Sort by *
Contacts presse :
Denis GETTLIFFE -
Responsable des relations presse - Tél : 01 42 98 55 77 -
dgettliffe@ccomptes.fr
Dorine BREGMAN -
Directrice de la communication - Tél : 01 42 98 98 09 -
dbregman@ccomptes.fr
R
APPORT PUBLIC THÉMATIQUE
Paris, le 13 juillet 2011
La gestion de la dette publique locale
La Cour des comptes rend public un rapport sur la gestion de la dette publique locale.
Dans ses rapports publics annuels de février 2009 et de février 2010 la Cour des comptes a
consacré un chapitre aux « risques pris par les collectivités territoriales et les établissements publics
locaux en matière d’emprunts». À la suite de ces travaux, dans un contexte d’endettement public
croissant qui atteint des limites difficilement franchissables, le rapport dresse un bilan global de la
situation des collectivités territoriales et de leurs établissements publics en matière d’endettement, de
leurs pratiques et des évolutions qui apparaissent nécessaire.
Lancée en 2009, l’enquête, réalisée par la Cour et les chambres régionales, a concerné plus de
150 collectivités territoriales et établissements publics locaux.
Les spécificités de la dette publique locale
Une dette en forte augmentation, mais un endettement globalement maîtrisé
Depuis plusieurs années, l’endettement local est à nouveau entré dans une
dynamique de forte
augmentation
. L’encours de la dette figurant au bilan des collectivités territoriales, il s’est accru depuis
2004 de 41 %, avec une augmentation de 80 % pour les régions, de 63 % pour les départements, de
18 % pour les communes et de 69 % pour les groupements de communes à fiscalité propre.
L’augmentation de la dette des collectivités territoriales est lié à un cycle d’investissem
ents important,
toutes collectivités confondues, jusqu’en 2009. Néanmoins, la
part de la dette publique locale dans
l’ensemble de la dette publique est restée relativement stable
(10% en 2010).
La part de l’emprunt dans le financement de l’investissement l
ocal reste inférieure à 15 %. Les
collectivités locales disposent d’une bonne capacité de désendettement
.
Cette situation plutôt favorable, conjuguée à une quasi absence de sinistre vis-à-vis des créanciers,
expliquent la confiance manifestée jusqu’ici par
les banques, qui sont relativement peu nombreuses à
intervenir et qui apportent près de 97 % des produits d’emprunts des collectivités locales.
Des règles budgétaires contraignantes mais parfois contournées
Contrairement à l’É
tat
, l’ensemble des flux de d
ette (emprunts nouveaux et remboursements) des
collectivités territoriales doit être prévu dans les budgets des collectivités. La
« règle d’or »
oblige à ce
que l’emprunt soit réservé au financement de l’investissement.
Les
règles budgétaires sont cependant parfois contournées ou induisent des effets pervers
.
Pour réaliser un volume de dépenses d’équipement élevé, des collectivités ont pu ainsi vouloir réduire le
montant du capital remboursé. Elles ont alors opéré par le biais d’aménagements visant à allége
r les
dépenses correspondantes de l'exercice et celles de l’avenir proche, en augmentant la durée de
remboursement.
Page 2 sur 4
Un cadre juridique insuffisant
Les collectivités et leurs établissements publics disposent d’une très grande liberté en matière de
souscrip
tion de contrats d’emprunts ou de contrats de produits dérivés. La réglementation des marchés
publics n’est pas applicable à ces contrats.
La liberté d’emprunter accordée aux collectivités locales est souvent présentée comme la
conséquence du
principe de libre administration des collectivités territoriales
. Elle n’interdirait
cependant pas, si un intérêt général le justifiait, que cette liberté soit encadrée par la loi.
Le
cadre juridique peu contraignant
applicable aux emprunts des collectivités locales a rendu
l’exercice des contrôles difficile, qu’il s’agisse du contrôle de légalité exercé par les préfets ou des
contrôles du ressort des comptables publics.
Il a, en revanche, permis aux collectivités locales de recourir à un
vaste éventail de produits de
financement
, qui s’est progressivement élargi à des
emprunts de plus en plus risqués
, dont certains
présentent la particularité de minorer transitoirement le charge d’intérêts des emprunteurs et d’opacifier
les conditions de détermination des marges des prêteurs.
L’émergence de la
crise financière
au cours de l’année 2008 et la
découverte de l’ampleur des
risques pris par certaines collectivités
en matière de gestion de leur dette, ont incité les pouvoirs
publics à réagir. En
décembre 2009, une « charte de bonne conduite »
a été signée entre les
principaux prêteurs et les associations d’élus locaux. Une circulaire interministérielle du 25 juin 2010 a
rappelé les règles et les principes applicables à l’emprunt et aux produits de couverture souscrits par les
collectivités territoriales.
Une gestion plus sophistiquée et moins maîtrisée
Un manque de stratégie et le rôle insuffisant des assemblées délibérantes
Alors que
la décision de s’endetter résulte souvent de choix politiques structurants
, la
définition clair
e d’une
stratégie d’endettement
par l’exécutif
et sa
formalisation dans un document
de référence demeurent relativement rares
.
Les
assemblées délibérantes ne sont pas toujours en situation
de pouvoir appréhender la nature
des opérations de gestion de dette
qu’elles autorisent, de vérifier si celles
-ci sont bien conclues dans
l’intérêt de la collectivité, et de s’assurer, le cas échéant, qu’elles sont cohérentes avec la stratégie
globale définie.
