Première section
Dossier n° 09 /2008
Avis du
30 juillet 2008
Commune de Baerenthal
(Moselle)
Budget non voté en équilibre réel
Article L.1612-5 du code général des collectivités territoriales
LA CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES DE LORRAINE
Vu le code des juridictions financières, notamment ses articles L.232-1 et R.242-1 à R.242-3 ;
Vu le code général des collectivités territoriales et notamment ses articles L.1612-4 à
L.1612-7, L.1612-19, R.1612-8 et R.1612-19 à R.1612-25 ;
Vu les lois et règlements relatifs aux budgets des communes et de leur établissements
publics ;
Vu
,
enregistrée au greffe de la Chambre régionale des comptes de Lorraine le 18 juin 2008
sous le n° 09/2008, la lettre du 16 juin 2008 par laquelle le préfet de la région Lorraine, préfet
de la Moselle, a saisi la chambre régionale des comptes en application des dispositions de
l’article L.1612-5 du code général des collectivités territoriales, au motif que le budget
principal de la commune de Baerenthal ainsi que les budgets du service de l’eau, du camping
« Ramstein-plage » et celui du lotissement « les Genêts » n’auraient pas été votés en
équilibre réel ;
Vu la lettre du 19 juin 2008 par laquelle le président de la chambre régionale des comptes de
Lorraine a informé le maire de la commune de Baerenthal
de la saisine susvisée et de la
possibilité qu’il avait, conformément aux dispositions de l’article R. 242-1 du code des
juridictions financières, de présenter des observations, soit oralement dans les conditions
prévues à l’article L. 242-2 dudit code, soit par écrit ;
Entendu les observations présentées oralement par le maire de Baerenthal le 16 juillet 2008 ;
Vu l’ensemble des pièces du dossier ;
2
Vu les conclusions du Ministère Public ;
Après avoir entendu M. Jean-Paul AZAMBOURG, conseiller, en son rapport et après en avoir
délibéré en séance de section, conformément à la loi, dans la formation suivante :
M. Jean LACHKAR, président de section, président de séance,
M. Laurent OCHSENBEIN, conseiller,
M. Jean-Paul AZAMBOURG, conseiller-rapporteur
1. Sur la recevabilité
:
Considérant
qu’aux termes du premier alinéa de l’article L.1612-5 du code général des
collectivités territoriales :
« lorsque le budget d'une collectivité territoriale n'est pas voté en
équilibre réel, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l'Etat dans un
délai de trente jours à compter de la transmission prévue aux articles L. 1612-8, le constate et
propose à la collectivité territoriale, dans un délai de trente jours à compter de la saisine, les
mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre budgétaire et demande à l'organe
délibérant une nouvelle délibération.
La nouvelle délibération rectifiant le budget initial doit intervenir dans un délai d’un mois à
partir de la communication des propositions de la chambre régionale des comptes ».
Considérant qu’aux termes du 1
er
alinéa de l’article L. 1612-5 mentionné ci-dessus le délai
imparti au représentant de l’Etat pour saisir la chambre régionale des comptes est de trente
jours à compter de la transmission prévue à l’article L. 1612-8 du code général des
collectivités territoriales ; que la délibération du 11 avril 2008 du conseil municipal de
Baerenthal adoptant les budgets 2008 de la commune n’ont été transmis par le maire au
représentant de l’Etat dans le département que le 21 mai 2008 accompagnée des documents
budgétaires, enregistrés le 23 mai à la sous-préfecture de Sarreguemines ; que dès lors à la
date d’enregistrement de la saisine par le greffe de la chambre le délai imparti était respecté ;
que s’agissant des documents dont la production par le représentant de l’Etat est requise en
application de l’article R. 1612-19 du CGCT cette condition a été satisfaite par la
transmission par le maire des documents complémentaires utilisés pour l’établissement du
budget, enregistrés au greffe de la chambre le 4 juillet 2008 ; qu’il résulte de ce qui précède
que la saisine susvisée est recevable à compter de cette date ;
2. Sur l’équilibre budgétaire et la sincérité des inscriptions figurant aux budgets 2008 de
la commune
