. L’augmentation annuelle au titre du mérite a d’abord été
définie comme pouvant aller jusqu’à 1,5 % du salaire mensuel brut, à
l’intérieur d’une enveloppe globale limitée à 0,5 % de la masse salariale
de l’année précédente. A la suite d’un accord signé le 10 janvier 2008,
cette augmentation peut désormais atteindre 5 % du salaire mensuel brut
de l’intéressé, dans la limite de 1,5 % de la masse salariale de l’année
précédente.
53
A l’exception des chercheurs de l’OFCE, qui relèvent d’un autre accord.
2004
2005
2006
2007
2008
2009
%
augmentation
2004-2009
2010
Rémunération annuelle
moyenne
33 713
34 845
35 901
37 676
38 641
39 831
18,1%
41 896
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80
Ces deux mécanismes font automatiquement progresser la masse
salariale d’environ 3 % par an, indépendamment de l’augmentation du
point de la fonction publique.
La question de la rémunération des salariés a été abordée en
conseil d’administration le 14 décembre 2010 par le président du conseil
de direction de l’IEP. Celui-ci a suggéré de limiter les revalorisations et
d’aligner l’évolution des rémunérations du personnel administratif sur
celle des autres établissements d’enseignement supérieur, en insistant sur
le fait que Sciences Po n’était pas « une entreprise qui crée des richesses
marchandes, et peut de ce fait réaliser des gains de productivité
mesurables qui lui permettraient de se fixer l’objectif d’une augmentation
de ses effectifs et du pouvoir d’achat de ses salariés quelles que soient les
circonstances
54
».
La prudence dans le pilotage de la masse salariale pour une
institution aussi dépendante des subventions publiques est une nécessité
impérieuse.
3 -
Un régime de rémunérations accessoires peu lisible
La part des primes dans les dépenses de personnel reste faible,
mais a tendance à augmenter. Le total des primes représente ainsi près de
2,48 M€ en 2010, contre 0,89 M€ en 2005. Si l’on exclut la part variable
réservée aux « cadres dirigeants » membres du comité exécutif, elle
atteint 2,05 M€. L’augmentation des primes observable en 2010 tient
essentiellement
à
la
signature
d’un
accord
d’intéressement
le
30 juin 2009, pour une durée de trois ans, à compter du 1
er
janvier 2009.
Cette prime annuelle est calculée sur la base de l’atteinte d’objectifs
collectifs : 0,298 M€ ont ainsi été versés au titre de l’intéressement en
2010.
Par ailleurs, un accord du 20 novembre 2009 a créé la
« contribution progressive de participation 2013
» (CPP 2013), prime
associée à la réalisation du plan de développement « Sciences Po :
Objectif
2013 ».
Cette
contribution,
versée
annuellement,
est
proportionnelle au salaire mensuel brut du salarié : un montant de
0,887 M€ a ainsi été versé en 2010 au titre de la CPP 2013.
Contrairement à la prime d’intéressement, la CPP 2013 n’est pas limitée
dans le temps, l’accord étant conclu pour une durée indéterminée.
A la différence de ces deux primes qui sont précisément définies
par les accords collectifs, les modalités d’attribution des primes de
performance manquent de lisibilité, notamment en ce qui concerne les
54
Procès-verbal du conseil d’administration de la FNSP du 14 décembre 2010.
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81
« primes exceptionnelles
»
, qui peuvent être accordées dans le cadre de
l’évaluation annuelle pour récompenser une action ponctuelle, et les
« primes
mensuelles
»
qui
sont
accordées,
notamment
à
des
fonctionnaires affectés à l’IEP, pour un travail supplémentaire limité dans
le temps. Ces deux primes, qui représentent 0,50 M€ en 2010, ne sont
encadrées par aucune grille et sont laissées à la discrétion des directeurs
et de l’administrateur. Leur montant est de fait extrêmement variable,
allant de 62 € à 15 000 € pour les primes exceptionnelles, et de 46 € à
10 164 € pour les primes mensuelles.
4 -
Une nécessaire mise sous plafond
Sans doute la FNSP est-elle un employeur privé mais, en tant
qu’opérateur de l’Etat, financé majoritairement par lui, sans ressources
propres autres que les droits d’inscription, elle ne saurait se désolidariser
du mouvement général de maîtrise des dépenses salariales engagé au sein
de la fonction publique. Le nombre élevé de personnels de soutien doit
désormais être stabilisé. Par ailleurs, les mécanismes de revalorisation
automatique des rémunérations doivent être revus afin de mieux maîtriser
la masse salariale. Les modalités d’attribution des primes mensuelles et
des primes exceptionnelles doivent enfin être clarifiées, et le recours à des
accords instituant des primes complémentaires sans limitation de durée
doit être évité dans le contexte actuel.
