Chapitre II
Des dérives continues dans l’exécution
de l’Ondam, un pilotage
efficace à retrouver
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
_____________________ PRÉSENTATION_____________________
Les dépenses de
l’objectif national des dépenses de l’assurance
maladie (Ondam) se sont établies à 256,0
Md€ en 2024, hors dépenses
résiduelles liées à la crise covid
69
. Elles ont progressé de 3,5 % par rapport
à 2023, évolution supérieure de plus d’un
point à la progression annuelle
de l’Ondam avant la crise sanitaire (+
2,3 % de 2010 à 2019).
Les dépenses hors c
ovid de l’Ondam se caractérisent, à nouveau en
2024, par une insuffisante maîtrise de leur exécution. Pour la quatrième
année consécutive, l’objectif initial fixé en loi de financement de la sécurité
sociale est dépassé, à hauteur cette fois-ci de 1,3
Md€ hors
covid (+ 0,5 %).
Contrairement aux années précédentes, l’inflation n’est pas venue peser sur
l’exécution, l’inflation constatée a
yant même été plus faible que la prévision
(1,8 % contre 2,5 %) et des marges étant disponibles. À
cela s’ajoute une
importante aggravation du déficit des hôpitaux publics, estimé à 3
Md€ en
2024, malgré une reprise de leur activité, ainsi que des établissements et
services médico-sociaux, qui était de 2 Md
€
en 2023.
Cette situation est symptomatique de l’enjeu
de mobilisation des
acteurs du système de santé et des pouvoirs publics afin de redonner à
l’Ondam son rôle d’in
strument de pilotage pluriannuel des dépenses du
système de santé. Un tel pilotage apparaît en effet nécessaire pour contrôler
le rythme de progression des dépenses de santé, qui
s’accroît
avec le
vieillissement de la population, le développement des maladies chroniques et
l’introduction de plus en plus rapide de médicaments innovants.
Cette
situation im
pose une amélioration permanente de l’efficacité des dépenses
70
.
Le présent chapitre caractérise l’évolution de l’Ondam en 2024 en
analysant les écarts de dépenses par rapport à sa construction et la gestion
de son exécution (I). Il examine les problématiques distinctes de chacun
des sous-objectifs, qui appellent à resserrer la maîtrise des dépenses (II).
69
256,4
Md€ avec dépenses covid, en pr
ogression de 3,3 %. Les données provisoires
des comptes de l’exercice seront consolidées en mars
2026.
70
Cour des comptes,
L’Objectif national des dépenses d’assurance maladie
(Ondam) :
maîtriser sa progression en veillant à la qualité des soins
, avril 2025.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
91
L’Ondam, un pilotage de
s trois branches : maladie, accidents du
travail et maladies professionnelles, et autonomie de la sécurité sociale
Chaque année, la loi de financement de la sécurité sociale fixe le montant
de l’objectif national de dépenses d’assurance
-maladie (Ondam)
pour l’année à
venir et un taux d’évolution pour les trois années suivantes.
L’Ondam comprend 80
% des dépenses de la branche maladie (honoraires
médicaux et salaires des personnels hospitaliers, prise en charge de soins et des
produits de santé, dotations aux établissements de santé, indemnités journalières
maladie), 80 % de celles de la branche autonomie (dotations aux établissements
et services médico-sociaux pour personnes âgées et pour personnes en situation
de handicap) et 36 % de celles de la branche accidents du travail et maladies
professionnelles. Il n’inclut pas les indemnités journalières maternité et paternité,
les pensions d’invalidité, les rentes, ni les concours aux départements.
L’Ondam constitue un objectif à ne pas dépasser et non un plafo
nd au sens
strict. La supervision de son exécution est confiée à un comité d’alerte
71
qui rend
des avis publics, transmis au Parlement au 15 avril, au 1
er
juin et au 15 octobre. En
cas de « risque sérieux
» de dépassement de l’Ondam en cours d’année, le com
ité
d’alerte adresse une notification au Parlement, au Gouvernement et aux caisses
nationales d’assurance maladie pour que des mesures de redressement soient
adoptées. Le seuil d’alerte du dépassement a été fixé, par décret, à 0,5
% du
montant arrêté pour
l’Ondam.
