COMMUNICATION A LA
COMMISSION DES FINANCES, DE L’ECONOMIE GENERALE ET
DU CONTROLE BUDGETAIRE DE L’ASSEMBLEE NATIONALE
(ARTICLE 58-2° DE LA LOI ORGANIQUE RELATIVE AUX LOIS DE FINANCES DU 1ER AOUT 2001 ET L 132-4 DU
CODE DES JURIDICTIONS FINANCIERES)
LES MODALITES DE MISE EN
PLACE DE L’AUTORITE DE
CONTROLE PRUDENTIEL
Octobre 2011
SOMMAIRE
AVERTISSEMENT
...........................................................................
5
RESUME
.............................................................................................
7
RECOMMANDATIONS
.................................................................
13
INTRODUCTION
............................................................................
15
CHAPITRE I - LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
17
I
- La refonte des structures et de l’organisation interne
.............
18
A - Les premières concrétisations d’une autorité unifiée
...................
18
B - Une réorganisation d’ensemble pertinente, au moins dans un
premier temps
.....................................................................................
22
C - L’adossement à la Banque de France : un avantage certain mais
des progrès encore à poursuivre
.........................................................
27
II
- L’intégration des personnels et le renforcement des effectifs35
A - L’évolution des statuts et des effectifs de l’ACP
.........................
35
B - Les principales problématiques de gestion des ressources humaines
............................................................................................................
49
III
- Le déséquilibre budgétaire à court et moyen terme
.............
57
A - Un déséquilibre budgétaire en 2011 et des perspectives
défavorables pour 2012, à contributions constantes
...........................
58
B - Des contributions à rééquilibrer à terme
......................................
62
C - La nécessaire maîtrise des coûts de fonctionnement
....................
67
D - Vers une plus grande transparence de l’information budgétaire.. 71
CHAPITRE II - LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET
L’EXERCICE DES MISSIONS DE L’ACP
..................................
75
I
- Les pouvoirs de l’ACP
...............................................................
75
A - De nombreux instruments juridiques précisant l’exercice de ses
différentes missions
............................................................................
76
B - Des pouvoirs élargis de police administrative mis en oeuvre
progressivement
.................................................................................
82
C - Des pouvoirs de sanction d’application trop réduite
....................
85
II
- La mission relative à la préservation de la stabilité financière
............................................................................................................
92
A - Les points d’attention du superviseur
...........................................
92
B - Le contrôle prudentiel : le suivi des conséquences de la crise
financière
............................................................................................
94
III
- La mission de protection des clients et le contrôle des
pratiques commerciales
...................................................................
99
A - La coordination avec l’AMF : acquis et problématiques
...........
100
B - Une montée en charge progressive des missions de protection de la
clientèle
............................................................................................
113
4
COUR DES COMPTES
IV
- L’objectif de renforcement de l’influence sur la scène
internationale et européenne
.........................................................
123
A - Le renforcement des moyens de l’ACP sur les enjeux
internationaux de l’assurance
...........................................................
124
B - La présence effective de l’ACP au plan européen et international
..........................................................................................................
126
CONCLUSION GENERALE
.......................................................
137
ANNEXES
.......................................................................................
139
Avertissement
Saisine de la Cour
La Cour a été saisie d’une demande d’enquête sur les modalités de
mise en place de l’Autorité de contrôle prudentiel par lettre du
1
er
décembre 2010 du président de la commission des finances, de
l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée Nationale
conformément au deuxième alinéa de l’article 58 de la loi organique
n° 2001-692 du 1
er
août 2001 relative aux lois de finances. Elle a effectué
cette enquête en 2011.
Contrôles sur pièces et sur place
Les rapporteurs de la Cour ont procédé à une enquête sur place et
examiné les documents transmis par l’Autorité. Ils se sont appuyés
également sur la connaissance acquise par la Cour de la gestion de la
Banque de France. Les principaux interlocuteurs au sein de l’Autorité de
contrôle prudentiel, de la Banque de France, de la direction générale du
Trésor, de la direction générale de la concurrence, de la consommation et
de la répression des fraudes et de l’Autorité des marchés financiers ont
été rencontrés. Pour enrichir certaines appréciations contenues dans le
rapport,
les
représentants
d’associations
de
consommateurs,
d’associations professionnelles des secteurs de la banque et de l’assurance
et de certains établissements financiers assujettis au contrôle de l’ACP
ont été également sollicités (voir annexe).
Limites de l'enquête
L’enquête
est
intervenue
après
16
mois
seulement
de
fonctionnement de l’ACP
1
et alors que certains décrets d’application de
la loi de régulation bancaire et financière n’étaient pas encore adoptés. La
demande de l’Assemblée Nationale portait sur ses modalités de mise en
place. L’enquête de la Cour analyse les moyens engagés par l’ACP pour
sa mise en place, dresse un premier bilan de son fonctionnement et
dégage les problématiques qui apparaissent à ce stade. Il n’entrait pas
dans son champ d’apprécier la qualité de la supervision
prudentielle
exercée par l’institution.
1
Ils sont comptabilisés entre la première réunion du Collège de l’ACP, intervenue le 9
mars 2010, et la fin de l’instruction de la Cour au début de juillet 2011. L’ordonnance
du 21 janvier 2010 prévoyait qu’à compter de la première réunion de son collège,
l’ACP succédait dans les droits et obligations respectifs de l’ACAM, du CEA, du
CECEI et de la Commission bancaire.
6
COUR DES COMPTES
Les appréciations de la Cour sont nécessairement limitées aux
premières réalisations de l’ACP. Ce n’est qu’une fois l’ensemble du
déploiement des actions de l’Autorité assuré qu’un bilan plus complet
pourra être réalisé.
Procédure contradictoire
Lors de sa séance du 19 juillet 2011, la première chambre de la
Cour a délibéré sur le relevé d’observations provisoires.
Le présent rapport tient compte de la contradiction conduite avec
l’Autorité de contrôle prudentiel, la Banque de France et la direction
générale du Trésor. En outre, ont été invités à contredire sur les parties du
relevé d’observations provisoires les concernant le président de la
Commission des sanctions de l’ACP, le président de l’AMF, le directeur
général de l’administration et de la fonction publique, le directeur général
de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, le
directeur général de la Caisse des dépôts et consignations et le président
du Comité consultatif du secteur financier. Seul le président de la
Commission des sanctions de l’ACP n’a pas répondu. Une audition du
Président de l’ACP et six auditions avec les représentants d’associations
de consommateurs et d’associations professionnelles des secteurs de la
banque et de l’assurance ont été effectuées.
Le présent rapport a été préparé par la première chambre de la
Cour des comptes, présidée par M. Christian Babusiaux, président de
chambre, qui en a délibéré le 9 septembre 2011. Les rapporteurs étaient
Mmes Catherine Julien-Hiebel, Christine Baillion et Aude Buresi,
rapporteures extérieures,
et le contre-rapporteur, Mme Hélène Morell,
conseillère maître.
Il a ensuite été examiné et approuvé par le Comité du rapport
public et des programmes le 27 septembre 2011.
Résumé
La mise en place, en mars 2010, de l’Autorité de contrôle
prudentiel (ACP), en raison de la crise financière et bancaire survenue à
partir de 2007/2008, visait à constituer une réponse à l’un des constats
partagés au plan international sur la nécessité d’améliorer la régulation du
secteur financier en l’orientant davantage vers le contrôle des risques dont
s’est nourrie la crise.
La France a opté pour la constitution d’une autorité de supervision
prudentielle plus intégrée que dans la situation précédente, et destinée à
surveiller à la fois les risques des deux grands secteurs professionnels que
sont d’une part, les établissements de crédit et les entreprises
d’investissement, d’autre part, les entreprises d’assurance, les mutuelles
et les institutions de prévoyance. La loi de modernisation de l’économie
du 4 août 2008 a habilité le gouvernement à prendre par ordonnance les
dispositions ayant pour objet de créer cette nouvelle autorité. Les travaux
préparatoires se sont ensuite prolongés jusqu’au début de 2010.
L’ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010, ratifiée par l’article 12 de
la loi de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010, a fusionné
quatre autorités indépendantes préexistantes, et principalement la
Commission bancaire et l’Autorité de contrôle des assurances et des
mutuelles -ACAM-, au sein de l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP).
Dans
le
cadre
de
sa
mission
de
supervision
prudentielle
des
établissements, la réforme a fixé trois objectifs pour l’institution qui s’est
vu ainsi confier un rôle élargi : veiller à la préservation de la stabilité
financière, protéger les clients et contrôler les pratiques commerciales,
renforcer l’influence de la France sur la scène internationale et
européenne.
L’atteinte
de
ces
objectifs
implique
une
profonde
transformation des moyens mis en oeuvre et des conditions d’exercice des
missions de l’ACP.
I
-
L’ACP a à son actif des réalisations concrètes.
Son installation s’est effectuée rapidement et sans rupture de
continuité dans l’activité par rapport aux anciennes autorités. Dans le
schéma d’organisation et de fonctionnement des services, il devait être
montré que l’ACP n’était pas la simple juxtaposition de l’ACAM et de la
Commission bancaire. L’organisation des services prend en compte la
transversalité nécessaire à une supervision d’égale intensité pour les
secteurs de la banque et de l’assurance. Toutefois, l’ACP a maintenu
séparé le contrôle proprement dit des établissements des deux secteurs, ce
qui, dans la période d’installation et de montée en charge, est justifié,
8
COUR DES COMPTES
mais devra faire l’objet d’une nouvelle réflexion dans la seconde phase du
fonctionnement de l’institution.
Il était attendu de l’ACP qu’elle intègre les personnels provenant
de l’ACAM. Ceux auxquels l’offre a été faite, dans les délais impartis, de
bénéficier des statuts des personnels de la Banque de France l’ont très
largement acceptée. La situation des commissaires contrôleurs des
assurances est encore à gérer.
Les actions nécessaires à la prise en charge de sa nouvelle mission
de protection de la clientèle et de surveillance des pratiques commerciales
ont été concrétisées par la création d’une direction, le recrutement de son
personnel et de premières interventions dans le contrôle des pratiques.
Dans le domaine international, l’ACP a veillé à renforcer les
moyens et les effectifs consacrés à la participation aux négociations
européennes,
notamment
sur
les
nouvelles
règles
prudentielles
applicables aux assureurs (Solvabilité II). Ce domaine qui était
insuffisamment couvert par l’ACAM constitue un enjeu d’avenir qui
nécessite une présence encore plus forte.
II
-
Toutefois, l’ACP doit poursuivre ses efforts et
les cibler pour remplir les objectifs de la réforme.
Le plein exercice des pouvoirs conférés par la loi suppose un
renforcement de la vigilance s’agissant de la préservation de la stabilité
financière, des efforts dans le contrôle des pratiques commerciales, un
renforcement de la politique de sanctions, l’élaboration plus précise de
doctrines d’intervention et le développement de la présence de l’ACP au
sein des autorités européennes et internationales de régulation financière.
Des points de vigilance s’agissant de la mission relative à la
préservation de la stabilité financière
Le suivi du risque de liquidité s’est intensifié à partir du premier
semestre 2010 et celui de l’exposition des établissements aux risques liés
aux dettes souveraines à partir de la mi-2010. Ce resserrement consiste
notamment en une fréquence accrue des informations portées à la
connaissance de l’Autorité. Le contexte apparu depuis la mi-2011 montre
qu’il est particulièrement indispensable que les liens existants entre la
Banque de France et l’ACP fonctionnent pleinement pour prévenir et
gérer de manière adaptée les effets sur la situation des établissements.
RESUME
9
La nouvelle mission de protection de la clientèle à mettre plus
pleinement en oeuvre
Pour cette mission, que le législateur a choisi de confier à la
nouvelle Autorité, le défi est à la fois de prévenir des risques de plus en
plus multiformes pour les consommateurs et épargnants, de faire adopter
en tant que de besoin de nouvelles attitudes dans la commercialisation par
les organismes et de répondre aux besoins de recours exprimés par les
associations consuméristes. Ces défis nécessitent le développement, au
sein de l’Autorité, d’une « culture du consommateur », aux côtés de sa
culture traditionnelle de superviseur prudentiel, et la mise en oeuvre
d’actions de plus en plus concertées et globales avec d’autres
intervenants.
A cet égard, la réforme de 2010 a créé une coordination entre
l’ACP et l’Autorité des marchés financiers (AMF) -appelée Pôle
commun- qui constitue l’une de ses mesures les plus nouvelles. La mise
en place d’un accueil téléphonique commun pour l’ACP et l’AMF appelé
« Assurance-Banque-Epargne Info service », en direction du public pour
les questions relatives aux produits financiers, a constitué la première
action visible de ce Pôle commun et fonctionne à la satisfaction des
associations de consommateurs.
Cependant, par rapport au vaste domaine d’intervention sur les
pratiques commerciales, ce pôle commun doit encore faire ses preuves.
En effet, il est marqué par l’ambition limitée de la loi d’en faire un outil
de coordination entre deux autorités, qui disposent chacune, dans leurs
domaines respectifs, de compétences en matière de protection de la
clientèle. L’enquête a montré que le champ des produits financiers devant
faire l’objet d’une coordination entre les deux autorités semble
relativement réduit. Elle a mis en évidence les différences de
positionnement des autorités sur les méthodes employées. L’enjeu se
porte aussi sur la capacité du pôle commun à programmer, de façon
concertée, des contrôles conjoints significatifs sur les pratiques
commerciales, qui n’est pas encore avérée.
Il est souhaitable que l’ACP, qui privilégie aujourd’hui le contrôle
réglementaire des professionnels, élargisse l’attention qu’elle porte aux
préoccupations des consommateurs et des épargnants. Elle devrait
pouvoir ainsi enrichir les activités du pôle commun.
Le bienfondé d’une pluralité d’intervenants pour les questions de
protection des consommateurs dans le domaine financier se poserait de
nouveau si le pôle, dont l’activité devra être évaluée plus complètement
après l’achèvement de la période de démarrage, n’apparaît pas comme le
lieu d’une action concertée globale.
10
COUR DES COMPTES
L’enquête a également fait apparaître le recouvrement possible des
sujets traités par le comité consultatif du secteur financier (CCSF) et par
la commission consultative « pratiques commerciales » de l’ACP, et la
nécessité d’inclure dans la coopération la direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
(DGCCRF).
Des doctrines d’emploi des nouveaux instruments juridiques à
clarifier et formaliser
Pour permettre l’action la plus large de l’Autorité dans le domaine
du contrôle des pratiques commerciales, le législateur l’a dotée du
pouvoir d’édicter des normes qui relèvent de ce qu’il est convenu
d’appeler « le droit souple ». Les instruments d’application, dont
notamment les bonnes pratiques recommandées, présentent des limites.
Un des risques relevés au cours de l’enquête est que l’Autorité utilise une
multiplicité de types de normes souples, ce qui est peu propice à la bonne
compréhension par les professionnels de la portée juridique et effective
des divers instruments utilisés. La doctrine de l’ACP à cet égard devrait
s’étoffer et être rendue lisible et prévisible.
Des pouvoirs de sanction à appliquer réellement
La commission des sanctions, indépendante du collège, et dont la
création devait constituer l’une des novations importantes de la réforme,
n’a fait l’objet, dans la période sous revue, que de rares saisines. La Cour
avait déjà relevé dans ses précédents travaux
2
le faible nombre et le
caractère insuffisamment dissuasif des sanctions. La tendance au
fléchissement du nombre de sanctions prononcées, déjà observée dans les
anciennes autorités, s’est poursuivie depuis la création de l’ACP. Le
collège devrait formaliser sa doctrine de saisine. Une telle doctrine
devrait permettre de clarifier l’articulation entre les contrôles exercés en
continu par le secrétariat général de l’ACP et les suites susceptibles de
donner lieu à griefs. Dans le domaine des sanctions, l’ACP dispose
désormais de tous les pouvoirs et modalités pertinents pour qu’une
politique de sanctions soit effectivement mise en oeuvre. De telles
dispositions ne sauraient rester plus longtemps sans application concrète.
Une
présence
au
sein
des
autorités
européennes
et
internationales de régulation financière à encore mieux
affirmer
La présence de l’ACP dans les enceintes européennes et
internationales qui traitent de la régulation bancaire et financière et le
2
Référés et lettres du président adressés, en janvier 2008 et 2009, à la ministre de
l’économie, de l’industrie et de l’emploi, au Parlement et aux autorités administratives
compétentes ; insertion au rapport public annuel 2009 sur les autorités de régulation
financière.
RESUME
11
détachement de personnels d’origine française au sein de ces institutions
demeurent un défi qui n’est pas totalement relevé, au moment où l’Union
européenne s’est dotée de trois autorités européennes de supervision et où
les travaux concernant l’élaboration des réglementations prudentielles
sont loin d’être achevés. L’insuffisance des forces que l’ACP peut
actuellement engager pour représenter la France au plan international a
été largement relevée par les entreprises, fédérations professionnelles et
experts rencontrés au cours de l’enquête. Des modalités concrètes de
gestion des ressources humaines tant par l’ACP que par la Banque de
France devraient être mises en oeuvre, et de façon plus méthodique, pour
renforcer cette présence.
III
-
L’adéquation entre les moyens déployés par
l’ACP et ses nouvelles missions reste à assurer.
La fusion des quatre autorités administratives chargées de la
régulation financière était une réforme délicate à mener. Elle représentait
notamment un défi majeur en termes de gestion des ressources humaines.
Elle est en phase de consolidation et d’approfondissement. Afin de
remplir pleinement ses nouvelles missions, l’ACP doit désormais
s’assurer de l’efficience de ses moyens et de leur correcte allocation.
Une cible d’effectifs dont l’atteinte n’est pas assurée
La stabilisation de l’organisation interne interviendrait fin 2012,
date à laquelle l’ACP doit, en principe, atteindre le niveau prévu de ses
effectifs. La réalisation de cet objectif n’est pas encore assurée à cette
échéance. L’ACP procède à des recrutements importants, notamment sur
le marché du travail mais aussi en provenance de la Banque de France,
qui doivent à la fois renforcer son expertise, compenser les retours très
significatifs de personnels de l’ancienne Commission bancaire vers les
directions de la Banque de France constatés en 2010 et 2011, enfin faire
face aux conséquences de l’intégration du corps de contrôle des
assurances dans le corps des ingénieurs des mines. Ce dernier point est
particulièrement sensible pour maintenir l’expertise dans le domaine des
assurances.
La Cour constate que le niveau de croissance fixé par le collège,
qui aboutit à un effectif global de 1 150 personnes fin 2012, représente
une augmentation de 28 % par rapport aux effectifs cumulés des
anciennes autorités, globalement cohérente avec l’élargissement des
tâches assignées par la loi. Au stade actuel du processus de fusion et des
recrutements nouveaux, elle ne pouvait se prononcer sur le niveau
optimal d’agents que devrait comprendre l’Autorité pour l’efficience de
l’ensemble de ses missions.
12
COUR DES COMPTES
Des points d’attention concernant les effectifs affectés aux
contrôles prudentiels
Dans le domaine des contrôles prudentiels, l’ACP a mis l’accent
sur le renforcement des effectifs affectés aux contrôles du secteur
assurance en prévoyant une augmentation de 75 %, ce qui est justifié par
l’accroissement des tâches concernant ce secteur. Toutefois, le collège
devrait s’assurer dès fin 2011 que les effectifs au sein des services de
contrôle sont bien répartis en fonction de l’importance des risques
prudentiels que l’ACP doit surveiller.
Par ailleurs, la Cour relève que, si les orientations des contrôles
évoluent nécessairement en fonction de l’actualité des thèmes, le nombre
des contrôles sur place est resté stable depuis ses enquêtes sur la
Commission bancaire et l’ACAM en 2007/2008. Or, le resserrement
nécessaire de la vigilance sur la situation des établissements impose un
accroissement du nombre et des moyens du contrôle sur place, qui est le
complément indispensable du contrôle permanent effectué à partir
notamment des informations transmises de façon périodique par les
établissements à l’Autorité.
Des perspectives de déséquilibre budgétaire
Des perspectives de déséquilibre budgétaire à court et moyen
terme ont été constatées. Pour y faire face dans l’immédiat, l’ACP
dispose d’une réserve de trésorerie qui avait été constituée par l’ACAM.
Il est souhaitable de la mobiliser avant d’envisager le relèvement des taux
de contribution des assujettis pour frais de contrôle. La contribution
souhaitable de la Caisse des dépôts et consignations au titre du contrôle
que la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008 a confié à
l’ACP sur cette institution nécessite une disposition législative lui
donnant une assise juridique. Il existe un rapport de un à cinq entre les
contributions des assureurs et celle des banques. Une réflexion des
pouvoirs publics est à conduire à moyen terme pour rééquilibrer les
contributions entre ces deux secteurs.
Des marges d’économie sur les coûts de fonctionnement et les
fonctions support
Une action de l’ACP est souhaitable pour réduire ses coûts de
fonctionnement (dépenses immobilières, frais généraux, etc). Les
fonctions support représentaient, par ailleurs, en mars 2010, 15 % des
effectifs de l’ACP, soit une proportion plus élevée que celle généralement
observée dans les grandes organisations. Ce ratio ne va pas décroître
notablement d’ici à la fin 2012, alors même que le législateur a prévu que
l’ACP dispose des moyens fournis par la Banque de France.
L’adossement logistique à la Banque de France doit permettre, après la
fin de la montée en charge de l’Autorité, d’accroître les synergies.
RECOMMANDATIONS
13
Recommandations
Gestion des ressources humaines
1. Accélérer l’atteinte de l’effectif cible
(ACP, Banque de France)
;
2. Développer la mobilité interne des personnels de la Banque de
France vers l’ACP
(Banque de France)
;
Contrôles prudentiels
3. Accroître le nombre de contrôles sur place
(ACP)
;
4. S’assurer, dès 2011, de la bonne répartition des effectifs globaux au
sein des services de l’ACP en fonction de l’importance des risques
prudentiels
(ACP)
;
5. Identifier et justifier le renforcement net des effectifs dédiés au
contrôle des assurances ; maintenir leur expertise dans ce domaine (
ACP) ;
Contrôle des pratiques commerciales
6. Permettre un développement des réalisations opérationnelles du
pôle commun ACP-AMF qui soit davantage en prise avec les préoccupations
des consommateurs
(ACP)
;
7. Prendre les mesures pour organiser, dans le cadre du pôle commun,
la coopération de la DGCCRF
(ACP, AMF, DGCCRF, pouvoirs publics)
;
8. Etoffer et poursuivre la formalisation de la doctrine d’emploi des
instruments du droit souple en matière de pratiques commerciales ; préciser
la doctrine des sanctions éventuelles
(ACP
) ;
Politique de sanctions
9. Réduire les délais qui peuvent exister entre la constatation par le
secrétariat général de manquements significatifs et la vérification par un
contrôle sur place des mesures effectivement mises en place par
l’établissement pour remédier auxdits manquements
(ACP)
;
10. Clarifier la doctrine du collège sur les manquements donnant lieu à
mesure de police administrative et sur ceux entraînant la saisine de la
commission des sanctions
(ACP)
;
11. Saisir la commission des sanctions dès lors que des manquements
significatifs déjà relevés lors d’un précédent contrôle sont répétés, même
partiellement
(ACP).
Présence au sein des autorités européennes et internationales de
régulation financière
12. Engager les actions nécessaires au renforcement des mobilités du
personnel à l’étranger
(Banque de France, ACP)
;
14
COUR DES COMPTES
Budget et contributions
13. Maîtriser la croissance des effectifs de l’ACP dans les fonctions
support et à terme, en rationaliser l’emploi
(ACP)
;
14. Identifier les marges d’économie sur les frais généraux et le coût
des fonctions support (
ACP)
;
15. Donner un fondement juridique à une contribution de la Caisse des
dépôts et consignations au titre du contrôle que la loi du 4 août 2008 a confié
à l’ACP sur cette institution
(pouvoirs publics)
;
16. Engager une réflexion pour rééquilibrer les contributions versées
par les secteurs de la banque et de l’assurance
(pouvoirs publics et ACP).
Introduction
L’ordonnance du 21 janvier 2010, ratifiée par la loi de régulation
bancaire et financière du 22 octobre 2010, a fusionné quatre autorités : les
deux autorités qui étaient compétentes pour l’agrément des établissements
de crédit et des organismes d’assurance (CECEI et CEA
3
) et celles qui
étaient chargées de la supervision prudentielle des établissements de
crédit et des organismes d’assurance (Commission bancaire et Autorité de
contrôle des assurances et des mutuelles). L’ensemble a laissé place à
l’Autorité de contrôle prudentiel. La loi de régulation bancaire et
financière a par la suite apporté des compléments à cette nouvelle
Autorité en termes de pouvoirs, de fonctionnement et de procédures.
La Cour avait contrôlé, dès les années 2006 et 2007, la
Commission bancaire, l’Autorité de contrôle des assurances et des
mutuelles (ACAM) et l’Autorité des marchés financiers (AMF). Elle a
communiqué le résultat de ses travaux à la ministre de l’économie, de
l’industrie et de l’emploi, au Parlement et aux autorités administratives
compétentes dans trois référés et trois lettres du président qui leur ont été
adressés entre janvier 2008 et début 2009. Elle a procédé, dans son
rapport public annuel de 2009, à une évaluation comparée de ces autorités
et avait souligné notamment que le dispositif français de contrôle et de
régulation financière devait être rationalisé, coordonné et renforcé. Lors
de la publication de ses deux rapports sur les concours publics aux
établissements de crédit en 2009 et 2010, la Cour a réitéré certaines de ses
observations
sur
la
supervision
prudentielle
et
a
insisté
plus
particulièrement sur la nécessité de renforcer les moyens de sanction.
Dans son rapport public annuel de 2011, elle a fait état de la mise en
oeuvre des recommandations émises, en tenant compte de la réforme
intervenue en 2010.
Par lettre en date du 1
er
décembre 2010, le Président de la
commission des finances, de l’économie générale et du contrôle
budgétaire de l’Assemblée Nationale a demandé au Premier président de
la Cour des comptes, sur le fondement du deuxième alinéa de l’article 58
de la loi organique relative aux lois de finances, la réalisation d’une
enquête sur les modalités de mise en place de l’Autorité de contrôle
prudentiel
4
. Le rapport de la Cour se concentre donc sur la mise en place
des pouvoirs, des moyens et des ressources permis par la réforme. Il vise
3
Comité des établissements de crédit et des entreprises d’investissement (CECEI) ;
Comité des entreprises d’assurance (CEA).
4
L’ordonnance du 21 janvier 2010 demande au ministre chargé de l’économie de
publier un rapport d’évaluation, trois ans après sa mise en place (article 24).
16
COUR DES COMPTES
également à apprécier la mise en oeuvre des objectifs à l’origine de la
création de l’ACP. L’appréciation porte en particulier sur les moyens
engagés et sur les éventuelles problématiques qui apparaissent à ce stade.
L’Autorité de Contrôle Prudentiel (ACP)
La réforme qui a conduit à la mise en place de la nouvelle autorité de
supervision visait à améliorer l’efficacité du système français de supervision
autour de trois objectifs : veiller à la préservation de la stabilité du système
financier ; protéger les clients et contrôler les pratiques commerciales ;
renforcer l’influence de la France sur la scène internationale et européenne.
Adossée à la Banque de France, et regroupant près de 1 000 agents,
l’ACP est dotée d’un statut d’autorité administrative indépendante. Elle est
financée par une contribution prélevée sur les organismes assujettis à son
contrôle.
Elle dispose de pouvoirs élargis de contrôle, de police administrative
et de sanction.
Ses missions ont été étendues à la protection de la clientèle. Dans le
cadre de cette mission, elle coopère avec l’Autorité des marchés financiers
(AMF). Un dispositif innovant de coordination entre ces deux autorités,
appelé pôle commun, a été mis en place afin de superviser les conditions de
commercialisation des produits financiers, tout en évitant que des zones
demeurent non couvertes.
L’ACP dispose d’un pouvoir de police administrative élargi par
rapport à ceux dont disposaient la Commission bancaire et l’ACAM.
S’agissant du pouvoir disciplinaire, afin d’assurer une séparation
totale de la notification des griefs et du jugement, l’ouverture de la procédure
de sanction est désormais effectuée par le collège, tandis que le jugement est
prononcé par une commission des sanctions. La loi du 22 octobre 2010 a, par
ailleurs, posé le principe de publicité des sanctions prononcées par la
commission des sanctions et relevé leur plafond.
Chapitre I
La mise en place de l’organisation
La mise en oeuvre de l’ordonnance du 21 janvier 2010, ratifiée par
la loi de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010, a fait
l’objet d’une préparation active par les anciennes autorités (en particulier,
les secrétariats généraux de la Commission bancaire et de l’Autorité de
contrôle des assurances et des mutuelles - ACAM), avec l’appui de la
direction générale du Trésor
5
.
Le rapprochement du Secrétariat général de la Commission
bancaire et de la Direction des établissements de crédit et des entreprises
d’investissement
6
, facilité par l’appartenance antérieure de ces deux
secrétariats à la Banque de France, a été réalisé dès avant la création de
l’ACP, fin 2009.
La préparation a permis, au moment de la publication de
l’ordonnance, de matérialiser rapidement l’unification des structures
qu’impliquait la création de l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP).
Dès lors que la loi maintenait l’adossement à la Banque de France
et ne conférait pas le statut d’autorité publique indépendante à la nouvelle
ACP
7
, la Banque a mis l’appui de son organisation au service de
l’Autorité de contrôle prudentiel.
Ces deux éléments ont joué en faveur de sa rapide visibilité.
5
Cette préparation s’est déroulée tout au long de l’année 2009 et le début 2010, avec
la mise en place, à partir de septembre 2009, d’un comité de pilotage comprenant les
membres de la direction générale des deux autorités.
6
Direction de la Banque de France en charge du secrétariat du comité des
établissements de crédit et des entreprises d’investissement.
7
L’ACP est dotée du statut d’autorité administrative indépendante.
18
COUR DES COMPTES
Une fois créée, l’ACP devait déployer son organisation interne et
intégrer les personnels en provenance de l’ACAM. Elle devait également
appeler les contributions financières dont les textes l’ont dotée et adopter
son budget.
I
-
La refonte des structures et de l’organisation
interne
A - Les premières concrétisations d’une autorité unifiée
1 - Des structures collégiales mises en place rapidement
L’ordonnance a créé une superposition de configurations du
collège, avec, outre le collège plénier, un collège dit « restreint » et deux
sous-collèges sectoriels : l’un dédié à l’assurance et l’autre à la banque.
Cette architecture visait notamment à respecter un équilibre entre le
secteur de la banque et celui de l’assurance qui souhaitait conserver une
instance dédiée à ses sujets ; le collège est unique au plan décisionnel,
mais est constitué de formations différentes. Il est encore trop tôt pour
vérifier si l’organisation en deux sous-collèges permet une suffisante
convergence dans le traitement des dossiers.
Attributions du collège et sous-collèges
Le collège en formation plénière (19 membres) « arrête les principes
d’organisation et de fonctionnement, le budget et le règlement intérieur de
l’Autorité. Il examine toute question de portée générale commune aux
secteurs de la banque et de l’assurance et analyse les risques de ces secteurs
au regard de la situation économique. Il délibère sur les priorités de
contrôle ». Il n’a pas vocation à examiner les questions individuelles.
La formation restreinte du collège (8 membres) a vocation à examiner
les questions transectorielles par nature (conglomérats financiers et
prises/augmentations/ cessions de participation susceptibles d’avoir un effet
significatif à la fois sur des entités relevant du secteur de la banque et sur des
entités relevant du secteur de l’assurance) ou, sur attribution du président ou
du vice-président, « les questions individuelles relatives à l’un des deux
secteurs, compte tenu notamment de leur incidence sur la stabilité
financière » (établissements très importants).
Deux sous-collèges sectoriels de l’assurance (8 membres) et de la
banque (8 membres) ont vocation à examiner les questions individuelles et
les questions d’ordre général spécifiques à chaque secteur.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
19
Un comité d’audit veille notamment au bon usage des ressources de
l’autorité. Trois commissions consultatives (affaires prudentielles, lutte
contre le blanchiment et pratiques commerciales) et un comité scientifique
complètent la structure institutionnelle.
Le collège plénier s’est réuni pour la première fois le 9 mars 2010,
seulement quelques jours après la nomination des membres du collège de
l’ACP, intervenue le 5 mars. De nouvelles nominations sont intervenues
ultérieurement, à la suite de l’adoption de la loi de régulation bancaire et
financière qui a prévu trois membres supplémentaires pour la formation
plénière du collège (le président de l’Autorité des marchés financiers et
deux membres désignés respectivement par le président de l’Assemblée
nationale et celui du Sénat
8
).
Au total, les différentes formations du collège se sont réunies
31 fois entre début mars et fin 2010
9
. Dès les premières réunions, des
décisions structurantes pour le fonctionnement de l’ACP ont été arrêtées.
Le collège plénier s’est ainsi rapidement doté d’un règlement intérieur
(intégrant des dispositions relatives à la prévention des conflits
d’intérêts). Il a arrêté les principes d’organisation des services de
l’autorité, institué des commissions consultatives dont les missions sont,
en partie, fixées par le code monétaire et financier
10
.
L’architecture du collège, qui n’a pas d’équivalent dans d’autres
autorités, fonctionne à la satisfaction des interlocuteurs rencontrés au
cours de l’enquête. La répartition des rôles soigneusement décrite par les
textes a permis de trouver un équilibre rapidement : la répartition des
thèmes de discussion et de décisions entre les collèges d’une part, et entre
les sous-collèges sectoriels et le collège restreint d’autre part, ne soulève
pas de difficulté majeure.
Toutefois, de l’avis de certains interlocuteurs, davantage de
dossiers concernant le secteur de l’assurance pourraient être examinés par
le collège restreint, qui n’a principalement examiné jusqu’à présent que le
cas d’un conglomérat financier et des dossiers relevant du secteur
bancaire, en particulier sur les exigences de fonds propres supérieures au
8
M. Philippe Auberger a été désigné, le 10 novembre 2010, par le Président de
l’Assemblée nationale et Mme Millot-Pernin, le 31 mars 2011, par celui du Sénat.
9
6 réunions en formation plénière, 7 réunions en formation restreinte, 8 réunions du
sous-collège assurances et 10 réunions du sous-collège banque (dont 2 ayant trait à
des établissements monégasques).
10
Article L. 612-14-I du code monétaire et financier : « L’Autorité peut instituer une
ou plusieurs commissions consultatives. Il est institué au moins une commission
chargée de rendre un avis sur les listes, les modèles, la fréquence et les délais de
transmission des documents et informations périodiques qui doivent être remis à
l’Autorité». L’article R.612-21 du code renvoie aussi à cette commission pour la
consultation préalable à l’adoption des dossiers-types de demande.
20
COUR DES COMPTES
minimum réglementaire ou sur des sujets liés aux modèles internes. Cette
situation est, très probablement, appelée à évoluer avec la mise en oeuvre
de Solvabilité II qui fait appel à des techniques de supervision déjà
connues en matière bancaire (modèle interne, exigences supplémentaires
de capital au titre du « pilier 2 »), même si les méthodes de calcul sous-
jacentes diffèrent fortement.
Par ailleurs, le collège plénier se compose d’un nombre trop élevé
de membres. Une taille limitée est la condition pour que le collège plénier
ait une existence suffisante par rapport aux autres formations. Cette
question devrait faire l’objet d’un réexamen après l’achèvement de la
fusion entre les anciennes autorités.
2 - La nécessaire continuité de l’activité vis-à-vis des
professionnels assujettis
Au cours de son enquête, la Cour n’a pas constaté de rupture de
continuité entre les quatre anciennes autorités (Commission bancaire,
ACAM, CECEI et CEA) et l’ACP. Cette continuité de l’activité vis-à-vis
des professionnels assujettis a été permise par la préparation active
réalisée en amont de la fusion. Elle était indispensable, en particulier dans
des domaines comme les agréments ou les prises de participation, qui
comportent des délais réglementaires impératifs
11
.
Parmi les professionnels rencontrés, certains ont également
souligné la parfaite continuité de l’activité de l’Autorité de contrôle
prudentiel.
3 - Des moyens matériels rapidement disponibles
La mise en place rapide d’un ensemble immobilier cohérent pour
l’ensemble du personnel de l’ACP et une gestion de la paie des
personnels de l’ex-ACAM par la Banque de France dès mars 2010
constituent deux exemples emblématiques de la concrétisation matérielle
de l’Autorité unifiée.
Dès la publication, le 19 janvier 2009, du rapport de l’IGF
12
préconisant la fusion des organes du contrôle prudentiel dans une
11
En matière bancaire par exemple, les délais sont particulièrement contraignants (60
jours pouvant être suspendus une fois) s’agissant des conditions de prise ou
d’extension de participation dans le capital d’un établissement assujetti
(règlement
96-16). En matière d’agrément, l’ACP doit statuer, en vertu de l’article L 511-14 du
code monétaire et financier, dans un délai de douze mois à compter de la réception de
la demande d’agrément.
12
Rapport de la mission de réflexion et de propositions sur l’organisation et le
fonctionnement de la supervision des activités financières en France, établi par
M. Bruno Delétré
.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
21
nouvelle autorité adossée à la Banque de France, la direction de
l’immobilier de la Banque (DISG) a prospecté le marché de l'immobilier
tertiaire francilien. En effet, la taille de la nouvelle entité (1 000 postes de
travail au démarrage ; près de 1 200 à terme rapproché) excédait les
capacités d'accueil de l'immeuble du siège de la Banque. Cette
anticipation a permis de regrouper les personnels de l’ACP dans un
ensemble immobilier composé de deux sites proches, pour la plupart de
ces personnels en juin 2010 et pour les autres en janvier 2011. Au total, il
se sera écoulé 15 mois entre l'identification des immeubles et une entrée
complète dans les lieux. Ce délai, qui pourrait sembler un peu long, est
conforme aux meilleurs standards
13
.
Regroupement des personnels de l’ACP sur deux sites proches
Après examen de différents scénarios couvrant un spectre large
(location/acquisition, Paris/petite couronne), un consensus s'est assez
rapidement dégagé à haut niveau sur le schéma suivant : installation de l'ACP
dès sa création dans l'immeuble abritant l'ACAM ; à cet effet, location du
maximum possible d'espace au Centre d'affaires Paris Victoire (CAPV) ;
recherche du complément de surfaces nécessaire à proximité, dans un
immeuble offrant des fonctionnalités comparables. A l'automne 2009,
l'ensemble immobilier "Opéra Victoire" (OV) a été privilégié pour cette
deuxième implantation.
La Banque a conclu les deux nouveaux baux : pour le CAPV, le
14 mai 2009 ; pour OV, le 07 décembre 2009. La mise à disposition par le
bailleur des locaux loués s'est échelonnée au CAPV entre le 01/09/2009 et le
01/01/2010 et est intervenue à OV le 01/09/2010.
Parallèlement à la négociation des baux, la Banque de France a engagé
des procédures de marché de nature à contenir les délais et les coûts
d'aménagement des plateaux loués : accord-cadre portant sur la maîtrise
d'oeuvre (avis de marché en mars 2009 ; marché CAPV signé le 07/08/2009 ;
marché OV signé le 11/02/2010) ; accord de référencement d'entreprises pour
les travaux au CAPV (publié le 23/09 et attribué le 24/12/2009); accord de
référencement d'entreprises pour les travaux à OV (lancé en mars et signé en
juillet 2010). L'installation des services a eu lieu, pour l'essentiel, en juin
2010 au CAPV et en janvier 2011 à OV. La surface utile nette par poste de
travail en janvier 2011 était de 12,9 m², la cible à fin 2012 étant de 11,2 m².
Le loyer hors taxe hors charges/m² s’élève à 618 euros (voir infra).