A ce titre, la mise en place d’un plafond d’emplois et d’un plafond
de masse salariale servant de base à l’attribution de la dotation globale de
fonctionnement est souhaitable, car elle permettrait au ministère de
l’enseignement supérieur et de la recherche, principal financeur de
Sciences Po, de veiller à ce que le développement de l’IEP se fasse en
cohérence avec les objectifs d’efficience fixés aux autres établissements
publics d’enseignement supérieur. A défaut, l’Etat encourrait le risque de
susciter des demandes reconventionnelles et non maîtrisées de hausse des
rémunérations.
B - Les enseignants-chercheurs : un système peu
transparent de décharges de service et de compléments
de rémunération
Le recours aux vacataires est une tradition à Sciences Po, qui
promeut depuis longtemps un enseignement par des professionnels
« praticiens » de leur domaine d’activité. Les enseignants vacataires ont
ainsi assuré 93 % des 144 000 heures de cours délivrées à l’IEP en
2010-2011. Ce recours à des vacataires représente pour Sciences Po une
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économie certaine par rapport à l’emploi d’enseignants permanents et
contribue à limiter le poids de la masse salariale enseignante : en 2011,
les vacataires ne représentent ainsi que 17 M€ sur les 30,43 M€ de
dépenses de « personnel académique » de la
FNSP (vacataires,
enseignants-chercheurs et chercheurs), tout en assurant l’essentiel des
heures de cours.
L’établissement a corrélativement longtemps privilégié un corps
réduit d’enseignants-chercheurs permanents.
Depuis la mise en place de sa nouvelle politique scientifique,
Sciences Po cherche à renforcer son corps académique. Entre 2005 et
2010, si le nombre d’enseignants et de chercheurs fonctionnaires a peu
varié (environ 90 enseignants-chercheurs et 53 chercheurs du CNRS), la
FNSP a en revanche recruté une cinquantaine d’enseignants et de
chercheurs supplémentaires sous contrat de droit privé et souhaite
poursuivre cette politique.
1 -
L’impact de la compétition internationale sur le recrutement
des enseignants-chercheurs
L’internationalisation des procédures de recrutement à Sciences Po
est une caractéristique de ces dernières années. L’ouverture de postes
d’économistes, d’historiens ou de juristes fait désormais l’objet d’une
publicité à l’échelle du « marché mondial » des enseignants-chercheurs,
l’objectif affiché étant de recruter des professeurs confirmés, mais aussi
de jeunes chercheurs ou enseignants prometteurs, en leur offrant des
conditions de travail et de rémunération attractives.
Cette volonté d’être compétitive en France et sur le marché
international a conduit l’institution à développer un système peu
transparent de compléments de rémunération et d’allègement de charges
d’enseignement.
Si
Sciences
Po
est
devenu
attractif
pour
les
enseignants-chercheurs, c’est au prix de nombreuses libertés prises avec
la réglementation.
2 -
Un système de rémunération des enseignants contractuels qui
manque de transparence et de cohérence
Les chercheurs et enseignants-chercheurs contractuels sont recrutés
en tant que « cadres au forfait annuel en jours » sur des postes propres à
la FNSP (professeur, professeur associé,
associate professor, assistant
professor,
chargé de recherche), en CDI ou en contrats d’usage à durée
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83
déterminée
55
. Sciences Po conduit à ce titre une politique de
« convergence des statuts » visant à inciter les chercheurs à prendre en
charge
des
enseignements,
contre
une
rémunération
annuelle
supplémentaire.
Sciences Po a indiqué à la Cour que « [l]es emplois de chercheurs
et d’enseignants chercheurs salariés de la FNSP font l’objet d’une
cotation dans la grille des rémunérations de la fondation. Cette grille est
publique et figure sur le site web de Sciences Po. Ainsi, les cotations de
ces emplois dans la grille de classification des emplois de la FNSP
sont-elles clairement indiquées : « cotation 40 » pour les directeurs de
recherche de classe exceptionnelle et les professeurs ; « cotation 36 »
pour les directeurs de recherche et les associate professors ; « cotation
30 » pour les assistant professors et « cotation 26 » pour les chargés de
recherche. Ce système de cotation est assurément plus souple que celui
des grilles indiciaires de la fonction publique. Il n’est pas pour autant
opaque ou inéquitable. »
L’examen des contrats individuels montre toutefois que les
rémunérations proposées aux enseignants-chercheurs et aux chercheurs ne
respectent pas toujours la fourchette prévue par la grille salariale de la
FNSP. Un tiers des contrats examinés par la Cour comporte ainsi un
salaire supérieur au plafond de la cotation du poste, notamment au sein du
département d’économie ; pour un autre cas, le salaire est au contraire
inférieur au minimum prévu.
