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OUR DES
C
OMPTES
La gestion de la dette
publique locale
Juillet 2011
Avertissement
Synthèse
du
Rapport public thématique
C
ette synthèse est destinée à faciliter la lecture et
l’utilisation du rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations et des organismes
concernés sont insérées dans le rapport.
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Les spécificités de la dette locale
. . . . . . . . . . . . .
7
2
Une gestion plus sophistiquée et moins maîtrisée
11
3
Le besoin d’une meilleure gestion des risques
. . .
15
Conclusion
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
18
Recommandations
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
19
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Sommaire
3
L
a Cour des comptes a consacré un chapitre de son rapport public annuel de
février 2009 aux « risques pris par les collectivités territoriales et les établis-
sements publics locaux en matière d’emprunts ». Elle a fait, à cette occasion, un cer-
tain nombre de propositions dont elle a dressé, l’année suivante, un bilan d’application
qui montrait que nombre de ses recommandations n’avaient pas été suivies d’effets.
A la suite de ces travaux, très ciblés sur les risques inhérents au développement des
produits dits structurés, et dans un contexte d’endettement public croissant qui atteint
des limites difficilement franchissables, le présent rapport dresse un bilan global de la
situation des collectivités territoriales et de leurs établissements publics en matière d’en-
dettement, de leurs pratiques, et des évolutions qui apparaissent nécessaires en ce
domaine.
Ce bilan s’appuie notamment sur les constats faits à l’occasion de l’enquête lancée
sur ce sujet en 2009 par la Cour et les chambres régionales des comptes. Elle a concerné
plus de 150 collectivités et établissements publics locaux.
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Introduction
5
1
Les spécificités
de la dette locale
L’augmentation
de l’encours
Depuis plusieurs années, l’endette-
ment local est à nouveau entré dans une
dynamique de forte augmentation.
Selon les données publiées par l’INSEE,
la dette brute des administrations
publiques
locales
(APUL)
atteint
160,6 M€ à la fin de l’année 2010. Si l’on
prend pour référence l’encours de la
dette figurant au bilan des collectivités
territoriales, il s’est accru depuis 2004 de
41 %, avec une augmentation de 80 %
pour les régions, de 63 % pour les
départements, de 18 % pour les com-
munes et de 69 % pour les groupements
de communes à fiscalité propre.
L’augmentation de la dette des col-
lectivités territoriales est lié à un cycle
d’investissements important, toutes col-
lectivités confondues, jusqu’en 2009.
En dépit de cette évolution, la part
de la dette publique locale dans l’ensem-
ble de la dette publique est restée relati-
vement stable au cours de ces dernières
années. En 2010, la dette des APUL
représente, selon l’INSEE, 10 % de l’en-
semble de la dette publique de la France
contre 10,3 % en 2004.
La tendance est identique si l’on rap-
porte la dette des APUL à la richesse
nationale, puisqu’elle représente 8,3 %
du PIB en 2010, soit 1,6 point de PIB de
plus qu’en 2004, mais 1,1 point de PIB
de moins qu’en 1994, année au cours de
laquelle elle avait atteint un point haut à
9,4 % du PIB.
Les collectivités locales autofinan-
cent majoritairement leurs dépenses
d’équipement. Le montant global d’au-
tofinancement généré par les collectivi-
tés locales en 2010 est d’ailleurs parmi
les plus élevés observés depuis 2000
puisqu’il atteint 30,2 Md€. La part de
l’emprunt dans le financement de l’in-
vestissement local est faible (entre 9 et
15 %) et les collectivités locales dispo-
sent d’une bonne capacité de désendet-
tement (3,9 ans).
Cette situation plutôt favorable,
conjuguée à une quasi absence de sinis-
tre vis-à-vis des créanciers, explique la
confiance manifestée jusqu’ici par les
banques, qui sont relativement peu
nombreuses à intervenir sur ce marché
et qui apportent près de 97 % des pro-
duits
d’emprunts
des
collectivités
locales. Ils se situent, selon les années,
dans une fourchette comprise entre 10
et 20 Md€.
L’encadrement
budgétaire
Contrairement à l’Etat, l’ensemble
des flux de dette (emprunts nouveaux et
remboursements) des collectivités terri-
toriales doit être budgétisé.
