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REPUBLIQUE FRANÇAISE
CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
du NORD-PAS-DE-CALAIS
Chambre
_____
Centre communal d’action sociale
de la commune de Douvrin
Département du Pas-de-Calais
Article L. 1612-15 du code général
des collectivités territoriales
N° 2008-0359
Séance du 23 octobre 2008
D E C I S I O N
LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES DU NORD - PAS-de-CALAIS ;
Vu le code des juridictions financières, notamment ses articles L. 211-7, L. 232-1, L. 242-1, L. 242-
2, R. 232-1 et R. 242-1 à R. 242-3 ;
Vu le code général des collectivités territoriales, notamment ses articles L. 1612-15, L. 1612-19 et
L. 1612-20 ; R. 1612-32 à R. 1612-37 ;
Vu les lois et règlements relatifs aux budgets des collectivités territoriales et des établissements
publics locaux ;
Vu la
lettre du 22 septembre 2008, enregistrée au greffe de la chambre régionale des comptes le
23 septembre 2008,
par laquelle M. Laurent FALLON, gérant de la SARL « Le Colibri », a saisi la
juridiction en vue d’obtenir le règlement de factures correspondant à des prestations d’hôtellerie
restauration fournies sur commandes du centre communal d’action sociale (CCAS) de Douvrin
(Pas-de-Calais) ;
Vu la lettre du 25 septembre 2008 par laquelle le
président de la chambre régionale des comptes a
informé le président du CCAS de la saisine susvisée, et de la possibilité qu’il avait de présenter ses
observations conformément à l’article R. 242-1 du code des juridictions financières, soit par écrit,
soit oralement dans les conditions prévues à l’article L. 242-2 dudit code ;
Vu la lettre du 30 septembre 2008 par laquelle le président de la chambre régionale des comptes a
demandé au préfet du Pas-de-Calais la transmission des informations prévues par l’article R. 1612-
33 du code général des collectivités territoriales ;
Vu la lettre en réponse du sous-préfet de Béthune, en date du 2 octobre 2008, enregistrée le
6 octobre 2008 ;
Vu les observations écrites de la collectivité et notamment la lettre du président du CCAS en date
du 6 octobre 2008, enregistrée au greffe de la juridiction le 8 octobre 2008 ;
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Vu la lettre du 3 octobre 2008, par laquelle l’ancien président du CCAS a présenté ses observations;
Vu les éléments transmis par la trésorière de la collectivité ;
Vu les documents transmis à la chambre et les éléments recueillis au cours de l’instruction ;
Ensemble les pièces à l’appui ;
Vu les conclusions du commissaire du gouvernement ;
Après avoir entendu M. Jean-François Grouillet, magistrat, en son rapport, et M. Denis Larribau,
commissaire du gouvernement, en ses conclusions ;
REND la décision suivante :
I. SUR LA RECEVABILITE DE LA SAISINE
Considérant qu’aux termes de l’article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales :
« Ne sont obligatoires pour les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires à
l’acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l’a expressément décidé. La
chambre régionale des comptes saisie, soit par le représentant de l'Etat dans le département, soit
par le comptable public concerné, soit par toute personne y ayant intérêt, constate qu'une dépense
obligatoire n'a pas été inscrite au budget ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette
constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine et adresse une mise en demeure à la
collectivité territoriale concerné. » ;
Considérant que l’article L. 1612-15 du code général des collectivités territoriales est applicable aux
établissements publics communaux en vertu des dispositions de l’article L. 1612-20 du même code ;
Considérant qu’aux termes de l’article R. 1612-32 du code général des collectivités territoriales :
« la saisine de la chambre régionale des comptes prévue à l'article L. 1612-15 doit être motivée,
chiffrée et appuyée de toutes justifications utiles, et notamment du budget voté et, le cas échéant,
des décisions qui l'ont modifié »