L’Ondam est en comptabilité d’exercice. Le constat définitif des dépenses
est effectué en année n+2.
Graphique n° 4 :
dépenses de l’Ondam hors
covid par sous-objectifs
en 2024 (en %)
Lecture
: l’Ondam comprend six sous
-
objectifs correspondant aux secteurs de l’
offre de soins.
Les dépenses de produits de santé (médicaments et dispositifs médicaux) sont incluses dans les
enveloppes des soins de ville et de dotations aux établissements de santé publics et privés.
Source
: comptes de l’exercice 2024, mise en forme C
our des comptes
71
Le comité est composé du secrétaire général de la commission des comptes de la
sécurité sociale
, du directeur général de l’I
nsee
et d’une personnalité qualifié
e.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
92
I -
En 2024, une occasion manquée de retour
à une maîtrise de
l’exécution de l’Ondam
Avant la crise sanitaire, de 2011 à 2019, l’Ondam fixé en loi de
financement de la sécurité sociale (LFSS) était systématiquement respecté
en exécution. Par contraste, pour la quatrième année consécutive, l’Ondam
hors covid
est exécuté en dépassement en l’
absence de mesures de régulation
suffisamment vigoureuses. Il en résulte une incertitude sur la capacité à tenir
l’Ondam en 2025 et la trajectoire d’ici à 2028 inscrite en LFSS pour 2025.
A -
Malgré un contexte favorable,
un nouveau dépassement
de l’Ondam en 2
024
L’exécution de l’Ondam n’est toujours pas revenue sous contrôle
comme avant la crise sanitaire. Le constat des dépenses 2023 a été révisé
nettement et tardivement. En 2024, un nouveau dépassement a été constaté
malgré des conditions normales d’exécutio
n.
Tableau n° 18 :
évolution de l’Ondam en 2024 (en Md€)
LFSS
Constat mars 2025
Écart
Écart en %
Ondam
254,9
256,4
1,5
0,6 %
Ondam hors covid
254,7
256,0
1,3
0,5 %
Source : Cour des comptes à partir des données de la direction de la sécurité sociale
1 -
Une révision tardive à la hausse du dépassement au titre de 2023
Entre la LFSS pour 2024 et le constat définitif de mars 2025, le
montant des dépenses 2023 de l’Ondam hors
covid a été révisé de 0,5
Md€
72
.
Une telle révision tardive des dépenses est atypique par rapport aux années
précédentes.
En conséquence, le dépassement en 2023 s’est finalement élevé
à 1,7 % (+ 4,1
Md€). En 2022, il était déjà de 1,5
% (+ 3,5
Md€).
L
e surcroît de dépenses 2023 apparu tardivement n’a pas été intégré
en construction de l’Ondam de 2024 (
effet de base négatif) et aucune mesure
de régulation n’a neutralisé le ressaut de dépenses induit en 2024. Il est donc
nécessaire de mieux fiabiliser les dépenses de l’Ondam, dans les meilleurs
délais possibles afin d’en limiter la répercussion sur l’anné
e suivante.
72
+ 0,2
M€ de provisions sur créances, +
0,1
M€ de produits de santé, +
0,1
M€ sur la par
t
tarif des établissements de santé, + 0,1
M€ de dépenses des conventions internationales.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
93
2 -
Malgré un contexte favorable, un nouveau dépassement
de l’Ondam en
2024 tenant aux soins de ville
En 2024, le dépassement de l’Ondam hors covid s’élève à 1,3
Md€
et tient pour le même montant au sous-objectif des soins de ville. Il
s’explique,
aux deux tiers, par un rendement plus faible qu’attendu des
recettes atténuatives des produits de santé (remises conventionnelles,
clauses de sauvegarde, cf.
infra
), devenues moins efficaces, notamment du
fait du plafonnement de la clause de sauvegarde en LFSS pour 2024. Le
solde du dépassement résulte d’une dynamique persistante des mêmes
postes que les années précédentes (indemnités journalières, honoraires des
infirmiers, des masseurs-kinésithérapeutes et des médecins spécialistes)
73
.
