LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
305
Les personnels des établissements
publics de santé
En mai 2006, le rapport public thématique sur le personnel des
établissements publics de santé (EPS) critiquait les inadaptations du
cadre de gestion des personnels, mettait en évidence les carences de la
régulation des effectifs et appelait à développer certains aspects des
politiques de gestion des ressources humaines (GRH).
En 2008, la Cour a examiné
les suites données à ses
recommandations, à l’exception de celles relatives aux dispositifs de
régulation démographique et de répartition territoriale des médecins qui
ont fait l’objet d’une enquête en 2007
104
.
Les établissements publics de santé employaient au 31 décembre
2006 plus d’un million de personnes, soit 94 000 médecins et 920 000
personnels soignants, administratifs et techniques, qui assurent plus de
60 % de l’activité hospitalière en France. En 2007, les dépenses de
personnel des hôpitaux publics s’élevaient à 37,3 Md€ soit un quart des
dépenses de l’assurance maladie. Elles représentaient 66 % des charges
d’exploitation des EPS, dont la situation financière était par ailleurs
jugée préoccupante par la Cour, en raison de la progression de leurs
déficits et de leur endettement
105
.
Dans le contexte des réformes annoncées et de la dégradation de
la situation financière des hôpitaux publics, la Cour a estimé important
de procéder à un nouvel examen du pilotage et de la gestion des
ressources humaines des EPS.
104) RALFSS 2007, p. 187 et suivantes. A propos des médecins libéraux, la Cour
observait que les difficultés étaient liées à une répartition insatisfaisante des effectifs,
plus qu’à un déficit de médecins. Elle soulignait également que les dispositifs de
régulation étaient inadaptés. Or, certains d’entre eux sont également applicables aux
médecins hospitaliers (numerus clausus, examen national classant).
105) Rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques 2008, pp. 26-
30.
306
COUR DES COMPTES
La Cour a analysé l’ensemble des outils de gestion des personnels
des EPS et le cadre administratif de la GRH hospitalière publique. Elle
est également revenue sur les actions qui avaient fait l’objet de
recommandations lors de ses précédents travaux
106
.
Elle observe que ses observations ont été en partie entendues.
Des évolutions significatives ont été constatées en termes de
modernisation des procédures de gestion, de simplification statutaire et
de réorganisation de l’administration centrale. Mais subsistent toutefois
d’importants points de blocage, sur des questions majeures, relatives au
statut et à la connaissance des revenus des professions médicales, au
pilotage de la masse salariale, à la gestion prévisionnelle des emplois,
des effectifs et des compétences (GPEEC), ou encore aux imperfections
du dispositif d’information statistique et financier.
De plus, tout en étant consciente de la spécificité des métiers de la
santé et des contraintes du travail à l’hôpital, la Cour constate que
certains aspects propres à la gestion des ressources humaines
hospitalière (absentéisme, aménagement et réduction du temps de travail)
sont encore insuffisamment documentés et suivis et que les objectifs de
productivité et de performance doivent être mieux intégrés dans les
politiques de GRH.
***
A - Les outils de gestion et le cadre administratif
1 -
Les instruments de connaissance et de prévision
La Cour observait que le ministère de la santé ne disposait pas
d’informations fiables sur les effectifs et la répartition des personnels
hospitaliers. Elle estimait que les dépenses de personnel n’étaient pas
connues avec un degré de précision suffisant.
La nomenclature comptable applicable aux EPS a été aménagée.
Elle permet désormais de mieux estimer le coût salarial global du
personnel médical et du personnel non-médical, ou encore d’identifier les
dépenses indemnitaires liées à l’organisation de la permanence des soins.
106) La lutte contre l’absentéisme, le temps de travail, les politiques de rémunération,
les politiques de promotion professionnelle, l’intégration des enjeux de productivité
aux politiques de GRH.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
307
Cette évaluation reste cependant encore imprécise, compte tenu
notamment des reports de charge qui se sont maintenus à un niveau élevé
jusqu’en 2005 (355 M€
107
).
La Cour regrette que le processus de consolidation des données
soit si long, les données nationales disponibles étant fort anciennes
et en
décalage avec la temporalité des activités de gestion, ce qui limite leur
utilité. Le même constat peut être fait pour d’autres sujets
108
.
En termes de qualité, les évolutions constatées n’ont en outre pas
permis de disposer d’une connaissance des dépenses de personnel par
statut, ou par nature de rémunération.
L’architecture des instruments et structures permettant de connaître
la situation administrative des personnels des établissements publics de
santé est en effet complexe. La Cour a ainsi dénombré six instruments
différents
109
qui
ne
suffisent
pourtant
pas
à
appréhender
avec
suffisamment de précision la situation des personnels puisqu’ils sont
complétés par des enquêtes ponctuelles
110
. Le défaut persistant de
définition d’une stratégie d’ensemble dans la construction de l’appareil
statistique et pour le recueil et l’exploitation des données disponibles est
d’autant plus gênant que de très nombreuses structures interviennent dans
cette matière
111
. La Cour a cependant pris note des travaux en cours, dont
l’aboutissement pourrait permettre certains progrès, d’ici l’année 2011.
107) Les données ultérieures n’ont pas été exploitées par la Cour : la régularisation,
sans doute partielle, lors de l’exercice 2006 des reports de charges non mandatées lors
des exercices antérieurs leur confère en effet un caractère peu représentatif, alors que
les données 2007 n’étaient pas disponibles au moment de l’enquête.
108) Notamment en matière d’absentéisme, où les dernières données disponibles
dataient de 2005 pour les personnels des EPS, alors qu’elles remontaient même à
2003 pour la fonction publique de l’Etat, au moment de l’enquête.
109) Ces instruments sont les suivants : statistique annuelle des établissements de
santé, statistique des personnels des établissements de santé, répertoire partagé des
professionnels de santé, enquête « coûts et carrières », déclarations annuelles de
données sociales, tableaux de bord sociaux des ARH.
110) Quatre études d’envergure ont ainsi du être conduites en 2007 et 2008,
respectivement sur la reprise d’ancienneté des praticiens hospitaliers ayant une
activité libérale, sur la caractérisation des postes vacants de praticiens hospitaliers et
de directeurs d’hôpitaux, sur les comptes épargne-temps des praticiens hospitaliers et
sur la rémunération de la permanence des soins à l’hôpital.
111) Trois directions d’administration centrale, la DGS, la DREES et la DHOS, une
mission dédiée au sein de la DHOS, une agence nationale (l’agence technique de
l’information hospitalière), un établissement public national (le CNG).
