C
OUR DES
C
OMPTES
des observations
Février 2005
L
e présent rapport est destiné à faciliter la lecture et le
commentaire du rapport de la Cour des comptes qui,
seul, engage la juridiction.
Les réponses des administrations et des organismes inté-
ressés sont insérées dans le rapport public.
Il est rappelé que les publications des juridictions financiè-
res ne mentionnent pas les constatations donnant lieu à des
procédures juridictionnelles.
Avertissement
Synthèses
Rapport public
annuel 2004
des juridictions
financières
Sommaire
3
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
1
Bilan de la “refondation indemnitaire”
dans la fonction publique civile de l’État . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .4
2
Les opérations immobilières
du ministère des affaires étrangères
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .6
3
Du désamiantage à la rénovation
du campus de Jussieu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8
4
L’évolution du rôle
de la direction générale de la santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .10
5
Les transformations du service public
de la transfusion sanguine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .12
6
Les dispositifs d’évaluation
des politiques d’aide à l’emploi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .14
7
Les spécificités d’EDF
et leur traduction comptable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .16
8
L’évolution du groupe France Télévisions . . . . . . . . . . . . . . . . . . .18
9
L’ union nationale
des associations familiales (UNAF) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
20
10
Les libéralités, ressources
de la générosité publique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .22
11
Les services départementaux
d’incendie et de secours (SDIS)
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .24
12
Les comités régionaux
du tourisme du “Grand Est” . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .26
13
La fiabilité des comptes
des collectivités territoriales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .28
Cour des comptes
4
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Bilan de la “refondation
indemnitaire” dans la
fonction publique civile
de l’État
1
A l’occasion de ses contrôles sur le
thème de la fonction publique et de
l’Etat employeur, la Cour s’est penchée à
plusieurs reprises sur les régimes indem-
nitaires des agents. A la suite de ses pre-
miers travaux, les ministères se sont
engagés en 1999 dans une entreprise de
“refondation indemnitaire”.
En 2004, la
Cour en a dressé le bilan.
La Cour constate que la régularisa-
tion juridique des primes et indemnités
est en bonne voie. De très nombreux
textes ont été pris qui leur donnent une
assise juridique. Cependant, quelques
anomalies ou irrégularités persistent.
Elles
concernent en particulier une par-
tie de l’encadrement supérieur de l’Etat,
notamment au travers des “surindicia-
tions” et de l’allocation de maintien de la
rémunération. Il en est de même du
caractère rétroactif
de certains textes au
ministère de l’intérieur, ou du versement
de primes par des tiers au ministère de
l’équipement.
Cette régularisation a été fréquem-
ment accompagnée d’augmentations
conséquentes des dépenses indemnitai-
res. Au regard du niveau particulière-
ment élevé atteint par les indemnités
reçues par les intéressés, la Cour consi-
dère que toute solution alourdissant les
charges pesant sur les finances publi-
ques et améliorant encore la situation
relative des catégories d’agents concer-
nés, tels des rééchelonnements indiciai-
res, des bonifications indiciaires ou de la
nouvelle bonification indiciaire, est à
proscrire.
Surtout, la refonte en substance des
diverses indemnités n’a pas été réelle-
ment entamée. La régularisation juridi-
que n’a pas été mise à profit pour poser
les principes d’un nouveau système.
Pourtant,
la question des régimes
indemnitaires est au cœur de l’effort de
modernisation de la gestion publique car
de leurs caractéristiques dépendent pour
une large part la mobilité des agents,
leur mobilisation sur les priorités
d’action et l’incitation à l’amélioration
de la performance collective et indivi-
duelle.
Quant à la modulation des primes,
elle n’est pas généralisée dans les admi-
nistrations contrôlées. Elle est faible,
voire inexistante, dans les ministères les
mieux dotés en indemnités. Un dispositif
visant à traduire la qualité des services
rendus par chaque agent
dans la rapidité
de son avancement, comme celui qui est
envisagé au ministère chargé de l’écono-
mie et des finances, ne dispense pas
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
5
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
d’une pratique de modulation des
indemnités ; en outre, cet avantage est
permanent et définitivement acquis au
contraire de la modulation indemnitaire
qui est par nature réversible.
La Cour signale deux projets visant à
mieux rémunérer la performance : le
premier concerne l’expérimentation
conduite en 2004 pour moduler les pri-
mes de certains directeurs d’administra-
tion centrale, l’autre concerne la prime
de résultat exceptionnelle instituée par
un décret du 21 juillet 2004 au bénéfice
des agents de la police nationale. Ces
projets de rémunération à la perfor-
mance sont trop récents pour qu’une
appréciation puisse être formulée.
Cependant, ils conduisent à souligner
que les marges de souplesse qu’ils sont
susceptibles d’offrir exigent que la trans-
parence
soit assurée. A cette fin doivent
être définis au niveau interministériel
des critères objectifs de modulation et
des outils de mesure et d’analyse a pos-
teriori communs, permettant de vérifier
que le système ne dérive pas vers la for-
faitisation.
Il importe également que les dispo-
sitifs nouveaux ne se résument pas à
l’adjonction d’un nouvel “étage” à un
système pour le reste inchangé.
Enfin, la Cour constate que les sys-
tèmes de gestion des primes et indemni-
tés sont le plus souvent défaillants ou
expérimentaux. Compte tenu du niveau
élevé des plafonds autorisés,
elle
souligne la nécessité d’organiser un dis-
positif
de compte-rendu.
Elle recommande à cet effet que
chaque ministère rende compte précisé-
ment chaque année, par exemple dans le
cadre des “rapports annuels de perfor-
mance”, des conditions de mise en
œuvre
en son sein des régimes indem-
nitaires.
La Cour estime indispensable que
des orientations gouvernementales fer-
mes obligent à la réforme de ces régimes
afin de parvenir à une gestion à la fois
plus harmonieuse et plus dynamique des
ressources humaines dans la
fonction
publique de l’Etat.
Cour des comptes
6
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Les opérations
immobilières du
ministère des affaires
étrangères
2
Dans le cadre de son programme de
contrôle, la Cour a examiné plusieurs
opérations immobilières conduites par
le ministère des affaires étrangères
durant ces dix dernières années. Les
investigations ont ainsi notamment
porté sur les opérations de construction
ou de rénovation des nouvelles ambas-
sades de France à Berlin et à Singapour,
du lycée français de Francfort et du cen-
tre culturel de Séoul, de l’hôtel du
Ministre
et
de
l’immeuble
de
la rue La Pérouse à Paris.
La Cour a mis en évidence de graves
défaillances dans l’exercice de la fonc-
tion de maître d’ouvrage, la succession
incohérente de programmes constam-
ment modifiés, voire abandonnés, et
enfin le caractère exorbitant du coût de
nombre de ces opérations pour les
finances publiques.
Le ministère ne dispose ni des struc-
tures, ni des outils de gestion lui permet-
tant de maîtriser l’ensemble complexe
des opérations qu’il met en oeuvre en
vue de l’entretien de l’important patri-
moine immobilier dont il est affecta-
taire. Il n’est pas non plus en mesure de
réaliser dans de bonnes conditions les
constructions nouvelles qu’imposent les
finalités de la politique étrangère de la
France.