Cour des comptes
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
7
Les spécificités de la dette locale
8
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les règles budgétaires, et plus parti-
culièrement l'article L. 1612-4 du code
général des collectivités territoriales
(CGCT), mettent au tout premier plan la
« règle d’or » selon laquelle l’emprunt est
réservé au financement de la seule sec-
tion d’investissement . En outre, le rem-
boursement du capital doit être assuré
tous les ans par des ressources appro-
priées, essentiellement l'autofinance-
ment. L’emprunt ne peut donc pas ser-
vir à rembourser la dette existante.
Ces règles budgétaires sont cepen-
dant parfois contournées ou induisent
des effets pervers.
Pour réaliser un volume de dépenses
d’équipement élevé, des collectivités ont
pu ainsi vouloir réduire le montant
annuel du capital remboursé. Elles ont
alors opéré par le biais d’aménagements
visant à alléger les dépenses correspon-
dantes de l'exercice et celles de l’avenir
proche, en augmentant la durée de rem-
boursement.
Les pratiques centrées sur une
approche trop exclusivement budgétaire
des problèmes de dette ont également
conduit à l’utilisation de ratios d’analyse
financière de la dette inadaptés.
Les règles
comptables
et de gestion
Les collectivités et leurs établisse-
ments publics disposent d’une très
grande liberté en matière de souscrip-
tion de contrats d’emprunts ou de
contrats de produits dérivés. Les assem-
blées délibérantes peuvent déléguer à
leurs
exécutifs
la
réalisation
des
emprunts et des opérations financières
utiles à la gestion de ces derniers, y com-
pris les opérations de couverture des
risques de taux et de change. La régle-
mentation des marchés publics n’est pas
applicable à ces contrats.
La liberté d’emprunter accordée aux
collectivités locales est souvent présen-
tée comme la conséquence du principe
de libre administration des collectivités
territoriales. Elle n’interdirait cependant
pas, si un intérêt général le justifiait, que
cette liberté soit encadrée par la loi.
Le cadre juridique peu contraignant
applicable aux emprunts des collectivi-
tés locales a rendu l’exercice des
contrôles difficile, qu’il s’agisse du
contrôle de légalité ou de celui des
comptables publics.
Il a, en revanche, permis aux collec-
tivités locales de recourir à un vaste
éventail de produits de financement, qui
s’est progressivement élargi à des
emprunts de plus en plus risqués, dont
certains présentent la particularité de
minorer transitoirement la charge d’inté-
rêt des emprunteurs et d’opacifier les
marges des prêteurs.
L’émergence de la crise financière au
cours de l’année 2008 et la découverte
de l’ampleur des risques pris par cer-
taines collectivités en matière de gestion
de leur dette, ont incité les ministres
concernés à réunir fin 2008 les princi-
pales associations d’élus et les princi-
paux établissements de crédits interve-
nant dans le secteur du financement des
collectivités locales.
9
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Les spécificités de la dette locale
Cette démarche a débouché sur la
signature le 7 décembre 2009 d’une
« charte de bonne conduite », entre les
principaux prêteurs et les associations
d’élus locaux. De façon complémen-
taire, une circulaire interministérielle du
25 juin 2010 a rappelé les règles et les
principes applicables à l’emprunt et aux
produits de couverture souscrits par les
collectivités territoriales.
Ces documents de référence d’une
valeur normative limitée ne modifient
pas le cadre juridique et comptable
applicable à la gestion de la dette des
collectivités locales.
Le cas particulier des établissements publics de santé
La dette des établissements publics de santé, qui a plus que doublé depuis 2004
pour atteindre 24 Md€ en 2010, ne fait pas partie de la dette publique locale.
Pour autant, l’examen par les chambres régionales des comptes de la gestion
de la dette hospitalière les a conduites à faire des constatations très comparables à
celles faites pour la dette des collectivités locales. Ainsi, comme elle le recom-
mande pour le secteur local, la Cour estime nécessaire de mieux associer les
conseils de surveillance à la définition de la stratégie d’endettement et au contrôle
de la gestion de la dette.
11
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
2
Une gestion plus sophisti-
quée et moins maîtrisée
Un manque de stra-
tégie
Dans un contexte de reprise de l’en-
dettement depuis 2003 et de hausse
rapide des taux d’intérêt jusqu’à la fin
2008, la gestion de la dette a pris une
importance croissante. Pour autant les
acteurs locaux n’en ont pas toujours suf-
fisamment pris conscience.
La définition claire d’une stratégie
d’endettement par l’exécutif et sa for-
malisation dans un document de réfé-
rence demeurent cependant relative-
ment rares.