308
COUR DES COMPTES
Sur le fond, la connaissance statistique des emplois et des effectifs
s’est
légèrement
affinée,
comme
l’illustrent
les
progrès
de
l’administration dans le suivi des vacances de postes dans les
établissements. La qualité de l’information disponible reste cependant
insuffisante. Ainsi, la localisation géographique des effectifs est peu
opératoire pour la tutelle, tandis que l’appréhension des situations de
multi-activité, fréquentes dans le secteur hospitalier, est perfectible.
De plus, les capacités de projection et de simulation des besoins en
personnels restent trop peu développées, en particulier au sein des EPS.
Ainsi, par exemple, la détermination du nombre de postes ouverts aux
examens classants nationaux des médecins se fonde
essentiellement sur
le
renouvellement des effectifs existants et prend encore peu en compte
la projection des besoins en fonction de l’organisation souhaitable de
l’offre de soins. Toutefois,
certaines évolutions traduisent une première
prise en compte des conclusions de travaux prospectifs, comme par
exemple la prise en compte dans le calcul du quota
d’accès à la
formation infirmière des développements de la politique de délégation
d’actes et de tâches.
Enfin, la Cour relève l’absence d’évaluation du coût des activités
de gestion des ressources humaines de l’hôpital public. S’agissant du
premier poste de dépenses de ce secteur et dans un contexte où les
possibilités de mutualisation de cette fonction ont été et continueront
d’être élargies, il serait pourtant souhaitable d’en mesurer l’efficience.
La Cour mettait en exergue deux sujets de préoccupation
majeure, pour lesquels la mise en place d’instruments nouveaux était
selon elle prioritaire : le pilotage de la masse salariale et la GPEEC.
Les conditions de pilotage de la masse salariale, notamment
l’analyse de ses facteurs d’évolution et le développement d’une capacité
de projection, restent insatisfaisantes, au niveau national comme au
niveau local. Dans les établissements, il semble que l’horizon se borne le
plus souvent à un cadre annuel. Ici encore, c’est l’absence persistante
d’outils adéquats qui explique les lenteurs des évolutions.
Le tableau
prévisionnel des effectifs rémunérés se limite, par exemple, à mettre en
regard les évolutions d’effectifs et les dépenses de rémunérations de
l’exercice passé avec celles de l’exercice à venir. L’horizon de pilotage
de la masse salariale des établissements se limite ainsi à un seul exercice,
ce qui est insuffisant.
Certes, au plan national, les travaux de l’observatoire national de la
démographie des professions de santé (ONDPS) et de l’observatoire
national des emplois et métiers de la fonction publique hospitalière
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
309
(ONEMFPH) ont permis de mieux documenter le cadre dans lequel
s’inscrit la GPEEC. Ainsi, à l’exception des directeurs d’hôpitaux, pour
lesquels des études sont toujours en cours, le volet analytique et
prospectif de la GPEEC a gagné en consistance au plan national.
Mais son développement devrait désormais se poursuivre au
niveau régional et s’affirmer dans les établissements. Au plan local, il est
en effet urgent que les principes de GPEEC se traduisent par une
inflexion des pratiques de gestion, qui paraît aujourd’hui encore limitée.
L’augmentation du nombre de projets dans les établissements correspond
en effet principalement à des actions d’une portée assez limitée, telles que
l’acquisition de logiciels ou l’organisation de formations. A l’inverse, des
opérations essentielles à la concrétisation de la démarche de GPEEC,
comme par exemple le classement des effectifs en métiers, semblent loin
d’avoir été partout conduites. A cet égard, les recommandations de la
Cour, d’une part, de confier l’animation d’une stratégie de GPEEC à un
chef de file unique au niveau national, disposant de relais régionaux et,
d’autre part, de développer des outils de GPEEC destinés aux
établissements, restent d’actualité.
*
Dans l’ensemble, alors que la refonte de l’appareil statistique et
d’information financière applicable aux personnels des EPS, pourtant déjà
annoncée dans les réponses faites au précédent rapport de la Cour, n’a
toujours
pas
abouti,
les
ajustements
opérés
n’ont
pas
permis
d’amélioration significative de l’information existante, ni en termes
d’exhaustivité des données, ni en termes de qualité des informations
disponibles, ou encore de délais de mise à disposition des informations au
niveau national.
Disposer d’une bonne connaissance de la situation des personnels
hospitaliers
et
d’analyses
prospectives
pertinentes
est
pourtant
indispensable pour faire évoluer l’offre de soins, asseoir les dispositifs de
GPEEC, ou présider à une politique de recrutement et de formation
adaptée. La Cour ne peut que réitérer sa préoccupation à ce sujet et
appeler l’administration à établir un plan d’action à moyen terme pour
remédier à des lacunes persistantes, étant entendu que c’est au niveau des
établissements que les progrès les plus significatifs sont attendus.
2 -
Le cadre administratif de gestion
La Cour appelait à une simplification du cadre statutaire. Elle
identifiait en particulier trois « complexités inutiles » : l’existence de
trois corps de direction, la trop grande variété des textes applicables
au personnel médical et la persistance de statuts locaux. Elle
310
COUR DES COMPTES
critiquait également les conditions de mise à disposition de directeurs
d’hôpitaux au sein de l’administration centrale de l’Etat.
L’administration a mis en oeuvre une politique volontariste de
fusion des corps de la fonction publique hospitalière (FPH).
En 2007, le nombre de corps de la filière ouvrière et technique a
été divisé de plus de moitié et deux des trois corps de direction ont été
fusionnés. Bien que son coût mérite encore d’être plus précisément
évalué, la rationalisation du cadre statutaire de la FPH est dans
l’ensemble conforme aux recommandations de la Cour. Elle permet que
l’architecture statutaire de la FPH soit désormais bien adaptée à la
diversité des métiers de l’hôpital public, tout en simplifiant les règles de
gestion.
Cependant, pour les personnels médicaux de l’hôpital public, les
statuts
restent
excessivement
fragmentés.
Des
règles
distinctes
s’appliquent ainsi à des personnels ayant suivi les mêmes études, obtenu
les mêmes diplômes et exerçant souvent des fonctions similaires.
La Cour relève également la persistance d’anomalies, dans
plusieurs
matières
qui
avaient
fait
l’objet
de
recommandations
récurrentes. Si la loi a permis de placer en cadre d’extinction les
personnels sous statut local
112
, ce que la Cour avait demandé, la
diminution effective des personnels relevant de cette catégorie n’a pu être
constatée. Faute de tout suivi rigoureux par l’administration des effectifs
concernés, il n’est pas possible de déterminer ce qu’il est advenu des
4000 personnes environ qui exerçaient sous ce régime en 2005.