La Cour a relevé tant l’absence de
coordination administrative et financière
au sein du ministère que l’insuffisance
de
coordination
interministérielle
concernant la politique immobilière de
l’Etat à l’étranger. Elle a également noté
l’absence d’un inventaire permettant de
connaître l’état des éléments du patri-
moine à l’étranger, comme de program-
mes-types de construction pour les dif-
férentes catégories d’opérations. En
conséquence, le maître d’ouvrage n’est
pas en mesure d’émettre des recomman-
dations relatives à la maîtrise des coûts
de construction.
Décidée à la fin de 1998, justifiée par
la réelle vétusté des installations, l’opéra-
tion de rénovation de l’hôtel du minis-
tère en donne l’exemple. L’insuffisance
des études préalables a conduit à des
remises en cause fréquentes. Le défaut
de programmation s’est traduit par des
incohérences et des dérapages financiers
entraînant d’importants surcoûts.
La Cour a aussi constaté que les pro-
grammations d’ensemble étaient irréalis-
tes. Une partie importante des opéra-
tions inscrites aux programmes et donc
considérées comme prioritaires sont
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
7
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
abandonnées ou suspendues, en raison
notamment de la nécessité de financer
les dépassements du coût des opérations
engagées antérieurement.
Ainsi,
au
rythme actuel des dotations et des
consommations de crédits, il faudrait
plus de 10 ans pour réaliser les opéra-
tions approuvées en 2003.
Les différentes opérations font l’ob-
jet de nombreuses modifications en
cours d’exécution en raison de la sous-
estimation des coûts. L’exemple le plus
frappant est fourni par la rénovation de
l’immeuble de la rue La Pérouse, qui
s’est caractérisée par l’absence d’identifi-
cation des besoins, la redéfinition com-
plète du projet en cours de chantier et
finalement la réalisation d’une partie
seulement des travaux.
Enfin, la dilution des responsabilités
au sein du ministère facilite les modifica-
tions nombreuses et non maîtrisées, en
marge des procédures régulières. Elle se
traduit en outre par l’allongement des
délais de réalisation et par la multiplica-
tion des litiges entre maître d’ouvrage,
maîtres d’œuvre et entreprises.
En conséquence, les dépassements
de coûts constatés pour les grandes opé-
rations du ministère sont significatifs et
fréquents. Afin de régulariser ces dépas-
sements, des avenants sont élaborés, qui
modifient sensiblement les conditions
du marché d’origine et peuvent consti-
tuer une remise en cause de la mise en
concurrence initiale.
La nouvelle implantation diplomati-
que de la France à Berlin en est l’illustra-
tion.
A un moment où il doit faire face
aux défis de la rationalisation de ses
implantations à l’étranger et du regrou-
pement envisagé de ses sites parisiens, la
Cour a appelé le ministère à mettre en
œuvre un véritable plan de profession-
nalisation de la fonction immobilière,
visant à créer un pôle de compétence
indispensable à son exercice.
Cour des comptes
8
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Du désamiantage à la
rénovation du campus
de Jussieu
3
Dès juin 1999, la Cour avait attiré
l’attention des pouvoirs publics sur les
conditions dans lesquelles avait été lan-
cée l’opération de désamiantage et de
rénovation du campus de Jussieu. La
Cour soulignait les risques d’une opéra-
tion conduite en l’absence d’une pro-
grammation d’ensemble des travaux et
sans qu’une autorité commune à tous les
occupants du campus assure la cohé-
rence de gestion nécessaire durant les
travaux et au-delà.
En 2004, la Cour a constaté que la
maîtrise des procédures, des délais et des
coûts n’a pas été assurée.
Le lancement de l’opération, en sep-
tembre 1996, a été décidé sur la base
d’études préalables insuffisantes. Le
diagnostic était principalement circons-
crit au risque sanitaire de l’amiante et les
insuffisances avérées en matière de
sécurité incendie du campus n’ont pas
été prises en compte. La teneur res-
treinte des propositions a conduit à pro-
poser un calendrier court de trente-sept
mois et un budget de 135 M€. Les
efforts ultérieurs de programmation ont
été déployés ensuite au coup par coup et
par divers intervenants (les universités,
le rectorat et l’Etablissement public du
campus de Jussieu) qui ont été maîtres
d’ouvrage sur le campus. Aucun d’eux
n’avait toutefois de vision d’ensemble, ni
sur cette opération particulièrement
complexe et soumise à de nombreuses
contraintes, ni sur le devenir du campus.
D’une opération circonscrite aux
seuls travaux de désamiantage du site
rendus impératifs par des contraintes de
santé publique, le chantier a changé pro-
gressivement d’échelle pour aboutir à
une rénovation globale du campus. La
redéfinition complète du champ de
l’opération décidée en 1998 a logique-
ment conduit à un allongement considé-
rable des délais et une forte augmenta-
tion des coûts. De nombreux problèmes
logistiques, techniques, juridiques et
stratégiques ont ponctué le déroulement
de l’opération dont l’achèvement com-
plet est encore soumis à aléas. Le mon-
tant total de l’opération sur la partie
appelée le “gril” a été chiffré en 2002 à
environ 800 M€ et le chantier lui-même
ne devrait pas être achevé avant plu-
sieurs années, les échéances étant régu-
lièrement repoussées.
Le principe avait été arrêté de
pour-
suivre les enseignements pendant les
travaux et de maintenir au site sa voca-
tion universitaire. Ceci obligeait à recou-
rir à des opérations tiroirs successives.
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
9
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Or, il est difficile de trouver à Paris des
locaux à louer suffisants et adaptés à des
activités de recherche, parfois d’ensei-
gnement. Les loyers sont élevés et de
nombreux aménagements sont nécessai-
res.
En outre,
les solidarités entre
recherche et enseignement et entre uni-
versités ont dû être respectées. Aussi les
opérations successives de déménage-
ment ont-elles été engagées au coup par
coup. La grande dispersion des activités
des deux universités qui en a résulté a
entraîné une désorganisation des deux
établissements et a généré des coûts
supplémentaires. A ces locaux exté-
rieurs, s’est ajoutée l’implantation sur le
site de Jussieu de bâtiments destinés à
des activités pédagogiques. Enfin, la
tour centrale a dû être fermée en juillet
2002 et évacuée dans la précipitation,
rendant indispensable le relogement des
services qu’elle abritait.
Les conditions de réalisation des
premiers travaux ont été à l’origine
d’une dérive substantielle des délais de
réalisation et dans une moindre mesure
d’une hausse des coûts prévisionnels. La
livraison des dernières barres du secteur
dit “des théoriciens”, retenu en priorité
pour y réaliser le test du désamiantage,
s’est effectuée avec un retard de trois
ans par rapport aux premières prévi-
sions. Les mesures conservatoires de
sécurité se sont avérées également insuf-
fisantes en matière de sécurité incendie.
Ces retards ont à leur tour eu des
conséquences non négligeables sur les
dépenses consacrées aux locaux loués à
titre temporaire.
Les incertitudes sur le coût final et le
calendrier de l’opération sont accrues
par celles du calendrier de transfert de
l’université Paris VII sur la ZAC Paris
Rive Gauche.