Cette carence se double, dans de
nombreuses collectivités, d’un dévelop-
pement insuffisant des outils de pilotage
financier pluriannuels, tels que les plans
pluriannuels d’investissement. La défini-
tion d’une stratégie d’endettement,
même si elle peut et doit être révisée
périodiquement, nécessite en effet d’ef-
fectuer des anticipations à un horizon
qui ne peut se limiter au court terme.
Les assemblées délibérantes ne sont
pas toujours en situation de pouvoir
appréhender la nature des opérations de
gestion de dette qu’elles autorisent, de
vérifier si celles-ci sont bien conclues
dans l’intérêt de la collectivité, et de s’as-
surer, le cas échéant, qu’elles sont cohé-
rentes avec la stratégie globale définie.
L’enquête a également montré qu’un
nombre significatif de collectivités terri-
toriales, en particulier des communes de
petite taille, mais pas uniquement,
avaient mis en place une gestion active
de la dette et effectuaient des opérations
complexes et risquées, notamment de
souscription d’emprunts structurés ou
de réaménagements, sur les seuls
conseils de leurs banques.
Les comptables du Trésor public
sont peu sollicités préalablement aux
décisions sur la dette. Au demeurant, ils
ne sont pas toujours en capacité d’ap-
porter un conseil répondant aux besoins
des gestionnaires locaux dans ce
domaine.
Des modalités
d’endettement
de plus en plus
complexes
La gestion de la trésorerie
Les collectivités territoriales sont
des correspondants du Trésor. Elles
sont tenues de déposer toutes leurs dis-
ponibilités auprès de l'Etat. Il est de leur
intérêt de limiter le plus possible leur
trésorerie, non rémunérée, lorsqu’elle
est alimentée par des emprunts. Il s’agit
du premier levier disponible pour limiter
significativement les charges financières.
Une gestion plus sophistiquée
et moins maîtrisée
12
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
De nombreuses collectivités s’effor-
cent de réduire le montant de leur tréso-
rerie, notamment au moyen d’emprunts
dits « revolving ». A l’inverse, les cham-
bres régionales des comptes sont sou-
vent conduites à recommander à cer-
taines d’entre elles la mise en place d’une
meilleure gestion de leur trésorerie.
Le recours au financement
obligataire
Les plus grandes collectivités, tirant
parti des dispositions de la loi sur les
nouvelles régulations économiques du
15 mai 2001 ont, par ailleurs, développé
des financements désintermédiés en
émettant notamment des billets de tré-
sorerie directement sur le marché.
Compte tenu de leur taille, peu de col-
lectivités locales françaises sont toute-
fois en mesure d’intervenir sur le mar-
ché obligataire. Afin de disposer de la
taille suffisante pour émettre, certaines
collectivités se sont organisées pour
mutualiser leurs besoins de financement
sous la forme d’émissions obligataires
groupées.
Des progrès insuffisants
dans la mise en concur-
rence
Le marché des prêts aux collectivités
locales s’est caractérisé par une diversifi-
cation de l’offre bancaire avant la crise
financière. L’intervention de nouveaux
prêteurs a cependant plus contribué à
favoriser la diffusion de produits de plus
en plus risqués qu’à permettre aux
emprunteurs de mieux comparer les
propositions. Elle n’a donc pas réelle-
ment permis de mieux faire jouer la
concurrence.
Les contrôles menés par les cham-
bres régionales des comptes montrent la
persistance trop fréquente de situations
dans lesquelles les collectivités territo-
riales ne font pas suffisamment appel à
la concurrence avant de procéder à un
emprunt ou à un réaménagement ou,
quand elles le font, se limitent à leurs
créanciers habituels.
Les collectivités sont aussi confron-
tées à la difficulté d’opérer des choix
parmi des offres bancaires qui sont d’au-
tant plus complexes à départager que les
consultations des banques ne s’opèrent
pas systématiquement sur la base d’un
cahier des charges.
Le développement
de l’offre d’emprunts
structurés
Le développement significatif des
emprunts structurés s’inscrit dans ce
contexte. Ces emprunts présentent très
souvent la caractéristique d’offrir à l’em-
prunteur un taux d’intérêt bonifié pen-
dant une première période d’amortisse-
ment, en contrepartie d’une prise de
risque accrue, pendant une phase ulté-
rieure de remboursement.
Le recours à des indices sous-jacents
de plus en plus volatils (marchés des
changes, marchés obligataires hors de la
zone euro), et de moins en moins négo-
Une gestion plus sophistiquée
et moins maîtrisée
13
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
ciables (indices spécifiques à certaines
banques) a certes permis de « bonifier »
le taux d’intérêt, mais a eu pour contre-
partie une prise de risques de plus en
plus grande et de moins en moins maî-
trisable. Les effets de levier ou les effets
cumulatifs ont eu pour conséquence
d’amplifier ces risques, justifiant le qua-
lificatif de “toxique” qui est parfois
appliqué à certains de ces produits.
