Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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COUR DES COMPTES
RAPPORT PUBLIC PARTICULIER
« La gestion des services publics locaux
d'eau et d'assainissement »
Janvier 1997
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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INTRODUCTION :
PREMIERE PARTIE : LE CADRE JURIDIQUE ET FINANCIER
I. - L'OBJECTIF DE QUALITE
A. - Les conséquences de la loi du 3 janvier 1992 sur la qualité de l'eau
B. – La redéfinition des compétences locales relatives à l'assainissement
II. – LE PRINCIPE DU FINANCEMENT PAR L'USAGER
A. – La réaffirmation du principe
B. - La persistance de transferts anormaux aux dépens des usagers :
III. - LES AIDES AUX INVESTISSEMENTS LOCAUX
A. - Les sources de financement
B. - L'ampleur croissante des besoins
DEUXIEME PARTIE : LA GESTION DIVERSIFIEE DES SERVICES
I. - L'EXCESSIVE DISPERSION DE L'ORGANISATION LOCALE
A. - Des structures intercommunales trop étroites
B. - L'interconnexion nécessaire des réseaux
II. - LES DEFICIENCES DANS LA GESTION DIRECTE ET DANS LA
MAITRISE D'OUVRAGE
A. - Les défauts d'organisation des régies
B. - La maîtrise imparfaite des investissements
III. - LE CONTROLE INSUFFISANT DE LA GESTION DELEGUEE
A. - Les aspects financiers de la délégation
B. - L'ambiguïté des relations contractuelles
C. - Les effets d'une concurrence imparfaite
D. - Le manque d'information et de contrôle
CONCLUSION
ANNEXES :
REPONSES DES ADMINISTRATIONS, DES COLLECTIVITES, ORGANISMES
LOCAUX ET DES ENTREPRISES PRIVEES DELEGATAIRES
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Délibéré
La Cour des comptes publie, sous la forme d'un fascicule séparé, un rapport
concernant LA GESTION DES SERVICES PUBLICS LOCAUX D’EAU ET
D’ASSAINISSEMENT.
Conformément aux dispositions du chapitre VI du titre III du livre Ier du Code
des juridictions financières et de l'article 52 du décret du 11 février 1985, la Cour des
comptes, délibérant en chambre du conseil, a adopté le présent rapport public.
Ce texte a été arrêté au vu du projet qui avait été communiqué au préalable, en
totalité ou par extraits aux administrations, collectivités et organismes concernés, et
après qu'il eut été tenu compte, quand il y avait lieu, des réponses fournies par ceux-ci.
En application des dispositions précitées, ces réponses sont publiées à la suite du
rapport ; elles engagent la seule responsabilité de leurs auteurs.
Les observations les concernant ont également été communiquées aux
entreprises privées, délégataires de services publics, intéressées ; il a été tenu compte,
quand il y avait lieu, de leurs réponses qui sont également publiées.
Ont délibéré (présents aux deux séances) : MM. Joxe, premier président ;
Labrusse, Bonnet, Morin, Lelong, Marmot, présidents de chambre ; Giscard d'Estaing,
Driol, présidents de chambre maintenus en activité ; MM. Contamine, Santini, Salmon-
Legagneur, de Maistre, Siebauer, Vorms, Wolff, Mathieu, Chartier, Ménasseyre, Perrin,
Chabrun, Capdeboscq, Collinet, Berger, Delafosse, Lescuyer, Giquel, Mme Legras,
MM. Motchane, Bénard, Billaud, Lagrave, Berthet, Recoules, Gravelin, Houri, Richard,
Devaux, Arnaud, Descheemaeker, Bayle, Parthonnaud, Adhémar, Mme Boutin,
MM. Benoist, Chabrol, Martin, Guéhenno, Schneider, Palau, Troesch, Mirabeau,
Déniel, Thérond, Mme Froment-Meurice, M. Ardouin, Mme Ruellan, M. Mordacq,
conseillers maîtres ; MM. Borel, Dischamps, Gros, Renouard, Harel, conseillers maîtres
en service extraordinaire ; M. Logerot, conseiller maître, rapporteur général.
Etait présente et a participé aux débats : Mme Gisserot, procureur général de la
République, assistée de M. Vachia, avocat général.
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INTRODUCTION
La gestion de l'eau et de l'assainissement est une préoccupation ancienne et
constante des responsables publics locaux. Indispensable à la vie des hommes et des
cités, elle relève, depuis la fin du XIXe siècle, de la compétence des communes.
L'attention de l'usager à la qualité et au prix de l’eau, l'importance du patrimoine
(stations d'épuration, de traitement, réseaux publics...) évalué aujourd'hui à 685
milliards de francs, font de la gestion de l’eau et de l’assainissement une responsabilité
essentielle et une préoccupation primordiale des élus locaux.
Les exigences d'une qualité de l’eau accrue et d'une protection améliorée de
l'environnement permise par un assainissement des eaux usées ont conduit à élargir la
responsabilité des communes. Une compétence plus globale a été définie ; de nouvelles
normes de qualité du service ont été précisées.
La compétence obligatoire des communes s'étend aujourd'hui à l'ensemble du
cycle de l’eau, de la production d’eau potable à l’assainissement des eaux usées. Cette
compétence n'est pas spécifique à la France puisque dans tous les pays de l'Union
européenne, à l'exception de la Grande-Bretagne, les autorités locales assurent la
responsabilité de la gestion de l’eau.
Les modalités selon lesquelles sont assurés les services publics de la distribution
de l’eau et de l’assainissement des eaux usées ont déjà, à plusieurs reprises, fait l'objet
d'observations dans les rapports publics de la Cour des comptes.
Ce fut le cas en 1976 et 1979 avant les lois de décentralisation, puis après celles-
ci, en 1989. Le manque de rigueur de la gestion financière des services et les risques de
la délégation de leur gestion aux entreprises privées y étaient mis en évidence. La Cour
notait aussi l'insuffisance de l'assistance aux communes, devenues responsables des
services d’eau et d’assainissement.
Or depuis, avec la loi du 3 janvier 1992 et la réglementation d'application
ultérieure, la France a entendu mettre en place une politique globale de l’eau qui
réponde aux objectifs de quantité et de qualité assignés aux Etats membres de la
Communauté européenne par les directives du 15 juillet 1980 sur les normes de
potabilité des eaux distribuées et du 21 mai 1991 relatives au traitement des eaux usées
urbaines.
L'importance des enjeux économiques et sociaux de la politique de l’eau illustre
la responsabilité des collectivités territoriales dans la gestion de leurs services de l’eau
et de l’assainissement.
La complexité de l'organisation administrative et financière dans le domaine de
l’eau
La gestion de l’eau et de l’assainissement doit donc être compréhensible pour les
élus qui délibérent et décident et pour les usagers qui financent le service. Or,
l'organisation actuelle en la matière est complexe.
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La loi du 3 janvier 1992 sur l’eau et les textes réglementaires qui la précisent
confirment et renforcent la compétence des communes dans la gestion de l’eau.
D'une part, elles interviennent dans les domaines de l'approvisionnement en eau,
de la dépollution des eaux pluviales, de la lutte contre la pollution et, d'une façon plus
générale, de l'entretien et de la restauration des cours d’eau.
D'autre part, les communes sont désormais en charge des dépenses relatives aux
systèmes d’assainissement collectifs et, facultativement, des systèmes d’assainissement
individuels.
Les communes sont donc désormais des acteurs essentiels de la gestion de la
ressource en eau, qu'il s'agisse de l'approvisionnement en quantité et qualité ou de la
gestion globale des divers aspects de l’assainissement.
Si la responsabilité des services de l’eau et de l’assainissement relève de la
compétence communale, en application du Code général des collectivités territoriales,
les capacités techniques et financières de chaque collectivité sont souvent trop limitées
pour assurer de manière satisfaisante la constitution et la gestion de ces services. C'est
pourquoi un grand nombre de communes ont choisi, en zone rurale comme en zone
urbaine, de se regrouper pour assumer leur responsabilité dans ce domaine.
Toute la gamme des institutions de l'intercommunalité est utilisée : syndicats à
vocation unique ou multiple, syndicats mixtes, districts, communautés urbaines et,
depuis la loi du 6 février 1992 sur l'administration territoriale de la République,
communautés de villes et de communes.
Cette diversité juridique s'accompagne d'une trés grande diversité dans
l'importance de la population dans le ressort des organismes concernés : du syndicat de
communes représentant quelques centaines d'habitants jusqu'au SYNDICAT DES
EAUX D'ILE-DE-FRANCE, regroupant cent quarante-quatre communes comptant
quatre millions d'habitants.
En outre, la gestion de l’eau et de l’assainissement d'une commune peut relever,
pour les différentes étapes du cycle de l’eau, d'institutions intercommunales différentes.
Le mode de gestion des services entraîne un degré supplémentaire de
complexité. En effet, chaque support public du service, commune ou établissement
public intercommunal, peut soit gérer directement le service dans le cadre des diverses
formes d'une régie, soit déléguer tout ou partie de cette gestion à un organisme public
ou privé en signant avec celui-ci un contrat de concession, d'affermage, de gérance ou
de régie intéressée.
De plus, en application de la loi du 7 janvier 1983 sur la répartition des
compétences (art. 28, 31 et art. 109 et suivants), toutes les collectivités territoriales sont,
en définitive, concernées par l'organisation des services de l’eau et d’assainissement.
Les régions et les départements interviennent dans l'aménagement du territoire ainsi
que, pour ces derniers, dans la répartition des aides du fonds national de développement
des adductions d'eau. Les départements ont souvent la responsabilité des services d'aide
technique aux stations d'épuration (SATESE), alors que les régions aident à la mise en
place de grands projets coordonnés à leur échelon, comme par exemple le programme
d’assainissement du littoral en PROVENCE-ALPES-COTE D'AZUR.
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Enfin, toujours au niveau local, les services déconcentrés de l'Etat doivent veiller
à assurer la bonne exécution des lois et règlements relatifs à l'environnement, à la police
des eaux , à l'hygiène et à la santé publiques. Ils exercent, également, un rôle de conseil
et de coordination.
Depuis 1964, cette organisation s'inscrit dans le cadre des six grands bassins
hydrographiques qui couvrent le territoire national, et qui relèvent chacun de la
compétence d'une agence de l’eau, établissement public de l'Etat. Dotées de ressources
financières spécifiques, provenant en partie de la facture d’eau, les agences ont pour
mission d'assurer et d'améliorer les diverses formes de la gestion de l’eau et de
l’assainissement à l'échelon d'un bassin ou d'un groupement de bassins.
En particulier, l'agence de l’eau établit et perçoit sur la facture d’eau payée par
l'usager des redevances qu'elle reverse sous forme de subventions ou de prêts aux
personnes publiques ou privées pour la réalisation d'investissements et pour les
dépenses permettant d'améliorer le fonctionnement des ouvrages.
Les acteurs de la gestion de l’eau et de l’assainissement sont donc divers. Leur
nombre n'atténue pas cependant la compétence primordiale des communes.
La traduction financière de cette organisation complexe se retrouve dans la
facture d’eau des usagers. En effet, outre le prix proprement dit de l’eau qu'ils
consomment, les usagers sont débiteurs, de ce seul fait, des droits suivants :
- les redevances d’assainissement qui reviennent aux communes, aux
départements et, le cas échéant, à des organismes interdépartementaux ;
- les montants éventuels des surtaxes correspondant aux frais d'emprunt
supportés par les collectivités pour réaliser les investissements nécessaires au
fonctionnement des services ;
- les redevances "Ressources et Pollution" prélevées pour le compte des six
agences nationales de l’eau ;
- les taxes perçues au profit du Fonds national pour le développement des
adductions d’eau, dont le produit est affecté à des aides que chaque département répartit
entre les communes rurales et les groupements qui réalisent des travaux d'alimentation
en eau potable et d’assainissement (art. L. 2335-1 et L. 2332-3 du Code général des
collectivités territoriales CGCT) ;
- le produit de la taxe revenant à l'établissement public Voies navigables de
France ;
- enfin, la TVA au taux réduit de 5,5 % due à l'Etat et s'appliquant à la totalité
des termes de la facture.
L'augmentation du prix de l’eau facturé à l'usager
La mise en place de la politique de l’eau s'est inscrite dans le contexte d'un
mouvement de hausse des coûts, qu'un récent rapport parlementaire n'hésite pas à
caractériser comme "une explosion du prix de l’eau ". Diverses enquêtes ont mesuré
cette situation.
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D'un recensement mené par dix-sept organisations de consommateurs portant sur
douze millions d'habitants répartis sur tout le territoire, hors ILE-DE-FRANCE, il
ressort que le prix moyen de l’eau au mètre cube facturé qui était de 8,60 F en 1990
s'élevait à 14,00 F en 1994. La moyenne globale de l'évolution du prix de l’eau de 1990
à 1994 était évaluée à + 47,71 %.
En ILE-DE-FRANCE, la direction régionale de l'équipement qui effectue des
études bi-annuelles de prix portant sur 99,8 % de la population francilienne a noté que le
prix de l’eau avait évolué de 10,28 F le mètre cube en 1990 à 15,11 F en 1994.
Les chambres régionales des comptes, au cours de leurs propres travaux, sont
arrivées au même constat d'une majoration importante du prix de l’eau au cours de la
période 1990/1994.
Ainsi, le prix de l’eau facturé aux usagers a augmenté à SAINT- ETIENNE de
124 % de 1990 à 1992, de 72,3 % de 1990 à 1994 à VICHY, de 112 % de 1990 à 1994 à
JOUE-LES-TOURS, de 75 % en trois ans dans le district de SAUMUR entre 1990 et
1993.
Il en est de même à LA CIOTAT où la hausse du prix de l’eau a été de 60 % en
cinq ans, de 1990 à 1995. C'est le cas également à METZ où l'augmentation a atteint 73
% en six ans, de 1988 à 1994. Dans toutes les régions, on observe une hausse sensible
du prix de l’eau, de l'ordre de 10 % par an.
Les chambres régionales des comptes ont mis en évidence les raisons principales
de l'augmentation du prix de l’eau. Les exigences nouvelles de qualité concernent
l'alimentation en eau potable et le traitement des eaux usées ; elles conduisent à la
réalisation d'investissements importants qui expliquent le plus souvent l'augmentation
du prix de l’eau, et rendent d'autant plus nécessaire une gestion rigoureuse visant à
maîtriser cette évolution.
Selon des données fournies par le Syndicat professionnel des entreprises d’eau et
d’assainissement, en six ans (1990 à 1995), les redevances d’assainissement ont en
moyenne doublé en francs courants, alors que le prix de l’eau proprement dit
n'augmentait que d'environ 30 % ; pendant la même période, les redevances aux agences
de l’eau ont, de leur côté, plus que triplé, leur part moyenne dans le prix facturé
augmentant pour représenter environ 15 % du total.
Il n'est pas de la compétence des chambres régionales des comptes de définir
localement ce que serait le juste prix de l’eau. Elles peuvent, en revanche, à travers
l'examen de la gestion des organismes locaux, qui relève de leurs attributions, établir
dans quelle mesure les conditions de la gestion des services publics d’eau et
d’assainissement peuvent expliquer les mouvements de hausses constatés. C'est dans
cette perspective que s'est inscrite l'enquête menée par les chambres régionales des
comptes de 1994 à 1996 .
La part de responsabilité revenant aux gestionnaires locaux dans la hausse des
coûts de services d’eau et d’assainissement ne peut être relative, d'une part, qu'aux
services de production et de distribution de l’eau et d'autre part, qu'aux services de
collecte, de transport et d'épuration des eaux usées. C'est donc sur la gestion de ces
services qu'a porté l'examen des chambres régionales des comptes.
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Cet examen a porté sur un nombre important de ces services, de l'ordre de trois
cents, représentatifs de la diversité des modes de gestion, directe ou déléguée, choisis
par les collectivités territoriales. Si le champ de l'enquête est ainsi relativement étendu,
il n'a pu intéresser cependant la totalité du territoire national, et les observations des
chambres régionales des comptes reprises à titre d'exemples dans le rapport ne sauraient
sans abus faire l'objet d'une généralisation, à l'égard des collectivités comme des
entreprises délégataires.
La convergence des constatations sur de nombreux aspects de la gestion de l’eau
et de l’assainissement montre toutefois que, face à des obligations nouvelles et à des
responsabilités plus étendues, les communes éprouvent des difficultés à mobiliser les
moyens nécessaires ; le rapport met ainsi en évidence les obstacles rencontrés par les
collectivités en vue de réaliser les objectifs définis par les autorités communautaires et
par le législateur français, malgré les progrès accomplis.
Cette situation résulte en premier lieu de l'insuffisance des moyens financiers et
des limites d'une progression du prix de l’eau. Le développement encore trop faible de
la coopération intercommunale est un autre facteur d'explication. Enfin, les collectivités
territoriales ne se sont pas donné elles-mêmes, dans leur gestion, les moyens requis :
une maîtrise insuffisante de la gestion des services d’eau et d’assainissement conduit à
accentuer les obstacles à franchir pour qu'un service public local de gestion de l’eau et
de l’assainissement réponde aux normes de qualités définies.
Le défaut de clarté des régimes contractuels, l'insuffisante concurrence entre les
entreprises privées contribuent aux difficultés, de même que les lacunes constatées dans
l'information des élus et des usagers ; enfin, les contrôles des délégations de service
public sont trop souvent peu rigoureux, voire inexistants.
L'enquête réalisée par les chambres régionales des comptes n'a pas pu prendre en
compte l'application des lois de février 1995 qui visent à apporter d'importants progrès.
La loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement devrait favoriser la transparence de la gestion : le maire ou le président
de l'établissement public de coopération intercommunale doit présenter chaque année à
l'assemblée délibérante un rapport sur le prix et la qualité de l’eau potable ; dans les
communes de 3 500 habitants et plus, le rapport et l'avis de l'assemblée sont mis à
disposition du public.
La loi du 8 février 1995 relative aux marchés publics et délégations de service
public, en rétablissant et en renforçant certaines dispositions de la loi du 29 janvier
1993, dite "loi Sapin", impose au délégataire de produire chaque année à la collectivité
concernée un rapport qui comprend les comptes retraçant la totalité des opérations et
une analyse de la qualité du service. Les juridictions financières sont désormais
habilitées à vérifier ces comptes, dans le cadre du contrôle de l'autorité délégante, mais
il y a lieu de souligner que les observations consignées dans le présent rapport ne
relèvent pas encore de l'application de cette nouvelle procédure, que les chambres
régionales des comptes n'ont pu effectivement mettre en oeuvre que trop récemment.
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Ces nouvelles dispositions permettront sans doute d'améliorer les conditions
générales de la gestion de l’eau et de l’assainissement. Mais aujourd'hui, alors que des
moyens importants doivent être mobilisés pour fournir un service de qualité,
l'organisation et la gestion d'un service déterminant pour l'usager et le contribuable local
apparaissent encore mal maîtrisées par certaines collectivités.
Conformément aux dispositions des articles L. 136-4 et L. 136-5 du code des
juridictions financières et de l'article 52 du décret du 11 février 1985, le projet du
présent rapport a été adressé aux ministres intéressés et les extraits les concernant ont
été envoyés aux représentants des collectivités territoriales et des organismes de
coopération intercommunale qui sont cités. Les réponses reçues par la Cour sont
publiées à la suite du rapport.
Les observations mentionnant des entreprises privées délégataires des services
publics d’eau et d’assainissement ont été communiquées à leurs dirigeants. La
publication des réponses de ceux-ci n'est pas de droit, dès lors que les dispositions
nouvelles plaçant ces entreprises, pour la partie de leur activité faisant l'objet des
délégations, dans le champ de contrôle des juridictions financières n'avaient pas encore
reçu application ainsi qu'il l'a été indiqué ci-dessus. La Cour a toutefois décidé, dans un
souci de clarté et de complète information du lecteur, d'insérer également ces textes
dans le document publié.
(1) L'annexe II donne la liste des communes et organismes intercommunaux
cités dans le rapport, avec indication de la population desservie ; celle-ci est
mentionnée, lors de la première citation, dans le texte.
(2) Onze chambres de métropole et d'outre-mer ont participé à l'enquête :
Alsace, Auvergne, Centre, Ile-de-France, Limousin, Lorraine, Midi- Pyrénées, Pays de
la Loire, Provence-Alpes-Côte d'azur, la Réunion, Rhône-Alpes ; les chambres
d'Aquitaine, de Bretagne et de Champagne- Ardenne ont également apporté leur
contribution.
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PREMIERE PARTIE
LE CADRE JURIDIQUE ET FINANCIER
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En même temps que s'affirme et se développe la responsabilité communale dans
l'ensemble du cycle de la gestion de l’eau, un ensemble de mesures renforce l'exigence
de qualité, qu'il s'agisse de l’eau à consommer ou de l’eau à dépolluer.
Ces normes plus contraignantes sont définies par une série de directives
européennes édictées entre 1975 et 1991. Elles sont reprises, pour partie, dans le droit
français à travers la loi du 3 janvier 1992 sur l’eau et les actes réglementaires qui l'ont
suivie.
Les aspects les plus importants concernent en premier lieu les "niveaux-guides",
c'est-à-dire les concentrations admissibles, pour plusieurs dizaines de paramètres, de
substances pouvant affecter la qualité de l’eau potable. En second lieu, l'équipement de
toutes les agglomérations en systèmes de collecte et d'épuration des eaux usées est,
selon un échéancier précis, rendu obligatoire.
Définie comme le patrimoine commun de la nation, l’eau doit relever d'une
gestion équilibrée entre les nécessités de sa conservation et les intérêts économiques.
Pour atteindre cet objectif, la loi a créé une instance de concertation.
Les comités de bassin, mis en place dans chacun des six bassins en 1966, sont
composés de représentants de l'administration, des collectivités territoriales et des
usagers. Le comité de bassin élabore le schéma directeur d'aménagement et de gestion
des eaux (SDAGE) qui fixe les orientations d'une gestion équilibrée de la ressource en
eau. En particulier, à travers les SDAGE, il harmonise les aménagements à réaliser avec
les objectifs définis de quantité et de qualité des eaux .
Il en résulte que les communes et leurs établissements publics sont désormais
des acteurs importants de la gestion de la ressource en eau, qu'il s'agisse de
l'approvisionnement en quantité et en qualité ou de la gestion globale des divers aspects
de l’assainissement. Cependant, le financement du traitement des eaux de pluie n'est pas
réellement défini par le législateur.
L'élargissement des compétences communales devrait permettre une prise en
compte globale de la gestion du cycle de l’eau.
Les objectifs à atteindre sont les normes de qualité de l’eau fixées par la loi (I).
Les moyens à mettre en oeuvre sont fondés sur le principe du financement par l'usager
(II), mais les communes reçoivent aussi diverses aides financières (III).
I. - L'OBJECTIF DE QUALITE
Les objectifs que doivent atteindre les communes, gestionnaires de l’eau et de
l’assainissement, ont trait à une meilleure qualité de l’eau. Ils ne sont pas spécifiques au
territoire national et sont définis notamment à partir de directives européennes qui
s'appliquent donc aux pays de la Communauté.
L'article 31 de la loi du 3 janvier 1992 habilite les communes à entreprendre les
études, "l'exécution et l'exploitation de tous travaux ou ouvrages ou installations" visant
à :
- l'approvisionnement en eau (programme de recherche des ressources nouvelles,
d'interconnexion, d'amélioration des rendements) ;
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- la dépollution des eaux (programmes d'amélioration de la qualité, auto-
contrôle, protection des captages, traitement des pollutions accidentelles) ;
- l'aménagement des bassins, l'entretien des cours d’eau non domaniaux, la
protection des sites aquatiques ;
- la prise en compte des nouvelles normes de qualité qui est imposée par la loi,
ce qui suppose la réalisation de nouveaux équipements à brève échéance.
Parce qu'il répond à une demande impérieuse et ancienne de la population,
l'approvisionnement en eau est globalement assuré. Cependant, la protection des
captages et la qualité des eaux appellent parfois de sérieuses réserves.
Plus récentes, les obligations des collectivités territoriales dans le secteur de
l’assainissement n'en sont pas moins contraignantes, pouvant aller jusqu'à la mise en
cause des exécutifs locaux devant les juridictions administratives, civiles et pénales.
Cependant, aucune obligation n'est faite aux collectivités de prendre en charge le
traitement des eaux de pluie.
A. - LES CONSEQUENCES DE LA LOI DU 3 JANVIER 1992 SUR LA
QUALITE DE L’EAU
Les actions menées par les collectivités, relatives à la gestion des captages d’eau
et à la surveillance de la conformité du produit aux normes d'hygiène et de qualité,
entraînent des dépenses qui ont un impact sur le prix de l’eau d'autant plus sensible que
les objectifs fixés au niveau européen sont ambitieux pour la santé publique.
Les efforts que les collectivités, petites et moyennes, auront à fournir pour
satisfaire aux normes, compte tenu du coût des investissements que supposent ces
nouvelles obligations, doivent être exactement appréciés.
1° La protection des captages
La protection des captages constitue une nécessité pour assurer aux usagers la
distribution d'une eau de qualité conforme aux dispositions du Code de la santé
publique.
Pourtant, selon une étude effectuée par le ministère de l'agriculture concernant
les communes rurales, il apparaissait qu'au 1er janvier 1995 un peu moins de 10 %
seulement des captages recensés bénéficiaient d'une protection correspondant à
l'ensemble de la procédure prévue par la réglementation. De même, une enquête
effectuée en 1993 par le ministère des affaires sociales montrait déjà que, dans soixante-
trois départements, 20 % à peine des points de prélèvement étaient dotés de périmètres
de protection par voie de déclaration d'utilité publique.
De plus, lorsqu'elle existe, la protection des captages et des réservoirs d’eau est
parfois plus symbolique que réellement efficace. Ainsi, dans le SYNDICAT MIXTE
DU LIORAN (Cantal), station touristique qui reçoit jusqu'à 10 000 personnes en hiver,
les périmètres de protection n'existent pas ou, au contraire, consistent en fils de fer
barbelés alors que le réservoir est situé en bordure des pistes de ski.
L'instauration de périmètres de sécurité, prévue par la réglementation, concerne
tous les points de prélèvement et les ouvrages qui ne bénéficient pas de protections
naturelles. Les eaux souterraines et les eaux superficielles sont concernées. Cette
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protection des captages a naturellement un coût, supportable pour les grandes
collectivités, plus sensible pour les petites. Le sous-équipement du secteur rural par
rapport au secteur urbain s'explique par le coût financier des mesures de protection
demandées aux petites communes, qui sont par ailleurs dépourvues des moyens
techniques nécessaires pour les appliquer.
D'une étude de la direction régionale d'action sanitaire et sociale (DRASS)
d'ILE-DE-FRANCE, il ressort qu'en 1990 le coût de l'ensemble de la procédure de
protection pouvait être évalué entre 25 000 F et 50 000 F par point d’eau. Peu sensibles
pour les collectivités urbaines (971 captages seulement pour toute l'Ile-de-France
peuplée de plus de 10 millions d'habitants), ces dépenses sont importantes en milieu
rural.
Or, toute défaillance dans le système de protection peut se traduire par une
pollution de l’eau dont la résorption, qui s'inscrit dans un contexte d'urgence, entraîne
nécessairement d'importantes dépenses. C'est ainsi qu'outre la connexion réalisée pour
un coût de 9,2 millions de francs, en vue de raccorder six communes au réseau de la
ville de MULHOUSE (Haut-Rhin) lors de la pollution constatée en 1988, les
collectivités ont dû faire face à une dépense de plus de 39 millions de francs pour
l'aménagement d'un nouveau champ captant.
Depuis la précédente grande loi sur l’eau du 16 décembre 1964, l'article L. 20 du
Code de la santé publique soumet à l'enquête publique les travaux de prélèvement et
impose la délimitation de périmètres de protection autour des captages créés
postérieurement à la promulgation de la loi.
La loi du 3 janvier 1992, en conservant ce dispositif, a étendu l'obligation des
périmètres de protection aux captages créés antérieurement à la loi de 1964 en
prévoyant simplement un délai de mise en conformité de cinq années. Ces procédures,
qui se traduisent par des acquisitions foncières et par le versement d'indemnités aux
occupants, ont un impact financier particulièrement important pour les communes
faiblement peuplées des zones rurales.
La plupart des collectivités ont ainsi pris un retard important par rapport à
l'échéance de 1997. Dans la région CENTRE, pour 1 375 captages recensés, 266 ont fait
l'objet de déclaration d'utilité publique et 68 seulement sont parvenus au terme de la
procédure.
Le
département
de
MEURTHE-ET-MOSELLE
fournit
un
exemple
particulièrement intéressant des différents aspects de la question. Il est apparu
rapidement que les communes ne seraient pas en mesure de satisfaire à leurs obligations
à l'échéance de 1997 fixée par la loi. Pour les aider à réaliser les études préalables
nécessaires, le département et l'agence de l’eau RHIN-MEUSE se sont alors engagés à
les subventionner, dans la limite d'un million de francs par an, à hauteur de 85 %
(agence : 70 % et département : 15 %). Malgré l'importance de ces aides, les demandes
sont restées peu nombreuses jusqu'à présent. Après un retard de plus de deux ans sur le
lancement du programme, les premières demandes, au nombre de vingt-six, ont été
enregistrées en 1994 et 1995 pour un montant global proche de 600 000 F. Vingt d'entre
elles n'ont encore reçu aucun début de réalisation. Les subventions versées par le
département pour six études ont représenté une dépense de 21 000 F.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
14
Selon les explications qui ont pu être recueillies auprès des services du
département et de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF), les
communes se trouvaient confrontées à la pénurie de moyens des bureaux d'études
susceptibles de les assister dans la conduite de ces projets.
En conséquence, la solution du subventionnement qui a été retenue apparaît,
certes, peu coûteuse à l'expérience, mais se révèle parfois inopérante.
Si les retards constatés peuvent se comprendre pour les petites communes
rurales, en revanche, les insuffisances qui apparaissent dans la protection des captages
des villes moyennes sont moins admissibles. Ainsi dans le district d'AURILLAC
(Cantal), qui regroupe onze communes représentant plus de 46 600 habitants, il est
apparu qu'en 1994 près de 70 % des captages en service possédaient une protection
insuffisante,
voire
mauvaise.
Ces
déficiences
proviennent
essentiellement
de
l'ancienneté de ces captages, tant du point de vue des procédures légales d'établissement
des périmètres de protection que des moyens techniques utilisés dans la construction des
ouvrages, ainsi que de la faible profondeur de captage de la ressource. En outre, l'état
d'entretien des périmètres de protection immédiats est très préoccupant, et les périmètres
de protection éloignés sont inexistants. Leur remise en état se traduit par une dépense de
700 000 F pour une première tranche portant sur vingt captages. Dans ce cas également,
l'agence de l’eau ADOUR-GARONNE, dont relève le district d'AURILLAC, apporte
son aide.
L'accès à la ressource assuré, la distribution de l’eau suppose que la qualité du
produit soit conforme aux normes réglementaires.
2° Les obligations des communes relatives au traitement de l’eau
a) Des normes rigoureuses en matière de qualité de l’eau
La responsabilité des communes en ce qui concerne la qualité des eaux destinées
à la consommation humaine résulte notamment des dispositions de l'article L. 19 du
code de la santé publique mettant en oeuvre la directive n° 80/778 CEE du 15 juillet
1980. Cette directive a, pour la première fois à l'échelon européen, établi une série
d'exigences de qualité pour l'ensemble des Etats membres.
Le décret du 3 janvier 1989 relatif aux eaux destinées à la consommation
humaine, à l'exclusion des eaux minérales naturelles, organise la police administrative
de la surveillance et de la permanence de la qualité de l’eau potable. Les annexes au
décret fixent les normes limites à ne pas dépasser, notamment pour les substances
indésirables comme les nitrates (50 milligrammes par litre), les substances toxiques
comme le mercure (1 microgramme par litre) ou le plomb (50 microgrammes par litre),
la
nature
et
la
concentration
des
pesticides
ainsi
que
certains
paramètres
microbiologiques.
b) La surveillance par les communes du respect des normes
Ces dispositions, qu'il est envisagé de rendre encore plus rigoureuses pour
certaines normes (le plomb), s'inscrivent dans le cadre d'une politique de prévention et
de protection de la ressource naturelle en eau. Elles exigent une vigilance maintenue à
chaque instant. Dans ce sens, le conseil général de la HAUTE-GARONNE, la ville de
TOULOUSE (382 500 habitants) et l'agence de l’eau ADOUR-GARONNE ont pris la
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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décision de mettre en place un dispositif d'alerte destiné à déceler toute variation
anormale de la qualité de l’eau potable. L'ensemble du département sera prochainement
couvert par cet investissement de l'ordre de 21,75 millions de francs supporté par le
conseil général et le délégataire ; l'agence de l’eau subventionne 50 % des dépenses. Ces
travaux pourraient être particulièrement générateurs d'économies, dans la mesure où ils
permettront d'éviter ou de limiter des dommages qui, à défaut, risqueraient d'être
importants.
Les communes sont très sensibles à ce sujet. En collaboration avec les services
de l'Etat, elles se sont donné les moyens d'une veille permanente de la qualité des eaux
distribuées. La situation demeure cependant préoccupante pour une part notable de la
population qui ne reçoit pas une eau conforme aux normes sanitaires évoquées ci-
dessus. Le rapport d'étape de novembre 1993 de l'évaluation du VIe programme des
agences de l’eau l'estimait à plus de cinq millions d'habitants en 1992. C'est dans les
grandes agglomérations que la qualité de l’eau potable est la mieux assurée. Ainsi, le
rapport annuel pour 1994 présenté au conseil départemental d'hygiène de PARIS, relatif
au contrôle des eaux de distribution publique dans la capitale, montre qu'il a été procédé
dans l'année à la détermination de 91 973 paramètres concernant les ressources et la
production de l’eau d'origine profonde et superficielle. De plus, le décret de 1989 ne
prévoyant qu'une seule analyse de pesticides et autres substances toxiques par an et
aucune en ce qui concerne le cadmium, le plomb et certains hydrocarbures, la ville de
PARIS a fait procéder à des "surcontrôles complémentaires" qui se sont traduits par 17
375 déterminations de paramètres.
Ces mesures correspondent annuellement à plusieurs milliers d'analyses dont le
coût unitaire, fixé par arrêté ministériel est, selon les cas, faible ou élevé : 5,60 F HT
pour les odeurs mais 566 F HT pour les hydrocarbures polycycliques aromatisés.
L'article 11 du décret de 1989 met à la charge de l'exploitant le coût de ces analyses ; il
en résulte donc nécessairement qu'elles sont en définitive supportées par l'usager.
Si la dépense correspondante est répartie sur un grand nombre d'usagers dans les
services urbains, elle constitue une charge réelle dans les petits services ruraux. Or,
précisément, les zones agricoles sont sujettes à la pollution des eaux naturelles
superficielles ou des nappes par les nitrates et les pesticides, sans que la participation
financière des utilisateurs de ces produits soit exigée. Pourtant le principe selon lequel
le pollueur doit être le payeur, qui fonde la législation, justifierait cette participation. Il
faut préciser que, en ce qui concerne les pollutions azotées, l'application du principe
n'est toujours pas intervenue, par suite notamment de l'impossibilité de distinguer les
intrants agricoles des apports naturels et d'imputer sa part de responsabilité à chaque
acteur agricole. La généralisation du code de bonne pratique agricole incluant le volet B
de l'annexe II de la directive 91/676 du 12 décembre 1991 devrait responsabiliser
davantage les agriculteurs et constituer, dans l'immédiat, une meilleure garantie pour les
usagers.
Le même souci de la qualité des eaux destinées à l'alimentation humaine conduit
les responsables des services à décider des investissements nécessaires. Ainsi, dans les
réseaux publics, à l'instar des réseaux privés, des considérations de santé publique
peuvent exiger le remplacement de canalisations ne répondant pas aux normes. Mais il
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(janvier 1997)
16
est alors certain que l'importance des services a une incidence directe sur l'ampleur des
hausses unitaires couvrant la dépense des équipements en cause.
On peut prévoir que l'instauration de normes encore plus exigeantes, à l'occasion
de la nouvelle rédaction envisagée de la directive européenne du 15 juillet 1980, aura
pour effet d'augmenter fortement le prix de l’eau. C'est ainsi que la révision de la norme
relative au plomb, ramenée de 50 à 10 microgrammes par litre, entraînerait pour son
application en France une dépense de plus de 100 milliards de francs (rapport de la
commission de la production et des échanges de l'Assemblée Nationale sur l’eau ).
La ville de METZ (Moselle, 200 000 habitants desservis), par exemple, qui
satisfait aux normes actuelles, envisage de réaliser, d'ici quelques années seulement, des
travaux d'investissement s'élevant à plus de 14 millions de francs hors taxes, afin
d'atténuer encore, dans ses champs captants Nord, les concentrations de pesticides. Il est
certain qu'une obligation nouvelle de satisfaire rapidement à des normes encore plus
sévères resterait financièrement à sa portée, bien que, de 1988 à 1994, la hausse
moyenne annuelle du prix de l’eau y ait été de 3,49 % (hors assainissement). Il est
douteux que des services de dimensions plus réduites y parviennent. Si l'on veut éviter
que seules quelques collectivités urbaines, financièrement privilégiées, soient en mesure
de se conformer aux nouvelles règles et qu'il n'en résulte une discrimination entre les
usagers quant à la qualité de l’eau, il importe que des mécanismes adéquats viennent
corriger l'inégalité des moyens.
Le constat concerne également l’assainissement des eaux usées. En 1990, le
financement du traitement des pesticides par le SYNDICAT DES EAUX D'ILE-DE-
FRANCE a eu pour effet une augmentation de 0,30 F du tarif de base. La réalisation par
le fermier de la commune de CHATEAUDUN (Eure-et-Loir, 14 500 habitants) d'une
unité de traitement des nitrates s'est traduite par un relèvement du prix du mètre cube
d’eau de 0,92 F.
B. - LA REDEFINITION DES COMPETENCES LOCALES RELATIVES
A L’ASSAINISSEMENT
1° Les obligations nouvelles des communes
Les obligations des communes dans le secteur de l’assainissement ont été
considérablement renforcées par de nouvelles normes, imposées à l'échelle européenne
par la directive du 19 mars 1991 sur les eaux résiduaires urbaines. Ces dispositions ont
été transposées en droit interne par la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 (art. 35) et le décret
d'application du 3 juin 1994.
Jusqu'alors,
les
communes
étaient
responsables
de
l'entretien
et
du
fonctionnement des réseaux et des stations d'épuration existants, mais elles n'étaient pas
tenues de créer ces équipements.
Désormais, l'intégralité des dépenses d'équipement et de fonctionnement
relatives à l’assainissement doit obligatoirement être prise en charge par la commune,
de la collecte des effluents à leur épuration jusqu'à l'élimination des boues (art. 2224-8
du Code général des collectivités territoriales). Le coût du traitement de ces dernières
est d'ailleurs important puisqu'il peut atteindre 1 F le mètre cube lorsqu'elles sont
incinérées. La généralisation de la mise à disposition de ces boues pour les agriculteurs,
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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sur le modèle du système mis en place par la ville de BESANCON (Doubs) depuis
1970, serait, sans doute une solution plus économique.
Les obligations imposées par la loi aux communes en ce qui concerne
l’assainissement peuvent se traduire par la mise en cause de la responsabilité des
exécutifs locaux, non seulement en réparation des dommages subis, mais aussi sur le
plan pénal. En effet, les juridictions pénales ont prononcé des sanctions à l'égard de
certains maires, sur la base de l'article L. 322-2 du nouveau code rural, qui prévoit une
amende de 120 000 F assortie éventuellement d'une peine d'emprisonnement de deux
ans, pour quiconque aura pollué les eaux de telle manière que leur action aura détruit le
poisson, nuit à sa nutrition, à sa production ou à sa valeur alimentaire.
Les juridictions pénales ont considéré qu'à partir du moment où les communes
entreprennent de créer une station d'épuration ou un réseau de collecte, elles sont
responsables du fonctionnement de ces ouvrages. Dès lors, les maires qui ont mis en
place de telles installations ont pris une responsabilité qui les rend justiciables des
sanctions précitées.
En instaurant un barème de peines très lourdes (amendes pouvant aller jusqu'à
500 000 F et emprisonnement jusqu'à deux ans), l'article 22 de la loi sur l’eau du 3
janvier 1992 permet de donner une base encore plus générale à la prise en compte de
pollutions de toute nature pour en rendre pénalement responsables leurs auteurs.
Cependant la loi du 13 mai 1996 relative à la responsabilité pénale pour des faits
d'imprudence ou de négligence a précisé le champ de la mise en cause de la
responsabilité des élus. Elle a subordonné celle-ci au constat que ne sont pas accomplies
"les diligences normales" qu'il leur appartient d'effectuer, compte tenu de leurs
compétences, du pouvoir et des moyens dont ils disposent.
Pour leur part, les tribunaux administratifs prononcent la réparation des
dommages constatés, dès lors qu'un lien est établi entre ceux-ci et un ouvrage public.
On assiste donc à une évolution importante du droit qui sanctionne aujourd'hui
les obligations des collectivités locales vis-à-vis de l’assainissement. Ce mouvement est
d'ailleurs poursuivi par le législateur qui, depuis la loi n° 95-101 du 2 février 1995 et
singulièrement par l'article 81 de cette loi, a instauré la responsabilité des personnes
morales vis-à-vis des actes de pollution. Dans ce cas, l'échelle des peines est désormais,
en application au nouveau code pénal, multipliée par cinq. Le maximum de l'amende
prévu par l'article L. 322-2 ne sera plus, par exemple, de 120 000 F mais de 600 000 F
pour les communes : celles-ci devraient être incitées à mieux respecter leurs obligations
dans le secteur de l’assainissement.
Ces obligations nouvelles devront être mises en oeuvre dans le respect des
échéances communautaires : au plus tard en l'an 2000 pour les agglomérations de plus
de 15 000 équivalents-habitants, et en l'an 2005 pour celles de plus petite taille. Ces
échéances sont avancées de deux ans et ce seuil ramené à 10 000 équivalents-habitants
dans les zones sensibles, en application du décret du 3 juin 1994.
Le volume des investissements à réaliser, dans un calendrier aussi serré, se
traduira par un effort financier considérable demandé aux usagers.
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(janvier 1997)
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De moins de 20 milliards de francs de 1987 à 1991, les investissements en
réseaux et en stations devaient plus que doubler au cours de la période 1992/1996 pour
atteindre 43 milliards de francs (rapport d'étape sur l'évaluation du VIe programme des
agences de l’eau du ministère de l'environnement).
L'examen des comptes des services d’assainissement reflète bien l'importance du
montant des investissements en cause. Ainsi, en zone urbaine dense, le coût d'une
nouvelle station dans le département des Hauts-de-Seine, d'une capacité d'épuration de
240 000 m3 par jour par temps sec avec élimination poussée des nitrates et des
phosphates,
a
été
autorisée
par
le
conseil
d'administration
du
syndicat
interdépartemental d’assainissement de l'agglomération parisienne (SIAAP) d'ILE-DE-
FRANCE (plus de 8 millions d'usagers) pour un montant de 2 milliards de francs hors
taxes.
Dans les zones rurales, en valeur relative, les coûts des stations d'épuration ne
sont pas moindres. Pour une capacité de l'ordre de 30 000 équivalents-habitants, le
syndicat à vocation multiple de HAUTE- DORDOGNE (Puy-de-Dôme, 5 300
habitants) a construit une station achevée en 1994 pour un coût de 21,6 millions de
francs. Les travaux complémentaires qui devront être réalisés pour respecter les normes
posées par la directive européenne du 21 mai 1991 induiront un surcoût de 10 millions.
A terme, le financement de l’eau et de l’assainissement domestiques risque de se
heurter aux limites des capacités contributives des usagers et donc, comme on le verra
plus loin, de peser fortement sur les budgets locaux, dans une période où la stabilisation
des prélèvements obligatoires est ressentie comme une nécessité.
2° Le problème non résolu du financement du traitement des eaux de pluies
La prise en charge financière du cycle de l’eau n'est pas complètement
organisée, car la question du financement du traitement des eaux de pluies demeure sans
solution.
La circulaire du 12 décembre 1978 des ministres de l'intérieur et du budget,
reprise sur ce point par l'instruction M. 49, mentionne que la contribution due par les
communes à leur service de l’assainissement pour l'évacuation des eaux pluviales,
lorsque les réseaux sont totalement unitaires, devrait se situer entre 20 et 35 % des
charges du réseau, intérêts de la dette et amortissements exclus, et entre 30 et 50 % des
amortissements techniques et des intérêts d'emprunts. En fait, certaines communes
utilisaient cette contribution en allant au-delà des limites autorisées pour subventionner
largement leur service d’assainissement. Ainsi, la commune de CLICHY-LA-
GARENNE (Hauts-de- Seine, 49 000 habitants) a subventionné, jusqu'en 1992, plus de
70 % du budget du service annexe de l’assainissement par une telle "contribution eau
pluviale".
L'article L. 2224-1 du Code général des collectivités territoriales, reprenant une
disposition de la loi du 5 janvier 1988 d'amélioration de la décentralisation, avait pour
effet d'interdire tout financement même partiel du service de l’assainissement par le
budget principal. Cependant, cette pratique est encore fréquente et des assouplissements
ont été apportés au principe (voir plus loin).
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(janvier 1997)
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La contribution des collectivités pour les eaux pluviales reste encore souvent le
moyen d'octroyer un avantage injustifié au service de l’assainissement ou à son
délégataire. La participation de la COMMUNAUTE URBAINE DE BREST (Finistère,
213 000 habitants), consentie contractuellement au fermier au titre des eaux pluviales, a
été déterminée à partir d'un pourcentage excessif au regard des caractéristiques du
réseau et des instructions en vigueur. Cette participation était ainsi majorée
anormalement d'environ 6 millions de francs par an. Sur la durée totale du contrat
d'affermage (vingt-cinq ans), conclu en 1987, le surcoût pour le contribuable aurait été
équivalent à la construction de l'usine d'incinération des ordures ménagères (150
millions de francs) si, à la suite des observations de la chambre régionale des comptes,
le contrat n'avait pas été révisé pour mettre fin à cette anomalie à partir de 1993.
Faute de réseaux séparatifs, le problème subsiste, en l'état, dans une majorité des
communes.
Il
s'est
même
aggravé
;
en
effet,
l'urbanisation
croissante
et
l'imperméabilisation des sols entraînent un écoulement des eaux de pluies dans les
réseaux plus important qu'antérieurement, tandis que, par le lessivage des sols qu'elles
opèrent, les eaux de pluies sont souvent extrêmement polluées. Il apparaît donc
nécessaire de compléter le système de dépollution des eaux usées par un système de
dépollution des eaux de pluie avant leur rejet dans les cours d’eau.
Jusqu'à ce jour, aucun financement spécifique n'est prévu. Les arrêtés
d'application de l'article 19 du décret du 3 juin 1994, qui précisent les prescriptions
techniques minimales relatives à la police de l’eau, obligent seulement à collecter le flux
de pollution par temps sec. Les communes sont libres de déterminer la part du flux de
pollution par temps de pluie qui peut être collectée dans les conditions économiquement
acceptables et supportables par leur propre budget. En effet, les fonds utilisés pour le
financement de la gestion des eaux pluviales proviennent principalement des ressources
communales. Les agences de l’eau ne disposant pas de recettes spécifiques, leur action
se limite, en dehors de quelques interventions particulières relatives au traitement des
eaux pluviales, à la lutte contre la pollution provenant des rejets urbains par temps de
pluie. Or, les investissements à réaliser pour résoudre la question sont considérables.
Dans le système de financement actuel, le budget des communes ne prend en
compte les dépenses relatives à l'épuration des eaux pluviales que si les réseaux sont
séparatifs. Lorsque les réseaux sont unitaires, le partage du financement entre les
communes et les services d’assainissement repose sur des clés de répartition
nécessairement plus complexes.
Il apparaît donc qu'une politique cohérente de dépollution des eaux usées
exigerait le traitement des eaux de pluie ; celui-ci dépend de la volonté et des capacités
financières des communes. Le système mis ainsi en place par les pouvoirs publics est
conforme à la lettre de la directive européenne relative aux eaux résiduaires urbaines du
21 mars 1991. Celle-ci demande simplement de "limiter la pollution des eaux
réceptrices résultant des surcharges dues aux pluies d'orage". Cette application
minimale correspondra à un volume d'investissements de l'ordre de 25 à 30 milliards de
francs sur la période 1992/2005 (Direction de l’eau, Perspectives des VIIes programmes
des agences de l’eau, mars 1996).
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(janvier 1997)
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La réalisation des objectifs liés à la qualité de l’eau potable et à la qualité de
l’assainissement pourrait donc se révéler difficile. L'enquête des chambres régionales
des comptes montre en outre que le principe d'une prise en charge du coût de l’eau par
les seuls usagers du service n'est pas pleinement respecté.
II. - LE PRINCIPE DU FINANCEMENT PAR L'USAGER
Le nouveau droit de l’eau issu de la législation de 1992 et des réglementations
récentes reflète, de la part des pouvoirs publics, une prise de conscience de la valeur
économique de l’eau. Celle-ci s'était déjà traduite par la mise en place de services d’eau
et d’assainissement autonomes, en principe rigoureusement équilibrés et financés par
l'usager, sur des bases de plus en plus conformes aux réalités économiques.
Ce principe du financement des services d’eau et d’assainissement par les
usagers n'est pas déterminé, comme les objectifs de qualité de l’eau, par des normes
européennes ; il n'en demeure pas moins que la plupart des pays de l'Union européenne
s'efforcent de le respecter. La fiscalisation partielle de l’eau en Espagne, l'absence
fréquente de budgets séparés des services de l’eau dans les "Stadtwerke" (sociétés
anonymes municipales) en Allemagne, conduisent à considérer que le financement de
l’eau par l'usager est une démarche encore difficilement réalisée.
En confirmant le principe du financement par les usagers de services distincts de
l’eau et de l’assainissement et en réformant le plan comptable de ces services, de
nouveaux textes sont venus apporter, en France, une incontestable clarté financière dans
la gestion publique locale de l’eau et de l’assainissement.
Cependant, ces gestions sont encore fortement marquées par des transferts
financiers anormaux des services d’eau et d’assainissement vers les budgets
communaux, tandis que le principe d'égalité entre les usagers de ces services publics est,
trop souvent, mal appliqué.
A. - LA REAFFIRMATION DU PRINCIPE
Le Code général des collectivités territoriales, tout en leur apportant des
assouplissements, confirme deux principes :
- les services d’eau et d’assainissement doivent être équilibrés et faire l'objet
d'un budget et d'une comptabilité distincts de ceux de la collectivité de rattachement ;
- leur financement doit être assuré essentiellement par l'usager, dans un cadre
prenant mieux en compte la valeur économique du service rendu.
1° L'autonomie des services d’eau et d’assainissement et leur obligation
d'équilibre
a) La distinction eau - assainissement
La production et la distribution d’eau puis la collecte, le transport et l'épuration
des eaux usées constituent les différentes phases d'un même cycle physique de
l'utilisation de l’eau.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
21
Dès lors, en termes économiques et financiers, l'organisation de ce cycle en un
service unique pouvait sembler se justifier. La loi du 2 février 1995, qui autorise, dans
certains cas, la création d'un service unique pour les communes de moins de 3 000
habitants, va apparemment dans ce sens. Elle oblige cependant, dans la facturation, à
distinguer ce qui relève de l’eau et ce qui correspond à l’assainissement.
Les habitudes administratives expliquent, pour partie, la différenciation des
services d’eau et d’assainissement. Mais, en définitive, le souci de clarté et l'exigence de
transparence financière la justifient. L'usager et l'élu local distingueraient avec difficulté
ce qui relève de l’eau ou de l’assainissement si les deux services étaient fusionnés.
Le regroupement abusif des deux services, parfois observé dans le passé pour
certaines collectivités, ne permettrait pas d'analyser avec précision l'évolution des coûts,
des produits et l'origine d'éventuels déséquilibres.
Les risques d'opacité qui résulteraient de la fusion des services et du
regroupement de leurs produits et charges seraient particulièrement regrettables en cas
de délégation du service. Les collectivités ne disposeraient plus alors d'éléments
financiers leur permettant d'identifier les opérations de chacune des deux activités. Il ne
serait plus possible de constater que certains délégataires équilibrent parfois une activité
par l'autre.
Ainsi, dans le département du PUY-DE-DOME, la Société d'économie mixte
pour l'exploitation des réseaux d’eau et d’assainissement et la protection de
l'environnement (SEMERAP) équilibre ses comptes, malgré les déficits du secteur de
l’assainissement, par les excédents provenant des services d’eau, sans en informer
expressément les élus des collectivités territoriales concernées. Or, ces excédents et
déficits, outre qu'ils sont dégagés par des activités distinctes, proviennent de secteurs
géographiques et d'usagers différents.
Cette apparente facilité laissée au secteur privé peut inciter à la confusion des
opérations d’eau et d’assainissement. L'exigence de clarté des comptes est d'autant plus
nécessaire que le paiement des services incombe à un redevable qui n'est pas toujours le
même.
b) L'équilibre financier de services autonomes
L'article 2224-1 du Code général des collectivités territoriales réaffirme le
principe de l'équilibre des services d’eau et d’assainissement. Il interdit la compensation
pure et simple du déficit de fonctionnement par le budget général. Ce dernier ne doit
donc pas supporter de charges concernant les services d’eau et d’assainissement, sauf
exception prévue par la loi. Inversement, il est, en principe, exclu que les budgets d’eau
et d’assainissement apportent des recettes au budget de la commune de rattachement.
Des assouplissements légaux ont été apportés à ces principes.
D'une part, l'article R. 323-11 du Code des communes, relatif aux budgets
annexes des régies communales, prévoit, en particulier, que l'excédent desdites régies
peut être reversé, à titre accessoire, à la collectivité de rattachement, sur décision du
conseil municipal. Cependant, il ne peut s'agir que d'un excédent ponctuel constaté en
fin d'exercice, et en aucun cas d'un excédent résultant de la fixation, à dessein, d'un prix
trop élevé, destiné, en définitive, à faire financer par les usagers de l’eau ou de
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l’assainissement le budget général de la commune. Cette situation serait contraire aux
principes d'équilibre fixés par l'article L. 2224-1 du Code général des collectivités
territoriales.
D'autre part, l'article L. 2224-2 autorise, sous certaines conditions très
restrictives, les conseils municipaux à équilibrer les budgets de l’eau et de
l’assainissement par des subventions du budget principal. C'est notamment le cas
lorsque les exigences du service public conduisent la collectivité à imposer des
contraintes particulières de fonctionnement ou lorsque le fonctionnement des services
exige la réalisation d'investissements très importants qui auraient une incidence
excessive sur les prix (plus de 15 % par an).
Ces dérogations sont fréquentes en zone rurale où le nombre d'abonnés est
parfois très réduit, comme en témoigne un recensement effectué dans le département de
MAINE-ET-LOIRE : sur trois cent soixante-quatre communes, soixante-sept d'entre
elles ont versé une subvention à leurs services d’eau ou d’assainissement.
Mais, il n'est pas rare de relever encore des abus, dans des services importants,
en zone urbaine ou péri-urbaine, notamment en matière d’assainissement. Ainsi, le prix
de l’eau est minoré dans la commune de PORTET (Haute-Garonne, 8 000 habitants)
qui, depuis 1990, verse plus de 1 million de subventions d'équilibre à son service
d’assainissement.
De même, la commune de VELIZY-VILLACOUBLAY (Yvelines, 21 000
habitants) subventionne son service d’assainissement. Le préfet n'a cependant autorisé
le versement de ces subventions qu'à condition qu'il s'accompagne d'un relèvement
sensible de la redevance d’assainissement et donc du prix de l’eau pour être conforme à
la réglementation. Il arrive, en effet, que des collectivités perdent de vue l'obligation
qu'elles ont de voter, chaque année, un tarif suffisant pour permettre l'équilibre du
service.
Dans certains cas pourtant, l'application stricte des règles d'équilibre et de
spécificité budgétaire de l’eau et de l’assainissement conduisait à des situations
paradoxales.
Le district de la rive gauche de SERRE-PONCON (Alpes-de-Haute- Provence,
523 habitants), qui dispose de grosses ressources fiscales liées à l'existence d'une
centrale hydraulique, gère les services d’eau et d’assainissement de deux petites
communes. L'équilibre des comptes annexes n'y est atteint que grâce à une subvention
d'exploitation de 947 900 F, les redevances perçues auprès des usagers ne s'élevant qu'à
40 000 F. Les ressources propres du service sont donc quasi exclusivement issues du
budget principal dont les recettes de fonctionnement proviennent pour l'essentiel des
contributions directes, auxquelles Electricité de France participe pour les trois quarts.
L'application stricte du principe d'équilibre des services d’eau et d’assainissement
conduirait donc le district à augmenter les tarifs alors même que la collectivité dispose
de ressources disponibles importantes.
Pour éviter ce genre de situation dans les petites collectivités, la loi du 12 avril
1996 autorise, désormais sans restriction, les communes de moins de 3 000 habitants
ainsi que leurs groupements à subventionner leurs services d’eau et d’assainissement.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
23
2° Une contribution des usagers prenant mieux en compte les réalités
économiques
Pour donner un cadre comptable cohérent à l'équilibre financier des services tout
en clarifiant l'enregistrement et l'utilisation des produits perçus auprès des usagers, les
pouvoirs
publics
ont
rendu
obligatoire
pour
les
services
publics
d’eau
et
d’assainissement l'utilisation d'un nouveau plan comptable, directement inspiré du plan
comptable général de 1982.
Mieux mesuré par un cadre comptable plus strict, l'équilibre financier des
services peut être atteint par l'utilisation d'un nouveau type de tarif prenant en compte la
valeur économique de l’eau.
a) Une comptabilité plus rationnelle issue de l'instruction M. 49 des
ministères du budget et de l'intérieur
Parce qu'elle rend obligatoires des écritures comptables correspondant à des
règles de gestion respectées depuis longtemps par les entreprises, comme la constitution
d'amortissements et de provisions ou encore la tenue des écritures de stocks,
l'application de la nouvelle instruction aux services publics locaux de l’eau et de
l’assainissement a pu faire craindre aux élus des communes de taille modeste que la
mise en oeuvre de nouvelles règles comptables se traduise par une augmentation
importante du prix de l’eau. Prenant en compte ces craintes, l'administration a reporté
jusqu'au 1er janvier 1996 l'application de la nouvelle réglementation pour les communes
de 500 à 1 000 habitants, au 1er janvier 1997 pour celles de moins de 500 habitants. De
plus, les communes de moins de 3 000 habitants ont été autorisées à établir un budget
unique pourvu, toutefois, que les règles d'assujettissement à la TVA soient identiques
pour les deux services. L'expérience a montré que la mise en oeuvre progressive de
nouvelles règles comptables n'a pas provoqué d'augmentation générale des factures.
Les contrôles des chambres régionales des comptes montrent, au contraire, que
la nouvelle instruction a atteint son but en obligeant les services à remettre de l'ordre
dans leur gestion qui, parfois, en avait grand besoin. Ainsi à METZ (Moselle) où, d'une
part, l'absence d'écritures d'amortissement contribuait à minorer les charges du service
de l’eau à hauteur de 1 872 897 F, alors que, d'autre part, l'omission de la reprise
annuelle des subventions d'équipement dans le budget de fonctionnement minorait les
recettes de celui-ci de 836 000 F. De plus, le même service n'avait pas, au 31 décembre
1993, intégré des bâtiments et des terrains lui appartenant, ce qui déséquilibrait son
bilan pour une valeur de 23,45 millions de francs.
L'intérêt financier de cette remise en ordre comptable n'est pas purement formel.
LA COMMUNAUTE URBAINE DU MANS (Sarthe, 185 000 habitants), qui s'était
résolue, dès 1991, à procéder aux amortissements réels de ses services d’eau et
d’assainissement, a pu ainsi doubler leur autofinancement.
Inversement, les mêmes biens étaient amortis deux fois à GRENOBLE (Isère,
150 800 habitants), une fois par la commune qui affectait, pour ce faire, une part de la
redevance d'affermage qu'elle percevait, et une autre fois par le fermier. Cette situation
pénalisait les usagers. La majoration du prix de l’eau qu'elle induisait n'était pas
imputable à la nouvelle instruction M. 49, mais à sa mauvaise interprétation.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
24
Jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle instruction, la comptabilité de stocks
des services était parfois approximative. A RIOM (Puy-de-Dôme, 19 300 habitants),
lors de la délégation des services d’eau et d’assainissement, la valeur des stocks,
comptabilisée jusqu'alors pour 2,7 millions de francs, s'avéra proche de zéro. Les pièces
stockées n'avaient plus, en effet, de valeur marchande. L'absence de contrôle des stocks,
faute de comptabilité précise, avait conduit les services à renouveler les commandes de
pièces sans prise en compte de l'existant et des besoins réels du service. Ces fautes de
gestion ont entraîné une perte nette pour la commune supérieure à 2 millions de francs.
En obligeant à une remise en ordre des écritures, le nouveau plan comptable a
donc contribué à la clarté de la gestion des services, condition première de la vérité des
prix. Toutefois, son application n'est pas encore parfaite, même dans des services
importants.
Dans
la
comptabilité
des
services
d’eau
et
d’assainissement
de
la
COMMUNAUTE URBAINE DE STRASBOURG (Bas-Rhin, 422 600 habitants), les
approvisionnements et les fournitures n'étaient pas encore retracées dans la comptabilité
de stocks à la date du 31 décembre 1994. Une collectivité aussi importante aurait
pourtant tout intérêt à mettre en application les dispositions de la nouvelle instruction
comptable. Il faut, en effet, souligner l'intérêt économique de cette mise en conformité
avec la réglementation, notamment pour une gestion rationnelle des stocks et pour la
détermination du coût des travaux réalisés en régie.
Quelques règles devraient cependant être réexaminées, comme l'amortissement
des participations d'une commune dont le service d’assainissement participe au
financement d'une station d'épuration appartenant à un syndicat d'aménagement de ville
nouvelle. Cette opération, en l'état des textes, s'analyse comme une subvention
d'équipement qui s'amortit, selon une règle générale, en cinq ans seulement. La
commune de RIS-ORANGIS (Essonne, 24 700 habitants), qui s'est trouvée dans cette
situation, a été obligée d'augmenter en conséquence la surtaxe communale
d’assainissement, ce qui s'est traduit par une augmentation du prix de l’eau dont l'utilité
économique reste à démontrer.
b) La prise en compte tarifaire de la valeur économique de l’eau
L’eau n'est plus une ressource inépuisable, disponible dans n'importe quelle
condition et en conséquence presque gratuite. Pour tenir compte de cette réalité, l'article
13 de la loi du 3 janvier 1992 préconise une nouvelle tarification de l’eau en rapport
plus direct avec les quantités consommées. Il exclut l'application des forfaits.
La tarification binôme fondée sur la prise en compte, d'une part, des charges
fixes du service, réparties entre tous les abonnés, d'autre part, de la consommation
effective de chacun d'eux, tient mieux compte des réalités économiques. Son application
a donné lieu parfois à une augmentation sensible des tarifs.
