COMMUNICATION A LA COMMISSION DES FINANCES DU
SENAT
ARTICLE 58-2° DE LA LOI ORGANIQUE DU 1ER AOUT 2001 RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES
La gestion et le financement
du Centre national du
cinéma et de l’image animée
(CNC)
Exercices 2007 à 2011
Août 2012
Sommaire
AVERTISSEMENT
......................................................................................
7
RESUME
.......................................................................................................
9
RECOMMANDATIONS
............................................................................
13
CHAPITRE I LES RESSOURCES DU CNC ONT CRU DE MANIERE
TRES SIGNIFICATIVE AU COURS DE LA PERIODE RECENTE .. 19
I
-
L
ES RECETTES FISCALES
......................................................................
19
A - Les ressources du CNC proviennent essentiellement du produit des
taxes qui lui sont affectées
...................................................................
20
B - Jusqu’en 2011, la forte progression des recettes fiscales est tirée
par le dynamisme de la taxe sur les services de télévision
..................
23
C - L’affectation exclusive au CNC du produit de la TST
« distributeurs » demeure problématique
............................................
29
D - Les recettes futures de TST « distributeurs » sont incertaines
......
30
II
-
L
ES AUTRES RESSOURCES DU
CNC
.....................................................
34
A - Les dotations budgétaires
..............................................................
34
B - Les ressources propres de l’établissement
....................................
37
CHAPITRE II LE CNC A TIRE PROFIT DU DYNAMISME DE SES
RESSOURCES POUR ETENDRE SES AIDES
......................................
45
I
-
L
ES AIDES A LA FILIERE PROFESSIONNELLE
,
COEUR DE LA MISSION DU
CNC
.........................................................................................................
46
A - Les aides du CNC se répartissent entre les différents stades de la
production, de la distribution et de l’exploitation d’une oeuvre
cinématographique ou audiovisuelle
...................................................
46
B - Au-delà de ces soutiens directs, le CNC a également contracté de
multiples engagements envers des tiers
...............................................
51
C - Enfin, le CNC a lancé un vaste plan de numérisation des salles et
des oeuvres
...........................................................................................
54
II
-
L’
AUGMENTATION DU VOLUME D
’
AIDES NE VA PAS DE PAIR AVEC UNE
MESURE DE LEUR EFFICACITE
....................................................................
56
A - Des succès indéniables
..................................................................
56
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B - Une situation en apparence florissante qui masque des résultats
plus contrastés
.....................................................................................
57
C - Une sédimentation croissante des dispositifs
................................
66
D - Une démarche de performance encore lacunaire
.........................
69
E - Un fondement économique à étayer
...............................................
72
CHAPITRE III LA GESTION INTERNE EST GLOBALEMENT
MAITRISEE, MAIS LA FORMALISATION DES OUTILS DE SUIVI
ET DE PILOTAGE RESTE
PERFECTIBLE
..........................................................................................
77
I
-
L
ES FRAIS DE FONCTIONNEMENT INTERNE
...........................................
78
A - Une enveloppe délicate à isoler
.....................................................
78
B - La mesure de la performance de gestion de l’établissement
.........
80
C - Un prélèvement rigide pour frais de gestion
.................................
82
II
-
U
NE GESTION DES RESSOURCES HUMAINES GLOBALEMENT MAITRISEE
,
MALGRE L
’
AUGMENTATION DE LA MASSE SALARIALE ET DU COUT DES
COMMISSIONS D
’
AIDES
..............................................................................
86
A - L’évolution des emplois et de la masse salariale
...........................
86
B - La situation particulière des membres des commissions
...............
92
III
-
L
A GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER
:
DES DECISIONS QUI
RESTENT
A PRENDRE
................................................................................................
96
A - Des retards dans l’adoption d’une stratégie immobilière
.............
96
B - Une opération d’acquisition d’immeuble dont le montage financier
est discutable
.....................................................................................
101
C - Une connaissance et une sécurisation des sites des Yvelines
insuffisantes
.......................................................................................
103
CHAPITRE IV UN MODELE A REDEFINIR
.....................................
109
I
-
L
A SITUATION D
’
AISANCE FINANCIERE DU
CNC
S
’
EXPLIQUE EN PARTIE
PAR LA NECESSITE DE POURVOIR AUX ENGAGEMENTS CONTRACTES PAR
L
’
ETABLISSEMENT AU TITRE DE SA POLITIQUE DE SOUTIEN
.....................
109
A - Le résultat net et la trésorerie du CNC enregistrent une forte
progression depuis 2006
...................................................................
110
B - L’immobilisation obligatoire d’une part significative de la
trésorerie au profit des dispositifs de soutien : la question des
provisions
..........................................................................................
112
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C - Une situation financière qui demeure favorable après la prise en
compte des provisions
.......................................................................
113
II
-
L
A CONFIGURATION ACTUELLE DU FINANCEMENT DU
CNC
NE
FAVORISE PAS L
’
AJUSTEMENT FIN DE SES RESSOURCES A SES BESOINS
... 119
A - Les faiblesses de l’information financière
...................................
119
B - L’insuffisance du pilotage de la gestion
......................................
130
III
-
L
A PERENNISATION DU CADRE D
’
INTERVENTION DU
CNC
SUPPOSE DE
PASSER D
’
UN PILOTAGE AUTONOME PAR LA RECETTE A UN PILOTAGE
CONCERTE PAR LA DEPENSE
....................................................................
134
A - Le développement d’outils d’information et de leviers de pilotage
plus performants
................................................................................
136
B - Les paramètres d’une réflexion sur le financement du CNC
.......
139
C - Les scénarios envisageables pour faire évoluer le modèle de
financement du CNC
.........................................................................
144
CONCLUSION GENERALE
..................................................................
149
ANNEXES
.................................................................................................
151
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Avertissement
En application de l’article 58-2° de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la Cour des comptes a
été saisie par le président de la commission des finances du Sénat, par
lettre du 21 novembre 2011
1
, d’une demande d’enquête sur la gestion et
le financement du Centre national du cinéma et de l’image animée
(CNC).
A la suite d’une réunion de travail avec le rapporteur spécial,
M. Aymeri de Montesquiou, vice-président de la commission des
finances du Sénat, le Premier président a précisé au président la
commission des finances le périmètre et le calendrier de l’enquête par une
lettre du 2 février 2012
2
.
L’enquête s’est appuyée sur les conclusions d’un contrôle des
comptes et de la gestion de l’établissement, portant sur la période 2001 à
2010. Elle a été conduite auprès du CNC, de la direction générale des
médias et des industries culturelles, du ministère de la culture et de la
communication, de la direction du budget, de la direction générale des
finances publiques, du secrétariat général des affaires européennes et de
l’autorité de régulation des communications électroniques.
Un relevé d’observations provisoires a été adressé le 22 mai 2012
au président du CNC, au secrétaire général du ministère de la culture et
de la communication et à la directrice générale des médias et des
industries culturelles. Des extraits en ont été envoyés au directeur du
budget, au directeur général des finances publiques et à la directrice de la
législation fiscale. Les destinataires ont fait parvenir leurs réponses
écrites entre la fin du mois de juin et le début du mois de juillet. Le
président du CNC
3
a par ailleurs été auditionné le 6 juillet 2012.
L’enquête comporte plusieurs développements sur les moyens
financiers mis à la disposition du CNC au titre de sa politique de soutien
aux
industries
cinématographiques
et
audiovisuelles.
Il
n’entrait
cependant pas dans son champ d’analyser les enjeux économiques de ces
filières.
L’analyse de l’efficacité et de l’efficience du CNC dans sa mission
de soutien à la filière repose donc sur la mise en perspective des résultats
1
Cf.
annexe 1.
2
Cf.
annexe 2.
3
De 2001 à 2009, le CNC était dirigé par un directeur général (Mme Véronique Cayla
du 24 juin 2005 au 31 décembre 2010). Depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance du
24 juillet 2009, l’établissement est dirigé par un président, qui délègue une partie de
ses prérogatives à un directeur général. M. Eric Garandeau a été nommé président du
CNC par le décret du 17 décembre 2010 et a pris ses fonctions le 1
er
janvier 2011.
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obtenus avec les objectifs fixés à l’établissement dans le document de
performance transmis au Parlement. Plus largement, la Cour a également
pris en compte les évolutions les plus directement mesurables de
l’économie du secteur (rythme de la production, durée d’exposition des
films en salles, résultats d’audience des oeuvres audiovisuelles, chiffre
d’affaires à l’exportation notamment), afin de resituer dans son contexte
l’effet des aides du CNC.
La période couverte par l’enquête s’étend de 2007 à 2011. Lorsque
cela est apparu pertinent, les observations ont été étendues à une période
plus large ou à toute la décennie 2001-2011.
L’enquête a été réalisée par la troisième chambre de la Cour des
comptes. Le présent rapport, qui en constitue la synthèse définitive, a été
délibéré, le 9 juillet 2012, par la troisième chambre, présidée par M.
Lefas, président de chambre, et composée de MM. Pichon, président de
chambre maintenu, Andréani, Barbé, Frangialli, Gautier, conseillers
maîtres, et Marland, conseiller maître en service extraordinaire, les
rapporteurs étant M. Mory, conseiller référendaire et Mme Sorbe,
auditrice et M. Tournier, conseiller maître, étant le contre-rapporteur.
Il a ensuite été examiné et approuvé le 18 juillet 2012 par le comité
du rapport public et des programmes de la Cour des comptes, composé de
MM. Migaud, Premier président, Bénard, procureur général, Bayle,
Bertrand, rapporteur général du comité, Mme Froment-Meurice, MM.
Durrleman, Levy, Lefas et Briet, présidents de chambre, M. Cazala
représentant M. Descheemaeker, président de chambre
.
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Résumé
Etablissement public administratif chargé depuis 1946 de la
politique de soutien au cinéma, le Centre national du cinéma et de l’image
animée (CNC) a vu ses missions s’élargir à la faveur des évolutions du
secteur de l’image. Il intervient désormais aux différents stades de la
création et de la transmission des oeuvres cinématographiques et
audiovisuelles, et a développé de nouveaux dispositifs de soutien en lien
avec les nouveaux supports de diffusion. Maillon essentiel de la politique
de financement public du cinéma et de l’audiovisuel, le CNC n’en
représente cependant qu’un élément parmi d’autres : d’autres instruments
(dispositifs fiscaux, obligations d’investissement des chaînes de télévision
dans la production d’oeuvres cinématographiques et audiovisuelles, aides
des collectivités territoriales) sont des composantes importantes du
soutien public à cette filière.
Depuis 2008, le CNC ne reçoit plus de subvention de
fonctionnement du ministère de la culture et de la communication. Il est
principalement financé par des taxes affectées, pour l’essentiel recouvrées
directement par l’établissement, dont le rendement a été très dynamique
au cours des dernières années. La création, en 2007, d’une nouvelle
imposition, pesant sur les distributeurs de services de télévision, a joué un
rôle majeur dans l’augmentation de ces recettes, le produit de cette taxe
passant de 94 M€ en 2008 à 322 M€ en 2011.
Le produit futur de cette taxe est aujourd’hui incertain, à la suite du
repositionnement
stratégique
d’un
opérateur
de
communications
électroniques et dans l’attente de la décision de la Commission
européenne sur la compatibilité de la nouvelle assiette avec le droit
communautaire. En outre, les fréquentes modifications qui ont été
apportées à l’assiette de cette taxe dans le souci de sécuriser la nouvelle
ressource au profit du CNC, attestent qu’en l’espèce, le lien entre la
diffusion des contenus et la taxation correspondante est moins patent que
pour les autres taxes. Dans ces conditions, l’application du principe selon
lequel la diffusion devait financer la création, principe sur lequel reposent
la perception et l’affectation des taxes d’origine a perdu une part de sa
justification.
Parmi les autres ressources perçues par l’établissement, les
cotisations professionnelles, dont la pertinence semble aujourd’hui devoir
être remise en cause, pourraient être supprimées.
Défendant l’idée d’une corrélation nécessaire entre l’activité du
secteur de l’image et le montant des soutiens versés, le CNC a tiré profit
du dynamisme de ses ressources affectées pour étendre la palette de ses
aides aux filières cinématographiques et audiovisuelles. Au-delà des
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dispositifs traditionnels de soutien qui se répartissent pour l’essentiel
entre les différents stades que sont la production, la distribution et
l’exploitation d’une oeuvre, de nouvelles aides ont vu le jour, axées sur les
supports de diffusion davantage que sur les contenus.
Cette multiplication de dispositifs, potentiellement porteuse de
redondances, reflète une économie générale des aides dans laquelle la
création de nouveaux mécanismes ne s’accompagne pas de la nécessaire
évaluation de la cohérence globale des soutiens. A cet égard,
l’augmentation du nombre de films produits chaque année ne saurait
constituer le seul critère d’analyse de la réussite du soutien public. La
Cour note également que, dans le domaine audiovisuel, la France
entretient un système d’aides unique en Europe, dans son principe et dans
son montant, pour des résultats d’audience des productions nationales
parmi les plus faibles. La mesure de l’efficience des aides peine encore à
se faire une place dans un tel cadre et, sauf à tenir pour irréfutable l’idée
selon laquelle le dynamisme d’un secteur emporte la nécessité de lui
affecter toujours plus d’argent public et donc d’en faire une priorité de
politique publique d’un rang supérieur à toutes les autres priorités
gouvernementales, la justification d’une telle augmentation continue des
aides reste à établir.
Sur le plan de la gestion interne, la recherche de performance est
freinée par des difficultés liées au suivi de l’enveloppe des charges de
fonctionnement,
malgré
de
notables
améliorations.
La
définition
d’indicateurs fiables à ce sujet permettrait d’assurer une mesure plus fine
de l’évolution de cette nature de dépenses. La maîtrise de la masse
salariale et des effectifs, notamment pour ce qui est des collaborateurs
occasionnels du service public intervenant dans le cadre des commissions
d’attribution des aides, doit constituer une priorité. Des décisions restent à
prendre pour finaliser rapidement une stratégie immobilière permettant à
l’établissement de se conformer aux normes en vigueur et de clarifier
avec le ministère de la culture les conditions d’occupation et de
sécurisation des sites qu’il occupe dans les Yvelines.
Entre 2005 et 2007, le CNC a engagé une réforme budgétaire et
comptable de grande ampleur qui a sensiblement amélioré la fiabilité des
états financiers et la qualité de la gestion budgétaire de l’établissement.
La clarification des états financiers et budgétaires, qui a rendu nécessaire
la constitution de provisions à un niveau élevé, justifie, pour partie,
l’importance de la trésorerie dont dispose l’établissement depuis 2008.
Au-delà, la situation d’aisance financière dans laquelle se trouve le CNC
lui a permis de constituer d’importantes réserves budgétaires (447 M€
après affectation du résultat 2011, soit 46 % du bilan).
Favorisée par l’autonomie à la fois budgétaire et institutionnelle
dont le CNC a bénéficié depuis sa création en 1946, cette situation traduit
un modèle de gestion qui conduit à déterminer le niveau des dépenses en
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fonction du montant des recettes issues du produit des taxes. De fait, la
pérennité de ce modèle est aujourd’hui remise en cause :
−
par la situation globale des finances publiques qui, en imposant
une stabilisation en valeur, voire une réduction des dépenses
d’intervention, renforce la nécessité de procéder à des
arbitrages
budgétaires
globaux
entre
les
différentes
composantes des politiques publiques ;
−
par l’extension des taxes affectées à des secteurs économiques
qui ne présentent plus une proximité aussi immédiate avec les
aides déployées par le CNC. Les incertitudes qui pèsent sur les
recettes fiscales futures de l’établissement rendent d’autant plus
nécessaire une réflexion critique sur l’opportunité de ce modèle
de pilotage autonome par la recette.
En opérant un prélèvement exceptionnel sur le fonds de roulement
du CNC en 2011, puis en plafonnant le produit de la taxe sur les services
de télévision (TST) « distributeurs » en 2012, le législateur a introduit une
rupture dans la logique de financement du CNC, celle-ci reposant sur
l’autonomie du compte de soutien et l’affectation exclusive et intégrale
du produit des recettes fiscales au budget de l’opérateur. Ce dispositif ne
semble pas pouvoir constituer une orientation durable permettant de
maîtriser de manière fine le couplage entre les recettes et les dépenses de
l’établissement.
Un changement de logique radical impliquerait d’intégrer dans le
budget de l’Etat l’ensemble des recettes actuellement prélevées au profit
du CNC et d’octroyer les aides aux secteurs cinématographiques et
audiovisuels sous la forme de subventions, à l’instar des autres dépenses
d’intervention du ministère. Au-delà des lourdes difficultés techniques et
juridiques qu’emporterait cette évolution, il n’est pas établi qu’une telle
allocation des ressources publiques serait intrinsèquement plus efficace
que le modèle actuel d’attribution des aides par l’intermédiaire d’un
établissement public associant les professionnels à la prise de décision.
L’impératif de retour à l’équilibre des comptes publics rend encore
plus nécessaire une révision des conditions qui président à la gestion
économique et financière du CNC. En l’espèce, il s’agit donc de
privilégier désormais une approche qui aboutisse à subordonner le niveau
de la recette à une hiérarchisation préalable et aussi précise que possible
des besoins du CNC rendus nécessaires par l’exercice de ses missions.
Autrement dit, la détermination du niveau de financement du CNC doit
dorénavant être fondée sur une évaluation précise des différents systèmes
d’aide, de leur articulation et du degré de priorité qui leur est attribué.
Parce qu’elle ne saurait produire ses pleins effets sans une
implication accrue du ministère de la culture et du Parlement dans la
détermination des orientations stratégiques du CNC comme du niveau de
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ses
interventions,
cette
évolution
requiert,
au
minimum,
que
l’établissement enrichisse ses outils d’information financière et que les
leviers de son pilotage soient également renforcés. Le passage d’un
dispositif de pilotage autonome par la recette à celui d’un pilotage par la
dépense, concerté entre l’Etat et l’opérateur, n’en implique pas moins une
évolution de la structure de financement du CNC. Trois scénarios peuvent
être envisagés : la fixation d’un plafond de dépenses pluriannuel
commandant la détermination du barème des taxes affectées au CNC, le
recours à des écrêtements ciblés, enfin la budgétisation d’une partie de
l’actuelle TST « distributeurs ». L’issue du contentieux communautaire
relatif à la taxation des opérateurs de communications électroniques et les
choix qui seront exprimés par le ministère de la culture et de la
communication et par le Parlement quant à l’intensité souhaitable de
maîtrise des dépenses du CNC conduiront naturellement à privilégier l’un
ou l’autre de ces scénarios.
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Recommandations
L’enquête
conduit
la
Cour
à
formuler
un
ensemble
de
recommandations qui figurent en fin de chaque chapitre. Elles sont
récapitulées ci-dessous. La recommandation suivie d’un astérisque (*)
nécessite une modification législative.
Pilotage de la dépense et mesure de la performance :
−
élaborer un contrat de performance liant le CNC au ministère
de la culture et de la communication et comportant un volet
consacré aux obligations de qualité de service (recommandation
n° 12, p. 149) ;
−
établir, dans les plus brefs délais, une lettre de mission
définissant les priorités et les modalités d’évaluation du
président du CNC (recommandation n° 13, p. 149) ;
−
enrichir le rapport d’activité annuel, établi pour la première fois
en juillet 2012, de données sur le fonctionnement interne de
l’établissement (recommandation n° 14, p. 149) ;
−
remplacer le document unique de performance du CNC par
deux documents, l’un prévisionnel, l’autre rétrospectif, sur le
modèle des PAP et des RAP. Communiquer au Parlement ces
deux documents au rythme de la procédure budgétaire
(recommandation n° 10, p. 149) ; *
−
élaborer une méthode d’analyse de l’efficacité et de l’efficience
des dispositifs d’aide mis en oeuvre au regard, d’une part, des
soutiens déjà existants et, d’autre part, des objectifs fixés au
CNC par ses tutelles et par le Parlement (recommandation n° 2,
p. 76) ;
−
en liaison avec le ministère de la culture et de la
communication, élaborer une trajectoire pluriannuelle de
dépenses dans le cadre des documents de performance
(recommandation n° 11, p. 149) ;
Ressources propres et fonctionnement interne
−
supprimer les cotisations professionnelles (recommandation
n° 1, p. 43) ;
−
définir un périmètre de dépenses de fonctionnement interne
appuyé sur une méthode d’imputation des coûts inspirée de la
comptabilité analytique. Elaborer et suivre des indicateurs
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d’efficience rapportant les frais de fonctionnement interne de
l’établissement (y inclus les dépenses d’investissement) aux
dépenses de soutien et à l’ensemble des dépenses d’activité
(recommandation n° 3, p. 108) ;
−
faire adopter par le conseil d’administration une enveloppe de
frais de fonctionnement interne en valeur absolue et moduler en
exécution le prélèvement pour frais de gestion afin de couvrir
cette enveloppe en tenant compte du dynamisme des autres
ressources propres de l’établissement (recommandation n° 4,
p. 108) ;
−
formaliser le suivi des effectifs de collaborateurs occasionnels
de service public. Engager une politique de stabilisation des
effectifs étendue aux membres des commissions d’aides
sélectives ; entreprendre un regroupement des commissions
d’attribution des aides sélectives (recommandation n° 5,
p. 108) ;
−
d’ici le 31 décembre 2012, arrêter un schéma pluriannuel de
stratégie immobilière permettant à l’établissement de se
conformer à l’avis du Conseil de l’immobilier de l’État
(recommandation n° 6, p. 108) ;
−
en accord avec les tutelles, affecter la réserve pour projet
immobilier au désendettement de l’établissement ou reverser
son montant au budget général de l’État (recommandation n° 7,
p. 108) ;
−
formaliser un schéma directeur pour les deux implantations du
CNC dans les Yvelines, afin de clarifier les responsabilités
entre occupants et d’assurer la visibilité nécessaire à une
réflexion sur l’optimisation des espaces de stockage et la
programmation
de
travaux
de
rénovation
éventuels
(recommandation n° 8, p. 108) ;
−
faire réaliser à partir de 2013 un audit périodique des provisions
constituées par le CNC au titre des aides par le contrôle général
économique et financier. Engager une démarche de certification
des comptes du CNC (recommandation n° 9, p. 148).
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Introduction
Un rôle historique de soutien au cinéma et à l’audiovisuel
Créé par la loi du 25 octobre 1946, le Centre national du cinéma et
de l’image animée (CNC) est un établissement public administratif, doté
de la personnalité juridique et de l’autonomie financière, placé sous la
tutelle du ministère de la culture et de la communication.
Définies par l’article L. 111-2 du code du cinéma et de l’image
animée, les missions du CNC sont de deux ordres : d’une part, la
réglementation du secteur du cinéma et des autres arts et industries de
l’image animée ; d’autre part, la contribution, dans l’intérêt général, au
financement et au développement de ces secteurs. A ce titre, le CNC
attribue des aides financières en faveur de la «
création, la production, la
distribution, la diffusion et la promotion des oeuvres cinématographiques
et audiovisuelles et des oeuvres multimédia
». Il soutient aussi la création
et la modernisation des salles de cinéma, de même qu’il finance les écoles
de formation, les festivals et les dispositifs d’éducation à l’image. En
parallèle, l’établissement assure le contrôle des recettes d’exploitation des
oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles réalisées par les exploitants
de salles de cinéma ou par les éditeurs de vidéogrammes, ainsi que la
collecte, la conservation, la restauration et la valorisation du patrimoine
cinématographique. Il conduit également des actions internationales,
telles que le soutien financier à la création et à la production
cinématographique, audiovisuelle et multimédia dans les pays en
développement. Enfin, il exerce une mission d’observation des activités et
professions rattachées aux différents secteurs de l’image animée.
Les ressources du CNC ont transité, jusqu’en 2008, par un compte
d’affectation spéciale, puis par un compte-mission. La mission hors
budget général « Cinéma, audiovisuel et expression radiophonique
locale » ayant été supprimée en 2009, les charges et produits des anciens
programmes 711 « Soutien aux industries cinématographiques » et 712
« Soutien aux industries audiovisuelles » s’y rattachant sont depuis lors
imputés directement sur le budget du CNC. Par ailleurs, sur les trois taxes
qui sont affectées à son financement, le Centre recouvre directement la
taxe spéciale additionnelle (TSA) depuis le 1
er
janvier 2007 et la taxe sur
les services de télévision (TST) depuis le 1
er
janvier 2010.
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Une évolution rapide des modes de soutien
Initialement organisé autour du seul CNC et longtemps centré sur
le cinéma, le soutien public s’est progressivement étendu à l’audiovisuel
et a été complété au fil du temps par de nouveaux outils : institut pour le
financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC), créé en 1983
pour développer un système de garanties bancaires, dispositifs fiscaux
(SOFICA
4
dès 1985, crédits d’impôts dans les années 2000) et aides des
collectivités territoriales, en forte croissance au cours des années récentes.
En outre, à partir des années 1980, la télévision a joué un rôle central
dans la politique de soutien au cinéma et à l’audiovisuel par
l’intermédiaire des obligations de production et de diffusion. En parallèle,
les soutiens du CNC à la production audiovisuelle ont connu depuis 1986
une extension rapide. Il résulte de ces évolutions que la politique publique
repose aujourd’hui sur un grand nombre d’outils : aides directes
(subventions
et
avances),
dépenses
fiscales,
garanties
bancaires,
obligations juridiques d’investissement, d’achats et de programmation.
Rapporté à l’ensemble des dépenses découlant d’aides directes ou
d’obligations réglementaires, qui représentent plus de 2,1 Md€ en 2011 et
viennent le plus souvent en soutien au secteur de la production, les aides
du CNC ne représentent que près de 31 % de ces financements, tandis que
les chaînes de télévision en assument plus de 58 %
5
.
4
Sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique et audiovisuelle, les
SOFICA soutiennent la production cinématographique en associant des souscripteurs,
bénéficiaires de l’avantage fiscal, et un producteur, bénéficiaire de l’investissement.
5
Le total de la valeur des marchés de la télévision, de la production
cinématographique et audiovisuelle de stock, de l’exploitation, de la distribution, de la
vidéo physique et dématérialisée est estimé par le CNC à 13,6 Md€ en 2010 ; les aides
du CNC représentent autour de 4 % de la valeur des secteurs qu’il soutient.
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Tableau n° 1 :
Paysage du soutien au cinéma et à l’audiovisuel en
2011, en millions d’euros
Source : Cour des comptes d’après données CNC (bilans) et documents
budgétaires.
L’enquête avait pour principal objet de mesurer «
l’efficacité et
l’efficience de la gestion du CNC dans sa mission de soutien à la filière
cinématographique et audiovisuelle
». A ce titre, le présent rapport
présente les recettes de l’établissement et leur évolution récente (I). Il
décrit l’économie des aides versées (II) et le fonctionnement interne de
l’établissement (III), en s’efforçant d’évaluer leur performance et de
formuler des recommandations pour faciliter à l’avenir cette évaluation.
Enfin, le rapport s’appuie sur une analyse de la situation financière de
l’établissement et de la configuration actuelle de son pilotage pour
proposer une redéfinition de son modèle de financement (IV).
840
366
652
115
36
82
0
100
200
300
400
500
600
700
800
900
Diffuseurs
(production
audiovisuelle)
Diffuseurs
(production
cinématographique)
CNC
Crédits d'impôt
SOFICA
Collectivités
territoriales
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Chapitre I
Les ressources du CNC ont crû de
manière très significative au cours de la
période récente
I
-
Les recettes fiscales
Le CNC est financé à titre principal par des taxes affectées (A). Au
cours de la dernière décennie, le rendement de ces taxes a crû de manière
très sensible, augmentant les ressources de l’établissement dans les
mêmes proportions. La création, en 2007, d’une nouvelle taxation, pesant
sur les distributeurs de services de télévision, a joué un rôle majeur dans
l’augmentation des ressources de l’établissement (B). La nécessité de
sécuriser le rendement de cette nouvelle imposition a entraîné de
fréquentes modifications d’assiette, au prix d’un certain relâchement du
lien entre la diffusion des contenus audiovisuels et la taxation (C).
Le dynamisme récent du produit de la taxe sur les distributeurs de
services de télévision se trouve hypothéqué par les positionnements
stratégiques adoptés par les opérateurs assujettis et par l’issue du
contentieux avec la Commission européenne sur la régularité de la
nouvelle taxe au regard du droit communautaire (D).
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A - Les ressources du CNC proviennent essentiellement
du produit des taxes qui lui sont affectées
Depuis la création du CNC, le principe général commandant le
régime des taxes qui lui sont affectées est le suivant : taxer les acteurs qui
retirent un bénéfice de la diffusion des contenus cinématographiques et
audiovisuels et reverser le produit de ces taxes à un organisme finançant
l’ensemble de la filière. Au nom de ce principe ont successivement été
taxés la billetterie des salles de cinéma (taxe spéciale additionnelle), les
chaînes de télévision, puis les distributeurs de services de télévision (taxe
sur les services de télévision) ainsi que les sociétés vendant ou louant des
contenus audiovisuels sous forme de vidéogrammes (taxes vidéos). Par
ailleurs, le CNC est affectataire d’autres recettes à caractère fiscal,
comme la taxe sur les bénéfices tirés de la production et de la diffusion de
films à caractère violent ou pornographique, ainsi que le produit des
sanctions pécuniaires infligées par le conseil supérieur de l’audiovisuel
(CSA).
1 -
La taxe sur les entrées dans les salles de cinéma
Créée par la loi du 23 septembre 1948
6
, la taxe spéciale
additionnelle (TSA) est la plus ancienne des taxes affectées au CNC.
Acquittée
par
les
exploitants
d’établissements
de
spectacle
cinématographique situés en France métropolitaine, la taxe est assise sur
les recettes générées par les entrées en salles. Ces « recettes guichet »
correspondent au produit du nombre d’entrées :
−
par le prix acquitté par le spectateur, dans le cas d’une
tarification au film ;
−
par le prix de référence par place, dans le cas d’une tarification
reposant sur les cartes d’accès illimité.
Un taux forfaitaire unique (10,72 % depuis le 1
er
janvier 2007
7
) est
ensuite appliqué à cette assiette taxable
8
. Le CNC recouvre directement la
TSA depuis le 1
er
janvier 2007.
6
Loi n° 48-1474 du 23 septembre 1948 instituant une aide temporaire à l’industrie
cinématographique.
7
Un taux spécifique de 16,08 % est appliqué pour les représentations en salles de
films à caractère pornographique ou d’incitation à la violence.
8
L’article 104 de la loi
n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative
pour 2006 a simplifié le barème de la TSA en remplaçant par un taux unique le
barème progressif qui précédait, composé de vingt tranches d’imposition (dont seize
étaient effectivement appliquées), fixées en fonction du tarif du billet.
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2 -
La taxe sur les services de télévision
Créée en 1986, la taxe sur les services de télévision (TST) est due
par les éditeurs de services de télévision établis en France et ayant
programmé, au cours de l’année civile, une ou plusieurs oeuvres
audiovisuelles ou cinématographiques éligibles aux aides financières du
CNC, et, depuis le 1
er
janvier 2008, par les distributeurs de services de
télévision établis en France.
Telle qu’initialement conçue, cette taxe n’a longtemps frappé que
les éditeurs de services de télévision, c’est-à-dire les chaînes achetant des
contenus auprès des producteurs (audiovisuels et cinématographiques) ou
de leurs représentants, et agrégeant ces contenus au sein de programmes.
Cette part « éditeurs » de la TST demeure assise sur le montant hors
taxes :
−
des sommes versées par les annonceurs et les parrains, pour la
diffusion de leurs messages publicitaires et de parrainage,
sommes qui font l’objet d’un abattement forfaitaire de 4 % ;
−
du produit de la contribution à l’audiovisuel public encaissé par
les chaînes de télévision
9
;
−
des sommes versées directement ou indirectement par les
opérateurs de communications électroniques aux chaînes de
télévision à raison des appels téléphoniques à revenus partagés,
des connexions à des services télématiques et des envois de
minimessages qui sont liés à la diffusion de leurs programmes,
à l’exception des programmes servant une grande cause
nationale ou d’intérêt général.
La taxe est calculée en appliquant un taux de 5,5 % à la fraction du
montant des versements et encaissements annuels excédant 11 M€, pour
chaque chaîne de télévision. Le CNC recouvre directement la TST depuis
le 1
er
janvier 2010.
Depuis le 1
er
janvier 2008, la TST a été étendue aux distributeurs
qui acheminent le contenu audiovisuel vers le téléspectateur : chaînes
auto-distribuées
(Canal
+,
auparavant
assujettie
à
la
seule
TST « éditeurs »), services de diffusion par câble (Numéricable), par
satellite, télévision numérique terrestre, fournisseurs d’accès à Internet
(FAI) et opérateurs de téléphonie mobile. La part « distributeurs » de la
TST repose sur le chiffre d’affaires des abonnements souscrits auprès des
sociétés concernées. Elle est calculée en appliquant un taux progressif,
compris entre 0,5 % et 4,5 % de l’assiette taxable.
9
A l’exception de la société France Télévisions au titre des services de télévision
spécifiques à l’Outre-mer.
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Tableau n° 2 : Evolution de la contribution nette des redevables à
la TST, en millions d’euros
2008
2009
2010
Chaînes autodistribuées
82,89
96,71
94,71
Câblo-opérateurs
0,00
5,97
3,56
Opérateurs de communications
électroniques
11,35
66,27
179,49
Total TST « distributeurs »
94,24
168,95
277,76
Source : Cour des comptes d’après données CNC.
3 -
La taxe sur la vidéo et les services de vidéo à la demande
Dans sa forme actuelle, la taxe «
sur les ventes et locations de
vidéogrammes destinés à l’usage privé du public et sur les opérations
assimilées
» est issue de la loi n° 2003-517 du 18 juin 2003. Son produit,
recouvré par la direction générale des finances publiques (DGFiP) selon
les mêmes procédures que la TVA, est affecté au CNC, après prélèvement
de frais de gestion à hauteur de 2,5 %.
Cette taxe est due par tout vendeur ou loueur de vidéos à raison de
son chiffre d’affaires hors TVA issu de la vente et de la location de
vidéos et, depuis juillet 2004, des opérations assimilées à ces ventes,
comme la vidéo à la demande (V à D). Le taux en est fixé à 2 %
10
.
4 -
Les autres recettes à caractère fiscal
Aux termes des articles L. 116-2 à L. 116-4 du code du cinéma et
de l’image animée, le CNC est affectataire de la taxe perçue sur les
producteurs,
distributeurs,
exploitants
et
diffuseurs
de
contenus
pornographiques ou d’incitation à la violence. Instaurée par la loi de
finances pour 1976
11
sous la forme d’un prélèvement spécial de 20 % sur
la fraction des bénéfices industriels et commerciaux soumis à l’impôt sur
les sociétés ou à l’impôt sur le revenu, cette taxe a été étendue à la
location et à la vente de supports vidéo à contenu pornographique ou
incitant à la violence, et son taux a progressivement été porté à 33 %
12
.
Par ailleurs, aux termes de l’article L. 116-5 du code du cinéma et
de l’image animée, le CNC reçoit le produit des sanctions pécuniaires
prononcées par le CSA à l’encontre des éditeurs de services de télévision.
10
Article 1609
sexdecies
B du code général des impôts.
11
Loi n° 75-1278 du 30 décembre 1975 de finances pour 1976.
12
Loi de finances pour 1993.
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Les recettes ainsi recouvrées demeurent au total marginales :
0,23 M€ en 2010 et 0,21 M€ en 2011
13
.
B - Jusqu’en 2011, la forte progression des recettes
fiscales est tirée par le dynamisme de la taxe sur les
services de télévision
Entre 2007 et 2011, les ressources du CNC ont augmenté de
46,3 % après neutralisation des changements de méthodes comptables
14
,
passant de 528 M€ en 2007 à 867 M€ en 2011. Cette progression a été
particulièrement dynamique entre 2008 et 2010 (+ 35 %).
13
Compte tenu de leur faible montant, l’analyse de ces recettes a été exclue du champ
de l’enquête.
14
Pour l’année 2011, il convient de neutraliser dans ce calcul l’impact des
modifications comptables mises en oeuvre par le CNC – comptabilisation des reprises
sur provisions au premier euro –, de manière à comparer sur une base homogène les
ressources de l’établissement.
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Tableau n° 3: Evolution des produits de fonctionnement du CNC
entre 2007 et 2011, en milliers d’euros
Taxes
affectées et
autres
produits de
gestion
Subventions
d'exploitation
Prestations
annexes
Produits
financiers
Produits
exceptionnels
Reprises
sur
provisions
Total
2007
528 026
37 232
444
3 751
219
23 297
592 969
2008
554 481
31 417
314
3 600
877
14 731
605 420
2009
635 812
27 081
199
4 066
96
5 687
672 941
2010
789 429
20 674
251
2 283
419
4 173
817 228
2011
841 079
14 828
183
6 218
63
5 073
867 445
2011/2007
+ 59,3 %
- 60,2 %
- 58,8 %
+ 65,8 %
- 71 %
- 78,2 %
+ 46,3 %
Source : Cour des comptes, d’après les comptes financiers du CNC
15
.
Cette évolution résulte principalement de la forte progression du
produit des taxes affectées, et plus particulièrement de la taxe sur les
services de télévision (TST). Au cours de la décennie écoulée, le produit
de la TST s’est accru en effet de 303 M€ (+ 92,3 %), dont 253 M€ entre
les seules années 2008 et 2011 ; il représente désormais 73 % des
ressources totales de l’établissement. Les recettes de TSA ont connu une
évolution moins spectaculaire, mais néanmoins significative (+ 41 %), en
raison de la hausse de fréquentation des salles de cinéma et,
subsidiairement, du prix des billets. Les recettes de taxes vidéo, qui ne
représentent qu’une faible proportion des recettes fiscales du CNC, ont
bénéficié du développement du DVD au début des années 2000. Elles se
stabilisent autour de 32 M€ depuis 2007.
15
Pour une présentation homogène des recettes, les reprises sur provisions
comptabilisées en 2011 ont été calculées en ne retenant que les soldes positifs de la
différence entre les reprises sur provisions et les dotations aux provisions, pour
chacun des dispositifs de soutien automatique (annexe 5 au compte financier 2011,
p. 56)
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Tableau n° 4 : Evolution du produit des principales taxes affectées
au CNC entre 2001 et 2011, en milliers d’euros
TSA
TST
Taxe vidéo
Total
Editeurs distributeurs Total TST
2001
101 420
328 100
-
328 100
12 790
442 310
2002
109 078
315 231
-
315 231
19 842
444 151
2003
102 738
313 587
-
313 587
24 543
440 869
2004
120 326
325 017
-
325 017
38 258
483 601
2005
104 597
323 985
-
323 985
37 460
466 041
2006
119 721
340 278
-
340 278
35 323
495 322
2007
116 699
362 238
-
362 238
33 296
512 234
2008
122 197
283 156
94 236
377 393
32 756
532 346
2009
127 891
282 072
168 948
451 020
32 910
611 821
2010
146 343
296 992
277 763
574 755
33 066
754 164
2011
143 077
308 994
322 050
631 044
31 964
806 084
2011/2001
41,1 %
- 5,8 %
NS
92,3 %
149,9 %
82,2 %
Source : Cour des comptes d’après données CNC (agent comptable).
Pour l’année 2008, la diminution de recettes de TST « éditeurs » résulte majoritairement
(43,8 M€) d’un effet de transfert, la chaîne Canal + voyant sa contribution scindée en une part
« éditeurs » et une part « distributeurs ». Pour l’année 2011, les recettes de TST correspondent
aux mandats effectivement encaissés par le CNC.
1 -
Le dynamisme de la TST « distributeurs »
La forte progression du produit de la TST « distributeurs »
procède, indirectement, du régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
appliqué aux opérateurs de communications électroniques à la suite de
l’apparition, en 2003, des offres Internet intégrées proposant un service
de téléphonie fixe ainsi qu’un accès à Internet et à la télévision (offres
dites «
triple play
»).
En effet, le législateur ayant souhaité frapper d’un taux réduit de
TVA (5,5 %) la part de ces abonnements «
triple play
» supposée
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représentative du service d’accès à la télévision
16
, les opérateurs ont alors
cherché à valoriser au titre de l’accès aux services de télévision la part la
plus importante possible des produits d’abonnement afin de minimiser
leur assujettissement à la TVA à taux normal. Suivant les rescrits fiscaux
obtenus par les différents opérateurs auprès de l’administration, la part
« services de télévision » représentait entre 43 % et 56 % du chiffre
d’affaires des abonnements. Finalement, la loi du 5 mars 2007 a fixé la
part minimale du produit des abonnements «
triple play
» assujettie au
taux réduit de TVA à 50 % du chiffre d’affaires des abonnements,
sécurisant au profit des opérateurs une situation fiscale qui ne correspond
pas directement à la réalité économique des offres composites (tant en
termes de coûts pour les opérateurs que de facturation des services de
télévision auprès des consommateurs).
Parallèlement, étendant le modèle historique de prélèvement sur
les secteurs qui diffusent des contenus audiovisuels, la loi du 5 mars 2007
a assujetti ces mêmes opérateurs de communications électroniques à la
taxe due par les distributeurs de services de télévision au CNC à partir du
1
er
janvier 2008. Aux termes de l’article 35 de ladite loi
17
, lorsqu’une
offre intégrée donnait accès à d’autres services, la taxe était assise
«
sur
la seule part de cette offre correspondant aux services de télévision.