De nombreux emprunts structurés
ont été conclus dans le cadre d’opéra-
tions de renégociations de dettes pou-
vant se traduire par la prise de positions
de plus en plus risquées. Le plus sou-
vent, l’analyse financière communiquée
aux organes délibérants des collectivités
ne mentionnait qu’une partie des flux
réellement générés par ces contrats.
Ainsi, le montant de la soulte due pour
quitter la position renégociée n’était
généralement pas identifié.
A défaut de disposer de ces infor-
mations, les assemblées délibérantes
n’ont pu exercer qu’un contrôle limité,
ce qui a facilité la diffusion des
emprunts structurés et confirme la
nécessité de renforcer, à l’avenir, le rôle
de ces assemblées.
Certaines collectivités locales ont,
par ailleurs, souscrit ce type d’emprunts
ou des produits dérivés sans être assu-
rées de détenir en interne une compé-
tence suffisante, notamment pour com-
prendre le contenu et les conséquences
possibles de ces contrats. Si le recours à
un conseil peut alors s’avérer utile, il
nécessite néanmoins de disposer d’une
capacité propre d’analyse des proposi-
tions faites par ce conseil.
15
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
La nécessaire
maîtrise des
emprunts structurés
L’enquête menée par les chambres
régionales des comptes a montré la dif-
fusion très large des produits structurés,
dans toutes les catégories de collectivi-
tés, quelle que soit leur taille.
Il est donc regrettable que le constat
fait par la Cour dans son rapport public
annuel de février de 2009, sur l’absence
de données statistiques publiques sur la
structure de la dette publique locale
demeure, encore aujourd’hui, d’actua-
lité.
On peut estimer l’encours de la
dette publique locale constitué d’em-
prunts structurés entre 30 à 35 Md€,
dont 10 à 12 Md€ présentent un risque
potentiellement élevé.
Le risque d’une dégradation impor-
tante des finances des collectivités
concernées ne s’est cependant pas
encore véritablement matérialisé, ce qui
n’est pas surprenant compte tenu
notamment des caractéristiques de ces
prêts qui commencent généralement par
une période de taux d’intérêt « bonifié ».
De plus, en cas de taux très dégradé, le
surcoût peut avoir été compensé par la
baisse simultanée des taux payés sur les
emprunts à taux variable, liée à l’effon-
drement des taux du marché monétaire
depuis l’automne 2008. Les risques
demeurent toutefois importants en rai-
son de la structure même de ces pro-
duits, de leur durée plus longue que les
produits classiques à taux fixe et varia-
ble, et des indexations fortement vola-
tiles sur lesquelles ils reposent, en parti-
culier lorsqu’il s’agit de parités de
change ou d’écarts de parités.
Certaines collectivités se retrouvent
d’ores et déjà liées par des emprunts ou
des produits dérivés dont elles ne peu-
vent sortir qu’en acceptant de payer un
taux d’intérêt ou une soulte prohibitifs
au regard des moyens financiers dont
elles disposent. Ces situations demeu-
rent
cependant
très
concentrées.
Quelques centaines de collectivités se
trouvent durablement exposées à un
risque sur une faible partie de leur
encours, mais probablement moins
d’une centaine sont exposées grave-
ment.
Les risques induits par les emprunts
structurés demeurent donc élevés et sus-
ceptibles de dégrader sensiblement la
situation financière des collectivités les
plus exposées.
Il importe dès lors de tirer pleine-
ment les conséquences de cette situa-
tion, ce que ne font pas suffisamment la
charte de bonne conduite et la circulaire
interministérielle du 25 juin 2010. La
3
Le besoin d’une meilleure
gestion des risques
Le besoin d’une meilleure gestion
des risques
16
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour recommande de faire un bilan de
l’application de cette charte et d’en
revoir les dispositions pour écarter les
produits basés sur des écarts d’indices
hors zone euro ou comportant des
effets de levier. De même, l’admission
d’une période de bonification d’intérêts
sur une partie de la durée du contrat
crée un déséquilibre dans les conditions
de son exécution et revient à minorer la
charge d’intérêt due à court terme pour
la reporter sur les exercices ultérieurs.
Cette pratique devrait être proscrite ou
neutralisée dans le résultat comptable.