Le dépassement de l
’Ondam en 2024 est certes plus limité que celui
des deux dernières années (4,2
Md€ en 2023, 3,5
Md€ en 2022), mais il est
plus préoccupant, tant les conditions étaient réunies pour une exécution
conforme à l’objectif initial.
La construction de l’Ondam
2024 reposait sur des hypothèses
réalistes. Elle intégrait
un retour à une dynamique d’activité des acteurs de
l’offre de soins comparable à
la période précédant la crise sanitaire et une
circulation de la covid devenue endémique.
L’évolution de la masse
salariale des personnels hospitaliers intégrait une hypothèse de progression
(2,8 %
) supérieure à la progression de l’Ondam avant la crise sanitaire
(2,3 % par an de 2010 à 2019).
En outre, des marges existaient en exécution, d’environ 0,5
Md€. La
provision pour financer la hausse d
’un
point de la cotisation vieillesse des
personnels hospitaliers et médico-sociaux à la CNRACL (0,25
Md€)
est
devenue inutile du fait de la baisse des cotisations maladie à due
proportion.
Le décalage d’entrée en vigueur de nouvelle
s mesures
conventionnelles, dont la nouvelle convention médicale signée entre la
caisse nationale de l’assurance maladie et les médecins le 4
juin 2024, a
conduit à des économies de fait (0,3
Md€).
Enfin, contrairement aux années précédentes, aucun aléa externe
n’est venu peser sur la gestion, comme l’accélération de l’inflation ou des
revalorisations de rémunération décidées en cours d’année. L’exécution
de l’Ondam en 2024 a même bénéficié d’un effet favora
ble lié à une
inflation constatée (1,8
%) plus faible que l’hypothèse initiale (2,5
%).
73
Le dépassement du sous-
objectif du fonds d’intervention régional (0,5
Md€) est lié à
une mesure de transfert entre sous-objectifs sans impact sur le niveau des dépenses.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
94
La provision spécifique inscrite en mesure nouvelle et destinée à prendre
en compte le risque d’inflation exceptionnelle constituait aussi une marge
(0,7
Md€)
74
.
La dynamique des dépenses est en réalité supérieure à ce que le seul
dépassement ne laisse apparaître. Les marges auraient dû être mises en
réserve et annulées, étant devenues sans objet. Elles ont été entièrement
consommées et sont venues atténuer le dépassement de 2024 qui, sinon,
aurait été deux fois plus important, soit 1
% de l’Ondam initial.
3 -
Un dépassement nettement supérieur
en tenant compte des déficits croissants des hôpitaux publics
En 2024, la situation financière des hôpitaux publics continue de se
dégrader fortement, malgré la reprise de leur activité. Selon des données
encore provisoires, leur déficit (budget principal) s’établirait entre 2,8
Md€
et 3
Md€
75
, contre 1,9
Md€ en 2023 et 0,7
Md€ en 2019.
Cette dégradation, qualifiée par le comité d’alerte
de « point de fuite
majeur de l’Ondam
», pousse à une analyse consolidée avec l’exécution de
l’Ondam. Le cumul des dépassements de l’Ondam en exécution et des
déficits des hôpitaux publics atteint 4,6
Md€ en 2022, 5,4
Md€ en 2023 et
encore 4,3
Md€ en 2024.
Ces montants équivalent à une moyenne de
l’ordre de 2
% de l’Ondam initial, soit un niveau bien supérieur au seuil de
0,5
% du comité d’alerte justifiant la mise en œuvre de mesures de
redressement. Ce constat appelle des mesures d’efficience.
74
La construction de l’Ondam 2024 a provisionné les charges liées à une hypothèse
d’inflation de 2,5
% en deux étages. Le tendanciel a intégré, par convention, une
prévision d’
inflation de 1 %, soit la moyenne 2010-2019. Une provision supplémentaire
a été répartie entre les sous-objectifs des soins de ville (0,3
Md€), des établissements
de santé (0,3
Md€) et les établissements et services médico
-sociaux (0,1
Md€).