» Par
souci de cohérence, l’instruction fiscale subséquente du 18 avril 2008 a
précisé que la part de l’offre correspondant aux services de télévision, et
qui constituait l’assiette de la TST, serait la même que celle à laquelle
était appliqué le taux réduit de TVA
18
. Le législateur a néanmoins
introduit un abattement de 10 % sur cette assiette.
Entre 2008 et 2011, les recettes issues de la TST « distributeurs »
ont mécaniquement bénéficié des effets cumulés de la croissance du
marché des communications électroniques (fournisseurs d’accès à
Internet et opérateurs de téléphonie mobile), du développement intensif
par les opérateurs de formules intégrées d’abonnement ouvrant droit aux
services de télévision, ainsi que de la stratégie d’optimisation fiscale des
opérateurs dans le contexte d’un taux réduit de TVA. Elles ont donc de ce
fait très fortement progressé.
16
L’objectif alors poursuivi était celui d’un parallélisme entre la taxation des services
de télévision par voie hertzienne, assujetti à un taux réduit de TVA, et la taxation des
services de télévision par voie électronique.
17
Disposition codifiée à l’article L. 302 bis KB du code général des impôts.
18
Instruction fiscale n° 45, 3 P-3-08 du 18 avril 2008 : «
par parallélisme, la part de
l’offre correspondant aux services de télévision et constituant l’assiette de la taxe est
estimée à 50 % du prix de l’abonnement global donnant accès à l’ensemble des
services fournis
».
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2 -
Les modifications successives d’assiette
En supprimant l’application du taux réduit de TVA sur l’offre
composite des fournisseurs d’accès à Internet (FAI), la loi de finances
pour
2011
a
substantiellement
modifié
l’économie
de
la
TST
« distributeurs ». En effet, il ne pouvait plus être fait référence à «
la part
de l’abonnement à laquelle était appliqué le taux réduit de TVA
» pour
définir l’assiette de TST, dès lors que tout le chiffre d’affaires des
fournisseurs d’accès à Internet et des opérateurs de téléphonie mobile
devenait assujetti à la TVA à un taux normal.
Alors que, jusqu’au 31 décembre 2010, l’assiette de la TST
« distributeurs » s’était alignée sur celle du taux réduit de TVA (50 % du
prix de l’offre «
triple play
»), celle-ci porte, depuis le 1
er
janvier 2011,
sur la totalité du prix de l’offre, diminué d’un abattement de 55 %,
lorsque cette offre «
inclut également, pour un prix forfaitaire, un accès à
des services de communication au public en ligne ou à des services de
téléphonie.
» En instituant cet abattement, le législateur a entendu
conserver le niveau d’assiette qui existait précédemment.
Tableau n° 5 : Evolution de l’assiette de TST (part distributeurs)
résultant de la loi de finances pour 2011
Assiette antérieure à la LFI 2011
Assiette modifiée par la LFI 2011
50 % des abonnements et autres
sommes acquittés par les usagers
100 % des abonnements et autres
sommes acquittés par les usagers
- 10 % de déduction
- 55 % de déduction
= 45 % du produit des abonnements
et autres sommes acquittés par les
usagers
= 45 % du produit des abonnements
et autres sommes acquittés par les
usagers
Source : Assemblée nationale, Rapport sur les conditions générales de
l’équilibre financier (tome 2) relatif à la loi de finances pour 2011, p. 209.
L’option alors retenue par le législateur n’a donc pas été celle
d’une minoration de la charge fiscale pesant sur les opérateurs, mais celle
d’une sécurisation de la ressource nouvelle au profit du CNC. L’exposé
des motifs du projet de loi de finances initiale pour 2011 indique ainsi
qu’il «
s’agit d’aménager, afin de maintenir son niveau, les modalités de
détermination de l’assiette de la taxe due par les distributeurs dans le cas
des offres composites. (…) Cette mesure permet, compte tenu du nouveau
régime de TVA applicable à ce type d’offres, de déterminer l’assiette de
la taxe due par ces distributeurs de façon autonome en application du
code du cinéma et de l’image animée et d’assurer ainsi la continuité de la
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contribution
de
ces
opérateurs
au
soutien
à
la
création
cinématographique, audiovisuelle et multimédia.
»
Plutôt que de produire les effets de stabilisation escomptés, cette
réforme s’est traduite au contraire par une fragilisation de la taxe en
raison de la position adoptée par l’opérateur Free en réaction à
l’instauration du nouveau régime de TVA. Afin d’optimiser sa charge
fiscale, cet opérateur a entrepris de dédoubler son offre d’abonnement
Internet, en distinguant, d’une part une offre dite
« double play »
(Internet
et téléphonie), facturée 29,99 €, et, d’autre part, une offre télévision,
facturée en option à 1,99 € pour toute souscription de la nouvelle offre.
Dans ces conditions, l’assiette de TST, précédemment de 13,50 €, s’est
trouvée pour cet opérateur réduite à 1,79 €, avec le risque de voir ses
concurrents adopter des pratiques similaires.
Ainsi confronté au risque d’une attrition de l’assiette fiscale et
d’une diminution à due proportion du produit de la taxe, le CNC a plaidé,
au cours de l’année 2011, pour une nouvelle modification de la taxe afin
d’en sécuriser le rendement. La loi de finances pour 2012 a finalement
entériné le principe d’une assiette « large », étendue à l’ensemble des
abonnements Internet et de téléphonie mobile, quel que soit le mode de
commercialisation des services de télévision (« gratuits » / payants –
commercialisés expressément ou non dans une offre composite ou dans
toute autre offre), au seul motif que ces abonnements permettent
techniquement d’accéder à des services de télévision.
Aux termes du nouvel article L. 115-6 du code du cinéma et de
l’image animée, dont l’entrée en vigueur est subordonnée à l’acceptation
de la nouvelle assiette par la Commission européenne, est assujetti à la
TST distributeurs l’ensemble du chiffre d’affaires « abonnements » des
fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et des opérateurs de téléphonie
mobile, au titre «
des accès à des services de communication au public en
ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces
services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de
télévision
».
Parallèlement, plusieurs modifications ont été introduites :
−
les abonnements professionnels ont été exclus de la base
d’imposition ;
−
les consommations de services électroniques « hors forfait » ont
été incluses dans la base d’imposition, dès lors qu’elles
permettent un accès à des services de télévision ;
−
le barème de la TST « distributeurs » a été simplifié et abaissé,
le taux marginal supérieur passant de 4,5 % à 3,5 % ;
−
l’abattement de 55 % a été porté à 66 %, dans le but de
maintenir constant le produit de la taxe recouvrée.
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C - L’affectation exclusive au CNC du produit de la
TST « distributeurs » demeure problématique
Trois ans à peine après la création de la taxe, les évolutions
successives de son assiette et de son barème n’ont pas contribué à en
conforter l’acceptabilité. Outre le défaut de stabilité du cadre fiscal qui en
résulte, force est de constater, s’agissant de la part de la taxe appliquée
aux opérateurs de communications électroniques, que le lien entre le fait
générateur de la taxation (l’activité de distribution de contenus
numériques relevant de catégories extrêmement diverses), l’assiette de la
taxe (le chiffre d’affaires résultant des abonnements aux services de
communications électroniques), et son objet (le financement de la
création cinématographique et audiovisuelle) apparaît à bien des égards
moins évident que pour les taxes affectées d’origine plus ancienne (cf.
annexe 3).
Certes, le principe selon lequel sont taxés au profit du CNC les
acteurs économiques qui tirent un bénéfice de la diffusion de contenus
cinématographiques et audiovisuels justifie qu’y soient attraits les
fournisseurs d’accès à Internet et les opérateurs de téléphonie mobile, dès
lors qu’une part non négligeable des contenus transitant par les services
qu’ils offrent relève de la filière à laquelle est consacrée l’activité du
Centre
19
.
Il n’en reste pas moins que l’affectation au CNC de l’intégralité du
produit de la taxation des opérateurs de communications électroniques
revient à conférer au Centre une prérogative discutable, dès lors qu’en
l’espèce il ne saurait se prévaloir d’être à lui seul concerné par la
diffusion sur Internet de contenus faisant l’objet d’un soutien public.
Les réflexions récemment menées par le ministère de la culture et
de la communication sur l’usage qui pourrait également être fait de cette
ressource aux fins d’abonder le financement des secteurs de la musique et
du spectacle vivant témoignent d’ailleurs que le principe de son
affectation exclusive au CNC n’a pas valeur de dogme intangible et que
l’idée d’étendre, à tout le moins, le bénéfice de son produit au soutien
d’autres activités culturelles ne paraît pas inconsidérée sur le plan
économique.
19
Commandée par le CNC, l’étude de l’institut IDATE sur l’utilisation des réseaux
haut débit en France réalisée en juin 2012 montre ainsi que la vidéo légale représente
près de 83 % de la bande passante des réseaux fixes, la consommation de télévision
sur ADSL représentant 90 % du trafic audiovisuel. L’étude indique par ailleurs que
les services audiovisuels mobilisent déjà 13,6 % de la bande passante des réseaux
mobiles.
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D - Les recettes futures de TST « distributeurs » sont
incertaines
1 -
Pour l’année 2011, les recettes de TST accusent un léger recul,
à la suite du repositionnement stratégique d’un opérateur de
communications électroniques
La réaction de l’opérateur Free à la réforme introduite par la loi de
finances pour 2011 (cf.
supra
) a eu pour conséquence d’affecter d’un
coefficient d’incertitude le produit net de la TST « distributeurs ». Le
CNC confirme que «
ce coefficient d’incertitude est d’autant plus élevé
qu’il s’applique non seulement à Free en 2011 mais également à tous les
autres opérateurs télécoms incités à repositionner leur offre (…). Cette
situation pourrait conduire à une attrition quasi-complète de l’assiette
fiscale des opérateurs télécoms tant qu’une nouvelle assiette n’aura pas
été mise en oeuvre
».
A ce jour, les pertes de recettes apparaissent cependant limitées.
Les recettes nettes de TST « distributeurs » perçues par le CNC en 2011
se sont ainsi élevées à 273,6 M€, contre 277,8 M€ en 2010, cette baisse
étant de fait en partie liée à la diminution des recettes fiscales acquittées
par Free. En 2012, les régularisations de TST « distributeurs » dues au
titre de l’année 2011 ont finalement rapporté à l’établissement un solde
créditeur
de
27,2 M€
20
-
les
régularisations
positives
liées
à
l’augmentation du chiffre d’affaires des opérateurs assujettis demeurant,
pour l’heure, supérieures aux régularisations négatives résultant des
repositionnements stratégiques desdits opérateurs.
2 -
Pour l’année 2012, le niveau des recettes de TST, qui dépend
de la décision de la Commission européenne, ne sera affecté au
CNC qu’à hauteur de 229 M€, dans l’hypothèse la plus favorable
La modification de la TST « distributeurs » votée en loi de
finances pour 2012 a été notifiée à la Commission européenne le 26
octobre 2011. Les autorités françaises ont répondu le 10 janvier 2012 à
une demande d’informations complémentaires de la Commission le 12
décembre 2011. Après une première prolongation du délai d’instruction
jusqu’au 15 avril 2012, la Commission européenne a de nouveau sollicité
un délai complémentaire de deux mois pour statuer. Le secrétariat général
aux affaires européennes a indiqué que «
dans le cadre de l’examen de la
notification du projet de modification de la TST, la Commission souhaite
s’assurer de la conformité des mesures notifiées avec la directive
20
Se décomposant en 42 M€ de régularisations positives et 14,8M€ de régularisations
négatives.
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2002/20/CE
« autorisation ».
»
Cet
élément
pourrait
conduire
la
Commission à réserver sa réponse pendant encore plusieurs mois,
l’application de la directive « autorisation » faisant aujourd’hui l’objet
d’un contentieux entre la Commission européenne et la France sur la taxe
« télécoms ».
Le contentieux communautaire relatif à la taxe « télécoms »
Introduite par la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la
communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, la
taxe sur les opérateurs de communications électroniques, dite taxe
« télécoms », a pour objet de compenser le manque à gagner dû à la
suppression des revenus publicitaires de la télévision publique et à la
suppression de la taxe sur les recettes publicitaires des chaînes privées.
Cette taxe est due par les opérateurs de télécommunications qui,
d’après le code des postes et des communications électroniques, fournissent
un service en France et qui ont fait l’objet d’une déclaration préalable auprès
de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes
(ARCEP).
La Commission européenne conteste la compatibilité de cette taxe
avec le droit communautaire, notamment avec la directive 2002/20/CE du
7 mars 2002 relative à l’autorisation de réseaux et de services de
communications électroniques. Aux termes de l’article 12 de cette directive,
«
les taxes administratives imposées aux entreprises fournissant un service
ou un réseau au titre de l’autorisation générale ou auxquelles un droit
d’utilisation
a
été
octroyé
(…)
couvrent
exclusivement
les
coûts
administratifs globaux qui seront occasionnés par la gestion, le contrôle et
l’application du régime d’autorisation générale, des droits d’utilisation et
des obligations spécifiques (…).
»
Les autorités françaises estiment que la directive 2002/20/CE permet
l’instauration d’une taxe portant sur le chiffre d’affaires des opérateurs
télécom. Au contraire, la Commission circonscrit cette imposition au prix à
payer pour l’obtention de la licence nécessaire à l’exercice de la profession.
Elle considère qu’une imposition complémentaire est dès lors interdite
puisque la directive prévoit qu’aucune taxe assise sur la licence ne peut
frapper les opérateurs, si elle va au-delà des frais administratifs nécessaires à
sa délivrance. Le 28 janvier 2010, la Commission européenne a adressé une
mise en demeure à la France au titre de la taxe « télécoms », suivie d’un avis
motivé le 1
er
octobre 2010. Le 23 septembre 2011, la Commission
européenne a traduit la France devant la Cour de justice de l’Union
européenne. A ce stade de la procédure, l’organisation d’une audience paraît
nécessaire aux autorités françaises afin d’insister devant la Cour sur les
points forts de la défense. D’après le SGAE, cette audience pourrait être
programmée à l’automne 2012, l’arrêt intervenant «
entre deux et cinq mois
après
».
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La résolution du contentieux relatif à la « taxe télécoms » ne
semble donc pas devoir être envisagée avant la fin de l’année 2012. Par
ailleurs, le 29 août 2011, un opérateur de communications électroniques a
déposé auprès de la Commission européenne une plainte relative au
financement des régimes d’aides aux industries cinématographiques et
audiovisuelles. Parmi les griefs formulés par le plaignant figurait le
niveau
des
recettes
encaissées
par
le
CNC,
qualifié
de
«
disproportionné
» au regard des besoins de financement du compte de
soutien. Les autorités françaises ont répondu le 6 octobre 2011 à la
demande d’informations de la Commission consécutive à cette plainte.
Interrogé sur ce point, le secrétariat général aux affaires européennes a
estimé que «
la réponse des autorités françaises a apporté les
clarifications nécessaires à la Commission, car toutes les mesures
notifiées ont été autorisées. La plainte ne concernait pas le projet de
modification de la TST et n’a donc pas d’incidence sur cette mesure
encore en cours d’examen.
»
Ces événements ont retardé l’entrée en vigueur de la nouvelle
assiette de la taxe, la loi de finances pour 2012 l’ayant renvoyé «
à une
date fixée par décret qui ne peut être postérieure au 1
er
janvier 2013
».
Faute d’autorisation de la Commission européenne, le CNC se trouve
donc actuellement dans l’impossibilité d’appliquer la nouvelle assiette de
la TST « distributeurs » dont il escomptait un rendement de 190,3 M€ en
provenance des opérateurs de télécommunications – aboutissant à un
rendement total de TST « distributeurs » d’environ 290 M€ en retenant
l’hypothèse d’une imposition constante des autres opérateurs assujettis à
la taxe
21
.
L’assiette établie en 2011 continuant à s’appliquer tant que la
Commission européenne n’a pas pris de décision, le produit attendu de la
taxe est fragilisé par le risque que fait peser l’éventualité de voir les
opérateurs réorienter leur offre commerciale en vue de réduire la charge
du prélèvement dont ils sont l’objet. Ce risque est estimé par le CNC pour
la seule année 2012 à 100 M€.
En tout état de cause, à supposer que le montant de TST
« distributeurs » finalement recouvré par l’établissement se rapproche de
la prévision initiale, le CNC ne sera affectataire que d’une recette écrêtée
à 229 M€, conformément aux dispositions de la loi de finances pour
2012. Au regard de la situation des finances publiques, le législateur a en
effet entendu plafonner le produit des taxes affectées aux opérateurs de
l’État et reverser toute recette excédentaire au budget général (cf. partie
IV
infra
)
Pour l’année 2012, le CNC envisageait, lors du premier exercice de
prévision budgétaire, un niveau de recettes de 721 M€, se décomposant
21
Les câblo-opérateurs et les chaînes de télévision autodistribuées.
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en 131,3 M€ de TSA, 558 M€ de TST et 31,7 M€ de taxes vidéo. Ces
prévisions ont été revues à la baisse en cours d’année, le CNC intégrant
dans
ses
projections
de
recettes
le
plafonnement
de
la
TST
« distributeurs » à 229 M€. Ainsi, le montant des recettes fiscales
envisagées par le CNC en budget primitif pour 2012 s’établissait à
700,8 M€
22
, les ressources prévisionnelles atteignant au total 834,06 M€.
Si l’écrêtement de la TST « distributeurs » était maintenu à son
niveau actuel et à supposer que le rendement des autres taxes soit
constant, le CNC verrait ainsi ses recettes fiscales pérennisées, pour les
prochaines années, à un niveau proche de 700 M€, les ressources totales
de l’établissement atteignant alors près de 800 M€ (sur la base d’une
extrapolation du budget 2012). Dans une perspective historique, ce niveau
de recettes serait nettement supérieur aux niveaux moyens de recettes
fiscales affectées au CNC par le passé, celles-ci n’ayant jamais dépassé
532 M€ jusqu’en 2008 (cf. tableau n° 4
supra
).
Tableau n° 6 : Prévisions de ressources du CNC pour 2012 (en M€)
Stade de budgétisation
Prévisions en 2011
Budget primitif 2012
Date
C.A du 7 juillet 2011
C.A. du 24 novembre
2011
TSA
131,3
130
TST éditeurs
309,2
310
TST distributeurs
248,8
229
Taxes vidéo
31,7
31,7
Total taxes affectées
721
700,8
Régularisations TSA et TST dues au
titre des années antérieures
-
19,1
Remboursements divers
-
80
Ressources propres
-
14,75
Ressources affectées
-
19,4
TOTAL GENERAL
-
834,06
Source : Cour des comptes, d’après budget primitif du CNC.
22
Commission d’examen du compte de soutien du 12 décembre 2011 et compte rendu
du CA du 24 novembre 2011.
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II
-
Les autres ressources du CNC
En sus des taxes affectées, qui représentent 93 % de ses ressources,
le CNC dispose de dotations budgétaires (A) et de ressources propres (B).
A - Les dotations budgétaires
A périmètre constant, les dotations budgétaires versées au CNC,
comptabilisées par l’établissement comme des subventions d’exploitation,
ont connu une légère augmentation entre 2001 et 2011. Cette progression
résulte d’évolutions contrastées.
Tableau n° 7 : Subventions d’exploitation reçues par le CNC entre
2001 et 2011 (en milliers d’euros)
2001
2007
2008
2009
2010
2011
−
Subvention du ministère de la
culture
5 751
19 520
15 263
14 265
9 011
0
dont interventions directes du ministère de la
culture
-
17 429
15 263
14 265
9 011
0
dont subvention de fonctionnement CNC
2 257
2 091
-
-
-
0
dont plan de restauration des films anciens
3494
-
-
-
-
Subvention du ministère de la recherche
46
-
-
-
-
0
Ressources affectées production et distribution
des films des administrations civiles
6 153
7 764
8 065
6 730
5 367
7 105
Dispositifs de soutien cofinancés
23
-
9 948
8 089
6 086
6 296
7 723
dont Industries techniques FAEM
-
3 862
2 893
2 036
2 723
4 842
dont RIAM
-
2 725
1 625
442
510
263
dont DICRéAM
-
749
665
709
741
986
dont cinéma peu diffusé
-
265
332
121
16
1
dont Fonds Sud
-
2 347
2 574
2 779
2 306
1 631
Total des subventions d'exploitation
11 950
37 232
31 417
27 081
20 674
14 828
Source : Cour des comptes, d’après données CNC (comptes financiers ; détail du compte 74).
23
Cf.
annexe 4.
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1 -
Le ministère de la culture et de la communication a opéré des
transferts de charges vers l’établissement pour un montant
significatif
Jusqu’en 2007 inclus, le ministère de la culture et de la
communication versait au CNC une subvention pour charges de service
public (2,1 M€ en 2007), destinée à couvrir une partie des frais de
fonctionnement de l’établissement. L’affectation directe au CNC du
produit de la TSA depuis le 1
er
janvier 2007 et les perspectives
d’accroissement des produits financiers qui en découlent ont conduit le
ministère à retirer sa subvention à partir du 1
er
janvier 2008.
Le dynamisme des ressources du CNC a par ailleurs conduit le
ministère de la culture à faire supporter par l’établissement des dépenses
précédemment imputées sur ses propres crédits budgétaires. Ces transferts
ont porté sur les éléments suivants :
−
le
financement
des
dispositifs
d’aide
au
secteur
cinématographique cofinancés par le ministère de la culture et
le CNC. Ainsi, en 2006, l’établissement a pris à sa charge le
non versement par le ministère de la culture de sommes dues à
hauteur de 5,6 M€ pour l’exercice 2005 au titre des dispositifs
cofinancés, ainsi qu’un arriéré de 11,4 M€ remontant à 1991,
dû par le ministère au titre du dispositif « guichet jeunesse »
(aide sélective destinée à la production de programmes pour la
jeunesse). En 2008, les dépenses relatives aux dispositifs d’aide
à la création culturelle multimédia (DICRéAM, FAEM,
RIAM), précédemment cofinancés par le ministère de la culture
et le CNC, ont été transférées à l’établissement, pour un
montant de 2,87 M€ ;
−
le
financement
d’opérations
régionales
précédemment
subventionnées
par
les
DRAC.
Les
festivals
cinématographiques en région présentant un intérêt national ou
international ont été intégralement mis à la charge du CNC en
2008 (1,5 M€) ; en 2012, une part significative des crédits
déconcentrés en faveur du cinéma, précédemment inscrits au
programme 334 « livres et industries culturelles » de la mission
« médias, livre et industries culturelles », ont été transférés au
CNC (1,28 M€ pour un montant total de 3,53 M€) ;
−
le
financement
d’institutions
cinématographiques
précédemment financées par le ministère de la culture. Ainsi, la
subvention versée par le ministère à la Cinémathèque française
a été intégralement prise en charge par le CNC à partir de 2011
(19,6 M€), de même qu’à partir de 2012, la charge liée au
financement de l’école nationale supérieure pour les métiers de
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l’image et du son (FEMIS), précédemment inscrite dans les
crédits budgétaires du programme 224 « transmission des
savoirs et démocratisation de la culture » de la mission
« culture » (7,82 M€).
Au total, le ministère de la culture et de la communication a
transféré 63,9 M€ de dépenses au CNC entre 2006 et 2012, se
décomposant en 17 M€ de dépenses ponctuelles (prise en charge par le
CNC d’engagements ponctuels non payés par le ministère) et 46,9 M€ de
dépenses annuelles récurrentes.
Tableau n° 8 : Dépenses d’intervention du ministère de la culture
transférées au CNC entre 2006 et 2012, en milliers d’euros
Transfert
dépenses
ponctuelles
2006
Non versement, en 2005, des crédits dus par le
ministère au titre des dispositifs cofinancés
5 575
2006
Arriérés remontant à 1991 dus au CNC au titre
du dispositif "guichet jeunesse"
11 410
Total
16 985
Transfert
dépenses
récurrentes
2008 Aides au multimédia
2 870
2008
Crédits déconcentrés (festivals en région)
1 500
2010
Ensemble des aides CNC / Mission Culture
13 805
2011
Cinémathèque française (50 % initialement
prévus en LFI 2011)
9 800
2011
Cinémathèque française (50 % transférés en juin
2011)
9 800
2012 FEMIS
7 828
2012
Crédits déconcentrés (patrimoine en région)
1 280
Total
46 883
Source : Cour des comptes, d’après réponse CNC.
Imputés au CNC par décision du directeur de cabinet du ministre
de la culture et de la communication, ces transferts de charges ont permis
au ministère de recouvrer les crédits lui permettant de financer d’autres
opérations telles que le concours alloué à France Télévisions en 2012,
dans un contexte budgétaire contraint. En outre, ces débudgétisations ont
permis
au
ministère
de
disposer
d’une
marge
de
manoeuvre
supplémentaire pour respecter la norme de dépense qui lui était imposée.
Le ministère de la culture ne verse plus aucune participation
financière au budget du CNC depuis le 1
er
janvier 2011. Les crédits
d’intervention du ministère dans le champ cinématographique sont
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désormais réduits à une enveloppe budgétaire minime (près de 3 M€
demandés en PLF 2012), comprenant essentiellement les actions
d’éducation à l’image conduites en DRAC
24
.
2 -
En tant qu’organisme centralisateur des paiements, le CNC
gère des ressources budgétaires qui lui sont affectées par d’autres
ministères en vue d’une utilisation prédéfinie
Les autres concours budgétaires affectés à l’établissement,
également comptabilisés en subventions d’exploitation, ont vu leur
périmètre se réduire fortement au terme de l’importante réforme
budgétaire et comptable mise en oeuvre par l’établissement à partir de
2005.
Les crédits relatifs aux dispositifs cofinancés ont connu une baisse
tendancielle au cours de la période récente, imputable au retrait des
ministères partenaires du CNC (le ministère chargé des affaires étrangères
a mis fin au cofinancement de l’aide aux cinématographies étrangères peu
diffusées en 2009) et au transfert de la gestion de l’un de ces dispositifs –
le RIAM – du CNC vers Oséo, les crédits correspondant n’étant plus
imputés que de manière résiduelle sur le budget du CNC.
B - Les ressources propres de l’établissement
Le CNC dispose également de ressources propres, comprenant les
produits financiers, le prélèvement sur les recettes du registre public du
cinéma et de l’audiovisuel (RPCA), les frais de gestion sur les concours
budgétaires affectés, les cotisations professionnelles ainsi que quelques
activités de vente de publications et de prestations de service.
1 -
L’augmentation des produits financiers
Tout au long de la dernière décennie, les produits financiers du
CNC ont connu une augmentation significative, à l’exception de la
période 2009-2010, les conséquences de la crise financière n’épargnant
pas l’établissement.
24
2,57 M€ parmi lesquelles les opérations « Ecoles au cinéma », « Collèges au
cinéma » et « Lycéens et apprentis au cinéma », imputés sur l’action 2 du programme
224, ainsi que 140 000 € au titre de bourses « cinéma » imputées sur l’action 1 du
programme 224.
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Tableau n° 9 :
Evolution des produits financiers du CNC entre 2001
et 2012, en milliers d’euros
Source : Cour des comptes, d’après données CNC ; les données pour 2012
sont prévisionnelles.
Sur la période récente, la progression des produits financiers
s’explique par l’augmentation de la trésorerie de l’établissement et par la
rationalisation de sa politique de placement. Pour l’année 2011, toute la
trésorerie a été placée en comptes à terme, présentant une gestion plus
souple et plus facilement optimisable que les bons du Trésor à intérêts
annuels. En 2012, la gestion d’un compte rémunéré
25
, ouvert sur
proposition de la direction générale des finances publiques (DGFiP),
devait permettre à l’établissement de placer sa trésorerie sur du très court
terme et d’en améliorer ainsi la souplesse de gestion. Cependant, la
faiblesse des taux de rendements actuels limitera vraisemblablement
l’apport d’un tel placement à 150 000 € pour l’année 2012 (pour 120 M€
placés tout au long de l’année).
25
La rémunération de ce compte est basée sur le solde quotidien de l’indice EONIA
(
Euro OverNight Index Average
, taux de rémunération des dépôts interbancaires du
jour) - 15 points de base.
0
1000
2000
3000
4000
5000
6000
7000
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
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2 -
Les prélèvements opérés sur le registre du cinéma et de
l’audiovisuel et sur les concours budgétaires affectés
a)
Le prélèvement sur les recettes des registres du cinéma et de
l’audiovisuel (RCA)
Créée par une loi du 22 février 1944, la conservation des registres
du cinéma et de l’audiovisuel est placée auprès du CNC. Elle gère le
registre public du cinéma et de l’audiovisuel (RPCA) et le registre des
options, qui recensent les actes, conventions et jugements relatifs à la
production, à la distribution, à la représentation et à l’exploitation des
oeuvres audiovisuelles
26
. Aux termes de l’article L. 125-2 du code du
cinéma et de l’image animée, «
toute requête aux fins d’inscription ou
publication, toute demande de renseignements, toute délivrance d’états,
certificats, copies ou extraits donnent lieu à la perception d’un
émolument
».
Conformément à l’article L. 114-1 du même code, une part des
émoluments versés au conservateur des registres du cinéma et de
l’audiovisuel est affectée au budget du CNC. En 2011, cette part sur les
recettes des registres a atteint 3,12 M€.
La disparition, au 1
er
janvier 2013, du régime associé au statut du
conservateur des hypothèques
27
, et par assimilation du statut du
conservateur du RPCA, conduira au remplacement des émoluments
actuellement perçus par le conservateur à l’occasion des formalités
effectuées auprès des registres du cinéma et de l’audiovisuel par une
redevance pour services rendus, perçue au profit du CNC.
Afin de fixer le juste niveau de la redevance à percevoir à partir de
2013, le Centre est en train de procéder à une expertise approfondie des
coûts de fonctionnement du RCA. Au regard des premiers travaux menés
– restant à consolider – le montant annuel de cette redevance devrait
s’établir entre 1,5 M€ et 1,8 M€, soit une diminution de ces ressources de
40 % à 50 %.
26
Le RPCA recense les actes, conventions et jugements des oeuvres pour lesquelles
les producteurs détiennent les droits d’adaptation des oeuvres littéraires adaptées. Un
producteur qui a pris une simple option pour l’adaptation d’une oeuvre littéraire
préexistante ne peut pas immatriculer au RPCA son projet ni rendre public les contrats
afférents. Le registre des options a ainsi été créé pour assurer la publicité des projets
et des contrats auxquels il donne lieu dans cette période intermédiaire.
27
Ordonnance n° 2010-638 du 10 juin 2010 portant suppression du régime des
conservateurs des hypothèques.
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b)
Le prélèvement sur les concours budgétaires affectés
Par ailleurs, sur la majeure partie des concours budgétaires affectés
à l’établissement (production et diffusion des films des administrations
civiles, dispositifs cofinancés), le CNC opère un prélèvement pour frais
de gestion dont le produit vient financer ses frais de fonctionnement (ces
prélèvements sont abordés de manière détaillée dans le chapitre 3). En
2011, ces prélèvements ont représenté une somme de 374 029 €.
3 -
Le maintien contestable des cotisations professionnelles
Aux termes de l’article L.115-14 du code du cinéma et de l’image
animée, le CNC est affectataire du produit de cotisations professionnelles
perçues auprès du secteur cinématographique. Au 1
er
janvier 2012, de
telles cotisations sont dues :
−
par les producteurs, à l’occasion de la cession de droits de
diffusion des films. Le taux de la cotisation est fixé à 0,58 %
des encaissements hors taxe sur la valeur ajoutée provenant des
cessions de droits ;
−
par les distributeurs, à l’occasion de l’exploitation sur tout
support des oeuvres dont ils assurent la distribution. Le taux de
la cotisation est fixé à 0,58 % des encaissements hors taxe sur
la valeur ajoutée provenant de l’exploitation ;
−
par les exportateurs de films. Le taux de la cotisation est fixé à
0,55 % du chiffre d’affaires hors taxe sur la valeur ajoutée ;
−
par les exploitants de salles. Le taux de cette cotisation est fixé
à 0,232 % du prix des entrées aux séances.
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Tableau n° 10 : Evolution des cotisations professionnelles perçues
par le CNC entre 2007 et 2011, en euros
2007
2008
2009
2010
2011
Cotisations exploitants
2 267 449
1 506 624
2 233 551
2 435 220
2 563 307
Cotisations producteurs /
distributeurs
4 566 899
4 339 254
3 841 679
6 009 970
5 222 973
Cotisations exportateurs
1 763 325
728 877
917 595
977 313
1 081 213
Industries techniques
302
1 207
-
-
-
Total des cotisations
professionnelles
8 597 976
6 575 963
6 992 825
9 422 502
8 867 493
Taux de recouvrement
dans l'exercice
99,91%
99,98%
99,97%
97,71%
99,98%
Source : CNC.
A l’origine, la perception de cotisations professionnelles se
justifiait au regard des missions d’organisation professionnelle confiées
au CNC et de la collaboration étroite entre l’établissement et la profession
dans l’élaboration et l’application de la réglementation du secteur du
cinéma. Par ses différentes interventions, dans le cadre, notamment, des
autorisations d’exercice, du contrôle de la sincérité et de la remontée
effective des recettes et du contrôle du financement des films, le CNC
assurait en effet le bon fonctionnement du secteur au bénéfice de
l’ensemble de la filière cinématographique. A cet égard, les cotisations
n’ont jamais servi à financer les régimes de soutien financier, mais les
charges de gestion de l’établissement induites par les missions précitées.
La modernisation du mode de financement du fonctionnement du
CNC, désormais assuré par des prélèvements pour frais de gestion opérés
sur
les
taxes,
rend
aujourd’hui
la
perception
des
cotisations
professionnelles anachronique. Ces cotisations présentent en outre, dans
leur économie actuelle, un biais discriminant car elles ne s’imposent
qu’aux entreprises du secteur cinématographique, les entreprises opérant
dans les secteurs audiovisuel, multimédia ou vidéo en étant exonérées
28
.
Conscient de ces limites, le CNC avait d’ailleurs envisagé, dans le cadre
de la préparation du budget pour 2011, la suppression des cotisations
professionnelles.
L’établissement
a
ainsi
indiqué
à
son
conseil
d’administration, réuni le 30 novembre 2010, que «
la réforme des
28
Le CNC indique que les compétences de l’établissement «
se sont progressivement
élargies, au-delà du seul cinéma, en direction des secteurs de l’audiovisuel, de la
vidéo et du multimédia mais il n’a pas été mis en place de régime d’organisation
professionnelle justifiant le prélèvement de cotisations sur ces secteurs, même si ceux-
ci sont également intéressés par les différentes missions de l’établissement
».
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cotisations professionnelles, qui était nécessaire compte tenu de leur
fragilité juridique et de leur caractère obsolète depuis la suppression des
autorisations d’exercice, est rendue possible par le niveau attendu des
taxes.
» La note de présentation du budget primitif pour 2011 ajoute que «
cette mesure (…) permettra d’assurer l’égalité de traitement entre les
entreprises appartenant aux différents secteurs de l’image animée
relevant du périmètre d’intervention du CNC, ces cotisations n’étant
recouvrées jusqu’à présent qu’auprès du secteur du cinéma.
» En
contrepartie, le budget primitif pour 2011 a maintenu les prélèvements
opérés sur le compte de soutien pour financer les frais de gestion du CNC
à un niveau inchangé
29
.
L’établissement a indiqué que s’il «
n’entend
[ait]
pas écarter
définitivement
la
possibilité
d’une
suppression
des
cotisations
professionnelles (…), il considère que cette décision n’est pas opportune
à très court terme compte tenu, d’une part, des fortes incertitudes qui
affectent les ressources du fonds de soutien et (…) d’autre part de la
baisse
attendue
en
2013
des
autres
ressources
propres
de
l’établissement
»
(revenus financiers et prélèvement sur les registres du
cinéma et de l’audiovisuel).
Les arguments d’opportunité avancés par le CNC ne sauraient
remettre
en
cause
la
nécessité
de
mettre
fin
aux
cotisations
professionnelles. Le relèvement des prélèvements pour frais de gestion
qui pourrait en résulter aurait pour conséquence de répartir de manière
plus équitable la charge de financement de la gestion du CNC sur
l’ensemble des professionnels.
29
Conseil d’administration du 30 novembre 2010 : «
Le CNC précise qu’à taux
constant, les frais de gestion prélevés sur les recettes fiscales permettent de
compenser la suppression des cotisations professionnelles, compte tenu de la
croissance prévue des taxes affectées à l’établissement.
»
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__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
La forte progression des recettes du CNC au cours des cinq
dernières années est liée à la création, en 2007, d’une nouvelle taxe
affectée à l’établissement, pesant sur les distributeurs de services de
télévision.
Si le produit de cette taxe demeure marqué par de fortes
incertitudes pour les années à venir, celle-ci représente, sur le long-
terme, un nouveau relais de croissance pour les recettes du CNC,
l’établissement demeurant à ce jour l’unique affectataire du produit de la
taxe alors même que d’autres secteurs pourraient légitimement prétendre
à la même ressource.
La clôture du compte d’affectation spéciale « cinéma, audiovisuel
et expression radiophonique locale » et l’affectation directe au budget du
CNC du produit des taxes qu’il recouvre désormais ont permis à
l’établissement de bénéficier de perspectives dynamiques en matière de
ressources propres, la gestion directe de la trésorerie augmentant de
manière significative les produits financiers.
Dans ce contexte, les cotisations professionnelles représentent une
survivance historique devenue archaïque, leur suppression pouvant
avantageusement être remplacée par une légère augmentation des
prélèvements opérés sur le compte de soutien.
Prenant acte du transfert du recouvrement des deux principales
taxes affectées au CNC et de l’augmentation des recettes fiscales de
l’établissement, le ministère de la culture a cessé de lui verser une
subvention de fonctionnement en 2008, avant de lui transférer la charge
des interventions qu’il assurait jusqu’alors dans le domaine du cinéma et
de l’image animée.
La Cour formule la recommandation suivante :
1.
supprimer les cotisations professionnelles.
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Chapitre II
Le CNC a tiré profit du
dynamisme de ses ressources pour
étendre ses aides
L’augmentation des recettes de l’établissement ne s’est pas traduite
par une augmentation proportionnelle des aides, en raison de la prise en
charge croissante de structures tierces et du lancement d’un plan
d’investissement qui n’est encore que partiellement engagé (I). Dans le
même temps, les aides déployées par le CNC se sont étendues à de
nouveaux supports, sans que ces évolutions aillent de pair avec une
évaluation de l’existant, ni avec une remise en cause des fondements
économiques de cette intervention (II). Dès lors, l’évaluation de
l’efficacité et de l’efficience des aides du CNC reste en partie suspendue
au déploiement d’instruments plus fins de mesure de la performance.
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I - Les aides à la filière professionnelle, coeur de la
mission du CNC
A - Les aides du CNC se répartissent entre les différents
stades de la production, de la distribution et de
l’exploitation d’une oeuvre cinématographique ou
audiovisuelle
Les soutiens du CNC couvrent l’ensemble des étapes encadrant
une oeuvre cinématographique ou audiovisuelle, de sa production à sa
distribution et à son exploitation. A chacune de ces étapes correspondent
deux types de dispositifs : des aides automatiques et des aides sélectives.
L’ensemble des aides se répartit approximativement à parité entre le
soutien automatique et le soutien sélectif.
Le soutien automatique, qui vise à consolider le tissu industriel
existant, repose sur le principe de la constitution de droits de tirage au
profit de producteurs, distributeurs, exploitants et éditeurs vidéo, à due
concurrence
des
recettes
générées
par
l’exploitation
d’oeuvres
cinématographiques ou audiovisuelles. Sur cette base, les entreprises
bénéficiaires peuvent mobiliser les droits constitués en vue de financer
leur activité future. Entre 2007 et 2011, les montants accordés au titre du
soutien automatique sont passés de 247 à 269 M€, soit une augmentation
de 9 %.
Les soutiens sélectifs, quant à eux, ont pour principale vocation de
favoriser la diversité (des oeuvres, des structures…) et le renouvellement
des talents. La procédure d’octroi de ces aides repose donc sur la
sélection de projets jugés porteurs par une commission de professionnels,
comme c’est le cas par exemple pour l’avance sur recettes. On dénombre
soixante dispositifs sélectifs différents, tous secteurs confondus, pour un
montant total d’environ 214 M€ en 2011, auxquels s’ajoutent 90 M€
d’avances remboursables
30
. Au total, les aides sélectives ont augmenté de
38 % entre 2007 et 2011, pour atteindre un montant de 304 M€.
30
Source : note de présentation du compte financier 2011. Le bilan 2010 du CNC ne
fait état que de 37 dispositifs sélectifs différents, pour environ 192 M€.
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Le financement des oeuvres cinématographiques
Tableau n° 11 – Répartition moyenne du financement des
films d’initiative française en 2011
Les aides versées par le CNC sont comptabilisées, pour la plupart
d’entre elles, parmi ses charges d’intervention. S’y ajoutent les avances
remboursables, comptabilisées depuis 2007 en immobilisations au bilan
de l’établissement.
Toutes aides confondues, le soutien versé par le CNC a augmenté
de 22 % entre 2007 et 2011, l’essentiel de cette augmentation étant lié à
une hausse des aides sélectives. La part du soutien automatique,
légèrement majoritaire en 2007, tend à décroître jusqu’à devenir
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légèrement minoritaire en 2011. Une partie de cette évolution est liée,
d’après le CNC, à la mise en oeuvre récente de nouvelles missions :
transferts de charge du ministère de la culture, plan numérique, soutien
conjoncturel à la production audiovisuelle pour les réseaux numériques.