13
A titre d'illustration, ce délai avait été estimé par un des plus grands intermédiaires
de la place à un minimum incompressible de 13-14 mois.
22
COUR DES COMPTES
B - Une réorganisation d’ensemble pertinente, au moins
dans un premier temps
L’organisation des services de l’Autorité de contrôle prudentiel,
dont les principes ont été arrêtés par le collège dès le 9 mars 2010 et
formalisés dans une décision du secrétaire général du 18 mars 2010, est
équilibrée et pertinente. En particulier, elle ne consiste pas en une simple
juxtaposition des services des quatre autorités fusionnées (ACAM, CEA,
CECEI et CB) et tient compte des missions confiées à l’Autorité.
1 - La création de directions ou services transversaux aux
secteurs de la banque et de l’assurance
L’organigramme de l’ACP comprend un certain nombre de
directions communes aux deux secteurs, banque et assurance, non
seulement au niveau des fonctions supports mais aussi des activités
opérationnelles. C’est le cas de quatre directions provenant de la fusion
des autorités (agréments, affaires juridiques, relations internationales et
études
14
). C’est également celui de la direction du contrôle des pratiques
commerciales qui assure, de manière transversale, la mission nouvelle de
l’ACP en matière de protection de la clientèle des professions assujetties
à son contrôle en ce qui concerne la commercialisation des produits
d’assurance et de crédit.
L’exemple de la direction des agréments, des autorisations et de la
réglementation
Cette direction est en charge des agréments et autres autorisations
liées aux agréments au cours de la vie des entités, notamment les prises de
contrôle, les restructurations et les changements de dirigeants, dans les deux
secteurs de la banque et de l’assurance.
Avant la fusion, les activités d’agrément et d’autorisation étaient
exercées :
- pour les établissements de crédit, entreprises d’investissement et
établissements de paiement, par la Direction des Établissements de Crédit et
des Entreprises d’Investissement (DECEI) de la Banque de France, qui
assurait le secrétariat du comité des établissements de crédit et des entreprises
d’investissement (CECEI), et qui a été rapprochée du Secrétariat général de
la Commission bancaire dès la fin 2009 ;
14
Ces deux dernières directions, jusqu’alors regroupées, viennent d’être séparées.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
23
- pour les compagnies d’assurance, par le Comité des Entreprises
d’Assurance (CEA) dont le secrétariat général était assuré par la direction
générale du Trésor ;
- pour les institutions de prévoyance et les mutuelles d’assurances des
livres II et III par la Direction de la Sécurité Sociale (DSS) du Ministère de la
Santé ou par les Directions régionales de l’action sanitaire et sociale
(DRASS) pour le compte des préfets de région pour les mutuelles en dessous
d’un certain seuil.
Dans ce cadre antérieur à la fusion, les brigades de contrôle de
l’Autorité de Contrôle des Assurances et des Mutuelles (ACAM)
concouraient à l’instruction des dossiers d’agrément ou d’autorisation pour le
compte du CEA et de la DSS, et les services de contrôle bancaire apportaient
leur expertise prudentielle à la direction des établissements de crédit et des
entreprises d’investissement.
2 - Le maintien de directions distinctes pour les contrôles
permanents et sur place des professionnels assujettis
L’organisation
des
activités
de
contrôle
individuel
des
professionnels assujettis au contrôle de l’ACP repose, en revanche, sur
des directions distinctes pour le secteur de la banque et celui de
l’assurance.
En ce qui concerne le secteur bancaire, l’organisation est reprise de
l’organisation précédente du secrétariat général de la Commission
bancaire, avec deux directions en charge du contrôle permanent
15
et la
délégation au contrôle sur place qui assure les missions de contrôle sur
place diligentées par le secrétariat général de l’ACP
16
.
En ce qui concerne le secteur des assurances, les huit brigades de
contrôle, qui rapportaient directement au secrétaire général et au
secrétaire général adjoint dans le cadre de l’ACAM, ont été intégrées au
sein de deux directions du contrôle des assurances. Une troisième
direction, nouvelle, a été créée pour accueillir les contrôles spécialisés et
transversaux concernant les entités du secteur des assurances, appelée
direction des contrôles spécialisés et transversaux. Cette direction
15
Le contrôle permanent est le contrôle du respect par les établissements assujettis à
l’ACP des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables, sur la
base des analyses des déclarations comptables et prudentiels, des entretiens
approfondis avec les représentants des établissements, des échanges avec les
superviseurs étrangers, notamment dans le cadre des collèges de superviseurs, et du
résultat des enquêtes sur place.
16
Cette délégation dispose également d’une cellule de contrôle des risques modélisés,
d’une cellule d’évaluation des systèmes d’information et d’une cellule de soutien
informatique.
24
COUR DES COMPTES
comprend notamment une cellule pour contrôler les modèles internes,
dans la perspective de la mise en oeuvre de la directive Solvabilité II,
deux services en charge des contrôles transversaux et spécialisés et une
mission spécialisée dans les contrôles sur place en matière de lutte contre
le blanchiment.
La note soumise au collège plénier de l’ACP pour sa première
réunion du 9 mars 2010 précise que « l’organisation de ces contrôles a
vocation à refléter la spécificité de chacun des secteurs dans lesquels
l’ACP exerce sa compétence et à assurer la technicité requise pour chacun
d’eux ». Cette organisation est pertinente, au moins dans un premier
temps, compte tenu des enjeux auxquels l’ACP est confrontée,
notamment avec la mise en oeuvre de Solvabilité II.
3 - Une organisation interne encore à parfaire sur certains points
L’objectif du secrétariat général de l’ACP est, à juste titre, de
mettre en place et stabiliser l’organisation interne décrite ci-dessus, afin
de consolider la fusion. Toutefois, au-delà de cette phase de mise en
place, quelques points particuliers pourraient faire l’objet d’une
évaluation, par exemple à l’occasion du bilan du fonctionnement de
l’ACP qui doit intervenir trois ans après sa mise en place.
a) L’organisation de la direction générale de l’ACP
Le secrétaire général de l’Autorité, dont le titulaire actuel est
l’ancien secrétaire général de la Commission bancaire, est assisté de cinq
secrétaires généraux adjoints. L’un d’entre eux est « premier secrétaire
général adjoint », nommé, aux termes de l’article L. 612-15 du code
monétaire et financier, par le président de l’ACP après avis conforme du
vice-président et agrément par les ministres chargés de l’économie, de la
sécurité sociale et de la mutualité
17
. Son actuel titulaire a été secrétaire
général adjoint à l’ACAM. La répartition des responsabilités entre les
secrétaires généraux adjoints est complexe.
17
Le premier secrétaire général adjoint doit, aux termes du même article, posséder
une expérience en matière d’assurance ou bancaire complémentaire de celle du
secrétaire général.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
25
Répartition des responsabilités au sein de la direction générale
de l’ACP (à la mi-juillet 2011)
Secrétaires
généraux adjoints
Fonctions antérieures à la
création de l’ACP
Directions ou services supervisés
Premier SGA
Secrétaire général adjoint de
l’ACAM
Direction du contrôle des établissements de crédit
généraux
et
spécialisés
(3
services) ;
deux
directions
du
contrôle
des
assurances
(à
l’exception d’une brigade de contrôle) ; direction
des affaires internationales
SGA
Secrétaire général adjoint de
la Commission bancaire
Direction
du
contrôle
des
établissements
mutualistes et des entreprises d’investissement (2
services) ; direction des affaires juridiques ;
Service des ressources humaines ; une brigade de
contrôle des assurances ; délégation au contrôle
sur place des établissements de crédit et des
entreprises d’investissement
SGA
Secrétaire général du Comité
consultatif de la législation et
de la réglementation finan-
cières (CCLRF) et du Comité
des établissements de crédit et
des entreprises d'investisse-
ment (CECEI)
Direction des agréments, des autorisations et de
la
réglementation ;
direction
des
affaires
financières ; service communication. Par ailleurs
ce SGA a conservé ses fonctions de secrétaire
général du CCLRF
SGA
Directeur
du
contrôle
des
établissements mutualistes et
des entreprises d’investisse-
ment
Direction du contrôle des établissements de crédit
généraux et spécialisés (1 service) ; direction du
contrôle des établissements mutualistes et des
entreprises
d’investissement
(2
services) ;
direction des études ; services informatiques
SGA
Sous-directeur en charge des
assurances,
à
la
direction
générale du Trésor
Direction
du
contrôle
des
pratiques
commerciales ; direction des contrôles spécialisés
et transversaux
Source : Cour des comptes, sur la base de documents de l’ACP
L’organisation étoffée de la direction générale, avec cinq
secrétaires généraux adjoints, pouvait s’expliquer dans la période de
transition actuelle, compte tenu de l’héritage des précédentes structures et
de la charge de travail importante liée au contexte de la fusion et à
l’évolution profonde des réglementations prudentielles. Il sera souhaitable
de faire évoluer cette organisation vers une structure plus resserrée, dans
laquelle chaque secrétaire général adjoint, et du moins le premier,
superviserait un ensemble de directions ou services plus substantiel.
b) La distinction entre le contrôle permanent et le contrôle sur place
L’ACAM et la Commission bancaire avaient deux pratiques
radicalement opposées. La Commission bancaire distinguait le contrôle
permanent du contrôle sur place. L’ACAM était composée de brigades de
contrôle qui comprenaient chacune, sous l’autorité d’un chef de brigade,
un certain nombre de contrôleurs qui effectuaient le contrôle permanent et
le contrôle sur place des établissements logés dans le portefeuille de la
brigade.
26
COUR DES COMPTES
Organisation du contrôle du secteur bancaire au sein du SGCB, puis
de l’ACP
Le contrôle permanent est organisé sous forme de directions
effectuant la surveillance d’un portefeuille d’établissements assujettis.
Chaque établissement dispose d’un ou plusieurs correspondants réguliers qui
reçoivent les informations envoyées de façon périodique au superviseur,
interrogent les établissements en fonction de l’actualité, préparent les saisines
du collège lorsque cela paraît nécessaire ou souhaitable.
Lorsqu’un contrôle sur place est diligenté par le Secrétaire général de
l’ACP, dans le cadre d’une lettre qui définit la mission, il est conduit par des
Inspecteurs de la Banque de France au sein de la Délégation au contrôle sur
place, qui organise le contrôle sur place. Les inspecteurs se rendent dans les
locaux de l’établissement inspecté et établissent un rapport de contrôle sur
place dont le projet donne lieu à échange contradictoire avec l’établissement
contrôlé. Sur la base de ce rapport, la Direction du contrôle permanent
concernée prépare la « lettre de suite » qui sera adressée à l’établissement
l’invitant à corriger les dysfonctionnements ou insuffisances relevées, ou bien
la mise en demeure (déléguée au président) ou encore, dans les cas les plus
graves, l’examen de la situation par le collège, pouvant conduire à la mise en
oeuvre d’une mesure de police administrative autre que la mise en demeure
ou encore à la décision d’ouvrir une procédure disciplinaire.
L’ACP a, dans l’ensemble, conservé à ce stade les pratiques
propres à l’ACAM et au SGCB, tout en faisant converger en partie les
systèmes de contrôle existants
18
à travers :
la création de la direction des contrôles spécialisés et
transversaux dans le secteur des assurances. Cette direction doit
notamment permettre d’organiser, comme dans le système de
l’ancienne Commission bancaire, des missions de contrôle sur
place transversales concernant des établissements appartenant à
différentes brigades, ce qui était plus difficile auparavant
19
.
Pour l’heure, les brigades conservent, néanmoins, à côté de leur
activité de contrôle permanent, la compétence de contrôles sur
place dont elles disposaient à l’ACAM ;
la mise en place, dans le domaine du contrôle bancaire
permanent, d’une nouvelle modalité de contrôle inspirée de
l’assurance que sont les visites sur place. Ces visites, d’une
durée courte, qui complètent les entretiens réguliers et
18
L’objectif, explicité par le Président de l’ACP lors de la première réunion du
collège, est de faire converger les systèmes de contrôle existants, chacun des deux
secteurs étant amené à développer les meilleures pratiques de l’autre secteur.
19
Cela supposait de lancer parallèlement des travaux identiques par plusieurs
brigades.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
27
approfondis menés avec les établissements de crédit, doivent
permettre notamment de s’assurer de manière plus détaillée du
degré de prise en compte des remarques contenues dans les
lettres faisant suite aux missions d’enquête sur place
20
.
Il conviendra d’évaluer, à moyen terme, si cette convergence doit
être poussée au terme de sa logique, avec une direction des contrôles
spécialisés et transversaux qui deviendrait une direction à part entière du
contrôle sur place des organismes d’assurance et des mutuelles, tandis
que les actuelles brigades de contrôle deviendraient des services
uniquement de contrôle permanent, notamment dans le contexte de la
directive Solvabilité II. En effet, la mise en oeuvre de cette directive va
s’accompagner d’une forte augmentation des « reportings » financiers et
prudentiels, et donc de l’activité de contrôle permanent.
Cette perspective, qui demeure très sensible pour les personnels de
l’ex-ACAM, est à gérer dans le temps, au regard également de la
nécessité de préserver la sécurité de l’organisation de l’ACP dans un
contexte de crise financière et de mise en place de réglementations
sectorielles complexes comme Solvabilité II. Elle devrait, en tout état de
cause, s’accompagner de nécessaires passerelles entre les deux activités
de contrôle, sur place et permanent.
C - L’adossement à la Banque de France : un avantage
certain mais des progrès encore à poursuivre
Le maintien de l’adossement de l’autorité prudentielle à la Banque
de France est une des leçons tirées de la crise financière. Un lien fort avec
la Banque doit permettre à l’Autorité de bénéficier notamment de
l’expertise économique et financière de la banque centrale et un tel lien
doit favoriser l’efficacité et la rapidité du traitement des situations
d’urgence qui pourraient affecter les entités bancaires ou d’assurance.
Dans ses précédents rapports
21
, la Cour a considéré que l’existence de la
Commission bancaire située au sein de l’ensemble Banque de France a
été un atout dans la maîtrise en France des effets de la crise bancaire et
financière de 2008. Le rapprochement de la supervision du secteur des
assurances de ce modèle intégré peut également être pertinent car, si
celui-ci connaît des spécificité fortes, il tend aussi, du fait des évolutions
qui l’affectent avec la mise en oeuvre de Solvabilité II, vers une
20
Elles peuvent permettre également, le cas échéant, d’examiner de manière
transversale et plus détaillée, un champ d’activité particulier ou de prendre
connaissance
de
certaines
fonctionnalités
des
systèmes
d’information
d’un
établissement.
21
Rapport public annuel 2009 ; rapport sur les concours publics aux établissements de
crédit (mai 2010).
28
COUR DES COMPTES
convergence des méthodes de supervision qui peuvent être appliquées de
façon assez largement commune aux deux secteurs banque et assurance.
Toutefois, ce parti ne peut trouver sa pleine signification que si
toutes les synergies entre la Banque de France et l’ACP sont tirées, ce
qui, selon certains professionnels, n’était pas totalement le cas à la date de
l’enquête, intervenue après 16 mois seulement de fonctionnement de
l’ACP.
1 - Une articulation de la supervision micro-prudentielle et de la
surveillance macro-prudentielle qui bénéficie d’échanges entre les
deux entités
L’ACP communique, par diverses voies, à la Banque de France les
problématiques macro-prudentielles qu’elle identifie dans son rôle de
supervision des établissements eux-mêmes. Ces problématiques sont à
leur tour intégrées par la Banque pour ses travaux de surveillance macro-
prudentielle. Ainsi la Banque de France dispose d’une information
enrichie par les observations de terrain.
Réciproquement,
l’ACP
peut
appréhender
la
liquidité
des
établissements de crédit à travers non seulement leurs opérations propres
mais aussi leur accès au refinancement de la banque centrale. Elle dispose
également des statistiques de la Banque.
Illustrations de l’articulation entre le contrôle micro-prudentiel et la
surveillance macro-prudentielle
L’ACP transmet au Gouverneur et aux directeurs généraux de la
Banque de France le dossier d’analyse des risques qu’elle élabore tous les six
mois comprenant généralement comme domaines d’analyse récurrents les
résultats de différents tests de résistance réalisés par le SGACP selon ses
propres méthodologies ou celles des autorités de supervision européennes
(EBA, EIOPA
22
), des focus thématiques sur des risques identifiés pour le
secteur des banques et des assurances, ainsi que des indicateurs de risque sur
ces secteurs. Les tests de résistance présentés dans ce dossier sont établis à
partir d’hypothèses économiques, notamment de croissance, élaborés par les
services de la Banque de France. Par ailleurs, le risque de liquidité est
appréhendé dans le dossier à travers la surveillance par l’ACP des ratios
individuels des grands établissements et, pour ce qui concerne le dernier
dossier, les données de la Banque centrale européenne sur l’évolution du
montant des facilités de dépôts des établissements.
22
Autorité bancaire européenne ; Autorité européenne des assurances et des pensions
professionnelles.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
29
La surveillance de l’exposition des établissements de crédit et
d’assurance aux risques liés aux dettes souveraines a également donné lieu,
au plan macro-prudentiel, à des notes spécifiques (sur un ou plusieurs pays)
de l’ACP qui a participé à des groupes de travail de la Banque de France sur
ce sujet.
L’ACP
est,
par
ailleurs,
présente
dans
différentes
enceintes
d’échanges d’informations où sont traitées des problématiques macro-
prudentielles (comité de stabilité financière interne à la Banque de France,
points préparatoires aux réunions internationales …). Le président et le vice-
président de l’ACP participent au Conseil de régulation financière et du
risque systémique (COREFRIS), réuni pour la première fois en février 2011
sous la présidence du ministre de l’économie. Ce conseil, qui s’est substitué
au collège des autorités de contrôle des entreprises du secteur financier, a été
créé par la loi de régulation bancaire et financière du 22 octobre 2010. Il a
pour objectif de coordonner l’action nationale et internationale de la France
en matière d’identification du risque systémique et de normalisation, ce qui
va dans le sens d’une précédente recommandation de la Cour.
L’ACP joue un rôle actif dans l’élaboration par la Banque de France
de la synthèse de l’évaluation du système financier français. Elle contribue
ainsi au dossier semestriel d’évaluation des risques financiers auquel
participent plusieurs autres directions générales de la Banque.
Des réunions ad hoc entre le secrétariat général de l’ACP et la Banque
permettent à l’ACP de mieux appréhender la liquidité des établissements du
point de vue de leurs opérations propres et de leur accès au refinancement de
la banque centrale.
L’ACP bénéficie également d’informations et de statistiques en
provenance de la Banque de France (sur les risques immobiliers, la
conjoncture, les défaillances d’entreprise…).
Sources: ACP, Ministère de l’économie, des finances et de l’industrie
2 - De nombreuses prestations effectuées par la Banque, dont la
prévision de coût est en voie d’amélioration
L’ordonnance du 21 janvier 2010 a posé le principe de
l’adossement de l’ACP à la Banque de France :
« I. - L’autorité de
contrôle prudentiel dispose des moyens fournis par la Banque de France.
Le secrétaire général de l’Autorité engage les dépenses dans la limite de
son budget. Il reçoit délégation pour conclure les contrats et procéder
aux appels d’offres, dans les conditions applicables aux marchés passés
par la Banque de France.
30
COUR DES COMPTES
II. - Le personnel des services de l’Autorité de contrôle prudentiel
est composé d’agents dont l’employeur est la Banque de France. »
En pratique, la Banque de France effectue, pour le compte de
l’ACP, de très nombreuses prestations (gestion de la paie, recrutement,
gestion de l’immobilier, prestations informatiques …). Ces prestations
peuvent d’ailleurs être réciproques puisque l’ACP fournit à son tour des
services à la Banque
23
. L’adossement de l’ACP à la Banque lui permet de
bénéficier d’une mutualisation avec les moyens de cette dernière ; il a
contribué à sa mise en place rapide.
Le détail des prestations rendues par la Banque à l’ACP et les
modalités de facturation ont été formalisés dans une « convention
financière Banque de France-Autorité de contrôle prudentiel », signée le
13 décembre 2010 pour une durée de trois exercices (2010-2012)
24
,
à
l’issue de discussions menées dans le cadre du comité d’audit.
Prestations fournies par la Banque à l’ACP et modalités de
facturation
La convention financière distingue les prestations fournies par la
Banque de France à l’ACP, selon qu’elles sont spécifiques ou non.
1) Prestations effectuées par la Banque spécifiquement pour l’ACP :
elles sont au nombre de six (prestations informatiques, prestations
immobilières, prestations de recouvrement, prestation de formation et de
développement de compétences, mise à disposition temporaire de moyens
supplémentaires en personnel et prestation du réseau).
Les principes d’évaluation des coûts applicables à ces prestations sont
décrits dans des annexes : ils reposent en particulier sur le nombre
d’équipements, le remboursement des charges facturées par les prestataires
externes ainsi que le nombre d’agents de la Banque de France qui concourent
à la réalisation des prestations. Concernant les agents, la convention rappelle
que le coût complet d’un agent comprend les salaires majorés de l’ensemble
des dépenses de fonctionnement relatives à l’exercice de l’activité et des
charges de support imputables.
23
Informations sur les secteurs bancaire et assurance, mise à disposition de la Banque
par l’ACP d’inspecteurs du contrôle bancaire.
24
L’article R.612-14 du code monétaire et financier prévoit que les coûts des moyens
et des prestations procurés par la Banque de France à l’ACP sont déterminés à partir
de la comptabilité analytique de la Banque, conformément aux conventions passées,
après avis du comité d’audit, entre l’ACP et la Banque.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
31
2) « Autres prestations » ou « services communs » : sont ainsi
désignées la gestion des ressources humaines, la gestion financière, la
logistique - courrier, communication interne, reprographie, archivage, mise à
disposition de véhicules et chauffeurs. Leur coût pour l’ACP est relatif et
dépend de la consommation respective par les différentes activités de la
Banque. La convention prévoit certains « inducteurs » de coûts, en indiquant
que ceux-ci ne sont pas exhaustifs.
Les prestations sont refacturées par la Banque de France à l’ACP
sur la base du coût complet, calculé au moyen de l’outil de comptabilité
analytique de la Banque
25
.
Système de comptabilité analytique de la Banque de France
Coût direct
Coût
du
personnel
élargi
(intéressement
et
participation…)
+
dépenses
de
fonctionnement
+
amortissements + certains éléments de rémunération
Coût complet
Coût direct + coût de l’informatique + coût de
l’immobilier + coût de la formation + régimes sociaux +
coût du gouvernement de la Banque
Source : Cour des comptes d’après des données Banque de France
Pour les exercices 2010 et 2011, la prévision du coût des
prestations effectuées par la Banque de France a été rendue complexe par
plusieurs éléments :
compte tenu de la fusion, les besoins de la nouvelle autorité
étaient difficiles à prévoir ;
en raison du calendrier de la comptabilité analytique de la
Banque, cette dernière ne disposait pas, au moment de
l’établissement des budgets 2010 et 2011, d’une base fiable de
coûts (à savoir les coûts réalisés des prestations effectuées sur
une année pleine). Ces données n’ont été disponibles, s’agissant
des prestations réalisées par la Banque au cours de l’exercice
2010, qu’après la clôture des comptes de la Banque, soit à la fin
du premier semestre 2011.
La description des éléments de coût dans la convention financière
a, en conséquence, été succincte, se limitant à l’énoncé de principes. Le
comité d’audit a souligné que les clés de répartition auraient mérité d’être
mieux précisées.
25
Les caractéristiques de l’outil de comptabilité analytique de la Banque de France
ont été normées dans le cadre du SEBC, à des fins de calcul de coût et de refacturation
de ceux-ci entre la BCE et les banques centrales nationales (BCN).
32
COUR DES COMPTES
Ces difficultés devraient, en principe, être prochainement levées.
La Banque de France s’est engagée à présenter au comité d’audit, lors du
point budgétaire de mi-année qui a lieu en septembre 2011, des fiches de
coûts par prestations, réalisées sur la base de l’analyse fine des coûts
conduite après l’arrêté des comptes pour 2010. Compte tenu de la
complexité des clés de répartition de la comptabilité analytique de la
Banque, cette dernière a pour objectif de présenter au comité d’audit les
principales d’entre elles, qui représentent la grande majorité des
prestations effectuées par la Banque pour le compte de l’ACP
26
.
Le comité d’audit a émis le souhait qu’un audit spécifique des
grilles de coûts imputés à l’ACP soit réalisé par l’audit interne de la
Banque de France et a considéré qu’il conviendra de s'interroger sur une
éventuelle mise à jour de la convention financière, après un cycle
budgétaire complet.
Le comité d’audit avait également souhaité, lors des discussions
sur le projet de convention financière, que cette dernière s’accompagne
d’un plan triennal d’évolution des charges dont découleraient ensuite les
refacturations annuelles. L’ACP a indiqué à la Cour que cette demande
serait satisfaite lors de la présentation du budget pour 2012.
Au total, la Banque de France est en mesure de répondre aux
demandes du comité d’audit qui devraient dès lors être satisfaites avant la
fin de l’année 2011.
3 - Le maintien de fonctions support étoffées au sein de l’ACP
L’ACP n’a pas remis complètement sa gestion aux services de la
Banque de France. Elle exerce en propre des fonctions support, soit que
ces fonctions se trouvent dans le champ d’un domaine partagé, soit
qu’elles traduisent une compétence spécifique de l’autorité.
En effet, le degré de mutualisation des moyens entre la Banque et
l’ACP varie selon les processus :
Certains sont entièrement pris en charge par les services de la
Banque : c’est le cas, par exemple, de la gestion de la paie ;
D’autres sont partagés entre le secrétariat général de l’ACP et
les services de la Banque, comme le recrutement et
l’informatique.
26
Environ 4/5
ème
des coûts devraient être expliqués à partir des clés de répartition
présentées au comité d’audit.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
33
Trois exemples sont donnés.
a) La gestion des ressources humaines
S’agissant du recrutement, la direction des ressources humaines de
l’ACP et celle de la Banque de France interviennent de manière
complémentaire :
la DRH de l’ACP est chargée de l’identification des besoins, de
la détermination des vagues de recrutement, de la promotion
des postes de l’ACP à l’extérieur (en lien avec la Banque), de
l’organisation des entretiens entre les candidats et les
responsables opérationnels de l’ACP ;
la DGRH de la Banque diffuse les offres de postes en interne,
choisit le vecteur de l’appel d’offres, analyse les candidatures
reçues pour mener un premier tri permettant d’écarter les
candidatures manifestement non conformes, conduit l’entretien
de « qualification téléphonique » qui permet notamment de
vérifier les prétentions salariales par rapport aux rémunérations
de la Banque de France, mène le volet RH des entretiens en lien
avec les RH de l’ACP et établit in fine le contrat de travail.
Lorsque les processus sont partagés entre la Banque et le
secrétariat général de l’ACP, une coordination est nécessaire entre les
différents services compétents, et entraîne des procédures qui demeurent
parfois lourdes, mais qui s’expliquent, notamment dans le domaine des
ressources humaines. Ainsi, s’agissant du recrutement, la Banque est
l’employeur du personnel des services de l’ACP. La DGRH de la Banque
s’assure de la cohérence des recrutements pour l’ACP avec la politique
d’ensemble de gestion des ressources humaines de l’employeur.
b) Les systèmes d’information
En ce qui concerne l’informatique, la Banque de France fournit
l’infrastructure (serveurs, services liés au poste de travail individuels tels
que messagerie, sites collaboratifs, bureautiques). L’ACP a maintenu une
informatique en propre, directement liée à son métier de supervision : ses
deux services de développement traitent principalement le domaine des
informations collectées auprès des organismes assujettis tandis qu’un
troisième service est en charge de l’appui aux utilisateurs et de fonctions
transversales à valeur ajoutée. Les services informatiques de l’ACP
devraient passer de 66
27
à 85 agents avant la fin de 2012, cette
augmentation se justifiant par plusieurs nécessités selon l’ACP,
27
66 agents à l’origine de l’ACP.
34
COUR DES COMPTES
notamment l'élargissement du portefeuille-projet lié aux nouvelles
missions et la mise en place du système d'information induit par
Solvabilité II.
La bonne articulation entre les services de la Banque et ceux de
l’ACP implique de définir précisément les besoins de l’ACP. Un contrat
de service, entré en vigueur en 2010, définit les services attendus de
l’organisation informatique de la Banque. L’ACP prévoit de signer
également, le cas échéant, un contrat de service immobilier avec la
Banque de France avant la fin 2012. La Cour recommande la signature de
tels contrats afin de régir les relations entre les deux structures, dans le
cadre de la convention financière.
c) Les affaires financières
La direction des affaires financières (DAF) de l’ACP est chargée
de la mise en place et du suivi du budget autonome de l’ACP, de
l’établissement des appels à contribution pour frais de contrôle pour un
peu plus de 50 000 assujettis et du suivi du recouvrement, ainsi que du
pilotage stratégique de l’ACP, de l’extension du contrôle de gestion à
l’ACP et du suivi des coûts analytiques.
Cette direction comprend en outre un service de l'immobilier et des
moyens généraux, qui gère les deux sites de l'ACP au quotidien, et
effectue des activités pratiques comme l’enregistrement et la distribution
du courrier, la reprographie, la sécurité, etc...
La DAF a été constituée par l'addition des collaborateurs en charge
des fonctions financières et de celles relatives à l'immobilier et moyens
généraux au sein de l'ACAM et de la Commission bancaire (SGCB).
L’effectif de la direction était de 35 agents lors de la création de l’ACP et
devrait être porté à 36 à la fin 2012.
Au total, les fonctions support dont la réunion à la création de
l’ACP représentait 135 agents en mars 2010 pourraient atteindre 157
agents à la fin de 2011 et 166 à la fin de 2012, selon les effectifs cibles,
soit une progression de 23 % sur la période 2010-2012, supérieure à celle
prévue pour certains effectifs opérationnels comme ceux du contrôle
bancaire (+ 16 %) et proche de celle de l’effectif global de l’ACP
(+ 28 %)
28
.
28
Cette augmentation concerne les services informatiques (+ 19 agents entre mars
2010 et l’objectif cible de fin 2012), le service en charge des normes et méthodes, de
l’organisation et de la formation (+ 6 agents), le service des ressources humaines (+ 2
agents), la direction de la DRHMSI – direction des ressources humaines, méthodes et
systèmes d’information - (+ 3 agents), les fonctions financières, du budget et de
l’immobilier restant quasiment stables (+ 1 agent).
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
35
Les fonctions support représentaient, en mars 2010, 15 % des
effectifs de l’ACP, soit une proportion plus élevée que celle généralement
observée dans les grandes organisations. Ce ratio ne va pas décroître
notablement d’ici à la fin de 2012, alors même que le législateur a prévu
que l’ACP dispose des moyens fournis par la Banque de France. Certes,
la création de l’ACP s’est accompagnée de fonctions nouvelles
(recensement d’un certain nombre de contributeurs, établissement des
appels à contribution pour frais de contrôle, projets informatiques dans le
cadre de Solvabilité II…) mais des zones de recoupement existent avec
les services de la Banque de France, en particulier dans le domaine de la
gestion des ressources humaines et celui de l’immobilier. Au terme de la
fusion, l’ACP devrait rationaliser ses fonctions support, en assurant un
redéploiement d’effectifs, en particulier dans les fonctions financières, le
budget et l’immobilier.
II
-
L’intégration des personnels et le
renforcement des effectifs
A - L’évolution des statuts et des effectifs de l’ACP
1 - La démarche de rapprochement des statuts
a) La coexistence de statuts différents en 2010 et 2011
Depuis sa création à juin 2011, trois grandes « catégories » de
personnels coexistent au sein de l’ACP :
les personnels de statut Banque de France, qui se subdivisent
entre les personnels titulaires ayant passé le concours et les
personnels contractuels recrutés en dehors des concours y
compris les fonctionnaires détachés sous contrat Banque de
France ;
les
personnels
de
droit
public,
issus
de
l’ex-ACAM,
comprenant les fonctionnaires détachés et les contractuels ;
les fonctionnaires affectés qui sont les cadres du corps de
contrôle des assurances.
36
COUR DES COMPTES
Catégories de personnels présents en mai 2011
1. Les personnels de statut Banque de France
- Les agents titulaires : leur recrutement provient du concours. Ces
agents titulaires relèvent pour leur retraite de la Caisse de réserve des
employés (CRE) de la Banque de France. La progression de leur
rémunération est déterminée par une grille indiciaire et
elle est liée aux
décisions d’avancement. L’avancement en grade s’effectue sur proposition de
la hiérarchie puis fait suite à un examen en commission paritaire.
L’avancement d’échelons au sein d’un grade suit une progression minimale
automatique et peut être accéléré par décision de la hiérarchie.
- Les agents du cadre contractuel : ils sont recrutés sur des contrats à
durée indéterminée. Leur recrutement répond au besoin de la Banque de se
doter de profils apportant des compétences ou expériences qui ne peuvent
être obtenues par la voie des concours. Afin d’anticiper l’intégration des
personnels de l’ex-ACAM dans ses statuts et l’augmentation des besoins de
recrutement nés de la création de l’ACP, la Banque a réformé en 2010 le
cadre statutaire des agents recrutés par voie contractuelle
29
. Leurs statuts et
conditions de rémunération ont été homogénéisés, et leur situation rendue
convergente avec celle des agents titulaires, avec une grille de classification à
7 niveaux. Ces agents relèvent pour leur retraite du régime général et pour la
retraite complémentaire, de l’IRCANTEC. Leur rémunération est définie en
indice, comme les titulaires. Ni l’avancement de carrière, ni la progression de
l’échelon de rémunération ne sont automatiques.
- Les « chargés de mission » : ils sont recrutés pour des missions
exceptionnelles et temporaires, en contrat à durée déterminée. Leur
rémunération est définie en euros et non en indice.
2. Les personnels de l’ex-ACAM
- Les commissaires-contrôleurs des assurances (CCA), fonctionnaires
de l’Etat affectés à la Banque de France, sont placés en position normale
d’activité aux termes du code monétaire et financier (voir infra).
- Les fonctionnaires détachés.
- Les agents contractuels de droit public, en CDD ou CDI.
Les agents titulaires de la Banque de France constituent la grande
majorité des effectifs de l’ACP, même si leur part au sein de l’Autorité
est inférieure à celle au sein de la Banque qui était de 90 % en 2009 et a
légèrement diminué entre juin 2010 et mai 2011.
29
Arrêté n°A 2010-01 du 2 février 2010.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
37
La part des personnels « contractuels » de la Banque et des chargés
de mission reste minoritaire mais elle a plus que doublé entre juin 2010 et
mars 2011 ; elle est largement supérieure à leur part au sein de l’effectif
de la Banque qui était de 4 % en 2009. Cette proportion reflète la
politique très active de recrutement de l’ACP sur le marché du travail.
Enfin, la part des personnels de l’ex-ACAM a légèrement diminué
entre juin 2010 et mai 2011, passant de 24 à 20 %.
Répartition des effectifs de l’ACP (en EATP) par statuts au 1
er
juin 2010 et au 2 mai 2011
9,8%
4,4%
3,1%
10,3%
3,5%
65,8%
6,6%
2,7%
70,3%
6,7%
3,6%
13,1%
0,0%
10,0%
20,0%
30,0%
40,0%
50,0%
60,0%
70,0%
80,0%
Personnels titulaires
Contractuels
Chargés de missions (CDD)
CCA
Fonctionnaires détachés
Contractuels de droit public
B dF
ex -A C A M
02-mai-11
1er juin 2010
Source : ACP
b) Une gestion administrative complexe
A la création de l’ACP, les conditions antérieures d’emploi
applicables à chaque catégorie de personnel ont été maintenues. Ainsi, les
différents régimes (par exemple, en matière d’horaires, de congés, de
compte épargne-temps…) sont demeurés en vigueur.
Par ailleurs, le code monétaire et financier prévoit que les accords
d’entreprise de la Banque de France s’appliquent à l’ensemble des
personnels de l’ACP, hormis les membres du corps de contrôle des
assurances pour lesquels un décret doit préciser les mesures d’adaptation
des dispositions de ces accords. Or, ce décret n’est pas intervenu
30
,
la
30
Un projet de décret avait été préparé par la direction générale du Trésor et le
secrétariat général des ministères économique et financier et transmis, début 2011, à
la direction générale de l’administration et de la fonction publique, qui n’y a pas
donné suite.
38
COUR DES COMPTES
fusion attendue du corps des commissaires-contrôleurs des assurances
avec le corps des ingénieurs des mines le rendant prochainement sans
objet.
Au total, les différences dans les conditions d’emploi compliquent
la gestion administrative des personnels avec le maintien, dans certains
cas, de logiciels spécifiques à l’ACAM. La réduction du nombre des
catégories de personnel était donc une nécessité administrative et un
facteur clé d’intégration des personnels dans une structure commune.
c) L’offre d’intégration aux fonctionnaires détachés et aux personnels
en CDI de l’ex-ACAM
L’intégration des personnels de l’ex-ACAM dans le nouvel
ensemble constituait un enjeu particulièrement sensible. La Banque et
l’ACP
ont
déployé
un
certain
nombre
d’actions :
réunions
d’information
31
, intégration rapide des personnels à l’offre de formation
de la Banque.
L’ordonnance du 21 janvier 2010 avait fixé un délai à une offre
d’intégration dans le cadre des statuts des personnels de la Banque de
France
32
. Ce délai a été respecté : l’offre d’intégration a eu lieu le 10 mars
2011.
Elle a visé 96 contractuels de droit public en contrat à durée
indéterminée dont l’âge moyen est de 35 ans, et 30 fonctionnaires
détachés dont l’âge moyen est de 53 ans quelque soit leur corps d’origine,
à l’exception des commissaires contrôleurs. Elle a reposé sur une offre
d’intégration au cadre contractuel de la Banque de France pour les
contractuels de l’ex-ACAM et au cadre titulaire de la Banque pour les
fonctionnaires détachés. Une attention particulière a été accordée au
rattachement indiciaire des contractuels de l’ex-ACAM, avec notamment
une incorporation dans leur traitement de la part variable qu’ils
percevaient chaque année et un rattachement indiciaire sur la base de la
rémunération 2010, dans les cas où la rémunération 2011 était moins
favorable.
31
Plusieurs réunions d’information à destination des agents de l’ex-ACAM se sont
tenues, tout d’abord pour leur présenter la Banque, le 8 avril 2010, puis détailler les
différentes catégories de personnel le 15 juin et enfin leur annoncer le calendrier de
l’offre d’intégration le 13 septembre.
32
«
Dans un délai de dix-huit mois à compter de l’installation de l’Autorité de
contrôle prudentiel, la Banque de France propose à tous les agents issus de l’Autorité
de contrôle des assurances et des mutuelles, à l’exception des agents sous contrat de
travail à durée déterminée et des membres du corps de contrôle des assurances, une
intégration dans le cadre des statuts des personnels de la Banque de France (…)
».
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
39
Les efforts de pédagogie de la part de la Banque et de l’ACP dans
la présentation de l’offre au personnel de l’ex-ACAM qui se sont
accompagnés d’entretiens individuels avec les directions des ressources
humaines ont été tout à fait notables
33
.
Elle a été très largement acceptée par la majorité des contractuels.
Elle l’a été dans une proportion bien moindre par les fonctionnaires
détachés, en raison vraisemblablement des conséquences sur le régime de
retraite : 12 fonctionnaires détachés l’ont néanmoins acceptée.
Conséquences de l’offre d’intégration des fonctionnaires au cadre
titulaire de la Banque de France pour le régime de retraite
Il est mis fin à l’affiliation des fonctionnaires au régime des Pensions
Civiles, qui devront désormais cotiser à la Caisse de réserve des employés
(CRE) de la Banque de France. Compte tenu de l’âge moyen élevé des
fonctionnaires détachés de l’ex-ACAM et de la durée d’affiliation minimale
de 15 ans actuelle pour obtenir une pension versée par la CRE, les conditions
ont constitué, pour certains, un facteur de blocage.