- S’agissant du budget principal :
Considérant qu’aux termes de la lettre de saisine «
le budget principal de la commune
présenterait une prévision, non sincère, de recette de fonctionnement de 90 000 € résultant du
reversement de l’excédent dégagé par le budget annexe de l’eau, à la suite d’un
sur-financement de celui-ci par l’emprunt
» ;
3
Considérant en effet que le budget annexe du service de l’eau comporte une prévision de
90 000 € au chapitre 672 en dépenses de fonctionnement correspondant au reversement au
budget principal de l’excédent dégagé par le service concerné ; qu’il apparaît par ailleurs que
la section d’investissement dudit budget est équilibrée par une recette de 28 000 € figurant au
chapitre 16, en complément de l’autofinancement prévisionnel ; que dès lors la prévision de
recette inscrite au budget général serait, aux termes de la saisine, insincère et déséquilibrerait
la section de fonctionnement du budget à hauteur de ce montant, seuls 62 000 € pouvant faire
l’objet d’un reversement du budget annexe au budget principal au regard de l’arrêt du conseil
d’Etat commune de Bandol, selon lequel le reversement prévu par l’article R. 2221-90 du
CGCT n’est possible qu’après couverture du besoin de financement dégagé par la section
d’investissement ;
Considérant toutefois que le montant de 28 000 € ne constitue pas un emprunt nouveau du
service annexe mais seulement la réintégration au budget de l’eau d’un prêt accordé
antérieurement à la commune par l’agence de bassin Rhin-Meuse et imputé à l’époque dans
les comptes du budget principal ; qu’il convenait donc de reverser la part résiduelle de
l’emprunt vers le budget annexe ; que dès lors la somme de 28 000 € ne résulte pas d’une
recette nouvelle d’emprunt et qu’en conséquence la recette de 90 000 € constituée par le
reversement de l’excédent dégagé par le service annexe est régulière ;
Considérant par ailleurs qu’il appartient à la chambre, dès lors qu’elle est saisie par le
représentant de l’Etat au titre de l’article L. 1612-5 du CGCT, de procéder également à
l’examen du budget qui lui est soumis pour avis ;
Considérant à cet égard que la section d’investissement du budget fait apparaître un montant
élevé de restes à réaliser, soit 276 090 € en dépenses et en recettes ; qu’en recettes les restes à
réaliser de 2007 sont constitués de recettes d’emprunt au chapitre 16 à hauteur de 168 350 € ;
Considérant qu’aux termes de l’article R. 2311-11 du CGCT «
les restes à réaliser de la
section d’investissement arrêtés à la clôture de l’exercice correspondent aux dépenses
engagées non mandatées et aux recettes certaines n’ayant pas donné lieu à l’émission d’un
titre…
» ; que sur le plan budgétaire et comptable ne répondent pas à la stricte définition de
recettes certaines, outre les subventions non justifiées par des arrêtés attributifs, les prêts non
adossés à des contrats, offres fermes ou lettres de confort justifiés à la clôture de l’exercice ;
Considérant que figure au budget primitif 2008 de la commune la recette d’un emprunt restant
à réaliser pour 168 350 € ; qu’un emprunt a été souscrit le 22 avril 2008 à hauteur de
100 000 € auprès du Crédit mutuel ; que le solde de l’emprunt restant à réaliser s’avérait alors
insincère puisque non justifié ;
Considérant par ailleurs que la situation financière de la commue est caractérisée notamment
par un endettement très élevé, l’encours de la dette s’élevant au 31 décembre 2007 à
1,576 M€ soit 2 217 €/habitant pour une moyenne de la strate d’environ 500 € ; que
l’endettement de la commune représente près de 3 années de produits de fonctionnement et
que sa capacité de désendettement (encours de dette/CAF) est de près de 36 années, durée
nécessaire pour rembourser l’encours de dette en y consacrant la totalité de la capacité
d’autofinancement dégagée en 2007 ; que cet endettement est récent puisqu’en 2005 l’encours
comme l’annuité de dette étaient inférieurs à la moyenne de la strate démographique ;
4
Considérant que dans ces conditions la commune sera amenée à faire une pause dans sa
politique d’investissement et à éviter le recours à l’emprunt ; qu’ainsi et dès le budget 2008 il