Par ailleurs, les conditions de mise à disposition de directeurs
d’hôpitaux au sein de l’administration centrale continuent à ne pas
respecter les dispositions prévues par la loi. L’assurance maladie en
supporte donc le coût à titre principal. La proportion de celles-ci faisant
l’objet d’un remboursement par l’Etat a même diminué, passant de 58 %
en 2004 à 35 % en 2008
113
. On observe même que l’administration a
formalisé cette pratique pourtant très contestable dans un arrêté du
23 mars 2007 qui met à la charge de l’assurance maladie, via les
enveloppes hospitalières, des dépenses qui relèvent du budget de l’Etat.
112) Article 49-1 de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la
fonction publique.
113) Données 2004 pour toutes les mises à disposition, données 2008 pour les seules
mises à disposition au profit de la direction de l’hospitalisation et de l’offre de soins.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
311
Enfin, les investigations de la Cour conduites en 2008 ont établi
que le dispositif de congé spécial des directeurs d’hôpitaux reste à la
charge
financière
d’établissements
où
les
personnes
concernées
n’exercent plus. Il mériterait par ailleurs d’être réformé sur le fond, dans
le sens d’une plus grande conditionnalité de son attribution et d’une
meilleure articulation avec d’autres situations susceptibles de répondre au
même objet, c’est-à-dire principalement la situation de recherche
d’affectation, mais aussi le détachement dans le corps des conseillers
généraux des établissements de santé, voire dans certains cas, le
licenciement pour insuffisance professionnelle, comme les textes le
permettent.
La Cour mettait en évidence des carences dans la gestion
disciplinaire des personnels médicaux et d’encadrement des EPS.
La tendance observée ces dernières années à un recours accru aux
procédures disciplinaires, lorsque les circonstances l’exigent, devra être
confirmée. En ce qui concerne les praticiens hospitaliers, l’inflexion est
remarquable, notamment en raison de l’utilité que peuvent revêtir ces
procédures pour garantir un meilleur niveau de sécurité des prises en
charges médicales. Pour ces personnels, le nombre de procédures
disciplinaires ouvertes pour les huit premiers mois de l’année 2008 est en
effet près de deux fois supérieur au nombre de procédures initiées sur les
vingt dernières années
114
.
La Cour relevait l’excessive centralisation de procédures de
gestion par ailleurs complexes.
L’institution d’un centre national de gestion (CNG), chargé de la
gestion statutaire et du développement des ressources humaines des
praticiens hospitaliers et des personnels de direction, a fait évoluer le
cadre de gestion. Son périmètre de compétences n’englobe toutefois pas
l’ensemble des professions médicales. En effet, les personnels médicaux
contractuels et les médecins hospitalo-universitaires n’en relèvent pas.
Cette réforme pose les bases d’une personnalisation et d’un
enrichissement des processus de gestion des personnels concernés. Son
déploiement sera suivi avec attention par la Cour.
114) Sept procédures étaient ouvertes à la fin du mois d’août 2008, alors que seules
deux avaient été engagées entre 1984 et 2002, tandis que deux autres étaient initiées
entre 2002 et 2004.
312
COUR DES COMPTES
D’ores et déjà, il semble que l’utilisation de certains nouveaux
instruments à disposition du CNG
115
soit insuffisante. Ainsi dans un
contexte où la Cour a appelé à amplifier les restructurations
hospitalières
116
, la nouvelle situation de recherche d’affectation
117
ne
concernait au 30 septembre 2008 que sept personnes. Une évaluation
initiale faite en 2007 avait pourtant estimé les besoins à hauteur de
350 personnes
118
.
Le rythme de déploiement de cette nouvelle position est
donc très insuffisant.
La création du CNG s’est accompagnée d’une révision des règles
de gestion des praticiens hospitaliers et des directeurs d’hôpitaux. Elle a
permis que nominations et mutations gagnent en fluidité, de sorte que la
durée des vacances de postes soit réduite.
La
réforme
des
procédures
de
nomination
des
praticiens
hospitaliers a en outre amorcé l’affirmation des compétences du chef
d’établissement dans la gestion des ressources médicales. L’affectation
d’un médecin à un poste spécifique relève désormais de sa responsabilité,
sur la proposition du président de la commission médicale de
l’établissement, pour autant que le médecin en question relève de la
catégorie des praticiens hospitaliers.
En effet, les procédures de gestion des praticiens hospitalo-
universitaires demeurent quant à elles inchangées. Elles se caractérisent
toujours par leur extrême centralisation, ainsi que par un régime de
double tutelle ministérielle, lié à la bi-appartenance hospitalière et
universitaire, régime très lourd, qui a jusqu’ici empêché toute réforme.
Enfin, il faut rappeler que les agents de la FPH de catégorie B et C,
c’est-à-dire la plus grande partie du personnel des EPS, sont gérés au
niveau des établissements. Le niveau de déconcentration des actes de
gestion qui les concernent est très élevé.
115) La décision d’en faire usage ne relève toutefois pas du seul CNG : elle est
conditionnée par la demande des intéressés, des établissements ou de leurs autorités
de tutelles.
116) RALFSS 2008, p. 263 et suivantes.
117) Instituée par l’article 50 de l’ordonnance n°2005-112 du 1er septembre 2005,
traduit dans les textes statutaires en 2006 et 2007.
118) IGAS, rapport n° 2007-164P sur le contrôle des mesures prises dans le cadre du
contrat de retour à l’équilibre financier des hôpitaux perdants à la TAA, p. 29. Selon
le ministère, au 29 décembre 2008, la situation de recherche d’affectation concernant
20 personnes.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
313
La Cour critiquait une répartition des rôles peu cohérente
entre les différents niveaux de l’administration, insistant sur les
difficultés de l’administration centrale à exercer sa fonction de
pilotage et sur l’éclatement des pouvoirs au sein de l’hôpital.
S’agissant de l’administration centrale, les recommandations de la
Cour ont été entendues.
Le ministère de la santé s’est réorganisé et la DHOS dispose
désormais de l’ensemble des compétences utiles au développement de son
rôle stratégique, alors que la création du CNG a permis de la décharger de
certaines tâches de gestion.
Si l’institution, en 2006, de commissions administratives paritaires
régionales des praticiens hospitaliers a étendu les compétences des
directeurs des agences régionales de l’hospitalisation (ARH), ces
dernières ne disposent toujours que de faibles compétences directes en
matière de GRH. Dans le cadre de leur fonction de tutelle, il semble
qu’elles ne se sont que rarement intéressées à la gestion du personnel,
alors qu’elles
en avaient pourtant la faculté.