Ainsi à JOUE-LES-TOURS (Indre-et-Loire, 36 800 habitants), la partie fixe, qui
couvre seulement les frais d'entretien du branchement ainsi que la location et l'entretien
du compteur, s'est élevée, dès l'application du nouveau système de tarification, à 336,28
F contre 265 F précédemment, somme qui couvrait également une consommation
annuelle de 30 m3. Dans l'immédiat, le nouveau tarif a donc privilégié le distributeur
d’eau.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
25
Aménagé de façon à mieux partager entre les abonnés les charges
incompressibles, le tarif binôme ne connaît qu'une généralisation encore imparfaite. Il
arrive même qu'on en fasse une application qui méconnaisse totalement sa valeur
économique en utilisant la partie fixe (les abonnements) pour dissimuler les hausses
effectives de la partie consommation, le prix de celle-ci au mètre cube restant
formellement stable comme dans la commune de COUERON (Loire-Atlantique, 16 400
habitants).
La nouvelle tarification suppose, pour être appliquée rationnellement, une
connaissance précise des quantités consommées. Elle implique donc la pose de
compteurs. Cette installation représente un investissement important et a donc un effet
direct sur les coûts, mais on en attend un effet à la baisse sur la consommation d’eau. Ce
phénomène, parfois non prévu faute d'études suffisantes, se manifeste avec une plus
grande fréquence depuis 1993/1994 sans que l'on puisse encore définir, comme à
PARIS, si ses causes sont transitoires ou à rattacher à l'élévation générale du prix de
l’eau.
C'est donc dans un cadre tarifaire renouvelé, certes plus en rapport avec la valeur
économique de l’eau mais encore loin de la traduire totalement, que la réglementation
nouvelle met en place un financement exclusif des services par les usagers. Ce mode de
financement suppose que les services publics traitent ceux-ci en parfaite égalité. Cet
objectif reste encore à atteindre.
B. - LA PERSISTANCE DE TRANSFERTS ANORMAUX AUX DEPENS
DES USAGERS
Malgré l'effort accompli ces dernières années pour faire en sorte que le prix payé
par l'usager corresponde mieux à la valeur réelle du service qu'il reçoit, des anomalies
subsistent. Elles se manifestent notamment par des transferts abusifs entre les
contribuables et les usagers, d'une part, et entre les différentes catégories d'usagers,
d'autre part. Cette situation aboutit à faire payer à certains usagers domestiques une
charge supérieure à celle qu'ils devraient supporter.
1° Les transferts de charge des contribuables vers les usagers
Si pendant longtemps le contribuable a payé une partie de la facture d’eau de
l'usager, sous forme de subventions d'équilibre avouées ou occultes, l'application de
principes budgétaires et comptables plus rigoureux a fortement réduit ce type de
transferts. Comme on l'a vu, la loi du 12 avril 1996 a cependant prévu que les
communes de moins de 3 000 habitants ne seraient pas astreintes à un strict équilibre de
leurs services d’eau.
La situation inverse, sans être aussi fréquente, a pu être observée : certains
services d’eau et d’assainissement financent d'une manière systématique les budgets
principaux des collectivités.
a)
Le
versement
d'excédents
budgétaires
des
services
d’eau
et
d’assainissement au budget principal
Certaines collectivités ont fixé les tarifs des services d’eau et d’assainissement à
un niveau supérieur à celui qui aurait permis d'équilibrer ces services, dans le seul but
de leur faire financer le budget principal par le reversement d'excédents.
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(janvier 1997)
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Ainsi, à la fin des années 1987 et 1988, la COMMUNAUTE URBAINE DE
BREST (Finistère) a réalisé des transferts entre les budgets annexes de l’eau et de
l’assainissement et le budget principal. Ces transferts ont représenté près de 10 millions
de francs. Cette "avance" n'a finalement été remboursée, pour sa totalité, qu'au cours de
l'exercice 1991. Cette pratique a permis de couvrir artificiellement l'existence d'un
déséquilibre du budget principal. De plus, elle était contraire à l'objectif poursuivi par la
création de budgets annexes pour les services industriels et commerciaux : déterminer
avec précision le coût du service et l'équilibrer.
Il est donc tout à fait abusif qu'au nom de l'équilibre, la surtaxe prélevée par la
commune dépasse de plus de deux fois le montant des dépenses qu'elle a pour but de
compenser au budget qui en supporte la charge. Si tel est le cas, une partie des
prélèvements est alors superflue et aboutit à faire financer le budget principal non par le
contribuable mais par l'usager. Cette situation a été observée à JOUE- LES-TOURS en
1991 et en 1992 où le service des eaux a versé 400 000 F puis 2,55 millions de francs au
budget principal de la ville.
La définition trop large du volume de la surtaxe a également amené le service de
l’eau et de l’assainissement de GAP (Hautes-Alpes, 33 400 habitants) à verser en 1993
au budget de la commune, 2,3 millions de francs.
A GRENOBLE, l'examen des comptes de la ville a montré que cette pratique,
qui était déjà celle de la régie municipale depuis au moins 1971 et qui s'est poursuivie
jusqu'en 1989, année où le service de l’eau a versé 12,3 millions de francs au budget
communal, s'est aggravée dès 1990 lorsque les services d’eau et d’assainissement ont
été affermés. Pendant la période 1990/1993, le budget principal de la ville a reçu 81,25
millions de francs du service de l’eau et 26,88 millions de francs du service de
l’assainissement. Lors de la délégation des services au secteur privé, le paiement d'un
droit d'entrée par le fermier-concessionnaire a, en effet, conduit à faire supporter aux
usagers la charge financière d'un capital versé au profit du budget principal.
A SAINT-ETIENNE (Loire, 290 000 habitants desservis dans 14 communes), la
délégation s'est, en outre, accompagnée d'une clôture des comptes annexes de l’eau et de
l’assainissement. On a procédé au reversement à la commune de 105,1 millions de
francs en 1992 et 15,6 millions en 1993, correspondant au solde des transferts liés à la
suppression de budgets annexes.
b) Les transferts provenant de versements de droits d'entrée
En échange du droit d'exploiter le service, il arrivait fréquemment que les
contrats prévoient le paiement par le délégataire de contreparties financières appelées
droit d'entrée. Or celles-ci, en totalité ou en partie, n'étaient pas destinées à couvrir les
dépenses des services d’eau ou d’assainissement. Elles constituaient, la plupart du
temps, des recettes alimentant le budget principal. Par conséquent, la charge financière
correspondante n'aurait pas dû être répercutée dans le prix demandé aux usagers.
L'enquête a mis en évidence de nombreux exemples de ces errements, dont les
plus caractéristiques ont été relevés à SAINT-ETIENNE et à GRENOBLE (voir
encadrés p. 85 et p. 101).
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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Les élus de la commune de PLOEMEUR (Morbihan, 18 000 habitants) sont allés
jusqu'à demander un versement allant au-delà de la valeur des installations à une régie
municipale créée pratiquement à cet effet. Il s'agissait ainsi de faire participer les
usagers des services d’eau et d’assainissement à l'équilibre du budget principal par le
moyen de transferts irréguliers
1
.
Lors d'une réunion le 6 décembre 1993, le conseil municipal a décidé la création
d'une régie municipale à caractère industriel et commercial, dotée de la personnalité
morale et de l'autonomie financière pour l'exploitation des services d’eau et
d’assainissement. L'objectif de cette création, identique à celui qui avait conduit à
envisager une mise en affermage, était de fournir à la commune les moyens de réduire
son endettement.
Auparavant, un appel d'offres avait été lancé auprès d'entreprises spécialisées du
secteur privé. Le résultat de la consultation avait été infructueux car les propositions
reçues n'atteignaient pas les montants escomptés, s'agissant notamment du droit
d'entrée.
Dans les délibérations du 20 décembre 1993 et du 10 janvier 1994, les élus
municipaux ont décidé "de fixer à la charge de la régie le paiement d'un droit d'entrée
permettant à la ville de rembourser un encours de dette de 57 millions de francs ainsi
que les frais y afférents", soit au total 62 millions. La collectivité a, en quelque sorte,
vendu, moyennant un prix surestimé, une partie de son patrimoine immobilier à sa
régie. Cette dernière s'est trouvée dans l'obligation d'emprunter une somme considérable
afin d'acquitter le droit d'entrée de 62 millions de francs et d'assurer la prise en charge
de 40 millions d'emprunts que lui a transférés la ville.
La finalité d'une régie communale s'opposait, par principe, à de tels procédés. Ce
droit d'entrée était seulement destiné à améliorer le ratio d'endettement de la collectivité
et à lui permettre de dégager des liquidités pour renégocier ses propres emprunts. Ainsi,
la commune a transféré la charge financière de l'équilibre du budget principal des
contribuables vers les usagers.
Une telle pratique, condamnée par la jurisprudence administrative, est désormais
formellement interdite par la loi du 8 février 1995.
c) Des services supportant des charges indues et privés parfois d'une partie
de leurs recettes
D'autres formes plus banales de transferts de charges au détriment des usagers
peuvent être décelées à l'examen des comptabilités communales, qu'il s'agisse de
charges supportées à tort par les services d’eau ou d’assainissement ou de recettes
spécifiques à ces services indûment affectées aux budgets principaux.
La lutte contre l'incendie constitue une dépense obligatoire des communes, dont
le financement, par conséquent, doit être supporté par le contribuable. Pourtant, c'est
l'usager du Syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable et d’assainissement
de la REGION MINIERE (Allier, 22 300 habitants) qui finance, depuis 1989, le
programme incendie à la place des communes qui composent l'établissement public.
1)Voir rapport public annuel de la Cour, 1995, p. 265
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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C'est également le cas en ce qui concerne les usagers du Syndicat intercommunal des
eaux de la région RHONE-VENTOUX (Vaucluse, 124 900 habitants). De telles
pratiques, qui sont fréquentes, n'en induisent pas moins des charges indues pour
l'usager.
A l'inverse, certaines recettes qui devraient bénéficier aux services sont parfois
retenues irrégulièrement dans les budgets principaux. Le cas de SAINT-ETIENNE est
particulièrement exemplaire. Ainsi, la ville a conservé l'intégralité de la prime
d'épuration versée par l'agence du bassin, ainsi que les sommes versées par les
communes avoisinantes en contrepartie de l'utilisation par celles-ci des ouvrages de
transport des eaux usées et d'épuration. La prime d'épuration s'élevait à 2 533 075 F en
1992 et à 2 272 000 F en 1994. La participation des communes aux frais de
fonctionnement de la station de Porchon se montait à 1 344 715 F en 1992 et à 1 479
120 F en 1994.
Ces avantages peuvent s'analyser comme un détournement des contributions des
usagers au coût des deux services, au profit du budget principal de la ville et donc des
contribuables.
En effet, les usagers payent à l'agence de l’eau, via le délégataire, les redevances
dites "de pollution". Ils payent aussi le coût de fonctionnement de la station d'épuration,
la redevance due au gestionnaire de la station faisant partie du coût du service et servant
de base à la détermination des tarifs. Ils payent , enfin, les travaux réalisés sur les
réseaux et les éventuels travaux de génie civil concernant la station, dont le coût,
assumé par le délégataire, est également répercuté dans les tarifs.
Or, la prime d'épuration, qui est conçue comme une sorte de redistribution des
redevances perçues par l'agence de l’eau en fonction des efforts entrepris par chaque
collectivité pour améliorer la dépollution (son montant est proportionnel à la quantité de
pollution supprimée), ne revient pas, au cas d'espèce, au service de l’assainissement.
Elle est versée au budget de la ville qui n'est soumise à aucune obligation quant à son
utilisation.
Il est évident, dans ces conditions, que le caractère incitatif de cette prime, voulu
par le législateur, ne saurait jouer.
Le détournement de la participation des communes voisines au coût de
fonctionnement de la station est tout aussi flagrant.
La Société stéphanoise des Eaux (et à travers elle les usagers des services) paye
l'intégralité de la redevance due à l'exploitant de la station, calculée sur l'ensemble de la
consommation d’eau des communes qui utilisent l'équipement. Cependant, les
participations versées à ce titre par les autres communes sont conservées par la ville de
SAINT- ETIENNE qui en dispose librement, au lieu d'être reversées en compensation
au délégataire, pour atténuer la charge des usagers stéphanois.
Il y a donc là un "court-circuit" fonctionnant au profit du budget de la ville de
SAINT-ETIENNE.
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2° Les entorses à l'égalité entre les usagers
Les transferts irréguliers ne concernent pas seulement les relations financières
entre les budgets principaux et les budgets annexes d’eau et d’assainissement, ils
concernent aussi la répartition des charges entre usagers.
L'examen des comptes des organismes assurant la distribution de l’eau et
l’assainissement montre la persistance de pratiques conduisant à des transferts
irréguliers de charges entre usagers. Ces anomalies réduisent la portée réelle du principe
d'égalité sur lequel repose pourtant la notion de service public.
Selon une jurisprudence administrative constante, rappelée par le Conseil d'Etat
dans son arrêt Bachelet du 14 janvier 1991, "le principe d'égalité ... s'apprécie entre
usagers placés dans des situations analogues". Dès lors, le respect du principe d'égalité
entre usagers du service public doit se vérifier entre les différentes catégories d'usagers
définies contractuellement.
a) L'égalité entre usagers domestiques
Les collectivités et, en définitive, les usagers ne sont tenus réglementairement de
prendre en charge les travaux d’assainissement que dans les limites des obligations du
service public de l’assainissement collectif. Au-delà, les travaux sont à la charge
exclusive de leurs bénéficiaires. Les surcoûts correspondants sont couverts, en principe,
par une participation financière de ces derniers.
Il n'est pas rare, cependant, que des opérations de cette nature soient englobées
dans l'assiette des travaux que les départements acceptent de subventionner.
En application de l'article L. 351 du Code de la santé, les ouvrages nécessaires
pour amener les eaux usées à la partie publique du branchement sont à la charge
exclusive des propriétaires. Or, ces branchements sont fréquemment incorporés dans les
opérations subventionnées.
Ainsi à la demande du maire de BRIEY (Meurthe-et-Moselle, 4 500 habitants),
le Syndicat du contrat de rivière Woigot (7 600 habitants desservis) a procédé à une
évaluation du coût des parties privatives des branchements que ce syndicat a décidé de
prendre en charge. Les résultats de cet exercice ont montré que l'incidence financière
d'une telle décision n'étaient pas négligeables ; le coût assumé par la collectivité et ses
partenaires financiers aux lieu et place des propriétaires s'élevait à 9,6 millions de
francs.
L'égalité entre usagers domestiques n'est pas toujours respectée. Il en est ainsi
pour la distribution de l’eau, lorsque l'existence de compteurs collectifs dispense
certains usagers du paiement de la partie fixe du tarif, alors que d'autres, disposant de
compteurs divisionnaires, y sont assujettis.
b) L'égalité entre usagers domestiques et usagers industriels
De nombreux transferts irréguliers entre usagers industriels et usagers
domestiques sont constatés.
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(janvier 1997)
30
Pour des raisons économiques étrangères à la gestion de l’eau, les gros
consommateurs bénéficient parfois d'avantages tarifaires. En effet au regard de la
jurisprudence, des différenciations restent possibles, sans s'écarter du respect du
principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques, dès lors que les usagers se
trouvent placés dans des conditions différentes au regard de la fourniture d’eau potable.
Ce principe trouve sa traduction dans les dispositions de l'article L. 2224-2 du Code
général des collectivités territoriales (art. R. 372-11 et 12 de l'ancien Code des
communes). Mais une application contractuelle trop large de ce principe au bénéfice des
services et des établissements industriels ou commerciaux, dont la consommation est en
général largement supérieure à celle des abonnés domestiques, peut pénaliser ces
derniers.
Ainsi, à TOULOUSE (Haute-Garonne), avant 1990, la commune avait instauré
des tarifs dégressifs pour usage industriel, qui ont été maintenus dans le cadre de la
concession. De ce fait, certains industriels bénéficient de rabais substantiels qui
constituent pour eux une aide indirecte ne les incitant pas à réduire leur consommation.
On rencontre cette situation à METZ où la dégressivité des tarifs de l’eau ne
bénéficie qu'aux industriels et commerçants. Ceci est manifestement peu conforme au
principe d'égalité des usagers devant les coûts du service public.
Cependant, c'est surtout dans le domaine de l’assainissement que les anomalies
les plus graves sont révélées. En effet, l'examen des modalités selon lesquelles la
redevance d’assainissement est assise conduit à estimer que son rendement pourrait être
augmenté tandis que sa répartition pourrait être plus équilibrée au profit des usagers
domestiques.
La réglementation prévoit que la redevance est assise sur le volume d’eau
prélevé sur le réseau public ou sur "toute autre source". Ceci implique l'assujettissement
à la redevance des personnes qui prélèvent l’eau en milieu naturel.
En négligeant de conclure avec certains distributeurs d’eau oeuvrant sur leur
territoire une convention qui permettrait d'identifier et de taxer les préleveurs d’eau
autonomes, les services d’assainissement se privent des ressources correspondantes.
C'est le cas du SYNDICAT INTERDEPARTEMENTAL D’ASSAINISSEMENT DE
L'AGGLOMERATION PARISIENNE.
Limitées aux ouvrages réalisés sous le domaine public, les obligations de service
public des communes en matière d’assainissement collectif ont, par ailleurs, uniquement
pour objet la collecte et le traitement des eaux usées domestiques.
Un arrêt du Conseil d'Etat, en date du 19 janvier 1994, rappelle qu'il appartient
"aux auteurs de projet(s) industriel(s) de créer les installations nécessaires à leur
réalisation dans le cadre des procédures qui leur sont applicables". Le raccordement
d'installations industrielles au réseau public d’assainissement peut, néanmoins, être
autorisé par les communes. Ces raccordements représentent ainsi près de 40 % des
effluents collectés par les réseaux publics dans le bassin RHIN-MEUSE. Mais ces
prestations peuvent entraîner des surcoûts liés, notamment, au dimensionnement et à la
conception des ouvrages. La loi prévoit alors (art. L. 358 du Code de la santé) que ces
autorisations peuvent être subordonnées à une participation financière de leurs
bénéficiaires aux dépenses correspondantes d'investissement et de fonctionnement.
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Les contrats d’assainissement conclus par le département de MEURTHE-ET-
MOSELLE et par l'agence de l’eau comportent un rappel aux collectivités de cette
réglementation, dont il ne semble pas, cependant, que toutes les potentialités financières
aient été jusqu'alors systématiquement exploitées.
c) L'égalité entre les usagers publics et les autres usagers
Une partie significative de la consommation d’eau des services publics locaux,
quand ce n'est pas celle de leurs agents, n'est pas facturée, soit en application d'usages
anciens, soit grâce à l'instauration de tarifications spécifiques ou de système de
ristourne.
Les services de la ville de RIOM, qui compte 19 300 habitants, bénéficient ainsi
de la fourniture gratuite de 200 000 m3 d’eau par an, ce qui représente une perte nette
pour les budgets de l’eau et de l’assainissement d'au moins 1 million de francs par an.
A SAUMUR (Maine-et-Loire), les services municipaux et du district (35 900
habitants desservis) se voient accorder une réduction de 50 % sur le tarif local de l’eau.
A ces rabais, qui trouvent leur origine dans des manipulations tarifaires, s'ajoute
parfois la pratique dite "des ristournes", qui, comme à TOUL (Meurthe-et-Moselle, 17
700 habitants), nuit à la transparence des comptes. C'est également le cas à
CAVAILLON (Vaucluse, 23 500 habitants) où la société fermière consent à la ville un
retour de 25 % de ses recettes nettes pour autant que la consommation annuelle des
services publics dépasse 300 000 m3. Au titre de l'exercice 1993, la commune a ainsi
encaissé une recette de 112 085 F. Le prix de l’eau acquitté par les usagers locaux a été,
évidemment, augmenté en conséquence.
A SAINT-ETIENNE, la ville, dans le premier état du contrat de délégation,
jusqu'à la suppression de ce dispositif par un avenant intervenu en décembre 1995,
assumait la charge financière de la baisse des encaissements qui pouvaient être constatés
dans la livraison d’eau aux communes périphériques. Le concessionnaire et les
bénéficiaires des livraisons étaient donc privilégiés en n'acquittant pas ainsi le prix réel
de l’eau. Il en résultait une rupture de l'égalité entre les usagers stéphanois et ceux des
communes environnantes.
En définitive, il apparaît qu'une plus grande rigueur dans l'application de la
réglementation permettrait, en améliorant l'assiette de la redevance et en faisant payer
les bénéficiaires réels des raccordements et des branchements, une meilleure répartition
de l'effort financier des dépenses d’assainissement entre les redevables.
On peut conclure, d'une manière générale, que même si elle a déjà donné lieu à
des hausses de prix, la prise en compte de la valeur réelle de l’eau n'est pas encore
achevée. Elle supposerait un élargissement de l'assiette de la redevance à tous les types
de consommation.
Ainsi les objectifs ambitieux définis par le législateur, tant en ce qui concerne la
qualité de l’eau que l'exigence de "vérité des prix", ne sont pas réalisés par les
collectivités territoriales.
Les obligations nouvelles qui pourraient apparaître seront difficiles à mettre en
oeuvre dans un contexte où l'augmentation du prix de l’eau a déjà été importante dans la
période récente pour beaucoup d'usagers.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
32
L'ambition définie exige la mobilisation de moyens importants par les
collectivités territoriales. Les travaux des chambres régionales des comptes mettent en
évidence certaines difficultés des communes à y parvenir, malgré diverses aides
financières qui leur sont apportées.
III. - LES AIDES AUX INVESTISSEMENTS LOCAUX
L'extension du champ de compétence des collectivités territoriales dans le
secteur de l’eau et de l’assainissement et la fixation de nouveaux objectifs de qualité
sont intervenues dans une conjoncture où les ressources financières des communes
doivent pourvoir aux besoins des autres secteurs (enseignement, environnement urbain
notamment).
L'effort financier principal repose, comme il a été vu, sur l'usager. Toutefois,
plusieurs régimes d'aides financières existent au profit des communes.
Si les agences de l’eau aident fortement les communes et leurs établissements
publics, leurs ressources financières sont cependant limitées par le fait qu'elles
proviennent des mêmes habitants qui sont à la fois contribuables des communes,
usagers des services et redevables de ces agences. La solution financière
complémentaire pourrait donc consister en un appel des communes aux aides de l'Etat et
des autres collectivités publiques. Or, les participations de ceux-ci sont en recul depuis
plusieurs années. Il en résulte que le financement global des communes et de leurs
services d’eau et d’assainissement n'est pas toujours à la hauteur des obligations qu'aux
termes de la loi, ceux-ci devraient pourtant assurer.
A côté des agences et de l'Etat lui-même, les départements et les régions,
partenaires habituels des communes, contribuent également au financement des
investissements.
Ayant notamment pour objet de contribuer au développement des régions en
retard ou gravement affectées par le déclin industriel, les fonds structurels de l'Union
européenne constituent un complément de financement. Le Fonds européen pour le
développement régional (FEDER) intéresse les investissements envisagés dans le
secteur de l’eau et de l’assainissement. Mais le recours à ce type de cofinancement ne
concerne que des zones ciblées géographiquement et n'est donc pas ouvert à tous les
services locaux.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
33
D
IRECTION DE L
'
EAU
-
BILAN
DES
ENGAGEMENTS
DU
X
EME PLAN
-
(en millions de francs)
RÉGIONS
Prévu
1989
1990
1991
1992
1993
1994
Total
ALSACE
AQUITAINE
AUVERGNE
BOURGOGNE
CENTRE
CORSE
FRANCHE-COMTÉ
ILE-DE-FRANCE
LANGUEDOC-ROUSSILLON
LIMOUSIN
LORRAINE
MIDI-PYRÉNÉES
NORD - PAS-DE-CALAIS
BASSE-NORMANDIE
PAYS DE LA LOIRE
PICARDIE
POITOU-CHARENTES
RHONE-ALPES
2,80
58,00
15,70
10,60
53,60
0,50
3,00
26,75
33,30
5,70
26,00
41,00
10,00
3,20
9,30
5,40
9,90
6,00
12,00
2,23
0,80
8,35
0,12
5,35
3,18
1,14
5,00
9,85
3,06
0,52
1,50
2,82
1,05
2,80
22,94
1,45
9,50
0,80
5,35
12,50
1,07
10,00
5,77
0,64
2,10
1,00
4,68
1,08
3,14
7,83
0,10
5,35
11,51
1,14
1,00
0,99
4,60
0,64
3,30
2,10
1,01
3,21
5,03
0,10
0,87
5,35
4,34
0,94
15,47
16,20
7,26
0,64
1,00
0,10
3,74
8,03
1,37
0,10
5,35
0,02
1,41
4,53
5,67
0,76
4,40
1,10
6,77
0,52
2,80
45,06
5,44
10,42
27,05
0,50
0,87
26,75
31,55
5,70
36,00
39,00
14,92
3,20
6,90
5,40
7,12
16,24
TOTAL
320,00
284,00
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
34
A. - LES SOURCES DE FINANCEMENT
1° Les aides des agences de l’eau
Les dépenses d'équipement en usines de purification des eaux , en réseaux de
distribution ou d’assainissement, en stations d'épuration, dépassent les seules
possibilités financières des services. Les pouvoirs publics ont mis en place des
structures originales d'aides au financement de ces investissements, les agences de l’eau.
Créées par la loi n° 64-1245 du 16 décembre 1964, les agences de l’eau jouent
un rôle central dans le financement des investissements des communes dans le secteur
de l’eau et de l’assainissement. Le VIe programme des agences arrêté en 1991 et
s'étendant sur la période 1992/1996 en est l'illustration.
Travaux prévus
Aides des agences
BASSINS
en milliards
de francs
en % du total
en milliards
de francs
en % du total
Adour-Garonne
Artois-Picardie.
Loire-Bretagne.
Rhin-Meuse
Rhône-Méditerranée
Corse
Seine-Normandie
9,9
6,4
13,6
7,5
14,5
29,0
12,25 %
7,90 %
16,80 %
9,30 %
17;90 %
35,85 %
3,2
2,4
5,2
3,0
6,0
15,1
9,20 %
6,90 %
14,90 %
8,60 %
17,20 %
43,20 %
TOTAL
............................
89,0
100,00 %
34,9
100,00 %
Source : Rapport d'étape 1993 de la réalisation du VIe programme – Ministère de l'environnement.
Ainsi, la situation des maîtres d'ouvrage locaux au regard des aides fournies par
les agences varie d'un bassin à l'autre. Des risques de différenciation des aides des
agences aux communes entre régions économiquement riches et régions moins bien
dotées apparaissent donc avec leurs conséquences tarifaires. Les disparités entre les
capacités financières des agences ont en effet leur traduction inévitable sur les prix
pratiqués par les services publics locaux de l’eau et de l’assainissement.
2° Les apports de l'Etat
Depuis la décentralisation, la seule subvention de l'Etat qui subsistait était la
dotation globale d'équipement, dont le volume était toutefois réduit. Ainsi en 1994, elle
représentait pour le SYNDICAT INTERDEPARTEMENTAL D’ASSAINISSEMENT
DE L'AGGLOMERATION PARISIENNE, 23 millions de francs, sur un budget
d'investissement de l'ordre de 1,33 milliard de francs. Depuis la loi de finances pour
1996, le caractère spécifique de la dotation d'équipement est supprimé, celle-ci se
trouvant insérée dans une enveloppe globale dont l'évolution générale est en relation
directe avec le taux de variation annuelle des prix à la consommation.
L'Etat intervient également dans le financement de l’eau et de l’assainissement
par le biais des contrats de plans dont de nombreux aspects concernent les domaines de
l’eau et de l’assainissement comme la mise en place des schémas d'aménagement et de
gestion des eaux (SAGE) et la protection contre les crues et dont l'avantage essentiel est
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
35
de permettre une certaine coordination des aides des financeurs. Au total, comme le
montre le tableau présenté plus haut, ces sommes, qui devaient atteindre 320 millions de
francs au cours du Xe plan (1989/1993), n'ont été engagées qu'à hauteur de 284
millions.
Les recettes du Fonds national pour le développement des adductions d’eau
(FNDAE), géré par le ministère de l'agriculture, sont assurées pour 55 % par un
prélèvement sur les produits du pari mutuel urbain et pour 45 % par le produit d'une
redevance spécifique assise sur les consommations d’eau distribuées dans toutes les
communes, urbaines et rurales. Ainsi s'établit une solidarité entre les usagers citadins et
ruraux.
Sur proposition du comité consultatif du Fonds, les départements reçoivent une
enveloppe budgétaire répartie ensuite par les conseils généraux sur la base des projets
présentés par les communes ou leurs groupements.
Pour mieux concentrer l'utilisation de ces crédits, des conventions pluriannuelles
ont été mises en place depuis 1991 avec 65 départements qui apportent un financement
d'un volume au moins équivalent. En 1994, le FNDAE a ainsi financé 655 millions de
francs de travaux, les conseils généraux concernés apportant pour leur part 726 millions
permettant de financer un volume global de travaux de 3,9 milliards de francs (source :
rapport de la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale).
Cependant, le FNDAE a vu ses ressources s'amoindrir pour deux raisons. D'une
part, le taux de la redevance payée par les usagers n'a pas suivi pendant près de 10 ans
l'évolution de l'indice général des prix : de 6,5 centimes/m3 en 1984, il n'était encore
que de 10,5 centimes par mètre cube en 1992. D'autre part, depuis 1993, le produit
effectif est inférieur au produit attendu, vraisemblablement du fait des conséquences des
nouvelles modalités tarifaires assises sur la consommation effective et non plus sur un
forfait.
3° Les apports des régions et des départements
Les subventions des régions et des départements pour l'équipement des services
sont d'une ampleur inégale et variable dans le temps, comme le montre l'exemple de la
région PAYS DE LA LOIRE, dont les subventions aux services d’assainissement
ruraux et urbains qui atteignaient 8,4 millions de francs en 1993 et 13,9 millions en
1994, ont décru, notamment en zone rurale, à 10,7 millions en 1995 et, selon la région, à
5,8 millions en 1996 (montant provisoire).
Dans la même région, le département de la SARTHE a réduit, entre 1990 et
1994, de 21,3 millions de francs à 20,5 millions sa participation aux investissements des
collectivités pour l’eau et l’assainissement. Dans le même temps, les besoins exprimés
passaient de 73 millions à 102 millions. Le département de la MAYENNE, pour sa part,
a entrepris directement d'importants travaux pour assurer la sécurité en eau. La création
d'un fonds départemental, alimenté par une contribution volontaire des syndicats d’eau
et d’assainissement basée sur une redevance de 1 franc le mètre cube, a permis de
recueillir en 1995 près de 16 millions de francs et d'accroître le montant des
interventions du conseil général de 12,6 millions à près de 30 millions.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
36
Lorsqu'ils réduisent leurs concours du fait de leurs propres difficultés budgétaires,
les départements et les régions provoquent le différé des projets en attente de leur
financement complet. Les programmes financés par les agences de l’eau s'en trouvent
parfois retardés.
La difficulté des départements à suivre le rythme imposé par les agences de l’eau
a ainsi pu être observée pour l’assainissement en MEURTHE-ET-MOSELLE, où les
échéances de démarrage supposé des programmes de travaux retenus par les contrats-
cadre de l'agence sont fréquemment dépassées d'un à deux ans à la date de leur signature
par le département. Le dédoublement de la programmation entre l'agence et le
département a pu conduire, si l'on en juge par les aides versées au cours des trois
premières années du contrat-cadre (50 % seulement des crédits ouverts), à un retard
d'exécution pour les programmes concernés.
Lorsqu'elles sont possibles, les aides des régions visent moins à soutenir
directement les programmes des communes qu'à améliorer l'état des infrastructures
hydrographiques globales de bassin dans lesquelles sont installés les services publics
locaux d’eau et d’assainissement.
Ainsi, le contrat de cinq ans 1992/1996 entre la région ILE-DE- FRANCE et
l'agence de l’eau SEINE-NORMANDIE a pour objet d'intercepter les rejets d'égoûts ou
miniers pour les envoyer en traitement, de poursuivre l'effort d'épuration des eaux usées
et de traiter la pollution des jours de pluie. Le bilan 1992/1993 de ce programme montrait
que la région avait déjà engagé 693 millions de francs sur la part de 2 milliards de francs
lui revenant (l'agence y affectant 4 milliards de francs).
De même, la convention "Bretagne eau pure II" envisage la réduction globale des
pollutions domestiques, piscicoles et agricoles, l'expérimentation et la recherche ainsi que
les actions à mener dans cette perspective sur tout le territoire régional au cours de la
période 1994/1998. Sur un programme global de 877,5 millions de francs, la région
BRETAGNE lui consacrera 90 millions et chacun des départements 47,5 millions.
Si l'engagement des départements et des régions est variable, il demeure tangible.
Toutefois, leur engagement financier est gêné, notamment en zones urbaines, par le fait
qu'une part importante de leurs ressources fiscales provient des droits perçus sur les
mutations immobilières dont le nombre et la valeur ont fortement décru depuis 1992.
B. - L'AMPLEUR CROISSANTE DES BESOINS
1° Une incidence budgétaire certaine pour les communes
La mise en oeuvre de ce que l'on pourrait appeler le nouveau droit de l’eau,
marquée par la loi du 3 janvier 1992 et l'adoption, le 12 juin 1991, du VIe programme
des agences de l’eau, devait être financée principalement par l'usager des services publics
de l’eau et de l’assainissement qui paie le prix de l’eau.
Mais les dépenses d'investissement à réaliser dans le secteur de l’eau sont parfois
d'un tel volume qu'elles entraîneraient une augmentation excessive des tarifs si elles
étaient financées seulement par les usagers des services. La loi permet alors aux
communes, sous certaines conditions, de prendre en charge dans leur budget propre une
partie des dépenses. Elles sont conduites à un endettement important dans les domaines
de l’eau et de l’assainissement. Elles doivent, en effet, suppléer les difficultés des
services d’eau et d’assainissement à financer les gros investissements.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
37
L'application de la loi du 3 janvier 1992 a donc une incidence budgétaire directe
pour les communes. C'est ainsi que, selon la direction de l’eau du ministère de
l'environnement, la réalisation du financement du VIe programme reposait, en 1993, à
raison de 43 % sur l'emprunt.
2° L'estimation des investissements futurs
La volonté des pouvoirs publics de faire respecter les directives européennes, et
notamment celle de 1991 sur les eaux résiduelles urbaines, s'est traduite en droit interne
par l'adoption d'un dispositif légal et réglementaire aux objectifs ambitieux, dont les
coûts de mise en oeuvre sont particulièrement importants dans une période où les
collectivités territoriales connaissent une stagnation relative de leurs ressources
financières.
Schématiquement, les conséquences directes des obligations nouvelles, à savoir
une collecte efficace et un traitement réel des eaux usées pour les agglomérations de plus
de 2 000 équivalents- habitants d'ici à 2005, le traitement du phosphore ou de l'azote d'ici
le 31 décembre 1998, une bonne fiabilité des stations d'épuration, correspondent environ
à 83 milliards de francs (base 1994) dont 60 milliards de francs devront être engagés au
31 décembre 2000
2
Les exigences indirectes des nouveaux textes concernent l’assainissement des
collectivités de moins de 2 000 équivalents- habitants. Selon la même source, elles se
traduiront par des investissements de l'ordre de 45 à 60 milliards de francs au cours de la
période 1995/2005. Les contraintes de l'urbanisation induiront un surcoût de 8 milliards
de francs de 1992 à 2005 en raison du recours à des technologies plus élaborées. Le
traitement minimal des eaux de pluies peut être évalué entre 25 et 30 milliards de francs
sur la même période.
Compte tenu de l'évaluation provisoire du VIe programme des agences de l’eau,
la direction de l’eau du ministère de l'environnement estimait, en 1996, que les
investissements annuels à envisager au cours du VIIe programme, de 1997 à 2005,
seraient de l'ordre de 14 milliards de francs (base 1994). Le financement de ces
équipements reposant d'abord sur le prix de l’eau, on peut estimer qu'au cours des années
prochaines son augmentation, pour être moins rapide qu'au cours de la période
1992/1996, devrait cependant se poursuivre. Elle sera due principalement aux hausses
des redevances d’assainissement et des redevances acquittées aux agences de l’eau.
Ce schéma serait à revoir à la hausse si des normes plus sévères concernant par
exemple les nitrates, les pesticides ou le plomb étaient adoptées.
Enfin, sur le plan économique, on estime, sur la base d'études effectuées à la
demande du ministère de l'environnement et du Commissariat général du plan, que la
réalisation du VIe programme des agences de l’eau s'est traduite par la création de plus
de 30 000 emplois dont près de 25 000 dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.
2) Source : rapport du ministère de l'environnement sur l'évaluation du VIe programme des agences de
l’eau.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
38
2ème partie :
La gestion diversifiée des services.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
39
La gestion de l’eau et de l’assainissement est l'une des responsabilités
principales des communes et des établissements publics intercommunaux. Cette priorité
donnée à la gestion de l'ensemble du cycle de l’eau est justifiée de plusieurs points de
vue. En premier lieu, le poids des investissements et le coût de fonctionnement des
services impliquent des engagements financiers importants. En second lieu, l'opinion
publique et les usagers sont attentifs à une eau de qualité et à un environnement protégé.
Dans ce contexte, le choix du mode de gestion des services revêt une importance
particulière.
La possibilité de déléguer au secteur privé les services publics de l’eau et de
l’assainissement a largement été utilisée en France, depuis le début du xixe siècle. Il en
résulte que les responsabilités exercées directement par les collectivités territoriales sont
variables selon la part de la gestion de l’eau et de l’assainissement déléguée aux sociétés
privées et selon le mode de délégation adopté.
Dans le cadre de la régie, la collectivité assure seule la totalité du service, avec
ses propres moyens (régie simple) ou sous son autorité directe ou indirecte (régie
autonome avec ou sans personnalité morale). Sa responsabilité est donc complète sur
l'ensemble de la gestion du cycle de l’eau lorsqu'aucun des deux services de l’eau et de
l’assainissement ne fait l'objet d'une délégation. La réalisation des investissements
comme l'exploitation des services reposent alors entièrement sur la collectivité.
La responsabilité des communes est également très étendue dans le cadre de la
régie intéressée ou de la gérance, qui constituent des formes atténuées de délégation. En
effet, le délégataire, qui agit sur ordre et pour le compte de la collectivité, n'y exploite
pas le service à ses risques et périls. Les déficits sont couverts par la collectivité
délégante et le délégataire n'est rémunéré que sur la base d'un forfait (gérance) ou d'une
prime comportant une part d'intéressement (régie intéressée). La commune conserve,
dans les deux cas, la maîtrise des tarifs, même si le régisseur intéressé est associé à leur
détermination. Elle assume aussi l'entière responsabilité de l'investissement et de son
financement.
Dans le cadre de l'affermage, beaucoup plus répandu, les investissements sont,
en principe, à la charge de la collectivité. Même si le fermier exploite le service à ses
risques et périls, en prenant à sa charge l'entretien et le renouvellement des installations,
la lourde mission de définir les investissements nécessaires, de les programmer et d'en
assurer la réalisation et le financement incombe, en qualité de maître d'ouvrage public, à
la collectivité territoriale délégante.
Ce n'est que dans le cadre de la concession, telle qu'elle est classiquement
définie, que le partenaire privé assume cette mission de maître d'ouvrage puisqu'il doit
alors réaliser ou faire réaliser, pour son propre compte, les investissements nécessaires
au fonctionnement du service, en assurant leur financement par les redevances perçues
sur l'usager.
Dans cette dernière hypothèse toutefois, le Code des marchés publics ne
s'applique pas aux travaux réalisés, puisque le maître d'ouvrage n'est plus une personne
publique mais un délégataire privé, agissant pour son compte, à la différence de la
situation observée dans le cadre d'affermages, de gérances ou de régies.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
40
L'enquête menée par les chambres régionales des comptes montre que
l'organisation des communes et de leurs établissements publics, marquée par une
excessive dispersion, est mal adaptée aux contraintes de gestion que connaissent les
services publics d’eau et d’assainissement (I). A cet égard, l'utilisation de toutes les
potentialités de l'intercommunalité peut être une solution pour résoudre les difficultés
rencontrées par les communes.
Les obstacles relevés devraient, en outre, être en partie compensés par une
maîtrise accrue de la gestion de l’eau et de l’assainissement. Or, qu'il s'agisse des
responsabilités exercées directement par les communes ou les établissements publics
intercommunaux (II), ou qu'il s'agisse du contrôle par ces dernières des responsabilités
qu'elles ont déléguées à des sociétés privées (III), la maîtrise de la gestion apparaît
insuffisante dans une proportion importante des collectivités sur lesquelles a porté
l'enquête.
Le manque de rigueur constaté concerne tous les modes de gestion, régies ou
délégations de service. Les errements retenus intéressent plus particulièrement ce
dernier mode de gestion parce qu'il est le plus répandu, notamment dans le secteur
urbain. En ILE-DE-FRANCE, sur 1 281 communes, 1 100 d'entre elles rassemblant
96,5 % de la population de la région ont opté pour la gestion déléguée.
Réalisée directement en régie ou indirectement à travers les différentes formes
de la délégation de service public, la gestion est peu transparente. Elle l'est d'autant
moins, dans le cas de la délégation de service public, que les formes juridiques
classiques de celle-ci, concession et affermage, ont perdu de leur spécificité pour se
perdre dans des contrats de type hybride parfois extrêmement complexes à mettre en
oeuvre. En outre, la délégation de service public s'exerce en France dans un contexte
professionnel très peu concurrentiel dont les excès financiers ont appelé une réaction
législative et réglementaire récente. Il faut espérer qu'elle permettra d'améliorer le
contrôle du fonctionnement des services et l'information des usagers.
I. - L'EXCESSIVE DISPERSION DE L'ORGANISATION LOCALE
La difficulté de mobiliser le financement des investissements, devenus
importants et souvent très coûteux, devrait inciter les collectivités à un effort de
coopération intercommunale. Cette coopération est indispensable pour améliorer
l'approvisionnement en eau qui ignore les limites administratives communales ; les
communautés locales de l’eau prévues par la loi du 3 janvier 1992 vont d'ailleurs dans
ce sens.
Or, les difficultés du financement des investissements, que connaissent certaines
communes, ne sont pas compensées suffisamment par les avantages que peut apporter
l'intercommunalité.
L'enquête a montré que l'organisation locale est souvent mal adaptée aux
contraintes techniques et financières spécifiques des services publics d’eau et
d’assainissement.
Le poids des investissements imposés par la nouvelle réglementation et le coût
de leur fonctionnement deviennent difficilement supportables pour les petites et
moyennes collectivités, dès lors qu'elles demeurent isolées. Ainsi, la station d'épuration
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
41
située à COLOMBES (Hauts-de- Seine), qui est réalisée sous la maîtrise d'ouvrage du
puissant
SYNDICAT
INTERDEPARTEMENTAL
D’ASSAINISSEMENT
DE
L'AGGLOMERATION PARISIENNE, représente, comme il a été indiqué, 2 milliards
de francs hors taxes.
Sauf exception, comme en région parisienne ou dans certaines grandes villes de
province, les services d’eau et d’assainissement n'atteignent pas la masse critique leur
permettant de mener à bien financièrement ces programmes de mise aux normes.
Les communes isolées sont, pour cette raison, de moins en moins aptes à faire
face à leurs obligations. Sur les cent trente-trois communes desservies par la société
d'économie mixte SEMERAP (PUY-DE- DOME), quatre seulement ont une eau
régulièrement contaminée. Ces quatre communes ont la particularité de ne pas adhérer
pour l’eau à un syndicat intercommunal, à la différence de toutes les autres sauf une.
A. - DES STRUCTURES INTERCOMMUNALES TROP ETROITES
La plupart des communes ont constitué, depuis longtemps, des structures
intercommunales pour l’eau et l’assainissement. Ces établissements atteignent rarement
en milieu rural la dimension optimale qu'exigerait une gestion plus efficace. Or, les
structures existantes sont souvent figées pour des raisons historiques, politiques ou pour
des questions de personnes. Dans ce contexte, le regroupement de syndicats s'avère très
difficile, y compris dans les cas où ils bénéficient de la même ressource en eau.
C'est ainsi qu'à la périphérie Sud-Ouest de TOULOUSE, deux syndicats utilisent
la même ressource et la même unité de production dont est propriétaire un autre
syndicat mixte. Si des conventions tripartites entre ces trois établissements publics
territoriaux ont bien été passées, leur éventuel regroupement n'a pas été envisagé. Il en
va de même dans le Sud toulousain où deux autres syndicats voisins sont desservis par
la même usine, propriété du département.
La rigidité des structures intercommunales a conduit à la multiplication du
nombre de syndicats aux compétences limitées, pour permettre l'association de plusieurs
groupement distributeurs, en vue de satisfaire un besoin commun : recherche de
ressources hydrologiques, unités de production de traitement ou d'épuration. Une
commune comme RIOM peut ainsi dépendre de quatre organismes, maîtres d'ouvrage
partiels pour son eau et son assainissement : SIVOM de RIOM pour la production
d’eau, SMUERR pour la protection des captages et la recherche hydrologique, Syndicat
d'aménagement de la HAUTE-MORGE pour la production d’eau à usage industriel et
Syndicat d’assainissement de la région de RIOM, sans évoquer le SIAEP de la Plaine de
RIOM auquel la commune appartient toujours formellement pour l'adduction et la
distribution d’eau.
Cette dispersion de la gestion locale rend évidemment plus difficile la cohérence
des actions. La réalisation des équipements est alors mal coordonnée. Ainsi, dans
l'agglomération du MANS, l'approche des problèmes de gestion est souvent très
différente entre la COMMUNAUTE URBAINE (185 500 habitants) et le Syndicat
intercommunal pour l'alimentation en eau potable de la REGION MANCELLE
(SIDERM, 81 900 habitants).
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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En LORRAINE, l'agence de l’eau RHIN-MEUSE, saisie de deux demandes non
coordonnées, de la commune de JARNY (Meurthe-et-Moselle, 8 700 habitants) et d'un
syndicat intercommunal, a refusé d'apporter son aide à un projet d'interconnexion, au
motif qu'il n'y avait pas de maître d'ouvrage unique et que subsistait un désaccord sur la
conception du programme.
La spécialisation de la gestion de l’eau et de l’assainissement est aussi à l'origine
de dysfonctionnements administratifs et financiers : retards de perception des
redevances du fait du régime légal de recouvrement par le distributeur, perte d'une
partie de l'assiette des redevances. Le SYNDICAT INTERDEPARTEMENTAL
D’ASSAINISSEMENT DE L'AGGLOMERATION PARISIENNE (SIAAP) a, par
exemple, de la difficulté à connaître la liste de certains redevables industriels.
La création des communautés locales de l’eau, prévue par la loi du 3 janvier
1992, devrait permettre, lorsqu'elles se développeront, de dépasser les clivages nés d'une
intercommunalité mal contrôlée. Ces établissements publics territoriaux devraient
faciliter la création de nouveaux périmètres de gestion ou d'étude moins circonscrits
dans des découpages administratifs qui manquent parfois de pertinence au regard des
enjeux.
Or, les insuffisances de l'organisation administrative ont non seulement pour
effet d'entraîner des coûts supplémentaires, mais également d'inciter à la délégation des
services. L'exploitation est alors organisée en fait par les exploitants privés, sur des
critères autres que ceux de l'efficacité de la gestion publique.
A VICHY (Allier, 28 000 habitants), le choix du délégataire des services d’eau
et d’assainissement avait été en partie motivé par le souhait de mieux "intégrer les
différents aspects de l'intercommunalité". La création d'une société spécifique (CBSE),
filiale des deux groupes privés représentés dans l'agglomération vichyssoise, n'a
nullement
fait
progresser
l'intercommunalité
depuis
1990
:
aucune
structure
intercommunale
n'a
été
créée
entre
VICHY
et
les
communes
limitrophes.
L'interconnexion des réseaux n'est toujours pas réalisée.
Dans ce contexte, la mise en place de syndicats départementaux ouvre une
alternative à la délégation en même temps que de nouvelles perspectives en matière de
développement des solidarités locales.
En ALSACE, le syndicat mixte "Service des eaux et de l’assainissement " du
BAS-RHIN (SDEA), intervient dans 74 % des communes de ce département au titre de
l'adduction d’eau potable (375 200 habitants desservis) et dans 83 % des communes
pour l’assainissement (638 300 habitants desservis). En plus des missions qui lui ont été
déléguées, le syndicat intervient comme prestataire de services dans des domaines
variés allant du quittancement des redevances d’eau à la maîtrise d'oeuvre et au contrôle
des installations d’assainissement, en relation avec une société d'économie mixte locale
(SEMDEA).
Dans certaines régions, des syndicats départementaux ont plus particulièrement
cherché à développer les solidarités entre communes en devenant de véritables
structures de péréquation.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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Le système proposé par ces syndicats répond partiellement aux problèmes posés
par l'atomisation des structures locales et par les disparités tarifaires qu'elle entraîne.
Dans les départements où ces établissements publics ont été mis en place, le prix unique
de l’eau fait l'objet d'une péréquation entre les services déficitaires et les services
excédentaires. Ces syndicats ont également une fonction d'expertise, de conseil et de
programmation. Ils donnent ainsi leur avis sur les aides départementales et accordent
eux-mêmes des subventions. Ils gèrent enfin, dans certains cas, les petits syndicats qui
se trouvent de la sorte vidés de leur substance.
La nécessité qui s'impose à de nombreuses collectivités de trouver de nouveaux
financements, sans augmenter les tarifs de manière excessive, justifie ces nouvelles
formes de coopération. Cependant, le système administratif qu'elles induisent connaît
des limites puisqu'il exclut nécessairement les services qui ont été délégués. Les prix de
l’eau fixés par le délégataire ne peuvent, en effet, faire l'objet d'une péréquation. En
outre, cette organisation financière est contraire au principe d'autonomie et d'équilibre
budgétaire par service ; elle déresponsabilise enfin les représentants de ces services qui
n'ont plus qu'une fonction formelle.
L'utilisation de systèmes de péréquation, si elle offre une alternative aux
collectivités ne souhaitant pas déléguer leur service, ne permet donc pas de pallier
totalement les insuffisances de l'organisation locale dans les secteurs de l’eau et de
l’assainissement.
B. - L'INTERCONNEXION NECESSAIRE DES RESEAUX
L'article 31, déjà cité, de la loi du 3 janvier 1992 habilite les collectivités
territoriales à entreprendre la réalisation et l'exploitation des ouvrages visant à assurer
l'approvisionnement en eau des consommateurs situés sur leur territoire. Ces
équipements doivent s'insérer dans le cadre des SAGE et à l'échelon supérieur, des
SDAGE, déjà évoqués, au fur et à mesure de leur mise en place.
Cette responsabilité était déjà reconnue aux communes par le dispositif législatif
et réglementaire mais elle se trouvait éparse dans divers textes : Code rural, première loi
sur l’eau du 16 septembre 1964, loi du 10 juillet 1973 relative à la défense contre les
eaux . La responsabilité des communes dans le secteur de l'approvisionnement en eau
est donc affirmée depuis plus longtemps que dans le secteur de l’assainissement. Ainsi
s'explique le fait que les infrastructures assurant la production et la distribution de l’eau
aient été dans l'ensemble réalisées assez tôt.
Toutefois, avec le double essor de l'urbanisation et de l'industrialisation, il est
apparu nécessaire depuis quelques décennies d'assurer, en quantité et en qualité,
l'approvisionnement en eau d'une population en voie de croissance rapide dans certaines
agglomérations. La continuité du service public impliquait que la conception des
réseaux puisse assurer la sécurité de l'alimentation en eau de zones démographiques
parfois très importantes, quelles que soient les circonstances : pollutions ou
interruptions accidentelles des ressources. En mettant en relation deux ou plusieurs
circuits, l'interconnexion des réseaux apparaît alors comme une nécessité. Encore faut-il
que
l'organisation
des
pouvoirs
publics
locaux
permette
sa
réalisation
car
l'interconnexion présuppose une gestion coordonnée.
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A TOULOUSE, bien que l'agence de l’eau ait préconisé l'interconnexion des
réseaux alimentés par la ville avec ceux des cantons Centre et Nord, celle-ci n'a pu être
mise en oeuvre. L'absence de décision politique d'ensemble, faute d'une structure
intercommunale d'agglomération, a empêché la réalisation de ce projet (voir encadré ci-
dessous).
Lorsqu'il est réalisé, le coût de ces nouveaux maillages, qui nécessite parfois des
conduites de diamètre important franchissant en secteur dense des fleuves et des
ouvrages publics conséquents, est souvent élevé. La liaison Marne/Seine, achevée en
1988 par le SYNDICAT DES EAUX D'ILE-DE-FRANCE (SEDIF), s'est élevée à plus
de 270 millions de francs hors taxes. Le raccordement au réseau de MULHOUSE
(Haut- Rhin), par une canalisation de 1,8 kilomètre, de six communes desservies
auparavant par le champ captant d'Illzach et de Kingersheim rendu inutilisable par suite
d'une pollution industrielle, a entraîné une dépense de 9,2 millions de francs. Le
dispositif mis en place en 1992 par un groupe de syndicats et de communes de la région
de RIOM en vue de l'interconnexion de leurs réseaux d’eau potable afin d'assurer la
sécurité de l'approvisionnement de certaines collectivités était estimé, avant toute
réalisation, à 46,5 millions de francs.
En revanche, l'interconnexion est déjà achevée ou très avancée, chaque fois
qu'une structure unique permet de regrouper les réseaux comme en ILE-DE-FRANCE
avec le SEDIF.
L'AGGLOMERATION TOULOUSAINE
Dans l'agglomération toulousaine, la cohérence des politiques communales dans la gestion de
l’eau et de l’assainissement est rendue difficile par la diversité et l'atomisation des modes de
gestion.
Si l'on relève une certaine tendance au regroupement des collectivités dans le domaine de la
production ou de la distribution d’eau potable assurées par onze syndicats (66 communes) et dix
communes à partir d'une ressource constituée essentiellement par la Garonne, en revanche, la
plupart des communes gèrent en régie directe leur service d’assainissement puisqu'on ne
dénombre que six syndicats d’assainissement.
La ville de TOULOUSE fournit en eau potable cinq communes limitrophes et sa station
d'épuration traite l'effluent de sept collectivités de l'agglomération.
Le département de la Haute-Garonne, à travers le service départemental de l’eau et de
l’assainissement, gère certaines unités de production d’eau potable, des réseaux de distribution
et plusieurs stations d'épuration pour le compte de collectivités.
L'éclatement des structures de gestion est illustré dans le Sud- Ouest toulousain où coexistent
trois syndicats sur la même zone. Il en est de même dans le Sud-Est toulousain où deux
syndicats sont alimentés par une usine qui appartient au département. Le regroupement des
syndicats pourrait contribuer à une meilleure gestion de la ressource.
Les modes de gestion sont diversifiés : hormis le cas des délégations de service pour lesquels
ont opté les communes de TOULOUSE (382 500 habitants), SAINT-ORENS (concession, 11
400 habitants) et BLAGNAC (affermage, 19 700 habitants), certains syndicats ou communes
gèrent en régie, ou confient par contrats la gestion totale ou partielle de leurs services à des
prestataires de services privés ou publics.
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Si la pluralité des opérateurs et celle des modes de gestion, bien qu'elles entraînent une absence
de lisibilité pour les usagers, peuvent présenter des avantages, la multiplicité des instances de
décision et le fait qu'aucune structure intercommunale d'agglomération n'exerce le rôle de maître
d'oeuvre d'une politique de l’eau ne garantissent pas l'optimisation des moyens.
Ainsi, l'interconnexion des réseaux préconisée par l'agence de l’eau pour pallier la vulnérabilité
vis-à-vis des pollutions à laquelle est sujette l'agglomération toulousaine du fait de l'unicité de la
ressource en eau, est retardée ou différée, dans la mesure où elle nécessite des accords
techniques et financiers entre des syndicats ou des communes dont les intérêts ou les
préoccupations divergent.
Le district de l'agglomération toulousaine a certes pour objet "l'interconnexion des réseaux
d’eau potable afin d'améliorer la sécurité de l'approvisionnement" mais n'a, jusqu'à présent,
entrepris aucune véritable action dans ce domaine. En outre, il constitue un cadre géographique
trop restreint puisque ni le département ni certaines communes importantes de l'agglomération
n'en font partie.
La coopération entre les collectivités, à défaut d'être institutionnelle, peut prendre la forme de
conventionnements.
A cet égard, il convient de souligner qu'une convention tripartite a permis la mise en place par la
ville de TOULOUSE, l'agence de l’eau et le département de la HAUTE-GARONNE, d'un
réseau d'alerte destiné à prévenir les pollutions. La première station d'alerte qui améliorera la
sécurité des approvisionnements en eau potable dans l'agglomération a été inaugurée le 11 mars
1996. De même, le schéma directeur de l'alimentation en eau potable du Grand Toulouse, en
cours de préparation sous l'égide de l'agence de l’eau, pourrait constituer pour les collectivités
concernées un cadre de réflexions et d'orientations.
Toutefois, certaines insuffisances dans la coopération intercommunale sont manifestes. Pour la
collecte et le traitement des eaux usées, une tentative d'approche globale des problèmes
d’assainissement s'est soldée par un échec. Le syndicat mixte "d'études des problèmes
d’assainissement ", constitué en 1986 à cet effet et qui réunissait toutes les collectivités
compétentes, n'a pas atteint les objectifs qui lui étaient assignés, les collectivités ne lui ayant pas
donné la possibilité de jouer un rôle déterminant dans ce secteur, à tel point que la dissolution
de ce syndicat est envisagée. De même, le syndicat mixte "pour l'étude et la protection de
l'environnement" constitué en 1991 ne compte pas TOULOUSE parmi ses adhérents.
Les difficultés rencontrées pour atteindre les objectifs de qualité du service
public de l’eau et de l’assainissement sont réelles alors que l'effort demandé aux usagers
est important. C'est pourquoi le contribuable local et l'usager du service d’eau et
d’assainissement sont en droit d'attendre une maîtrise renforcée de la gestion des
services par les autorités locales. Or celle-ci est encore insuffisante.
II. - LES DEFICIENCES DANS LA GESTION DIRECTE ET DANS LA
MAITRISE D'OUVRAGE
Bien qu'il ait connu un certain déclin au cours des dernières décennies, le mode
de gestion en régie reste très fréquent, notamment dans le domaine de l’assainissement.
Par ailleurs, compte tenu des affaires récentes que la justice a eu à connaître, il
pourrait connaître une nouvelle faveur en zone urbaine. Les insuffisances parfois
constatées par les chambres régionales des comptes lors du contrôle des régies méritent
donc une attention particulière.
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Le rôle des collectivités territoriales en tant que maîtres d'ouvrage, que ce soit
dans le cadre de régies ou de délégations du service public, appelle quant à lui de
nombreuses remarques.
A. - LES DEFAUTS D'ORGANISATION DES REGIES
Les
principaux
dysfonctionnements
de
services
publics
d’eau
et
d’assainissement relevés au cours de l'enquête proviennent d'insuffisances techniques et
financières. Ils pourraient être cependant corrigés si les procédures de contrôle de la
gestion étaient mises en oeuvre et si l'information des usagers, que pourtant le mode de
gestion en régie est censé favoriser, était organisée.
1° Des pratiques conduisant parfois à l'inefficacité
Du fait de la technicité croissante des procédés modernes de production et de
distribution d’eau aussi bien que d’assainissement, la constitution de services
opérationnels dotés de personnels hautement qualifiés exige un savoir-faire qui sort des
domaines courants des compétences communales. A ce défi technique, les régies
doivent également joindre un savoir-faire financier qu'elles ne possèdent pas toujours.
a) Sur le plan de l'organisation des services
Face aux technologies plus complexes, rendues nécessaires par les nouveaux
objectifs de qualité qui leur sont assignés, les services en régie souffrent parfois d'un
manque de qualification de leurs personnels. Leurs effectifs, fréquemment pléthoriques,
pèsent également sur l'efficacité de la gestion et sur les coûts d'exploitation.
A TOULOUSE, le personnel employé par la ville, pour la gestion de l’eau et
l’assainissement, représentait 475 agents. Il a été réduit à 331 agents après concession à
la Compagnie générale des eaux . Cette réduction a permis de réaliser dès 1990
d'importants gains de productivité.
L'importance des charges de personnel de certaines régies conduit d'ailleurs les
collectivités à reporter abusivement sur la section d'investissement une partie des
dépenses d'exploitation. Certaines facturations excessives de travaux en régie
permettent un financement par emprunt ; ainsi, certains travaux en régie, comptabilisés
par la COMMUNAUTE URBAINE DU MANS, ne peuvent être considérés comme
accroissant de façon durable l'actif des services et n'auraient donc pas dû être imputés en
section d'investissement.
D'autres insuffisances dans le fonctionnement des services en régie sont
fréquemment relevées. Le mauvais état des réseaux et l'absence de rigueur des
procédures de facturation, de recouvrement et de remise gracieuse contribuent à des
rendements médiocres.
Alors que la moyenne retenue par l'agence ADOUR-GARONNE s'établit autour
de 75 %, les taux de rendement du réseau du district d'AURILLAC (Cantal) sont tombés
de 68 % en 1992 à 59 % en 1994. L'étude réalisée pour rechercher les causes de cette
faiblesse a permis de constater la conjugaison de plusieurs facteurs. En premier lieu, le
président du district, en l'absence de toute décision de l'assemblée délibérante, octroyait
des dégrèvements avant facturation (30 436 m3 pour une même année). En second lieu,
le défaut de facturation des services publics locaux représentait, en 1994, 176 705 m3,
soit cent cinq compteurs non relevés.
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A CILAOS (Réunion, 5 900 habitants), le rendement du service de l’eau était en
1994 de 35,8 %, en excluant d'ailleurs une zone de distribution sans compteurs. La
faiblesse de ce taux était due à la vétusté des installations et aux difficultés éprouvées
par le personnel de la régie à intervenir sur les fuites des canalisations enterrées. Dans le
même temps, les consommations d’eau des services communaux, non munis de
compteurs, n'étaient pas facturées. Certains abonnés privés continuaient à bénéficier,
pour les mêmes raisons, de facturations forfaitaires. En outre, le volume des impayés
connaissait une évolution croissante, en l'absence d'instructions précises données aux
agents chargés du recouvrement.
Des anomalies similaires ont également pu être relevées à SAINT- PAUL-DE-
LA-REUNION (71 700 habitants). La régie des eaux s'est révélée incapable d'assurer la
facturation et le recouvrement de manière satisfaisante, malgré la présence de vingt-
quatre agents au service administratif. Cette situation a justifié le choix de la mise en
affermage du service en 1990. Les fautes de gestion antérieures ont conduit la
collectivité a admettre en non-valeur, en 1994, 12 millions de francs de recettes
irrécouvrables, dont la charge a dû être échelonnée sur six années dans les budgets du
service de l’eau.
Les dysfonctionnements de la régie des eaux et de l’assainissement de la ville de
RIOM (Puy-de-Dôme), responsable, à la suite d'une inondation, des dommages causés
aux équipements sportifs de la commune (400 000 F en 1992) et incapable de gérer
correctement les stocks et la mise en recouvrement afférente à l’eau consommée, ont
également constitué la motivation principale de la mise en affermage des services en
1993. Elle s'est traduite par une réorganisation complète du service et les effectifs ont
ainsi été réduits de dix-huit à sept agents.
Devant les difficultés, de nombreuses communes ont opté pour la délégation de
leurs services d’eau et d’assainissement, qui leur semblait être la meilleure solution aux
problèmes, d'ordre notamment technique, rencontrés.
b) Sur le plan financier
Sur le plan financier, le manque de rigueur dans la gestion de certaines régies se
traduit également par des surcoûts d'exploitation ou des déséquilibres. L'instruction M.
