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Le
Président
N°/G/106/02-356E
Noisiel, le 5 mars 2002
N° 02-0031 R
RECOMMANDE AVEC A.R.
Monsieur le Directeur Général,
Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint le rapport comportant les observations définitives
arrêtées par la Chambre régionale des comptes d'Ile-de-France sur la gestion du Crédit municipal
de Paris.
Il est accompagné des réponses reçues à la Chambre dans le délai prévu par l'article L. 241-11,
alinéa 4, du Code des juridictions financières .
Conformément à la loi, ce document final devra être communiqué par le président au conseil
d'orientation et de surveillance dans les conditions prévues par l'alinéa 5 de l'article précité. Dès la
plus proche réunion du conseil d'orientation et de surveillance, le document final sera considéré
comme un document administratif communicable à toute personne en faisant la demande, dans
les conditions fixées par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
Vous voudrez bien informer le greffe de la Chambre de la date à laquelle le rapport d'observations
et les réponses jointes auront été portés à la connaissance du conseil d'orientation et de
surveillance.
Enfin, je vous précise qu'en application des dispositions de l'article R. 241-23 du code précité, le
rapport d'observations et les réponses jointes sont transmis au Préfet de la région Ile-de-France,
Préfet de Paris et au Receveur général des finances - Trésorier payeur général de la région Ile-
de-France.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur général, l'expression de ma considération distinguée.
P.J. : 1.
Christian DESCHEEMAEKER
Monsieur le Directeur Général du Crédit municipal de Paris
55 ,rue des Francs Bourgeois
75181 PARIS CEDEX 04
RAPPORT D'OBSERVATIONS FORMULEES PAR LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
D'ILE-DE-FRANCE SUR LES COMPTES DU CREDIT MUNICIPAL DE PARIS POUR LES
EXERCICES : 1995 A 2000
INTRODUCTION
A - DEROULEMENT DE LA PROCEDURE
La lettre d'ouverture du contrôle a été adressée au directeur général de l'établissement le 4 février
2000.
Le 18 janvier 2001 a eu lieu l'entretien préalable prévu par l'article L.241-7 du Code des
juridictions financières au cours duquel le conseiller rapporteur a fait part à l'ordonnateur des
observations qu'il envisageait de présenter à la Chambre à la suite de l'examen des comptes et de
la gestion de la caisse de crédit municipal de Paris.
Au cours de sa séance du 31 janvier 2001, la Chambre a examiné le rapport relatif à la caisse de
crédit municipal de Paris.
A l'issue de son délibéré, la Chambre a décidé l'envoi d'une lettre d'observations provisoires ou
d'extraits. L'envoi de ces diverses correspondances a eu lieu le 25 mai 2001. Il était demandé à
tous les destinataires de bien vouloir faire connaître les remarques que les documents reçus
appelaient de leur part avant la date du 25 juillet 2001. Nombreux sont ceux à avoir demandé un
délai qui leur a été accordé. Le vice-président du Conseil d'orientation et de surveillance avait
notamment sollicité le 11 juillet 2001 un délai du fait du départ le l'ancien directeur et de la
vacance précédant la nomination de son successeur. Le directeur général du crédit municipal de
Paris a fait connaître sa réponse le 17 septembre dernier.
Les réponses reçues contenaient un certain nombre de demandes d'auditions dont celle du
directeur général de l'établissement. Ces cinq auditions ont eu lieu les 8 et 11 février 2002.
La Chambre a arrêté les observations définitives dans sa séance du 11 février 2002.
B - PRESENTATION DE LA CAISSE DE CREDIT MUNICIPAL DE PARIS
Etablissement public communal de crédit et d'aide sociale, la caisse de crédit municipal de Paris
est un établissement public administratif, statut qui emporte application des dispositions prévues
par le code général des collectivités territoriales, notamment en matière financière et comptable et
en ce qui concerne le régime juridique des actes pris au nom de l'établissement. C'est également
un établissement de crédit, soumis comme tel à la loi bancaire du 24 janvier 1984 et au contrôle
de la commission bancaire. En tant qu'établissement autorisé à effectuer
des prêts sur gages il
est soumis au décret du 30 décembre 1936 relatif à l'organisation des caisses de crédit municipal
et monts-de-piété.
Dans son rapport public 1998, la Cour des comptes relevait qu'au regard de cette ambivalence de
leur activité, les caisses de crédit municipal avaient perdu de vue les exigences qui s'attachaient à
leur statut d'établissements publics chargés d'une mission de service public, sans avoir su, pour
autant, adapter leurs structures et leur organisation à celles du secteur concurrentiel.
Elle
rappelait qu'afin de prévenir le risque d'une crise financière grave, la loi n°92-518 du 15 juin 1992
avait organisé le recentrage des crédits municipaux sur leurs activités traditionnelles.
Les erreurs et irrégularités relevées par la Cour des comptes à partir d'une enquête réalisée dans
neuf établissements se retrouvent, pour la plupart, au crédit municipal de Paris. Ce dernier paraît
même avoir méconnu la réglementation d'une manière plus systématique que ce n'était le cas
pour les établissements inclus dans cette précédente enquête.
La caisse de crédit municipal fait valoir qu'elle a pu considérer que son statut n'était pas celui d'un
établissement public administratif. Elle se fonde sur les dispositions du décret n° 89-79 du 8
février 1989 qui contient un dispositif de transformation d'établissement public administratif en
établissement public industriel et commercial. La Chambre fait, toutefois, observer que le crédit
municipal de Paris n'a pas suivi jusqu'à son terme la procédure prévue et qu'en l'état du droit,
aucun décret n'est venu constater son éventuelle transformation en établissement public industriel
et commercial. Elle précise par ailleurs, que cette faculté a été abrogée par le décret n°92-1294
du 11 décembre 1992.
I / L'EVOLUTION DE LA CAISSE
1 - L'EVOLUTION DES ACTIVITES
1-1 les mutations consécutives à la refonte du cadre législatif
Après avoir contribué à la création et au développement d'organismes professionnels destinés à
fédérer les caisses de crédit municipal, le crédit municipal de Paris a été conduit, à la suite de la
réforme opérée par la loi du 15 juin 1992, à se retirer de toutes les structures communes, pour
certaines dissoutes par la loi. Il a réintégré la "Conférence permanente", dernier organe fédérant
le réseau des caisses de crédit municipal dans la deuxième moitié des années quatre vingt dix.
Comme l'ensemble du
réseau, après une période d'expansion mal maîtrisée de ses activités
bancaires, le crédit municipal a dû procéder à un assainissement de sa situation. Il a absorbé en
1994 une filiale créée sept ans plus tôt, dans des conditions juridiquement contestables, pour lui
permettre d'étoffer son réseau d'agences et dont le rôle coûteux d'intermédiaire avait conduit à
faire supporter à l'établissement des charges élevées de location ou de sous location. Par ailleurs,
il a été amené à adopter une stratégie plus conforme au principe de prudence en matière de
provisionnement et d'octroi des crédits, pour limiter les risques caractérisés par une accumulation
des créances douteuses. Cet assainissement s'est traduit par une contraction des concours à la
clientèle dont le montant a été réduit de 0,35 milliard d'euros en 1988 à 0,29 milliard d'euros en
1994.
1-2 L'activité au cours des cinq dernières années
Depuis lors, l'encours des créances sur la clientèle a repris sa progression. Il s'élevait à 356,9
millions d'euros à fin 1999, soit près de soixante-dix pour cent de l'actif au sens du plan comptable
bancaire. Sur ce total l'encours des crédits de trésorerie, demeuré relativement stable sur la
période récente, représentait un montant de 240,1 millions d'euros. La part des crédits de
trésorerie à finalité sociale -prêts sur gages et prêts sociaux- était environ du quart, pour un
encours s'élevant respectivement à 41,5 millions d'euros et 10,2 millions d'euros.
Ce regain d'activité demeurait, cependant, fragile. En effet, la production des prêts sur gages, dont
le crédit municipal détient statutairement le monopole, a connu depuis 1997 une nette diminution,
qui ne devrait pas manquer de se répercuter sur l'encours de ce type de prêts. Par ailleurs,
l'amélioration des concours à la clientèle correspondait pour l'essentiel à un développement des
crédits à l'habitat résultant d'une convention conclue en 1995 avec le ministère de la Défense au
bénéfice de ses personnels. Or, cette convention a été résiliée depuis lors.