D’autres mesures doivent être prises
afin d’améliorer la maîtrise des risques. Il
conviendrait ainsi de :
- mettre en place un suivi statistique
de la structure de la dette publique
locale ;
- rendre obligatoire, dans les opéra-
tions de renégociations d’emprunts, la
comptabilisation de toutes les soultes et
indemnités de réemploi, sans compensa-
tion ;
- traduire, sur le plan comptable, les
conséquences de l’existence de produits
risqués en mettant en place un système
de provisionnement obligatoire de ces
risques qui devrait, au minimum, avoir
pour objet de neutraliser le gain transi-
toire induit par l’existence d’un taux
« bonifié » ;
- renforcer le rôle des assemblées
délibérantes en imposant la présentation
chaque année d’un rapport sur la gestion
de la dette qui servirait de base à un
débat annuel sur ce sujet, couplé avec le
vote du budget ;
- améliorer le traitement collectif
des cas les plus difficiles mais sans met-
tre en place une structure de défaisance.
L’anticipation
des évolutions
du modèle
de financement
Au-delà de ces risques induits par la
diffusion des produits structurés et qu’il
convient donc de traiter, il apparaît que
le modèle de financement des collectivi-
tés locales est susceptible d’une évolu-
tion profonde dont il serait certaine-
ment utile de chercher à anticiper dès
maintenant les conséquences.
L’accès des collectivités locales au
crédit à des conditions très favorables
pourrait en effet être remis en cause,
compte tenu de la réduction de la
concurrence et de l’augmentation des
marges bancaires depuis la crise finan-
cière, mais aussi des difficultés que
connaît actuellement le principal établis-
sement bancaire intervenant sur ce mar-
ché. Enfin l’évolution annoncée des
normes prudentielles dans le cadre des
discussions dites des accords de Bale III
risque d’avoir, à terme, un effet impor-
tant sur le volume et sur le coût du cré-
dit aux collectivités territoriales.
Dans ce contexte, une diversifica-
tion des sources de financement des col-
lectivités locales devrait être recherchée.
Le besoin d’une meilleure gestion
des risques
17
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Le financement obligataire constitue
un axe possible de diversification pour
les plus grandes collectivités locales mais
qui restera probablement limité par rap-
port aux besoins à satisfaire.
La création d’une agence de finance-
ment des collectivités locales pourrait
fournir une solution supplémentaire
pour diversifier l’offre de financement
des collectivités locales, sous réserve que
soient respectées les conditions néces-
saires à son bon fonctionnement. Elles
concernent son domaine d’intervention,
le mécanisme de garantie solidaire des
collectivités en faveur de l’agence, le
niveau de fonds propres et de réserves
de liquidités, le mode de gouvernance et
plus fondamentalement sa capacité à
respecter les règles prudentielles impo-
sées par les accords de Bâle III.
Conclusion
18
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L
’enquête menée par la Cour et les chambres régionales des comptes sur la ges-
tion de la dette publique locale débouche sur un bilan contrasté. Des progrès
ont été réalisés par les collectivités territoriales pour améliorer la qualité de la gestion de
leur dette, mais ils restent insuffisants.
Les banques portent une part de responsabilité dans la situation actuelle pour avoir
conçu l’offre d’emprunts structurés et encouragé leur diffusion sans toujours assurer une
information suffisante sur les risques encourus.
De son côté, l’Etat n’a pas assez pris en compte les risques induits par les emprunts
structurés, diffusés à une large échelle et de manière excessive à certaines collectivités. La
Charte de bonne conduite conclue en décembre 2009 répond sur certains points aux
recommandations formulées par la Cour dans son rapport public annuel de février
2009. Elle apparaît néanmoins comme une mesure trop peu contraignante pour per-
mettre de résoudre efficacement les difficultés actuelles et éviter qu’elles ne réapparais-
sent. Une modification de la réglementation comptable devrait être envisagée pour obli-
ger au provisionnement des risques inhérents à ces emprunts.
Les conditions de financement des collectivités locales après la crise financière et le
retrait de plusieurs prêteurs vont probablement évoluer. L’entrée en vigueur des normes
bancaires issues des accords de Bâle III devrait modifier les possibilités d’accès des col-
lectivités locales aux financements bancaires. Il convient dès lors d’étudier dès à présent
les moyens de diversifier les sources de financement du secteur local.