Consacrée par la loi
119
,
l’autonomie du chef d’établissement dans la
gestion du personnel a été élargie, d’une part, par l’introduction de l’état
prévisionnel des recettes et dépenses (EPRD) et, d’autre part, par
l’affirmation d’une « nouvelle gouvernance hospitalière ». La Cour a
cependant observé que le CNG, avec l’appui de la DHOS, peut décider de
la non-publication des déclarations de vacances de postes. Souvent
motivée par des objectifs pertinents de non renouvellement de personnels
dans certains établissements à restructurer, cette pratique mériterait d’être
sécurisée en modifiant les textes régissant les procédures de nomination
de ces personnels.
La Cour estime que l’institution d’agences régionales de santé
(ARS) et les évolutions législatives annoncées devraient permettre
d’étendre l’autonomie du chef d’établissement, mais aussi de rénover les
modalités d’exercice de la tutelle. Un renforcement de sa portée en
matière de GRH est attendu, notamment au moyen du diagnostic
préalable à la conclusion de contrats pluriannuels d’objectifs et de
moyens, mais aussi dans le cadre du suivi de leur exécution.
*
La rationalisation du cadre statutaire a été très largement engagée
par l’administration pour ce qui concerne la FPH, à l’exception notable,
donc, des textes régissant les personnels médicaux.
119) Article L. 6143-7 du code de la santé publique.
314
COUR DES COMPTES
L’institution d’un CNG et la réforme de certaines procédures de
gestion des personnels de direction et d’une partie des personnels
médicaux témoignent d’une volonté de dynamiser la gestion des
personnels des EPS. Les évolutions observées ne sont cependant pas
toujours à la hauteur des enjeux. Il conviendrait par exemple de faire
évoluer la « doctrine d’emploi » de la situation de recherche d’affectation,
afin qu’elle soit plus largement utilisée. Par ailleurs,
l’extension du
champ de compétences du CNG à l’ensemble des médecins mériterait
d’être mise à l’étude.
Toutefois, la question de la déconcentration de certains actes de
gestion des personnels d’encadrement de la FPH et des personnels
médicaux reste ouverte. Les marges de manoeuvre des responsables
locaux
120
à leur égard doivent encore être renforcées, ce que pourraient
permettre les évolutions législatives en préparation.
Enfin, corollaire d’une autonomie locale dont l’extension est
annoncée, la tutelle exercée par de futures ARS sur les questions de GRH
hospitalière devra être renforcée.
***
B - Les politiques de gestion des personnels des
établissements publics de santé
Si le cadre administratif et financier de la gestion du personnel des
EPS a été en partie adapté, les politiques menées en matière de gestion
des ressources humaines ont quant à elles souvent peu évolué.
1 -
L’absentéisme
La Cour demandait la mise en place d’une politique de lutte
active contre l’absentéisme injustifié.
Selon les dernières données disponibles, c’est-à-dire pour la
période 2004-2005, l’absentéisme du personnel des EPS s’est accru. Il a
augmenté, en moyenne, de 2,7 jours entre 2001 et 2005, pour atteindre en
2005, en moyenne, le niveau de 25,4 jours d’absence par personne et par
120) Directeur d’ARS pour les chefs d’établissements, chefs d’établissements pour les
personnels d’encadrement de la FPH (directeurs adjoints, directeurs des soins) et les
personnels médicaux. Cette évolution serait compatible avec la permanence d’une
gestion administrative et d’une gestion des carrières centralisée au niveau du CNG.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
315
an, toutes catégories de personnel confondues
121
dont 19,3 pour motifs
médicaux.
L’absentéisme du personnel des EPS se maintient ainsi à un niveau
sensiblement supérieur à celui constaté dans d’autres secteurs publics, par
exemple dans la fonction publique de l’Etat, où il atteignait, en 2003,
13 jours en moyenne par personne et par an, toutes catégories
confondues
122
.
Certes,
les
contraintes
des
métiers
ne
sont
pas
comparables, mais l’ampleur de l’écart semble indiquer l’existence d’un
problème spécifique d’absentéisme au sein des EPS.
Dans ce contexte, la Cour constate pourtant que le coût de ce
phénomène reste mal cerné et qu’aucune stratégie nationale de contrôle
ne semble avoir été définie.
*
Sans préjuger des actions qui peuvent être conduites dans les
établissements, il n’existe toujours pas réellement de politique de lutte
contre l’absentéisme au niveau national.
2 -
L’aménagement et la réduction du temps de travail
La Cour s’était intéressée à la réduction du temps de travail
(RTT) à l’hôpital. Elle critiquait la méconnaissance du temps de
travail médical, en raison de l’inapplication de la réglementation
relative aux tableaux de service ou de l’absence de définition des
obligations de service des praticiens hospitalo-universitaires. Elle
soulignait que les charges liées à la RTT restaient mal connues,
appelait à la diffusion des exemples de réorganisation fructueuse et
insistait sur la nécessité de prendre la mesure des charges résultant
de l’introduction d’un compte épargne temps (CET).
Les obligations de service des praticiens hospitalo-universitaires
sont restées floues, faute d’être définies par des textes. La mesure de
celles de leurs confrères praticiens hospitaliers demeure peu aisée à
apprécier, en raison d’une production encore irrégulière des tableaux de
service.
Ces tableaux sont de plus d’une fiabilité généralement très
perfectible. La Cour a cependant noté l’intention du ministère d’intervenir
plus fermement à l’avenir, avec le concours du réseau de la direction
générale des finances publiques, pour exiger plus de rigueur dans la
121) Source : DHOS.
122) Source : DGAFP. En septembre 2008, les dernières données disponibles
remontaient à l’année 2003.
316
COUR DES COMPTES
production de ces tableaux. Il s’agit en effet d’un sujet central, autour
duquel
s’articule
tout
le
fonctionnement
de
l’hôpital.
Or,
la
méconnaissance du temps de travail médical continue d’être un obstacle
aux réorganisations internes aux établissements qui auraient dû
accompagner l’introduction de la RTT.
Les effets de la RTT sur l’activité et la productivité des hôpitaux
publics sont toujours très imparfaitement mesurés. Ainsi, l’impact des
évolutions de l’organisation du temps de travail reste dans l’ensemble mal
connu. Il peut être appréhendé à partir de la situation des quelques
dizaines établissements qui ont bénéficié de chantiers d’appui de la
mission nationale d’expertise et d’audit hospitalier (MEAH) en matière
d’organisation du temps de travail. Mais faute de représentativité de cet
échantillon, les effets de la RTT sur l’activité et la productivité ne
peuvent encore être évalués de manière rigoureuse au plan national.