La structure globale de financement s'est également améliorée dans les années récentes, sous
l'effet d'une augmentation continue des fonds propres et d'une réduction sensible des encours de
titres du marché interbancaire, des créances négociables et des emprunts obligataires. Ce
rééquilibrage, qui a permis de réduire significativement les charges de refinancement, était
nécessaire pour contrebalancer l'érosion des produits de l'activité bancaire entraînée par la baisse
des conditions générales du crédit. Le produit net bancaire a pu, ainsi, être stabilisé à hauteur de
près de 25,9 millions d'euros sur les dernières années. Cette préservation de la marge par un
allègement de la charge de refinancement semble, toutefois, avoir trouvé ses limites en 1999, le
produit net bancaire s'inscrivant en diminution de 7,5 %.
En dépit des efforts consentis pour contenir l'évolution des frais généraux, la baisse du résultat
avant impôt sur les deux dernières années révèle une situation en voie de dégradation, alors que
les perspectives offertes par le développement du secteur des prêts à l'habitat paraissent
sérieusement compromises après la résiliation de la convention passée avec le ministère de la
Défense.
2- L'ADMINISTRATION ET L'ORGANISATION
2-1 Les relations avec les autorités bancaires
La loi du 17 juin 1992 confie l'administration de la caisse à son directeur, sous le contrôle du
conseil d'orientation et de surveillance. Son statut ambivalent d'établissement public administratif
et d'établissement bancaire emporte, à cet égard, des obligations particulières. Or, des différends
sérieux portant sur l'interprétation de certaines dispositions de la réglementation bancaire se sont
élevés, dans la période récente, entre les responsables du crédit municipal et les autorités
chargées de faire respecter cette réglementation.
Le premier de ces différends porte sur les critères que doivent satisfaire les personnes chargées
de déterminer l'orientation de la caisse et est consécutif à la notification de la désignation d'un
nouveau directeur, en août 1999, au comité des établissements de crédit et des entreprises
d'investissement (CECEI). En vertu de l'article 15 de la loi bancaire le comité a, en effet, estimé
que la désignation
de M. LEGRIS n'était pas compatible avec l'agrément d'établissement de
crédit dont dispose le crédit municipal. Bien qu'il n'ait pas été contesté que l'intéressé ne disposait
pas d'une expérience adéquate pour participer à la détermination de l'activité d'un établissement
de crédit, celui-ci a été maintenu dans ses fonctions par le conseil d'orientation et de surveillance,
en dépit de certaines oppositions. Après avoir recherché une solution de compromis difficile à
trouver, les responsables du crédit municipal ont choisi d'intenter un recours contentieux à
l'encontre de la décision du CECEI confirmée par lui le 4 avril 2000.
Le second différend porte sur les méthodes comptables, la mesure du risque et l'évaluation des
provisions et fait suite à une mission de contrôle diligentée par la commission bancaire au premier
semestre 2000. Ainsi que le mentionne le rapport d'activité du crédit municipal pour l'exercice
1999, après avoir examiné, notamment, la prise en compte des conséquences comptables de
l'évolution des conditions des contrats de prêts dans le cadre de la loi Neiertz, cette mission a, en
effet, conclu à une insuffisance de provisions qu'elle a évaluée à 38 millions de francs. Pour
couvrir partiellement ce risque, le crédit municipal a procédé à une réallocation de ses provisions
pour créances douteuses, ce qui a eu pour contrepartie de réduire la couverture du poste afférent
aux intérêts et pénalités de retard sur les prêts tombés en contentieux. De fait, le rapport d'activité
pour 1999 indique que ce poste, provisionné jusqu'alors à 100 %, n'est plus provisionné qu'à
concurrence de 90,85 %. Cette suite donnée à son intervention a été jugée inappropriée par la
commission bancaire. Un contentieux est en cours.
La caisse de crédit municipal de Paris a fait procéder à une expertise du montant des pertes
techniques induites par les dossiers placés sous le régime de la loi Neiertz. L'insuffisance de
provisions serait aux termes de cette expertise limitée à 1,2 MF. Néanmoins, le directeur général
de l'établissement évoque en février 2002 une somme de 22 millions de francs. Sans préjuger de
l'issue de ce contentieux qui ne se limite pas à ces seuls dossiers, ces différences d'appréciation
mettent en lumière les imperfections du système de mesure des risques qu'aucune étude sur les
possibilités de récupération effective des créances ne permet de corroborer.
2-2 Le rôle des organes de direction
L'ampleur de ces divergences de vues avec les autorités bancaires n'aurait, sans doute, pas été
telle si le conseil d'orientation et de surveillance avait rempli pleinement son rôle.
Etant chargé de veiller au respect des réglementations générales de la profession bancaire, le
conseil d'orientation et de surveillance aurait dû, en particulier, adopter un règlement intérieur
définissant, notamment, les procédures de contrôle interne destinées à assurer la sécurité des
opérations (art. 10 du décret n° 92-1294 du 11 décembre 1992). Or, le crédit municipal de Paris
n'était encore doté d'aucun règlement intérieur à la date du présent contrôle.
Alors qu'il lui incombe de définir les orientations générales et qu'à ce titre les orientations en
matière de conditions générales de dépôt des fonds, des prêts et des autres services offerts par la
caisse doivent être soumises à son approbation, il n'apparaît pas que le conseil d'orientation et de
surveillance ait été conduit à se prononcer sur les modalités des services offerts à la clientèle au
cours des dernières années. La périodicité très espacée des réunions du conseil, limitées en
moyenne à deux
par an de 1995 à 1999, n'a vraisemblablement pas été étrangère à cet apparent
effacement.
Le faible nombre de ces réunions ne paraît pas non plus compatible avec l'exercice par le conseil
d'un contrôle permanent sur la gestion de l'établissement par le directeur (art. 2 de la loi n° 92-518
du 15 juin 1992).
La désignation de ce dernier apparaît donc d'autant plus essentielle pour la
détermination des orientations de l'établissement, conformément à l'esprit des dispositions de la
loi bancaire que l'établissement a cru, pourtant, devoir contester.
Au regard de ces constatations, la caisse de Crédit municipal de Paris indique qu'à compter de
l'exercice 2000, les réunions du COS ont été plus fréquentes. Le COS s'est réuni quatre fois
durant l'exercice 2000, trois fois au cours du premier semestre 2001 et le rythme de ses réunions
serait désormais mensuel. La Chambre prend acte de l'intention formulée par le directeur général
de la caisse de mettre fin dans les prochains mois, aux carences relevées concernant notamment
l'absence de règlement intérieur.
2-3 Les documents financiers
Les budgets et les comptes financiers approuvés par le conseil et transmis à la chambre appellent
de sérieuses réserves :
- certains postes de dépenses sont fortement sous dotés (exemple budget 1998 : "prestations de
services" (art. 636) autorisés 3,5 MF réalisés 8,8 MF ; "charges sur opérations avec la clientèle"
(ch. 67) autorisés 187,7 MF réalisés 221,6 MF) ;
- les prévisions de recettes, effectuées sur la base d'une projection des différentes composantes
du produit net bancaire, sont systématiquement surévaluées sur certains postes et sous-évaluées
sur d'autres dans des proportions très importantes (exemples : "intérêts prêts sur gages
et
agences" (art. 700.0) budget 1997 prévu 52,7 MF réalisé 26,6 MF, budget 1998 prévu 49,5 MF
réalisé 25,1 MF ; "conservation et autres activités" (art. 731) budget 1997 prévu 4,4 MF réalisé
34,9 MF, budget 1998 prévu 4,4 MF réalisé 33,6 MF).