Au cours de la décennie écoulée, on observe en outre des
tendances contrastées, s’agissant des principaux secteurs aidés :
−
le soutien à la production (cinématographique et audiovisuelle)
concentre plus de la moitié des aides. 230 M€ sont ainsi
consacrés à la production audiovisuelle en 2011, soit 40 % du
total des aides, et 102 M€ à la production cinématographique,
soit 18 % de l’ensemble. Les aides à l’exploitation (91 M€ en
incluant le plan numérique, soit 16 % du total) et à la
distribution
(31 M€,
soit
5 %)
présentent
des
volumes
financiers moindres ;
−
si le montant des aides progresse dans tous les secteurs sur
longue
période,
celles
qui
vont
à
la
production
cinématographique augmentent moins rapidement (aides stables
entre 2007 et 2011) que celles qui sont allouées à la production
audiovisuelle (+ 23 %), à l’exploitation cinématographique
(+ 34 %) ou à la distribution cinématographique (+ 62 %).
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Tableau n° 12 : Evolution des dépenses de soutien du CNC
de 2007 à 2011 (en M€)
2007
2008
2009
2010
2011
Variation
2007/2011
SOUTIEN
AUTOMATIQUE
247
262
275
271
269
+ 9 %
production cinéma
65
71
67
70
65
0 %
Distribution
24
22
27
18
22
- 8 %
Exploitation
19
17
18
17
23
+ 17 %
Vidéo
4
8
5
4
5
+ 42 %
production audiovisuelle
136
145
158
162
154
+ 14 %
SOUTIEN SELECTIF
221
246
259
271
306
+ 38 %
Soutien sélectif :
subventions et
fonctionnement
156
174
174
179
214
+ 37 %
production cinéma
28
19
18
19
18
- 36 %
production audiovisuelle
45
50
49
47
53
+ 18 %
distribution, diffusion et
promotion
58
63
65
72
86
+ 48 %
divers cinéma et audiovisuel
17
32
33
29
38
+ 124 %
plan numérique
2,3
2,1
1,2
4,2
10
+ 335 %
industries techniques et
innovation
6
7
7
8
12
+ 100 %
Soutien sélectif : avances
65
72
85
92
90
+ 40 %
avance sur recettes
6
12
17
21
17
+ 176 %
aide au développement de
long métrage
1
2
2
3
2
+ 118 %
avances sur le soutien
automatique à l’exploitation
et numérisation des salles
47
40
48
46
48
+ 2 %
avances audiovisuelles
10
17
18
21
22
+ 113 %
TOTAL
468
508
534
543
575
+ 23 %
Part du soutien automatique
53 %
52 %
52 %
50 %
47 %
- 11 %
Part du soutien sélectif
47 %
48 %
48 %
50 %
53 %
+ 13 %
Source : Cour des comptes d’après données CNC (note de présentation du compte
financier). Seuls sont pris en compte, pour chaque exercice, les soutiens automatiques
effectivement mobilisés et les soutiens sélectifs effectivement versés. Le montant de soutien
automatique indiqué exclut les remboursements d’avances (68,3 M€ en 2011), imputés sur
le même compte, mais qui ne correspondent pas à des versements d’aides.
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Tableau n° 13 : Evolution des principales aides versées par
le CNC (en M€, 2001-2011)
Source : Cour des comptes d’après données CNC.
Les commissions d’attribution des aides sélectives
Les décisions d’attribution des aides sélectives sont prises par le
président du CNC après avis de commissions spécialisées, composées de
professionnels du secteur. En 2011, on dénombre ainsi 46 commissions
différentes, qui réunissent au total 656 professionnels. Ceux-ci se distinguent
en deux catégories : d’une part les lecteurs, au nombre de 267, qui remettent
aux commissaires un avis circonstancié sur les projets écrits (dossiers, plans
de financement, devis, scénarios…), d’autre part les commissaires, au
nombre de 389, qui délibèrent sur les projets et proposent l’attribution des
aides. Si le CNC indique que «
la progression du nombre de membres des
commissions et des comités de lecture s’explique à la fois par le
développement des mécanismes de soutien et par la complexité croissante des
dossiers examinés
», la perspective d’une rationalisation doit néanmoins être
recherchée.
Un dispositif de soutien à un secteur économique qui repose sur des
commissions composées de professionnels implique une vigilance constante
quant aux procédures d’attribution des aides pour prévenir les éventuels
conflits d’intérêts. Dans le cadre de son dernier contrôle, la Cour des comptes
a mis en évidence le renouvellement limité des membres de certaines
commissions (commission d’agrément notamment). Le CNC considère que la
relative pérennité de la composition des commissions est importante pour
permettre à ses membres d’y trouver pleinement leur place et leur autorité. Il
s’est cependant engagé à limiter dans certains cas le nombre de mandats
effectués, pour faciliter la rotation et l’ouverture.
0
50
100
150
200
250
2001
2003
2005
2007
2009
2011
production
audiovisuelle
production
cinéma
exploitation
cinéma
distribution
cinéma
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Par ailleurs l’établissement a indiqué que le choix des membres répondait à la
«
nécessité de réunir les compétences de professionnels actifs
» et qu’il n’est
donc «
pas surprenant qu’il arrive que leurs projets soient eux-mêmes
soutenus
» Le CNC s’est néanmoins engagé à formaliser davantage les
procédures en vigueur, en particulier s’agissant de la commission d’avance
sur recettes, afin d’assurer une homogénéité de traitement des candidats, et à
systématiser le remplacement d’un membre par son suppléant en cas
d’examen au cours de la session d’un dossier pour lequel existe une relation,
même indirecte, entre un commissaire et un demandeur.
B -
Au-delà de ces soutiens directs, le CNC a également
contracté de multiples engagements envers des tiers
Conformément aux dispositions de l’article 4 du décret n° 99-130
du
24
février
1999
relatif
au
soutien
financier
de
l'industrie
cinématographique, le CNC accorde via des subventions, «
dans l'intérêt
général de la cinématographie, un soutien financier à des organismes de
droit public ou de droit privé, en vue de favoriser : 1° La promotion du
cinéma en France ; 2° L'expansion du cinéma français à l'étranger ; 3°
La
promotion
en
France
et
à
l'étranger
des
industries
cinématographiques françaises ; 4° La formation aux métiers de l'image
et du son, notamment par la mise en place d'actions spécifiques de
formation répondant aux besoins particuliers de secteurs déterminé
s ».
De même, l’article 6 du décret n° 98-35 du 14 janvier 1998 relatif au
soutien
financier
de
l’industrie
audiovisuelle
prévoit
que
«
des
subventions peuvent être attribuées par le directeur général du Centre
national de la cinématographie à des organismes assurant des actions de
promotion en France et à l'étranger des programmes et des industries de
l'audiovisuel
».
A ce titre, en dehors des aides versées directement au secteur selon
les mécanismes décrits plus haut, le CNC est engagé auprès de divers
organismes, en vertu de conventions annuelles ou pluriannuelles, pour un
montant total évalué à 77 M€ en 2011.
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Tableau n° 14 : Subventions du CNC à des tiers, par domaine de
soutien, en M€ (2007-2011)
2007
2008
2009
2010
2011
2011/2007
Associations et festivals
24,6
27,8
26,9
28,7
29,2
+19,0%
Création cinéma et
audiovisuelle
0,9
0,9
0,9
1,0
1,1
+30,7%
Diffusion du cinéma et
éducation à l'image
4,2
5,0
4,8
4,7
5,4
+27,6%
Promotion du cinéma et de
l'audiovisuel
18,3
20,5
19,7
21,4
21,1
+15,2%
Promotion des industries
techniques
0,1
0,1
0,2
0,1
0,2
+35,8%
Promotion des nouveaux
médias
0
0
0,1
0,3
0,2
-
Divers cinéma et
audiovisuel
1,1
1,2
1,2
1,2
1,3
+22,1%
Cinémathèque française et
patrimoine en région
0
0
0
9,5
19,7
n.s.
Production
cinématographique et
audiovisuelle en région
6,6
11,2
13,5
7,7
14,7
+123,8%
Dotation nette à l'IFCIC
3,7
4,2
2,1
6,9
7,4
+101,0%
FEMIS*
0
0
0
0
0,9
-
Programmes européens
5,0
5,2
5,1
5,2
5,2
+3,3%
TOTAL
39,8
48,3
47,6
57,9
77,1
+93,7%
Source : données CNC (réponse au relevé d’observations provisoires.
* Le financement de l’Ecole nationale supérieure des métiers de l’image et du son
(FEMIS), jusqu’alors assuré par le programme 224 « Transmission des savoirs et
démocratisation de la culture », a été transféré au CNC par la LFI pour 2012.
Cette débudgétisation représente une dépense supplémentaire estimée à 7,8 M€.
L’essentiel des financements (plus de 50 M€ en 2011) correspond
à des subventions que le CNC verse à une série d’organismes oeuvrant à
des titres divers au soutien du cinéma et de l’audiovisuel en France et à
l’étranger (cf. détail en annexe). Il peut s’agir soit d’apports ponctuels à
des associations (31 M€) dont certaines organisent des festivals (le CNC a
ainsi versé 3,8 M€ pour l’organisation du festival de Cannes en 2011),
soit de crédits mis en oeuvre en vertu de conventions conclues avec les
collectivités territoriales (15 M€) ou d’engagements européens de la
France (5 M€).
La période récente a été marquée par l’implication croissante des
collectivités territoriales
dans le financement du cinéma et de
l’audiovisuel (multiplication par cinq des crédits en dix ans), quoique
cette tendance soit légèrement en recul depuis 2009. En 2011, les soutiens
des collectivités territoriales consacrés au cinéma et à l’audiovisuel
s’élevaient à 61 M€. Ces financements sont principalement assurés par les
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régions, celles-ci représentant en 2009 près de 93 % des soutiens locaux
dans le secteur cinématographique, et 88 % dans le secteur audiovisuel
31
.
Le CNC a développé une politique d’abondement de ces
financements locaux, régie par des conventions passées avec les
collectivités concernées
32
. Ses engagements financiers annuels sont
limités à un maximum de 2 M€ par convention. Les montants engagés par
le CNC dans le cadre des avenants financiers 2011 ont atteint 17,5 M€
(dont 14,8 M€ pour les fonds d’aide à la création et à la production et
2,6 M€ pour les festivals).
Par ailleurs, les principaux postes de dépenses concernent deux
organismes, l’Institut pour le financement du cinéma et des industries
culturelles (IFCIC) et la Cinémathèque française.
Créé en 1983, l’IFCIC, est un établissement de crédit chargé par le
ministère de la culture et le ministère de l’économie et des finances de
contribuer au développement des industries culturelles en facilitant leur
accès au financement bancaire. Chaque année, l’IFCIC évalue les besoins
de dotation en fonction de ses prévisions de crédits à garantir pour chaque
catégorie de prêt et en fonction du risque associé à chaque type de crédits.
L’IFCIC évalue en parallèle les excédents que le CNC peut récupérer sur
dotations des années précédentes. En 2011, la dotation du CNC s’élevait à
16,1 M€. Les récupérations sur les dotations des années précédentes
représentant 8,7 M€, la dotation effectivement décaissée ne s’élevait en
réalité qu’à 7,4 M€.
La Cinémathèque française, association de la loi de 1901, est
subventionnée au titre de ses missions d’intérêt général que sont la
conservation, la restauration et la valorisation des films et objets de ses
collections. Jusqu’en 2009 inclus, le ministère de la culture et de la
communication a assuré seul le versement de cette subvention. Courant
2010, le ministère a demandé au CNC de participer au financement de
cette subvention, un avenant tripartite à la convention entre le ministère
de la culture et la Cinémathèque française ayant été passé à cet effet. En
2011, le transfert est devenu intégral et, depuis lors, le CNC subventionne
seul la Cinémathèque française (19,6 M€ en LFI 2012). Chaque année,
une convention est signée entre le CNC et la Cinémathèque pour entériner
le montant de la subvention, qui couvre environ 71 % du budget de
l’association.
31
Données de l’agence régionale de financement du cinéma Centre Images.
32
Ces conventions couvrent aujourd’hui 40 collectivités territoriales (les 26 régions
de métropole et d’outre-mer, 12 départements, la communauté urbaine de Strasbourg
et la Ville de Paris).
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C - Enfin, le CNC a lancé un vaste plan de numérisation
des salles et des oeuvres
Le plan numérique, qui s’étend sur la période 2010-2015,
représente un effort financier important visant à favoriser l’adoption des
nouvelles technologies de diffusion par les différents maillons de la
chaîne du cinéma. D’après le budget primitif pour 2012, ce plan devrait
représenter 371,8 M€ au total, répartis en quatre enveloppes :
−
la numérisation des salles (120,3 M€ en incluant la dotation de
l’IFCIC) ;
−
la numérisation des oeuvres (117,5 M€) ;
−
le soutien conjoncturel à la production audiovisuelle pour les
réseaux numériques (36,5 M€) ;
−
les investissements liés à la diffusion et à la conservation
numériques (63,5 M€)
33
.
Les fonds destinés à la numérisation des oeuvres n’ont pas encore
été engagés, deux éléments venant retarder l’investissement dans ce
domaine. D’une part, les hypothèses de coût sont conditionnées par
l’ampleur donnée de leur côté par le Commissariat général à
l’investissement (CGI) et par la Caisse des dépôts et consignations (CDC)
au champ des interventions qui leur incombent dans le cadre du fonds
national pour la société numérique
34
. Seul Gaumont ayant signé, à ce
jour, un accord avec la CDC, ces hypothèses ne s’affinent que
progressivement. D’autre part, les opérations de numérisation visées par
le CNC, qui concernent des oeuvres patrimoniales, à moindre potentiel
commercial, nécessitent au préalable de mener un inventaire national des
oeuvres concernées, ainsi qu’une analyse des opérations de restauration
dont elles doivent faire l’objet avant leur numérisation. Par ailleurs,
l’autorisation de la Commission européenne n’est intervenue que le
21 mars 2012, retardant encore le déploiement de ce plan.
Au 1
er
janvier 2012, 7,3 M€ ont été consommés pour le soutien
conjoncturel à la production audiovisuelle pour les réseaux numériques.
Le budget pour 2012 prévoit d’y affecter 14,6 M€. Le volet diffusion et
33
Outre ce plan numérique au sens strict, le CNC prévoit également des dépenses
liées à l’acquisition de collections (4 M€) et au plan de restauration et de
fonctionnement des Archives françaises du film (30 M€).
34
Après la mise en place du fonds national pour la société numérique dont la gestion a
été confiée à la Caisse des dépôts et consignations, les crédits en provenance du
programme des investissements d’avenir (« grand emprunt ») sont censés couvrir la
numérisation des oeuvres ayant un fort potentiel commercial. Un accord-cadre a été
signé en mai 2011 entre le CGI et les détenteurs de grands catalogues, sous l’égide du
ministère chargé de l’industrie et du ministère de la culture et de la communication.
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conservation numérique, pour sa part, a mobilisé moins de 2 500 € en
2011 ; il est envisagé d’y employer 20,5 M€ en 2012.
L’aide à la numérisation des salles prévoyait initialement de
contribuer au financement de la numérisation d’environ 1 000 salles
35
(soit 750 établissements), pour un total de 114 M€ d'aides (73 M€ de
subventions et 41 M€ d'avances remboursables), auxquelles s’ajoute une
contribution de l’IFCIC (7,5 M€). Fin février 2012, environ un tiers des
écrans et un tiers des établissements éligibles ont bénéficié d’une aide du
CNC, pour 28,1 M€, ce qui représente cependant moins du tiers du
montant initial prévu par le plan
36
.
Le CNC rappelle que les salles françaises sont passées très
rapidement au numérique (+ 75 % d’écrans numérisés début 2012 par
rapport à fin 2010). Il considère que les nouvelles catégories d’écran qui
vont à présent entrer dans le dispositif (circuits itinérants notamment)
appelleront des investissements plus coûteux, ce qui explique l’absence
de proportionnalité directe entre consommation de l’enveloppe prévue
(moins du tiers) et nombre de salles aidées (plus du tiers). Il indique en
outre que l'examen des premières demandes d'aide à la numérisation
montre que certaines catégories de salles «
qui n'avaient pas été
identifiées comme ayant besoin d'aide publique devront recourir au
dispositif du CNC
»
37
. Le nombre d’écrans éligibles a augmenté en
conséquence de 80 % par rapport aux prévisions initiales, passant de
1 000 à 1 800 écrans (soit de 750 à 1 300 établissements). Si les
prévisions budgétaires ne dépassent pas l’épure initiale, c’est que les
apports propres des exploitants et des collectivités territoriales s’avèrent
supérieurs aux prévisions. Fin février 2012, 448 établissements ont
bénéficié d’une aide à la numérisation, soit 597 écrans.
Pour autant, l’effort de transparence dont l’établissement fait
preuve sur ce plan ne va pas jusqu’à une justification économique de la
nécessité de suppléer au marché pour financer en si peu de temps le
passage au numérique de près de 1 300 établissements, dont certains,
35
Comité financier du 7 avril 2010.
36
Le périmètre des salles aidées a été modifié en 2012 pour couvrir davantage
d’établissements, en particulier du fait que le taux de couverture de certains
équipements par des contributions des distributeurs n’a pas atteint le niveau attendu
(le plan s'adresse aux salles qui ne perçoivent pas, du fait de leur programmation,
suffisamment de contributions pour couvrir au moins 75 % du coût de leurs
investissements). Le coût définitif pourrait être de 108 M€ fin février 2012, soit un
gain de 6 M€ par rapport aux prévisions initiales.
37
C’est le cas en particulier de certaines salles participant à une association
mutualisant les contributions des distributeurs, qui n’auraient pas été éligibles seules,
ou de salles partageant des copies en première semaine de sortie nationale, ces cas
n’ayant pas été anticipés dans le cadre de la loi du 30 septembre 2010.
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considérés isolément, auraient vraisemblablement été en mesure de
financer seuls cette mutation. Cet investissement apparaît dès lors comme
un exemple symptomatique de l’absence d’arbitrage budgétaire en amont,
conséquence du pilotage autonome par la recette qui caractérise
l’établissement.
II
-
L’augmentation du volume d’aides ne va pas
de pair avec une mesure de leur efficacité
A - Des succès indéniables
Le cinéma français présente des signes de bonne santé. La part de
marché du cinéma français se maintient ces dernières années autour de
35 % (très supérieure à la part de marché du cinéma national dans
d’autres pays européens - qui oscille entre 1 % dans les pays d’Europe
centrale et orientale et 25 % dans les pays les plus performants comme
l’Allemagne, le Danemark ou l’Italie).
L’année 2011 confirme cette
tendance : la part de marché des films français est de 41,6 %, et certains
films français sont de grands succès, reconnus y compris à l’étranger
38
. Le
CNC rappelle à cet égard que «
le cinéma français reste, aujourd’hui, le
seul cinéma européen et l’un des rares cinémas du monde à susciter, sur
longue période, un nombre d’entrées en salles à l’étranger comparable et
même supérieur, certaines années, au nombre d’entrées constaté dans les
salles de cinéma françaises
. »
En outre, le CNC met régulièrement en avant l’évolution positive
de deux agrégats qui, même s’ils ne figurent pas, en tant que tels, parmi
ses objectifs, viennent à l’appui de ce propos : le nombre de films
produits agréés par le CNC (passant de 204 à 272 entre 2001 et 2011, soit
+ 33%) et la fréquentation des salles de cinéma, en progression constante
depuis 2001 (plus de 215 millions d’entrées en 2011, dont 89,6 millions
pour des films français). Enfin, le parc de salles de spectacles français est
particulièrement dense : 8,3 salles pour 100 000 habitants en 2011, alors
qu’on ne compte par exemple que 5,7 salles pour 100 000 habitants en
Allemagne.
38
Les films français ont enregistré en 2011 71,7 millions d’entrées à l’étranger
(source : Unifrance).
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B - Une situation en apparence florissante qui masque
des résultats plus contrastés
Pour autant, ces motifs légitimes de satisfaction ne peuvent être
tenus en soi pour suffisants, dans la mesure où les évolutions constatées
s’accompagnent d’une augmentation plus que proportionnelle du montant
des aides allouées par le CNC. Et, sauf à tenir pour irréfutable l’idée selon
laquelle le dynamisme d’un secteur emporte la nécessité de lui affecter
toujours plus d’argent public, la justification de cette augmentation
continue des aides reste à établir.
Au niveau global, il est donc à craindre que le système d’aides
déployé par le CNC ne prospère qu’en raison du fort dynamisme des
ressources dont l’établissement a bénéficié ces dernières années. Certes, il
ne saurait être question de remettre en cause le principe d’un soutien
public au secteur cinématographique et audiovisuel. Néanmoins, dans un
contexte de contrainte forte sur la dépense publique et sur le niveau des
prélèvements obligatoires qui ne saurait exclure le CNC, opérateur de
l’État, au cours des prochains exercices, rien n’interdit de s’interroger sur
la pertinence de certains dispositifs d’aides, dès lors qu’ils présentent par
rapport aux objectifs des résultats stables, voire déclinants, pour des coûts
souvent croissants.
Dans cette perspective, des signes de saturation du modèle d’aides
doivent être évoqués, en particulier pour la production de films, domaine
qui reste le plus soutenu par le CNC, et pour la production audiovisuelle,
qui, pour sa part, bénéficie de soutiens financiers croissants, mais
présente des résultats décevants.
1 -
L’augmentation du nombre de films produits : une réussite ?
Entre 2001 et 2011, l’activité de production cinématographique a
connu une augmentation régulière, atteignant à plusieurs reprises des
records historiques.
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Tableau n° 15 : Evolution du nombre de films agréés par le CNC
entre 2001 et 2011
Films d'initiative française
Films à
majorité
étrangère
Nombre
total de
films agréés
par le CNC
Films
intégralement
français
Films
majoritairement
français
Total
2001
125
47
172
32
204
2002
106
57
163
37
200
2003
105
78
183
29
212
2004
130
37
167
36
203
2005
126
61
187
53
240
2006
127
37
164
39
203
2007
133
52
185
43
228
2008
145
51
196
44
240
2009
137
45
182
48
230
2010
143
60
203
58
261
2011
152
55
207
65
272
2001/2011
21,6%
17,0%
20,3%
103,1%
33,3%
Source :
Cour
des
comptes
d’après
données
CNC
(La
production
cinématographique en 2011)
La production cinématographique française occupe la première
place en Europe en nombre de films produits annuellement. En 2009, les
films d’initiative française ont ainsi représenté 20 % des 893 longs
métrages européens. Avec une moyenne annuelle de 180 films d’initiative
française ayant donné lieu à un agrément d’investissement entre 2001 et
2010, la production française devance la production espagnole (151 films
par an) et la production britannique (139 films par an
39
). Le CNC indique
qu’assurer un volume élevé de films produits «
constitue un objectif sous-
jacent du système d’aide
,
pour deux raisons principales :
−
un volume important de production est une condition pour
assurer la diversité de la création cinématographique, objectif
général de l’intervention du CNC. Le renouvellement et la
découverte des talents (…), la proposition d’univers artistiques
39
Les données britanniques doivent être minorées, car elles comptabilisent certains
films intégralement produits par des sociétés américaines au Royaume-Uni.
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variés, plus ou moins exigeants, difficiles en termes de potentiel
commercial, et donc risqués économiquement supposent
l’existence d’une offre alternative à l’offre de films à fort
potentiel commercial, qui est la première à se financer ;
−
un volume important de production est aussi une condition
pour assurer une forte présence commerciale de la production
française, tant sur son marché qu’à l’international. Pour rester
concurrentiel par rapport à un cinéma américain puissant qui
peut amortir ses coûts de production sur un marché domestique
de grande ampleur […], il est nécessaire d’assurer l’existence
d’une offre variée et significative d’oeuvres françaises et
européennes, attrayante auprès du public, qui permet une
présence commerciale forte et régulière ».
Au cours de la décennie, l’augmentation du nombre de films
agréés n’a pas nui à la fréquentation générale des films français. Au
contraire, la part de marché des films français dans la fréquentation en
salles s’est maintenue à un niveau élevé, plaçant la production française
au premier rang européen en termes de position sur le marché
domestique. Le CNC voit donc dans cette hausse «
un indicateur de la
vitalité de l’écosystème français
».
La performance globale de la fréquentation des films français
masque néanmoins des disparités importantes. La fréquentation des films
français est plus concentrée sur les dix principaux succès que ne l’est la
fréquentation de l’ensemble des films vus en France, toutes nationalités
confondues. Ainsi, en 2010, dix films français concentrent 41 % des
entrées en salles concernant des films français, alors que les dix premiers
succès de l’année – tous films confondus – ont réunis seulement 24,5 %
du total des entrées en salles. Cette tendance s’est poursuivie en 2011 :
vingt films français ont dépassé le million d’entrées, dont
Intouchables
(16,7 millions d’entrées) et
Rien à déclarer
(8,2 millions d’entrées).
En outre, une part structurelle de films réalise un nombre très
réduit d’entrées. Entre 2001 et 2010, la proportion de films produits
chaque année qui ont été vus par moins de 50 000 spectateurs est passée
de 51 % à 60 %. L’une des raisons de cette faible fréquentation réside
dans l’exposition limitée des films concernés. En 2010, près de 50 % des
films français inédits sortent en moins de 50 copies, dont près de 35 % en
moins de 25 copies. Cette sortie limitée obère structurellement la capacité
d’un film à rencontrer un public, pour une durée d’exploitation moyenne
limitée à quelques semaines sur un parc de 5 478 salles actives. Le CNC
estime que «
soutenir en production comme en distribution des films qui
s’adresseront à un public de niche […] répond à l’objectif général de
soutenir la diversité de l’offre cinématographique et le renouvellement
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des talents
», rappelant que certains films commercialement fragiles
atteignent un équilibre économique en raison de leur faible coût de
production et de distribution. Les études économétriques sur le sujet
40
permettent cependant de relativiser cette affirmation, révélant que le
pourcentage de films rentables, sans qu’il soit possible d’établir une
corrélation systématique, a tendance à décroître avec le budget du film.
40
Cf.
par exemple l’étude d’Olivier Bomsel et Cécile Chamaret,
Rentabilité des
investissements dans les films français
, Cerna – MINES ParisTech, octobre 2008.
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Tableau n° 16 : Ventilation de la fréquentation des films français inédits entre 2001 et 2010
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
Films
générant
plus
d'un
million d'entrées
Nombre
20
13
19
17
16
18
11
17
18
19
%
9,8%
6,3%
8,8%
7,1%
6,8%
7,4%
4,2%
7,1%
6,7%
7,0%
Films générant entre 500 000
et 1 million d'entrées
Nombre
9
12
12
16
21
20
17
20
20
15
%
4,4%
5,8%
5,5%
6,7%
8,9%
8,3%
6,5%
8,3%
7,5%
5,6%
Films générant entre 100 000
et 500 000 entrées
Nombre
42
42
44
50
43
49
69
53
58
50
%
20,5%
20,2% 20,3% 21,0% 18,2% 20,2% 26,3% 22,1% 21,6%
18,5
Films générant entre 50 000 et
100 000 entrées
Nombre
30
18
18
16
25
22
27
30
20
23
%
14,6%
8,7%
8,3%
6,7%
10,6%
9,1%
10,3% 12,5%
7,5%
8,5%
Films générant moins de
50 000 entrées
Nombre
104
123
124
139
131
133
138
120
152
163
%
50,7%
59,1% 57,1% 58,4% 55,5% 55,0% 52,7% 50,0% 56,7%
60,4 %
TOTAL
205
208
217
238
236
242
262
240
268
270
Source : Cour des comptes, d’après données CNC.
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Cette faible exposition s’explique aussi par des sorties dites
« techniques », consistant à exposer un film dans une seule salle,
généralement pour une seule semaine, afin de mettre en paiement le
contrat de préachat de droits de diffusion passé avec une chaîne de
télévision. Ces sorties techniques se sont élevées à 30 films au cours de la
dernière décennie. Elles ont généré 62 069 entrées, soit une moyenne de
2 069 entrées par film
41
.
Plus encore, l’analyse des données du CNC révèle que les films
ayant connu la plus forte progression en nombre au cours de la dernière
décennie sont ceux dont la distribution a représenté entre 25 et 49 copies
(+70,8 %) et entre 50 et 99 copies (+66,7 %). Dès lors, la présence de
films distribués en un nombre restreint (inférieur à 25) de copies ne peut
expliquer à elle seule la très faible fréquentation de plus de la moitié des
films français. La cause semble devoir être également recherchée dans un
effet de saturation du réseau d’exploitation, la multiplication du nombre
de films inédits produits et exposés en salles (573 en 2007, 595 en 2011)
ne pouvant, dans ces conditions, qu’entraîner un taux d’échec
structurellement important. Le CNC fait certes remarquer que, si le
nombre de films sortis a progressé de 4 % entre 2007 et 2011, le nombre
de séances a augmenté de 12 % sur la même période. Le rapport
d’activité 2011 du Médiateur du cinéma relève cependant un double
phénomène de «
rotation plus rapide des films
» et d’«
homogénéisation
de la programmation
» entre salles de cinéma, qui rend de plus en plus
aléatoire l’accès à certains films fragiles. Ces données témoignent d’une
évolution progressive mais marquée vers un marché du cinéma à deux
vitesses, le marché des films commerciaux porteurs, attirant toujours plus
de spectateurs, et le marché des films moins porteurs, où s’accumulent de
plus en plus de films enregistrant des résultats médiocres ou franchement
mauvais.
A ce sujet, le CNC n’en tient pas moins à souligner l’extrême
difficulté, «
pour les professionnels eux-mêmes, porteurs et financeurs de
projets,
d’anticiper
le
potentiel
commercial
des
films
».
L’idée
d’introduire un critère d’exposition lors de l’octroi d’une aide à la
production pourrait d’après lui conduire à «
se substituer à l’expertise et
la responsabilité du producteur et distributeur
. » L’établissement signale
également qu’il a entrepris une réévaluation des aides à la distribution,
dont le montant est stable depuis 2007 (31,1 M€ en 2007, 30,7 M€ en
2011).
Au terme d’une décennie qui n’a cessé de voir augmenter le
nombre de films français produits chaque année, il est donc permis de
s’interroger sur la pertinence d’un dispositif de soutien orientant une part
41
Ces données sont extraites de l'ouvrage de René Bonnell,
La vingt-cinquième
image
, 3
e
éd., Gallimard.
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significative de ses ressources vers des films qui ne pourront rencontrer,
pour des raisons tenant aux limites matérielles du réseau d’exploitation,
qu’un public restreint, voire marginal. En tout état de cause, il apparaît
raisonnable d’admettre que soutenir la production cinématographique sur
des fonds publics n’a de sens que si le film produit a des chances d’être
convenablement exposé. Dès lors, on peut également s’interroger sur
l’opportunité, pour le CNC, de redéployer une partie des crédits qu’il
oriente aujourd’hui vers les aides à l’audiovisuel en direction de films
dont la programmation en salles paraît compromise, au stade de la
recherche de distributeurs, et dont la première diffusion sur une chaîne de
télévision aurait plus de sens
42
.
2 -
Des objectifs généraux non atteints dans le secteur audiovisuel
D’après le document de performance transmis au Parlement, les
aides au secteur audiovisuel visent deux objectifs principaux :
−
consolider l’industrie des programmes audiovisuels, c’est-à-
dire lutter contre l’atomisation du secteur en évitant une trop
forte dispersion des aides et en favorisant l’exportation de
programmes ;
−
enrichir l’offre de programmes et soutenir l’innovation
audiovisuelle.
Si l’on excepte l’objectif de concentration des aides au profit des
producteurs indépendants, les résultats demeurent globalement très en
deçà des prévisions. En particulier, la concentration des aides aux dix
principales sociétés, loin de se renforcer, accuse un recul significatif :
elles absorbaient près de 20 % du soutien automatique en 2007, contre
16,4 % en 2011. Certes, cet indicateur n’intègre pas la notion de groupes
audiovisuels, constitués de plusieurs sociétés pouvant disposer d’autant
de comptes de soutien automatique et le CNC s’est d’ailleurs engagé à
envisager une modification de cet instrument de mesure. L’établissement
estime toutefois «
qu’un équilibre doit être trouvé entre l’émergence et
l’accompagnement de quelques acteurs significatifs de la production […]
et la préservation indispensable de la diversité et de l’indépendance du
tissu créatif
. »
Il apparaît enfin, d’après des données dont le CNC relativise la
fiabilité, que les programmes audiovisuels français s’exportent de moins
en moins bien, y compris par rapport à une cible révisée tendanciellement
42
Avec les limites que comporte d’après le CNC le marché télévisuel, jugé moins
ouvert que celui des salles et moins porteur pour l’exploitation ultérieure de l’oeuvre
sur d’autres supports.
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à la baisse (le chiffre d’affaires à l’exportation de l’industrie de
programmes est passé entre 2007 et 2011 de 157 à 136 M€, tandis que
l’objectif affiché dans les documents de performance chutait de 300 à
160 M€).
Le constat global sur les performances du secteur audiovisuel
demande à être nuancé selon les genres. Si l’animation et le
documentaire, par exemple, peuvent se prévaloir d’une situation
favorable, le cas de la fiction française demeure problématique, comme
l’a analysé récemment la mission Chevalier
43
. L’offre étrangère a occupé
60,4 % des soirées de fiction en 2011 et la fiction américaine réalise à elle
seule 72 des 100 meilleures audiences de l’année 2011, alors que ce
palmarès n’intègre que quatre fictions françaises
44
. En outre, la part
d’audience moyenne de la fiction étrangère est plus élevée que la part
d’audience moyenne en première partie de soirée sur TF1, France 2,
Canal+ et M6, alors que la part d’audience moyenne de la fiction
française se situe en dessous.
Tableau n° 17 : Place de la fiction dans les cent meilleures
audiences de l'année (2005-2010)
Source :
CSA,
« La
fiction
sur
les
chaînes
nationales
gratuites.
Chiffres-clés 2005-2010 ».
43
Le défi de l’écriture et du développement
, rapport de la mission Chevalier, mars
2011.
44
La diffusion de la fiction à la télévision en 2011
, rapport du CNC, avril 2012.
56
40
11
13
4
7
8
4
14
46
57
63
62
2005
2006
2007
2008
2009
2010
fiction américaine
52 minutes
fiction française 52
minutes
fiction française 90
minutes
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Depuis 2007, le total des aides à la production audiovisuelle a
augmenté de 20 %. Dans le budget primitif 2012, la dotation du soutien
automatique à la production audiovisuelle a même été renforcée de 17 M€
par rapport à 2011. Là encore, le CNC attribue cette croissance à la «
très
forte mutation qu’a connue le paysage audiovisuel
» au cours de la
dernière décennie (augmentation du nombre de chaînes locales,
réorganisation du paysage des chaînes thématiques, lancement de la
TNT), et signale que la part relative du CNC dans le financement de la
fiction a eu, quant à elle, tendance à décliner depuis 2005, devenant
même inférieure à 10 % en 2011.
Avec 229 M€ en 2011, la France entretient néanmoins un dispositif
de soutien à l’audiovisuel unique en Europe dans son principe et dans son
volume
45
, tout en demeurant l’un des pays où les productions nationales
font les plus mauvais résultats d’audience.
Le ministère de la culture fait état à ce sujet d’un constat partagé
avec le CNC sur deux faiblesses de la fiction française, «
au niveau de
l’écriture et du développement d’une part, et au niveau de la capacité à
produire des séries longues d’autre part
. » Il y voit des difficultés
«
conjoncturelles
»,
liées
au
«
renouveau
de
la
fiction
longue
américaine
» face à laquelle « la
fiction française a entamé une
adaptation qui est en passe de donner des résultats significatifs en qualité
[…] et même en audience
»
46
, mouvement accompagné par les pouvoirs
publics. Le CNC souligne aussi que «
plusieurs éléments encourageants
laissent penser que la situation de la fiction française va en
s’améliorant
», et fait état de bonnes performances d’audience de séries
françaises sur la télévision en ligne.
L’établissement met l’accent sur le soutien à la phase d’écriture et
de développement des projets, dans la lignée des recommandations du
rapport Chevalier. Par arrêté du 10 avril 2012 a été mise en oeuvre une
réforme du soutien à la production audiovisuelle de fiction, prévoyant une
augmentation du soutien généré pour les séries de journée et d’avant
soirée, l’instauration d’une dégressivité du soutien généré pour les séries
de fiction et une bonification du soutien accordé aux séries de première
45
Le rapport de l’Observatoire européen de l’audiovisuel consacré en 2004 aux
Aides
publiques aux oeuvres cinématographiques et audiovisuelles en Europe – Une analyse
comparative
présente le dispositif français comme «
le plus important programme de
soutien à la production audiovisuelle en Europe
», devançant très largement en
montant les rares fonds consacrés par certaines collectivités à la production
audiovisuelle (Bavière, Catalogne et Communauté française de Belgique).
46
Mentionnons par exemple des séries quotidiennes (
Plus Belle la Vie
,
Scènes de
ménage
), des unitaires et séries de première partie de soirée (
Engrenages
,
Mafiosa
,
Les Hommes de l’ombre
…) ou des formats courts (
Bref
,
Vestiaires
…), qui réalisent
par ailleurs les meilleures audiences en fiction sur la télévision de rattrapage.
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partie de soirée lorsqu’elle font l’objet d’une commande d’au moins 300
minutes.
De telles réorientations de ressources au profit d’un secteur
pourraient gagner à s’inscrire dans une réflexion plus ouverte sur les
perspectives pluriannuelles d’évolution des dispositifs d’aide, qui serait
plus clairement explicitée vis-à-vis de la représentation nationale (cf.
partie IV).
C - Une sédimentation croissante des dispositifs
La forte augmentation, depuis 2008, de la contribution des
opérateurs de communications électroniques au budget du CNC s’est
accompagnée d’un déploiement de nouveaux dispositifs d’aide permettant
de soutenir, plus ou moins directement, l’innovation et les nouveaux
supports de diffusion d’images : ils visent en particulier à accompagner
les investissements liés au numérique, à encourager le développement de
technologies innovantes et à favoriser les projets conçus pour plusieurs
supports de diffusion.
Outre les aides à la numérisation des salles, d’autres dispositifs
nouvellement créés ont conduit à des décaissements croissants depuis
2007.
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Tableau n° 18 : Dispositifs de soutien créés depuis 2007 ayant
donné lieu à versement (en euros)
Objet
2007
2008
2009
2010
2011
Aide aux
pilotes de
fiction
audiovisuelle
-
-
-
-
619 750
Aides à la
création
numérique
(nouveaux
médias)
0
1 134 178
1 498 223
1 811 150
2 322 126
Promotion
des nouveaux
médias
(associations)
-
-
146 500
259 065
184 130
Aide sélective
à la vidéo à la
demande
-
486 075
740 825
956 550
740 615
Aide à la
numérisation
des salles
-
-
-
0
5 764 380
Dotation à
l'IFCIC
(garantie
numérisation
des salles)
-
-
-
2 250 000
2 250 000
Fonds images
de la diversité
998 850
1 345 550
981 575
1 343 557
1 624 701
Total
998 850
2 965 803
3 367 123
6 620 322
13 505 702
Source : données CNC (réponse au questionnaire).
Par ailleurs, depuis 2008, les programmes destinés à des « éditeurs
de services à la demande », c’est-à-dire des chaînes de télévision sur
Internet, sont éligibles au soutien automatique à la production
audiovisuelle à condition qu’ils soient également préachetés par une
chaîne de télévision. Depuis avril 2011, ce soutien est également ouvert à
des projets audiovisuels financés uniquement par un diffuseur ou une
plate-forme Internet (sept programmes en ont bénéficié en 2011, pour un
total d’aides de 400 000 euros).
Au-delà des soutiens traditionnels, conçus comme des aides au
contenu à différents stades (production, distribution ou diffusion,
exploitation et exportation), le contexte d’évolution technologique rapide
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a conduit le CNC à créer, depuis une dizaine d’années, des aides plus
spécifiquement ciblées sur les supports, dans le but de soutenir les
formats émergents, porteurs de renouvellement du processus créatif.
Dernièrement, les décrets n° 2012-54 du 17 janvier 2012 et
n° 2012-269 du 24 février 2012 relatifs respectivement aux aides à la
création artistique multimédia et numérique et aux aides en faveur de la
création pour les nouveaux médias sont venus confirmer l’existence du
dispositif d’aide à la création artistique multimédia (DICRéAM) et d’une
aide sélective à la création pour les nouveaux médias (principalement
Internet et les écrans mobiles), auparavant mis en oeuvre par voie de
convention avec le ministère de la culture ou sous forme expérimentale.
Le second dispositif s’adresse à la fois aux oeuvres spécifiquement
destinées aux nouveaux médias et aux oeuvres dites « transmédia », c’est-
à-dire exploitables à la fois sur les supports traditionnels (télévision,
salles de cinéma) et sur les nouveaux médias.
Sans qu’il ait été procédé à une évaluation transparente de l’impact
attendu des dispositifs conventionnels initiaux, ces deux décrets adoptés
début 2012 ont entériné leur existence et ont instauré pour chacun d’entre
eux une commission de professionnels, chargée de donner un avis
préalable à la décision du président du CNC sur leur octroi.
Il n’en reste pas moins, comme le souligne d’ailleurs le CNC, que
les opérateurs de télécommunications bénéficient déjà, en tant que
diffuseurs, «
de l’ensemble des aides du fonds de soutien apportés à la
production cinématographique et audiovisuelle qui alimentent leurs
réseaux
. » La logique économique qui préside à la création de nouvelles
aides, spécifiquement ciblées sur les nouveaux supports de diffusion des
images, n’apparaît donc pas clairement. Cette double logique d’aide aux
contenus et aux structures est potentiellement porteuse de redondances,
non évaluées.