49, pourtant obligatoire depuis 1992, n'est parfois pas encore appliquée compte tenu
notamment de l'étalement de son entrée en vigueur dans les petites collectivités.
La gestion de la trésorerie reste, d'une manière générale, un point faible des
régies directes. Trop souvent, les emprunts sont mobilisés prématurément, sans
nécessité, ce qui majore les charges financières supportées par les usagers.
Le report d'opérations d'investissement conduit ainsi à des excédents importants
: le syndicat des eaux de SAINT-SYMPHORIEN, SAINT- CYR-SUR-LOIRE,
SAINTE-RADEGONDE (Indre-et-Loire, 36 700 habitants) présentait, pour les
exercices 1992 et 1993, des résultats excédentaires de 8,8 et 8 millions de francs,
provenant pour l'essentiel de la reprise d'excédents antérieurs et représentant 60 % du
produit de la vente d’eau.
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On est ainsi conduit à s'interroger sur l'intérêt d'immobiliser de tels moyens, qui
sont, en définitive, des prélèvements prématurés supportés par l'usager, ne donnant pas
lieu à rémunération, compte tenu de l'obligation de dépôt des fonds au Trésor imposée
aux collectivités territoriales.
Pourtant, la création de réserves, en vue de l'autofinancement futur
d'investissements croissants, n'est pas en soi condamnable puisqu'elle a pour objectif de
réduire les charges de financement imposées à l'usager.
A la différence des collectivités territoriales bénéficiant de ressources fiscales,
ces services industriels et commerciaux ne peuvent prétendre au versement des avances
sur douzièmes du produit des impôts opérées par le Trésor public. Par ailleurs, bien que
les règles budgétaires et comptables qui leur sont imposées soient proches désormais de
celles d'entreprises privées, les seules exceptions à la règle du dépôt gratuit au Trésor
jusqu'à présent admises ne concernent que les régies dotées de la personnalité morale,
très rares dans les secteurs de l’eau et de l’assainissement, qui peuvent ouvrir des
comptes courants bancaires après avis du trésorier-payeur général, et, dans une certaine
mesure, les régies dotées de la seule autonomie financière qui peuvent ouvrir un compte
de chèques postaux dans des conditions très restrictives.
Il y a lieu de noter également que les syndicats de communes appliquant
l'instruction M 49 peuvent placer librement les excédents de fonds provenant de leurs
activités industrielles et commerciales
3
.
Dès lors, il pourrait être envisagé, à titre dérogatoire, que les fonds disponibles
des régies d’eau et d’assainissement soient rémunérés par le Trésor public, à des
conditions proches du marché.
Un tel assouplissement de la réglementation permettrait de tirer les
conséquences financières du caractère spécifique des services d’eau et d’assainissement.
L'incitation à la délégation pourrait être alors réduite puisque l'obligation de dépôt de
fonds au Trésor n'est pas imposée aux partenaires privés des collectivités.
Quelques ajustements réglementaires rénovant le statut juridique des régies
permettraient d'adapter ce mode de gestion à une exploitation satisfaisante des services
d’eau et d’assainissement. Les errements observés dans la gestion de certaines régies
communales ne sont pourtant pas imputables à des vices inhérents à ce mode
d'exploitation, mais bien plutôt à l'insuffisance du contrôle interne des collectivités
territoriales.
2° L'inexistence trop fréquente des organes de contrôle des régies
a) Les organes institutionnels ne sont pas constitués
Dans le cadre de la régie directe, le service s'exerce à l'intérieur de la collectivité.
Les élus, les responsables administratifs et les usagers devraient logiquement être mieux
à même d'exercer les contrôles qui leur incombent tant sur la qualité du service que sur
les prix pratiqués. Cette situation n'est pourtant que rarement vérifiée.
3) Réponse à une question écrite n° 16440 du 4 juillet 1996 (Sénat, 7 novembre 1996).
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Le Code général des collectivités territoriales distingue trois types de régies :
- des régies simples, sans personnalité morale ni organes spécifiques,
fonctionnant dans le cadre de l'article L. 2221-8, lorsqu'elles ont été créées avant le 28
décembre 1926 ;
- des régies financièrement autonomes dotées d'un conseil d'exploitation ;
- des régies dotées de la personnalité morale et gérées par un conseil
d'administration.
Ces deux dernières catégories, qui favorisent la participation des représentants
des usagers à la gestion des services, ne sont toutefois que très rarement instituées. Il
n'existe, en effet, qu'un nombre très réduit de régies dotées de la personnalité morale. En
outre, beaucoup de régies financièrement autonomes, créées depuis 1926, ne sont pas
érigées conformément aux dispositions du Code général des collectivités territoriales,
qui prévoient l'établissement d'un règlement intérieur, la mise en place d'un conseil
d'exploitation et la nomination d'un directeur disposant de prérogatives spécifiques,
propres à assurer l'efficacité et l'indépendance de la gestion du service public,
notamment en cas de conflit d'intérêts avec la collectivité support.
C'est ainsi que l'organisation actuelle, en régie simple, de la COMMUNAUTE
URBAINE DU MANS s'appuierait, comme dans de très nombreux cas, sur le caractère
très ancien de la prise en charge de l’eau par la collectivité. En revanche, le service
d’assainissement, plus récent, aurait, en tout état de cause, justifié l'institution du cadre
prévu par la réglementation de 1926. Les principes de responsabilité, de transparence et
de participation - qui régissent actuellement la gestion des services publics -
s'accommoderaient mieux de l'existence d'un conseil d'exploitation, permettant d'y
associer les usagers, que de l'organisation prévue pour les régies simples, qui ne se
distingue pas de celle de la commune, si ce n'est sur les plans budgétaire et financier.
b) Les usagers ne sont pas consultés
La création, prévue par l'article 26 de la loi n° 92-125 du 6 février 1992, dite loi
ATR, de commissions consultatives pour les services publics locaux, aurait pu
permettre de mieux associer les usagers à la gestion des services, qu'ils soient gérés en
régie directe ou délégués.
Cependant, cette mesure, obligatoire dans les communes de plus de 3 500
habitants ou les groupements comportant au moins une commune de cette catégorie, n'a
généralement pas été appliquée. Dans les rares cas où ces commissions ont été créées,
comme dans l'agglomération du MANS (SIDERM), elles ne jouent aucun rôle, faute
d'avoir été convoquées.
La mise à disposition du public des rapports annuels présentés par les exécutifs
locaux sur le prix et la qualité des services publics de l’eau et de l’assainissement est
prévue par la loi du 2 février 1995 et par le décret du 6 mai 1995 dans les communes de
plus de 3 500 habitants. Cette disposition est de nature à développer l'information des
usagers sur la gestion de ces services.
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La mise en place progressive des instances de contrôle prévues par les textes,
associant les usagers à la gestion locale, devrait permettre aux collectivités, qui
souhaitent conserver la gestion en régie de leurs services publics, de parvenir à une plus
grande transparence et à une meilleure concertation.
B. - LA MAITRISE IMPARFAITE DES INVESTISSEMENTS
Le manque de définition et de programmation d'investissements de plus en plus
importants et l'insuffisante maîtrise de leur réalisation dans un contexte concurrentiel
peu développé, constatés par l'enquête des chambres régionales des comptes,
concourent simultanément au renchérissement des coûts.
1° L'insuffisance des études
Que ce soit dans l'évaluation des besoins des services, dans la mise en place des
solutions envisagées ou dans la programmation des investissements décidés, les études
correspondantes apparaissent souvent insuffisantes.
a) L'évaluation des besoins
Les études entreprises par les collectivités pour évaluer leurs besoins en eau
reposent souvent sur l'hypothèse d'une expansion continue et parfois totalement
irréaliste de la demande. C'est ainsi que la baisse récente de la consommation globale
d’eau n'a pas été prévue. L'incidence des mutations technologiques et démographiques
est mal appréciée. Mais, à la décharge des collectivités, il faut constater qu'elles ont
parfois été victimes de l'incapacité des organismes à qui sont confiées ces études.
L'étude diagnostic effectuée pour le compte de la COMMUNAUTE URBAINE
DU MANS, qui préconisait la construction d'une nouvelle usine de traitement des eaux
et de captages supplémentaires, était ainsi fondée sur des prévisions démographiques
qui ne se sont pas confirmées : une baisse de la population entre 1988 et 1995 s'est
produite alors qu'une croissance très forte des besoins (+ 14 %) avait été prévue.
Au syndicat de la Plaine de RIOM (Puy-de-Dôme, 28 communes, 24 500
habitants), la surévaluation des besoins en eau atteignait déjà 12 % en 1994, moins de
deux ans après l'étude.
Le même cabinet avait établi, en 1993, pour le SIVOM de RIOM une prévision
de consommation, pour 1995, qui a dépassé de 40 % la réalité. En 1992, dans un
contexte de pénurie d’eau, le même syndicat, prévoyant l'implantation d'une importante
unité d'embouteillage qui aurait fait doubler sa consommation (1,5 à 3 millions de
mètres cubes), avait décidé de financer un programme d'interconnexion à hauteur de
27,8 millions de francs. Aux termes de la convention passée à cet effet avec un syndicat
voisin, le SIVOM s'est engagé, en outre, à payer un forfait de 500 000 m3 d’eau par an
qu'il n'utilise qu'à hauteur d'un cinquième, plus une redevance pour investissements
antérieurs (1,11 million de francs en 1996).
De la même façon, la ville de RIOM s'est engagée, dans un cadre différent, à
payer un forfait de 300 000 m3 d’eau brute, ainsi qu'une participation pour
investissement au Syndicat d'aménagement de la HAUTE-MORGE, en prévision d'une
implantation d'entreprises qui ne s'est pas réalisée. Ces divers engagements, lourds de
conséquence pour l'usager riomois, ont été pris sur de simples présomptions, sans
garantie ni étude approfondie.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
51
b) Des solutions techniques mal adaptées
A DINARD (Ille-et-Vilaine, 10 300 habitants), la commune avait confié à un
cabinet privé, sans mise en concurrence, ni consultation, l'étude d'un barrage sur le site
du Bois-Joli. La maîtrise d'oeuvre de l'opération a également été confiée au même
cabinet, toujours sans mise en concurrence.
Alors que le rapport d'évaluation présenté dans le cadre de l'appel d'offres pour
la réalisation des travaux minimisait les aléas techniques et financiers susceptibles
d'affecter le projet, deux avenants ont été nécessaires pour prendre en compte des
surcoûts de 3,5 millions de francs, soit 15 % du marché initial. A cette insuffisance au
moins partielle de la préparation du programme s'ajoutait la méconnaissance du fait que
les eaux recueillies par l'ouvrage n'offraient pas les qualités requises pour être
distribuées sans traitement.
L'utilisation du barrage du Bois-Joli, qui a coûté au total 30 millions de francs,
reste donc aujourd'hui conditionnée par la construction d'une usine de traitement des
eaux . Or, ce projet n'est toujours pas programmé par la collectivité. Les usagers de la
ville de DINARD se voient donc facturer un surcoût de 2,40 F par mètre cube au titre
d'un barrage qui s'avère actuellement inutile pour l'alimentation en eau potable de leur
ville.
Les mêmes errements ont pu conduire, dans le domaine de l’assainissement, à la
construction de stations d'épuration fonctionnant imparfaitement du fait de leur
inadéquation au nombre d'abonnés raccordés : sur les dix-huit stations du district
d'AURILLAC, cinq sont surdimensionnées et huit sous-dimensionnées.
Dans d'autres cas, les solutions techniques adoptées, malgré leur coût élevé,
répondent mal aux objectifs de qualité que se sont fixé les collectivités.
On observe à SAINT-ETIENNE un renversement de l'ordre logique des
opérations : les effluents sont déversés avant d'être traités dans le milieu naturel à savoir
la rivière Le Furan, affluent de la Loire, pourtant réputée constituer la réserve d’eau de
meilleure qualité pour l'alimentation en eau potable de la ville. L’eau provenant de la
rivière est ensuite traitée globalement. On peut dire qu'à SAINT- ETIENNE, plus de 32
kilomètres de ruisseaux sont encore des égouts.
Bien évidemment, le traitement des rejets, ainsi préalablement dilués, est
coûteux pour des résultats médiocres. La station de traitement est surdimensionnée par
rapport à ce qui aurait été nécessaire dans un cycle normal, et le coût d'exploitation est
important du fait des volumes d’eau à traiter. Cette situation est aggravée par temps de
pluie ; la station ne peut plus traiter les eaux du Furan ; une grande partie des eaux usées
de l'agglomération stéphanoise est directement rejetée dans le milieu naturel, en aval de
la station. Il faut rajouter la pollution due à la remise en suspension par le flot d'orage de
la pollution de temps sec décantée et stockée dans le réseau hydrographique utilisé.
Pour sa part, le Syndicat intercommunal d’assainissement de SANARY-
BANDOL (Var, 22 200 habitants) n'a été en mesure de contrôler son partenaire privé
(voir encadré ci-dessous) ni pour la réalisation de la station d'épuration ni pour ses
conditions d'exploitation. Cette situation entraîne, elle aussi, des conséquences
financières importantes pour l'usager.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
52
La solution de l’assainissement collectif, trop longtemps encouragée, s'avère
inadaptée en milieu rural, lorsque l'habitat est dispersé. L'agence de l’eau SEINE-
NORMANDIE a calculé que les ensembles d’assainissement dits "autonomes" sont plus
avantageux financièrement dès lors que les habitations sont distantes en moyenne de 25
mètres. Ces ensembles sont aussi plus performants que le système réseau-station du fait
d'une épuration mieux contrôlée. C'est pourquoi l'article 35 de la loi du 3 janvier 1992
demande aux communes de définir sur leur territoire les zones d’assainissement non
collectif. Néanmoins, le ministère de l'agriculture a constaté que, depuis 1990, le
nombre de résidents des communes rurales non rattachés au système collectif décroît.
LA STATION D'EPURATION DE SANARY-BANDOL
La station, conformément au marché du 23 décembre 1982, devait être construite suivant le
procédé "physico-chimique", suffisant pour répondre aux besoins des deux cités jusqu'à la fin du
siècle. Pourtant, alors même que la station n'avait pas encore été mise en service, le constructeur
faisait adopter par le comité syndical, dès le 27 novembre 1984, un premier avenant, d'un
montant supérieur à 20 millions de francs HT, pour doubler la station physico-chimique et y
ajouter une chaîne de traitement biologique. L'entreprise obtenait cet accord en dépit d'avis
techniques défavorables.
Les engagements très stricts et précis, fermes et sans réserves, qu'avait contractés le constructeur
en matière de teneur de chlorures et de sulfures, de corrosion ou de bruit n'ont absolument pas
été tenus. Malgré la compétence revendiquée par l'entreprise, une dégradation très rapide du
génie civil et du matériel non adapté au type de corrosion présenté a contraint au remplacement,
réalisé ou en cours, de la plupart des gros matériels et l'on peut considérer que la station
biochimique est aujourd'hui hors d'état de fonctionnement.
L'accumulation des anomalies a conduit à faire supporter au syndicat, et donc aux communes
membres, un surcoût de 15,3 millions de francs HT, soit une augmentation de 30 % du marché
initial et de son avenant.
L'entreprise paraît d'autant moins excusable qu'elle n'a pas hésité à faire état de sa très longue
expérience pour acquérir la confiance du syndicat et entraîner sa conviction dans ses choix.
Par ailleurs, la direction départementale de l'équipement du VAR, maître d'oeuvre de la
construction, bien qu'ayant perçu une rémunération supérieure à 3 millions de francs, n'a pas
joué le rôle qui était le sien : elle n'a pas contraint le constructeur à effectuer à ses frais les
réparations et a poussé à la mise en place de la seconde tranche.
Enfin, l'exploitation de la station, confiée au constructeur, a révélé l'existence d'anomalies
multiples : un double comptage fait payer chaque année deux fois le traitement réel de 365 000
m3 d'effluents ; l'exploitant a fait dériver les prix, sans tenir compte des réglementations en
vigueur ni de ses engagements contractuels.
Si le syndicat, en engageant une procédure contentieuse, s'efforce de mettre un terme pour
l'avenir à ces dérives coûteuses, il n'est pas certain qu'il obtienne la compensation intégrale des
conséquences financières de ses négligences passées.
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(janvier 1997)
53
c) Les insuffisances de programmation
Mal évalués ou inadaptés, les investissements sont aussi parfois mal
programmés. Pendant trop longtemps, les collectivités ont négligé la programmation de
leurs travaux de renouvellement ou d'extension. Elles ont été conduites à réaliser, en
urgence, d'importants programmes qu'elles auraient pu mieux étaler, à moindre coût
pour l'usager. Une meilleure programmation permettrait sans doute d'éviter les surcoûts
non justifiés qui en découlent.
Pourtant, certaines collectivités n'hésitent pas à lancer leurs travaux avant même
toute formalisation du programme : pour le Syndicat d'électrification et d’eau de RIEC-
SUR-BELON (Finistère, 14 400 habitants), les délibérations fixant les programmes de
travaux sont ainsi systématiquement postérieures aux marchés publics. Les programmes
annuels de rénovation et de renforcement des réseaux se caractérisent par une mauvaise
définition des travaux : absence de correspondance entre les travaux programmés et les
plans prévisionnels établis par le maître d'oeuvre, réalisation de travaux non autorisés
par une délibération, programmation effectuée à partir de plans anciens et non à jour.
Les insuffisances de la programmation sont parfois lourdes de conséquences.
Faute de les avoir prévues antérieurement, en programmant leur étalement sur une
longue période, le Syndicat d’eau potable de la BASSE-LIMAGNE (Puy-de-Dôme, 44
communes, 75 900 habitants) a été contraint de réaliser 144 millions de francs de
travaux sur six ans. Il a dû avoir recours, pour cela, à la concession de service public,
perdant ainsi la maîtrise d'ouvrage de ses investissements en 1993.
2° L'insuffisance de la concurrence
Les difficultés des collectivités territoriales à définir leurs besoins pourraient être
surmontées si une réelle concurrence existait entre les entreprises capables de satisfaire
leurs demandes. Or, le secteur économique de l’eau et de l’assainissement en France est,
en fait, dominé par quelques grands groupes de taille internationale devant lesquels les
collectivités, même les plus importantes, sont en situation d'infériorité.
La technicité de la gestion de l’eau et de l’assainissement conduit trop souvent
les collectivités et leurs maîtres d'oeuvre habituels à utiliser les procédures les moins
contraignantes en matière de publicité et de mise en concurrence. Les principaux
intervenants se trouvent alors en dehors du champ d'application du Code des marchés
publics.
a) Des techniques complexes et protégées
Les techniques modernes de traitement des eaux requièrent des compétences que
n'ont pas toujours les communes et que sont souvent seuls à détenir les grands groupes
spécialisés dans le domaine de l’eau. Cette carence, qui affecte particulièrement les
petits services en milieu rural, a également pu être observée dans des communes plus
importantes.
Or, la spécificité des techniques utilisées dans les secteurs de l’eau et de
l’assainissement autant que la concentration des entreprises en groupes oligopolistiques
sont un obstacle à l'exercice d'une véritable concurrence pour l'attribution des marchés
de travaux.
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(janvier 1997)
54
Dans de nombreux cas, la réalisation des ouvrages est ainsi confiée à des
entreprises du groupe du délégataire. Ainsi, la commune de BLAGNAC (Haute-
Garonne) a confié à son fermier, sans mise en concurrence, la construction d'une
nouvelle station d'épuration, dont le coût (45 millions de francs HT, soit 1 285 F par
équivalent- habitant) est parmi les plus élevés des coûts constatés pour des stations
utilisant le même procédé de traitement.
b) Un recours excessif à la procédure des marchés négociés
L'abus du recours à la procédure du marché négocié, qui évite d'organiser une
consultation formelle des entreprises susceptibles d'effectuer des travaux, a souvent été
reproché aux maîtres d'ouvrages publics.
Ainsi le Syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable de REZE-
BOUGUENAIS (Loire-Atlantique, 59 800 habitants) a-t-il usé, à plusieurs reprises, de
cette forme de marché en 1990 et 1991, pour confier les travaux au gestionnaire du
service. Dans les différents cas relevés, le recours au marché négocié était abusif,
puisqu'aucun texte n'autorisait cette procédure.
Sur
soixante
dix-neuf
marchés
passés
par
le
SYNDICAT
INTERDEPARTEMENTAL
D’ASSAINISSEMENT
DE
L'AGGLOMERATION
PARISIENNE (SIAAP) en 1993, onze ont été conclus sans mise en concurrence pour
un montant supérieur à 13,6 millions de francs. Le caractère répétitif de l'utilisation des
procédures de négociation, presque toujours avec les mêmes entreprises, a également pu
être constaté.
Pour les grosses opérations, dans ce contexte peu concurrentiel, les procédures
de contrôle des coûts prévues par la circulaire du ministre de l'économie et des finances
du 26 juillet 1971, afin que soient analysées les marges pratiquées par les entreprises,
devraient s'imposer. Cependant, peu de collectivités sont en mesure, comme le SIAAP
qui dispose de moyens importants, d'effectuer ces contrôles dans des conditions
satisfaisantes.
La position occupée par le délégataire est également un obstacle au libre jeu de
la concurrence même lorsque la collectivité conserve juridiquement la maîtrise
d'ouvrage des investissements, comme le montre l'exemple suivant.
Le fermier du syndicat d’eau de RIEC-SUR-BELON, déjà mentionné, est
consulté et assiste systématiquement aux réunions du comité syndical concernant les
travaux. A cette occasion, le délégataire avait formulé, en décembre 1991, une
proposition de réalisation de travaux évaluée à 5,8 millions de francs, aussitôt acceptée
par le comité dans le cadre d'un marché négocié. A la suite de l'intervention du contrôle
de légalité, cette procédure a été abandonnée, au profit d'un appel d'offres. Celui-ci a été
déclaré infructueux et la proposition du délégataire a finalement été retenue, sa
participation au financement des travaux à hauteur de 550 000 F l'ayant placé en
position favorable.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
55
c) L'influence de la maîtrise d'oeuvre privée
L'absence de concurrence est également observée pour les missions de maîtrise
d'oeuvre, souvent confiées à un nombre réduit de prestataires connaissant bien les
réseaux et parfois liés au délégataire du service : tel est le cas du cabinet choisi par le
Syndicat intercommunal des eaux RHONE-VENTOUX (Vaucluse), qui a des liens
privilégiés avec la société fermière.
Le même cabinet a obtenu, à partir de 1988, d'importants marchés d'études de la
ville de JOUE-LES-TOURS (Indre-et-Loire), sans mise en concurrence préalable : 622
650 F en 1988, 450 000 F en 1989, 5 692 800 F en 1990, ramenés à 4 962 377 F après
observations de la chambre régionale des comptes pour l'application d'un abattement de
20 %, prévu au contrat, sur la rémunération du maître d'oeuvre pour non-respect de
certains de ses engagements contractuels. La mise en concession du service de l’eau, en
1990, n'a nullement remis en cause la présence du cabinet, ni modifié la charge
finalement supportée par la collectivité au titre de ces études.
Dans de nombreux cas étudiés, un maître d'oeuvre unique exerce un véritable
monopole de fait susceptible d'influer non seulement sur les coûts des études mais aussi
sur ceux des travaux : la totalité des trente-deux marchés de maîtrise d'oeuvre et de
travaux conclus, de 1988 à 1991, par le SIAEP de REZE-BOUGUENAIS, déjà cité
pour l'utilisation abusive de la procédure des marchés négociés, ont été attribués, pour
un montant de 17 millions de francs, au même maître d'oeuvre et au même entrepreneur,
par ailleurs gérant du service.
III. - LE CONTROLE INSUFFISANT DE LA GESTION DELEGUEE
L'obligation de mise aux normes des services d’eau et d’assainissement, dans un
contexte financier difficile pour certaines collectivités locales, a été un facteur propice
au renforcement des délégations de services publics, enregistré depuis une quarantaine
d'années. La part du secteur privé dans la distribution d’eau potable en France est ainsi
passée de 31 % en 1954 à 60 % en 1980 et 75 % en 1991, contre seulement 40 % dans
le domaine de l’assainissement. Le retard général pris dans l'équipement de ce secteur
peut expliquer la faiblesse relative de ce taux.
La délégation de service public constitue, en effet, une formule bien adaptée aux
besoins des collectivités, puisqu'elle permet, grâce aux importants moyens financiers
apportés par les sociétés spécialisées du secteur, de résoudre rapidement les problèmes
de gestion et d'investissement induits par une législation de plus en plus contraignante.
Cependant, l'absence d'encadrement et de contrôle des délégations de services
publics, aggravée par la moindre transparence de ce mode de gestion, a conduit à des
abus. La loi du 29 janvier 1993 et les lois récentes des 2 et 8 février 1995 ont eu pour
objet de remédier à ces difficultés.
A. - LES ASPECTS FINANCIERS DE LA DELEGATION
Qu'elle précède ou qu'elle suive l'acte de délégation du service public, la hausse
des prix est souvent à mettre en relation avec le changement de mode de gestion. Pour
remédier à cette situation, le législateur a défini de nouvelles règles plus contraignantes
en faveur des usagers du service public.
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(janvier 1997)
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1° La délégation, moyen de financer les investissements
Le changement de mode de gestion est souvent la conséquence d'une situation
qui implique à terme l'engagement de dépenses supplémentaires importantes :
investissements hors de portée de la collectivité, réticence des élus à prendre en charge
la responsabilité directe de fortes hausses de prix ou coût d'une mauvaise gestion
antérieure.
Une motivation importante de la décision de déléguer la gestion du service
public réside alors dans l'importance et dans les modalités de sa contrepartie financière.
L'augmentation générale de la pression fiscale et des charges d'investissement
des communes, les limitations imposées par la loi du 5 janvier 1988 dans l'endettement
et l'octroi de garanties d'emprunt, l'obligation d'affichage de l'endettement global,
étendue aux comptes annexes, prévue par la loi du 6 février 1992 et le décret du 27 mars
1993, inclinent les collectivités à rechercher de nouvelles formes de financement ; elles
sont désormais fortement incitées à limiter l'endettement nouveau, ou plutôt sa trace
visible, ce qui induit des transferts de charges, notamment à travers la délégation des
services en cause.
Pour l'autorité délégante, le contrat de délégation de service présente en effet
l'intérêt de desserrer dans le court terme les contraintes budgétaires immédiates ; mais
les conditions tarifaires qui en sont la contrepartie pèsent à long terme sur les usagers.
Ainsi, la ville de SAINT-ETIENNE (voir encadré p. 85) avait trouvé, en 1992,
par la délégation de ses services d’eau et d’assainissement à la Société stéphanoise des
eaux (filiale constituée à parité par les groupes Lyonnaise des eaux et CGE), le moyen
de limiter son endettement grâce à l'encaissement d'un droit d'entrée, tout en se
procurant des ressources fiscales nouvelles : la société délégataire avait pris en charge la
dette des deux services, soit respectivement 295 et 209,6 millions de francs. Un droit
d'entrée de 400 millions de francs, ramené à 382 millions, devait permettre d'atténuer,
en outre, l'endettement du budget principal de la ville, bénéficiaire, par ailleurs, d'une
redevance annuelle de 22 millions de francs, réduite ultérieurement à 9,6 millions.
Enfin, la gestion des services par une personne de droit privé permettait à la collectivité
de percevoir une ressource nette de 800 000 F au titre de la taxe professionnelle ainsi
qu'une redevance pour occupation du domaine public, intégrée au droit d'entrée.
Il est à noter que la suppression des droits d'entrée et redevances initialement
prévues a été compensée par la création de nouvelles redevances capitalisées. La ville
n'a pu conserver l'avantage financier immédiat qu'elle avait retiré en déléguant la
gestion de ses services qu'au prix de l'abandon de la perception effective des nouvelles
redevances d'usage et d'occupation du domaine public.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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LA VILLE DE SAINT-ETIENNE
Dotée d'un réseau de distribution d’eau potable ancien mais en bon état, la ville de Saint-Etienne
ne dispose, en revanche, que d'un système d’assainissement archaïque dont la mise aux normes
nécessitera, dans un court délai, des investissements importants. Il en résulte que la réalisation
coûteuse d'une station d'épuration, en principe performante et de grande capacité, n'aboutit pour
le moment qu'à des taux de dépollution inadmissibles pour une agglomération desservie de
quelque 300 000 habitants, y compris les communes environnantes.
Alors que la gestion de la station d'épuration a été confiée dès l'origine, en 1971, à une société
privée dont le contrat n'a cessé d'être réaménagé à des conditions pour elle avantageuses, ce
n'est qu'en 1992 que le service de l’eau et le réseau d’assainissement ont fait l'objet d'une
délégation pour une durée de 30 ans qualifiée de concession.
La gestion en régie des deux services, qui aurait dû comporter l'établissement de budgets
annexes strictement équilibrés en recettes et en dépenses, a toujours été marquée par une
confusion administrative et comptable qui a rendu au moment de la délégation - et rend
aujourd'hui encore - difficile l'évaluation de leur coût réel de fonctionnement et donc la
détermination d'un tarif d'équilibre. Cette confusion s'étend d'ailleurs aux fournitures d’eau aux
communes environnantes qui, faute de bases contractuelles suffisantes, ont conduit à
l'accumulation d'impayés à hauteur de 18 millions de francs.
De plus, dans la période la plus récente, la contribution du budget annexe au budget principal
n'a cessé de croître sous la pression des besoins budgétaires de la ville. Les transferts sont passés
de 10 millions de francs en 1990 à 32 en 1991 et plus de 60 en 1992, année de la délégation. Ces
transferts ont été jugés irréguliers par la juridiction administrative, comme chargeant indûment
l'usager de l’eau au bénéfice du contribuable, et ont donc été sanctionnés par l'annulation des
tarifs alors en vigueur.
C'est dans ce contexte d'urgence budgétaire qu'il convient de situer la négociation ayant abouti à
la date du 1er octobre 1992 à la concession pour 30 ans des deux services de l’eau et de
l’assainissement (hors station d'épuration) à une filiale à parts égales de la Compagnie générale
des eaux et de la Lyonnaise des eaux . Une telle durée était en soi anormale dès lors que sa
justification principale se trouvait non pas dans le besoin d'investissement, puisque l'essentiel
des travaux neufs d'extension ou de modernisation (surtout pour l’assainissement ) restaient en
dehors de la convention, mais dans l'amortissement d'un droit d'entrée extraordinaire qui devait
être payé à hauteur de 400 millions de francs en 3 ans.
Les contentieux en chaîne engendrés par cette opération ont entraîné une instabilité chronique
des tarifs applicables et donc du régime de la concession elle-même, puisqu'on en est
aujourd'hui au 7e avenant pour le service de l’eau et au 3e pour celui de l’assainissement.
La ville s'est, en dernier lieu, engagée à rembourser intégralement le droit d'entrée, en
contrepartie du versement à son profit, par le concessionnaire, d'une redevance d'occupation du
domaine public et d'une redevance dite d'entretien des ouvrages non concédés, qui seront
payées, en définitive, par l'usager, sous le couvert d'un nouveau tarif d'équilibre. Ce dernier tend
en fait à consolider le transfert initial des ressources au bénéfice du budget principal sans pour
autant garantir au service la moindre ressource nouvelle pour ses besoins futurs, en particulier
ceux qui devraient impérativement résulter d'un programme d'investissement estimé à 600
millions de francs pour la mise en conformité du seul système d’assainissement au niveau de
l'agglomération.
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(janvier 1997)
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Au total, au regard de l'engagement durable de la collectivité de garantir à son concessionnaire
les ressources procurées par un tarif dont les bases initiales étaient plus du double de celles du
tarif applicable deux ans avant la délégation, la ville aura obtenu le bénéfice essentiellement
temporaire d'un important apport de fonds pour son budget. Les effets en étant aujourd'hui
épuisés, la ville demeure seule face à toutes ses charges et, parmi celles-ci, celles qui ne
manqueront pas de résulter de la refonte de son système d’assainissement, même si une partie de
ces charges devait être prise en compte par la communauté de communes constituée en 1995. Le
concessionnaire, quant à lui, a obtenu, sous le couvert du maintien de l'équilibre initial de la
concession, des avantages certains en terme de ressources, en contrepartie de charges qui, selon
ses comptes les plus récents, feraient apparaître un déficit d'exploitation mais dont il n'a pas eu à
justifier, spécialement pour l’assainissement, qu'il en serait de même sur toute la durée de la
concession. Il demeure, en outre, bien placé pour offrir ses services lors de la réalisation
nécessaire des importants travaux qu'il ne s'est, pour l'essentiel, pas engagé à financer lui-même.
Les aléas de la délégation des services de l’eau et de l’assainissement à Saint-Etienne, aussi bien
que les incertitudes pesant sur leur gestion actuelle et future, illustrent la nécessité pour l'autorité
délégante de se doter d'une capacité juridique, administrative et technique de négociation et de
contrôle dont, de toute évidence, la ville de Saint-Etienne n'a pas jusqu'ici disposé. Qu'il s'agisse
des frais de gestion et de structure allégués par le concessionnaire, de sa propre rémunération,
ou des charges liées aux provisions constituées par lui en fonction de leur destination courante
ou finale tout au long de la concession, rien en l'état actuel du dossier ne permet de considérer
que la cession précipitée du service en 1992 aura permis de préserver à long terme les intérêts
de la collectivité, c'est-à-dire, en définitive, ceux de ses contribuables comme ceux de ses
usagers.
Les besoins de financement des collectivités constituent parfois le motif
essentiel de la mise en affermage de leurs services. La délégation est alors détournée de
son objet pour devenir une technique élaborée de financement du budget principal,
défavorable à l'usager- contribuable. L'exemple de GRENOBLE (voir encadré page
101) est très révélateur des risques s'attachant à ces nouvelles formes d'ingénierie
financière.
Or, chaque fois qu'elles recourent à la délégation de service public pour faire
financer leurs investissements, les collectivités devraient mieux mesurer l'impact sur les
prix du mode de gestion choisi.
En confiant en 1994 à la Compagnie générale des eaux , fermière de son service
d’eau, la réalisation de 19 millions d'investissements, dont 5,6 millions apportés par le
délégataire, au lieu d'assurer elle- même la maîtrise d'ouvrage des travaux dans le cadre
d'un marché public financé à des conditions normales, la commune de JARNY
(Meurthe-et- Moselle) a considérablement renchéri la charge finale que devra supporter
l'usager.
Un autre exemple est apporté par les syndicats de BASSE-LIMAGNE et de la
Plaine de RIOM (Puy-de-Dôme) qui ont concédé leur service à SCET- Environnement
en 1993 afin de faire réaliser respectivement 114 et 15 millions de francs
d'investissements. En optant pour la formule très onéreuse du crédit-bail, le délégataire
fait supporter à l'usager un surcoût de 3 millions de francs pour le premier syndicat et de
1,1 million pour le second. Pour ce dernier, l'opération est d'autant plus critiquable que
la collectivité aurait pu financer elle-même à moindre coût et avec les mêmes délais
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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d'exécution les travaux en cause, en utilisant d'ailleurs, en partie, des ressources
d'autofinancement qui n'avaient pas été prises en compte.
2° Les hausses de prix accompagnant la délégation
Même lorsque la revalorisation des tarifs intervient juste avant le changement de
mode de gestion, la hausse du prix est bien à mettre en relation avec la délégation du
service dans de nombreux cas examinés par les chambres régionales des comptes.
Ainsi, à TOULOUSE, le prix de l’eau a progressé de façon notable à la fin de
l'année 1989, quelques mois avant la mise en concession, à un moment où les
pourparlers avec les deux sociétés pressenties étaient près d'être engagés. Les
augmentations de prix, qui avaient pour objectif avoué d'arriver à une situation
financière plus saine, ne pouvaient que faciliter la négociation à entreprendre.
Un constat identique a également pu être fait, en 1990, pour la ville de
DINARD, où les prix de l’eau ont été augmentés de plus de 14 % postérieurement à la
consultation des délégataires potentiels et juste avant la mise en affermage, alors que
l'équilibre des budgets annexes ne nécessitait pas une progression d'une telle ampleur.
Plus fréquents sont les cas où les augmentations de prix interviennent après la
délégation des services publics ; le manque de clarté des contrats, le manque
d'information de la collectivité ou des usagers, l'insuffisance des contrôles, l'absence de
véritable concurrence y contribuent.
C'est ainsi qu'à EGLETONS (Corrèze, 5 800 habitants), le prix de l’eau a plus
que doublé trois ans après la mise en affermage, alors que les investissements restent à
la charge de la collectivité. Cette dérive est imputable à l'institution d'un droit d'entrée
de 10 millions de francs.
Pour sa part, la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX (635 000
habitants) a vu les tarifs de l’eau augmenter, toutes taxes, redevances et surtaxe
comprises, de 25,7 % en 1992, 9,15 % en 1993 et 7,58 % en 1994, alors que leur
croissance moyenne annuelle constatée avant la mise en concession n'était que de 4,92
%. Les hausses enregistrées entre 1992 et 1994 excédaient très largement celles
annoncées aux conseillers communautaires en 1991 (7,5 % en 1992 et 6 % en moyenne,
en francs constants, à partir de 1993), pourcentages jugés à l'époque raisonnables pour
justifier l'intérêt d'une mise en concession du service.
Pour répondre à cette situation, des dispositions législatives ont eu pour objectif,
depuis quelques années, d'encadrer les relations des délégataires, des collectivités et des
usagers dans des règles plus strictes :
- l'article 11 de la loi du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité
des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de
publicité et de mise en concurrence permet notamment au juge, saisi par une personne
écartée d'un contrat, d'ordonner à la personne morale responsable de se conformer à ses
obligations ;
- la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République
organise la participation des usagers (art. 26 de la loi et L. 2143-4 du Code général des
collectivités territoriales) ;
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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- la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la
transparence de la vie économique et des procédures publiques traite dans son chapitre
IV des délégations de service public, les soumettant à des procédures de publicité et de
mise en concurrence ;
- la loi du 2 février 1995 tend à limiter les durées des délégations et prohibe les
droits d'entrée ;
- la loi du 8 février 1995 (chap. Ier et II) sur les délégations de services publics
et marchés publics a rendu plus restrictives certaines dispositions de la loi du 29 janvier
1993 ; elle a soumis les comptes des délégataires au contrôle des juridictions
financières.
L'entrée en vigueur de ces lois, encore très récente pour les deux dernières,
devrait réduire à l'avenir le nombre des anomalies déjà dénoncées antérieurement par la
Cour des comptes.
B. - L'AMBIGUITE DES RELATIONS CONTRACTUELLES
Depuis l'abandon en 1982, du fait de la décentralisation, de la référence
obligatoire aux cahiers des charges-types de concession et d'affermage, les contrats de
délégation, plus souvent imposés par les entreprises gestionnaires de réseaux que
proposés par les collectivités dans le cadre des procédures de mise en concurrence,
tendent à se banaliser, sous la forme hybride "d'affermage concessif". Il en résulte un
manque de clarté des relations contractuelles, notamment en ce qui concerne
l'investissement.
1° Des concessions évoluant vers l'affermage
Les concessions dans lesquelles le délégataire prend normalement à sa charge
l'investissement limitent en fait - dans certains cas - les responsabilités effectives du
concessionnaire. Celui-ci peut ne prendre en charge qu'un seul ouvrage, comme à
JOUE-LES-TOURS (station de pompage et de traitement de Saint-Sauveur) ou qu'une
enveloppe financière correspondant aux investissements qu'il estime devoir engager
pendant la durée du contrat. Les travaux supplémentaires, qui viendraient à excéder
cette enveloppe, sont à la charge de la collectivité concédante, comme le prévoit par
exemple le traité de concession passé en 1995 entre la commune du MONT-DORE
(Puy-de-Dôme, 2 000 habitants) et SCET-Environnement.
Les risques de dérapage des prix, que comportent à terme de telles clauses, sont
importants, surtout si les besoins n'ont pas été correctement évalués ou si l'enveloppe de
travaux à la charge du concessionnaire n'est ni actualisable, ni assortie d'une liste
d'ouvrages à réaliser. En effet, le concessionnaire sera en mesure de réclamer, s'il prend
en charge de nouveaux programmes, non seulement une révision du prix de l’eau mais
également une prolongation de la durée du contrat, en application de l'article 40 B de la
loi du 29 janvier 1993. Si, au contraire, les nouveaux programmes restent à la charge de
la collectivité concédante, celle-ci devra les financer par une surtaxe, dont l'existence
n'est pas conforme aux principes de la concession.
De telles opérations effectuées par la collectivité supposeraient, en outre, la
tenue d'une comptabilité spécifique conforme à l'instruction M. 49, alors que ladite
instruction exclut pourtant de son application les services gérés en concession.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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La ville de SAINT-ETIENNE a ainsi supprimé, purement et simplement, ses
budgets annexes de l’eau et de l’assainissement lors de la délégation de ces deux
services, ce qui a permis au budget principal de bénéficier en 1992 d'un transfert net de
105 millions de francs. Or, le maintien des budgets annexes s'imposait, eu égard à la
nature de la délégation, nonobstant sa qualification de concession retenue par le contrat.
En effet, la collectivité a conservé la charge d'ouvrages importants, participant de façon
essentielle au fonctionnement du service de l’eau (entretien des barrages et des
bâtiments). Elle s'est engagée à contribuer éventuellement au financement des
investissements qui excèdent le montant de travaux mis à la charge du concessionnaire.
Dès lors, le contrat de délégation peut être assimilé, de ce point de vue, à un affermage,
qui suppose la tenue par la collectivité de comptabilités annexes de type M. 49.
2° Des affermages tendant vers la concession
A l'inverse de la situation précédente, dans le droit fil de la jurisprudence du
Conseil d'Etat (syndicat intercommunal du Bocage, 6 mai 1991), qui reconnaît la
possibilité de confier à un fermier la concession d'une partie des ouvrages d'un réseau
d’assainissement, de nombreux contrats d'affermage dérivent vers une forme
concessive.
A DRAGUIGNAN (Var, 29 600 habitants), le contrat qui mettait seulement à la
charge du fermier, en 1984, l'entretien et l'exploitation des réseaux d’eau et
d’assainissement avait été modifié en 1987 pour lui permettre d'effectuer des travaux
pour le compte de la collectivité, contre remboursement. Depuis cette date, la ville avait
choisi d'autoriser le fermier à préfinancer les ouvrages nouveaux et à inclure le
remboursement de ces avances dans le prix de l’eau. Par ce montage, qui transformait
l'affermage en "semi-concession", la municipalité permettait au délégataire de se
substituer à elle pour le financement et la réalisation d'ouvrages de gros travaux, comme
l'usine de potabilisation préfinancée en 1991 pour 2,75 millions de francs, sans exiger
en retour une transparence accrue. Il a été mis fin en 1996 à ce système de
préfinancement à la suite des observations de la chambre régionale des comptes.
A CHATEAUDUN (Eure-et-Loir), l'affermage de l’assainissement a été justifié
par les travaux de mise aux normes européennes de la station et du réseau qu'il a été
décidé de confier à un délégataire pour mieux en étaler la charge. Le montant des
travaux, initialement évalué à 16,8 millions de francs hors taxes, a été fixé à 21 millions
hors taxes, soit 0,95 franc par mètre cube. Mais, en définitive, ce programme de
rénovation a été abandonné au profit d'un projet de construction d'une nouvelle station.
La réalisation de cet équipement entraînera à terme une nouvelle augmentation du tarif.
A BLAGNAC (Haute-Garonne), le même type de contrat, juxtaposant
affermage, concession de travaux et financement des ouvrages par le fermier, a été
passé en 1992, par avenant au traité d'affermage du service d’assainissement. La
Compagnie générale des eaux s'est engagée, en échange de la prorogation de son contrat
de trente ans (soit au total cinquante ans), à construire une nouvelle station d'épuration
qu'elle financerait à hauteur de 22 millions de francs. Cette procédure, également suivie
pour le service de l’eau, dessaisit la commune de la maîtrise d'ouvrage et donne un
caractère hybride au contrat et n'en favorise pas la transparence.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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C. - LES EFFETS D'UNE CONCURRENCE IMPARFAITE
1° Des partenaires peu nombreux et stables
a) Un secteur très concentré
Le secteur privé de la distribution d’eau potable et de l’assainissement, qui était
jusqu'à une date récente fermé à la concurrence étrangère, même européenne, reste
dominé par quelques grands groupes français de taille internationale : la Générale des
Eaux (CGE), la Lyonnaise des Eaux et à un moindre niveau, la Société d'aménagement
urbain et rural (SAUR, groupe Bouygues), la Compagnie internationale de services et
d'environnement (CISE, groupe Saint- Gobain).
La distribution de l’eau à PARIS est assurée, depuis 1984-1985, par des
compagnies appartenant au groupe de la Compagnie Générale des Eaux pour la rive
droite et à celui de la Lyonnaise des Eaux pour la rive gauche.
La concentration du secteur peut se trouver accentuée par les accords que
passent ces groupes pour exploiter les services les plus importants, parfois en créant au
besoin des filiales communes à la demande des collectivités elles-mêmes.
A SAINT-ETIENNE a été créée en 1992 la Société stéphanoise des eaux (SSE),
constituée à l'occasion de la délégation des services d’eau et d’assainissement, à parité
par les groupes Lyonnaise des eaux - Dumez et Compagnie générale des eaux . Après
avoir présenté séparément leurs candidatures et leurs offres, dans le cadre de la
consultation organisée par la ville, les deux groupes se sont associés après que le conseil
municipal leur eut demandé de "s'entendre pour présenter une proposition commune, à
élaborer à partir de celle de La Lyonnaise des eaux ", jugée plus intéressante.
Une démarche similaire a été adoptée en 1989 à VICHY. La ville a demandé à la
CISE de se rapprocher de la Lyonnaise des eaux , de manière à intégrer les différents
aspects de l'intercommunalité des services d’eau et d’assainissement de l'agglomération.
Cette demande a été suivie par la création d'une filiale commune aux deux sociétés, la
Compagnie bourbonnaise d'environnement (CBSE).
L'insuffisante
maîtrise
des
collectivités
sur
leurs
services
d’eau
et
d’assainissement, dans un contexte concurrentiel qui ne leur est pas favorable, explique
en grande partie la stabilité excessive des délégataires.
b) Des contrats de délégation de longue durée
Les contraintes liées à la continuité du service public et à la nécessité d'amortir
les moyens importants mis en oeuvre en vue de son exploitation, supposent une certaine
permanence du délégataire. Toutefois, une tendance à la pérennisation des positions
acquises a pu être observée dans de nombreux cas.
La Compagnie générale des eaux gère ainsi sous le régime de la régie intéressée
depuis quarante-sept ans, sans mise en concurrence, le service du SYNDICAT DES
EAUX D'ILE-DE-FRANCE (4 millions d'usagers).
A DINARD (Ille-et-Vilaine), la production d’eau est assurée, depuis 1929, par la
CISE : de 1929 à 1969 dans le cadre d'une concession et depuis lors dans le cadre d'un
affermage, prolongé une première fois en 1988 puis une seconde fois en 1991 pour
quatorze ans. Ainsi, en 2005, le même exploitant aura géré la production de l’eau
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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pendant soixante- seize ans sans qu'aucune mise en concurrence permette à la
collectivité de s'assurer qu'elle traitait avec le mieux-disant.
Les durées de certains affermages, très supérieures aux douze années suggérées
par les anciens cahiers des charges, sont précisément à rapprocher de la prise en charge
par le fermier, souvent par simple avenant, d'une partie de l'investissement incombant à
la collectivité. Cette prise en charge, qu'elle prenne la forme d'un transfert des annuités
d'emprunt ou d'un transfert de la réalisation de programmes nouveaux, est souvent sans
rapport avec la durée excessive de prolongation des contrats qu'elle entraîne. Elle peut,
en outre, être à l'origine d'importants profits pour le délégataire.
La COMMUNAUTE URBAINE DE BREST a affermé, en 1987, ses services de
l’eau et de l’assainissement pour une durée de vingt-cinq ans, contre l'engagement pris
par le délégataire de financer 28 millions de francs d'investissement et de rembourser les
annuités des emprunts contractés antérieurement par la collectivité. Cette charge
annuelle a donc été introduite dans le prix de revient du fermier, alors qu'elle ne devrait
pourtant pas peser à l'avenir de la même manière qu'en 1987, au fur et à mesure de
l'amortissement des emprunts. Par ailleurs, en ce qui concerne les programmes
nouveaux, mis à la charge du fermier, 7,5 millions de francs de travaux restaient encore
à réaliser quatre ans après le début de l'affermage. Aucun calendrier d'exécution n'avait
été annexé au contrat, lequel ne comportait d'ailleurs pas de clause de révision
permettant d'actualiser le montant des travaux concédés.
A MODANE (Savoie, 4 250 habitants), les accords passés en 1991 avec le
groupe Lyonnaise des Eaux - Dumez pour l'affermage, pendant trente ans, des services
d’eau et de l’assainissement et pour l'exploitation des remontées mécaniques de la
station de Valfréjus, avaient notamment pour contrepartie le versement à la collectivité
d'une annuité de 1,5 million de francs pendant six ans.
Plus récemment encore, le SIAEP de REZE-BOUGUENAIS (Loire- Atlantique)
a confié, en janvier 1993, au gérant du service de l’eau, la charge de 1,6 million de
francs de travaux, en contrepartie d'un allongement de huit ans du contrat, ce qui en
portait la durée à vingt ans.
De telles pratiques ne peuvent que limiter la marge de manoeuvre des
collectivités à l'expiration des contrats.
2° L'insuffisante mise en concurrence
a) En ce qui concerne les travaux
La délégation de travaux à l'exploitant a parfois pour corollaire leur attribution
privilégiée aux sociétés du même groupe. Ainsi, la dévolution à la SAUR du marché
d'extension de la station d'épuration de MANOSQUE (Alpes-de-Haute-Provence, 19
100 habitants) a été consécutive à la conclusion, quelques jours avant l'entrée en vigueur
des dispositions de la loi du 29 janvier 1993 sur les délégations de services publics, d'un
avenant avec cette société fermière.
A SAINT-MALO (Ille-et-Vilaine, 49 300 habitants), le fermier se réserve les
travaux financés par le fonds de renouvellement mis à la charge de l'usager à hauteur de
4 millions de francs par an. Cette disposition contractuelle, qui aboutit à contourner les
règles de mise en concurrence, peut faire perdre à la collectivité le bénéfice financier
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des améliorations techniques à intervenir d'ici 2012, si le bordereau de prix de
l'entreprise n'est pas revu pour tenir compte des gains de productivité.
A GRENOBLE, certaines charges d'investissement conservées par la ville sont
également source de profit pour le fermier (groupe Lyonnaise des Eaux ) dans la mesure
où il est l'attributaire des travaux.
Dans le cadre de concessions, où l'exécution de travaux par le délégataire est
plus conforme à l'esprit du contrat, on peut également reprocher le manque de définition
des ouvrages mis à sa charge : l'obligation de résultat édictée par le contrat de
concession liant la COMMUNAUTE URBAINE DE BORDEAUX à la Lyonnaise des
Eaux fixe le montant du fonds de réserve mais ne précise ni le montant minimum des
investissements, ni leur calendrier d'exécution, en contradiction avec les termes de la
délibération communautaire qui avait fixé les enveloppes moyennes annuelles à
consacrer aux réseaux pour expliquer l'intérêt de la mise en concession.
Au syndicat de la BASSE-LIMAGNE (Puy-de-Dôme), si un calendrier est bien
fixé, la même imprécision existe quand à la nature des travaux à réaliser
(renouvellement ou extension). Les programmes sont, en fait, négociés chaque année
entre le délégataire (SCET-Environnement) et le syndicat. Mais, aucune indication n'est
donnée par le contrat sur les modalités de financement d'éventuels investissements
supplémentaires qui viendraient à excéder l'enveloppe initiale.
b) En ce qui concerne les contrats de délégation de service public
Malgré les efforts du législateur pour clarifier les conditions de délégation des
services publics, la concurrence reste imparfaite dans le secteur de l’eau et de
l’assainissement. Des cas récents prouvent qu'il est difficile de placer les candidats
éventuels dans des conditions d'égalité face aux délégataires déjà en place, notamment
lorsque ces derniers sont seuls à connaître des éléments financiers décisifs.
A l'occasion de la procédure engagée en 1994 pour le renouvellement de
l'affermage du service du Syndicat intercommunal de la VALLEE DE L'AUZON (Puy-
de-Dôme, 27 200 habitants), une erreur substantielle a été commise sur les volumes
facturés. Si tous les candidats ont formulé une offre basée sur le dossier de consultation,
seul le délégataire en place était en mesure de connaître le potentiel réel de
l'exploitation. Celui-ci a finalement été reconduit pour douze ans.
Quelles que soient les modalités du régime de délégation de service public, les
investissements réalisés sont financés, au moins en partie, par l'argent public provenant
des usagers et éventuellement des aides reçues d'organismes publics : collectivités
territoriales ou agence de l’eau.
A SAINT-ETIENNE, le projet de délégation a été conçu et mené dans la plus
grande confidentialité, sans que les services concernés ne soient, à quelque niveau que
ce soit, associés à l'opération. L'absence de cahier des charges préalable, de propositions
formalisées de façon précise par les groupes consultés, ou de dossier de comparaison
des offres a pu être constatée. Même si l'autorité municipale de l'époque a voulu
organiser une certaine concurrence lors de la passation des contrats, elle ne s'est pas
donné les moyens de retirer tous les avantages d'une telle démarche. On a pu même
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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relever qu'un inventaire fiable des équipements concernés n'était pas disponible au
moment de la passation des contrats.
3° La pratique des droits d'entrée
Jusqu'à ce qu'elle soit interdite par la loi du 2 février 1995, l'une des pratiques
contribuant le plus à fausser la concurrence lors de la négociation des contrats de
délégation tenait au versement de droits d'entrée, droits d'utilisation ou d'usage, qui
constituait souvent le critère essentiel de choix des collectivités, sans lien avec l'intérêt
réel du service, comme l'ont montré, entre autres, les exemples de GRENOBLE (voir
encadré p. 101) et de SAINT-ETIENNE (voir encadré p. 85).
En effet, le paiement par le délégataire de droits d'entrée aux collectivités faisait
supporter à l'usager des charges étrangères au service, au profit le plus souvent des
budgets principaux comme cela a été expliqué plus haut. Il avait également pour effet
d'allonger la durée normale des contrats : vingt-cinq ans pour l'affermage du service de
l’eau à la COGESE (groupe Lyonnaise des Eaux ) à GRENOBLE ; trente- quatre ans
pour celui du service de l’eau de SAINT-DENIS DE LA REUNION (122 000 habitants)
à la Compagnie générale des eaux , avec une contribution aux investissements de 31
millions de francs ; trente ans pour celui des services d’eau et d’assainissement du
district urbain de SAUMUR à la SAUR, avec un droit d'entrée de 35 millions de francs ;
vingt ans pour celui du service de l’eau d'une commune rurale à la Société d'économie
mixte départementale des eaux et de l’assainissement du Bas-Rhin, avec 8,5 millions de
francs de droit d'entrée.
La pratique du droit d'entrée avait des conséquences défavorables pour les
services d’eau et d’assainissement, qui perdurent dans certains cas malgré l'interdiction
pour l'avenir. Elle constituait, en effet, un moyen d'accélérer les transferts de charges
des contribuables vers les usagers : à SAINT-ETIENNE, l’eau et l’assainissement
finançaient le budget principal de la ville bien avant leur délégation au secteur privé.
Mais le changement de mode de gestion a eu pour effet, voire pour objectif, de
permettre le transfert immédiat à la ville de 400 millions de francs sous forme de droit
d'entrée, ultérieurement remplacé par un système de capitalisation de redevances
d'occupation du domaine public et d'utilisation des ouvrages concédés. Ce transfert
obère pour longtemps la capacité des services à financer leurs investissements. En effet,
la charge que supporteront les usagers, pendant trente ans, à ce titre, correspondant à des
dépenses externes, ne pourra pas être consacrée à la rénovation ou à l'amélioration des
équipements du service public.
A TOULOUSE, la délégation par la commune, en 1990, de ses services d’eau et
d’assainissement a été assortie de la reprise par l'entreprise délégataire, la CGE, de la
dette des services concédés qui s'élevait à 687,5 millions de francs et du versement d'un
droit d'entrée de 437,5 millions de francs permettant d'alléger d'autant la dette de la
commune. L'amortissement de ces sommes contribue à rendre déficitaires les comptes
du concessionnaire. Ceux-ci font apparaître un déficit annuel de 80 millions de francs
pour les années 1991 à 1993, alors même que des gains de productivité importants ont
été réalisés. Ce déficit a, en partie, pour origine le droit d'entrée initial, dont les annuités
d'amortissement représentent 37 % des charges financières et la moitié du déficit
apparent de l'exploitation. Le droit d'entrée fait donc obstacle à l'affectation des gains de
productivité au bénéfice des usagers. Comme à SAINT-ETIENNE, les surcoûts liés aux
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travaux de mise aux normes CEE, non pris en compte initialement par le
concessionnaire, ne pourront pas être compensés par les gains de productivité. Ils
devraient se traduire par de nouvelles augmentations de la redevance d’assainissement.
Enfin, on observe parfois, comme à LORIENT (Morbihan, 61 600 habitants),
que le droit d'entrée (30 millions de francs), dont l'incidence sur le prix payé par l'usager
est masquée par la prise en charge des annuités d'emprunt par le fermier, ne coûte rien
au délégataire. En effet, la seule révision de la part du prix correspondant aux annuités
d'emprunt procurera au délégataire une ressource équivalente au droit d'entrée (99
millions de francs sur la durée du contrat, soit 30 millions de francs actualisés, valeur
1990). Au surplus, le maintien de la tarification antérieure permet au fermier de
récupérer non seulement les annuités mises à sa charge, mais un montant sensiblement
supérieur, égal à 55 millions de francs, les annuités ayant des valeurs décroissantes, et
leur durée étant inférieure à celle du traité d'affermage.
LE CAS DE LA VILLE DE GRENOBLE
Deux conventions d'affermage conclues en 1989 ont délégué la gestion des services de l’eau et
de l’assainissement de la ville de Grenoble à une société privée, la Compagnie de gestion des
eaux du sud-est (COGESE), dont le capital est partagé entre la Société anonyme de distribution
d’eau intercommunale (SDEI) et la Société d'exploitation des réseaux d’eau potable
intercommunaux (SEREPI), toutes deux filiales de la Société lyonnaise des eaux .
Après examen des conditions dans lesquelles est intervenue cette délégation et au vu de la
situation financière des deux services avant et après leur mise en affermage, la chambre a estimé
que ces conventions avaient instauré entre les usagers, les contribuables de la ville de Grenoble
et le fermier des relations dont les termes d'équilibre n'étaient pas établis et dont la sécurité
juridique était menacée.
La délégation a été en premier lieu détournée de son objectif normal dans la mesure où elle a été
conçue comme un instrument permettant à la ville de se procurer les fonds dont elle avait besoin
pour redresser sa situation financière propre. Pour y parvenir, les conventions avaient organisé à
son profit un système de transferts financiers fondé sur la perception par le fermier de
l'intégralité des recettes dégagées par l'exploitation des services, selon une progression
programmée des tarifs, et sur la rétrocession d'une partie des recettes ainsi perçues.
Ces rétrocessions, sous forme de redevance ou droit d'entrée, devaient permettre à la ville
d'encaisser par anticipation les recettes que la perception normale d'une surtaxe correspondant
aux charges conservées par elle au titre de ses services lui aurait procurées. Pour compenser
l'avantage ainsi obtenu pendant une première période de onze années, la durée de la délégation a
été anormalement étendue à 25 ans, de sorte qu'à partir de la douzième année le fermier puisse
récupérer à son profit les recettes provenant de la majoration continue des tarifs.
Si l'on exprime les sommes en cause en valeur 1989 après application d'un taux d'actualisation
de 9,1 % (suggéré par les contrats eux-mêmes), les versements du délégataire atteignent 355
millions tandis que les recettes que la ville aurait perçues elle-même par hypothèse, sur la durée
des conventions, s'élèvent à 308 millions.
La délégation de service public a donc été utilisée par la ville comme une technique financière
permettant d'échanger sur une période de vingt-cinq ans un flux de recettes contre un autre et,
par ce moyen, grâce à l'encaissement anticipé de ressources, de réaliser un gain de l'ordre de 47
millions de francs en valeur 1989.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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A ce gain pourrait théoriquement s'ajouter celui que la ville serait susceptible de réaliser du fait
de l'allégement des charges qu'elle a conservées, notamment en matière d'équipement, et qui
sont couvertes par les recettes rétrocédées. Toutefois, le surplus financier global que la ville
pourrait retirer du mécanisme financier ainsi constitué serait directement tributaire de la
politique d'investissement que, eu égard aux obligations qu'elle a conservées, la ville aurait en
définitive à financer avec les recettes rétrocédées.
Le système ainsi mis en place pour procurer, du fait de la délégation, un surplus de recettes
provenant des services d’eau et d’assainissement n'avait toutefois d'intérêt qu'à la condition que
les ressources ainsi encaissées puissent être utilisées. Or la ville n'est pas parvenue à le faire
complètement, dès lors que l'illégalité du transfert des charges de l'usager au bénéfice du
contribuable a été mise en évidence. Le fonds de roulement des budgets annexes des deux
services s'est de ce fait trouvé anormalement gonflé au cours des années les plus récentes (28
millions de francs fin 1993) et les transferts au bénéfice du budget principal, qui avaient atteint
quelque 115 millions de francs au cours des années 1990 à 1993, ont dû être ramenés à la stricte
compensation des charges qu'il continuait à assumer.
Mais l'avantage financier à moyen terme obtenu par la ville avait une contrepartie. En décidant
de déléguer dans de telles conditions ses services d’eau et d’assainissement, la ville de Grenoble
a accepté de procurer à son fermier des moyens financiers beaucoup plus importants que ceux
avec lesquels ils avaient jusqu'ici fonctionné. Elle a dû pour cela consentir à ce que les usagers
supportent une augmentation des tarifs programmée sur toute la durée de la délégation sans que
pour autant les justifications puissent naturellement en être apportées sur une aussi longue
période.
Il en résulte que le fermier s'est trouvé habilité à percevoir des sommes de l'ordre de 246
millions de francs en valeur 1989. Rien ni dans les contrats, ni dans les comptes-rendus
financiers effectués à la suite des premiers exercices d'exploitation ne permettait d'anticiper le
gain net final du fermier, compte tenu de ses charges. Ce qui est sûr en revanche, c'est que
l'usager avait à supporter durablement, du seul fait des contrats, des augmentations de tarifs
importantes, dont les justifications ne résultaient pas des termes de la négociation et n'ont
toujours pas été produites depuis lors.
Il se trouve de plus que la réforme du financement du service de l’assainissement décidée en
même temps que son affermage a créé des charges nouvelles tant pour les usagers que pour les
contribuables. Cette réforme a consisté en trois mesures prises en 1989 : fiscalisation de la
contribution versée par la ville au syndicat d'agglomération au titre de l’assainissement,
institution par ce même syndicat d'une surtaxe destinée au financement de son service
d’assainissement, diminution de la redevance d’assainissement communale. Ces trois mesures
ont eu pour effet de faire supporter par le budget du syndicat d'agglomération des charges
jusque là supportées par le budget du service de l’assainissement de la ville, sans pour autant
que la redevance acquittée par les usagers de ce service soit diminuée à due concurrence. De ce
fait, l'excédent dégagé par l'exploitation de ce service lors de son affermage s'est trouvé
sensiblement majoré, l'augmentation étant évaluée pour toute la durée de la délégation à 85
millions de francs valeur 1989. La réforme du financement de ce service est donc à prendre en
compte pour apprécier l'économie globale des contrats d'affermage.