- les inscriptions budgétaires en matière de provisions sont dépourvues de tout réalisme tant en
dépenses (art. 685) qu'en recettes (art. 785) (exemples : budget 1997 dotation prévue 10 MF
réalisée 56,5 MF reprise sur provision prévue 0 réalisée 153 MF ; budget 1998 dotation prévue 11
MF réalisée 64 MF reprise sur provisions prévue 0 réalisée 85 MF) ;
Le Crédit municipal fait observer que depuis le milieu des années 90, le produit net bancaire prévu
est de plus en plus proche de celui réalisé. Il n'en demeure pas moins que certains de ses
déterminants font l'objet d'erreurs de prévision systématiques qui ne permettent pas au conseil
d'orientation et de surveillance de prendre des décisions de façon suffisamment éclairée.
Les modifications ainsi apportées au budget initial faisaient l'objet, après la clôture de l'exercice,
d'une autorisation spéciale de virement de crédits et de régularisation des dépassements en
section d'exploitation et d'investissement, dont le contenu et les modalités d'adoption
contreviennent gravement aux dispositions prévues en la matière par l'article L. 1612-11 du
CGCT. En effet, si celui-ci autorise d'apporter au budget, après la clôture de l'exercice, les
modifications permettant d'ajuster les crédits de la section de fonctionnement et d'inscrire les
crédits nécessaires à la réalisation des opérations d'ordre, il n'autorise pas à opérer des virements
à l'intérieur de la section d'investissement (exemple : autorisation spéciale pour 1998 virements
entre les chapitres 20, 21 et 23) et moins encore à régulariser des dépassements sur des
chapitres correspondant à des dépenses réelles de fonctionnement ou d'investissement (exemple
: autorisation spéciale pour 1998 chapitre 67 dépassement de 5 millions d'euros). Par ailleurs, les
modifications apportées après le terme de l'exercice doivent l'être dans les vingt et un jours
suivant la fin de celui-ci et ne peuvent donc être adoptées aux mois de mai ou
juin suivants,
comme cela a été régulièrement le cas au crédit municipal (exemple : autorisation spéciale pour
1998 adoptée le 28 juin 1999).
Jusque fin 2001, par cette procédure irrégulière, favorisée sans doute par l'espacement de ses
réunions, le conseil d'orientation et de surveillance s'est en fait borné à ajuster le budget au
compte exécuté, en procédant le même jour à l'adoption du compte financier, du compte
administratif et de la décision de régularisation sur le budget de l'exercice auquel ces comptes se
rapportent. Il a, ainsi, renoncé à disposer de documents budgétaires fiables, se privant par la
même de véritable possibilité de se prononcer utilement, à l'occasion de leur adoption, sur les
orientations de l'établissement et sur les conditions des services offerts à la clientèle. Il a, par
ailleurs, couvert des règlements effectués par le comptable en dépassement des crédits ouverts,
pour des montants pouvant atteindre plusieurs dizaines de millions de francs, en méconnaissance
de ses obligations.
Le Crédit municipal de Paris fait remarquer que selon lui, les irrégularités relevées par la Chambre
tiendraient pour une part à la nature bancaire de l'activité de l'établissement et aux incertitudes qui
affectent son cadre comptable. L'article quatre du décret du 8 février 1989, prévoyant l'adoption
d'un plan comptable par arrêté conjoint du Ministre chargé du Budget et du Ministre de l'Intérieur
est toujours à l'état de projet.
3- La tenue de la comptabilité
3-1 La double comptabilisation des opérations
Comme les autres caisses de crédit municipal, le crédit municipal de Paris tient deux comptabilités
: une comptabilité publique et une comptabilité bancaire. L'actif et le passif du bilan figurent pour
leurs montants bruts dans la première et pour leurs montants nets dans la seconde. Par ailleurs,
de nombreux postes font l'objet d'une contraction, le cas échéant partielle, dans la présentation du
bilan bancaire. Ainsi, le poste 491, figurant pour 395 millions de francs à l'actif brut de la caisse en
1997 aurait fait l'objet, selon les explications fournies, d'une contraction à hauteur de 230 millions
dans l'actif net bancaire. Une table de concordance prévoit, pour chaque compte servi dans la
comptabilité bancaire, sa correspondance dans le plan comptable défini par l'instruction de la
direction de la comptabilité publique. Pour autant, celle-ci ne suffit pas à s'assurer du bien fondé
des diverses compensations opérées.
La nécessité de fournir une image fidèle de la situation de la caisse devrait logiquement conduire
le comptable public et le commissaire aux comptes à fournir des assurances sur ce point à
l'occasion de l'approbation annuelle du compte financier et du rapport d'activité.
3-2 La situation et le rôle du comptable public
Dans son rapport public 1998, la Cour des comptes relevait le risque de confusion inhérent à la
tenue de cette double comptabilité et de retrait du comptable public dans l'exercice de ses
missions. La situation de l'agent comptable du crédit municipal de Paris et l'absence de séparation
nette entre ses activités et celles relevant de l'ordonnateur en fournissent une illustration
exemplaire.
La caisse ne dispose pas d'un agent comptable titulaire, le responsable actuel du poste ayant été
désigné pour en assurer l'intérim, par un arrêté du préfet de Paris en date du 20 décembre 1989.
Cet intérim, en principe temporaire, mais prorogé, en fait, depuis plus de dix ans, ne répond
manifestement pas à l'esprit des dispositions prévues en cas de vacance du poste de comptable
titulaire par l'instruction générale du 16 août 1966. L'absence d'obligation pour le comptable
intérimaire de prêter le serment professionnel ne saurait, en particulier, s'interpréter qu'au regard
de la brièveté de ses fonctions. Elle n'est à l'évidence pas compatible avec un exercice plein et
entier par le comptable de sa responsabilité personnelle. La Chambre rappelle que la prestation
de serment est une formalité substantielle.
Ainsi que le rappelait la Cour des comptes, la compétence du comptable public touche l'ensemble
des mouvements de fonds de la caisse, le principe de séparation de l'ordonnateur et du
comptable conférant à ce dernier des responsabilités de contrôle particulières à cet égard. Or, ce
principe a subi de nombreux accommodements au crédit municipal de Paris, où le comptable ne
paraît pas en mesure d'exercer quelque contrôle que ce soit sur les opérations bancaires, la
possibilité d'établir des moyens de paiement étant largement déléguée par lui aux membres de la
direction de l'établissement, tandis que les mouvements de fonds des agences bancaires du crédit
municipal échappent totalement à son contrôle.
La faiblesse des moyens dont dispose l'agent comptable l'a, par ailleurs, conduit à faire reposer
sur un seul de ses collaborateurs un ensemble de tâches couvrant la gestion des chéquiers, la
comptabilisation des opérations et les rapprochements bancaires, qui devraient être normalement
séparées. Cette absence de séparation des tâches a fait l'objet d'une réserve du commissaire aux
comptes.
Ce relâchement dans l'exercice de ses responsabilités par l'agent comptable trouve, notamment,
sa traduction dans le fonctionnement de divers comptes ouverts à son nom à l'agence bancaire de
Paris pour faciliter les jeux d'écritures relatives aux chèques à régime particulier. Cette facilité
permet, en effet, de multiplier des opérations non retracées dans la comptabilité générale et
présente à l'évidence des risques, que l'absence de tenue d'un inventaire des formules de
chèques ne peut qu'aggraver.
La méconnaissance du principe de séparation de l'ordonnateur et du comptable trouve
particulièrement à s'illustrer avec le compte ouvert à l'agence bancaire sous l'intitulé "agent
comptable du CMP : chèques certifiés". Ce compte, dont la signature appartient aussi bien à
l'agent comptable qu'au directeur général, et auquel est associée une carte VISA PREMIER
établie nominativement au nom de ce dernier, ne constitue, en effet, rien d'autre qu'une facilité
offerte à celui-ci pour régler ses frais de représentation en dehors de toute formalité et sans
justification particulière. Pour que ce type de frais puisse faire l'objet d'une avance, il conviendrait
qu'une régie soit créée à cet effet, sachant que la prise en charge de ces dépenses devrait être
appuyée en toute hypothèse de justificatifs.
Au regard de ces constatations, le directeur général de la caisse fait observer que le compte dont
il est fait mention s'intitule désormais " frais de représentation du CMP ". Il ajoute qu'une
procédure rigoureusement décrite est attachée à la gestion de ce compte et que le service du
budget recense mensuellement les justificatifs des dépenses pour régularisation par mandat.