L’administration a été en mesure de produire une évaluation du
coût de la mise en oeuvre de la RTT à l’hôpital, de l’ordre de 3,6 Md€
123
pour la période 2002-2006. La Cour estime que cette première estimation
mérite d’être complétée, notamment dans la mesure où le taux
d’occupation des postes créés dans le cadre de la RTT continue à ne pas
être précisément cerné et où le nombre d’heures supplémentaires ou de
jours de congés, n’ayant fait l’objet ni d’une indemnisation, ni d’une
récupération, ni d’une épargne sur compte épargne temps (CET), n’a été
évalué que de manière partiellement actualisée depuis 2005.
S’agissant plus particulièrement des CET, la Cour constate que la
compensation par le fonds pour l’emploi hospitalier des jours portés sur
le compte épargne temps durant la période de mise en oeuvre de la RTT
n’a pas été complète. Seuls 50 % des jours épargnés, pour tous les
personnels et 50 % des heures supplémentaires restant dues aux
personnels relevant de la FPH, donc à l’exclusion du temps de travail
additionnel des médecins ni récupéré, ni indemnisé et qui n’aurait pas été
versé sur CET, pourront être indemnisées dans le cadre d’un protocole
d’accord signé le 15 janvier 2008. Elle relève par ailleurs que toutes les
conditions semblent réunies pour une reconstitution rapide de ce stock, à
défaut de réorganisations. Enfin, la Cour s’inquiète de l’érosion des
montants provisionnés au titre du CET, qui ont diminué de 88 M€ entre
2005 et 2006
124
. Depuis le 1
er
janvier 2008, les établissements sont en
123) Source : données DHOS, corrigées par la Cour de l’effet des mesures découlant
des décrets du 14 mai 2008 mettant en oeuvre le protocole d’accord du 15 janvier
2008.
124) Source : DHOS.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
317
effet seuls responsables des montants provisionnés
125
. Alors que
l’augmentation des versements sur les CET semble avérée, un risque
financier sérieux pourrait émerger à l’avenir.
Enfin, la Cour relève les efforts faits pour diffuser les exemples de
bonnes pratiques dans la mise en oeuvre de la RTT, à travers notamment
les travaux de la mission nationale d’expertise et d’audit hospitalier
(MEAH).
*
Attendu par la Cour, un bilan d’ensemble de la mise en oeuvre de
l’aménagement et de la réduction du temps de travail à l’hôpital public
n’est toujours pas en mesure d’être produit, sept ans après la conclusion
des premiers protocoles organisant la RTT. Or, un tel bilan est
indispensable à l’identification des difficultés de gestion et des risques
financiers liés à la RTT.,
3 -
La politique indemnitaire et salariale
La Cour appréciait sévèrement la politique salariale menée à
l’égard des personnels des EPS. Elle demandait également une
simplification des régimes indemnitaires et une réforme de plusieurs
primes ou avantages. Elle prenait acte des réformes annoncées par
l’administration,
qui
visaient
à
moderniser
l’architecture
indemnitaire des personnels des EPS.
La politique salariale relative aux personnels de la FPH s’inscrit
dans une perspective inter-fonctions publiques. Elle est donc animée par
les orientations de la « refondation indemnitaire » décidée par le
gouvernement
126
.
En revanche, la politique salariale conduite à l’égard des
personnels médicaux reste dépourvue de lignes directrices. Motivée le
plus souvent par des objectifs conjoncturels, elle gagnerait à être plus
125) Jusqu’à cette date, pour tenir compte de la progressivité des créations d’emplois
qui ont accompagné la RTT, mais aussi pour financer les mesures dérogatoires
d’indemnisation des jours épargnés sur CET ou le paiement d’heures supplémentaires
ni rémunérées, ni indemnisées et restant dues aux personnels ou encore financer le
remplacement de personnels utilisant leurs droits à congés épargnés, des crédits du
fonds pour l’emploi hospitalier ont été répartis entre les établissements et sont venus
abonder les provisions qui avaient pu être constituées par les établissements.
126) Cette politique s’est notamment traduite dans les accords salariaux du 21 février
2008 ayant arrêté les principes qui présideront aux négociations salariales de la
fonction publique pour la période 2009-2011.
318
COUR DES COMPTES
formalisée, mieux documentée et recentrée sur des enjeux communs à
l’ensemble des personnels des EPS
127
.
La participation croissante de la fédération hospitalière de France
(FHF) au dialogue social relatif aux rémunérations des personnels des
EPS pourrait favoriser la constitution d’une politique salariale plus
structurée. A terme, il serait donc souhaitable qu’elle s’implique
également dans les négociations relatives aux personnels médicaux. La
Cour relève toutefois que cette évolution pourrait soulever des difficultés
juridiques, en raison du statut de la FHF
128
.
L’administration a engagé des réformes, en vue d’encadrer l’octroi
de certains avantages
129
, ou pour faire coïncider le mode de financement
de l’hôpital public, désormais fonction de l’activité, et le mode de
rémunération de ses personnels. Mais la plus grande partie d’entre eux ne
bénéficient toujours pas à ce jour de dispositifs de rémunérations assis sur
des objectifs d’activité individualisés et liés à des mécanismes
d’évaluation.
Le succès des projets en cours
130
dépendra en effet en grande partie
de la diffusion d’une culture d’évaluation dans les EPS. Son
développement, stimulé par les démarches de certification conduites par
la Haute autorité de santé, reste toutefois entravé par l’absence des textes
réglementaires qui auraient pourtant dû l’encadrer
131
.
S’agissant des personnels médicaux, l’architecture de leurs
rémunérations repose encore sur des bases insuffisamment objectivées.
Elle reste complexe et mal connue de l’administration hospitalière.
Principale réforme, l’introduction d’une « part complémentaire variable
de rémunération
132
» est en-deçà des attentes de la Cour. Elle ne permet
en effet pas nécessairement une modulation individuelle des indemnités et
ne prend pas en compte l’exercice de responsabilités administratives ou
127) Développement d’une rémunération variable, assise sur des objectifs d’équipe ou
individualisés, prise en compte de l’activité ou de la productivité dans l’évolution des
rémunérations, en lien avec le développement de mécanismes d’évaluation.
128) La FHF est une association de type loi 1901. Formellement, elle ne représente
que les établissements adhérents : ce n’est pas une fédération d’employeurs.
129) Attribution de logements de fonction ou d’indemnités compensatrices.