; qu’aux termes de l’article R. 1612-34 du même code : «
La
chambre régionale des comptes se prononce sur la recevabilité de la demande. Elle constate
notamment la qualité du demandeur et, s'il y a lieu, l'intérêt qu'il a à agir
» ;
Considérant
que la saisine porte sur l’absence de paiement de trois factures d’un montant total de
3 363 euros toutes taxes comprises, correspondant à des prestations d’hôtellerie restauration
commandées au nom du centre communal d’action sociale de Douvrin ;
Considérant que M. Laurent FALLON a qualité pour saisir la chambre ; qu’il a, en effet, justifié,
dans le cadre de l’instruction, de sa fonction de gérant de l’hôtel restaurant « Le Colibri » en
produisant un extrait du registre du commerce et des sociétés ; que le requérant, en sa qualité de
créancier, a intérêt à agir ; que son courrier explicite les motifs de la saisine ; qu’y sont jointes les
copies des bons de commande et des factures en cause ; que les documents budgétaires sont
parvenus à la chambre le 6 octobre 2008 ; que, dès lors, la saisine peut être considérée comme
recevable à cette date ;
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II. SUR LE CARACTERE OBLIGATOIRE DE LA DEPENSE
Considérant qu’aux termes de l’article L. 1612-15, premier alinéa, du code général des collectivités
territoriales : «
Ne sont obligatoires pour les collectivités territoriales que les dépenses nécessaires
à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément
décidé. »
; que selon l’article L. 2321-2 du même code : «
Les dépenses obligatoires comprennent
notamment : (…) 32° L'acquittement des dettes exigibles »
; qu’une chambre régionale des comptes
ne peut constater qu’une dépense est obligatoire pour un établissement public qu’en ce qui concerne
les dettes échues, certaines, liquides, non sérieusement contestées dans leur principe et dans leur
montant, et découlant de la loi, d’un contrat, d’un délit, d’un quasi-délit, ou de toute autre source
d’obligations ;
Considérant que trois bons de commande ont été signés par l’ancien président du CCAS couvrant,
tant des prestations d’hébergement que des repas, d’abord pour la période du 1
er
au 29 février 2008,
puis pour la période du 1
er
au 15 mars et enfin pour la période du 16 au 30 mars 2008 ; qu’ils fixent
l’engagement de la dépense à 50 € TTC par jour pour l’hébergement et à 17 € TTC le prix des
repas ; que chaque bon indique que la facture doit être établie au nom du CCAS ; que dans la limite
des trois bons de commande précités, les trois factures produites à l’appui de la saisine, d’un
montant total de 3 363 €, couvrent les périodes précitées, à savoir la facture n° 200010208 pour un
montant de 1 740 € TTC, relative à la période du 1
er
au 29 février 2008 ; la facture n° 200010308
pour un montant de
920 € TTC, relative à la période du 1
er
au 15 mars 2008 ; la facture
n° 401160308 pour un montant de
703 € TTC, relative à la période du 16 au 28 mars 2008 ;
Considérant, dès lors, que les dépenses relatives aux trois factures ci-dessus sont échues, certaines
et liquides ;
Considérant, néanmoins, que le nouveau président du CCAS développe différents arguments visant
à contester sérieusement le caractère obligatoire des dépenses engagées par son prédécesseur ; que,
par lettre adressée au requérant en date du 30 juin 2008, jointe à la saisine, il l’avait notamment
informé que son prédécesseur
« n’avait pas la délégation de pouvoir lui permettant de signer les
bons de commande »
; qu’il a confirmé cette position dans sa lettre susvisée du 6 octobre 2008 ;
que, dans cette même lettre, il ajoute que
« aucune délibération de principe concernant
l’hébergement d’urgence n’a été prise pendant la mandature de [son] prédécesseur, ni même de
délibération concernant le relogement (…) à l’hôtel Le Colibri »
;
Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article L. 123-5 du code de l’action sociale et des
familles (CASF)
« le centre communal d'action sociale anime une action générale de prévention et