La confusion entre le rôle de prêteur et celui de conseil
La
d
iversification de l’offre bancaire
avant la crise financière a cependant plus
joué dans le sens
de la diffusion de produits de plus en plus risqués
que pour permettre aux emprunteurs de mieux
comparer les propositions.
Le
développement significatif des emprunts structurés
s’inscrit dans ce contexte. Ces emprunts
présentent très souvent la caractéristique d’offrir à l’emprunteur un taux d’intérêt bonifié pendant une
première période d’amortissement, en contrepartie d’une prise de risque accru, pendant une ph
ase
ultérieure de remboursement.
De nombreux emprunts structurés ont été conclus dans le cadre d’opérations de renégociations de
dettes pouvant se traduire par la prise de positions de plus en plus risquées.
Page 3 sur 4
L’enquête de la Cour et des chambres régionales
des comptes a fait apparaître que
ces opérations
complexes avaient souvent été mises en place par les collectivités sur les conseils de leurs
banques
.
Le besoin d’une meilleure gestion des risques
La nécessaire maîtrise des emprunts structurés
L’enquête
a aussi montré la
diffusion très large des produits structurés
, dans toutes les
catégories de collectivités, quelle que soit leur taille.
Le Cour et les chambres régionales estiment l’encours de la dette publique locale constitué
d’emprunts structurés entre 30 à 35 Md€, dont 10 à 12 Md€ présentent un risque potentiellement
élevé
.
Certaines collectivités se retrouvent d’ores et déjà liées par des emprunts ou des produits dérivés
dont elles ne peuvent sortir qu’en acceptant de payer un taux d’intérêt ou une s
oulte prohibitifs au regard
des moyens financiers dont elles disposent.
Ces situations demeurent cependant très concentrées.
Il importe de tirer pleinement les conséquences de cette situation, ce que ne font pas suffisamment la
« charte de bonne conduite » et la circulaire interministérielle du 25 juin 2010.
Les évolutions probables du modèle de financement
Il est vraisemblable que
le modèle de financement des collectivités locales va connaître une
évolution profonde
. L’accès des collectivités locales au crédit à des conditions très favorables jusqu’à
récemment pourrait en effet être remis en cause, compte tenu de la réduction de la concurrence et de
l’augmentation des marges bancaires depuis la crise financière. Enfin l’évolution annoncée des normes
prude
ntielles (Bale III) risque d’avoir, à terme, un effet important sur le volume et sur le coût du crédit aux
collectivités territoriales.
La
création d’une agence de financement des collectivités locales
pourrait fournir une solution
supplémentaire pour dive
rsifier l’offre de financement des collectivités locales.
Au total, l’enquête de la Cour et des chambres régionales débouche sur un
bilan contrasté
: des
progrès ont été réalisés par les collectivités territoriales pour améliorer la qualité de la gestion de leur
dette, mais ils restent insuffisants, notamment en termes de réflexion stratégique.
Les banques portent une part de responsabilité dans la situation actuelle pour avoir conçu
l’offre d’emprunts structurés et encouragé leur diffusion
sans toujours assurer une information
suffisante sur les risques encourus.
De son côté, l’État n’a pas assez pris en compte les risques induits par les emprunts
structurés
,
diffusés à une large échelle et de manière excessive à certaines collectivités
. La
Charte de bonne conduite conclue en décembre 2009 répond sur certains points aux recommandations
formulées par la Cour dans son rapport public annuel de février 2009. Elle apparaît néanmoins comme
une
mesure trop peu contraignante pour permettre de résoudre efficacement les difficultés
actuelles et éviter qu’elles ne réapparaissent
. Une
modification de la réglementation comptable
devrait être envisagée pour donner une image plus fidèle des risques inhérents à ces emprunts.
Page 4 sur 4
La Cour formule les principales recommandations suivantes :
-
faire le bilan de la « charte de bonne conduite » et écarter certains emprunts risqués reconnus par
cette charte ;
-
mettre en place un suivi statistique global de la structure de la dette publique locale ;
-
introduire dans la comptabilité locale une obligation de provisions pour risque en matière de dette ;
-
encourager la gestion en trésorerie « zéro » des collectivités locales ;
-
pour les collectivités les plus importantes, accompagner le projet de budget primitif d’un rapport sur la
dette et rend
re obligatoire l’organisation d’un débat annuel sur la dette au sein de l’assemblée
délibérante ;
-
mutualiser la gestion de la dette structurée des collectivités le souhaitant au sein d’une cellule de
suivi, destinée à les aider à identifier et à concrétiser, en liaison avec les banques, des solutions de
sortie ;
-
en revanche, ne pas donner suite au projet de création d’une structure de défaisance ;
-
systématiser les mises en concurrence des établissements bancaires ;
-
éviter les situations de dépendance vis-à-
vis d’un seul établissement ;
-
étudier et arbitrer la faisabilité d’une agence de financement des collectivités territoriales
.
Consulter le rapport et les autres éléments
Contacts presse :
Denis GETTLIFFE -
Responsable des relations presse - Tél : 01 42 98 55 77 -
dgettliffe@ccomptes.fr
Dorine BREGMAN -
Directrice de la communication - Tél : 01 42 98 98 09 -
dbregman@ccomptes.fr