75
Avis du comité d’alerte de l’Ondam du 15 avril 2025.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
95
Graphique n° 5 :
évolution
du cumul des dépassements de l’Ondam
et du déficit des hôpitaux publics (en Md€)
Notes
: en 2020, l’Ondam hors dépenses exceptionnelles liées à la covid a été sous
-exécuté. Les
hôpitaux publics sont financés par les dépenses de l’Ondam et, dans une moind
re mesure, par les
organismes complémentaires de santé et les patients.
Sources :
Cour des comptes d’après les LFSS et
données provisoires 2024 des hôpitaux publics
B -
Une régulation insuffisante des dépenses,
un risque pour tenir la trajectoire pluriannuelle
Les facteurs de risque de dépassement en 2024, en partie identifiés,
étaient estimés dans le rapport de l’an dernier à 1
Md€
76
. L’estimation des
recettes atténuatives des produits de santé est devenue plus complexe du fait
de leur ampleur croissante (10,7
Md€ en 2024), de la
contestation du calcul
par les entreprises pharmaceutiques et de
l’assouplissement
des règles de
déclenchement des clauses de sauvegarde en LFSS pour 2024. Le montant
des mesures de maîtrise des dépenses (4,4
Md€
77
) paraissait ambitieux par
comparaison à 2023 (2,6
Md€) ou à la période précédant la crise sanitaire
(3,6
Md€ en 2019).
Dans son avis du 26 juillet
2024, le comité d’alerte de l’Ondam avait
appelé à la vigilance en pointant un risque de dépassement « significatif ».
76
Cour des comptes,
Un nouveau dépassement de l’Ondam en 2023, une impérative
reprise en main de son pilotage dès 2024
, chapitre II, Ralfss 2024.
77
Dont 3,5
Md€ de mesures d’économie pour gager les mesures nouvelles, 720
M€ de
maîtrise médicalisée et 180
M€ de lutte contre
les fraudes.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
96
Bien qu’accr
ues par rapport aux années précédentes, les mesures de
régulation sont toutefois restées encore insuffisantes en 2024.
1 -
Une réalisation partielle des mesures de maîtrise des dépenses
En construction de l’Ondam, les mesures
de maîtrise des dépenses
relèvent de deux catégories. En premier lieu, les mesures de lutte contre les
fraudes à l’assurance maladie et de maîtrise médicalisée des dépenses de
santé
78
sont intégrées au tendanciel des dépenses pour en atténuer la
dynamique. En second lieu, afin de gager des mesures nouvelles, des
mesures d’économie supplémentaires sont intégrées à la LFSS. De manière
récurrente, il s’agit de la baisse des prix et de la consommation des produits
de santé, de l’optimisation de la gestion des établissements de santé et
médico-sociaux, de la régulation des dépenses de soins de ville, notamment
dans le cadre des négociations conventionnelles avec les professionnels de
santé, et des transferts de prise en charge des dépenses de santé aux
organismes complémentaires de santé et aux assurés.
Dans tous les cas, la mise en œuvre de ces mesures est essentielle à
la tenue de l’Ondam. Elle est pourtant insuffisamment documentée, ce qui
en fragilise le suivi. Il conviendrait de présenter de manière systématique,
en annexe aux projets de LFSS
et d’approbation des comptes de la sécurité
sociale (PLACSS), un récapitulatif chiffré des objectifs des mesures de
maîtrise des dépenses et de leur réalisation. Il en va de même pour les
mesures nouvelles.
En 2024, selon des informations disponibles partiellement, les
mesures de maîtrise des dépenses n’ont été qu’en partie mises en œuvre.
Sur un objectif de 4,4
Md€, la part non réalisée peut être estimée entre
0,7
Md€ et 1,1
Md€, soit jusqu’à 25
% de l’objectif. Le doublement des
franchises et participations des usagers est intervenu plus tardivement que
prévu et les baisses de prix de produits de santé ont été inférieures aux
attentes. Les montants de maîtrise médicalisée des dépenses de santé
(720
M€ attendus)
ne sont pas encore disponibles
79
. Les mesures de
prévention en santé en vue de réduire la dépense de santé demeurent
limitées (25
M€ pour la vaccination antigrippale).