A la suite de la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites,
et sans attendre le délai du 1
er
janvier 2017 fixé aux régimes spéciaux par la
loi, la Banque prévoit d’appliquer à son propre régime ces nouvelles
évolutions, à l’exception de leur calendrier d’application. La Banque
envisage de reprendre les principales mesures techniques de la réforme ; elle
prévoit de supprimer toute durée minimale d’affiliation pour obtenir une
pension.
Les personnels ayant refusé l’offre d’intégration soit environ une
vingtaine de personnes conservent leurs contrats et leurs statuts
34
.
d) Le cas particulier des commissaires-contrôleurs des assurances
La Banque de France et l’ACP travaillent désormais sur une
possibilité de détachement pour les commissaires-contrôleurs des
assurances, dont le calendrier devra coïncider avec celui de leur
intégration dans le corps des ingénieurs des mines, prévue en principe au
1
er
janvier 2012.
33
Le projet d’offre d’intégration a, par ailleurs, fait l’objet de trois réunions de
concertation entre la DGRH de la Banque, le secrétariat général de l’ACP et les
organisations syndicales, et de deux commissions du personnel.
34
La Banque proposera, au moment du renouvellement de leur détachement, soit en
général fin 2012, aux fonctionnaires détachés de l’ex-ACAM ayant refusé
l’intégration au cadre titulaire de la Banque, un renouvellement dans le cadre
contractuel de la Banque de France.
40
COUR DES COMPTES
Position des commissaires-contrôleurs d’assurance au sein de la
Banque de France
Le code monétaire et financier prévoit que les commissaires-
contrôleurs des assurances affectés à la Banque de France sont placés en
position normale d’activité. La disparition
de jure
du corps de contrôle des
assurances par intégration dans le corps des ingénieurs des mines rendra
caduque cette disposition. La mise en oeuvre de cette disposition est
actuellement complexe.
En effet, la position normale d’activité au sein de la Banque de France
est une disposition non conforme au statut général de la fonction publique ;
elle nécessite donc des dispositions législatives ou réglementaires
ad hoc
pour être appliquée, en particulier si l’on souhaite étendre aux personnels en
position d’activité certains des accords d’entreprise ou des règlements de la
Banque de France. De fait, la position d’activité marginalise les
fonctionnaires affectés par rapport au reste du personnel.
Le syndicat du corps de contrôle des assurances, qui a été à l’origine
de la disposition, a indiqué en 2011 que la majorité de ses agents n’en
souhaitait plus le maintien et était favorable à la position de détachement.
Extrait du rapport sur les principes et modalités de mise en oeuvre de
l’intégration du corps de contrôle des assurances dans le corps des mines,
établi par le chef du corps de contrôle des assurances et le vice-président du
conseil général de l’industrie, de l’énergie et des technologies (mars 2011)
2 - L’évolution des effectifs depuis la création
a) Des effectifs globalement en progression
L’effectif de l’ACP est passé de 898 en mars 2010 à 967 fin avril
2011, soit une progression de près de 8 %. Les directions dont les
effectifs ont le plus augmenté sont la direction du contrôle des pratiques
commerciales, les directions de contrôle des assurances et les directions
support (DRH et direction des affaires financières).
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
41
Evolution des effectifs bruts par direction
09/03/10
01/06/10
03/01/11
29/04/11
Var avril
11/mars 10
Contrôle bancaire
373
367
374
377
1,1 %
Contrôle assurance
103
98
113
126
22,3 %
DCPC
40
43
59
64
60,0 %
Juridique et agréments
116
115
113
119
2,6 %
Etudes, Affaires
internationales
104
106
101
106
1,9 %
Directions support
135
133
144
149
10,4 %
Secrétariat général, Vice
présidence et
communication
27
27
24
26
-3,7 %
Total ACP
898
889
928
967
7,7 %
Source : ACP
L’évolution globale de l’effectif est la résultante contrastée
d’importants flux d’entrées soit 211 sur la même période (ce qui
représente 23 % de l’effectif initial de l’ACP), compensés par des flux
élevés de départs au nombre de 142 (16 % de l’effectif initial). Dans le
même temps, 70 personnes ont changé de fonction au sein de l’ACP. Au
total, 212 personnes ont quitté l’ACP ou changé de fonction depuis sa
création, ce qui signifie que près d’un quart des postes existant à la
création de
l’ACP a vu le titulaire changer depuis mars 2010.
Variations d’effectif depuis la création de l’ACP
Effectifs
Mouvement mars-
dec 2010
Effectifs
Mouvement janv-
avr 2011
Effectifs
03/09/10
Arrivées
Départs
03/01/11
Arrivées
départs
29/04/11
ACP
898
135
-105
928
76
-37
967
Rotation du
personnel en %
15 %
-12 %
8 %
-4,0 %
Source : ACP
b) Des mouvements de départs de forte amplitude vers la Banque de
France
Les départs de l’ACP ont été principalement le fait d’agents de la
Banque de France, qui ont muté vers d’autres services ou directions de la
Banque et ont représenté plus de 60 % des départs en 2010 et 2011. Alors
que les flux de personnel entre la Banque et le Secrétariat général de la
commission bancaire se compensaient globalement au cours des années
précédentes, tel n’a pas été le cas en 2010 et la tendance semble s’être
poursuivie début 2011.
42
COUR DES COMPTES
Causes de départ de l’ACP
mars - déc 2010
janv - avril 2011
Nombre
%
Nombre
%
Mutations vers la Banque de France
65
61,9 %
24
64,9 %
Démissions
8
7,6 %
1
2,7 %
Nouvelles affectations dans la
fonction publique
7
6,7 %
2
5,4 %
Retraites
7
6,7 %
3
8,1 %
Détachements
6
5,7 %
1
2,7 %
Disponibilités pour convenance
personnelle
4
3,8 %
0
0,0 %
Fin de CDD
4
3,8 %
4
10,8 %
Rupture de période d'essai
2
1,9 %
2
5,4 %
Décès
1
1,0 %
0
0,0 %
Invalidité
1
1,0 %
0
0,0 %
Total
105
100,0 %
37
100,0 %
Source : ACP
Les origines d’un tel mouvement peuvent se trouver dans
l’appréhension suscitée par l’autonomie du statut de l’ACP par rapport à
la Banque de France et par des considérations pratiques comme
l’éloignement géographique du siège de la Banque, la mise en place d’un
nouveau comité d’établissement, la crainte de ne plus avoir accès aux
services de certaines associations ou du restaurant d’entreprise du siège.
Afin de ne pas donner corps à de telles craintes, la politique du
secrétariat général a été de ne pas s’opposer aux départs.
c) Le cas particulier des directions de contrôle des assurances
Les directions de contrôle des assurances proprement dites ont vu
leur effectif décroître temporairement pendant quelques mois. Ce
phénomène serait lié à la rotation déjà traditionnellement élevée à
l’ACAM, à laquelle s’est ajouté un choc ponctuel lié à l’organisation
nouvelle. En effet, la mise en place de l’Autorité s’est accompagnée de la
création de nouveaux services
35
qui ont, dans un premier temps, été
constitués par des contrôleurs issus des brigades. Plus marginalement la
mise en place de structures hiérarchiques intermédiaires a ouvert des
opportunités nouvelles de progression de carrière. Tel a été le cas avec,
par exemple, la création des deux directions de contrôle des assurances
pour encadrer les huit brigades de contrôle auparavant directement
35
Direction des contrôles spécialisés et transversaux, service des affaires
internationales assurances.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
43
rattachées aux secrétaire général et secrétaire général adjoint de l’ACAM.
Une partie du personnel des brigades de contrôle a donc été réaffectée.
Ces directions se sont ensuite très rapidement étoffées.
Evolution de l’effectif des directions de contrôle des assurances
mars-10
juin-10
03/01/11
avril-11
1ère direction de contrôle des assurances
35
34
41
45
2
ème
direction de contrôle des assurances
33
29
33
34
Source : ACP
3 - Des cibles ambitieuses de renforcement d’ici à 2012
a) Une cible d’effectifs définie par direction
Le secrétariat général de l’ACP a engagé un programme de
recrutement qui vise à porter les effectifs à près de 1 150 à fin 2012, soit
une progression de 28 % par rapport à l’effectif qui était d’un peu moins
de 900 agents en mars 2010.
Trois cibles ont été présentées au collège plénier de l’ACP le
24 novembre 2010 et validées par ce dernier : 940 agents à fin 2010,
1 052 agents à fin 2011 et 1 147 agents à fin 2012. La note transmise au
collège n’explicite pas pour toutes les directions les raisons de ces
augmentations d’effectifs. Elle ne contient des éléments détaillés sur les
modalités de construction de ces cibles que pour la direction du contrôle
des pratiques commerciales et pour celles du contrôle des assurances
(voir encadré infra).
Cibles d’effectifs de l’ACP
Effectifs
Effectifs cibles
9 mars
2010 (A)
fin 2010
fin 2011
fin 2012
(B)
B/A
Contrôle bancaire
373
376
412
431
16 %
Contrôle assurance
103
118
146
180
75 %
Pratiques commerciales
40
58
67
76
90 %
Juridique et agréments
116
117
128
136
17 %
Etudes, Affaires
internationales
104
103
117
132
27 %
Directions support
135
144
157
166
23 %
SG, Vice président et
communication
27
24
25
26
-4 %
Total ACP
898
940
1052
1147
28 %
Source : ACP
44
COUR DES COMPTES
Cibles en matière de pratiques commerciales et de contrôle des
assurances
S’agissant des pratiques commerciales, le chiffrage établi par
l’Inspection générale des finances dans son rapport sur « le contrôle du
respect des obligations professionnelles à l’égard de la clientèle dans le
secteur financier »
36
de 60 personnes avait été dans un premier temps retenu ;
le développement des missions de l’ACP, confirmé par la loi de régulation
bancaire et financière, a ensuite conduit le secrétariat général à viser une cible
supérieure,
notamment
pour
prendre
en
compte
le
contrôle
des
intermédiaires.
Le renforcement du contrôle des assurances vise à atteindre d’une
part, pour le contrôle permanent effectué au sein des brigades, un ratio de un
contrôleur pour dix organismes d’assurance (hors les plus petits organismes),
contre quinze environ aujourd’hui, et d’autre part, le développement
d’équipes de contrôle sur place spécialisées (modèles internes, système
d’information, blanchiment) ou transversales. Ceci devrait conduire, à
horizon 2012, à un taux de l’ordre de 40 % par rapport aux effectifs affectés
au contrôle bancaire, alors que la situation de départ était plus proche d’un
contrôleur en assurance pour quatre contrôleurs bancaires.
Source : ACP
L’augmentation des effectifs opérationnels de l’ACP est cohérente
avec l’accroissement de ses missions. La Cour avait déjà souligné, dans
ses précédents travaux, l’insuffisance des effectifs de contrôle du
secrétariat général de la Commission bancaire et de ceux de l’ACAM
37
.
Cette augmentation doit, par ailleurs, être resituée dans le contexte plus
global de la politique des ressources humaines de la Banque de France, à
qui la Cour a recommandé d’accentuer notablement ses efforts de
réduction d’effectifs à l’horizon 2020, ce qui peut favoriser les
redéploiements. Le caractère encore récent de la mise en place de
l’Autorité ne permet pas à la Cour de se prononcer sur l’ampleur en
valeur absolue qu’il faudrait donner à ce renforcement ni sur l’allocation
optimale par direction. A l’occasion des travaux futurs de mise à jour des
cibles d’effectifs, le recul conféré par une année pleine de fonctionnement
devrait permettre à l’ACP de documenter plus finement les modalités de
construction de ces cibles.
En revanche, comme déjà mentionné supra, l’augmentation des
effectifs des fonctions de support à horizon 2012 dans les mêmes
proportions que l’effectif global de l’ACP est moins justifiée. De même,
si l’organisation étoffée de la direction générale, avec cinq secrétaires
36
Juillet 2009.
37
Rapport public annuel 2009.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
45
généraux adjoints, s’explique dans la période de transition actuelle, elle
ne peut constituer une cible.
b) Les incertitudes des cibles intermédiaires
Les cibles intermédiaires d’effectifs à fin 2010 et fin 2011 ont été
présentées au collège sans que l’analyse de la Cour ait pu objectiver et
expliquer la répartition dans le temps de l’effort de progression des
effectifs. En effet, il est constaté des décalages qui pourraient se reporter
sur la fin de 2011 et la cible finale pour 2012.
Ainsi, l’objectif initial qui a été annoncé pour 2010 était de 1 000
personnes. Il a été revu à la baisse en fin d’année 2010 à un niveau de 940
mais n’a pas été non plus atteint. L’effectif constaté en début 2011 n’est
que de 928, soit un déficit de 12 postes en raison principalement du
nombre plus élevé que prévu de départs de l’ACP comme souligné
précédemment. Les directions n’ayant pas atteint leur cible d’effectifs en
2010 sont principalement la direction des agréments et de la
réglementation et les directions de contrôle des assurances. L’écart reste
toutefois limité au regard des effectifs présents (12 agents sur un effectif
cible de 940).
c) Une cible d’effectifs nets difficile à atteindre en 2011
Du fait du décalage constaté à la fin de 2010, l’effort de
recrutement devait s’accentuer pour 2011 et concernait un niveau de 124
effectifs supplémentaires pour l’année
.
Les effectifs ont progressé de 39 agents entre janvier et fin avril
2011. Cette progression intègre la titularisation de 27 agents recrutés par
concours en 2010 et affectés par la Banque de France à l’ACP début
2011. Dans le même temps, le nombre de départs de l’ACP est resté très
élevé sur les quatre premiers mois de l’année 2011 : 37 départs en 4 mois
contre 105 sur dix mois en 2010.
46
COUR DES COMPTES
Comparaison des effectifs réalisés et des cibles
Effectifs réels
Effectifs cibles
03/01/11
29/04/11
fin 2010
fin 2011
fin 2012
Contrôle bancaire
374
377
376
412
431
Contrôle assurance
113
126
118
146
180
Pratiques commerciales
59
64
58
67
76
Juridique et agréments
113
119
117
128
136
Etudes, Affaires
internationales
101
106
103
117
132
Directions support
144
149
144
157
166
SG, VP et
communication
24
26
24
25
26
Total ACP
928
967
940
1052
1147
Source : ACP
Pour atteindre la cible d’effectif pour 2011, 78 agents en net
devront être recrutés entre mai et décembre 2011 (hors direction générale
et directions support). Cet objectif semble difficilement atteignable,
malgré le rythme élevé de recrutements sur le marché depuis le début
d’année, compte tenu des fortes incertitudes concernant les départs. Un
nouveau décalage qui serait constaté à la fin de 2011 pourrait conduire à
reporter sur 2012 l’atteinte de la cible souhaitée.
Les flux d’entrées-sorties font apparaître un départ massif des
agents qui notamment réintègrent les services de la Banque de France ou
partent définitivement, remplacés par du personnel en provenance de
l’extérieur dont le rythme de recrutement ne peut à la fois satisfaire la
croissance programmée des effectifs de l’Autorité et le remplacement de
ceux déjà en poste. Cet élément de fragilité est sans doute le point faible
de la réforme qui n’a pas été anticipé. Il nécessite de nouvelles mesures à
l’égard de l’information des personnels en place et l’accélération de la
stabilisation de l’organisation afin de les rassurer sur l’avenir de leur
carrière au sein de l’ACP.
En tout état de cause, l’objectif d’assurer pleinement le contrôle
prudentiel et, à cette fin, d’atteindre le plus rapidement possible l’effectif
cible devrait être désormais prioritaire dans la gestion des ressources
humaines.
4 - L’évolution des modalités de recrutement
a) Les conditions des recrutements sur le marché du travail
Près de la moitié des recrutements effectués pour l’ACP a concerné
un recours direct au marché pour les postes qui n’ont pas de candidat en
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
47
interne. Cet élément a constitué une nouveauté pour la Banque de France
qui, avant la création de l’ACP, ne recrutait des cadres contractuels que
de façon beaucoup plus ponctuelle
38
.
Origine des arrivées à l’ACP
mars - déc 2010
janv - avril 2011
Total
Nombre
%
Nombre
%
Nombre
%
Mutations de la Banque
de France
39
29 %
12
16 %
51
24 %
Contractuels (CDI)
47
35 %
33
43 %
80
38 %
Contractuels (CDD)
15
11 %
4
5 %
19
9 %
Concours
32
24 %
27
36 %
59
28 %
Retours de détachement
2
1 %
0
0 %
2
1 %
Total
135
100,0 %
76
100 %
211
100 %
Source : ACP
La Cour a essayé de déterminer si les rémunérations proposées par
la Banque ont pu constituer ou non un frein aux recrutements sur le
marché du travail.
La Banque élimine les candidats dont les prétentions salariales sont
trop élevées par rapport aux rémunérations de la Banque. Elle établit,
ensuite, son offre contractuelle à partir des éléments suivants :
un parangonnage interne, qui vise à maintenir une certaine
comparabilité des rémunérations entre les différents statuts au
sein de la Banque (notamment entre titulaires et contractuels
ayant
une
expérience
professionnelle
et
des
diplômes
similaires) ;
le salaire antérieur du candidat et le marché.
La Banque justifie le parangonnage interne par des raisons de
gestion des ressources humaines, ainsi que par des aspects juridiques.
Comme le secrétariat général de l’ACP, elle estime que les niveaux de
rémunération
offerts
ne
constituent
pas
un
véritable
frein
aux
recrutements. Elle peut faire valoir, auprès des nouveaux embauchés, des
rémunérations complémentaires liées aux avantages familiaux, à
l’intéressement et à la participation, ainsi que les possibilités d’évolution
et de mobilité au sein de la Banque. Cependant, il est admis en interne
38
Les recrutements de cadres contractuels et de chargés de mission par la Banque
étaient d’environ une vingtaine par an entre 2003 et 2006, avant d’augmenter à une
quarantaine par an entre 2007 et 2009.
48
COUR DES COMPTES
que le niveau de rémunération proposé peut conduire à des délais de
recrutement plus longs, surtout s’agissant des personnes les plus
expérimentées. Au total, pas plus de 10 cas de refus de venir à l’ACP
l’auraient été pour des raisons salariales. En revanche, un consensus se
serait établi entre les opérationnels et les services RH de la Banque et de
l’ACP pour ne pas donner suite à ces recrutements, compte tenu de la
volonté de maintenir une certaine comparabilité des rémunérations en
interne, à travail égal.
La Cour n’a pas été en mesure de procéder par elle-même à des
comparatifs de salaires.
Concernant les compétences, l’ACP a recruté 10 actuaires alors
que le marché de ces profils est très tendu, 9 contrôleurs des assurances
dont deux admissibles au concours externe des commissaires-contrôleurs
des assurances. Des profils juridiques spécialisés ont rejoint l’ACP,
notamment la direction des pratiques commerciales (juristes en assurance
dommages, en assurance de personnes, juristes bancaires, expert en
pratiques commerciales bancaires). En 2010, sur l’ensemble des
recrutements de cadres, les profils avec 3 à 10 ans d’expérience environ
représentent
62,5 %
des
40
recrutements.
Les
profils
les
plus
expérimentés, avec 15 à 30 ans d’expérience, plus rares, représentent
15 % des recrutements.
L’ACP et la Banque ont déployé d’importants efforts pour donner
une image de recruteur sur le marché du travail. L’ACP a engagé, à partir
de l’automne 2010, un programme de prospection au niveau des grandes
écoles scientifiques (Ecoles normales supérieures, ENSAE…) avec une
présence lors des forums, des mailings, des publicités dans la presse
spécialisée, la conception de fiches métiers, la présence renforcée sur
l’espace recrutement du site Internet de la Banque de France…
L’ACP mettait par ailleurs en place, au moment de la mission, un
recrutement en sortie d’écoles d’ingénieurs. La cible est de 25
recrutements environ en 2011, en priorité pour le contrôle des assurances.
Au total, la Banque et l’ACP ont mis en oeuvre les moyens
adéquats pour attirer les recrutements de marché, même s’il reste à ajuster
le rythme de ces recrutements.
b) L’augmentation et la diversification des recrutements par concours
Les recrutements par concours ont représenté 28 % des entrées.
L’intégration du corps de contrôle des assurances dans celui des
ingénieurs des mines va se traduire, dès 2011 et pour les années
suivantes, par une réduction du nombre d’ingénieurs affectés en début de
carrière à l’ACP (voir infra).
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
49
L’objectif du secrétariat général de l’ACP et de la Banque est donc
d’accroître les recrutements par concours de la Banque de France. Le
concours d’adjoints de direction convient particulièrement aux candidats
de formation généraliste. En revanche, aucun des 13 candidats ingénieurs
n’a réussi le dernier concours. Or, des besoins de profils à connaissances
mathématiques ont été identifiés. En conséquence, le règlement du
concours d’adjoint de direction (AD) de la Banque a été aménagé pour
l’ouvrir davantage aux profils scientifiques. Cette évolution est positive.
En outre, le nombre de places offertes au concours a été
augmenté : 50 places ont été offertes en 2011 contre seulement une
trentaine les deux années précédentes. L’ACP espère se voir affecter, en
2012, jusqu’à 30 adjoints de direction
39
.
Affection des adjoints de direction recrutés par concours à
l’ACP
Adjoints de direction ayant
intégré la BDF
Affectation au SGCB-ACP et à l’inspection
générale (délégation au contrôle sur place)
2008
17
4
2009
25
8
2010
30
10
2011
32
18
Source : ACP
B - Les principales problématiques de gestion des
ressources humaines
1 - La nécessité de préserver, de manière durable,
l’expertise acquise par l’ACAM dans le domaine du contrôle
des assurances
a) Le corps de fonctionnaires des commissaires-contrôleurs des
assurances : des recrutements en forte réduction à compter de 2011
Le corps des commissaires-contrôleurs des assurances est un corps
supérieur à caractère technique du ministère en charge de l’économie,
recrutant principalement à la sortie de l’Ecole Polytechnique et des
Ecoles normales supérieures. Sa mission principale est le contrôle de
l’assurance. Il comptait, en 2010, une centaine de membres, dont la
moitié en poste à l’ACP, un quart en exercice dans des administrations ou
entreprises publiques et un quart en disponibilité.
39
Le concours d’adjoint de direction de la Banque de France a lieu en septembre N,
avec une arrivée dans les services en février N+1.
50
COUR DES COMPTES
La situation des commissaires contrôleurs au sein de l’ACAM
Historiquement, ce corps s’est largement identifié aux différentes
autorités en charge du contrôle de l’assurance.
Corps des commissaires-contrôleurs
Le corps de contrôle des assurances a d’abord été régi par le décret de
1899 qui a créé les commissaires-contrôleurs des sociétés d’assurance contre
les accidents du travail. D’autres corps de commissaires-contrôleurs sont
ensuite apparus, coexistant jusqu’en 1936 (corps des commissaires-
contrôleurs des sociétés d’assurance sur la vie, instauré par la loi de 1905 …).
Un statut unificateur a été adopté en 1936, puis refondu en 1968. Le statut du
corps de contrôle est actuellement régi par le décret du 15 juillet 2005. C’est
le statut commun des grands corps techniques de l’Etat qui a servi de modèle
à ce statut, tant pour la hiérarchie des grades que pour les règles
d’avancement et les indices. Les commissaires-contrôleurs constituent
aujourd’hui un corps classé dans la catégorie A et placé sous l’autorité du
ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Les commissaires-
contrôleurs sont nommés et titularisés par décret du président de la
République.
Les commissaires-contrôleurs représentaient ainsi un quart à un
tiers de l’effectif de l’Autorité de contrôle de l’assurance et des mutuelles
(ACAM), en occupaient les postes de secrétaire général et secrétaire
général adjoint, les emplois de chef de brigade et de direction nécessitant
une expertise du contrôle de l’assurance, plus de trois quarts des emplois
au sein des brigades de contrôle en charge des contrôles tant permanent
que sur place des entreprises d’assurance. Cette carrière assurait
l’attractivité et la visibilité du corps, et donc la qualité du recrutement car
les commissaires-contrôleurs étaient, dès leur entrée en fonction,
responsables du contrôle d’un portefeuille d’entreprises d’assurance, sous
l’autorité de seulement deux niveaux hiérarchiques, celui du chef de
brigade et celui du secrétaire général. Très rapidement, ils acquéraient
une forte expertise du contrôle et du secteur de l’assurance, participaient à
la définition des positions françaises au niveau européen et international
et à l’élaboration de la réglementation. Cette organisation entraînait
néanmoins une absence de permanence. Alors que les recrutements
augmentaient fortement depuis 1998 (7 en moyenne par an sur la période
2005-2009 et un poste non pourvu), les départs de l’ACAM ont toujours
été très rapides et fréquents (plus de 8 en moyenne par an) après une
durée moyenne de contrôle au sein de l’autorité de 3 ans et demi. Peu de
retours étaient constatés (1,6 en moyenne par an)
40
.
40
Données extraites du rapport sur l’évolution du corps de contrôle des assurances
(juillet 2010) établi par le chef du corps de contrôle des assurances.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
51
La Cour avait souligné, dans son rapport public annuel 2009 déjà
cité, que le corps des commissaires-contrôleurs, trop étroit, ne permettait
pas à lui seul de répondre aux besoins de l’ACAM et que son insuffisance
numérique, malgré les recrutements en forte augmentation, n’avait pas été
compensée par des recrutements extérieurs.
Les perspectives
A la suite de la création de l’ACP et dans le contexte plus large de
la fusion des corps de la fonction publique, le ministre de l’économie, des
finances et de l’industrie a donc considéré que la taille et le
fonctionnement du corps de contrôle n’étaient plus adaptés pour continuer
à assurer la totalité des missions de contrôle de l’assurance. Sur les
recommandations formulées par le chef du corps, il va être intégré dans le
corps des ingénieurs des mines à compter du 1
er
janvier 2012. Cette
intégration constitue un changement majeur pour le contrôle des
assurances : les commissaires-contrôleurs des assurances ne constitueront
plus le vivier principal de l’effectif en charge de ce contrôle. Ils seront
désormais minoritaires au sein des équipes de contrôle des assurances.
Les conséquences au sein de l’ACP
En effet, l’intégration du corps de contrôle des assurances dans le
corps des mines va se traduire, dès 2011 et pour les années suivantes, par
une réduction du nombre d’ingénieurs affectés en début de carrière à
l’ACP. Suite à des échanges entre le corps des mines, le corps de contrôle
des assurances et la Banque de France, il a été convenu initialement
d’affecter chaque année à l’ACP au moins deux ingénieurs des mines en
premier poste, pour une durée de quatre ans, ce qui est nettement inférieur
aux recrutements observés depuis 1998 dans le corps de contrôle des
assurances. L’ACP pourra faire, par ailleurs, appel à des ingénieurs des
mines en deuxième poste et au-delà
41
.
L’intégration du corps de contrôle des assurances dans le corps des
mines pourrait également s’accompagner, de manière ponctuelle, en
2011, d’un mouvement des commissaires-contrôleurs des assurances vers
d’autres corps. Certains d’entre eux, en poste à l’ACP, ont déjà émis le
souhait d’intégrer un autre corps que celui des ingénieurs des mines
(IGAS, IGF, CGEFI, INSEE …). Le nombre de départs ainsi que leur
calendrier ne sont pas encore connus. Afin de les lisser, l’intégration à
l’IGAS pourra intervenir avec possibilité de maintien des fonctions à
l’ACP pour une durée limitée à deux ans
42
.
41
Le corps des mines représente actuellement un vivier de l’ordre de 1 400
ingénieurs.
42
Article 23 du décret du 1
er
août 2011 portant statut particulier du corps de l’IGAS.
52
COUR DES COMPTES
b) Le contexte de préparation à Solvabilité II : des conséquences sur
l’implication des personnels
Solvabilité II modifie en profondeur les règles prudentielles qui
s’appliquent au secteur des assurances. L’ACP a mis en place un comité
de pilotage interne sur Solvabilité II, qui vise à coordonner la mise en
place des différents et nombreux aspects de ce projet.
L’un d’entre eux est la revue par l’ACP des modèles internes des
organismes
français
d’ici
l’été
2012.
Le
nombre
d’organismes
d’assurance qui ont fait part à l’ACP de leur intérêt pour un modèle
interne destiné à calculer leur exigence de capital sous Solvabilité II
s’élève actuellement à 15, contre le double anticipé au départ. Cette
démarche recouvre, par ailleurs, des situations très différentes, dont
seulement deux à trois grands groupes internationaux à tête française pour
lesquels l’ACP est contrôleur du groupe (voir encadré ci-dessous). Bien
que la modélisation puisse être plus complexe dans ces groupes en raison
de la diversité des types de risques, l’ampleur du travail de validation
devrait probablement être moindre que pour l’application du dispositif de
Bâle 2, dans la mesure où le secrétariat général de la Commission
bancaire était contrôleur d’un nombre beaucoup plus élevé de groupes
43
.
Le secrétariat général de l’ACP a déjà entamé le travail de validation des
modèles internes dans certains groupes. Il pourrait disposer d’un délai
supplémentaire pour ce faire, compte tenu de la probabilité de plus en
plus forte d’un report de l’entrée en application de Solvabilité II au
1
er
janvier 2014
44
.
43
La cellule de « contrôle des risques modélisés » de la délégation au contrôle sur
place des établissements de crédit se composait alors d’une douzaine de personnes.
44
Un texte de compromis a été rédigé en juin 2011 par la présidence du Conseil de
l'Union européenne proposant un report de l'application des obligations Solvabilité II
au 1er janvier 2014 et une obligation pour les assureurs de communication au
superviseur de leur plan de mise en oeuvre des nouvelles règles et de son avancement
en date du 30 juin 2013.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
53
Typologie des organismes d’assurance ayant fait part de leur intérêt
pour un modèle interne
- Deux à trois grands groupes internationaux à tête française, cotés en
bourse, pour lesquels l’ACP est contrôleur du groupe et doit se coordonner
avec les autorités de contrôle étrangères ;
- Quatre groupes internationaux à tête européenne, pour lesquels
l’ACP n’est pas le contrôleur du groupe mais doit être en mesure de répondre
aux demandes d’avis du contrôleur du groupe, par exemple sur les filiales
situées dans son périmètre de contrôle ;
- Des modèles internes plus partiels pour des organismes spécialisés
dont l’activité est spécifique et donc mal prise en compte par la formule
standard.
Le choix de l’ACP de maintenir une filière assurance spécifique en
son sein est justifié, au moins dans un premier temps, au regard de l’enjeu
que représente la validation des modèles internes, et plus largement la
préparation à la mise en oeuvre de Solvabilité II.
L’ACP a effectué les recrutements minimaux. La validation des
modèles internes sollicite à la fois la direction des contrôles spécialisés et
transversaux, qui dispose d’une cellule des modèles internes, et les
brigades de contrôle des compagnies d’assurance, qui y participent
également, avec l’appui de cette direction.
L’effectif de la cellule des modèles internes s’élève désormais à 6
personnes, majoritairement recrutées sur le marché du travail au cours des
derniers mois. L’objectif est de porter l’effectif de cette cellule à 10
personnes à fin 2012. Cet objectif paraît cohérent avec la charge de travail
attendue. Il serait néanmoins souhaitable d’atteindre plus rapidement la
cible prévue pour fin 2012.
S’agissant des brigades, la stratégie de l’ACP pour compenser la
réduction, dès 2011, du nombre d’ingénieurs des mines qui lui seront
affectés en premier poste et le choc démographique ponctuel qu’elle
pourrait subir fin 2011-début 2012 est pragmatique. Elle consiste à
combiner les recrutements au cadre contractuel (juniors en sortie d’école,
personnels avec une ou plusieurs expériences) et une augmentation des
recrutements par concours d’adjoints de direction de la Banque de France,
ouverts davantage aux profils scientifiques (voir supra).
c) La spécialisation d’une filière assurance pérenne au sein de
l’ACP : avantages et inconvénients
Au-delà de la phase intense de mise en oeuvre de Solvabilité II, la
question se pose de savoir s’il convient de maintenir à moyen terme une
54
COUR DES COMPTES
filière assurance spécifique ou s’il conviendrait de développer la
polyvalence banque/assurance des personnels de contrôle.
La polyvalence des effectifs de contrôle présente l’avantage d’une
gestion des ressources humaines plus souple et plus fluide. Elle
présenterait néanmoins le risque de ne pas garantir une expertise
suffisante des problématiques propres à chaque secteur. D’ores et déjà,
dans le contrôle bancaire, certains contrôleurs se spécialisent sur tel ou tel
métier de la banque (banque de financement et d’investissement, banque
de détail…).
A contrario, l’avantage du maintien d’une filière assurance
spécifique est de permettre de prendre en compte les spécificités du
secteur des assurances. Certes, la mise en place de la directive Solvabilité
II dans l’assurance, après celle de Bâle II dans la banque, a vocation à
rapprocher, en partie, les techniques de supervision (généralisation de
l’emploi de modèles internes et autorisation de les employer accordée par
le régulateur ; évolution des systèmes de contrôle interne mis en place par
les entreprises supervisées et de leur gouvernance…). Il demeure que les
deux métiers sont différents, leurs modèles économiques sont bien
distincts, ce qui leur confère des profils de risque très différents, que ce
soit au niveau micro-prudentiel (stabilité des institutions individuelles) ou
macro-prudentiel
(stabilité
du
système
financier
et
impact
sur
l’économie). Il est, à cet égard, intéressant de relever que tant au sein de
l’autorité de supervision britannique que de l’allemande, la supervision
des banques et celle des assurances sont assurées par des départements
distincts.
Le maintien d’une telle filière ne doit néanmoins pas entraîner le
risque d’un fonctionnement cloisonné entre les secteurs de la banque et de
l’assurance, ce qui n’est pas souhaitable. La réponse du secrétariat
général de l’ACP pour éviter ce risque est d’encourager les échanges de
personnel de contrôle entre la banque et l’assurance afin de favoriser la
transversalité et la mutualisation des expériences.
Au total, il s’agit d’un choix complexe, qu’il conviendra de
trancher après une période transitoire.
2 - Le développement de la mobilité professionnelle et
géographique
Outre les enjeux d’une mobilité professionnelle à l’international
qui est abordée dans le chapitre II du rapport, le développement de la
mobilité des personnels de la Banque vers l’ACP ainsi que celle, au sein
de l’ACP, entre les secteurs de la banque et de l’assurance paraît
nécessaire.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
55
a) Des mobilités insuffisantes de la Banque vers l’ACP
Comme il a été déjà mentionné, la mobilité vers d’autres services
de la Banque de France a été la principale cause de départs de l’ACP en
2010. Ce mouvement s’est poursuivi au cours des premiers mois de
l’année 2011.
Compte
tenu
des
besoins
en
effectifs
de
l’ACP,
il
est
particulièrement important de développer les mobilités de la Banque de
France vers l’ACP. Cette problématique s’inscrit dans un contexte plus
général de faible mobilité interne au sein de la Banque, que la Cour a
soulignée dans ses différents travaux. La direction générale des
ressources humaines de la Banque est consciente de cet enjeu. Une
mission en cours de l’Inspection générale de la Banque porte précisément
sur la mobilité des cadres, avec un accent particulier sur les mobilités à
l’ACP. Les compétences des analystes d’entreprises présents dans le
réseau de la Banque pourraient, par exemple, être utiles dans le cadre du
contrôle des établissements de crédit. Il s’agirait donc de favoriser les
mobilités de ces agents, de la province vers l’Île-de-France, et de traiter la
question de l’équivalence du niveau des salaires payés par la Banque
45
pour une qualité et un coût de la vie différents.
b) Un enrichissement mutuel des compétences encore embryonnaire
entre la supervision des assurances et celle des banques
L’ACP souligne que la rotation des effectifs de contrôle d’un
secteur à un autre permettra une transformation et une amélioration
continue des pratiques de chaque secteur. Il s’agit pour elle d’une voie qui
rendrait plus effective la fusion des autorités de contrôle préexistantes.
Les mouvements de personnel de contrôle des banques vers les
assurances sont encore faibles et réciproquement. Un seul agent venant de
l’ACAM était en poste début mai 2011 à la direction du contrôle
permanent bancaire, tandis que six adjoints de direction et deux directeurs
adjoints titulaires de la Banque de France étaient intégrés aux directions
de contrôle des assurances. Dans le domaine des affaires internationales,
une spécialiste bancaire a rejoint le service en charge des assurances.
Toutefois, le renforcement de ce type de mobilité est un objectif de la
direction générale de l’ACP. Un commissaire-contrôleur vient d’être
nommé à la tête d’un des principaux services de contrôle bancaire.
45
L’indemnité de résidence produit un écart de rémunération de 1,2 à 2 % entre Paris
et la province.
56
COUR DES COMPTES
3 - La formation des personnels de contrôle d’assurance
Antérieurement à la création de l’ACP, l’ACAM avait une
politique
de
formation
destinée
principalement
à
permettre
la
titularisation des commissaires-contrôleurs des assurances dans leur corps
de fonctionnaires. C’est pourquoi il s’agissait d’un cursus long centré sur
une formation économique et financière académique, d’une durée
comprise entre un et deux ans
46
, complétée par une formation particulière
à l’assurance et aux techniques de contrôle, dispensée en parallèle au sein
de l’ACAM ou dans le cadre de stages en entreprises
47
. L’ensemble de la
formation était dénommée « l’école d’application des commissaires-
contrôleurs des assurances ».
Dans la période qui suit l’intégration de l’ACAM, l’ACP maintient
cette formation initiale du corps
48
ainsi que l’école d’application des
commissaires-contrôleurs des assurances, logée en son sein et gérée par
l’un de ses agents. Toutefois, du fait de l’intégration future du corps des
commissaires-contrôleurs dans celui des ingénieurs des mines, cette
formation n’aura plus lieu d’être. L’ACP entend donc orienter la
formation des nouveaux arrivants vers une formation « métier » destinée
à l’ensemble d’entre eux quelles que soient leurs origines de recrutement
(contractuels, titulaires de la Banque de France ou ingénieurs des mines).
Cette formation comportera trois volets principaux : une présentation
générale de la Banque de France, une présentation plus spécifique de
l’ACP, une formation à l’assurance et aux techniques de contrôle. D’ores
et déjà en 2011, le cursus a été adapté concernant les nouveaux adjoints
de direction affectés par la Banque à l’ACP
49
.
Cette réorientation est cohérente avec l’évolution des recrutements.
En
revanche,
au
plan de l’organisation, une
rationalisation de
l’organisation de la formation est souhaitable à terme. Cette organisation
repose aujourd’hui sur un triptyque :
la direction des ressources humaines de l’ACP, qui joue un rôle
de coordination, en lien avec la direction de la formation de la
Banque. Elle héberge un « responsable formation » qui assurait
auparavant la formation des contrôleurs bancaires du SGCB ;
46
Deux tiers des commissaires-contrôleurs recrutés entre 2005 et 2009 ont suivi une
formation à l’Ecole nationale de la statistique et de l’administration (ENSAE).
47
En fin de parcours, un jury d’examen, sanctionnant la formation et présidé par le
chef du corps, statuait sur la titularisation du contrôleur.
48
Le coût de la formation et le salaire des commissaires-contrôleurs stagiaires sont
pris en charge par l’ACP.
49
La Banque de France a affecté à l’ACP en 2011 une vingtaine d’adjoints de
direction dont cinq en brigade de contrôle des assurances.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
57
un « responsable formation » en charge de la formation des
personnels affectés à la Délégation au contrôle bancaire « sur
place », logé au sein de la délégation au contrôle sur place ;
un « responsable formation » en charge de l’école d’application
des
commissaires-contrôleurs
d’assurance
et
des
autres
formations d’assurance, logé au sein de la direction des
contrôles spécialisés et transversaux.