Les contrôles préalables au règlement des opérations de gestion courante ne sont pas davantage
exercés. Ainsi, le traitement de la paie est effectué selon
un protocole ne faisant intervenir que le
seul service du personnel, de la liquidation au virement, l'agent comptable prenant en charge ces
opérations sur la base d'un mandat global non appuyé des pièces justificatives nécessaires à la
vérification des liquidations.
Cet insuffisant souci de sécurité dans la tenue de la comptabilité, allant à l'encontre de
l'accroissement des exigences en matière de contrôle interne, n'est pas dépourvu de
conséquences dommageables pour la bonne marche des activités de l'établissement, comme le
montrent les nombreux exemples relevés plus haut de paiements effectués en dépassements des
crédits ouverts ou les fréquentes irrégularités dans le règlement des marchés qui seront
examinées plus loin.
Certes, le directeur général de la caisse indique que la régularité des comptes n'a jamais été mise
en cause. La Chambre rappelle toutefois l'existence de contentieux avec la Commission bancaire
relatifs aux méthodes comptables en vigueur au sein de la caisse. Par ailleurs, elle souligne que
l'existence d'un commissaire aux comptes ne dispense pas le comptable public de procéder sous
sa responsabilité au contrôle des opérations de dépenses et de recettes.
4- La transmission des actes au contrôle de légalité
Comme pour tout établissement public communal, le caractère exécutoire des actes du crédit
municipal de Paris est subordonné à leur transmission au représentant de l'Etat, en vertu des
dispositions combinées des articles L. 2131-1 et L. 2131-12 du code général des collectivités
territoriales.
Parmi les actes soumis à cette obligation de transmission figurent, notamment, les délibérations
du conseil d'orientation et de surveillance, les conventions relatives aux marchés et les décisions
individuelles relatives à la nomination, à l'avancement de grade et à l'avancement d'échelon des
agents.
Cette obligation est restée largement ignorée, puisque seules les délibérations portant
approbation du budget et des comptes ont fait l'objet d'une transmission durant la période
contrôlée. Cette abstention a eu pour effet de soustraire au contrôle de légalité de très
nombreuses décisions portant aussi bien sur les orientations de la caisse que sur ses actes
courants de gestion. Les responsables du crédit municipal ont pu, ainsi, s'affranchir des règles
régissant la commande publique et la gestion des agents publics.
Au regard de ces constatations, le Crédit municipal de Paris indique que depuis juillet 1999, tous
les actes de l'établissement sont régulièrement transmis au contrôle de légalité. Il précise qu'il en
va de même concernant les délibérations du Conseil d'orientation et de surveillance. Il n'en reste
pas moins que pour la période précédente, les responsables du crédit municipal ont pu, ainsi,
s'affranchir des règles régissant la commande publique et la gestion des agents publics.
II / LA GESTION INTERNE DU CREDIT MUNICIPAL DE PARIS
5 - LA COMMANDE PUBLIQUE
Le crédit municipal de Paris, en sa qualité d'établissement public local, est tenu d'appliquer les
dispositions du code des marchés publics. En particulier, le code en vigueur sur la période
contrôlée prévoyait en son article 321 que les travaux, achats de fournitures ou prestations de
service, dont le montant annuel excédait le seuil de 300 000 F (45 734,71 euros), devaient faire
l'objet d'une mise en concurrence en recourant à l'une des procédures visées à
son article 279. Il
devait être recouru à une procédure d'adjudication ou d'appel d'offres lorsque le montant total de
l'opération en cause excédait la somme de 700 000 (106 714,31 euros), la commission d'appel
d'offres étant composée, dans le cas d'un établissement public communal tel que le crédit
municipal, du représentant légal de l'établissement et de deux membres de l'assemblée
délibérante désignée par celle-ci.
Ces principes bien connus et pour l'essentiel conservés dans le nouveau code issu du décret n°
2001-210 du 7 mars 2001, ont, pourtant, été systématiquement ignorés ou arbitrairement
interprétés par les responsables du crédit municipal de Paris.
Le Crédit municipal de Paris indique que son activité se rapprochant pour partie de celle d'un
établissement public industriel et commercial, il a cru pouvoir s'exonérer des dispositions du code
des marchés publics. La Chambre rappelle qu'en tout état de cause, la caisse de Crédit municipal
de Paris étant un établissement public local, elle est soumise au code des marchés publics.
5-1 Les commandes hors marché
Les dépenses d'exploitation n'ont pas toujours donné lieu à un marché au cours de la période
contrôlée, alors que de nombreuses commandes de même nature ont été effectuées auprès des
mêmes fournisseurs pour des montants supérieurs à 300 000 F au cours d'une même année.
Ont été, ainsi, réglés sur simples factures, pour le compte d'une même entreprise :
- des travaux d'imprimerie d'un montants excédant 300 000 F (45 734,71 euros) par an ;
- des prestations de nettoyage à hauteur de près de 137 204,12 euros par an ;
- des prestations de maintenance pour 118 340,53 euros en 1998 ;
- des fournitures informatiques pour 157 345,33 euros en 1998 ;
- des travaux d'entretien et de rénovation pour une somme de 63 337,54 euros en 1998 ;
- des prestations de surveillance et de gardiennage pour un montant de 350 000 euros en 1998 et
1999. La caisse indique que la commande passée à la société en question aurait fait l'objet d'une
mise en concurrence. Cependant aucune pièce faisant état d'une telle procédure n'a été produite
à la Chambre. Il a été mis fin à ce contrat en 1999 au motif qu'il n'était pas conforme aux règles du
code des marchés publics;
- des prestations de mise en oeuvre d'un logiciel pour une somme de 320 000 euros ;
- des travaux de couverture hors marché pour 86 516,19 euros en 1995.
Cette liste n'est pas limitative.
5-2 Les "marchés" d'investissement
Seuls quatre marchés concernant des opérations d'investissement ont été produits dans le cadre
du présent contrôle. Encore les pièces transmises n'ont-elles pas permis d'établir pour deux
d'entre eux, relatifs à la restructuration des prêts sur gages, d'une part, à la rénovation de la
façade de la rue des Blancs Manteaux, d'autre part, que l'attribution de ces marchés avait été
précédée d'une publicité et d'une mise en concurrence. En outre, aucun acte d'engagement n'a
été produit pour ces deux marchés, tandis que pour un troisième, relatif au remplacement de
l'autocommutateur, seul un acte d'engagement non signé a pu être fourni. L'absence de cette
pièce essentielle, comme de tout devis, faisant obstacle à quelque vérification de la liquidation que
ce soit, les conditions financières d'exécution de ces marchés n'ont pu
donner lieu à aucun
contrôle, les décomptes généraux et définitifs n'ayant, d'ailleurs, pas pu être obtenus pour la
plupart des lots.
En définitive, seul un marché, relatif à la mise en place d'un progiciel de gestion, paraît avoir suivi
une procédure de publicité et d'attribution conforme au code des marchés publics. C'est aussi le
seul qui ait été transmis au contrôle de légalité. Pour autant, les clauses financières de ce marché
n'étaient pas exemptes d'imprécision. La préfecture, en mesure pour une fois
de formuler des
observations, n'a, d'ailleurs, pas manqué de demander des éclaircissements à l'établissement sur
ce point. Elle a également relevé que ce marché n'avait pas fait l'objet d'une délibération du
conseil d'orientation et de surveillance. La même observation aurait pu être faite pour les trois
autres marchés si l'établissement n'avait omis de les transmettre au contrôle de légalité.