78
Elle vise à réduire les dépenses de santé inutiles, redondantes voire délétères, sans porter
atteinte à la qualité des soins (par exemple : prescriptions injustifiées de transport sanitaire,
d’indemnités journalières ou de produits de santé
inadaptés). Elle se concrétise par des
mesures incitatives pour améliorer les prescriptions. Voir Cour des comptes,
La maîtrise
médicalisée des dépenses de santé : une régulation inaboutie
, Ralfss 2023.
79
L’objectif de la maîtrise médicalisée des dépenses
de santé de 775
M€ a été réalisé à
hauteur de 167
M€ en 2022, dernière année renseignée. Voir annexe Ondam du PLFSS
2022 et rapport d’évaluation des programmes de sécurité sociale maladie du Placss 2023.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
97
Graphique n° 6 :
suivi de l’exécution des mesures de maîtrise
des dépenses de l’Ondam en 2024 inscrites en loi de financement
de la sécurité sociale
(en Md€)
Notes : la comparaison entre économies
ex ante
et
ex post
n’est pas aisée en méthodologie. Entre ces différentes
séries d’économies, il est possible d’avoir une vision
ex post
précise pour certaines (participations financières
et franchises mesurées mensuellement par la Cnam, baisses de prix des médicaments,
etc
.). Pour d’autres, la
mise en œuvre n’est pas directement observable (maîtrise médicalisée des dépenses de santé, mesures en
établissements de santé).
Le résultat de la lutte contre les fraudes correspond au montant de préjudice détecté et stoppé par la Cnam.
Sources :
Cour des comptes d’après les données de la DSS, de la DGOS, du CEPS, de la Cnam, et les annexes
Ondam du PLFSS et Maladie du PLACSS
2 -
Des mécanismes de régulation insuffisants
La régulation des dépenses de l’Ondam a été, en partie, renforcée
sur les crédits mis en réserve mais n’a pas été élargie à la priorisation des
mesures nouvelles. Des dépenses dépassant le périmètre de l’Ondam pour
appuyer le secteur médico-social ont été aussi décidées.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
98
a)
Des mises en réserve de crédits en partie inopérantes
En 2024, le mécanisme de mise en réserve des crédits de l’Ondam
80
a été davantage mobilisé que les années précédentes. Sur 765
M€
mis en
réserve en début de gestion, 565
M€ ont été
annulés soit près des trois-
quarts, contre un tiers en 2023 et en 2022. Cette opération a permis
d’atténuer le dépassement de l’Ondam hors covid de 0,7
% à 0,5 %.
Ce levier de régulation reste sujet à caution.
D’une part,
les soins de
ville, seul sous-objectif en dépassement, ne sont soumis à aucun
mécanisme de mise en réserve pour atténuer la dynamique de leurs
dépenses. D’autre part, l
a majeure partie des crédits annulés en 2024 a porté
sur les établissements de santé (304
M€), ce qui a contribué à majore
r
d’autant leurs déficits
81
.
En 2025, le Gouvernement a décidé de porter la mise en réserve des
crédits de l’Ondam à 1,1
Md€, soit 0,
4 %, dont notamment 0,7
Md€ sur les
établissements de santé et 0,2
Md€ sur le secteur médico
-social.
b)
Une absence de régulation des mesures nouvelles
En 2024, l’Ondam initial intégrait un solde total de 4,6
Md€ de
mesures nouvelles. Une partie était inévitable, notamment les extensions
en année pleine de la revalorisation du point d’indice (0,6
Md€), les
dispositions conventionnelles signées en 2023 (1,1
Md€,
dont 0,5
Md€
pour le règlement arbitral de 2023 concernant les médecins), l’avenant
concernant les transporteurs sanitaires (0,2
Md€)
ou la rallonge de la
subvention à l’Établissement français du sang (0,1
Md€).