Par ailleurs, la dynamique à laquelle obéit l’économie générale des
aides du CNC ne s’accompagne pas de la suppression des dispositifs
passés, même si certains dispositifs, comme les aides à la fiction
précédemment évoquées, peuvent subir des adaptations profondes.
D’après le CNC, «
c’est parce que leur utilité demeure avérée
» et que
l’émergence de nouveaux modes de diffusion n’entraîne pas à ce jour la
disparition des anciens.
Il en résulte néanmoins un système qui se caractérise aujourd’hui
par une grande complexité : les dispositifs nouveaux - huit depuis 2007 -
viennent s’ajouter aux aides existantes (on dénombre au total au moins 66
dispositifs d’aide en 2012), sans que ces dernières soient pour autant
remises en cause. Depuis 2001, l’aide à la petite exploitation est le seul
dispositif qui a été supprimé (abrogée en 2002, elle représentait 1,1 M€
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d’engagements en 2001 et 30 000 € en 2002)
47
. Les autres suppressions
enregistrées au cours de la décennie correspondent plutôt à des révisions
de dispositifs : le fonds de création audiovisuelle a été supprimé en 2005
pour être repris dans le fonds d’innovation audiovisuelle créé la même
année et le RIAM (Recherche et Innovation en Audiovisuel et
Multimédia) a été supprimé en 2007 pour être immédiatement recréé en
prenant acte de la fin du cofinancement avec les ministères de chargés de
l’industrie et de la recherche, remplacé par une convention avec Oséo
48
.
D - Une démarche de performance encore lacunaire
1 -
Une définition d’objectifs qui ne facilite pas le contrôle de la
performance
Entre 2007 et 2011, les ressources du CNC ont connu une forte
croissance sans que la définition de leur assiette et l’évaluation de leur
volume soient explicitement corrélées à une recherche de performance
des emplois auxquels elles sont consacrées.
A défaut d’un contrat de performance où seraient déterminés les
objectifs opérationnels assignés à l’activité du CNC, les finalités que
poursuit celui-ci ressortent de différents textes ou documents :
−
l’article L. 111-2 du code du cinéma et de l’image animée :
«
Le Centre national du cinéma et de l'image animée a pour
missions : 1° d'observer l'évolution des professions et activités
du cinéma et des autres arts et industries de l'image animée
[…] ; 2° de contribuer, dans l'intérêt général, au financement
et au développement du cinéma et des autres arts et industries
de l'image animée […] ; 3° de contrôler les recettes
d'exploitation des oeuvres […] ; 4° de tenir les registres du
cinéma et de l'audiovisuel […] ; 5° de collecter, conserver,
restaurer et valoriser le patrimoine cinématographique […] ;
6° de participer à la lutte contre la contrefaçon […]
» ;
−
le document de performance remis chaque année au Parlement,
dans ses différentes rubriques : «
favoriser le succès des films
nationaux, en France et à l’étranger
», «
contribuer à la qualité
47
Décret n° 2002-567 du 22 avril 2002.
48
Décret n° 2006-324 du 20 mars 2006 relatif au soutien financier aux industries
techniques de la cinématographie et de l'audiovisuel et décret n° 2008-1015 du
1
er
octobre 2008. On peut néanmoins saluer le fait que la création récente, par le
décret n° 2012-543 du 23 avril 2012, de l’aide aux cinémas du monde, aille de pair
avec la suppression de l’aide aux films en langue étrangère.
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et à la diversité de la création cinématographique
», «
diffuser
le cinéma sur l’ensemble du territoire
», «
enrichir l’offre de
programmes
et
soutenir
l’innovation
audiovisuelle
»,
«
favoriser l’attractivité du territoire national
», «
favoriser la
diversité de l’offre et l’exposition de la création française en
vidéo et sur les nouveaux supports de distribution
», «
favoriser
la transition rapide et homogène vers la numérisation des
salles de cinéma
» ;
−
les bilans du CNC, de manière plus ou moins explicite : en
2010, l’éditorial signé par le président de l’établissement met
ainsi en avant le fait que «
c’est la numérisation des oeuvres qui
est au coeur de nos priorités, pour favoriser la diffusion de
notre patrimoine créatif sur toutes les plates-formes
» ou que la
«
priorité du CNC
» est de «
toujours encourager l’innovation
et l’inventivité de la création audiovisuelle, sur tous les
supports de diffusion, et veiller en particulier à donner un
nouveau souffle à la fiction française et à préserver le
documentaire de création
». Le bilan des évolutions passées est
également l’occasion de faire état d’objectifs sous-jacents :
«
L’année 2010 a […] été particulièrement positive pour la
production cinématographique française : nombre record de
films,
croissance
soutenue
et
proportionnelle
des
investissements
».
Devant cette multiplicité d’objectifs dont le niveau de normativité
varie, il paraît difficile de mettre en relation les moyens financiers
engagés par le CNC pour accomplir sa mission d’aide au cinéma et à
l’audiovisuel avec la mesure de la situation du secteur et de ses
évolutions. Et ce d’autant que la multiplication des aides, qui n’est sans
doute pas injustifiée, ne facilite pas une approche intégrée de la
performance du dispositif dont le CNC est le vecteur. L’établissement se
montre d’ailleurs «
conscient du fait que la mesure de la performance
doit être l’une [de ses] priorités
», tout en rappelant qu’il est «
toujours
délicat de distinguer la part résultant des interventions du CNC de celles
d’autres facteurs pour expliciter les performances […] du secteur de
l’image en France
».
Le CNC considère le document de performance qu’il produit à
l’attention du Parlement comme la référence pour l’évaluation de son
action, et s’engage à améliorer la qualité de ce document dès 2012, en
lien avec ses tutelles et le Parlement. Il indique également qu’il envisage
de lancer une évaluation indépendante de l’impact de ses aides, «
non
seulement sur les secteurs soutenus, mais aussi, plus largement, sur
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l’économie française
», à l’image d’études conduites au Royaume-Uni à
ce sujet
49
.
2 -
Des indicateurs qui mesurent l’efficacité plus que l’efficience
Si la série d’indicateurs suivis depuis 2007 a le mérite de conserver
une
certaine
stabilité,
on
peut
regretter
qu’il
s’agisse
presque
exclusivement d’indicateurs d’efficacité et non d’indicateurs d’efficience,
mettant en relation les résultats obtenus avec les moyens engagés. Dans le
document de performance
ad hoc
présenté au Parlement pour 2012, on
dénombre ainsi vingt indicateurs mesurant l’efficacité socioéconomique
de l’activité du CNC et un seul indicateur d’efficience : en l’occurrence,
l’indicateur 3.2, qui mesure l’«
impact d’un euro d’aide sélective à
l’exploitation sur les autres financements des travaux des salles de
cinéma dans les zones rurales et les unités urbaines de moins de trente
mille habitants
».
Le CNC a indiqué à la Cour avoir engagé la mise en oeuvre d’un
plan de contrôle de gestion, afin de disposer d’«
outils adaptés au suivi et
à la mesure de l’efficacité et de l’efficience de l’activité des services et de
traduire les objectifs du document de performance en leviers d’action
opérationnels
». Il précise qu’une cartographie des soutiens doit être
préalablement établie pour nourrir une réflexion sur les indicateurs
existants.
3 -
Une démarche de justification au premier euro encore
embryonnaire
La justification au premier euro présentée dans les rapports annuels
de performances (RAP), puis dans les documents de performance du
CNC, se résume largement à un descriptif des différents mécanismes
d’aide, du nombre de leurs bénéficiaires et de leur montant unitaire
moyen, sans inclure, par exemple, ce qui pourrait être une hiérarchisation
des aides en fonction de leur effet de levier. Le niveau général auquel se
situe cette approche ne permet donc pas d’apprécier la pertinence d’une
augmentation des dépenses, ni de justifier que cette augmentation suive
celle des recettes.
Dès lors que le CNC a été fondé sur le principe selon lequel son
rôle devait consister à redistribuer vers les professionnels de l’argent
perçu auprès d’eux, l’on peut concevoir qu’une telle démarche de
49
Oxford Economics,
The economic impact of the UK film industry
, juin
2010. Cette étude citée par le CNC évalue néanmoins plutôt l’impact de la
filière cinématographique dans son ensemble sur l’économie britannique.
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justification au premier euro ne s’impose pas naturellement. Pour autant,
il convient de rappeler que les taxes collectées par le CNC relèvent de la
catégorie des impositions de toute nature au sens de l’article 3 de la
LOLF et que les crédits qu’il gère sont des crédits publics, devant, en tant
que tels, pouvoir faire l’objet d’arbitrages du Parlement sur leur emploi.
E - Un fondement économique à étayer
Le
CNC
présente
la
politique
de
soutien
au
secteur
cinématographique et audiovisuel comme un «
mécanisme vertueux dans
lequel une partie des revenus de la diffusion des programmes, y compris
les productions des grands studios américains, est prélevée et recyclée
pour financer la production de nouvelles oeuvres originales françaises et
européennes, par nature plus difficiles, qui viendront à leur tour
alimenter les circuits de diffusion, favorisant ainsi le renouvellement de
la création et la diversité des talents. La règle de base est très simple et
très efficace : l’aval finance l’amont, la distribution finance la
création
. »
50
Partant de ce postulat, le CNC déduit de la croissance de la
demande économique dans les secteurs de l’image la nécessité d’une
augmentation des soutiens publics à due concurrence : «
Quand le chiffre
d’affaires de la diffusion augmente […], le produit des taxes prélevées
sur le secteur progresse également et les soutiens peuvent véritablement
accompagner
la
croissance
économique
en
nourrissant
les
investissements de l’ensemble de la chaîne de valeur
». Il fait valoir qu’il
existe une corrélation exacte entre le dynamisme de l’activité
cinématographique et audiovisuelle d’un pays et le niveau des apports en
financement public nationaux. Il en conclut qu’à défaut d’un maintien de
ce lien direct entre l’évolution économique du secteur de la diffusion et le
montant des taxes qui y sont prélevées, il existe un risque de
développement d’une présence encore plus forte des oeuvres américaines
sur les écrans, seules disponibles en quantité suffisante pour satisfaire la
demande, ou, à la télévision, de contenus perçus comme moins riches
culturellement (programmes de flux ou rediffusions). Dès lors qu’on s’en
tient à cette logique, l’augmentation des dépenses n’a pas à se justifier
50
Le ministère de la culture et de la communication adopte le même raisonnement en
considérant que l’élargissement de la TST aux fournisseurs d’accès à Internet
distribuant des services de télévision «
vise à conforter le principe essentiel de notre
politique de diversité culturelle : la taxation des opérateurs utilisant la diffusion
d’oeuvres des industries culturelles (« aval ») pour financer la création de ces oeuvres
(« amont »).
» Il indique également que «
l’adéquation entre le dynamisme des taxes
affectées et celui de l’économie des acteurs du secteur est l’élément fondamental du
succès de la politique mise en oeuvre par le CNC
. »
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autrement que par l’augmentation des recettes, directement liée à la
croissance économique du secteur de l’image.
Le CNC estime à cet égard que les dépenses des ménages en
programmes audiovisuels ont «
plus que doublé (+106,6 %) au cours de
la dernière décennie
»
51
et que «
la progression des taxes affectées au
fonds de soutien constatée au cours des années 2000 n’a, par conséquent,
rien d’excessif. Elle induit même en pratique un relatif décrochage (d’un
peu plus d’un tiers) entre le produit des taxes et la croissance du marché
de la diffusion
. » L’établissement considère donc que «
la contrainte
budgétaire de l’État, qui s’applique bien sûr au titre de la bonne gestion
des deniers publics aux dépenses de gestion du CNC, n’a pas vocation à
s’appliquer aux dépenses de soutien, sauf à vouloir introduire dans des
secteurs en croissance un effet récessif parfaitement exogène
. »
L’évolution mentionnée par le CNC au cours de la période 2000-
2010 est néanmoins contestable, dès lors que l’appréciation de la
demande des ménages en programmes audiovisuels sur Internet, qui
constitue l’élément le plus dynamique, se fonde sur l’assiette de TST
« distributeurs »
déclarée
par
les
opérateurs
de
communications
électroniques auprès du CNC, assiette dont le présent rapport a montré
qu’elle ne correspondait pas à une quantification précise de l’usage
« audiovisuel » d’Internet. Pour sa part, la Cour a pu observer, lors de ses
derniers contrôles du CNC, que le budget de l’établissement connaît un
quasi-doublement tous les dix ans depuis 1988, cette forte progression
étant plus ou moins corrélée à l’augmentation des dépenses des ménages
en programmes audiovisuels
52
.
51
Le CNC se réfère aux chiffres d’affaires annuels des entrées en salles de cinéma, de
la consommation payante de vidéo physique et de vidéo à la demande, des
abonnements de services de télévision distribués directement par les éditeurs et les
opérateurs d’accès.
52
A titre d’exemple, au cours de la période 1988-2000, le budget du CNC est passé de
224 M€ à 480 M€ (soit une augmentation de 114 %), les dépenses des ménages en
programmes audiovisuels enregistrant, au cours de la même période, une progression
de 135 %.
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Tableau n° 19 : Evolution des dépenses des ménages en
programmes audiovisuels (en milliers d’euros)
1988
2001
2010
ABONNEMENTS TV
660
2 691
3 288
VIDEO PHYSIQUE
626
1 245
1 402
VIDEO A LA DEMANDE
0
0
136
CINEMA
554
1 021
1 305
SERVICES DE TELEVISION
DISTRIBUES PAR INTERNET
0
0
4 114
Total
1 840
4 957
10 244
Source : CNC. Les données 2010 concernant les services de
télévision distribués par Internet correspondent à l’assiette
de la TST « distributeurs ».
Plus généralement, le postulat dont le CNC se prévaut pour
justifier l’augmentation continue et non limitée de ses recettes prête à
discussion. En effet :
−
il n’est pas prouvé qu’il existe une relation directe entre la
croissance de la demande économique à laquelle il se réfère et
celle du domaine d’activités qu’il contribue à soutenir ;
−
la nécessité de corréler la dépense publique à la croissance du
secteur de l’image n’est pas démontrée par le CNC, hormis par
une référence à la situation de concurrence internationale (le
volume de soutien est considéré par l’établissement comme
adéquat pour préserver les parts de marché de la France) ;
−
l’ensemble des soutiens publics en faveur du secteur du cinéma
et de l’audiovisuel dépassant largement le spectre des aides du
CNC
53
, l’impact de ce qui pourrait être une croissance plus
modérée de ces dernières doit sans doute être relativisé.
Dès lors que, dans la configuration actuelle, le pilotage par les
recettes constitue, à l’évidence, le point de départ de la stratégie
budgétaire du CNC, cette question n’est en rien théorique. Car même si le
ministère de la culture et de la communication affirme pour sa part que
c’est à partir des besoins de dépenses «
qu’il est possible de déterminer le
niveau et la dynamique nécessaires des recettes
», force est de constater
53
On rappellera qu’à lui seul, le montant total des investissements des chaînes dans la
production audiovisuelle et cinématographique est supérieur à 1,2 milliard d’euros en
2011. La part de financement du CNC par rapport à celui des chaînes de télévision est
néanmoins variable selon les genres (de 14 % pour les fictions à 81 % pour la
captation de spectacle vivant en 2010).
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que le modèle correspondant de pilotage par la dépense, et donc la
définition de priorités parmi les besoins identifiés, ne s’est pas encore
imposé à l’établissement.
La systématisation d’une démarche d’évaluation de la performance
des aides paraît seule à même d’établir le bien-fondé économique et
financier des interventions de l’établissement.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Les aides du CNC au secteur cinématographique et audiovisuel
ont crû de 23 % entre 2007 et 2011, passant de 468 à 575 M€. Elles sont
allouées à parts égales selon des mécanismes automatiques et sélectifs.
Une partie d’entre elles (77 M€ en 2001) est versée au titre de
conventions
annuelles
ou
pluriannuelles,
principalement
à
des
associations,
organismes
spécifiques,
collectivités
territoriales
et
programmes européens. Enfin, le CNC a déployé ces dernières années un
plan d’investissement spécifique en faveur de la numérisation des salles
et des oeuvres du patrimoine cinématographique.
Cette extension importante du champ aidé par le CNC est
présentée par l’établissement comme le nécessaire accompagnement d’un
secteur économique qui connaît une forte croissance, estimée à l’aune de
la consommation d’image par les ménages sur des supports toujours plus
variés.
La Cour met cependant en évidence les limites de ce raisonnement
économique. Elle souligne également les résultats mitigés de la politique
menée : la croissance du nombre de films produits chaque année masque
des difficultés d’exposition en salles pour un nombre toujours plus
important d’oeuvres cinématographiques. Dans le domaine audiovisuel, le
dispositif de soutien français, unique en Europe, est loin d’atteindre les
objectifs fixés.
Plus largement, la Cour met en avant les faiblesses de la démarche
d’évaluation conduite par le CNC quant à la performance de ces
dispositifs d’aide. Dans ce contexte, la Cour signale le risque d’une
sédimentation croissante de mécanismes de soutien dont l’efficacité et
l’efficience sont insuffisamment mesurées.
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La Cour formule la recommandation suivante :
2. élaborer une méthode d’analyse de l’efficacité et de l’efficience
des dispositifs d’aide mis en oeuvre au regard, d’une part, des soutiens
déjà existants et, d’autre part, des objectifs fixés au CNC par ses tutelles
et par le Parlement.
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Chapitre III
La gestion interne est globalement
maîtrisée, mais la formalisation des
outils de suivi et de pilotage reste
perfectible
Le suivi des charges de fonctionnement interne du CNC a été
grandement facilité par la mise en oeuvre en 2007 d’une réforme
budgétaire et comptable de grande envergure, qui permet désormais leur
identification quasi immédiate. Ces dépenses gagneraient cependant à être
suivies plus finement, en particulier sous l’angle de la performance de
gestion de l’établissement (I). Dans le détail, la gestion des ressources
humaines de l’établissement (II) et celle de son patrimoine immobilier
(III) peuvent vraisemblablement être davantage maîtrisées.
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I
-
Les frais de fonctionnement interne
A - Une enveloppe délicate à isoler
L’enquête conduite en 2011 par le ministère de la culture et de la
communication fait ressortir, en première approche, que le CNC se
caractérise par le poids important de ses fonctions support, qui
représentent plus de 36 % du total des emplois de l’établissement. A titre
de comparaison, le poids moyen de ces fonctions pour l’ensemble des
opérateurs du ministère de la culture est évalué à 22 %. Cette situation
particulière du CNC peut néanmoins s’expliquer par les prérogatives
d’administration centrale qui lui sont dévolues et par l’importance que
revêt, en termes de gestion, son activité d’octroi d’aides.
La présentation des dépenses de fonctionnement
Les charges de fonctionnement interne n’apparaissent pas en lecture
directe dans les comptes du CNC. Néanmoins, depuis la réforme budgétaire
et comptable de l’établissement (2007), elles sont reconstituées en annexe de
chaque décision budgétaire et dans la présentation du compte financier.
Cette évolution permet à l’établissement de se rapprocher du respect
de la circulaire budgétaire annuelle, selon laquelle l’unité de spécialité des
crédits est l’enveloppe (personnel, fonctionnement, investissement, et
éventuellement intervention) votée par le conseil d’administration
54
. Le
règlement financier du CNC prévoit à ce titre un principe de «
fongibilité
limitée des crédits
» entre les trois catégories de dépenses enregistrées au
compte d’activité : dépenses de soutien, crédits destinés au fonctionnement
interne de l’établissement, concours budgétaires affectés. En l’absence de
comptabilité analytique, il est cependant encore impossible de déterminer
précisément la répartition d’une partie des crédits.
54
Circulaire relative au cadre budgétaire et comptable des opérateurs de l’État et des
établissements publics nationaux pour 2012, p. 10.
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Tableau n° 20 :
Charges de fonctionnement interne du CNC
(2007-2011), en millions d’euros
2007
2008
2009
2010
2011
2011/2007
Charges du
compte d’activité
avant
retraitement
510,3
549,7
558,0
576,1
641,4
+ 26 %
dont dépenses de
soutien
456,0
492,5
505,5
524,3
588,2
+ 29 %
dont concours
budgétaires
affectés
17,7
16,1
12,8
11,7
14,8
- 16 %
Charges de
fonctionnement
interne
36,6
41,1
39,7
40,1
38,3
+ 5 %
Source : données CNC.
Pour assurer leur homogénéité, ces données n’incluent pas les dotations aux
provisions et aux amortissements.
Outre les dépenses de personnel, ces dépenses incluent le
fonctionnement courant, le remboursement des intérêts d’emprunt, les
frais liés à l’acquisition du bâtiment sis 11 rue Galilée et des
amortissements. A l’exception des dépenses de personnel (+ 12 % entre
2007 et 2011, soit 28,4 M€ en 2011) et des frais de réception (
cf.
encadré
infra
), ces dépenses augmentent peu depuis 2007.
Le périmètre choisi pour ces dépenses liées au seul fonctionnement
interne du CNC pourrait toutefois être affiné : l’enveloppe regroupant les
dépenses de soutien inclut ainsi l’ensemble des crédits se rapportant aux
Archives françaises du film (AFF), dont une partie correspond de fait à
des dépenses de fonctionnement interne. S’il est malaisé de les distinguer
dans la gestion quotidienne, on peut néanmoins concevoir, dans une
optique de comptabilité analytique, qu’un pourcentage des dépenses
relatives aux AFF soit considéré comme relevant des crédits liés à la
gestion du CNC, par exemple au prorata du nombre d’agents y travaillant
(81 agents sur les 497 que comptait l’établissement en 2010, soit 16,3 %).
Par ailleurs, compte tenu de leur objet, une fraction des dépenses
d’investissement mériterait d’être suivie au même titre (remboursement
du capital de l’emprunt pour l’acquisition du 11 rue Galilée,
immobilisations
incorporelles
et
corporelles
en
lien
avec
le
fonctionnement interne de l’établissement, etc.). Elles représentent, si
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l’on exclut l’achat du 11 rue Galilée en 2010 pour 22 M€, une dépense
moyenne de 2,5 M€ par an entre 2007 et 2011.
Les frais de réception du CNC
Les frais de réception du CNC s’élèvent à 618 000 € en 2011, soit
une progression de 102 % depuis 2001 et de 13 % depuis 2007.
D’après le CNC, ils couvrent pour 40 % en moyenne les buffets,
plateaux repas et cocktails destinés aux membres des commissions, dont le
nombre a progressé de 42 % depuis 2001. L’activité de certaines
commissions, à l’instar de la commission de classification (dont les charges
de fonctionnement ont augmenté de 60 % depuis 2006), dépend de l’activité
même du secteur.
Les frais de réception se résument, pour 80 % en 2010, aux
prestations de quatre fournisseurs en vertu d’un marché à bon de commandes
notifié fin 2008. Les voeux annuels au personnel et aux professionnels du
cinéma et de l’audiovisuel y tiennent également une place importante. Les
voeux 2009, qui ont eu lieu à la Cité de l’architecture et du patrimoine, ont
ainsi coûté 130 781 € à l’établissement, soit 16,5 % des frais de réception de
l’année. Les voeux 2010, dans les locaux de la Cinémathèque française, ont
coûté 98 020 €, soit 16 % des frais de réception de l’année.
Le CNC fait valoir que le développement prévu des outils de
contrôle interne et de contrôle de gestion devrait fournir «
des moyens
spécifiques pour accroître la maîtrise de ces dépenses
. » Par ailleurs,
l’arrivée à échéance en 2012 du marché portant sur la majorité des prestations
de réception va permettre une nouvelle mise en concurrence, qui «
devrait
également être favorable à l’obtention de meilleures conditions pour les
prestations commandées au titre des différents événements
. »
B - La mesure de la performance de gestion de
l’établissement
Si l’évolution du taux de prélèvement sur les taxes affectées au
CNC concentre l’attention des professionnels,
notamment lors des
réunions de la commission d’examen du compte de soutien, elle n’est pas
l’indicateur le plus pertinent pour mesurer la performance de gestion de
l’établissement, dans la mesure où elle ne prend pas en compte
l’ensemble de ses ressources propres et où elle n’est pas mise en relation
avec son activité. A l’avenir, il apparaît souhaitable que l’établissement se
dote d’un indicateur de suivi qui permette d’apprécier plus finement sa
performance de gestion. Une telle démarche impliquerait de s’appuyer sur
une logique de comptabilité analytique pour mieux distinguer les coûts de
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fonctionnement interne de ceux qui sont rattachables à des dépenses de
soutien.
On peut établir une mesure
minimale
de l’efficience du CNC sur
ce plan, à travers le rapport entre les crédits liés au fonctionnement
interne de l’établissement et les montants alloués aux soutiens (sans
oublier que l’activité du CNC ne se limite pas au seul versement d’aides)
et le rapport entre les crédits de fonctionnement interne et l’ensemble des
charges inscrites au compte d’activité. De ce point de vue, sous réserve
des effets dus à l’acquisition de l’immeuble au 11 rue Galilée en 2010 et
aux changements de périmètre intervenus en particulier en 2011, la
performance de gestion de l’établissement semble s’améliorer sur la
période.
Tableau n° 21 : Indicateurs de la performance de gestion du CNC
de 2007 à 2011 (en M€)
2007
2008
2009
2010
2011
2011/2007
Charges de
fonctionnement
interne (A)
37,9
43,0
41,5
66,9
40,9
+ 8 %
Dépenses
d’intervention (B)
532,5
580,0
619,4
634,8
665,0
+ 25 %
Ratio 1 = A/B
7,1 %
7,4 %
6,7 %
10,5 %
6,1 %
- 14 %
Charges de
fonctionnement
interne (A)
37,9
43,0
41,5
66,9
40,9
+ 8 %
Charges du
compte d’activité
(C)
510,3
549,7
558,0
576,1
641,4
+ 26 %
Ratio 2 = A/C
7,4 %
7,8 %
7,4%
11,6 %
6,4 %
- 14 %
Source : Cour des comptes d’après données CNC (comptes financiers et note
de présentation du compte financier 2011). Pour assurer leur homogénéité, ces
données n’incluent pas les dotations aux provisions et aux amortissements. En
revanche, à la différence du tableau n° 20, les charges de fonctionnement
interne et d’intervention incluent les dépenses d’investissement liées à la
gestion du Centre et celles liées au versement d’avances.
L’interprétation de tels ratios demanderait à être nuancée en tenant compte du
fait que les versements d’aides d’une année se doublent aussi d’engagements
financiers, dont le paiement peut intervenir ultérieurement.
Le CNC a indiqué à la Cour qu’il envisageait la définition
d’indicateurs de ce type dans le cadre de la mise en place d’un contrôle
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interne et d’un contrôle de gestion. Il dit assurer d’ores et déjà en interne
le suivi d’un indicateur : la part relative, au sein de son budget total, des
dépenses liées aux activités de soutien et des dépenses liées au
fonctionnement interne de l’établissement. L’existence et l’évolution d’un
tel indicateur gagneraient à être plus largement communiquées dès 2012,
comme s’y engage l’établissement.
Le CNC indique également que l’objectif à terme est de doter
l’établissement d’une véritable comptabilité analytique.
Dans
ce
contexte,
l’absence
de
comptabilité
analytique,
prolongement naturel de la réforme comptable, est un frein à l’évaluation
de la performance de gestion de l’établissement, tant pour son organe
délibérant que pour les tutelles et le Parlement.
C - Un prélèvement rigide pour frais de gestion
Historiquement, le CNC finance ses frais de fonctionnement
interne par un prélèvement opéré sur les taxes qui lui sont affectées,
auquel s’ajoutait jusqu’en 2008
la subvention spécifique qui lui était
accordée par le ministère de la culture et de la communication. Sous
l’empire du compte de soutien, ces prélèvements apparaissaient
distinctement dans les comptes de l’établissement, en recettes ou en
dépenses. La modification de la nomenclature du compte d’affectation
spéciale dans le cadre de la LOLF et la mise en oeuvre des
recommandations de la Cour lors de son précédent contrôle (en particulier
la création d’un budget unique), ont conduit l’établissement à ne plus
faire apparaître dans ses états financiers le prélèvement pour frais de
gestion. Le montant du prélèvement, exprimé en pourcentage des taxes
prélevées, continue néanmoins à faire l’objet d’une discussion au moment
du vote du budget primitif. Il figure également dans le document de
performance transmis au Parlement.
Les montants prélevés par le CNC sur les taxes affectées au titre du
financement de ses frais de gestion ont augmenté de 73 % depuis 2007.
Cette progression doit être rapportée à l’augmentation de 60 % du produit
de ces taxes sur la même période. Ainsi, en 2011, le CNC a prélevé près
de 42 M€ sur les taxes affectées pour assurer le financement de son
fonctionnement.
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Ce prélèvement ne représente cependant qu’une partie de ses
produits de fonctionnement. Outre les cotisations professionnelles déjà
évoquées, le CNC prélève également, par exemple, des frais de gestion
sur les concours budgétaires affectés par d’autres administrations pour la
réalisation de projets cofinancés (374 029 € en 2011 sur une enveloppe de
14,8 M€, soit un pourcentage de 2,5 %
55
). A l’instar des autres recettes
comptabilisées parmi les ressources propres de l’établissement, ces
crédits n’apparaissent pas en lecture directe dans les documents destinés à
l’information du Parlement.
Tableau n° 22 : Produits de fonctionnement du CNC entre 2007 et 2011,
en millions d’euros
2007
2008
2009 2010 2011 2011/2007
Frais de gestion prélevés sur les taxes
affectées
24,3
26,4
27,0
32,2
42,0
+ 73 %
Subvention de fonctionnement du
ministère de la culture
2,1
-
-
-
-
n. s.
Ressources propres
16,2
14,6
14,4
16,2
18,9
+ 17 %
dont cotisations professionnelles
8,6
6,6
7,0
9,6
8,9
+ 3 %
dont inscriptions au RPCA
2,6
3,1
2,6
3,1
3,1
+ 21 %
dont revenus financiers
3,7
3,6
4,1
2,3
6,2
+ 66 %
dont frais de gestion sur les concours
budgétaires affectés
0,6
0,4
0,4
0,4
0,4
- 33 %
dont autres produits d’exploitation
0,7
1,0
0,3
0,7
0,3
- 53 %
dont régularisations Unedic et charges
à payer
0,03
0,02
0,04
0,01
0,01
- 80 %
Emprunt lié à l’acquisition du 11 rue
Galilée
-
-
-
22
-
n. s.
TOTAL
42,6
41,1
41,4
70,4
60,9
+ 43 %
TOTAL hors emprunt
42,6
41,1
41,4
48,4
60,9
+ 43 %
Source : Cour des comptes, d’après données CNC (notes de présentation des
comptes financiers).
55
Conformément à l’instruction budgétaire et comptable M91, qui prévoit (2.3.3 du
chapitre 4 du titre 4, tome 1) que «
l’établissement public peut, en accord avec le
bailleur de fonds, prélever des frais de gestion sur les conventions de ressources
affectées
».
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Soumis à l’approbation du conseil d’administration, le taux de
prélèvement pour frais de gestion est en réalité déterminé par le calcul, en
valeur absolue, du montant estimé des besoins correspondants, rapporté à
la prévision de recettes des taxes affectées au CNC. Au cours des années
récentes, le taux de prélèvement réel a donc été systématiquement
inférieur au taux prévisionnel, ce qui s’explique par l’enregistrement de
plus-values de recettes non anticipées. En revanche, considéré en valeur
relative par rapport au montant effectif de taxes prélevées, il apparaît en
très légère hausse depuis 2007.
Tableau n° 23 : Ecart entre le taux de prélèvement pour frais de
gestion en prévision et en exécution de 2007 à 2011 (montants en
millions d’euros)
2007
2008
2009
2010
2011
2011/2007
Pourcentage
prévisionnel de frais
de gestion
4,8 %
5,0 %
5,0 %
5,6 %
5,6 %
+ 17 %
Montant prévisionnel
de taxes
505,6
528,5
540,6
575,9
750,0
+ 48 %
Montant prévisionnel
de frais de gestion
24,2
26,4
27,0
32,2
42,0
+ 73 %
Produit des taxes en
exécution
512,6
533,6
612,0
764,1
817,9
+ 60 %
Frais de gestion
prélevés
24,2
26,4
27,0
32,2
42,0
+ 73 %
Taux effectif de
prélèvement
4,7 %
5,0 %
4,4 %
4,3 %
5,1 %
+ 8 %
Source : données CNC (budgets primitifs et comptes financiers).
Pour justifier l’augmentation ou le maintien du prélèvement sur les
taxes, le CNC invoque la nécessité de couvrir la suppression de la
subvention de fonctionnement du ministère de la culture en 2008, le
transfert du recouvrement de la TSA au 1
er
janvier 2007 puis de la TST au
1
er
janvier 2010
56
, la mise en oeuvre de nouveaux dispositifs de soutien,
56
Comité financier du 26/11/2009 : «
Il est procédé, en 2010, à un relèvement du taux
de frais de gestion prélevés par le CNC sur les recettes des taxes du compte de
soutien. Cette augmentation (le taux passant de 5 % à 5,6 %) est destinée d’une part à
couvrir les charges liées au
recouvrement de
la TST, d’autre part, à sécuriser les
ressources de fonctionnement du Centre, dans un contexte de forte décrue du
rendement du placement de la trésorerie. Au total, le relèvement de 0,6 point du taux
de frais de gestion prélevés sur le compte de soutien représente un gain de ressources
pour la gestion du CNC de 3,45 M€, à mettre au regard des 6 M€ d’économies de
frais de collecte DGFIP sur le recouvrement de la TST
».
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enfin la suppression prévue (mais finalement non advenue) des
cotisations professionnelles en 2011. Compte tenu du maintien de cette
ressource, le conseil d’administration du 24 novembre 2011 a accepté,
lors de l’adoption du budget primitif pour 2012, une baisse du
prélèvement sur les taxes, dont le taux passe de 5,6 à 5 %
57
.
Cette modalité de fixation du montant de prélèvement pour frais de
gestion paraît singulièrement rigide : l’enveloppe prévue n’est jamais
revue en cours de gestion. Or, en 2011, la rentabilité des placements de la
trésorerie du CNC a atteint un niveau plus favorable qu’initialement
prévu en budget primitif (6,2 M€ au lieu de 2,2 M€). Cette plus-value a
été constatée en décision modificative
58
, à l’instar d’autres plus-values
enregistrées sur le poste des cotisations professionnelles ou des
inscriptions au registre public du cinéma et de l’audiovisuel.
Ces évolutions n’ont pas pour autant donné lieu à une modification
du volume de crédits prélevés sur les taxes affectées. Il en est résulté un
écart, important en 2011, entre produits de fonctionnement (60,9 M€) et
charges de fonctionnement (38,3 M€), d’ailleurs jugé atypique par le
CNC. Comme en 2010, le différentiel a été pour l’essentiel reversé à la
réserve pour projet immobilier, alors qu’il aurait pu l’être au budget
général de l’État. Dans ces conditions, l’établissement gagnerait à fixer,
au stade du budget prévisionnel, une enveloppe globale de charges de
fonctionnement interne, et à adapter en conséquence, en exécution, le
montant des frais de gestion prélevés sur les taxes affectées.
57
«
Les prévisions de ressources propres s’établissent pour 2012 à 14,74 M€, en
progression de 9,49 M€ (soit + 180 %) par rapport au budget primitif 2011. Cette
forte augmentation s’explique par l’inscription au budget primitif 2012 d’une
prévision de produit des cotisations professionnelles, alors que le budget primitif
2011 reposait sur une hypothèse de suppression de ces cotisations. Ce niveau de
ressources propres permet de réduire le prélèvement pour frais de gestion sur le
produit des taxes (5 % au lieu de 5,6 %) au bénéfice des soutiens
».
58
Deuxième décision modificative du 7 juillet 2011.
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II
-
Une gestion des ressources humaines
globalement maîtrisée, malgré l’augmentation de la
masse salariale et du coût des commissions d’aides
A -
L’évolution des emplois et de la masse salariale
1 -
L’évolution des effectifs du CNC au cours de la période sous
revue est marquée par une relative stabilité
Avec 14 agents de moins en 2010 qu’en 2001, les effectifs du CNC
exprimés en personnes physiques ont connu une diminution modeste de
2,7 % au cours de la décennie. Cette évolution combine en réalité une
légère augmentation (7,3 %) des effectifs « indiciés » (c’est-à-dire des
agents dont la rémunération est corrélée avec l’indice de la fonction
publique) et une forte baisse (- 63,9 %) des agents « non indiciés ».
Tableau n° 24 : Evolution des effectifs du CNC (2001-2010) en
personnes physiques
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2010/2001
Contractuels
309
311
319
355
350
361
379
390
394
399
29,1 %
Fonctionnaires
130
138
136
101
104
97
91
83
78
72
-44,6 %
Total des agents
indiciés
439
449
455
456
454
458
470
473
472
471
7,3 %
Collaborateurs
extérieurs
10
11
10
2
2
2
3
1
2
1
-90,0 %
Mis à disposition
14
12
11
13
10
12
12
10
9
9
-35,7 %
Vacataires
48
34
19
25
27
30
21
21
23
16
-66,7 %
Total des agents non
indiciés
72
57
40
40
39
44
36
32
34
26
-63,9 %
Total général
511
506
495
496
493
502
506
505
506
497
-2,7 %
Source : Cour des comptes d’après données CNC ; les effectifs en personnes physiques sont comptabilisés au
31 mars de chaque année jusqu’en 2004 et au 31 décembre à partir de 2005.
Exprimés en équivalents temps plein (ETP), les effectifs du CNC
ont progressé de 0,4 % entre 2007 et 2011, l’établissement ayant toujours
respecté son plafond d’emplois.
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Tableau n° 25 : Evolution des effectifs du CNC (2005-2010) en ETP
au 31 décembre
2007
2008
2009
2010
2011
2011/2007
Contractuels (CDI, CDD,
agents titulaires sur contrat
de détachement)
368,6
380,1
383,8
388,1
391,8
6,3 %
Fonctionnaires titulaires
affectés par le MCC
87,2
80,5
75,8
70,2
66 - 24,3 %
Total des agents indiciés
455,8
460,6
459,6
458,3
457,8
0,4 %
Plafond d’emplois du CNC
467
467
463
460
458
462
Part des contractuels dans les
emplois indiciés
80,9 %
82,9 %
83,5 %
84,7 %
85,6 %
-
Source : Cour des comptes d’après données CNC ; les plafonds d’emplois
comprennent les abondements respectifs de 9 ETP (en 2007) et 6 ETP (en 2012)
corollaires du transfert du recouvrement de la TSA et de la TST à
l’établissement.
En 2011, 85,6 % des emplois permanents de l’établissement sont
pourvus par des agents contractuels. L’établissement explique cette
situation par le nombre peu élevé de candidatures proposées par des
fonctionnaires en cas de vacance de poste.
Depuis 2009, le CNC applique la règle de non remplacement d’un
départ à la retraite sur deux, celle-ci se traduisant par l’évolution à la
baisse de son plafond d’emplois (hors modifications de périmètre liées au
transfert d’ETP en provenance de la direction générale des finances
publiques pour assurer les missions de recouvrement des taxes affectées
au CNC).
L’établissement indique avoir procédé à plusieurs redéploiements
de postes au cours de la période sous revue, dont une partie découle de
l’application de la règle de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux
partant à la retraite.
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2 -
L’augmentation sensible de la masse salariale
Les charges de personnel du CNC, qui ont atteint 28,4 M€ en
2011, ont connu une progression modérée entre 2007 et 2011 (+ 11,8 %).
En revanche leur augmentation apparaît plus significative sur une période
plus longue : au cours de la dernière décennie, la masse salariale de
l’établissement est ainsi passée de 21,1 M€ en 2001 à 28,4 M€ en 2011,
progressant de 34,7 %, soit près de deux fois plus vite que les aides
versées par le centre au cours de la même période (celles-ci ayant connu
une augmentation de 20 %).
Le CNC estime que «
cette comparaison n’est pas pertinente (car)
les actions mises en oeuvre par les agents du CNC ne se limitent pas à la
seule gestion des aides financières mais comprennent notamment la
réglementation du secteur, le recouvrement et le contrôle fiscal, le
contrôle de la réglementation (contrôle des recettes…), les activités
patrimoniales
(à
titre
illustratif,
la
direction
du
patrimoine
cinématographique compte 74,3 ETP au 31 décembre 2011)
».
De fait, un tel ratio ne saurait être invoqué isolément pour
apprécier l’efficience de la gestion des aides du CNC. Il témoigne, en
revanche, de la nécessité, pour l’établissement, d’affiner la justification
de ses dépenses de fonctionnement et de se mettre en mesure de les
rapporter à l’évolution de ses missions, les informations correspondantes
ayant vocation à figurer dans le document de performance. Outre
l’augmentation significative des cotisations sociales, le CNC explique la
progression de ses dépenses de personnel sur la période 2001-2010 par :
−
l’évolution des missions de l’établissement et, corrélativement,
le nombre de postes physiques des agents indiciés, contractuels
et fonctionnaires affectés ou détachés qui a augmenté de 7,3 %
de 2001 à 2010, passant de 439 à 471. Cette évolution génère
un surcoût global en année pleine de 1,12 M€ ;
−
le cumul du glissement vieillesse-technicité (GVT) sur la
période 2001 à 2010 est évalué à 550 000 €, soit un surcoût
global estimé sur les traitements bruts de l’année 2010 de
1,1 M€ compte tenu du fait que les promotions interviennent le
plus souvent en milieu d’année ;
−
la hausse de la valeur du point, qui représente, à périmètre
constant, un impact de 700 000 € sur la période ;
−
les campagnes de requalifications qui ont engendré un coût
estimé de 384 000 € sur la période ;
−
la comptabilisation en dépenses de personnel, à compter de
2008, de l’indemnité versée aux membres des commissions et
le versement de l’ensemble des cotisations et taxes y afférent
(surcoût de 300 000 €) ;
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−
la mise en application du statut des agents du CNC qui a été à
l’origine d’une augmentation de 190 000 € entre 2007 et 2008 ;
−
divers mouvements et ajustements ont eu une incidence de
258 000 € le montant des traitements bruts sur la période.