Incontestablement exceptionnelle
par son ampleur, la rénovation du cam-
pus de Jussieu a particulièrement souf-
fert de l’absence tant d’une programma-
tion d’ensemble que d’une structure de
pilotage unique. La Cour ne peut que
constater à ce sujet que l’ensemble des
options nécessaires à l’achèvement com-
plet de l’opération ne sont pas encore
prises et que les instances devant faire
des propositions sur le cohérence des
sites concernés viennent seulement
d’être mises en place.
Cour des comptes
10
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
L’évolution du rôle de la
direction générale de la
santé
4
Le contrôle effectué par la Cour a eu
comme objectif d’apprécier si la direc-
tion générale de la santé (DGS) est en
mesure de jouer le rôle que les textes lui
attribuent. Il n’a pas visé à évaluer son
intervention dans les “crises sanitaires”
des années récentes. Au terme de ces
travaux, la Cour souligne les limites du
cadre et des modalités de son action.
La DGS a pour mission de proposer
à l’autorité ministérielle les objectifs de
la politique de prévention et de protec-
tion de la santé et d’en coordonner la
mise en œuvre. Si des progrès ont été
réalisés, à la suite notamment de la créa-
tion depuis le début de la décennie 1990
de huit agences de veille et de sécurité
sanitaire qui démultiplient ses moyens
d’action, la DGS peine à s’affirmer en
tant que pivot de la politique de santé.
Cette situation est à la fois le reflet et
l’une des causes d’une limite plus fonda-
mentale : l’influence encore faible des
préoccupations de santé publique sur les
politiques du ministère de la santé et, au-
delà, de l’Etat dans son ensemble.
Trois facteurs principaux sont à
l’origine de cette situation.
Tout d’abord, l’action de la DGS
prend place dans une réalité institution-
nelle complexe, où il ne lui est pas
reconnu de rôle prépondérant,
pas
même de coordination de l’ensemble
des administrations. Selon les sujets, les
ministères chargés de l’agriculture, de la
consommation, de l’environnement, de
l’industrie, du logement et du travail
sont en effet également compétents. Ce
n’est que dans les domaines des mala-
dies à déclaration obligatoire et des eaux
destinées à la consommation humaine
que le ministère de la santé est chef de
file au niveau interministériel. Les coo-
pérations entre ministères sont d’am-
pleur très variable. La mutualisation de
l’expertise sur les risques sanitaires liés
aux milieux développée par les agences
sanitaires à tutelle multiple reste par-
tielle.
Au sein même du ministère de la
santé, la DGS n’est que rarement inves-
tie d’un rôle de coordination.
Les
domaines de recouvrement de ses mis-
sions et de celles de la direction de l’hos-
pitalisation et de l’organisation des soins
sont larges, et incluent les questions de
démographie et de formation des pro-
fessions de santé. En outre, la politique
de santé publique est nettement séparée
de l’assurance maladie. Aucune instance
n’est chargée de porter un point de vue
à la fois médical et financier sur les évo-
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
11
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
lutions nécessaires des actes, produits et
dispositifs de santé admis au rembourse-
ment par la sécurité sociale. Enfin, les
nombreuses priorités notifiées aux ser-
vices déconcentrés de l’Etat (DRASS et
DDAS) ne sont pas hiérarchisées.
Ensuite, les moyens d’action dont
dispose la DGS apparaissent insuffi-
sants. A titre principal, la mise en œuvre
de la politique de santé publique passe
par la règle de droit. Mais la DGS ne
parvient pas à produire en temps utile la
très grande quantité de textes réglemen-
taires que rendent nécessaires les lois
nouvelles. De plus, la transposition des
directives européennes continue à
connaître des retards.
Aucune agence sanitaire n’est actuel-
lement liée par un contrat d’objectifs et
de moyens.
Le recours à des sources d’expertise
externes à la direction a fait progresser
l’évaluation des risques sanitaires mais il
s’avère encore insuffisant : les relations
avec les agences sont parfois difficiles,
l’objet des demandes d’expertise n’est
pas toujours suffisamment explicité et
les moyens ne sont pas toujours accor-
dés. L’attribution de subventions à des
associations se heurte aux difficultés
habituelles : absence d’évaluation des
résultats et difficulté à redéployer les
crédits en fonction de nouvelles priori-
tés.
Enfin, les tâches de gestion ont
conservé un caractère prépondérant. La
programmation devrait constituer le
vecteur principal de la conception et de
la mise en œuvre de la politique de santé
publique. Or, la DGS a surtout joué un
rôle d’exécutant des “plans”, “program-
mes” ou “stratégies” décidés en-dehors
d’elle ; la plupart n’ont au demeurant ni
dispositif
d’évaluation ni, pour certains,
de comité de pilotage national.
La DGS a bénéficié entre 2000 et
2002 d’une priorité en matière d’emplois
attribués mais une partie des emplois a
connu ou continue à connaître une
vacance prolongée et la rotation des
agents est encore rapide. Les vacances
d’emplois sont en outre pour partie
concentrées sur les missions de sécurité
sanitaire.
Pour donner à la politique de santé
publique l’ampleur voulue par le législa-
teur, la Cour considère qu’il faut à la fois
une révision du cadre institutionnel dans
lequel agit la DGS au sein du ministère
de la santé et au niveau interministériel,
un renforcement des moyens et des
méthodes destinés à prévenir et à traiter
les crises sanitaires, un allégement des
tâches de gestion par transfert à d’autres
directions et aux agences sanitaires et la
mise en œuvre de programmations
rigoureuses destinées à donner une tra-
duction à ses objectifs.
Cour des comptes
12
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Les transformations du
service public de la
transfusion sanguine
5
Depuis 1992, l’organisation du ser-
vice de transfusion sanguine a connu de
profondes transformations. Réalisées en
deux étapes, elles ont permis de spécia-
liser et de concentrer les responsabilités
dans ce secteur profondément marqué
par la crise du sang contaminé.
La loi du 4 janvier 1993 a créé
l’Agence française du sang (AFS), char-
gée d’harmoniser les pratiques médica-
les, de veiller à l’autosuffisance nationale
en produits labiles,
d’agréer et de
contrôler les établissements de transfu-
sion sanguine dont le nombre a été
divisé par quatre, le Laboratoire français
du fractionnement et des biotechnolo-
gies (LFB), habilité à produire les frac-
tions plasmatiques soumises depuis
1989 au statut du médicament,
et
l’Institut national de transfusion san-
guine (INTS),
centre de références
chargé d’une mission d’enseignement et
de recherche.
La loi du 1er juillet 1998 a parachevé
la centralisation en substituant à l’AFS
un
nouvel
établissement
public,
l’Etablissement français du sang (EFS)
qui a absorbé tous les établissements de
transfusion existants, quel que soit leur
statut. L’EFS est désormais l’opérateur
unique en matière de collecte et de pré-
paration des produits labiles. Les com-
pétences de réglementation technique
ont été attribuées à l’Agence française
de sécurité sanitaire des produits de
santé (AFSSAPS).
La Cour constate les progrès signi-
ficatifs ainsi obtenus mais note aussi
les efforts qui restent à faire pour assu-
rer le plein succès de la réforme.
Malgré la baisse régulière du nombre
de donneurs,
l’autosuffisance a été
assurée.