La mise en œuvre d’une partie des aut
res mesures nouvelles aurait
pu être subordonnée à la réalisation effective des mesures d’économie,
pour autant qu’elles puissent être suivies en temps réel, ou ajournée dans
l’attente d’un premier retour fiable sur la tenue de l’Ondam en exécution.
Selon des priorités à établir, cela aurait pu concerner certaines des mesures
supplémentaires d’attractivité des personnels des
établissements de santé
et médico-sociaux (0,5
Md€).
80
L’article 20 de la
loi de programmation des finances publiques pour les années 2023
à 2027 prévoit que «
À compter du 1
er
janvier 2024, une fraction représentant 0,3 % du
montant de l’Ondam est mise en réserve au début de chaque exercice
».
81
Les autres annulations de crédits ont concerné les établissements et services médico-
sociaux (134
M€) et diverses autres rubriques (127
M€).
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
99
c)
Un soutien au secteur médico-social au-delà
du strict champ de l’Ondam
Les établissements et services médico-sociaux bénéficient de crédits
pour adapter leur offre, notamment par l’affectation d’une fraction de
cotisation sociale généralisée (CSG) depuis 2024 (2,6
Md€ par an)
82
.
Toutefois, les délais de réalisation des investissements étant fréquemment plus
longs que prévu, il reste chaque année des reliquats de crédits dits « crédits non
reconductibles », qui atteignent des niveaux anormalement élevés (1
Md€ en
2022 et en 2023, 1,1
Md€ en 2024).
En 2023 et en 2024, ces marges ont été en partie utilisées pour aider
financièrement des établissements
d’hébergement pour personnes âgées
dépendantes (Ehpad) en difficulté. Or, ces difficultés sont peu liées au
financement des dépenses relevant de l’Ondam mais plutôt
à celui
provenant des conseils départementaux
,
dont les dotations n’ont pas
progressé de façon homogène
83
. En 2024, le soutien aux Ehpad a représenté
286
M€ (+
18 % par rapport à 2023).
3 -
Des incertitudes sur la capacité à tenir la trajectoire
d’ici 2028
L’accumulation des dépassements de l’Ondam et l’insuffisante
maîtrise de l’exécution encore en 2024 créent une incertitude sur le respect
de la trajectoire de l’Ondam inscrite en LFSS pour 2025.
a)
Un cumul de dépassements qui fragilise la tenue de la trajectoire
De 2021 à 2024, le cumul de
s dépassements de l’Ondam en
exécution par rapport à l’objectif initial fixé en LFSS s’est élevé à 9,3
Md€,
soit l’équivalent de 30
% de la hausse de l’Ondam sur la période. Un peu
82
Cour des comptes,
Une branche autonomie aux leviers insuffisants pour faire face à
des enjeux démographiques cruciaux
, chapitre X de ce rapport.
83
En Ehpad, les dépenses de soins sont couvertes par la branche autonomie incluses
dans le périmètre de l’Ondam
; celles de dépendance par un forfait fixé par le
département
; les frais d’hébergement relèvent des résidents
et des départements.
Depuis 2018, la dotation dépendance, fixée par les départements, a été en moyenne
revalorisée de 7,5 % et la dotation soins de 11 %. D
ans le même temps, l’inflation
cumulée a été de 16 %.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
100
plus de la moitié (5,2
Md€) relève de décisions de revalorisation des
salai
res prises en cours d’année, non compensées par ailleurs
84
.
La reprise de ces dépassements, année après année, dans le socle de
dépenses, sans remise en cause ni atténuation des mesures nouvelles, conduit
à une augmentation mécanique des dépenses de l’Ondam
. Par conséquent, il
est essentiel à l’avenir d’éviter tout dépassement de l’Ondam en exécution.
Graphique n° 7 :
évolution de l’Ondam constaté hors covid (en Md€)
Source : LFSS, mise en forme Cour des comptes
b)
Des mesures de maîtrise des dépenses à calibrer à bonne hauteur
Dans ce contexte, la maîtrise de l’exécution de l’Ondam en 2025
s’annonce compliquée
: le niveau élevé des mesures nouvelles (6,2
Md€,
contre 4,6
Md€ en 2024) implique de les gager, au moins en partie, par des
mesures d’économie d’un niveau sans équival
ent (4,3
Md€ contre 3,5
Md€ en
2024). En 2025, il est de ce fait nécessaire d’adopter des mesures vigoureuses
de régulation des dépenses afin d’éviter tout nouveau dépassement.