5-3 La responsabilité de la direction
Le crédit municipal de Paris ne s'est manifestement pas doté d'une organisation adaptée en
matière de préparation, de passation et d'exécution de la commande publique. Son système
informatique de gestion ne prévoyait pas de sommation des dépenses effectuées par nature et
par fournisseur, comme il aurait été utile pour s'assurer que le seuil de 300 000 F
(45 734,71
euros) n'était pas dépassé. Pour l'élaboration des cahiers des charges, il lui a été, parfois,
nécessaire de s'en remettre aux services techniques de la ville de Paris, comme cela a été le cas
pour le remplacement de son autocommutateur. Le déroulement de cette opération, prise en
charge par la mairie de Paris, a, d'ailleurs, échappé pour l'essentiel au crédit municipal. Au plan
administratif, il n'a pas été tenu sur la période de registre des offres, comme le prévoyait l'article
299 ter du code des marchés, pour établir de façon certaine la date de leur réception. La
composition de la commission d'appel d'offres, elle-même, ne paraît pas avoir été formellement
décidée par une délibération du conseil d'orientation et de surveillance, au risque d'entacher la
validité des décisions de cette commission.
En s'abstenant de procéder, sauf exception, à une mise en concurrence régulière, les
responsables successifs du crédit municipal ont méconnu les dispositions légales destinées à
garantir l'égalité d'accès à la commande publique. Cette absence de formalisme, qui n'a pu qu'être
préjudiciable aux intérêts de l'établissement, a été, en outre, une source de confusion dans les
relations entre l'établissement et ses prestataires, comme l'illustre, en particulier, la participation
d'un cabinet de conseil aux activités de la direction des crédits durant près de trois années.
5-4 Le contrat avec une EURL
Cette collaboration d'un cabinet extérieur aux activités internes de la caisse, s'est manifestée par
un contrat conclu le 19 juin 1997 entre la direction générale du crédit municipal et une EURL, "aux
fins d'optimiser l'action de la direction des crédits au sein de l'établissement et d'assurer le
développement de ce secteur d'activité". La signature n'a pas
été précédée d'une mise en
concurrence, contrairement à la réglementation. Le gérant a été habilité, par lettre du 30 juin
suivant, à connaître tous les dossiers de demande de prêts et à autoriser les services de la
direction des crédits à octroyer des crédits. Même si cet intervenant fait observer que la délivrance
de cette autorisation faisait l'objet d'une décision collégiale et que concernant les dossiers
importants, le pouvoir de décision n'appartenait qu'au seul directeur général, cette situation était
critiquable.
Au titre de l'exécution de ce contrat, un honoraire mensuel de 42 000 F HT a été versé à ce
consultant. La Chambre relève toutefois que les termes du contrat ne sont pas suffisamment
précis pour apprécier ni les conditions, ni les résultats attendus de son intervention. Ce contrat,
dont le coût cumulé sur les trois années 1997, 1998 et 1999 a totalisé près de 1,6 million de
francs, a été résilié le 8 mars 2000.
6- LE PERSONNEL
6-1 le cadre réglementaire
Ainsi que l'a rappelé la Cour des comptes dans son rapport public pour 1998, le personnel des
caisses de crédit municipal relève du statut de la fonction publique territoriale.
Si la loi n° 84-53
du 26 janvier 1984 a prévu que les personnels des administrations parisiennes soient soumis à un
statut particulier, fixé pour la période contrôlée par le décret n° 94-415 du 24 mai 1994, il n'en
demeure pas moins qu'à l'exception des dispositions dérogatoires introduites par ce texte la loi du
26 janvier 1984 s'applique au personnel du crédit municipal de Paris.
C'est ainsi qu'en vertu de l'article 34 de ladite loi, les créations d'emploi doivent faire l'objet d'une
délibération précisant le ou les grades correspondant à l'emploi créé et, si l'emploi est créé en
application des trois derniers alinéas de l'article 3 relatifs au recrutement de contractuels, le motif
invoqué, la nature des fonctions, le niveau de recrutement et de rémunération, et cela pour autant
qu'ils aient été recrutés après le 24 mai 1994.
Cette dernière disposition s'applique particulièrement au personnel du crédit municipal, composé
dans sa très grande majorité d'agents contractuels, comme d'ailleurs l'article 126 ouvrant à ceux
de ces derniers qui étaient en fonctions à la date de publication de ladite loi un droit à titularisation
dans les emplois ainsi créés, selon l'une des modalités prévues à son article 128. En application
de la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 intervenue depuis lors, le conseil de surveillance du
crédit municipal a émis, le 28 juin 1999, un avis de principe favorable à l'ouverture de concours
réservés aux agents non titulaires de l'établissement et chargé le directeur général d'établir la liste
des postes susceptibles d'être ouverts dans les corps de catégorie C et B. Il reste que ce dispositif
ne s'appliquera pas aux emplois qui ne peuvent être pourvus par des fonctionnaires, en raison de
leurs spécificités techniques, lesquels demeureront régis par les dispositions susvisées de la loi
du 26 janvier 1984.
Or, ces emplois qui concernent, notamment, au crédit municipal les postes de catégorie A
requérant une spécialité financière ou bancaire, n'ont donné lieu jusqu'à présent, à la
connaissance de la chambre, à aucune délibération précisant le niveau de recrutement et de
rémunération des agents concernés. Le budget de la caisse n'est, d'ailleurs, accompagné d'aucun
état du personnel permettant de connaître les effectifs budgétaires et les effectifs pourvus et pour
le personnel non titularisé les conditions de rémunération et la justification du recrutement.
La direction de la caisse souscrit à cette analyse et ajoute qu'une délibération du Conseil
d'orientation et de surveillance en date du 24 janvier 2001 est venue préciser le niveau de
recrutement et de rémunération des agents contractuels de catégorie A.
6-2 la liquidation des rémunérations
Cette absence de transparence a, notamment, pour conséquence que la liquidation des
rémunérations ne peut faire l'objet d'aucune vérification de la part de l'agent comptable, les
mandats mensuels de paiement n'étant appuyés que d'un tableau reprenant en une seule ligne la
totalité de la ligne nette (déduction URSSAF exclues) des rémunérations versées. Ainsi les
rémunérations accessoires ne sont pas même distinguées des rémunérations principales.
Les mandats ne sont accompagnés d'aucune des pièces justificatives prévues par le décret n° 88-
79 du 21 janvier 1988 : décompte individuel ou copie des bulletins de paie, décisions relatives à
l'octroi des primes et indemnités, notamment.
Le comptable est, ainsi, dans l'ignorance, par exemple, du détail des heures supplémentaires
liquidées au personnel, ou du montant des primes versées.
Le directeur général de la caisse fait valoir que la liquidation de la paie s'effectue désormais au
sein du service du personnel, rattaché à la direction des ressources humaines et des affaires
juridiques et fiscales. Il ajoute que jusqu'à une époque récente, la liquidation de la paie s'effectuait
au service de la comptabilité auquel étaient transmis des éléments détaillés, dont un listing
mentionnant les paies individuelles.
Cette évolution accompagne de la mise en place d'un dispositif assorti d'une série de contrôles et
vérifications préalables, en vue de permettre le lancement automatique de la paie. La chambre
rappelle que l'exercice par les services de l'établissement d'un contrôle de la liquidation de la paie,
ne dispense pas le comptable d'effectuer les diligences auxquelles il est tenu à ce titre.
Selon les éléments recueillis auprès des services, le montant mensuel des indemnités
accessoires serait voisin de 137 200 euros. Or, à la connaissance de la chambre, aucune
délibération n'a été prise pour fixer ce régime indemnitaire ainsi que le requiert l'article 88 de la loi
du 26 janvier 1984.
Concernant la rémunération des cadres contractuels, la Chambre relève pour trois d'entre eux un
écart sensible entre le cumul de leur rémunération mensuelle brute telle qu'il résulte des termes
de leurs contrats respectifs, et le montant de leur rémunération annuelle brute. Cette différence
découle manifestement de l'octroi de primes non contractuellement prévues qui sont versées
selon un barème et une procédure qui demeurent obscurs.
Les cadres intéressés et le directeur général de la caisse font valoir que la rémunération brute
annuelle comprend une part variable dont le montant est décidé par ce dernier. La notification
écrite du directeur de l'établissement de verser une prime serait constitutive d'un avenant au
contrat initial. La Chambre constate toutefois qu'il ne lui pas été produit de délibérations encadrant
ce régime indemnitaire, ni de grille permettant d'apprécier selon quels critères le directeur de
l'établissement est amené à verser des primes substantielles à ses principaux cadres.