Le regroupement de l’ensemble de la compétence en formation au
sein de la direction des ressources humaines pourrait permettre de réaliser
des économies d’échelle.
4 - La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
(GPEC)
La création de l’ACP doit aller de pair avec une bonne valorisation
des
compétences
et
une
meilleure
mobilité
professionnelle
et
géographique. Le secrétariat général de la Commission bancaire était déjà
intégré dans la GPEC de la Banque de France. Le chantier consistant à
préciser le référentiel des fonctions et compétences pour le contrôle des
assurances et à l’intégrer à la GPEC de la Banque, vient de débuter.
Compte tenu des nombreux autres chantiers de ressources humaines
induits par la fusion, la GPEC n’a pas été jugée prioritaire.
Il sera néanmoins important d’effectuer, dès 2012, un bilan sur
l’adaptation des effectifs aux différentes fonctions de l’ACP (pour
identifier les situations de sous-effectifs ou de sureffectifs) et d’engager
une réflexion prospective sur les parcours de carrières des agents de
l’ACP.
III
-
Le déséquilibre budgétaire à court et moyen
termes
L’ordonnance du 21 janvier 2010
50
a prévu que l’ACP dispose de
l’autonomie financière grâce à des ressources propres qui viennent de la
perception de contributions sur les organismes assujettis, selon un barème
dont l’assiette et la fourchette sont fixées par l’ordonnance, et dont le taux
ou le montant est précisé par arrêté ; en cas d’insuffisance, des dotations
additionnelles peuvent être attribuées par la Banque de France. Dans la
limite des contributions, le collège arrête le budget sur proposition du
50
Article 1er de l’ordonnance n°2010-76 du 21 janvier 2010, codifié à l’article L.612-
18 du code monétaire et financier.
58
COUR DES COMPTES
secrétaire général. Ce budget constitue un budget annexe de la Banque de
France.
A - Un déséquilibre budgétaire en 2011 et des
perspectives défavorables pour 2012, à contributions
constantes
Le premier exercice budgétaire de l’ACP a été présenté en année
pleine, bien que la fusion soit intervenue en mars 2010. L’exercice a été
légèrement excédentaire, à hauteur de 2,7 M€, en raison notamment du
report de la masse salariale qu’ont provoqué des recrutements moindres
que prévu. En revanche, le budget prévisionnel pour 2011 est déficitaire
et les prévisions présentées au collège pour 2012 seraient défavorables si
le dispositif actuel des contributions restait constant.
Le budget 2010 de l’ACP en exécution
M€
Charges de personnel
83,7
Frais généraux
74,4
Amortissements
2,7
Ensemble des dépenses
160,7
Contributions des assujettis
160,7
Prestations externes et autres produits
0,8
Produit des placements
0,3
Refacturation des prestations rendues à la Banque
1,5
Ensemble des recettes
163,4
Majoration du solde des contributions reportées
2,7
Source : ACP
1 - Un budget 2011 adopté en déficit
Le budget 2011, adopté le 24 novembre 2010 par le collège plénier
de l’ACP, présente un déficit prévisionnel
51
avoisinant 10 M€, dont le
montant exact varie selon le versement ou non, d’ici la fin de l’exercice,
de la contribution attendue de la Caisse des dépôts et consignations. La
prévision de dépenses s’établit à 179,7 M€, en augmentation de 12 %, soit
+19 M€ par rapport aux dépenses de 2010. Cette augmentation serait
principalement due à la progression attendue des effectifs, si celle-ci se
réalisait conformément aux prévisions.
51
Hors report du solde 2010.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
59
La contribution de la Caisse des dépôts et consignations
En application de la loi de modernisation de l’économie du 4 août
2008
52
, la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et
consignations (CDC) confie à la Commission bancaire, l’examen du respect
par la Caisse de la réglementation bancaire et financière à laquelle elle est
désormais assujettie. Les décrets du 9 mars 2009 et du 27 avril 2010 relatifs
au contrôle externe de la CDC précisent les conditions dans lesquelles les
obligations comptables, prudentielles et de contrôle interne lui sont
applicables. Un protocole signé le 24 mars 2010 entre le président de la
Commission de surveillance, le directeur général de la CDC et le secrétaire
général de l’ACP décrit l’organisation du contrôle des activités bancaires et
financières de la CDC par l’ACP.
Sur le fondement de ces dispositions, l’ACP a mis en place un
contrôle permanent sur pièces et diligenté quatre missions d’inspection sur
place. Elle a adressé en avril 2011 au président de la Commission de
surveillance un rapport annuel qui rend compte des travaux réalisés par
l’ACP en 2010 dans le cadre du programme de travail approuvé par la
Commission de surveillance et des principaux enseignements que le
secrétariat général de l’ACP a pu en dégager.
Le ministre de l’économie a adressé au directeur général de la CDC un
courrier le 15 juillet 2010, en vue de concrétiser la participation de la CDC au
financement de l’ACP. Ce courrier expose la base sur laquelle pouvait se
fonder la contribution financière de la Caisse pour l’exercice 2010 en
l’absence de détermination exacte de l’exigence minimale en fonds propres la
concernant. En effet, cette exigence minimale sert d’assiette à la contribution
fixée à 0,60 pour mille pour tous les établissements de crédit assujettis au
contrôle de l’ACP. Selon les informations de la Cour, la détermination des
exigences minimales en fonds propres devrait être effectuée par l’ACP sur la
base des états COREP (états prudentiels) au 30 juin 2011 à transmettre par la
CDC le 30 novembre 2011, et la Commission de surveillance de la Caisse
devrait discuter de son modèle prudentiel au deuxième semestre 2011. A la
date de la présente enquête, le processus était donc encore en cours.
L’ACP a calculé un montant pour l’exercice 2010 se fondant sur la
méthode suggérée par le ministre et ce montant estimé a été reconduit pour le
budget prévisionnel de 2011. Pour les besoins de sa bonne gestion du budget,
il n’est pas anormal que le collège de l’ACP fasse une estimation de
l’ensemble des recettes attendues sur l’année y compris en provenance de la
CDC. L’ACP a engagé dès 2010 les moyens pour répondre aux obligations
mises par la loi concernant le contrôle des activités bancaires et financières
de la Caisse.
52
Article L. 518-15-3 du code monétaire et financier.
60
COUR DES COMPTES
Au plan juridique, la Caisse n’est pas mentionnée parmi les entités
assujetties à une contribution pour frais de contrôle
53
. Elle le serait en tant
que teneur de compte conservateur car elle possède cette qualité mais la CDC
n’est ni un prestataire en service d’investissement, ni un établissement de
crédit au sens commun du terme. Son statut spécial a toujours nécessité des
textes la concernant et il apparaît donc que la loi de 2008 et le décret de 2009
organisant un contrôle de la commission de surveillance par appel aux
services de l’ACP n’ont pas été accompagnés de dispositions de financement
des charges encourues. La CDC considère donc que le paiement volontaire de
la contribution pour frais de contrôle, sans support législatif, sur la seule base
d’un accord avec l’Etat, portant à la fois sur le principe et le mode de
détermination de cette contribution, pourrait apparaître juridiquement
critiquable. Il conviendrait, par conséquent, d’introduire une disposition
législative prévoyant l’assujettissement de la Caisse à une contribution pour
frais de contrôle en faveur de l’ACP.
Le collège ayant validé le niveau des dépenses permettant à la
nouvelle autorité de remplir ses missions pour 2011, il a discuté des
différentes options envisageables pour combler le déficit prévisionnel de
2011 :
l’utilisation de la réserve apportée par l’ACAM- à laquelle le
comité d’audit n’était pas favorable, en raison du fort rattrapage
qu’il serait alors nécessaire d’effectuer sur le taux des
contributions des organismes en 2012 et 2013- ;
une augmentation des taux de contribution. Cette option avait la
faveur du comité d’audit qui recommandait une politique
progressive d’augmentation des contributions des assujettis sur
les deux à trois ans à venir, en accompagnement de la montée
en charge de l’ACP jusqu’en 2013. La direction générale du
Trésor
a
cependant
marqué
sa
préférence
pour
une
augmentation des taux de contribution en 2012, dont la
nécessité et le calibrage seraient déterminés sur la base de
prévisions fiables et précises, ce que le collège a approuvé ;
une dotation additionnelle de la Banque de France. Le président
de l’ACP a
évoqué cette possibilité en attendant de pouvoir
calibrer
l’ajustement
des
contributions
nécessaires
aux
dépenses de fonctionnement de l’ACP.
Au total, à la date de l’enquête, le taux des contributions n’a pas
été relevé. Si le déficit 2011 était confirmé, il devrait donc être couvert
par un prélèvement sur la trésorerie initialement apportée par l’ACAM.
Cette trésorerie s’élève à 34 M€ à laquelle s’ajoute l’excédent de 2010 de
2,7 M€. Cette trésorerie qui a été dévolue à l’ACP a résulté des résultats
53
Article L. 612-20 du code monétaire et financier.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
61
positifs, dégagés durant les quatre premières années du fonctionnement
de l’ACAM, de 2004 à 2007, et qui lui ont permis de se constituer des
fonds propres. Lors de son précédent contrôle sur l’ACAM, la Cour avait
mentionné ce niveau élevé que l’autorité justifiait par son exposition aux
risques du fait de son activité de supervision
54
.
Nonobstant l’origine de cette trésorerie sur laquelle la Cour avait
pris position
55
, compte tenu de l’intégration de l’ACAM dans une autorité
prudentielle qui a repris l’intégralité de ses missions, l’apport de cette
trésorerie fait désormais partie intégrante des comptes de l’ACP.
Aussi, il apparaît nécessaire d’utiliser au moins en partie les
réserves ainsi constituées avant d’envisager tout relèvement des taux de
contribution
des
établissements,
d’autant
que
les
données
de
fonctionnement de l’ACP ne seront disponibles et représentatives en
année pleine qu’à l’issue de l’exercice budgétaire 2011. Par la suite, si
l’évolution des taux de contribution devait suivre au plus près les
perspectives annuelles de charges, il pourrait alors être considéré que
l’ACP n’a pas besoin de disposer d’une trésorerie aussi importante.
2 - La nécessité d’un équilibre durable entre le montant des
contributions et celui des dépenses
L’article R.612-13 du code monétaire et financier décrit les
éléments de l’équilibre budgétaire de l’ACP, en particulier la nature des
recettes de celle-ci :
« Le budget comporte la prévision des recettes, y
compris les revenus attendus du placement des contributions reportées au
titre d'exercices précédents, les prélèvements prévus sur les réserves
inscrites au compte « contributions reportées de l'Autorité de contrôle
prudentiel » tenu dans les livres de la Banque de France conformément à
l’article L.612-18, les dotations additionnelles décidées par le Conseil
général de la Banque de France et des dépenses prévues par l'autorité
pour l'exercice de ses missions
. »
Le déséquilibre anticipé pour 2012 entre les recettes issues des
contributions et les dépenses s’élèverait à environ 30 M€
56
.
La réserve de trésorerie dont dispose l’ACP, inscrite en
« contributions reportées au titre d’exercices précédents », si elle apporte
une solution transitoire pour l’exercice 2011, ne permettrait pas de
couvrir l’intégralité du déséquilibre entre les contributions et les dépenses
54
La faiblesse des dépenses par rapport aux recettes durant cette période tient à la
perception par l’ACAM, en 2004, de la totalité des cotisations annuelles réglées par
ses assujettis alors qu’elle n’a commencé à fonctionner que sur la seconde partie de
l’année, puis aux retards pris dans sa montée en charge.
55
La Cour estimait justifié qu’une partie (16 M€ environ) revienne à l’Etat.
56
Note au collège plénier du 24 novembre 2010.
62
COUR DES COMPTES
en 2012, dans le cas où les hypothèses de déséquilibre pour 2011 se
réaliseraient.
La Banque de France peut attribuer une dotation additionnelle à
l’ACP
57
. Celle-ci serait comptabilisée en charge dans le budget de la
Banque, tel qu’adopté par son Conseil général, et réduirait son résultat à
due concurrence. De manière générale, la Banque considère néanmoins
que les dépenses de l’ACP doivent, par principe, être couvertes par ses
ressources propres, à savoir les contributions des assujettis. S’agissant du
déficit 2011 et des perspectives de déficit en 2012, la Banque estime
qu’ils devraient être couverts, en priorité, par l’utilisation de la trésorerie
de l’ex-ACAM et par un éventuel ajustement des taux des contributions
des organismes assujettis au contrôle de l’ACP.
L’ACP prévoit d’atteindre le rythme de croisière de ses activités à
partir de 2013, après avoir atteint la cible d’effectifs de 1 150 personnes
environ, fin 2012. Pour obtenir l’équilibre de l’exercice 2012, les deux
seules variables d’ajustement sont la hausse du montant des contributions
ou la réduction des dépenses.
B - Des contributions à rééquilibrer à terme
1 - Des assiettes de contributions dont la justification n’est pas
homogène
L’ordonnance du 21 janvier 2010 prévoit le financement de l’ACP
par les personnes soumises à son contrôle
58
. Ce mode de financement est
transposé de la pratique pour les autorités publiques indépendantes
comme l’ACAM et l’AMF. Le budget de l’ACAM, d’un montant de
29 M€ en 2009, était intégralement financé par les contributions versées
par les organismes contrôlés : assurances, mutuelles et institutions de
prévoyance.
Pour l’ACP, la contribution pour frais de contrôle est assise :
sur
les
exigences
minimales
en
fonds
propres
des
établissements de crédit, des entreprises d’investissement, des
établissements de paiement et des compagnies financières
59
;
sur les primes
60
ou cotisations émises ou acceptées, à savoir le
chiffre d’affaires pour les organismes d’assurance, ainsi que les
57
Article L. 612-18 du code monétaire et financier.
58
Article L.612-20 du code monétaire et financier.
59
L’assiette est le cas échéant établie sur une base consolidée.
60
Les primes sont prises en compte pour leur montant net de cession ; elles sont
appréciées sur une base sociale.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
63
Mutuelles du livre II du code de la mutualité et les institutions
de prévoyance ;
sur une base forfaitaire pour certaines professions (changeurs
manuels, courtiers et sociétés de courtage d’assurance,
intermédiaires
en
opérations
de
banque
et
service
de
paiement…).
Assiettes des contributions dues à l’ACP et contributeurs en
2010
Catégories d’assujettis
Assiette et taux
Etablissements de crédit
Entreprises
d’investissement
Montant des exigences minimales de fonds propres ou normes de
représentation de capital minimum
Taux de 0,60 pour mille (avec une contribution minimale de 500 €)
Changeurs manuels
Contribution forfaitaire : 1 000 €
Intermédiaires en
opérations de banque et
services de paiement
Contribution forfaitaire : 150 €
Assurances
Primes ou cotisations émises et acceptées
Taux de 0,12 pour mille (avec une contribution minimale de 500 €)
Mutuelles
Institutions de prévoyance
Primes ou cotisations émises et acceptées
Taux de 0,12 pour mille (avec une contribution minimale de 500 €)
Courtiers d’assurance
Associations de micro
crédit
Pour les courtiers, contribution forfaitaire : 150 €
Pour les associations sans but lucratif, contribution forfaitaire : 100 €
Source : Cour des comptes
Concernant
le
secteur
bancaire,
le
chiffre
d’affaires
des
établissements de crédit (ou produit net bancaire) ne pouvait pas être
retenu comme assiette de contributions, en raison, notamment, de sa
volatilité pour les établissements établissant leurs comptes en IFRS, les
décotes liées à l’évaluation des actifs à la juste valeur entrant en compte
dans la formation du produit net bancaire. Les exigences minimales de
fonds propres constituent donc une assiette stable, qui est pertinente car
reliée au niveau de risque des banques qui doit être contrôlé par le
superviseur. Le taux de contribution de 0,60 pour mille retenu
61
dans
l’arrêté du 9 avril 2010 se situe dans la fourchette prévue par
l’ordonnance entre 0,40 pour mille à 0,80 pour mille, et devait permettre
de faire face aux charges de l’ACP.
Du côté du secteur des assurances et des mutuelles, l’assiette de
contribution comme les taux de contribution n’ont pas été révisés à
l’occasion de la création de l’ACP
62
. L’assiette, basée sur le chiffre
61
Voir l’arrêté du 9 avril 2010 fixant le taux de contribution pour les établissements
de
crédit et entreprises d’investissement.
62
L’arrêté du 25 avril 2010 précise le taux applicable aux entreprises d’assurances et
fixe le montant des contributions que doivent acquitter les intermédiaires (courtiers
d’assurance, IOBSP, changeurs manuels).
64
COUR DES COMPTES
d’affaires, varie avec les fluctuations d’activité du secteur. L’ACAM
avait d’ailleurs justifié sa réserve de trésorerie par une précaution d’un an
de fonctionnement. La prévisibilité des recettes de contributions est donc
moindre que pour les établissements de crédit.
2 - Les déséquilibres selon les secteurs contrôlés en 2010
a) Des difficultés de recouvrement lors du démarrage
A fin février 2011, une très large part des recettes au titre de
l’année 2010 avait été collectée par l’ACP, le taux de collecte
s’établissant à 98,5 %.
L’ACP a rencontré des difficultés de recouvrement circonscrites,
pour la plupart, au monde des intermédiaires : intermédiaires en
opérations de banque et services de paiement et courtiers. Ces assujettis,
très nombreux et nouvellement soumis au contrôle, n’avaient pas anticipé
leur obligation de financement et un certain nombre d’entre eux a
contesté cette obligation.
L’exemple des intermédiaires en opérations de banque et services de
paiement (IOBSP)
L’ACP a procédé au recensement des IOBSP, en demandant aux
établissements de crédit de déclarer, courant juin 2010, les intermédiaires
auxquels ils avaient donné mandat et en s’efforçant parallèlement de
déterminer le périmètre de ces intermédiaires avec les associations
professionnelles, FBF et ASF. La population des IOBSP a d’abord été
évaluée à 65 000 personnes environ (en juin 2010). Au final, 30 000 appels à
contribution ont été émis pour la campagne 2010 sur la base des IOBSP
effectivement déclarés par les établissements de crédit et de paiement
mandants.
Au titre de l’année 2010, 30 014 appels à contribution pour frais de
contrôle ont été adressés à des IOBSP pour un montant global de 4,5 M€. Les
appels à contribution se sont déroulés en octobre 2010 sur la base d’une
première liste établie par l’ACP puis en février 2011, à la suite de la
publication d’une liste rectificative.
A fin février 2011, 15 191 IOBSP avaient procédé au règlement
intégral de la contribution appelée, soit 2,3 M€ représentant 50,6 % des
contributions appelées non annulées.
Ce niveau de recouvrement inférieur à celui constaté sur les autres
catégories d’assujettis s’explique selon l’ACP par :
- une moindre connaissance par les IOBSP du rôle de l’ACP et du
principe de contribution pour frais de contrôle, ce qui a généré un volume
significatif de demandes d’information et de contestations ralentissant le
processus de recouvrement ;
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
65
- un processus de recouvrement moins avancé que sur les autres
catégories d’assujettis en raison notamment d’une émission plus tardive des
appels à contribution compte tenu de la date de première publication de la
liste des IOBSP.
Le secrétariat général de l’ACP a été confronté, par ailleurs, à un
nombre très significatif de contestations et demandes d’information sur la
nature de la contribution pour frais de contrôle. Il s’est traduit par la réception
de 2 100 courriers, 900 courriers électroniques, près de 6 400 appels
téléphoniques, la mise en place d’un centre spécifiquement créé à cet effet
mobilisant à temps plein jusqu’à 8 opérateurs. Près de 1 800 appels à
contribution n’ont pas pu être remis à leurs destinataires en raison d’adresses
erronées ou incomplètes.
Source : ACP
Ces difficultés de démarrage devraient progressivement se résorber
avec la définition, en cours, d’un statut des IOBSP, et la mise en place
d’un enregistrement obligatoire de ces professionnels à l’ORIAS
(Organisme pour le Registre des Intermédiaires en Assurance)
63
.
b) Le poids prédominant des contributions du secteur bancaire
L’appel des contributions s’est effectué auprès de 50 032 assujettis
pour un versement total de 160 M€.
Les établissements de crédit et les entreprises d’investissement
ont versé près de 120 M€, contribuant à hauteur de 79 % des montants
encaissés. Les entreprises d’assurance ont contribué pour près de 5 fois
moins, soit 25 M€ environ. Le secteur des mutuelles et des institutions de
prévoyance a pour sa part versé 3,5 M€.
63
Un décret d’application de la loi de régulation bancaire et financière, qui était en
cours d’élaboration au moment de l’enquête de la Cour, doit préciser le champ
d’application du statut d’IOBSP (y compris les critères d’exemption à ce statut) et les
différentes catégories d’IOBSP. L’impact sur les ressources de l’ACP qu’aura ce
nouveau champ d’application n’est pas évalué à ce stade. Voir infra.
66
COUR DES COMPTES
Comparaison entre les montants appelés et encaissés pour
l’exercice 2010 (au 28 février 2011)
Catégories d’assujettis
Nombre
d’assujettis
Montant appelé
(
en M€)
Montant encaissé
(
en M€)
Etablissements de crédit/entreprises
d’investissement
307
125,97
125,94
Changeurs manuels
146
0,146
0,137
IOBSP
30 024
4,5
2,28
Assurances
315
25,21
25,19
Mutuelles / IP
940
3,45
3,45
Courtiers d’assurance / Associations
de micro crédit
18 300
2,5*
2,37
TOTAL
50 032
162,02
159,37
Source : ACP, présentation du rapport d’exécution budgétaire au comité
d’audit le 14 mars 2011 ; * Ce montant correspond au montant appelé net
des annulations.
Les cinq contributeurs bancaires les plus importants ont versé
102,1 M€ au total à l’ACP tandis que les cinq plus gros contributeurs du
secteur des assurances apportaient 9,7 M€. Le rapport de 1 à 5 entre les
contributions des assureurs et celles des banques correspond au rapport
qui existait dans le budget initial de l’ACP entre le budget de l’ex-
ACAM et celui du contrôle bancaire.
Toutefois les efforts de croissance des moyens de l’ACP entre
2011 et 2013 portent en partie sur le secteur de l’assurance. D’une part,
comme la Cour l’avait relevé lors de son contrôle sur l’ACAM, l’autorité
était
sous-dimensionnée par rapport aux enjeux du secteur. D’autre part,
ces enjeux se réalisent maintenant avec la mise en application de la
directive Solvabilité II. Enfin, l’attention portée dans le contrôle des
pratiques commerciales aux deux secteurs devrait s’équilibrer à terme.
c) Les perspectives concernant les contributions du secteur assurance
Le collège s’est interrogé sur la nécessité de modifier l’assiette de
contributions des assureurs afin que celle-ci soit plus stable et reflète
mieux les risques du secteur. La détermination des éléments constitutifs
d’une nouvelle assiette, liée aux fonds propres, nécessite d’attendre la
mise en oeuvre de la directive Solvabilité II, qui pourrait n’intervenir
qu’au 1
er
janvier 2014.
Dans l’intervalle, une augmentation du taux des contributions des
assureurs pourrait être envisagée. Elle pourrait sans doute se heurter à des
objections de la profession qui pourrait considérer que la consommation
de la réserve de trésorerie actuelle en provenance de l’ACAM correspond
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
67
à des contributions déjà versées
64
. Ce raisonnement ne pourrait valoir que
pour la période entre 2011 et 2012 puisque cette réserve serait épuisée
rapidement. En outre, le secteur des assurances a aujourd’hui des taux qui
n’ont pas évolué. Enfin, des mouvements, comme par exemple la collecte
sur l’assurance-vie, sont susceptibles d’affecter le chiffre d’affaires des
entreprises d’assurance, diminuant leur part relative dans l’ensemble des
contributions.
En tout état de cause, une stratégie pertinente de rééquilibrage
entre les deux secteurs devra s’appuyer sur des indicateurs de gestion et
de performance plus précis, établis à partir du coût analytique des
activités de l’ACP, sans toutefois aboutir à mettre en place un
financement par secteur qui ne serait pas compatible avec l’unicité de
l’ACP voulue par le législateur, qui doit au contraire permettre d’ajuster
les travaux aux zones de risques et aux priorités de contrôle définies par
le collège. A cet égard, l’Autorité a indiqué à la Cour qu’elle mettait en
place un dispositif de contrôle de gestion d’ici à la fin de 2011.
C - La nécessaire maîtrise des coûts de fonctionnement
L’analyse des coûts de fonctionnement est un enjeu de maîtrise des
dépenses, lesquelles ont un plafond contraint du côté des recettes.
Hormis les dépenses de personnel qui suivent la croissance réalisée
des effectifs, des postes de frais généraux représentent une part
importante. Les charges de personnel représentent 52 % du budget de
l’ACP en 2010. Au sein des frais généraux, les budgets immobilier et
informatique constituent les premier et deuxième postes de dépenses.
Les frais généraux de l’ACP en 2010
M€
Achats
0,4
Dépenses informatiques
25,9
Dépenses immobilières
23,4
Sous-traitance hors informatique
12,8
Location et maintenance diverses
0,2
Frais de mission
4,2
Frais postaux et de télécommunication
0,4
Autres frais généraux
7,1
TOTAL
74,4
Source : ACP
64
Entre 2005 et 2009, les assureurs, mutuelles et institutions de prévoyance ont versé
un excédent de contributions par rapport aux besoins de fonctionnement de l’ex-
ACAM. En montant cumulé, l’excédent représentait 34 M€ à la création de l’ACP.
68
COUR DES COMPTES
1 - Les dépenses de personnel
Pour un effectif moyen de 857,5 équivalent agent temps plein (hors
stagiaires et emplois temporaires d’été), les charges de personnel de
l’exercice 2010 se sont élevées à 83,7 M€
65
. Les dépenses de personnel
de l’ACP suivent très largement les caractéristiques et les évolutions des
dépenses de personnel de la Banque de France
66
.
Composition des charges de personnel de l’ACP en 2010
M€
Rémunération du personnel
54,5
Charges patronales
22,1
Droits acquis à la retraite
7,1
TOTAL
83,7
Source : ACP
Les comparaisons établies par la Banque de France, dans le cadre
de la préparation de l’offre d’intégration aux personnels de droit public de
l’ex-ACAM
67
, entre les régimes de droit public et les accords d’entreprise
de la Banque illustrent que ces derniers sont beaucoup plus favorables en
ce qui concerne les congés de maternité (33 semaines rémunérées à plein
traitement au lieu de 16 semaines dans la fonction publique
68
) et les
congés d’adoption (27 semaines rémunérées à plein traitement au lieu de
10 semaines dans la fonction publique
69
). Les accords d’entreprises sont
également plus favorables en ce qui concerne le régime des heures
supplémentaires (possibilité de paiement à la Banque de France qui
n’existe pas dans la fonction publique) et les modalités d’alimentation du
compte épargne-temps (en jours, heures et numéraire à la Banque, en
jours seulement dans la fonction publique).
2 - Les budgets informatiques
Les dépenses informatiques représentent le deuxième poste
budgétaire après les charges de personnel, en raison notamment de la
65
Ces charges comprennent non seulement les salaires des actifs de l’ACP mais aussi
les droits acquis à la retraite des agents titulaires en activité.
66
Celles-ci résultent des négociations annuelles obligatoires menées à la Banque de
France, consécutivement à l’arrêté des comptes, qui conduisent aux accords
d’entreprises, portant à la fois sur les rémunérations et les avantages non salariaux.
67
Excluant les commissaires contrôleurs des assurances.
68
« Durée égale à celle prévue par la législation sur la sécurité sociale », d’après
l’article 34-5° de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 dite Le Pors portant dispositions
statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat.
69
« Durée égale à celle prévue par la législation sur la sécurité sociale » (article 34-5°
de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984, susvisée).
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
69
mise à niveau de l’équipement informatique de l’ACP dans la perspective
des réformes en cours et à venir
70
: elles ont représenté 25,9 M€ en 2010.
Une partie est liée à l’installation de l’ACP (3,2 M€). Le reste se partage,
pour un tiers environ (7,4 M€), en sous-traitance externe des projets de
l’ACP et pour deux tiers (15,3 M€) en prestations informatiques fournies
par la Banque. Le coût de cette dernière prestation reflète principalement
les coûts de ressources humaines davantage que ceux des matériels.
3 - Les dépenses immobilières
Le budget immobilier constitue le troisième poste de dépenses de
l’ACP pour un montant de 23,4 M€. Elles se décomposent en 21,2 M€ de
loyers et charges locatives et 2 M€, rémunérant la prestation de gestion
rendue par la direction de l’immobilier et des services généraux de la
Banque de France (DISG).
Le Comité d’évaluation et de contrôle (CEC) de l’Assemblée
Nationale,
dans
son
rapport
sur
les
autorités
administratives
indépendantes (AAI)
71
, a relevé que les loyers acquittés par l’ACP auprès
de bailleurs privés pour un coût de 559 €/m² la font figurer parmi les 7
autorités administratives indépendantes présentant des coûts supérieurs au
loyer moyen constaté dans le « quartier central des affaires » soit
543 €/m²
72
. Ce rapport a recommandé que les AAI respectent la décision
prise par le gouvernement le 30 juin 2010 de ne consentir aucun bail de
plus de 400 € par an et par m² en Ile de France, ainsi que l’objectif de
12 m² de surface utile nette par agent
73
.
Le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction
publique a diligenté, en décembre 2010, une enquête de France Domaine.
La Banque de France y a répondu en renseignant, pour les deux sites
occupés par l’ACP, la surface indiquée au bail, le montant total du loyer
ainsi que les indicateurs de performance immobilière que sont les postes
de travail par m² ; elle a également communiqué la répartition des loyers
par m² figurant aux deux baux, sans indiquer l’identité des bailleurs.
La situation de l’ACP est spécifique car son adossement à la
Banque de France est légalement prévu par les textes. La Banque
refacture les charges qui entrent dans les dépenses elles-mêmes financées
par des contributions du secteur privé. Cependant, il est utile que l’ACP
en tant qu’autorité administrative se rapproche des normes publiques
70
La mise en oeuvre de Solvabilité II s’accompagnera, notamment, d’une
augmentation forte des reportings prudentiels.
71
En date du 28 octobre 2010.
72
Au 1
er
janvier 2011, le chiffre est de 618 euros/m² HTHC.
73
La surface utile nette par poste de travail à l’ACP en janvier 2011 était de 12,9 m²,
la cible à fin 2012 étant de 11,2 m².
70
COUR DES COMPTES
adoptées : tel paraît le cas pour l’occupation en m². Par ailleurs,
l’implantation retenue pour les locaux de l’ACP est un héritage des
implantations antérieures du secrétariat général de la Commission
bancaire et de l’ACAM. Une étude de la Banque de France sur les
différentes options envisageables pour réduire le montant des loyers à
court et moyen terme (mutualisation des charges immobilières avec la
Banque de France, éventuel changement de localisation en fonction de
l’évolution du parc immobilier de la Banque, etc) serait souhaitable.
4 - Des marges de réduction sur deux catégories de frais généraux
Les frais de mission constituent la cinquième catégorie de
dépenses en volume. Ils ont représenté 4,2 M€ en 2010, et devraient
augmenter de 25 % en 2011 pour atteindre 5,1 M€, largement du fait des
missions de contrôle bancaire sur place qui représentent plus des 3/4 des
frais de mission. Le coût moyen d’un jour-agent pour ce type de mission
ressort à 87 €
74
. Les spécificités du contrôle bancaire sur place peuvent
justifier un coût supérieur à une mission dans la fonction publique.
Néanmoins, dans la perspective de contenir les dépenses, les frais de
mission
75
devraient constituer un point d’attention.
La gestion de la flotte automobile de l’ACP coûte 300 000 € en
2010. 48 véhicules de fonction sont mis à disposition par la Banque de
France aux 6 membres de la vice-présidence et de la direction générale de
l’ACP d’une part, et à 42 inspecteurs de la délégation au contrôle sur
place des établissements de crédit et entreprises d’investissement arrivés
au grade d’inspecteur de 2
ème
classe, d’autre part. Ces dépenses de
transport devraient être révisées.
Par ailleurs, certaines des entités assujetties au contrôle de l’ACP
avancent leur propre grille de lecture des dépenses de fonctionnement de
l’Autorité en comparant ses
coûts de contrôle à leur propre budget
d’audit et de commissariat aux comptes. Il est évident que les deux
activités ne sont pas tout à fait comparables, notamment parce que le
superviseur a un contrôle permanent et reçoit des reportings informatisés
exhaustifs dont l’analyse ne s’apparente pas aux techniques des missions
intermédiaires des CAC.
Néanmoins, l’ACP dispose de marges d’économies sur ses frais
généraux, qui devraient faire l’objet d’une vigilance renforcée. Il est
important que l’ACP mette en place des indicateurs de performance et un
contrôle de gestion qui lui soit propres afin de suivre ses coûts
analytiques. Outre un dispositif de contrôle de gestion, l’ACP a engagé
74
Sur la base d’un effectif moyen en mission de 170 personnes et d’un nombre moyen
de jours travaillés de 210.
75
Hors missions internationales, non visées ici.
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
71
une réflexion sur la modernisation de ses indicateurs de performance afin
de rendre compte de l’ensemble de ses activités et d’être en mesure de
suivre ses projets prioritaires sur un horizon pluriannuel.
D - Vers une plus grande transparence de l’information
budgétaire
Le rapport sur l’exécution budgétaire présenté au comité d’audit de
l’ACP fournit une information détaillée dont le contenu semble issu de la
tenue d’une comptabilité. En effet, outre l’état détaillé des dépenses et des
ressources et leur présentation selon la terminologie du plan comptable
général, le rapport renseigne sur le montant de la réserve de trésorerie qui
représente l’élément majeur du patrimoine de l’ACP.
Toutefois, afin d’être tout à fait équivalente à l’information de type
comptable, l’information contenue dans le rapport budgétaire transmis au
comité d’audit devrait être complétée par quelques éléments descriptifs de
la situation du bilan : le montant des actifs immobilisés et d’autres
éléments d’actif tels les dépôts de cautions de loyers, et le montant des
passifs éventuels. Par ailleurs, la synthèse des moyens fournis par la
Banque devrait être produite accompagnée de la décomposition par
prestations.
L’information communiquée au public au sujet des moyens utilisés
par l’ACP figure dans la dernière partie du rapport annuel. Elle est
directement extraite du rapport d’exécution budgétaire examiné par le
comité d’audit et retrace de manière plus synthétique les contributions
pour frais de contrôle et les principales lignes de dépenses budgétaires.
L’ACP a indiqué à la Cour sa volonté d’assurer la transparence sur
l’utilisation de ses ressources. Aussi, il serait opportun que l’ACP
enrichisse la communication sur les dépenses et les recettes en expliquant
plus largement l’évolution de son budget, ses composantes et ses
objectifs.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
L’unification des structures qu’impliquait la création de l’Autorité
de
contrôle
prudentiel
(ACP)
a
été
rapidement
matérialisée.
L’adossement de l’autorité de supervision prudentielle à la banque
centrale, sur un champ sectoriel élargi, constitue un atout que la Cour
avait relevé dans ses conclusions antérieures sur la supervision
prudentielle. Dans le fonctionnement interne de l’Autorité, la mise à
disposition de la logistique de la Banque de France permet clairement la
mutualisation des moyens. Celle-ci est à parfaire, après la phase de
montée en charge, afin de maîtriser les coûts, notamment des fonctions
support. Une meilleure connaissance des modalités de facturation des
72
COUR DES COMPTES
prestations servies par la Banque est également de nature à contribuer à
la maîtrise du budget de l’ACP.
L’organisation interne mise en place au secrétariat général de
l’ACP, qui est équilibrée et pertinente, a intégré l’enjeu d’une autorité
qui ne pouvait reproduire les schémas des autorités précédentes. Il reste
à en stabiliser certains aspects. L’intégration des personnels de
l’ancienne ACAM dans les statuts des agents de la Banque de France a
fait l’objet d’actions adéquates et a rencontré en très grande partie le
succès
escompté.
Toutefois,
une
catégorie
de
personnels
-les
commissaires contrôleurs des assurances- demeure un point de vigilance,
et des efforts particuliers doivent être déployés pour maintenir l’expertise
du contrôle des assurances et renforcer les effectifs qui y sont dédiés dans
un contexte de fortes sollicitations pour la mise en oeuvre de la réforme de
Solvabilité II.
Le collège de l’Autorité a défini la cible que doit atteindre le
niveau global des effectifs d’ici à la fin de 2012, soit près de 1 150
personnes, en progression de + 28 % par rapport à l’effectif de départ en
mars 2010. Elle est ambitieuse à l’horizon fixé. Si l’augmentation des
effectifs opérationnels de l’ACP est cohérente avec l’accroissement de ses
missions, des marges de manoeuvre devront être dégagées à terme pour
rationaliser certaines fonctions.
La mobilité professionnelle des personnels, y compris pour
occuper des postes dans le domaine international, constitue un enjeu que
doit prendre en compte la gestion des ressources humaines. Cette
mobilité pourrait s’appuyer sur le vivier que représentent les personnels
de la Banque de France.
S’agissant du budget, si l’exercice 2010 a été légèrement
excédentaire, des tensions sont apparues pour l’exécution du budget de
2011 et pour 2012, les projections sont défavorables à contributions
constantes. La trésorerie constituée par l’ex-ACAM devrait être utilisée à
court terme. Il est souhaitable d’engager une réflexion sur une
contribution plus équilibrée entre les deux principaux contributeurs -
banques et assurances.
La Cour formule en conséquence les recommandations suivantes :
Gestion des ressources humaines
1. Accélérer l’atteinte de l’effectif cible (ACP ; Banque de
France) ;
2. Développer la mobilité interne des personnels de la Banque de
France vers l’ACP (Banque de France) ;
LA MISE EN PLACE DE L’ORGANISATION
73
Budget et contributions
3. Maîtriser la croissance des effectifs de l’ACP dans les fonctions
support et à terme, en rationaliser l’emploi (ACP) ;
4. Identifier les marges d’économie sur les frais généraux et le
coût des fonctions support (ACP) ;
5. Donner un fondement juridique à une contribution de la Caisse
des dépôts et consignations au titre du contrôle que la loi du 4 août 2008
a confié à l’ACP sur cette institution (pouvoirs publics) ;
6. Engager une réflexion pour rééquilibrer les contributions
versées par les secteurs de la banque et de l’assurance (pouvoirs publics
et ACP).
Chapitre II
La mise en oeuvre des pouvoirs et
l’exercice des missions de l’ACP
En raison de la date à laquelle l’enquête est intervenue, l’analyse
de la mise en oeuvre des pouvoirs dont l’ACP peut faire usage comme
celle
des
actions
concrètes
intervenues
depuis
sa
création
est
nécessairement limitée à un premier bilan de fonctionnement. L’ACP est,
dans ces domaines, en phase de transition vers un régime de croisière.
Certains ajustements à opérer apparaissent d’ores et déjà. Les obligations
mises à la charge de l’ACP par la loi ont ouvert des problématiques de
fonctionnement que l’institution devra résoudre concrètement. Il est
souhaitable que l’ACP atteigne le plus tôt possible l’efficacité attendue
dans l’exercice de ses pouvoirs et de ses missions.
I
-
Les pouvoirs de l’ACP
A la différence de l’AMF qui s’appuie sur un Règlement général
homologué par le ministre, l’ACP ne dispose pas d’un tel instrument et le
pouvoir réglementaire est exercé par le ministre de l’économie par
arrêtés. Pour autant, la mise en place de l’ACP s’est accompagnée d’une
diversification des instruments juridiques à sa disposition dont la portée
mérite d’être clarifiée.