Au-delà de 2025, la trajectoire inscrite en LFSS pour 2025 prévoit un
ralentiss
ement de la progression de l’Ondam de 3,4
% en 2025 à 2,9 % par
an d’ici à 2028. Les économies ne sont toutefois documentées en LFSS
qu’année après année. Une telle trajectoire permettrait certes de stabiliser la
84
Voir aussi le
rapport à la commission des comptes de la sécurité sociale,
octobre
2024, fiche 3.2 «
Retour sur l’évolution de l’Ondam entre 2019 et 2023
» qui détaille
l’évolution de l’Ondam entre dépenses exceptionnelles et évolutions courantes.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
101
part de l’Ondam dans le produit intérieur b
rut à 8,8 %, niveau nettement
supérieur à celui d’avant la crise sanitaire (8,2
%)
85
. Elle conduirait
néanmoins à une aggravation du déficit cumulé des trois branches de la
sécurité sociale qui financent l’Ondam. Celui
-ci passerait de 11,8
Md€ en
2024 à 20,1
Md€ en 2028, soit une accumulation de dette sociale de 73
Md€.
Pour tenir l’Ondam 2025 et la trajectoire inscrite en LFSS pour
2025, l’efficacité des dépenses doit être fortement améliorée en
développant la prévention en santé, en réorganisant l’offre
de soins des
établissements de santé et médico-sociaux et en répartissant les efforts de
financement entre les acteurs du système de santé
86
.
II -
Une maîtrise des dépenses à resserrer
pour chacun des sous-objectifs
De 2023 à 2024, la progression de l’Ondam hor
s covid de 3,4 %
recouvre des évolutions différenciées par sous-objectif. La croissance
limitée des dotations aux établissements de santé (+ 2,4 %) est en trompe
l’œil en raison de l’aggravation de leur déficit. La croissance nettement
plus forte des dotations aux établissements et services médico-sociaux
(+ 4,3
%)
recouvre
l’ensemble
des
mesures
visant
à
renforcer
l’accompagnement de la perte d’autonomie
87
. La plus forte progression des
soins
de
ville
(+ 4,4 %)
reflète
une
dynamique
des
dépenses
insuffisamment maîtrisée.
85
Dont 0,1
point d’effet périmètre co
mme la création de la branche autonomie en 2021.
86
Cour des comptes,
L’Objectif des dépenses d’assurance maladie
: maîtriser la
progression des dépenses en veillant à la qualité des soins
, avril 2025.
87
Sont intégrés à la trajectoire financière de l’Ondam d’ici à 2028, la création
d’ici à
2030 de
50 000 nouvelles solutions pour les personnes en situation de handicap
,
l’augmentation du taux d’encadrement en Ehpad (50
000 recrutements), la création de
places en Ehpad et en services infirmiers à domicile et la création de 200 centres de
ressources territoriaux.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
102
Graphique n° 8 :
exécution de l'Ondam hors covid par sous-objectif
(en Md€)
Source : lois de financement de la sécurité sociale, mise en forme Cour des comptes
A -
Une poursuite de la forte dynamique des dépenses
de soins de ville à réguler
Entre les sous-
objectifs de l’Ondam, les dépenses des soins de ville
sont celles qui ont le plus progressé en 2024 (+ 4,4 %, soit + 4,7
Md€).
Cette progression est encore plus marquée hors produits de santé (+ 4,6 %).