apparaît nécessaire et possible d’annuler, différer, reporter ou réduire certains projets
d’investissement ; qu’il peut en être ainsi d’un montant de 141 160 €, dont 3 000 € au chapitre
21 et 138 160 € au chapitre 23 (123 400 € d’opérations nouvelles et 14 760 € de restes à
réaliser), concernant les opérations n° 1004 -rénovation du presbytère (- 10 000 €),
1005 -matériel, outillage et mobilier (- 3 000 €), 1006 -travaux de bâtiments (- 3 000 €),
1007 -travaux de VRD (- 15 400 €), 1009 -éclairage public (- 50 000 €), 1014 -poteau
d’incendie (- 5 000 €), 1015 -parking (- 4 760 €), 1016 -réfection de rue (- 20 000 €),
1018-châteaux forts (- 30 000 €) ;
Considérant toutefois que le montant des subventions attendues est également à minorer de
10 000 € (opération n° 1012 -travaux vestiaires stade - subvention ADEME) ;
Considérant que les autres inscriptions budgétaires apparaissent sincères et évaluées pour leur
montant prévisionnel, notamment le produit des cessions (ch. 024) pour 66 756 € par transfert
au budget annexe du lotissement « les Genêts » ;
Considérant par ailleurs que les inscriptions de crédits des chapitres de la section de
fonctionnement n’appellent pas d’observation particulière, sauf à augmenter en recettes le
chapitre 74 (dotations) du montant effectivement notifié de DGF (+ 2 300 €) et le chapitre 73
(impôts et taxes) du montant de produit fiscal direct effectivement voté figurant à
l’état 1259 (+ 5 000 €) ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le virement de la section de fonctionnement
(021) pourrait être porté dans ces conditions à 73 023 €, le montant du recours à l’emprunt
pour le financement des restes à réaliser 2007 en dépenses d’investissement limité au montant
déjà contracté de 100 000 € et le montant des emprunts nouveaux limité à 68 850 € (-
68 910 €) ;
- S’agissant du budget annexe du service de l’eau :
Considérant qu’aux termes de la lettre de saisine «
le besoin de financement de la section
d’investissement n’est pas couvert par l’affectation de l’excédent libéré par l’activité du
service, dans la mesure où le recours à l’emprunt, à hauteur de 28 000 €, s’est avéré
nécessaire pour assurer l’équilibre
» ;
Considérant comme il a été dit plus haut que la somme de 28 000 € ne résulte pas d’un
emprunt nouveau du service mais de la réintégration dans ses écritures, par une opération
d’ordre, de la part résiduelle d’un prêt antérieur accordé à la commune par l’agence de l’eau et
imputé dans les comptes du budget principal ; que dès lors le besoin de financement n’est pas
assuré par un nouvel emprunt et qu’en conséquence la prévision de dépense de 90 000 € au
chapitre 672 de la section de fonctionnement concernant le reversement au budget principal
de l’excédent dégagé est régulière, et qu’en conséquence le budget annexe de l’eau a été voté
en équilibre réel ;
5
- S’agissant du budget annexe du camping « Ramstein plage » :
Considérant qu’aux termes de la lettre de saisine «
le budget de ce camping est déséquilibré
en section d’investissement ; en effet, les recettes restant à réaliser, reportées à hauteur de
194 000 €, ne sont pas sincères ; seule une partie de leur montant est justifiée par un contrat
d’emprunt de 100 000 €
» ;
Considérant en effet que les recettes d’emprunt inscrites en restes à réaliser et non assorties
d’un accord, d’une offre ou d’un contrat de prêt ne constituent pas strictement une recette
certaine au sens de l’article R. 2311-11 du CGCT ;
Considérant que figure en restes à réaliser 2007, en recettes du budget annexe du camping, un
emprunt de 194 000 € ; qu’un prêt a été contracté auprès de la caisse de Crédit Mutuel en date
du 22 avril 2008, toutefois limité à 100 000 € ; que les subventions restant à percevoir
s’élèvent par ailleurs à 57 340 €, dûment justifiées ;
Considérant que les restes à réaliser en dépenses, engagées pour la totalité de leur montant,
s’élèvent à 387 080 €, non financées à hauteur de 229 740 € ; qu’en outre le déficit
d’investissement reporté de 2007 est de 17 304 € ;
Considérant que les opérations nouvelles sont inscrites au budget pour un montant de