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Tableau n° 26 : Charges de personnel du CNC entre 2001 et 2011, en milliers d’euros
2001
2007
2008
2009
2010
2011
2011/
2007
2011/
2001
Traitement du personnel permanent
9 628 12 469 12 831 12 917
13 005
13 303
6,7%
38,2%
Indemnité de résidence
287
381
393
397
396
408
7,1%
42,4%
Primes et indemnités diverses
2 904
2 876
3 105
3 150
3 128
3 091
7,5%
6,4%
Frais du personnel permanent
177
168
167
172
183
175
3,9%
-1,1%
Supplément familial de traitement
84
119
125
120
123
128
7,1%
51,8%
Indemnités de licenciement et allocations pour perte d'emploi
114
85
103
100
65
100
17,9%
-12,2%
Rémunérations du personnel permanent
13 195
16 098
16 724
16 856
16 899
17 204
6,9%
30,4%
Rémunérations du personnel sur crédits
246
Charges sociales
4 752
5 792
6 636
6 924
6 793
6 988
20,6%
47,1%
Rémunérations diverses (vacation, stagiaire, forfaitaire)
1 065
1 012
1 142
1 268
1 216
1 260
24,5%
18,2%
OEuvres sociales et restauration
316
428
475
510
535
555
29,7%
75,6%
Formation professionnelle
3
-100%
Total des rémunérations brutes du personnel
19 577
23 330
24 978
25 557
25 444
26 007
11,5%
32,8%
Impôts et taxes sur les rémunérations
1 553
2 129
2 290
2 388
2 408
2 457
15,4%
58,2%
Total des charges de personnel
21 131
25 459
27 268
27 945
27 852
28 464
11,8%
34,7%
Source : Cour des comptes, d’après CNC (comptes financiers). Les charges relatives à l’indemnisation des membres
des commissions, qui n’étaient pas comptabilisées en charges de personnel jusqu’en 2007, ont été réintégrées dans
ce tableau par souci d’homogénéité, à la ligne « rémunérations diverses ».
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Au cours de la dernière décennie, le profil des agents du CNC a
fortement évolué dans le sens d’une plus grande qualification. Alors
qu’en 2003, les agents de catégorie C représentaient 35 % des postes, ils
n’en constituaient plus que 24 % en 2009.
Tableau n° 27 : Evolution de la structure des
postes du CNC, en personnes physiques
Catégorie
2003
2008
2009
A
Nombre de postes
159
232
232
%
34,9%
49%
49,2%
B
Nombre de postes
139
120
126
%
30,5% 25,4% 26,7%
C
Nombre de postes
157
121
114
%
34,5% 25,6% 24,2%
Source : CNC.
Le CNC indique que cette situation est liée à l’évolution générale
des secteurs du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia, à l’émergence
de nouveaux acteurs et à la convergence des moyens de diffusion et de
production, lesquelles exigent un niveau de technicité accrue pour gérer la
réglementation et les soutiens de ces secteurs. L’élévation souhaitée du
niveau général de qualification des agents s’est traduite par plusieurs
vagues de requalification de postes, dans le cadre d’un plan lancé en
2003. Ainsi, aux 115 postes requalifiés entre 2003 et 2005 se sont ajoutés
51 nouvelles requalifications entre 2006 et 2011. Au total, ce sont près de
170 requalifications, représentant près de 36 % des postes (sur la base des
effectifs 2011 exprimés en ETP), qui ont eu lieu au cours de la dernière
décennie.
Imputable en grande partie à la progression des traitements,
l’augmentation de la masse salariale du CNC au cours de la dernière
décennie relève donc d’une dynamique structurelle liée à l’évolution des
postes.
Les
nombreuses
requalifications
auxquelles
a
procédé
l’établissement constituent dès lors un facteur de rigidité de la masse
salariale pour les années à venir, qu’il conviendra d’encadrer pour
maîtriser la hausse des dépenses de personnel. A cet égard, le travail de
référencement des postes entrepris sous la forme d’une cartographie des
métiers devra être mené à bien et étendu à l’ensemble des postes de
l’établissement. Le CNC a par ailleurs indiqué que le renforcement de la
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démarche métier en 2011 «
avec la généralisation de l’entretien
professionnel, sera poursuivi avec l’établissement d’un référentiel métier
cohérent avec celui du ministère de la culture.
»
B - La situation particulière des membres des
commissions
Le décret n° 2008-267 du 18 mars 2008
59
a conféré aux membres
des commissions et comités de lecture attribuant les aides sélectives du
CNC un statut de collaborateurs occasionnels du service public.
A ce titre, ces personnels, indemnisés « à la tâche » par le CNC au
titre de leur participation aux commissions n’ont pas vocation à être
comptabilisés sous le plafond d’emplois de l’établissement. Les effectifs
correspondant ne sont pas suivis dans un document formalisé, alors même
qu’ils ont pourtant augmenté de manière substantielle entre 2007 et 2011
(+ 36,9 %).
Tableau n° 28 : Evolution des effectifs des membres des
commissions entre 2007 et 2011, en personnes
physiques
2007
2008 2009 2010
2011
2011/2007
479
536
560
636
656
36,9%
Source : CNC, service du personnel.
Le décompte des seuls commissaires délibérant sur la décision
d’attribution des aides (qui représentaient 389 personnes sur les 636
membres de commissions comptabilisés en 2010, l’écart correspondant
aux lecteurs qui apportent une observation critique sur les dossiers de
demande d’aides sans pour autant participer au délibéré) représenterait
ainsi, en première analyse, une quinzaine d’équivalents temps plein
travaillé (ETPT).
59
Décret n° 2008-267 du 18 mars 2008.
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Tableau n° 29 : Estimation des effectifs de commissaires
participant aux commissions d’aides du CNC en 2010, en ETPT
Nombre de commissaires
389
Nombre total de demi-journées indemnisées
6 152
Nombre de journées indemnisées
(1)
3 076
Nombre de jours travaillés par semaine
5
Nombre de semaines par an
52
Nombre de jours de congés et RTT
44
Temps de travail théorique d'un ETPT (en jours)
(2)
216
ETPT théoriques commissaires
(1)/(2)
14,24
Source : Cour des comptes, d’après CNC, annexe à la décision 4-1458 du 4
février 2010.
Le CNC a indiqué suivre avec attention cette dépense et ne voir
aucune difficulté «
à mentionner dans le document de performance, ou de
façon peut-être plus appropriée dans le rapport d’activité, le nombre de
membres de commissions.
»
L’établissement indique par ailleurs que «
la progression du
nombre de membres des commissions et des comités de lecture s’explique
à la fois par le développement des mécanismes de soutien et par la
complexité croissante des dossiers examinés.
60
» Sans méconnaître la
complexité des dispositifs de soutiens déployés par le CNC, ce dernier
pourrait être invité à envisager le regroupement de plusieurs dispositifs au
sein de commissions communes, afin de limiter les coûts afférents à la
réunion des dites commissions. Le CNC n’y est d’ailleurs pas opposé,
ayant indiqué que «
dans le prolongement du déploiement du contrôle de
gestion,
des
regroupements
pourront
être
envisagés
s’ils
sont
pertinents
. »
La
formalisation
du
suivi
des
effectifs
de
collaborateurs
occasionnels de service public s’impose comme première étape en vue
d’une stabilisation des effectifs qui soit étendue aux membres des
commissions d’aides sélectives.
Définies par une décision de la directrice générale du CNC, les
indemnités perçues par les membres des commissions en contrepartie de
leurs activités ont été soumises aux cotisations salariales et patronales
60
L’établissement illustre le développement des dispositifs de soutien, ayant un
impact sur le nombre de commissions réunies, à la lumière de plusieurs exemples
récents : la mise en place du dispositif Recherche et Innovation en Audiovisuel et
Multimédia (RIAM) et du dispositif de soutien aux industries techniques en 2006, la
mise en place du dispositif Fonds image de la diversité en 2007.
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depuis le 1
er
janvier 2009
61
. Pour les années antérieures (2001-2008), le
CNC ne payait les charges patronales dues au titre des indemnités de
membres des commissions qu’après contrôle et redressement des
URSSAF ; seules la CSG et la CRDS étaient précomptées. En
conséquence, le CNC a revalorisé l’intégralité des bases d’indemnisation
de façon à garantir une indemnité nette à payer d’un montant équivalent.
Cette revalorisation explique en partie l’augmentation des
dépenses consacrées à l’indemnisation des membres des commissions,
une autre partie de cette progression s’expliquant par l’augmentation des
effectifs et l’harmonisation des rémunérations opérée en 2010 (certains
personnels étant auparavant bénévoles quand d’autres étaient rémunérés).
Tableau n° 30 : Evolution de la rémunération des membres de
commissions du CNC entre 2001
et 2011 (en euros)
Rémunération brute
des membres de
commission
Charges
employeur CNC
Total
2001
467 188
555 584
467 188
2002
671 366
671 366
2003
734 305
1 289 889
2004
783 279
-
783 279
2005
623 339
484 248
623 339
2006
580 642
580 642
2007
533 345
1 017 593
2008
693 708
222 400
916 108
2009
771 921
258 581
1 030 502
2010
903 440
302 336
1 205 776
2011
987 673
331 514
1 319 187
2011/2001
111 %
-
-
Source : CNC ; à la suite d’un contentieux avec l’URSSAF relatif à la
nature des indemnités versées aux membres des commissions et à leur
assujettissement aux cotisations sociales, le CNC a acquitté annuellement
ces charges à partir de 2008. Les montants versés avant 2008 sont
regroupés par période triennale correspondant aux périodes des
contrôles effectués par l’URSSAF.
En première analyse, le coût moyen d’un membre de commission
est passé de 1 456 € en 2001 à 1 896 € en 2010. Ce montant moyen
masque une forte disparité des indemnités, selon la fonction occupée et la
61
Urssaf, Ircantec, taxe sur les salaires.
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commission concernée. A titre d’exemple, le président de la commission
d’avances sur recettes a perçu, en 2010, une indemnité annuelle de
27 955 €. Un commissaire membre de la commission du soutien financier
à la distribution perçoit, quant à lui, 335 € en un an s’il atteste d’une
présence effective aux dix demi-journées annuelles de réunion de la
commission et qu’il examine les dossiers correspondants.
Tableau n° 31 : Evolution du coût moyen des membres de
commissions du CNC entre 2001
et 2011
Nombre de
membres de
commissions
Rémunération brute
moyenne des membres
des commissions (en €)
Coût moyen d'un
membre de
commission (en €)
2001
448
652 383
1 456
2002
520
856 561
1 647
2003
522
919 500
1 761
2004
533
783 279
1 470
2005
494
784 755
1 589
2006
466
742 058
1 592
2007
479
694 761
1 450
2008
536
916 108
1 709
2009
560
1 030 502
1 840
2010
636
1 205 776
1 896
2011
656
1 319 187
2 011
2011/2001
+ 46,4 %
+ 102,2 %
+ 38,1 %
Source : Cour des comptes, d’après CNC (réponse au questionnaire) ; la
somme correspondant au rattrapage de plusieurs années de cotisations
employeur versé par le CNC en 2003 et en 2007 a été répartie sur les
différentes années concernées. La somme de cette part de cotisations
employeur et de la rémunération brute annuelle correspond à la
rémunération brute moyenne des membres des commissions. Le coût moyen
d’un membre de commission est calculé en rapportant cette rémunération
brute moyenne au nombre de membres de commission.
Le CNC souligne, à juste titre, que cette disparité «
est le reflet de
la diversité en termes de volume de travail, de temps de présence et
d’investissement demandée à chaque membre en fonction du périmètre de
chaque commission et des soutiens afférents
. » Il ajoute que «
compte
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tenu de cette disparité, une analyse sur un coût moyen n’est pas
significative car trop d’éléments liés aux fluctuations de l’activité des
commissions entrent en considération
. »
En 2010, l’établissement a entrepris un travail d’harmonisation sur
la rémunération des commissaires, conduisant à établir quatre forfaits
d’indemnisation qui prennent en compte le travail préparatoire en amont
des commissions, la complexité du travail en commission et le nombre de
dossiers étudiés. A périmètre constant, l’évolution des indemnités des
commissaires entre 2010 et 2011 n’a été que de 3 %. Le travail
d’harmonisation entrepris par le CNC s’est donc traduit par une meilleure
maîtrise de la croissance de l’indemnisation des commissaires. Le CNC
s’est par ailleurs engagé à réaliser en 2012 un bilan précis en vue de
dégager d’autres pistes éventuelles et d’accroître le niveau de prévision
des indemnités allouées à l’ensemble des membres de commissions.
III
-
La gestion du patrimoine immobilier : des
décisions qui restent à prendre
La stratégie de l’établissement reste à définir malgré le constat
partagé du non-respect des normes immobilières en vigueur. Son
élaboration se heurte au manque de souplesse de l’établissement quant à
son implantation. Par ailleurs, les opérations financières passées et
envisagées en matière immobilière sont des révélateurs de la situation
d’aisance financière du CNC.
A - Des retards dans l’adoption d’une stratégie
immobilière
1 -
Une implantation historique dans le 16
e
arrondissement
Le CNC est actuellement installé dans quatre immeubles
haussmanniens du 16
e
arrondissement, dans le quartier Iéna-Trocadéro,
pour une superficie totale de 6 323 m
2
de surface utile nette (SUN) :
−
12, rue de Lübeck (1 929 m
2
de SUN), où se situe le siège, dont
le CNC est propriétaire depuis 1953, d’une valeur estimée en
2011 à 23,3 M€ ;
−
32, rue Galilée (785 m
2
), dont le CNC est propriétaire depuis
1950, d’une valeur estimée en 2011 à 11,8 M€ ;
−
11, rue Galilée (1 829 m
2
), que le CNC a acquis en pleine
propriété en 2010 pour 22 M€ et qui est estimé fin 2011 à
26,5 M€ ;
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−
3, rue Boissière (1 780 m
2
), dont le CNC est locataire pour un
coût annuel de 1,36 M€ (loyer et charges locatives), et dont le
bail, datant du 9 décembre 1994 et renouvelé le 1
er
janvier
2004, expire le 31 décembre 2012.
2 -
Une situation globalement confortable par rapport aux
normes
62
Le ratio d’occupation, qui correspond à la division de la surface
utile des bureaux par les effectifs, varie de 8,6 à 21,6 m
2
par agent. En
ratio global pour les quatre immeubles, on obtient 12,93 m
2
par agent, ce
qui a pu conduire le CNC à considérer le ratio de 12 m
2
par agent comme
quasiment respecté
63
. En réalité, ce ratio est très variable selon les sites
:
si les bâtiments du 32, rue Galilée et du 12, rue de Lübeck présentent
respectivement un ratio de 12,66 et de 12,95 au m
2
par agent, les autres
bâtiments
dépassent
largement
le
ratio
recommandé
pour
les
administrations publiques : 16,33 m² au 11, rue Galilée et 16,48 m² au
3, rue Boissière.
Le ratio d’efficacité immobilière (surface utile nette / surface utile
brute) n’apparaît pas non plus satisfaisant. Il s’établit respectivement à
50 %, 56 % et 64 % pour les trois immeubles dont le CNC est
propriétaire, alors que le niveau préconisé est de 67 % ou plus : la
capacité utile d’accueil n’est pas optimale dans ces différents bâtiments.
Les normes immobilières qui s’appliquent aux opérateurs de l’État
ne sont donc pas encore pleinement respectées par le CNC.
3 -
La réserve pour projet immobilier
Dans le prolongement du principe qui institue la non-fongibilité
entre les dépenses de soutien et les dépenses de gestion, l’adoption de
l’arrêté des comptes de l’année 2007, premier exercice réel d’affectation
du résultat dans un nouveau contexte budgétaire et comptable, a donné au
CNC
l’occasion
de
créer
des
réserves
facultatives
spécifiques
(
cf.
chapitre 4). Le montant de la réserve pour projet immobilier, qui
s’élevait à 0,54 M€ au 1
er
janvier 2008, a atteint 27,9 M€ au début de
l’année 2012, et ce malgré l’utilisation de la réserve à hauteur de
875 206 € en 2010 pour financer une partie des frais d’acquisition de
l’immeuble du 11, rue Galilée.
62
Les normes applicables sont principalement retracées dans la circulaire du Premier
ministre relative au pilotage stratégique des opérateurs de l’État
du 25 mars 2010.
63
Dossier du comité financier du 7 avril 2010.
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Tableau n° 32 : Evolution du montant de la réserve immobilière,
en millions d’euros
Date
Montant
01/01/2008
0,54
01/01/2009
4,27
01/01/2010
4,73
01/01/2011
7,31
01/01/2012
27,9
Source : Cour des comptes d’après données CNC. Le budget
primitif
pour
2012
prévoit
l’affectation
de
6 M€
supplémentaires à cette réserve.
Le principe retenu par les comités financiers et conseils
d’administration est que la réserve immobilière doit être abondée par le
résultat positif imputable à la seule gestion du CNC. Dans les faits, ces
27,9 M€ proviennent, pour 23,4 M€ directement des excédents du résultat
d'exploitation, principalement des plus-values de ressources propres
(13,8 M€, dont plus de 9 M€ sont issus de plus-values de cotisations
professionnelles) et d’une sous-consommation de crédits liés à la gestion
de l'établissement (8,6 M€). Le reste (4,5 M€) est issu de reclassements
d'autres comptes de réserve ou du compte 110 « Report à nouveau », eux-
mêmes à l’origine abondés par des excédents du résultat d’exploitation.
Par ailleurs, la vocation précise de cette réserve a varié au cours du
temps, dans la mesure où la stratégie immobilière de l’établissement n’est
pas stabilisée. Inscrite dans la perspective du regroupement de
l’établissement sur un seul site, sa création en 2008 «
répond à l’objectif
d’éviter au maximum le recours à l’emprunt
» (comité financier du
28 mars 2008). D’autres utilisations possibles s’y sont par la suite
ajoutées :
−
«
ces crédits sont destinés à financer une meilleure installation
des équipes du CNC dans le cadre soit d’une opération de
regroupement sur un seul site (à l’étude), soit d’une rénovation
des locaux actuels et d’un redéploiement plus efficient des
agents.
» (comité financier du 7 avril 2009) ;
−
«
ces crédits sont destinés à financer notamment les coûts des
droits de mutation liés au projet d’acquisition de l’immeuble du
11 rue Galilée, et une meilleure installation des équipes du
CNC dans le cadre d’une rénovation et d’une réallocation des
locaux
. » (conseil d’administration du 7 avril 2010) ;
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−
le CNC indique aujourd’hui que cette réserve «
représente un
complément de financement qui permettrait de couvrir
l’acquisition d’un site unique
. »
4 -
Le long cheminement vers une stratégie immobilière
Face à l’augmentation de ses loyers immobiliers (+ 13 % en 2005,
+ 30 % de 2005 à 2009), le CNC s’est interrogé dès 2006 sur
l’opportunité d’un regroupement de ses services sur un seul site. Dans le
même temps, la fonction d’accueil du CNC
64
était mise en avant de façon
constante pour justifier la nécessité de maintenir une implantation dans
Paris ou en proche périphérie. Depuis lors, plus de trente hypothèses
d’implantations ont été étudiées, parallèlement à celle d’un maintien dans
les locaux, avec ou sans densification dans les immeubles dont le CNC
est propriétaire.
La pérennisation de la situation existante découle finalement de la
volonté de saisir une occasion d’achat : en 2009, la situation locative de
l’immeuble du 11, rue Galilée étant jugée supérieure de 20 % à la valeur
locative de marché et le niveau de dégradation du bâtiment impliquant de
procéder à des travaux, le CNC s’est montré intéressé par la proposition
du propriétaire de céder l’immeuble, dont la valeur vénale hors droits
était estimée à 22 M€. Sans consultation préalable du ministère
65
, et après
une longue période de réflexion, la possibilité d’effectuer un achat à des
conditions avantageuses et de tirer profit de la situation de locataire-
occupant a donc prévalu à court terme sur le souhait, formulé de longue
date
66
, d’un regroupement du CNC sur un seul site. L’établissement fait
remarquer
que,
tout
en
conservant
intacte
la
possibilité
d’un
regroupement futur, cette opération est venue enrichir son actif, d’autant
que la valeur vénale de l’immeuble a été estimée en 2011 supérieure de
20 % au prix d’achat, ce qui laisse au CNC la possibilité de le valoriser
dans de bonnes conditions en cas de cession.
Il n’en reste pas moins que le loyer actuellement versé pour
l’immeuble du 3, rue de Boissière se situe au-dessus du plafond fixé à
64
Environ 700 membres de commissions sont reçus au CNC, lequel fait état de la
difficulté à recruter des professionnels pour y participer.
65
Le ministère a été informé de cette décision par l’avis de France Domaine, la veille
du comité financier du 7 avril 2010.
66
On en trouve déjà trace en 1950 dans les réflexions sur l’acquisition des bâtiments
au 12, rue de Lübeck et 32, rue Galilée.
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400 €/m
2
pour les prises à bail dans la région Ile-de-France
67
puisque le
coût d’occupation actuel correspond à un ratio de 540 €/m
2
. Dans ce
contexte, France Domaine a fait savoir au CNC qu’une prolongation du
bail
au-delà
du
31 décembre
2012
n’était
pas
envisageable.
L’établissement est donc confronté à la nécessité de reconsidérer sa
stratégie immobilière.
La question d’un maintien dans le 16
e
arrondissement suscite des
débats récurrents. Le Conseil de l’immobilier de l’État (CIE) a estimé au
début de l’année 2011
68
«
qu’il n’a pas été établi qu’une telle localisation
présente pour le CNC des avantages supérieurs à ceux d’une
implantation alternative dans un secteur périphérique convenablement
desservi par les transports en commun
». Dans sa lettre du 30 mars 2011
adressée au président du CNC, France Domaine recommande de «
tirer
les conséquences des orientations indiquées par le CIE
» concernant la
localisation de l’établissement dans le quartier central des affaires.
Les développements les plus récents témoignent d’une volonté de
trouver une nouvelle implantation dans Paris. Une étude capacitaire a en
effet conclu à la fin du mois d’octobre 2011 à l’impossibilité de densifier
l’occupation sur les trois bâtiments dont le CNC est propriétaire, en
faisant apparaître un besoin résiduel d’espace correspondant à une
cinquantaine de postes. Ayant écarté récemment la proposition du
ministère de la culture et de la communication d’une implantation dans
les espaces devenus vacants du musée des arts et traditions populaires,
ainsi que celle de France Domaine d’un déménagement vers la Cité du
cinéma implanté à Saint-Denis, le CNC se concentre aujourd’hui sur la
possibilité d’acquérir un immeuble situé quai de Grenelle, dans le
15
e
arrondissement de Paris.
Un décaissement de 20 M€ a été programmé en juin 2012 dans le
plan de trésorerie de l’établissement, dans la perspective d’un
déménagement. La vente des trois bâtiments dont le CNC est propriétaire
(dont la valeur est estimée à près de 62 M€) est également envisagée. Or,
si l’on rapporte la surface utile nette actuellement occupée par le CNC
(6 323 m
2
) au prix du m
2
dans le 15
e
arrondissement (8 700 € en moyenne
en avril 2012 d’après la Chambre des notaires de Paris), on peut anticiper
une opération d’un montant de 55 M€ hors frais de travaux et de
déménagement. Dans la mesure où le montant cumulé du produit de
cession attendu des trois immeubles dont le CNC est propriétaire paraît
67
Plafond fixé hors taxes et hors charges dans les grandes lignes du projet de loi de
finances 2011 et évoqué à plusieurs reprises fin 2010 dans les déclarations du ministre
du Budget (non repris toutefois par un article en loi de finances).
68
Avis du Conseil de l’immobilier de l’Etat sur la stratégie immobilière du CNC,
4 mars 2011.
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pouvoir couvrir les frais du regroupement sur un site unique, l’utilité de la
réserve immobilière est donc susceptible d’être mise en doute.
Par ailleurs, la perspective d’un déménagement est aujourd’hui
bloquée par un désaccord avec France Domaine sur le périmètre de la
mise en concurrence préalable : France Domaine souhaite que le cahier
des charges s’étende à Paris et à la petite couronne, tandis que le CNC
plaide pour un appel à candidature limité à Paris même, en raison des
contraintes liées au fonctionnement des commissions composées de
professionnels.
Refusant toute concession à ce sujet, le CNC a prévu de renouveler
«
à titre transitoire
» le bail de l’immeuble de la rue Boissière. Par
ailleurs, l’opération de rénovation et de réallocation de ses locaux du 16
e
arrondissement, programmée en 2011, a été suspendue.
Interrogé à ce sujet dans le cadre du contrôle de la Cour, le
ministère indique seulement qu’il souhaite «
approfondir l’évaluation des
enjeux liés à l’implantation du CNC
. »
Aux retards accumulés dans la définition d’une stratégie
immobilière s’ajoute la non-conformité de l’établissement aux normes
immobilières en vigueur.
B - Une opération d’acquisition d’immeuble dont le
montage financier est discutable
L’opération d’acquisition du 11, rue Galilée en 2010 a été réalisée
sur la base d’un montage financier relativement simple :
−
pour la valeur principale du bien, un emprunt de 22 M€ sur
20 ans ;
−
pour les droits de mutation et frais notariaux, l’utilisation d’une
partie de la réserve pour projet immobilier constituée au bilan, à
hauteur de 875 000 €.
Le CNC justifie le recours à l’emprunt en expliquant que la
compensation du montant des échéances par le gain qu’il réalise sur la
charge locative (environ 1,48 M€ en 2009) lui a permis d’éviter une
augmentation de ses charges générales. Il met aussi en avant la nécessité
de veiller «
scrupuleusement à l’étanchéité entre les crédits destinés aux
soutiens et ceux destinés à sa gestion
» et gageant qui si, en 2010, «
le
CNC avait opté pour une utilisation des ressources fiscales pour financer
l’acquisition de l’immeuble […], il lui aurait été légitimement reproché
de ponctionner le fonds de soutien pour enrichir son patrimoine
. » On
peut néanmoins faire remarquer que le remboursement de l’emprunt,
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financé en partie grâce au prélèvement pour frais de gestion sur les taxes
affectées à l’établissement, n’est pas moins lié à la contribution du secteur
au financement du CNC.
On peut donc s’interroger sur le bien-fondé de cette décision, tant
il apparaît que la situation de trésorerie du CNC, particulièrement
confortable à la date de l’emprunt, aurait pu conduire à recourir au moins
en partie à un prélèvement sur le fonds de roulement (qui dépasse
largement les engagements du CNC, constitués sous forme de
provisions), plutôt que de contracter un emprunt pour lequel les intérêts à
verser doivent s’élever au total à 8,79 M€.
Tableau n° 33 : Situation nette de trésorerie de 2006 à 2012, en
millions d’euros
Source : Cour des comptes d’après données CNC.
L’accord des tutelles sur un recours quasi exclusif à l’emprunt pour
procéder à cette acquisition, alors que l’établissement avait déjà constitué
une réserve spécifiquement destinée à ce type d’opération et disposait lors
de l’achat d’une trésorerie abondante placée à un taux moindre que celui
de l’emprunt, apparaît difficilement justifiable dans une optique de
maîtrise de la dette publique.
Il convient sur ce point de noter que le CNC entre dans le champ
de l’article 12 de la loi de programmation des finances publiques pour la
période
2011-2014,
qui
prévoit
que
les
organismes
divers
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d’administration centrale ne peuvent désormais emprunter pour une durée
supérieure à un an.
Dans l’hypothèse d’une nouvelle acquisition, il est recommandé au
CNC, en accord avec ses tutelles, d’affecter la réserve pour projet
immobilier au désendettement de l’établissement ou de reverser son
montant au budget général de l’État.
C - Une connaissance et une sécurisation des sites des
Yvelines insuffisantes
1 -
Une connaissance imprécise du patrimoine immobilier
Le service des archives françaises du film (AFF) dispose de deux
implantations dans les Yvelines, dans l'ancienne batterie de défense de
l'ouest parisien de Bois
-
d'Arcy et dans un fort situé à Saint
-
Cyr, classé
monument historique. Environ 1,1 million de bobines de films sont
conservées sur ces sites.
L’ensemble de Bois
-
d’Arcy regroupe onze bâtiments, répartis sur
une surface de cinq hectares (2 053 m
2
de SUN), dévolus à la
conservation des bobines sur support en acétate et au stockage des films
sur support nitrate. Deux autres bâtiments sont occupés, d’une part, par le
laboratoire et la direction du patrimoine du CNC, et, d’autre part, par des
espaces de stockage et divers locaux techniques, ainsi que par une salle de
projection. Le CNC est attributaire de ces immeubles qui appartiennent au
ministère de la culture et de la communication.
Une partie de l’ensemble immobilier du fort de Saint
-
Cyr
(construit en 1874), propriété du ministère de la culture, est également
attribuée à titre de dotation au CNC, avec facturation des frais de
fonctionnement. Elle couvre une surface utile nette d’environ 8 795 m
2
.
Le CNC met à la disposition de la Cinémathèque française certains de ses
locaux pour lui permettre de stocker et de conserver une partie de ses
collections de films. En vertu de la convention conclue avec la
Cinémathèque française le 31 janvier 2001, il s’agit d’une mise à
disposition à titre gratuit, le coût des travaux et les frais d’entretien et de
fonctionnement étant à la charge de la Cinémathèque française.
Ni le ministère, ni l’établissement, n’ont été en mesure de produire
de convention d’attribution concernant l’un ou l’autre site. Seuls sont
disponibles les arrêtés d’affectation des sites au ministère de la culture et
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de mise en dotation au profit du CNC
69
. Il a donc été difficile d’identifier
qui, du CNC ou du ministère, était responsable des risques associés à
l’utilisation
des
bâtiments
et
assumait
les
charges
d’assurance
correspondantes
70
.
Alors que le CNC a des besoins croissants de stockage, qui
devraient s’accentuer avec les arrivées en masse de copies argentiques à
la suite de la numérisation des oeuvres, le site de Saint
-
Cyr est
manifestement sous-utilisé. Les différentes implantations y sont partagées
avec le ministère de la culture et de la communication, la Cinémathèque
française,
l’Agence
française
du
court
métrage,
les
Archives
photographiques et l’école des pompiers du département.
La connaissance très imprécise de la répartition des bâtiments se
traduit par la non-exploitation de plusieurs casemates appartenant de droit
au CNC ainsi que par une série de situations irrégulières : bâtiment
normalement affecté en dotation au CNC mais occupé de fait par le
ministère de la culture et de la communication, casemates utilisées par le
CNC sans que cette situation ne soit prévue par l’arrêté de 1990,
bâtiments appartenant au CNC mais inoccupés à ce jour, bâtiment de plus
de 500 m
2
inutilisable car rendu inaccessible par la végétation et non
desservi par le réseau électrique.
Des progrès notables sont en cours pour cartographier plus
précisément ces sites. Le secrétariat général du ministère de la culture et
de la communication a lancé à la fin de juin 2012 l’élaboration d’un
schéma directeur sur ces sujets, piloté par l’opérateur du patrimoine et des
projets immobiliers de la culture (OPPIC) en lien avec le CNC et la
Cinémathèque française. D’importants travaux de rénovation pourraient
s’avérer nécessaires sur les deux sites, dont la charge financière reste à
répartir.
69
Il s’agit respectivement des arrêtés d’affectation du 1
er
février 1971 pour
Bois-d’Arcy et du 10 mai 1990 pour St-Cyr, et du 3 août 1973 et du 25 avril 1990.
70
L’ensemble des immeubles occupés par le CNC doivent être assurés par
l’établissement en tant qu’occupant-locataire de l’État, qui assume pour sa part ses
responsabilités en tant que propriétaire. Le CNC prend en charge une assurance en
tant qu'exploitant et seul occupant sur Bois-d'Arcy. Concernant le site de Saint-Cyr,
que le CNC utilise à des seules fins de stockage et où il n'est pas le seul occupant, le
CNC ne possède pas d’assurance spécifique. L’établissement a indiqué examiner
actuellement une extension de son contrat d’assurance pour la partie qui lui est
affectée, sur la base de l’expertise des biens du CNC qui va être lancée pour définir
l’étendue des garanties à prendre en compte dans le renouvellement du contrat
d’assurances.
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2 -
Une sécurisation du site à améliorer
Le plan de sécurité intervention du site de Saint-Cyr, qui dépend
du ministère de la culture et de la communication, est toujours au stade de
l’élaboration. Le contexte particulièrement dangereux (les pellicules à
base de nitrate sont extrêmement inflammables) a été rappelé par deux
mises en demeure adressées au CNC par la DRIRE concernant
Bois
-
d’Arcy
71
.
Plusieurs opérations, dont la maîtrise d’ouvrage a été confiée au
service national des travaux (SNT), révèlent des défaillances dans la
conduite des travaux. Les relations entre les services du CNC et ceux du
SNT ont été difficiles, conflictuelles, voire contentieuses au cours de la
période sous revue. Néanmoins, plusieurs opérations devraient trouver
une issue positive à la faveur du partenariat renouvelé qui se met
actuellement en place avec l’OPPIC.
La nécessaire sécurisation des sites constitue le premier axe du
nouveau plan d’action de la direction du patrimoine cinématographique,
établi à la suite du rapport de l’IGAAC. Le CNC a indiqué avoir déjà mis
en oeuvre plusieurs mesures s’agissant du gardiennage, de la détection et
de la lutte contre les incendies et de la maintenance des groupes froids, et
s’engage à les prolonger sur la base d’un audit global de sécurité sur le
site de Bois-d’Arcy, dont les conclusions ont été rendues en juin 2012.
Compte
tenu
du
caractère
inestimable
du
patrimoine
cinématographique
entreposé
sur
ces
sites,
la
clarification
des
responsabilités entre occupants et l’élaboration d’une stratégie pour
garantir l’intégrité des objets conservés constituent aujourd’hui une
urgence. Selon l’option retenue en matière de stratégie immobilière, la
réserve pour projet immobilier pourrait y être utilement employée.
71
Le 26 mai 2003 et le 19 mai 2011. Cette dernière mise en demeure concernait
notamment la température dans les salles où sont stockées des bobines sur support
nitrate.
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__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Le suivi des dépenses de fonctionnement interne du CNC s’est
considérablement amélioré depuis la mise en oeuvre par l’établissement
de la réforme budgétaire et comptable en 2007. L’identification fine de
cette enveloppe peut néanmoins être encore améliorée afin de constituer
le support d’une mesure par l’établissement de sa performance de
gestion.
Les modalités de détermination du prélèvement pour frais de
gestion sur les taxes affectées ne permettent pas aujourd’hui de prendre
en compte l’évolution du produit des taxes, d’où un risque d’excédent des
produits de fonctionnement, avéré en 2010 et 2011. Les excédents de
fonctionnement enregistrés ont alors été essentiellement affectés à la
réserve pour projet immobilier constituée par l’établissement.
L’évolution des effectifs du CNC est globalement stable depuis
2007. En revanche, la masse salariale a sensiblement augmenté (+ 12 %
entre 2007 et 2011, + 35 % depuis 2001). Cette hausse s’explique
principalement
par
la
progression
des
traitements,
liée
aux
requalifications de postes initiées au cours des dernières années, d’où
une rigidité croissante de la masse salariale de l’établissement.
Les membres des commissions d’attribution des aides sélectives du
CNC, dotés du statut de collaborateurs occasionnels du service public, ne
font pas l’objet d’un suivi formalisé, alors même que leur nombre est en
augmentation (de 479 à 656 entre 2007 et 2011, soit + 37 %).
La situation immobilière de l’établissement n’est à ce jour pas
conforme aux normes qui s’imposent aux opérateurs en la matière. Le
CNC, implanté dans quatre immeubles du 16
e
arrondissement, réfléchit
de longue date à l’éventualité d’un regroupement sur un seul site.
L’établissement ne parvient cependant pas à un accord avec France
Domaine sur sa localisation, souhaitant limiter les recherches à Paris
intra muros.
Malgré une trésorerie abondante, l’établissement a eu recours à
l’emprunt pour financer en 2010 l’acquisition d’un des immeubles qu’il
occupe. Dans un contexte où le produit de la cession de ses immeubles
pourrait apporter au CNC les ressources suffisantes à son regroupement
sur un seul site, la Cour met en doute l’utilité de la réserve pour projet
immobilier constituée au cours des dernières années (27 M€ en 2012).
La connaissance du patrimoine et les mesures de sécurisation des
deux sites qu’occupe le CNC dans les Yvelines pourraient être
améliorées.
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La Cour formule les recommandations suivantes :
3. définir un périmètre de dépenses de fonctionnement interne
appuyé sur une méthode d’imputation des coûts inspirée de la
comptabilité analytique. Elaborer et suivre des indicateurs d’efficience
rapportant les frais de fonctionnement interne de l’établissement (y inclus
les dépenses d’investissement) aux dépenses de soutien et à l’ensemble
des dépenses d’activité ;
4. faire adopter par le conseil d’administration une enveloppe de
frais de fonctionnement interne en valeur absolue et moduler en
exécution le prélèvement pour frais de gestion afin de couvrir cette
enveloppe en tenant compte du dynamisme des autres ressources propres
de l’établissement ;
5. formaliser le suivi des effectifs de collaborateurs occasionnels
de service public. Engager une politique de stabilisation des effectifs
étendue aux membres des commissions d’aides sélectives ; entreprendre
un regroupement des commissions d’attribution des aides sélectives ;
6. d’ici le 31 décembre 2012, arrêter un schéma pluriannuel de
stratégie immobilière permettant à l’établissement de se conformer à
l’avis du Conseil de l’immobilier de l’État ;
7. en accord avec les tutelles, affecter la réserve pour projet
immobilier au désendettement de l’établissement ou reverser son montant
au budget général de l’État ;
8. formaliser un schéma directeur pour les deux implantations du
CNC dans les Yvelines, afin de clarifier les responsabilités entre
occupants et d’assurer la visibilité nécessaire à une réflexion sur
l’optimisation des espaces de stockage et la programmation de travaux
de rénovation éventuels. Mettre en oeuvre rapidement l’ensemble des
préconisations formulées dans le cadre du nouveau plan d’action de la
direction du patrimoine cinématographique.
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Chapitre IV
Un modèle à redéfinir
Entre 2005 et 2007, le CNC a engagé une réforme budgétaire et
comptable de grande ampleur qui a grandement amélioré la fiabilité des
états financiers et la qualité de la gestion budgétaire de l’établissement.
La clarification des états financiers et budgétaires, qui a rendu nécessaire
la constitution de provisions à un niveau élevé, justifie, pour partie,
l’importance de la trésorerie dont dispose l’établissement depuis 2008,
même si celui-ci a par ailleurs constitué d’importantes réserves
budgétaires (I). La configuration actuelle ne favorisant pas la maîtrise des
recettes et des dépenses de l’établissement (II), il est proposé d’infléchir
le dispositif de pilotage et le modèle de financement du CNC (III).
I
-
La situation d’aisance financière du CNC
s’explique en partie par la nécessité de pourvoir aux
engagements contractés par l’établissement au titre
de sa politique de soutien
Le CNC dispose d’une trésorerie considérable (820,5 M€ au
31 décembre 2011), dont une part substantielle, loin de constituer une
ressource non affectée, est immobilisée pour garantir le financement de
dépenses d’intervention (508 M€) et d’investissement (111 M€). Au-delà
de ces obligations, qui découlent de la tenue de la comptabilité en droits
constatés, une somme de 335 M€ demeure aujourd’hui à la disposition du
CNC, correspondant à des réserves budgétaires affectées au financement
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du plan numérique, à la couverture du risque de conjoncture et au
financement du plan immobilier de l’établissement
.
A - Le résultat net et la trésorerie du CNC enregistrent
une forte progression depuis 2006
1 -
Le résultat net
L’analyse financière de l’établissement traduit une situation
d’aisance budgétaire indiscutable. A l’exception de l’année 2006, au
cours de laquelle ont été enregistrées, pour la première fois, des dotations
relatives à la constitution des provisions pour charges de soutiens
sélectifs, le résultat d’exploitation du CNC est largement positif au cours
de la période sous revue. Il a considérablement augmenté entre 2008 et en
2010 (annexe 7) en raison de la forte croissance du produit des taxes
affectées (+ 42 % en trois ans), avant de se stabiliser à un niveau élevé
(206 M€) en 2011, alors que le montant des aides versées et enregistrées
dans les comptes de charges a connu une croissance moins marquée au
cours de la même période (+ 10,8 % entre 2008 et 2011).
La période 2007-2011 révèle certes un accroissement des charges
imputables au fonctionnement interne de l’établissement, auquel est
associée une diminution progressive des subventions d’exploitation. Cette
situation est cependant équilibrée par l’augmentation du produit des taxes
affectées, sur lesquelles le CNC prélève des frais pour financer son
fonctionnement interne.