de développement social dans la commune, en liaison étroite avec les institutions publiques et
privées
qu’il peut intervenir sous forme de prestations remboursables ou non remboursables
» ;
qu’au sein de ces différentes missions certaines sont obligatoires et d’autres facultatives ; que les
prestations en matière de relogement entrent dans cette dernière catégorie ; que ces prestations ainsi
que leurs modalités doivent être décidées par le conseil d’administration du CCAS ;
Considérant
qu’aucune délibération de principe concernant l’hébergement d’urgence n’a été prise,
ni même de délibération spécifique concernant le relogement d’un locataire à l’hôtel « Le Colibri » ;
que cette action ne pouvait entrer dans le champ de la compétence du CCAS ; que, de jurisprudence
constante, la prise en charge d’une dépense relative à une activité étrangère à la mission d’un
organisme public est illégale ;
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Considérant que la délibération du 10 avril 2001 accordant une délégation de pouvoir totale au
président du CCAS de Douvrin jusqu’au 17 mars 2007 conformément à l’article 21 du décret n° 95-
562 du 6 mai 1995 ne vise que l’attribution des prestations sociales, de manière globale ou
individuelle aux personnes ou familles nécessiteuses Douvrinoises, énumérées dans ladite
délibération ; que les prestations liées au relogement ne figurent pas dans cette énumération ; que le
président du CCAS en fonction au moment des faits ne pouvait donc valablement émettre les bons
de commande ;
Considérant, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens développés par la collectivité, que
la dépense est donc sérieusement contestée ; qu’il en résulte qu’elle ne peut être considérée comme
obligatoire ;
Considérant, en outre, que la chambre régionale des comptes n’est pas compétente pour décider
d’une indemnisation du requérant ;
Considérant qu’aux termes de l’article R. 1612-36 du code général des collectivités territoriales,
lorsque la chambre régionale des comptes constate que la dépense n'est pas obligatoire, elle notifie
sa décision à l'auteur de la demande, à l'établissement public concerné et au représentant de l'Etat ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE la saisine recevable ;
CONSTATE l’absence de caractère obligatoire de la dépense en ce que les dettes invoquées sont
sérieusement contestées ;
DECIDE qu’il n’y pas lieu
de mettre en demeure le centre communal d’action sociale de Douvrin
d’inscrire à son budget les crédits nécessaires à leur acquittement ;
DIT que la procédure est close ; que la présente décision sera notifiée à l’hôtel restaurant « Le
Colibri », au président du centre communal d’action sociale de Douvrin et au préfet du Pas-de-
Calais ; qu’une copie sera adressée au comptable du centre communal d’action sociale, sous-couvert
du trésorier-payeur général du Pas-de-Calais ;
RAPPELLE que, en application des dispositions de l’article L. 1612-19 du code général des
collectivités territoriales, les assemblées délibérantes sont tenues informées dès leur plus proche
réunion des avis de contrôle budgétaire formulés par la chambre régionale des comptes, et qu’en
application de l’article R. 1612-14 du même code, ces avis sont communicables aux tiers dès qu’a
lieu la première réunion de l’assemblée délibérante suivant leur réception par la collectivité.
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Délibéré par la Chambre,
A Arras, le 23 octobre 2008.
Etaient présents : M. Jean-Luc Girardi, président de séance, MM. Stéphane Lucien-Brun, Sébastien
Heintz, Mmes Brigitte Jurga-Hoffmann, Dominique Corbeau, M. Jean-Jacques Gauthé, magistrats,
et M. Jean-François Grouillet, magistrat-rapporteur.
Le magistrat-rapporteur,
Pour le président empêché,
le président de section,
président de séance,
Jean-François GROUILLET
Jean-Luc GIRARDI
Le Président,
Thierry MOURIER des GAYETS
La présente décision peut être attaquée devant le tribunal administratif dans le délai de deux mois à
compter de sa notification.