Au total, la chambre régionale des comptes a considéré que l'établissement de relations plus
équilibrées et juridiquement sûres entre les usagers, les contribuables et le fermier passait
nécessairement aujourd'hui par le respect des règles désormais clairement posées par les lois des
2 et 8 février 1995 relatives, la première à la protection de l'environnement, la seconde aux
marchés publics et délégations de service public (livre IV - titre 1er du Code général des
collectivités territoriales). Les versements du fermier à la commune doivent être limités à la
seule couverture des charges temporaires ou permanentes conservées par la commune au titre de
Cour des comptes - rapport public particulier
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la gestion de ses deux services et les tarifs perçus par le fermier doivent être fixés conformément
aux principes en vigueur (tels qu'ils ont été explicités par la jurisprudence). Un tel équilibre ne
peut être atteint qu'au vu de comptes d'exploitation prévisionnels et de comptes de résultats
établis selon les règles du genre et soumis aux contrôles prévus par la loi.
Ce sont ces raisons qui ont effectivement conduit la nouvelle municipalité de Grenoble à
renégocier les conventions d'affermage dans un sens plus conforme à l'intérêt des usagers
grenoblois.
4° Les difficultés de mise en oeuvre de la loi du 29 janvier 1993
L'insuffisance de la concurrence explique, en grande partie, la conclusion de
contrats déséquilibrés au détriment des collectivités territoriales. Les clauses
contractuelles comportent souvent des dispositions irrégulières, sans rapport avec l'objet
de la délégation. C'est pourquoi le législateur est intervenu en 1993 et a complété
récemment ses dispositions avec la loi du 8 février 1995.
a) Les conditions de renégociation de certains contrats
Les apports de la loi ont permis de corriger partiellement une situation très
préjudiciable aux usagers : reconduction systématique des délégations ; durée excessive
des contrats ; généralisation des droits d'entrée et redevances capitalisées ; publicité
insuffisante ; attributions privilégiées de travaux.
L'enquête a permis cependant de constater que de nombreux contrats ont été
renégociés, parfois avant leur terme normal, quelques mois ou semaines avant l'entrée
en vigueur de la loi. Dans certains cas, les collectivités ont même tenté, jusqu'à la
dernière heure, d'éviter les procédures de publicité qui s'imposaient à elles en arguant de
l'existence d'une décision antérieure à la date d'entrée en vigueur du texte : le syndicat
intercommunal des eaux de la région RHONE-VENTOUX (Vaucluse) a approuvé, le 30
mars 1993, un nouveau contrat d'affermage pour l’eau potable, signé ultérieurement
sans que la procédure ait été soumise à une quelconque publicité.
A MANOSQUE (Alpes-de-Haute-Provence), la conclusion précoce de nouveaux
contrats avec la SAUR, décidée le 10 février 1993, témoigne elle aussi de l'anticipation
délibérée de la loi, destinée à pérenniser la présence du fermier en place : le nouveau
contrat, ne prenant effet qu'au 1er janvier 1994, a été transmis au représentant de l'Etat,
le 26 mars 1993, six jours avant la date d'entrée en vigueur de la disposition de la loi
rendant la publicité obligatoire.
Le renouvellement du contrat passé par le syndicat d’eau de LEVET (Cher, 10
500 habitants) avec la Compagnie générale des eaux est intervenu le 26 mars 1993, sans
mise en concurrence, pour une nouvelle période de quinze ans ; ce nouveau contrat
prenait effet, au 1er juillet 1993, et la délibération autorisant sa signature a été déposée
en préfecture postérieurement à celle-ci.
Dans tous les cas où les renouvellements sont intervenus dans de telles
conditions, une partie du dispositif légal s'est trouvée privée d'application immédiate, et
pour une longue période.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
69
b) Les possibilités de prolongation de la durée de la délégation
L'une des dispositions de la loi du 29 janvier 1993 risque de faire obstacle, à
terme, aux principes de mise en concurrence et de limitation de durée des délégations
fixés par ses articles 38 et 40.
En effet, l'article 40 de la loi pose le principe de la limitation de la durée des
contrats de délégation de service public en fonction des prestations demandées au
délégataire. En aucun cas, la durée de la délégation ne peut dépasser celle des
amortissements des installations nouvelles réalisées par le délégataire. Mais, selon les
dispositions du 2e alinéa (B) du même article, la durée de la délégation peut être
prolongée - sans nouvelle mise en concurrence - lorsque le délégataire effectue à la
demande de la collectivité des investissements non prévus initialement au contrat et de
nature à modifier son économie générale. L'enquête des chambres régionales des
comptes a révélé des cas d'application extensive de ces dispositions.
En Lorraine, la commune de JARNY (Meurthe-et-Moselle) a confié en février
1994 à la CGE, par avenant au contrat d'affermage, la réalisation d'une station de
pompage et de traitement des eaux d'un coût de 19 millions de francs HT,
subventionnée à 70 %. En contrepartie d'un financement de 5,6 millions de francs
apporté par le fermier, la collectivité a prolongé la durée du contrat de vingt-cinq ans, le
portant, sans remise en concurrence, à quarante-sept ans, en se fondant sur l'article 40 B
de la loi.
Antérieurement déjà, un an avant l'échéance du contrat au 31 décembre 1992, la
même commune avait bénéficié d'une participation de 1,6 million de francs de son
fermier à qui elle avait confié des travaux d’assainissement, en contrepartie d'une
première prolongation de quatorze ans du contrat d'affermage.
De la même manière, le Syndicat intercommunal d’assainissement du JARNISY
(12 500 habitants), en contrepartie de la réalisation par la CGE, son fermier, de 400 000
F d'investissements, a prolongé, par avenant au contrat d'affermage, la durée de celui-ci
de treize ans (toujours en référence à l'article 40 B de la loi) pour la porter, sans remise
en concurrence, à une durée de trente-sept ans.
La même pratique a pu être dénoncée à EGUILLES (Bouches-du-Rhône, 5 950
habitants) à la suite de la saisine par le préfet de la chambre régionale des comptes.
Celle-ci a, en effet, considéré que la prorogation de quinze ans d'un contrat d'affermage,
le 8 avril 1993, en contrepartie de l'exécution par le fermier (SAUR) de travaux
d'adduction d’eau, n'était pas possible depuis l'entrée en vigueur de la loi du 29 janvier
1993. Le délégataire n'avait, en effet, pas été contraint de réaliser des travaux non
prévus, puisque ceux-ci étaient initialement à la charge de la commune et non de la
société fermière.
c) La pratique des redevances d'occupation du domaine public
Fortement encadrée par la loi du 29 janvier 1993, avant d'être purement et
simplement interdite par la loi du 8 février 1995, la pratique du droit d'entrée subsiste
néanmoins sous la forme fallacieuse de redevance d'occupation du domaine public
capitalisée, telle que celle payée à la commune du MONT-DORE (Puy-de-Dôme) en
1995 par SCET- Environnement.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
70
Cette redevance se présente aujourd'hui comme un véritable "succédané" de
droit d'entrée. Liée à l'utilisation, par le délégataire, de la voirie communale sous
laquelle sont enfouis les réseaux, cette redevance trouve sa justification apparente dans
les avantages qu'il tire lui-même de cette occupation et les sujétions qui en résultent
pour la ville. Toute l'ambiguïté résulte de la juste évaluation de cette redevance, sous le
contrôle du juge administratif.
Il est significatif qu'à SAINT-ETIENNE, les mêmes avenants aux contrats de
délégation aient prévu, simultanément en 1995, la suppression des droits d'entrée et
redevances initialement prévus et leur remplacement par diverses redevances dont une
redevance d'occupation du domaine public, calculée par référence au tarif de droit
commun (17 F le mètre linéaire), égale à 12 334 000 F pour le service de l’eau et 10 944
000 F pour le service de l’assainissement, et représentant plus du tiers de la valeur
annuelle d'amortissement des droits d'entrée.
D. - LE MANQUE D'INFORMATION ET DE CONTROLE
Une grande partie des dérives relevées dans le cadre des délégations de service
public pourraient être évitées si l'information des élus et des usagers était développée et
si un véritable contrôle des délégataires était exercé. Les lois des 2 et 8 février 1995
vont dans cette direction. Elles contribuent à améliorer la transparence des délégations
de service public. Leur entrée en vigueur est cependant trop récente pour que l'on puisse
apprécier toute la portée de leurs dispositions.
Dans la période récente, le mauvais fonctionnement des organes institutionnels
(commissions consultatives) et l'insuffisante information des usagers ont conduit les
associations de consommateurs à saisir les tribunaux comme à SAINT-ETIENNE
(Loire), au SIVOM de la région de LA BAULE (Loire-Atlantique, 70 000 habitants), ou
plus récemment au district de GUINGAMP (Côtes-d'Armor, 8 800 habitants).
1° Le manque d'information des collectivités et des usagers
a) Une information souvent déficiente
L'enquête a permis de constater que, dans les cas examinés, l'information des
élus, au moment du changement de mode de gestion, était rarement satisfaisante, faute
de contrôles antérieurs et de réelle maîtrise des services. Les études effectuées pour
évaluer l'intérêt des différentes formules de gestion ou propositions reçues étaient
fréquemment insuffisantes. Les délégataires pressentis s'abstenaient souvent de produire
les documents techniques ou financiers permettant de juger leurs offres avec
discernement.
Sur le plan technique, la connaissance qu'a la collectivité de l'état des réseaux et
des ouvrages peut s'avérer très sommaire. Ainsi, à VICHY, a pu être constatée
antérieurement à la délégation de services l'absence d'études fiables sur les équipements.
Les études relatives aux travaux d'amélioration du réseau ont donc été effectuées de
mars à août 1990, postérieurement à la conclusion du contrat, par l'entreprise
délégataire.
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(janvier 1997)
71
A COUERON (Loire-Atlantique) (voir encadré p. 110), l'étude diagnostic
confiée en 1989 à l'entreprise privée (CEO), qui sera choisie en 1990 pour assurer
l'exploitation des services d’eau et d’assainissement, était fondée sur des longueurs de
réseaux communiquées par les services techniques communaux, inférieures de 42 % à la
réalité. L'étude, payée par la commune après la délégation de service, prenait en compte
un linéaire de 75 kilomètres au lieu de 105 pour l’eau et 15 au lieu de 27 pour
l’assainissement. La découverte de ces erreurs en 1992 a entraîné une révision
substantielle de la rémunération de l'exploitant.
COMMUNE DE COUERON
La commune de Couëron, située en bord de Loire et à proximité de Nantes, compte 16 340
habitants.
La distribution de l’eau potable et son assainissement ont été assurés en régie municipale
jusqu'en 1989.
La ressource en eau était fournie par la régie municipale des eaux de Nantes. L'exploitation des
réseaux ne présentait pas de difficulté particulière, pas plus que le traitement des eaux usées qui
devait être assuré, à terme, par les importantes installations destinées à recevoir, ultérieurement,
toutes les eaux usées de la région nantaise.
Les usagers bénéficiaient d'un tarif uniforme de l’eau, institué pour les usagers du Syndicat
départemental d'alimentation en eau potable (SDAEP) auquel Couëron adhère. Ce syndicat de
péréquation garantissait, par ses subventions, l'équilibre de l'exploitation du service communal
de l’eau.
Le budget principal de la commune, pour sa part, devait équilibrer par ses subventions les
dépenses d'investissement, la redevance d’assainissement étant insuffisante à garantir l'équilibre
de gestion.
Confronté à cette situation de subventionnement des services, contraire aux dispositions de
l'article L. 2224-2 du Code général des collectivités territoriales, le conseil municipal en a
confié l'affermage à la Compagnie des eaux et de l'ozone (CEO) le 25 juin 1990. La convention,
d'une durée de vingt-cinq ans, prévoit la prise en charge de la dette des services, la reprise du
personnel municipal volontaire, la conservation d'un tarif du mètre cube d’eau identique à celui
fixé par le syndicat départemental. Le motif de la délégation du service exprimé dans la
délibération est de "maintenir le service public au même coût pour la population et d'améliorer
la desserte et la qualité du service aux couëronnais".
Cette dévolution a été insuffisamment maîtrisée. Les études préalables menées par les services
communaux et le futur exploitant ne se sont appuyées sur aucune consultation d'experts
indépendants (experts privés, services de l'Etat ou SDAEP) :
- le bénéfice de la péréquation des tarifs d’eau potable a été perdu : le SDAEP a exclu, de fait, la
commune de ses aides, en raison de l'incompatibilité de l'affermage avec le système de
répartition des excédents ;
- le financement des investissements nouveaux, resté à la charge de la commune, qui aurait
nécessité l'institution de surtaxes, n'a été organisé que sous la forme d'un reversement forfaitaire
à la commune de 5 % des recettes du fermier, tant en ce qui concerne le service d’eau que celui
d’assainissement.
D'autres insuffisances altèrent l'équité du contrat : par exemple, la formule de révision des prix
s'applique à l'ensemble de la rémunération de l'exploitant bien que cette dernière comporte
l'amortissement de la dette souscrite à annuité constante.
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72
L'équilibre du contrat est calculé sur une période de vingt-cinq ans, durée trop longue au regard
du caractère évolutif des normes, des techniques d'exploitation et des consommations. Cette
durée ne répondait qu'aux nécessités de l'amortissement de la part de la dette du service prise en
charge par l'exploitant. Les premiers comptes rendus font apparaître que les estimations qui ont
servi de référence au calcul d'un tarif moyen pour vingt-cinq ans sont parfois dépassées au bout
de quatre ans. De surcroît, les erreurs sur la longueur des réseaux ont faussé les conditions de la
négociation initiale des contrats.
En tout état de cause, la confusion organisée entre le prix de l'exploitation confiée au fermier et
celui de l'amortissement financier d'investissements qui auraient dû rester à la charge de la
collectivité est critiquable. Elle fausse la perception de la dette réelle de la commune, qui aurait
sans doute pu obtenir directement des conditions plus favorables d'endettement ou de
rééchelonnement de sa dette.
Les objectifs (tarifaires ; de neutralité pour les finances communales ; de qualité) visés par la
délégation n'ont pas été atteints :
- le tarif du mètre cube d’eau consommé ne devait pas dépasser celui fixé par le syndicat
départemental. La part fixe d'abonnement a été seule augmentée pour satisfaire aux demandes
de l'exploitant. Pour une consommation moyenne de 150 m3 par an, la facture finale a pu
augmenter de 10 %, de 1994 à 1995, là où le seul tarif proportionnel augmentait de 5 % ;
- l'absence de surtaxe a privé le budget d'investissement des ressources suffisantes et la
commune a dû, à nouveau, subventionner les services d’eau et d’assainissement à un niveau
supérieur à celui précédant l'affermage : 6 millions pour les deux services entre 1992 et 1994,
contre 4 millions de 1988 à 1990 ;
- une association de défense des usagers couëronnais s'est constituée afin de manifester ses
réserves sur la qualité du service rendu : elle a notamment obtenu de l'exploitant le
remboursement à chaque usager de sommes considérées comme recouvrées à tort.
En 1996, la commune n'a toujours pas institué de surtaxe, ni sur l’eau, ni sur l’assainissement, et
continue à subventionner irrégulièrement les investissements de ses services. La nouvelle
municipalité tente de renégocier le contrat.
Les équipements remis au partenaire privé ne font parfois l'objet d'aucun
inventaire ainsi que le révèlent des contrôles à SAINT-PAUL (Réunion) ou au syndicat
de BASSE-LIMAGNE (Puy-de-Dôme).
Sur le plan financier, le manque d'information des collectivités peut avoir le
même effet.
La commune d'EGLETONS, déjà citée, ne disposait pas, lors de la mise en
affermage de son service d’eau potable, du compte d'exploitation produit par le
délégataire. Cette information aurait permis à la collectivité de distinguer clairement ce
qui, dans le prix de l’eau, ressortissait à l'exercice du service public de ce qui constituait
la contrepartie de pratiques purement financières (droit d'entrée en particulier).
Pour le syndicat de la plaine de RIOM (Puy-de-Dôme), la mise en concession du
service d’eau avait été motivée par l'incapacité de la collectivité à prendre en charge un
programme de 15 millions de francs d'investissement. Or, les études effectuées à
l'époque reposaient sur une évaluation erronée des ressources du syndicat. De plus, la
décision de mise en concession a été prise à une date à laquelle le comité syndical ne
pouvait ignorer que la collectivité bénéficierait de plus d'un million de recettes
annuelles supplémentaires au titre de l'interconnexion des réseaux. Cette ressource lui
Cour des comptes - rapport public particulier
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(janvier 1997)
73
permettait
de
rembourser
facilement
l'emprunt
qui
aurait
pu
compléter
l'autofinancement du syndicat.
Trop souvent, les modalités d'exercice de la délégation empêchent ou
compliquent la production de l'information dont les élus et les usagers devraient
disposer pour exercer pleinement leurs prérogatives.
La production des documents annuels prévus par les contrats (comptes et
comptes rendus financiers, comptes rendus techniques) n'était d'ailleurs que très
rarement respectée avant la loi du 8 février 1995. Cette nouvelle législation a rendu
obligatoire, pour la plupart des délégations, l'établissement par le délégataire d'un
rapport annuel comportant les comptes et une analyse de la qualité du service.
A SAINT-AMAND-MONTROND (Cher, 11 900 habitants) et à DINARD (Ille-
et-Vilaine), les comptes rendus financiers, bien que prévus au contrat, n'ont pas été
produits par le délégataire pendant les quatre premières années de l'affermage, intervenu
respectivement en 1990 et 1991.
A METZ, les documents financiers n'avaient pas été produits pendant près de
vingt ans, avant que n'intervienne un contrôle de la chambre régionale des comptes. En
outre, les documents, finalement communiqués par le fermier, ne donnaient pas une
représentation fidèle de la situation de la délégation : exclusion des produits financiers,
charges financières non détaillées, présentation ne permettant pas de suivre l'évolution
des paramètres de la formule de révision des prix (voir encadré p. 114).
VILLE DE METZ
Par contrat du 1er octobre 1973, la ville de METZ a confié pour trente ans à la Société
mosellane des eaux l'exploitation de son service de distribution publique d’eau potable.
Au plan juridique, le contrat lie la seule ville de METZ et le fermier alors même qu'il traite de
l'exploitation du service de distribution publique d’eau potable pour une trentaine de
collectivités publiques, non signataires du contrat. Cette anomalie juridique a pour conséquence
de soumettre le montant de la surtaxe à la seule décision du conseil municipal de la ville de
METZ. De plus, la surtaxe effectivement perçue ne correspond pas, pour plus de la moitié des
collectivités, à la surtaxe effectivement votée. C'est ainsi que, dans deux communes, est levé
depuis vingt ans, sans aucune base légale, un prélèvement spécifique, assimilable à un
prélèvement fiscal, assis sur la facture d’eau, venant abonder le budget général. De 1973 à 1995,
les prélèvements de l'espèce se sont élevés à plus de 12 millions de francs.
Au plan technique et financier, la ville de METZ, dont l'effectif du service des eaux ne
comprenait, jusqu'à une date récente, qu'un seul fonctionnaire pour un réseau de plus de 770
kilomètres, n'a pas exercé pendant plus de vingt ans les contrôles minimaux sur l'activité de son
fermier. Des missions relevant exclusivement de sa compétence ont même été transférées au
fermier ; ainsi de 1989 à 1992, le recouvrement des participations prévues par l'article L. 332-15
du Code de l'urbanisme a été confié au fermier, alors même que le comptable public de la ville
avait appelé à plusieurs reprises l'attention du service sur le caractère illégal des procédures
suivies.
En l'absence de moyens, les outils techniques élémentaires indispensables à la surveillance du
réseau n'ont pas été mis en oeuvre. Dès lors, la ville s'est trouvée dans l'incapacité de vérifier
réellement le respect par le fermier de ses obligations en matière de renouvellement des
ouvrages. A titre d'illustration de ces défaillances dans le suivi technique, la ville a eu
connaissance pour la première fois en 1994, soit plus de vingt ans après la signature du contrat,
du taux de rendement de son réseau.
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(janvier 1997)
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Au plan financier, aucune information n'a été transmise par le fermier à la ville entre 1973 et
1993. Le premier compte rendu financier, au demeurant très lacunaire - une page sur cent dans
le rapport annuel du délégataire -, a été transmis en juin 1995. Enfin, alors même que par le jeu
des clauses de révisions de prix, la rémunération du fermier aurait pu être renégociée dès 1978,
le premier avenant au contrat d'origine a été passé en novembre 1993. Les retards observés ont
permis ainsi au fermier de bénéficier sur une longue période d'une rémunération presque
totalement indexée dans la mesure où la partie fixe de la formule de révision de prix avait été
progressivement neutralisée. Les conséquences de cette dérive, évaluées à 60 centimes par
mètre cube, n'ont pas été remises en cause lors de la signature de l'avenant de novembre 1993.
De fait, en l'absence d'informations financières sur les conditions d'exécution du contrat, la ville
ne disposait pas des éléments indispensables pour optimiser les modifications contractuelles.
b) L'imprécision des comptes rendus annuels
L'article 73 de la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection
de l'environnement, dont les dispositions ont été rapidement rendues applicables par le
décret du 6 mai 1995, prévoit que le maire présente chaque année à son conseil
municipal un rapport détaillé sur le prix et la qualité des services publics de l’eau et de
l’assainissement. Dans les communes de 3 500 habitants et plus, le rapport et l'avis de
l'assemblée délibérante sont mis à la disposition du public. Cette disposition devrait
renforcer la portée de l'obligation en la soumettant au contrôle des administrés.
Ces textes sont venus combler de lourdes lacunes mises en évidence par
l'enquête dans le dispositif d'information des élus et des usagers. En particulier, dans les
délégations
de
service
public,
les
rapports
d'activité
des
fermiers
et
des
concessionnaires, lorsqu'ils étaient fournis, manquaient souvent de précisions et étaient
parfois très peu explicites.
A ISSOUDUN (Indre, 13 900 habitants), comme dans de nombreux cas, les
comptes rendus annuels, tant techniques que financiers, ont été produits parfois avec
retard et toujours dans des formes différentes et moins complètes que celles prévues au
traité d'affermage.
A
ROMORANTIN-LANTHENAY
(Loir-et-Cher,
17
900
habitants),
la
collectivité ne dispose pas d'informations suffisantes pour contrôler l'emploi des
dotations de renouvellement, le montant des travaux correspondants n'étant pas indiqué.
A COUERON (Loire-Atlantique), l'information financière communiquée par le
fermier ne permet pas la mise en oeuvre de la clause contractuelle de réexamen des
conditions économiques de la convention d'affermage : absence de comparabilité des
prévisions et des réalisations, provisions non conformes à l'offre ayant permis de retenir
le délégataire, évolution différenciée des composantes du prix ne répondant pas à des
considérations économiques.
Dans le district de SAUMUR (Maine-et-Loire), le compte d'exploitation
prévisionnel joint aux contrats ne comporte pas un détail suffisant des postes de
dépenses justifiant les augmentations de prix. Le district ne s'était, en outre, toujours pas
prononcé en septembre 1993 sur les comptes rendus de l'année 1991.
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(janvier 1997)
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Les comptes rendus financiers produits par la Lyonnaise des Eaux comportent
des frais généraux calculés au niveau du centre régional. Les modalités de liquidation ne
sont pas toujours expliquées dans les comptes rendus financiers adressés aux
collectivités : c'est le cas pour le syndicat de BASSE-MODER (Bas-Rhin, 44 500
habitants) ; en revanche, le répertoire comptable retraçant l'état des provisions de
renouvellement des installations a été produit à la chambre régionale des comptes ; il en
ressort de l'analyse que cette ressource est suivie très précisément par le fermier.
L'examen de la comptabilité analytique d'une société d'économie mixte, fermière
de services d’eau et d’assainissement, la SEMERAP (Puy- de-Dôme) a permis de mettre
en évidence que les comptes rendus financiers produits aux collectivités par les
délégataires intègrent de nombreux retraitements comptables, non exposés de manière
explicite au conseil d'administration et aux collectivités concernées.
La précision et le nombre des indicateurs financiers et techniques qui, aux
termes du décret du 6 mai 1995, doivent figurer dans les rapports annuels sur l’eau et
l’assainissement risquent de ne pas suffire. L'opacité, constatée dans de nombreux cas,
peut demeurer un obstacle à l'information des élus et des usagers tant que n'auront pas
été fixées des règles de présentation communes à l'ensemble de la profession.
Il y aurait lieu, à cet égard, d'encourager les collectivités à demander aux
délégataires de leur fournir un compte rendu financier précis distinguant en particulier :
- les charges techniques d'exploitation du service ;
- les charges éventuelles liées à la dette ;
- les charges financières (amortissement et provisions, avec leurs justifications
détaillées) ;
- le montant des travaux de renouvellement.
Enfin, d'une manière générale, un effort devrait être fait pour améliorer la
présentation des cahiers des charges, qui comportent parfois jusqu'à une dizaine
d'avenants successifs, des règlements intérieurs, qui ne prévoient pas toujours les règles
d'accès aux documents administratifs, et des factures, qui ne donnent qu'une information
lacunaire difficile à analyser pour le non-initié.
Il résulte, en effet, de toutes ces insuffisances un manque de transparence et
d'information qui obère la capacité de contrôle non seulement des usagers mais aussi
des collectivités délégantes.
2° Des contrôles souvent négligés
Les collectivités s'en remettent parfois totalement aux délégataires de leurs
services publics, en négligeant le devoir de contrôle qui leur incombe. C'est ainsi qu'à
SAINT-DENIS DE-LA-REUNION aucun schéma directeur n'a été établi et la ville se
contente d'un programme pour 1996 à 2001 élaboré par son fermier pour les travaux de
renforcement et d'extension. Elle reconnaît, en outre, n'exercer aucun contrôle sur les
volumes de production et de consommation indiqués par le fermier et donc sur les
montants des recettes perçues. De nombreux exemples similaires ont pu être observés,
notamment dans les collectivités de taille modeste où les compétences techniques et
financières font souvent défaut.
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(janvier 1997)
76
La mise en place d'un contrôle du délégataire n'est pas toujours ressentie comme
une démarche normale et utile ; elle est plutôt considérée comme une charge
supplémentaire imposée à l'usager.
Il est vrai que, par rapport à une exploitation en régie, la délégation implique un
surcoût : le délégant doit contrôler le délégataire et assurer la rémunération d'agents de
contrôle d'une compétence suffisante ; le délégataire doit engager des frais pour
démontrer sa bonne volonté au délégant.
C'est ainsi que la Société stéphanoise des eaux verse à la ville de SAINT-
ETIENNE 0,3 % de son chiffre d'affaires pour financer ce contrôle, ce qui représentait,
en 1994, 524 280 F prélevés annuellement sur les usagers.
Toutefois, les frais qu'engagent les collectivités à ce titre sont largement
compensés par les gains issus du contrôle lorsqu'il existe réellement.
Des anomalies subsistant dans le cadre des délégations de services publics ne
sont pas détectées faute d'un contrôle efficace, indépendant du délégataire. Ainsi,
certaines clauses des cahiers des charges sont inadaptées ou mal appliquées.
a) Les formules de révision de prix
Les formules paramétriques permettant l'actualisation annuelle des tarifs de base,
pour tenir compte de l'évolution normale des coûts, peuvent comporter un caractère
abusif et permettre aux délégataires d'obtenir une augmentation injustifiée de leurs
marges.
A JOUE-LES-TOURS (Indre-et-Loire), le conseil municipal s'était engagé, le 13
février 1992, à ce que les prix et tarifs de base du concessionnaire soient maintenus.
Dans le même temps, il acceptait un avenant qui avait notamment pour conséquence de
réduire la partie fixe de la formule de révision de 39 % à 10 %. L'incidence de cette
modification représentait à elle seule une augmentation immédiate de 3 % par rapport à
l'application de la formule initiale. Cette mesure, accentuée par l'augmentation du
paramètre salaire de 36 à 53 %, continuera de produire ses effets pendant toute la durée
de la concession, sauf si les termes de la formule font l'objet d'une renégociation visant
à mieux prendre en compte la réalité économique du contrat.
Certaines formules de révision suggérées par les délégataires tendent à
surestimer la part des salaires dans l'ensemble des coûts. L'évolution des index salariaux
est, en effet, généralement plus rapide que celle des autres paramètres. L'analyse des
comptes d'exploitation du délégataire a permis de constater, pour le Syndicat à vocation
unique de LA HARDT (Haut-Rhin, 42 000 habitants), que les charges de personnel
représentaient à peine plus de 30 % des dépenses directes du fermier alors qu'elles
figuraient pour 50 % dans la formule de révision des prix.
A LORIENT (Morbihan), la formule de révision des prix avantage le délégataire
: d'une part, les salaires sont pris en compte pour 45 % alors qu'ils ne représentent que
31 % des charges ; d'autre part, le remboursement des annuités d'emprunt de la
collectivité par le délégataire est révisé au moyen de la même formule bien qu'il s'agisse
d'une charge fixe, voire dégressive, non susceptible de variations en raison des
conditions économiques. La partie fixe de la formule paramétrique devrait donc être de
54 % au lieu de 12 %. Le fait que l'augmentation, traduite par le jeu de la formule
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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d'indexation, ait été inférieure à l'inflation au cours des cinq premières années
d'application du traité ne contredit pas pour autant son caractère abusif, dès lors qu'en
effet sa structure ne reflète pas celle des coûts mis en oeuvre pour assurer le service.
Dans les exemples cités, les collectivités auraient eu intérêt à mieux contrôler
l'effet de la formule paramétrique sur les prix, en rapprochant l'évolution constatée de
celle effectivement enregistrée sur les coûts apparaissant dans les comptes
d'exploitation.
Il est rare cependant que ce contrôle soit effectué avec rigueur, même dans les
grosses collectivités. C'est ainsi que le SYNDICAT DES EAUX D'ILE-DE-FRANCE
n'a pas renégocié depuis de nombreuses années la partie fixe de 4 % de la formule
paramétrique de révision du prix qui est censée compenser les gains de productivité
dont se prévaut pourtant l'organisme.
De même, à METZ, l'absence de renégociation de cette formule, pendant près de
vingt ans, a procuré un avantage au fermier, expliquant en partie l'augmentation du prix
de l’eau (voir encadré, p. 114).
b) Les recettes
Dans le domaine du recouvrement des recettes, l'insuffisance des contrôles
exercés par les collectivités permet aux délégataires de réaliser des gains financiers
injustifiés, en reversant avec retard les surtaxes qu'ils encaissent pour le compte des
collectivités.
Lorsque le contrat prévoit des pénalités de retard, elles ne sont pas toujours
appliquées avec spontanéité. Le Syndicat des eaux du NORD CAP-SIZUN (Finistère, 4
700 habitants), malgré le rappel à l'ordre qui lui avait été adressé au titre des exercices
1983 à 1985, a continué de négliger jusqu'en 1992 le contrôle de l'application de ces
pénalités.
Il est vrai que certaines collectivités se prêtent avec complaisance à ces pratiques
pour obtenir du délégataire une rémunération de leurs disponibilités, que ne permet pas
normalement l'obligation de dépôt des fonds communaux au Trésor.
De 1989 à 1993, la commune de GUERLESQUIN (Finistère, 1 640 habitants) a
ainsi obtenu 121 500 F d'intérêt pour 1 233 000 francs de surtaxes déposées chez son
fermier.
Toutefois, les produits financiers générés par ces dépôts ne sont pas toujours
imputés par les délégataires en atténuation des charges supportées par les usagers.
La SEMERAP, chargée de l'exploitation du SIAEP de la plaine de RIOM (Puy-
de-Dôme), a conservé plus d'un million de francs de redevances d'interconnexion
destinées au syndicat, certaines pendant plus de deux ans, sans imputer les produits
financiers sur le compte de la délégation. Une autre partie de ces redevances, destinée à
faire contribuer les usagers d'un autre syndicat (le SIVOM de RIOM) aux moyens
d'exploitation du SIAEP (1,3 million de francs en deux ans), a été encaissée par le
délégataire au titre de l'année 1993, conformément au contrat, sans répercussion sur le
compte d'exploitation de la délégation. Faute de contrôle par la collectivité, ses usagers
n'ont ainsi pas pu bénéficier de la participation des abonnés du réseau voisin qui avait
précisément pour objet d'atténuer leurs charges.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
78
c) Les opérations d'investissement et les fonds de travaux
Les insuffisances du contrôle des délégataires par les collectivités sont
particulièrement visibles et lourdes de conséquences en matière de travaux.
Les équipements réalisés par les fermiers ou les concessionnaires ne font parfois
l'objet d'aucun inventaire ainsi que le révèlent les contrôles récents.
Les fonds de travaux qui leur sont confiés permettent de financer d'autres
charges que les investissements, comme par exemple les redevances de l'agence de l’eau
à TOUL (Meurthe-et-Moselle). Dans d'autres cas, les fonds restent inutilisés : détenus
par la SAUR pour le compte du district de SAUMUR, ils proviennent d'un prélèvement
annuel sur l'usager de 7,7 millions de francs et n'avaient toujours pas été employés à la
réalisation d'investissements en fin d'année 1993, contrairement aux engagements pris.
Le délégataire disposait à cette date de 26 millions de francs de disponibilités sur le
fonds de travaux.
Le principe même du fonds de travaux dans le cadre d'affermages contrevient à
plusieurs règles applicables aux collectivités locales maîtres d'ouvrage, destinées à
permettre un meilleur contrôle de l'utilisation des fonds publics : obligation de dépôt de
leurs disponibilités au Trésor ; interdiction de contracter les recettes et les dépenses ;
intégration annuelle des immobilisations à l'actif de la collectivité ; application du Code
des marchés publics.
d) Les charges de personnel
Faute de précision dans les documents produits par les délégataires, les dépenses
de personnel sont rarement contrôlées par les collectivités. Pourtant, la délégation du
service rend parfois obscures les conditions d'emploi des agents et d'imputation de leur
coût. Dès lors, elle peut s'accompagner d'une majoration de ce poste de dépense. En
l'absence de contrôle, les délégataires ne répercutent pas toujours les gains de
productivité engendrés par les investissements financés par l'usager. Au Syndicat des
eaux de BEAUFORT (Ille-et-Vilaine, 94 200 habitants), le délégataire a financé la
moitié des installations de télégestion (soit 1 165 000 F) moyennant la prolongation
pour six ans du contrat. Or, le bénéfice qu'il tire des économies de personnel induites
par cet équipement est largement supérieur au coût de son investissement initial. Le
syndicat aurait pu utilement rapprocher ces deux éléments pour contester la
prolongation du contrat demandée par le délégataire ou exiger en contrepartie une
diminution du prix de l’eau.
En outre, les personnels communaux détachés bénéficient, dans le cadre des
délégations, d'avantages supérieurs à ceux qu'autorise l'article 64 de la loi du 26 janvier
1984 et l'article 6 du décret du 13 janvier 1986 (règle dite des 15 %).
Pour ces raisons, et malgré les gains de productivité obtenus, l'augmentation des
charges de personnel a pu être observée dans certains cas de délégation des services.
A SAINT-ETIENNE, ce poste de dépenses a crû de 20,7 % entre 1991, dernier
exercice complet d'exploitation en régie, et 1994. Les personnels détachés ont reçu la
garantie qu'ils conserveraient leur rémunération et leurs avantages antérieurs, majorés
de 10 % (15 % pour les personnels intégrés). De plus, aux effectifs permanents du
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(janvier 1997)
79
délégataire, doivent être ajoutés les agents extérieurs à l'entreprise (les cadres détachés
des sociétés mères) qui représentent 11 % de ses frais de personnel.
Les contrôles effectués à la SEMERAP (Puy-de-Dôme) ont montré que le
régime indemnitaire très favorable des agents, qui se conjugue désormais avec une
indexation directe du point indiciaire sur le prix de l’eau, très critiquable, entraîne des
hausses de coûts qui pourraient avoir une incidence sur la situation financière de la
société et donc sur les tarifs applicables à l'usager, suivant les modalités du contrat
d'affermage.
L'insuffisance des contrôles exercés par les collectivités délégantes entraîne une
perte de maîtrise de leurs services, laissant une trop grande latitude au délégataire.
Les dispositions nouvelles de la loi du 8 février 1995, autorisant les chambres
régionales des comptes à vérifier auprès des délégataires de service public les comptes
produits aux autorités délégantes, devraient favoriser, à l'avenir, une plus grande
transparence de ce mode d'exploitation.
Il faut souhaiter que ces mesures incitent les collectivités à mettre en place les
contrôles internes, indépendants des délégataires, qui leur font encore trop souvent
défaut.
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(janvier 1997)
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CONCLUSION
Un triple constat
L'examen approfondi de la gestion des services publics locaux d’eau et
d’assainissement, illustré par de nombreux exemples, conduit à un triple constat :
- en premier lieu, les services publics de l’eau et de l’assainissement, assurés de
manière globalement satisfaisante dans notre pays, vont requérir des moyens financiers
croissants pour répondre aux exigences de qualité définies par les normes européennes
et par la loi du 3 janvier 1992. Leurs ressources actuelles s'avèrent souvent insuffisantes
pour faire face aux VIe et VIIe programmes des agences de l’eau ;
- en deuxième lieu, le respect des normes de qualité doit être assuré et implique
des engagements financiers qui, en règle générale, doivent être financés par les usagers
et non par les contribuables. Dans de nombreux cas, les dispositions du Code général
des collectivités territoriales ne sont pas respectées ;
- en troisième lieu, les difficultés rencontrées par les communes pour mobiliser
les moyens financiers devraient les conduire à une maîtrise renforcée de la gestion des
services d’eau et d’assainissement. Il est cependant constaté une maîtrise insuffisante,
tant des interventions directes des collectivités que des services dont elles ont délégué la
gestion à des sociétés privées.
La gestion de l’eau et de l’assainissement est techniquement d'une grande
complexité. En effet, les obligations nouvelles définies par le législateur entraînent des
engagements financiers importants, tandis que les progrès techniques nécessitent une
"veille technologique" de la part des autorités communales. Enfin, les communes ont à
négocier avec des partenaires privés dotés de moyens techniques puissants. Il en résulte
que les communes et les établissements publics intercommunaux ont besoin d'une
assistance qu'il paraît utile de développer. La négociation et le suivi des contrats de
délégation, la mise en oeuvre de nouvelles exigences liées à la qualité de l’eau,
impliquent un pouvoir d'expertise que n'ont pas nécessairement les communes.
Une assistance technique à développer
Les collectivités peuvent, en partie, trouver des moyens d'assistance dans un
effort plus soutenu de coopération intercommunale.
Les départements et les régions aident les services locaux d’eau et
d’assainissement, en participant directement au financement de leurs investissements.
En développant l'action des services d'aide technique aux stations d'épuration
(SATESE), les départements sont en mesure de soutenir efficacement l'action des
communes et des établissements publics intercommunaux. Leurs interventions sont,
cependant, tributaires de leurs possibilités financières.
C'est pourquoi les services de l'Etat et les agences de l’eau pourraient développer
leur rôle de conseil et d'assistance.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
81
Autour des préfets qui ont, directement, la charge du contrôle de légalité des
actes des collectivités décentralisées, ainsi que la responsabilité de la police des eaux et
de la salubrité publique, tous les grands services déconcentrés sont concernés à un titre
ou à un autre par la politique locale de l’eau :
- les directions départementales de l'équipement (DDE) ;
- les directions départementales de l'agriculture et de la forêt (DDAF) ;
- les directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS) qui
assurent le contrôle sanitaire des eaux d'alimentation ;
- les directions régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement,
(DRIRE) ;
- les directions départementales de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes (DDCCRF).
Ces différents services exercent des missions diverses, parfois difficiles à
concilier. L'exercice simultané, par les mêmes services administratifs, de missions de
contrôle et de missions d'assistance rémunérée peut constituer un obstacle à l'action
cohérente de l'Etat.
La création de missions interservices de l’eau (MISE) et de "pôles de
compétence" destinés à l'information pluridisciplinaire du préfet, suggérée par la
circulaire interministérielle du 22 janvier 1993, peut être de nature à faciliter la
coordination de l'intervention de l'Etat. L'objectif prioritaire des MISE est, en effet,
d'améliorer la clarté et l'efficacité de l'action opérationnelle des services de l'Etat au
niveau départemental dans le domaine de l’eau, en particulier dans l'exercice des
missions de police et de gestion des eaux . Mais leur mise en place est trop récente pour
que l'on puisse porter une appréciation sur l'efficacité de ces structures qui doivent
s'adapter encore plus précisément à leur mission. La création prochaine d'une instance
hiérarchisée de coordination des différentes directions départementales concernées par
l’eau et l’assainissement n'est pas exclue.
Les nouvelles missions confiées aux préfets dans le cadre de la loi sur l’eau
(mise en oeuvre des SDAGE et des SAGE, organisation administrative du zonage dans
des agglomérations) sont également susceptibles de redonner à l'Etat un rôle important
dans l'organisation locale de l’eau et de l’assainissement.
Acteurs majeurs de la politique de l’eau, les agences de l’eau, à travers les
prélèvements incorporés à la facture d’eau et les aides accordées aux collectivités
territoriales, constituent un instrument essentiel de la politique d'amélioration de la
ressource en eau et de la lutte contre les pollutions. Elles se sont, pendant longtemps,
considérées comme de simples "banques de l’eau ", laissant au maître d'ouvrage le soin
d'apprécier l'intérêt et l'opportunité des équipements. Elles pourraient être appelées à
devenir de plus en plus des instances d'assistance et de conseil aux communes.
Parallèlement à leur action en matière de financement des équipements ou d'aide
au fonctionnement des stations, les agences de l’eau sont susceptibles d'apporter aux
collectivités territoriales une assistance technique dont celles-ci ont besoin, d'une part en
ce qui concerne l'évaluation de la qualité de l’eau et d'autre part en ce qui concerne la
programmation et le contrôle des investissements.
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82
L'intérêt de voir se développer l'assistance technique est double. En premier lieu,
elle doit permettre aux collectivités de mieux définir leurs besoins et de mieux défendre
leurs intérêts face aux entreprises de travaux et face aux concessionnaires. En second
lieu, les agences de l’eau contrôleront plus efficacement les conditions dans lesquelles
elles accordent leurs aides financières et orienteront mieux leur action vers les objectifs
prioritaires d'une politique globale de l’eau.
Les adaptations souhaitables de la réglementation
L'organisation cohérente d'un soutien à l'action des communes pourrait se
prolonger par une réflexion sur certaines dispositions qui faciliteraient la transparence et
l'autonomie de la gestion.
A l'inverse de la situation qui prévaut par exemple dans les régies intéressées, les
dispositions du Code des marchés publics peuvent être légalement écartées en cas de
concession du service ou même de délégation au fermier de la réalisation de certains
ouvrages.
La transposition en droit interne de la directive communautaire sur les marchés
publics de travaux en 1991, qui avait pour conséquence de rendre applicables aux
concessions de travaux publics les règles de publicité européennes propres aux marchés,
ne concerne pas les secteurs de l’eau et de l’assainissement.
Par ailleurs, les dispositions de la directive européenne relative à ces secteurs,
elle aussi transposée en droit interne, ne concernent pas les concessions. Il en résulte
que les travaux réalisés par les concessionnaires de service public en matière d’eau et
d’assainissement, secteur pourtant très concentré, ne relèvent que des pratiques de
concurrence entre les rares entreprises du secteur.
Dès lors, parallèlement à la recherche des conditions d'une plus grande
concurrence lors de l'attribution des contrats de délégation, une réflexion pourrait être
menée sur les mesures susceptibles de renforcer les obligations de publicité et de mise
en compétition des travaux conduits par le délégataire. Les possibilités d'intervention
des filiales des délégataires pourraient aussi être encadrées.
S'agissant des services gérés en régie, la règle imposant aux communes le dépôt
de leurs fonds disponibles dans les caisses du Trésor public, sans possibilité d'obtenir
une rémunération attrayante, limite, pour elles, l'intérêt de la constitution de réserves en
vue d'investissements futurs. Il semble donc que, dans le cas particulier de l'exploitation
des services d’eau et d’assainissement, services publics industriels et commerciaux, il
serait cohérent de prévoir une rémunération des fonds déposés au Trésor. Une telle
mesure pourrait encourager l'autofinancement des investissements dans le domaine de
l’eau et de l’assainissement, auquel incite par ailleurs la généralisation de
l'amortissement prévu par l'instruction comptable M. 49.
Les nouveaux moyens d'information des communes
Ces propositions sont de nature à améliorer la maîtrise, par les communes, de ces
services. Cependant, les nouveaux outils que le législateur a défini au profit des
autorités locales devraient déjà permettre un progrès sensible.
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L'information des élus et des usagers sur la gestion du service public local de
l’eau et de l’assainissement doit favoriser un meilleur suivi des services par les
communes.
A cet égard, de nouveaux droits ont été reconnus par une législation récente.
L'article L. 1411-13 du Code général des collectivités territoriales reprenant les
dispositions de l'article 14 de la loi du 6 février 1992 précise les conditions de mise à
disposition du public des documents remis par le délégataire. Les usagers ont alors
accès au "rapport annuel" qui rassemble les comptes rendus techniques, financiers et
comptables de l'activité du service.
Si les mentions obligatoires de ceux-ci ont été définies par le décret du 6 mai
1995, il reste cependant à établir un cadre de présentation commun à l'ensemble de la
profession.
Cette même loi du 3 janvier 1992, précisée par un décret du 26 septembre 1994,
prévoit la publication des résultats du contrôle de la qualité de l’eau potable.
L'article 13 de la loi du 2 février 1995 (art. L. 2224-5 du Code général des
collectivités territoriales) oblige le maire ou le président d'un groupement de communes
à présenter devant l'assemblée délibérante un rapport annuel portant sur le prix et la
qualité des prestations fournies par le service. Ce rapport annuel devait être présenté
pour la première fois en 1996.
L'information aujourd'hui obligatoire des élus locaux et des usagers est renforcée
par l'institution, dans les communes de 3 500 habitants et plus et dans les établissements
publics intercommunaux, d'une commission consultative des services publics locaux.
Ces nouvelles dispositions permettent au maire ou au président de groupement
de communes d'exiger des services, qu'ils soient ou non délégués, une information
suffisante et claire. Celle-ci, en développant la transparence de la gestion des services,
en facilitera le contrôle.
En utilisant ces nouvelles prérogatives et en se dotant de moyens d'assistance
technique, les communes pourraient être en mesure de poursuivre dans de meilleures
conditions leurs interventions pour un service public d’eau et d’assainissement de
qualité.
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84
ANNEXE I
PRINCIPAUX TEXTES LEGISLATIFS ET REGLEMENTAIRES CONCERNANT LA
GESTION DES SERVICES D’EAU ET D’ASSAINISSEMENT
1° Sur la qualité de l’eau :
- Décret n° 89-3 du 3 janvier 1989 modifié relatif aux eaux destinées à la consommation
humaine à l'exclusion des eaux minérales naturelles.
2° Sur la gestion de l’eau et la transposition en droit interne des directives européennes :
- Loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l’eau ;
- Décret n° 93-742 du 29 mars 1993 relatif aux procédures de déclaration et
d'autorisation ;
- Décret n° 93-743 du 29 mars 1993 relatif à la nomenclature des opérations soumises à
déclaration ou à autorisation en application de l'article 10 de la loi du 3 janvier 1992 ;
- Décret n° 94-469 du 3 juin 1994 relatif à la collecte et au traitement des eaux usées ;
- Arrêté du 23 novembre 1994 portant délimitation des zones sensibles pris en
application de l'article 6 du décret n° 94-469 du 3 juin 1994.
3° Organisation et planification :
- Décret n° 92-1042 du 24 septembre 1992 portant application de l'article 5 de la loi sur
l’eau du 3 janvier 1992 relatif aux schémas d'aménagement et de gestion des eaux
(SDAGE) ;
- Décret n° 94-289 du 6 avril 1994 relatif aux communautés locales de l’eau.
4° Modes d'exploitation des services :
- Loi n° 92-1282 du 11 décembre 1992 modifiée sur la procédure de certains contrats
dont ceux de l’eau ;
- Loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 sur la prévention de la corruption et transparence de
la vie économique et des procédures publiques ;
- Loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative à la protection de l'environnement et
notamment ses articles :
- 73 instituant l'obligation d'un rapport annuel sur le prix et la qualité des services d’eau
et d’assainissement ;
- 75 sur la durée des DSP ;
- 76 sur l'interdiction des droits d'entrée ;
- 81 sur la responsabilité des personnes morales ;
- Loi n° 95-127 du 8 février 1995 relative aux marchés publics et délégations de service
public ;
- Décret n° 95-635 du 6 mai 1995 relatif aux rapports annuels sur le prix et la qualité
des services publics de distribution de l’eau potable et de l’assainissement.
5° Organisation financière :
- Instruction M. 49 modifiée sur la comptabilité des services publics locaux de
distribution d’eau et d’assainissement.
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(janvier 1997)
85
ANNEXE II
COMMUNES ET ORGANISMES INTERCOMMUNAUX CITES DANS LE RAPPORT
(avec indication de la population desservie par les services publics locaux d’eau et
d'assainissement )
1. Plus de 1 million de personnes desservies (2) :
- syndicat interdépartemental d'assainissement
de l'agglomération parisienne (SIAAP)
......
plus de 8 millions
- syndicat des eaux d'Ile-de-France (SEDIF) ..
plus de 4 millions
2. Plus de 500 000 (2) :
- syndicat mixte "Service des eaux et
de l'assainissement du Bas-Rhin" (SDEA)
....
638 300
(assainissement)
- communauté urbaine de Bordeaux
..............
635 000
3. Plus de 400 000 (1) :
- communauté urbaine de Strasbourg
............
422 600
4. Plus de 300 000 (2) :
- Toulouse
....................................
382 400
- SDEA du Bas-Rhin
............................
375 200 (eau)
5. Plus de 200 000 (3) :
- Saint-Etienne
...............................
290 000
(14 communes)
- communauté urbaine de Brest
.................
213 000
- Metz
........................................
200 000
6. Plus de 100 000 (4) :
- communauté urbaine du Mans
....................
185 500
- Grenoble
....................................
150 800
- syndicat intercommunal des eaux de la
Région Rhône-Ventoux (Vaucluse)
.............
124 900
- Saint-Denis de la Réunion
...................
122 000
7. Plus de 80 000 (2) :
- syndicat des eaux de Beaufort (Ille-et-Vilaine)
94 200
- SIAEP de la Région mancelle (Sarthe)
.........
81 900
8. Plus de 60 000 (4) :
- syndicat des eaux de Basse-Limagne
(Puy-de-Dôme)
.................................
75 900
- Saint-Paul de la Réunion
......................
71 800
- SIVOM de La Baule (Loire-Atlantique)
..........
70 000
- Lorient (Morbihan)
............................
61 600
9. Plus de 40 000 (6) :
- SIAEP de Rezé-Bouguenais (Loire-Atlantique) ...
59 800
- Saint-Malo (Ille-et-Vilaine)
...................
49 300
- Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine)
.............
49 000
- district d'Aurillac (Cantal)
...................
46 600
- syndicat intercommunal de la Basse-Moder
(Bas-Rhin)
.....................................
44 500
- SIVU de la Hardt (Haut-Rhin)
...................
42 000
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10. Plus de 20 000 (14) :
- Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire)
................
36 800
- syndicat des eaux de Saint-Symphorien,
Saint-Cyr-sur-Loire,
Sainte-Radegonde(Indre-et-Loire)
................
36 700
- district de Saumur (Maine-et-Loire)
............
35 900
- Gap (Hautes-Alpes)
.............................
33 400
- La Ciotat (Bouches-du-Rhône)
...................
30 600
- Draguignan (Var)
...............................
29 600
- Vichy (Allier)
.................................
28 000
- syndicat intercommunal de la Vallée de l'Auzon
(Puy-de-Dôme)
..................................
27 200
- Ris-Orangis (Essonne)
..........................
24 700
- syndicat des eaux de la Plaine de Riom
(Puy-de-Dôme)
..................................
24 500
- Cavaillon (Vaucluse)
...........................
23 500
- SIAEP de la Région minière (Allier)
............
22 300
- syndicat d'assainissement de Sanary-Bandol (Var)
22 200
- Vélizy-Villacoublay (Yvelines)
.................
21 000
11. Plus de 10 000 (15) :
- Blagnac (Haute-Garonne)
........................
19 700
- Riom (Puy-de-Dôme)
.............................
19 300
- Manosque (Alpes de Haute-Provence)
.............
19 100
- Ploëmeur (Morbihan)
............................
18 000
- Romorantin-Lanthenay (Loir-et-Cher)
............
17 900
- Toul (Meurthe-et-Moselle)
......................
17 700
- Couëron (Loire-Atlantique)
.....................
16 400
- Châteaudun (Eure-et-Loir)
......................
14 500
- syndicat d'électrification et d'eau de
Riec-sur-Belon (Finistère)
.....................
14 400
- Issoudun (Indre)
...............................
13 900
- syndicat intercommunal du Jarnisy
(Meurthe-et-Moselle)
...........................
12 500
- Saint-Amand-Montrond (Cher)
....................
11 900
- Saint-Orens (Haute-Garonne)
....................
11 400
- syndicat d'eau de Levet (Cher)
.................
10 500
- Dinard (Ille-et-Vilaine)
.......................
10 300
12. Moins de 10 000 (15) :
- syndicat mixte du Lioran (Cantal)
......
environ 10 000(saison)
- Guingamp (Côtes-d'Armor)
.......................
8 800
- Jarny (Meurthe-et-Moselle)
.....................
8 700
- Portet (Haute-Garonne)
.........................
8 000
- syndicat de rivière Woigot (Meurhe-et-Moselle)
7 600
- Eguilles (Bouches-du-Rhône)
....................
5 950
- Cilaos (Réunion)
...............................
5 900
- Egletons (Corrèze)
.............................
5 800
- SIVOM de Haute-Dordogne (Puy-de-Dôme)
..........
5 300
- syndicat des eaux du Nord-Cap-Sizun (Finistère)
4 700
- Briey (Meurthe-et-Moselle)
.....................
4 500
- Modane (Savoie)
................................
4 250
- Le Mont-Dore (Puy-de-Dôme)
.....................
2 000
- Guerlesquin (Finistère)
........................
1 640
- district de la rive gauche de Serre-Ponçon
(Alpes-de-Haute-Provence)
......................
520
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
87
ANNEXE III
GLOSSAIRE DES SIGLES UTILISES
(hormis les signes propres à des organismes locaux déterminés)
DDAF : Direction départementale de l'agriculture et de la forêt.
DDASS : Direction départementale des affaires sanitaires et sociales.
DDCCRF : Direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression
des fraudes.
DDE : Direction départementale de l'équipement.
DRASS : Direction régionale des affaires sanitaires et sociales.
DRIRE : Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement.
FEDER : Fonds européen de développement régional.
FNDAE : Fonds national pour le développement des adductions d’eau.
MISE : Mission interservices de l’eau.
SAGE : Schéma d'aménagement et de gestion de l’eau.
SATESE : Service d'aide technique aux stations d'épuration.
SDAEP : Syndicat départemental d'alimentation en eau potable.
SDAGE : Schéma directeur d'aménagement et de gestion de l’eau.
SEM : Société d'économie mixte.
SIAEP : Syndicat intercommunal d'alimentation en eau potable.
SIVOM : Syndicat intercommunal à vocation multiple.
SIVU : Syndicat intercommunal à vocation unique.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
88
Réponse du MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT
Les
services
publics
d’eau
potable
et
d’assainissement
possèdent
certaines
caractéristiques spécifiques qui nécessitent une grande vigilance sur la manière dont ils sont
dispensés :
- ce sont des services d'usage obligatoire pour le consommateur qui ne peut vivre sans
eau ;
- ce sont des monopoles locaux, le consommateur ne pouvant pas choisir son
fournisseur ;
- il y a souvent l'échelon intermédiaire d'une collectivité locale entre le consommateur
final et le prestataire de service.
Dans ce contexte, il incombe à l'Etat de disposer d'instruments de régulation, sachant
que ces services ont vocation à rester des services publics locaux, tant en ce qui concerne le
prix du service qu'en ce qui concerne les conditions dans lesquelles il est dispensé. Des mesures
importantes et pour une bonne part récentes ont déjà été prises, telles que :
- la tarification dite "binôme" de l’eau ;
- la limitation de la durée des concessions à vingt ans, sauf à saisir le trésorier-payeur
général ;
- l'interdiction du droit d'entrée ;
- l'obligation faite aux maires et aux présidents de syndicat de présenter publiquement
un rapport sur la gestion des services ;
- la création de "l'Observatoire de l’eau " ;
- la refonte de la facture d’eau.
L'EVOLUTION DU PRIX DE L’EAU
1. Les causes de la hausse du prix de l’eau
Bien que la formation du prix de l’eau fasse intervenir de très nombreux paramètres,
trois causes possibles à l'origine des augmentations de ce prix peuvent être identifiées.
Le
premier
paramètre
est
l'incidence
de
l'accélération
des
programmes
d’assainissement des communes. Cette mise à niveau des équipements, voulue et décidée au
niveau national depuis maintenant deux ans, s'est traduite par un accroissement important des
programmes d'investissement à réaliser par les collectivités. Elle est rendue nécessaire pour la
reconquête des rivières et des nappes dans le cadre d'une directive européenne qui fixe à
l'horizon 2005 la mise en conformité de toutes les communes. Le montant des travaux
correspondants, prévus sur la période 1992-1996 du VIe programme d'intervention des agences
de l’eau, s'élève ainsi à environ 50 milliards de francs. L'incidence de ces travaux se traduit par
une forte augmentation des dépenses des services d’eau et d’assainissement. Par ailleurs, il
convient de rappeler que l'augmentation des redevances des agences de l’eau a un impact
beaucoup plus faible car ces redevances représentent en moyenne 13 % du prix de l’eau.
Deux autres mesures plus techniques peuvent également expliquer certaines
augmentations en fonction des conditions locales.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
89
La première consiste en la mise en application de l'instruction comptable M 49 du 10
novembre 1992, qui rappelle la nécessité de l'équilibre budgétaire des services d’eau et
d’assainissement aux termes du code des communes. Son application immédiate, dans certains
cas, a provoqué des variations brutales du prix de l’eau, particulièrement sensibles dans le cas
des petites communes rurales ou à l'occasion de la réalisation d'investissements importants.
La seconde mesure technique qui explique en partie cette augmentation consiste en
l'application du nouveau système de tarification de l’eau mis en place par la loi du 3 janvier
1992, à travers son article 13.
Le principe énoncé dans cet article prévoit la décomposition du prix de l’eau entre une
partie fixe et une partie proportionnelle au volume réellement consommé, contrairement aux
systèmes de tarification antérieurs qui reposaient très souvent sur des bases forfaitaires.
Ce système du forfait était souvent à l'origine de gaspillages car, dans certains cas, il
constituait une sorte de droit à consommer jusqu'à épuisement du forfait, parfois d'un volume
supérieur aux besoins propres des ménages. Par ailleurs, les consommateurs étaient choqués de
payer une eau qu'ils n'avaient pas consommée. C'est notamment de la part des consommateurs
d’eau des communes touristiques que provenaient les plus fortes protestations. L'article 13 de la
loi sur l’eau du 3 janvier 1992 permet ainsi de lutter contre le gaspillage de l’eau, les
sécheresses rappelant régulièrement que l’eau peut être un bien rare et précieux.
Néanmoins, la loi et son décret d'application laissent une marge de liberté dans la mise
en oeuvre de ces modalités et autorisent ainsi les maires ou les présidents de syndicats de
distribution d’eau, dans la limite du principe d'égalité des citoyens devant les charges, à mettre
en place une facturation qui permet, dans la transparence, d'ajuster les contributions des
différentes catégories d'usagers.
2. Le suivi du prix de l’eau
a) Les différents suivis existants.
Le syndicat professionnel des entreprises de services d’eau et d’assainissement (SPDE)
fournit mensuellement un indice pour chacune des composantes du prix de l’eau. Cet indice est
établi à partir d'un échantillon de 46 pour cent des communes de plus de 10 000 habitants ayant
confié leur service de distribution d’eau potable ou leur service d’assainissement à un
gestionnaire délégué.
Depuis février 1993, l'INSEE fournit également une estimation au niveau national du
prix moyen d'une facture d’eau annuelle de 120 mètres cubes. Ce prix moyen est déterminé pour
les résidences principales des abonnés domestiques qui disposent d'un compteur de 15 mm de
diamètre et d'un branchement de 20 millimètres de diamètre. Il est calculé mensuellement à
partir d'un échantillon représentatif de communes situées dans dix-neuf agglomérations.
L'observatoire permanent de l'écologie locale dit "Ecoloc" réalise une enquête annuelle
auprès d'un échantillon représentatif des communes françaises de plus de 2 000 habitants. Cette
enquête porte sur environ 500 communes regroupant 11 millions d'habitants. Elle permet
d'estimer l'évolution à moyen terme du prix de l’eau, à partir des prévisions effectuées par
chacune des communes enquêtées. En 1996, comme le VIIe programme d'intervention des
agences de l’eau seront renforcés en milieu rural, cette enquête a été étendue aux communes de
700 à 2 000 habitants. L'enquête fournit notamment des prévisions nationales sur le prix moyen
de l’eau potable dans cinq ans et elle apporte des explications sur les évolutions prévisibles et
constatées.
Depuis 1994, la direction de l’eau du ministère de l'environnement s'est associée à la
direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du
ministère de l'économie et des finances pour mieux suivre l'évolution du prix de l’eau en
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
90
France. Ce suivi porte sur chaque préfecture et sous-préfecture, ainsi que sur les communes les
plus peuplées de chaque département, à concurrence de dix communes pour les départements
comprenant suffisamment de communes de plus de 10 000 habitants et avec un minimum de
cinq communes pour les autres départements. 700 communes regroupant environ 25 millions
d'habitants sont ainsi enquêtées chaque année par les services de la direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes du ministère de l'économie et
des finances.
Le ministère de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, chargé de gérer le fonds
national pour le développement des adductions d’eau (FNDAE), effectue également un suivi
quinquennal du prix de l’eau auprès d'un panel de 500 communes rurales. La prochaine édition
de cette enquête sera disponible à la fin de l'année.
b) L'évolution du prix de l’eau depuis 1992
En 1992, 1993 et 1994, l'augmentation en francs courants du prix global toutes taxes
comprises de l’eau a été supérieure à 10 % par an. A partir de 1995, cette hausse est devenue
inférieure à 7 % par an.
La hausse de + 47 % en francs courants de ces quatre années a surtout concerné la
part des coûts de l’assainissement dans le prix de l’eau (+ 76 %) et dans une moindre mesure la
part du coût de la distribution de l’eau potable (+ 26 %).
Il est vrai que la part des redevances des agences de l’eau a augmenté pour que ces
agences puissent apporter des aides financières aux collectivités locales, aux entreprises et aux
agriculteurs, mais elle se stabilise désormais à 15 % du montant moyen de la facture d’eau.
Il en résulte un prix moyen de 15 F par mètre cube en 1996, notablement inférieur au
prix moyen constaté en Allemagne, par exemple.
Pour les cinq prochaines années et dans un contexte où le Gouvernement a décidé de
stabiliser le VIIe programme d'intervention des agences de l’eau (1997-2001) au niveau atteint
en 1996, les communes prévoient une hausse moyenne du prix de l’eau de + 5 % par an en
francs courants.