2 -
Le fonds de roulement et la trésorerie du CNC
L’évolution
du
fonds
de
roulement
depuis
2007
traduit
incontestablement l’aisance de l’établissement.
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Tableau n° 34 : Fonds de roulement, besoin en fonds de
roulement et trésorerie, en milliers d’euros
2007
2008
2009
2010
2011
Actif circulant
331 637
351 602
428 280
634 686
826 216
Dettes à court terme
34 684
31 845
29 234
30 579
25 990
Fonds de roulement net global
296 953
319 757
399 047
604 107
800 225
Variation du fonds de roulement
-
22 804
79 290
205 060
196 119
Provisions pour charges de soutien
421 662
439 889
449 569
464 001
508 389
Fonds de roulement hors provisions
-124 709 -120 132 -50 522
140 106
291 836
Variation du fonds de roulement hors
provisions
-
4 577
69 610
190 628
151 731
Dépenses globales de fonctionnement du
CNC hors dotations aux provisions pour
activités de soutien
519 040
567 955
577 111
599 476
661 686
FDR hors provisions X 360 / dépenses
globales de fonctionnement = nombre
de jours de dépenses couverts par le
FDR
-86
-76
-32
84
159
Besoin en fonds de roulement
90 816
40 796
-25 831
-18 469
-20 322
Trésorerie
206 137
278 961
424 877
622 576
820 548
Source : CNC, comptes financiers.
Les provisions constituées par l’établissement au titre de son
activité
de
soutien
(soutiens
automatiques
et
soutiens
sélectifs)
s’équilibrant de manière autonome par le jeu des dotations (constitutions
de nouveaux engagements pour le CNC) et des reprises sur provisions
(disparition de l’engagement du CNC), elles n’ont pas vocation à figurer
en contrepartie des actifs immobilisés au même titre que les autres
capitaux permanents
72
. Une fois neutralisé l’effet des provisions dans le
calcul du fonds de roulement, celui-ci demeure néanmoins élevé, en
augmentation régulière depuis 2008. En 2011, il assure plus de cinq mois
de fonctionnement à l’établissement.
Positif en 2007 et en 2008 en raison de la créance sur le compte
d’affectation spéciale, le besoin en fonds de roulement devient négatif à
partir de 2009. L’évolution de cet indicateur, qui représente la différence
entre les créances à court terme et les dettes à court terme, illustre la
72
Les actifs immobilisés du CNC, d’un montant de 150 M€ au bilan 2011, sont
constitués à hauteur de 100 M€ par les aides accordées sous forme d’avances, celles-
ci ayant pour contrepartie la réserve immobilisée, d’un montant similaire, aux
capitaux permanents. Le solde des actifs immobilisés (50 M€), correspondant aux
actifs corporels, a pour contrepartie, parmi les capitaux permanents, les capitaux
propres, une partie des réserves immobilisées, les réserves et l’emprunt.
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situation très favorable dans laquelle se trouve actuellement le CNC,
indépendamment des engagements souscrits par l’établissement auprès
des professionnels au titre de son activité de soutien.
La trésorerie a fortement progressé durant la période, pour
atteindre un niveau très conséquent. Corrigée des effets de périmètre liés
au transfert au CNC des disponibilités du compte d’affectation spéciale à
la clôture de ce dernier en 2009, la progression de la trésorerie de
l’établissement demeure significative, passant de 306,4 M€ en 2007 à
820,5 M€ en 2011.
Tableau n° 35 : Evolution de la trésorerie du CNC entre 2007 et
2011, en millions d’euros
2007
2008
2009
2010
2011
2011/2007
Disponibilités CNC
206,1
279,4
424,9
622,6
820,5
Trésorerie CAS
100,3
67,9
-
-
-
Total
306,4
346,9
424,9
622,6
820,5
+ 168 %
Source : Cour des comptes, d’après données CNC.
Au 31 décembre 2011, le montant de la trésorerie représente plus
de 70 % des dépenses d’activité annuelles (interventions comprises) de
l’établissement.
B - L’immobilisation obligatoire d’une part significative
de la trésorerie au profit des dispositifs de soutien : la
question des provisions
Dans le cadre de la réforme budgétaire et comptable qu’il a mise
en oeuvre entre 2005 et 2007 à la demande de la Cour des comptes, le
CNC a fait le choix de traduire dans ses comptes la réalité des
engagements de soutien financier consentis auprès des professionnels. Ce
choix participe incontestablement d’une démarche de qualité comptable
et de recherche d’une image fidèle de la situation financière et du
patrimoine de l’établissement et ne saurait être remis en question
(annexe 6).
Au total, les provisions constituées au titre des activités de soutien
s’élevaient à 508,4 M€ au 31 décembre 2011.
Dès
lors
que
les
règles
de
comptabilisation
des
aides
correspondantes peuvent conduire à la déchéance des droits qui en
conditionnent l’octroi (l’entreprise de production a fait faillite, l’échéance
des droits n’a pas été identifiée par le CNC, le projet bénéficiaire d’une
aide a été abandonné et le producteur n’en a pas informé le CNC…),
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l’exercice annuel de revue interne des provisions mérite d’être complété
par un audit périodique des provisions ainsi constituées afin d’en
actualiser le montant.
En réponse à la Cour, le CNC et le ministère de la culture ont
indiqué que le service du contrôle général économique et financier a
programmé, pour 2013, un audit comptable et financier, susceptible
d’aborder le sujet des provisions.
Par ailleurs, le CNC fait valoir qu’en tant qu’établissement public
administratif ne réunissant pas les conditions mentionnées aux articles
135 et 136 de la loi n° 2003-706 du 1
er
août 2003 de sécurité financière, il
n’entre pas dans le champ de révision légale des établissements tenus de
désigner un commissaire aux comptes.
Rien ne justifie cependant de demeurer en dehors du mouvement
de certification des comptes des opérateurs compte tenu de l’article 47-2
de la Constitution et des enjeux budgétaires et financiers en présence
(1,5 Md€ de crédits ouverts à la clôture de gestion 2011 en comptant les
provisions liées aux dépenses de soutien).
C - Une situation financière qui demeure favorable
après la prise en compte des provisions
1 -
L’augmentation rapide de la capacité d’autofinancement
La capacité d’autofinancement de l’établissement, c’est-à-dire les
ressources générées par les opérations liées à l’exploitation dont
l’organisme pourrait disposer pour investir ou augmenter son fonds de
roulement, a considérablement progressé depuis 2006. Cet indicateur,
calculé à partir du résultat de l’exercice dont on neutralise les dotations et
les reprises d’amortissements et de provisions afin de ne conserver que
les décaissements et les encaissements, est révélateur de l’aisance
financière de l’établissement en dépit des obligations de court et de
moyen terme qu’il contracte au titre des aides accordées.
Même minorée des dépenses de l’année comptabilisée dans le
résultat d’exploitation
73
et des provisions constituées au titre de l’activité
de soutien, l’évolution de la capacité d’autofinancement (CAF) au cours
des cinq derniers exercices demeure très dynamique.
73
Le résultat d’exploitation du CNC est partiellement composé de crédits qui, bien
que n’apparaissant pas au compte financier, correspondent bien à des dépenses de
l’année (immobilisations financées par des produits d’exploitation et restes à payer sur
engagements financiers).
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Tableau n° 36 : Capacité d’autofinancement de 2007 à 2011, en
milliers d’euros
2007
2008
2009
2010
2011
Capacité d'autofinancement
59 374 40 976 109 480 236 984 220 991
dont variation des provisions
3 184 26 833
28 015
37 088
63 901
dont excédents d’exploitation
mobilisés sur des dépenses de
l’exercice
34 677 12 043
15 103
18 809
22 506
Solde de la CAF
21 511
2 100
66 363 181 088 134 584
Source : Cour des comptes, d’après données CNC (comptes financiers).
L’analyse de la capacité d’autofinancement conduit ainsi à nuancer
fortement l’affirmation du CNC selon laquelle «
les opérations de
patrimonialisation (provisions….) expliquent très largement le niveau de
trésorerie de l’établissement
»
74
: l’augmentation des recettes de
l’établissement a été bien plus dynamique que le rythme de constitution
des dotations aux provisions.
La croissance significative des réserves facultatives
Chaque année, le résultat financier du CNC est affecté
prioritairement à la couverture des restes à payer
75
et au financement des
opérations d’investissements (qui comprennent principalement les aides
accordées sous forme d’avance remboursables). Le surplus constaté à
l’issue de cette première opération d’affectation, qualifié d’excédent réel
d’exploitation, est ensuite, pour partie, reporté en gestion N+1 et, pour
une autre partie, destiné à l’abondement de réserves constituées par
l’établissement en vertu d’un principe de précaution.
L’excédent réel d’exploitation (selon les termes employés par
l’établissement) est passé de 21,5 M€ en 2008 à 134,6 M€ en 2011
76
.
74
Compte rendu du conseil d’administration du CNC du 7 juillet 2011.
75
Les restes à payer désignent les crédits engagés mais non mandatés au cours de
l’exercice d’engagement. Dans le cas du CNC, les restes à payer sur engagements
financiers des exercices antérieurs correspondent, en fonctionnement, aux marchés et
commandes engagés et non encore payés (service fait attendu pour 2011) et, en
immobilisations, principalement aux aides attribuées sous forme d’avance et dont le
versement interviendra dans les années à venir.
76
Le résultat plus modéré de l’année 2008 s’explique par la constitution de nouvelles
provisions au titre des soutiens automatiques, à la suite d’une analyse interne ayant
conduit au sous-provisionnement des soutiens à la distribution et à l’édition vidéo
(- 10,2 M€), ainsi que par un niveau plus élevé que prévu de génération des soutiens
automatiques.
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Tableau n° 37 : Détermination de l’excédent réel
d’exploitation du CNC entre 2007 et 2011, en euros
2007
2008
2009
2010
2011
Résultat (1)
56 188 514 14 143 448 81 230 386 199 899 557 157 090 359
Prélèvements opérés
sur
le
fonds
de
roulement
pour
financer
les
investissements (2)
18 630 079
76 157
7 100 043
13 150 125
1 866 145
Restes à payer (3)
16 047 029 11 967 154
8 002 817
5 658 915
20 639 936
Excédent
réel
d'exploitation
(4) = (1) – (2) – (3)
21 511 406
2 100 137 66 127 526 181 090 517 134 584 278
Source : Cour des comptes, d’après données CNC (comptes financiers).
Jusqu’en 2007, les bénéfices de l’établissement étaient reversés à
un poste de réserves non spécifiques. Pour assurer un meilleur suivi des
crédits et accroître la transparence de son information financière, le CNC
a souhaité distinguer, à partir de 2008, les réserves suivant leur objet. A
ce jour, quatre catégories de réserves ont été constituées :
les « réserves immobilisées », où sont enregistrés les excédents
d’exploitation ayant servi à mandater des dépenses d’investissement. Le
compte « réserves immobilisées » représente ainsi la contrepartie de
l’actif net du CNC (après prise en compte des amortissements et
dépréciations). Cette réserve est elle-même subdivisée en trois comptes
(« immobilisations
incorporelles
et
corporelles »,
« avances
remboursables », « dépôts et cautionnements ») ;
la « réserve pour projet immobilier », abondée des crédits non
utilisés sur le budget de gestion de l’établissement. Cette réserve est
destinée à des achats immobiliers ou à des travaux (
cf.
supra
) ;
la « réserve de solidarité pluriannuelle », abondée de l’excédent
des recettes fiscales et d’une partie des crédits non engagés. Cette réserve
est destinée à faire face aux aléas d’un exercice (recettes fiscales
inférieures aux prévisions de recettes, voire augmentation de la part du
film français se traduisant par une augmentation de la dette associée au
soutien automatique) ;
la « réserve numérique », abondée du montant des crédits ouverts
au titre du plan numérique non dépensés dans l’exercice et, le cas
échéant, des crédits du fonds de soutien non employés par ailleurs ; cette
réserve a pour objet de financer le plan numérique s’étendant sur la
période 2010-2015.
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Trouvant leur origine dans la réforme budgétaire et comptable
mise en oeuvre par le Centre, les réserves immobilisées répondent
opportunément au besoin de clarifier la comptabilisation des dépenses
d’investissement (et notamment des aides accordées sous forme
d’avances). Au même titre que les provisions, ces réserves sont
considérées comme « obligatoires ». Les trois autres catégories de
réserves sont, en revanche, considérées comme « facultatives », dès lors
qu’elles résultent de la thésaurisation des excédents de gestion accumulés
par le CNC depuis plusieurs années.
Or, entre 2009 (affectation du résultat 2008) et 2011 (affectation
du résultat 2010), le CNC a majoritairement affecté son résultat financier
à l’abondement de réserves facultatives. Celles-ci ont en effet mobilisé
entre 80 % et 90 % des bénéfices du CNC. La tendance s’est nettement
infléchie en 2012, l’établissement affectant une part importante de son
résultat 2011 au report à nouveau afin de couvrir le risque de recettes lié
aux incertitudes affectant la nouvelle TST « distributeurs » – non encore
tranchées à ce jour par la Commission européenne – et de résorber le
report à nouveau négatif constitué en 2007.
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Tableau n° 38 : Affectation des excédents réels d’exploitation du
CNC entre 2007 et 2011 (en euros)
2007
2008
2009
2010
2011
Affectation de l'excédent
réel d'exploitation aux
réserves facultatives
Réserve
projet
immobilier
540 000
1 138 698
36 230
2 027 911
19 687 143
Réserve
solidarité
pluriannuelle
20 900 000
- 6 585 650
12 000 810
24 106 675
0
Réserve
numérique
0
7 500 000
53 340 000
154 080 725
39 350 400
Total des crédits
destinés
à
l'abondement
des
réserves
facultatives
21 440 000
2 053 048
65 377 040
180 215 311
59 037 542
Part
de
l'excédent
réel
d'exploitation
consacrée à l'abondement des réserves
facultatives
99,7 %
97,8 %
98,9 %
99,5 %
43,9 %
Part du résultat consacrée à l'abondement
des réserves facultatives
38,2 %
14,5 %
80,5 %
90,2 %
37,6 %
Source : Cour des comptes, d’après données CNC (notes de présentation de l’affectation
du résultat en comité financier).
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Tableau n° 39 : Situation des réserves nettes et du report à nouveau après affectation
du résultat du CNC (2008 à 2011, en euros)
2008
2009
2010
2011
2012
2012/2008
Affectation du
résultat 2007
Affectation du
résultat 2008
Affectation du
résultat 2009
Affectation du
résultat 2010
Affectation du
résultat 2011
Réserve projet immobilier
540 000
4 273 878
4 728 709
7 316 376
27 945 552
5075,1 %
Réserve solidarité pluriannuelle
20 900 000
20 859 750
32 860 561
56 967 236
56 967 236
172,6 %
Réserves immobilisées
0
85 766 247
96 706 157
106 123 921
111 627 245
30,2 %
dont immobilisations corporelles
et incorporelles
0
10 581 332
10 251 948
13 663 916
15 500 470
46,5 %
dont avances remboursables
0
75 134 562
86 387 856
92 396 652
96 068 421
27,9 %
dont dépôts et cautionnements
0
50 353
66 353
63 353
58 353
15,9 %
Réserve numérique
0
7 500 000
60 840 000
214 920 725
250 121 125
3234,9 %
Réserves bilan d’ouverture
au
1
er
janvier 2007
145 334 651
0
0
0
0
Total des réserves
166 774 651
118 399 875
195 135 426
385 328 257
446 661 157
167,8 %
Crédits destinés à la gestion N+1
34 748 514
29 666 184
34 161 019
44 464 800
91 699 627
163,9 %
Report de décision d’affectation
du résultat (risque TST)
0
0
0
0
22 231 237
-
Constitution de provisions
automatiques bilan ouverture
-253 167 316
-185 566 762
-185 566 762
-185 566 762
-136 901 264
-45,9%
Total du report à nouveau
-218 418 802
-155 900 578
-151 405 743
-141 101 962
-45 201 637
-79,3 %
Source : Cour des comptes, d’après CNC, comptes financiers.
Au total, les réserves constituées par le CNC – hors réserves
immobilisées, qui découlent des modalités de comptabilisation des
immobilisations de l’établissement – s’élèvent à 335 M€ au 1
er
mai 2012.
Elles s’ajoutent aux provisions constituées par l’établissement pour être
en mesure de répondre à ses engagements de long terme et sont motivées
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par la volonté de faire face à des dépenses futures. Si la mise en réserve
témoigne d’un principe de prudence qui n’est pas contestable en soi, elle
invite néanmoins à s’interroger sur l’adéquation entre les ressources de
l’établissement et ses besoins pérennes.
II
-
La configuration actuelle du financement du
CNC ne favorise pas l’ajustement fin de ses
ressources à ses besoins
Les données produites par le CNC dans le cadre de la procédure
budgétaire n’offrent pas au Parlement une visibilité suffisante pour lui
permettre de se prononcer en toute connaissance de cause sur la relation
qu’il juge souhaitable d’établir entre les recettes et les dépenses de
l’établissement. Cette situation sous-optimale s’est traduite, dans un
contexte budgétaire contraint, par des prélèvements opérés en loi de
finances sur le fonds de roulement et les recettes du CNC, qui ne
sauraient constituer une méthode pérenne de pilotage budgétaire (A).
Par ailleurs, l’organisation de la gouvernance et l’exercice de la
tutelle du CNC sont encore trop peu développés pour garantir un pilotage
optimisé et concerté de l’établissement (B).
A - Les faiblesses de l’information financière
Si le transfert du recouvrement des deux principales taxes affectées
au CNC a entraîné des gains d’efficience substantiels, il s’est néanmoins
accompagné
d’une
perte
d’information
du
point
de
vue
de
l’administration des finances et du Parlement.
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1 -
Le transfert de recouvrement des taxes affectées présente un
bilan positif en termes d’efficience mais a nui à la qualité de
l’information budgétaire
La période sous revue est marquée par le transfert au CNC du
recouvrement et du contrôle de deux des trois taxes affectées à
l’établissement, opérations précédemment assurées par la direction
générale des finances publiques : la TSA (depuis le 1
er
janvier 2007
77
) et
la TST (depuis le 1
er
janvier 2010). Le transfert du recouvrement au CNC
s’est traduit par un surcroît de recettes au profit du CNC :
−
alors que la direction générale des finances publiques prélevait
4 % de frais de gestion sur le produit de la TSA (soit 4,7 M€ en
2006), reversés au budget général de l’État, le CNC estime que
le coût de gestion de la taxe lui revient à 700 000 € en 2010
(ces coûts incluant le personnel, les frais de développement du
logiciel de recouvrement et d’équipement) ; toutes choses
égales par ailleurs, par rapport aux prélèvements qu’aurait
opérés la DGFiP sur le produit de la taxe en 2010 (5,9 M€), le
transfert de la liquidation et du recouvrement au CNC emporte
donc un surcroît de recettes pour le CNC de 5,2 M€ ;
−
alors que la DGFiP prélevait 1,5 % de frais de gestion sur le
produit de la TST (soit 6,9 M€ en 2009), reversés au budget
général de l’État, le CNC estime que le coût de gestion de la
taxe lui revient à 515 000 euros en 2010 (ces coûts incluant le
personnel, les frais de développement et d’équipement). Toutes
choses égales par ailleurs, par rapport aux prélèvements
qu’aurait opérés la DGFiP sur le produit de la taxe en 2010
(8,6 M€), le transfert du recouvrement et du contrôle au CNC a
donc permis un surcroît de recettes pour le CNC de 8,1 M€.
Au total, comme le souligne le rapport d’information de la mission
d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale établi en octobre
2011
78
, «
la gestion directe de ces deux taxes affectées par le CNC aura
permis de réaliser des économies substantielles en termes de gestion
», la
Cour estimant ces gains pour le CNC à 13,3 M€ pour l’année 2010.
Comme le précise néanmoins la DGFiP, «
les frais d’assiette et de
recouvrement appliqués [avant le transfert de ces deux opérations au
CNC], n’étaient pas collectés au profit de la DGFiP mais alimentaient le
budget de l’État. C’est pourquoi ils étaient calculés de manière
77
Article 104 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006 de finances rectificative
pour 2006.
78
Rapport d’information n° 3798 déposé le 12 octobre 2011, relatif au financement
des politiques culturelles de l’État par des ressources affectées.
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totalement forfaitaire, sur la base d’un pourcentage fixe, sans référence à
un calcul de coût réel de gestion par la DGFiP.
»
Sur le plan de l’information budgétaire, la suppression du compte
d’affectation spéciale (CAS) et des projets annuels de performances
(PAP) et rapports annuels de performances (RAP) qui y sont associés a
été compensée par la mise en place d’un document de performance
ad
hoc
79
. Depuis septembre 2011, ce document fait l’objet d’un débat du
conseil d’administration du CNC avant sa transmission au Parlement. Le
CNC demeure par ailleurs présenté comme opérateur principal du
programme 224
80
, et figure dans le « Jaune Opérateurs » et dans le
fascicule « Voies et Moyens ». Il n’y a donc pas, à première vue, de perte
d’information budgétaire.
La direction du CNC affirme avoir veillé à garantir au Parlement le
même niveau d’information que celui qui existait préalablement avec les
PAP et RAP. On peut néanmoins s’interroger sur la réelle amélioration de
la qualité de l’information budgétaire. Le document de performance,
certes plus fourni sur le plan stratégique, laisse de côté plusieurs
rubriques des anciens PAP et RAP ; si la fusion des informations dans un
seul document, à dominante prospective, est compensée dans le document
de performance 2012 par une comparaison des prévisions N-1 et de
l’exécution N+1, l’unicité du document de performance restreint
cependant la possibilité d’une actualisation des prévisions de recettes et
de dépenses en cours d’année via l’élaboration d’un RAP concomitant à
l’adoption de la loi de règlement.
N’y figurent ni l’exécution N-1 des
dépenses, ni l’exécution N-2 des recettes et des dépenses. A la suite du
contrôle de la Cour, le CNC s’est engagé à enrichir à l’avenir le document
sur ces points, et à inclure également un tableau comparant les recettes de
l’exercice N-1 en prévision et en exécution.
En outre, parmi les ressources propres de l’établissement, seul
figure dans le document de performance transmis au Parlement le
prélèvement opéré par le CNC pour ses frais de gestion sur les taxes
affectées.
De même, le document de performance manque d’indications sur
les principales associations aidées par le CNC (montant des subventions
allouées, part de celles-ci dans le budget de l’organisme). Les concours à
79
L’article L. 114-2 du nouveau code du cinéma dispose que «
Le Centre national du
cinéma et de l’image animée établit chaque année un rapport, qui rend compte du
rendement et de l’emploi
prévisionnels des taxes et prélèvements et autres produits qu’il
perçoit ou qui lui sont affectés en
application des dispositions du présent livre. Ce
rapport est adressé au Parlement en même temps que le projet de loi de finances de
l’année
».
80
De fait, les taxes affectées sont considérées comme des impositions de toute nature
et comme des ressources de l’État aux termes des articles 3 et 6 de la LOLF et dans la
norme n° 7 sur les opérateurs.
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l’IFCIC pourraient également être précisés et détaillés sous l’angle des
interventions en garantie, du nombre et du type de bénéficiaires et des
résultats en termes d’effet de levier. Il en va de même pour l’abondement
des fonds dotés par les collectivités territoriales (dispositif dit « un euro
pour deux »).
81
Ces lacunes ne sont que partiellement compensées par les données
générales fournies dans le bilan annuel produit par le CNC. La partie
« financements publics » de ce rapport livre en effet une présentation
exclusivement descriptive des différents mécanismes d’aide et des masses
financières qui leur sont consacrées. Les chiffres qui y sont présentés
apparaissent souvent approximatifs
82
.
Dans ce contexte, l’élaboration d’un rapport d’activité annuel (si
besoin sous forme d’un enrichissement du bilan déjà existant, afin de ne
pas multiplier inutilement les documents) et l’adoption d’un niveau de
détail accru dans l’information fournie au Parlement permettraient à
l’établissement de se conformer plus pleinement aux exigences qui
découlent de la LOLF. Le CNC signale d’ailleurs qu’il a fait sienne pour
la rentrée 2012 la recommandation de la Cour qui prône l’élaboration
d’un rapport annuel d’activité, le ministère et le CNC se montrant ouverts
l’un et l’autre à «
toute modification relative aux modalités actuelles
d’information du Parlement
» si celui-ci le souhaite.
81
Encadrée par convention, la mesure dite du « 1 euro pour 2 », mise en place en
2001, prévoit que le CNC abonde, par des crédits issus du compte de soutien, les
projets de longs métrages bénéficiant de soutiens financiers sélectifs d’une collectivité
territoriale. Le CNC réserve ce dispositif aux films qu’il a précédemment agréés. En
2005, le dispositif est étendu aux programmes audiovisuels, sous réserve que ces
oeuvres aient obtenu l’autorisation préalable délivrée par le CNC. Depuis 2006, ce
dispositif s’applique également à la production de courts métrages.
82
Le bilan 2010 affiche ainsi que les moyens disponibles pour le fonds de soutien en
budget primitif s’élèvent à 575,88 M€, alors que ce document indique un montant de
621,88 M€ (comprenant certes les crédits au titre de la mission Culture et les
ressources affectées, pour 34 M€). Les données diffèrent aussi, pour une part, de
celles présentées au Parlement : la part de marché du film français, de 35,6 % en 2009
d’après le document de performance, s’élève pour cette année-là à 36,8 % d’après le
bilan annuel du CNC.
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2 -
Les écarts entre prévisions et réalisations de recettes fiscales
Dans un contexte marqué par une forte incertitude, la fiabilité des
prévisions de recettes du CNC s’est dégradée à mesure de l’augmentation
des ressources de l’établissement. Jusqu’en 2009, les prévisions de
recettes sur lesquelles le CNC construisait son budget présentaient un bon
niveau de fiabilité.
A partir de 2009, les prévisions du CNC relatives au produit des
taxes fiscales apparaissent systématiquement sous-évaluées dans les
documents budgétaires initiaux.
Entre 2008, première année de mise en oeuvre de la TST
« distributeurs » et 2011, l’écart entre les recettes effectivement perçues
par le CNC et les recettes initialement envisagées a ainsi atteint 310 M€
dont 260 M€ imputables à la seule TST. Cet écart cumulé ne s’élève qu’à
43 M€ entre l’exécution des taxes et les prévisions après la dernière
décision modificative.
A cet égard, la construction des prévisions de recettes en N+1 sur
la base de prévisions d’assiette arrêtées au second trimestre de l’année N
limite structurellement la qualité des informations dans un contexte
économique, fiscal et juridique, marqué par une forte volatilité.
Les hypothèses prises pour le rendement prévisionnel des taxes en
N+1 sont présentées au conseil d’administration du CNC à l’été N
(antérieurement au comité financier) en vue de l’élaboration du document
de performance présenté au Parlement début octobre. Ces données sont
ensuite entérinées dans le cadre de l’approbation du budget primitif N+1
lors du conseil d’administration se tenant à la fin de l’année N.
L’ampleur des écarts entre prévisions et réalisations de recettes
apparaît d’autant plus préjudiciable qu’entre 2008 et 2012 les documents
mis à la disposition du Parlement et du public par le CNC ne
comportaient aucune indication sur les sous-estimations de recettes
fiscales, y compris de manière rétroactive. Depuis la clôture du compte-
mission « cinéma, audiovisuel et expression radiophonique locale » en
2009 et la disparition des documents budgétaires associés, il a ainsi fallu
attendre le document de performance 2011 pour voir apparaître les
recettes effectivement perçues en 2009. De même, les données
budgétaires communiquées au public dans les bilans annuels du CNC,
tenant lieu de rapports d’activité de l’établissement
83
, n’ont eu entre 2008
et 2010 que peu de rapport avec la réalité puisqu’elles reprenaient,
s’agissant des recettes, les chiffres prévisionnels de la LFI ou du budget
83
Les bilans annuels du CNC ne constituent pas des rapports d’activité
stricto sensu
,
dès lors qu’ils ne comportent presque aucune information sur la gestion interne du
CNC.
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primitif et non les chiffres réalisés. Ces écarts étaient d’autant plus
critiquables que le CNC disposait des chiffres définitifs de perception au
moment de l’élaboration du bilan (mai N+1).
Le CNC a tenu compte des observations formulées par la Cour
pour l’élaboration du bilan 2011, en mai 2012. Le produit des taxes et les
dépenses de soutien y sont désormais présentés en exécution et non plus
sur la base des prévisions budgétaires initiales. En outre, un important
travail de mise en cohérence a été mené par les services du CNC de
manière à consolider les informations produites sur les aides attribuées
par dispositif de soutien.
Depuis 2008, les incertitudes pesant sur les recettes fiscales
affectées au CNC ont réduit la fiabilité des prévisions budgétaires de
l’établissement. A partir de cette date, le CNC définit ses besoins de
financement sur la base d’un budget systématiquement minoré en
recettes. L’écart entre les recettes fiscales prévisionnelles et les recettes
effectivement encaissées par l’établissement, qui s’élève à 310 M€ entre
2008 et 2011, représente donc un véritable effet d’aubaine
84
pour le CNC.
3 -
Le renforcement de l’information financière par
l’intermédiaire du fascicule des « Voies et moyens »
En loi de finances pour 2012, le législateur a entendu renforcer le
niveau d’information dont il dispose sur les ressources affectées aux
opérateurs de l’État. Le dispositif retenu consiste ainsi à enrichir le tome
1 du fascicule « Voies et moyens », qui traite déjà des ressources
affectées, avec une partie dédiée dressant un bilan prévisionnel du
dispositif de plafonnement des taxes affectées pour l’année courante et
l’année à venir pour chaque organisme visé par le présent article. Le
Gouvernement avait alors indiqué que, «
ce document étant transmis au
Parlement au plus tard le premier mardi d’octobre, cette solution assure
la bonne information du Parlement avant l’examen de la première partie
du projet de loi de finances de l’année dont le plafonnement des taxes
affectées relèvera désormais
»
85
.
84
Le caractère conjoncturel de cette forte progression des recettes fiscales a d’ailleurs
été qualifié rétrospectivement d’ « effet d’aubaine » par le ministre de l’économie et
des finances, dans le cadre du débat sur un amendement au projet de loi de finances
rectificative pour 2011 :
« l’acceptation de notre amendement n’empêcherait en
aucune façon de trouver, sur la base du rapport rendu par la mission d’évaluation et
de contrôle et dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012, des modalités qui
soient parfaitement adaptées, sur la stabilité du financement du CNC, pour lequel il y
a eu un effet d’aubaine indiscutable (…)
».
85
Exposé des motifs de l’amendement n° 333 débattu en séance publique le
14 décembre 2011.
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S’agissant spécifiquement du CNC, les mesures adoptées en loi de
finances pour 2012 conduiront effectivement à renforcer l’information du
Parlement mais ne résoudront pas le problème structurel posé par le
rythme
d’encaissement
des
recettes
fiscales
du
CNC
et,
plus
particulièrement, des recettes de TST, qui sont aujourd’hui les plus
dynamiques.
Ainsi, les estimations de recettes fiscales pour l’année N+1 doivent
impérativement intervenir au second trimestre de l’année N sur la base
des données économiques et prospectives connues à ce moment-là. Lors
de la préparation du budget primitif de l’année N, au troisième trimestre
N-1, les prévisions du mois de juin précédent font, bien entendu, l’objet
d’une vérification sur la base des données les plus récentes, cependant
celles-ci ne permettent pas, à ce stade de l’année, d’affiner beaucoup plus
avant les hypothèses de départ. En effet, le CNC doit attendre d’avoir
reçu les déclarations de TST de l’année N, fin avril N+1, pour pouvoir
procéder à un réajustement de la prévision budgétaire. A cela s’ajoute le
fait que les contributeurs de la TST peuvent, de leur propre initiative,
procéder en cours d’année à la suspension de leurs acomptes s’ils
estiment avoir acquitté suffisamment de taxe.
Le CNC précise que «
le processus de prévisions du produit des
taxes est particulièrement complexe s’agissant de la TST « distributeurs »
acquittée par les opérateurs [de télécommunications], qui évoluent dans
un secteur dont le contexte technologique (boom des usages tiré par des
supports innovants…), économique (forte concurrence nécessitant des
efforts d’innovation commerciale incessants…) et fiscal (changement du
régime de TVA à taux réduit annoncé à l’été 2010, avec une incidence
majeure sur la TST) est marqué par une forte volatilité.
»
En tout état de cause, les informations financières figurant au
tome 1 du fascicule « voies et moyens » seront manifestement éloignées
du niveau des recettes réellement encaissées par le CNC au cours de
l’année correspondante.
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4 -
Les limites des opérations de maîtrise de la dépense opérées en
2011 et 2012
a)
Le prélèvement exceptionnel sur le fond de roulement
En réaction au très fort dynamisme des ressources du CNC, le
législateur a opéré, depuis 2011, plusieurs prélèvements sur le produit des
taxes affectées au profit du budget général de l’État. La loi de finances
pour 2011
86
a institué un prélèvement exceptionnel de 20 M€, versé en
deux virements de 10 M€
87
le 1
er
juillet et le 31 décembre 2011.
La possibilité d’un prélèvement pluriannuel sur le budget du CNC
a été évoquée à plusieurs reprises, une telle mesure n’ayant, pour l’heure,
jamais été adoptée par le Parlement. Un amendement à la loi de finances
rectificative pour 2011 a ainsi été débattu courant juin 2011 au Sénat, qui
visait à «
[créer] enfin, de 2011 à 2014, un prélèvement annuel sur les
recettes du CNC au profit du budget général de l’État. Ce prélèvement est
égal à 10 % du montant des ressources affectées au centre en application
du livre I
er
du code du cinéma et de l’image animée. Il est motivé par la
progression très substantielle des ressources du CNC, ayant permis
l’accumulation d’une trésorerie significative. Il n’est, dans ces
conditions, pas anormal que l’opérateur contribue à la trajectoire de
résorption du déficit sur la durée couverte par la dernière loi de
programmation des finances publiques.
88
»
b)
L’écrêtement des taxes affectées au CNC
Dans le cadre de ses travaux conduits en 2011 sur le financement
des politiques culturelles de l’État par des ressources affectées
89
, la
mission d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale a proposé
de plafonner les taxes affectées aux opérateurs culturels pour calibrer ces
dernières à l’aune des perspectives de dépenses des opérateurs. La
proposition énoncée par la mission d’évaluation et de contrôle était la
suivante : «
indiquer, dans le cadre de chaque projet de loi de finances et
pour chaque opérateur affectataire de recettes fiscales, le montant des
charges estimées pour l’année suivante, ce plafond de dépenses
permettant de déterminer le plafond des recettes nécessaires pour les
couvrir. Poser le principe selon lequel la part des ressources affectées
86
Article 35 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.
87
Décret n° 2011-442 du 20 avril 2011 relatif à la mise en oeuvre du prélèvement
exceptionnel prévu à l'article 35 de la loi de finances pour 2011.
88
Amendement n° 225 présenté par M. Philippe Marini ;
89
Rapport d’information n° 3798 déposé le 12 octobre 2011.
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dépassant le plafond ainsi arrêté est automatiquement reversée au budget
général de l’État.
»
Au cours de la discussion du projet de loi de finances pour 2012, le
législateur a effectivement plafonné le produit des taxes affectées aux
opérateurs de l’État (l’ensemble des opérateurs étant concernés, au-delà
du secteur culturel) en posant le principe d’un reversement au budget
général de l’État de toute recette excédant le plafond. Initialement
envisagé dans un amendement porté par le Gouvernement
90
, l’écrêtement
de chaque taxe affectée au CNC aurait conduit à limiter le budget de
l’établissement à 705,9 M€. A l’issue de la discussion parlementaire, le
CNC a été l’un des rares opérateurs
91
à se voir exonéré de l’application
d’un tel dispositif, seul le produit de la TST distributeurs étant finalement
écrêté, à hauteur de 229 M€, aux termes de la loi de finances pour 2012
92
.
Le mécanisme d’écrêtement mis en place par la LFI 2012 n’a pas
été conçu pour être limité à 2012 mais s’inscrit dans une démarche
pérenne ; l’article 46 de la loi de finances pour 2012 précise en effet que
«
le
produit
des
ressources
et
impositions
(…)
est
plafonné
annuellement », ce qui permet d’envisager de calibrer chaque année le
niveau du plafond
».
Juridiquement envisageable, l’écrêtement généralisé des taxes
affectées au CNC ne constitue cependant pas un objectif souhaitable, dès
lors qu’il remettrait en cause de manière substantielle l’économie des
soutiens
automatiques
déployés
par
le
centre,
ceux-ci
étant
structurellement liés aux recettes de TSA et de taxes « vidéo ».
90
L’amendement n° I-431, adopté le 21 octobre par l’Assemblée nationale, relatif à la
maîtrise des taxes affectées à l’ensemble des opérateurs de l’État, a conduit à
plafonner chacune des taxes affectées au CNC, l’excédent constaté sur le produit de
chaque taxe étant reversé au budget général de l’État. Ce dispositif a finalement été
substantiellement modifié en dernière lecture devant l’Assemblée nationale, seul le
produit de la TST étant plafonné.
91
Les seuls opérateurs exonérés de l’écrêtement intégral des taxes affectées ont été le
CNC, le Centre national de développement du sport (CNDS) et l’Office français de
l’immigration et de l’intégration.
92
PLF 2012 adopté par les deux assemblées (« petite loi »), article 46.
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L’écrêtement généralisé des taxes affectées, une démarche juridiquement
envisageable mais peu souhaitable sur le fond
La généralisation à l’ensemble des taxes affectées au CNC de
l’écrêtement introduit en loi de finances pour 2012 pour la seule taxe sur les
services de télévision (TST) ne se heurterait
a priori
à aucun obstacle d’ordre
juridique sur le plan du droit communautaire. Les lois de finances pour 2011
et 2012, qui ont déjà procédé à des reversements depuis le budget du CNC
vers le budget général de l’État, n’ont pas été censurées par le Conseil
constitutionnel au motif de l’incompatibilité que présenteraient de telles
mesures avec le droit communautaire en vigueur.
Loin de remettre en cause la conformité des aides déployées par le
CNC aux industries cinématographiques et audiovisuelles, le reversement au
budget général d’une partie des taxes affectées à l’établissement aurait pour
conséquence, au contraire, d’attraire hors du champ des aides d’État la partie
de la recette rebudgétisée. Le secrétariat général des affaires européennes
(SGAE) estime ainsi que «
la conformité de la TST n’est examinée par la
Commission dans le cadre de son contrôle de compatibilité des aides d’État
que parce qu’il s’agit d’une taxe affectée à un régime d’aides d’État, c’est-à-
dire qu’il existe un lien d’affectation contraignant entre la taxe et l’aide en
vertu de la réglementation nationale pertinente. Si le produit de la TST
distributeurs était versé intégralement au budget de l’État, ce lien
d’affectation disparaîtrait, et cette partie de la TST n’aurait plus à être
notifiée ni examinée par la Commission au titre des règles du traité sur le
fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) relatives aux aides d’État.
(…) Ceci ne préjuge pas du contrôle que pourrait effectuer la Commission
sur la conformité de la TST distributeurs au regard d’autres règles du TFUE
ou du droit dérivé.
» Cette mesure serait également neutre du point de vue de
la régularité du dispositif de soutien aux industries cinématographiques et
audiovisuelles, le SGAE précisant que «
les modalités de financement par
taxes affectées ou dotations budgétaires d’un régime d’aide n’ont pas
d’incidence sur la compatibilité de ce régime d’aide en lui-même avec le
marché intérieur.
»
Cette modification rendrait toutefois nécessaire une nouvelle
notification du dispositif de soutien public aux industries cinématographiques
et audiovisuelles, peu de temps après que ce régime a déjà fait l’objet d’une
nouvelle procédure de notification auprès de la Commission européenne.
Techniquement, une telle perspective serait envisageable à condition
de réviser annuellement les « taux de retour » des différents dispositifs de
soutien automatique de manière à ajuster la dépense correspondant aux droits
de tirage générés au niveau des ressources accordées au CNC par la loi de
finances initiale. Néanmoins, cette opération serait particulièrement lourde au
plan technique.
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Plus fondamentalement, le plafonnement de l’ensemble des taxes
actuellement affectées au CNC présente l’inconvénient majeur de rompre
avec le principe historique de mutualisation et de péréquation qui fonde le
fonctionnement des dispositifs de soutien automatique. Ainsi, la TSA et les
taxes vidéo sont à la fois des ressources pour le CNC et les déterminants des
droits de tirage dont bénéficient les producteurs, les distributeurs et les
exploitants dans le cadre des dispositifs de soutien automatique. Le
plafonnement de ces taxes ne pourrait avoir pour conséquence que de rompre
l’étroite corrélation existant aujourd’hui entre le niveau de ressources
publiques générées par l’exploitation d’une oeuvre et les droits acquis par les
différents acteur de la filière au titre de cette même exploitation. Le ministère
de la culture rappelle à cet égard que
« les dépenses – et donc les recettes –
liées aux soutiens automatiques ne peuvent pas être plafonnées car elles
conditionnent le bon fonctionnement de l’ensemble du système d’aide
».