76
COUR DES COMPTES
A - De nombreux instruments juridiques précisant
l’exercice de ses différentes missions
1 - L’indispensable clarification de leur portée juridique
L’instauration de l’ACP s’est accompagnée d’une refonte des
instruments juridiques à sa disposition pour préciser la façon dont elle
entend exercer sa mission. Certains instruments ont été précisés ou
rénovés comme les lignes directrices ; d’autres ont été formellement
introduits, notamment en matière de commercialisation et de protection
de la clientèle. C’est le cas des bonnes pratiques constatées ou
recommandées par l’ACP ainsi que des codes de bonne conduite
approuvés par l’ACP.
Instruments juridiques concernant l’ensemble du champ d’action de
l’ACP (hors instruments spécifiques aux pratiques commerciales)
Type de document
Type
d’instrument
Matière
concernée
Objet de l’instrument
Portée juridique
Notices
Prudentiel
Explications
sur
les
modalités de mise en
oeuvre
d’un
texte
réglementaire
Lignes directrices
Guide d’explication de
la
réglementation
applicable
destiné
à
l’ensemble
des
assujettis au contrôle
de l’ACP
Documents
généraux
d’analyse
et
d’interprétation
Principes
d’application
sectoriels
Lutte contre le
blanchiment et
le financement
du terrorisme
(LCB/FT)
Déclinent
les
lignes
directrices de l’ACP
Positions
Précisions sur un point
particulier
de
la
réglementation
Documents ponctuels
Réponses
aux
questions
Précisions données à la
suite
d’interrogations
extérieures,
lorsqu’elles
ne
s’intègrent pas dans un
autre document
N’ajoutent
ni
ne
retranchent,
ni
ne
modifient les obligations
qui
découlent
exclusivement des lois et
règlements auxquels ils
font
référence ;
aucune
portée juridique directe ;
peuvent donner lieu à une
mise
en
demeure
de
l’établissement sur la base
du
texte
législatif
ou
réglementaire méconnu
Documentation
méthodologique
Chartes
du
contrôle
Toutes
Récapitulent les droits
et
obligations
des
personnes contrôlées et
de
contrôleurs
et
décrivent les processus
de contrôle sur place
Aucune
Seules
les
dispositions
législatives
et
réglementaires rappelées
dans
la
charte
sont
opposables
Source : Cour des comptes, à partir du document Politique de transparence de l’ACP
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
77
L’ensemble de ces instruments, y compris ceux relevant du
domaine des pratiques commerciales, qui sont publiés sur le registre
officiel de l’Autorité, accessible sur Internet, est destiné à informer les
personnes soumises à son contrôle et le public sur la manière dont elle
interprète les textes entrant dans son champ de compétences. La plupart
des instruments ont donc une visée explicative, telles les positions ou les
lignes directrices. Ils permettent une meilleure prévisibilité de l’action de
l’ACP, notamment à l’occasion des contrôles qu’elle exerce.
Cet effort de clarification de textes nombreux, techniques et parfois
complexes est accueilli positivement par les professionnels rencontrés au
cours de l’enquête. La terminologie des instruments juridiques dont
dispose l’ACP est comparable à celle utilisée par l’AMF
76
pour certains
de ses propres instruments (instruction, position, recommandation,
pratique de marché admise). Les associations professionnelles regrettent
que les termes employés par les deux autorités soient identiques mais
avec, parfois, des portées juridiques différentes
77
. Néanmoins, elles sont,
dans l’ensemble, favorables à la publication par l’ACP de son
interprétation sur la réglementation, permettant une meilleure prévisibilité
de son action.
2 - La complexité des instruments dans le domaine des
pratiques commerciales
Aux termes de l’article L. 612-1 du Code monétaire et financier,
l’ACP « est chargée de veiller au respect par les personnes soumises à son
contrôle des règles destinées à assurer la protection de leur clientèle,
résultant notamment de
toute disposition législative et réglementaire
ou
des
codes de conduite approuvés
à la demande d'une association
professionnelle, ainsi que des
bonnes pratiques
de leur profession qu'elle
constate
ou
recommande
, ainsi qu'à
l'adéquation des moyens et
procédures
qu'elles mettent en oeuvre à cet effet ; elle veille également à
l'adéquation des moyens et procédures que ces personnes mettent en
oeuvre pour respecter le livre Ier du code de la consommation. »
La complexité même de cet article qui fournit à l’ACP une palette
d’interventions, lesquelles de surcroît peuvent être actionnées en même
temps, a pu désorienter par rapport aux pratiques antérieures. En effet,
l’émergence d’instruments permettant à l’ACP de créer des normes qui
76
Voir les
Principes d’organisation et de publication de la doctrine de l’AMF
publiés
par l’AMF le 7 décembre 2010.
77
C’est le cas des recommandations notamment.
78
COUR DES COMPTES
relèvent de ce qu’il est convenu d’appeler « le droit souple »
78
(la « soft
law » est couramment pratiquée en droit anglo-saxon) dans le domaine de
la commercialisation et de la protection de la clientèle est la grande
nouveauté de la loi.
L’ACP a adopté, à ce jour, cinq recommandations et deux
positions dans le domaine de la commercialisation et de la protection de
la clientèle (voir infra). Elle n’a pas encore formalisé le constat de bonnes
pratiques.
Instruments juridiques relevant du domaine de la
commercialisation de produits et de la protection de la clientèle
Type d’instrument
Objet de l’instrument
Portée juridique
Codes
de
conduites
homologués
par
le
ministre (après avis du
CCSF)
Codes de conduite élaborés par
des
organisations
représentatives
des
professionnels
du
secteur
financier
Portée réglementaire
Application
directe
à
l’ensemble
des
professionnels concernés
Bonnes
pratiques
constatées
Bonnes
pratiques
identifiées
par
l’ACP
lors
des
ses
contrôles
Recommandations
(ou
bonnes
pratiques
recommandées)
Préconisations pratiques
Identification
de
mauvaises
pratiques
Portée juridique indirecte ; peuvent donner
lieu à une mise en garde
79
par l’ACP dont
le non respect peut conduire à une
procédure disciplinaire
Codes
de
bonne
conduite approuvés par
l’ACP à la demande
d’une
association
professionnelle
Engagements
des
adhérents
d’une
association
professionnelle ; précisent les
modalités de mise en oeuvre des
textes
Caractère
obligatoire
des
dispositions
approuvées pour l’ensemble des adhérents
à
l’association
professionnelle.
Peut
donner lieu à mise en demeure des
établissements
Source : Cour des comptes sur la base de données ACP
Les instruments nombreux et variés dont dispose l’ACP ajoutent
aux lois et règlements ou les interprètent, ce qui a provoqué des
interrogations de la part des professionnels quant à leur portée juridique.
L’ACP a donc entrepris de clarifier la nature et la portée juridique des
78
Il n’existe pas de traduction unanimement acceptée par la communauté juridique au
concept anglo-saxon de « soft law » qui se définit par opposition à la « hard law », le
droit positif.
79
Voir infra sur les pouvoirs de police pour la distinction entre mise en garde et mise
en demeure.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
79
différents instruments qu’elle utilise, dans le cadre d’un document
formalisé
80
.
Il demeure que l’architecture des différents instruments, en
particulier dans le domaine du contrôle des pratiques commerciales et de
la protection de la clientèle, est complexe. Leur compréhension comme
leur appropriation demanderont du temps.
3 - Les incertitudes liées à l’application du « droit souple »
La mise en place par le législateur d’instruments de « droit
souple » au profit de l’ACP témoigne de la volonté de trouver un
équilibre entre des instruments normatifs de portée réglementaire et un
droit moins contraignant. Ces instruments de « droit souple » présentent,
en effet, deux avantages principaux : une souplesse d’adoption et
d’application plus grande que pour des instruments réglementaires et, par
conséquent, une capacité de réactivité plus forte aux évolutions des
pratiques professionnelles.
Dans le même temps, ils comportent un certain nombre de limites,
qui ne sont d’ailleurs pas propres à l’ACP mais concernent plus
généralement les autorités administratives indépendantes. La question de
l’invocabilité de ces normes devant une juridiction civile dans un litige
opposant un particulier à sa banque ou à son assurance reste ainsi ouverte.
De même, la question de leur articulation avec le droit positif peut se
poser
81
. Le risque de confusion a été souligné par le rapport
parlementaire
82
sur les Autorités administratives indépendantes du
28 octobre 2010, qui recommande dans le déploiement du droit souple, de
« s’assurer que ces lignes directrices ne soient pas créatrices de règles
empiétant sur le domaine de la loi et du règlement en prévoyant par
exemple un mécanisme par lequel le commissaire du gouvernement
puisse déférer devant le juge administratif les actes des AAI à portée
générale qu’il estimerait excéder leur champ de compétences »
83
.
80
Document intitulé
La politique de transparence de l’ACP
.
81
Voir sur ce sujet :
L’ACP et les pratiques contra legem des syndics de copropriété
,
Thierry Bonneau, professeur de droit à l’Université Panthéon-Assas (Paris 2), in La
Semaine Juridique Notariale et Immobilière n°17, 29 avril 2011.
82
Rapport d’information fait au nom du comité d’évaluation et de contrôle des
politiques publiques par MM. René Dosière et Christian Vanneste, Assemblée
nationale.
83
L’ACP estime que la jurisprudence actuelle du Conseil d’Etat sur l’intérêt à agir
permet déjà à l’Etat d’exercer un recours pour excès de pouvoir contre ses
recommandations.
80
COUR DES COMPTES
Dans ce contexte, l’ACP devrait veiller à ce que la mise en oeuvre
de son objectif légitime d’améliorer la prévisibilité de son action en
publiant sa doctrine sous différentes formes, notamment dans le domaine
des pratiques commerciales, soit convenablement comprise par les
professionnels concernés et n’engendre pas de confusion.
4 - L’apport des commissions consultatives dans la politique de
transparence de l’ACP
L’appropriation des normes a d’autant plus de succès qu’elle passe
par une consultation de l’ensemble des acteurs concernés avant leur
adoption. La procédure d’adoption des documents publics par le collège,
telle qu’elle ressort du document sur la politique de transparence de
l’ACP, prévoit, « sauf exception »
84
, une consultation de la profession
soit par l’intermédiaire des commissions consultatives
85
, soit de manière
directe. Les associations professionnelles, ainsi que les associations de
consommateurs pour les sujets qui les concernent, considèrent que les
documents publics devraient toujours être soumis à consultation
préalable. A cet égard, le collège de l’ACP est allé au-delà des obligations
fixées par le code monétaire et financier
86
en mettant en place trois
commissions consultatives qui sont notamment chargées de rendre un
avis sur les documents de l’ACP, préalablement à leur adoption.
5 - Un pouvoir de contrôle partiel du respect des engagements
pris par les professionnels
D’autres
« normes »
existent
dans
le
domaine
de
la
commercialisation et la protection de la clientèle. Il s'agit notamment des
engagements pris, volontairement, en matière financière, par une ou
plusieurs associations professionnelles dans le cadre du Comité
consultatif du secteur financier
87
afin d'assurer l'application par leurs
84
Ces exceptions sont, pour l’ACP, les cas où le document découlerait d’une action
en cours du collège qui serait secrète.
85
Il existe 3 commissions consultatives : « lutte contre le blanchiment et le
financement du terrorisme », « pratiques commerciales », « affaires prudentielles ».
86
Article L. 612-14-1 : « L’Autorité peut instituer une ou plusieurs commissions
consultatives.
Il est institué au moins une commission chargée de rendre un avis sur
les listes, les modèles, la fréquence et les délais de transmission des documents et
informations périodiques qui doivent être remis à l’Autorité. (…) ».
87
Le comité consultatif du secteur financière (CCSF), instance paritaire entre
professionnels et consommateurs créée en 2003, est chargé d’étudier les questions
liées aux relations entre les établissements du secteur financier et leurs clientèles, et
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
81
adhérents des avis ou des recommandations adoptées par le CCSF, tel
l’avis du 4 mai 2010 sur les ventes concomitantes, ou l’avis du
17 décembre
2009
sur
l’assurance
de
protection
juridique.
Les
associations professionnelles peuvent transcrire les avis du CCSF dans le
cadre de leurs normes professionnelles ; c’est de plus en plus souvent le
cas du côté de la Fédération bancaire française (FBF).
Les textes législatifs et réglementaires actuels ne permettent pas à
l’ACP
d’exercer
un
contrôle
direct
sur
les
engagements
des
professionnels devant le CCSF. S’ils ont été formalisés par une norme
professionnelle,
l’ACP
pourra
éventuellement
vérifier
que
les
établissements bancaires les ont bien intégrés à leur dispositif de contrôle
interne
88
.
La loi de régulation bancaire et financière a prévu la possibilité
pour le ministre chargé de l’économie de demander à l’ACP de procéder
à une vérification de leur respect
89
. Cette disposition vise à garantir
l’effectivité des engagements pris volontairement par les professionnels
dans le cadre du CCSF, tout en évitant le risque de les tarir par la mise en
place d’un contrôle systématique de l’ACP. A ce titre, elle prévoit
seulement une vérification par l’ACP, et non un véritable contrôle de
cette dernière. Les résultats de cette vérification font l’objet d'un rapport
que l'Autorité remet au ministre et au Comité consultatif du secteur
financier.
Une première demande a été faite à ce titre début 2011, portant sur
le respect par les banques de leurs engagements relatifs à la mobilité
bancaire
90
. L’enquête en cours de l’ACP repose sur l’envoi d’un
questionnaire aux banques adhérentes de la FBF. Parallèlement, la
de proposer toutes les mesures appropriées, sous forme d’avis ou de recommandations
d’ordre général.
88
Le règlement du comité de la régulation bancaire et financière (CRBF) n°97-02 du
21 février 1997 relatif au contrôle interne des établissements de crédit et des
entreprises d’investissement définit le risque de non-conformité de la manière
suivante : le risque de sanction judiciaire, administrative ou disciplinaire, de perte
financière significative ou d'atteinte à la réputation, qui naît du non-respect de
dispositions propres aux activités bancaires et financières, qu'elles soient de nature
législative ou réglementaires,
ou qu'il s'agisse de normes professionnelles et
déontologiques
, ou d'instructions de l'organe exécutif prises notamment en application
des orientations de l'organe délibérant.
89
Article L. 612-29-1 du code monétaire et financier.
90
Avis du CCSF du 9 décembre 2010 tirant bilan de l’accord pris par les banques en
mai 2008, traduits par une norme professionnelle de la FBF en juillet 2009. L’avis du
CCSF prévoit une série de mesures permettant aux clients de changer de banque plus
facilement et d’être mieux informés par leur banque.
82
COUR DES COMPTES
DGCCRF enquête sur place dans 500 agences bancaires de 50
départements. Le délai de remise du rapport au ministre est fixé à la fin
du mois de septembre 2011.
Les suites qui pourront être données à ce premier rapport ne sont
cependant pas clairement définies à ce stade. S’agissant de la vérification
d’un engagement professionnel non homologué par le ministre, et non
approuvé par l’ACP – et non d’un contrôle -, celle-ci ne pourrait pas
aboutir directement à une saisine de la commission des sanctions, même
si des manquements étaient relevés. Par ailleurs, compte tenu de la
méthode adoptée (enquête déclarative) et du cadre juridique de l’enquête,
l’ACP ne pense pas possible que des suites directes puissent être
envisagées à son niveau. Ce sera donc à l’Etat de déterminer les suites à
donner à ce type de rapport.
B - Des pouvoirs élargis de police administrative mis en
oeuvre progressivement
L’ordonnance du 21 janvier 2010 tire les conséquences de l’arrêt
DUBUS
de
la
CEDH
91
.
Trois
phases
distinctes sont
désormais
distinguées clairement : la phase de contrôle administratif, laissée à la
main du secrétaire général de l’ACP, dans le cadre des priorités de
contrôle définies par le collège ; les mesures de police administrative
ainsi que l’ouverture de la procédure disciplinaire qui relèvent du
collège ; les sanctions disciplinaires qui sont décidées par la commission
des sanctions.
1 - Des pouvoirs renforcés
Le corpus de mesures de police administrative a été sensiblement
élargi par rapport aux pouvoirs dont disposaient la CB et l’ACAM
puisque l’ACP cumule désormais les pouvoirs qu’avaient les deux
autorités, et elle peut les exercer sur l’ensemble de ses assujettis.
91
L’arrêt de la CEDH Dubus c/France du 11 juin 2009 a condamné la France pour le
manque d’impartialité objective de la Commission bancaire statuant en matière
disciplinaire. La Cour a estimé « que la société requérante pouvait raisonnablement
avoir l’impression que ce sont les mêmes personnes qui l’ont poursuivie et jugée »
compte tenu de l’absence de distinction claire entre les fonctions de poursuite,
d’instruction et de sanctions au sein de la commission bancaire.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
83
La mise en demeure, la mise en garde et l’injonction avec astreinte
La mise en demeure est adressée à un établissement afin de
l’enjoindre de respecter une obligation qui lui est directement opposable. Elle
s’applique dans tous les domaines.
La mise en garde ne s’applique, en revanche, que dans le domaine du
contrôle des pratiques commerciales. En cas de méconnaissance par un
établissement des bonnes pratiques constatées ou recommandées par l’ACP
en matière de commercialisation et de protection de la clientèle, l’ACP peut
lui adresser une mise en garde individuelle, mais seulement si elle constate
que les pratiques de cet établissement sont susceptibles de mettre en danger
les intérêts de ses clients, assurés, adhérents ou bénéficiaires. Le non respect
d’une mise en garde peut donner lieu à saisine de la commission des
sanctions.
Une astreinte est une mesure coercitive, sous forme d’une pénalité
pécuniaire versée par jour (ou semaine, ou mois) de retard à l’exécution
d’une obligation. Dans le cadre de l’ACP, l’injonction de produire des
documents sollicités, dans le cadre du contrôle permanent, peut être assortie
d’une astreinte d’un montant maximal journalier de 15 000 €. L’astreinte est
liquidée par le collège en cas d’inexécution partielle ou totale ou d’exécution
tardive de l’injonction
92
. L’ACP ne considère pas l’injonction avec astreinte
comme une mesure de police administrative à proprement parler puisqu’elle
ne figure pas dans le chapitre du Code monétaire et financier qui porte cet
intitulé. Il s’agit toutefois d’une mesure coercitive à visée préventive et peut
être assimilée à une mesure de police administrative.
L’élargissement des pouvoirs de l’ACP va dans le sens des
recommandations formulées par la Cour qui estimait, dans son rapport
public annuel de 2009, que les instruments de sanction (administrative,
pécuniaire et disciplinaire) mis en oeuvre par les trois autorités n’étaient
adaptés ni en diversité, ni en puissance.
92
Article R. 612-28 du code monétaire et financier.
84
COUR DES COMPTES
Les conditions de mise en oeuvre des mesures de police administrative
de l’ACP
Type de pouvoir
Commission bancaire
ACAM
ACP
Mise en garde
Lorsqu'un établissement de crédit
a manqué aux règles de bonne
conduite
de
la
profession,
la
commission bancaire, après avoir
mis ses dirigeants en mesure de
présenter leurs explications, peut
leur adresser une mise en garde.
Non
(depuis
l’arrêt
Laurent
du
CE
28
octobre 2002)
Lorsque
l’ACP
constate
qu’une
personne contrôlée a des pratiques
susceptibles de mettre en danger les
intérêts de ses clients, assurés ou
bénéficiaires ;
la
mise
en
garde
intervient
après
demande
d’explications.
Mise en demeure
Non
Non
L’ACP peut mettre en demeure toute
personne soumise à son contrôle de
mettre en oeuvre toutes mesures
destinées à sa mise en conformité
avec
les
obligations
au
respect
desquelles elle a pour mission de
veiller.
Soumettre
un
programme
de
rétablissement
Non
Si le respect par une
entreprise de réassurance
de ses engagements est
compromis
L’ACP peut exiger de toutes les
personnes
soumises
à
son
contrôle qu’elles lui soumettent un
programme
comprenant
toutes
mesures appropriées pour renforcer
ou restaurer sa situation financière,
améliorer ses méthodes de gestion ou
son organisation.
Mesures
conservatoires
Non
Mise sous surveil-lance
spéciale,
obligation
de
présenter
un
plan
de
redressement, exigence de
solvabilité
renforcée,
blocage
d’actifs,
interdiction temporaire de
certaines
opérations,
nomination
d’un
administrateur provisoire,
suspension ou limitation
du paiement des valeurs
de rachat, de la faculté
d’arbitrages,
du
versement d’avances sur
contrat
ou de la faculté
de renonciation.
Si
sont
compromis
ou
sont
susceptibles de l’être la solvabilité ou
la liquidité de la personne ou les
intérêts
des
clients
ou
assurés :
Placement sous surveillance spéciale,
limitation ou interdiction temporaire
de l’exercice de certaines opérations,
suspension,
restriction
ou
interdiction temporaire de la libre
disposition de tout ou partie des
actifs, suspension ou limitation du
paiement des valeurs de rachat, de la
faculté d’arbitrages, du versement
d’avances sur contrat
ou de la
faculté de renonciation ; transfert
d’office
de
tout
ou
partie
du
portefeuille ;
interdiction
ou
limitation de la distribution d’un
dividende
aux
actionnaires ;
suspension
d’un
ou
plusieurs
dirigeants.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
85
Administration
provisoire
A la demande des dirigeants
ou à l'initiative de la CB
lorsque
la
gestion
de
l'établissement
ou
de
l'entreprise ne peut plus être
assurée dans des conditions
normales.
Oui.
Cf
mesures
conservatoires
A la demande des dirigeants, ou à
l’initiative de l’ACP lorsque la gestion de
l’établissement ou de l’entreprise ne peut
plus être assurée dans des conditions
normales, ou en cas de suspension d’un ou
plusieurs
dirigeants
de
la
personne
contrôlée.
Source : Cour des comptes
2 - Une mise en oeuvre progressive
L’ACP met en oeuvre progressivement ces nouveaux pouvoirs. Elle
a ainsi prononcé trois mises en garde et cinq mises en demeure. Elle a
exigé un programme de rétablissement, elle a prononcé le transfert
d’office de l’intégralité d’un portefeuille de contrats et de bulletins
d’adhésion à des règlements d’une mutuelle et désigné un administrateur
provisoire auprès de deux entités.
Il est difficile, à ce stade, d’apprécier l’impact de ces nouvelles
mesures de police administrative. L’ACP considère que la diversification
de la palette de ses instruments lui permet de mieux proportionner sa
réaction. La part relative des procédures disciplinaires pourrait être
amenée à diminuer dès lors que les mesures de police administrative sont
plus étoffées. De fait, l’ACP a prononcé, depuis sa création, nettement
plus de mesures de police administrative (11 mesures) que saisi la
commission des sanctions (7 saisines dont 3 concernent le même dossier),
ce qui reflète largement le choix de l’ACP d’agir principalement de
manière préventive. L’ACP souligne que les mises en demeure déjà
prononcées sont susceptibles d’aboutir à une saisine de la commission des
sanctions, si l’établissement poursuit ses mauvaises pratiques et n’a pas la
volonté d’y remédier. Une évolution de sa pratique en ce sens est
nécessaire pour assurer la pleine efficacité du dispositif de contrôle.
C - Des pouvoirs de sanction d’application trop
réduite
Les sanctions disciplinaires font partie de la politique de régulation
du superviseur. En raison de leur caractère dissuasif, elles participent
pleinement à la mission de prévention des risques prudentiels, d’anti-
blanchiment et de mauvaises pratiques commerciales. Lorsqu’elles sont
prononcées, elles ont valeur d’exemples.
86
COUR DES COMPTES
1 - Le renforcement de la sécurité juridique des procédures de
sanction
Dans ses précédents travaux
93
, la Cour avait appelé l’attention de
la Commission bancaire, de l’ACAM, du Premier ministre et du
Parlement, sur la nécessité pour la Commission bancaire et l’ACAM de
se
conformer
plus
complètement
aux
obligations
afférentes
à
l’organisation d’un procès équitable, à défaut de quoi la création d’une
commission des sanctions séparée du collège des autorités serait devenue
inévitable. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme
(CEDH) a confirmé ces observations. L’ACP dispose désormais d’une
commission des sanctions à l’instar de la situation qui, dès 2003, a
prévalu au sein de l’AMF.
a) La composition de la commission des sanctions
L’indépendance de la commission des sanctions passe, en premier
lieu, par l’incompatibilité des fonctions de membre de la commission des
sanctions avec celle de membre du collège. Les personnes mises en cause
peuvent également demander la récusation d’un des membres si son
impartialité est mise en doute.
Initialement l’ordonnance prévoyait que la commission des
sanctions comporte cinq membres ; ce nombre a été porté à six
94
par la loi
de régulation bancaire et financière en raison de la création de la fonction
de rapporteur au sein de la commission. Celui-ci instruit, met en forme et
présente les dossiers. Il ne participe pas au délibéré et garantit ainsi
l’impartialité et l’information complète de la commission des sanctions.
Les dispositions concernant le rapporteur devaient être applicables aux
procédures adressées à la commission à partir du 22 janvier 2011. Le
décret d’application n’ayant été signé que le 28 juin 2011, entre le
22 janvier et le 28 juin le collège n’a donc pas pu saisir la commission.
Cependant, cela ne concerne qu’un seul dossier.
93
Référés en date du 29 janvier 2008 et du 15 janvier 2009.
94
La commission des sanctions est composée de 6 membres : deux conseillers d’Etat,
un conseiller à la Cour de cassation, trois membres choisis (nommés par arrêté du
ministre de l’économie) en raison de leurs compétences dans les matières utiles à
l’exercice par l’Autorité de ses missions. Des suppléants sont nommés selon les
mêmes modalités.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
87
b) La procédure disciplinaire
La procédure disciplinaire, qui débute par la notification des griefs
au mis en cause par le président de la formation du collège agissant
comme autorité poursuivante, répond aux exigences du procès équitable
au sens de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des
droits de l’Homme (CESDH) : assistance du mis en cause par un avocat à
tous les stades de la procédure ; possibilité pour le mis en cause d’être
entendu par le rapporteur et la commission, de déposer des observations
écrites, d’accéder à la procédure et d’en avoir copie ; principe de publicité
des débats et des sanctions.
A la fin de la phase d’instruction, le principe du contradictoire est
assuré par la remise du rapport du rapporteur au mis en cause et au
représentant du collège désigné, qui peuvent chacun présenter des
observations. Le rapporteur dispose de pouvoirs très importants.
L’analyse plus complète de l’étendue de ces pouvoirs ne sera possible
qu’à la lumière de la pratique.
Rôle et pouvoirs du rapporteur
Le décret du 28 juin 2011 prévoit que le rapporteur « procède à toute
diligence utile », et en particulier aux auditions qui lui paraissent nécessaires.
Les
« diligences
utiles »
ne
sont
pas
détaillées,
mais
concernent
principalement la demande de production de pièces au mis en cause ou au
collège, par exemple les archives du contrôleur (c'est-à-dire des pièces
utilisées à l’appui du rapport) ou les précédents rapports de contrôle de
l’établissement. On peut également envisager que le rapporteur désigne un
expert sur des sujets très techniques afin d’éclairer la commission des
sanctions.
L’article R.612-38 du code monétaire et financier permet également
au rapporteur de saisir le collège s’il estime que les griefs doivent être
complétés ou sont susceptibles d’être notifiés à une ou plusieurs personnes
autres que celles mises en cause. Ce pouvoir de demander une extension de la
saisine de la commission des sanctions est très important, comparable à celui
du juge d’instruction sollicitant un réquisitoire supplétif du Procureur de la
République.
88
COUR DES COMPTES
L’article L. 311-4 du code de justice administrative (CJA), modifié
par l’ordonnance du 21 janvier 2010, prévoit désormais que le Conseil
d’Etat connaît en premier et dernier ressort des recours de pleine
juridiction des décisions de la commission des sanctions de l’ACP
95
. Si
celle-ci n’est pas une juridiction administrative dans l’ordre juridictionnel
français, elle n’en demeure pas moins un tribunal au sens de l’article 6 de
la CEDH, compte tenu de sa nature, de ses attributions et de la
« coloration pénale »
96
des sanctions qu’elle rend.
L’ordonnance a donc permis un alignement des voies de recours
contre les décisions des autorités indépendantes, notamment l’AMF
ent.
97
.
Les recours sont ouverts aux personnes sanctionnées, mais aussi au
Président de l’ACP. La première décision rendue par la commission des
sanctions de l’ACP à l’encontre d’un établissement de crédit a fait l’objet
d’un recours par l’établissem
c) La publicité de l’audience et des sanctions
Dans
ses précédents
travaux, la Cour
recommandait
que
l’anonymat des sanctions ne soit plus la règle mais l’exception. La loi de
régulation bancaire et financière pose le principe que la publicité de la
sanction et de l’audience est la règle.
S’agissant de la publicité de l’audience, le président de la
commission peut néanmoins, à la demande du mis en cause ou d’office,
interdire au public l’accès de la salle « dans l’intérêt de la moralité, de
l’ordre public, de la sécurité nationale ou lorsque la protection des secrets
des affaires ou de tout autre secret protégé par la loi l’exige ». En
pratique, dans les deux seuls cas (sur trois audiences) où la demande a été
formulée, le Président y a fait droit.
95
La compétence en premier et dernier ressort du Conseil d’Etat -par opposition à la
compétence d’appel- indique que la commission des sanctions de l’ACP n’est pas
considérée comme une juridiction administrative, à la différence de la commission
bancaire statuant en matière disciplinaire (article L.613-23 -abrogé- du Code
monétaire et financier prévoyait explicitement que la Commission bancaire statuant
en matière disciplinaire était une juridiction administrative), mais comme un
organisme collégial à compétence nationale.
96
Expression utilisée par la CEDH pour caractériser la nature des sanctions
prononcées par la Commission bancaire.
97
Pour mémoire : les décisions de l’AMF peuvent être déférées devant le Conseil
d’Etat ou la Cour d’appel de Paris selon la nature de l’affaire. Lorsque le recours est
présenté devant le Conseil d’Etat, il obéit, comme pour l’ACP, aux dispositions de
l’article L 311-4 du CJA.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
89
Concernant les décisions, celles-ci peuvent ne pas être publiées
pour des motifs sérieux tenant notamment au risque de perturbation grave
des marchés financiers ou si elles sont susceptibles de créer un préjudice
disproportionné pour l’établissement. Elles peuvent également être
publiées sans qu’il soit possible d’identifier l’établissement ou la
personne en cause. Depuis la mise en place de l’ACP, quatre décisions
ont été rendues. Toutes ont été publiées sur le site Internet de l’ACP.
L’une d’entre elles, en date du 26 mai 2011, l’a été sans possibilité
d’identification. La faculté de faire publier les décisions dans un journal
aux frais du sanctionné n’a pas été utilisée par la commission des
sanctions.
D’une manière générale, la restriction de la publicité des audiences
et des décisions de la commission des sanctions, qui peut dans certains
cas réduire l’efficacité de ces dernières, doit être prudemment utilisée.
2 - Une commission des sanctions trop peu saisie
Dans ses précédents travaux
98
, la Cour relevait que la politique de
sanction de la Commission bancaire et de l’ACAM était insuffisamment
dissuasive. Au-delà de la question du montant maximum des sanctions
pécuniaires autorisé, relevé depuis lors par la loi de régulation bancaire et
financière à 100 M€, la Cour soulignait que les autorités pouvaient faire
preuve de plus de sévérité dans leur politique de sanctions, en s’appuyant
sur le constat que le nombre de sanctions prononcées par la Commission
bancaire entre 2005 et 2009
99
, et l’ACAM entre 2004 et 2009 était faible
: moins de 10 par an pour la première, ce qui dénotait un fléchissement
par rapport à la situation antérieure, et entre 3 et 10 pour la seconde.
Pour les 16 premiers mois, la commission des sanctions a eu à
connaître de 7 saisines, dont 3 concernent le même dossier, soit un
volume inférieur à celui cumulé des sanctions de la Commission bancaire
et de l’ACAM sur une année. La signature tardive du décret d’application
de la loi de régulation bancaire et financière précisant la procédure devant
la commission des sanctions n’explique pas ce faible nombre.
L’analyse des saisines montre qu’elles ont concerné, en grande
majorité, de petites structures. Toutefois, la Commission a été saisie fin
2010 d’un dossier relatif à un grand établissement bancaire, dont
l’audience est prévue à l’automne 2011.
98
Insertion au rapport public annuel 2009 sur les autorités de régulation financière.
99
De plus de 20 sanctions par an, on est passé à moins de 10.
90
COUR DES COMPTES
Les décisions rendues par la commission des sanctions de l’ACP
Quatre décisions ont été rendues depuis la création de la commission
des sanctions. Toutes ont été rendues publiques.
- Décision du 10 janvier 2011 rendue contre un établissement de
crédit. Condamnation à un blâme et une sanction pécuniaire de 150 000 €
pour : non respect des règles de gouvernance (défaillance en matière de
contrôle permanent de la gestion), défaillance des procédures de contrôle
permanent et de contrôle périodique, défaut de séparation des fonctions
d’engagement et de validation, défaut dans l’examen de la conformité, défaut
du système d’information et de l’organisation comptable, défaut dans
l’appréciation du risque crédit, du risque de liquidité et des risques
opérationnels, non respect du règlement du Comité de la réglementation
comptable relatif au traitement comptable du risque de crédit, défaillance
dans le dispositif de lutte contre le blanchiment et le financement du
terrorisme.
- Décision du 28 février 2011 rendue contre trois courtiers d’assurance
pour manquement aux conditions de capacité professionnelle permettant de
gérer un cabinet de courtage d’assurance et manquement à l’information
auprès de l’ORIAS du changement de gérant, et prononçant l’interdiction de
pratiquer l’activité d’intermédiation pour 10 ans et une sanction de 10 000 € à
l’encontre de l’un, et un avertissement pour l’autre. Les manquements n’ont
pas été retenus à l’encontre du troisième courtier.
- Décision du 26 mai 2011 rendue contre l’établissement de crédit A.
Condamnation à un avertissement et à publication de la décision sous une
forme ne permettant pas l’identification de l’établissement pour : défaut de
séparation des fonctions d’engagement et de validation, défaut dans
l’organisation du contrôle interne, moyens du contrôle permanent et
périodique insuffisants au regard de la taille de l’établissement, défaut de
mise à jour de manuels de procédures, défaut d’une partie du dispositif de
lutte anti-blanchiment. Une partie des griefs notifiés n’a pas été retenue.
- Décision du 15 juillet 2011 rendue à l’encontre d’un organisme de
caution mutuelle. Condamnation à un avertissement et une sanction
pécuniaire de 20 000 € pour avoir méconnu l’obligation posée par l’article R.
336-1 du Code des assurances de « mettre en place un dispositif permanent
de contrôle interne (…) permettant [notamment] d’identifier, d’évaluer, de
gérer et de contrôler les risques liés aux engagements de l’entreprise (…) ».
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
91
Le faible nombre de sanctions peut provenir de la position de
l’ACP, qui comme la Commission bancaire et l’ACAM, privilégie la
prévention. Selon elle, les mesures de police administrative et les points
soulevés dans des lettres de suite
100
sont de nature à inciter les
établissements à modifier leurs pratiques davantage que la notification
d’une sanction. La mise en oeuvre de ces modalités serait plus efficace. Le
suivi de l’établissement est continu, l’évolution de sa situation est
examinée, et ce n’est qu’en cas de répétition de la défaillance que des
griefs conduisant à la saisine sont émis. Cette approche « d’escalade
graduée » est connue de la Cour qui l’avait déjà relevée dans son contrôle
antérieur sur la Commission bancaire. Néanmoins, elle avait fait
l’observation que la lettre de suites d’un contrôle sur place devait elle-
même faire l’objet d’un suivi rapproché, car le temps entre deux
inspections pouvait être long et les engagements de faire pris par les
établissements pouvaient ne pas être respectés. L’ACP indique dans sa
réponse que les lettres de suite font systématiquement l’objet d’un suivi
rigoureux par le secrétariat général dans le cadre du contrôle permanent,
une seconde enquête pouvant, le cas échéant, être diligentée en cas de
doute sur l’effectivité de la mise en oeuvre des mesures annoncées.
Toutefois, la Cour précise que sa recommandation de veiller à ne pas
laisser s’écouler des délais trop importants entre la lettre de suite et le
contrôle des mesures correctrices mises en place par l’établissement,
porte sur les délais entre deux inspections sur place, afin que le collège
soit en mesure de saisir la commission des sanctions dans des laps de
temps rapprochés par rapport aux fait initiaux.
Plus globalement, la frontière entre les manquements donnant lieu
à saisine de la commission des sanctions et ceux donnant lieu à un autre
type de réponse devrait être plus clairement définie
101
. C’est donc à une
100
Adressée par le secrétaire général de l’ACP, la lettre de suite est le document par
lequel l’ACP communique à l’établissement concerné le résultat du contrôle sur place
dont il a fait l’objet (article L. 612-27 du code monétaire et financier). Elle recense les
insuffisances ou manquements constatés et invite l’organisme à adopter, le cas
échéant, les mesures correctrices appropriées dont le détail doit être porté à la
connaissance du Secrétariat général.
101
Par exemple, lettre de suite du 18 janvier 2011 (adressée à un établissement de
crédit) présentée lors de la 40ème séance du sous collège sectoriel banque :
l’inspecteur « relève également de sérieuses lacunes, dont la plupart avaient pourtant
déjà fait l'objet de remarques lors d'une précédente mission sur place, tenant
principalement aux procédures d'entrée en relation, à la mesure et à la surveillance des
risques de crédit, ainsi qu'aux traitements comptables et prudentiels ». La précédente
mission sur place, en 2008, avait donné lieu à une sanction en 2009 sur certains
manquements à nouveau relevés lors du contrôle effectué en 2010, et qui, cette fois,
92
COUR DES COMPTES
doctrine de la saisine que le collège pourrait travailler afin de donner des
orientations au secrétariat général dans le cadre de son travail de contrôle.
De même, il conviendrait que le collège saisisse la commission des
sanctions dès lors que des manquements déjà relevés par le secrétariat
général lors d’un précédent contrôle sont répétés, même partiellement.
Cette dernière recommandation, qui ne méconnaît pas la nécessité de
proportionner les suites en fonction de la nature, de la gravité et du
périmètre des manquements constatés, y compris en cas de récidive, a
pour objectif de reconnaître le rôle de la commission des sanctions dans
l’appréciation de ces éléments pour décider ensuite des conséquences.
II
-
La mission relative à la préservation de la
stabilité financière
La réforme visait à doter la France d’une autorité de supervision
apte à surveiller les risques sur l’ensemble du secteur financier, dans une
perspective de stabilité financière.
Afin d’apprécier les modalités de mise en oeuvre de la réforme sur
ce point, la Cour a identifié les moyens déployés par l’ACP au titre du
contrôle prudentiel et les a mis en regard des sources d’instabilité
persistantes que l’ACP elle-même a relevées au sein des secteurs bancaire
et de l’assurance. En revanche, la demande de l’Assemblée nationale ne
portait pas sur l’évaluation de l’efficacité des actions de l’ACP.
A - Les points d’attention du superviseur
Malgré l’évolution favorable, en 2010, des résultats des principaux
groupes bancaires français et des sociétés d’assurance et des mutuelles
françaises, l’ACP a identifié des sources d’instabilité qui persistent et
imposent une vigilance de sa part :
la capacité des banques à se financer sur les marchés dans un
délai et à un coût raisonnable, qui reste un enjeu majeur de
stabilité financière dans un contexte de marché susceptible de
conduire à une raréfaction et/ou un renchérissement du coût des
nouvelles ressources ;
n’ont donné lieu qu’à une simple lettre de suites et à une mise en garde (mesure de
police administrative).