Les bases de la liquidation de la rémunération du directeur général apparaissent encore plus
floues. L'arrêté de nomination du précédent directeur en date du 10 avril 1999, ne comportait
aucune mention relative à la rémunération de l'intéressé, le montant de celle-ci n'ayant, par
ailleurs, fait l'objet d'aucune délibération du conseil d'orientation et de surveillance. Le directeur en
fonction fait valoir que son projet de contrat de travail et les conditions de son embauche ont été
soumis à l'avis du Conseil d'orientation et de surveillance.
6-3 le comité des oeuvres sociales
Cette association, déclarée le 11 octobre 1985, a pour objet d' "assurer l'animation sociale et
culturelle de l'établissement en faveur de tous les agents du Crédit Municipal de Paris en exercice,
de leur fournir une aide morale et matérielle".
L'article 6 de ses statuts prévoit que le directeur général du CMP est président de droit de cette
association et que celui-ci désigne le vice président, le trésorier, et le secrétaire après appel de
candidature auprès des agents ayant adhéré à l'association.
Les statuts de cette association, qui la placent dans une dépendance critiquable vis-à-vis de
l'établissement, devraient être revus pour lui assurer une réelle autonomie.
7- La gestion du patrimoine immobilier
7-1
les concessions de logements
Le crédit municipal , ainsi que la loi l'y autorise, a concédé à un certain nombre de ses agents des
logements dans des immeubles lui appartenant. Les conditions d'attribution et les clauses
financières de ces conventions de concessions s'écartent, cependant, des possibilités offertes par
la réglementation.
En effet, en vertu de la loi n° 90-1067 du 28 novembre 1990, le conseil d'orientation et de
surveillance aurait dû prendre une délibération fixant la liste des emplois pour lesquels un
logement de fonction pouvait être attribué gratuitement ou moyennant une redevance, ce qui n'a
pas été le cas.
Au surplus, ces conventions auraient dû être transmises au contrôle de légalité,
ainsi que prévu par l'article L. 2134-4 du code général des collectivités territoriales (CGCT), ce qui
a été une nouvelle fois omis.
A supposer que ces conventions puissent s'analyser comme des concessions par utilité de
service et non comme de simple baux privés, il convient, en outre, de rappeler que l'abattement
de loyer consenti ne saurait être supérieur à 46 % du loyer réel, ainsi qu'il résulte des dispositions
du code des domaines et de la jurisprudence du Conseil d'Etat (arrêt du 30 octobre 1996 -
commune de MURET).
Or, certains des loyers pratiqués apparaissent très avantageux, même rapportés à cette règle.
Ainsi, des logements situés 14/22 rue des Blancs Manteaux étaient concédés pour les loyers
mensuels suivants, au mois de juillet 2000 : 800 euros (189 m²) ; 320,45 euros (121 m²) ; 221,20
euros (81 m²). La modicité de ces redevances apparaît encore plus flagrante, lorsqu'on constate
qu'à la même date les loyers perçus pour d'autres concessions dans les mêmes immeubles
étaient établis sur la base de prix au mètre carré deux à trois fois supérieurs : 1015,50 euros (121
m²) ; 319,23 euros (50 m²) tout en restant, néanmoins, bien au dessous des prix du marché.
Les charges afférentes à ces logements sont tout aussi modiques. En effet, les provisions pour
charges s'échelonnent entre 15,24 euros et 121,96 euros par mois, pour une moyenne de près de
45,73 euros, les sommes ainsi acquittées tenant lieu de participations forfaitaires aux dépenses
d'eau, de gaz, d'électricité et de chauffage, en l'absence de compteurs individuels.
La Chambre se doit de rappeler également que les avantages en nature consentis à des agents
de l'établissement doivent être déclarés aux services fiscaux en application de l'article 82 du code
général des impôts.
Le Crédit municipal de Paris indique qu'il souhaite mettre fin à cette situation critiquable. Son
directeur précise être sur le point d'engager une remise à plat de la gestion du parc immobilier de
l'établissement. Concernant la question de la minoration des loyers, le directeur général de la
caisse affirme avoir entrepris depuis plusieurs mois des démarches propres à régulariser cette
situation
7-2 LES LOCAUX DONNES A BAIL
La gestion des locaux donnés à bail fait l'objet d'un suivi insuffisant.
Ainsi, un appartement de 239 m² situé rue des Blancs Manteaux demeurait, à la date du contrôle,
occupé sans titre par une personne auquel l'établissement avait donné congé cinq ans plus tôt,
après avoir recherché sans succès à réviser les conditions du bail initial, particulièrement
avantageuses pour l'intéressé.
Sous la menace d'une action contentieuse, le crédit municipal avait dû renoncer en 1988 à porter
le loyer de cet appartement, fixé originellement à 1 118,06 euros par mois, à un prix plus proche
de celui du marché, soit 30 490 euros annuel. Le bail avait, alors, été renouvelé pour trois ans
sans augmentation de loyer. En conséquence, l'intéressé aurait dû quitter les lieux en 1991. Ce
congé ne lui a été donné qu'en 1995, date à laquelle l'occupant était toujours dans les lieux, pour
un loyer n'ayant subi en définitive aucune augmentation. La caisse de Crédit municipal fait
toutefois observer que dès 1995, elle a engagé une phase contentieuse en vue d'obtenir le départ
de l'occupant de cet appartement. Il a ne l'a quitté qu'en mai 2001 à l'issue d'un accord avec la
caisse.
Un certain nombre d'autres appartements sont occupés en fonction de baux tacites : un logement
situé au 14 de la rue des Blancs Manteaux et un autre situé 47 rue Gabrielle. D'autres propriétés :
un immeuble sis rue Forest, d'une valeur estimée à 40 MF, un appartement situé à La Celle-Saint-
Cloud
et un autre situé quai Alphonse le Gallo à Boulogne, sont libres de tout occupant depuis
plusieurs années, en dépit des charges importantes qui y sont afférentes, s'élevant
respectivement à 1067,14 euros et à 457,35 euros par mois pour les deux derniers cités. La
Chambre prend acte de l'initiative de la caisse de Crédit municipal de Paris, de mettre en vente
cet immeuble et un de ces appartements.
III / LES ACTIVITES FINANCIERES DU CREDIT MUNICIPAL DE PARIS
Les activités des caisses de crédit municipal, relevant de leur statut d'établissement de crédit, font
l'objet d'une vigilance particulière, qui leur impose, notamment de se doter de systèmes de
contrôle interne sûrs et efficaces. Les prescriptions en la matière sont désormais régies par le
règlement n° 97-02 du 21 février 1997, qui précise et renforce les obligations relatives aux
dispositifs de prévention des risques.
Ces dispositions ont été mises en oeuvre avec un certain retard au crédit municipal de Paris, qui a
attendu l'année 1999 pour recruter un contrôleur interne chargé de veiller, comme le prévoit le
règlement précité, à la cohérence et à l'efficacité des procédures internes.
Jusqu'à cette date, le contrôle interne a été limité à un contrôle des engagements, circonscrit,
d'ailleurs, aux prêts bancaires et ne couvrant pas, par conséquent, les prêts sociaux et les prêts
sur gages. Ni l'organisation comptable, ni le traitement de l'information destinée aux dirigeants de
la caisse et aux autorités bancaires n'étaient, par ailleurs, concernées par ce contrôle.
Les observations qui suivent, portant pour l'essentiel sur cette période, illustrent les insuffisances
de ce dispositif, qui n'ont pas été entièrement comblées depuis, même si l'action du nouveau
contrôleur interne a permis certains progrès, concrétisés, notamment, par la mise au point d'un
guide des procédures et par la mise en place d'un comité des risques.
Le système d'information et de mesure des risques appelle, en particulier, des améliorations, le
crédit municipal ne disposant toujours pas d'une comptabilité analytique, malgré une tentative en
1996 demeurée sans suite.
On ne peut donc que rejoindre les conclusions de l'enquête diligentée par la commission bancaire
quant à la nécessité de renforcer les moyens dont dispose le contrôleur interne afin de répondre
pleinement aux exigences de la réglementation en matière de prévention des risques et de fiabilité
de l'information.