Tout en suivant la lettre des préconisations de la mission
d’évaluation et de contrôle, le dispositif de plafonnement introduit en loi
de finances pour 2012 s’éloigne néanmoins substantiellement de leur
esprit, le niveau du plafond fixé par le Gouvernement ne résultant
vraisemblablement pas d’une analyse fine des projections de dépenses des
opérateurs, mais, s’agissant du CNC, du maintien d’un niveau de recettes
considéré comme « acceptable » au regard de l’évolution historique de
celles-ci. A cet égard, le plafonnement des recettes du CNC à 700 M€
situe celles-ci à un niveau historiquement élevé. Force est de reconnaître
que le niveau de « juste suffisance » des recettes du CNC est aujourd’hui
complexe à établir, la création de nombreux dispositifs de soutien par
ajouts successifs, sans évaluation des résultats obtenus, étant par nature
peu compatible avec une démarche de justification au premier euro.
Le CNC a indiqué à la Cour qu’il avait initialement «
défendu le
principe d’une baisse significative du barème applicable
[à la TST
distributeurs]
, afin d’assurer un rendement approprié de la taxe. Le
Gouvernement a fait un choix différent en calant les taux sur le niveau de
la contribution des opérateurs télécom de l’exercice 2010.
» Il est
probable que le choix du Gouvernement a résulté de la volonté de
pérenniser le niveau de financement du CNC tout en obtenant de
nouvelles ressources fiscales.
Ce
faisant,
le
dispositif
de
plafonnement
de
la
TST
« distributeurs » et de reversement au budget général de l’État est
discutable s’agissant du CNC :
−
sur le fond, il prend acte de l’absence de corrélation intégrale
entre le produit de la taxe et sa destination ; dès lors, c’est le
fondement-même de la taxe affectée qui doit être remis en
cause ;
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−
sur la forme, il conduit à reverser au budget général de l’État le
produit d’une taxe liquidée et recouvrée par l’un de ses
opérateurs, certes plus performant en la matière que la DGFiP.
Au demeurant, le CNC s’oppose à une telle démarche, ayant
indiqué
qu’il
plaiderait
« pour
la
suppression
du
mécanisme
d’écrêtement » car celui-ci « rompt le lien économique entre la croissance
du marché de l’image et le soutien au réinvestissement dans la création
originale de contenus. Ce mécanisme d’écrêtement porte en germe un
risque d’éviction des oeuvres françaises et européennes du marché de la
diffusion et un risque récessif sur ce marché, à l’instar d’autres grands
pays européens pour lesquels les niveaux de soutien public stagnent voire
diminuent et qui connaissent une baisse de la fréquentation globale en
salles. »
S’ils répondent à la nécessité de faire participer le CNC – comme
les autres opérateurs – à l’effort de réduction du déficit public, les
différents gages opérés depuis 2006 sur les ressources du CNC ne
s’inscrivent pas dans une réflexion générale sur l’adéquation des moyens
financiers aux objectifs assignés à l’établissement.
B - L’insuffisance du pilotage de la gestion
1 -
La fragilité des outils de pilotage
Au-delà des manques, déjà relevés, que présentent les outils de
remontée des informations financières au Parlement, les modalités de
tutelle et de gouvernance de l’établissement demeurent perfectibles en
dépit des progrès réalisés au cours des dernières années.
a)
Une gouvernance encore en construction
Le droit du cinéma reposait jusqu’en 2009 sur le code de
l’industrie cinématographique et sur divers textes épars édictés au fil des
années depuis 1956. L’adoption, par l’ordonnance n° 2009-901 du
24 juillet 2009, de la partie législative du code du cinéma et de l’image
animée a été l’occasion de rassembler, de simplifier et de rendre plus
conforme à la hiérarchie des normes cet ensemble de dispositions.
S’agissant du CNC, le code du cinéma et de l’image animée «
vise
à consolider et à moderniser l’organisation et le fonctionnement
» de
l’établissement
93
, renommé Centre national du cinéma et de l’image
93
Exposé des motifs de l’ordonnance n° 2009-901 du 24 juillet 2009 relative à la
partie législative du code du cinéma et de l’image animée.
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animée, pour entériner l’extension de son champ d’action au-delà du seul
cinéma. Il dote le Centre d’un conseil d’administration, cette mesure
répondant aux recommandations de la Cour formulées dès 1993. Le rôle,
la composition et les modalités pratiques d’organisation du conseil
d’administration n’ont été précisés par décret que près d’un an plus tard
94
.
L’article L. 112-2 du code du cinéma et de l’image animée dispose
que le conseil d’administration règle par «
ses délibérations les affaires
de l'établissement. A cet effet, notamment, il délibère sur les conditions
générales d'attribution des soutiens financiers et approuve le budget.
»
Le décret d’application prévoit en conséquence que le conseil
d’administration a notamment compétence, dans le respect des autres
dispositions réglementaires en vigueur en la matière, pour délibérer sur
les «
conditions générales d'attribution des aides financières
»
95
. Au vu
des comptes rendus des conseils d’administration qui se sont déjà tenus à
la date de clôture de l’instruction, cette dimension est de plus en plus
explorée dans les délibérations du conseil. Les débats d’ores et déjà
consacrés au plan numérique ou à la politique patrimoniale du CNC
pourraient à cet égard constituer les points d’entrée d’une réflexion plus
large sur l’ensemble des mesures de soutien. La délibération relative au
document
de
performance
lors
du
conseil
d’administration
du
29 septembre 2011 représente un autre signal positif.
Il paraît souhaitable que la codification de la partie règlementaire
du code du cinéma et de l’image animée, prévue pour l’été 2012, conforte
ce rôle stratégique du conseil d’administration. L’idée avancée par le
CNC d’un « règlement général des aides » regroupant et mettant à jour les
décrets et arrêtés relatifs aux différents dispositifs d’aides, et dont
l’adoption serait débattue par son conseil d’administration, pourrait aussi
être de nature à mettre le rôle de cette instance en pleine conformité avec
les dispositions du code du cinéma.
94
Décret n° 2010-654 du 11 juin 2010. La loi n°2011-525 du 17 mai 2011 prévoit de
surcroît que deux parlementaires, «
désignés respectivement par les commissions
chargées de la culture de l'Assemblée nationale et du Sénat
», siègent désormais au
conseil d’administration.
95
Article 3 du décret n° 2010-654 du 11 juin 2010 relatif au CNC.
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b)
Une tutelle distante
L’article L. 111-1 du code du cinéma et de l’image animée dispose
que le CNC est «
un établissement public administratif placé sous la
tutelle du ministre chargé de la culture.
» Cette tutelle concerne
l’ensemble des missions énumérées à l’article L. 111-2, notamment la
veille et le soutien au secteur, le contrôle des recettes des exploitants ou
les actions en faveur du patrimoine cinématographique. Par ailleurs, le
code accorde au président du CNC une série de prérogatives similaires à
celles d’un directeur d’administration centrale : il «
participe
» à
l’élaboration de textes législatifs et règlementaires, «
propose
» des
mesures pour le développement du secteur, «
est associé
» à la
préparation de la position française dans les négociations internationales.
Cette nature duale de l’établissement a été confirmée lors des travaux de
la révision générale des politiques publiques et entérinée à travers
l’adoption du code du cinéma et de l’image animée en 2009.
Dans la pratique, la tutelle du ministère présente plusieurs
insuffisances.
Depuis sa réorganisation en 2009, l’exercice de cette tutelle est
partagé entre, d’une part, le secrétariat général du ministère pour ce qui
touche aux questions budgétaires, immobilières et de ressources humaines
et, d’autre part, la direction générale des médias et des industries
culturelles (DGMIC) concernant le volet métier. La tutelle exercée par le
secrétariat général, ainsi que l’indique le ministère, est «
identique à celle
qu’il assure sur les autres opérateurs en tutelle partagée au sein du
ministère
». En témoigne la mise en place d’enquêtes ciblées depuis 2010
(sur les effectifs et sur les ressources propres), prélude au déploiement du
système d’information OPUS - outil qui doit faciliter à l’avenir la
remontée d’informations en provenance des opérateurs.
Pour leur part, les missions de la DGMIC en la matière découlent
de l’application de l’article 5 du décret relatif aux missions et à
l’organisation du ministère
96
, selon lequel elle «
suit les activités du
CNC
». Cette disposition est interprétée de manière particulièrement
restrictive. Le ministère estime que la DGMIC «
n’a pas de compétence
en tant qu’administration centrale dans le domaine du soutien au cinéma
– si ce n’est au travers des obligations d’investissement des chaînes
déterminées par décret –, ni de fonction de tutelle juridiquement définie
sur les activités du CNC en tant qu’établissement public
. » De fait,
l’association de la DGMIC aux décisions stratégiques concernant
l’activité du CNC apparaît modeste ; à titre d’exemple, le CNC représente
seul le ministère de la culture sur les questions d’encadrement
96
Décret n° 2009-1393 du 11 novembre 2009.
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communautaire des politiques publiques de soutien au secteur du cinéma
et de l’audiovisuel
97
.
En réalité, la prise en compte des missions d’administration
centrale conférées au président du CNC se diffuse dans les faits à
l’ensemble de la conduite de l’activité de soutien de l’établissement, et
conduit celui-ci à revendiquer une autonomie très marquée
98
. Le
ministère opère certes une distinction entre le CNC agissant « en
vertu de
ses compétences d’administration centrale, en matière de règlementation
dans le domaine du cinéma par exemple
», avec lequel la DGMIC
entretient «
une relation de coopération
», et le CNC mettant en oeuvre
des dispositifs de soutien en tant qu’établissement public. Dans ce second
cas, le ministère indique que, «
si les prérogatives accordées au CNC en
tant qu’administration centrale ainsi que son financement par des taxes
affectées peuvent expliquer l’autonomie dont jouit l’établissement, il n’en
existe pas moins une tutelle exercée par les ministères compétents
» ; la
DGMIC «
apporte alors au secrétariat général, au sein du ministère, sa
connaissance des secteurs soutenus, notamment l’audiovisuel, sans pour
autant exercer une tutelle formelle sur l’établissement public
. » Alors que
la ligne de démarcation est relativement aisée à tracer, les habitudes
prises découlent pour partie de l’autorité morale que son antériorité
historique
99
confère au CNC.
En outre, dans la mesure où les conditions qui président à son
financement confèrent au CNC une indéniable indépendance financière,
les instruments de pilotage dont le ministère pourrait disposer à son
endroit sont rares. Et si le ministère a envisagé à plusieurs reprises de
conclure avec l’établissement un contrat de performance afin de se
conformer à l’obligation en la matière pour les opérateurs de l’État
100
, il
n’y est pas parvenu à ce jour. Il a été néanmoins indiqué à la Cour que ce
sujet «
est actuellement à l’étude par le cabinet nouvellement constitué
».
Il convient de rappeler qu’à ce jour 46 opérateurs du ministère de la
97
Le CNC précise cependant que, «
compte tenu du rôle pilote exercé par la DGMIC
en matière audiovisuelle – le rôle du CNC y étant plus limité – de fréquents échanges
ont lieu entre les deux administrations, s’agissant particulièrement de la
réglementation relative aux obligations de production
».
98
La rédaction du premier article du code du cinéma ne facilite d’ailleurs pas la
distinction claire de ces deux natures : d’après son second alinéa, les prérogatives
d’administration centrale énumérées à l’article L. 111-3 sont attribuées «
pour
l’élaboration et la mise en oeuvre de la politique de l’État dans les domaines
mentionnés à l’alinéa précédent
» (c’est-à-dire le soutien accordé par le CNC en tant
qu’établissement public).
99
Institué en 1946, il existait donc bien avant que soit créé le ministère des affaires
culturelles (1959).
100
Circulaire 4BCJS-05-3152 du 1er août 2005 relative à la préparation des budgets
des établissements publics administratifs et autres.
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culture sur 82 disposent d’un contrat de performance, en cours
d’exécution ou en phase avancée de préparation - aucun de ces contrats
n’étant cependant assorti d’un engagement sur les moyens.
Le CNC s’appuie sur sa nature mixte pour considérer l’élaboration
d’un contrat de performance comme «
superfétatoire
», au motif qu’il
ajouterait une strate supplémentaire aux documents existants et poserait
un problème de principe car il ne serait «
pas adapté au statut du CNC –
les administrations centrales du ministère n’en sont en effet pas dotés
. »
Il rappelle par ailleurs, en matière stratégique, «
le lien d’autorité étroit
exercé par le Ministre et son Cabinet, comme il est de rigueur avec toute
administration centrale
. » Il n’en reste pas moins que la dimension
d’administration centrale du CNC ne saurait emporter l’impossibilité de
recourir à l’outil d’un contrat pour ce qui est des activités relevant de sa
dimension d’établissement public.
Enfin, la lettre de mission encadrant l’action du président du CNC
est loin d’être un instrument systématiquement utilisé. Parmi les
opérateurs concernés du ministère de la culture et de la communication
(soit 75 organismes), 37 lettres de mission sont signées ou en préparation.
Au 1
er
juillet 2012, le président du CNC, nommé par décret du 17
décembre 2010, ne disposait toujours pas de lettre de mission. L’envoi
d’un compte rendu de sa gestion en 2011, par courrier au cabinet du
ministre le 10 avril 2012, pourrait constituer l’unique document
permettant de déterminer la part variable de sa rémunération. La
directrice générale précédente, n’a été destinataire d’une lettre de mission
que près de deux ans après sa nomination. Dans l’attente, la part variable
maximale de sa rémunération lui a été versée sous forme forfaitaire.
III
-
La pérennisation du cadre d’intervention du
CNC suppose de passer d’un pilotage autonome par
la recette à un pilotage concerté par la dépense
Exception parmi les opérateurs de l’État, le CNC a développé son
action, depuis sa création en 1946, dans le cadre d’un dispositif de
financement grâce auquel le niveau de ses dépenses était déterminé par
celui de la recette. L’autonomie institutionnelle et budgétaire de
l’établissement lui a ainsi permis, pendant plus de soixante ans, de bâtir,
avec l’accord de ses tutelles, une politique ambitieuse de soutien aux
secteurs cinématographiques et audiovisuels, qui a évolué avec le
montant des recettes fiscales encaissées.
Ce modèle historique semble avoir vécu. L’augmentation continue
des recettes et corrélativement des dépenses est incompatible avec
l’objectif de retour à l’équilibre des finances publiques. De fait, en
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opérant un prélèvement exceptionnel sur le fonds de roulement du CNC
en 2011, puis en écrêtant le produit de la TST « distributeurs » en 2012, le
législateur a introduit une rupture dans la logique de financement du
CNC, qui reposait jusqu’alors sur l’autonomie du compte de soutien et
l’affectation exclusive et intégrale du produit des recettes fiscales au
budget de l’opérateur.
Attachés à la spécificité de ce modèle de pilotage, le CNC et sa
tutelle en revendiquent aujourd’hui le maintien, éventuellement corrigé à
la base par une modulation des recettes fiscales. Interrogé sur les
perspectives de maîtrise des recettes et des dépenses du CNC, le ministère
de la culture estime ainsi que «
la voie d’un meilleur calibrage de la
recette fiscale semble devoir être préférée à l’instauration de mécanismes
pérennes de plafonnement des taxes alimentant les dispositifs de soutien
du CNC
». L’établissement partage cette position, indiquant que «
les
évolutions d’assiette (pour tenir compte des évolutions dans les modes de
diffusion) et les ajustements des taux (pour obtenir un niveau de
contribution proportionné) sont la seule manière d’assurer la pérennité et
l’acceptabilité d’un système fiscal qui a démontré son efficacité et sa
robustesse dans un secteur soumis à de constantes mutations
».
Malgré son apparente simplicité, une telle approche pose un
problème dans sa mise en oeuvre. En effet, sauf à envisager celle-ci sur
une perspective pluriannuelle, l’ajustement fréquent des taux, voire de
l’assiette des taxes, a pour conséquence d’introduire un coefficient
d’incertitude dans le cadre fiscal, préjudiciable à l’acceptabilité des taxes
et à l’activité économique des assujettis.
Dès lors, il semble que la perspective de pérenniser le cadre
d’intervention original du CNC, tout en surmontant les écueils auxquels il
est confronté, invite à réfléchir à d’autres solutions.
En tout état de cause, il convient d’inverser la logique qui conduit
à faire découler le niveau des dépenses de celui de recettes procédant de
la mécanique autonome des taxations. En l’espèce, il s’agit de privilégier
désormais une approche qui aboutit à subordonner le niveau de la recette
à une appréciation préalable et aussi précise que possible des besoins du
CNC rendus nécessaires par l’exercice de ses missions. Autrement dit, la
détermination du niveau de financement du CNC doit dorénavant être
fondée sur une approche optimisée des différents systèmes d’aide, de leur
articulation et du degré de priorité dont ils sont l’objet.
Parce qu’elle ne saurait produire ses pleins effets sans une
implication accrue du ministère et du Parlement dans la détermination des
orientations stratégiques du CNC comme du niveau de ses interventions,
cette évolution requiert, au minimum, que l’établissement enrichisse ses
outils d’information et que les leviers de son pilotage soient également
renforcés (A). Au-delà et dans une perspective de moyen terme, le
passage d’un dispositif de pilotage autonome par la recette à celui d’un
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pilotage concerté par la dépense implique manifestement une évolution de
la structure de financement du CNC (B).
A - Le développement d’outils d’information et de
leviers de pilotage plus performants
1 -
L’amélioration de la qualité et de la fréquence de
l’information financière
Au-delà de l’extension annoncée du périmètre du document de
performance à l’ensemble de l’activité du CNC, la pleine application de
la LOLF à l’établissement implique l’adoption d’un niveau de détail
accru dans l’information fournie au Parlement. Dans une logique de
chaînage vertueux, les informations financières présentées gagneraient à
être plus systématiquement mises en relation avec les objectifs fixés
antérieurement : la dissociation du document de performance en deux
temps, sur le modèle des PAP et des RAP, permettrait de se conformer à
cette exigence. Si le CNC a indiqué à la Cour qu’il lui semblait «
plus
simple et plus lisible de disposer d’un document unique permettant de
faire immédiatement des comparaisons, plutôt que de deux instruments de
communication différents
», il a par ailleurs ajouté être mesure de
s’adapter sans difficulté à une demande du Parlement en ce sens, rendant
par ailleurs nécessaire une modification de la partie législative du code du
cinéma et de l’image animée (article L. 114-2).
Il n’en demeure pas moins que, dans son état actuel, le document
unique de performance du CNC ne remplit qu’imparfaitement la fonction
d’information complète du Parlement en prévision et en exécution.
2 -
La définition d’une trajectoire de dépenses pluriannuelle
Confronté à la nécessité d’affiner sa démarche de justification au
premier euro, le CNC fait valoir la complexité d’une analyse
prévisionnelle des dépenses, en raison du caractère aléatoire de ses
recettes et du fait de la corrélation entre ses dépenses d’intervention et le
produit des taxes qui lui sont affectées. Interrogé sur ce point par la Cour,
le
CNC
a
critiqué
le
«
caractère
largement
artificiel
d’une
programmation pluriannuelle de l’évolution des soutiens au-delà d’un
horizon réaliste de 12 à 18 mois maximum
». L’argument opposé par
l’établissement paraît recevable s’agissant des dépenses de soutien
automatique (47 % des dépenses d’intervention du CNC), la mobilisation
des droits de tirage par leurs bénéficiaires étant très difficile à anticiper. Il
n’en reste pas moins que les aides sélectives, en revanche, et plus encore
les plans d’investissement pluriannuels qui, comme le plan numérique,
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mobilisent des sommes importantes, doivent pouvoir être anticipés et
planifiés par le CNC en application d’une stratégie clairement formalisée.
D’ores et déjà, l’établissement se livre d’ailleurs à un exercice de
prévision des besoins de financement du secteur à la faveur de la
notification quinquennale à la Commission européenne du régime
d’aides, assujetti au contrôle des aides d’Etat. Ainsi, pour la période
2006-2011, puis pour la période 2012-2017, les autorités françaises ont
notifié à la Commission européenne des niveaux globaux de dépenses
d’aides exprimés en cumul pour la période considérée. En outre, en ayant
réalisé, en mars 2011, un exercice interne de budgétisation prévisionnelle
(comprenant également les soutiens automatiques), l’établissement a
attesté qu’il était en mesure d’établir de telles projections à un horizon
quinquennal, quand bien même celles-ci devraient revêtir une portée
incertaine.
Une programmation pluriannuelle des dépenses, réactualisée
chaque année de manière glissante, présenterait dans le cas du CNC un
intérêt certain, s’agissant des interventions accordées sous forme de
soutiens sélectifs et des dépenses de fonctionnement de l’établissement.
Sans constituer un plafond de dépenses opposable à l’établissement, cet
exercice de programmation permettrait néanmoins de disposer d’une
présentation pluriannuelle de la trajectoire de dépenses de l’opérateur.
Une telle démarche, formalisée dans les documents de performance du
CNC, permettrait d’établir, par la voie d’un examen approfondi que seul
l’établissement est aujourd’hui en mesure de produire, le niveau de
« juste suffisance » auquel doit correspondre le montant des recettes
inscrites dans le budget du CNC au regard des besoins auxquels sa
mission le charge de pourvoir.
Le ministère de la culture s’est montré ouvert à une telle approche :
s’il a indiqué ne pas souhaiter «
élaborer une trajectoire de dépenses qui
fasse l’objet d’un vote dans le cadre des documents de performance
», il a
néanmoins admis que «
les besoins liés à certains soutiens sélectifs, et
notamment les grands projets spécifiques comme le plan numérique,
pourraient faire l’objet d’une trajectoire pluriannuelle plus fine. Celle-ci
devra néanmoins être suffisamment souple pour permettre l’adaptation
des soutiens aux besoins qui peuvent apparaître sur un marché en
constante évolution.
»
La nécessité d’élaborer une trajectoire pluriannuelle de dépenses,
avec les souplesses requises, s’impose dans le cadre de la future loi de
programmation des finances publiques et dans la perspective d’un retour
à l’équilibre des comptes publics. Cette trajectoire comporterait
notamment des prévisions de dépenses pour les soutiens sélectifs et les
investissements d’ampleur du CNC (plan numérique).
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3 -
La formalisation d’outils de suivi et de pilotage avec le
ministère de la culture
La définition d’une trajectoire pluriannuelle de dépense ne présente
d’intérêt que si elle trouve sa traduction formelle dans un document
exprimant, sur cette base, la vision partagée par le CNC et sa tutelle quant
aux orientations stratégiques de l’établissement. A cet effet, l’élaboration
et la signature d’un contrat de performance semblent constituer la voie la
plus appropriée pour permettre au ministère de jouer véritablement son
rôle à l’égard du CNC et conférer ainsi un caractère de politique globale
et cohérente aux interventions de l’établissement. Cette perspective
devrait d’ailleurs figurer parmi les principaux objectifs assignés au
Président du CNC dans la lettre de mission dont la production ne saurait
être plus longtemps différée.
Par ailleurs, si les bilans annuels élaborés par le CNC contiennent
des données exhaustives et précises sur les filières cinématographiques et
audiovisuelles, ainsi qu’une information de synthèse sur les soutiens
publics, force est de constater qu’ils ne rendent que très peu compte du
fonctionnement interne du CNC et de ses coûts. Les dépenses liées à la
gestion du CNC, qui atteignent 43 M€ en 2011 si l’on y inclut les
dépenses d’investissement, peuvent certes apparaître mineures au regard
des masses budgétaires gérées par l’établissement (641 M€ en 2011 hors
dotations aux amortissements et aux provisions) ; elles n’en demeurent
pas moins significatives si on les compare aux budgets totaux de certains
opérateurs du ministère (62 M€ pour les vingt écoles nationales
d’architecture, 42,6 M€ pour l’établissement public du musée d’Orsay et
du musée de l’Orangerie, 36 M€ pour la Comédie française
101
).
Jusqu’à l’élaboration d’un rapport annuel d’activité, pour la
première fois en 2012 à la demande de la Cour, l’absence de données
chiffrées sur la gestion interne de l’établissement, apparaît comme une
anomalie dans le champ des établissements publics, à plus forte raison
lorsqu’elle concerne un établissement de la taille du CNC. La gestion du
centre demeure mal connue, alors même que le CNC a de brillantes
réussites à faire valoir, telles que sa réforme budgétaire et comptable ou
l’efficience et la qualité du recouvrement des taxes affectées. En outre, la
communication de ces données permettrait de disposer d’une information
régulièrement mise à jour sur les modalités de gestion de cet
établissement particulier, ainsi que sur les projets propres à son
fonctionnement interne.
En définitive, le pilotage du CNC souffre de l’absence de contrat
de performance, de lettre de mission adressée au président de
101
Comptes financiers 2010 des opérateurs
.
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l’établissement et de rapport d’activité reflétant annuellement les
évolutions de sa gestion interne.
B - Les paramètres d’une réflexion sur le financement
du CNC
1 -
La nécessaire « mise sous tension » de l’établissement
Dans un contexte budgétaire fortement contraint, la préservation
du modèle de financement par le CNC des activités cinématographiques
et audiovisuelles suppose d’envisager les modalités d’une « mise sous
tension » de l’établissement aux fins de garantir un ajustement du niveau
de dépenses – et donc de recettes – compatible avec la situation actuelle
des finances publiques.
La politique de soutien au cinéma en Allemagne
Le modèle de soutien public au cinéma en Allemagne repose
principalement sur une agence nationale, la FFA (
Filmförderungsanstalt
), et
sur des soutiens versés par les
Länder
. L’ensemble des aides publiques au
secteur représentait 316 M€ en 2010, soit environ moitié moins que les
soutiens versés par le CNC.
Les recettes de la FFA proviennent en majorité de prélèvements sur
le secteur via des taxes affectées (à 42 % sur les recettes des exploitants, à
32 % sur l’industrie vidéo et à 18 % sur les services de télévision). Il n’existe
pas en Allemagne d’équivalent à la part « distributeurs » de la TST.
Les modalités de pilotage budgétaire de la dépense par le CNC et la
FFA obéissent à des logiques différentes. En France, chaque producteur,
distributeur ou exploitant, bénéficiant de soutien automatique de la part du
CNC, dispose d’un compte propre auprès de l’établissement, crédité d’un
montant correspondant aux revenus tirés de l’exploitation d’une ou de
plusieurs oeuvres. Les sommes générées ne peuvent être mobilisées qu’en vue
d’un réinvestissement dans la production, la distribution ou l’exploitation
d’autres oeuvres.
En Allemagne, les conditions d’utilisation de l’aide sont similaires
mais le pilotage de la dépense est déterminé plus en amont. Les dépenses de
la FFA dépendent en effet d’une répartition préalablement fixée par la loi
entre les différents secteurs aidés (art. 68 de la
Filmförderungsgesetz
) :
-
37 %
pour
le
soutien
automatique
à
la
production
(
Referenzfilmförderung
),
-
8,5 %
pour
le
soutien
sélectif
à
la
production
(
Projektfilmförderung
),
- 2 % pour le court-métrage,
- 3 % pour l’aide au développement,
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- 8 % pour le soutien automatique à l’exploitation,
- 17,5 % pour le soutien sélectif à l’exploitation,
- 10 % pour le soutien automatique à la distribution ;
- 12,5 % pour le soutien automatique à la distribution ;
- 1,5 % pour la formation continue et d’autres mesures.
La dépense est donc maîtrisée globalement dans la mesure où son
montant ne dépend que des recettes perçues à travers les taxes, tandis que son
affectation n’est décidée qu’en proportion de l’enveloppe.
Ce schéma se répète à l’échelle des bénéficiaires des aides
automatiques : les dispositifs allemands d’aide automatique prennent en
compte à importance égale la génération des soutiens et la définition de
l’enveloppe budgétaire qui y est consacrée, à travers un système de points.
Chaque bénéficiaire d’une aide (producteur, distributeur ou exploitant) se
voit ainsi attribuer, selon un barème dépendant principalement du nombre
d’entrées, un certain nombre de points. La valeur du point est fixée chaque
année en fonction du montant des recettes perçues par la FFA et du total des
points accumulés par les bénéficiaires des aides. Le soutien accordé est
calculé en fonction de la valeur du point l’année du fait générateur (la
production d’un film), et peut être utilisé dans les deux ans.
A la différence du système français, dans lequel les modalités de
calcul des aides ne sont revues que ponctuellement, en cas de fléchissement
du marché (pour la dernière fois en 2005), le dispositif adopté par la FFA
permet donc d’ajuster en continu les dépenses aux recettes.
De ce point de vue, il semble souhaitable de s’interroger sur la
pertinence d’un financement exclusif du CNC par des taxes affectées. En
effet, quels que soient les arguments qui plaident en sa faveur, rien ne
justifie que ce mode de financement soit exclusif, autrement dit, qu’il
couvre l’intégralité des besoins en terme de dépenses qu’il incombe à
l’établissement de satisfaire.
Certes, l’on peut considérer que, pour ce qui est du soutien
automatique, le mécanisme d’épargne forcée avec lequel celui-ci se
confond rend sans doute légitime une telle couverture. En revanche, un tel
raisonnement ne saurait valoir pour les soutiens sélectifs. En effet,
ceux-ci procèdent d’une politique publique dont les orientations et le
niveau des interventions jugé nécessaire demeurent, en termes de
pilotage, du ressort des pouvoirs publics.
Or l’expérience prouve qu’en introduisant dans le plan de
financement d’un établissement public un terme de bouclage prenant la
forme d’une subvention issue du budget général, l’État se trouve en
mesure de disposer d’un levier lui permettant d’être effectivement
impliqué dans la stratégie de l’organisme et d’exercer à bon escient son
rôle d’autorité de tutelle.
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Dans le cas du CNC, la mise en oeuvre d’un tel principe serait sans
aucun doute de nature à favoriser le passage d’une logique de pilotage par
la recette à celle du pilotage par la dépense. Une fois déterminé
ex ante
le
niveau optimal des besoins de financement du CNC au regard des
objectifs de la politique publique en faveur du cinéma et de l’audiovisuel,
le taux des taxes serait arrêté de telle manière qu’il soit nécessaire de
compléter l’affectation de leur produit par une subvention du ministère de
la culture et de la communication, destinée à équilibrer le plan de
financement de l’établissement.
Ainsi, une part de la couverture financière des besoins du CNC
procéderait de l’arbitrage budgétaire global, portant sur l’ensemble des
dépenses de la mission culture, contrairement à la situation actuelle qui
exclut, de fait, la politique du cinéma et de l’audiovisuel de cet arbitrage,
alors même que les autres secteurs (le spectacle vivant, le patrimoine) y
sont assujettis. En outre, le ministère serait fondé à moduler le montant de
cette subvention sur la base des engagements figurant dans le contrat de
performance, en fonction des résultats dont l’établissement rendrait
compte à sa tutelle. Le ministère de la culture a indiqué qu’il n’était pas
favorable à une budgétisation d’une fraction du financement du CNC, une
telle démarche impliquant, selon lui, «
un retour en arrière par rapport
aux
réformes
entreprises
ces
dernières
années
(notamment
la
transmission de la tutelle de la FEMIS et de la Cinémathèque)
». Il
indique par ailleurs que la budgétisation du financement du CNC «
ne
permettrait pas d’exercer une tutelle plus efficace
», estimant qu’il
n’existe «
pas de lien mécanique entre la nature des ressources des
opérateurs et la qualité de la tutelle. Celle-ci repose avant tout sur des
outils de pilotage (lettres de mission, dialogue de gestion annuel et infra-
annuel) qui, seuls, permettent de vérifier que l’opérateur atteint
effectivement les objectifs de politique publique qui lui sont assignés.
»
La Cour ne partage pas l’analyse du ministère. Elle observe que les
débudgétisations opérées au cours des dernières années portaient sur des
activités très précisément ciblées et que les financements antérieurement à
la charge du ministère ne correspondaient en rien au principe d’une
subvention générale d’équilibre allouée au CNC. Par ailleurs, ces
opérations n’ont à l’évidence pas été compensées par un renforcement des
outils de pilotage de la tutelle, la plupart d’entre eux (lettre de mission,
contrat de performance) demeurant aujourd’hui inexistants comme cela a
pu être évoqué à maintes reprises. Sans pour autant considérer que
l’intensité de la tutelle est subordonnée à la faculté d’allouer une
subvention générale d’équilibre, elle n’en estime pas moins que le recours
à cette technique de financement est de nature à constituer un levier de
pilotage efficace des établissements publics.
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2 -
La fiscalité des opérateurs de communications électroniques,
une recette envisageable pour contribuer au financement des
politiques culturelles
Créée en 2007 par une loi qui visait à encadrer « la télévision du
futur »
102
, la taxe sur la distribution des services de télévision a
incontestablement joué un rôle précurseur en posant le principe de la
nécessaire contribution des opérateurs de communications électroniques
au financement de la création. S’étendant aux chaînes de télévision
autodistribuées et aux câblo-opérateurs, cette nouvelle taxe a marqué
l’ultime élargissement du système de taxation historique du CNC, qui
avait
successivement
englobé
la
projection
des
oeuvres
cinématographiques en salles, la diffusion d’oeuvres audiovisuelles par
des chaînes de télévision, puis la location et la vente de vidéogrammes.
Le
contexte
a,
depuis
lors,
évolué.
Les
opérateurs
de
communications électroniques sont ainsi devenus les principaux assujettis
à la nouvelle taxe (apportant 150 M€ de contributions nettes en 2011, soit
près de 55% des recettes de TST « distributeurs »), alors même que les
évolutions d’assiette ont progressivement atténué la clarté du lien entre le
fait générateur de la taxation et son objet (partie I du présent rapport).
Parallèlement, plusieurs domaines d’activité (la musique, le spectacle
vivant et la presse notamment) ont revendiqué le produit d’une taxe
frappant les opérateurs de communications électroniques.
Prenant acte de l’impact incontestable de la diffusion des
technologies de l’information et de la communication sur les pratiques
culturelles
103
, le ministère de la culture et de la communication a engagé
une réflexion sur la contribution des acteurs du champ numérique au
financement de la politique culturelle. Dans le cadre des travaux
préparant la création du centre national de la musique, le ministère de la
culture semble d’ailleurs avoir implicitement admis le financement d’un
tel organisme par une part des recettes de TST « distributeurs », suivant
en cela les propositions du rapport de préfiguration. Cette réflexion
globale demeure cependant marquée par de lourdes incertitudes :
- incertitudes quant à l’impact réel du développement des
nouveaux supports sur la chaîne de valeur des biens culturels ;
- incertitudes quant aux conditions de taxation des opérateurs
numériques domiciliés à l’étranger ;
102
Loi n° 2007-309 du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion
audiovisuelle et à la télévision du futur.
103
Olivier Donnat, département des études, de la prospective et des statistiques du
ministère de la culture et de la communication,
Les pratiques culturelles des Français
à l’ère numérique
, 2009.
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-
incertitudes quant à la conformité au droit communautaire de
toute nouvelle taxation des opérateurs de communications électroniques.
Les incertitudes que fait peser le contexte communautaire sur la fiscalité
des opérateurs de communications électroniques
En raison de l’affectation de son produit au CNC, la taxe sur les
services
de
télévision
« distributeurs »
est
assujettie
au
contrôle
communautaire des aides d’État. La nouvelle assiette, résultant de la loi de
finances pour 2012, est d’ailleurs en cours d’examen par la Commission
européenne sur ce fondement.
Consulté sur ce point, le SGAE estime que «
la conformité de la TST
n’est examinée par la Commission dans le cadre de son contrôle de
compatibilité des aides d’État que parce qu’il s’agit d’une taxe affectée à un
régime d’aides d’État, c’est-à-dire qu’il existe un lien d’affectation
contraignant entre la taxe et l’aide en vertu de la règlementation nationale
pertinente. Si le produit de la TST distributeurs était versé intégralement au
budget de l’État, ce lien d’affectation disparaîtrait, et cette partie de la TST
n’aurait plus à être notifiée ni examinée par la Commission au titre des
règles du TFUE relatives aux aides d’État. Ceci ne préjuge pas du contrôle
que pourrait effectuer la Commission sur la conformité de la TST
distributeurs au regard d’autres règles du TFUE ou du droit dérivé.
»
La possibilité de frapper par de nouvelles impositions le chiffre
d’affaires des opérateurs de communications électroniques dépend ainsi, en
grande partie, de l’issue du contentieux actuellement pendant devant la Cour
de justice de l’Union européenne au sujet de la taxe « télécoms ».
Conformément à sa doctrine constante, la Cour demeure très
réservée quant à la perspective de voir se multiplier les taxes affectées
pour assurer tout ou partie du financement des établissements chargés de
porter une politique publique. En outre, dans un contexte marqué par la
fiscalisation des opérateurs de communication électronique, il lui semble
nécessaire d’observer la plus grande prudence quant aux voies qui
pourraient être explorées dans le but d’accroître le niveau de taxation
d’un secteur d’activité dont les projections de croissance sont, de ce point
de vue, assurément attractives. Si tant est qu’une telle option ne soit pas
incompatible avec l’état du droit communautaire, une taxation unique,
dont le produit, qui pourrait être plus important qu’actuellement, serait
alors versé au budget général de l’État constitue pour la Juridiction la
seule perspective alternative au système aujourd’hui en vigueur.
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C - Les scénarios envisageables pour faire évoluer le
modèle de financement du CNC
A partir des observations qui précèdent, il est possible de
concevoir sous la forme de trois scénarios une évolution du modèle de
financement du CNC fondés sur l’idée d’assurer une adéquation maîtrisée
des recettes et des dépenses du CNC. S’ils divergent sur les modalités
d’organisation du financement, ils ont tous pour point de départ commun
le principe de la détermination
ex ante
du niveau de la dépense du CNC
dans une perspective pluriannuelle. Cette programmation du budget
alloué aux dépenses prendrait la forme d’une cible annuelle pour les
dépenses de soutiens sélectifs et les investissements du CNC ; les
dépenses de soutiens automatiques seraient quant à elles encadrées par
une valeur plancher et une valeur plafond.
1 -
La fixation d’un plafond de dépenses pluriannuel
commandant la détermination du barème des taxes affectées
Sur la base du niveau arrêté de dépenses prévisionnelles, le
législateur détermine le barème des taxes affectées au moment de la
signature du contrat de performance. Le barème ainsi défini demeure
inchangé pour la durée d’exécution du contrat. Le CNC continue à
recouvrer l’ensemble des taxes qui lui sont aujourd’hui affectées, y
compris la TST « distributeurs ». En cas d’excédent de recettes constatées
par rapport aux recettes prévisionnelles, celles-ci demeurent affectées au
CNC. A l’inverse, l’établissement corrige à la baisse le taux de retour des
soutiens automatiques et le volume des aides sélectives.
Ce scénario, le plus proche de la configuration qui prévalait avant
la mise en place de l’écrêtement de TST en loi de finances pour 2012,
présente l’avantage de préserver l’autonomie du compte de soutien, tout
en assujettissant le CNC à une trajectoire de dépenses concertée avec les
tutelles. En outre, sauf à ce que la TST « distributeurs » soit remise en
cause par les instances communautaires, aucun risque supplémentaire
n’est engagé par rapport à la situation juridique actuelle.
Ce scénario n’ouvre aucune possibilité pour l’État de récupérer sur
son budget une partie des recettes de taxe affectées au CNC. La recherche
de recettes fiscales supplémentaires pourrait en revanche justifier une
baisse du barème des taxes affectées au CNC dans le cadre du contrat de
performance
et,
en
maintenant
une
pression
fiscale
constante,
l’augmentation, à due concurrence, des autres taxes pesant sur les
opérateurs assujettis et dont le produit est versé au budget général de
l’État.
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2 -
Le recours à des écrêtements ciblés
Le barème des taxes affectées au CNC continue d’être établi sur
une base relativement fruste, mais le Centre conserve le produit de ces
taxes. Dès lors que les recettes constatées dépassent la prévision de
dépenses de l’année, l’État récupère le trop-perçu par l’intermédiaire d’un
écrêtement sur le produit des taxes ou d’un reversement du Centre au
budget général.
Proche de la situation actuelle, ce scénario en diffère néanmoins
par le caractère ciblé des écrêtements si ce mécanisme prévaut. Ceux-ci
ne sont plus appliqués, de manière homothétique, au CNC comme à
l’ensemble des opérateurs de l’État, mais résultent de la confrontation du
besoin de financement prévisionnel de l’établissement et du niveau de
recettes fiscales constaté. Ainsi, le CNC se trouve bien assujetti à une
trajectoire de dépenses et l’État peut envisager de disposer d’une
ressource additionnelle pour financer d’autres activités (culturelles ou
autres encore). Cette approche présente l’avantage de ne pas obliger à
revoir le taux des taxes affectées au CNC, pas plus qu’à moduler les taux
d’autres taxes ou impôts pour conserver le même niveau de recettes
globales. En revanche, elle n’exonère pas, à moyen terme, de tout risque
de contentieux communautaire, lequel pourrait emporter une perte nette
de recettes au cas où serait remise en cause la possibilité même de
poursuivre le prélèvement de taxes jugées alors irrégulières.
3 -
La budgétisation d’une partie de l’actuelle TST
« distributeurs »
Ce scénario conduit à
dédoubler le régime de la TST
« distributeurs » selon la typologie des entreprises qui y sont assujetties :
−
la taxe pesant sur les chaînes de télévision autodistribuées et les
câblo-opérateurs demeure affectée au CNC sous la forme d’une
TST « distributeurs » au périmètre réduit ; l’établissement
continue à recouvrer la taxe correspondante ;
−
une taxe pesant sur le chiffre d’affaires des opérateurs de
communications électroniques, recouvrée par la direction
générale des finances publiques, est affectée au budget général
de l’État.
La faisabilité de ce scénario suppose qu’aient été au préalable levés
les risques non négligeables que le droit communautaire fait peser sur la
possibilité d’une nouvelle taxation des opérateurs de communications
électroniques ayant pour effet de modifier substantiellement le régime
actuel de taxation qui leur est appliqué.