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
93
les risques liés à la dette souveraine et aux relations croisées
entre les émetteurs souverains dans plusieurs Etats membres et
le secteur financier européen ;
les risques liés au niveau et à l’évolution des taux. Une
faiblesse durable des taux d’intérêt peut conduire les banques à
s’engager
dans
des
opérations
plus
risquées
et
plus
rémunératrices.
De
fait,
certains
marchés
ont
été
particulièrement actifs en 2010 et au début de l’année 2011
reflétant un regain de l’intérêt des investisseurs pour le risque
(relance du marché de la dette spéculative
102
…). Une hausse
soudaine des taux pourrait conduire à une dégradation des
expositions des banques. Une remontée rapide des taux pèserait
sur la collecte et sur les rachats en assurance vie mettant ces
produits en concurrence avec des placements de court terme.
Les entreprises se trouveraient contraintes de vendre leurs actifs
obligataires avec des moins-values ;
le risque d’un ajustement significatif des prix de l’immobilier,
autre source potentielle de vulnérabilité. En effet, si le marché
immobilier devait se dégrader, la faiblesse des marges sur les
crédits immobiliers accordés par les banques pourrait ne pas
permettre de couvrir la hausse du coût du risque.
Les priorités de contrôle de l’ACP recouvrent largement ces zones
de vigilance auxquelles s’ajoutent le suivi des conséquences de la crise
financière et l’actualité réglementaire. Parmi les priorités de contrôle
définies pour 2011 par le Collège plénier de l’ACP figurent ainsi :
la préparation aux futures règles de Solvabilité II et de Bâle III ;
le suivi du redimensionnement et de l’encadrement des activités
de marché ;
le suivi de la situation des réseaux internationaux des grands
groupes
bancaires
et
la
poursuite
de
la
coopération
transfrontière (mise en place et participation aux collèges de
superviseurs) ;
l’appréciation du degré de résilience des assureurs vie dans un
contexte de taux bas (capacité à servir les rendements garantis,
accroissement de la prise de risque de crédit…) ;
102
On constate notamment le retour aux titrisations qui avaient fortement décru
pendant la crise de 2008.
94
COUR DES COMPTES
l’application des nouvelles réglementations (règles françaises
relatives
à
la
liquidité,
encadrement
des
« bonus »,
réglementation sur les infrastructures de marché, etc) ;
l’intensification du contrôle de la gouvernance, dans le cadre
actuel mais
également dans la perspective d’entrée en vigueur
de la directive Solvabilité II ;
l’approfondissement de la connaissance et la mise en place du
contrôle des nouveaux assujettis au contrôle de l’ACP
(mutuelles locales régies par le code de la mutualité,
antérieurement sous la responsabilité des préfets de région,
Caisse des dépôts et consignations, entreprises de micro-crédit,
établissements de paiement).
B - Le contrôle prudentiel : le suivi des conséquences de
la crise financière
1 - Les thèmes du contrôle prudentiel
a) Le secteur bancaire
En 2010, dans le cadre du contrôle permanent
103
, l’ACP a mené
plus
de
900
entretiens
approfondis
avec
les
représentants
des
établissements assujettis à son contrôle.
Elle a effectué un suivi particulier des conséquences de la crise
financière (conditions d’extinction de certaines activités de marché
développées par les établissements et qui ont fortement souffert de la
crise financière ; prise en compte des demandes de l’ACP en matière
d’évaluation et de maîtrise des risques, notamment en ce qui concerne le
suivi des opérations de marché ; risque de liquidité et conditions de
refinancement des établissements). L’ACP suit, par ailleurs, l’exposition
des établissements de crédit aux risques liés aux dettes souveraines.
Depuis la mi-2010, le
reporting
semestriel sur les engagements
internationaux a été complété par un
reporting
ad hoc mensuel des
103
L’ACP assure le contrôle du respect des dispositions législatives et réglementaires
applicables aux établissements assujettis à son contrôle par le biais du contrôle
permanent ainsi que par des missions de contrôle sur place. Les actions menées dans
le cadre du contrôle permanent s’appuient notamment sur les analyses des
déclarations comptables et prudentielles, les entretiens approfondis avec les
représentants des établissements et les échanges
dans le cadre de collèges de
superviseurs.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
95
principaux établissements de crédit mentionnant leurs expositions à
l’étranger, dont les émetteurs souverains. L’objectif a été d’assurer un
suivi plus rapproché des expositions sur les pays sensibles.
Les entretiens avec les grands établissements ont été intensifiés,
notamment sur le suivi des conditions de liquidité au 1
er
semestre 2010
lorsque les marchés ont traversé des périodes tendues.
Les enquêtes sur place réalisées pour le compte de l’ACP, en
application du programme d’enquêtes établi précédemment par le
secrétariat général de la Commission bancaire, ont été au nombre de 149
en 2010, contre 141 en 2009. Elles ont permis d’approfondir l’analyse des
effets de la crise sur le secteur bancaire, en abordant notamment les
thèmes suivants
104
:
les implantations à l’étranger d’établissements français (31
enquêtes) ;
la prise en compte par les établissements des recommandations
de l’ACP sur le suivi des opérations de marché (15 enquêtes) ;
le risque de crédit (26 enquêtes).
Comme l'avait fait le secrétariat général de la Commission
bancaire les années précédentes, l’ACP a réalisé des enquêtes sur
l’affacturage et le financement de l’habitat par voie de questionnaire
auprès des principaux établissements concernés.
104
En raison de la modification des activités bancaires et de l’amélioration ou
l’extension du périmètre des modèles internes de gestion, trois enquêtes ont, par
ailleurs, été menées sur l’application des règles prudentielles Bâle II.
96
COUR DES COMPTES
Le contrôle par l’ACP de l’application de réglementations récentes
-
L’arrêté du 14 janvier 2009 tirant les leçons des évènements
survenus à la Société générale
Depuis les contrôles sur place réalisés en 2008, qui avaient donné lieu
à l’envoi de lettres de suite, des travaux de suivi ont eu lieu chaque année tant
sur les recommandations émises que sur les plans ad hoc mis en place par les
grands groupes. Ces plans font l’objet d’entretiens de suivi rapproché avec le
secrétariat général de l’ACP.
-
L’arrêté du 19 janvier 2010 renforçant les systèmes de mesure et de
suivi des risques au sein des banques
Le secrétariat général de l’ACP a transmis aux établissements de
crédit une lettre décrivant les modifications à apporter au rapport annuel sur
le contrôle interne pour l’année 2011 afin d’intégrer des informations
concernant les nouvelles obligations imposées par l’arrêté mentionné ci-
dessus.
Des enquêtes sur place ont, le cas échéant, analysé en 2010 les
dispositifs de contrôle interne, qui ont été, par ailleurs, abordés lors des
entretiens menés par le secrétariat général de l’ACP avec les établissements
de crédit.
-
Dispositif
français
d’encadrement
des
rémunérations
des
professionnels de marchés (loi de régulation bancaire et financière, arrêtés
ministériels des 5 novembre 2009 et 17 décembre 2010)
En 2009, le secrétariat général de la Commission bancaire a mené
deux enquêtes sur les rémunérations des professionnels de marché, dont les
conclusions ont été communiquées au Ministre chargé de l’économie. Ces
enquêtes ont fait l’objet, en 2010, d’un suivi. Les services de contrôle
permanent de l’ACP se sont, également, assurés en 2010 (et actuellement en
2011) de la production par les établissements bancaires des rapports sur les
rémunérations prévus par la réglementation. Le sujet des rémunérations
constitue désormais un thème additionnel dans l’analyse des risques d’un
établissement par l’ACP. En 2011, l’ACP a adressé à la profession bancaire
un questionnaire sur les politiques et pratiques de rémunération.
Le rapport établi par l’ACP à partir des réponses à ce questionnaire
(intitulé «
Les pratiques récentes de rémunérations dans les grands
établissements bancaires en France ») a été présenté en collège restreint de
l’ACP du 29 juin 2011. Il inclut en annexe un comparatif des législations,
réglementations et pratiques dans les pays d’enregistrement des plus grandes
banques à caractère systémique : Etats-Unis, Royaume-Uni, Allemagne,
Suisse. Le SGACP prévoit de transmettre des lettres aux établissements ayant
complété les questionnaires.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
97
-
Les règles françaises relatives à la liquidité (arrêté du 5 mai 2009)
L’ACP a mené des travaux pour s’assurer de la préparation des
établissements au nouveau dispositif. En parallèle, un suivi spécifique de la
liquidité de certains établissements, notamment en période de crise a eu lieu.
Par la suite, les premières enquêtes de l’ACP ont été menées en 2010 en vue
de la validation des approches avancées telles qu’elles sont prévues par le
nouveau dispositif français entré en vigueur le 30 juin 2010.
Source : ACP
b) Le secteur de l’assurance
Dans le domaine des assurances, l’ACP a également effectué un
suivi particulier des conséquences de la crise financière :
examen des taux de revalorisation des provisions des assureurs
vie ;
suivi des risques souverains afin de mieux apprécier l’étendue
éventuelle des risques auxquels sont susceptibles de faire face
les organismes d’assurance français et les bénéficiaires de leurs
contrats dans la mesure où les organismes d’assurance
investissent généralement une partie substantielle de leur actif
sous forme d’obligations, notamment en provenance d’Etats
souverains ;
participation aux exercices des tests de résistance européens,
coordonnés par le comité européen des contrôleurs des
assurances et des pensions privées, puis, en 2011, par
l’EIOPA
105
.
L’ACP a également intégré, dans son dispositif de contrôle, les
organismes nouvellement assujettis à son contrôle direct, à savoir
notamment les mutuelles pratiquant des opérations d’assurance et régies
par le livre II du code de la mutualité (par exemple, les mutuelles de
santé)
106
. Il ressort des entretiens menés par la Cour avec des
105
Autorité européenne des assurances et pensions professionnelles (EIOPA en
anglais).
106
A l’inverse, les mutuelles relevant du livre III, qui gèrent des oeuvres sanitaires et
sociales, ne rentrent pas dans le champ de l’ACP, qui conserve néanmoins un droit de
suite auprès d’organismes liés à des organismes relevant de son contrôle (cas des
mutuelles et unions du livre III liées à des mutuelles et unions du livre II). Les
mutuelles du livre III relèvent désormais du contrôle du ministère du travail, de
l’emploi et de la santé.
98
COUR DES COMPTES
professionnels du secteur de la mutualité et leurs représentants que l’ACP
a pris en charge ce nouveau champ de compétence. Les craintes initiales
d’une absence ou d’une insuffisante prise en compte des spécificités du
secteur mutualiste au sein de la nouvelle autorité fusionnée se sont donc
estompées. Les professionnels du secteur de la mutualité soulignent,
néanmoins, la nécessité de proportionner les outils de contrôle
(notamment, reporting financiers et prudentiels) à la taille des organismes
concernés et aux risques réels qu’ils représentent.
c) Les conglomérats financiers
Les services de contrôle de l’ACP des secteurs de la banque et de
l’assurance ont maintenu, s’agissant des conglomérats, des contrôles
sectoriels en raison de la spécificité des lignes métiers. Cependant, ils
coordonnent désormais leur analyse sur la situation de ces conglomérats,
et notamment les opérations intragroupe (entre branche assurance et
branche banque des groupes de bancassurance). Ils ont, par ailleurs,
organisé des réunions avec des groupes de bancassurance pour
approfondir
la
connaissance
des
modalités
de
suivi
du
risque
« assurance » par la direction des risques « groupe » des conglomérats.
Ce dernier point a été relevé par certains professionnels comme une
évolution positive.
2 - Des contrôles sur place à accentuer
D’une manière générale, si les thèmes de contrôle évoluent en
fonction de l’actualité, la capacité quantitative des contrôles sur place est
stable depuis les dernières enquêtes de la Cour sur la Commission
bancaire et l’ACAM en 2007/2008. Ainsi, le nombre de contrôles sur
place sur les activités ou organismes d’assurance a été en 2010 à peu près
équivalent à celui de 2009 (37 en 2010, contre 39 en 2009). Pour le
secteur bancaire, le nombre est également quasi équivalent par rapport
aux années antérieures. Le resserrement de la vigilance sur la situation
des établissements impose un accroissement des contrôles sur place, à la
suite de la crise bancaire et financière.
Il convient de noter que, comme mentionné plus haut, les effectifs
en charge de ces contrôles (contrôle sur place bancaire, brigades de
contrôle assurance et direction des contrôles spécialisés et transversaux),
restés quasiment stables entre mars 2010 et mai 2011, devraient
progresser, en principe, de façon significative d’ici fin 2012, afin de
permettre à terme un renforcement du nombre des contrôles sur place. Ce
renforcement doit être accéléré.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
99
III
-
La mission de protection des clients et le
contrôle des pratiques commerciales
L’ordonnance de 2010 a été novatrice en confiant à l’ACP une
mission de contrôler les pratiques commerciales et de protéger les
clientèles dans son champ d’action qui a été dans le même temps
considérablement élargi à un ensemble de professionnels jusqu’alors non
assujettis au contrôle de la Commission bancaire. Comme la mission de
protection de l’épargne était déjà une mission légale confiée à l’AMF par
la loi de sécurité financière du 1er août 2003, il a été trouvé le moyen de
coordonner les deux autorités sur ce terrain et la loi a donc créé une
organisation originale appelée « pôle commun AMF/ACP ».
La Cour avait déjà souligné qu’une coordination du point de vue
de la protection de l’épargnant était nécessaire
107
, celui-ci étant confronté
à la fois à l’innovation financière des produits d’épargne et à une
asymétrie dans ses rapports avec les réseaux distributeurs. Elle avait
suggéré que l’AMF soit le coordonnateur principal des sujets relatifs à
l’épargnant. La loi n’a pas suivi cette voie en prévoyant une égalité
d’action entre l’AMF et l’ACP, chacune dans leur domaine de
compétence, charge à elles de concrétiser les actions communes au profit
des épargnants.
Concernant l’ACP proprement dite, un triple mouvement l’a donc
concernée : appréhender un large champ de produits et services financiers
et de professionnels distributeurs, contrôler les pratiques commerciales de
tous les réseaux distributeurs, travailler avec l’AMF dans le cadre du pôle
commun.
Concernant l’AMF, la révision de sa stratégie en 2009, un peu
antérieure à la mise en place de l’ordonnance, l’a tournée vers une
démarche plus approfondie de protection de l’épargnant.
Pour les besoins de la présente enquête sur les modalités de mise
en oeuvre de la nouvelle mission de l’ACP, la Cour l’a replacée dans le
cadre plus large des actions concernant l’épargne financière
108
et a
souhaité adopter une démarche plus évaluative en faisant part des
positions des acteurs et de celle des bénéficiaires. Compte tenu de la
création récente de l’ACP, la présente appréciation porte davantage sur
107
Insertion sur les autorités de régulation financière, rapport public de 2009.
108
Une évaluation en cours de la politique publique concernant l’assurance vie a
permis à la Cour d’aborder la thématique des contrats d’assurance vie.
100
COUR DES COMPTES
les moyens engagés et sur les problématiques qui surgissent dans le
domaine du contrôle.
A - La coordination avec l’AMF : acquis et
problématiques
Aux termes de l’article L.612-47 du code monétaire et financier
l’ACP et l’AMF « instituent un pôle commun chargé, sous leur
responsabilité, »
de
quatre
missions
dans
le
domaine
de
la
commercialisation des produits financiers et de la protection de la
clientèle :
coordonner les propositions de priorités de contrôle ;
analyser les résultats de l’activité de contrôle ;
coordonner la veille sur l’ensemble des opérations de banque
ou d’assurance et les services d’investissement et d’épargne et
surveiller les campagnes publicitaires ;
offrir un point d’entrée commun pour toutes les clientèles.
Le pôle commun est donc à la fois un mécanisme de coordination
entre les deux superviseurs en matière de contrôle et de veille publicitaire,
et un point d’entrée commun pour la clientèle.
1 - La coordination de deux autorités indépendantes
Le pôle commun est né du constat d’une imbrication croissante
entre les produits financiers (assurance-vie, crédits adossés à des
OPCVM…) et d’une distribution de toute la gamme des produits
financiers par les réseaux (guichets bancaires, certains intermédiaires
indépendants…). Le pôle commun a vocation à coordonner les moyens de
contrôle des produits et des professionnels de distribution, en évitant que
des zones demeurent non couvertes.
Une convention signée le 30 avril 2010 entre l’ACP et l’AMF a
précisé le dispositif. Le pôle commun est animé par un coordonnateur,
choisi en alternance dans le personnel de l’ACP et de l’AMF et nommé
pour deux ans. Le premier coordonnateur désigné est l’un des secrétaires
généraux adjoints de l’ACP. Le pôle commun ne dispose d’aucune
ressource propre. La coordination consiste à fixer des objectifs communs
en matière de contrôle et de veille que chaque autorité mettra en oeuvre
selon sa propre approche et sa réglementation. Depuis sa mise en place, le
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
101
pôle commun a permis le développement d’un dialogue nourri entre les
deux autorités
109
et plusieurs actions ont d’ores et déjà été engagées
conjointement ou concomitamment. Elles portent à la fois sur les produits
et sur une coordination des programmes de contrôle.
a) Les produits
Le champ des produits devant faire l’objet d’une coordination n’est
pas d’emblée défini car il doit concerner à la fois l’ACP et l’AMF. Un
travail d’élaboration de la cartographie des pouvoirs, du champ de
compétence et des procédures de contrôle des deux autorités a été
entrepris et a abouti au constat que le principal point de recoupement
entre les deux autorités se trouvait dans les instruments financiers
-principalement les OPCVM- susceptibles d’être commercialisés soit
directement dans les comptes titres ou les PEA commercialisés par les
banques, soit en tant que support des unités de compte commercialisées
dans des contrats d’assurance-vie en unités de compte. Pour d’autres
produits, leur qualification juridique, et par conséquent, l’identification de
l’autorité responsable de leur contrôle, a pu soulever des difficultés qui
ont été résolues ou sont en cours de traitement.
109
Notamment au cours des réunions mensuelles du Pôle commun auxquelles
participent la direction du contrôle des pratiques commerciales côté ACP, la direction
des relations avec les épargnants et la direction des contrôles côté AMF.
102
COUR DES COMPTES
Exemples de produits financiers faisant l’objet de coordination par le
pôle commun
Il existe des zones non couvertes par le contrôle de l’ACP et de
l’AMF, sur lesquelles le pôle commun a travaillé : la commercialisation de
parts de sociétés en nom collectif (SNC) dans le cadre d’investissements à
visée de défiscalisation. La part de SNC n’est pas un instrument financier au
sens de la loi ; la société qui commercialise n’entre pas forcément dans le
champ du contrôle de l’ACP. Pour autant, il s’agit bien de placements
financiers présentant un risque certain de mauvaise commercialisation.
Suite au développement sur Internet d’offres de produits spéculatifs
sur le marché des changes et compte tenu des risques spécifiques associés à
ces produits, la qualification juridique des opérations de change au comptant
avec effet de levier a également été au coeur des discussions du pôle commun
pendant plusieurs mois. La problématique était soit de considérer ces
opérations comme des instruments financiers, les faisant entrer dans le champ
des dispositions de la directive MIF
110
, et donc du contrôle de l’AMF, ou de
considérer qu’il s’agit d’opérations de change au comptant en raison de leur
dénouement en fin de journée avec un effet de levier qui est une opération de
crédit. Le pôle commun a réussi à faire adopter une position commune
AMF/ACP le 31 mai 2011 sur les opérations de change reportables (« Rolling
spot Forex »), en considérant ces produits comme des contrats d’instruments
financiers relevant ainsi des services d’investissement – donc de l’AMF– et
non des opérations de banque, et deux communiqués de presse communs en
juillet 2011.
De même, le pôle commun a pris des décisions concernant le
risque d’appréciation divergente entre le visa de l’AMF portant sur des
OPCVM et l’avis de l’ACP sur la non-conformité d’une publicité pour un
contrat d’assurance-vie en unités de compte intégrant ces mêmes
OPCVM. La solution a été que l’AMF transmettrait à l’ACP toutes les
publicités des produits sous jacents aux contrats dont le contrôle est de la
compétence de l’ACP.
110
La Directive « marchés d’instruments financiers » est entrée en vigueur le
1
er
novembre 2007. Elle prévoit, en matière d’investissement financier, un examen
précis par le professionnel des objectifs, de la situation financière, de l’expérience et
des connaissances du client.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
103
b) Les contrôles sur place conjoints
En 2010, l’AMF et l’ACP ont effectué trois contrôles sur place
conjoints impliquant des équipes communes
111
. Ces premiers contrôles
ont concerné des entreprises exerçant à la fois les activités de sociétés de
gestion de portefeuille et de courtiers en assurance, et ayant une activité
de production et de distribution d’OPCVM commercialisés directement
ou comme supports de contrats d’assurance-vie en unités de compte. En
2011, deux priorités de contrôle ont été fixées : la vérification de la bonne
application de la recommandation de l’ACP et de la position AMF sur les
produits complexes, et la meilleure connaissance de la chaîne de création
et de distribution des OPCVM, notamment quand ils sont diffusés dans le
cadre des contrats d’assurance-vie. Dix contrôles conjoints de conseillers
en investissement financiers/courtiers d’assurance-vie sont programmés
en 2011.
La coordination des programmes de contrôle conjoints entre
l’AMF et l’ACP se heurte parfois à des différences institutionnelles de
calendrier entre les deux autorités : le programme de contrôles est validé
annuellement à l’ACP alors que les contrôles à effectuer sont définis, à
l’AMF, par des comités de programmation qui ont lieu trois fois par an.
Des points positifs sont à souligner comme les entretiens en
commun et le choix de dossiers transversaux.
En l’état, le code monétaire et financier ne prévoit pas la possibilité
que les contrôles communs donnent lieu à rédaction d’un seul rapport
commun à l’ACP et l’AMF. Les équipes de l’ACP et de l’AMF
établissent donc des rapports distincts dans le cadre de leurs compétences
respectives. Chaque collège décide ensuite seul des suites qu’il entend
donner au rapport qui lui est présenté. Les rapports et les suites sont
adressés au coordonnateur du pôle commun. Si les suites sont débattues
lors des réunions du pôle commun, chaque autorité conserve ses
prérogatives. Les professionnels rencontrés par la Cour lors de son
enquête n’ont cependant pas fait part de difficultés particulières qui
seraient liées à la mise en place de ces contrôles conjoints ou à l’existence
de deux rapports de contrôle distincts.
111
Selon la convention AMF/ACP sur le pôle commun, les contrôles communs
ACP/AMF peuvent prendre trois formes : désignation d’un seul contrôleur commun
par les deux entités, ou création d’une équipe commune composée des contrôleurs
ACP et AMF, ou participation ponctuelle de l’AMF ou de l’ACP à des contrôles
effectués par l’autre organisme
.
104
COUR DES COMPTES
2 - Le maintien de conceptions différentes dans la surveillance des
pratiques commerciales
La coordination ne signifie pas harmonisation complète des
positions
des
deux
autorités.
D’une
part,
les
différences
de
réglementations applicables aux secteurs supervisés conduisent les
autorités à respecter leur propre champ de compétence. D’autre part, le
modèle
d’action adopté par l’ACP ne ressemble pas à celui de l’AMF.
a) Les différences de cadre réglementaire
Ce point est illustré par l’action concrète qui a porté sur la
commercialisation des contrats d’assurance vie en unités de compte
constituées d’instruments financiers dits « complexes »
112
où l’ACP a
adopté une « recommandation » et l’AMF une « position ».
Les deux autorités ont certes partagé le même objectif de prévenir
le risque de commercialisation inadaptée de ce type de produits, mais des
raisons juridiques
113
et les différences dans leurs instruments et leurs
pouvoirs
114
expliquent qu’elles ont pris position chacune pour ce qui la
concerne.
112
La recommandation de l’ACP et la position de l’AMF concernent les OPCVM de
droit français à formule visés à l’article R. 214-27 du code monétaire et financier ; les
OPCVM structurés de droit étranger équivalents ; les titres de créance complexes et
les titres financiers équivalents émis sur le fondement de droits étrangers, à
l’exclusion des warrants simples, ces derniers étant définis comme des produits
structurés sous forme de bons d’option cotés (en continu) sur un marché réglementé
ou un système multilatéral de négociation, donnant le droit (et non l’obligation)
d’acheter ou de vendre un actif choisi, à un prix fixé dès l’émission et pendant une
période déterminée.
113
Référence au cadre juridique issu de la directive marchés d’instruments financiers,
d’un côté, et de la directive sur l’intermédiation en assurance, de l’autre.
114
L’AMF a un pouvoir d’agrément préalable qui n’existe par au niveau de l’ACP
pour l’assurance vie.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
105
Illustration des différences de pouvoir : la position de l’AMF et la
recommandation de l’ACP sur les instruments financiers
particulièrement complexes
La position de l’AMF demande, s’agissant des instruments financiers
complexes pour lesquels l’AMF considère que le distributeur ne pourra pas
s’assurer que le client comprenne le produit et mesure les risque qu’il prend
s’il y souscrit, que soit indiqué sur tout support de commercial de tels
produits : «
l’AMF considère que ce produit est trop complexe pour être
compris par des investisseurs non professionnels et n’a dès lors pas examiné
les documents commerciaux ».
De son côté, la recommandation de l’ACP impose au professionnel de
fournir de manière compréhensible dans tous les documents remis au
souscripteur les informations lui permettant de comprendre la nature de
l’unité de compte, ainsi que les risques encourus ; d’être en mesure de
justifier auprès de l’ACP des moyens mis en oeuvre pour permettre au
souscripteur de comprendre que l’unité de compte proposée constitue un
placement risqué ; de recueillir par tout moyen approprié la preuve que le
souscripteur comprend la nature du support proposé et de donner des
informations exactes, claires et non trompeuses au sujet de risques de perte.
Au-delà des différences de réglementations, la position de l’AMF
et la recommandation de l’ACP reflètent également un souci un peu
différent quant à la protection de la clientèle. Dans le cas cité plus haut,
les deux autorités ont fixé quatre critères de complexité communs
115
.
Néanmoins, chaque autorité a ajouté un critère complémentaire
spécifique :
l’ACP a estimé que sa recommandation s’appliquait aux
produits « n’offrant pas
sur la durée de vie
de l’instrument
financier une protection du capital d’au moins 90 % du capital
investi » ;
115
Mauvaise présentation des risques et du profil de gain/perte de l’instrument
financier ; caractère inhabituel pour le souscripteur/adhérent de l’instrument financier
en raison du ou des sous-jacents utilisés ; profil de gain/perte assujetti à la réalisation
concomitante de plusieurs conditions sur au moins deux classes d’actifs ; nombre de
mécanismes compris dans la formule de calcul du gain ou de la perte de l’unité de
compte.
106
COUR DES COMPTES
l’AMF a considéré que sa position trouvait à s’appliquer pour
les instruments financiers «
offrant à l’échéance une protection
du capital inférieure à 90 % du capital initial
».
Ces critères spécifiques s’expliquent, selon l’ACP, par la nature du
public concerné par l’assurance vie qu’elle considère moins informé que
celui possédant un compte de titres composé d’instruments financiers
complexes, et qui, à ce titre se doit d’être mieux protégé
116
. Il faut ajouter
à cela les spécificités du contrat d’assurance-vie
dont le dénouement peut
intervenir avant l’arrivée à maturité de l’instrument financier servant de
support, notamment en cas de décès de l’assuré.
L’objectif des deux autorités est d’agir en amont des problèmes,
c'est-à-dire dès que les premières vagues de produits potentiellement
problématiques sont offertes à la commercialisation. Les premiers travaux
du pôle commun sur les produits ne concernent pas la majorité des
épargnants. Les contrats en unités de compte sont une partie minoritaire
de l’épargne investie en assurance vie, soit environ 13 % d’un montant de
1 375 Md€ d’épargne en assurance vie, et parmi les formules de contrats
en unité de compte commercialisés, celles qui font appel aux produits dits
complexes ne sont pas non plus les plus nombreux. Toutefois,
l’orientation de l’assurance-vie, que la Cour a l’occasion d’examiner
concomitamment à la présente enquête, montre que la vente de contrats
en unités de compte pourrait s’accélérer dans l’avenir. C’est donc à bon
droit que le pôle commun s’est penché sur une question difficile dans
l’intérêt de l’investisseur.
b) Les différences dans le modèle d’action
Plus globalement, l’ACP et l’AMF ont adopté un positionnement
différent.
Le positionnement de l’AMF
L’AMF s’est orientée vers une proximité avec les épargnants. Sa
direction de la relation avec les épargnants, qui exerce, comme l’ACP, la
veille sur les produits et les publicités, comprend un service de médiation
chargé de recueillir les réclamations qui n’ont pas pu aboutir auprès des
services réclamations des établissements. Elle s’est engagée dans des
116
Le rapport du pôle commun mentionne à cet égard que « s’il est parfois
particulièrement difficile de comprendre la formule de rendement à échéance de
certains produits financiers, il est encore plus difficile de comprendre ce qui se passe
en cas de sortie anticipée, avant l’échéance du produit, ce qui a conduit l’ACP à
exiger une attention particulière sur les rachats avant terme ».
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
107
campagnes de visites mystère et a entrepris de renforcer les actions de
formation et d’information des épargnants.
Fonctionnement des visites mystère
Les « visites mystères » sont effectuées par un organisme indépendant
mandaté à cet effet. En 2010, l’AMF a engagé deux campagnes de « visites
mystère ». Chacun des dix plus grands établissements bancaires français fait
l’objet du contrôle de dix de ses agences dans dix villes différentes (onze
pour la deuxième campagne). Les visiteurs simulent le comportement de
prospects en situation de demande de conseil selon un scenario préparé par la
DREP de l’AMF (direction des relations avec les épargnants).
Ces visites constituent un moyen pour l’AMF de vérifier les pratiques
de commercialisation des produits financiers en agence. Elles ne sont pas
ultérieurement des sources de contrôle, l’anonymat des agences visitées étant
d’ailleurs préservé par l’institut d’audit.
Les résultats de ces visites ont fait l’objet d’échanges avec les
professionnels concernés afin de les sensibiliser aux problèmes relevés. Le
principe de ces visites, accueillies avec réticence dans un premier temps, a
fait l’objet de retours plutôt positifs de la part des établissements concernés
qui ont pu bénéficier d’une évaluation, sans visée disciplinaire, du
fonctionnement de leur réseau.
Par ailleurs, le collège de l’AMF
a émis un rapport sur
« l’indemnisation des préjudices subis par les épargnants et les
investisseurs »
117
qui a été soumis à consultation publique le 25 janvier
2011. Il comprend quatre axes : le développement des procédures
amiables, la prise en compte de l’indemnisation des victimes, la mise en
place d’une action collective en droit français, la contribution de l’AMF
en tant qu’expert pour l’évaluation du préjudice.
Le positionnement de l’ACP
L’ACP a mis l’accent sur ce qu’elle considère comme un axe
prioritaire : le contrôle des moyens mis en place par les établissements.
Sa direction du contrôle des pratiques commerciales comprend, à
la date de l’enquête, 65 personnes dont un tiers appartenaient à l’ACAM.
De nature transversale, elle effectue des contrôles tant sur le secteur
bancaire que sur celui des assurances. La différence avec son homologue
à l’AMF provient de ce qu’elle n’est pas une direction de « relations »,
117
Groupe de travail présidé par MM. Delmas-Marsalet et Ract-Madoux.
108
COUR DES COMPTES
mais de « contrôle » du respect des règles de protection de la clientèle
et
des moyens mis en place par les établissements pour atteindre l’objectif
de protection de la clientèle
118
.
D’emblée, l’ACP a considéré que les actions qui ont été
développées par l’AMF
comme l’appui à la formation du grand public, le
recours à des investigations ou des achats anonymes dans les réseaux
bancaires ou les intermédiaires ou la médiation ne relèvent pas de son
coeur de métier. Compte tenu de l’étendue du champ des produits et
services qui relève de sa responsabilité (ensemble des services bancaires
et d’assurance) et de ses moyens humains limités, l’ACP a estimé
préférable ne pas disperser son action afin de se centrer sur sa mission
principale de contrôle.
Ce positionnement est clairement assumé par l’Autorité de contrôle
prudentiel. Elle a émis des réserves sur les effets de la méthode des visites
mystère et ne souhaite pas investir le champ de la médiation. Elle a
toutefois mis en place de nombreux instruments de veille des pratiques
commerciales :
suivi
des
nouveaux
produits
et
des
campagnes
publicitaires, analyse des réclamations, relations avec les associations de
consommateurs et les médiateurs.
S’agissant de la conduite de visites mystère dans les établissements
distributeurs de produits, l’ACP souligne qu’il paraît difficile d’en tirer
des enseignements utiles en raison des limites méthodologiques (taille
restreinte de l’échantillon, biais lié au fait que les visiteurs-mystère ne
peuvent être par construction que des nouveaux clients…), et de
l’exploitation des résultats, tant sur le plan purement informatif que sur le
plan procédural, qui apparaît délicate pour une autorité de contrôle.
De même, l’ACP n’est pas favorable à la mise en place d’une
médiation en son sein. Elle souligne que sa mission est de vérifier le
respect des règles de protection de la clientèle mais non de favoriser un
accord amiable entre les parties. En outre, la Banque de France est
impliquée dans le comité de la médiation bancaire (elle assure le
secrétariat de ce comité qui est présidé par le gouverneur) qui supervise
l’ensemble du dispositif de médiation bancaire français développé en
France très progressivement à partir de 1998
119
. En matière d’assurance,
la désignation d’un médiateur dans les organismes n’est pas obligatoire,
mais les assurés
peuvent recourir au médiateur de la Fédération française
118
Le contrôle de la commercialisation des produits financiers est intégré à la
Direction du contrôle à l’AMF.
119
Sous l’influence d’une recommandation de la Commission européenne du 3 mars
1998, puis de la Loi Murcef du 11 décembre 2001.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
109
des sociétés d’assurance (FFSA) ou du Groupement des entreprises
mutuelles d’assurances (GEMA). Dans ce contexte, le positionnement du
médiateur de l’ACP par rapport aux autres médiateurs ne serait pas
évident, et il pourrait en résulter une certaine confusion pour le
consommateur.
Enfin, si l’ACP estime que la formation du grand public n’entre
pas dans le rôle du superviseur, elle a, cependant, engagé diverses actions
en faveur de la formation des professionnels des secteurs de la banque et
de l’assurance
120
.
L’information des professionnels et du public passe
également par les recommandations qu’elle émet.
Comme la réforme a organisé un diptyque d’autorités qui ont
désormais la même légitimité légale d’oeuvrer pour la protection de la
clientèle financière, chacune dans leur champ de compétences, la
divergence des méthodes adoptées traduit la culture propre à chacune des
autorités. L’ancienne Commission bancaire était exclusivement un
superviseur prudentiel tandis que l’ACAM était davantage en prise avec
l’assuré et estimait devoir exercer un contrôle global sur le secteur.
L’AMF a un objectif général de protection de l’épargne dans le champ
soumis à son contrôle. Les orientations observées tant à l’AMF qu’à
l’ACP traduisent ainsi une complémentarité reposant sur des méthodes
qui ne font pas double emploi et qui correspondent au modèle dominant
de chaque autorité.
Toutefois, du point de vue du client, multi-détenteur de services
bancaires, d’assurance et d’épargne, il est probable que les subtilités
d’équilibre entre les deux autorités ne puissent être comprises, au regard
des problèmes récurrents que rencontrent les usagers des banques. L’ACP
devrait donc être conduite à élargir son positionnement actuel. Dans ce
cas, il serait souhaitable qu’elle s’appuie plus fortement sur le pôle
commun. Par exemple, les visites mystères ou les actions d’information
envers les professionnels pourraient être mutualisées. Le pôle commun
pourrait prendre en charge davantage les demandes de terrain des
associations de consommateurs qui ne relèvent pas exclusivement de
considérations de contrôle prudentiel.
120
Participation à des séminaires de sensibilisation ou de formation des
professionnels, organisation d’une conférence annuelle destinée aux professionnels de
la banque et de l’assurance, ainsi qu’aux journalistes de la presse spécialisée pour
présenter l’action de l’ACP en matière de contrôle des pratiques commerciales ;
démarches entreprises par l’ACP, conjointement avec l’AMF, vis-à-vis de l’Education
nationale et des universités pour inclure dans les programmes de formation des futurs
professionnels des modules sur la protection de la clientèle.
110
COUR DES COMPTES
La question d’une pluralité d’intervenants pour les questions de
protection des consommateurs dans le domaine financier pourrait de
nouveau se poser si le pôle, dont l’activité devra être évaluée plus
complètement, n’apparaît pas comme le lieu d’une action concertée
globale. Outre les différences de positionnement des deux autorités
concernées, le recouvrement possible des sujets traités par le comité
consultatif du secteur financier (CCSF) et par la commission consultative
« pratiques commerciales » de l’ACP, la nécessité d’inclure dans la
coopération la DGCCRF, sont apparus au cours de l’enquête de la Cour.
Le pôle commun devrait, en effet, pouvoir se coordonner avec la
direction générale de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes en ce qui concerne particulièrement les domaines
de la veille publicitaire et des pratiques commerciales
121
, l’ACP
partageant d’ailleurs avec la DGCCRF des compétences concurrentes sur
le livre Ier du Code la consommation. Cette coordination suppose
toutefois la création d’un secret partagé entre les deux autorités et la
DGCCRF, qui n’est pas encore inscrit dans la loi. La vocation de la
DGCCRF de traitement des litiges individuels est différente de la mission
de protection des clientèles confiée aux superviseurs qui doivent identifier
les comportements à risque sur une base globale. Ces missions différentes
et complémentaires nécessitent une collaboration organisée, permettant
une répartition des tâches et garantissant la pleine efficacité du dispositif.
3 - Le point d’entrée « Assurance-Banque-Epargne Info service »
Principale innovation du pôle commun, le point d’entrée commun
« Assurance-Banque-Epargne Info Service » (ABE Info Service) a été
mis en place le 28 juin 2010. Ce service aux particuliers comprend un site
Internet
122
et un accueil téléphonique qui informent et orientent le public
en mettant à sa disposition des informations générales concernant les
produits, contrats et services financiers ainsi que les démarches à
entreprendre en cas de litiges. Une adresse postale est également à la
disposition du public.
121
Discours du ministre à l’occasion de l’installation de l’ACP: « C’est pourquoi j’ai
voulu la création d’un pôle commun à l’Autorité de contrôle prudentiel et à l’Autorité
des marchés financiers chargé de développer et de coordonner l’action des autorités
en matière de contrôle de la commercialisation. Il constituera également un point
d’entrée pour les demandes des consommateurs. Je veux que - fort de l’expérience de
l’AMF et de l’ACAM - ce pôle développe de véritables politiques et un savoir-faire
français en matière de contrôle des pratiques de commercialisation en coordination
avec la DGCCRF ».
122
www.abe-infoservice.fr.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
111
Ce point d’entrée commun a été mis en place à partir d’une
plateforme téléphonique préexistante au sein du réseau Banque de France,
qui répondait déjà aux questions relevant de la Banque (informations sur
les fichiers d’incidents, surendettement, droit au compte…) et a été
étendue à celles relevant des attributions de l’ACP et de l’AMF.
L’utilisation d’une structure préexistante a permis la mise en place rapide
d’un point d’entrée commun.
Le bilan que l’on peut en tirer montre quelques défauts de jeunesse
mais aussi que ce service n’ôte pas la responsabilité de traiter au fond les
réclamations des clients.
