LE MUSÉE RODIN
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Le musée Rodin
A l’issue du contrôle du musée Rodin,
effectué en 2007, la Cour a
adressé un référé au ministre de la culture et au ministre chargé du
budget appelant son attention sur la détérioration de la situation
financière de l’établissement, sur les responsabilités incombant à l’Etat
en matière d’entretien des immeubles au titre de la loi du 22 décembre
1916 portant acceptation des donations consenties par le sculpteur et sur
les modalités selon lesquelles le musée avait été assujetti à l’impôt sur les
bénéfices.
Alors que depuis l’origine, le produit des entrées et des ventes de
bronzes avait permis au musée Rodin de mener à bien sa mission sans
aucune subvention de l’Etat, sa situation financière s’est fortement
dégradée depuis 1999. Le déficit d’exploitation n’a cessé de croître pour
atteindre 3,6 M€ en 2007 et les réserves ont diminué de plus de moitié
entre 1999 et 2007 (de 58 à 21,4 M€). La Cour notait qu’à contexte
inchangé, le redressement de la situation financière de l’établissement
paraissait exclu.
La vétusté de l’hôtel Biron et les contraintes inhérentes
à la sécurité des immeubles accueillant du public qui imposent une
limitation du nombre des visiteurs journaliers, ne permettent pas
d’escompter une augmentation très significative du produit des droits
d’entrée. Quant aux ventes de bronzes, les démarches récemment
engagées pour recenser les exemplaires des oeuvres de Rodin déjà éditées
et déterminer les droits d’édition qui subsistent montrent que les
perspectives de ventes concernent, plus que par le passé, des petits
« sujets » et que les ventes à venir seront, vraisemblablement, moins
rémunératrices. Enfin, l’établissement acquittait un impôt sur les
bénéfices (supérieur à 12 M€ entre 1999 et 2007) bien qu’il soit en
déficit.
Les observations portées dans le référé ont reçu une suite
favorable.
* * *
La Cour notait que l’établissement avait été assujetti en 1998 à
l’impôt sur les bénéfices en retenant comme assiette les seules
activités commerciales – c’est-à-dire pour l’essentiel les ventes de
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COUR DES COMPTES
bronzes et non pas le résultat global de l’ensemble de ses activités qui
tient compte du déficit des activités non lucratives. Elle notait que
cette situation paradoxale méritait d’être réexaminée
.
Le ministre du budget a reconnu le bien fondé de l’observation de
la Cour et a indiqué que ses services avaient accepté de régulariser la
situation au titre des exercices 2005 et 2006 à ce titre un somme de
1,9 M€ sera restituée au musée Rodin en 2009.
La Cour notait que la situation de l’ensemble immobilier était
préoccupante et posait la question du respect par l’Etat des
engagements qu’il a pris en contrepartie des donations que Rodin lui
a consenties d’entretenir et de réparer les bâtiments et le jardin.
En effet, les actes de donation annexés à la loi de 1916
stipulent : « Tous les travaux de mise en état des bâtiments
concédés à M. Rodin, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur, devront
être effectués par les soins et aux frais de l’Etat. Toutes les
réparations à faire dans l’avenir, qu’elles soient par leur nature
grosses réparations ou réparations d’entretien resteront également à
la charge de l’Etat… Le jardin dépendant de l’hôtel Biron sera
entretenu aux frais de l’Etat ».
Cependant, le décret du 2 février 1993 relatif au musée
Rodin indique dans son article 1 : « le Musée Rodin est un
établissement public national à caractère administratif… Il est
constitué à Paris, à l’hôtel Biron, dans la chapelle et le jardin y
attenant, ainsi que dans son annexe à Meudon », et, dans son
article 2 : « les immeubles mentionnés à l’article 1 sont remis en
dotation à l’établissement ; l’établissement public en assume la
charge ».
Or, la remise au Musée Rodin, à titre de dotation, des biens
immobiliers n’emportait aucun avantage pour l’établissement par
rapport à la situation antérieure : elle ne faisait que formaliser la
situation qui prévalait depuis la loi de 1916, en confirmant la mise
à disposition gratuite du musée des biens immobiliers initialement
concédés à Rodin et dont l’Etat n’a pas cessé d’être propriétaire.
En revanche, le corollaire de la remise en dotation pénalisait
lourdement le musée puis la charge des immeubles lui était ainsi
transférée.
LE MUSÉE RODIN
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Le ministre du budget a précisé que la loi de finances pour 2009
prévoit l’attribution d’une substitution d’investissement de 3,2 M€ au
musée Rodin, destinée à financer les travaux les plus urgents à
l’hôtel Biron.