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Dans l’hypothèse où cette circonstance ne se réaliserait pas, le
CNC se verrait alors accorder une subvention du ministère, qui viendrait
compléter les recettes fiscales qui lui sont affectées et compenser la perte
de recettes résultant de la suppression d’une partie de la TST
« distributeurs ».
Cette évolution ne bouleverserait pas les équilibres de financement
du CNC. Contrairement à la TSA et aux taxes vidéos, la part
« distributeurs » de la TST constitue une ressource qui, n’étant pas
corrélée au calcul des soutiens automatiques, demeure à la libre
disposition de l’établissement. Une refonte de la TST « distributeurs »
n’aurait pas donc d’impact immédiat sur le montant des soutiens versés
par le CNC au titre des dispositifs de soutien automatique.
Par ailleurs, une telle mesure n’ôterait pas toute autonomie à
l’établissement, une part substantielle de ses ressources demeurant liée à
des taxes directement affectées (TSA, taxes vidéos, TST « éditeurs » et
taxe sur les chaînes de télévision autodistribuées et les câblo-opérateurs).
Le CNC craint qu’un financement budgétaire de son activité
n’implique un «
retour à la rigidité dans la mise en oeuvre du fonds de
soutien
», au motif que «
la part de crédits relevant de la subvention du
ministère devrait être intégrée dans la mission Culture, ce qui signifie
une non-fongibilité entre ces crédits et ceux gérés par ailleurs par le
CNC au titre des autres taxes lui demeurant affectées
». L’établissement
met en avant la difficulté à isoler des dispositifs de soutien qui
relèveraient spécifiquement de la mission « culture » et signale la
complexité de l’information budgétaire qui en résulterait.
Les craintes de l’établissement ne semblent pas pour autant
fondées. En effet, si la situation qu’il décrit a pu caractériser la façon dont
les crédits étaient mis en oeuvre avant 2010 au titre de la mission
« culture », les règles qui régissent désormais les subventions pour
charges de service public destinées au financement des opérateurs de
l’État prévoient que ces dernières constituent par nature «
une subvention
globalisée destinée à couvrir indistinctement des dépenses de personnel
et de fonctionnement de l’opérateur et, le cas échéant, d’investissement
en lui conférant une capacité d’autofinancement accrue.
»
104
Seules les
subventions destinées à couvrir une dépense d’investissement devraient
donc être identifiées par le recours à une nomenclature spécifique. Cette
contrainte serait de faible portée, l’essentiel des aides versées par le CNC
étant à ce jour constituées par des dépenses d’intervention (550 M€ en
2011, soit 86 % des soutiens).
104
Les subventions versées aux opérateurs sont intégralement inscrites au compte 74
(« subvention d’exploitation ») du compte de résultat prévisionnel.
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Quels que soient les scénarios retenus, il convient à tout le moins
d’inscrire la question du financement du CNC dans une perspective
pluriannuelle qui permette de stabiliser le cadre fiscal associé à l’activité
du CNC. La signature d’un contrat de performance doit constituer un
préalable, non seulement pour obliger le CNC à travailler sur son
dispositif d’intervention et sa trajectoire de dépenses, mais également
pour garantir à son financement une visibilité appropriée.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
La situation d’aisance financière dans laquelle se trouve le CNC
s’explique en partie par la nécessité d’immobiliser des sommes
susceptibles d’être engagées par les professionnels au titre du soutien
automatique ou des aides sélectives que l’établissement leur a accordées.
Au terme d’une réforme budgétaire et comptable majeure menée entre
2005 et 2007, le CNC comptabilise désormais ces engagements sous la
forme de provisions, cette démarche étant source de transparence et
d’une performance accrue dans la gestion des aides.
La forte augmentation du produit des taxes affectées au CNC
constatée depuis 2007 n’est cependant pas totalement gagée par
l’immobilisation des sommes dues au titre des aides, l’établissement
ayant par ailleurs immobilisé une partie de ce surplus pour financer un
plan de numérisation de grande ampleur, pour constituer une réserve de
précaution en cas de retournement de conjoncture et pour préparer le
déménagement de l’établissement hors de son implantation historique.
A l’heure actuelle, le CNC évolue ainsi dans un environnement
budgétaire ne connaissant aucune forme de contrainte. Les circuits de
financement de l’établissement, conduisant ce dernier à recouvrer les
taxes qui lui sont affectées, ainsi que les insuffisances caractérisant le
pilotage de la gestion font obstacle à une présentation justifiée et affinée
de l’adéquation des ressources du CNC aux besoins de financement des
secteurs qu’il soutient. A défaut d’une telle justification, les opérations de
maîtrise de la dépense conduites en 2011 et en 2012 traduisent un
pilotage budgétaire défaillant.
Il convient, pour dépasser ces limites, d’inverser la logique qui
conduit à faire découler le niveau des dépenses de celui des recettes
procédant de la mécanique autonome des taxes affectées au CNC. Il
s’agirait ainsi de privilégier désormais une approche qui conduit à
subordonner le niveau de la recette à une appréciation préalable et aussi
précise que possible des besoins de l’établissement.
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Cette évolution requiert, au minimum, que l’établissement
enrichisse ses outils d’information et que les leviers de son pilotage
soient également renforcés. Au-delà et dans une perspective de moyen
terme, le passage d’un dispositif de pilotage autonome par la recette à
celui d’un pilotage concerté par la dépense pourrait se traduire par une
évolution de la structure de financement du CNC.
A cet effet, la Cour formule les recommandations suivantes :
9. faire réaliser à partir 2013 un audit périodique des provisions
constituées par le CNC au titre des aides par le contrôle général
économique et financier. Engager une démarche de certification des
comptes du CNC ;
10. remplacer le document unique de performance du CNC par
deux documents, l’un prévisionnel, l’autre rétrospectif, sur le modèle des
PAP et des RAP. Communiquer au Parlement ces deux documents au
rythme de la procédure budgétaire (projet de loi de finances / loi de
règlement) ;*
11. en liaison avec le ministère de la culture et de la
communication, élaborer une trajectoire pluriannuelle de dépenses dans
le cadre des documents de performance ;
12. élaborer un contrat de performance liant le CNC au ministère
de la culture et de la communication et comportant un volet consacré aux
obligations de qualité de service ;
13. établir, dans les plus brefs délais, une lettre de mission
définissant les priorités et les modalités d’évaluation du président du
CNC ;
14. enrichir le rapport d’activité annuel, établi pour la première
fois en juillet 2012, de données sur le fonctionnement interne de
l’établissement (indicateurs de la performance de gestion, politique
immobilière, systèmes d’information, etc.).
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Conclusion générale
Opérateur central de la politique de soutien public à la filière
cinématographique et audiovisuelle, le CNC a bénéficié ces dernières
années de ressources affectées très dynamiques.
Ces crédits ont été employés par l’établissement au profit de ses
dispositifs de soutien et de son fonctionnement interne. L’extension du
champ de ses aides nécessiterait d’être davantage assortie d’une
évaluation de leur impact réel. De même, la performance de gestion de
l’établissement gagnerait à être mieux maîtrisée et plus finement mesurée.
La Cour formule plusieurs recommandations en ce sens, visant à
améliorer les outils de pilotage de l’établissement et à poursuivre la
modernisation de sa gestion.
Dans un contexte de forte contrainte sur les finances publiques, ce
suivi de l’efficacité et de l’efficience de la gestion du CNC doit guider
une réflexion plus large sur le modèle de gestion et de financement de
l’établissement.
Depuis la création du CNC en 1946, l’extension des missions de
l’établissement et la multiplication des taxes qui lui ont été affectées ont
conduit à soustraire progressivement la politique cinématographique et
audiovisuelle du champ des arbitrages budgétaires opérés pour le reste
des
politiques
culturelles,
et
à
laisser
s’accroître
de
manière
ininterrompue les ressources publiques consacrées au financement des
secteurs encadrés par le CNC.
Cette situation spécifique, qui déroge à la règle d’universalité
budgétaire, conduit aujourd’hui à reconduire, année après année, entre
700 M€ et 800 M€ de recettes fiscales au bénéfice d’un établissement au
statut hybride, tout à la fois administration centrale et opérateur de l’État.
En 2011, les sommes en jeu – 806 M€ de recettes fiscales – ont représenté
29,3 % des crédits de paiement de la mission « culture » (2 754,21 M€).
Sauf à opérer une remise en cause radicale de l’ensemble du
modèle de soutien aux secteurs audiovisuels par une budgétisation de
l’intégralité des ressources du CNC, la réponse à cette question passe par
une modification substantielle des modalités de financement de
l’établissement, visant à assujettir celui-ci à une meilleure adéquation de
ses ressources à ses besoins objectifs, et par là même, à le faire entrer
dans le champ des contraintes auxquelles doivent être désormais soumis
l’ensemble des opérateurs publics dans le cadre du retour à l’équilibre des
comptes publics.
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En tout état de cause, il importe que toute réflexion portant sur le
modèle de financement du CNC demeure centrée sur l’évaluation du juste
besoin induit par la poursuite optimisée de ses activités et l’adéquation du
niveau de recette permettant de le satisfaire. En l’espèce, la perspective
pour l’État de récupérer des recettes additionnelles ne saurait être
envisagée que sous l’angle d’un effet collatéral du dispositif finalement
adopté, et non comme l’un des critères déterminants du choix qui pourrait
être fait.
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Annexes
Annexe 1 : Demande du Sénat et réponse du Premier président
Annexe 2 : Le paysage du soutien public au cinéma et à l’audiovisuel
Annexe 3 : La part « distributeurs » de la taxe sur les services de
télévision, une imposition dont les déterminants et l’affectation ne sont
pas corrélés
Annexe 4 : Les dispositifs de soutien cofinancés
Annexe 5 : Détail des aides accordées par le CNC à des associations en
2011 (en euros)
Annexe 6 : La prise en compte des engagements pluriannuels du CNC
sous forme de provisions
Annexe 7 : Soldes intermédiaires de gestion du CNC entre 2006 et 2011
(en milliers d’euros)
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A
nnexe 1
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Annexe 2 – Le paysage du soutien public au cinéma et à
l’audiovisuel
Les diffuseurs
La loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la
communication et les décrets n° 90-66 du 17 janvier 1990, n° 2010-416
du 27 avril 2010 et n° 2010-747 du 2 juillet 2010 (ainsi que le décret
n° 2010-379 du 12 novembre 2010 relatif aux services de médias
audiovisuels à la demande) imposent aux diffuseurs de contenus
audiovisuels des obligations d’investissement et de diffusion qui
constituent une modalité importante du soutien direct et indirect à la
production cinématographique et audiovisuelle française et européenne.
Si cette contribution des chaînes de télévision au financement
d’oeuvres cinématographiques et audiovisuelles n’est pas de même nature
que celle du CNC
105
, elle n’en constitue pas moins un avantage financier
accordé aux producteurs, dont le cadre juridique et l’enveloppe globale
sont définis par l’État.
On estime l’investissement des chaînes dans la production
audiovisuelle aidée à 840 M€ en 2011, ce qui représente par exemple
71,4 % du financement de la fiction
106
. Les investissements des chaînes
de télévision dans les projets cinématographiques agréés représentaient
365,8 M€ en 2011 (318,9 M€ sous forme de préachats et 46,9 M€ sous
forme d’apports en coproduction), couvrant en moyenne 32 % du devis
des films d’initiative française
107
.
Dispositions fiscales et garanties bancaires
Le crédit d’impôt pour dépenses de production d’oeuvres
cinématographiques, créé en 2004, permet à une société de production,
sous conditions, de déduire de son imposition jusqu’à 20 % de ses
dépenses de production, avec un plafond d’un million d’euros par film.
En 2011, la dépense fiscale liée à ce crédit d’impôt s’élevait à 58 M€. Le
crédit d’impôt pour dépenses de production d’oeuvres audiovisuelles,
entré en vigueur en 2005 selon un principe similaire, représente une
dépense fiscale de 49 M€ en 2011. Enfin, le crédit d’impôt international,
instauré en 2009, concerne des oeuvres dont la production est engagée par
une société étrangère dont au moins une partie de la fabrication a lieu en
France. Les dépenses fiscales afférentes représentaient 8 M€ en 2011.
105
En vertu de la jurisprudence
UTECA
(CJCE, 5 mars 2007), il ne s’agit pas d’une
aide d’État au sens de l’article 87 du TCE.
106
La production audiovisuelle aidée en 2011
, CNC.
107
La production cinématographique aidée en 2011
, CNC.
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Les sociétés pour le financement de l’industrie cinématographique
et audiovisuelle (SOFICA)
108
constituent une forme de soutien fiscal à la
production, complémentaire aux crédits d’impôt, qui associe des
souscripteurs, bénéficiaires de l’avantage fiscal, et un producteur,
bénéficiaire de l’investissement. La réduction d’impôt peut s’élever
jusqu’à 36 % des souscriptions en numéraire (dans la limite de 18 000 €
par foyer fiscal). En 2011, cette réduction représente une dépense fiscale
de 28 M€, pour un investissement global de 36 M€ dans les films agréés.
Enfin, les sociétés de production peuvent bénéficier d’une garantie
bancaire via l’IFCIC, établissement de crédit agréé détenu à 49 % par
l’État, le groupe Oséo et la Caisse des dépôts et consignations.
L’établissement facilite l’accès des industries culturelles au financement
bancaire par une participation en risque aux prêts accordés par des
banques. En 2011, l’IFCIC a ainsi délivré à ce titre un montant total de
garanties de 228 M€ pour des sociétés de cinéma et d’audiovisuel,
auxquels s’ajoutent 6 M€ pour les autres secteurs d’activité relevant du
CNC (exploitation cinématographique, industries techniques, jeu vidéo).
Les collectivités territoriales
La participation des collectivités territoriales au financement de
l’aide aux secteurs cinématographique et audiovisuel a fortement
augmenté au cours de la période récente. Le CNC accompagne cet effort
dans le cadre d’une politique conventionnelle mise en oeuvre au cas par
cas avec les collectivités concernées. Les montants engagés en 2011, tous
partenaires confondus (collectivités, CNC et DRAC), ont atteint
108,96 M€, dont 82 M€ engagés par les collectivités territoriales (61 M€
en 2010).
Les autres instruments de soutien
A ces différentes aides publiques s’ajoutent d’autres types de
soutien indirects, moins aisément chiffrables :
−
les obligations de diffusion d’oeuvres cinématographiques et
audiovisuelles qui incombent aux chaînes de télévision en vertu
du décret de 1990 susmentionné ;
−
le respect de la chronologie des médias, définissant l’ordre et
les délais dans lesquels les diverses exploitations d’une oeuvre
(salle, télévision, vidéo…) peuvent intervenir, en application
108
Sociétés anonymes de droit français, elles ont pour activité exclusive le
financement en capital d’oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles agréées par le
président du CNC.
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des articles L. 231-1 à L. 234-2 du code du cinéma et de
l’image animée ;
−
les divers dispositifs fiscaux dont peuvent bénéficier les
entreprises ayant leur principale activité dans le secteur
cinématographique ou audiovisuel (TVA à taux réduit,
amortissements dérogatoires, exonération de cotisation foncière
des entreprises) ;
−
la part des allocations versées, en application des annexes 8 et
10 de la convention de l'assurance chômage, aux intermittents
du spectacle travaillant dans le secteur audiovisuel ou
cinématographique. En 2010, ces derniers représentaient
environ 32 % des allocataires, soit près de 27 000 employés
(huit des dix principaux employeurs d’intermittents relèvent de
ces secteurs : ils ont eu recours en 2010 à plus de 16 000
salariés du spectacle). En 2010, le déficit total de ce régime
s’élevait à 1,032 Md€, dont 330,2 M€ pour le seul secteur
cinématographique et audiovisuel.
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Annexe 3 – La part « distributeurs » de la taxe sur les
services de télévision, une imposition dont les
déterminants et l’affectation ne sont pas corrélés
Le
financement
du
compte
de
soutien
aux
industries
cinématographiques et audiovisuelles repose sur un mécanisme de
prélèvement d’une partie des revenus de la diffusion des programmes et
de réutilisation des sommes prélevées pour financer la production de
nouvelles oeuvres originales françaises et européennes, qui viendront à
leur tour alimenter les circuits de diffusion. La justification de l’extension
aux distributeurs de services de télévision par câble et sur Internet de ce
modèle de financement, à l’origine de la TSA, de la taxe sur les
vidéogrammes et de la TST « éditeurs »,
repose sur l’idée que ces
opérateurs tirent profit de la commercialisation de services de télévision
sans pour autant participer par ailleurs au financement des contenus
cinématographiques et audiovisuels à l’instar des acteurs « historiques »
de la diffusion de ces contenus.
La notion de distributeur de services de télévision désigne «
toute
personne qui établit avec des éditeurs de services des relations
contractuelles
en
vue
de
constituer
une
offre
de
services
de
communication audiovisuelle mise à disposition auprès du public par un
réseau de communications électroniques.
»
109
Elle recouvre donc, en
premier lieu, les chaînes de télévision qui s’auto-distribuent (Canal +,
Canalsatellite) ainsi que les entreprises distribuant la télévision par câble
(principalement Numéricable).
Aux termes de la loi du 5 mars 2007 sur la télévision du futur, «
est
également regardé comme distributeur de services de télévision toute
personne proposant un accès à des services de communication au public
en ligne ou à des services de téléphonie, dès lors que la souscription à ces
services permet de recevoir, au titre de cet accès, des services de
télévision.
» Cette disposition inclut donc mécaniquement dans le champ
de la taxe instituée par la loi de finances pour 2008 les fournisseurs
d’accès à Internet (FAI) et les opérateurs de téléphonie mobile, puisqu’à
cette date, l’état des technologies leur permet effectivement d’inclure ce
service dans leur offre.
109
Article 2-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de
communication ; le même article précise que doit être «
également regardée comme
distributeur de services toute personne qui constitue une telle offre en établissant des
relations contractuelles avec d'autres distributeurs
».
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I.
Il n’est pas contestable que la distribution de services
de télévisions occupe une place de plus en plus
importante dans l’usage d’Internet et de la téléphonie
mobile.
Rendue possible par la diffusion rapide du progrès technologique,
la consommation de services de télévision sur Internet et, dans une
moindre mesure, par la téléphonie mobile est un phénomène en
expansion.
Les
études
disponibles
témoignent
d’une
croissance
très
dynamique des abonnements permettant de recevoir des services de
télévision, par Internet et par la téléphonie mobile. D’après l’autorité de
régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP)
110
,
le nombre d’abonnements à un service de télévision souscrits en France
dans le cadre d’un forfait couplé avec Internet est passé de 4,5 millions au
31 décembre 2007 à 12,3 millions au 31 décembre 2011. A cette date,
58,4 % des accès à haut débit sont désormais couplés avec un service de
diffusion de télévision souscrit par le client auprès de son fournisseur
d’accès à Internet. Toujours d’après l’ARCEP, les utilisateurs sont de
plus en plus nombreux à utiliser un service de téléphonie mobile
(comprenant l’accès à la télévision) sur le réseau de troisième génération
(3G) : 27,8 millions de clients, correspondant à 40 % du parc de
téléphones mobiles, sont ainsi enregistrés sur le réseau 3G au
31 décembre 2011.
De son côté, l’enquête annuelle du centre de recherche pour l’étude
et l’observation des conditions de vie (CREDOC) sur la diffusion des
technologies de l’information et de la communication dans la société
française
111
confirme la part croissante d’Internet dans les moyens
d’accès aux services de télévision. L’accès Internet à haut débit
représenterait, en 2011, 37 % des accès aux services de télévision, en
deuxième position derrière la télévision numérique terrestre (61 %) et
devant le satellite et le câble. A titre de comparaison, l’accès Internet ne
représentait que 10 % des accès aux services de télévision en 2007.
L’étude fait cependant état de résultats plus mitigés s’agissant de l’accès
aux services de télévision par la téléphonie mobile : «
regarder la
télévision sur son téléphone mobile reste extrêmement peu développé
[en
2011]
: moins d’un possesseur de téléphone mobile sur dix le fait (8 %
exactement).
» Le développement de la licence de quatrième génération
(4G), augmentant les capacités de circulation des données sur le réseau
110
ARCEP,
Observatoire trimestriel des marchés de communications électroniques
en France
, 4
e
trimestre 2011, résultats définitifs.
111
Enquête réalisée sur la base d’un échantillon représentatif de 2 241 personnes.
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mobile, pourrait néanmoins se traduire par une augmentation rapide de la
consommation de services de télévision sur téléphones cellulaires.
Par ailleurs, selon une étude réalisée par l’Institut de l’audiovisuel
et des télécommunications en Europe (IDATE) en mars 2012, la
consommation de vidéo (légale et illégale) représenterait en 2010 89 %
du trafic des réseaux d’accès à haut débit et à très haut débit fixes, chiffre
qui s’établit à 83 % si l’on retire les trafics illégaux. Cette part très
importante de la vidéo dans le trafic total s’expliquerait en grande partie
par la consommation de la télévision sur ADSL qui représente 90 % du
trafic audiovisuel. En outre, les services audiovisuels mobiliseraient
également en 2010 13,6 % du trafic sur les réseaux mobile. Il convient
cependant de souligner que ces données procèdent d’une mesure de la
consommation de bande passante (en giga-octets) et qu’une telle mesure
conduit mécaniquement à minorer les autres usages de l’Internet (accès à
des sites, échange de mail, téléchargement de musique…) ou de la
téléphonie mobile (communication vocale, échange de SMS) qui eux sont
très peu consommateurs de bande passante.
En outre, les usages d’Internet liés à la consommation d’oeuvres
audiovisuelles ne connaissent pas une croissance plus dynamique que
l’ensemble des usages d’Internet, comme le confirment chaque année les
enquêtes du CREDOC
112
.
II.
La difficulté à étalonner le poids économique de la
distribution des services de télévisions sur les
différents supports rend de moins en moins pertinent
le lien qui fait dériver la TST « distributeurs » des
contenus aidés par le CNC
Outre le fait qu’elle n’est que l’un des prismes de la mesure de
l’usage de l’Internet et de la téléphonie mobile, la consommation de
bande passante ne semble pas être un élément déterminant des coûts
112
A titre d’exemple, l’étude 2011 du CREDOC indique que la proportion d’individus
ayant regardé la télévision par Internet sur leur ordinateur au cours des 12 derniers
mois est passée de 15 % en 2010 à 18 % en 2011 ; la proportion d’individus regardant
des films ou des séries en direct est passée de 20 % en 2010 à 24 % en 2011 et la
proportion d’individus téléchargeant des films sur Internet de 14 % à 15 %. Ces
augmentations, incontestables, doivent être comparées avec les évolutions des autres
pratiques sur Internet, également répertoriées par l’enquête : écoute de la musique en
direct (de 30 % en 2010 à 35 % en 2011), achat ou vente de produits ou services sur
Internet (de 44 % en 2010 à 48 % en 2011), formation (de 9 % en 2010 à 13 % en
2011).
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supportés par les opérateurs comme en témoigne la politique mise en
oeuvre par l’opérateur Free. Car si l’on s’inscrit dans la logique qui est la
sienne, logique certes guidée par un souci d’optimisation fiscale, le coût
marginal de la consommation de service de télévision semble très faible
au regard de ce que représente le seul coût induit par la fourniture du
service d’accès au réseau.
Le CNC n’en prétend pas moins que «
l’abattement opéré sur le
chiffre d’affaires taxable (55 % d’abattement en 2011, 66 % depuis la
LFI 2012) (…) permet (…) de tenir compte de la nature des offres qui
incluent d’autres services que la réception des services de télévision.
»
L’établissement en déduit que «
la taxe reste clairement liée à la diffusion
de contenus audiovisuels, le service commercialisé par les opérateurs
concernés offrant bien un accès direct à ces contenus.
» Sur ce point, il
convient de rappeler que la détermination de l’assiette sur laquelle a été
établie la TVA à taux réduit sur les services de télévision (50 % des
abonnements « triple pay ») tire son origine de l’évaluation du coût des
composants spécifiques inclus dans les terminaux (les « boîtes ») pour
permettre la réception de ces services de télévision.
En réalité, l’abattement apporté à la TST « distributeurs » doit
davantage être perçu comme une mesure purement technique, destinée à
garantir la pérennisation du produit de la taxe, plutôt que comme une
estimation fiable de la part des abonnements multiservices réputée
correspondre aux services de télévision. Au cours du débat parlementaire
conduisant à l’adoption de la loi de finances initiales pour 2012, la
ministre chargée du budget a ainsi précisé que «
l’abattement [était] porté
de 55 % à 66 %, au vu des données les plus récentes transmises par les
opérateurs de communications électroniques fournisseurs d’accès à
Internet. Il permettra ainsi de garantir une charge fiscale pour le secteur
équivalente à celle supportée en 2010.
»
Par ailleurs, pour ce qui est des FAI et des services de téléphonie
mobile, l’instauration de la TST « distributeurs » participe, par rapport à
la logique de taxation dans laquelle le CNC s’est inscrite originellement,
d’un mécanisme de double dérivation qui a pour effet de distendre le lien
de cette taxe avec l’objet du CNC.
A travers la taxation des salles de cinéma, le CNC opère un
prélèvement sur l’activité de diffusion de films qui constitue la raison
d’être des exploitants. Avec la TST « éditeurs », le prélèvement a été
justifié par le fait que la diffusion de films constituait à l’époque l’un des
produits « phares » des chaînes de télévision, qui concurrençait de
surcroît l’exploitation en salles. En outre, le CNC ayant par la suite
étendu le champ de ses aides aux productions audiovisuelles, l’on peut
considérer que l’activité générique de ces opérateurs coïncide, dans son
principe, avec le domaine d’intervention du Centre. Et le même type de
raisonnement peut être tenu pour les chaînes de télévision qui
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s’auto-distribuent puisque leur activité peut être assimilée à celle de
chaînes historiques.
En revanche, avec la TST « distributeurs » appliquées au FAI et
aux opérateurs de téléphonie mobile, une étape est franchie sur la voie
d’une décorrélation entre les contenus dont ceux-ci assurent la diffusion
et les domaines d’intervention du CNC. Car de fait, le média qu’est
Internet et le moyen de communication qu’est la téléphonie mobile ont
une vocation qui tend à l’universel, et ceci d’autant plus que l’évolution
des
technologies
permet
de
donner
corps
au
phénomène
de
« convergence » qui avait été pressenti à l’orée du XXI
e
siècle.
Autrement dit, même si elle représente une part importante du
trafic en termes de bande passante, la consommation de services de
télévision constitue un usage parmi d’autres de ces moyens de
communication électronique. Sans compter que d’autres produits
culturels y sont d’ailleurs consommés massivement sans pour autant faire
l’objet d’une taxation, le cas de la musique étant à cet égard
emblématique.
En outre, hormis la taxe qu’ils versent, les opérateurs de
communications électroniques ne participent pas, sauf exception, au
financement direct ou indirect des contenus qu’ils diffusent, à la
différence des autres contribuables aux taxes affectées au CNC (les
exploitants de salles qui louent des films, les éditeurs de services de
télévision qui achètent des droits de diffusion et coproduisent des oeuvres
et les sociétés de vente ou de location de vidéo qui concourent à
l’amortissement des droits acquis par les éditeurs).
Au bout du compte, le principe consistant à financer la création par
la distribution semble avoir trouvé, avec cette part spécifique de la TST
« distributeurs », une application dont on peut se demander si elle est
proportionnée, quant à ses effets en termes de revenu, à l’ampleur des
usages sur laquelle elle repose.
En effet, s’il n’apparaît pas complètement illégitime que les FAI et
les opérateurs de téléphonie mobile participent au financement des
contenus qu’ils diffusent, il n’en reste pas moins qu’une double
interrogation peut être formulée au sujet des modalités qui ont été
retenues à cet effet :
- d’une part, dans la mesure où les productions cinématographiques
ou audiovisuelles ne sont pas les seuls contenus ayant, à un moment où à
un autre de la réalisation, bénéficié d’un soutien financier public, il paraît
difficile de trouver une justification irréfragable à l’affectation exclusive
au CNC du produit de la taxation correspondante ;
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- d’autre part, l’importance que, compte tenu de son montant, le
produit de la taxe prend désormais dans le financement du CNC, voire
dans l’ensemble des financements publics au cinéma et à l’audiovisuel,
n’est pas à ce jour fondée sur des évaluations convaincantes de la place
qu’occupent les FAI et les opérateurs de téléphonie mobile dans la chaîne
de valeur ajoutée de cette filière d’activité.
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Annexe 4 - Les dispositifs de soutien cofinancés
Cinq dispositifs sont aujourd’hui à ce jour cofinancés par le CNC
et différents ministères. Seuls trois d’entre eux font encore l’objet de
nouveaux cofinancements. Ils représentent au total 7,7 M€ en 2011 :
−
le FAJV (Fonds d’Aide au jeu vidéo), anciennement FAEM
(Fonds d'aide à l'édition multimédia), représente 4,8 M€ en
2011. Il est cofinancé par le ministère de l’économie, des
finances et de l’industrie et soutient la R&D, l'innovation et la
création dans le secteur du jeu vidéo (aide à la pré-production
de jeux vidéo, aide à la maquette, aide destinée aux opérations
promotionnelles collectives).
−
le
DICRéAM
(Dispositif
pour
la
Création
Artistique
Multimédia), 986 000 €, cofinancé par le ministère de la culture
et de la communication, le CNC et le Centre National du Livre.
Il soutient le développement, la production et la diffusion
d'oeuvres novatrices ou expérimentales dans le domaine de la
création artistique multimédia et numérique, via une aide à la
maquette, une aide à la production et une aide aux
manifestations
consacrées
à
la
création
multimédia
et
numérique ;
−
le RIAM (Recherche et Innovation en Audiovisuel et
Multimédia), 262 000 €, géré par OSEO Innovation, sur la base
d’un cofinancement du ministère de l’économie, des finances et
de l'industrie auquel il a été mis fin en 2007. Ce dispositif
soutient, par des subventions, les projets innovants des
entreprises dans les domaines de la production, du traitement,
de la distribution et de la publication d'images et de sons ;
−
le Fonds Sud, 1,6 M€, cofinancé par le ministère des Affaires
étrangères et européennes, qui s’adresse aux réalisateurs
originaires d’Afrique, d’Amérique Latine, du Proche et Moyen-
Orient, d’une partie de l’Asie et de certains pays de l’Est. La
subvention versée sert non seulement à financer les coûts de
production dans les pays éligibles, mais également à soutenir le
coût des travaux de production et postproduction effectués en
France ;
−
le Fonds pour les cinématographies étrangères peu diffusées,
1 250 €, également cofinancé, jusqu’en 2009, par le ministère
des Affaires étrangères et européennes, qui soutient les
distributeurs français dans les frais d’acquisition des droits de
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diffusion et les frais d’édition pour les films retenus par le
Fonds Sud ;
Par le décret n° 2012-543 du 23 avril 2012 a été créé un fonds
d’aide aux cinémas du monde, «
transposition aux cinéastes du monde de
l’avance sur recettes
», fusionnant le Fonds Sud et l’aide aux films en
langue étrangères (AFLE). Ce nouveau fonds, mis en place avec le
ministère des affaires étrangères mais majoritairement financé par le
CNC, pourrait être doté de six millions d’euros, soit près du double du
budget combiné du Fonds Sud et de l’AFLE (3,3 M€ en 2010). Il a pour
but
de
favoriser
les
coproductions
avec
les
pays
dont
les
cinématographiques sont les plus susceptibles de contribuer à la
promotion de la diversité culturelle.
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Annexe 5 : Détail des aides accordées par le CNC à des
associations en 2011 (en euros)
Objet de l'aide / destinataire de la subvention
Montant versé en 2011
Unifrance international
6 885 000 €
Commission supérieure et technique de l'image et du son
1 300 000 €
Agence du développement régional du cinéma
4 556 000 €
Association du Festival international du Film de Cannes
3 168 273 €
Société des Réalisateurs de Films / Quinzaine des réalisateurs
470 000 €
Syndicat français de la critique de film
210 000 €
Ecole nationale supérieure de l’image et du son - ENSMIS
855 000 €
Aides à la création cinéma / soutien aux auteurs
894 000 €
dont Groupe de recherches et d’essais cinématographiques
(GREC)
587 000 €
Aides à la création audiovisuelle
247 300 €
Promotion des nouveaux médias
184 130 €
Promotion des industries techniques
158 509 €
Associations de promotion du cinéma
4 633 445 €
dont Association française des cinémas d’art et d’essai (AFCAE)
455 925 €
dont Agence du court métrage
1 745 610 €
dont Société des Réalisateurs de Films
29 000 €
Associations de promotion de l'audiovisuel
3 454 750 €
dont TV France International (TVFI)
1 700 000 €
dont Festival international des programmes audiovisuels (FIPA)
442 500 €
Associations de promotion du cinéma et de l'audiovisuel à
l'international
971 860 €
Aide à divers organismes et secours aux artistes
1 264 511 €
dont Société des Réalisateurs de Films
210 000 €
Aide à la production cinématographique en région
7 917 349 €
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Aide à la production audiovisuelle en région
6 813 857 €
dont Commission Nationale du Film France
822 900 €
Initiatives européennes communes / Média et Europacinéma
487 040 €
Eurimages
4 671 255 €
Education à l'image / Actions de sensibilisation en milieu scolaire
832 320 €
Diffusion du patrimoine cinématographique en région
155 000 €
dont Cinémathèque de Toulouse
155 000 €
TOTAL
50 129 600 €
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Annexe 6 – La prise en compte des engagements
pluriannuels du CNC sous forme de provisions
De grande ampleur, la réforme budgétaire et comptable mise en
oeuvre par le CNC entre 2005 et 2007 a permis d’améliorer le cadre de
gestion budgétaire et de fiabiliser les états financiers de l’établissement.
La réforme a permis d’accomplir des progrès sensibles dans de nombreux
domaines :
−
la mise en place d’un budget unique et l’abandon de la
procédure des ressources affectées ;
−
l’abandon des reports dits « prudentiels » et la gestion plus
transparente des reports des crédits ;
−
la prise en compte au bilan de la dette contractée au titre des
activités de soutien et la constitution de provisions ;
−
la comptabilisation du remboursement des avances en droits
constatés et la prise en compte des restes à recouvrer au bilan ;
−
la fin de l’accumulation au bilan des droits d’exploitation des
administrations civiles et de leurs établissements publics ;
−
l’amélioration du suivi des immobilisations et l’existence d’un
état de l’actif.
Cette réforme a notamment permis de perfectionner la maîtrise des
engagements financiers du CNC à l’égard des professionnels, dans le
cadre d’un dispositif de provisionnement.
Au titre des dispositifs de soutien dit « automatique », reposant sur
le principe du droit de tirage, le CNC contracte en effet auprès des
professionnels
des
secteurs
cinématographique
et
audiovisuel
(producteurs, distributeurs, exploitants de salles, éditeurs vidéo) un
engagement financier futur dont le montant est déterminé en fonction de
données connues
ex ante
(recettes d’exploitation, fréquentation…). Ces
engagements réunissent les critères constitutifs d’une dette. Or, jusqu’en
2006, l’ensemble des engagements contractés par le CNC au titre des
dispositifs de soutien automatique, constituant ce que le CNC appelait la
« dette flottante », ne figuraient pas au bilan de l’établissement mais
étaient suivis de manière extracomptable.
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I.
Avant la réforme, une gestion imprécise des
engagements en ressources affectées, impliquant
des reports de crédits « prudentiels »
Avant 2005, le CNC procédait en effet aux reports de l’ensemble
des crédits non consommés correspondant aux dispositifs de soutien.
Contraires au principe d’universalité budgétaire car ne figurant pas, pour
la majorité d’entre eux, dans les documents budgétaires
113
, ces reports
« prudentiels » résultaient d’une gestion en ressources affectées sur
laquelle était fondé le suivi budgétaire. L’établissement justifiait les
reports par l’existence d’une « dette flottante », correspondant aux droits
non mobilisés des professionnels du cinéma et de l’audiovisuel au soutien
automatique. Dans son précédent rapport, la Cour des comptes avait
constaté que l’importance du volume des reports conduisait à une forte
sous-consommation des crédits, et avait préconisé leur abandon et le
recours à la constitution de provisions.
Dans le cadre de sa réforme budgétaire et comptable, le CNC a
abandonné la gestion des dépenses de soutien en ressources affectées,
mettant ainsi fin aux reports prudentiels et donnant lieu à la constitution
de provisions au titre des soutiens générés.
II.
Après la réforme, la prise en compte au bilan de
la dette contractée au titre des activités de soutien,
impliquant la constitution de provisions
Le CNC a choisi de comptabiliser au bilan, sous la forme de
provisions, la totalité des sommes mobilisables au titre du soutien
automatique. L’établissement a procédé, pour chacun des cinq dispositifs
de soutien automatique, à un inventaire, au 1
er
janvier 2007, du soutien
généré, non mobilisé et non périmé au 31 décembre 2006 et a constitué
des provisions pour charges à hauteur de la dette ainsi constatée, d’un
montant de 316 M€. Depuis 2007, le CNC ajuste chaque année ce stock
de provisions sur la base de l’évolution des droits générés, non mobilisés
(non versés) et non échus : les droits générés donnent lieu à la
constatation de nouvelles provisions, tandis que les droits échus ou
mobilisés se traduisent par la constatation de reprises sur provisions.
113
Article 21 du décret du 10 décembre 1953 : «
l’ordonnateur ne peut accroître par
aucune ressource particulière le montant des crédits inscrits au budget
».
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Les provisions pour charges de soutien automatique, qui
s’élevaient à 316 M€ au 1
er
janvier 2007, ont atteint 371 M€ au
31 décembre 2011.
Evolution des provisions pour charges de soutien
automatique depuis 2007, en milliers d’euros
2007
2008
2009
2010
2011
Provisions pour charges de
soutien automatique production
cinéma
115 894
118 538
121 948
118 527
125 806
Provisions pour charges de
soutien automatique distribution
19 616
31 763
28 635
33 159
35 868
Provisions pour charges de
soutien automatique
exploitation
67 372
68 307
71 727
72 892
70 008
Provisions pour charges de
soutien automatique vidéo
9 967
9 118
8 820
8 942
7 546
Provisions pour charges de
soutien automatique audiovisuel
103 421
111 018
109 524
111 236
131 441
Total
316 272
338 743
340 654
344 755
370 669
Source : Cour des comptes, d’après les comptes financiers du CNC.
D’autres dispositifs de soutien ont également donné lieu, à partir
du 1
er
janvier 2006, à l’enregistrement de provisions. Il en est ainsi des
aides sélectives versées sous forme de subventions, le paiement
intervenant parfois très en aval de la décision d’attribution en raison des
délais nécessaires à la réalisation du projet aidé. Les restes à payer sur ces
dispositifs font donc l’objet de provisions pour charges, dont le montant
s’élevait à 137,7 M€ au 31 décembre 2011.
Au total, les provisions constituées par le CNC au titre des
engagements consentis auprès de tiers dans le cadre de sa mission de
soutien s’élèvent, au 31 décembre 2011, à 508,4 M€.
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Annexe 7 – Soldes intermédiaires de gestion du CNC
entre 2006 et 2011 (en milliers d’euros)
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Ventes de marchandises
0
0
0
0
−
0
0
Coût des marchandises vendues
0
0
0
0
0
0
Marge commerciale
0
0
0
0
0
0
Production
vendue
+
production
stockée + production immobilisée
276
444
314
199
251
183
Déstockage de production
0
0
0
0
0
0
Production de l'exercice
276
444
314
199
251
183
Marge commerciale + production de
l'exercice
276
444
314
199
251
183
Consommations externes
15 253
15 676
15 355
14 864
13 656
14 975
Valeur ajoutée
-14 977
-15 232
-15 041
-14 665
-13 405
-14 792
Subventions d'exploitation
41 074
37 232
31 417
27 081
20 674
14 828
Impôts et taxes
2 063
2 214
2 387
2 515
3 682
3 527
Charges de personnel
21 653
22 797
24 978
25 558
25 444
26 007
Excédent (ou insuffisance) brut(e)
d'exploitation
2 381
-3 011
-10 989
-15 657
-21 857
-29 498
Autres produits
511 458
528 026
554 481
635 812
789 429
841 079
Reprises
sur
amortissements
et
provisions et transferts de charges
0
23 297
14 731
5 655
3 871
453 703
Autres
charges
(hors
créances
irrécouvrables)
500 450
469 300
503 381
513 971
521 799
558 320
Dotations
aux
amortissements
et
provisions et créances irrécouvrables
113 170
19 936
28 492
16 666
20 125
500 482
Résultat d'exploitation
-99 781
59 076
26 350
95 173
229 519
206 481
Produits financiers
2 137
3 751
3 600
4 098
2 585
7 012
Charges financières
0
6 545
13 072
17 067
21 624
18 906
Résultat financier
2 137
-2 794
-9 472
-12 970
-19 040
-11 894
Résultat courant avant impôt
-97 644
56 281
16 878
82 203
210 479
194 587
Produits exceptionnels
1 057
219
877
96
419
63
Charges exceptionnelles
17 893
313
3 611
1 070
10 574
37 969
Résultat exceptionnel
-16 836
-94
-2 734
-974
-10 155
-37 905
Impôt sur les bénéfices
0
0
0
0
426
-409
Participation des salariés aux résultats
0
0
0
0
0
0
Résultat net comptable
-114 480
56 187
14 144
81 229
199 898
157 090
Source : Cour des comptes d’après données CNC (comptes financiers).
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