Les quelques difficultés de démarrage et de montée en charge ont
été les suivantes :
il y a eu des difficultés de mise en place, liées à une préparation
insuffisante du personnel de la Banque qui s’est traduite par
une saturation fréquente du serveur au niveau de la Banque de
France et de nombreux appels transférés directement de la
plateforme vers l’ACP et l’AMF aux heures de pointe. Ce
phénomène est en voie de diminution depuis le mois de janvier
2011 ;
le taux de traitement des appels (appels répondus/appels
entrants) sur l’ensemble de la plate-forme est seulement de
80 % en moyenne depuis la mise en place du dispositif. Or, sur
l’ensemble des appels traités quotidiennement, moins de 10 %
seulement concernent spécifiquement les assurances et les
produits financiers. La mise en place du point d’entrée commun
ABE Info service n’a donc pas entraîné en principe une
augmentation trop sensible des appels des plateformes de la
Banque. Or, malgré cette augmentation mesurée, le taux
d’appel traité parait refléter une difficulté à répondre à
davantage d’appels entrants. Dans l’hypothèse où le nombre
d’appels entrants augmenterait de manière sensible, la Banque
de France devrait réexaminer l’organisation d’ensemble. En
janvier 2011, mois qui a enregistré une augmentation
exceptionnelle avec 2 200 appels par jour en moyenne sur
l’ensemble de la plate-forme, seuls 66% de ces appels ont pu
être traités ;
l’objectif du point d’entrée commun qui est aussi que les
autorités connaissent les sources des problèmes des clients est
imparfaitement atteint. En effet, après chaque appel, les agents
de la Banque de France ont une minute pour remplir un
questionnaire de qualification de l’appel. Ce remplissage n’est
112
COUR DES COMPTES
toutefois pas obligatoire, ce qui fait perdre une partie du retour
sur les questionnements des particuliers. Par ailleurs, les appels
sur les sujets bancaires sont toujours traités au niveau des
succursales, alors que sur les thématiques assurances, la
plateforme de la Banque transfère à l’ACP les questions les
plus délicates, auxquelles les agents de la Banque ne peuvent
répondre sur la base des fiches-type dont ils disposent. La
connaissance par l’ACP des thématiques d’appels bancaires les
plus fréquentes gagnerait à être affinée.
Fonctionnement du point d’entrée ABE Info Service
13 succursales de la Banque de France traitent les appels reçus au titre
de la Banque, de l’AMF et de l’ACP. 18 EATP en heures pleines
123
sont
affectés pour répondre aux 1 200 à 1 400 appels quotidiens. 6 d’entre elles
traitent plus spécifiquement les appels relatifs aux domaines couverts par
l’ACP ou l’AMF. Les agents de la Banque de France ont bénéficié d’une
formation de trois jours (deux jours pour l’assurance et un jour pour les
produits financiers).
Les opérateurs répondent au moyen de fiches techniques préparées par
l’ACP et l’AMF. Dès que les opérateurs ne savent pas répondre, ils renvoient
l’appel vers l’ACP ou l’AMF selon un principe « d’escalade ». L’ACP et
l’AMF reçoivent également les appels « en débordement », en cas de
saturation du serveur de la Banque de France (l’appel est dit « débordé » au
bout de 40 secondes) mais aussi des appels directs. Ces appels directs
représentent la majorité des appels reçus par les superviseurs, ensuite
viennent les appels en débordement. 4 EATP à l’AMF (AMF Epargne Info
Service) et 3 EATP à l’ACP (Assurance Info Service)
sont affectés à cette
mission.
Les opérateurs d’Assurance info-service à l’ACP, juristes exerçant au
sein du service Informations et Réclamations, traitent les questions plus
complexes renvoyées par la Banque de France sur le fonctionnement des
contrats d’assurance. Les questions les plus fréquemment posées à
Assurance-Info Service concernent le délai de rétractation en assurance, les
refus d’assurance et le délai de versement d’une assurance-vie.
Les questions renvoyées vers l’AMF concernent l’habilitation des
intermédiaires financiers, les vérifications à effectuer avant un investissement
en OPCVM, et les questionnaires issus de la directive MIF.
123
Heures pleines de 9h à 12h et de 13h à 17h, le service étant ouvert de 8h à 18
heures.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
113
B - Une montée en charge progressive des missions de
protection de la clientèle
La direction du contrôle des pratiques commerciales (DCPC) a été
créée pour répondre à cette nouvelle mission et a pu être construite à
partir du département du droit des contrats et des relations avec les
assurés qui existait à l’ACAM. Elle s’est étoffée et a mis en place
progressivement des outils. Certains aspects de son action ont fait l’objet
d’une appréciation par les associations de consommateurs ou les
professionnels rencontrés au cours de l’enquête et leurs réflexions
peuvent être utiles à la poursuite de l’enrichissement des résultats de la
direction. Les outils et les méthodes de la DCPC ont trait principalement
à trois grands domaines.
1 - Le traitement des réclamations
Le service Information et Réclamations de l’ACP reçoit et analyse
les réclamations qui lui sont adressées par courrier, courriel ou qui lui
arrivent par la plateforme téléphonique ABE.
Typologie des réclamations écrites reçues par l’ACP
L’ACP en a reçu 3 500 en 2010 et 920 depuis début 2011. En matière
bancaire, elles portent essentiellement sur la tenue de compte, les crédits, les
moyens de paiement et les produits d’épargne. Côté assurance, les
problématiques soulevées sont : le refus d’indemnisation, des difficultés dans
la gestion du contrat, et la contestation du montant des frais ou des primes.
Source : ACP
L’ACP oriente les réclamants vers les instances appropriées
(services de réclamations internes, services de médiation, commission de
surendettement) mais n’intervient pas dans les litiges individuels, sauf en
cas de violation flagrante de la loi ou de dysfonctionnement du service de
réclamation de l’établissement ou de l’organisme
124
. La prévention des
litiges par la surveillance des dispositifs des établissements est
privilégiée, par rapport à des réponses aux réclamations immédiates de la
clientèle.
Selon l’ACP, une intervention au niveau des procédures et des
dispositifs est plus efficace et couvre un champ massif de clientèle. La
124
L’ACP formule alors une demande de précision ou de pièces à l’établissement mis
en cause.
114
COUR DES COMPTES
convergence de réclamations constitue, par ailleurs, un faisceau d’indices
en vue d’orienter les priorités de contrôles futurs sur les établissements.
Une base de données permet de recenser les réclamations et les suites qui
y sont apportées. Un projet de recommandation était, à la date de
l’enquête, à l’étude sur la manière dont devraient fonctionner les services
de traitement des réclamations dans les établissements. Ceux-ci vont faire
l’objet de contrôles in situ -7 dans les entreprises d’assurance, 3 dans le
secteur bancaire-
en 2011.
L’appréciation d’un positionnement optimal de l’ACP vis-à-vis des
réclamations qui lui sont adressées comme une sorte de recours du client
est délicate :
l’AMF ne traite pas non plus toutes les réclamations au fond, le
dispositif de médiation étant destiné avant tout à une mise en
relation amiable, sans interférence en principe du tiers AMF ;
ensuite, le nombre des réclamations connues sur la base de
celles que prenait en charge l’ACAM inviterait au réalisme.
L’ACAM avait reçu 4 112 réclamations et avait traité 3 657
litiges individuels en 2009. L’ACP a été destinataire d’un
nombre à peu près équivalent en 2010, ce qui risque de
représenter une charge lourde par rapport à ses autres priorités ;
en revanche, la pression consumériste est une dimension à
prendre en compte et les voies d’intermédiation font partie de la
gestion des conflits : pour les consommateurs, l’ACP est une
autorité indépendante des intérêts professionnels.
Pour concilier ces différents éléments et en l’absence de
l’instauration d’une médiation spécifique à l’ACP, il serait important que
le contrôle exercé par l’ACP sur cette dimension dans les organismes
trouve rapidement une visibilité et, le cas échéant, se traduise par des
sanctions en cas de défaillance caractérisée du contrôle interne des
établissements. Le renforcement du cadre juridique et des obligations des
établissements en la matière, auquel l’ACP s’emploie notamment par la
rédaction d’un projet de recommandation sur le fonctionnement des
services de traitement des réclamations, constitue une étape qu’il
importerait de franchir dans un délai suffisamment rapproché.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
115
2 - L’utilisation de la recommandation
Les cinq recommandations déjà émises par l’ACP
125
concernent,
pour quatre d’entre elles, des thématiques liées à l’assurance, et plus
particulièrement aux produits d’assurance vie en unités de compte.
L’ACP reconnaît que ces produits ne concernent pas nécessairement un
grand nombre de souscripteurs
126
. Elle souligne néanmoins que ces offres
de produits complexes témoignent de risques sur le canal de distribution
de l’assurance-vie, qui est le placement financier le plus important dans le
patrimoine des français (1 375 Md€ d’actifs placés en 2010, l’assurance-
vie représentant 40 % des actifs financiers détenus par les français).
La prépondérance en 2010 des thématiques liées à l’assurance
reflète en grande partie l’héritage du département du droit du contrat et
des relations avec les assurés de l’ex-ACAM, et la progressive montée en
puissance de la nouvelle direction dans le domaine bancaire
127
. La
recommandation de l’ACP sur la gestion par les établissements de crédit
des comptes mandants de syndics de copropriété a, ainsi, été formulée à
la suite d’un contrôle sur place. Dans certains cas, le choix de
thématiques liées à l’assurance résulte également de la nécessaire
coordination avec l’AMF dans le cadre du pôle commun. Ainsi,
s’agissant de la commercialisation des contrats d’assurance sur la vie en
unités de compte constituées d’instruments financiers complexes, un
projet de position avait d’abord été élaboré au sein de l’AMF et soumis à
un premier examen de son collège (été 2010), suivi d’un travail de
coordination dans le cadre du Pôle commun AMF-ACP (été 2010) qui a
conduit l’ACP à formuler une recommandation, publiée simultanément
avec la position de l’AMF le 15 octobre 2010.
L’utilisation de la recommandation nécessite des réglages. Certains
professionnels rencontrés au cours de l’enquête ont souligné la difficulté,
125
Thèmes des recommandations de l’ACP : la commercialisation des contrats
d’assurance vie en unités de compte constitués d’instruments financiers complexes, la
commercialisation de contrats d’assurance vie en unités de compte constituées de
titres de créances émis par une entité liée financièrement à l’organisme d’assurance,
les communications à caractère publicitaire des contrats d’assurance vie en unités de
compte composées de titres obligataires et autres titres de créance, la gestion par les
établissements de crédit des comptes mandants de syndics de copropriété et la
commercialisation des contrats d’assurance vie liés au financement en prévision
d’obsèques.
126
Les fonds placés en assurances-vie sur des fonds en euros représentent 93 % des
fonds placés en assurance vie.
127
La recommandation sur les conflits d’intérêts lors du placement de titres
obligataires de la maison-mère a également vocation à s’appliquer aux banques.
116
COUR DES COMPTES
voire l’impossibilité, d’appliquer, notamment le point 5.5 de la
recommandation
portant
sur
la
commercialisation
des
contrats
d’assurance vie en unités de comptes constituées d’instruments financiers
complexes, qui impose au professionnel de recueillir par tous moyens la
preuve que le souscripteur/adhérent comprend la nature du support
proposé comme unité de compte ainsi que les risques afférents. Si les
professionnels peuvent justifier de la mise en oeuvre effective de leur
obligation de moyens, il apparaît effectivement difficile de rapporter la
preuve que le client a compris. L’ACP souligne, sur ce point, qu’un
établissement peut toujours adopter une pratique différente de celle
qu’elle recommande dès lors que cette pratique aboutit au même objectif
de protection des intérêts de la clientèle.
3 - Les outils de la surveillance des pratiques commerciales
La surveillance des pratiques commerciales s’exerce par des
contrôles et une veille sur les nouveaux produits.
a) Le contrôle sur pièces
L’ACP analyse les informations adressées par les établissements et
les organismes en matière de pratiques commerciales, qui sont tenus de
rédiger une annexe nouvelle à leur rapport sur le contrôle interne annuel.
La trame en a été élaborée et diffusée aux banques en juillet 2010 et en
octobre pour le secteur des assurances. Les premiers rapports ont été
reçus par l’ACP en avril 2011 et ils étaient en cours d’exploitation lors de
l’enquête de la Cour. Ils feront l’objet d’une restitution lors de la
conférence du contrôle de l’ACP du 7 octobre 2011. Néanmoins,
s’agissant du premier exercice sur le sujet de la protection de la clientèle,
des ajustements seront sans doute nécessaires, et pris en compte dans le
cadre de l’informatisation du reporting.
14 entretiens de surveillance rapprochée (8 entreprises d’assurance,
6 banques) ont été effectués en 2010 sur le modèle de ceux pratiqués par
le contrôle bancaire. Ils ont permis principalement à l’ACP de confronter
sa vision de la protection de la clientèle avec celle retenue par
l’établissement ou l’organisme d’assurance ainsi que d’identifier des
responsables et des correspondants au sein des structures.
b) La veille sur les nouveaux produits et les publicités
La DCPC exerce une veille sur les nouveaux produits du marché,
ainsi que sur les publicités pour les services, contrats, produits bancaires
et d’assurance commercialisés en France. Un juriste spécialisé, provenant
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
117
de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité a été recruté.
L’ACP ne dispose pas du pouvoir d’approbation des prospectus
128
,
comme en dispose l’AMF pour les OPCVM, à l’occasion de l’agrément
du produit.
Une première action a concerné le crédit à la consommation. Une
seconde a porté sur la mise en oeuvre de la recommandation sur les
produits complexes ainsi que de la position sur les ventes avec primes
dans les contrats d’assurance vie. Ces actions ont été suivies de l’envoi de
11 lettres
129
. Le faible nombre de courriers et le décalage entre la parution
des publicités en décembre 2010 et l’envoi de lettres en mars ou avril
2011 s’expliquent, selon l’ACP, par l’acquisition tardive de l’outil de
veille informatique sur la publicité en janvier 2011 et par la nécessité de
définir une procédure adaptée à la veille. Au demeurant, le nombre de
courriers envoyés ne reflète pas le nombre total de publicités ou de
nouveaux produits examinés, qui est forcément supérieur.
Les sociétés financières concernées auraient donné une suite
positive aux observations de l’ACP. Les assurances-vie en unités de
compte constituées d’instruments financiers complexes faisaient encore
l’objet d’un contrôle sur pièces, notamment à partir d’échantillons de
contrats, à la date du présent rapport.
4 - Les enjeux et les perspectives du contrôle sur place
Le contrôle des pratiques commerciales présente des spécificités
par rapport au contrôle prudentiel
130
. Pourtant, il n’en est pas déconnecté
car de mauvaises pratiques commerciales peuvent avoir un impact
prudentiel, voire systémique. C’est ce qu’a rappelé l’Inspection générale
des finances dans son rapport sur « le contrôle du respect des obligations
professionnelles à l’égard de la clientèle dans le secteur financier »
131
en
soulignant que la mauvaise commercialisation de produits financiers était
une cause de la crise
des « subprimes » aux Etats Unis. Au Royaume
128
Le droit européen l’interdit d’ailleurs en matière d’assurance.
129
3 en matière de ventes avec primes en assurance vie, 4 sur les assurances vie en
unités de compte constituées d’instruments financiers complexes et 4 sur les publicités
offrant des crédits à la consommation en période de Noël.
130
Le contrôle prudentiel est essentiellement technique ; le contrôle des pratiques
commerciales est centré sur des aspects juridiques (conformité et lisibilité des
publicités, information précontractuelle, obligation de conseil ou de mise en garde,
gestion du contrat…) et de contrôle interne (adéquation des moyens et procédures mis
en oeuvre pour respecter les règles de protection de la clientèle).
131
Juillet 2009.
118
COUR DES COMPTES
Uni, les banques doivent supporter les importantes conséquences
financières nées de pratiques commerciales abusives.
Les défaillances dans la commercialisation de l’assurance-
emprunteur au Royaume-Uni
Les
« payment-protection
insurance »
(PPI)
ou
« assurances-
emprunteurs » sont destinées à assurer des risques (maladie, licenciement…)
lors de la souscription d’un emprunt bancaire. Depuis 2005, les banques
britanniques ont vendu ces assurances systématiquement avec tous les
emprunts bancaires, y compris quand les emprunteurs ne pouvaient bénéficier
de la couverture (par exemple, les chômeurs). Elles ont exercé une contrainte
sur les emprunteurs en leur faisant croire que leur assurance était obligatoire
pour obtenir un emprunt, alors que des assurances déléguées auraient été bien
moins coûteuses.
Devant les abus commis par les banques, le régulateur britannique, la
FSA a imposé une nouvelle réglementation rétroactive sur ces PPI et obligé
les banques à indemniser leurs clients.
L’association des banquiers britanniques (BBA) a porté l’affaire
devant la Haute Cour de Londres, qui a donné raison à la FSA le 20 avril
2011. Les conséquences de cette décision sont évaluées entre 7 et 10 Md€
pour le secteur bancaire britannique. D’ores et déjà, les banques ont
provisionné les condamnations futures (3,2 Md £ pour Lloyds Banking
Group), entraînant des conséquences non négligeables sur leur bilan.
En 2010, 14 contrôles ont été menés, au titre des pratiques
commerciales (3 dans des sociétés financières spécialisées dans le crédit à
la consommation, 1 dans un organisme d’assurance et 10 chez des
intermédiaires d’assurance). Ces contrôles faisaient, pour les sociétés
financières spécialisées, déjà partie du programme de contrôle de la
commission bancaire, qui avait anticipé la mise en place de l’ACP et
l’adoption de la loi portant réforme du crédit à la consommation. La
direction du contrôle des pratiques commerciales a donc commencé par
effectuer des contrôles conjoints avec les directions de contrôle assurance
et banque dans le domaine des pratiques commerciales. Cela lui a permis
de découvrir les différentes structures et d’adapter peu à peu sa propre
méthodologie.
En 2011, le programme de contrôle comprend davantage de
contrôles
autonomes
de
la
direction
en
charge
des
pratiques
commerciales. S’agissant des établissements bancaires ou organismes
d’assurance, une soixantaine de contrôles sont programmés en 2011. Le
champ des thèmes de contrôle porte notamment sur l’application de la
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
119
« déliaison »
132
de l’assurance emprunteur à la suite de la réforme du
crédit à la consommation, la mise en oeuvre du devoir de conseil en
assurance-vie, la commercialisation en ligne, les contrats non réclamés en
assurance vie, les produits d’assurance santé et leur commercialisation
par
des mutuelles relevant du code de la mutualité ainsi que la banque de
détail. L’organisation et l’information sur le traitement des réclamations
par les entreprises font également l’objet de contrôles réguliers.
Aucun contrôle de l’ACP en matière de pratique commerciale n’a,
pour l’heure, donné lieu à saisine de la commission des sanctions. La
sanction prononcée à l’égard d’un intermédiaire d’assurance, en février
2011, est consécutive à un rapport de contrôle effectué par l’ACAM en
mai 2009.
5 - Le point de vue des associations de consommateurs
Concernant le traitement des réclamations, certaines associations
de consommateurs regrettent que le positionnement de l’ACP se situe en
retrait de celui qu’avait adopté l’ACAM à l’égard des assurés. Elles ont
émis la réflexion que l’absence de visites de terrain du type des visites-
mystère ne la mettait pas en prise avec les informations pratiques de
terrain. D’une façon générale, elles souhaiteraient que les contrôles de
l’ACP soient plus centrés sur ces problèmes pratiques. L’information
donnée sur le taux annuel effectif global (TAEG), l’application de dates
de valeur
133
, la mobilité bancaire ou la tarification en sont des
illustrations. Les problématiques ne relèvent pas toutes de la même source
normative : loi pour le TAEG, jurisprudence pour les dates de valeur,
normes professionnelles pour la mobilité bancaire ou la tarification.
132
C'est-à-dire le libre choix de son assurance emprunteur (possibilité d’assurance
déléguée, par opposition à l’assurance groupe).
133
Les dates de valeur correspondent aux dates à partir desquelles les opérations sont
prises en compte sur le compte bancaire; elles sont justifiées par les banques comme
les délais de traitement des opérations ; la Cour de cassation, dans un arrêt du 31 mai
2011 (confirmant un arrêt du 6 avril 1993) a rappelé l’illicéité des dates de valeur,
sauf en matière de traitement de chèques.
120
COUR DES COMPTES
L’exemple du taux annuel effectif global (TAEG)
Le calcul et l’information donnée sur le TAEG, leur conformité au
code de la consommation ainsi que le respect de la réglementation sur l’usure
constituent les aspects du sujet. Compte tenu de la complexité du mode de
calcul du TAEG et des interprétations divergentes sur l’intégration des
commissions d’intervention (considérées ou non comme des frais annexes)
dans le calcul du TAEG, l’ACP attend les résultats de ses premiers contrôles
pour étudier les contours d’une éventuelle recommandation sur ce sujet, afin
de répondre au souhait de clarification des associations de consommateurs.
6 - Les difficultés d’un contrôle adapté des intermédiaires
L’ACP a vocation à contrôler l’ensemble des canaux de
distribution. A ce titre, elle peut soumettre
134
à son contrôle les
intermédiaires d’assurance au nombre de 42 612 et les intermédiaires en
opérations de banque et services de paiement (IOBSP) dont le nombre
recensé
s’élève
à
35 596.
L’ACP
exerce
ce
contrôle,
après
assujettissement des intermédiaires, à l’occasion des contrôles sur place.
En 2010, elle a pu le faire pour seulement huit intermédiaires. En 2011,
trois intermédiaires d’assurance également IOBSP ont été assujettis.
L’enjeu est majeur en raison de la multiplicité et de la très grande
hétérogénéité de ces intermédiaires.
La loi n’a pas prévu, pour l’ACP, le modèle de l’AMF qui est celui
d’une délégation des contrôles pour les conseillers en investissement
financier (CIF). L’ACP souhaite procéder elle-même au contrôle des
pratiques commerciales quel que soit le canal de distribution, pour les
raisons suivantes :
l’autorégulation soulève les réticences des associations de
consommateurs, comme des professionnels qui souhaitent une
égalité des conditions de contrôle ;
la délégation de contrôle suppose l’adhésion des intermédiaires
à une association professionnelle. Or, le taux de couverture de
ces associations est très faible. Ainsi, la chambre syndicale des
courtiers en assurance ne regroupe
que 1 000 adhérents en
134
Le code monétaire et financier n’impose pas une obligation systématique de
contrôle des intermédiaires par l’ACP.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
121
2010, alors qu’il existe
près de 20 000 courtiers en assurance
ou réassurance.
L’ACP reconnaît qu’elle ne pourra pas contrôler la totalité des
intermédiaires. En 2011, 50 contrôles sont prévus sur les intermédiaires
d’assurance
135
. Elle prévoit une montée en puissance progressive, en
s’appuyant sur le réseau de la Banque de France. Sur les 50 contrôles, la
moitié est effectuée conjointement par les contrôleurs de la Direction du
contrôle des pratiques commerciales et le réseau de la Banque qui dispose
d’un accompagnement méthodologique. Les thèmes de contrôles
concernent notamment le respect des devoirs d’information et de conseil,
les conventions entre les producteurs et les distributeurs
136
et la
vérification de l’application des recommandations sur l’assurance-vie en
unités de compte composées de produits complexes.
L’Autorité privilégie des contrôles approfondis plutôt qu’un
objectif quantitatif, en soulignant que ces contrôles permettent d’envoyer
des messages qui concerneront plus largement les professionnels du
secteur. Elle souligne que l’assujettissement au contrôle de l’ACP semble
avoir déjà provoqué une prise de conscience au sein de la profession des
courtiers d’assurance et des agents généraux, avec l’apparition de guides
pour se préparer à un contrôle de l’ACP
137
.
Au-delà des contrôles sur place, le contrôle de ces
intermédiaires repose aussi, selon l’ACP, sur :
l’existence d’un statut. Ce statut existe pour les intermédiaires
d’assurance. Il est en cours de finalisation pour les IOBSP ;
l’obligation d’enregistrement auprès de l’ORIAS (organisme
pour le registre des intermédiaires en assurance)
138
qui a fait
135
Le décret d’application de la loi de régulation bancaire et financière précisant la
réglementation applicable aux IOBSP n’était, au moment de l’enquête de la Cour, pas
encore paru.
136
L'ordonnance n°2008-1271 du 5 décembre 2008, complétée par décret du
11 janvier 2010, a introduit dans le code monétaire et financier et dans le code des
assurances une obligation de conclure des conventions de distribution entre
producteurs et distributeurs de produits d'épargne, de placement et d'assurance vie afin
de clarifier les rôles respectifs des producteurs et des distributeurs dans la confection
des documents publicitaires ; le distributeur ne peut mettre à disposition de ses
prospects que les documents approuvés par la compagnie d'assurance.
137
Guide méthodologique produit par un cabinet d’avocat sur : « Comment organiser
son activité et se préparer à un contrôle de l’ACP ».
138
Le registre tenu par l’ORIAS était jusqu’ici limité aux intermédiaires en assurance.
Le décret d’application précisant les modalités d’inscription des IOBSP à l’ORIAS
était en cours d’élaboration au moment de l’enquête de la Cour.
122
COUR DES COMPTES
l’objet d’une réforme pour étendre son champ d’action aux
IOBSP. Il est considéré comme un premier niveau de contrôle
sur les conditions d’enregistrement. L’ACP souhaite que ce
filtre soit renforcé en autorisant l’ORIAS à vérifier notamment
l’identité
des
intermédiaires.
Aujourd’hui,
l’association
recueille
uniquement
une
déclaration
d’honorabilité,
l’assurance de responsabilité civile professionnelle/et ou de
garantie financière et la capacité professionnelle ;
L'Organisme pour le registre des intermédiaires en assurance
(ORIAS)
Le Registre des intermédiaires en assurance recense les personnes,
physiques ou morales, autorisées à exercer l'activité d'intermédiation en
assurance ou en réassurance en France. Sa consultation permet de vérifier
cette habilitation pour tous les intermédiaires, qu'ils soient immatriculés en
France ou dans un autre Etat européen. A la suite de la loi de régulation
bancaire et financière, les IOBSP doivent être immatriculés au registre
unique des intermédiaires tenu par l’ORIAS.
L'ORIAS est une association « loi 1901 » à but non lucratif qui
fonctionne selon les principes habituels régissant de telles associations : des
administrateurs désignés par les fédérations professionnelles se réunissent en
conseil d'administration et décident du budget et des orientations de
l'association ; une assemblée générale annuelle approuve le rapport annuel,
les comptes de l'exercice clôturé et le budget de l'exercice suivant.
Cependant, des règles, prévues à l'article R. 512-3 du code des
assurances, encadrent le fonctionnement et la gouvernance de l'ORIAS :
- les statuts de l'association sont homologués par arrêté du ministre
chargé de l'économie ;
- le montant de la cotisation est fixé par arrêté du ministre (après
délibération du conseil d'administration) ;
- les membres de la commission d'immatriculation ne sont pas
nommés par l'association mais par arrêté du ministre chargé de l'économie, et
il est possible d'être membre de cette commission sans être administrateur (la
Fédération bancaire française par exemple) ;
- un commissaire du gouvernement « peut participer aux travaux de
tous ces organes » et n'a pas voix délibérative. Il reçoit tout document et
convocation aux réunions et peut demander une seconde délibération ;
- en cas de dissolution de l'association, l'excédent de l'actif net sur le
passif est dévolu à un autre organisme ayant un objet similaire ou à l'Etat.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
123
la clarification du partage des responsabilités entre les
différents acteurs, sur la base notamment des conventions entre
producteurs et distributeurs dans le domaine de l’assurance vie,
laquelle obligation est entrée en vigueur en janvier 2010.
Le nombre très élevé d’IOBSP et d’intermédiaires en assurances
comporte une dimension pratique non négligeable. Alors que dans ses
précédents contrôles sur la commission bancaire et l’AMF, la Cour
s’inquiétait déjà du peu d’exhaustivité des contrôles sur la population des
changeurs manuels par la Commission bancaire et du caractère peu
opérationnel du contrôle des CIF par l’AMF, la réforme a fait entrer dans
le champ d’activité de l’ACP un contrôle de professions encore plus
larges, hétérogènes, non encadrées a priori.
Les réponses aujourd’hui sont d’ordre administratif (statut,
enregistrement). Si elles ne sont pas inutiles, elles ne répondent pas à
l’objectif d’une régulation prudentielle par le contrôle des risques. Les
contrôles sur place de l’ACP en nombre nécessairement limité paraissent,
à ce stade, constituer le complément d’une identification au premier
niveau des organismes.
La Cour se réserve de porter ultérieurement une appréciation plus
circonstanciée, une fois le déploiement des mesures en cours effectué.
IV
-
L’objectif de renforcement de l’influence sur
la scène internationale et européenne
Un objectif visé dans la réforme consistait à permettre un
positionnement renforcé de la présence française dans les négociations
européennes et internationales sur la régulation financière. L’alignement
avec la mission légale
139
qu’avait déjà obtenue l’AMF dans ce domaine a
été opportun.
La loi
140
prévoit que, dans l’accomplissement de ses missions,
l’Autorité de contrôle prudentiel doit prendre en compte les objectifs de
stabilité financière dans l’ensemble de l’Espace économique européen et
de
mise
en
oeuvre
convergente
des
dispositions
nationales
et
communautaires
en
tenant
compte
des
bonnes
pratiques
et
recommandations issues des dispositifs de supervision communautaires,
139
L’article L. 621-1 dispose que l’AMF « apporte son concours à la régulation de ces
marchés aux échelons européen et international ».
140
Article L612-1 du code monétaire et financier.
124
COUR DES COMPTES
notamment l’Autorité bancaire européenne et l’Autorité européenne de
l’assurance et des pensions professionnelles. Aux termes du code
monétaire et financier, l’ACP coopère étroitement avec ses homologues
de l’Espace économique européen et apporte en particulier son concours
aux structures de supervision des groupes transfrontaliers, les collèges
européens
de
superviseurs
141
.
L’action
de
l’ACP
s’inscrit
donc
étroitement dans le cadre de la nouvelle architecture européenne de
supervision financière qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2011.
Afin d’apprécier les modalités de mise en oeuvre de la réforme sur
ce point, la Cour a identifié les moyens déployés par l’ACP au regard des
enjeux auxquels elle est confrontée en resituant ces moyens - autant que
faire se peut - par rapport à ceux dont disposent les autres Etats membres.
Les investigations n’ont, en revanche, pas eu pour objet d’apprécier les
résultats obtenus qui sont fournis par l’ACP elle-même. Cette évaluation
aurait nécessité une information approfondie sur les négociations, la
connaissance des rapport des forces en présence au plan international et
des
positions
des
différentes
parties
prenantes,
ce
que
seule
l’administration pourrait être en mesure d’établir.
A -
Le renforcement des moyens de l’ACP sur les enjeux
internationaux de l’assurance
L’ACP vient de scinder son actuelle direction des études et des
affaires internationales (DERI) pour créer une direction des affaires
internationales en charge de la coordination de l’action de l’ACP au
niveau européen et international, tant dans le domaine des assurances que
de la banque. Les effectifs des services de la DERI qui composaient cette
direction
142
sont passés de 43 en mars 2010 à 50 en mai 2011. Comme
cela a déjà été constaté dans la première partie du rapport, cette évolution
est la résultante d’un nombre élevé de départs (9) comme d’arrivées (16
sur la même période). L’objectif cible est de 58 agents fin 2012
143
.
141
Il n’entrait pas dans le champ de l’enquête de la Cour d’étudier le fonctionnement
des collèges de superviseurs (chargés de coordonner la supervision des établissements
financiers implantés dans plusieurs pays), dont le nombre s’élevait, au moment de
cette enquête, selon l’ACP, à 20, dont 14 pour le secteur des banques et 6 pour celui
des assurances.
142
Sans compter le directeur des affaires internationales et ses proches collaborateurs
(parmi lesquels certains chargés de mission directement impliqués dans des travaux de
coordination internationale).
143
14 pour le service des affaires internationales assurances, 26 pour le service des
affaires internationales banques et 18 pour le service des études comptables.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
125
Effectifs de la direction des affaires internationales
Effectif (nombre de
personnes rémunérées)
CB
ACAM
Total
mars
2010
mai 2011
Service
des
affaires
internationales
Assurances
0
6
6
12
Service
des
affaires
internationales Banque
23
0
23
22
Services
des
études
comptables
13
1
14
16
TOTAL
36
7
43
50
Source : ACP
Dans un contexte marqué par les négociations sur l’application des
nouvelles règles prudentielles de Solvabilité II au niveau européen,
l’augmentation des effectifs, centrée sur le service des affaires
internationales assurances (qui ont doublé en passant de 6 personnes en
septembre 2009 à 12 personnes en mai 2011) est légitime, mais la
différence de niveau avec le service dédié aux relations internationales
pour le secteur bancaire demeure sensible. Ce renforcement était urgent
car il s’agissait de prendre la mesure des conséquences de l’application de
la directive européenne Solvabilité II qui sont d’une très grande
sensibilité pour les assureurs et les mutualistes français
144
. Les
négociations sont donc, à l’heure actuelle, cruciales.
Au-delà de la direction des affaires internationales, d’autres agents
de l’ACP contribuent au processus de régulation européenne et
internationale. En particulier, le secrétaire général et les secrétaires
généraux adjoints sont membres de nombreuses instances ou groupes de
travail. Durant les dix premiers mois d’activité de 2010, ils ont participé à
19 réunions internationales et à 8 réunions sur les cinq premiers mois de
l’année 2011. Dans le domaine des assurances, les brigades et la direction
144
La directive Solvabilité II du 25 novembre 2009 détermine les principes généraux
(niveau 1) du nouveau régime prudentiel et a été modifiée le 24 novembre 2010 par la
directive dite Omnibus I. Le 19 janvier 2011, une proposition de directive dite
« Omnibus II » a été publiée par la Commission européenne. Elle vise en particulier à
amender la directive Solvabilité II et prévoit la possibilité d’adopter des dispositions
dites « transitoires » qui visent à permettre l’adaptation progressive des organismes
d’assurance au nouveau régime. A la date de l’enquête de la Cour, les mesures
d’exécution (niveau 2) étaient en cours de rédaction par la Commission européenne
tandis que les lignes directrices et les normes techniques contraignantes (niveau 3)
étaient en cours d'établissement par l’Autorité européenne des assurances et des
pensions professionnelles.
126
COUR DES COMPTES
des contrôles spécialisés et transversaux sont également impliquées dans
le sujet de Solvabilité II. Par ailleurs, la direction des affaires juridiques
est directement en charge de la coopération nationale et internationale de
l’ACP dans le domaine de la lutte contre le blanchiment et le financement
du terrorisme (une vingtaine de réunions internationales en 2010,
notamment dans cadre du GAFI) ainsi que sur les aspects juridiques de la
gestion des crises. Les questions transversales relatives à la protection de
la clientèle sont traitées par la direction du contrôle des pratiques
commerciales. Enfin, la participation des agents des directions du
contrôle des établissements aux collèges de superviseurs ainsi qu’aux
groupes de travail européens et internationaux relatifs à ces collèges
contribue également à assurer la coordination internationale des actions
de l’ACP.
B - La présence effective de l’ACP au plan européen et
international
1 - Le déploiement de l’ACP au sein des instances européennes et
internationales
a) Présence dans les groupes de travail
Le déploiement de l’ACP dans les instances européennes et
internationales est appréciable. A titre d’exemple, la direction des affaires
internationales a participé à 280 réunions depuis mars 2010.
Pour ce qui concerne la supervision bancaire, le secrétariat général
de la Commission bancaire était déjà très présent au niveau européen, en
ayant notamment présidé le comité européen de supervision bancaire
145
entre 2006 et 2008. Cette présence se poursuit désormais dans le cadre de
l’autorité bancaire européenne (EBA en anglais), mise en place depuis le
1
er
janvier 2011 : l’ACP participe à tous les groupes de travail,
notamment via la présidence d’un des quatre comités permanents de
l’EBA sur la comptabilité, le
reporting
et l’audit
146
. Au niveau
international, l’ACP est également présente dans quasiment tous les
groupes du Comité de Bâle.
Dans le domaine des assurances, au niveau européen, elle est
désormais membre de la quasi-totalité des groupes et sous groupes de
145
L’autorité bancaire européenne a succédé à ce comité au 1
er
janvier 2011.
146
Comité permanent SCARA qui a succédé au groupe d’experts du CEBS sur
l’information financière.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
127
travail de l’autorité européenne des assurances et de pensions
professionnelles (EIOPA en anglais).
Au total, l’ACP assure la présidence ou co-présidence d’un comité
permanent et de sept groupes de travail actuellement constitués par les
deux nouvelles autorités sectorielles EBA et EIOPA, dont certains sont
particulièrement stratégiques. C’est, par exemple, le cas, au sein de
l’autorité européenne de supervision des banques. C’est également le cas,
au sein de l’EIOPA, avec des groupes de travail sur les exigences en
fonds propres et sur le reporting des états prudentiels, deux sujets
essentiels dans le cadre de Solvabilité II, ainsi que sur la protection de la
clientèle, compte tenu de la nouvelle compétence qui a été conférée à
l’ACP dans ce domaine. Sans préjuger de l’importance respective des
différents groupes de travail, il convient néanmoins de relever que le
nombre de présidences et de co-présidences françaises de groupes de
travail au sein de l’EIOPA et de l’EBA est légèrement inférieur à ce qui
est observé pour l’Allemagne et le Royaume Uni.
Présidences ou co-présidences de groupe de travail dans les
autorités européennes
EBA
EIOPA
Allemagne (BaFin)
5
5
Royaume-Uni (FSA)
2
7
France (ACP)
3
5
Espagne (BoS/MEH)
5
0
Belgique (BNB)
4
1
Source : ACP
b) Présence au sein des organes dirigeants des instances européennes
et internationales
L’ACP est membre de l’Autorité bancaire européenne et de
l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles.
Elle est représentée au conseil de ces deux autorités par son secrétaire
général, qui est également membre du conseil d’administration de
l’autorité bancaire européenne. Certains professionnels du secteur de
l’assurance ont souligné le handicap pour la France de ne pas être
représentée au conseil d’administration de l’Autorité européenne des
128
COUR DES COMPTES
assurances et des pensions professionnelles
147
. En effet, ce conseil
d’administration, composé de 6 membres, veille à ce que l’autorité
accomplisse la mission et les tâches qui lui sont confiées et soumet à
l’adoption du conseil de l’autorité un programme de travail annuel et
pluriannuel.
Présence de l’ACP dans les institutions européennes et
internationales
Institutions européennes
Autorité bancaire européenne (EBA)
-
Présence de l’ACP au conseil d’administration de cette autorité ;
-
Présidence d’un des 4 comités permanents : SCARA (comptabilité, audit et reporting), et
de 2 groupes de travail : risque de marché, transparence financière ;
-
Participation des services de l’ACP aux travaux dans les groupes d’expertise (exigences
quantitatives, modèles internes,…) : l’ACP est représentée dans les 3 autres comités
permanents et dans 26 autres groupes de travail de l’EBA ;
-
Deux agents issus du superviseur français détachés dans les services de l’EBA.
Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (EIOPA)
-
Présidence de 5 comités ou groupes de travail (exigences en fonds propres, reporting,
protection de la clientèle, équivalence Bermudes, taxonomie) ;
-
Participation des services de l’ACP aux travaux dans la quasi-totalité de la trentaine de
groupes d’expertise (par exemple, exigences quantitatives, modèles internes, Pilier 2 et
supervision de groupe) pour l’élaboration des standards techniques à adopter par la
Commission (ce qui représente 105 réunions depuis mars 2010) ;
-
Deux agents du SG ACP détachés dans les services de l’EIOPA.