LES MESURES DE TRANSPARENCE DE LA GESTION DES SERVICES
PUBLICS LOCAUX D’EAU ET D’ASSAINISSEMENT
Depuis 1992, les principales évolutions ont été représentées par le doublement des
investissements des collectivités territoriales dans le cadre du VIème programme d'intervention
des agences de l’eau, par la réforme de la facturation de l’eau et du budget annexe de l’eau et
de l’assainissement, par les mesures législatives de transparence de la gestion déléguée du
service public industriel et commercial de l’eau et de l’assainissement et par la modernisation
de la réglementation telle que la police de l’eau ou la transcription en droit français des
directives européennes relatives à l’assainissement.
La concentration dans le temps de ces principales évolutions a engendré des difficultés
d'application mais aussi d'information des collectivités territoriales, des maîtres d'ouvrage et
des gestionnaires locaux des services publics de l’eau et de l’assainissement.
Plusieurs de ces difficultés locales ont été soulevées par la Cour des comptes.
D'ores et
déjà, le Gouvernement a pris des mesures de transparence
et
d'assouplissement destinées à y remédier.
1. L'observatoire de l’eau
Les hausses sensibles du prix de l’eau ont entraîné des débats locaux et un besoin accru
de transparence de son évolution et du service rendu.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
91
A l'échelon local, les consommateurs d’eau peuvent faire appel aux services des
directions départementales de la consommation, de la concurrence et de la répression des
fraudes, ainsi qu'aux agences de l’eau pour leurs besoins d'informations sur les factures d’eau.
Sur le plan national, les consommateurs d’eau doivent avoir également droit à une plus
grande transparence sur l'organisation du financement de l'alimentation en eau et de
l’assainissement ainsi que sur la qualité des services rendus.
C'est pourquoi le ministère de l'environnement et le ministère des finances et du
commerce extérieur ont mis en place en mars 1996 une structure légère d'information et
d'évaluation, dénommée "Observatoire de l’eau ".
L'Observatoire de l’eau est chargé d'analyser l'évolution des différents éléments du prix
de l’eau, la qualité des services rendus aux usagers des services publics de distribution de l’eau
potable et d’assainissement ainsi que les investissements en relation avec les modes de gestion
et de facturation.
Il associe l'ensemble des partenaires concernés, les associations de consommateurs, les
associations de protection de l'environnement, les professionnels, les élus locaux, les
organismes de bassin et l'Etat.
2. La lisibilité de la facture d’eau
Dans l'intérêt des consommateurs, une facture-type de l’eau a été établie par un arrêté
du 10 juillet 1996.
Elle oblige les gestionnaires à distinguer clairement dans chaque facture remise aux
abonnés la partie du prix qui correspond respectivement à la distribution de l’eau, à la collecte
et au traitement des eaux usées et aux taxes et redevances versées aux organismes publics. Elle
les oblige aussi à présenter de façon séparée la part de l'abonnement et celle la consommation
ainsi que les parts du ou des distributeurs, de la commune ou des organismes intercommunaux.
3. Le rapport annuel du maire
La loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement a prévu, dans son article 73, un rapport annuel du maire (ou du président de
l'organisme intercommunal auquel la commune a transféré ses compétences) sur le prix et la
qualité des services publics de l’eau potable et de l’assainissement.
Les maires, lorsqu'ils exercent directement leur compétence, ou les présidents des
syndicats intercommunaux, avaient jusqu'au 30 juin 1996 pour produire ce rapport.
Ultérieurement les maires ayant transféré leurs compétences auront jusqu'au 31 décembre 1996
pour rédiger un rapport de synthèse englobant l'ensemble des services financés par la facture
d’eau payée par le consommateur.
Pour qu'un premier bilan soit présenté lors de la prochaine séance de l'Observatoire de
l’eau, le ministère de l'environnement a demandé en juillet 1996 aux préfets de réaliser une
enquête sur la mise en oeuvre de cette nouvelle procédure de transparence locale :
- le rapport annuel a-t-il été rédigé et présenté effectivement aux conseils municipaux et
aux conseils des syndicats intercommunaux ?
- la démarche a-t-elle fait l'objet d'un intérêt particulier de la part des élus, du public,
des consommateurs ? a-t-elle suscité des débats ?
- des difficultés ont-elles été rencontrées pour l'élaboration du rapport ? qui l'a rédigé
(les services eux-mêmes, la direction départementale de l'équipement, la direction
départementale de l'agriculture et de la forêt, un bureau d'études travaillant pour le compte de
la collectivité,...) ?
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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- quels sont les enseignements à tirer de cette première phase ? le rapport annuel a-t-il
permis de faire progresser la transparence sur les conditions de fonctionnement et de
financement des services publics de l’eau potable et de l’assainissement ?
4. Aide technique pour l'élaboration et le suivi des contrats de concession ou
d'affermage
Les lois du 29 janvier 1993 modifiée et du 8 février 1995 ont eu pour effet d'instituer
des procédures destinées à accroître la transparence des conditions d'une délégation de
services publics et de l'exécution annuelle des services délégués.
Récemment, l'Association des maires de France et la Fédération nationale des
collectivités concédantes et régies ont créé Service Public 2000 pour assister les collectivités
délégantes dans leurs relations avec les entreprises délégataires. Cette initiative vise à
accroître les capacités de négociation des communes et la transparence des fonctionnements
par l'intervention de tiers dépendants.
Ces aides et conseils viennent ainsi renforcer ceux que peuvent déjà apporter aux
maires les directions départementales de l'agriculture et de la forêt ou les directions
départementales de l'équipement, ainsi que certains bureaux privés d'ingénieurs-conseils.
Cet ensemble devrait permettre d'améliorer la prise en compte de l'intérêt général et de
celui des usagers des services publics concernés. Des dispositions protectrices sont notamment
utiles pour les petites collectivités souvent démunies face à de grands groupes, publics ou
privés, de délégataires.
5. L'assouplissement de l'instruction comptable M 49
Les budgets des services publics industriels et commerciaux doivent être équilibrés en
recettes et en dépenses. Ce principe général, posé à l'article L. 2224-1 du code général des
collectivités territoriales, a pour objet de maintenir une totale égalité de traitement entre la
gestion privée ou déléguée et la gestion en régie directe. Il garantit aussi à la collectivité une
totale neutralité financière, puisque le coût se trouve intégralement répercuté sur l'usager sous
forme de redevance.
Ce principe n'interdit pas la prise en charge des investissements les plus lourds
(stations d'épuration et réseaux) par la collectivité, sous réserve de justification (art. L. 2224-
2). Lorsque des investissements ne peuvent être financés sans une augmentation excessive des
tarifs, la commune peut, au moyen d'une subvention inscrite à son budget général, aider un
service public industriel et commercial à équilibrer son budget. Cette prise en charge par le
budget général de la commune, prévue par l'article L.322-5 du code des communes, n'est
soumise à aucune condition de seuil démographique, ni de délai. Elle doit faire l'objet d'une
délibération du conseil municipal fixant les règles de calcul et les modalités de versement des
dépenses prises en charge.
Compte tenu des difficultés d'application de l'instruction comptable M 49 pour les
petites communes, le calendrier de mise en oeuvre de cette instruction a été assoupli dès 1994 :
- les communes de moins de 2 000 habitants qui justifient de difficultés particulières
pour la mise en place de budgets annexes ont bénéficié de dérogations pour l'exercice 1994 ;
- les communes de moins de 1 000 habitants ont bénéficié de dérogations pour
l'exercice 1995 et celles de moins de 500 habitants pour l'exercice 1996.
Enfin, plus récemment, le législateur a autorisé, dans la loi n° 96-314 du 12 avril 1996
portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, les communes de moins de 3 000
habitants et les groupements composés de communes de moins de 3 000 habitants à prendre en
charge les dépenses de leurs services publics industriels et commerciaux d’eau et
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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d’assainissement. Dorénavant, ces communes et groupements pourront répercuter sur la
fiscalité les dépenses de leurs services, y compris celles de l'exploitation, sans avoir à introduire
de justifications. Ces dispositions s'appliquent quel que soit le mode de gestion du service.
LES OUTILS D'APPLICATION DE LA POLITIQUE NATIONALE DE L’EAU
1. La planification locale
Les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) ont été
élaborés au niveau des six grands bassins hydrographiques français par les comités de bassin,
en concertation avec les élus, les usagers, les services de l'Etat et les principaux acteurs
économiques et sociaux concernés.
Ils ont fait l'objet d'une vaste consultation, notamment auprès des conseils généraux et
régionaux et des grandes villes et seront tous approuvés par les préfets coordonnateurs de
bassin avant la fin de 1996.
Leurs préconisations, fruit d'une très vaste concertation et d'une réflexion approfondie,
vont créer un cadre juridique incontestable.
Ils serviront de documents de référence pour toutes les décisions que l'Etat et les élus
seront amenés à prendre dans le domaine de l’eau, soit au plan réglementaire soit au plan des
aménagements ou des programmes.
Les dispositions de planification qu'ils comportent forment donc un cadre décentralisé
au niveau des six bassins hydrographiques qui encadrent désormais, en complément de la
réglementation, notamment l'activité des services publics locaux de l’eau et de l’assainissement.
2. Les actions des agences de l’eau
Après avoir facilité le financement des équipements, des dispositions spécifiques sont
arrêtées au VIIe programme d'intervention des agences de l’eau (1997-2001) pour inciter les
maîtres d'ouvrage à obtenir les meilleurs niveaux de performances possibles. Il convient
d'assurer et de faciliter une efficacité durable des investissements réalisés.
Les moyens nécessaires pour une incitation à l'optimisation du fonctionnement des
ouvrages (incitation au meilleur fonctionnement, assistance technique et suivi) seront ainsi
développés progressivement au cours des prochaines années.
Les agences doivent aussi poursuivre l'acquisition des données sur la qualité des eaux
et les milieux aquatiques, en mettant l'accent sur les indicateurs de la qualité biologique des
milieux. L'effort engagé pour l'acquisition, le stockage et l'exploitation des données relatives
aux milieux et aux ouvrages est nécessaire pour assurer l'équité de traitement des différents
usagers, pour garantir la cohérence et la pertinence des programmes de travaux.
La connaissance et l'accompagnement du bon fonctionnement des ouvrages, le suivi de
la qualité biologique des cours d’eau et l'intégration des préconisations des schémas directeurs
d'aménagement et de gestion des eaux dans les modalités d'intervention des agences doivent
ainsi orienter les maîtres d'ouvrage vers la définition de plans de développement durable ; la
pérennité des résultats et la maîtrise des dépenses d'investissement et de fonctionnement en
seront facilitées.
En outre une réflexion sur les contrôles des dispositifs d'interventions des agences de
l’eau est en cours, de manière à ce que ces interventions soient davantage contrôlées à la fois
sur le plan légal et sur le plan de leur efficacité. De plus, des renforcements des conseils des
agences aux petites collectivités sont prévus afin de leur permettre de préparer suffisamment en
amont les cahiers des charges de leurs travaux d'équipement.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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Réponse conjointe du MINISTRE DE L'INTERIEUR et
du MINISTRE DE LA FONCTION PUBLIQUE, DE LA REFORME DE L'ETAT
ET DE LA DECENTRALISATION
Les remarques et critiques formulées par la Cour sur la gestion des services publics
locaux d’eau et d’assainissement appellent de notre part un certain nombre d'observations.
Dans la première partie du rapport, il est entre autres rappelé, d'une part, la nécessité
d'individualiser les services d’eau et d’assainissement, à l'exception des cas prévus dans la loi
du 2 février 1995 relative à la protection de l'environnement et, d'autre part, le principe du
financement de ces services par l'usager.
L'individualisation des services d’eau et d’assainissement
L'instruction budgétaire et comptable M 49 rappelait effectivement les modalités
d'individualisation du service en fonction du degré d'autonomie du service (régie simple ou
directe, régie dotée de la seule autonomie financière, régie dotée de la personnalité morale,
affermage et concession). L'instruction prévoyait la possibilité de gestion commune des deux
services d’eau et d’assainissement dans les communes de moins de 3 000 habitants, avec
production d'un état de ventilation.
Ces dernières dispositions ont été élevées au niveau législatif ; l'article L. 2224-6 du
code général des collectivités territoriales autorise les communes et groupements de moins de 3
000 habitants à établir un budget unique des services de distribution d’eau potable et
d’assainissement si les deux services sont soumis aux mêmes règles d'assujettissement à la TVA
et si leur mode de gestion est identique, sous réserve que le budget et les factures émises fassent
apparaître la répartition entre les opérations relatives à la distribution d’eau potable et celles
relatives à l’assainissement.
Hormis cette exception législative, l'individualisation des services se poursuit.
L'intervention de l'article 75 de la loi n° 96- 314 du 12 avril 1996 a suscité auprès de certains
élus des incertitudes quant au maintien de son principe ; celles-ci ont été levées, notamment par
la réponse à la question écrite n° 42471 du 26 août 1996, qui rappelait l'obligation et les
fondements de la production d'un budget annexe distinct pour chaque service, même en cas de
subventionnement par la commune de rattachement. D'une manière générale, les raisons de
l'individualisation des services publics à caractère industriel et commercial ont été exposées
dans de nombreuses réponses à des questions écrites parlementaires (notamment réponse à la
question écrite n° 23267 du 29 janvier 1995, posée par M. Alain Bocquet, député, JO du 20
mars 1995 ; à la question écrite n° 14130, posée par M. Jean-Patrick Courtois, sénateur, JO du
22 août 1996).
L'application de la comptabilité M 49 et la constitution de budgets annexes a permis de
constater que la plupart des services, même créés après 1926, étaient gérés sous forme de
régies simples, et non sous forme de régies dotées de la seule autonomie financière. Le
caractère technique de leur gestion justifie pourtant un suivi attentif par des intervenants
spécialisés, comme le prévoit le dispositif de ces dernières, qui disposent d'un directeur et d'un
conseil d'exploitation.
Il apparaît cependant que les petites communes répugnent à instituer une structure pour
la gestion d'un tel service.
Ces
deux
éléments,
qui
ont
jusqu'à
présent
retardé
le
développement
de
l'individualisation du service, proviennent du fait que les services d’eau et d’assainissement
sont encore très souvent perçus comme des services susceptibles de mettre en valeur l'action de
la municipalité, et dont les dépenses doivent demeurer adaptées aux possibilités de financement
de la commune et aux objectifs de la politique communale. Le nécessaire respect de normes
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
95
nationales ou européennes en matière d'environnement est souvent ressenti comme une
obligation, contraire à la libre administration des collectivités locales. Il est vrai que le coût
très important de l'application ce ces normes et l'échéancier de leur mise en oeuvre posera de
réelles difficultés.
Le financement du service par l'usager
La Cour des comptes souligne l'intérêt et l'apport de la comptabilité M 49 dans la
transparence financière et l'estimation du coût des services d’eau et d’assainissement mais
souhaiterait cependant un étalement plus long des participations versées par un service à un
autre service au regard, notamment, des difficultés rencontrées par le service d’assainissement
de Ris-Orangis, amené à participer à la station d'épuration du SAN d'Evry.
Ce point particulier a déjà fait l'objet d'une réponse à la Cour. Le problème qui s'est
posé à la ville de Ris-Orangis provient de l'éclatement d'une même compétence, en l'occurrence
entre la ville et le SAN, alors que, si la ville a transféré la compétence assainissement au SAN,
elle devrait s'interdire de l'exercer. Le SAN serait seul financé par la redevance, et la
subvention versée par la ville serait supportée sur son budget propre, et non répercuté sur la
redevance communale. Au contraire, la ville ayant conservé une partie du service transféré, la
combinaison des articles L. 2224-7 du CGCT et de l'article R. 372-6 du code des communes
conduit à considérer que, dans ce cas, chaque partie du service constitue un service
d’assainissement, et que chacune dispose de sa propre redevance d’assainissement. La Cour
conteste le fait que la ville ait augmenté sa propre redevance pour subventionner le service géré
par le SAN ; or, ces deux services auraient dû être regroupés et financés par une redevance
unique. Du point de vue financier, la situation serait en tous points identique.
Par ailleurs, le rapport met en exergue les errements constatés par les chambres
régionales en matière de versements de droits d'entrée par le délégataire.
Après la loi du 29 janvier 1993, qui exigeait la justification des droits d'entrée, et celle
du 8 février 1995 qui les a expressément interdits dans les domaines de l’eau, de
l’assainissement et des ordures ménagères, la jurisprudence a précisé les conditions dans
lesquelles une commune peut demander à un délégataire de service public le versement de
fonds au titre de ce service. L'arrêt du Conseil d'Etat du 9 septembre 1996 affirme clairement
que la fixation de redevances "qui ne trouvent pas leur contrepartie directe dans des prestations
fournies par le service municipal de distribution d’eau " est "entachée d'une erreur de droit".
Il reste à prendre un décret d'application de la loi du 29 janvier 1993 qui pourrait
s'inspirer de l'analyse du Conseil d'Etat.
Dans le cadre des travaux du plan comptable des entreprises concessionnaires
entrepris sous l'égide du Conseil national de la comptabilité, notre position a toujours été de
défendre l'indispensable corrélation entre les droits d'entrée autorisés et les dépenses afférentes
au service. Ce lien existe à l'évidence pour les amortissements des immobilisations et les
remboursements des emprunts, puisque ces deux sortes de dépenses sont visées à l'article R.
372-17 du code des communes, qui prévoit leur répercussion sur la redevance. Pour toute autre
charge d'exploitation, il doit y avoir adéquation entre le montant du droit demandé au
délégataire et la dépense ; le montant ne peut être supérieur.
La généralisation de l'instruction M 14 a fourni l'occasion de rappeler les règles
patrimoniales applicables, et celles qui régissent notamment l'utilisation d'un domaine public
par un tiers. L'instruction M 14 précise à cet effet que "la mise en concession emporte les
mêmes effets que l'affectation. La collectivité concédante conserve la pleine propriété du bien,
le concessionnaire ne disposant que d'un droit de jouissance sur celui-ci." Le paragraphe relatif
à l'affectation rappelle par ailleurs que l'affectation se distingue de la location en ce que "la
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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location implique le versement d'un loyer, tandis que l'affectation ne comporte aucune
rémunération, les conditions d'usage qui l'assortissent parfois ne constituant pas des charges
financières". La mise en concession des immobilisations est présumée, comme l'affectation,
s'effectuer à titre gratuit.
Enfin, la Cour reconnaîtrait aux communes une certaine cohérence à ce qu'elles
disposent d'une rémunération de leurs fonds disponibles en prévision d'investissements futurs
pour l'exploitation de leurs services publics d’eau et d’assainissement.
Il ne nous appartient pas de faire des observations sur ce point particulier qui relève
essentiellement du ministère de l'économie et des finances (directions de la comptabilité
publique et du Trésor).
Les dysfonctionnements et insuffisances constatés dans la gestion des services d’eau et
assainissement et soulignés dans la deuxième partie du rapport appellent également de notre
part des remarques sur les points suivants :
L'excessive dispersion de l'organisation locale
Les structures intercommunales sur lesquelles repose la gestion des services d’eau et
d’assainissement sont effectivement souvent anciennes et donc facteurs de rigidité. Cette
situation se rencontre plus particulièrement en milieu rural où la remise en cause des structures
intercommunales existantes, voire leur constitution, peut être perçue comme une perte d'identité
ou présenter un risque d'aggravation fiscale.
Néanmoins, l'intercommunalité constitue une solution qui peut se révéler des plus
intéressantes, en permettant aux petites communes de réaliser des économies d'échelle ou
d'améliorer le suivi technique si celles-ci savaient mieux l'utiliser. Il arrive en effet que les
communes regroupent leurs services d’eau et d’assainissement dans une structure
intercommunale,
souvent
en
vue
d'obtenir
un
financement
extérieur
(fiscalité
ou
subventionnement du département), la définition du périmètre du groupement ou du mode de
gestion pour lequel il a opté n'est pas alors la première priorité de ce regroupement. Or, dans le
secteur de l’eau et de l’assainissement, les contraintes géographiques ou géologiques
pourraient conduire à privilégier une structure intercommunale autre que celle qui recouvre le
canton ou une circonscription administrative, comme celles qui correspondent le plus souvent à
ces établissements fiscalisés.
Il arrive alors que ces derniers ne soient pas en mesure de gérer les services qui leur
sont confiés et les délèguent eux-mêmes à un fermier ou à un concessionnaire privé, voire même
à un autre organisme de coopération intercommunale. Dans le premier cas, la gestion déléguée
peut au moins avoir pour effet d'unifier les tarifs, dans la mesure où l'établissement public est
substitué à ses communes membres. Dans le second cas, l'on peut aboutir à un inutile
empilement de structures qui peut rendre inopérant, au plan financier, le regroupement des
services. Ce choix peut par ailleurs faire échec à la règle du financement par l'usager, en
sollicitant le contribuable.
Le recours aux syndicats mixtes départementaux aboutit par ailleurs dans certains cas
à des montages complexes qui se limitent à effectuer une péréquation des tarifs, obtenue par le
reversement des excédents des services bénéficiaires, venant combler le déficit des autres
services. Une telle péréquation ne respecte pas le principe d'équilibre des services industriels et
commerciaux.
Ces syndicats mixtes présentent très souvent, aussi, l'inconvénient de formaliser un
empilement de structures. Ils maintiennent en place des syndicats primaires, supposés, soit
gérer le service, soit opérer un premier regroupement. Dans ce cas, l'on peut s'interroger sur
l'utilité du maintien de deux structures intercommunales ayant le même objet, à savoir le
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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syndicat primaire et le syndicat mixte. Il existe même des exemples de syndicats mixtes qui
perçoivent des surtaxes, reversées par des fermiers ayant un contrat avec la commune
adhérente ou le syndicat primaire, et n'ayant en revanche aucune relation avec le syndicat
mixte. Certains de ces syndicats mixtes, qui n'exploitent pas effectivement le service,
subventionnent ou prennent en charge l'amortissement des immobilisations, alors que l'article
R. 372-17 du code des communes précise sans ambiguïté que les dotations aux amortissements
sont financées par la redevance propre au service.
Ces syndicats mixtes ont souvent pour objet réel d'opérer un financement sélectif des
services par le département. Ce dernier pourrait parfaitement atteindre cet objectif par la
détermination de règles de subventionnement spécifiques, sans mettre en place à cet effet une
structure-écran.
Devant la multiplicité des structures intercommunales et leur complexité, le législateur
a souhaité dans le cadre de l'article 78 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 sur l'aménagement
et le développement du territoire que le Gouvernement engage une réflexion de fond sur les
problèmes de l'intercommunalité. En application de cet article, le Gouvernement doit soumettre
prochainement au Parlement un rapport qui dressera le bilan de l'intercommunalité et tentera
d'établir un diagnostic en mettant en lumière les acquis et les difficultés de fonctionnement. Sur
la base de ce constat, des propositions d'amélioration seront formulées en ce qui concerne tant
l'organisation et le fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale
que leur environnement financier et fiscal. Ce document esquissera des voies possibles pour
promouvoir les formes les plus intégrées de coopération. Dès à présent, un document de travail
préparatoire a été transmis aux associations d'élus pour leur permettre de faire part de leurs
remarques et de leurs propositions et contribuera ainsi à renforcer leur sensibilité à ce
problème.
Par ailleurs, la prochaine mise en oeuvre des schémas directeurs d'aménagement et de
gestion des eaux , élaborés à l'initiative du préfet coordonnateur du bassin par le comité de
bassin compétent, devrait contribuer à pallier l'insuffisance de la maîtrise de la gestion de l’eau
et de l’assainissement soulevée par les auteurs du rapport. En effet, ces schémas
départementaux, relayés par des schémas d'aménagement et de gestion des eaux à portée plus
locale, qui privilégient une approche harmonisée de cette gestion, atteignent la phase finale de
leur élaboration après quatre années de gestation. Examinés en mission interministérielle de
l’eau puis en Conseil national de l’eau, leur approbation par les préfets coordonnateurs de
bassin est en cours. Les orientations préconisées par ces documents, même si elles n'ont pas de
portée obligatoire, pourront contribuer à déclencher les opérations d'aménagement des
réseaux.
Les défauts d'organisation des régies
Le principe de la séparation budgétaire mis en oeuvre par l'application de l'instruction
budgétaire et comptable M 49 concernant l'ensemble des services d’eau et d’assainissement
contribue, depuis le 1er janvier 1992 pour les communes les plus importantes, à la clarification
des comptes et permet notamment de mieux identifier les coûts de fonctionnement de ces
services.
Toutefois, compte tenu des difficultés rencontrées par les petites communes rurales
pour mettre en oeuvre les dispositions de ce nouveau plan comptable, il est apparu nécessaire
au Gouvernement d'en différer l'obligation pour certaines collectivités. Ainsi, la circulaire
interministérielle du 10 novembre 1992 en a reporté la date de mise en oeuvre pour les
communes de petite taille (au 1er janvier 1996 pour les communes de 500 à 1 000 habitants, et
au 1er janvier 1997 pour les communes de moins de 500 habitants).
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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Or, la structure communale actuelle est telle que plus de 25 000 communes comptent
moins de 700 habitants et que la plupart d'entre elles n'ont donc pas encore réellement mis en
oeuvre le nouveau plan comptable. Celui-ci devrait ainsi produire pleinement ses effets dans les
prochaines années seulement.
Le contrôle de la gestion déléguée
L'exercice du contrôle de légalité des conventions passées par les collectivités
territoriales relatives aux concessions ou affermages nécessite la prise en compte de l'évolution
rapide des dispositions législatives et réglementaires applicables au domaine concerné qui ne
facilite pas une bonne maîtrise de la manière déjà complexe par les agents chargés de cette
mission.
Ainsi, dans le domaine de l’eau et de l’assainissement, une quinzaine de textes de
portée législative ou réglementaire sont intervenus depuis l'adoption de la loi n° 92-3 du 3
janvier 1992 sur l’eau. Dans le domaine des modes d'exploitation des services, la loi n° 93-122
du 29 janvier 1993, sur la prévention de la corruption et la transparence de la vie économique
et des procédures publiques, a déjà fait l'objet de plusieurs modifications successives qui ne
facilitent pas sa lisibilité et son interprétation par les agents chargés du contrôle de légalité
confrontés par ailleurs au contexte local qui peut faire prévaloir l'urgence des travaux à
réaliser.
Pour autant, l'examen des statistiques relatives aux actes transmis aux préfets et leur
évolution sur trois ans (de 1992 à 1994) montre une progression constante et notable du
nombre d'observations faites par les préfets à l'égard des conventions relatives aux concessions
et affermages. Ainsi, le taux d'observations formulées par rapport aux actes des collectivités
locales et établissements publics locaux reçus, est passé de 4,4 % en 1992 à 6,4 % en 1993 et
12,3 % en 1994
4
. Une sensibilisation accrue des agents concernés notamment par le biais
d'actions de formation régulières contribue à cette évolution. Notre objectif est de maintenir
cette formation au profit des agents de préfecture chargés du contrôle de légalité voire de la
renforcer dans les années à venir.
Par ailleurs, l'ambiguïté des relations contractuelles que dénonce également le rapport
n'a pas échappé aux responsables locaux comme aux représentants des organisations
professionnelles du secteur de l’eau et de l’assainissement. C'est pourquoi des négociations
sont en cours pour élaborer de nouveaux modèles de conventions tenant compte des évolutions
à la fois juridiques, techniques et financières intervenues dans ce domaine depuis les années
quatre-vingts, date à laquelle avaient été mis au point les textes qui servent encore actuellement
de référence. Outre l'objectif poursuivi, ces discussions présentent l'avantage de contribuer à
sensibiliser les acteurs concernés aux difficultés rencontrées et aux enjeux à prendre en compte.
En matière de transparence des comptes des services d’eau et d’assainissement, des
dispositions nouvelles sont mises en oeuvre. Le décret n° 95-635 du 6 mai 1995 relatif aux
rapports annuels sur le prix et la qualité des services publics de l’eau potable et de
l’assainissement trouve à s'appliquer pour la première fois en 1996 et portera sur l'exercice de
l'année 1995. Pour les communes de 3 500 habitants et plus, ces rapports doivent être mis à
disposition du public et adressés au préfet pour information.
4) Sources : 11e, 12e et 13e rapports du Gouvernement au Parlement sur le contrôle a posteriori des
actes des collectivités locales et des établissements publics locaux.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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Par ailleurs, l'arrêté du 10 juillet 1996 relatif à la facturation de la distribution de l’eau
et de la collecte et du traitement des eaux usées constitue un progrès dans le sens de la
"normalisation" de ces documents et permet de clarifier, tant pour le consommateur que pour le
délégataire du service, le prix de l’eau en précisant notamment la répartition des parts qui
reviennent au distributeur ou à la collectivité locale. Ces nouvelles dispositions entreront en
vigueur le 1er janvier 1998 pour les communes ou établissements publics de coopération
intercommunale de plus de 30 000 habitants. En deçà de ce seuil, elles seront mises en oeuvre
au 1er janvier 1999 (entre 10 000 et 30 000 habitants) et au 1er juillet 2000 (moins de 10 000
habitants).
Il s'agit d'une montée en charge progressive du système pour permettre aux organismes
gestionnaires de se doter des moyens informatiques nécessaires. Les effets prévisibles sur une
approche plus rigoureuse des comptes de ces services ne seront pas observables avant plusieurs
années mais c'est aussi un changement d'état d'esprit qui s'exprime au travers d'un tel texte.
Enfin, dans la même logique de poursuite des efforts de transparence, un projet de
décret est en cours d'élaboration en application de l'article L. 2313-1 du code général des
collectivités territoriales pour définir la nature et le contenu des documents à produire par les
délégataires de service public dans le cadre de la publicité des budgets et des comptes des
collectivités.
Réponse du ministre de l'ECONOMIE et des FINANCES
D'une manière générale, mon département partage l'analyse de la haute juridiction,
tout en relevant que l'enquête réalisée par la Cour a porté sur l'examen d'une situation
antérieure à 1995 et n'a donc pas pu prendre en compte les effets des lois de février 1995.
Mon ministère souscrit notamment aux critiques formulées par la Cour des comptes
quant à la persistance, tout au moins sur la période examinée, de pratiques contraires aux
règles fixées par l'article L. 2224-1 du code général des collectivités territoriales. En vertu de
cette disposition législative, les budgets des services publics d’eau et d’assainissement doivent
être équilibrés en recettes et en dépenses. Or, il est apparu que ces règles s'avéraient
inégalement appliquées, conduisant dans certains cas à favoriser un transfert de charges des
usagers vers les contribuables.
Il reconnaît également la pertinence des observations de la Cour relatives au défaut
d'informations des collectivités locales et des usagers pour ce qui relève de la gestion et du
mode de financement des services publics d’eau et d’assainissement.
L'application des nouvelles procédures prévues par la loi du 29 janvier 1993, dite loi
Sapin et les textes législatifs et réglementaires pris en 1995 en complément de la loi Sapin
devrait permettre de résoudre les problèmes évoqués par la Cour.
En effet, la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de
l'environnement pose deux principes essentiels : le premier concerne l'interdiction des droits
d'entrée dans les contrats de délégation des services d’eau et d’assainissement, le second, la
limitation à vingt ans des durées de ces contrats, sauf examen préalable par le trésorier-payeur
général, à la demande de l'autorité délégante, des justificatifs du dépassement de cette durée.
Le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale doit
en outre présenter chaque année à son assemblée délibérante un rapport annuel sur le prix et la
qualité du service public d’eau potable destiné notamment à l'information des usagers.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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La loi du 8 février 1995 prévoit également la production par le délégataire d'un rapport
comportant notamment les comptes retraçant la totalité des opérations afférentes à l'exécution
de la délégation du service public et une analyse de la qualité du service. Ce rapport est assorti
d'une annexe permettant à l'autorité délégante d'apprécier les conditions d'exécution du service
public.
Par ailleurs, la même loi a complété la loi Sapin en précisant les modalités de
prolongation des délégations dans le cas de la réalisation d'investissements matériels par le
délégataire. La loi prévoit également que le contrat doit stipuler les tarifs à la charge des
usagers et préciser l'incidence sur ces tarifs des paramètres ou indices qui déterminent leur
évolution.
Enfin, il convient de préciser que les conditions d'information des usagers ont été
améliorées. L'arrêté du 10 juillet 1996 relatif aux factures de distribution d’eau et de collecte et
traitement des eaux usées a fixé les grandes lignes d'une facture type, afin d'améliorer la
lisibilité et la compréhension des factures par l'usager.
Ces nouvelles dispositions vont dans le sens d'une plus grande transparence et d'une
information plus complète des collectivités locales et des usagers. Elles sont donc de nature à
répondre à certaines observations de la Cour.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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REPONSES DES COLLECTIVITES ET ORGANISMES LOCAUX
Avertissement
1. Les réponses apportées par les responsables élus des collectivités territoriales ou
présidents d'organismes locaux sont présentées par régions et ensuite dans l'ordre des
départements.
2. Les maires de Ploemeur (Morbihan), de Ris-Orangis (Essonne), d'Eguilles (Bouches-
du-Rhône) et de Saint-Paul-de-la-Réunion ont fait connaître qu'ils n'avaient pas d'observations
particulières à formuler sur les extraits communiqués.
3. Des modifications ont été apportées au texte de la Cour au vu des réponses du maire
de Guerlesquin (Finistère) et des présidents des Syndicats intercommunaux des eaux de la
Basse-Moder (Bas-Rhin) et de la région de Fontgombault (Indre), du Syndicat intercommunal
d’assainissement des eaux usées de la Haute-Saine (Aube) et du Syndicat intercommunal
d'alimentation en eau potable des Vals-de-Sèvre (Vendée). En conséquence, ces réponses ne
sont pas publiées.
ALSACE
Réponse de la présidente de la Communauté urbaine de STRASBOURG (Bas-Rhin)
En réponse aux observations, concernant la Communauté urbaine de Strasbourg,
formulées dans le rapport de la Cour des comptes portant sur "la gestion des services publics
locaux d’eau et d’assainissement ", j'ai l'honneur de vous apporter les précisions suivantes :
Vous avez relevé que dans la comptabilité des services d’eau et d’assainissement de la
Communauté urbaine de Strasbourg, les approvisionnements et les fournitures n'étaient pas, en
l'état, retracés dans la comptabilité des stocks.
La Communauté urbaine de Strasbourg s'est attachée à mettre en oeuvre, dès son entrée
en vigueur, le nouveau plan comptable relatif à ces services, issu de l'instruction M 49 des
ministères du budget et de l'intérieur.
L'application de ces dispositions, comme vous le rappelez, contribue à la clarté de
gestion de ces services, par une connaissance précise des conditions de leur équilibre financier.
Pour ce qui est de la comptabilisation des stocks, leur impact sur la tenue des comptes
de bilan de ces services est réduit, dans la mesure où les approvisionnements ne représentent
qu'une masse financière annuelle d'environ 4,5 millions de francs pour l’eau et 0,6 million de
francs pour l’assainissement, sur des budgets respectifs de 171 millions de francs et 157
millions de francs en 1995. Par ailleurs, la variation des stocks est retracée en comptabilité en
fin d'exercice.
Néanmoins, le règlement des questions que vous évoquez fait partie des préoccupations
à court terme de notre collectivité.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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En effet, la gestion et la comptabilisation des stocks des budgets de la ville, de la
Communauté urbaine de Strasbourg et de leurs budgets annexes va faire l'objet d'une nouvelle
approche globale en 1997, par la mise en service d'un logiciel de gestion permettant
l'application à partir du 1er janvier 1997 du nouveau cadre comptable défini par l'instruction
M 14.
Réponse du président de la Société d'économie mixte départementale des eaux et de
l’assainissement du BAS-RHIN
La Haute juridiction a relevé que l'une des pratiques contribuant à fausser la
concurrence lors de la négociation de contrats de délégation, tient au versement de droits
d'entrée ou d'usage sans lien avec l'intérêt réel du service et cité à titre d'exemple le contrat
passé par la SEMDEA.
Il est fait observer :
- que le contrat en cause a été conclu sur la base des exigences fixées par la collectivité
affermante ;
- que le contrat passé ne s'inscrivait pas en violation des dispositions légales en vigueur
à ce moment-là ;
- que compte tenu du contexte concurrentiel particulièrement agressif dans cette affaire,
la marge de négociation de la SEMDEA a été réduite à sa plus simple expression, notamment
en ce qui concerne le droit d'usage.
Il est par ailleurs souligné que dans le cas d'espèce, ainsi que cela a été indiqué à la
chambre régionale des comptes, qui a d'ailleurs pu le vérifier concrètement dans le cadre du
récent contrôle de notre organisme, aucun contrat souscrit entre 1976 et 1991, n'a comporté de
droit d'usage et que ceux passés après le contrat en cause, l'ont été dans le strict respect de la
loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 et de la loi n° 95-101 du 2 février 1995.
L'observation formulée doit donc être considérée comme ne concernant qu'une affaire
ponctuelle et non comme une pratique avérée de la SEMDEA.
Il est indiqué enfin, que le montant du droit d'usage s'est élevé à 8,5 millions de francs.
Il a été versé à la collectivité affermante qui, seule, a décidé de son affectation. Si cette
affectation ne devait pas avoir de lien avec l'intérêt réel du service, il ne saurait en être fait
grief au délégataire.
La SEMDEA se rallie, quant aux pratiques dénoncées, aux observations formulées par
la Haute juridiction.
Réponse du président du Syndicat intercommunal à vocation unique des communes du bassin
potassique alimentées en eau potable par LA HARDT (Haut-Rhin)
Suite à une pollution historique et à la fermeture en 1988 des anciens champs captants
d'Illzach, le 9 février 1989, le syndicat SAEP BP/HARDT a, par contrat de concession, concédé
à la Lyonnaise des Eaux la réalisation et l'exploitation d'ouvrage de production et d'adduction
d’eau potable dans la Hardt.
La rédaction du contrat de concession a été établie conformément à un cahier des
charges type pour la concession d'une distribution publique d’eau potable.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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La chambre régionale des comptes d'Alsace a procédé en 1995 à l'examen des comptes
du syndicat pour les exercices 1988 à 1993.
La chambre note, dans ses observations, que les dépenses de main- d'oeuvre
représentent environ 30 % des dépenses directes et qu'elles figurent pour 50 % dans la formule
de révision du tarif de base.
Cette formule de révision est une formule-type habituelle au niveau des propositions
faites dans le cadre d'une concession d’eau, comprenant plusieurs paramètres parmi lesquels
celui relatif à la main- d'oeuvre.
Après renseignements demandés auprès du concessionnaire, celui-ci affirme que la
somme des charges de main-d'oeuvre directe et des sous- traitants intervenant dans le service
public représente une proportion du coût du service de l'ordre de 53 %, soit une proportion en
rapport avec celle comprise dans les paramètres pris en compte dans la formule de révision.
Cela étant, le SIVU tient à faire observer que, dans le cadre des négociations en vue de
la dévolution de la concession, une attention particulière a été portée à la partie fixe de la
formule de révision.
Prévu initialement à hauteur d'un coefficient de 0,10 usuel, celui- ci a été porté à l'issue
des négociations à 0,125, ce qui, du point de vue de l'usager, représente à terme un intérêt non
négligeable.
AQUITAINE
Réponse du président de la Communauté urbaine de BORDEAUX (Gironde)
I. - "LES HAUSSES ACCOMPAGNANT LA DELEGATION"
Même si une relation entre la hausse des prix de l’eau et l'adoption d'un mode de
gestion déléguée peut être mise en évidence, le choix de la délégation ne saurait être la seule
explication de cette augmentation.
Ainsi, l'augmentation constatée lors de la signature du traité de concession, le 27
décembre 1991, est essentiellement motivée par les obligations de résultats particulièrement
importantes, tant en matière de quantité que de qualité d’eau distribuée, qui sont à la charge du
concessionnaire (a), mais également dans l'environnement extracontractuel (b) sachant qu'en
toute hypothèse ces augmentations se situent à un niveau comparable à celui observé sur
l'ensemble du territoire national (c).
a) Le contexte contractuel
Fixé par référence à l'article 33 du traité de concession du 27 décembre 1991, le coût
du mètre cube d’eau facturé à l'usager est fixé contractuellement selon un tarif comprenant une
prime fixe et un prix de base.
La prime fixe
La prime fixe, du fait de modifications de ses modalités de calcul issues du traité de
concession, a été majorée de 20,4 % durant cette même période (1991-1992).
En effet, elle est calculée à partir d'un coefficient (déterminé selon le débit nominal et le
diamètre du compteur), multiplié par la valeur du prix de base de l’eau. Or, si ce coefficient n'a
pas varié entre 1991 (contrat de gestion) et 1992 (traité de concession), le tarif de référence
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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était le prix de base, hors surtaxe en 1991, soit 3,787 F et celui intégrant la valeur de l'ex-
surtaxe en 1992, soit 4,56 F.
Le prix de base
Jusqu'au 31 décembre 1991, le tarif de l’eau potable se composait d'un prix de base
(intégrant la redevance prélèvement), majoré d'une surtaxe communautaire. Cette dernière a
été supprimée le 1er janvier 1992 et sa valeur a été intégrée, du fait du nouveau mode de
gestion du service, au prix de base fixé par le traité de concession, prix de base qui ne
comprend plus la redevance prélèvement.
Ainsi, l'évolution du prix de base de l’eau entre 1991 et 1992 a été de 7,5 %, en passant
de 4,241 F (prix de base : 3,787 F et surtaxe 0,454 F) à 4,56 F (hors taxes). A noter que si l'on
extrait du prix de base la redevance prélèvement (0,11 F), la hausse a été de 10,4 % (4,131 F à
4,56 F).
Ce relèvement de prix trouve son fondement dans l'accroissement des obligations
imposées au concessionnaire. Plus précisément, en 1991, ces engagements avaient pu être
évalués à 220 millions de francs environ, ce qui représentait, sur la base d'une consommation
annuelle prévisionnelle de 43 millions de mètres cube, une hausse du prix de l’eau supérieure à
0,50 F par mètre cube. Ainsi, on ne peut comparer que des prix qui s'appuient sur des niveaux
d'investissement identiques, ce qui aurait, en première approximation, entraîné une majoration
des tarifs de 20 % dès 1992 et de 30 % entre 1991 et 1994 sur la base de l'ancien contrat de
gestion.
b) Le contexte extracontractuel
Dans le même temps, une décision gouvernementale a permis que les agences de l’eau
puissent majorer très largement les redevances qu'elles perçoivent. Entre 1991 et 1992, par
exemple, l'agence de l’eau Adour-Garonne a été autorisée à doubler ses redevances, la
redevance pollution passant de 0,60 F à 1,31 F, soit une hausse de 118,3 %, et la redevance
prélèvement de 0,11 F à 0,21 F, soit + 91 %.
Un tableau récapitulatif, établi sur la base d'une consommation de 100 m3/an, montre
bien l'influence des hausses des redevances de l'agence de l’eau, à l'encontre desquelles notre
établissement public ne dispose d'aucun moyen d'action et qu'il n'a pu que subir.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
105
c) Un niveau d'augmentation comparable à celui observé en France
Une étude, réalisée en 1994, par le Syndicat professionnel des distributeurs d’eau
(SPDE), montre que le prix de la distribution d’eau potable en France a augmenté de 15,9 %
entre 1992 et 1994, contre 16,6 % pour la communauté urbaine (4,56 F [HT] à 5,316 F [HT]),
étant précisé, cependant, qu'en décembre 1994 le prix moyen en France se situait à 6,40 F
(TTC), contre 5,678 F (TTC) pour notre établissement public.
Le prix de l’eau seule est passé de 4,56 F (hors taxes) au 1er janvier 1992 à 5,529 F
(hors taxes) au 1er janvier 1996, soit une hausse de 21,25 %, ce qui représente une moyenne
annuelle de 5,31 %, proche de celle signalée par vos soins avant le passage en concession (4,92
%). Il faut remarquer qu'entre 1990 et 1991, le prix de l’eau seule avait été majoré de 6,96 %
(3,965 F à 4,241 F) et de 11,52 % entre 1989 et 1991, soit 5,76 % en moyenne (3,803 F à 4,241
F).
Concernant les hausses enregistrées entre 1992 et 1994 du seul prix de base de l’eau (et
non du prix de l’eau retenu par la Cour), elles n'exèdent nullement celles annoncées aux
conseillers communautaires, puisque leur origine se situe dans la formule d'actualisation
prévue à l'article 34 du traité de concession, actualisation qui s'applique au 1er janvier et au
1er juillet de chaque année. Ainsi, la hausse des tarifs fixés par l'article 33 a été établie à partir
de valeurs en francs constants (valeur au 31 décembre 1991), alos que les augmentations dont
il est fait état se rapportent à des valeurs actualisées, étant précisé que l'évolution liée à la
formule d'indexation se rapproche de l'inflation (+ 2,14 % pour 1992-1993 et + 4,03 % pour
1992-1994).
II. - UN MANQUE DE DEFINITION DES OUVRAGES A LA CHARGE DU
CONCESSIONNAIRE
Comme indiqué plus haut, le concessionnaire doit, à l'inverse des dispositions de
l'ancien contrat de gestion, répondre à des objectifs de résultats précis et mettre en oeuvre, à
son initiative, des moyens techniques et financiers nécessaires. Ces objectifs, qui sont fixés par
l'article 5 du traité, tendent à une amélioration quantitative et qualitative de l’eau distribuée et
cela dans un délai de 10 ans. Il faut y voir la traduction d'une volonté forte de la communauté
urbaine d'améliorer le service de l’eau dans l'intérêt de ses usagers.
Il n'y a donc pas de prévision d'enveloppe globale mais simplement une évaluation de
référence des moyens que les services techniques communautaires ont estimé devoir être
mobilisés par le concessionnaire. Ainsi, la concrétisation de l'action du concessionnaire ne doit
pas se juger par rapport aux moyens financiers mobilisés, mais aux seuls résultats. Tout
engagement sur une enveloppe globale conduirait non plus à des objectifs de résultats, mais à
des objectifs de moyens. Dans ces conditions, notre établissement public ne voulait pas se
trouver dans cette situation paradoxale où la mobilisation des sommes contractuellement fixées
aurait été effectuée par le concessionnaire sans que ce dernier parvienne à remplir totalement
ses obligations qualitatives et quantitatives.
C'est, en fait, dans cette obligation de résultats que réside la notion de "risques et
périls" du concessionnaire, ce qui laisse supposer, bien évidemment, la mise en place d'un
système de contrôle extrêmement performant de la part des services communautaires en vue de
s'assurer de la bonne exécution des objectifs impartis au concessionnaire. C'est d'ailleurs dans
cette optique, il faut le souligner, que les frais de contrôle sont pris en charge par le
concessionnaire au travers des dispositions de l'article 16 du traité de concession.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
106
AUVERGNE
Réponse du maire de VICHY (Allier)
"UNE INFORMATION SOUVENT DEFICIENTE"
La cour note qu'à Vichy "a pu être constaté antérieurement à la délégation de service
l'absence d'études fiables sur les équipements. Les études relatives aux travaux d'amélioration
du réseau ont été effectuées de mars à août 1990, postérieurement à la conclusion du contrat,
par l'entreprise délégataire".
La première observation (absence d'études fiables) est sévère pour les services
techniques municipaux de l'époque qui, peu de temps avant le renouvellement de l'équipe
municipale en 1989, ont réalisé un inventaire complet des réseaux d’eau et d’assainissement,
ainsi qu'une prévision des principaux investissements à réaliser.
Ce programme ayant été établi, avant même la décision de concession, par les services
municipaux dans l'optique de la poursuite de l'exploitation par leurs soins, il n'y avait a priori
pas de raison de douter de sa validité.
La seconde observation (études postérieures à la conclusion du contrat) fait un
amalgame entre des études de deux niveaux de précision différents répondant à une logique
incontournable pour tout maître d'oeuvre.
Comme rappelé ci-avant les "études relatives aux travaux d'amélioration du réseau" ont
en réalité été réalisées en leur temps par les services municipaux.
Ce sont elles qui ont servi de base à "un projet d'exécution détaillé" qui, lui, a été
logiquement confié au concessionnaire et donc réalisé postérieurement à la signature du
contrat, en collaboration avec les services techniques municipaux, avec validation par l'Agence
de l’eau.
"DES STRUCTURES INTERCOMMUNALES TROP ETROITES"
Après avoir rappelé qu'à Vichy "le choix du délégataire des services d’eau et
d’assainissement avait été en partie motivé par le souhait de mieux "intégrer les différents
aspects de l'intercommunalité"", la Cour note que "la création d'une société spécifique... n'a
nullement fait progresser l'intercommunalité depuis 1990 : aucune structure communale n'a été
créée entre Vichy et les communes limitrophes".
La Cour ajoute "l'interconnexion des réseaux n'est toujours pas réalisée".
C'est pour des raisons évidentes que les trois communes de Vichy, Bellerive et
Brugheas, pourtant de sensibilités politiques différentes, ont souhaité la constitution de cette
nouvelle société. En effet, la CISE étant désormais titulaire du contrat de Vichy et la Lyonnaise
des Eaux de ceux de Bellerive et de Brugheas, si une filiale commune n'avait pas été créée, la
Société Lyonnaise des Eaux aurait conservé l'exclusivité de la gestion de réseaux qui ont
vocation à s'étendre vers d'autres communes de l'agglomération sur la rive gauche de l'Allier.
Dans ces conditions, il ne pouvait plus, avant longtemps, être question d'intercommunalité en
matière d’eau et d’assainissement dans l'agglomération vichyssoise avec deux groupes
différents de part et d'autre de l'Allier.
Le gaspillage des moyens se serait ainsi poursuivi, alors qu'au contraire la gestion de
ces réseaux par une même entreprise a permis une rationalisation qui va déboucher sur la
fermeture de l'usine de production de Bellerive, celle de Vichy étant suffisante pour satisfaire
l'ensemble des besoins.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
107
Il est donc certain que la création d'une telle filiale a permis une avancée tout à fait
souhaitable de l'intercommunalité entendue au plan des équipements communs rationnels.
Il est bien exact qu'aucune structure intercommunale n'a été créée entre Vichy et les
communes limitrophes dans le domaine de la gestion des eaux . Qu'aurait-elle apporté au plan
économique ? A l'évidence, rien. Bien au contraire elle serait allée à contre courant de la
création du Syndicat mixte des eaux de l'Allier dont la vocation dépasse très largement le
périmètre de l'agglomération.
En effet, dès la conclusion du contrat de concession en 1990, et c'est précisément l'une
des raisons qui a conduit à la création d'une filiale commune, la ville de Vichy a souscrit à
l'idée
proposée
par
le
conseil
général
de
l'Allier
d'une
structure
départementale
d'interconnexion des réseaux d'alimentation en eau potable et a donc décidé, d'un commun
accord avec Bellerive et Brugheas, de ne pas créer une structure intercommunale afin d'adhérer
directement au SMEA.
Un désaccord fondamental entre les trois villes les plus importantes du département
(Montluçon, Moulins, Vichy) et le SMEA a retardé cette adhésion, mais si ces difficultés dues au
contenu du schéma directeur départemental (qui ignorait les possibilités d'exportation d’eau
des communes urbaines) n'avaient pas existé, la ville de Vichy serait adhérente au syndicat
mixte depuis sa création en octobre 1992 et - il s'agit là de la réponse au second point soulevé
par la Cour - l'interconnexion serait réalisée.
Pour conclure, précisons que le schéma départemental est en cours de révision sous
l'autorité du département et que l'adhésion de la ville de Vichy sera réalisée dès la fin de cette
révision, permettant alors immédiatement l'interconnexion.
"UN SECTEUR TRES CONCENTRE"
La Cour note que, "à Vichy, la ville a demandé en 1989 à la CISE de se rapprocher de
la Lyonnaise des Eaux ...".
Les raisons de cette démarche étant explicitées en réaction à l'observation intitulée
"Des structures intercommunales trop étroites", il ne sera pas fait de commentaire
supplémentaire.
Il est par contre rappelé que le souhait de rapprochement des deux sociétés n'a pas été
exprimé par la seule ville de Vichy, mais également par celles de Bellerive et Brugheas dans un
intérêt général de rationalisation.
Réponse du président du Syndicat intercommunal d’assainissement
et d’eau potable de la REGION MINIERE (Allier)
A la suite des observations formulées par la chambre régionale des comptes
d'Auvergne, j'ai pris bonne note de celles-ci, sachant que le programme incendie, financé en
investissement par le syndicat, aurait dû être une dépense obligatoire pour les communes
rattachées au syndicat en application de l'article L. 221-2-7° du Code des communes.
Je vous précise que ces travaux ont toujours fait l'objet de dossiers approuvés par la
sous-préfecture pour demande de subvention sollicitée par le comité syndical, octroyée par le
département ou l'Etat.
Depuis ces observations, toute demande de travaux pour la défense incendie formulée
par une commune adhérente au syndicat doit être financée en totalité par la collectivité
concernée.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
108
Réponse du président du district du bassin d'AURILLAC (Cantal)
I. - "L'OBJECTIF DE QUALITE"
La protection des captages
Le district du bassin d'Aurillac entend poursuivre le programme de réhabilitation des
périmètres de protection immédiats de ses captages engagé en 1995.
Une réunion est programmée pour le 17 octobre avec le conseil général du Cantal, la
SEM-SEBA 15, l'agence de l’eau Adour-Garonne. L'objectif de cette réunion est de faire un
point de l'état des périmètres de protection de nos captages (immédiats, rapprochés et éloignés)
et de mettre en place une méthode opérationnelle nous permettant de pallier dans les meilleurs
délais aux déficiences constatées.
Une des contraintes fortes à laquelle le district est confronté depuis l'intégration des
réseaux d’eau potable des communes rurales, réside dans le fait qu'il doit gérer une multitude
de petits captages de faible débit, mal protégés et de surcroît, souvent difficiles à protéger.
D'où le choix stratégique, arrêté par le district, d'abandonner progressivement le
maximum de ces captages et de concentrer ses efforts de protection sur quelques sites
privilégiés.
C'est ce qui a été réalisé pour les captages des communes de Naucelles, de Reilhac et
de Crandelles, dont les réseaux sont désormais raccordés au grand réseau d'Aurillac-Arpajon-
sur-Cère. C'est également ce qui sera fait prochainement pour une partie de la commune
d'Ytrac avec le raccordement du réservoir de Branviel sur ce même réseau via le château d’eau
de la Capelotte à Sansac-de-Marmiesse déjà raccordé.
Parallèlement, le district a entrepris le renforcement de ses ressources en eau potable
de qualité dans trois secteurs propices :
- la vallée de la Jordanne avec la recherche de nouvelles ressources en nappe profonde.
D'où la réalisation dans le courant du quatrième trimestre 1996 de deux forages d'essai dans la
plaine de Velzic ;
- la montagne de Boudieu avec la source de Boussac ;
- la vallée de la Cère et principalement la commune de Vézac avec les recherches
entreprises sur les sources.
Ces trois opérations visent à renforcer notre capacité de production en eau de qualité
afin d'alimenter à terme l'ensemble du district à partir de quatre sites faciles à protéger : Velzic
sur la Jordanne, La Prade et Vézac sur la Cère et la montagne de Boudieu.
Les ressources complémentaires, que le district espère ainsi trouver, permettront de
poursuivre l'interconnexion des réseaux en renforçant l'approvisionnement des réservoirs de
Roc-Castanet et de Coissy à partir de Velzic et en alimentant la commune de Vézac et une
partie d'Arpajon-sur-Cère à partir des sources de Marvejols, de soulager d'autant la
distribution de Coissy pour permettre la desserte de Giou-de-Mamou et de Yolet et avec l'apport
de Boussac, les points de ces deux communes plus ceux de Saint-Simon et d'une partie
d'Aurillac.
II. - "LES DEFAUTS D'ORGANISATION DES REGIES"
La procédure des dégrèvements accordés par le président avant facturation a été revue.
Désormais, tout dégrèvement fait l'objet d'une admission en non valeur présentée, pour
approbation, au conseil districal.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
109
La non-facturation des consommations des services publics locaux sera abandonnée
dès 1997 avec la mise en place d'un tarif qui évoluera sur cinq ans.
Compte tenu des contraintes financières et fiscales des budgets des différentes
communes et du budget général du district, ce délai de cinq ans semble indispensable pour
permettre un lissage progressif de cet alignement tarifaire.
III. - "LA MAITRISE IMPARFAITE DES INVESTISSEMENTS"
L'inadéquation des stations d'épuration ou nombre d'abonnés raccordés correspond à
l'héritage transmis par les communes rurales lors de la création du district.
Le système d’assainissement géré par le district qui en résulte, est constitué par la
juxtaposition de réseaux communaux ou infracommunaux qui démontrent de façon criante que
l'absence de structure intercommunale sur l'ensemble du bassin d'Aurillac a empêché le
développement d'une politique d’assainissement à l'échelle de l'agglomération avec tous les
inconvénients que cette absence de réflexion d'ensemble à long terme a pu générer.
Ainsi, alors que le SIVM de la région d'Aurillac s'est préoccupé dès 1986 de faire
réaliser par un bureau d'études spécialisé un diagnostic complet de son système
d’assainissement, réseaux et stations d'épuration, afin de mettre en place un schéma directeur
d’assainissement, les communes rurales ont continué à travailler à l'échelle de leur territoire
voire du hameau.
Cette situation s'est traduite par un retard important de la signature d'un contrat
d'agglomération avec l'agence de l’eau Adour- Garonne.
Finalement, le 1er juin 1995, l'agence constatant que le district avait engagé la
réalisation d'une étude-diagnostic de l’assainissement des communes rurales, a décidé de
signer un contrat d'agglomération pour la partie urbaine du district, Aurillac et Arpajon-sur-
Cère, au terme de celui-ci en 1997, le district devra avoir :
- mis en conformité les branchements des abonnés ;
- éliminé les eaux claires parasites ;
- restructuré le réseau avec mise en séparatif de secteurs déjà en majeure partie
séparatifs ;
- mis aux normes la station de Souleyrie avec suppression de la station de Brouzac ;
- réalisé une étude sur la valorisation agricole ou l'incinération des boues des stations
d'épuration.
Parallèlement au respect des engagements du contrat d'agglomération, le district
s'attache :
- à réhabiliter les réseaux des communes rurales avec comme objectif l'élimination des
eaux claires parasites des réseaux d’assainissement ;
- à améliorer le fonctionnement des stations d'épuration existantes avec la mise en
place de dégrilleurs automatiques, de silos à boues, en supprimant les ouvrages les plus
obsolètes tels que la station des Bouleaux à Ytrac par exemple.
Sachant qu'à terme, au vu des résultats de l'étude-diagnostic en cours, il faudra aboutir
à l'élaboration d'un schéma directeur districal d’assainissement intégrant l'ensemble des
communes, mais également compatible avec les possibilités financières du service
d’assainissement.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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Réponse du président du Syndicat mixte du LIORAN (Cantal)
Afin de répondre aux observations de la Cour des comptes concernant la gestion des
services publics locaux d’eau et d’assainissement, j'ai l'honneur de vous informer que les
travaux de réfection du périmètre de captage de la source de La Gouyère ont été réalisés par la
Lyonnaise des Eaux et sont à ce jour terminés.
Je me permets de préciser que ce périmètre de protection sur un site particulièrement
isolé et très peu fréquenté a été réalisé en fil de fer barbelé, alors que la protection du réservoir
d’eau de Font de Cère situé à proximité des pistes a été réalisée à l'aide de poteaux bois et
clôture type "moutons".
Réponse du maire du MONT-DORE (Puy-de-Dôme)
CONCESSION DES SERVICES DE L’EAU ET DE L’ASSAINISSEMENT DE LA VILLE
DU MONT-DORE
En concluant un contrat de concession de ses services de l’eau et de l’assainissement,
la commune du Mont-Dore n'a fait que bénéficier d'une disposition économique admise et que
la loi n'interdit pas, à savoir la perception d'un droit d'occupation du domaine public auprès du
concessionnaire.
S'il est vrai que le coût des services dont le concessionnaire a la charge peut être sujet à
caution au cas particulier, une étude comparative avec les pratiques existantes dans d'autres
collectivités nous a permis de penser que la moyenne se situait aux alentours de 12 F le mètre
linéaire de canalisation.
Sur le fond, il est vrai également qu'en augmentant la charge du concessionnaire, celle-
ci a un effet sur le prix de vente de l’eau. Toutefois peut-on imaginer que la commune, en tant
que concédant, n'ait pas le souci de faire payer à une entreprise chargée de l'exécution du
service le coût d'un droit d'occupation du domaine public, alors qu'il est réclamé par ailleurs à
tout autre utilisateur. Il en va ainsi pour les commerçants disposant d'une terrasse, d'étalages,
de marches le long de la voirie, ou encore pour les balcons, enseignes, etc. surplombant la voie
publique. Ce même droit est exigé des commerçants ambulants qui, pour exercer leur activité,
utilisent une partie du domaine public périodiquement tout au long de l'année. La commune
peut- elle exonérer de l'application d'un tel droit une entreprise concessionnaire au simple motif
que le surcoût ainsi généré entraînera une augmentation du prix de l’eau ? Ne s'agit-il pas
plutôt de l'application d'un principe d'égalité des citoyens devant la loi, car on peut tout aussi
bien imaginer que le commerçant qui acquitte un droit de voirie le répercute dans le prix des
prestations qu'il rend à ses clients.
La capitalisation du droit d'occupation en début de contrat ne constitue pour la
commune qu'une facilité de trésorerie qui lui permet d'alléger la charge de ses contribuables,
ce qui demeure pour elle une préoccupation constante de nature différente, car l'impôt ne
comporte pas pour le citoyen une contrepartie au sens propre.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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Réponse du président du SIAEP de la BASSE-LIMAGNE (Puy-de-Dôme)
1. "L'autonomie des services d’eau et d’assainissement "
Il est vrai qu'un déséquilibre est constaté dans les résultats financiers de la SEMERAP
faisant apparaître globalement un déficit sur l'activité assainissement et un bénéfice sur
l'activité eau.
Une première explication réside dans le fait que les charges nouvelles supportées par le
délégataire pour les contrats du SIAEP de Basse-Limagne et Plaine de Riom ont fait l'objet de
réactualisation par avenant de la rémunération du fermier. Au contraire, aucune revalorisation
sur les contrats d’assainissement n'a été opérée bien que certains contrats soient anciens et que
des modifications soient intervenues dans la réglementation (nouvelles exigences des normes
liées à une plus grande sensibilité des problèmes de l'environnement), aucune clause de
revalorisation prévue au contrat ne l'autorisant.
Une deuxième explication réside dans le fait que la SEMERAP est historiquement une
émanation de syndicats d’eau. Les syndicats trouvent leur origine dans la volonté de regrouper
des collectivités, petites ou grandes en vue d'une économie d'échelle. Il en est résulté une
péréquation des tarifs aux usagers entre collectivités associées. Cet esprit d'intercommunalité a
présidé à la création et à la gestion de la SEMERAP. Les contrats d’assainissement ont été
souscrits avec des collectivités (syndicats et communes) dans le seul périmètre des syndicats
d’eau potable affermés. D'une certaine manière la péréquation entre les deux activités sur le
même territoire n'a pas pénalisé les usagers. De plus certaines activités déficitaires notamment
en matière d'environnement ont été délibérément maintenues par les administrateurs acceptant
le déséquilibre de ces activités sachant qu'il était compensé par les résultats d'autres secteurs
d'activités. C'est un choix des élus dont on peut seulement constater que les faits semblent leur
donner raison puisque l'intercommunalité est aujourd'hui le moyen proposé notamment par les
pouvoirs publics pour rendre cohérentes les actions des collectivités en matière de projet et
d'aménagement du territoire dont la distribution et la gestion de l’eau est partie intégrante.