60 900 €, pouvant être réduit de 24 000 € (opération n° 2003 -travaux de VRD- 19 000 €,
opération n° 2004 -travaux de bâtiment- 5 000 €), les subventions d’investissement étant
attendues et justifiées à hauteur de 87 000 € (dont 60 000 € du département pour une
opération figurant en restes à réaliser) ;
Considérant par ailleurs que le remboursement en capital de la dette s’élève à 52 200 €,
couvert pour ce montant par le virement de la section de fonctionnement ; qu’enfin les
excédents de fonctionnement capitalisés sont de 32 734 € ; que dès lors, et compte tenu des
dépôts et cautionnements attendus (500 €), l’équilibre de la section d’investissement ne
pourra être assuré que par le recours à un nouvel emprunt à hauteur de 163 710 € ;
- S’agissant du budget du lotissement « les Genêts » :
Considérant qu’aux termes de la lettre de saisine «
ce budget présente, en section de
fonctionnement, un déséquilibre dès lors que le montant des recettes s’élevant à 342 000 € est
inférieur au montant des dépenses établi à 351 000 €
» ;
Considérant toutefois que la différence de 9 000 €, somme correspondant à l’intégration des
charges financières au coût de production, provient d’une erreur matérielle par l’omission de
l’inscription en recette au chapitre 796 de la dépense de même montant inscrite au chapitre
608 par opération de transfert à l’intérieur de la section de fonctionnement (chapitre
globalisé 043) ;
Considérant qu’il a été procédé à la régularisation des écritures ; que dès lors le budget annexe
du lotissement « les Genêts » est équilibré en recettes et en dépenses dans chacune des deux
sections ;
6
Par ces motifs,
EMET L’AVIS SUIVANT
1. Déclare
recevable la saisine du préfet de la région Lorraine, préfet de la Moselle, au titre de
l’article L. 1612-5 du code général des collectivités territoriales ;
2. Constate
que les budgets annexes du service de l’eau et du lotissement « les Genêts » de la
commune de Baerenthal ont bien été votés en équilibre réel au sens des dispositions de
l’article L. 1612-4 du CGCT ;
3. Propose
à la collectivité de procéder aux modifications des inscriptions budgétaires du
budget principal et du budget annexe du camping « Ramstein plage » décrites ci-dessus, afin
de répondre à l’obligation de sincérité et d’équilibre des budgets édictée par l’article
L. 1612-4 du CGCT ;
4. Demande
, conformément aux alinéas 1 et 2 de l’article L. 1612-5 du CGCT, au maire de
Baerenthal d’inviter son conseil municipal à prendre une délibération rectifiant le budget
général et le budget annexe du camping « Ramstein plage », afin de rétablir l’équilibre
budgétaire à partir des propositions précitées, délibération qui devra intervenir dans le délai
d’un mois à compter de la notification du présent avis et être adressé, en application de
l’article R. 1612-12 du CGCT, dans le délai de huit jours au représentant de l’Etat ainsi qu’à
la chambre régionale des comptes ;
5. Rappelle
qu’en application de l’article L. 1612-19 du CGCT les assemblées délibérantes
sont tenues informées dès leur plus proche réunion des avis formulés par la chambre régionale
des comptes et des arrêtés pris par le représentant de l’Etat ;
6. Recommande
à la commune, en raison de sa situation financière fragilisée notamment par
les investissements récemment réalisés, financés par un recours massif à l’emprunt ayant
entraîné un endettement excessif, l’instauration d’une pause dans les dépenses d’équipement,
limitées aux opérations urgentes et en rapport avec les ressources de la commune, la
reconstitution d’une capacité d’autofinancement propre à accélérer le désendettement, y
compris par une hausse des taux de fiscalité, actuellement inférieurs aux taux moyens
observés dans la strate démographique ;
Le présent avis sera notifié :
-
au préfet de la région Lorraine, préfet de la Moselle
-
au maire de Baerenthal.
7
Copie en sera adressée :
-
au trésorier-payeur général du département de la Moselle,
-
au trésorier de la commune de Baerenthal.
à Epinal, le 30 juillet 2008
Jean-Paul AZAMBOURG
conseiller-rapporteur
Jean LACHKAR
président de section,
président de séance
Jean MOTTES
président de la chambre,