En pratique, la charge de travail et la rémunération sont négociées
directement entre l’intéressé et les principales directions de Sciences Po,
en fonction de sa rémunération précédente et de sa notoriété, sans qu’une
grande attention soit portée au respect de la grille. Un
assistant professor
(cotation 30) a ainsi pu se voir attribuer une rémunération mensuelle
dépassant le maximum de la rémunération prévue pour un professeur
(cotation 40). Les initiatives prises par l’exécutif dans ce domaine ne sont
pas validées par une instance collégiale, et il en résulte un manque de
transparence et de cohérence dans la politique de rémunération des
enseignants contractuels.
55
Aux termes de l’art. D 1242-1 du code du travail, de tels contrats peuvent être
conclus dans le secteur de l’enseignement et dans celui de la recherche scientifique
réalisée dans le cadre d'une convention internationale, d'un arrangement administratif
international pris en application d'une telle convention, ou par des chercheurs
étrangers résidant temporairement en France.
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3 -
Des irrégularités dans la gestion du service des enseignants
sous statut public
Les enseignants-chercheurs affectés à l’IEP de Paris bénéficient du
traitement et des primes liés à leur statut. Il est cependant difficile de
rémunérer les jeunes
assistant professors
à des niveaux plus élevés que
celui des professeurs d’université, sans créer des difficultés internes.
Sciences Po a donc tendance à pratiquer un alignement par le haut des
rémunérations, notamment celles des professeurs d’université, en
recourant à des contrats de droit privé complémentaires, auxquels
s’ajoutent des primes et de fréquentes décharges d’enseignement.
A l’issue de son contrôle, la Cour a pu établir que la gestion des
enseignants-chercheurs associait la direction des études et de la scolarité
(DES), la direction scientifique (DS), la direction de l’information
scientifique (DIS) et la direction des ressources humaines (DRH).
Elle a constaté que le système ainsi mis en place était
particulièrement opaque et donnait lieu à des pratiques irrégulières :
-
en 2010-2011, une vingtaine de professeurs des universités
bénéficiant d’une décharge d’enseignement ont été également
rémunérés pour des enseignements complémentaires, ce qui est
contraire aux dispositions du décret du 6 juin 1984, modifié par
le décret du 23 avril 2009, fixant les dispositions statutaires
communes applicables aux enseignants-chercheurs ;
-
les responsables d’écoles ou de départements reçoivent à la fois
une prime et une décharge d’enseignement pour une même
fonction ;
-
en 2010-2011, des professeurs ont bénéficié de décharges
supérieures aux deux tiers de leur service, en cumulant la
direction
de
plusieurs
structures
(écoles,
départements,
masters), décharges qui peuvent atteindre 100 % de leur
service. Or l’article 7-IV du décret du 6 juin 1984 modifié
prévoit que les décharges accordées au titre de la direction
d’une unité de formation et de recherche ne peuvent dépasser
les deux tiers du service d’enseignement
56
;
-
enfin, certains cours magistraux sont majorés par des
coefficients compris entre 1,2 et 4, selon le nombre d’étudiants
56
Le service d’enseignement annuel d’un enseignant-chercheur est égal à 128 heures
de cours, ou 192 heures de
travaux dirigés ou pratiques, ou toute combinaison
équivalente en formation initiale, continue ou à distance. Dans la comptabilisation de
la charge d’enseignement, une heure de cours est donc équivalente à 1,5 heure de TD
ou de TP.
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85
inscrits
57
. En fonction du coefficient, ce système aboutit à ce
qu’une
heure
de
cours
effective
soit
irrégulièrement
comptabilisée pour deux, trois, voire quatre heures : un
enseignant assurant 28 heures de cours par an peut ainsi se voir
comptabiliser 112 heures de cours s’il bénéficie d’un
coefficient 4.