2. "Les insuffisances de programmation"
Le SIAEP de Basse-Limagne s'est constitué en 1936 ; les travaux de premier
établissement ont été mis en place entre cette date et 1950, ce qui fait que l'ensemble des
infrastructures initiales datait de quarante à soixante ans à la date de l'examen de la chambre
régionale des comptes. Jusqu'en 1982, le syndicat se finançait par centimes syndicaux ; il n'a
jamais pratiqué l'amortissement technique des premières installations pour ne pas alourdir la
fiscalité. Cette pratique de l'amortissement n'est pour la plus grande part des collectivités
devenue une réalité qu'avec la M 49. En conséquence, le syndicat avait engagé en 1990, par
précaution et avant toute rénovation des infrastructures, une étude générale diagnostique de
fonctionnement de ses réseaux. Le plan d'investissement envisagé correspondait au schéma
directeur prévu par les conclusions de cette étude. Il parait inopportun de prétendre que le
syndicat n'avait pas programmé ses travaux sauf sur le plan financier. Dès lors la pratique de
l'amortissement n'aurait pu être que récente et n'aurait pas suffi à permettre le financement des
travaux de rénovation rendus nécessaires par la vétusté.
3. "La délégation, moyen de financer l'investissement"
Le choix du syndicat est intervenu dans un souci de limitation de prix à l'usager. La
seule comparaison des charges de remboursement d'emprunt et de loyers de crédit bail ne peut
suffire à justifier un choix sachant que le crédit-bail inclut une remise gratuite au terme de la
période de location des biens réalisés sous crédit-bail à la collectivité alors qu'il s'agit de biens
amortissables sur une période plus longue à laquelle aurait été soumis le syndicat s'il avait lui-
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
112
même emprunté. C'est donc une comparaison sur les deux éléments qui aurait dû être examinée
sur la durée de la concession.
4. "Les effets d'une concurrence imparfaite"
Il n'est pas exact de considérer que les programmes sont négociés chaque année entre
SCET-Environnement et le syndicat, puisque la programmation des travaux est du ressort de la
collectivité et s'appuie sur un schéma directeur établi en 1990. Le concessionnaire s'efforce
d'exécuter les décisions du syndicat dans le cadre du découpage annuel prévu au contrat de
concession pour le financement des travaux. Le syndicat est de ce fait responsable de la gestion
de l'enveloppe globale des travaux et de son engagement annuel.
La réécriture du contrat de concession recommandée par la chambre régionale des
comptes sera l'occasion de régler les conditions économiques du contrat selon qu'il y aurait
dépassement ou insuffisance des réalisations des travaux prévus initialement.
5. "Le manque d'information des collectivités et des usagers"
L'état des actifs des biens remis au concessionnaire est difficile à réaliser en raison de
plusieurs facteurs :
- le syndicat a été créé en 1936, il y a soixante ans, et des réalisations de cette époque
sont encore en service, leur valeur étant en pratique inconnue ;
- le syndicat était à l'origine un syndicat d'adduction. La distribution relevait de la
compétence communale. Le syndicat a étendu ses compétences à la distribution. Aucun procès-
verbal de remise d'installation n'a concrétisé cette incorporation. Il ne dispose donc ni
d'estimation ni de plans autres que ceux qui ont pu être reconstitués au fur et à mesure par le
fermier ;
- nombre d'extensions ont été réalisées par les communes adhérentes ou par les
particuliers demandeurs et incorporées au patrimoine du syndicat sans autres formalités.
Seul est disponible un état des plans existants reconstitué par le fermier.
Réponse du président du SIAEP des communes de LA PLAINE DE RIOM
(Puy-de-Dôme)
1. "L'autonomie des services d’eau et d’assainissement "
[Réponse identique à celle du SIAEP de la BASSE-LIMAGNE]
2. "L'évaluation des besoins"
En liminaire, je me permets de faire observer que c'est la ville de Riom qui prévoyait
l'implantation d'une importante unité d'embouteillage (et pas mon syndicat) et qui a été à
l'initiative du programme d'interconnexion en tant que collectivité demandeur.
L'étude du cabinet Gaudriot réalisée en 1991-92 à la demande de l'Agence de l’eau
Loire-Bretagne qui s'inquiétait sur la gestion de la pénurie d’eau et de la nécessité de
rechercher de nouvelles ressources et d'harmoniser les pompages (partage de débit d’eau de
Volvic entre le SMUERR, le SIVOM de Riom, le Syndicat de la Plaine de Riom) compte tenu
d'un affaiblissement important des ressources (SIVOM), des craintes qui planaient sur Volvic
après trois années de sécheresse (forte baisse constatée sur les sources gravitaires à
Louchadière et Argnat) et de la baisse du Gargouilloux (tombée de 55 litres par seconde à 12
litres par seconde), a été contrariée par l'évolution économique et climatique.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
113
Cette étude a porté sur la définition des besoins à partir des perspectives de croissance
annoncées par les pouvoirs publics en période climatique porteuse de surconsommation (milieu
rural et résidentiel) et d'un accroissement régulier du nombre d'abonnés et des consommations.
L'étude a retenu une croissance de consommation modeste de 1,5 % sur les années à venir. Les
perspectives d'évolution ont été contrariées par la climatologie qui à l'inverse entre 1992 et
1993 a entraîné une baisse non prévue de consommation de 7 % pour l'ensemble du secteur. Le
projet d'usine d'embouteillage annoncée à Riom ne s'est pas concrétisé, d'importantes industries
du Riomois ont fermé leur porte, fragilisant le tissu économique. Ces événements étaient par
nature imprévisibles.
Le syndicat de la Plaine de Riom n'a jamais été demandeur dans l'interconnexion. Il a
accepté sur la demande pressante des administrations et par solidarité avec les collectivités
voisines à fournir de l’eau, voire pendant une période d'un an, à abandonner ses droits d’eau de
Volvic au profit du SIVOM de Riom et à se déssaisir ainsi de sa sécurisation d’eau potable. Les
effets de la convention d'interconnexion pour le SIVOM correspondent à des charges réelles (le
rapport de la chambre régionale des comptes a reproché à mon syndicat de n'avoir pas exigé
toutes les sommes qu'il était en droit d'attendre). Un avenant récent a été conclu pour tenir
compte de la baisse de consommation du SIVOM.
3. "La délégation, moyen de financer l'investissement"
[Réponse identique à celle du SIAEP de la BASSE-LIMAGNE]
Les capacités d'autofinancement soulignées par le rapport étaient purement comptables
dans la mesure où la trésorerie correspondante n'était pas toujours disponible. Dans la réalité
le syndicat avait des besoins chroniques de trésorerie. Le syndicat ne pouvait pas gager des
excédents fictifs dans des travaux certains avec en perspective des recettes incertaines.
4. "Une information souvent déficiente"
Il est exact que la convention d'interconnexion a été signée par mon syndicat le 21
juillet 1992 alors que la concession a été signée le 14 septembre 1992. Il se trouve que le
dossier de concession a été établi avant la convention d'interconnexion mais l'urgence de la
situation de sécheresse a fait que la signature de la concession a été reportée après les
vacances sans que les éléments constitutifs aient été revus.
Le syndicat ne s'est pas engagé sur un programme d'emprunt basé partiellement sur ce
financement complémentaire de 1 million de francs. En effet la renégociation de la convention
d'interconnexion à la demande du SIVOM de Riom pour tenir compte de la baisse de
consommation constatée sur son territoire a conduit mon syndicat à conclure un avenant qui
ramène à 600 000 francs la recette prévisionnelle, soit une baisse annuelle de 400 000 francs
qui aurait dû être compensée par une hausse des tarifs à l'usager.
5. "Un contrôle insuffisant des recettes"
La convention signée par le SIVOM de Riom et toutes ses communes adhérentes, avec
les SIAEP de la Plaine de Riom et de Basse-Limagne, prévoyait que la SEMERAP, fermier du
SIAEP facturerait et encaisserait pour le compte du SIAEP les sommes dues par le SIVOM et
lui reverserait les sommes perçues. Ceci se justifiait puisque les sommes à percevoir avaient
plus le caractère d'une redevance que d'une contribution d'une collectivité, d'ailleurs non
associée. Une délibération du comité syndical du SIAEP de la Plaine de Riom du 15 juillet 1992
communiquée lors du contrôle de la chambre régionale des comptes stipule que les sommes
perçues par le SIAEP au titre du c) "Moyens d'exploitation de la convention" étaient reversées à
la SEMERAP, gestionnaire du réseau syndical. L'observation peut porter sur le fait que la
SEMERAP a agi par compensation pour éviter deux mouvements de trésorerie supplémentaires
et que cela n'est pas conforme à la convention puisque la somme n'apparaît pas en recette et en
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
114
dépenses sur les comptes au syndicat. La SEMERAP n'a donc pas gardé indûment les sommes
perçues au titre du c) de la convention ; les sommes lui étaient bien destinées.
Réponse du président de la Société d'économie mixte pour l'exploitation des réseaux d’eau et
d’assainissement et la protection de l'environnement (SEMERAP)
1. "L'autonomie des services d’eau et d’assainissement et leur obligation d'équilibre"
Il est vrai qu'un déséquilibre est constaté dans les résultats financiers de la SEMERAP
faisant apparaître globalement un déficit sur l'activité assainissement et un bénéficie sur
l'activité eau.
Une première explication réside dans le fait que les charges nouvelles supportées par le
délégataire pour les contrats des SIAEP de Basse-Limagne et Plaine de Riom ont fait l'objet de
réactualisation par avenant de la rémunération du fermier. Au contraire, aucune revalorisation
sur les contrats d’assainissement n'a été opérée bien que certains contrats soient anciens et que
des modifications soient intervenues dans la réglementation (nouvelles exigences des normes
liées à une plus grande sensibilité des problèmes de l'environnement), aucune clause de
revalorisation prévue au contrat ne l'autorisant.
Une deuxième explication réside dans le fait que la SEMERAP est historiquement une
émanation de syndicats d’eau. Les syndicats trouvent leur origine dans la volonté de regrouper
des collectivités, petites ou grandes en vue d'une économie d'échelle. Il en est résulté une
péréquation des tarifs aux usagers entre collectivités associées. Cet esprit d'intercommunalité a
présidé à la création et à la gestion de la SEMERAP. Les contrats d’assainissement ont été
souscrits avec des collectivités (syndicats et communes) dans le seul périmètre des syndicats
d’eau potable affermés. D'une certaine manière, la péréquation entre les deux activités sur le
même territoire n'a pas pénalisé les usagers.
De plus certaines activités déficitaires notamment en matière d'environnement ont été
délibérément maintenues par les administrateurs acceptant le déséquilibre de ces activités
sachant qu'il était compensé par les résultats d'autres secteurs d'activités. C'est un choix des
élus dont on peut seulement constater que les faits semblent leur donner raison puisque
l'intercommunalité est aujourd'hui le moyen proposé notamment par les pouvoirs publics pour
rendre cohérentes les actions des collectivités en matière de projet et d'aménagement du
territoire dont la distribution et la gestion de l’eau est partie intégrante.
Contrairement à ce qu'écrit le rapport, les contrats d’assainissement déficitaires
portent toujours sur des secteurs géographiques où les contrats d’eau sont bénéficiaires. Les
usagers sont les mêmes, la SEMERAP ayant développé son activité assainissement à partir des
territoires où elle exerçait une activité d’eau.
2. "L'imprécision des comptes rendus annuels"
Il est pris acte de la nécessité d'informer le conseil d'administration et les collectivités
concédantes des retraitements comptables nécessaires pour présenter le compte rendu annuel.
Cette explication a déjà été donnée lors de la présentation de la lettre définitive de la chambre
régionale des comptes d'Auvergne à l'assemblée générale de la SEMERAP. Par ailleurs il a été
expressément reconnu par la chambre régionale des comptes que les retraitements étaient tout
à fait justifiés. Il s'agit en définitive d'un simple manque d'information auquel il a été remédié.
3. "Le contrôle des recettes"
Sur ce point la SEMERAP tient à préciser qu'elle ne partage pas l'avis de la chambre
régionale des comptes. En effet, le réseau du syndicat de Plaine de Riom a été mis en
concession au début de l'année 1993 ; aucune somme n'était donc à reverser au SIAEP de
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
115
Plaine de Riom mais à son concessionnaire. De surcroît, les usagers du SIAEP de Plaine de
Riom n'ont jamais eu à pâtir du fait de la non-atténuation de leur charge, le prix de l’eau était
fixé par convention soit du traité d'affermage jusqu'en 1993 soit du traité de concession depuis
1993.
4. "Le contrôle des charges de personnel"
Il est vrai que de 1993 à 1995 l'indexation du point indiciaire a suivi l'évolution
moyenne du prix de l’eau. Il faut toutefois préciser que cette indexation s'est en réalité traduite
par une augmentation de l'ordre de 1,2 % soit l'évolution du coût de la vie sur la même période.
Cette décision avait été prise du fait du blocage de l'indice de référence de la RATP sur les
années antérieures. Il a été tenu compte des observations de la chambre régionale des comptes
d'Auvergne puisque dès 1996 l'indice de référence est celui de la RATP. Par ailleurs le
rapporteur a pu constater qu'aucune réévaluation de contrat n'a été demandée par la
SEMERAP depuis sa création en 1975 jusqu'à ce jour en fonction des coûts salariaux.
Réponse du président du SIVOM de la HAUTE-DORDOGNE (Puy-de-Dôme)
Lors de l'élaboration du dossier de faisabilité de la station d'épuration de la Haute-
Dordogne, une large concertation s'est instaurée avec le Centre d'études techniques de
l'équipement, les services de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt, et
l'Agence de bassin Loire-Bretagne. L'évolution des caractéristiques techniques de cet ouvrage
n'a pas échappé aux participants, mais le problème se posait dans des termes différents.
La station d'épuration de la Haute-Dordogne est conçue comme le dernier maillon d'un
dispositif destiné à épurer les effluents des communes de La Bourboule, Le Mont-Dore et
Murat-le-Quaire, qui nécessitait au préalable la construction ou la réfection partielle d'un
collecteur intercommunal.
Depuis 1983, le SIVOM de la Haute-Dordogne a pris en charge chaque année une
tranche de travaux de réhabilitation de ce collecteur, et il est apparu assez rapidement que se
poserait au niveau du fonctionnement de la station d'épuration le problème des eaux parasites,
extrêmement abondantes dans notre région.
Une étude entreprise par le CETE a abouti dès 1986 à la prise en compte dans les
travaux des ouvrages destinés à éliminer la quantité la plus importante possible de ces eaux
parasites ( eaux de sources, eaux pluviales). Toutefois, les résultats n'ont pas été probants. Le
directeur de l'Agence de bassin Loire-Bretagne de l'époque a donc suggéré au syndicat de
réaliser le plus rapidement possible la station d'épuration afin qu'elle serve de "test" grandeur
nature, et que le résultat de son fonctionnement permette de déterminer les actions à
entreprendre de manière fiable pour améliorer le transfert des effluents et diminuer l'arrivée
d’eaux parasites.
Le schéma prospectif s'établissait donc ainsi :
- réhabilitation du collecteur intercommunal ;
- construction de la station d'épuration ;
- étude diagnostique en fonction des résultats constatés ;
- travaux complémentaires sur les réseaux destinés à éliminer l'excédent d’eaux
parasites ;
- réalisation de la 2e tranche de construction de la station pour mise en conformité avec
les normes européennes qui d'ailleurs, au moment de la construction de l'ouvrage, n'étaient pas
en vigueur.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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Nous nous situons donc aujourd'hui au niveau de la phase "étude diagnostique". La
station d'épuration fonctionnant depuis un an et demi, elle a permis d'observer une arrivée
d’eaux parasites dont le volume est supérieur à l'effluent proprement dit.
Une consultation a été engagée courant 1996 en vue de rechercher le bureau d'étude
qui va réaliser l'étude diagnostique sur l'année 1997 afin de pallier ces défauts sur l'ensemble
des réseaux communaux (La Bourboule, Le Mont-Dore, Murat-le-Quaire).
Il est en effet de bonne gestion d'entreprendre la construction du deuxième étage de la
station d'épuration destiné à compléter l'épuration physico-chimique dès l'instant où le premier
étage actuellement en service fonctionnera correctement.
Toutefois, je tiens à préciser que, dès le départ, l'étude technique du dossier de la
station incluait la réalisation de cette première phase tout en tenant compte de la nécessité d'y
adjoindre la deuxième. Si sur le fond la remarque que vous effectuez est bien exacte, un surcoût
étant obligatoirement nécessaire pour mettre aux normes la station, il me semble néanmoins
important de considérer qu'il s'agit à l'origine d'une volonté délibérée d'étaler le financement de
ce projet sur plusieurs années en raison des contraintes techniques, et non pas d'une négligence
qui aurait abouti à ne pas prendre en compte l'évolution future de la station.
Réponse du président du Syndicat intercommunal d’assainissement
de la VALLEE DE L'AUZON (Puy-de-Dôme)
Le projet d'insertion évoque le cas de notre syndicat pour illustrer, au chapitre relatif
aux effets d'une concurrence imparfaite, l'insuffisance de la mise en concurrence pour les
délégations de service public.
Je tiens à rappeler que les erreurs mentionnées dans ce projet d'insertion n'ont pu en
fait fausser le jeu de la concurrence :
- l'abandon dans le document remis aux candidats admis à présenter une offre, des
mentions ayant figuré dans la publicité de l'appel à candidatures concerne exclusivement la
faculté pour le délégataire de participer au financement de la mise aux normes européennes de
la station d'épuration et s'explique uniquement par la renonciation du syndicat à ce mode de
financement pour les travaux correspondants : de toute évidence, cette circonstance n'a pu
avoir aucun effet sur le jeu de la concurrence puisque, comme le prévoit la loi, les offres ont été
présentées et jugées sur la base non pas de l'avis d'appel à candidatures, mais du document
remis aux candidats admis à présenter une offre ;
- l'erreur sur les volumes facturés n'a été détectée qu'après la désignation du nouveau
délégataire, au cours de l'exécution de sa délégation de service public : les offres de tous les
candidats admis à présenter une offre (y compris celle du délégataire sortant) ont été
présentées et jugées sur la base, erronée mais figurant dans le document qui leur avait été
remis, des volumes facturés, soit 1 480 000 m3 ; les erreurs sur ce volume proviennent de deux
éléments :
- des erreurs techniques dans la prise en compte des consommations ;
- la non-prise en compte du volume des établissements Toury ; au moment de la mise au
point du dossier, l'autorité préfectorale avait intimé l'ordre à ces établissements de réaliser une
installation de dépollution autonome.
De ce fait, les offres étaient comparables et la sélection a été opérée dans des
conditions identiques sur la base des coûts d'exploitation sur lesquels la répartition en fonction
du volume vendu est sans effet (lorsque l'erreur a été découverte, elle a conduit notre syndicat à
diminuer mécaniquement le prix du mètre cube).
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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Il résulte de ce qui précède que, pour regrettables qu'elles soient, les erreurs signalées
par la Cour des comptes n'ont pas eu pour effet de restreindre l'égal accès des candidats à
l'octroi de la délégation, ni, d'une manière générale, de fausser le jeu de la concurrence.
Réponse du président du conseil régional de BRETAGNE
La région Bretagne soutient financièrement directement les programmes des communes
ou groupements de communes en matière d'investissement (stations d'épuration et réseaux dans
un certain nombre de secteurs prioritaires).
La convention Bretagne eau pure n° 2 fait état d'un programme estimatif global de 877
millions de francs.
Réponse du président du district de GUINGAMP (Côtes-d'Armor)
1. L'exposé du conflit
Le conflit ayant opposé durant le second semestre 1995 un collectif de consommateurs
à la Lyonnaise des Eaux repose sur un problème de qualité de l’eau. Le collectif a assigné la
Lyonnaise des Eaux devant le tribunal d'instance de notre ville, au motif qu'à certains moments
de l'année l’eau distribuée avait une concentration en nitrates supérieure à la norme de 50
mg/litre.
Il est vrai, et cela n'est pas contesté par quiconque, que les teneurs en nitrates
dépassent cette limite selon la fluctuation des concentrations sur une échelle de valeur de 40 à
45 mg/litre au minimum à 50 à 55 mg au maximum.
L'alimentation des eaux est assurée exclusivement par de l’eau superficielle.
Les installations affermées à la Lyonnaise ne sont pas dotées des équipements
permettant d'effectuer le traitement des nitrates. Il ne lui est donc pas matériellement possible
de délivrer une eau respectant la norme dont il s'agit.
Le coeur du conflit n'est pas là ; il repose sur la préoccupante dégradation de la
ressource tout au long de ces dix dernières années. Elle tient à nos pratiques agricoles :
développement de l'élevage intensif, de nouvelles productions végétales (le maïs), de la
performance économique pour répondre aux exigences des marchés... et pour que nos régions
survivent il ne faut pas l'oublier.
Elles posent aujourd'hui des questions de débat de fond et le conflit qui a été porté
devant le tribunal par le Collectif Eau Pure en est l'une des expressions.
2. La nature de la démarche
Le collectif en assignant la Lyonnaise a affiché clairement sa stratégie :
- s'attaquer à un grand groupe, gestionnaire de réseaux, et externalisant ainsi l'action
sur un plan plus général ;
- médiatiser le procès pour sensibiliser la population au thème de la reconquête de la
qualité de l’eau ;
- obliger l'Etat, en agissant sur un grand groupe disposant de moyens, à conduire une
politique environnementale.
Les coupures de presse ci-jointes en rendent compte.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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La problématique de l'action menée par le collectif ne se fonde pas sur une question
intrinsèquement de produit de consommation, mais bien sur la volonté de voir s'enclencher un
dispositif d'interventions publiques visant la reconquête de la qualité de l’eau.
Pour bien traduire son ambition d'oeuvrer dans cette voie le collectif a marqué sa
détermination en se plaçant délibérément sur ce terrain et en exprimant clairement son hostilité
à tout projet d'unité de dénitrification (usine de traitement).
La Lyonnaise des Eaux a suscité après le procès la création d'un club de
consommateurs. Cette démarche engagée auprès du collectif et de l'ensemble des abonnés n'a
pas rencontré un écho favorable.
Dans le cas d'espèce le différend a bien son épilogue judiciaire mais l'origine de la
cause est étrangère à la fois à l'exploitant du réseau et à la collectivité, en l'occurrence le
district. Les autorisations en matière d'élevage ne sont pas de leur ressort, pas plus que les
pratiques culturales.
Réponse du président de la Communauté urbaine de BREST (Finistère)
1. Redevance " Eaux pluviales"
Suite à la lettre d'observations de la chambre régionale des comptes de Bretagne du 30
mars 1992, la Communauté urbaine a tenu compte de ces observations dans une renégociation
en cours de contrat. La redevance a été ainsi ramenée à 6 593 637 F pour l'exercice 1993 et au-
delà.
2. Transferts entre budgets annexe et principal en 1987 et 1988
Le remboursement de cette avance au budget annexe par le budget principal a été
effectué au titre de l'année 1991.
Ceci a été noté par la chambre régionale dans sa lettre du 30 mars 1992.
3. Durée des contrats
Bien que sans calendrier initial, l'engagement de réalisation de 28 000 000 F de travaux
a été soldé en 1993.
Réponse du président du Syndicat intercommunal des eaux
du NORD du CAP-SIZUN
(Finistère)
Vous avez bien voulu me transmettre le projet de rapport concernant l'application de
pénalités de retard à sa société fermière par le Syndicat des eaux du Nord du Cap-Sizun.
L'assertion contenue dans ce rapport est pour le moins inexacte : en effet, vous trouverez,
ci-joint, le détail du calcul des pénalités qui ont été appliquées pour les exercices 1984 à 1990
conformément au contrat d'affermage.
Depuis cette date le fermier a respecté les dates de versement prévues au contrat :
- 1984 : 1 944,31 F ;
- 1985 : 20 630,01 F ;
- 1986 : 26 295,59 F ;
- 1987 : 18 830,20 F ;
- 1988 : 28 095,52 F ;
- 1989 : 16 789,72 F ;
- 1990 : 5 565,39 F ;
soit au total : 118 150,74 F de pénalités.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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Réponse du président du syndicat intercommunal de RIEC-SUR-BELON (Finistère)
Le rapport que la Cour des comptes se propose de publier et que vous m'avez transmis
appelle de ma part les observations suivantes qui avaient d'ailleurs déjà dû, pour la plupart,
être adressées à la chambre régionale des comptes.
Les observations concernant la programmation ne me paraissent en grande partie pas
justifiées.
Il convient d'abord de rappeler que le syndicat avait fait établir en 1990 un programme
pluriannuel de renouvellement et de renforcement de réseaux qui avait été examiné lors de la
réunion du 12 avril 1990. Le comité syndical avait conclu à la nécessité d'engager chaque
année un programme de travaux de l'ordre de 2 MF. C'est sur cette base qu'ont été établis les
programmes des années suivantes en prenant en compte divers critères tels que l'âge et l'état
des canalisations, la nature des matériaux, les prévisions d'augmentation des consommations
dans certains secteurs, les projets d'urbanisation, etc.
Ainsi qu'en attestent les comptes rendus des réunions du comité syndical, le programme
annuel de travaux est arrêté lors du vote du budget primitif, quand est connu le montant du
programme subventionné défini par le conseil général. C'est également d'une manière générale
lors de cette réunion qu'est décidé le mode de dévolution des travaux. L'observation de la Cour
des comptes selon laquelle "les délibérations fixant les programmes de travaux sont ainsi
systématiquement postérieures aux marchés publics" est à ma connaissance contraire à la
réalité.
Il arrive effectivement qu'en cours d'année le syndicat soit, malgré lui, contraint de
modifier le programme initial pour tenir compte par exemple de nouvelles demandes
d'alimentation en eau dans des zones constructibles dont il n'avait pas connaissance en début
d'année et surtout de la réalisation d'autres travaux dont il n'a pas la maîtrise et qui nécessitent
des modifications de réseaux ou des réalisations coordonnées. Ceci a été particulièrement vrai
à plusieurs reprises au cours des dernières années à cause de travaux réalisés sur le territoire
du syndicat par le conseil général sur des routes départementales dans l'emprise desquelles se
trouvent des canalisations d’eau potable ou par EDF qui a engagé un programme important
d'enterrement de réseaux électriques, ces deux organismes n'ayant informé le syndicat qu'au
dernier moment de la date de réalisation de leurs travaux (voir la délibération n° 268/92 du 18
décembre 1992 qui me paraît très explicite à cet égard).
Contrairement à ce que laisse entendre la Cour des comptes, ces modifications n'ont
pas engendré de surcoûts dans la mesure où il s'agit dans la plupart des cas de travaux de
renouvellement ou de renforcement anticipés qui ont été traités sur la base des prix du marché
en cours, même quand il s'agissait de travaux de faible importance.
C'est également dans un souci d'économie et pour éviter plusieurs interventions
successives au même endroit, que le syndicat a décidé d'accompagner les travaux d'EDF,
chaque fois qu'un besoin de renouvellement de canalisations figurait dans le programme
pluriannuel de 1990 afin de pouvoir poser en tranchée commune les canalisations d’eau
potable et les câbles électriques.
On peut donc penser que c'est au contraire l'absence de coordination dans la
réalisation de ces travaux qui aurait pu être reprochée au syndicat.
La non-mise à jour des plans soulignée par la Cour des comptes n'est qu'apparente ;
elle est due au fait que les dates de mise à jour n'ont pas toujours été portées sur les plans mais
il me semble que l'essentiel est que les plans de réseaux concernés par les différents
programmes de travaux correspondent bien à la réalité.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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S'agissant de la concurrence, la Cour des comptes semble reprocher la consultation et
la présence du fermier aux réunions du comité syndical. Il convient de rappeler que
conformément aux articles 26 et 63 du contrat d'affermage, la société fermière doit formuler des
propositions en matière de travaux et être consultée sur la programmation. Etant chargée de
l'exploitation des installations, elle est la mieux placée pour en connaître l'état et il est
indispensable qu'elle fasse part des problèmes rencontrés. Il va de soi que c'est ensuite au
comité syndical avec le concours du maître d'oeuvre de décider de la suite à donner aux
propositions qui lui ont été présentées. D'autre part, les réunions du comité syndical sont
publiques et par conséquent toute personne peut avoir connaissance de la nature et de
l'estimation financière des travaux dont il s'agit : ces informations étant d'ailleurs souvent
reprises par la presse.
L'observation concernant la participation du fermier au financement des travaux de
l'usine de traitement d’eau résulte semble-t-il d'une mauvaise interprétation de la notion de
participation au renouvellement des ouvrages.
Il convient de rappeler que le montant de la participation du fermier au titre du
renouvellement avait été estimé par le maître d'oeuvre à 550 000 francs au stade de l'étude de
l'avant-projet, c'est- à-dire avant la dévolution des travaux. Cette estimation avait été faite
conformément aux dispositions de l'article 26 du contrat d'affermage qui précise que "lorsque
les travaux constituent à la fois un remplacement des ouvrages et un renouvellement de ceux-ci
à la charge du fermier, la part du coût correspondant à un renouvellement de l'ouvrage à
l'identique est à la charge du fermier, déduction faite éventuellement de la valeur d'usage
résiduelle dudit ouvrage". Cette rédaction est d'ailleurs conforme en tous points au cahier des
charges type annexé au décret du 17 mars 1980 qui était applicable au moment de la signature
du contrat d'affermage.
Dès lors que le contrat d'affermage met à sa charge le renouvellement des équipements
électromécaniques, le fermier aurait donc été dans l'obligation de verser cette participation
quelle que soit l'entreprise chargée des travaux. Il faut ajouter que le montant de cette
participation a dans un premier temps été fortement contesté par le fermier qui remettait en
cause la méthode de calcul utilisée par le maître d'oeuvre et qu'en réalité il lui a été imposé. Il
est donc inexact d'affirmer qu'elle lui a permis de se placer en situation favorable.
Réponse du président du Syndicat intercommunal des eaux
de BEAUFORT
(Ille-et-Vilaine)
Vous indiquez dans l'extrait du projet de votre rapport s'intitulant "des abus dans les
charges de personnel" et figurant dans un paragraphe plus général relatif à "des contrôles
souvent négligés", que le délégataire, la CEO, a financé des installations de télégestion et s'est
procuré un bénéfice provenant des économies de personnel induites par cet équipement. Vous
en déduisez que le Syndicat des eaux de Beaufort n'a pas suffisamment contrôlé l'opération en
question et aurait dû soit contester la prolongation du contrat soit exiger une diminution du prix
de l’eau.
Permettez-moi, de vous indiquer en quelques mots l'objectif poursuivi dans la mise en
place de la télégestion des installations de production et de distribution publique d’eau potable.
Notre syndicat l'a vivement souhaité afin d'améliorer la qualité du service rendu à nos abonnés.
Pour illustrer mon propos, je me limiterai à un seul exemple : les niveaux d’eau dans
les réservoirs ; ils étaient contrôlés auparavant à l'occasion des divers déplacements des agents
du délégataire. Ainsi, lorsqu'une anomalie se produisait elle n'était pas constatée
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
121
immédiatement et il en résultait des conséquences importantes pour nos abonnés (manque de
pression ...). La télégestion de l'ensemble du système permet au délégataire d'être averti
immédiatement d'un incident et d'intervenir dans les plus brefs délais pour rétablir le
fonctionnement normal du service public de l’eau potable.
Il convient de préciser que la télégestion de ces installations n'apporte aucune
économie de gestion. En réalité, ce changement se traduit par des charges nouvelles :
- l'amortissement de l'investissement pour moitié ;
- la mise à disposition d'un local par la CEO (immobilisation) avec climatisation ;
- la maintenance de la totalité du matériel avec un personnel de haute technicité.
Le matériel installé est un matériel informatique de haute technologie, renouvelé et
amélioré en permanence aux frais de la CEO : changement de carte, échange standard de
pièces,...
Concernant les satellites placés sur les différentes installations du Syndicat (réservoirs,
compteurs de fuites,...), il s'agit d'un matériel fragile très sensible aux orages. Après chaque
orage, les agents de la CEO doivent contrôler chacun de ces satellites (18 au total pour le seul
Syndicat de Beaufort) et remplacer les cartes détériorées (4 000 F minimum pour une simple
carte, coût pouvant atteindre 20 000 F si la réparation s'étend à d'autres accessoires) ;
- l'analyse en continu par interrogations cycliques, des données de production et du
réseau, et traitement des informations par un personnel qualifié ;
- l'analyse en continu par interrogations cycliques, de plusieurs paramètres relatifs à la
qualité de l’eau, et traitement des informations par un chimiste ;
- la remise périodique de comptes rendus à la collectivité ;
- les frais d'appel des postes satellites vers le poste central lors de l'apparition de
défauts ;
- les redevances France Télécom des lignes spécialisées.
A titre indicatif, les redevances payées à France Télécom en 1995 par la CEO,
interrogée, se sont élevées à 120 000 F ;
- l'énergie électrique nécessaire au fonctionnement de l'ensemble de ces équipements.
- et surtout les interventions plus nombreuses la nuit et les week- ends, les interventions
des chimistes, les réparations immédiates de fuites, les remplacements des cartes sur satellites
après chaque orage (frais de personnel et de déplacements kilométriques). Chaque intervention
exige deux heures au minimum avec deux personnes la nuit pour des raisons de sécurité.
Dans ces conditions, notre syndicat n'a pas jugé utile d'engager une réflexion dont
l'objet aurait été les deux orientations que vous suggérez :
- Une diminution du prix de l’eau ne peut se justifier dans la mesure où la télégestion
n'a pas pour effet de baisser les charges d'exploitation du délégataire.
- Concernant la contestation de la prolongation du contrat, je tiens à vous signaler que
le cahier des charges conclu avec la CEO prévoit dans son article 29 une reconduction de droit
de la durée du contrat par période de six ans sauf dénonciation par l'une des parties deux ans
au moins avant l'expiration du bail.
Cette clause contractuelle s'applique sans qu'il soit nécessaire que la CEO finance un
quelconque investissement.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
122
Le comité syndical a entériné le dispositif contractuel contenu dans l'article 29 du
contrat cité ci-dessus en s'appuyant sur le fait que la CEO amortisse sa participation au
financement de la télégestion puisque le prix de l’eau n'a pas été modifié.
Je me permets de vous indiquer que le tribunal administratif de Pau dans un jugement
rendu le 17 novembre 1991 - SIAEP du Pays de la Soule - a dans son cas similaire au nôtre
reconnu qu'une collectivité confie à son fermier la réalisation d'un dispositif de télétransmission
moyennant la prolongation du contrat d'affermage.
Réponse du maire de DINARD (Ille-et-Vilaine)
"Maîtrise imparfaite des investissements"
"Des solutions techniques mal adaptées".
C'est au début de l'année 1987 que la commune de Dinard a contacté un bureau
d'études en vue de l'attribution d'un marché d'ingénierie avec pour mission d'établir un APS.
Pour ce marché, il a été fait référence aux articles 313 et 314 bis du code des marchés
publics dans sa rédaction issue de l'édition n° 20010 de 1984.
Le recours à la procédure sans mise en concurrence pouvait encore se justifier au
regard des dispositions de l'article 312 bis en raison des investissements réalisés par ce bureau
d'études depuis de nombreuses années dans le cadre de son assistance à la commune.
Il faut donc se reporter à l'époque de la passation du marché, et faire également
référence aux caractéristiques de ce marché, pour vérifier qu'il n'y avait pas lieu de mettre en
concurrence.
Il y a eu un surcoût de travaux de l'ordre de 15 %, ce qui ne remet cependant pas en
cause l'économie des marchés et pouvait donc intervenir dans le cadre d'un avenant (possibilité
confirmée à la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993).
Un écart de 15 % est loin d'être exceptionnel...
On relèvera que tant sur la procédure de passation que sur le contenu du marché,
l'administration d'Etat n'a émis aucune contestation à l'époque.
L'utilisation de ce barrage se trouve effectivement compromise aujourd'hui en raison de
la dégradation de la qualité des eaux recueillies.
Ce problème dépasse très largement le cadre de ce projet et en tout cas ne pouvait être
connu, ni pris en considération au départ.
Aujourd'hui, une usine de traitement des eaux est nécessaire. La collectivité territoriale
(et en particulier les usagers de la ville de Dinard...) paie les conséquences d'imprévisions et de
politique qui ne sont ni de son fait, ni de ses compétences.
"Les aspects financiers de la délégation"
"Les hausses de prix accompagnant la délégation."
L'augmentation des tarifs décidée par délibération du conseil municipal de Dinard à
l'occasion du budget primitif au mois de mars 1990 est intervenue alors que le service était
exploité en régie et s'imposait en raison d'une mauvaise gestion comportant de nombreux
retards dans la facturation, et de l'obsolescence des équipements.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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A l'époque de cette délibération, et contrairement à ce qu'a pu considérer la chambre
régionale des comptes, aucune négociation n'était menée avec le futur fermier, ces négociations
n'ayant débuté qu'au mois de juillet 1990.
En mars 1990, le service étant exploité par la commune, les retards et la mauvaise
gestion imposaient une augmentation sensible des tarifs.
Il n'y a ici aucune relation particulière avec la délégation de service.
"Les effets d'une concurrence imparfaite"
"Des partenaires peu nombreux et stables."
"Des contrats de délégation de longue durée."
La pérennisation des relations contractuelles d'affermage est l'héritage du passé... mais
également le constat d'une exploitation qui a priori donne satisfaction.
A une époque, qui n'est pas si lointaine, on considérait que c'était là au contraire le
gage d'une bonne relation contractuelle et d'une "responsabilisation et coordination" entre la
personne publique et la société fermière.
En la matière, il n'est nullement certain que "mise en concurrence" rime avec qualité et
intérêt du service. Il faut y prendre garde et il est peut-être préférable d'imposer des
améliorations du service rendu dans le cadre d'un contrat existant que d'avoir recours
systématiquement à une mise en concurrence.
"Manque d'information des collectivités et des usagers."
"Une information souvent déficiente."
Comme il a été ci-dessus indiqué, les relations entre la commune et la société fermière
sont basées, fort heureusement, sur la confiance.
En outre, il n'est pas toujours aisé pour une commune, ne disposant pas forcément de
moyens importants, d'assurer le suivi de tous les engagements contractuels l'intéressant.
C'est sans doute conscient de cette difficulté que le législateur a imposé, par la loi du 8
février 1995... seulement, la production systématique de ces informations à la charge du
fermier.
Quant à la ville de Dinard, elle a procédé à la refonte de la convention d'affermage sur
ce point après avoir par ailleurs constaté que les chiffres produits par la société fermière
montrent la bonne santé de ce service à la satisfaction générale.
Réponse du maire de SAINT-MALO (Ille-et-Vilaine)
Les remarques de la Cour des comptes appellent de ma part les réponses suivantes :
1. Le contournement des règles de concurrence
Le Conseil d'Etat dans son arrêt "Syndicat du bocage" du 6 mai 1991 dit qu'aucune
disposition de nature législative ou réglementaire ne s'oppose à ce qu'une collectivité concède à
son fermier la réalisation et l'exploitation de son réseau et que c'est à tort que le tribunal
administratif avait annulé l'avenant, qui confiait cette mission au fermier, au motif que les
dispositions du code des marchés publics n'avaient pas été respectées.
2. Perte du bénéfice des améliorations techniques - Révision des prix
2.1. Révision des prix
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
124
Le cahier des charges prévoit la révision des prix et de la formule de variation pour les
travaux neuf et d'entretien, dans huit cas précis et, en tout état de cause, tous les cinq ans (art.
40).
L'avenant n° 2 du 21 décembre 1991 au contrat d'affermage est la dernière
actualisation du bordereau.
2.2. Améliorations techniques - Niveaux des prix
Si les travaux de reprises de branchements, les raccordements de réseaux, le fonds
spécial de renouvellement sont attribués à titre exclusif au fermier, les travaux d'extension de
réseaux sont mis en concurrence dans la forme d'un marché à bons de commande triennal.
Le marché en cours a été rendu exécutoire le 23 février 1994.
Cette méthode permet de suivre l'évolution réelle des prix du marché et l'évolution des
techniques.
Ces éléments servent ainsi à mettre à jour le bordereau des prix du cahier des charges.
Réponse du maire de LORIENT (Morbihan)
Les observations intéressant Lorient, que vous vous proposez d'intégrer à un prochain
rapport sur la gestion des services publics d’eau et d’assainissement, appellent de ma part
quelques précisions.
Il convient tout d'abord de rappeler que c'est en 1989 que la ville de Lorient a affermé
son service d’assainissement. La pratique des droits d'entrée faisait partie intégrante des
conditions de la concurrence à cette époque, bien antérieure aux jurisprudences de 1993- 1994
et à la loi de 1995 décidant finalement de les proscrire.
Ces droits d'entrée ont permis d'autofinancer le budget d'investissement de la ville sans
augmenter pour autant la tarification pour l'usager de l’assainissement.
Vous annoncez qu'ils ne coûtent rien au délégataire, ces 30 MF étant compensés par
une économie de 55,2 MF qu'il réalise au titre des annuités en fin d'affermage.
Or, si l'ont peut convenir que 55,2 MF représentent à peu près la somme des annuités
qu'aurait représenté un emprunt de 30 MF sur quinze ans au taux de l'époque (soit 9 % par an),
il faut bien noter que cette marge ne se présente qu'au bout de huit à dix ans (durée résiduelle
moyenne de l'encours en 1989).
Les deux sommes ne peuvent donc se compenser, le portage de 30 MF sur huit à dix ans
n'étant pas pour sa part financièrement gratuit : il coûte au délégataire le manque à gagner
d'un placement normal de ces mêmes sommes sur la même période au taux d'époque, ce qui est
considérable.
Le délégataire doit donc bien, au-delà de l'économie virtuelle des chutes d'annuités,
compter sur ses objectifs de gains de productivité et ses espoirs de quantités facturées pour
atteindre, à son risque, une économie générale équilibrée de cet affermage.
Il ne me semble donc pas juste d'affirmer que les droits d'entrée ne coûtent rien au
délégataire.
Quant à notre formule de révision de prix, elle apparaît effectivement insuffisamment
adaptée au contenu du contrat, ce qui présenterait un risque de disproportion en cas d'évolution
importante de ses différents paramètres.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
125
Ceci étant, force est de constater que la redevance n'a progressé que de 13,8 %, en
passant de 3,25 F par mètre cube en 1989 à 3,70 F par mètre cube en 1995, sur une période où
l'inflation a été de 16,6 %.
Loin d'un caractère abusif ou d'une augmentation injustifiée des marges du délégataire,
cette formule a donc pour l'instant conduit à une baisse du prix en francs constants.
Enfin pour être complet, il faut indiquer que les consommations facturées par
l'exploitant ont pour leur part baissé de 13,7 % sur la même période, passant de 3,785 Mm3 en
1989 à 3,267 Mm3 en 1994, baisse qui n'a donc pas été compensée par le mécanisme
d'indexation de la redevance qui comme on l'a vu n'a pas même suivi l'inflation.
En conclusion, je crois que si notre contrat contient certes des éléments, virtuellement
ou au moins potentiellement favorables à notre cocontractant, le souci légitime que peut avoir
la juridiction financière de les mettre en exergue ne doit pas conduire à en exagérer la portée.
Le contrat s'apprécie dans son économie générale et à la lumière des faits, et sur ces
plans je ne vois pas que l'affermage du service public d’assainissement de la ville de Lorient ait
été anormalement favorable à la société exploitante.
CENTRE
Réponse du président du Syndicat intercommunal d'adduction d’eau de LEVET (Cher)
Vous m'avez adressé les extraits du projet de rapport que se propose de publier votre
juridiction sur "la gestion des services publics locaux d’eau et d’assainissement ", mettant en
cause le Syndicat intercommunal d'adduction d’eau de Levet.
Ces extraits sont tirés d'un paragraphe de ce projet de rapport qui est consacré aux
difficultés de mise en oeuvre de la loi du 29 janvier 1993 et sorti d'un chapitre traitant des effets
d'une concurrence imparfaite : le renouvellement avec la Compagnie générale des eaux de
notre traité pour l'exploitation par affermage du service syndical de distribution d’eau potable y
est présenté comme un abus relevant, selon votre juridiction, de la liste des nombreux excès qui,
à ses yeux, ont pu être constatés dans la période qui a précédé l'entrée en vigueur de la loi
précitée.
Ces extraits appellent une série d'observations de ma part, en ma qualité de président
du Syndicat intercommunal d'adduction d’eau de Levet.
Je ne conteste en aucune manière l'appréciation générale portée par votre juridiction
tant sur les apports de la loi du 29 janvier 1993 que sur les conditions dans lesquelles celle-ci a
été mise en oeuvre. Mais je ne peux admettre que, du seul fait d'un rapprochement de dates, le
cas particulier de notre syndicat soit retenu pour illustrer les abus que votre juridiction
constate et dénonce.
Les circonstances, précises mais non reprises dans le projet de rapport, dans lesquelles
le traité pour l'exploitation par affermage du service syndical de distribution d’eau potable a
été renouvelé, justifient la décision prise sans lui donner, pour autant, un caractère abusif.
Je tiens tout d'abord à noter que la régularité formelle de ce renouvellement n'est pas
contestable ni d'ailleurs contestée au regard de la loi du 29 janvier 1993 : je rappelle, en effet,
que son article 47 prévoit qu'elle ne s'applique qu'aux conventions dont la signature est
intervenue à compter du 31 mars 1993, c'est-à-dire postérieurement à celle du traité pour
l'exploitation par affermage du service syndical de distribution d’eau potable.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
126
Je tiens ensuite et surtout à rappeler :
- que le traité en cours venait à expiration le 31 décembre 1992 ;
- que son renouvellement a été envisagé dès le début de l'année 1992 et a fait l'objet de
négociations au cours de cette année 1992 ;
- que ces négociations, menées sur la base de propositions faites dès le début de l'été
1992 par le fermier sortant pressenti, n'ont pu aboutir avant le printemps 1993 en raison des
difficultés relatives aux conditions d'approvisionnement en eau ;
- que les discussions sur ce projet ont été engagées non seulement dès avant la
publication de la loi du 29 janvier 1993 mais encore bien avant le dépôt du projet de loi
correspondant.
Il résulte de ce qui précède que l'époque de ce renouvellement s'explique non par une
décision arbitraire et inutile mais par la longueur et la complexité, réelles et dues à certains
aspects administratifs et techniques de la négociation, de la mise au point du traité dont la
signature s'est placée dans le strict respect de la légalité.
Dans ces conditions, il ne me paraît pas évident ni souhaitable de considérer comme
abusif le cas du renouvellement, avec la CGE, du traité pour l'exploitation par affermage de
notre collectivité locale de production et distribution d’eau potable.
Réponse du maire de SAINT-AMAND-MONTROND (Cher)
La Cour relève que la compagnie fermière n'aurait pas respecté les termes des articles
78 et 82 du traité d'affermage qui imposent la communication du document financier à la ville
de Saint-Amand-Montrond.
Sur ce point, la collectivité ne peut que souligner, comme l'a d'ailleurs relevé la
chambre régionale des comptes, la demande de communication systématique du document
susvisé. A cet égard, la Compagnie générale des eaux l'avait transmis pour l'exercice 1994.
A l'avenir, le contrôle sera exercé plus strictement dans le cadre des nouvelles
dispositions de la loi n° 95-127 du 8 février 1995. L'apport de ce texte et le recrutement d'un
responsable juridique au sein de l'équipe de gestion de la ville renforceront le contrôle des
satellites de la collectivité.
Réponse du maire d'ISSOUDUN (Indre)
"Le manque d'information des collectivités et des usagers"
Le compte rendu des statistiques pour les exercices 1992, 1993 et 1994 est identique et
voulait par souci de lisibilité regrouper les informations techniques et financières.
Les paramètres absents et relevés par l'observateur des comptes rendus 1992, 1993 et
1994 concernaient :
- les inventaires.
Du fait de la maîtrise de ses investissements, la commune les connaît parfaitement.
Dans les comptes rendus, le fermier indiquait les investissements directement réalisés par lui-
même, à savoir "les branchements neufs".
- volume maximal journalier/volumes prélevés.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
127
Si ces deux points sont absents, les informations transmises par la perception du service
(évolution et insuffisance), vont bien au-delà du contenu prévu.
- effectif du service.
Le fermier a répondu qu'il assurait la gestion de 34 contrats à partir de l'exploitation de
Châteauroux, dont 19 depuis Issoudun et que son organisation ne permettait pas d'affecter
individuellement des agents aux différents services.
- nombre de jours (heures) d'arrêt des installations d’eaux usées.
Ces informations font l'objet d'une procédure particulière pour la communication à la
commune, la police de l’eau et les fédérations de pêche.
- dépenses et exploitations.
La comptabilité du fermier ne permettait pas d'individualiser les dépenses par contrat,
depuis 1995 des clefs de répartition ont été produites.
Il faut comparer les informations contenues dans les articles 75 et 82 du contrat
d’assainissement ou 81 et 82 du contrat d’eau au regard du décret 95-635 du 6 mai 1995 qui
est venu préciser le contenu des rapports annuels sur le prix et la qualité des services publics de
l’eau et de l’assainissement.
Dans ce décret, des informations du contrat, comme le volume maximal journalier, les
effectifs du service et le nombre de jours et d'heures d'arrêt des différentes installations, ne sont
pas mentionnées.
Il conviendra d'harmoniser les termes du contrat antérieur à la loi du 2 février 1995
afin qu'aucune ambiguïté ne puisse subsister dans les comptes rendus soit à cause d'éléments
incomplets, soit à cause d'éléments superfétatoires.
Réponse du maire de JOUE-LES-TOURS (Indre-et-Loire)
Conseiller municipal de l'opposition pendant la période servant de base à votre
rapport, j'avais moi-même dénoncé les abus dont vous faites état dans le cadre de la mise en
concession du service de l’eau.
Cependant, si, effectivement, le prix de l’eau a sensiblement augmenté à Joué-lès-Tours,
c'est aussi parce que la ville est la seule de l'agglomération à avoir anticipé ses besoins en
réalisant
la
station
de
pompage
et
de
traitement
de
Saint-Sauveur.
Ce
choix
d'approvisionnement, qui certes, représente un investissement important, tenait compte de la
nécessité de diversifier les sources d'alimentation mais aussi de préserver le Cénomanien.
Ces investissements sont donc nécessaires, mais il appartient effectivement, aux élus,
dans l'intérêt des usagers, d'être particulièrement vigilants vis-à-vis de leur concessionnaire.
L'obligation nouvelle faite à ces derniers de présenter un rapport annuel à la collectivité
constitue à ce titre un moyen d'y parvenir. Le conseil municipal, qui vient d'examiner le rapport
annuel de la CFSP lors de sa séance du 26 septembre 1996, a demandé au concessionnaire de
baisser le prix du mètre cube de 0,50 franc.
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128
Réponse du président du Syndicat intercommunal des eaux de SAINT-SYMPHORIEN,
SAINT-CYR-SUR-LOIRE, SAINTE-RADEGONDE
(Indre-et-Loire)
Les excédents mentionnés par la Cour ne correspondent pas aux résultats nets des
exercices 1992 et 1993. Ils sont constitués, pour l'essentiel, de la reprise d'excédents antérieurs,
ayant deux origines principales :
1° Le report d'opérations d'investissement importantes
- équipement d'un forage au cénomanien (forage réalisé en 1993) reporté en l'absence
de l'autorisation d'exploitation qui doit être délivrée par la préfecture ;
- construction d'un nouveau réservoir enterré différée en raison du report d'un grand
projet d'aménagement (implantation d'un centre international de logistique et de transports).
Ces deux investissements doivent être réalisés à court terme (1996 pour l'équipement du
forage et 1997 pour le réservoir).
2° Une facturation supplémentaire en 1991
En 1991, il a été décidé par le comité du syndicat d'effectuer un "rattrapage" de
facturation pour les abonnés de Saint-Symphorien. Auparavant, ces usagers recevaient leur
facture plus de six mois après la relève du compteur. Ce délai était imposé par l'ancien système
de facturation.
En avril 1991, la facture adressée aux abonnés de ce quartier concernait douze mois de
consommation (au lieu de six habituellement).
D'une manière générale, le syndicat intercommunal des eaux a opté pour
l'autofinancement de ses opérations d'investissement. Ainsi, aucun emprunt n'a été contracté
depuis plus de 6 ans malgré la réalisation de plusieurs programmes importants.
Parallèlement, le tableau ci-dessous montre que les augmentations du prix de l’eau ont
été très modérées depuis 1990. En 1996, le comité a décidé une augmentation du prix de l’eau
de 1,87 % et le gel de la prime fixe (abonnement au service). Celui-ci est de 70 F par semestre.
Evolution du prix de l’eau de 1990 à 1995
TAUX D'AUGMENTATION
PRIX DU METRE CUBE
:
1990
:
3,87 %
:
3,22 F
:
:
1991
:
4,04 %
:
3,35 F
:
:
1992
:
3,88 %
:
3,48 F
:
:
1993
:
2,87 %
:
3,58 F
:
:
1994
:
2,51 %
:
3,67 F
:
:
1995
:
2,18 %
:
3,75 F
:
L'évolution du prix d'un mètre cube d’eau de 1990 à 1996 est de 0,53 F (3,22 F HT au
1er janvier 1990 ; 3,75 F HT au 1er janvier 1996).
Il serait intéressant de comparer cette progression avec celles d'autres services d’eau
(privatisés ou non).
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
129
Réponse du maire de ROMORANTIN-LANTHENAY (Loir-et-Cher)
En ce qui concerne l'imprécision des comptes rendus annuels, je me dois de préciser
que l'observation figurant au présent dans votre rapport a trait à un contrôle effectué par la
chambre régionale des comptes durant l'année 1994 et donc antérieure à la loi du 2 février
1995 qui a introduit l'obligation pour le maire de présenter chaque année à son conseil
municipal un rapport détaillé sur le prix et la qualité des services publics de l’eau et de
l’assainissement. Il est pour le moins surprenant de voir reprocher au maire, malgré son désir
d'information, de n'avoir pu éclairer son conseil municipal faute de disposer d'informations de
son fermier, informations que ce dernier est maintenant tenu de communiquer par la loi de
1995. Le reproche devrait plutôt s'adresser au Gouvernement et aux législateurs qui n'ont pas
prévu plus tôt une telle obligation.
En effet dans le cas précis de notre ville, les contrats ont été passés en tous points
conformément au cahier des charges normatif imposé par l'Etat avant qu'il ne devienne de
simple modèle. Il faut d'ailleurs remarquer que la chambre régionale des comptes du Centre,
dans sa lettre d'observations définitives du 22 février 1995, mentionne que la ville a exigé la
production des comptes rendus technique et financier de son fermier. Cette lettre ne fait en
aucune façon l'observation que le contrôle exercé par la commune sur le délégataire de service
public aurait été défaillant. Enfin, la ville a confié pour le service de l’eau une mission de
contrôle à la direction départementale de l'équipement dans les domaines administratif,
financier et technique.
ILE-DE-FRANCE
Réponse du président du conseil régional d'ILE-DE-FRANCE
Le contrat de cinq ans 1992/1996 entre la région Ile-de-France et l'Agence de l’eau
Seine-Normandie a pour objet d'harmoniser, au niveau financier et technique, les politiques des
deux organismes en matière de collecte et de traitement des eaux usées, domestiques et
pluviales. Pendant la durée du contrat, l'Agence de l’eau s'est engagée à accorder aux maîtres
d'ouvrage publics un montant global de subventions de 4 milliards de francs, alors que la
région d'Ile-de-France s'est engagée à accorder un montant global de subventions de 2
milliards de francs, sous réserve du vote des crédits dans le cadre de ses budgets annuels. Le
bilan 1992/1996 de ce programme montre que la région Ile-de-France a engagé 1 902 millions
de francs sur la part lui revenant.
Réponse du président du SYNDICAT DES EAUX D'ILE-DE-FRANCE
I. - "L'INTERCONNEXION NECESSAIRE DES RESEAUX"
Pour apprécier à sa juste mesure le coût de la liaison Marne/Seine, il convient de
replacer cette opération dans son double contexte, historique et environnemental.
Cette interconnexion a été décidée à la veille de la mise en service de la centrale
nucléaire de Nogent-sur-Seine, située en amont de la prise d’eau de l'usine de Choisy-le-Roi,
qui alimente une population d'un million et demi d'habitants de la proche banlieue parisienne.
Conçu dans un objectif de sécurité, cet ouvrage doit permettre le secours de ce secteur
par l'usine de Neuilly-sur-Marne et inversement, en cas de pollution particulièrement grave
nécessitant l'arrêt total d'une usine, ou de pollution nucléaire de la Seine, circonstance que ne
pouvaient totalement exclure les responsables du service public de l’eau potable.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
130
Cette opération a nécessité la pose d'une canalisation de 1 250 millimètres de diamètre,
sur une longueur de 20 kilomètres, en zone très fortement urbanisée, ce qui en explique le coût ;
elle constitue toujours à l'heure actuelle le seul dispositif de secours opérationnel de cette
ampleur en Ile-de-France, et pour lequel seule l'Agence de l’eau Seine-Normandie avait
accepté d'apporter son concours financier.
II. - "LES EFFETS D'UNE CONCURRENCE IMPARFAITE"
"Des partenaires peu nombreux et stables"
La permanence du partenariat conclu avec la Compagnie générale des eaux s'explique
en partie par l'histoire. Cette entreprise privée, créée en 1852, plus de trente ans avant
l'institution communale elle- même, avait été depuis l'origine le partenaire naturel de la plupart
des communes syndiquées, dans le cadre de concessions individuelles.
Cette permanence a d'ailleurs largement contribué à garantir un service de "qualité
d'exécution incontestable", reconnue par la Cour elle-même.
Ce régime s'est pérennisé jusqu'en 1949, date à laquelle, et sous l'impulsion de M.
Théodore Tissier, vice-président du Conseil d'Etat et ancien président du syndicat, la
collectivité publique lui préféra le régime de la régie intéressée.
Il convient également de rappeler que la loi imposant la mise en concurrence au terme
d'un contrat ne date que de janvier 1993. Dans le cadre de l'actuel contrat de délégation de
service public, le syndicat procède tous les cinq ans, par voie d'avenant, à ses adaptations en
fonction de l'évolution de la réglementation et de l'environnement économique.
"Des contrôles souvent négligés"
La Cour relève également, que depuis de nombreuses années la partie fixe de la formule
du prix de l’eau se situe à un niveau anormalement bas de 4 %, alors que les investissements
effectués par le syndicat devraient accroître la productivité du service.
Des gains de productivité ont effectivement été réalisés, en particulier par l'important
développement de l'informatique. En revanche, la plupart des investissements lourds mis en
service ces dernières années, et tout particulièrement en matière de sécurité des
approvisionnements et de qualité de l’eau, ont accru les charges d'exploitation. L'évolution du
coefficient d'actualisation du prix de l’eau, de 1986 à 1993, démontre une bonne adaptation de
la formule aux conditions économiques.
III. - "L'OBJECTIF DE QUALITE"
Bien que le syndicat n'exerce aucune compétence en matière d’assainissement, puisqu'il
a pour unique objet la production et la distribution d’eau potable, la facture d’eau regroupe au
titre du "guichet unique", non seulement le prix de l’eau proprement dit, mais aussi un ensemble
de taxes et de redevances (notamment pour l’assainissement ), qui s'imposent au syndicat, ne
transitent pas par ses comptes et sont perçues pour le seul bénéfice d'organismes extérieurs.
La part syndicale proprement dite a connu entre 1986 et 1993 une augmentation
moyenne annuelle de 3,4 %, intégrant une majoration exceptionnelle limitée à 30 centimes,
nécessitée en 1990 par le traitement des pesticides, en application du décret 89-3 du 3 janvier
1989, lui-même pris en application de la directive 80-778/CEE du 15 juillet 1980.
Hors cette majoration exceptionnelle, cette évolution n'aurait été que de 2,7 %.
Au cours de la même période, les taxes et redevances ont progressé de leur côté en
moyenne de 10,7 % par an.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
131
En 1994 par exemple, le prix de l’eau a représenté en moyenne, pour une
consommation de 120 mètres cubes, 8,36 F/m3 et les taxes et redevances 9,57 F/mètre cube soit
plus de 53 %. Cet écart s'est accru très sensiblement en 1995 et 1996.
Réponse du président du Syndicat interdépartemental pour l’assainissement de
l'AGGLOMERATION PARISIENNE
1. "L'égalité entre usagers domestiques et usagers industriels"
En matière de redevances dues par les usagers, la Cour observe que les dispositions
appliquées aux usagers non domestiques peuvent avantager ces derniers au détriment des
abonnés domestiques.
La principale source de disparité est le "coefficient de dégressivité" qui est appliqué
dans le calcul des redevances, en fonction du volume d’eau consommé annuellement. Le SIAAP,
comme semble- t-il la plupart des services d’assainissement, a jusqu'ici appliqué dans ce
domaine les dispositions de la circulaire n° 78-545 du 12 décembre 1978, qui concerne les
modalités d'application du décret n° 67-945 du 24 octobre 1967. Dès lors que ces dispositions
ne s'imposeraient plus à lui, et considérant que les coûts unitaires d'épuration ne sont pas
affectés par les volumes mais uniquement par la charge des effluents rejetés par les
établissements industriels, le SIAAP modifierait le mode de calcul des redevances dues par ces
établissements, de façon à mieux assurer l'égalité voulue entre usagers domestiques et usagers
industriels.
En ce qui concerne l'assujettissement à la redevance d'usagers du service
d’assainissement qui prélèvent l’eau directement dans le milieu naturel, les conventions passées
avec les distributeurs d’eau qui ne comportaient pas l'obligation de rechercher ces usagers sur
le territoire desservi en vue de percevoir la redevance ont été ou seront prochainement
complétées. L'ampleur du manque à gagner résultant de l'absence de cette disposition paraît
toutefois limitée.
2. "L'excessive dispersion de l'organisation locale"
Si le poids des investissements est élevé, comme le fait ressortir le montant du projet de
l'usine d'épuration "Seine centre" que le SIAAP construit à Colombes, il convient d'observer
que l'organisation interdépartementale a précisément permis aux usagers de bénéficier de l'effet
de taille, et de coûts du service d’assainissement plus avantageux. Pour pallier les
inconvénients du découpage des responsabilités dans l'agglomération parisienne entre la
collecte des eaux usées, qui est normalement de la compétence des communes, et leur transport,
qui peut faire intervenir plusieurs maîtres d'ouvrages, puis leur traitement, qui relève du SIAAP,
celui-ci s'efforce d'organiser les concertations nécessaires, en particulier pour que les
conventions à passer avec les usagers non domestiques autorisés à déverser dans le réseau
tiennent compte des impératifs de transport et d'épuration des eaux en cause. Des conventions-
types de rejet sont en cours de mise au point dans ce but.