8- L'ACTIVITE DE PRETS SUR GAGES
8-1 L'évaluation des biens et les conditions de prêts
Les prêts sur gages sont attribués sur la base d'une appréciation des objets remis en
nantissement. Les commissaires priseurs sont chargés de procéder à cette appréciation, dont le
montant conditionne celui du prêt à accorder. Aux termes de la réglementation en vigueur, le
montant des sommes à prêter est, en effet, fixé aux deux tiers du prix de leur estimation, ou aux
quatre cinquièmes de leur valeur estimée d'après leur poids pour les métaux précieux, la durée
des prêts pouvant être de six mois ou un an.
Les commissaires priseurs sont responsables de leurs évaluations. Lorsqu'un objet non dégagé
est vendu avec un déficit, il leur revient de combler la différence entre le montant du prêt
augmenté des intérêts et le produit de la vente. Dans l'esprit de cette réglementation, issue du
décret du 30 décembre 1936 régissant l'organisation des caisses de crédit municipal et monts-de-
piété, le produit de la vente s'il est proche de l'évaluation doit, en effet, suffire à couvrir la dette en
capital et intérêts, lorsque celle-ci n'a pas fait l'objet d'un remboursement à son échéance.
Dans son rapport public de 1998, la Cour des comptes avait déjà relevé qu'afin de limiter les
risques d'une mise en jeu de leur responsabilité, les commissaires priseurs avaient tendance à
sous évaluer les biens gagés, de sorte que le produit des ventes excède en général les sommes
prêtées d'après ces évaluations.
Les commissaires priseurs appréciateurs font cependant valoir que l'évaluation des objets gagés
ne peut être exacte qu'au moment où elle est effectuée, c'est-à-dire par rapport à l'état d'un
marché qui est, par nature, fluctuant. La réalisation de pertes ou de bonis dépend avant tout de
retournements de conjoncture comme celui intervenu en 1999, dont les commissaires priseurs
appréciateurs n'ont pas la maîtrise. Ils rappellent que conscients du caractère imprévisible du
résultat des adjudications futures, ils se doivent d'agir avec toute la prudence requise sauf à
compromettre la réalité de leur garantie.
La chambre relève toutefois que la caisse a accordé, dans la quasi totalité des cas, une
majoration du montant des prêts consenties sur la base de ces évaluations. A titre d'exemple, en
mars 2000, neuf prêts sur dix ont bénéficié d'une telle majoration, à concurrence de 20 % en
moyenne.
Cette pratique, qui n'a été justifiée par aucune décision, peut avoir de lourdes conséquences,
dans la mesure où les commissaires priseurs ne sauraient être tenus à la couverture des pertes
résultant d'une telle majoration des prêts, le crédit municipal s'exposant même à perdre
entièrement le bénéfice de leur garantie si le montant du prêt excède l'évaluation du bien gagé.
La caisse de Crédit municipal de Paris fait observer que les risques encourus sont limités par le
fait que moins de 10%
des objets gagés font l'objet d'une vente aux enchères.
La responsabilité des commissaires priseurs se trouve, en outre, atténuée par la limitation des
intérêts grevant les sommes mises à leur charge en cas de mévente. En effet, bien que la durée
des prêts ait été portée à un an en 1997, ce qui aurait impliqué d'évaluer les sommes dues au
crédit municipal en l'absence de remboursement par l'emprunteur sur la base du capital augmenté
de quatorze mois d'intérêts, la directrice du crédit municipal avait décidé arbitrairement de limiter à
sept mois le cumul des intérêts dus, soit le montant prévu par la réglementation pour les prêts
d'une durée de six mois. La Chambre prend acte de l'initiative prise en 1999 par le directeur
général de la caisse de mettre fin à la limitation de responsabilité des commissaires priseurs pour
les prêts d'une durée d'un an.
Les taux d'intérêt appliqués sont particulièrement élevés. Ainsi qu'il ressort d'une note interne du
crédit municipal, ils sont, en effet, calculés de façon à se rapprocher le plus possible du taux
maximum autorisé par la banque de France, c'est-à-dire du seuil de l'usure, soit 11,23 % à la date
du contrôle, compte tenu des frais de garde de 500 F par mois. Pas plus que sur les modalités qui
précèdent, le conseil d'orientation et de surveillance ne s'est prononcé sur ces taux, alors qu'il lui
revient d'approuver les conditions générales des prêts.
Le directeur général de la caisse ne conteste pas le constat formulé par la Chambre. Il précise
toutefois qu'au cours des dernières années, il a été demandé au conseil d'orientation et de
surveillance de supprimer les frais de garde sur les prêts de faibles montants portés à la somme
de 1 500 F en 1998. Par ailleurs, il indique que depuis le 16 octobre 2000, les taux n'ont pas été
modifiés malgré l'augmentation des taux de l'usure.
Ces pratiques sont rendues possibles par la sous évaluation des biens gagés. Ainsi, le montant
total adjugé en 1999 était-il, en dépit des majorations pratiquées, près de deux fois supérieur au
capital prêté, les bonis de liquidation capitalisés s'élevant à la même date à près de 35 millions de
francs.
L'établissement enregistre, néanmoins, des pertes sur certaines ventes, le montant des
admissions en non valeur correspondantes s'étant élevé à 2,6 millions de francs en 1997 et à 2,1
millions de francs pour chacune des années 1998 et 1999, sans qu'il soit possible de déterminer
la proportion dans laquelle ces moins values ont pu être couvertes par le jeu normal de la garantie
liée à la responsabilité des commissaires priseurs.
Enfin, ainsi que la Cour des comptes l'avait également relevé dans d'autres établissements, les
commissaires priseurs tardent à se libérer, à la suite des ventes, des sommes perçues au profit de
la caisse de crédit municipal. Si le délai entre la perception des fonds et leur reversement, qui était
de plus de six mois jusqu'en 1997, a été sensiblement réduit depuis lors, il continue, néanmoins,
de s'écouler près de deux mois avant la remise de ces fonds, durant lesquels les commissaires
priseurs peuvent percevoir une rémunération sur leur placement au détriment de la trésorerie de
l'établissement.
8-2 LE SUIVI DES OPERATIONS
L'activité de prêts sur gages se doit d'apporter un certain nombre de garanties aux déposants.
Conformément au règlement 97-02 du comité de la réglementation bancaire, le dispositif de
contrôle interne doit, en particulier, garantir l'existence d'une piste d'audit permettant de
reconstituer dans un ordre chronologique les opérations depuis la remise des objets jusqu'à leur
dégagement ou à leur mise en vente et à la liquidation du produit correspondant. Or, le dispositif
existant présente, à cet égard, des insuffisances qui sont une source de risques multiples, ainsi
qu'il apparaît au stade du dénouement de ces opérations.
Lorsque les emprunteurs ne se sont pas acquittés du remboursement de leur dette à échéance,
l'établissement est en droit de faire procéder à la vente aux enchères publiques des objets remis
en nantissement. Les ventes sont annoncées par affiche publique. Afin de leur permettre d'éviter
cette mise en vente, l'établissement adresse aux emprunteurs une lettre les informant de la
possibilité qui leur reste ouverte de s'acquitter des sommes dues pour dégager leurs biens. Un
sondage réalisé par les services de la caisse
en cours de vérification fait, cependant, apparaître
que plus de 40 % de ces lettres recommandées ne sont pas réclamées ou ne peuvent atteindre
leur destinataire. Le directeur général de la caisse fait toutefois observer que les lettres
recommandées sont souvent doublés de courriers simples.
Les conséquences néfastes d'une méconnaissance des coordonnées des emprunteurs du point
de vue de la préservation de leurs intérêts apparaissent encore plus clairement, lorsque les ventes
des objets non dégagés font ressortir, comme il est fréquent, un boni de liquidation. Aux termes de
la réglementation, ce boni revient, en effet, de droit aux emprunteurs, l'établissement ayant à les
aviser par lettre de la mise à disposition de ces sommes, lorsque celles-ci n'ont pas été réclamées
dans un délai de trois mois après la liquidation de la vente.