Sciences Po a indiqué à la Cour qu’« en 1994, le Conseil dit « de
l’article 7 », organe qui tient lieu de conseil d’administration en formation
restreinte à l’IEP de Paris, a établi une grille qui fixe les équivalences
horaires applicables à chacune des activités correspondant aux fonctions
des enseignants-chercheurs. Cette grille, révisée une première fois en
2006, est actuellement en cours de réactualisation ».
La décision de 1994
du conseil de l’article 7 n’a cependant pu être produite à la Cour.
Pour l’établissement, cette grille est conforme aux évolutions
instituées par le décret du 23 avril 2009, qui a modifié le décret du
6 juin 1984.
Il ressort au contraire des vérifications de la Cour que les
coefficients 3 et 4 ne figurent pas dans la grille qui lui a été transmise au
cours de l’instruction : leur attribution est laissée à la discrétion du
directeur de l’IEP et des directeurs concernés. Il apparaît aussi que
l’ensemble de ces coefficients n’est pas conforme aux dispositions du
décret du 6 juin 1984 modifié.
L’article 7-II dudit décret prévoit en effet que « […] dans le
respect des dispositions de l’article L. 952-4 du code de l’éducation et
compte tenu des priorités scientifiques et pédagogiques, le conseil
d'administration en formation restreinte ou l'organe en tenant lieu définit
les principes généraux de répartition des services entre les différentes
fonctions des enseignants-chercheurs […]. Il fixe également les
équivalences horaires applicables à chacune des activités correspondant à
ces fonctions, ainsi que leurs modalités pratiques de décompte. Ces
équivalences horaires font l’objet d’un référentiel national approuvé par
arrêté du ministre chargé de l’enseignement supérieur ».
Le Conseil
d’administration de la FNSP non plus que le conseil de l’article 7 n’ont
validé les principes généraux de répartition des services ni les
57
La grille est la suivante : nombre d’étudiants inscrits < 100 : le coefficient est égal à
1,5 ; nombre d’étudiants inscrits
≥
100 et < 500 : le coefficient est égal à 2. Par
ailleurs, la direction des études et de la scolarité applique un coefficient 3 si le nombre
d’étudiants est
≥
500 et < 900 et un coefficient 4 si le nombre d’étudiants est
≥
900.
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86
équivalences horaires applicables à chacune des activités correspondant à
ces fonctions
58
.
En outre, l’arrêté du 31 juillet 2009 qui approuve le référentiel
national d’équivalences horaires autorise l’attribution de forfaits d’heures
en
contrepartie
d’activités
supplémentaires
clairement
identifiées
(innovation pédagogique, encadrement d’étudiants, responsabilité de
structures ou de missions pédagogiques, etc.). Ce référentiel ne prévoit
nullement, en revanche, de coefficients de majoration appliqués
directement aux heures de cours.
Les conditions d’attribution des coefficients de pondération aux
enseignants-chercheurs
ne
sont
pas
conformes
aux
dispositions
réglementaires en vigueur. L’attribution de ces coefficients limite de
façon importante la charge d’enseignement des personnels académiques,
les enseignants contractuels étant concernés aussi bien que les
enseignants sous statut public. Un calcul des heures de cours réellement
assurées en 2010-2011, rapportées aux heures comptabilisées par
Sciences Po, a été effectué pour l’ensemble des professeurs, maîtres de
conférences et professeurs associés sous statut public : il montre que les
heures réellement assurées ne représentent que les deux tiers des heures
comptabilisées.
Tableau n° 26 : Calcul du nombre d’heures de cours après
application des coefficients de pondération
Source : bilans des charges d’enseignement 2010-2011 – calcul Cour des
comptes
Le suivi du service des enseignants-chercheurs doit par ailleurs
être plus rigoureux : jusqu’en 2009-2010, le contrôle
ex post
reposait
uniquement sur les déclarations des enseignants, qui remplissaient une
feuille de service en fin d’année universitaire. Depuis l’année 2010, les
bilans de fin d’année sont constitués à partir des informations figurant
dans l’outil de gestion de la scolarité. Néanmoins, aucune retenue sur
salaire n’a été pratiquée à l’encontre de certains enseignants n’effectuant
58
Aucune délibération du conseil d’administration ni du conseil de l’article 7 n’a
notamment approuvé la grille des coefficients de 2006 actuellement en vigueur.
Nombre d'heures de cours réellement assurées par les enseignants-chercheurs sous
statut public
4 271,25
Nombre d'heures de cours après application des coefficients de majoration
6 504,15
% Nombre d'heures réelles / nombre d'heures comptabilisées
65,70%
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pas la totalité de leur service obligatoire, y compris après application des
décharges et des coefficients.