3. "L'insuffisance de la concurrence"
Les marchés négociés, sans mise en concurrence, que le SIAAP a passés en 1993
représentent 13,6 MF, à comparer au montant total des marchés passés cette année-là, de 2 608
MF, soit moins de 0,5 % de ce total. Il convient également d'observer que la plupart de ces
marchés négociés concernent des fournitures et prestations comme par exemple l'entretien par
leurs constructeurs de machines ou équipements spécialisés, qui ne peuvent être assurées que
par des entreprises données, et qui dans le cas d'autres maîtres d'ouvrages sont généralement
réglées sur simples bons de commande, alors que les seuils correspondants sont dépassés, en
raison de la taille de ses installations, dans le cas du SIAAP.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
132
Réponse du maire de VELIZY-VILLACOUBLAY (Yvelines)
La mise en place de la M 49 a entraîné pour la commune de Vélizy- Villacoublay des
charges supplémentaires (dotations aux amortissements) difficilement compensables par des
produits puisque l'unique recette réside dans la redevance d’assainissement (pas de vente d’eau
).
Afin de remédier à la demande de dérogation qui permettait de prendre en charge sur le
budget communal la subvention d'équilibre, une étude sur la nature des dépenses en
fonctionnement et en investissement a été effectuée.
Cette étude a permis :
- de réduire les dépenses de fonctionnement (- 21,36 %) et d'investissement (- 46,60 %)
;
- d'aboutir à une participation de la commune pour les dépenses d’eaux pluviales
transitant par le réseau unitaire (JO du 6 mars 1979) alors que jusqu'à présent ces frais étaient
entièrement supportés par le budget assainissement.
Enfin, elle a permis dès 1996 de ne plus avoir recours à une subvention d'équilibre tout
en revenant à une évolution régulière du taux de la redevance d’assainissement.
LORRAINE
Réponse du maire de BRIEY (Meurthe-et-Moselle)
J'ai effectivement demandé au président du syndicat du contrat de rivière Woigot
(CRW) de l'époque d'évaluer le coût des parties privatives des branchements. En effet, le
syndicat avait pris la décision de principe de les réaliser et de les financer intégralement dans
le cadre du contrat. Il me semblait que le syndicat n'avait pas bien mesuré la portée juridique et
financière de ses décisions. L'estimation financière me semblait un préalable minimum. Durant
le même temps, j'ai demandé à M. le sous-préfet de Briey de solliciter un audit financier du
syndicat par la chambre régionale des comptes de Lorraine.
La rédaction de votre projet peut laisser sous-entendre que c'est moi, en ma qualité de
maire de Briey, qui ai insisté pour que les branchements particuliers soient intégrés au contrat.
C'est précisément le contraire, d'autant que les branchements visés ont bénéficié, pour
l'essentiel, à des consommateurs résidant dans d'autres communes adhérentes. La conséquence
a été, qu'à enveloppe financière identique, les travaux d’assainissement collectif ont été
diminués.
Réponse du maire de TOUL (Meurthe-et-Moselle)
"Les entorses à l'égalité entre les usagers"
"A ces rabais, qui trouvent leur origine dans des manipulations tarifaires, s'ajoute
parfois la pratique dite "des ristournes", qui, comme à Toul (Meurthe-et-Moselle), nuit à la
transparence des comptes."
Réponse : Dans la mesure où la ristourne fait l'objet d'un versement régulier et
comptabilisé au compte "ressources et charges financières de la collectivité" du traité
d'affermage du service de l’assainissement, la transparence des comptes ne peut pas être
contestée.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
133
"Des contrôles souvent négligés"
"Les fonds de travaux qui leur sont confiés permettent de financer d'autres charges que
les investissements, comme par exemple les redevances de l'agence de l’eau à Toul (Meurthe-et-
Moselle)."
Réponse : Le règlement de la redevance à l'agence de bassin est imputé en dépenses sur
le compte "fonds de travaux" du traité d'affermage du service de distribution d’eau potable
depuis la création du compte (1970) et résulte d'un commun accord entre les parties.
L'incidence de cette imputation provoque évidemment une diminution du volume des
travaux finançables par le compte spécial.
Réponse du maire de METZ (Moselle)
APPLICATION DE L'INSTRUCTION COMPTABLE M 49
Les écritures manquantes d'amortissement des immobilisations et d'amortissement des
subventions d'équipements ont été régularisées sur l'exercice 1995. L'absence de prise en
compte, dans le budget annexe de la ville antérieurement au 31 décembre 1994, se concevait
dans la mesure où le fermier amortissait ces mêmes immobililisations dans sa comptabilité pour
faire face à son obligation contractuelle de renouvellement des biens affermés. L'amortissement
des immobilisations dans le budget annexe de la ville aurait conduit à imputer deux fois une
même charge à l'usager.
L'intégration des bâtiments et terrains aux comptes du budget annexe des eaux est en
cours de traitement. Le nombre important de biens concernés, leur localisation sur les bans de
vingt-huit communes et les travaux de rénovation des cadastres de nombre d'entre elles
conduits par les services de l'Etat ont retardé cette intégration.
EGALITE ENTRE USAGERS DOMESTIQUES ET USAGERS INDUSTRIELS
La dégressivité des tarifs de l’eau, au seul bénéfice des consommateurs industriels et
commerçants, est en vigueur depuis le début du contrat d'affermage, soit depuis 1973, et n'avait
pas été remise en cause par l'autorité de tutelle à l'époque lors de l'approbation du contrat. De
telles dispositions se retrouvent d'ailleurs dans de nombreux services des eaux . Bien
évidemment, la ville de Metz tiendra compte de l'état actuel de la jurisprudence du Conseil
d'Etat relative au principe d'égalité entre les usagers.
LA FORME JURIDIQUE DU SERVICE DES EAUX
Si la ville de Metz a été, seule, signataire du contrat d'affermage alors que celui-ci
traitait de l'exploitation du service public de distribution d’eau sur vingt-huit communes, c'est
parce qu'elle était, au moment de la signature dudit contrat, seule autorité organisatrice du
service des eaux sur le territoire des collectivités concernées. Cette situation résulte des
contrats de cession des réseaux et des installations de distribution d’eau potable par les villes
en question à la ville de Metz, cette dernière s'engageant à desservir les collectivités cédantes
en eau selon des quantités et des tarifs fixés dans chaque contrat.
La validité juridique de ces contrats qui s'échelonnent de 1931 à 1964 n'a jamais été
contestée notamment par les communes desservices. Ils avaient, d'ailleurs, été approuvés par le
préfet, autorité de tutelle à l'époque.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
134
AU PLAN FINANCIER
L'obligation pour le fermier de fournir des comptes rendus financiers a été introduite
dans l'avenant n° 1 au contrat d'affermage en date du 2 novembre 1993. L'absence de cette
obligation dans le contrat d'origine n'a pas empêché la ville de Metz de contrôler les comptes
du fermier, notamment en se faisant présenter les pièces de sa comptabilité comme le prévoyait
le dernier alinéa de l'article 40 du contrat d'affermage initial.
En ce qui concerne les participations prévues par les articles L. 332-15 du code de
l'urbanisme, si elles ont été effectivement recouvrées par le fermier pour le compte de la
collectivité jusqu'en 1992, les sommes ainsi prélevées étaient régulièrement reversées par ce
dernier au comptable public. Enfin, à compter de 1993, ces participations ont été perçues
directement par le percepteur.
La Cour indique qu'à Metz le prix de l’eau a augmenté de 73 % de 1988 à 1994. Cette
présentation nous paraît incomplète dans la mesure où il n'est pas indiqué que l'écart est
constaté sur des prix comprenant également la redevance d’assainissement et la redevance à
l'agence du bassin. Sur la même période de six ans, le prix de l’eau seule (part du fermier plus
surtaxe) n'a évolué que de 21,6 %.
Par ailleurs, la Cour rapproche cette augmentation de la moyenne nationale évaluée à
47,71 %. La comparaison est ici trompeuse puisque la moyenne d'augmentation nationale est
calculée sur quatre années (de 1990 à 1994) alors que l'augmentation à Metz est établie sur six
ans (de 1988 à 1994).
Sur la même période à Metz, le prix de l’eau a progressé de 57,11 %, cela étant
essentiellement dû aux augmentations de la redevance d’assainissement (84,88 %) et de la
redevance pollution (179,31 %) décidées respectivement par le SIVOM de l'agglomération
messine et par l'agence de l’eau Rhin-Meuse.
MIDI-PYRENEES
Réponse du maire de BLAGNAC (Haute-Garonne)
La ville de Blagnac précise que la réalisation et l'exploitation de la nouvelle station
d'épuration ont été confiées par avenant au traité d'affermage de l’assainissement au fermier de
la ville dans les conditions suivantes :
La prolongation critiquée a fait suite à la décision de construire et exploiter une
nouvelle station d'épuration se substituant à l'ancienne station dont la capacité en termes
quantitatif aussi bien que qualitatif apparaissait limitée compte tenu des prévisions
démographiques et surtout de la mise en application des directives européennes en matière de
traitement des rejets.
Sur le strict plan réglementaire, aucune remarque ne peut être formulée dans la mesure
où le fermier du service d’assainissement de la ville de Blagnac a reçu entière compétence pour
assurer la gestion des ouvrages de traitement des eaux usées.
Le respect des engagements contractuels pris par la ville de Blagnac a conduit tout à
fait naturellement et en adéquation avec la réglementation applicable en octobre 1992 à
rechercher avec le gestionnaire les conditions de financement de la nouvelle station.
Aucune mise en concurrence ne s'imposait donc.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
135
Les conditions de passation de l'avenant ayant abouti à une prolongation de la durée du
traité d’assainissement, après négociation avec le fermier et prise en compte des différents
éléments économiques et techniques connus, ont été admises par la préfecture qui n'a d'ailleurs
pas déféré cet avenant devant le tribunal administratif.
Il n'aurait pu en être différemment en application de la jurisprudence du Conseil d'Etat
du 10 avril 1991 (syndicat intercommunal de Bocage) et du 26 septembre 1994 (commune de
Labenne) qui a rappelé que, dans la mesure où le fermier prenait en charge une partie des
ouvrages dont l'exploitation lui avait été confiée en répercutant le coût sur les usagers, insérant
ainsi une part concessive dans un affermage, l'application des dispositions du code des marchés
publics ne s'imposait pas.
L'aspect de la critique touchant la durée importante consentie au fermier est la
conséquence directe du montant des sommes prises en charge par la Compagnie générale des
eaux .
En ce qui concerne le coût de la station d'épuration de 45 MF HT évoqué par la Cour et
qui serait parmi les plus élevés des coûts constatés pour des stations utilisant le même procédé
de traitement, la ville de Blagnac tient à préciser que le coût moyen a été calculé à partir
d'études publiées dans un document par le ministère de l'environnement et les agences de l’eau,
baptisé "Approche technico- économique des coûts d'investissement des stations d'épuration". Il
y a lieu de noter que :
- ce document publié en 1985 s'appuie sur des études menées de 1988 à 1992 pour 102
stations d'épuration ;
- des précautions sont prises par les auteurs avant d'annoncer les coûts
d'investissement, à savoir :
- "les chiffres qui figurent sur ce document sont donc donnés à titre indicatif, beaucoup
plus pour illustrer la démarche que pour fournir un référentiel exploitable" (p. 30) ;
- "cependant, l'échantillon retenu n'a pas de valeur représentative du parc des stations
au plan national quant à la répartition des filières, pour permettre une étude significative de
chacune d'elles, notamment pour les biofiltres" (p. 31) ;
- deux référentiels sont établis :
- après tri monocritères ;
- après tri multicritères.
De l'avis même des auteurs, les chiffres obtenus après tri- monocritères sont peu
significatifs et il est noté "l'absence de corrélation entre les coûts par habitant équivalent et la
capacité des installations" (p. 32).
Nous constatons un coût moyen hors maîtrise d'oeuvre pour les biofiltres de :
- 813 F/habitant équivalent après tri monocritères (page 33) ;
- 1 017 F/habitant équivalent après tri multicritères (p. 34) en valeur moyenne et 1 369
F en valeur maxi.
Mais là encore, ces chiffres sont à prendre avec prudence, puisque l'on note page 35 :
"Il faut bien constater que, malgré des tris successifs et donc la constitution de sous
échantillons a priori plus homogènes, la dispersion des coûts à l'équivalent habitant pour la
station dans son ensemble reste trop importante pour constituer une information directement
opérationnelle.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
136
Enfin, et c'est sans doute essentiel, cette étude a été menée avant la parution de la loi
sur l’eau de janvier 1992.
Elle ne prend donc pas en compte les obligations résultant des décrets d'application de
cette loi.
Ceux-ci imposent, entre autres, d'obtenir des résultats conformes aux normes 95 % du
temps.
Cette obligation nécessite la fiabilisation du fonctionnement des usines (bassin tampon,
surdimensionnement des ouvrages, mise en place d'importants dispositifs de secours pour une
bonne fiabilisation des ouvrages).
Le coût de cette fiabilité, à savoir 7,6 MF HT, a été communiqué à l'agence de l’eau.
Le coût de la station d'épuration, incluant maîtrise d'oeuvre, la conduite d'amenée,
ainsi que le coût de la fiabilisation, ressort à 45 MF HT.
Soit, pour l'ouvrage seul :
- hors maîtrise d'oeuvre (10 %) : 41 MF ;
- hors conduite d'amenée (1,9 MF) : 39,1 MF ;
- hors fiabilisation (7,6 MF) : 31,5 MF.
Ramené à l'équivalent habitant, nous arrivons à une valeur de 900 F, valeur inférieure
à la valeur moyenne affichée par l'agence de l’eau dans l'étude rappelée ci-dessus, valeur qui
ne pouvait que conforter la ville dans le choix de l'option retenue.
Réponse du maire de SAINT-ORENS (Haute-Garonne)
Je
souhaiterais
apporter
une
précision
sur
l'interconnexion
des
réseaux
d'approvisionnement d’eau concernant la ville de Saint-Orens.
Saint-Orens dispose de deux sources d'approvisionnement en eau : l'habituel réseau
toulousain et, depuis le 1er janvier 1996, le réseau de la Montagne-Noire.
Cela offre à notre ville une meilleure sécurité aux Saint-Orennais en cas de pollution
d'une des deux sources.
Réponse du maire de TOULOUSE (Haute-Garonne)
I. - Dans la section intitulée "Les entorses à l'égalité entre les usagers", la
Cour note
que, à Toulouse, avant 1990, c'est-à-dire avant la mise en gestion déléguée du service, la
commune avait instauré des tarifs dégressifs pour usage industriel, qui ont été maintenus dans
le cadre de la concession.
La Cour ajoute que certains industriels bénéficient de rabais substantiels qui ne les
incitent pas à réduire leur consommation.
Il convient de noter que les rabais s'appliquent par tranches successives, ces rabais sont
donc progressifs et ne s'appliquent pas au "premier mètre cube".
Par ailleurs, ces dispositions, qui étaient déjà en vigueur avant la mise en concession
du service, n'ont pas eu pour effet d'augmenter la consommation. Au contraire, les plus gros
consommateurs ont réduit leur consommation de manière significative. C'est ainsi que, sur la
période 1989-1995, leur consommation est passée de 3 490 000 à 3 149 000 m3, soit 341 000
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
137
m3 de moins, ce qui correspond à une baisse de près de 10 %. Cette baisse est même de 15,45
% si sont écartées les consommations d'Aérospatiale et de la Société d'exploitation thermique
du Mirail (SETMI), ces deux sociétés ayant vu leur activité modifiée : pour l'Aérospatiale, par
l'installation à Toulouse d'une unité supplémentaire (le centre d'études), et pour la SETMI, par
la mise en oeuvre de la dépollution des fumées, procédé qui est consommateur d’eau.
II. - Dans la section intitulée "L'interconnexion nécessaire des réseaux
", la Cour note
que "bien que l'agence de l’eau ait préconisé l'interconnexion des réseaux alimentés par la ville
avec ceux des cantons Centre et Nord, celle-ci n'a pu être mise en oeuvre. L'absence de décision
politique d'ensemble, liée à l'inexistence d'une structure intercommunale d'agglomération, a
empêché la réalisation de ce projet".
Il existe une structure générale de coopération intercommunale au niveau de
l'agglomération : il s'agit du district du Grand Toulouse. Mais, comme l'indique le rapport de la
Cour, il n'a pas le périmètre géographique pertinent pour prendre des initiatives dans ce
domaine, bien qu'il s'agisse du district le plus peuplé de France.
Néanmoins, la ville de Toulouse s'est toujours fortement impliquée dans la politique
d'agglomération, notamment pour la réalisation d'études de sécurité, l'élaboration du schéma
directeur d'aménagement et de gestion de l’eau (SDAGE), la création des deux premières
stations d'alerte et la signature du contrat d'agglomération de l'agence de l’eau Adour-
Garonne. Actuellement, le lancement des opérations prévues par le deuxième contrat
d'agglomération est en cours. Celui-ci porte sur la réalisation de travaux évalués à près de 550
millions de francs hors taxes, avec pour objectif la réhabilitation du milieu naturel sur la
Saudrune et la Garonne, la fiabilisation des équipements existants, l'extension des capacités de
traitement, l'augmentation des performances et le contrôle des impacts sur le milieu naturel.
Pour ce qui concerne l'interconnexion des réseaux d’eau potable, la ville de Toulouse
va demander au préfet de réunir les différentes parties prenantes. Pour ce qui la concerne, elle
a déjà décidé de réaliser une double alimentation sur l'Ariège et sur la Garonne (légèrement en
amont du confluent de ces deux rivières) afin de sécuriser l'approvisionnement en eau.
Possédant deux usines d’eau interconnectées entre elles, possédant bientôt une double
alimentation sur la Garonne et sur l'Ariège, la ville de Toulouse sera totalement protégée pour
la sécurité en alimentation en eau potable.
Elle est prête à mettre cette sécurité à disposition des autres distributeurs d’eau qui
pourront interconnecter leurs réseaux avec celui de la ville de Toulouse.
Pour ce qui concerne le réseau d'alerte sur la Garonne, les deux stations d'alerte à la
charge de la ville de Toulouse ont été construites et sont opérationnelles depuis mars 1996.
Le conseil général de la Haute-Garonne s'est chargé de la réalisation des autres
stations situées en amont et elles devraient être construites dans le proche futur.
Le rapport de la Cour évoque également le syndicat mixte d'étude et d’assainissement
qui n'aurait pas atteint les objectifs qui lui étaient assignés, au motif que les collectivités ne lui
auraient pas donné la possibilité de jouer un rôle déterminant dans ce secteur.
Dès lors que la ville de Toulouse avait construit les collecteurs périphériques E et F, la
logique technique et le pouvoir attractif de ces ouvrages étaient tels que les communes
périphériques pouvaient se raccorder, et le syndicat mixte d'études et d'aménagement n'avait
que peu de raison pour continuer à exister.
Par ailleurs, dans de nombreuses autres agglomérations françaises, le périmètre des
usines d’assainissement est lié à un seul bassin versant.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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138
A Toulouse, nous sommes allés beaucoup plus loin puisque ce sont trois bassins
versants dont les eaux usées sont assainies dans l'usine de Ginestous, propriété de la ville de
Toulouse :
- le bassin versant de la Garonne, mais également, grâce à l'extension des réseaux aux
communes situées sur le bassin versant de l'Hers en rive droite et du Touch en rive gauche ;
- le Touch : Colomiers (2e ville du département, 27 000 habitants), raccordée à 50 % ;
Tournefeuille (20 000 habitants), raccordée à 60 % ;
- l'Hers : L'Union (12 000 habitants) ; Balma (12 000 habitants) ; Quint (4 000
habitants) ; Ramonville (12 000 habitants) ; Saint-Orens (11 000 habitants) ; une partie de
Pechbusque et peut-être bientôt une partie de la communauté de communes du SICOVAL.
Ainsi, près de la moitié des habitants du département de la Haute- Garonne se trouvent
raccordés sur l'usine d’assainissement de Ginestous, propriété de la ville de Toulouse.
Ces explications démontrent que la politique de collecte et d'épuration des eaux usées
ne peut être qualifiée d'insuffisante en raison d'un manque supposé de coordination
intercommunale.
Au contraire, l'usine de Ginestous est un vrai outil d'agglomération, même s'il n'est pas
le résultat d'une structure intercommunale.
Par ailleurs, le rapport de la Cour note que "le syndicat mixte pour l'étude et la
protection de l'environnement constitué en 1991 ne compte pas Toulouse parmi ses adhérents".
La compétence géographique de ce syndicat mixte s'étend sur l'ensemble du
département de la Haute-Garonne et ses compétences techniques sont générales puisqu'il s'agit
de
5
:
"- coordonner les actions et les différents secteurs d'activités touchant l'environnement ;
- sensibiliser les différents acteurs économiques et institutionnels aux problèmes de
l'environnement ;
- faire prendre conscience à la nouvelle génération des problèmes d'environnement".
Il est bien clair que, compte tenu de l'importance de son périmètre et du caractère trop
général de ses compétences techniques, un tel syndicat mixte n'est pas susceptible d'apporter
une contribution décisive pour les questions d’assainissement des eaux usées.
III. - Dans la section consacrée aux "défauts d'organisation des régies
", la Cour note
que, à "Toulouse, le personnel employé par la ville pour la gestion de l’eau et l’assainissement
représentait 475 agents. Il a été réduit à 331 agents après concession à la Compagnie générale
des eaux . Cette réduction a permis de réaliser dès 1990 d'importants gains de productivité".
Ces gains de productivité sont indéniables et n'auraient pas été réalisés si l'ancien
système de gestion en régie avait été maintenu. C'est parce que le concessionnaire espérait de
tels gains de productivité qu'il a pu s'engager contractuellement sur la maîtrise de l'évolution
des tarifs pratiqués auprès des usagers. Ces tarifs évoluent selon la formule paramétrique
définie par le traité de concession, indexation qui est particulièrement favorable aux
consommateurs.
5) Article "objet" du statut du syndicat mixte pour l'étude et la protection de l'environnement.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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En effet, de l'enquête réalisée par "Conso 2000", qui regroupe 17 organisations
nationales de consommateurs, il ressort qu'entre 1990 et 1994, pour les communes de plus de
200 000 habitants, l'augmentation s'est élevée à près de 64 %. Quelles que soient les strates de
population, la hausse moyenne dans l'ensemble des communes a été supérieure à 50 % sur la
même période. Ces résultats démontrent le caractère très modéré de la hausse du prix de l’eau
à Toulouse (26 % sur la même période), d'autant plus que, sur le même laps de temps, les taxes
appliquées sur le prix de l’eau, lato sensu, ont augmenté de 128 %, contre seulement 18,8 % au
"produit eau ", stricto senso (production de l’eau + assainissement, hors taxes).
Il convient également d'observer que, en valeur absolue, le prix de l’eau (tout compris)
à Toulouse, soit 13,27 F le m3 en 1994, est nettement inférieur (- 19,23 %) au prix moyen relevé
par Conso 2000 pour les autres Communes de plus de 200 000 habitants, soit 16,43 F le m3.
IV. - Dans la section consacrée aux "aspect financiers de la délégation
", la Cour
indique : "Ainsi, à Toulouse, le prix de l’eau a progressé de façon notable à la fin de l'année
1989, quelques mois avant la mise en concession, à un moment où les pourparlers avec les deux
sociétés pressenties étaient près d'être engagés. Les augmentations de prix, qui avaient pour
objectif avoué d'arriver à une situation financière plus saine, ne pouvaient que faciliter la
négociation à entreprendre."
La décision d'augmentation du prix de l’eau a été prise avant que les premières
réunions aient eu lieu avec les concessionnaires potentiels.
Les augmentations de prix sont intervenues par délibération du 27 octobre 1989 et elles
n'étaient pas significativement différentes de celles des années précédentes.
Les premières réunions avec les deux concessionnaires potentiels ont eu lieu le 6
décembre 1989 et le conseil municipal a délibéré sur le contrat de concession le 23 février
1990.
D'une manière générale, à cette époque, la ville de Toulouse procédait à des révisions
importantes dans sa gestion financière.
Ainsi, pour son budget principal, la ville de Toulouse avait décidé de réduire la charge
de l'emprunt et, si possible, de rembourser par anticipation les emprunts en cours.
A cette période, le différentiel entre les taux d'intérêt des emprunts et le niveau de
l'inflation était tel que financer un investissement par emprunt conduisait d'abord à payer cet
investissement et, parallèlement, à payer plus de 50 % de cet investissement en francs constants
pour rémunérer les banques prêteuses.
Pour les services de l’eau et de l’assainissement, la volonté était exactement parallèle
et il convenait donc de fixer le juste prix pour l’eau et l’assainissement. Pour ces services, la
nécessité d'une remise à niveau financière conséquente était d'autant plus nécessaire que l'on
commençait à évoquer des opérations d'investissement importantes pour l'avenir.
Il ne s'agissait pas d'anticiper le programme de travaux de l'usine de Ginestous,
puisqu'il n'était pas prévu de mettre en place une "cagnotte" pour réaliser ces travaux, mais
plutôt de ne pas augmenter l'endettement ou de le réduire afin de se mettre en position saine
pour supporter les travaux futurs de Ginestous.
En conclusion sur ce point, les augmentations de prix avant la concession ont certes
facilité la négociation du contrat de concession, mais de telles augmentations avaient lieu tous
les ans et elles auraient eu lieu même si le service n'avait pas été délégué.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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V. - Dans la section "La pratique des droits d'entrée",
la Cour note que, à "Toulouse,
la délégation par la commune, en 1990, de ses services d’eau et d’assainissement a été assortie
de la reprise par l'entreprise délégataire, la CGE, de la dette des services concédés qui s'élevait
à 687,5 millions de francs et du versement d'un droit d'entrée de 437,5 millions de francs
permettant d'alléger d'autant la dette de la commune. L'amortissement de ces sommes contribue
à rendre déficitaires les comptes du concessionnaire. On constate que les comptes financiers du
délégataire font apparaître un déficit annuel de 80 millions de francs pour les années 1991 à
1993, alors même que des gains de productivité importants ont été réalisés. Ce déficit a, en
partie, pour origine le droit d'entrée initial, dont les annuités d'amortissement représentent 37
% des charges financières et la moitié du déficit apparent de l'exploitation. On peut en conclure
que le droit d'entrée fait obstacle à l'affectation des gains de productivité au bénéfice des
usagers. Les surcoûts liés aux travaux de mise aux normes CEE, non initialement pris en
compte par le concessionnaire, ne pourront pas être compensés par les gains de productivité.
Ils devraient se traduire par de nouvelles augmentations du prix de l’assainissement ".
Le droit d'entrée, qui était d'ailleurs une pratique légale à l'époque et n'a fait l'objet
d'aucune remarque au titre du contrôle de légalité, n'a été que l'un des paramètres déterminants
dans le choix du concessionnaire.
En effet, il a été tenu compte de l'ensemble de ses capacités à gérer le service public.
L'évolution ultérieure des tarifs pratiqués auprès des usagers était un second paramètre
de choix et elle est demeurée très modérée depuis le début de la concession, si on la compare
aux autres villes de France.
Ainsi le tarif actuel et son évolution depuis la mise en concession se trouvent-ils à un
niveau compétitif par rapport aux autres agglomérations.
Le rapport de la Cour évoque également la situation fortement déficitaire des comptes
du concessionnaire. Cette situation déficitaire n'a pas d'incidence sur l'usager.
En effet, le contrat de concession prévoit que, quelle que soit la situation de ses
comptes, le concessionnaire doit réaliser tous les investissements nécessaires
6
) et le prix de
l’eau ne peut évoluer que selon la formule paramétrique contractuelle.
La Cour note que la pratique du droit d'entrée fait obstacle à l'affectation des gains de
productivité aux usagers.
Mais peut-on raisonnablement espérer que le concessionnaire aurait été réellement
incité à réaliser des gains de productivité s'il ne pouvait pas en bénéficier ?
La pratique du droit d'entrée, légale à l'époque, est ainsi une pratique qui oblige le
concessionnaire à prendre le risque financier d'effectuer des efforts significatifs et constants.
Dans le cas du contrat de concession de Toulouse et compte tenu du niveau du droit
d'entrée qui a été négocié (437,5 MF), le concessionnaire n'est absolument pas assuré de
pouvoir "récupérer" la mise initiale sur la durée de la concession.
S'il ne peut la récupérer en totalité, "Toulouse", c'est-à-dire à la fois les contribuables
toulousains et les usagers de l’eau, bénéficiera de la partie de cette mise initiale non récupérée
par le concessionnaire à la fin de période de concession.
6)A l'exception des investissements nécessités par une modification des normes, auquel cas un
réajustement des tarifs est à négocier.
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Par ailleurs, les surcoûts liés à la mise aux normes CEE n'étaient pas chiffrables en
1990, année de la conclusion du traité de concession. Les arrêtés préfectoraux définissant les
nouvelles conditions de rejet n'ont été pris en effet que le 20 novembre 1991 et le 30 mars 1992.
Ils vont d'ailleurs être modifiés pour tenir compte du SDAGE approuvé en août 1996.
Le nouvel arrêté sera probablement pris fin 1996 ou début 1997. C'est sur cette base que le
concessionnaire lancera les travaux en vue d'une mise en service avant le 31 décembre 2000.
La comparaison de ces dates (1990 pour l'année de signature du contrat de concession
et 2000 pour la mise en service des normes CEE), qui sont séparées de dix ans, montre bien la
très grande difficulté, voire l'impossibilité, d'inclure les coûts de mise aux normes CEE dès
l'origine du contrat.
PAYS DE LA LOIRE
Réponse du président du conseil régional des PAYS DE LA LOIRE
La région des Pays de la Loire subventionne l’assainissement rural et urbain sur les
départements littoraux de Loire-Atlantique et de Vendée, dans le but d'améliorer la qualité des
eaux de baignade et des eaux utilisées par les producteurs conchylicoles, cela dans l'objectif
d'un meilleur développement économique.
Les dotations sont attribuées globalement dans le cadre de l'aménagement du littoral,
sans préaffectation d'enveloppe pour un département ou l'autre, ce qui permet une meilleure
adaptation aux besoins des collectivités maîtres d'ouvrage et aux délais de réalisation des
travaux.
Pour l’assainissement rural, la dotation globale s'est élevée à près de 7 000 000 F en
1993, 12 300 000 F en 1994, 10 000 000 F en 1995 et 4 400 000 F en 1996 (situation à la date
de septembre 1996).
Pour l’assainissement urbain, les affectations s'élevaient à près de 1 500 000 F en
1993, 1 600 000 F en 1994, 1 200 000 F en 1995 et 1 400 000 F en 1996 (situation à la date de
septembre 1996).
Réponse du maire de COUERON (Loire-Atlantique)
L'étude préliminaire transmise par la Cour des Comptes appelle un certain nombre de
remarques :
1. L'étude confiée en 1989 à la CEO visait à "proposer une politique d'intervention aux
élus et techniciens de la ville de Couëron, au vu des éléments techniques et économiques mis en
évidence par l'étude, pour une bonne gestion des infrastructures existantes". Elle ne concernait
que l’eau potable, et non l’assainissement. Les données transmises par la mairie à l'entreprise,
et qui furent reprises ensuite lors de la consultation étaient imprécises, notamment en ce qui
concerne la longueur du réseau. Il convient de rappeler ici l'ancienneté de certaines parties de
ce réseau, remontant à plusieurs dizaines d'années, et la mauvaise qualité de certaines archives
municipales, en particulier pour les plans de récolement.
2. Les articles 39 et 37 des cahiers des charges d'affermage respectivement de l’eau et
de l’assainissement prévoient de nombreux cas de révision de la structure tarifaire et il convient
de signaler que l'application de ces articles permet de préparer actuellement des avenants dont
les buts seront cités ci-dessous.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
142
3. Concernant les remboursements intervenus en 1995, ils ne proviennent pas de
problèmes liés au contrat, mais d'une erreur commise lors de la facturation.
Au sujet des avenants de 1994, ils ont eu pour objet de corriger certaines des erreurs
apparues en cours d'exploitation, et notamment la mauvaise appréciation de la longueur de
réseau. La commune et son fermier ont alors pallié cette erreur en respectant autant que
possible les usagers.
Il importe d'ailleurs de relativiser l'impact pécuniaire sur les usagers de ces avenants,
puisque l'on constate que l'augmentation s'est traduite en bas de facture par un montant
d'environ 1 franc (TTC) par mètre cube consommé. Et, il faut savoir qu'en 1994 environ 60 %
des usagers consommaient moins de 100 mètres cubes par an.
Depuis la mise en oeuvre du contrat, la commune a tenté de rester proche de son
objectif initial, à savoir ne pas s'écarter de manière brutale des conditions de facturation que
rendait possible l'adhésion au Syndicat départemental d'adduction d’eau tout en créant de
manière durable les conditions d'une capacité communale d'autofinancement net importante
par la reprise d'une part de la dette par le fermier.
La renégociation prévue au contrat, après cinq années, et du fait de l'évolution des
volumes, donne lieu actuellement à la préparation d'avenants qui seront présentés au conseil
municipal dans un délai rapproché. La commune et le fermier profitent de ces avenants pour
résoudre certains problèmes mis en avant par la chambre régionale des comptes, et donner
satisfaction à des demandes formulées par une association de défense des usagers locaux. Un
travail en commun est mené, visant à :
- améliorer la nature du service rendu aux usagers, en matière d'informations,
d'interventions, de facturations, et plus généralement pour toutes formes de prestations par
l'ouverture d'une antenne locale à Couëron ;
- supprimer les dépôts de garantie versés par les usagers lors de leur abonnement, et
cela à échéance d'un an après la signature des avenants, et résorption des impayés constatés
actuellement ;
- sortir la dette relative aux travaux d’eau pluviale pour la rendre sans effet sur la
partie eaux usées du contrat d’assainissement par son financement exclusif au travers du
budget communal ;
- procéder à une évaluation incontestable des mètres cubes d’eau pluviale transitant
par le réseau unitaire résiduel et la station d'épuration, et définir le coût de son traitement ;
- définir, suite aux opérations précédentes, et après suppression des 5 % prévus au
contrat, l'assiette d'une surtaxe, en assainissement, pour préfigurer le financement des
investissements à venir, dont le coût est estimé à 16 millions de francs sur cinq ans. Cette
surtaxe devra tenir compte de la très grande durée de vie des investissements (plusieurs
dizaines d'années), ce qui pourra, en regard des possibilités financières de la commune,
conduire à pérenniser un déficit structurel, sans le compenser par une subvention d'équilibre. Il
n'y a en effet aucune raison pour que seule une génération finance un équipement qui sera
utilisé par plusieurs ;
- prendre en considération, en eau potable, les importantes modifications intervenues
dans l'individualisation des comptages relatifs aux logements de la société d'HLM SAMO,
jusqu'à présent traités collectivement ;
- tout en maintenant les factures dans une progression raisonnable, revoir la répartition
entre les parties fixes et les consommations, de manière à ne pas pénaliser les petits
consommateurs.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
143
La présentation de l'avenant au conseil municipal sera précédée par :
- une rencontre avec l'association d'usagers ;
- la transmission pour avis à la chambre régionale des comptes ;
- la présentation et un débat en commission communale des finances.
Rappelons cependant qu'aujourd'hui, comme en 1991, le contrat traduira d'abord une
volonté politique en matière de rendu de service public. La commune et son fermier
s'attacheront à donner à leur action le plus de lisibilité possible pour les usagers et les élus.
Réponse du maire de LA BAULE (Loire-Atlantique)
Le SIVOM de la région bauloise, établissement public de coopération, s'est transformé
tant dans son titre (Syndicat intercommunal de la Côte-d'Armor et de la presqu'île
guérandaise/SICAPG) que dans ses statuts et dans ses modalités de fonctionnement : ainsi a été
créée la commission locale des usagers, prévue par la loi "ATR" du 6 février 1992 et ses textes
subséquents. Cette commission s'est réunie régulièrement depuis sa création.
Réponse du président du SIAEP de REZE-BOUGUENAIS (Loire-Atlantique)
"Un recours excessif à la procédure des marchés négociés"
Si certaines décisions peuvent sembler contrevenir à des dispositions législatives ou
réglementaires, elles résultent alors de mauvaises interprétations de celles-ci et en aucun cas
d'une volonté de les détourner.
"Influence de la maîtrise d'oeuvre privée"
Le choix du maître d'oeuvre est réalisé en appliquant la réglementation du code des
marchés publics, laquelle est graduée en fonction de l'estimation du marché à conclure.
Le législateur a donné aux maîtres d'ouvrages une grande latitude de choix pour des
marchés de faible importance et admis une libre négociation avec le candidat retenu. Les
marchés de maîtrise d'oeuvre conclus annuellement par le Syndicat se situent dans ce cas. Les
trois critères de choix fixés par l'article 314 bis du code des marchés publics sont les
compétences, les références et les moyens des candidats. Le maître d'ouvrage tient évidemment
compte parmi les références du candidat de celles qui résultent d'une prestation antérieure
exercée à son profit et des particularités d'un réseau de distribution publique d’eau potable
(continuité, efficacité, notamment), donc de la bonne connaissance que peut en avoir un maître
d'oeuvre pour des travaux à caractère répétitif (de nature très différente par exemple de la
construction d'un bâtiment public). Cette bonne connaissance se traduit par une influence
favorable au niveau du coût des études et des travaux. De plus, on voit mal comment la
continuité du service public pourrait être assurée dans de bonnes conditions avec un
changement annuel de maître d'oeuvre. La qualité du service, qui doit répondre à des exigences
de plus en plus grandes des consommateurs, nécessite une connaissance du réseau qui ne
s'acquiert pas en une année.
Il me paraît incohérent de cumuler le nombre des marchés de maîtrise d'oeuvre et de
travaux, de même que leurs montants puisqu'il s'agit de prestations de natures différentes, les
résultats n'ont, de ce fait, aucune valeur significative.
A la restriction près d'une mauvaise interprétation éventuelle du code des marchés
publics, dans le cas de certains marchés négociés, ce code n'interdit pas la candidature d'une
entreprise par ailleurs gérante du réseau.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
144
Si depuis plusieurs années la candidature de cette entreprise a été retenue, c'est qu'elle
offrait - et de loin le plus souvent - les meilleures conditions, tant pour le coût que pour les
conditions de réalisation.
"Des contrats de délégation de longue durée"
Mes remarques portent sur la forme et sur le fond :
Sur la forme :
Le syndicat a confié à son gérant le soin de faire procéder à la réfection de deux
réservoirs. La décision a été prise par le comité syndical et le délégataire a été pressenti avant
la publication de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, relative à la prévention de la corruption
et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques. Le syndicat avait donc
toute possibilité de modifier par avenant le contrat de gérance et de prolonger celui-ci.
Sur le fond :
La prolongation de huit années du contrat est tout à fait justifiée et bien négociée, eu
égard à la durée d'amortissement qui peut être raisonnablement retenue pour ce type de travaux
(de quinze à vingt ans). La durée nouvelle du contrat ainsi modifiée (vingt ans) se trouve
d'ailleurs en concordance avec celle fixée depuis par l'article 75 de la loi du 2 février 1995. Il
est à noter par ailleurs que la durée de douze ans stipulée dans les anciens cahiers des charges
type d'affermage, antérieur aux lois de décentralisation, a perdu toute validité depuis ces lois.
Par ailleurs, la négociation de ce nouveau contrat a permis d'obtenir de bien meilleures
conditions pour le SIAEP, tant en ce qui concerne la rémunération du gérant que les échéances
de reversement des recettes de vente d’eau.
Réponse du président du conseil général de la MAYENNE
"L'AIDE DU DEPARTEMENT AUX INVESTISSEMENTS DANS LE DOMAINE DE
L'ALIMENTATION EN EAU POTABLE"
A quelques précisions près, l'extrait de rapport de la Cour des comptes ne soulève pas
de remarque particulière et retrace bien les problèmes de financement des grandes
infrastructures auxquelles de plus en plus sont confrontées les collectivités locales pour faire
face à la modernisation des réseaux et à l'accroissement des besoins en alimentation en eau
potable. C'est ainsi que l'inventaire général diligenté par le ministère de l'agriculture pour la
période 1995-1999 fait état d'un besoin d'investissement de 470 MF dans les domaines de l’eau
et de l’assainissement en Mayenne.
Il est apparu irréaliste de faire supporter par la fiscalité la mise en oeuvre de
programmes subventionnés sur une telle masse financière lorsqu'on sait que le point de fiscalité
en Mayenne ne représente qu'environ 3,5 MF et que les fonds du FNDAE ont tendance à se
stabiliser. Les réflexions de l'assemblée départementale, appuyées par une étude en 1992, ont
conduit à la création d'un fonds départemental alimenté par une contribution volontaire des
collectivités distributrices basée sur l'instauration d'une redevance au demeurant fort
raisonnable de 1 F/m3. C'est ainsi qu'à ce jour 81 collectivités sur 83 (2 petites communes dont
l'une riveraine de l'Ille-et-Vilaine n'étant pas concernées) ont signé la convention de
participation volontaire au fonds.
Cette unanimité démontre à l'évidence que les collectivités sont confrontées à des
difficultés de financement des investissements et que la solidarité départementale a joué.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
145
Un comité consultatif de suivi, composé de représentants des collectivités distributrices
d’eau (communes urbaines, communes rurales, syndicats d’eau, etc.) est réuni chaque année
pour examiner les comptes, l'évolution de la redevance et les orientations à donner au fonds.
Cette solution a permis d'accroître le niveau d'intervention sur le secteur de l’eau de 12,6 MF à
près de 30 MF puisque le fonds a produit en 1995 près de 16 MF qui viennent s'ajouter aux
crédits départementaux et à ceux du FNDAE. Cette masse financière est affectée à la
programmation des travaux d'adduction d’eau et d’assainissement subventionnés par le conseil
général, aux différentes actions de protection des ressources, à des actions de traitement et de
construction d'usines de production d’eau potable et d'épuration des eaux usées.
Enfin, 40 % du produit du fonds d’eau est affecté à la construction en maîtrise
d'ouvrage directe par le département d'une grande retenue d’eau potable dans le Nord
Mayenne sur le site de Saint-Calais-du- Désert destinée principalement à soutenir l'étiage de la
rivière la Mayenne durant les périodes de forte consommation, celle-ci assurant 70 % des
besoins en eau du département.
Réponse du président du conseil général de la SARTHE
Durant la période 1990-1994, les besoins exprimés par les collectivités concernant les
investissements pour l’eau et l’assainissement sont passés de 73 MF à 102 MF, tandis que l'aide
du département passait de 21,3 MF à 20,5 MF.
Il n'y a en conséquence pas eu de brusque augmentation de la demande.
Par ailleurs, à partir de 1992, les aides du conseil général étaient "encadrées" par une
convention avec l'Etat par le biais du Fonds national d'adduction en eau potable FNDAE.
Cette convention a fait passer l'aide du département de 21,7 MF en 1991 à 23,5 MF en
1992, tandis que l'Etat passait d'une aide de 9,8 MF à 11,5 MF.
En 1993, l'aide du département a été baissée à 20,5 MF, conformément à la convention,
afin d'établir une parité sur les aides à l’assainissement : 5 MF pour l'Etat et 5 MF pour le
département (contre 8 MF en 1992).
Réponse du président de la Communauté urbaine du MANS (Sarthe)
Le rapport de la Cour des comptes étonne beaucoup la communauté urbaine dans la
mesure où les critiques faites sur le fonctionnement de la régie pour la gestion de l’eau
paraissent encourager d'autres modes de gestion. Le rapport dénonce les faiblesse de la gestion
en régie, insiste sur "les défauts d'organisation des régies" et souligne "des pratiques
conduisant parfois à l'inefficacité". Il eût été plus judicieux de saluer les collectivités comme la
communauté urbaine qui, contrairement, à l'air du temps, ont refusé de privatiser leur service
d’eau.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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"Une comptabilité plus cohérente issue de l'instruction M 49"
Tout en procédant à l'amortissement réel de ses installations et canalisations, d’eau et
d’assainissement, la communauté urbaine a pu, en restant en régie, limiter l'augmentation de
ses tarifs aux chiffres suivants :
:
ANNEES
:
EAU
:
ASSAINISSEMENT
:
:
:
:
:
:
1992
:
+ 5,35 %
:
+ 7,39 %
:
:
:
:
:
:
1993
:
+ 2,50 %*
:
+ 6,66 %
:
:
:
:
:
:
1994
:
+ 4,28 %*
:
+ 2,01 %
:
:
:
:
:
:
1995
:
+ 3,34 %*
:
+ 5,33 %
:
:
:
:
:
:
1996
:
+ 3,98 %*
:
+ 4,50 %
:
______________________________________________________________________
:
:
:* Variation en pourcentage calculée sur la base du tarif hors TVA
:
:depuis l'assujettissement à la TVA au 1er janvier 1993 et montant du:
:FNDAE non compris dans le prix de l'eau voté par la collectivité.
:
"Des structures intercommunales trop étroites"
Les difficultés de la situation mancelle tiennent à deux phénomènes :
1. Quand la Communauté urbaine - dont l’eau est une compétence obligatoire - a été
créée en 1972, le Syndicat intercommunal pour l'alimentation en eau potable (SIDERM) existait
déjà et comprenait toutes les communes autour du Mans, sauf Le Mans. La Communauté
urbaine n'a donc pu reprendre que la compétence de l’eau sur la ville du Mans. Ainsi ne peut
être assurée, de façon totalement satisfaisante, l'unité communautaire dans ce domaine.
2. Outre les communes de la périphérie mancelle, le syndicat est constitué d'un nombre
majoritaire de communes rurales. Or, c'est la Communauté urbaine, c'est-à-dire, l'usine de
production du Mans qui fournit au syndicat l'essentiel de ses besoins.
"Les défauts d'organisation des régies"
La Cour semble prévoir un regain de faveur pour le mode de gestion en régie dans les
zones urbaines compte tenu des affaires récentes dont la justice a eu à connaître. Il pourrait
être souligné que ce regain d'intérêt est d'abord dû aux tarifs pratiqués presque toujours
inférieurs à ceux des services concédés ou affermés.
C'est le cas précisément de la Communauté urbaine du Mans.
D'autre part, il y a bien d'autres domaines de la gestion communale qui exigent des
personnels hautement qualifiés :
- traitement des ordures ménagères ;
- urbanisme et aménagement de la ville ;
- voiries et ouvrages publics ;
- développement culturel ;
- la gestion financière et la diversité des produits et services à contrôler.
Leur recrutement dans le cadre communal général ne semble pas inconciliable avec la
technicité nécessaire.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
147
Est-il vraiment opportun de citer le cas de la Communauté urbaine du Mans pour
illustrer que l'importance des charges - de personnel notamment - conduit les collectivités à
reporter abusivement sur la section d'investissement une part des dépenses d'exploitation ? En
effet, les travaux en régie pris en exemple de facturation excessive du fonctionnement vers
l'investissement ne représentent eux-mêmes dans les budgets d'investissement concernés que 1
% en assainissement et 4 % en eau.
De plus, les factures en cause évoquées, au moment du contrôle, n'ont été reprises dans
la lettre d'observations définitive que dans les termes mesurés suivants : "Malgré la modicité
des montants en cause au regard des masses financières concernées, leur addition peut avoir
une incidence finale."
Enfin, les dépenses de personnel du service n'ont pas fait l'objet d'une appréciation
défavorable de la chambre. Même si le système actuel de régie directe est susceptible d'évoluer,
il convient de noter qu'il n'interdit pas l'information et le contrôle des usagers conformément à
la loi.
"L'évaluation des besoins (investissements)"
L'étude diagnostic dont il est question avait justement fait l'objet d'une commande
concertée de la Communauté urbaine et du SIDERM et d'un financement commun. C'est à
l'initiative de la communauté urbaine que, devant les volumes d’eau produits, les conclusions de
l'étude ont été remises en cause. En effet, de 1988 à 1995 la consommation moyenne de la
population desservie a augmenté de 1,6 % au lieu des 14 % annoncés par l'étude.
Réponse du président du Syndicat intercommunal pour l'alimentation en eau potable de la
REGION MANCELLE (Sarthe)
"L'EXCESSIVE DISPERSION DE L'ORGANISATION LOCALE"
"Des structures intercommunales trop étroites"
Depuis sa création en 1950, le Syndicat intercommunal a connu un développement
constant, passant de onze à vingt-neuf communes en 1964, pour atteindre quarante communes
en 1985.
L'évolution durant les trente dernières années se traduit par :
- un doublement de la population (de 41 500 à 86 000 habitants) ;
- un triplement du nombre d'abonnés (de 11 000 à 35 000 abonnés) ;
- un quadruplement de la consommation (de 1 295 000 à 5 200 000 mètres cubes par
an).
La taille actuelle du syndicat, dont le comité groupe 105 délégués, permet à chaque
commune d'y avoir un même poids et offre une bonne structure économique pour une gestion
efficace.
L'agglomération mancelle est alimentée en eau potable à partir d'une seule usine
appartenant à la Communauté urbaine du Mans et traitant les eaux de la rivière l'Huisne.
Un arrêt accidentel de cette usine, dû à une pollution ou un acte de malveillance,
entraînerait un manque d’eau potable immédiat pour une population de 235 000 habitants,
puisque les réserves totales représentent un volume inférieur à la consommation journalière de
pointe.
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La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
148
A la demande du Syndicat intercommunal, qui a présenté un projet de diversification de
la ressource en eau, comprenant une usine de potabilisation des eaux de la rivière la Sarthe et
six forages dans l'étage cénomanien, le préfet de la Sarthe a constitué une commission d'études
associant les services de l'Etat, l'Agence de bassin Loire- Bretagne, la Communauté urbaine du
Mans et le syndicat.
Un projet global relatif à la sécurité de l'approvisionnement en eau de l'agglomération
mancelle, approuvé par toutes les parties, est en cours de réalisation depuis 1992.
Seul, le projet d'usine sur la Sarthe, pièce maîtresse du dispositif, n'a pas encore reçu
un agrément définitif.
Depuis son origine et dans un souci de gestion commune, le Syndicat intercommunal a
confié l'exploitation de tous ses ouvrages à la Communauté urbaine du Mans.
"L'INEXISTENCE TROP FREQUENTE DES ORGANES DE CONTROLES DES
REGIES"
"Les usagers ne sont pas consultés"
La commission consultative, créée par délibération du comité syndical en date du 30
juin 1993 n'a, à ce jour, pas été convoquée, tous les documents relatifs au fonctionnement et à
la gestion du syndicat étant à la disposition des usagers au siège et dans les quarante
communes du syndicat.
D'autre part, aucune modification ou événement majeur ayant une incidence directe
pour les usagers n'est intervenue depuis la création de cette commission.
PROVENCE-ALPES-COTE D'AZUR
Réponse du maire de MANOSQUE (Alpes-de-Haute-Provence)
"L'INSUFFISANTE MISE EN CONCURRENCE"
L'importante opération d'extension de la station d'épuration de Manosque a été
préparée pendant de nombreuses années par les services municipaux et a fait l'objet d'une mise
en concurrence réglementaire tant pour la mission de maîtrise d'oeuvre (procédure de
concours) que pour les travaux (procédure d'appel d'offres).
En parallèle de cette opération très lourde, a été lancée, à partir de 1992, une
renégociation avec le fermier, dont le contrat arrivait à échéance début 1994, négociation
permettant en particulier d'obtenir du fermier une offre de concours au titre du renouvellement
des installations (dont la station d'épuration), dont le fermier bénéficierait pendant la durée
ultérieure de son nouveau contrat. Cette négociation a été lancée indépendamment des
modifications réglementaires qui n'avaient pas encore abouti à cette époque.
Il est certain que la mairie a voulu conclure cette négociation dans le cadre
réglementaire simple précédant la mise en application de la loi Sapin. Cette procédure était par
ailleurs justifiée étant donné l'aboutissement des nombreux mois de négociation et la nécessité
de lancer rapidement l'appel d'offres en vue de la réalisation des travaux d'extension et de
remise aux normes de la station d'épuration.
Par ailleurs, trois offres sérieuses recevables financièrement et techniquement ont été
remises dans le cadre de l'appel d'offres pour les travaux précités. S'il est certain que la SAUR
a été incitée à remettre l'offre économiquement la plus intéressante en tant que fermier et
gestionnaire ultérieur des installations, il est tout à fait normal que la commission d'appel
d'offres ait retenu cette offre qui était nettement la mieux-disante : la mise en concurrence et
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
149
l'incitation d'économie d'échelle de l'opération a permis de réaliser cette opération à des coûts
intéressants pour la collectivité et donc pour les contribuables.
Réponse du maire de GAP (Hautes-Alpes)
Le niveau de la surtaxe instaurée n'a pas été fixé dans le but de financer le budget
principal par le reversement d'excédents mais en prévision d'investissements importants qui
vont être entrepris en vue d'assurer une diversification de la ressource en eau potable de la
ville. Ainsi est-il actuellement envisagé d'abandonner une prise d’eau dans la Drac, d'acheter
une source et de construire une canalisation d'amenée d’eau de 24 kilomètres. S'il avait fallu
passer d'un seul coup d'un niveau de prix de l’eau modeste au niveau qui permet de financer un
tel programme, ce prix de l’eau aurait "explosé".
Le conseil municipal a donc préféré étaler - en partie préventivement - sur plusieurs
années l'augmentation du prix de l’eau afin d'en "lisser" son évolution. Le niveau atteint avant
travaux a d'ailleurs été jugé suffisant en 1996 et la surtaxe n'a pas subi d'augmentation.
Réponse du maire de LA CIOTAT (Bouches-du-Rhône)
A La Ciotat, la hausse du prix de l’eau a été de 60 % en cinq ans de 1990 à 1995, de
11,95 francs le mètre cube à 20,22 francs.
Au 1er janvier 1996, et après renégociation par la nouvelle municipalité, le prix du
mètre cube a été ramené à 17,70 francs.
Réponse du maire de DRAGUIGNAN (Var)
Par deux avenants, l'un au contrat d’eau potable, l'autre au contrat d’assainissement, le
conseil municipal a mis fin au système de préfinancement par le fermier de nouveaux ouvrages,
et ce, suite aux observations de la chambre régionale des comptes.
La ville prend donc à sa charge, pour ce qui est des emprunts contractés par le fermier
pour des ouvrages réalisés, la partie du capital non encore amortie, en contrepartie de la
diminution du tarif de base de la TEC de 0,15 franc le mètre cube, soit l'incidence exacte sur le
prix de l’eau du remboursement de ses participations financières.
Toute nouvelle installation sera bien évidemment, à l'avenir, financée par la commune.
Réponse du président du Syndicat intercommunal d’assainissement de SANARY-SUR-MER -
BANDOL (Var)
L'actuel conseil du syndicat intercommunal d’assainissement de Sanary - Bandol a été
élu en 1989.
Dès cette date, nous avons fait procéder à une expertise technique et financière qui a
mis au jour, entre autres anomalies, un surfinancement d'environ 7,5 MF.
M. le maire de Sanary a demandé à M. le préfet du Var, et à M. le président de la
chambre régionale des comptes, de procéder à un contrôle sur la construction de la station
d'épuration intercommunale et la gestion du syndicat depuis son origine.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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La chambre régionale des comptes a réalisé cette enquête entre 1993 et 1995, a confirmé
toutes les anomalies relevées par l'audit sus-cité et a démontré d'autres mécanismes de
surfacturation portant sur la construction et sur l'exploitation de la station d'épuration.
Le syndicat a également chargé un expert de vérifier la comptabilité de l'exploitant, pour
la partie relative à la station de Sanary - Bandol. Ces investigations ont mis en lumière des frais
non justifiés qui ont eu pour conséquence une surestimation des bilans d'exploitation
prévisionnels servant de base au calcul du prix du traitement.
Du fait que les règles des marchés publics et celles de la mise en concurrence n'ont pas
joué normalement, le syndicat a été amené à entreprendre plusieurs actions contentieuses auprès
des tribunaux civils et administratifs, et avoir recours au "privilège du préalable" pour récupérer
une partie des sommes indûment payées.
Ainsi, une expertise judiciaire est en cours sur les problèmes de génie civil liés à la
garantie décennale.
Le syndicat a émis les titres de recette à l'encontre de l'exploitant, sur la base de
certaines anomalies signalées par la chambre régionale des comptes. Les sommes retenues
représentent à ce jour environ 1,7 MF, dont 1,15 MF font actuellement l'objet d'une procédure
contentieuse intentée par l'exploitant devant le tribunal administratif de Nice.
Les titres de recette relatifs au double comptage d'une partie des effluents seront émis sur
l'exercice 1996.
Le syndicat a également obtenu la remise en état de la filière biologique aux frais du
constructeur-exploitant.
L'objectif du syndicat est aujourd'hui de renégocier un contrat d'exploitation conforme
aux coûts réels en maîtrisant les différents paramètres liés au traitement des effluents et au
traitement des boues, en fonction de l'évolution de la réglementation qui génère elle aussi des
augmentations non négligeables.
Réponse du maire de CAVAILLON (Vaucluse)
Le projet de rapport que vous m'avez transmis traite de l'égalité de traitement entre les
usagers publics et les autres usagers en ce qui concerne la gestion du service public d’eau et
d’assainissement de la commune de Cavaillon.
Votre conclusion provisoire est que, dans ce cadre, l'égalité entre usagers souffrirait
d'une application imparfaite.
En premier lieu, il est tout d'abord indispensable de rappeler que les tarifs et les
ristournes qu'applique aujourd'hui la SDEI résultent de l'application d'une délibération du
conseil municipal de Cavaillon en date du 22 octobre 1984 reçue en sous-préfecture le 31
octobre 1984.
Il résulte donc clairement de ce rappel :
- que, d'une part, la municipalité actuelle n'est en rien à l'origine des modalités de
ristourne en faveur de la commune de Cavaillon ;
- que, d'autre part, cette délibération n'ayant fait l'objet d'aucune observation du
contrôle de légalité, ni d'aucun contentieux par un usager, ni enfin d'observation de la part du
comptable public, la municipalité actuelle devait tenir ladite délibération pour parfaitement
légale et ne peut que s'en tenir à cette position aussi longtemps que la juridiction administrative,
seule autorité compétente, pour apprécier la légalité de toute délibération, ne se sera pas
prononcée.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
151
En second lieu et au fond, il est important de remarquer qu'aucune discrimination
tarifaire n'est relevée et que seule la ristourne sur recettes est évoquée.
La délibération du 22 octobre 1984 susmentionnée établit en fait une rémunération
versée par le SDEI à la commune en pourcentage des recettes et avec une condition de
consommation, rémunération qui tend à compenser les différentes prestations qu'assure la
commune de Cavaillon en matière de contrôle général, de surveillance de réseau, de conseils et
de suivi. Cette possibilité est parfaitement envisagée dans le cas de concession ou d'affermage et
doit rester modérée.
En l'espèce, le versement de la SDEI à la commune de Cavaillon pour 1993, soit 112 085
francs, comme le note justement le projet de rapport transmis, correspond globalement au coût
annuel d'un agent.
Ce montant ne paraît en aucun cas exagéré si, bien entendu, le principe même de ce
versement est admis.
Réponse du président du Syndicat intercommunal des eaux
REGION RHONE-VENTOUX (Vaucluse)
"Des services supportant des charges indues et privés parfois d'une partie de leurs
recettes"
S'il est vrai qu'afin de satisfaire la demande des maires surtout des plus petites
communes, celles-ci avaient la possibilité de payer des travaux concernant les poteaux incendie
avec les droits de branchements, il faut rappeler que, pour l'exercice 1992, la somme consacrée à
ces travaux a représenté 0,8 % des dépenses totales d'investissement du syndicat. Le principe
n'était donc pas respecté mais l'impact des charges indues est toujours resté très marginal. Il
convient de noter qu'à la suite des observations faites par la chambre régionale des comptes de
Provence-Alpes-Côte d'Azur, et avant même son rapport définitif, plus aucune dépense liée à la
défense incendie n'a été prise en compte par le syndicat.
"L'influence de la maîtrise d'oeuvre"
Le Syndicat Rhône-Ventoux a toujours choisi son maître d'oeuvre dans le respect des
règles édictées par le code des marchés publics, en matière de passation de marchés d'études et
de maîtrise d'oeuvre.
En ce qui concerne les supposés liens privilégiés entre le fermier et le cabinet, ceux-ci
ont apporté des preuves contraires à la chambre régionale des comptes PACA qui n'en a pas
tenu compte.
Il semblerait, par contre, très intéressant de comparer les taux de rémunération des
différents bureaux d'études et l'on se rendrait compte qu'en ce qui concerne le taux moyen retenu
pour les travaux du Syndicat Rhône-Ventoux, à qui il est reproché d'être sous influence de la
maîtrise d'oeuvre prévue, il s'élève à 7 % alors que la chambre régionale des comptes PACA a,
pour sa part, trouvé tout à fait normal, pour un autre bureau d'études, dans le même domaine
d'activité, un taux de rémunération supérieur à 13 %.
"Les conditions de renégociation de certains contrats"
Le Syndicat Rhône-Ventoux a bien appliqué les dispositions de l'article 47 de la loi Sapin
du 29 janvier 1993. Le fermier a bien été pressenti comme délégataire avant le 31 mars 1993 et a
réalisé des études préliminaires.
Quant à la date apposée sur le contrat d'affermage pour l’eau potable, comme cela a
déjà été écrit, il s'agit d'une erreur matérielle, avec pour preuve, la date du contrat d'affermage
pour l’assainissement qui a été adopté à la même séance (30 mars 1993) et qui, lui, porte bien
cette même date.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
152
LA REUNION
Réponse du maire de SAINT-DENIS
La ville de Saint-Denis, en prenant acte des observations de la Cour, souligne
cependant les trois points suivants :
- la gestion du service public de l’eau a été confiée initialement à la Compagnie
générale des eaux par un traité d'affermage en date du 23 juin 1976, revu le 4 janvier 1991,
bien avant l'entrée en vigueur des lois n° 93-122 (loi "Sapin") et n° 95-101 (loi "Barnier"), qui
ont introduit la notion de concurrence en ce qui concerne les délégations de service public ;
- jusqu'en 1993, où ont été individualisés les budgets annexes de l’eau et de
l’assainissement, la participation aux investissements n'a donc pas été traitée différemment des
autres recettes provenant du fermier. Le budget annexe désormais existe. Cela étant, la
participation aux investissements est à rapprocher de la situation particulière des communes
des DOM. Elles ont affronté et affrontent encore une évolution démographique sans
comparaison avec la métropole. Ainsi, Saint-Denis est passé de 25 000 habitants à 130 000
habitants entre 1950 et 1990, dans un cadre géographique très marqué par des conditions
difficiles de relief. Cette situation exceptionnelle n'a pas été suivie d'un transfert de moyens
financiers en proportion correspondante pour la réalisation des équipements de base. Elles
souffrent encore d'un retard important ;
- à juste raison, la Cour fait remarquer les insuffisances du contrôle exercé, notamment
dans les communes de taille modeste. La ville de Saint-Denis en est bien consciente et s'efforce
de les renforcer, mais là aussi ne peut inscrire cette volonté que dans la réalité du sous-
encadrement qui prévaut dans l'administration des communes de l'outre-mer. Ainsi, la ville de
Saint-Denis comptait 49 cadres A en 1989 pour un effectif permanent de 3 371 employés. En
1995, les cadres A étaient de 88 pour un effectif de 3 500, ce qui souligne autant l'effort fait que
le retard encore à combler, le ratio moyen dans les villes équivalentes étant de 5 %.
RHONE-ALPES
Réponse du maire de GRENOBLE (Isère)
I.
-
OBSERVATIONS
APPORTEES
AUX
EXTRAITS
DU
RAPPORT
CONCERNANT LA COMMUNE DE GRENOBLE
En premier lieu, je dois vous préciser que la majeure partie de vos observations portant
sur l'analyse des contrats de gestion déléguée de l’eau et de l’assainissement conclus le 3
novembre 1989 et l'examen des modalités de leur application recueille mon assentiment à
quelques remarques près.