130) Développement de l’intéressement collectif, institution d’une prime de fonctions
et de résultats, substitution de l’évaluation à la notation.
131) Révision de l’arrêté du 24 mars 1967 relatif à la prime de service, prise d’un
décret relatif à l’entretien professionnel prévu par la loi n° 2007-148 du 2 février
2007.
132) Introduite par un décret n° 2006-1221 du 5 octobre 2006 et un arrêté du 28 mars
2007.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
319
institutionnelles. De plus, à ce jour, elle ne concerne toujours que les
seuls chirurgiens.
*
La mise en oeuvre des réformes annoncées en 2006 a été très
progressive. Les conditions d’une modernisation de la politique
indemnitaire à l’égard des personnels relevant de la FPH ne semblent
toujours pas réunies, notamment en raison de la diffusion encore modeste
d’une culture d’évaluation et de l’absence d’une réforme de la prime de
service. En ce qui concerne le personnel médical, dans un contexte où la
refonte prochaine de l’architecture de leur rémunération est annoncée, la
Cour ne peut que constater, à nouveau, l’opacité s’attachant à la mesure
de leurs revenus.
Dans l’ensemble, la politique indemnitaire menée à l’égard des
personnels de l’hôpital public a peu évolué. Elle demeure insuffisamment
liée à la prise en considération de leur efficience ou de leur activité.
Compte tenu des volumes financiers en jeu, des évolutions plus rapides
sont attendues, dans le sens d’une politique mieux liée à des objectifs
individuels ou collectifs de performance, eux-mêmes plus formalisés.
4 -
La promotion professionnelle
La Cour avait souhaité un recours accru aux politiques de
promotion professionnelle, afin de résorber les difficultés de
recrutement de certaines professions.
Sept ans après son introduction par la loi n° 2002-73 du 17 janvier
2002 de modernisation sociale, la valorisation des acquis de l’expérience
professionnelle (VAE) ne permet d’accéder qu’à trois diplômes du
secteur sanitaire (aide-soignant, auxiliaire de puériculture, préparateur en
pharmacie hospitalière).
Si le ministère a su adapter son organisation pour faire face à
l’afflux des demandes de certification par VAE des diplômes concernés et
ainsi améliorer la gestion de ces procédures, il est certain que le périmètre
des diplômes ouverts à la VAE reste encore bien trop étroit.
Par ailleurs, des obstacles juridiques sont toujours avancés pour
limiter le recours aux voies classiques de promotion professionnelle
(concours interne, examen professionnel, promotion au choix). Elles ne
sont à
ce jour utilisées
que pour
les
personnels des
filières
« administrative » et « ouvrière et technique », qui ne connaissent pas de
difficultés de recrutement particulières, contrairement à nombre de
métiers des filières « soignante » ou « médico-technique ».
*
320
COUR DES COMPTES
La Cour souhaite vivement que la VAE soit étendue au plus vite
aux professions qui connaissent les difficultés de recrutement les plus
importantes, notamment à la profession infirmière, dans des conditions
permettant une large utilisation de ce dispositif. Elle considère qu’il est
indispensable d’étudier les moyens de dépasser les difficultés juridiques
qui s’opposeraient à son déploiement, ainsi qu’à un plus large recours aux
instruments classiques de promotion professionnelle.
Les difficultés liées à des dispositions du droit communautaire
,
réelles à ce jour, ne devraient pourtant pas être considérées comme
insurmontables à l’avenir, dans un contexte où le Parlement européen et
le Conseil se sont récemment prononcés pour valoriser non plus les
durées de formation, mais surtout les acquis des apprentissages dans le
« cadre européen de certifications », qui préside au développement de la
VAE
133
dans le cadre de la stratégie dite « de Lisbonne ».
5 -
La productivité
La
Cour
relevait
que
les
écarts
de
productivité
entre
établissements étaient si marqués qu’ils méritaient d’être examinés
rigoureusement.
La mise au point d’instruments de mesure et d’analyse de la
productivité, permettant aux établissements de se situer les uns par
rapport aux autres, est en passe d’atteindre un stade opérationnel.
L’examen de ces données par la tutelle doit donc désormais encore
acquérir un caractère plus systématique.
*
En matière de productivité, l’enjeu principal reste de mieux tirer
parti des analyses comparées qui pourraient être menées entre
établissements de dimensions similaires, pour travailler à l’amélioration
de l’efficience des organisations, à partir des meilleures pratiques
observées.
Par ailleurs, les réorganisations qui paraissent possibles à
l’occasion du départ en retraite de plus de 220 000 agents de la FPH entre
2008 et 2015 nécessiteront de mieux intégrer les enjeux de productivité
dans les politiques de GRH. Le projet de développer coopérations et
délégations de tâches entre professionnels de santé à l’hôpital devrait y
contribuer.
133) Recommandation du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008
établissant le cadre européen de certifications pour l’éducation et la formation tout au
long de la vie.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
321
Au-delà de cette réforme, prévue par les travaux législatifs en
cours, ces réorganisations pourraient donnent lieu à des gains substantiels
de productivité, permettant de ne pas remplacer la totalité des personnels
partis en retraite. L’enjeu est important : à titre purement indicatif, il a été
calculé que le non-remplacement d’un fonctionnaire sur trois parmi ceux
partant en retraite dans les cinq prochaines années, c'est-à-dire d’une
proportion relativement modeste des effectifs totaux des hôpitaux publics,
de l’ordre de 7 %, pourrait générer près de 300 M€ d’économies par an
134
sur la période 2008-2012, soit une diminution récurrente d’1,5 Md€ de la
base de masse salariale des personnels des EPS, à l’issue de la période
considérée.
***
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Alors que l’hôpital public est une entreprise de main d’oeuvre, dont
les deux tiers des coûts sont des charges de personnel, il est paradoxal de
relever que les politiques de modernisation de l’hôpital public les plus
récentes (plans hôpital 2007 et hôpital 2012) se sont essentiellement
consacrées aux équipements et à l’investissement.
La Cour considère donc que la gestion des ressources humaines
doit faire l’objet d’une attention encore plus soutenue de la part des
autorités de tutelle, notamment dans le contexte de la mise en oeuvre de la
future loi hôpital, patients, santé, territoires.
Aussi, la Cour continuera à suivre avec attention les évolutions
des politiques de GRH hospitalière publique, ainsi que la modernisation
du cadre administratif et financier de la gestion du personnel des EPS. La
Cour attend que les réformes en cours sur l’organisation et la gestion des
hôpitaux et sur le contrôle de l’Etat, avec la création d’agences
régionales de santé, accordent à la GRH une place essentielle. A défaut,
les efforts nécessaires en matière d’équipement et d’investissement
programmés par les plans « hôpital 2007 » et « hôpital 2012 » ne
suffiront pas à moderniser et optimiser les capacités hospitalières.