La sécurité sanitaire a été notable-
ment accrue en même temps que les
contrôles des structures et des produits
ont été renforcés. Ces progrès certains
doivent être poursuivis,
notamment
grâce à l’amélioration des systèmes de
suivi et de contrôle actuellement dispo-
nibles. Dans le domaine de la distribu-
tion, en outre, le choix n’a pas encore été
clairement arrêté entre les sites propres
de l’Etablissement et les dépôts hospita-
liers, dont une moitié environ n’ont pas
encore
reçu
d’avis
favorable
de
l’AFSSAPS.
En ce qui concerne le fractionne-
ment, la question du statut du LFB doit
être tranchée au plus tard au terme de la
convention actuelle. Le législateur a opté
en 2004 pour la formule d’une société
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
13
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
entièrement détenue par le secteur
public qui devrait être mise en œuvre
rapidement.
La coexistence aujourd’hui de l’EFS
et de l’INTS dans le domaine de la
recherche appelle à une réflexion sur la
meilleure organisation à mettre en place.
Pour ce qui concerne l’EFS lui-
même, la Cour note un certain nombre
de faiblesses dans le domaine financier.
Si les efforts réalisés ces dernières
années ont permis une nette améliora-
tion de la couverture des charges par les
ressources, cet équilibre reste fragile. Les
besoins liés à la sécurité sanitaire et aux
normes nouvelles, qu’il s’agisse de prati-
ques ou d’équipement, exigeront encore
vraisemblablement des dépenses non
négligeables. Les tarifs eux-mêmes se
situent à un niveau élevé.
Ils ne
devraient évoluer qu’en fonction de leur
pertinence économique qui n’est pas
assurée en l’absence d’une connaissance
fine des coûts de revient des produits.
La priorité doit donc être donnée
aux efforts de productivité. Si la diversi-
fication des activités de l’EFS ne peut
pas être critiquée par principe, elle ne
doit pas conduire à limiter les réorgani-
sations nécessaires dans le réseau.
Cour des comptes
14
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Les crédits inscrits au budget du tra-
vail pour les aides à l’emploi (24,5 Md€
en loi de finances initiale pour 2004)
représentent 1,5 % du PIB. Les com-
pensations
d’exonérations
sociales
constituent désormais le premier poste
de ces aides.
L’enquête de la Cour a fait apparaî-
tre l’insuffisance, eu égard à ces enjeux,
des dispositifs qui devraient permettre
de mesurer l’impact des politiques mises
en œuvre.
Leur évaluation repose principale-
ment sur la direction de la recherche, des
études et de la statistique (DARES) du
ministère chargé de l’emploi. L’Institut
national de la statistique et des études
économiques (INSEE) assure la collecte
de certaines données ; il ne s’est que tar-
divement impliqué dans l’évaluation de
la réduction du temps de travail. La
direction de la prévision du ministère de
l’économie, des finances et de l’industrie
est peu intervenue.
Plusieurs organismes de recherche,
dont notamment le centre de recherches
en économie et statistiques (CREST) lié
à l’INSEE, sont dans la période récente
à l’origine des travaux importants.
Toutefois, l’accès trop limité des cher-
cheurs aux données statistiques a nui au
nécessaire pluralisme des évaluations.
Les dispositions législatives intervenues
en 2004 devraient à cet égard apporter
des améliorations sensibles.
L’évaluation des aides à l’emploi a
également souffert de la dispersion des
données statistiques nécessaires entre
les différents opérateurs des politiques
publiques, ainsi que de l’insuffisance de
certaines de ces données. Ainsi, en
matière de réduction du temps de tra-
vail, les enquêtes et fichiers administra-
tifs existants n’apportaient pas toutes les
informations utiles, ce qui a obligé à de
délicates extrapolations.
Les priorités des autorités politiques
vont aux analyses préalables le plus
directement utiles à la prise de décision.
Ces évaluations “ex ante” sont établies à
l’aide de modèles de simulation perfec-
tionnés.
En revanche, les évaluations ex post,
plus riches d’enseignements mais plus
longues et plus lourdes à réaliser, sont
rares et n’occupent qu’une faible part
dans la programmation de la DARES.
Les études “ex post” ne sont, le plus
souvent, que légères et partielles. De
surcroît, les politiques publiques en ce
domaine sont souvent infléchies ou
Les dispositifs
d’évaluation des
politiques d’aides à
l’emploi
6
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
15
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
modifiées avant que leurs effets aient pu
être complètement mesurés.
Enfin, quels que soient les efforts
des administrations pour perfectionner
les systèmes d’information et dévelop-
per les études, leurs initiatives ne peu-
vent suffire à pallier l’absence d’un cen-
tre d’impulsion et d’animation extérieur,
définissant les objectifs et les modalités
de la démarche évaluative, puis assurant
une discussion pluraliste des résultats.
En dehors de deux rapports d’am-
pleur limitée, le Conseil national de
l’évaluation n’a mené dans le domaine
de l’emploi qu’une seule grande évalua-
tion, celle des aides aux emplois non
marchands, qui présente des lacunes
méthodologiques et où se décèle une
influence excessive de la DARES. Le
Conseil national de l’évaluation ne s’est
intéressé ni aux allègements de charges
ni
à la réduction du temps de travail. Du
fait de sa mise en sommeil, il n’existe
plus aujourd’hui d’instance interministé-
rielle d’évaluation des politiques de l’em-
ploi.
Les conséquences de la situation
observée se manifestent par la relative
rareté et les résultats incertains des tra-
vaux visant à mesurer l’impact des meu-
res d’aide à l’emploi.
Ce sont les aides directes à l’emploi
dans le secteur non marchand, en parti-
culier, en leur temps, les emplois jeunes,
qui ont fait l’objet des travaux les plus
abondants. Toutefois, les résultats ne
sont pas complètement concluants,
faute notamment qu’aient été évalués les
effets structurels des mesures sur l’acti-
vité, l’emploi et le chômage et qu’aient
été mis en parallèle les chances et le
devenir professionnel de bénéficiaires et
de non bénéficiaires comparables.
L’effet sur l’emploi des allègements
de charges a donné lieu à plusieurs tra-
vaux d’évaluation scientifique. Leurs
résultats sont très sensibles aux hypo-
thèses théoriques qui en forment le sup-
port. L’effet en termes d’emplois créés
des allègements en vigueur en 1997 a
donné lieu en 2001 à cinq études dont
les chiffrages varient de 1 à 10. Il n’y a
pas eu d’études systématiques des expé-
riences étrangères ni d’études sectoriel-
les.
L’effet sur l’emploi de la réduction
du temps de travail a notamment donné
lieu à une évaluation de la DARES. Mais
celle-ci s’est heurtée à des difficultés
importantes qui en ont limité la portée.
Plusieurs autres travaux, dont une étude
conduite en 2001 sous l’égide du com-
missariat général du Plan ont abouti à
des résultats contrastés, affectés d’im-
portantes incertitudes méthodologiques.
Ainsi, les pouvoirs publics ne sont
pas en mesure d’apprécier de façon
exhaustive et fiable l’impact des dépen-
ses considérables engagées en faveur de
l’emploi. Il n’est, a fortiori, pas possible
d’assurer que l’effet positif global des
mesures appliquées compense l’impact
économique négatif
des prélèvements
obligatoires nécessaires pour les finan-
cer.