Au total, la gestion des enseignants-chercheurs a fait l’objet
d’irrégularités répétées sur la période, que Sciences Po s’est engagé à
corriger à l’exception notable du système des coefficients de pondération
des cours.
Cette pratique irrégulière des coefficients, qui contribue à la
multiplication
des
heures
complémentaires
et
qui
masque
les
sous-services éventuels, doit être supprimée, tout comme les autres
irrégularités constatées. Sciences Po doit les remplacer par un référentiel
d’équivalence de charges conforme au référentiel national.
4 -
Des carences répétées dans la gestion des logements de
fonction
Lors de son contrôle, la Cour a constaté qu’entre 2005 et 2010, une
douzaine de logements ont été loués par la FNSP et mis à la disposition
de professeurs étrangers de passage ou d’agents nécessaires au bon
fonctionnement
des
bâtiments
(appariteurs,
agents
techniques…).
Certains logements ont également été mis à la disposition d’enseignants
et de cadres de la fondation. Au cours de la phase d’instruction, Sciences
Po a souligné que « les attributions de logement ont toujours été
exceptionnelles, pour pallier des difficultés passagères ou une situation
temporaire de mobilité géographique, dans les cas de logements attribués
à des enseignants-chercheurs ou à des cadres dirigeants, de manière
strictement encadrée ».
Depuis 2010, l’établissement s’est défait d’une grande partie de ses
logements et a indiqué qu’il comptait recourir davantage à des bailleurs
privés spécialisés dans l’hébergement temporaire de chercheurs.
La Cour a cependant constaté qu’entre 2005 et 2010, quatre
appartements ont été mis à la disposition de trois enseignants-chercheurs
et d’un cadre dirigeant pour une durée comprise entre deux et six ans, ce
qui ne s’apparente pas à une situation de mobilité temporaire. Deux autres
appartements ont été mis à la disposition de directeurs d’un même
campus en région. Il a également été constaté que l’attribution de ces
logements se faisait sans consultation du conseil d’administration de la
FNSP.
Le statut de droit privé de la FNSP lui permet de ne pas justifier
d’une utilité de service pour attribuer des logements à ses salariés, y
compris lorsque ceux-ci sont des fonctionnaires affectés à l’IEP.
Toutefois, la fourniture d’un logement à titre gratuit doit être déclarée
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comme avantage en nature, la valeur de cet avantage constituant un
élément de rémunération soumis aux cotisations de sécurité sociale et
devant être intégrée à la déclaration fiscale du bénéficiaire.
Or l’examen de certains dossiers personnels et des tableaux
transmis par Sciences Po a montré que de nombreuses erreurs avaient été
commises dans la déclaration de la valeur des logements
59
: dans quatre
cas d’attribution à des cadres ou à des enseignants-chercheurs, la présence
de montants identiques plusieurs années de suite indique que la valeur de
l’avantage n’a pas été réévaluée annuellement conformément aux
barèmes publiés par la direction générale des finances publiques. Lors
d’un contrôle conduit par l’URSSAF, un rappel de cotisations avait déjà
été effectué au titre des années 2006-2007. Ces erreurs se sont pourtant
reproduites en 2008 et 2009 pour un professeur.
Dans deux autres cas d’attribution de logement à des professeurs,
la FNSP n’avait pas déclaré l’avantage en nature. Ces erreurs ont été
régularisées à la fin du contrôle de la Cour, pour un montant de 58 000 €.
L’attribution de logements à des fonctionnaires affectés à l’IEP
soulève par ailleurs une difficulté, dans la mesure où la FNSP ne prend
pas en charge l’ensemble de la rémunération de ces fonctionnaires. La
valeur de l’avantage en nature est, en effet, calculée sur la seule base du
complément de revenu versé par la FNSP, mais non sur la rémunération
totale du bénéficiaire. Cette situation a pu conduire à attribuer un
appartement de 130 m² situé dans le 5
ème
arrondissement de Paris à un
enseignant, dont le traitement annuel global dépassait 70 000 € nets, pour
une valeur estimée à 130 € par mois d’avantage en nature. Cette pratique
reflète la singularité du statut de Sciences Po, qui permet à la FNSP de se
considérer comme un employeur différent de l’IEP.
Enfin, il a été constaté que les propriétaires de deux appartements
dont la FNSP était elle-même locataire jusqu’en août 2012 étaient
eux-mêmes professeurs à Sciences Po. Dans un des cas, le contrat de
location prévoit le financement par la f