Faute de traitement adapté des informations relatives à ces opérations, il n'a pas été possible de
s'assurer des conditions dans lesquelles ces procédures de restitution des bonis étaient mises en
oeuvre. Compte tenu de l'impossibilité d'atteindre nombre des intéressés préalablement à la
vente, il est, cependant, à craindre que ceux-ci ne puissent être fréquemment prévenus de
l'existence des sommes qui leur sont dues. Or, ces dernières sont définitivement acquises à
l'établissement si elles n'ont pas été réclamées dans un délai de trois ans. Au regard de ces
constatations, le directeur général de l'établissement fait valoir qu'il est adressé à chaque
déposant une lettre individualisée, que les conditions des prêts sur gages sont affichées dans les
locaux et que les reconnaissances de prêts mentionnent les droits des déposants en matière de
bonis.
Ainsi qu'il a été rappelé, le solde du compte d'attente sur lequel sont enregistrés ces bonis
représentait un total de 5,3 millions d'euros à la fin de l'année 1999.
S'il est vrai que les dispositions du décret du 30 décembre 1936 favorisent l'anonymat, en
prévoyant que la reconnaissance de dépôt de l'objet engagé soit faite au porteur, il conviendrait
que les déposants soient informés à ce moment de l'intérêt que présente, du point de vue de
l'exercice de leurs droits, la donnée de renseignements suffisants les concernant.
Les responsables de la caisse ne sauraient pas davantage se retrancher derrière l'anonymat pour
justifier que des signatures de personnes fictives soient apposées sur des affiches annonçant ces
ventes judiciaires et sur les lettres en informant les intéressés, comme cela a été le cas pour des
affiches mentionnant le nom de ROUSSEAU (service du contentieux des prêts sur gage ) et pour
des lettres recommandées au nom de D. JURICK (service du contentieux des prêts sur gage ),
signées sous de fausses identités.
Outre l'irresponsabilité d'un tel procédé, celui-ci apparaît particulièrement inadmissible dans le
cadre d'une procédure de vente judiciaire, dont la validité pourrait être dès lors contestée.
Il convient de noter que l'application des dispositions du décret du 30 décembre 1936 ne va pas
sans soulever un certain nombre de difficultés. Les principes d'un paiement expressément au
comptant (art. 46) ou de l'anonymat des opérations (art. 36) ne vont pas dans le sens de
dispositions plus récentes encadrant les règlements en espèces ou la lutte contre le blanchiment.
Le quantum des prêts tel qu'il fonctionne n'est pas conforme aux mécanismes décrits par l'article
34 du décret. Enfin, le régime de responsabilité des commissaires priseurs appréciateurs tel qu'il
est prévu aux articles 28 et 46 dudit décret n'est pas sans ambiguïté ainsi que l'illustrent diverses
pratiques en cours au moment du contrôle.
S'agissant de ventes judiciaires, il se produit parfois que des lots restent impayés a l'issue d'une
adjudication au sein du Crédit municipal de Paris. La procédure suivie dans un tel cas introduit
une rupture dans le suivi des opérations. En effet, après avoir versé au crédit municipal le montant
de l'adjudication, certains commissaires priseurs déposaient le bien en leur nom, contre un prêt
minimum de 30,50 euros, en vue de procéder ensuite à sa vente requise. Cette pratique est
contestée par la caisse. Les biens
n'ayant pas été payés a l'issue d'une adjudication pourraient
en effet être remis en vente pour le compte de l'établissement. Ce mécanisme rend impossible
tout bilan global de l'opération, puisque l'éventuel boni réalisé au cours de la seconde vente
revient entièrement au commissaire priseur sans qu'un rapprochement soit possible avec le
montant du déficit couvert par ce dernier.
Les ventes peuvent également donner lieu, dans de plus rares cas, à des litiges avec les
acheteurs, mettant en cause les procédures d'authentification des objets déposés et la sécurité
des règlements. Ainsi, la vente d'un tableau en juin 1999 a donné lieu à une succession
d'incidents. L'acquéreur a qui le tableau a été remis contre la remise d'un simple chèque de 42
250 F a mis en cause son authenticité et n'a pas honoré sa signature. Cet incident a provoqué un
conflit émaillé de nombreux rebondissements entre trois des commissaires priseurs et le directeur
général de la caisse. Il en a résulté que ladite vente a été annulée et que les trois commissaires
priseurs ont décidé de démissionner de leurs fonctions au cours du printemps 2000.
9 - LES ACTIVITES BANCAIRES
Il n'a pas été procédé, dans le cadre du présent contrôle, à un examen approfondi des activités
bancaires, celles-ci ayant fait, par ailleurs, l'objet d'une enquête diligentée par la commission
bancaire. Les observations qui suivent viennent à l'appui de celles faites plus haut sur la tenue de
la comptabilité et sur le contrôle interne.
9-1 LES COMPTES DE CLIENTELE GENERALE
Les listes de comptes de clientèle établies par le service informatique pour les besoins de la
direction financière et de l'agence bancaire sont affectées par des problèmes de mise à jour et par
des artifices ou des erreurs de procédure mettant en cause la fiabilité du système comptable :
- plus de
quatre cent comptes
clôturés, parfois depuis des années, apparaissent toujours ouverts
en mai 2000 ;
- les comptes de clientèle sont doublés, en cas d'incident de paiement, de comptes dits "de
blocage", ce procédé manuel traduisant l'absence de traitement informatique des chèques
impayés, alors que cette fonctionnalité était, pourtant, prévue par le cahier des charges du
système informatique acquis en 1999 ;
- près d'un millier de comptes dits "de tiers CMP" créés par erreur lors de la montée en charge
de
ce nouveau logiciel comptable subsistent dans les fichiers.
Les conditions dans lesquelles la migration des données s'est effectuée vers le nouveau logiciel
sont donc loin d'être optimales. Les désordres constatés justifieraient, à tout le moins, qu'il soit
procédé à un apurement du fichier des comptes de clientèle. Le traitement des incidents de
paiement mériterait, par ailleurs, d'être revu dans le cadre du programme de contrôle interne.
9-2 le projet de filialisation des activités bancaires
Ainsi que la loi n° 92 518 du 15 juin 1992 lui en ouvre la possibilité, le crédit municipal de Paris a
entamé au cours du premier semestre 2000 une procédure susceptible de conduire à la
filialisation de ses activités de crédit, autres que de prêts sur gages et à la création, à cet effet,
d'une société anonyme dont le crédit municipal serait actionnaire majoritaire. Le partenaire retenu
-le groupe des Mutuelles du Mans-
quoique minoritaire a accepté de décharger la ville de Paris
du risque d'actionnaire de référence
au sens de la loi bancaire.
Les commissaires aux apports ont été désignés par ordonnance du président du tribunal de
commerce le 31 août 2000. Un audit, achevé le 12 septembre 2000, a tenté d'évaluer la valeur de
reprise des actifs en cas de cession de l'activité bancaire du crédit municipal de Paris.
La totalité du personnel affecté aux activités bancaires concurrentielles du crédit municipal devrait
être intégrée dans la nouvelle société.
Au terme de cette opération, le crédit municipal devrait détenir 54 % du capital. En l'état actuel de
ce projet, cependant, aucune disposition ne permet d'assurer que cette nouvelle société, si elle
est créée, restera filiale à plus de 50 % de l'établissement. Dans l'hypothèse d'une augmentation
de capital, ce dernier pourrait perdre, en effet, son statut d'actionnaire majoritaire.
Ainsi que le prévoit l'article 2 de la loi du 15 juin 1992 précitée, ce projet a fait l'objet d'une
information par le maire de Paris au conseil municipal de Paris, le 13 novembre 2000.
Cette information fait référence à la décision prise par le conseil d'orientation et de surveillance,
au cours de ses séances des 30 mai et 12 octobre 2000, d'élaborer un projet de filialisation qui
devrait être à nouveau soumis à son approbation avant toute décision définitive. Au regard de ces
constatations, le directeur général de la caisse fait valoir qu'une mission d'évaluation des risques a
été constituée. Cette mission a entrepris une évaluation du traité d'apport.
Le Conseil d'orientation et de surveillance a décidé, en novembre 2001, d'interrompre ce projet de
filialisation.
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Réponses de l'ordonnateur :
IFO17040201.pdf
IFO17040202.pdf