La Cour insiste sur l’urgence qu’il y a
à corriger les défauts dont souffre l’orga-
nisation actuelle des travaux d’évaluation
et à renforcer la demande d’évaluation.
Cour des comptes
16
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Les spécificités d’EDF et
leur traduction
comptable
7
Le dernier contrôle de la Cour sur
les comptes et la gestion d'EDF a été
l'occasion d'un examen approfondi des
problèmes et pratiques comptables de
l'entreprise. Au delà des remarques,
pour certaines déjà formulées par ses
rapports précédents sur les provisions,
le traitement comptable des concessions
et les engagements de retraite, la Cour a
mis un accent particulier sur les spécifi-
cités d'EDF, les évolutions de son réfé-
rentiel comptable et leurs conséquences
sur la comparabilité et l'évaluation des
performances économiques et financiè-
res de l'entreprise.
Une des particularités de cette entre-
prise tient à l'ampleur de son parc de
centrales nucléaires.
Or,
comme l'a
montré le rapport public particulier que
la Cour a récemment consacré à ce sujet,
la production et l'utilisation de combus-
tibles
nucléaires sont assorties d'obliga-
tions de long terme dont la traduction
comptable recèle difficultés et incertitu-
des. Les actifs de production génèrent
un montant important de charges calcu-
lées : dotations aux amortissements et
provisions pour démantèlement des ins-
tallations. Les chiffrages de la dépense
future
et notamment celle qui concerne
la gestion des déchets relève d'hypothè-
ses tenant à divers facteurs : durée des
cycles concernés, technologie, prix, taux
d'inflation et d'actualisation.
Toute
variation dans ces paramètres a, du fait
des volumes financiers concernés, des
répercussions
significatives
sur
le
compte de résultat comme sur le bilan
de l'entreprise.
Par ailleurs, si son statut de conces-
sionnaire a été abandonné pour le réseau
de transport, il existe encore dans le
domaine de la distribution. Or, ce statut,
et donc ses modifications, emportent
des conséquences importantes sur les
comptes de l'entreprise.
Compte tenu des volumes financiers
concernés,
toute
modification
de
méthode ou de présentation liée à l'évo-
lution du référentiel comptable a aussi
des conséquences majeures. A cet égard,
la mise en œuvre des normes compta-
bles internationales (IFRS), déjà large-
ment anticipée en 2003 par EDF dans le
souci déclaré de permettre une meilleure
comparaison de ses comptes avec ceux
de ses principaux concurrents euro-
péens, est un facteur de changement
important.
La Cour, dans ses derniers contrôles,
a émis l'avis que les comptes de l'électri-
cien national étaient réguliers et sincères.
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
17
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Elle a souligné le gros effort de fiabilisa-
tion et d'amélioration de ces comptes
poursuivi par l'entreprise.
Pour autant, la situation des comp-
tes d'EDF n'est pas stabilisée : la filiali-
sation prévue du réseau de transport de
l'électricité, la modification du régime
des retraites, la possible externalisation
des provisions pour abonder des fonds
dédiés à la gestion des déchets ou au
démantèlement, le retour d'expérience
sur la durée de vie des équipements, l'en-
trée en vigueur des nouvelles normes
comptables sont de nature à modifier la
physionomie des comptes. Or ces évolu-
tions interviendront dans un contexte
lui-même mouvant du fait en particulier
de la transformation récente du statut
d'EDF, de son exposition à la concur-
rence, de l'ouverture prévue de son capi-
tal.
L’ensemble de ces changements ne
manquera pas d'élever les exigences de
transparence de ses nouveaux partenai-
res pour tout ce qui concernera le
domaine comptable. L'Etat, qui selon la
loi a vocation à demeurer l'actionnaire
majoritaire, aura à cet égard une respon-
sabilité particulière dont les conséquen-
ces ne peuvent être sous-estimées car les
marchés risquent de sanctionner sévère-
ment les obscurités ou les incertitudes
pesant sur les résultats ou les charges à
venir.
La Cour recommande donc que dès
maintenant EDF utilise pleinement les
annexes de ses comptes pour rendre la
lecture de ceux-ci aussi claire et aussi
peu contestable que possible.
Elle
recommande de même que l'entreprise,
une fois achevée le passage aux normes
IFRS de sa comptabilité, s'abstienne de
procéder
à
des
changements
de
méthode ou d’estimation trop fréquents,
sauf s'ils sont dûment justifiés et bien
expliqués.
Cour des comptes
18
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
L’évolution du groupe
France Télévisions
8
Dans son rapport public 1998, la
Cour avait été particulièrement critique
sur la gestion de France Télévisions.
Sept ans plus tard, à l’occasion du
contrôle général des chaînes du groupe
et de nombreuses autres filiales, la Cour
a souhaité vérifier les conditions dans
lesquelles la holding avait exercé son
rôle de pilotage et orienté la stratégie du
groupe.
La Cour observe en premier lieu que
France Télévisions dispose désormais
de la structure de tête qui lui manquait.
La mise en place par la loi du 1er août
2000 d’une holding a permis de procé-
der à une remise en ordre financière et
comptable qui s’imposait et d’entrer
dans une logique orientée sur la perfor-
mance. Ce changement a permis des
synergies et des économies significatives
et, depuis sa création, le résultat du
groupe a toujours été bénéficiaire.
Plus encore, l’existence de France
Télévisions en tant que groupe donne à
la télévision publique une visibilité et
une identité qui lui faisaient défaut. Face
à des concurrents puissants mais dispo-
sant d’une seule chaîne hertzienne,
France Télévisions offre une large
gamme de chaînes (France 2, France 3,
France 5, RFO…) qui touche les publics
les plus divers.
Mais ces premiers résultats encoura-
geants ne répondent encore que très
partiellement aux exigences d’un groupe
confronté à une concurrence sévère et
doivent être parachevés dans trois
domaines au moins.
Tout d’abord, le groupe France
Télévisions devrait être en mesure d’as-
sumer pleinement les responsabilités
d’actionnaire de référence pour toutes
les filiales qu’il contrôle. Tel n’est pas le
cas aujourd’hui pour TV5,
CFI et
ARTE. Ensuite, la maîtrise des dépenses
de personnel constitue un impératif, leur
progression au cours de ces dernières
années ayant été supérieure à celle des
autres charges comme à celle des res-
sources. Le cadre conventionnel actuel
qui régit les relations avec le personnel
constitue par ailleurs un sérieux frein
pour la prise en compte des change-
ments technologiques et des nouveaux
métiers. Enfin, sans remettre en cause le
choix d’une organisation qui responsa-
bilise les dirigeants des principales chaî-
nes et filiales, le pouvoir d’arbitrage et de
coordination de la holding doit être ren-
forcé. La complémentarité entre les
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
19
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
chaînes impose que France Télévisions
dispose de procédures de contrôle,
d’alerte et de sanction pour tenir le coût
des grilles.
La Cour constate en second lieu que
la stratégie de France Télévisions au
cours de ces dernières années a été pro-
fondément perturbée par l’incertitude
pesant sur le niveau de ressources publi-
ques qui lui sont affectées. Après avoir
misé au milieu des années quatre-vingt
dix sur le marché du satellite - mais en y
entrant tardivement et sans avoir les
moyens financiers nécessaires pour s’y
développer - France Télévisions s’en est
dégagé. Le groupe public ne peut plus
compter sur ces chaînes pour compen-
ser la diminution d’audience tendan-
cielle de toutes les chaînes hertziennes.