134) Source : direction du budget. L’estimation ne concerne que les personnels
relevant de la FPH, c’est-à-dire qu’elle n’inclut pas les personnels médicaux.
322
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DE LA MINISTRE DE LA SANTÉ, DE LA JEUNESSE, DES
SPORTS ET DE LA VIE ASSOCIATIVE
L’insertion de la Cour relatif aux « personnels des établissements
publics de santé » appelle de ma part les observations suivantes.
Le ministère de la santé se félicite des progrès constatés par la Cour
en ce qui concerne les actions de modernisation des procédures de gestion,
de simplification statutaire et de réorganisation de l’administration centrale.
Ces chantiers ambitieux engagés depuis 2006 se poursuivent
aujourd’hui et le ministère de la santé entend souligner les travaux en cours
ou à venir qui pour certains répondront aux points de blocage mis en
évidence par la Cour.
Les outils de gestion et le cadre administratif
Compte tenu du principe d’autonomie des établissements de santé
qu’ils soient publics ou privés, le ministère de la santé doit mettre en place
un dispositif de grande ampleur pour avoir une connaissance précise des
facteurs d’évolution de l’emploi et de la masse salariale.
La Cour souligne qu’il existe actuellement six instruments différents
dont l’objet est d’étudier la situation des personnels hospitaliers mais il
convient de rappeler qu’ils ont des finalités et sont issus d’enquêtes diverses,
les unes relatives aux bilans sociaux des établissements de santé, les autres
sur les effectifs ou sur les rémunérations.
La fiabilité et la rationalisation de la remontée d’information sur
le
thématique des rémunérations dans le champ des établissements de santé
publics et privés (personnel médical et non médical) est un objectif du
ministère de la santé.
De manière coordonnée entre la DHOS, la DREES, le CNG, l’ATIH,
et la DGAFP, les actions suivantes doivent être mises en oeuvre dans le cadre
d’un programme pluriannuel.
•
Dès 2009, sera mis en place un tableau de bord de la masse
salariale des établissements de santé s’appuyant sur les données
comptables : le suivi des rémunérations et des ETP par catégorie de
personnel dans l’EPRD initial, les états quadrimestriels et le compte
financier.
•
L’enquête « coûts et carrières » évoluera vers les déclarations
annuelles de données sociales (DADS), avec un recueil au niveau de
l’individu (résultat fin 2009).
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
323
•
Au travers d’établissements cibles, des remontées d’information
(DADS, coûts et carrières, SPE) seront expertisées et comparées. En
2011, le Ministère de santé souhaite pouvoir exploiter les données
issues de la DADSU ;
•
Enfin, l’opérateur national de paie (ONP) recueille actuellement les
besoins pour la mise en place d’un système d’information
décisionnel (SID ONP) alimenté principalement pour les trois
fonctions publiques par les données annuelles anonymisées et
retraitées fournies par les SIASP (système d’information sur les
agents publics de l’INSEE). Cet outil dont l’exploitation est prévue
pour le premier trimestre 2011 permettra de couvrir des
thématiques telles la gestion opérationnelle RH, la GPEEC,
l’emploi et la masse salariale, et le suivi d’activité, et ainsi avoir des
éléments de comparaisons pour les trois fonctions publiques.
Ainsi, tout en ayant la volonté de pouvoir expertiser la cohérence des
données recueillies, le ministère de la santé s’engage dans une démarche de
rationalisation de ses outils en s’inscrivant dans le cadre d’une démarche
inter fonction publique.
Le ministère de la santé entend poursuivre ses efforts dans le domaine
de la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences. En
effet, il est urgent que les principes de GPEEC se traduisent par une inflexion
des pratiques de gestion, qui peut apparaître encore trop limitée aujourd’hui.
C’est pourquoi, dès 2009, il sera demandé aux directeurs d’ARH d’avoir une
démarche d’incitation forte au travers de l’insertion d’un volet GPEEC dans
les contrats d’objectifs et de moyens de tous les établissements.
Concernant la suggestion de la Cour d’étendre la compétence du
CNG à l’ensemble des médecins, le ministre de la santé indique que cette
extension peut être envisagée pour les personnels enseignants et hospitaliers
qui relèvent d’une gestion, qui peut apparaître encore trop limitée
aujourd’hui. C’est pourquoi, dès 2009, il sera demandé aux directeurs
d’ARH d’avoir une démarche d’incitation forte au travers de l’insertion d’un
volet GPEEC dans les contrats d’objectifs et de moyens de tous les
établissements.
Concernant la suggestion de la Cour d’étendre la compétence du
CNG à l’ensemble des médecins, le ministère de la santé indique que cette
extension peut être envisagée pour les personnels enseignants et hospitaliers
qui relèvent d’une gestion nationale assurée conjointement par les ministères
en charge de l’enseignement supérieur et de la santé. En revanche, la
centralisation de la gestion des praticiens contractuels actuellement recrutés
et gérés par les établissements publics de santé ne paraît pas présenter
d’intérêt évident et n’est donc pas envisagée.
324
COUR DES COMPTES
Il paraît nécessaire de pondérer l’appréciation de la Cour concernant
la situation de recherche d’affectation. En effet, à l’époque où le rapport a
été élaboré, le CNG n’était en charge de ses missions, et notamment de la
procédure de recherche d’affectation, que depuis à peine neuf mois. Depuis
lors le nombre de personnels placés en recherche d’affectation a connu une
augmentation très conséquente. En effet, il est à ce jour de 20 personnes (6
praticiens et 14 personnels de direction) et il devrait passer à une
quarantaine d’ici la fin de l’année après consultation des instances
consultatives compétentes pour ces différents corps. Par ailleurs, si l’effectif
cible a bien été évalué à 350 personnes, il a également été prévu qu’il ne
serait atteint qu’au terme d’une montée en charge sur trois ans (fin 2010).
En outre, il ne faudrait pas privilégier l’instrument que constitue la
situation de recherche d’affectation au détriment de son objectif qui consiste
à favoriser la mobilité interne et externe des professionnels concernés. Dans
cette perspective, le CNG a pris en charge à ce jour l’accompagnement
professionnel, hors recherche d’affectation, de 70 personnes (41 praticiens et
29 personnels de direction). Ce dispositif plus souple et moins onéreux peut
s’avérer plus approprié que celui de la recherche d’affectation pour apporter
une solution à une majorité de situations professionnelles.