Commission européenne
-
Assistance à la direction générale du Trésor lors de l’élaboration de la position française
devant la Commission (Solvency Expert Group) ;
-
Présence d’experts nationaux détachés de la BDF dans les services de la Commission (5
personnes en 2010) ;
Comité européen du risque systémique
(ESRB) : participation au côté du gouverneur de la
Banque de France dans le cadre de son activité internationale ; participation aux groupes de
travail.
147
Le secrétaire général de l’ACAM, avait été nommé fin 2009 à la vice-présidence
du comité européen des contrôleurs d’assurance et des pensions professionnelles, qui
a été, au 1
er
janvier 2011, remplacé par l’EIOPA.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
129
Institutions internationales
Comité de Bâle (banques)
-
Présidence ou co-présidence des groupes de travail lutte anti-blanchiment, conglomérat
148
et comptabilité (présidence BDF pour ce dernier groupe)
-
Participation des services de l’ACP à la quasi-totalité des groupes et sous-groupes
techniques (une trentaine au total) ;
-
Sept agents détachés à la Banque des règlements internationaux (BRI).
Association internationale des contrôleurs d’assurance (IAIS)
-
Secrétaire général adjoint de l’IAIS : commissaire contrôleur des assurances, en poste à la
commission de contrôle des assurances de 1986 à 2001 ;
-
Représentation des services de l’ACP à la quasi-totalité des groupes de travail, (plus d’une
vingtaine), dont notamment la participation au groupe de travail « ComFrame » sur les
assureurs internationaux, au groupe sur la stabilité financière et au Forum sur la
convergence des pratiques de supervision.
Groupement d’action financière (GAFI)
-
Co-présidence d’un sous-groupe de travail en charge de la révision des recommandations
du GAFI ;
-
Participation des services de l’ACP aux 5 groupes de travail.
Membre de l’Autorité des Normes Comptables française avec fourniture d’assistance
technique à la Commission
des normes comptables internationales
Source : Cour des comptes, sur la base de données ACP
c) Les résultats concrets obtenus par l’ACP dans le cadre de sa
stratégie d’influence européenne et internationale
L’ACP souligne, à titre d’exemples, que certaines avancées ont pu
être obtenues dans le cadre des négociations sur Bâle 3, s’agissant par
exemple du futur ratio de liquidité à court terme, avec l’élargissement de
la définition des actifs liquides, ou encore s’agissant du ratio de
solvabilité, en faisant reconnaître la spécificité des fonds propres des
groupes mutualistes qui émettent des parts sociales ou encore la résilience
du modèle de bancassurance français, ce qui permet un traitement adapté
pour les participations bancaires dans les assurances.
Sur Solvabilité II, l’ACP indique qu’elle a participé aux
initiatives permettant de tenir compte des difficultés posées par la
complexité du futur cadre prudentiel. A ce titre, elle a élaboré des
propositions techniques permettant de simplifier les modalités de calcul
de la formule standard
149
. L’ACP souligne qu’elle a, par ailleurs, fait
148
Le groupe de travail sur les conglomérats, en charge de réviser et actualiser les
principes (qui datent de 1999) de surveillance des conglomérats financiers, se tient
dans le cadre d’un forum rassemblant le comité de Bâle, l’association internationale
des contrôleurs d’assurance et l’association internationale des autorités de marchés
financiers.
149
Après Solvabilité I qui prévoyait une marge de solvabilité déterminée en fonction
de pourcentages sur les primes et les sinistres, la réglementation des assurances passe,
130
COUR DES COMPTES
prévaloir ses vues sur la nécessité d’harmoniser le
reporting
prudentiel et
financier de Solvabilité II, afin notamment de faciliter l’échange
d’information entre les superviseurs.
Au total, le déploiement de l’ACP dans les instances où s’élabore
et se décide l’encadrement de la régulation des organismes est d’une
absolue nécessité. Il a connu en 2010-2011 une expansion pour le
domaine des assurances qui n’était pas suffisamment couvert du temps de
l’ACAM. Cette expansion doit néanmoins être poursuivie, tant au niveau
européen qu’international (comité de Bâle, comité de stabilité financière,
association internationale des contrôleurs d’assurance, commission
européenne …), pour plusieurs raisons :
la création de trois nouvelles autorités européennes de
surveillance, dont deux pour lesquelles l’ACP est concernée,
nécessite un effort supplémentaire pour assurer la présence
française dans des proportions significatives et comparables à
la forte représentation des autres pays européens de poids
identique;
l’évolution de la régulation financière après Bâle III et
Solvabilité
II,
notamment
sur
les
questions
de
risque
systémique et de la révision des règles de liquidité, n’est pas
terminée.
2 - Des conséquences à tirer de la création des nouvelles autorités
européennes
a) La nécessité d’être présent
En 2010, 10 agents de la Banque, provenant ou non de l’ACP,
étaient détachés dans les institutions européennes et internationales
150
en
charge de la réglementation et de la supervision prudentielles (voir détails
dans le tableau ci-dessus), ce qui est faible
151
. Ce diagnostic qui est
avec Solvabilité II, à des règles plus complexes intégrant le risque, soit par
l'application d'une formule standard, soit par la prise en compte d'un modèle interne.
150
2 à l’Autorité européenne des assurances et pensions professionnelles, 1 à
l’Autorité bancaire européenne et 7 à la Banque des règlements internationaux.
151
Au-delà, des agents de la et les sinistres, la réglementation des assurances passe,
avec Solvabilité II, à des règles plus complexes intégrant le risque, soit par
l'application d'une formule standard, soit par la prise en compte d'un modèle interne.
151
2 à l’Autorité européenne des assurances et pensions professionnelles, 1 à
l’Autorité bancaire européenne et 7 Banque sont également détachés au sein
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
131
clairement établi par le secrétariat général de l’ACP lui-même est partagé
par la Cour. Compte tenu des compétences des nouvelles autorités
européennes de surveillance, qui sont notamment dotées de pouvoirs de
médiation entre les superviseurs nationaux ainsi que de pouvoirs
d’urgence et peuvent édicter des standards techniques sur la mise en
oeuvre de la législation communautaire, un apport significatif de
l’expérience française constitue un enjeu d’importance.
De nouvelles autorités européennes
Le Système européen de supervision financière, entré en vigueur le
1er janvier 2011, répond au besoin d’un renforcement de la supervision
macro- et micro-prudentielle au niveau européen. Un Comité européen du
risque systémique (CERS ou ESRB en anglais) a ainsi été créé, alors que les
comités européens de superviseurs ont été remplacés par trois autorités
européennes de supervision aux pouvoirs et compétences élargis : l’Autorité
bancaire européenne (EBA), l’Autorité européenne des assurances et des
pensions professionnelles (EIOPA), l’Autorité européenne des marchés
financiers (ESMA).
Si le Comité européen ou une autorité européenne détecte une
situation d’urgence, il contacte le Conseil de l’Union européenne qui prévient
si nécessaire les autorités européennes. Dans ce cas, les trois autorités
disposent de pouvoirs exceptionnels, notamment la possibilité d’imposer aux
autorités nationales (ou, à défaut, directement aux établissements financiers)
de prendre les mesures nécessaires.
Le comité européen du risque systémique a deux tâches principales :
la collecte, le partage et l’analyse des informations relative au risque
financier systémique ; l’alerte et la formulation de recommandations. Il a
également pour mission d’assurer la coordination de son action avec
l’ensemble des acteurs, internationaux (FMI, FSB…), européens (Conseil,
autorités européennes…), et nationaux (banques centrales…).
d’institutions européennes et internationales (en 2010, 5 à la Commission européenne,
40 à la BCE).
132
COUR DES COMPTES
La
mission
principale
des
trois
autorités
prudentielles
est
l’harmonisation de la supervision des établissements et des marchés
financiers au sein de l’Union afin de réduire les possibilités d’arbitrages
réglementaires entre pays, par le développement de normes communes, une
application harmonisée et une protection similaire des clients et investisseurs
à travers le marché commun. Pour ce faire, elles peuvent notamment émettre
des propositions de normes techniques communes ; émettre des orientations
et recommandations ; faciliter le dialogue et, le cas échéant, régler tout litige
entres autorités nationales.
Depuis leur création, les autorités ont poursuivi les travaux d’une part
de définition de standards techniques qui seront proposés à la Commission
européenne et d’autre part de coordination auprès des superviseurs nationaux
des tests de résistance simulés par les grands établissements européens.
Source : rapport annuel 2010 de l’ACP
Or, le nombre d’agents d’origine française dans les services de ces
autorités est, à ce stade, réduit. L’EBA compte actuellement deux agents
issus du superviseur bancaire français sur un effectif total de 30, alors que
la cible d’effectif à l’EBA est d’une centaine de personnes à horizon
2012, et deux agents détachés à l’EIOPA, dont l’effectif cible serait à
terme de 80 personnes. Certains agents de l’ACP peuvent également être
détachés de manière ponctuelle comme, par exemple, pour la conduite
des tests de résistance de l’EBA ou l’exercice de calibrage en assurance
non-vie de Solvabilité II, pour lesquels deux agents du secrétariat général
de l’ACP ont été mis à disposition respectivement de l’EBA et de
l’EIOPA pendant plusieurs semaines.
Si l’ACP affirme sa volonté de détacher davantage de personnes à
mesure que les services de ces autorités européennes s’étoffent, les
difficultés apparaissent. Le secrétariat général souligne le nombre réduit
de candidats en interne, le caractère politique de certaines nominations
aux postes de direction ainsi que les limites imposées par les institutions
européennes en fonction des nationalités qui conduisent, afin d’assurer la
représentation des petits pays et de donner la priorité aux nouveaux
membres, à minorer la part des anciens grands pays de l’Union par
rapport à leur poids budgétaire, sans parler de leur poids économique et
financier. L’administration serait favorable à ce que la part des effectifs
de l’EIOPA et de l’EBA
152
ayant une connaissance du contexte en France
152
A titre de référence : la France représente 8,4 % des voix et des budgets des deux
instances ; la part de la Banque de France dans le capital souscrit de la Banque
centrale européenne (fonction de la part de sa population et de son PIB au sein de
l’Union) est de 14,22 % fin 2010.
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
133
représente au moins 10 %, et idéalement 20 %, ce qui représenterait 15
personnes actuellement. Le rôle de la Banque de France est central dans
cette stratégie, notamment en raison des leviers d’action dont elle dispose,
y compris au moment du retour en son sein des personnels détachés.
b) Les enjeux de l’influence
L’ACP peut, sans attendre, influencer le fonctionnement
européen :
en étant force de proposition sur les missions des instances de
ces autorités. L’ACP a ainsi déjà pris l’initiative d’une
proposition franco-allemande ayant abouti à la définition d’une
feuille de route pour le conseil d’administration de l’EBA ;
en participant à la construction d’une culture de supervision
européenne et d’échanges sur les pratiques de contrôles. A ce
titre, l’ACP a déjà déployé un certain nombre d’actions :
diffusion au sein du secrétariat général de l’ACP des
recommandations émises par les autorités européennes ; co-
organisation et accueil de séminaires et réunions de travail avec
l’EIOPA et l’EBA ;
en se positionnant sur ceux de leurs appels d’offres qui ont un
caractère stratégique. L’ACP et la Banque de France ont ainsi
déjà
remporté
l’appel
d’offres
pour
mettre
en
place
l’informatique de l’EBA
153
. Ce projet permet à l’ACP de
contribuer à la diffusion au niveau européen du standard de
communication qu’elle a mis en place pour les échanges de
données avec les professionnels assujettis à son contrôle, dans
le cadre notamment des états déclaratifs prudentiels et
financiers.
153
Cela recouvre notamment la mise en place de la chaîne de traitement des
reportings que l’EBA sera amenés à centraliser et analyser.
134
COUR DES COMPTES
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
La refonte substantielle des instruments juridiques, qui sont
désormais à la disposition de l’ACP, pose de nouvelles problématiques
par rapport à la situation antérieure, imposant à l’Autorité de préciser la
façon dont elle entend les utiliser. Cela doit la conduire à élaborer et
formaliser des doctrines d’emploi qui soient prévisibles, claires et
applicables pour les assujettis. C’est le cas en particulier du nouveau
pouvoir, applicable dans le domaine des pratiques commerciales,
d’édicter des normes de droit souple qui ont une visée explicative
bienvenue mais qui doivent s’insérer plus clairement dans les outils de la
supervision prudentielle du régulateur. Il reste un champ de précisions à
apporter à cet égard concernant les effets concrets auxquels s’exposent
les établissements contrôlés en cas de non respect. De même, le corpus de
mesures de police administrative à disposition de l’ACP a été
sensiblement élargi. Il doit être pleinement utilisé.
S’agissant de l’exercice du pouvoir disciplinaire, la commission
des sanctions a été, jusqu’à présent, très peu saisie. Or, les pouvoirs
publics ont montré la volonté qu’une politique de sanction soit
effectivement mise en oeuvre, en accordant à l’ACP l’ensemble des
modalités lui permettant de sanctionner efficacement.
S’agissant des contrôles prudentiels sur les établissements, la
Cour relève deux points de vigilance : la capacité d’augmenter les
contrôles sur place (inspections) qui sont le complément indispensable du
contrôle permanent exercé par les services du secrétariat général de
l’ACP ; le maintien de l’expertise dans le contrôle des assurances.
Pour la mission de protection de la clientèle, que le législateur a
choisi de confier à la nouvelle Autorité, le défi est à la fois de prévenir
des risques de plus en plus multiformes pour les consommateurs et
épargnants, de faire adopter en tant que de besoin de nouvelles attitudes
dans la commercialisation par les organismes et de répondre aux besoins
de recours exprimés par les associations consuméristes. Ces défis
nécessitent le développement, au sein de l’Autorité, d’une « culture du
consommateur », aux côtés de sa culture traditionnelle de superviseur
prudentiel, et la mise en oeuvre d’actions de plus en plus concertées et
globales avec d’autres intervenants.
Le dernier objectif assigné à l’ACP - renforcer la présence
française dans les négociations européennes et internationales sur la
régulation financière - connaît une réelle concrétisation dans la période
sous revue. Il se heurte néanmoins à la question des moyens humains. De
LA MISE EN OEUVRE DES POUVOIRS ET L’EXERCICE DES MISSIONS
DE L’ACP
135
nouvelles mesures devraient être prises pour assurer l’expansion de
l’influence française.
La Cour formule en conséquence les recommandations suivantes :
Contrôles prudentiels
7. Accroître le nombre de contrôles sur place (ACP) ;
8. S’assurer, dès 2011, de la bonne répartition des effectifs
globaux au sein des services de l’ACP en fonction de l’importance des
risques prudentiels (ACP) ;
9. Identifier et justifier le renforcement net des effectifs dédiés au
contrôle des assurances ; maintenir leur expertise dans ce domaine
(ACP) ;
Contrôle des pratiques commerciales
10. Permettre un développement des réalisations opérationnelles
du pôle commun ACP-AMF qui soit davantage en prise avec les
préoccupations des consommateurs (ACP) ;
11. Prendre les mesures pour organiser, dans le cadre du pôle
commun, la coopération de la DGCCRF (ACP, AMF, DGCCRF,
pouvoirs publics) ;
12. Etoffer et poursuivre la formalisation de la doctrine d’emploi
des instruments du droit souple en matière de pratiques commerciales ;
préciser la doctrine des sanctions éventuelles (ACP) ;
Politique de sanctions :
13. Réduire les délais qui peuvent exister entre la constatation par
le secrétariat général de manquements significatifs et la vérification par
un contrôle sur place des mesures effectivement mises en place par
l’établissement pour remédier auxdits manquements (ACP) ;
14. Clarifier la doctrine du collège sur les manquements donnant
lieu à mesure de police administrative et sur ceux entraînant la saisine de
la commission des sanctions (ACP) ;
15. Saisir la commission des sanctions dès lors que des
manquements significatifs déjà relevés lors d’un précédent contrôle sont
répétés, même partiellement (ACP).
Présence au sein des autorités européennes et internationales de
régulation financière :
16. Engager les actions nécessaires au renforcement des mobilités
du personnel à l’étranger (Banque de France, ACP) ;
Conclusion générale
La fusion de quatre autorités administratives chargées de la
régulation financière était une réforme délicate à bien des égards, dans un
contexte de bouleversement des règles internationales et européennes du
cadre prudentiel applicable aux deux grands secteurs essentiels au
financement de l’économie. Cette fusion est désormais en phase de
consolidation.
L’enquête de la Cour a identifié les points d’attention sur lesquels
l’ACP doit concentrer et accélérer ses efforts :
le plein exercice des pouvoirs conférés par la loi qui suppose un
renforcement de la vigilance et des contrôles sur place, des
efforts concertés et visibles dans le contrôle des pratiques
commerciales, le renforcement de la politique de sanctions,
l’élaboration plus précise de doctrines d’intervention ;
pour ce faire, la nécessité d’atteindre rapidement le niveau des
effectifs prévus tout en maîtrisant ses coûts de fonctionnement
et les fonctions support ;
et, la documentation précise de l’efficience des moyens,
notamment des effectifs, dans les zones prioritaires de
développement
que
sont
le
contrôle
prudentiel
des
établissements
et
le
développement
de
la
présence
à
l’international.
ANNEXES
139
Annexes
Annexe 1
–
Lettre de saisine
Annexe 2
–
Liste des personnes rencontrées ou auditionnées
Annexe 3
– Les conditions de mise en oeuvre des pouvoirs de l’ACP
(hors mesures de police administrative)
Annexe 4
– L’utilisation par les banques des obligations de financement
à l’habitat
Annexe 1 – Lettre de saisine
142
COUR DES COMPTES
Annexe 2 – Liste des personnes rencontrées ou
auditionnées
1. Autorité de Contrôle Prudentiel
Président
M. NOYER, Président (également en sa qualité de Gouverneur
de la Banque de France)
Vice Président
M. THIERRY, Vice-Président
Secrétariat général
Mme NOUY, Secrétaire général
M. ROUX, premier secrétaire général adjoint
M. CARDONA, Secrétaire général adjoint
M. ELBAUM, Secrétaire général adjoint
M. FERNANDEZ-BOLLO, Secrétaire général adjoint
M. PESIN, Secrétaire général adjoint, responsable du Pôle
commun ACP-AMF
Direction du contrôle des pratiques commerciales
Mme de CHATILLON, Directeur
Mme SELLIER, Directeur adjoint
Direction des affaires juridiques
M. DE GANAY, Directeur des affaires juridiques
Mme MARTIN, Chargée de mission
Première direction du contrôle des assurances
M. COULOMB, Directeur
Deuxième direction du contrôle des assurances
M. FLICHE, Directeur
Direction des contrôles spécialisés et transversaux
M. MARCHAND, Directeur
ANNEXES
143
Direction des affaires internationales
M. RICHARD, Directeur
M. PRATO, Adjoint au directeur
Direction des ressources humaines, méthodes et systèmes
d’information
M. MOURIAUX, Directeur
Direction des affaires financières
M. BORD, Directeur
Mme CLERC, adjoint au Directeur
M. CARREE, Chef du service de gestion financière
Commission des sanctions
-
M. MARTIN LAPRADE, Président
-
M. CLEMMER, Chef du service de la commission des
sanctions
Membres des collèges de l’ACP
-
M. UZAN, membre du collège plénier de l’ACP, du sous-
collège sectoriel assurances et président du comité d’audit
-
M. HOENN, membre du collège plénier de l’ACP, du collège
restreint et du sous-collège sectoriel banque
-
M. COSTE, membre du collège plénier de l’ACP, du collège
restreint et du sous-collège sectoriel banque
2. Banque de France
M. REDOUIN, Premier sous-gouverneur
Direction générale des ressources humaines
Mme POUSSIN-DELMAS, Adjointe au directeur général des
ressources humaines
Mme HAAS, Directrice de la gestion des ressources humaines
144
COUR DES COMPTES
Direction générale des activités fiduciaires et de place
-
M. Jean-Luc VATIN, Directeur de la surveillance des relations
entre les particuliers et la sphère financière
-
Mme Marie-Claude MEYLING, Chef de service, Service de
maîtrise d’ouvrage
3. Comité consultatif du secteur financier
-
M. CONSTANS, Président, membre du collège plénier de l’ACP
et président de la commission consultative des pratiques
commerciales
-
Mme
SALON-MICHEL,
Secrétaire
générale
du
comité
consultatif du secteur financier
4. Administrations
Direction générale du Trésor
M. DE VILLEROCHÉ, Chef du service du financement de
l’économie
Mme ATIG, Sous-directeur assurances
M. BOITREAUD, Sous-directeur des affaires bancaires
M. GARWACKI, adjoint au Chef de bureau
M. CUMENGE, adjoint au Chef de bureau
Direction Générale de la Concurrence, de la
Consommation et de la Répression des Fraudes
M. MARTIN, Chef du service de la régulation et de la sécurité
Mme GALLERAND, bureau « F3 » professions organisées
M. de GENEVE, bureau « F3 » professions organisées
Autorité des marchés financiers
-
M. FRANCQ, Secrétaire général
-
Mme LEMAIRE, Directrice de la Direction des relations avec les
épargnants
Autorité des Normes Comptables
-
M. HAAS, Président et membre du collège plénier de l’ACP, de
sa formation restreinte et de son comité d’audit
ANNEXES
145
Corps du contrôle des assurances
-
Mme. LEMERY, Chef du corps de contrôle des assurances
5. Professionnels
Association française des Sociétés Financières
-
M. SALMON, Président
-
Mme PALLE-GUILLABERT, Délégué général
-
M. LASSERON, Délégué général adjoint
Fédération Bancaire Française
M. OUDEA, Président
Mme OBOLENSKY, Directrice générale
M. de LAUZUN, Directeur général délégué
Mme BAC, experte juridique et conformité
M. PIERRE, spécialiste régulation financière et prudentielle
Fédération Française des Sociétés d’Assurance
M. SPITZ, Président
M. LEQUOY, Délégué général
M. GOSSIC, Directeur assurances personnes
M. CHAPUT, Conseiller du Président et du Délégué général
M. LABILLOY, Directeur des affaires économiques, financières
et internationales
M. POIGET, Directeur des affaires juridiques, fiscale et de la
concurrence
Fédération Nationale de la Mutualité Française
M. CANIARD, Président
M. COHEN-SOLAL, Directeur général
M. ROUX, Directeur délégué auprès du directeur général
146
COUR DES COMPTES
Groupement des entreprises mutuelles d’assurance
M. ANDRECK, Président
M. DE BOISSIEU, Secrétaire général
M. BONNET, Responsable vie et finances
Allianz Vie
M. JUMELLE, Directeur Assurances de personnes Partenariats
vie
AXA
M. HARLIN, Directeur des affaires financières
M. HAMILIUS, Directeur des affaires européennes
M. MIRABAUD, Directeur du cabinet du directeur des affaires
financières
La Banque Postale
M. BAJOU, membre du directoire
M. TRAULLE, Directeur de la coordination des audits externes
M. LEVY, Directeur de la conformité
BPCE
M. BRAC DE LA PERRIERE, Inspecteur général
Groupe Monceau assurances
M. DUPIN, Président et Directeur général
Identités Mutuelle
M. GAUDU, Directeur général adjoint
Mme BOLLEY, Secrétaire générale
Laser Cofinoga
M. CICALA, Directeur général (depuis le 16 juin 2011)
M. PHILIPPIN, Directeur général (jusqu’au 15 juin 2011)
ANNEXES
147
Mutuelle centrale de réassurance
M. SZMARAGD, Directeur général
6. Associations de consommateurs
Association Française des Usagers des Banques
-
M. MAITRE, Secrétaire général
UFC-Que choisir
Mme PEREZ, Administratrice nationale
M. CHIPOY, Chargé de mission Banque et Assurance,
Département des études
AFOC
Mme GERVAIS, Secrétaire générale
M. MONDANGE, Juriste
148
COUR DES COMPTES
Annexe 2 : Les conditions de mise en oeuvre des
pouvoirs de l’ACP (hors mesures de police
administrative)
Type de pouvoir
Commission bancaire (ou
CECEI)
ACAM (ou CEA)
ACP
Recommandation
individuelle
Pour
les
établissements
de
crédit et prestataires de services
d’investissement pour restaurer
ou
renforcer
leur
situation
financière,
améliorer
leurs
méthodes de gestion ou assurer
l'adéquation
de
leur
organisation à leurs activités ou
à
leurs
objectifs
de
développement.
Recommandation de prendre
toutes les mesures appropriées
pour restaurer ou renforcer sa
situation financière, améliorer
ses méthodes de gestion ou
assurer
l'adéquation
de
son
organisation à ses activités ou à
ses objectifs de développement.
Pour
les
établissements
de
paiement en matière de fonds propres
pour les établissements de paiement
exerçant des activités de nature
hybride en cas de menace sur la santé
financière
de
l’établissement
de
paiement
pour la CDC, en matière de LAB/FT,
pour améliorer ses procédures ou son
organisation
Injonction
Pour
les
établissements
de
crédit et les prestataires de
service d’investissement : pour
restaurer
ou
renforcer
sa
situation financière, améliorer
ses méthodes de gestion ou
assurer
l'adéquation
de
son
organisation à ses activités ou à
ses objectifs de développement,
Cette
injonction
peut
en
particulier
porter
sur
une
exigence de détention de fonds
propres ou sur une restriction
temporaire leur activité.
Non (depuis l’arrêt Laurent du
CE
28 octobre 2002)
Pour les établissements visés au A du
I de l’article L. 612-2 (EC, EI, EP,
changeurs,
compagnies
financières...) : injonction à prendre,
dans
un
délai
déterminé,
toutes
mesures destinées à renforcer ou
restaurer
sa
situation
financière,
améliorer ses méthodes de gestion ou
assurer
l’adéquation
de
son
organisation à ses activités ou à ses
objectifs de développement
Pour les établissements de paiement :
à l’effet d’assurer l’existence
de
fonds propres suffisants pour les
services de paiement
Pour les établissements de paiement
exerçant des activités de nature
hybride à
l’effet
de
créer
une
personne morale
distincte pour les
activités de services de paiement
quand les autres activités portent ou
menacent de porter atteinte à la santé
financière
de
l’établissement
de
paiement ou à la capacité de l’ACP
de
contrôler
le
respect
de
ses
obligations
Pour la CDC en matière de LAB/FT:
l’ACP peut adresser des injonctions
de prendre des mesures appropriées
pour améliorer ses procédures ou son
organisation
ANNEXES
149
Injonctions avec
astreinte
Non
Non
En cas de méconnaissance d’une
obligation
de
déclaration
ou
de
transmission d’états, de documents
ou de données demandés par l’ACP.
Le montant maximal journalier de
l’astreinte est de 15 000 €.
Retrait
d’agrément
(hors
procédure
de sanction)
A
la
demande
de
l’établissement ou d’office par
le
CECEI
si
l’entreprise
d’investissement
ne
remplit
plus
les
conditions
ou
engagements auxquels étaient
subordonnés son agrément, ou
si l’agrément a été obtenu par
fraude ou fausses déclarations
Prononcé par le CEA, en cas
d'absence prolongée d'activité,
de rupture de l'équilibre entre
les
moyens
financiers
de
l'entreprise et son activité ou, si
l'intérêt
général
l'exige,
de
changements
substantiels
affectant la répartition de son
capital,
la
qualité
des
actionnaires ou la composition
des organes de direction.
Oui : pouvoirs du CECEI et du CEA
150
COUR DES COMPTES
Annexe 4 : L’utilisation par les banques des
obligations de financement de l’habitat
Cette annexe est une note d’information réalisée à la demande de
M. Jérôme Chartier, député.
Les obligations de financement de l’habitat (OFH) émises par les
sociétés de financement à l’habitat (SFH) relèvent du compartiment de
marché des obligations sécurisées
154
, qui est relativement ancien en
France. Elles sont héritières des dispositifs contractuels d’obligations
sécurisées, Covered Bonds, qui s’étaient beaucoup développés depuis le
début de la crise financière de liquidité en 2007.
1. L’évolution récente des obligations sécurisées en
France
Les obligations sécurisées désignent les obligations de moyen et
long terme émises par les établissements de crédit dont le remboursement
et le versement des intérêts sont garantis par les flux financiers provenant
de portefeuilles dédiés de prêts (ou des titres et valeurs représentatifs de
portefeuilles de prêts) inscrits à l’actif du bilan de la banque, représentant
le « collatéral » des obligations.
Les prêts sélectionnés dans les portefeuilles de collatéral présentent
tous un faible risque de défaut. La très bonne qualité de crédit du
collatéral contenu dans les obligations sécurisées permet aux banques
d’obtenir la meilleure notation de la part des agences (triple A) et
d’accéder ainsi à de meilleures conditions de financement de la part des
investisseurs, par rapport à des émissions d’obligations simples
(« rehaussement de crédit » obtenu grâce aux obligations sécurisées). En
France, les émissions d’obligations sécurisées sont toutes notées AAA par
les agences de notation.
En outre, les obligations sécurisées notées AAA sont éligibles aux
opérations de refinancement de la BCE : les établissements de crédit les
apportent en garantie à la banque centrale afin d’obtenir des prêts de
trésorerie de celle-ci (Main refinancing operations de la BCE).
Les obligations sécurisées sont apparues en France avec les
émissions de la Caisse de refinancement hypothécaire (CRH) à partir de
1985. Puis, elles se sont développées à partir de 1999, sous la forme
154
Covered bonds
, en anglais.
ANNEXES
151
d’« obligations foncières », émises par des sociétés de crédit foncier
(SCF), consécutivement à la loi de 1999
155
qui a transposé le dispositif
allemand des
Pfandbriefe
156
.
Les
obligations
foncières
reproduisent
les
principales
caractéristiques des Pfandbriefe :
- prêts majoritairement assortis d’une sureté réelle (prêts
hypothécaires de premier rang) ou prêts à des collectivités publiques ;
- surdimensionnement de l’actif par rapport au passif (ratio de
102%) ;
- détenteurs de titres privilégiés, grâce, en France, à la création
d’établissement de crédit distinct des banques, les sociétés de crédit
foncier (SCF), dont le patrimoine est séparé et se trouve « éloigné » de la
faillite éventuelle de la maison-mère ;
- présence d’un contrôleur spécifique chargé de vérifier la qualité
et la valeur des hypothèques.
Jusqu’en 2007, le compartiment des obligations sécurisées est resté
limité en France aux émissions d’obligations foncières, réalisées par les
trois sociétés de crédit foncier agréées
157
ainsi qu’aux emprunts de la
Caisse de refinancement de l’habitat
158
(CRH).
Mais à partir de 2007, la liquidité devenant plus difficile d’accès
sur le marché interbancaire
159
, les groupes BNP Paribas et Banques
populaires ont créé des véhicules de refinancement spécifiques pour les
prêts immobiliers, adoptant de manière contractuelle, certaines des
dispositions de la loi instituant les obligations foncières, en particulier
celles destinées à protéger les investisseurs du risque de la faillite de la
banque. Leurs véhicules de refinancement, filiales à 99,9 % appelées
155
Loi n°99-532 du 25 juin 1999 relative à l’épargne et à la sécurité financière.
156
Pendant les années 1990, le marché allemand des
Pfandbriefe
s’était beaucoup
développé et était le plus liquide d’Europe, son encours excédant celui des emprunts
d’Etat (le marché des
Bund
). La France a cherché à établir un marché de
Pfandbriefe
à
la française afin d’attirer les investisseurs étrangers dans notre pays, à la veille du
passage à l’euro, qui exacerbait la concurrence sur les marchés financiers entre la
France et l’Allemagne.
157
Ces trois sociétés sont la Compagnie de financement foncier (CFF), filiale du
Crédit Foncier de France, Dexia Municipal Agency, filiale de Dexia et CIF
Euromortgage, filiale du groupe Crédit immobilier de France.
158
La Caisse de refinancement hypothécaire est devenue Caisse de refinancement à
l’habitat, en vertu de la loi de 1999 instituant les obligations foncières.
159
Consécutivement à la crise internationale de liquidité intervenue à partir du
printemps 2007, suite à la faillite de Bear Stearns aux Etats-Unis.
152
COUR DES COMPTES
Covered Bonds
160
, ont été agréés par la Commission bancaire comme
établissements de crédit et notés AAA par les agences de notation. Le
Crédit Mutuel, le Crédit Agricole puis la Société générale ont par la suite
créé des structures de Covered Bonds, respectivement en 2008, 2009 et
2010.
Le
développement
de
ces
nouvelles
formes
contractuelles
d’obligations sécurisées a été encouragé par deux des mesures prises par
la BCE pour contrecarrer la crise de la liquidité interbancaire, qui s’est
aggravée à partir de septembre 2008, à la suite de la faillite de Lehman
Brothers.
En octobre 2008, la BCE a décidé d’accepter les obligations
sécurisées contractuelles en tant que garanties financières éligibles pour
les opérations de refinancement, à titre temporaire et exceptionnel, alors
que
celles-ci
ne
répondaient
pas
aux
exigences
prescrites
par
la « directive OPCVM ».
La « directive OPCVM » désigne la directive 2009/65/CE du
Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 portant coordination des
dispositions
législatives,
réglementaires
et
administratives
concernant
certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM).
Elle dispose, en son article 52 :
«
Les Etats membres peuvent porter la limite de 5% prévue au
paragraphe 1 premier alinéa
[Un OPCVM ne peut investir plus de 5% de ses
actifs dans des valeurs mobilières ou des instruments du marché monétaire
émis par une même entité ou 20% de ses actifs dans des dépôts placés auprès
de la même entité]
jusqu’à un maximum de 25% pour les obligations émises
par un établissement de crédit qui a son siège statutaire dans un état membre
et qui est légalement soumis à une surveillance spéciale des autorités
publiques destinée à protéger les détenteurs d’obligations. En particulier, les
sommes découlant de l’émission de ces obligations sont investies,
conformément à la législation, dans des actifs qui, durant toute la période de
validité des obligations, peuvent couvrir les créances résultant des
obligations et qui, en cas de faillite de l’émetteur seraient utilisés en priorité
pour le remboursement du principal et le paiement des intérêt courus ».
Ce
dispositif est transposé à l’article R.214-6 du code monétaire et financier.
En outre, en mai 2009, la BCE a décidé d’acheter des obligations
sécurisées, légales et contractuelles, sur le marché secondaire, afin de
160
Afin de les distinguer des SCF.
ANNEXES
153
faciliter les émissions de celles-ci sur le marché primaire. Le programme
d’achat a duré 1 an, de juin 2009 à juin 2010, et a porté sur 60 Md€. Cette
mesure en faveur de la liquidité des obligations sécurisées a rassuré les
investisseurs et a permis de relancer en France le compartiment des
émissions d’obligations de moyen-long terme (plus de 2 ans) par les
banques dès l’été 2009.
2. La transformation des
Covered Bonds
en
obligations de financement de l’habitat
La création des sociétés de financement de l’habitat (SFH) par la
loi du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière (LRBF) a
consisté, notamment, à légaliser les dispositifs de
Covered Bonds
nés
depuis 2007 dans le cadre contractuel. Une nouvelle loi était nécessaire
car, d’une part, la loi de 1999 qui avait institué les sociétés de crédit
foncier ne correspondait plus aux pratiques majoritaires des banques dans
le crédit immobilier, d’autre part, les conditions de refinancement des
banques françaises devaient être assouplies, alors que la BCE s’apprêtait
à mettre fin à certaines mesures non conventionnelles de politique
monétaire.
Les sociétés de crédit foncier (SCF) sont limitées dans leur objet et
ne peuvent acquérir que certaines catégories de prêts immobiliers
résidentiels, à l’instar des
Pfandbriefe
allemands : les prêts doivent revêtir
la forme de crédits hypothécaires de premier rang dans la proportion d’au
moins 65 % du portefeuille d’actifs et les prêts cautionnés ne peuvent pas
représenter plus de 35 % de celui-ci. En outre, pour être éligibles à l’actif
des SCF, les prêts cautionnés ne doivent pas être garantis par une société
de caution du groupe bancaire auquel appartient la SCF.
Or, la part des prêts hypothécaires a beaucoup diminué depuis 10
ans en France, en partie parce que les formalités d’enregistrement des
hypothèques sont restées lourdes et couteuses. Majoritaires en 1999, au
moment de la création des SCF, les prêts hypothécaires sont devenus
minoritaires en 2010, ne représentant plus que 30 % du marché des prêts
résidentiels, contre 70 % pour les prêts cautionnés.
A titre d’illustration de l’ampleur du développement des prêts
cautionnés, Crédit Logement, établissement de place spécialisé dans le
cautionnement des prêts résidentiels, présentait au 31 décembre 2010 un
encours de prêts garantis de plus de 200 Md€ (d’après le rapport annuel
2010 de Crédit Logement).
En juin 2010, la BCE a mis fin au programme d’achat de 60 Md€
de
Covered bonds
.
154
COUR DES COMPTES
La loi LRBF a introduit consécutivement une catégorie nouvelle de
prêts, les prêts à l’habitat, et a institué les sociétés de financement de
l’habitat dont l’objet exclusif réside dans le financement ou le
refinancement des prêts à l’habitat.
Les prêts à l’habitat sont définis à l’article L. 515-35 du code
monétaire et financier :
« Les prêts à l’habitat sont destinés, en tout ou partie, au financement
d’un bien immobilier résidentiel et garantis soit par une hypothèque de
premier rang (ou une sureté immobilière conférant une garantie au moins
équivalente) ou par un cautionnement consenti par un établissement de crédit
ou une entreprise d’assurance. »
Les SFH ne peuvent pas financer ou refinancer des prêts
immobiliers
autres
que
résidentiels
(immobilier
commercial,
par
exemple), à la différence des SCF dont les actifs éligibles portent sur les
prêts immobiliers en général ainsi que sur les prêts aux personnes
publiques.
En revanche, la loi soumet les SFH au même régime prudentiel que
les SCF, qu'il s'agisse des règles antérieures à la réforme (présence d'un
contrôleur spécifique, exigences qualitatives et quantitatives relatives au
ratio de couverture minimum entre les actifs éligibles et le passif
privilégié, principe du surdimensionnement, quotité de financement et
limite maximale des valeurs de remplacement), ou des nouvelles
exigences introduites par la LRBF (obligation d'assurer à tout moment la
couverture des besoins de trésorerie et publication sur une base
trimestrielle des informations relatives à la qualité et à la durée des prêts,
titres et valeurs à financer).
Enfin, la LBRF aménage, à titre de mécanisme transitoire, une
procédure d'agrément spécifique en vue de permettre aux émetteurs
d'obligations sécurisées contractuelles qui le souhaitent d'opter pour le
statut de SFH dans les douze mois suivant la promulgation du nouveau
dispositif.
Avant la transformation en SFH, le refinancement des prêts à
l’habitat sous forme de
Covered Bonds
était très élevé, l’encours cumulé
pour les groupes bancaires exerçant en France dépassant 100 Md€.
Au printemps 2011, l’ensemble des groupes bancaires a procédé à
la transformation des véhicules de
Covered Bonds
en SFH, BPCE créant
une SFH à partir de la fusion des deux véhicules de
Covered Bonds
qui
préexistaient dans le groupe.
ANNEXES
155
Désormais, aucun véhicule contractuel ne subsiste plus dans le
domaine du refinancement des prêts résidentiels
161
en France.
Dès 2011, les obligations à l’habitat ont représenté une source de
financement de moyen-long terme importante pour les banques. Les
gisements de prêts éligibles au refinancement avoisinent 200 Md€.
Les SFH ont en commun d’être toutes notées AAA et de recourir,
en tout ou partie, à la caution de Crédit Logement.
En définitive, la création des obligations de financement de l’habitat
répond à un besoin majeur des banques, le financement à moyen- long
terme et tire parti d’un des gisements d’actifs financiers les plus
volumineux en France, les prêts à l’habitat. Ce nouvel outil de
financement constitue un atout pour les banques françaises dans la
concurrence internationale.
161
Home Loans
, en anglais.