Puis, alors que le déploiement sur la télé-
vision numérique terrestre (TNT) d’une
large offre publique constituait l’axe
majeur du contrat d’objectifs et de
moyens signé en 2001 avec l’Etat,
France Télévisions a dû prendre acte de
la décision de l’Etat de différer la mise
en œuvre de la TNT et revoir par ailleurs
à la baisse, pour des raisons financières,
son offre de programmes.
L’abandon de fait du contrat
d’objectifs et de moyens
actuel et le
report sine die d’un nouveau contrat
avec l’Etat placent le groupe public dans
la situation difficile d’avoir à mettre en
œuvre une série de décisions gouverne-
mentales sans avoir l’assurance de dis-
poser des ressources nécessaires. Cette
situation constitue un handicap sérieux.
Cette hypothèque demeure pour le
proche avenir, France Télévisions étant
confronté à une progression de ses
dépenses aussi rapide que celle des
recettes. La diversité de l’offre de pro-
grammes à financer a pour effet que le
coût de la grille de l’ensemble des chaî-
nes évolue selon une tendance qui ne
peut être très inférieure à celle de ses
concurrents privés. Or, c’est l’identité de
la télévision publique qui se trouverait
affectée si les chaînes n’étaient plus en
mesure de toucher les publics divers qui
sont les leurs.
Les hésitations et changements stra-
tégiques de ces dernières années reflè-
tent d’abord la situation des finances
publiques et la difficulté de l’Etat action-
naire à arbitrer entre les options possi-
bles. Pour la Cour, les autorités politi-
ques doivent apprécier sans trop atten-
dre si un effort supplémentaire doit être
demandé aux contribuables par le biais
de la redevance ou si la rigueur des
temps impose de revoir le périmètre de
la télévision publique ou d’en réduire les
ambitions en termes de programmes.
Cour des comptes
20
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
L’union nationale des
associations familiales
(UNAF)
9
L’UNAF est une association très
atypique : son existence, ses missions
et
son financement sont fixés et garantis
par la loi. Elle est chargée de promou-
voir, défendre et représenter les intérêts
des familles vivant sur le territoire fran-
çais, quelles que soient leurs croyances
ou leur appartenance politique. Elle
fédère des unions départementales aux-
quelles adhèrent librement des associa-
tions familiales relevant elles-mêmes de
divers mouvements familiaux.
La responsabilité qui lui est ainsi
confiée et le privilège de financement
public dont elle jouit auraient dû
conduire tant les pouvoirs publics que
l’UNAF elle-même à mettre en place
des mécanismes garantissant une utilisa-
tion
optimale
des
fonds
publics.
A l’issue de son précédent contrôle en
1986, la Cour avait relevé
une applica-
tion incorrecte des règles régissant le
fonds spécial et un train de vie excessif
de l’UNAF. Le contrôle effectué en
2003 a permis de constater que les
mesures récemment prises par les diri-
geants ont permis une amélioration de la
gestion, mais qu’elles s’avèrent encore
insuffisantes. En outre, les pratiques
contestées en matière de modalités de
financement persistent.
La Cour a observé en premier lieu
que
l’attribution de fonds publics à
l’UNAF devrait être subordonnée à une
meilleure représentativité de l’associa-
tion, la France rurale étant actuellement
sur représentée.
S’agissant des ressources, la Cour
observe que les modalités de finance-
ment assurent à l’UNAF un finance-
ment confortable et croissant avec la
masse des prestations familiales (25 M€
en 2003) qui est versé sans
définition
préalable d’objectifs ni justification
d’emploi. Non seulement l’assiette est
naturellement dynamique, mais sa défi-
nition a été élargie par rapport à la lettre
des textes telle qu’interprétée par le
Conseil d’Etat. Le taux de prélèvement a
été augmenté sans la justification d’un
élargissement des missions. Enfin, tant
la répartition du fonds spécial que les
modalités de versement aux unions et
mouvements familiaux étaient, faute
d’avoir été mises à jour, opérées de
façon irrégulière par l’Etat et l’UNAF.
Les régimes de sécurité sociale
finan-
ceurs ne sont pas associés à cette répar-
tition.
S’agissant des comptes et de la ges-
tion, la Cour observe que la traduction
du fonds spécial dans les comptes de
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
21
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
l’UNAF n’est pas claire, ce qui empêche
d’en suivre la consommation.
Elle
constate enfin une gestion peu rigou-
reuse : son aisance financière semble
avoir dispensé l’UNAF pendant long-
temps de mettre en place un suivi bud-
gétaire et des procédures de
maîtrise
des coûts.
Le contrôle de l’UNAF a donc mon-
tré de multiples défaillances, tant de la
part de l’Etat que de l’association elle-
même. La Cour estime que l’Etat devrait
déléguer à la CNAF, qui fédère l’ensem-
ble des finances de la branche famille, la
mise en œuvre et le contrôle du fonds
spécial.
Mais la forte présence de
l’UNAF au sein des instances
des orga-
nismes de sécurité sociale et surtout de
la CNAF n’est pas de nature à faciliter
cette évolution. Par ailleurs, les textes
devaient préciser les missions confiées à
l’UNAF et encadrer plus strictement le
niveau de son financement sur fonds
publics. Une convention entre l’UNAF
et les régimes financeurs devrait définir
les modalités de versement et de
contrôle des fonds attribués. Les dispo-
sitions figurant dans la loi de finance-
ment de la sécurité sociale pour 2005
tendent à répondre
partiellement aux
observations de la Cour.
Cour des comptes
22
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Les libéralités,
ressources de la
générosité publique
10
Les organismes faisant appel à la
générosité publique se signalent princi-
palement par leurs opérations de col-
lecte de dons. Cependant les libéralités,
dont les legs constituent la part princi-
pale, représentent en 2002 un flux
important de recettes, 30 % des ressour-
ces issues de la générosité publique pour
les 62 organismes dont les comptes ont
pu être communiqués à la Cour.
La pérennisation, voire le dévelop-
pement de ce type de ressources, impli-
quent que le
donateur ou le
testateur
potentiel ait l’assurance que sa volonté
sera rapidement et sûrement exécutée.
Pour faire face à cette exigence légitime,
la Cour considère que le régime juridi-
que et administratif qui s’applique aux
libéralités doit être assoupli et que la
recherche, par les organismes, d’une
plus grande efficacité dans leur gestion
est indispensable.
Le régime des libéralités perçues par
les personnes morales a été construit à
partir de la seconde moitié du XIXème
siècle autour du principe de l’autorisa-
tion administrative préalable, dans le
souci d’assurer un équilibre entre les
droits des organismes bénéficiaires et
l’intérêt des familles.
Or, l’application de ce principe se
traduit aujourd’hui, compte tenu du
nombre et de la complexité des dossiers,
par des délais de plusieurs mois, parfois
de plusieurs années, avant que les orga-
nismes puissent entrer en possession
d’une libéralité. Pour les six organismes
que la Cour a examinés et dont cinq sont
du ressort de la préfecture de Paris, les
délais constatés étaient
en moyenne
supérieurs à deux ans.