Enfin, il convient de rappeler que si les placements en recherche
d’affectation sont décidés par le directeur général du CNG, après avis des
commissions administratives paritaires nationales compétentes pour
les
deux corps de direction et, s’agissant des praticiens hospitaliers, des avis de
la commission médicale d’établissement, du conseil exécutif ainsi
que de la
commission statutaire nationale, en revanche, le CNG n’a pas l’initiative de
ces procédures puisqu’il n’est saisi qu’à la demande des intéressés, de leurs
supérieurs hiérarchiques ou des autorités qui les contrôlent. A cet égard, les
110 personnes dont le CNG aura pris en charge l’accompagnement
professionnel d’ici la fin de l’année 2008 (dont 40 environ en recherche
d’affectation) représentent l’ensemble des demandes qui lui ont été adressées
en ce sens.
Les politiques de gestion des personnels des établissements de santé
1) Le ministère de la santé souhaite préciser les causes de l’évolution
de l’absentéisme depuis 2001.
Le nombre de jours d’absence pour motifs médicaux s’élève en 2005 à
19,3 jours d’absence par an et par agent, en augmentation de 2,7 jours par
rapport à la période 2001-2005. Il s’explique essentiellement par
l’augmentation des absences pour cause de maternité, paternité ou adoption
qui représentent 4 jours par agent par an.
LES PERSONNELS DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ
325
Les personnels hospitaliers sont à 79,8 % des femmes.
Les congés pour maternité ou paternité occupent un poids croissant
dans les absences pour motif médical : de 17,7 % en 2001 à 21,2 % en 2005
et 21,7 % en 2006.
Hormis les absences pour maternité, paternité et adoption que l’on
peut considérer comme inévitables, les absences pour motifs médicaux
s’élèvent à 15,3 jours.
Enfin, le poids des absences pour maladies professionnelles a doublé
en six ans avec, en 2006, 2,7 % des absences liées à des maladies
professionnelles ou imputables ou service, contre 2,6 % en 2005 et 2,1 % en
2004. Une amélioration de la prise en compte de ces affections et de leurs
causes est en cours.
2) La Cour estime que des obstacles juridiques sont toujours avancés
pour limiter le recours aux voies classiques de promotion professionnelle,
notamment pour les filières soignante ou médico-technique.
Le ministère de la santé entend rappeler la création du fonds
mutualisé des études promotionnelles (FMEP) rendu obligatoire pour les
établissements publics de santé par l’ordonnance 2005-406 du 2 mai 2005
(article 16 II).
Représentant
pour
les
établissements
publics
de
santé
une
contribution de 0,2 % de leur masse salariale en 2007, portée à 0,4 % en
2008 et 0,6 % en 2009, ce dispositif a permis en 2007 le financement de
1 800 études promotionnelles en 2007 et près de 2 900 (octobre 2008).
Il faut en outre rappeler que depuis 2000, les aides soignants ont une
voie d’accès réservée au sein des instituts de formation en soins infirmiers
pour 15 % des places ouvertes (ce pourcentage a été porté à 20 % en 2003).
Le ministère de la santé entend rappeler que la question du
développement de la VAE pour les professions réglementées se pose avec
acuité. En effet, il existe une difficulté en termes de compatibilité du dispositif
VAE existant en France depuis 2002 et des directives sectorielles anciennes
(1977) toujours en vigueur (même dans leur version 2005) dans leurs grands
principes pour ce qui concerne l’accès à certaines professions réglementées.
Ces dernières fondent exclusivement l’accès au diplôme sur des temps
de formation et ce dispositif ne fait aucune place à la validation des acquis
de l’expérience. Ainsi, le diplôme d’Etat infirmier permet l’exercice d’une
profession réglementée au sens de la directive 2005-36, relative à la
reconnaissance des qualifications professionnelles.
Le principe de la VAE se trouve donc limité par le fait qu’une
expérience acquise dans l’exercice d’actes effectués illégalement ne peut être
prise en compte. Ainsi, même dans le cas où cette expérience serait
intervenue sous une couverture légale (par exemple dans le cas de médecins
326
COUR DES COMPTES
autorisés à exercer dans le champ infirmier), cette validation rencontre
l’obstacle lié à la directive sectorielle européenne citée ci-dessus qui ne
reconnaît l’accès au diplôme infirmier que par la seule voie de la formation.
Le ministère de la santé a donc souhaité agir par d’autres moyens (du
type dispense de scolarité en utilisant des passerelles entre diplômes) axés
sur des temps de formation et non des temps d’exercice.
En conclusion, le ministère de la santé, de la jeunesse, des sports et de
la vie associative poursuit son chantier de modernisation des ressources
humaines dans les établissements publics de santé en veillant à prendre en
compte la plupart des critiques formulées par la Cour des Comptes. Ainsi, à
titre d’exemple, le projet de loi « Hôpital, patients, santé, territoires » qui a
été présenté lors du Conseil des ministres du 22 octobre 2008, propose la
prise en charge des congés spéciaux par le centre national de gestion, et
l’extension de la situation de recherche d’affectation pour en faire un outil de
gestion des ressources humaines des personnels de direction. Des mesures
sont également prises pour tenir compte des limites du dispositif indemnitaire
de part complémentaire de rémunération qui ne permet pas de valoriser
l’atteinte d’objectifs individuels et collectifs de performance pour l’ensemble
des praticiens. Ainsi, le projet de loi prévoit de mieux prendre en compte
l’activité et les responsabilités institutionnelles dans la rémunération des
praticiens. La création d’un nouveau type de contrat (dont pourront
bénéficier les praticiens hospitaliers titulaires placés en détachement) en est
une des déclinaisons.
RÉPONSE DU MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET
DE LA FONCTION PUBLIQUE
Je partage l’essentiel des recommandations de la Cour en faveur d’un
renforcement des politiques de gestion des personnels de santé, dans un
contexte de responsabilité accrue des chefs d’établissements. Je partage
également, comme la direction du budget vous l’a fait connaître dans sa
réponse à l’enquête de suite du 26 août 2008, les observations formulées par
la Cour s’agissant du manque de statistiques actualisées et centralisées
nécessaires à un véritable pilotage de la masse salariale, une meilleure
connaissance du personnel médical et de son évolution, et au renforcement
de l’individualisation des politiques d’évaluation des personnels.
En ce qui concerne plus particulièrement l’aménagement et la
réduction du temps de travail, je souscris aux observations de la Cour
tendant à regretter la méconnaissance du temps de travail des personnels
médicaux et la nécessité de renforcer le suivi des tableaux de services au sein
des établissements de santé.