Cependant, les efforts financiers de l’Etat ne dispenseront pas les
responsables du musée de s’attacher à contenir les charges de
l’établissement et à mieux valoriser les bâtiments et les collections,
notamment en améliorant les conditions d’accueil du public et en
optimisant les tarifs d’entrée, en développant le recours au mécénat et en
recherchant constamment des acquéreurs potentiels de bronzes.
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COUR DES COMPTES
RÉPONSE DE LA MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA
COMMUNICATION
Je souhaite apporter quelques précisions à l’insertion de la Cour des
comptes sur « le musée Rodin ».
Dès 2007, la direction de la législation fiscale a autorisé le musée à
soumettre à l’impôt sur les sociétés l’ensemble de ses activités, ce qui lui
permet de ne plus acquitter cet impôt tant que son résultat ne fera pas
apparaître de bénéfice sur la totalité de son exercice. La direction de la
législation fiscale a en outre récemment indiqué à l’établissement qu’un
remboursement d’impôt sur les sociétés au titre des années 2005 et 2006
serait effectué en 2009, pour un montant de 1,9 M€.
Concernant la situation de l’ensemble immobilier du musée et
l’engagement de l’Etat, tirant les mêmes conclusions que la Cour des
comptes sur la dégradation rapide des réserves financières du musée, le
ministère de la Culture et de la Communication accordera au musée une
subvention
d’investissement
de
3,2
M€
en
autorisations
d’enga-
gement = Crédits de paiement sur la période de 2009 – 2011, correspondant
au coût des « travaux prioritaires » à mener sur l’hôtel Biron.
Partageant les observations de la Cour des comptes sur l’évolution
des charges du musée, mes services s’attachent, en élaborant le premier
contrat de performance de l’établissement, à mettre en place les moyens et
outils de pilotage pour maîtriser les charges de l’établissement.
RÉPONSE DU MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET
DE LA FONCTION PUBLIQUE
L’insertion de la Cour des comptes sur « le musée Rodin » appelle de
ma part les observations suivantes.
La Cour prend acte de la réponse de la direction de la législation
fiscale (DLF) à l’établissement en date du 19 mars 2008, selon laquelle
l’établissement, à compter de l’exercice 2007, peut renoncer pour
l’application de l’impôt sur les sociétés à la sectorisation de ses activités
lucratives dès lors que son résultat est globalement déficitaire.
Je tiens à porter à votre connaissance que l’établissement a par
ailleurs saisi la DLF, afin d’obtenir une régularisation sur les exercices 2006
et 2005. Par courriers en date du 11 septembre 2008 et du 3 octobre 2008, la
DLF lui a fait part de son accord. Le musée Rodin percevra donc, en 2009,
1,9 M€ correspondant à la régularisation de l’impôt sur les bénéfices réglé
au titre des exercices 2005 et 2006.
LE MUSÉE RODIN
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Concernant la question du financement par l’Etat des investissements
du musée, le projet d’insertion au prochain rapport public annuel de la Cour
mentionne la réponse de la ministre de la Culture et de la communication
datée du 25 juillet 2008, précisant qu’elle a « appelé l’attention du ministre
du budget sur la nécessité de financer les travaux en cause ».
J’indique à la Cour que le projet de loi de finances pour 2009 prévoit
l’attribution d’une subvention d’investissement de 3,2M€ au musée Rodin
destinée à financer les travaux les plus urgents sur l’hôtel Biron.
Ces travaux, programmés sur deux ans, permettront d’accueillir les
visiteurs dans de meilleures conditions de confort et de sécurité.
Au-delà de ces travaux d’urgence, une éventuelle subvention de l’Etat
devra, en tout état de cause, être appréciée au regard des autres priorités de
la mission culture dans les années à venir, liées au développement des
grands projets déjà lancés.
Par ailleurs, la subvention de l’Etat ne dispense pas l’établissement
de mener une recherche active de financements propres, par exemple de
mécénat, afin de financer les éventuels travaux complémentaires qui
pourraient être conduits.
Enfin, je partage la conclusion de la Cour incitant l’établissement à
une plus grande responsabilisation, tant du point de vue de la maîtrise de ses
charges que du développement de ses ressources propres.
Cette ligne de conduite commence d’ores et déjà à porter ses fruits.
Les ventes de bronzes apporteront vraisemblablement au musée des recettes
de 5,4 M€ en 2008 et 6,5 M€ en 2009. Ainsi, l’établissement devrait
présenter, en exécution 2008 et en 2009, un résultat d’exploitation positif
s’établissant respectivement à 1,7 M€ et 1 m€ ; Je peux qu’encourager ces
efforts.