En outre, les préfectures, confron-
tées à un stock
important de dossiers en
attente (une année pour la préfecture de
Paris), ne sont pas en mesure d’assurer
le contrôle du respect des conditions
fixées par les arrêtés préfectoraux.
Enfin le traitement juridique et
l’appréhension des contrats d’assurance
vie, dont l’importance est croissante
dans le volume des libéralités, soulèvent
des
difficultés spécifiques.
La Cour a pris acte de l’annonce par
le ministère de l’intérieur de la simplifi-
cation du régime juridique des libérali-
tés.
Par ailleurs, dans l’ensemble, les
organismes gèrent ces ressources dans
des conditions satisfaisantes, mais des
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
23
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
progrès peuvent être accomplis sur plu-
sieurs points :
- l’application de la réglementation
comptable : tous les organismes ne se
sont pas encore mis en conformité avec
les dispositions du nouveau plan comp-
table des associations, pourtant obliga-
toire depuis 2000 ;
- le suivi administratif et financier :
les déficiences les plus caractéristiques
concernent les systèmes informatiques.
La Cour incite à cet égard les organis-
mes à grouper leurs efforts, des démar-
ches dispersées pouvant se révéler coû-
teuses et peu adéquates ;
- les relations avec les testateurs : les
représentants des organismes étant
conduits à avoir des relations avec eux, il
est indispensable que les organismes
édictent en la matière des
règles de
déontologie et qu’ils en assurent le
respect.
Cour des comptes
24
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Les services
départementaux
d’incendie et de secours
(SDIS)
11
La loi du 3 mai 1996, relative aux
services d’incendie et de secours, a subs-
titué à la logique d’organisation commu-
nale une logique départementale. Cette
départementalisation a eu comme objec-
tif
la coordination et la rationalisation
de la lutte contre l’incendie et des
secours en optimisant les moyens mis en
œuvre et en renforçant les solidarités
locales.
Les chambres régionales des comp-
tes constatent que les ambitions n’ont
pas été pleinement satisfaites.
Les interventions des SDIS ont
beaucoup évolué.
La lutte contre l’in-
cendie, compétence exclusive des SDIS,
est devenue très minoritaire, alors que le
secours à victime, mission partagée avec
d’autres services représente 4 interven-
tions sur 10. Mais si la nature des inter-
ventions est connue, les autres données
nécessaires à caractériser plus finement
l’activité des SDIS et permettre une
meilleure adaptation des moyens aux
missions ainsi que la mesure des perfor-
mances du service, comme l’évaluation
des moyens mobilisés et la durée
de
chaque intervention, sont encore parcel-
laires ou inexistantes.
Le schéma départemental d’analyse
et de couverture des risques (SDACR)
que chaque SDIS doit élaborer n’a pas
été, en général, l’outil d’une évolution
significative. L’implantation géographi-
que des centres de secours et les délais
d’intervention sont restés inchangés.
L’adéquation des matériels aux risques
incendie est prévue, mais les schémas
n’ont pas traité de façon approfondie
l’organisation des services en fonction
des secours à victime. L’absence d’un
dispositif d’évaluation risque de peser
sur les conditions de la révision de ces
schémas.
Le regroupement des centres de
traitement de l’alerte (CTA) et l’organi-
sation d’un centre opérationnel d’incen-
die et de secours (CODIS) pour assurer
la coordination des interventions ont été
un des premiers efforts d’investissement
lourd. Cependant, très peu de services
ont saisi l’opportunité de regrouper le
CTA avec les centres de réception et de
régulation des appels, le “15”. La Cour
note que les niveaux de “détresse vitale”
ou de “secours d’urgence” devraient
être caractérisés de façon identique afin
de faciliter l’organisation de la réponse
aux appels d’urgence.
Certaines des interventions des
SDIS, notamment lors des secours à vic-
times, donnent lieu à des participations
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
25
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
financières des bénéficiaires. Quelle que
soit la situation, mise à disposition de
moyens en faveur des centres hospita-
liers,
suppléance d’une carence des
ambulanciers privés ou réponse à la
demande des personnes privées ou
publiques, la prise en charge financière,
quand elle existe, est toujours inférieure
au coût réel supporté par le SDIS.
Au cours des cinq années qui ont
suivi la publication de la loi de 1996, les
budgets des SDIS ont connu dans l’en-
semble un accroissement important. De
fait, les charges ont été sous-estimées
lors des premiers transferts. Les charges
de gestion administrative n’étaient pas
isolées dans le budget de chaque collec-
tivité. Les transferts des agents commu-
naux administratifs et techniques n’ont
pas été à la hauteur des besoins. La
diversité des moyens techniques mis en
commun et la nécessité de conforter la
sécurité ont conduit à renouveler et à
compléter les matériels mis à la disposi-
tion des SDIS. Les créations nettes
d’emploi, notamment pour intégrer les
sapeurs-pompiers volontaires ont été un
autre motif
d’augmentation des bud-
gets. Les mesures statutaires nouvelles,
les revalorisations de la carrière des
sapeurs-pompiers et les effets de l’amé-
nagement et de la réduction du temps de
travail s’y sont ajoutés.
Doit être souligné l’importance de
l’effectif des sapeurs-pompiers volon-
taires, qui représente 80 % de l’effectif
des SDIS.
Leur présence permet le
maillage actuel en centres de secours.
Mais l’intégration d’une partie d’entre
eux aux corps départemental et la réduc-
tion significative des engagements de
volontaires depuis plusieurs années font
craindre une difficulté à terme pour
répondre aux sollicitations de la popula-
tion. Par ailleurs, la Cour note le para-
doxe créé par la limitation de la disponi-
bilité des sapeurs-pompiers profession-
nels par la réglementation soucieuse de
préserver un haut degré de vigilance,
alors même qu’ils peuvent souscrire des
contrats de sapeurs-pompiers volontai-
res en complément de leur temps de tra-
vail.
Malgré les charges qui ont accompa-
gné la départementalisation, les cham-
bres régionales des comptes estimaient
que la situation financière de la plupart
des SDIS, au 31 décembre 2001, était
saine. Cependant, elles constatent aussi
que le renouvellement des équipements
et la rénovation des casernements pré-
vus dans les plans d’équipement ainsi
que le nouveau régime de retraite
accordé récemment aux sapeurs-pom-
piers professionnels conduiront à un
accroissement important de charges.
Cet accroissement interviendra à
un moment où le montant global
annuel des contributions des commu-
nes et de leurs établissements publics
de coopération intercommunale aura
été limité. Les SDIS devront donc maî-
triser leurs dépenses, pour cela se doter
d’outils de contrôle de gestion qui
n’ont que rarement été développés. Ils
devront aussi s’interroger,
avec les
départements, sur l’évolution de leurs
ressources financières.
Cour des comptes
26
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
Les comités régionaux
du tourisme du “Grand
Est”
12
Dans son rapport public de 1992, la
Cour des comptes, à la suite d’une
enquête menée par huit chambres
régionales des comptes, avait constaté
que l’action publique en matière de
soutien et de développement du tou-
risme était dispersée entre de multiples
acteurs et souvent peu efficace.