Recommandations
19
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Améliorer l’information sur les
risques de dette
:
privilégier l’utilisation des ratios
de solvabilité comme la capacité de
désendettement qui mesure en années
d’autofinancement le remboursement
du capital de la dette ainsi que les
informations reposant sur la valorisa-
tion financière de l’emprunt ou de
l’instrument de couverture ;
à l’inverse, prendre garde à l’uti-
lisation des ratios et indicateurs élabo-
rés à partir de l’annuité de la dette
(annuité sur recettes réelles de fonc-
tionnement, taux moyen de la dette,
capacité d’autofinancement nette) qui
conduisent à privilégier la diminution
à court terme de l’annuité de la dette,
sans tenir compte des risques futurs,
en rallongeant la durée d’amortisse-
ment et en augmentant le risque finan-
cier en général ;
introduire dans la comptabilité
des collectivités territoriales, de leurs
établissements publics, des orga-
nismes publics de logement social une
obligation de provisions pour risque
en matière de dette à hauteur, au mini-
mum, pour les contrats prévoyant ini-
tialement un taux inférieur au taux de
marché, du gain budgétaire artificiel
ainsi créé ;
faire obligatoirement apparaître
dans la comptabilité des collectivités
territoriales et de leurs établissements
publics les soultes éventuellement
payées ou reçues lors d’opérations de
réaménagement ou lors de résiliation
anticipée d’instruments de couver-
ture ;
mettre en place un suivi statis-
tique global de la structure de la dette
(notamment en termes de maturité et
d’exposition au risque de taux) des
collectivités locales et de leurs établis-
sements publics débouchant sur la
publication d’un rapport annuel natio-
nal.
Favoriser la diversification de
l’offre de prêts :
systématiser
les
mises
en
concurrence des établissements ban-
caires lors de chaque opération de
financement ou de réaménagement,
en recourant à une large consultation
et en s’appuyant sur un cahier des
charges précis ;
rechercher une répartition équi-
librée des créanciers bancaires afin de
ne pas créer de situation de dépen-
dance vis-à-vis d’un seul établisse-
ment ;
étudier et arbitrer la faisabilité
de la création d’une agence de finan-
cement des collectivités territoriales et
s’assurer que ses principes et règles de
fonctionnement permettront bien
d’offrir aux collectivités territoriales
une nouvelle source de financement
dans des conditions de concurrence et
de sécurité financière pérennes.
Recommandations
20
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Renforcer
les
moyens
de
contrôle interne et externe :
pour les collectivités les plus
importantes (par exemple les com-
munes de plus de 5 000 habitants),
accompagner le projet de budget pri-
mitif d’un rapport sur la dette, présen-
tant, d’une part, les résultats de la stra-
tégie de gestion de la dette et de la tré-
sorerie du dernier exercice clos ainsi
que la stratégie à venir et d’autre part,
les
caractéristiques
de
chaque
emprunt et contrat de couverture
souscrit ;
instaurer chaque année, sur la
base du rapport susmentionné, un
débat d’orientation de la dette devant
l’assemblée délibérante qui détermi-
nera la stratégie de gestion de la dette,
et le cas échéant, définira à cette occa-
sion la délégation de pouvoir accordée
à
l’exécutif
pour
souscrire
les
emprunts et recourir à des opérations
de couverture ;
mettre fin aux incohérences
entre les textes régissant l’exercice du
contrôle de légalité sur les contrats de
prêts afin que ces contrats soient clai-
rement soumis à une obligation de
transmission au contrôle de légalité.
Aider les collectivités locales en
difficultés :
mettre en place à destination
des petites collectivités souhaitant
mutualiser
la
gestion
de
leurs
emprunts structurés une cellule de
suivi destinée à les aider à identifier et
à concrétiser, en liaison avec les
banques, des solutions de sortie ;
en revanche, ne pas donner
suite au projet de création d’une struc-
ture de défaisance prenant en charge
les emprunts les plus risqués sans que
les collectivités qui les ont souscrits en
supportent le coût de sortie.
Améliorer les bonnes pratiques
dans le recours à l’emprunt
en respectant l’interdiction de
découvert posée par l’article 26 de loi
organique relative aux lois de finances,
encourager la gestion en trésorerie
« zéro » des collectivités territoriales
en renforçant les échanges avec les
comptables publics, notamment par la
signature de conventions partena-
riales ;
faire le bilan de la charte de
bonne conduite qui devait être réalisé
après un an d’application et, en tout
état de cause, écarter les produits
basés sur des écarts d’indices hors
zone euro, ou comportant des effets
de levier. Modifier en conséquence la
circulaire du 25 juin 2010.
.