En matière d'amortissement des immobilisations, vous indiquez que les mêmes biens
étaient amortis deux fois, une fois par la commune et une autre fois par le fermier. Pour
répondre à cette remarque, la ville considère, qu'en sa qualité de propriétaire des installations,
elle détient, seule, la responsabilité de l'amortissement de ses biens.
II. - GESTION DES SERVICES EAU ET ASSAINISSEMENT EN REGIE
DIRECTE
A mon sens, votre rapport ne fait pas mention des années de gestion en régie directe
antérieures à la décision d'affermage des services de l’eau et de l’assainissement au cours
desquelles des efforts financiers considérables avaient été faits par la ville de Grenoble.
Ces efforts avaient abouti à un service rendu aux usagers dans des conditions
extrêmement satisfaisantes, et à un coût tout à fait raisonnable.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
153
Par voie de conséquence, la décision de procéder à un affermage n'avait donc pas pour
justification réelle la nécessité de réaliser de lourds investissements, comme l'a noté la chambre
régionale des comptes dans ses observations.
III. - APPRECIATION PORTANT SUR L'ECONOMIE GENERALE DES DEUX
CONTRATS D'AFFERMAGE
Il est évident que l'une des motivations de la décision d'affermage de ces deux services,
du point de vue du maire de l'époque, était, devant les graves difficultés financières engendrées
par sa politique, d'anticiper l'encaissement de ressources, afin de financer des actions
étrangères au service de l’eau et de l’assainissement.
C'est sans doute la raison principale de la durée extrêmement longue des deux
conventions, en contradiction totale avec les recommandations du ministre de l'intérieur dans
sa circulaire du 7 août 1987.
Les deux conventions d'affermage conclues fin 1989 ont organisé entre la commune et
le fermier des relations déséquilibrées, tandis que les usagers se sont vu imposer au bénéfice du
fermier de fortes augmentations de tarifs.
Comme l'indiquait la chambre régionale des comptes, en contrepartie d'un gain à court
terme - l'encaissement anticipé de recettes destinées au financement irrégulier d'une politique
d'investissement étrangère aux services affermés et dont la charge doit être supportée par les
contribuables - la commune a fait abandon sur le long terme de recettes qui finançaient son
budget principal.
De ce fait, ce sont les contribuables qui ont vu disparaître un avantage, au profit, non
pas des usagers, comme le voudrait le retour à la règle, mais du fermier, puisque ces sommes
perdues par la commune s'ajoutent aux recettes supplémentaires procurées par l'augmentation
des tarifs.
IV. - OBJECTIFS FIXES ET REALISES PAR LA NOUVELLE EQUIPE
MUNICIPALE
Confirmant sa volonté d'atteindre le plus rapidement possible les objectifs pour lesquels
l'équipe municipale s'était engagée sur ce point pendant la campagne électorale des
municipales de juin 1995, le conseil municipal, dans ses séances du 6 juillet et 7 décembre
1995, 25 mars, 13 mai, 17 juin et 16 septembre 1996, m'a donné mandat, au vu des
observations définitives de la chambre régionale des comptes Rhône- Alpes, pour agir afin qu'il
soit mis fin aux illégalités et irrégularités financières révélées, tout en réaffirmant le double
objectif d'une diminution du prix de l’eau et de l’assainissement facturé aux usagers et d'un
retour de la gestion de l’eau et de l’assainissement dans le secteur public.
Conformément aux observations de la chambre régionale des comptes qui concluait son
avis en indiquant "qu'il existe ainsi de solides raisons de renégocier les conventions d'affermage
afin de redresser leur économie dans l'intérêt des usagers de la ville de Grenoble", les
discussions menées avec le fermier ont abouti à un accord qui réalise nos engagements et qui se
traduit par :
- la suppression des contributions et avantages jugés illégaux ou injustifiés et la
correction des erreurs et omissions liées à l'application des contrats ;
- la baisse du prix de l’eau et de l’assainissement ramené de 13,59 F (TTC) à 11,66 F
(TTC) au 1er janvier 1996 ;
- la transformation de la société anonyme en société d'économie mixte locale ;
- la création d'un comité des usagers grenoblois de l’eau et de l’assainissement.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
154
Réponse du maire de MODANE (Savoie)
Les accords passés en 1991 avec le groupe Lyonnaise des Eaux - Dumez pour
l'affermage, pendant trente ans, des services de l’eau et de l’assainissement avaient notamment
pour contrepartie le versement d'une contribution de 6 millions de francs pendant six ans pour
le service de l’eau et 3 millions de francs pendant 6 ans pour le service de l’assainissement.
L'exploitation des remontées mécaniques de la station de Valfréjus a été confiée en
1991 par une concession de quinze années à la société anonyme d'économie mixte Valfréjus
Développement, au capital de un million de francs, ayant pour actionnaires à 65 %, la
commune de Modane, 20 % la société Lyonnaise des Eaux - Dumez, et 15 % la société
Transmontagne, cette dernière étant exploitante des remontées mécaniques.
REPONSES DES ENTREPRISES PRIVEES DELEGATAIRES
Réponse de la Compagnie générale des eaux
Le rapport public particulier de la Cour appelle de notre part deux remarques
liminaires :
- nombre d'observations de ce rapport portent sur des points (droit d'entrée, durée
contractuelle, etc.) qui ont, depuis la période sous contrôle, fait l'objet d'encadrements
radicalement nouveaux par les lois et règlements récents qui ont concerné notre profession.
Ceci n'invalide pas les observations de la Cour sur la période précédente. Mais il nous paraît
capital de souligner, pour le lecteur, que les bouleversements juridiques récents font qu'il existe
clairement à nos yeux un avant et un après. Or c'est l'avant qui est ici, pour l'essentiel, l'objet
du rapport ;
- 10 contrats gérés par la Compagnie générale des eaux font l'objet, à un titre ou à un
autre, d'observations de la Cour. Ce nombre est à mettre en regard des quelque 2 300 contrats
gérés par la Compagnie en France.
I. - OBSERVATIONS GENERALES
a) Le rapport indique qu'"une motivation importante de la décision de déléguer la
gestion du service public réside dans l'importance et les modalités de sa contrepartie
financière". Ce peut être en effet parfois une motivation, mais elle nous paraît très seconde au
regard de ce que nous croyons être les vraies raisons du choix de déléguer la gestion d'un
service, à savoir :
- la nécessité de recourir à un professionnel de l’eau en un temps où, comme le
reconnaît d'ailleurs la Cour dans son rapport, "les techniques modernes de traitement des eaux
requièrent des compétences que n'ont pas toujours les communes". A titre d'illustration, la
Générale des eaux gère un budget de recherche de l'ordre de 350 MF, qui seul peut lui
permettre de répondre à des besoins de plus en plus complexes ;
- le souci d'efficacité de gestion : l'observation de cas concrets de services passés d'une
gestion en régie à une gestion déléguée, et ce pour une population concernée de près d'un
million d'habitants, fait apparaître un gain de productivité qui s'élève en moyenne à environ
22 % ;
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
155
- le souci de qualité du service. On notera, à cet égard, que le taux de non-conformité
aux normes sanitaires est, à la Compagnie, d'après les statistiques du ministère de la santé,
quatre fois inférieur à celui connu dans les régies. De même, notre expérience a montré que
chaque fois que nous prenions en gestion déléguée un réseau dont le rendement était insuffisant,
l'amélioration de l'étanchéité qui en résultait était de l'ordre de 30 %.
Ce sont là, nous semble-t-il, les raisons profondes du succès de la gestion déléguée en
France, comme de manière croissante à l'étranger, beaucoup plus que le souci de mobiliser
plus aisément des financements en temps de difficultés financières pour les collectivités locales.
La Cour précise par ailleurs que "pour l'autorité délégante, le contrat de délégation de
service présente l'intérêt de desserrer dans le court terme les contraintes budgétaires
immédiates ; mais les conditions tarifaires qui en sont la contrepartie pèsent à long terme sur
les usagers". Elle vise ici les seuls cas où les contrats de délégation impliquent des
investissements ou des financements. Cet étalement dans le temps de l'investissement du
délégataire correspond à un choix délibéré, et d'ailleurs très courant, de répartition de l'impact
financier entre les actuels et les futurs usagers (pourquoi les usagers d'aujourd'hui
supporteraient-ils tout l'impact d'investissements qui profiteront aux usagers de demain ?). En
sens inverse, on notera que la prise en compte dès la première année dans le prix des services
délégués de l'indispensable renouvellement des installations (ce qui est rarement le cas pour les
régies), permet de préserver l'avenir en évitant les risques de surcoûts futurs. Dans ces
conditions, l'arbitrage réalisé entre court et long terme nous paraît équilibré.
b) La Cour évoque l'"ambiguïté des relations contractuelles" qui naîtrait de
l'introduction de dispositions concessives dans les affermages. Outre qu'il s'agit là d'une
combinaison consacrée tant par la jurisprudence administrative que par la loi n° 93-122 du 29
janvier 1993, elle vise des cas très limités, et relève d'un choix préparé et décidé en toute
connaissance de cause par la collectivité. Il paraît donc difficile de parler d'ambiguïté à propos
d'une application stricte de la loi qui ne vise qu'à permettre une certaine adaptabilité du contrat
de délégation à des besoins très circonscrits des collectivités. En toute hypothèse, le caractère
par nature explicite et écrit du contrat de gestion déléguée paraît garantir une meilleure
transparence que les dispositions implicites qui s'appliquent à la gestion directe.
c) Le rapport évoque, semble-t-il pour la déplorer, la domination du secteur privé par
quelques grands groupes français de taille internationale, ainsi que l'exercice imparfait de la
concurrence qui en résulterait. A cela, notre réponse tient en quatre points :
- la coexistence, en France, de quatre opérateurs nationaux ainsi que de plusieurs
acteurs régionaux significatifs en compétition sur le marché de la gestion déléguée de l’eau et
de l’assainissement, conduit à une concurrence bien plus forte dans ce domaine que dans
d'autres secteurs de services de l'économie française - électricité, gaz, transports ferroviaires,
télécommunications jusqu'à très récemment. Par ailleurs, à l'heure où les atouts de la gestion
déléguée séduisent un nombre croissant de pays et où la Banque mondiale évoque un "modèle
français" dans la prise en compte des besoins collectifs, l'existence d'acteurs français de rang
international est à l'évidence une chance pour la France ;
- le rapport évoque l'ouverture récente du marché à la concurrence étrangère. Notre
conviction est que cette concurrence va s'intensifier dans les années à venir, particulièrement en
provenance des principales sociétés britanniques qui disposent par rapport à leurs concurrents
français d'avantages considérables en termes de cash-flow, de capacité bénéficiaire et de
capitalisation boursière ;
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
156
- à l'inverse, les marchés de nos grands voisins, à l'exception de celui de la Grande-
Bretagne, sont autrement moins ouverts à la concurrence que le marché français, puisque
généralement dominés par le système de la régie. Il faudrait donc plutôt parler d'une
dissymétrie de concurrence, permettant actuellement à des opérateurs étrangers de venir en
France alors que l'inverse n'est généralement pas possible ;
- enfin, on rappellera que les procédures de mise en concurrence à l'occasion des
délégations de services publics ont été, en France, renforcées par plusieurs lois récentes. Ainsi,
la procédure d'attribution d'une délégation comprend-elle pas moins de 23 étapes, dont deux
passages devant le conseil municipal et un délai de réflexion obligatoire ; la durée des contrats
a été limitée pour soumettre régulièrement la dévolution des services publics à la concurrence ;
dans le même esprit, les possibilités de prolongation des contrats ont été strictement limitées :
la prolongation des contrats actuellement établis ne peut jamais être tacite, mais doit toujours
faire l'objet d'un vote de l'assemblée délibérante.
Cet ensemble de facteurs nous conduit à avancer qu'en France la concurrence est sans
comparaison possible plus forte qu'en dehors de nos frontières, et de surcroît singulièrement
renforcée par les lois récentes.
d) La Cour évoque certes les "difficultés de mise en oeuvre de la loi du 29 janvier
1993". Leur évocation ne nous paraît cependant pas pouvoir réellement compromettre les effets
d'un texte qui a entraîné un bouleversement des relations contractuelles entre collectivités
locales et entreprises délégataires. D'une part en effet, s'agissant de la Compagnie, seul un cas,
au demeurant modeste, est cité de contrat renouvelé sans mise en concurrence, et ce avant
l'entrée en vigueur de la loi. D'autre part, la prime au sortant évoquée par la Cour lors des
mises en concurrence ne résiste pas à l'examen des faits : il suffit de rappeler que, par le biais
notamment des rapports annuels du délégataire, les collectivités délégantes comme les
concurrents ont un accès direct aux conditions techniques et financières d'exécution des
délégations : dans ces conditions, l'information est largement partagée, à un point que l'on
retrouve d'ailleurs dans peu d'autres secteurs de la vie économique ouverts à la concurrence.
Enfin, le jeu de l'article 40, alinéa 2 b) de la loi qui ouvre, pour répondre à des besoins
d'investissement, des possibilités de prolongation de la durée de la délégation et qui est mis en
cause par la Cour, est soumis à des conditions d'application très strictes (précisées à deux
reprises depuis la loi de 1993) qui en limitent fortement la mise en oeuvre (environ 5 cas par an
en 1995 et en 1996, à comparer aux 2 300 contrats de la Compagnie). Il est difficile d'y voir une
menace pour les nouvelles règles issues de la loi du 29 janvier 1993. Notre réalité quotidienne,
c'est bien que les contrats ont un terme, et les remises en concurrence ont été nombreuses en
1996.
e) Enfin, le rapport laisse entendre que les délégataires ne sont pas suffisamment
contrôlés. Pourtant, outre que des dispositions déjà anciennes du code des communes (art. R.
324-2 à R. 324-4) prévoyaient nombre de contrôles sur les délégataires, les lois des 2 et 8
février 1995 ont renforcé les moyens des assemblées délibérantes des collectivités locales,
notamment pour l'établissement rendu obligatoire, par le délégataire, d'un rapport annuel sur
la qualité du service et d'un compte rendu financier soumis au contrôle des chambres
régionales des comptes, tandis que le maire a l'obligation de présenter chaque année au conseil
municipal un rapport annuel sur le prix et la qualité de ses services d’eau potable,
d’assainissement et de déchets ménagers.
Là encore, il nous semble que peu de secteurs sont désormais aussi contrôlés que celui
de l’eau - par les chambres régionales des comptes, mais aussi les ministères techniques, les
directions départementales de la concurrence, de la consommation et de la répression des
fraudes, ainsi que les experts souvent mandatés par les collectivités.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
157
Enfin l'idée selon laquelle, par rapport à une exploitation en régie, la délégation
impliquerait un "surcoût" en raison du contrôle que le délégant doit exercer sur le délégataire,
nous paraît curieuse puisqu'elle laisse entendre que les régies ne sont pas contrôlées. Il nous
semble à l'inverse très clair que l'on contrôle plus facilement un service externalisé qu'un
service qui ne l'est pas : tous les salaires, frais et charges d'un délégataire sont ainsi, pour ne
prendre que cet exemple, intégrés dans un même budget, de sorte que le montant de la facture
d’eau correspond de façon certaine au coût du service. Et il est clair aussi que la transparence
a un coût, qu'il faut assumer.
II. - OBSERVATIONS PARTICULIERES
a) Ville de Saint-Etienne
S'agissant des seules observations de la Cour la concernant directement, la Compagnie
fait remarquer les deux points suivants :
- la constitution d'une filiale commune Lyonnaise des eaux - Compagnie générale des
eaux ne peut être imputée à un accord entre les deux sociétés. En effet, la Cour relève elle-
même que l'association a été imposée par la ville de Saint-Etienne, dans le cadre de la
procédure de consultation qu'elle avait choisi d'organiser (sans y être obligée) ;
- la prolongation du contrat de la Société stéphanoise de services publics (SSSP) -
filiale de la Compagnie générale des eaux - pour l'exploitation de la station d'épuration de la
ville de Saint-Etienne, a fait l'objet de négociations approfondies au terme desquelles la SSSP a
pris en charge le financement, la réalisation et l'exploitation d'un ensemble de chaulage des
boues, représentant un investissement de 1,31 million de francs hors taxes et permettant de
rendre celles-ci conformes aux conditions techniques d'une mise en décharge. On voit mal, dans
ces conditions, en quoi il aurait pu y avoir une situation déséquilibrée entre les parties.
b) Commune de Jarny
L'intervention de la Compagnie a permis de mener à bien, dans un contexte
administratif et technique complexe et difficile, une opération visant à enrayer les menaces
fortes que faisait courir à très court terme sur la distribution de l’eau à Jarny l'arrêt des
exhaures par les mines de fer de Lorraine. Sur le plan technique et financier, la solution retenue
a reçu l'accord de l'ensemble des nombreux organismes impliqués (Agence de l’eau Rhin-
Meuse, Nancy, direction départementale de l'équipement, etc.). Sur le plan juridique, cette
solution a pu être rapidement mise en oeuvre par la Compagnie générale des eaux , dans le
cadre de son contrat d'affermage, en raison de sa faculté d'obtenir l'autorisation préalable des
autorités sanitaires selon une procédure simplifiée (celle-ci n'étant possible que du fait de ses
droits sur le procédé en cause et de l'existence d'une première expérience suivie par les
autorités sanitaires). Elle est intervenue dans le cadre d'un avenant conclu conformément à
l'article 40, alinéa 2 b), de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 et à des conditions normales. Si
l'avenant a conduit à une prolongation de la durée contractuelle, celle-ci a été calculée
strictement selon les principes fixés par l'article 40, alinéa 1er, de la loi n° 93-122 du 29 janvier
1993. Il en est de même de la prolongation du contrat d’assainissement.
c) Syndicat intercommunal d’assainissement du Jarnisy
La réalisation d'équipements nouveaux était impérative pour répondre aux nouvelles
normes réglementaires en matière d’assainissement. Le recours à l'article 40, alinéa 2 b), de la
loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 s'est fait dans des conditions régulières et d'ailleurs non
contestées.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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e) Ville de Draguignan
La réalisation de l'usine de traitement d’eau potable est intervenue dans le cadre non
pas d'une concession de service public mais d'un marché public dont la procédure de passation
a été organisée et contrôlée par la ville selon le code des marchés publics. Le rôle des différents
intervenants dans l'opération de construction a été clairement défini. A cet égard, la société
TEC, fermier du service municipal de distribution publique d’eau potable, a apporté un
financement partiel pour cette opération sans en assumer la maîtrise d'ouvrage : celle-ci est
restée publique, ainsi qu'en atteste l'intervention de la ville de Draguignan dans la passation
des différents marchés de services et de travaux liés à cette opération. Cette situation, qui a fait
l'objet d'un suivi comptable spécifique de la part du fermier et d'un contrôle de la part de la
ville de Draguignan, est claire et nette.
f) Ville de Blagnac
L'intervention du délégataire s'est placée dans le cadre d'une concession de service
public et non pas d'un marché public de travaux : elle comporte un financement de l'ouvrage
par la Compagnie générale des eaux . Un tel schéma juridique est légal (ainsi que l'admet la
Cour) et ses conséquences directes sont connues : la maîtrise d'ouvrage est régulièrement
transférée de la collectivité au concessionnaire et la ligne de partage entre les éléments
d'affermage et de concession est clairement et précisément établie.
Quant au coût de 45 MF de l'usine d'épuration, il se décompose en 1,8 MF de
canalisations de liaison avec l'ancienne station et 43,2 MF d'usine stricto sensu : il se justifie
par le strict respect des normes européennes en vigueur en matière de traitement des eaux
usées. La réalisation en concession de cet ouvrage garantit par ailleurs à la collectivité que les
performances annoncées seront tenues puisque le maître d'ouvrage en est lui-même l'exploitant
(concept de garantie de résultat).
g) Ville de Paris
L'établissement de deux zones géographiques de distribution d’eau et l'attribution de
leur gestion à deux délégataires distincts et concurrents relèvent, non pas d'une initiative de ces
derniers, mais d'une mesure d'organisation de la distribution d’eau dans la ville de Paris,
décidée par cette dernière préalablement au choix des délégataires retenus. Cette organisation
opère une séparation à la fois matérielle et territoriale des missions de distribution d’eau et
crée par ailleurs, sur le territoire de la ville de Paris, un contexte de concurrence comparative
permanente, similaire au système qui s'applique aujourd'hui en Angleterre.
h) Ville de Saint-Denis de la Réunion
La somme de 31 millions de francs visée par la Cour ne peut être rangée dans la
catégorie des droits d'entrée. Elle est contractuellement et exclusivement destinée à l'extension
et à la modernisation du service d’eau. Son versement prévu par le nouveau contrat de vingt
ans est régulier et a pour but de permettre à la ville de réaliser les investissements
indispensables.
La Compagnie générale des eaux a, à diverses reprises en 1991, 1992 et 1993,
régulièrement demandé à la ville de réaliser ces investissements et, de son côté, la ville a
confirmé sa volonté de procéder aux investissements nécessaires, n'étant retardée en cela que
par un recours devant la juridiction administrative. D'autre part, la Compagnie générale des
eaux a constamment rempli ses obligations d'information et de communication. Elle a toujours
remis, dans les conditions prévues, les comptes rendus annuels et les programmes de travaux.
Par ailleurs, c'est bien la ville qui a établi son programme d'investissements pour la période de
1996 à 2001, avec une simple et légitime consultation de son exploitant.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
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i) Ville de Toulouse
La Cour met en exergue le déficit des comptes financiers du délégataire. Or, les
sommes visées par la Cour constituent des charges du délégataire trouvant leur contrepartie
directe dans l'exécution de ses obligations contractuelles et le déficit n'a d'impact ni sur le prix
de l’eau ni sur le montant des investissements réalisés par le délégataire dans le cadre de ses
obligations contractuelles. Par ailleurs, si la Cour reconnaît que le délégataire a réalisé des
gains de productivité qu'elle qualifie d'importants, ces gains ont pu être mobilisés par la ville,
ce qui est à mettre à l'actif de la délégation des services publics. Enfin, si les surcoûts de mise
aux normes européennes de la station d'épuration n'ont pas été pris en compte par la
concession signée en 1990, c'est délibérément en raison de l'incertitude, qui n'a pas
complètement disparu à ce jour, sur les travaux à réaliser.
Réponse de la société Lyonnaise des eaux
Lyonnaise des eaux tient tout d'abord à préciser que, pour ce qui concerne les services
d’eau et d’assainissement qu'elle gère directement ou par l'une de ses filiales, la Cour fait
référence à huit collectivités ; les critiques portent essentiellement sur deux contrats, Saint-
Etienne et Grenoble, parmi la cinquantaine de collectivités ayant fait l'objet de contrôles par les
chambres régionales des comptes. Cela signifie que la majorité des contrats du groupe
Lyonnaise des eaux contrôlés est exempte de remarques.
Lyonnaise des eaux laisse aux sociétés Stéphanoise des eaux et Société des eaux de
Grenoble le soin de répondre aux observations sur les contrats de Saint-Etienne et de Grenoble
qui les concernent directement.
En outre, la présente réponse est rédigée au vu des seuls extraits du rapport de la Cour
qui ont été communiqués à Lyonnaise des eaux.
Enfin, Lyonnaise des eaux se doit d'insister sur le fait que nombre des observations de
la Cour portent, comme elle-même ne manque pas de le souligner, sur des difficultés qui
appartiennent au passé depuis que des dispositions législatives nouvelles, qui avaient
précisément pour objet d'y mettre fin, ont été adoptées.
1. SUR "LES ASPECTS FINANCIERS DE LA DELEGATION"
Sous la rubrique "La délégation, moyen de financer les investissements", la Cour
considère qu'une motivation importante pour les collectivités locales de déléguer la gestion de
leur service public réside dans les contreparties financières, le contrat de délégation présentant
l'intérêt de desserrer dans le court terme les contraintes budgétaires immédiates...
Les contreparties financières immédiates (droit d'entrée) qui, selon la Cour, ont pu
conduire en France les collectivités locales à confier la gestion de leurs services d’eau et
d’assainissement à un délégataire ne peuvent plus être aujourd'hui considérées comme
déterminantes.
En effet, ainsi que la Cour le souligne à juste titre, la loi du 2 février 1995 a interdit le
versement de droits d'entrée qui avaient permis à certaines collectivités de desserrer leurs
contraintes budgétaires en obtenant par ce moyen une recette pour leur budget principal. La
pratique des droits d'entrée est désormais révolue.
La Cour relève en outre que les conditions tarifaires qui sont la contrepartie des choix
effectués par les collectivités délégantes pèsent à long terme sur les usagers.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
160
Si on fait exception des situations révolues de transfert opéré entre les recettes du
service d’eau et le budget principal de la collectivité, Lyonnaise des eaux fait observer que,
pour ce qui la concerne, la Cour n'a pas relevé d'exemples dans lesquels la répercussion des
coûts sur les tarifs ne serait pas strictement justifiée.
Enfin et surtout, les raisons qui conduisent une collectivité locale à choisir la
délégation comme mode de gestion de leurs services publics d’eau et d’assainissement ne sont
pas réductibles aux seules considérations d'ordre budgétaire et financier.
Notre métier de délégataire consiste à gérer dans les meilleures conditions de qualité et
d'efficacité ces services en faisant profiter les usagers d'une compétence et d'une technicité
reconnues unanimement tant en France qu'à l'étranger.
Toute collectivité locale trouve un intérêt légitime, tout en conservant la propriété des
installations, à recourir à des entreprises spécialisées pour gérer des services chaque jour plus
complexes, notamment en raison des contraintes environnementales de plus en plus lourdes
(l'évolution des normes de qualité des eaux est une illustration de cette réalité).
Le contrat de délégation opère un transfert des risques techniques et industriels sur le
délégataire mais réserve à la collectivité les décisions essentielles : définir les objectifs à
atteindre (le délégataire a une obligation de résultat), fixer les tarifs, programmer les
investissements, contrôler les résultats obtenus et informer le public sur la qualité du service
rendu.
2. SUR "LES EFFETS D'UNE CONCURRENCE IMPARFAITE"
"Un secteur très concentré"
La concentration des entreprises du secteur de l’eau s'explique essentiellement par le
savoir-faire et la capacité de recherche et de mise en oeuvre de moyens techniques importants
qu'ont su développer les grands groupes dans le domaine de la gestion déléguée des services
d’eau. Lorsque les premières entreprises en France se trouvent également être les premières
dans la compétition internationale, on ne saurait inscrire leur primauté au compte d'une
concurrence insuffisante.
S'il est exact que la concentration dans ces secteurs a pu se trouver accentuée par le fait
que deux des principaux délégataires ont constitué en commun le contrôle de filiales, il faut
ajouter à la raison justement relevée par la Cour, et selon laquelle, à Saint- Etienne et à Vichy,
ce résultat venait d'une demande expresse formulée par les collectivités délégantes, que ces
situations demeurent en outre exceptionnelles. Ainsi, Lyonnaise des eaux gère seule, par
exemple, les services d’eau de Bordeaux, Orléans et Dijon...
"Des contrats de délégation de longue durée"
Pour ce qui concerne la durée des contrats de délégation qui se trouverait prolongée
par simple avenant, Lyonnaise des eaux tient à préciser que de telles prolongations sont
désormais encadrées par les dispositions de l'article 40 b de la loi du 29 janvier 1993 qui limite
les possibilités de prolongations dans des conditions très strictes en prenant en considération la
durée d'amortissement des investissements nécessaire afin de ne pas conduire à une
augmentation manifestement excessive du tarif.
La Cour ajoute que la prolongation des contrats peut être à l'origine d'importants
profits pour le délégataire.
Bien que formulée avec une certaine prudence, cette affirmation ne repose, au cas
particulier, sur aucun fait précis concernant le groupe Lyonnaise des eaux .
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
161
En tout état de cause et pour les raisons évoquées précédemment, la question de la
durée des contrats se trouve désormais réglée par les dispositions légales.
"Les conditions de concurrence des contrats de délégation de service public"
La Cour considère que des cas récents prouvent qu'il est difficile de placer les
candidats éventuels dans des conditions d'égalité face aux délégataires déjà en place.
Il ne saurait être fait grief à une collectivité de renouveler le contrat de délégation avec
le délégataire en place, dès lors que son offre lui apparaît la meilleure, y compris dans le
domaine de la qualité du service attendu.
En tout état de cause, sur le plan de la connaissance technique du service délégué, il ne
peut être contesté que le délégataire en place dispose d'une expérience que les autres candidats
ne peuvent avoir.
Sur le plan financier, l'analyse des informations contenues dans le rapport du
délégataire et de celles figurant dans la comptabilité de la collectivité est de nature à permettre
aux différents candidats de disposer des éléments nécessaires à la présentation des offres.
3. SUR "LE MANQUE D'INFORMATION ET DE CONTROLE"
La Cour observe que les contrôles du délégataire ne seraient pas toujours ressentis, par
les collectivités délégantes, comme une démarche normale et utile, mais plutôt comme une
charge supplémentaire imposée par les usagers.
Aussi la Cour considère que, par rapport à l'exploitation en régie, la délégation
implique un "surcoût".
Outre qu'elle donne à penser que les régies ne feraient l'objet d'aucun contrôle, ce qui
serait singulier, la notion de "surcoût" pourrait induire a contrario l'idée que les autres
éléments de coûts entre la régie et la délégation sont identiques.
En réalité, les modalités de contrôle sont l'une des nombreuses différences entre les
structures de coûts des régies et de la gestion déléguée. Mais, parmi ces différences, certaines
sont à l'avantage de la régie tandis que d'autres sont à l'avantage de la gestion déléguée. Ainsi,
par exemple, les coûts d'approvisionnement de Lyonnaise des eaux sont, en raison de flux
économiques plus importants, très souvent inférieurs à ceux d'une régie.
Réponse de la Société stéphanoise des eaux
1. SUR "LES ASPECTS FINANCIERS DE LA DELEGATION"
"La délégation, moyen de financer les investissements"
La Cour considère qu'"une motivation importante pour les collectivités locales de
déléguer la gestion de leur service public réside dans l'importance et dans les modalités de sa
contrepartie financière". Elle cite à cet égard le cas de Saint-Etienne.
La Stéphanoise des eaux fait observer que l'intérêt pour la ville de Saint-Etienne de
déléguer ses services d’eau et d’assainissement ne saurait être limité aux seuls aspects liés aux
recettes budgétaires.
Il convient de souligner en effet l'action positive menée par notre société depuis la
concession des services en octobre 1992.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
162
La Société stéphanoise des eaux a déployé des efforts importants pour améliorer et
moderniser les services publics d’eau et d’assainissement, parmi lesquels on peut citer :
- l'établissement et l'informatisation des plans des réseaux ;
- d'importants investissements (123 MF en 3 ans) pour le renouvellement des réseaux
d’eau, la réhabilitation des installations et l'extension des locaux d'exploitation ;
- la rénovation du parc des compteurs (la proportion de compteurs âgés de plus de
quinze ans est passée de 70 % en 1992 à 19 % en 1995, ce qui a nécessité le remplacement de
32 000 compteurs) ;
- l'amélioration de la productivité, notamment au niveau des charges du personnel : la
Société stéphanoise des eaux emploie actuellement 170 personnes alors que la régie en
employait 209. Mais, avec un personnel moins nombreux, la société doit faire face à des
missions nouvelles (encaissement des factures, traitement des contentieux et gestion du
personnel) qui n'existaient pas dans les services d’eau et d’assainissement de la ville. Ces
missions étaient mises techniquement et financièrement à la charge d'autres services de la ville.
L'effort de productivité du concessionnaire est donc bien réel et très significatif.
De plus, il faut observer que les nombreux contrôles dont la Société stéphanoise des
eaux a fait l'objet depuis octobre 1992 (expertise judiciaire, chambre régionale des comptes
Rhône-Alpes, tribunal administratif de Lyon) n'ont relevé aucun dysfonctionnement ni aucun
manquement dans la gestion des services publics qui lui ont été délégués.
Ainsi, la Société stéphanoise des eaux a mené à bien ses missions malgré un contexte
difficile, fortement médiatisé, résultant du contentieux sur le prix de l’eau dont l'origine est
antérieure à la délégation des services.
2. SUR L'ENCADRE "LA VILLE DE SAINT-ETIENNE", 8e ALINEA
La Cour observe que le concessionnaire "demeure, en outre, bien placé pour offrir ses
services lors de la réalisation nécessaire des travaux importants qu'il ne s'est, pour l'essentiel,
pas engagé à financer lui-même".
Cette remarque ne s'applique pas au cas du concessionnaire.
En effet, la Société stéphanoise des eaux n'a jamais été candidate aux marchés publics
passés par la ville de Saint-Etienne dans le cadre du code des marchés publics et n'a pas
vocation à se comporter comme une entreprise de travaux.
3. SUR "LES ENTORSES A L'EGALITE ENTRE LES USAGERS"
Au titre des entorses à l'égalité des usagers, la Cour évoque le dispositif de garantie par
la ville de Saint-Etienne du chiffre d'affaires provenant des ventes d’eau aux communes de la
périphérie. Elle indique que le concessionnaire et les bénéficiaires étaient ainsi privilégiés en
n'acquittant pas le prix réel de l’eau.
L'analyse de la Cour n'est pas exacte.
Le mécanisme de garantie prévu initialement par le contrat se justifiait par la double
incertitude existant au moment de la passation du contrat tant sur les volumes livrés aux
communes environnantes que sur le tarif applicable en l'absence de conventions.
Cette garantie de recettes n'avait pas d'incidences sur le prix de l’eau payé par l'usager
stéphanois. En effet, lorsque la garantie était mise en jeu, il y avait prélèvement sur la
redevance versée par le concessionnaire à la ville et inscrite par cette dernière à son budget
général.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
163
Quant à évoquer une rupture d'égalité entre les usagers, les communes étant supposées
privilégiées en n'acquittant pas le prix réel de l’eau, une telle remarque n'a pas de fondement
juridique.
En effet le principe jurisprudentiel d'égalité des usagers du service public s'applique à
l'égard des usagers placés dans des situations comparables.
On ne peut prétendre que les communes ayant la charge de leur réseau de distribution
seraient dans une situation identique à celle du consommateur stéphanois.
Les différences tarifaires finalement admises par la ville de Saint-Etienne à l'égard des
communes de sa périphérie sont donc tout à fait conformes aux principes juridiques régissant la
fixation du tarif des services publics locaux.
4. SUR "LES EFFETS D'UNE CONCURRENCE IMPARFAITE"
"La pratique des droits d'entrée"
La Cour observe que le transfert immédiat du droit d'entrée au budget principal obère
pour longtemps la capacité des services à financer leurs investissements.
La Stéphanoise des eaux précise que, par suite de l'annulation des droits d'entrée
intervenue en décembre 1995 dans le cadre de l'avenant n° 7 au contrat eau et de l'avenant n° 3
au contrat assainissement, le prix de l’eau et la redevance d’assainissement tels qu'ils sont fixés
actuellement ne sont plus obérés par la répercussion des droits d'entrée.
Ils comportent certes la contrepartie d'une redevance d'occupation du domaine public
et d'une redevance d'utilisation des barrages, mais ceux-ci ont été fixés à un tarif que le tribunal
administratif de Lyon a considéré dans son avis du 7 décembre 1995 comme n'étant pas entaché
d'une erreur manifeste d'appréciation.
5. SUR "LES CONTROLES SOUVENT NEGLIGES"
La Cour relève que la Société stéphanoise des eaux verse à la ville de Saint-Etienne 0,3
% de son chiffre d'affaires pour financer le contrôle du délégataire.
Cette disposition du contrat de concession, en donnant à la ville les moyens financiers
du contrôle, lui permet de se doter de la capacité juridique, administrative et technique de
négociation et de contrôle que la Cour considère comme étant tout à fait indispensable. On
soulignera qu'il est naturel que ce coût soit supporté par le consommateur et non par le
contribuable. Quant au montant de 0,3 % du chiffre d'affaires, il est comparable, voire
inférieur, à ce qui peut être pratiqué par d'autres organismes.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
164
Réponse de la Société des eaux de Grenoble (ex-COGESE)
"Encadré" Le cas de la ville de Grenoble
2e paragraphe
Il est indiqué que la chambre a estimé que les conventions avaient instauré entre les
usagers, les contribuables de la ville de Grenoble et le fermier des relations dont les termes
d'équilibre n'étaient pas établis et la sécurité juridique menacée.
A ce sujet, il faut remarquer :
a) Que les conventions entre la ville de Grenoble et la COGESE ne traitent pas de la
relation usagers-contribuables. En effet, l'affectation budgétaire par la ville des redevances
perçues du fermier ne résulte pas des dispositions des conventions ;
b) Et qu'économiquement les conventions ne traduisent pas un déséquilibre en faveur de
la COGESE.
Bien au contraire, une étude effectuée par le Boston Consulting Group (BCG) et
transmise à la chambre régionale des comptes de Rhône- Alpes met en évidence un avantage
financier en faveur des Grenoblois de 37 millions de francs en valeur actuelle 1989.
Cette étude a été prise en compte par la chambre régionale des comptes de Rhône-
Alpes, qui a estimé que ses données de base pouvaient être retenues. La chambre de Rhône-
Alpes apporte toutefois des corrections en baissant le résultat à l'avantage des Grenoblois de 37
millions de francs à 32,4 millions de francs. Par ailleurs, la chambre de Rhône-Alpes constate
que les frais avant l'affermage en 1989, supportés par le budget principal de la ville pour le
compte de sa régie, sont estimés à 6 millions de francs/an par le BCG, alors que les
responsables actuels de la municipalité estiment aujourd'hui que ces frais étaient en 1989 de
1,8 millions de francs/an. Ne se prononçant pas sur cette différence d'appréciation, la CRC
indique que le résultat de 32,4 millions de francs positif pour les Grenoblois deviendrait négatif
de 18 millions de francs si l'estimation faite aujourd'hui par les responsables de la collectivité
était retenue.
A ce sujet, on notera que l'estimation du BCG a été faite à partir d'une analyse fine des
dépenses manquantes dans les comptes administratifs de la régie et donc supportées par le
budget principal de la ville : assurances, loyers, chauffage, entretien des bureaux, timbrages,
comptabilité, service juridique, gestion du personnel, encadrement, etc.
3e paragraphe
Le projet de rapport indique que les conventions avaient organisé à son profit un
système de transferts financiers fondé sur la perception par le fermier de l'intégralité des
recettes dégagées par l'exploitation des services, selon une progression programmée des tarifs,
et sur la rétrocession d'une partie des recettes ainsi perçues.
Il faut noter ici que les transferts financiers entre le budget de l’eau et le budget
principal, effectués par la ville, n'étaient aucunement organisés par les conventions.
9e paragraphe et 10e paragraphes
La rédaction de ces paragraphes laisse entendre que les augmentations de tarifs
consenties par la ville étaient non justifiées, ce qui, bien entendu, est préjudiciable à la
réputation de notre société. En pratique, comme il a été rappelé ci-dessus, l'examen a posteriori
des conditions économiques de ces contrats par le Boston Consulting Group, puis par la
chambre de Rhône-Alpes, puis enfin par la ville de Grenoble qui a renégocié ces contrats au
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
165
printemps 1996, a montré que ces tarifs ne comportaient aucune disposition anormale
économiquement. A cet égard, le gain de 37 millions de francs en faveur des Grenoblois, mis en
évidence par le Boston Consulting Group (ramené à 32,4 millions de francs par la chambre de
Rhône-Alpes), résulte des efforts opérationnels du fermier.
11e paragraphe
Il est indiqué que la réforme du financement du service de l’assainissement consistant à
faire supporter par le budget du syndicat d'agglomération des charges jusque-là supportées par
le budget du service de l’assainissement de la ville est à prendre en compte pour apprécier
l'économie globale des contrats d'affermage.
Cette considération ne nous semble par exacte. En effet, les modifications décidées par
la ville consistant à faire supporter par le budget du syndicat d'agglomération des annuités
jusque-là supportées par le budget assainissement de la ville n'ont pas changé l'économie des
contrats entre la ville et la COGESE, puisque la COGESE a respecté ses engagements
contractuels relatifs à ces annuités en continuant à les verser à la ville.
Il faut toutefois préciser qu'à la suite des remarques de la chambre de Rhône-Alpes la
ville de Grenoble a décidé de renoncer à percevoir ces redevances contractuellement à la
charge du fermier et que la rémunération de celui-ci a été minorée en tenant compte de cette
modification du contrat.
Réponse de la Société mosellane des eaux
"A Metz, les documents financiers n'avaient pas été produits pendant près de vingt ans
avant que n'intervienne un rapport de la chambre régionale des comptes".
Chaque année depuis l'origine du contrat d'affermage, la société a transmis à la ville de
Metz des documents conformes aux obligations prévues à l'article 40 du traité d'affermage en
date du 1er octobre 1973 approuvé par un arrêté du ministre de l'intérieur du 30 octobre 1973.
De plus, à chaque fois que la ville a souhaité des informations complémentaires au titre des
produits et des charges, la société a répondu aux questions posées. Ainsi, un examen approfondi
de la situation financière de la délégation a eu lieu à la demande de la ville en 1981. Un nouvel
examen a eu lieu en 1992 et 1993 lors de la mise au point de l'avenant n° 1 visé par la
préfecture de la Moselle le 23 novembre 1993.
Dans l'encadré, le rapport indique successivement :
1° "Au plan juridique, le contrat lie la seule ville de Metz et le fermier alors même qu'il
traite de l'exploitation du service de distribution publique d’eau potable pour une trentaine de
collectivités publiques non signataires du contrat."
L'article 1er du cahier des charges intitulé "Service affermé" précise que "Le présent
affermage a pour objet l'exploitation du service de distribution publique d’eau potable de la
ville de Metz et des collectivités gérées, au 1er janvier 1973 par le service des eaux de la ville
de Metz, dont la liste est la suivante : Argancy, Ay-sur- Moselle, Le Ban-Saint-Martin, Charly-
Oradour, Chieulles, Ennery, Failly, Flévy, Hauconcourt, Jury, Longeville-lès-Metz, Lorry-lès-
Metz (partie), Maizières-lès-Metz, Malroy, Metz, Mey, Montigny-lès-Metz, (partie), Moulin-lès-
Metz (partie), Peltre, Plappeville, Saint-Julien, Sanry-lès-Vigy, Scy-Chazelles (partie), Tremery,
Vantoux, Vany, Villers-l'Orme, Woippy."
Ainsi, la société exécute l'objet du traité d'affermage du 1er octobre 1973 approuvé par
un arrêté du ministère de l'intérieur du 30 octobre 1973.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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2° "Au plan technique et financier, la ville de Metz dont l'effectif du service des eaux ne
comprenait, jusqu'à une date récente qu'un seul fonctionnaire pour un réseau de plus de 770
kilomètres, n'a pas exercé pendant plus de vingt ans les contrôles minimaux sur l'activité de son
fermier."
Par nature, la gestion déléguée vise à réduire les coûts supportés par la collectivité
locale. La ville de Metz s'est toutefois attachée à assurer le contrôle des activités de la société
en nommant un contrôleur à plein temps ayant pour mission de procéder d'une manière
permanente à des contrôles, y compris dans les locaux de la société.
Par ailleurs, on peut s'interroger sur la pertinence d'un ratio entre la mission d'un
contrôleur et la longueur du réseau dont la représentativité n'est pas établie.
3° "Ainsi de 1989 à 1992, le recouvrement des participations prévues par l'article L.
332-15 du code de l'urbanisme a été confié au fermier."
Cette mission confiée par la ville à la société visait à simplifier les procédures de
recouvrement des participations fixées par la ville et dues par les bénéficiaires au titre du
renforcement nécessaire du service, visée par l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme
conformément aux stipulations des permis de construire. Cette mission a pris fin en 1993.
4° "En l'absence de moyens, les outils techniques élémentaires indispensables à la
surveillance du réseau n'ont pas été mis en oeuvre. Dès lors, la ville s'est trouvée dans
l'incapacité de vérifier réellement les obligations du fermier en matière de renouvellement. La
ville a eu connaissance pour la première fois en 1994 du taux de rendement de son réseau."
L'obligation contractuelle de la société est d'assurer en tant que de besoin, le
renouvellement des ouvrages du service à l'exception du génie civil des barrages (art. 9 du
traité).
La ville a toujours eu connaissance des éléments lui permettant de connaître le
rendement de son réseau et donc de vérifier le respect par la société de ses obligations. En effet,
depuis l'origine du contrat, dans tous les comptes rendus, figurent les volumes pompés et les
volumes distribués, dont le quotient fait ressortir le rendement du réseau. Ce rendement était en
1972 égal à 68 % et en 1995 à 79 %. Ces deux chiffres confirment, s'il en était besoin, que la
société a parfaitement entretenu et renouvelé les canalisations chaque fois que nécessaire et
rempli ainsi ses obligations contractuelles.
5° "Au plan financier, aucune information n'a été transmise par le fermier à la ville
entre 1973 et 1993."
Les documents transmis par la société chaque année depuis 1973 à la ville de Metz
étaient conformes aux obligations prévues à l'article 40 du traité d'affermage.
Depuis 1995, les comptes rendus techniques et financiers remis à la ville ont été
adaptés en application de la loi n° 95-127 du 8 février 1995.
6° "La rémunération du fermier aurait pu être renégociée dès 1978, le premier avenant
au contrat d'origine a été passé en novembre 1993."
Un examen approfondi de la situation financière de la délégation a eu lieu à la
demande de la ville en 1981 mais n'a pas eu de suite car il aurait conduit à une augmentation
de notre rémunération. Un nouvel examen a eu lieu en 1992 et 1993 lors de la mise au point de
l'avenant n° 1.
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
167
7° "Les retards observés ont permis ainsi au fermier de bénéficier sur une longue
période d'une rémunération presque totalement indexée. Les conséquences de cette dérive,
évaluée à 60 centimes par mètre cube n'ont pas été remises en cause lors de la signature de
l'avenant de novembre 1993."
L'introduction dans les contrats d'affermage des clauses de révision est habituelle et
conforme au cahier des charges modèle. Leur négociation est laissée à la libre appréciation des
parties. Il faut en outre rappeler que la formule de révision du contrat d'affermage a permis
l'ajustement de la rémunération de la société sur l'évolution des prix. On ne peut donc parler de
dérive et la chiffrer sans explication à 60 centimes par mètre cube alors même qu'il aurait
convenu de souligner que le contrat a été déficitaire pendant les premières années.
Le graphique ci-dessous permet d'ailleurs de constater que l'augmentation du prix de
l’eau n'est pas due à la seule rémunération de la société, mais plutôt à la forte hausse des
produits perçus pour le compte de tiers (Agence de l’eau, assainissement...).
En outre, le tableau ci-après fait ressortir la variation des différentes composantes du
prix de l’eau entre le 1er semestre 1974 (date de la première facturation émise par la société) et
le 1er semestre 1996 (date de la dernière facturation) :
Variation du prix de l’eau sur 22 ans
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
: PRIX DE L'EAU : 1er SEMESTRE 1974: 1er SEMESTRE 1996: VARIATION % :
:
:------------------:------------------:
:
:
:
F/m3
:
%
:
F/m3
:
%
:
:
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
:
:
:Part fermier
:
0,8492
:
42,7 :
5,0150
:
30,9 :
490,6
:
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
:Surtaxe ville
:
0,4400
:
22,1 :
0,7600
:
4,7 :
72,7
:
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
:FNDAER
:
0,0400
:
2,0 :
0,1400
:
0,9 :
250,0
:
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
:Agence de l'eau:
0,0020
:
0,1 :
3,2800
:
20,2 : 1 829,4 (1) :
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
:Assainissement :
0,5687
:
28,6 :
6,1700
:
38,1 :
984,9
:
:Sivom
:
:
:
:
:
:
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
:TVA
:
0,0900
:
4,5 :
0,8451
:
5,2 :
839,0
:
_____________________________________________________________________
:
:
:
:
:
:
Total TTC
:
1,9899
: 100,0 : 16,2101
: 100,0 :
714,6
:
_____________________________________________________________________
:
:
: (1) Variation calculée à partir de 0,17 F/m3 en 1976.
:
_____________________________________________________________________
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
168
Réponse de la Compagnie des eaux et de l'ozone (CEO)
Concernant la commune de Saint-Malo, le rapport de la Cour affirme que les
dispositions contractuelles créant un fonds de renouvellement des canalisations alimenté par un
prélèvement sur nos recettes de vente d’eau aboutissent à "contourner les règles de mise en
concurrence". Nous rappellerons simplement que le cahier des charges type de l'affermage des
services d’eau potable de 1980, référence toujours en vigueur actuellement, prévoit
expressément de confier le renouvellement des canalisations au fermier (art. 25, 3, variante B).
Par ailleurs, la Cour craint de voir la commune "perdre le bénéfice des améliorations
techniques... si le bordereau de prix n'est pas revu pour tenir compte des gains de productivité".
Pourtant, l'article 3 de l'avenant n° 2, instituant le fonds de renouvellement, spécifie clairement
que "le bordereau des prix est périodiquement soumis à réexamen, conformément aux
dispositions de l'article 41 du cahier des charges", fixant les modalités de révision de la
rémunération du fermier. Ceci est confirmé dans les clauses administratives particulières de
l'avenant, article 1.1.2, qui précisent que le bordereau de prix pourra être adapté aux nouvelles
techniques mises en oeuvre au moins tous les cinq ans. Ces dispositions garantissent une mise à
jour régulière des tarifs, et permettent à la collectivité et aux usagers de profiter financièrement
des gains de productivité obtenus.
Concernant la commune de Couëron, nous tenons à souligner que l'étude diagnostic
réalisée en 1989, et facturée selon un devis établi préalablement à l'attribution de la prestation,
ne s'inscrivait aucunement dans la démarche de délégation des services d’eau et
d’assainissement entreprise par la commune l'année suivante.
Il est exact que la CEO a pris en charge, lors de la délégation, un linéaire de réseau
nettement supérieur aux estimations ayant servi de base au calcul de sa rémunération. La
découverte de l'ampleur des erreurs, lors de la refonte totale des plans (que conseillait
d'ailleurs l'étude diagnostic mentionnée ci-dessus), justifiait amplement l'application des
clauses contractuelles de révision des tarifs de base. Il était dès lors inévitable, comme le
souligne le rapport, que les objectifs tarifaires initiaux ne puissent être atteints.
La Cour soutient également que la formule de révision ne devrait s'appliquer qu'à la
part de la rémunération de l'exploitant concernant l'exploitation, à l'exclusion de celle
découlant de la reprise des annuités d'emprunt de la commune. Nous tenons à préciser que le
taux utilisé pour le lissage sur 25 ans de l'amortissement de la dette a été de 6,67 %, alors que
les taux à long terme en vigueur pour les collectivités à l'époque de la signature du contrat
étaient de l'ordre de 10,5 %. L'emploi d'un taux aussi faible est justifié précisément par
l'indexation des montants récupérables auprès des usagers, au moyen de la formule de révision.
Un mode de calcul différent, mettant en jeu des montants récupérables non indexés et un taux
de 10,5 %, aurait engendré des tarifs supérieurs de plus de 1 F/m3 à ceux définis au contrat,
pour l'année 1990.
Par ailleurs, la Cour affirme que la durée contractuelle de 25 ans "est trop longue au
regard du caractère évolutif des normes, des techniques d'exploitation et des consommations".
Nous nous permettons de rappeler que l'article 39 du contrat d'affermage de l’eau prévoit
précisément un réexamen complet de la rémunération du fermier, "après 5 ans" (cas n° 1), en
cas de "modification substantielle des ouvrages et des procédés de production et de traitement"
(cas n° 5), ou "en cas de variation de plus de 20 % du volume global vendu de référence" (cas
n° 2). Le contrat d’assainissement contient des dispositions similaires en son article 37.
Le rapport souligne avec raison l'écart entre les estimations ayant servi au calcul d'un
tarif moyen sur 25 ans et les constatations réalisées depuis la signature du contrat. Ces écarts
sont dus en grande partie à l'implantation récente d'une nouvelle activité industrielle grosse
consommatrice d’eau sur le territoire communal. Cet élément nouveau, ainsi que l'échéance des
Cour des comptes - rapport public particulier
La gestion des services publics locaux d'eau et d'assainissement
(janvier 1997)
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cinq années de pratique des conditions financières initiales, justifie l'application des cas n° 1 et
2 de l'article 39 visé ci-dessus. C'est dans cette optique, et non dans le cadre d'une "tentative de
renégociation du contrat", comme le rapport l'affirme, que la commune et la CEO ont négocié
une révision des tarifs, qui sera matérialisée par un avenant dans les semaines à venir.
Enfin, nous tenons à préciser que le remboursement effectué auprès de chaque usager
couëronnais qu'évoque le rapport a été décidé suite à une erreur dans le paramétrage de la
formule d'actualisation du prix de l’eau en 1994. La CEO a intégralement assumé le coût de
cette erreur, regrettable mais ponctuelle.
Concernant le syndicat des eaux de Beaufort, la Cour affirme que le coût des
installations de télégestion supporté par la CEO en 1986 est compensé par les gains de
productivité obtenus, et qu'il n'y avait donc pas lieu de prolonger la durée du contrat. Il faut
savoir, d'une part, qu'un outil de télégestion entraîne toujours des charges supplémentaires
pour l'exploitant : frais de télécommunications, d'électricité, de maintenance, etc. ; d'autre part
que les économies de personnel envisageables à terme ne peuvent souvent pas être réalisées
immédiatement.
Dans le cas de Beaufort, l'amortissement de l'investissement sur la durée restante du
contrat (six ans) correspondait à une "économie" immédiate de 1,5 ouvrier, que l'absence de
départ en retraite parmi le personnel affecté au contrat rendait irréalisable, étant entendu qu'un
licenciement était exclu aussi bien par le fermier que par la collectivité. Il a donc semblé, afin
d'éviter une hausse des tarifs de base, que la meilleure solution était d'allonger la durée du
contrat, en faisant jouer par anticipation la clause de reconduction contenue à l'article 29 du
cahier des charges. Cette décision, loin de constituer un abus, a permis d'offrir à l'usager une
meilleure qualité de service, sans augmentation du prix de l’eau.
Réponse de la Compagnie internationale de services et d'environnement (CISE)
Le contrat d'origine signé en 1929 à Dinard par les sociétés Eau et assainissement et la
Compagnie générale des services urbains et de crédit est venu à terme en 1969.
Un nouveau contrat en date du 4 juillet 1969 lui a succédé, dans lequel, sans
modification de sa rémunération, l'exploitant prenait à sa charge un certain volume de travaux.
Ce contrat, dénoncé par la ville, a été suivi d'un avenant prévoyant son maintien pour six ans
maximum, par période reconductible de deux ans moyennant un rabais de 3,3 % sur tous les
prix unitaires.
L'avenant suivant (n° 5), s'il a effectivement prolongé la durée jusqu'au 31 décembre
2005, a prévu une clause de résiliation unilatérale sans indemnité au cas où la ville déciderait
d'arrêter les installations de production de Pont-Avet.
La collectivité, soucieuse de garder sa liberté dans le choix de ses sources
d'approvisionnement, s'est mise dans la position de conserver le bénéfice d'une exploitation
dont elle était satisfaite avec l'avantage d'une capacité de réaction immédiate à un schéma
d'approvisionnement différent.
Ainsi, si la stabilité n'a pas dans le passé empêché les remises en cause, assorties à
chaque fois d'amélioration au bénéfice du concédant, elle a aujourd'hui disparu.
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Réponse de la Société d'aménagement urbain et rural (SAUR)
Notre société est citée à trois reprises, s'agissant des délégations de service public de
Manosque, du district urbain de Saumur et de la commune d'Eguilles.
A Manosque, les délégations de gestion de services de l’eau et de l’assainissement ont
été régulièrement conclues le 13 mai 1993, conformément à la législation alors en vigueur, à la
suite d'une négociation approfondie avec la collectivité, entamée plusieurs mois auparavant.
Quant aux travaux de construction de la station d'épuration, ils ont été confiés
ultérieurement à notre société, sur appel d'offres, conformément au code des marchés publics.
A Saumur, le fonds spécial de travaux, commun aux deux services délégués de l’eau et
de l’assainissement, a été ouvert à la demande du district urbain. Ce fonds est géré en
transparence, la collectivité décidant seule de son utilisation et de la dévolution des marchés.
A Eguilles, conformément aux observations de la chambre régionale des comptes, la
commune est revenue sur sa décision de prorogation du contrat par avenant et, par délibération
du 24 juillet 1994, elle a retiré l'avenant incriminé.
Les observations que vous formulez sur ces trois délégations ont trait à une période
antérieure à l'entrée en vigueur de la loi du 29 janvier 1993, ou, pour Eguilles, immédiatement
postérieure.
Le cadre législatif réglementaire nouveau mis en place depuis cette date est aujourd'hui
bien connu des collectivités locales et son respect, auquel notre groupe a toujours marqué son
attachement, nous paraît de nature à éviter les écueils que la Cour a pu relever ici ou là, et qui
n'étaient pas généralité, même à l'époque, pour notre groupe.
Réponse de la société Omnium de traitement et de valorisation (OTV)
Traitement biologique :
Le traitement biologique améliore les performances du procédé physico-chimique. Ce
complément, décidé par le syndicat de Sanary- Bandol sur les conseils de la DDE du Var et
alors même que la station n'était pas encore en service, relevait de la volonté de mieux protéger
encore l'environnement marin dans une région sensible à forte vocation balnéaire. Le
constructeur n'a jamais eu, en droit comme en fait, les moyens de faire adopter cette décision
par le syndicat. Par ailleurs, tous les engagements contractuels d'OTV ont été tenus. Il n'est
subsisté aucune réserve à la réception de la station.
Corrosion des équipements et des bétons :
Le problème est consécutif à une teneur en sulfures des eaux usées fortement supérieure
à la normale, due à une configuration particulière du réseau d’assainissement ainsi qu'à un
mauvais entretien de celui-ci.
Or, d'une part, la teneur en sulfures des eaux usées ne figurait pas dans le dossier de
consultation du marché et d'autre part, OTV n'est pas en charge de l'exploitation et de
l'entretien du réseau d’assainissement des communes membres du syndicat. Sur les conseils
d'OTV, le syndicat a mis en place les mesures correctives sur son réseau. Depuis la station
fonctionne parfaitement.
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Dégradation du génie civil :
Le marché de construction a été passé en lots séparés. Le lot génie civil n'a pas été
confié à OTV mais à un groupement distinct d'entreprises solidaires, seul responsable de ses
fautes éventuelles. Une expertise judiciaire en cours n'a révélé aucune faute d'OTV.
Nuisances auditives :
La campagne d'essais préalables à la réception de la station a certifié que les émissions
sonores étaient conformes au marché.
Dérive des prix :
L'affirmation selon laquelle l'exploitant a fait dériver les prix, sans tenir compte des
réglementations en vigueur ni de ses engagements contractuels apparaît, à défaut d'autres
précisions, dépourvue de tout fondement.
Double comptage :
OTV soutient que le schéma de comptage des eaux , qui répondait à une logique
technique, était connu et validé de toutes les parties : les eaux polluées issues du traitement des
boues sont renvoyées en tête de station et donc de nouveau comptées pour le simple motif
qu'elles font l'objet de deux traitements successifs (process de traitement des boues, puis
process de traitement des eaux usées).
En toute hypothèse, l'adoption d'un schéma de comptage différent n'aurait conduit qu'à
des effets financiers négligeables. A contrario, il a été certifié par un organisme de contrôle
indépendant (APAVE), que la mesure des débits des eaux usées, qui sert de base au calcul de la
rémunération d'OTV, était inférieure à la réalité d'environ 6 % et a conduit à un préjudice pour
OTV très supérieur aux chiffres résultant du prétendu "double comptage".
Réponse de la société SCET-Environnement
I. - "LE CONTROLE INSUFFISANT DE LA GESTION DELEGUEE LES
ASPECTS FINANCIERS DE LA DELEGATION"
Le service de l’eau des syndicats de Basse Limagne et de la plaine de Riom a été confié
par voie de concession, début 1993, à SCET- Environnement.
a) Le financement des investissements réalisés par le concessionnaire a été assuré par
contrat de crédit-bail.
On observera en premier lieu que rien ne permet de lier le choix du mode de
financemement au choix du mode de gestion : le concessionnaire aurait pu choisir le
financement en emprunt, par exemple, et la collectivité, si elle avait assuré elle-même la
maîtrise d'ouvrage, aurait tout aussi bien pu recourir au crédit-bail.
On observera en second lieu que l'analyse du choix d'un financement ne peut reposer
sur une simple comparaison des taux d'intérêts. Si le crédit-bail a été passé, en l'espèce, au taux
de 9,73 %, alors qu'un emprunt classique aurait sans doute pu être contracté par la collectivité,
à cette époque, au taux de 9,15 % il ne faut pas oublier que ce dernier taux n'aurait pas
représenté la totalité du coût d'une telle opération.
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En particulier, si la collectivité avait souhaité conserver la maîtrise d'ouvrage des
investissements, elle aurait, du même coup, nécessairement dû supporter les coûts liés à
l'exercice de cette maîtrise d'ouvrage, soit au minimum 1 % du montant de l'investissement, et
les répercuter sur les prix de l’eau.
En outre, le taux pratiqué en crédit-bail tient compte, nécessairement, du fonds de
garantie consenti par le concessionnaire sur ses fonds propres, cependant que le montage a
permis de ne demander aucune garantie à la collectivité.
b) Par ailleurs, il paraît difficile de considérer que le syndicat de la plaine de Riom
aurait pu financer les travaux en utilisant des ressources d'autofinancement.
En effet, les volumes de vente d’eau au jour de la décision de concéder, qui auraient pu
donner à penser qu'une capacité d'auto- financement se dégageait, étaient en fait issus d'une
période de consommation particulièrement et anormalement élevée, résultant d'une sécheresse
persistante de 1989 à 1992.
Dès 1993, ces volumes ont fléchi d'environ 8 %.
En outre il faut nécessairement, en toute hypothèse, tenir compte des impayés, qui se
situent inévitablement entre 1 % et 2 % des recettes appelées.
II. - "LES EFFETS D'UNE CONCURRENCE IMPARFAITE L'INSUFFISANTE
MISE EN CONCURRENCE EN CE QUI CONCERNE LES TRAVAUX"
Les syndicats, préalablement à la mise en concession, ont établi une schéma directeur
des investissements qui a servi de base à la programmation générale des travaux.
C'est bien sur la réalisation de ce programme, chiffré, que le concessionnaire s'est
engagé.
Cependant, il est nécessaire, en fonction des urgences, mais aussi des opportunités
locales, de définir annuellement le programme des travaux à réaliser.
C'est même la seule solution permettant d'obtenir la souplesse nécessaire pour
l'adéquation des travaux aux besoins.
S'il s'avèrait à la fin de la période de travaux que, le programme ayant été réalisé en
totalité, le plafond des dépenses prévu n'était pas atteint, deux possibilités, au terme du contrat,
s'offriraient :
- le concessionnaire réaliserait alors des travaux supplémentaires ;
- ou opérerait une répercussion à la baisse sur le prix facturé aux usagers.
En revanche, pour le cas où le budget prévu serait utilisé en totalité, on ne voit pas bien
pourquoi le contrat aurait dû prévoir les modalités de financement de travaux dont il n'envisage
pas la réalisation.
La réalisation d'investissements supplémentaires, dans cette hypothèse,
supposant nécessairement un alourdissement des engagements contractuels, celle-ci
donnera normalement lieu, si le cas échoit, à la passation d'un avenant au contrat qui
permettra aux parties de définir les modalités de leur financement.