Douze ans plus tard, les chambres
régionales des comptes des cinq
régions du “Grand Est”
(Alsace,
Bourgogne,
Champagne
Ardenne,
Franche-Comté, Lorraine) ont procédé
au contrôle des comités régionaux du
tourisme (CRT). La création d’un CRT
par région est obligatoire depuis la loi
du 3 janvier 1987 et les budgets de ces
organismes sont en forte croissance
depuis dix ans.
Les comités régionaux ont conçu
leurs actions souvent de façon très
indépendante, dépensant des sommes
importantes dans des opérations mal
maîtrisées ou à l’efficacité très incer-
taine. Ils ont eu un fonctionnement
coûteux notamment en matière de per-
sonnel et de déplacements. La coopéra-
tion entre les différents organismes
agissant dans le domaine touristique n’a
pas été suffisamment organisée.
Les orientations des politiques
menées au niveau des régions en
matière de tourisme restent mal défi-
nies. L’absence ou les insuffisances des
schémas régionaux de développement
du tourisme et des loisirs ne permettent
pas d’orienter l’action des autres collec-
tivités ni des autres acteurs (comités
départementaux du tourisme, offices
de tourisme d’une commune ou d’un
groupement de communes).
La loi du 31 décembre 1992 avait
prévu des conventions avec les autres
collectivités territoriales concernées
pour la mise en place des actions
répondant aux objectifs du plan régio-
nal et aux modalités de mise en œuvre
du schéma régional. Elle reste mal
appliquée et la coordination voulue par
le législateur se transforme le plus sou-
vent en concurrence des compétences.
De ce fait, les différentes structures
sont à l’origine d’interventions désor-
données, en particulier sur les marchés
extérieurs et en matière de diffusion
d’informations.
Une clarification des politiques
menées par les régions et leurs CRT
s’impose aussi pour permettre une
application réelle de la loi du 13 août
2004 qui, sans trancher sur la réparti-
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
27
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
tion des compétences entre les nom-
breux intervenants, dispose que les
missions des offices de tourisme com-
munaux
ou
intercommunaux,
en
matière d’accueil et d’information des
touristes ainsi que de promotion touris-
tique, doivent être assurées en cohé-
rence avec le comité départemental et
le comité régional du tourisme.
Cour des comptes
28
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
La fiabilité des comptes
des collectivités
territoriales
13
Même si les principes de base sont
analogues, les comptes des collectivités
territoriales et de leurs établissements
publics sont établis selon des règles,
fixées par instructions ministérielles, qui
diffèrent de celles applicables aux entre-
prises ou à l’Etat. Les instructions
comptables en vigueur ne sont pas
homogènes d’une catégorie de collecti-
vités à l’autre.
A la différence de l’Etat, la plupart
des opérations traduisant
l’application
des principes comptables généraux dans
les administrations locales sont intégrées
dans la comptabilité des recettes et des
dépenses budgétaires. Les opérations de
fin d’exercice qui en découlent permet-
tent le passage d’une simple comptabi-
lité de caisse (encaissements - décaisse-
ments) à la comptabilité générale.
Les chambres régionales des comp-
tes ont renforcé leurs contrôles sur la
fiabilité des comptes produits aussi bien
par les ordonnateurs que par les comp-
tables et en livrent les premiers ensei-
gnements : la réglementation est assez
souvent mal appliquée ; dans certains
domaines, elle est à revoir.
Les résultats d’un exercice sont par-
fois surévalués. Les méthodes utilisées
sont aussi variées que critiquables : la
perte découlant du caractère
irrécouvra-
ble d’une créance est constatée avec
retard ; des factures reçues de fournis-
seurs sont enregistrées après un délai
contraire à la règle du rattachement des
charges à l’exercice (pratique des “factu-
res dans les tiroirs”) ; les possibilités
d’étalement de charges offertes par la
réglementation sont utilisées abusive-
ment ; enfin, des produits de cession
d’actif
sont indûment affectés à la cou-
verture de dépenses de fonctionnement.
De telles anomalies sont fréquentes.
La connaissance de leur patrimoine
par les collectivités reste très insuffi-
sante. Pourtant, la réforme par étapes
des instructions comptables applicables
au secteur local avait parmi ses ambi-
tions la mise en place de procédures
d’inventaire fiables et l’introduction
progressive d’un amortissement des
immobilisations. L’année 1999 aurait dû
voir l’achèvement des inventaires et du
recensement des travaux réalisés sur les
immobilisations. Cette échéance n’a que
rarement été tenue. Ce constat est
préoccupant, car les normes comptables
internationales renforcent les exigences
dans le domaine patrimonial.
En outre, la gestion financière des
collectivités
et
des
établissements
Le rapport public annuel 2004
Observations des juridictions financières
29
Synthèse
du Rapport public 2004 de la
Cour des comptes
publics locaux est soumise à un principe
d’équilibre budgétaire strict. Bien des
distorsions constatées par les chambres
régionales des comptes dans l’applica-
tion des règles comptables résultent de
tentatives
pour
contourner
cette
contrainte : constater une charge pour
satisfaire à une règle comptable implique
en effet de dégager une recette équiva-
lente. La combinaison de normes bud-
gétaires et de normes comptables
conduit la réglementation comptable
à
des solutions de compromis. C’est
en
matière de provisions que cette concilia-
tion soulève le plus de difficultés en rai-
son des conséquences budgétaires à
retardement qu’elle peut avoir.
Enfin, le principe de comptabilisa-
tion en droits constatés, joint à l’inter-
diction de présenter un budget en défi-
cit, peut conduire à ne pas enregistrer
des dettes et contrevenir ainsi à l’exi-
gence de fiabilité des comptes. Ainsi, la
comptabilisation tronquée de certaines
opérations masque parfois pendant plu-
sieurs exercices des situations déséquili-
brées. La Cour considère que la concilia-
tion des principes comptables et budgé-
taires doit passer par la réglementation
et exclure les accommodements au cas
par cas. Il conviendrait donc de rendre
possible l’apparition d’un déficit en fin
d’exercice pour inscrire les dotations
budgétaires nécessaires et faire apparaî-
tre des résultats exacts.
La bonne application des règles
comptables est essentielle pour appré-
cier correctement la situation financière
et patrimoniale des collectivités. La
responsabilité
dans
ce
domaine
incombe,
certes,
aux
comptables
publics, mais elle ne peut être engagée à
l’égard de ceux-ci en raison d’erreurs
dans la comptabilisation des opérations
de fin d’exercice.
La responsabilité en ce domaine est
avant tout celle des ordonnateurs
puisqu’ils sont chargés de la comptabi-
lité d’engagements. Or, celle-ci n’est pas
toujours tenue ou, lorsqu’elle existe, elle
ne l’est pas selon les règles en vigueur.
La Cour conclut ses observations en
notant que les comptabilités des diffé-
rentes catégories de collectivités et d’éta-
blissements publics locaux présentent
chacune des particularités. Certaines ne
s’expliquent que par l’échelonnement de
la parution des instructions comptables.
Ne devraient subsister que des différen-
ces facilement explicables. La rénova-
tion du plan comptable général entre-
prise sous l’égide du conseil national de
la comptabilité devrait être une incita-
tion supplémentaire en ce sens.