Les plus fortes hausses concernent notamment les indemnités journalières
(+ 8
%) et certaines dépenses d’honoraires, en particulier des masseurs
-
kinésithérapeutes (+ 5,2 %), des infirmiers (+ 4,9 %) et des médecins
spécialistes (+ 4,6 %). Les importantes revalorisations conventionnelles
signées en 2023, avec des effets financiers sur 2024, auraient dû être
l’occasion d’une meilleure régulation.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
103
Tableau n° 19 :
exécution 2024 des soins de ville (en Md€)
En Md€
Réalisé 2024
provisoire
Réalisé 2023
définitif
Écart
2024/2023
Honoraires médicaux et dentaires
29,3
28,4
0,9
3,2 %
dont médecins généralistes
6,5
6,3
0,2
3,4 %
dont médecins spécialistes
15,3
14,7
0,7
4,6 %
dont chirurgiens-dentistes
4,5
4,7
- 0,2 - 4,8 %
dont rémunération forfaitaire
2,5
2,4
0,1
2,5 %
Honoraires paramédicaux
16,2
15,4
0,8
5,3 %
dont infirmiers
9,8
9,4
0,5
4,9 %
dont masseurs-kinésithérapeutes
5,1
4,9
0,3
5,2 %
Biologie
3,5
3,8
- 0,3 - 7,5
%
Transports sanitaires
6,3
6,0
0,2
3,8
%
Indemnités journalières
17,1
15,9
1,3
8,0
%
Vaccinations
0,1
0,1
0,0
3,0
%
Prise en charge cotisations
2,7
2,5
0,2
7,9
%
Autres dépenses
0,4
0,4
0,02 - 5,6
%
Total soins de ville
hors produits de santé
75,7
72,6
3,1
4,3
%
Total soins de ville
hors produits de santé et hors covid
75,5
72,2
3,3
4,6
%
Médicaments
(et rétrocessions hospitalières)
31,4
29,9
1,5
4,9 %
Dispositifs médicaux
9,1
8,6
0,5
6,1 %
Tests, masques (covid)
0,1
0,2
- 0,1 - 8,3 %
Remises et contributions
conventionnelles
- 6,3
- 5,7
- 0,6
10,8 %
Total produits de santé
en soins de ville
34,3
33,0
1,3
3,8
%
Total soins de ville
109,9
105,6
4,4
4,2
%
Total soins de ville hors covid
109,6
105,0
4,7
4,4
%
Source : direction de la sécurité sociale, mise en forme Cour des comptes
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
104
1 -
Une progression exceptionnelle et atypique
des indemnités journalières
De 2019 à 2023, la dépense des indemnités journalières a progressé
en moyenne de 6,5 % par an et, encore, de 8 % en 2024, pour atteindre
17,1
Md€. Elle
relève en majorité du régime général (14,3
Md€ en 2023
)
et correspond à des arrêts maladie (71 %) et à des accidents du travail et
maladies professionnelles (29 %)
88
.
a)
Une dynamique des indemnités journalières maladie
liée en large partie à la hausse de la sinistralité
Sur le seul périmètre du régime général, de 2019 à 2023, les dépenses
d’
indemnités journalière maladie (10,2
Md€ en 2023) ont
été tirées par des
facteurs économiques et démographiques (hausse et vieillissement de la
population active, progression du Smic et des salaires sous l’effet de
l’inflation)
pour 57 %, mais aussi par une augmentation du taux de recours
(sinistralité) pour 43 %
89
. Depuis 2019, le nombre de journées indemnisées
augmente de 3,9 % par an et celui des arrêts de 4,1 %.
Les arrêts maladie indemnisés du régime général se caractérisent par
une forte concentration. En 2023, près d
’un
actif sur trois en a bénéficié
pour une durée moyenne de 48 jours, stable par rapport à 2019. Les arrêts
inférieurs à 8 jours représentent la moitié des arrêts mais 4 % des dépenses
d’assurance maladie
. Les arrêts de six mois ou plus comptent pour 7 % des
arrêts mais 45 % de la dépense. Le nombre de jours indemnisés par
bénéficiaire est resté stable
à l’échelle nationale en
2019 et 2023. Toutefois,
d’importants
écarts sont aussi constatés entre départements de métropole,
allant de 41,5 dans la Marne à 62 en Corse-du-Sud.
b)
Des indemnisations au titre des accidents du travail
et maladies professionnelles de plus en plus longues
Toujours sur le périmètre du régime général, de 2019 à 2023, les
indemnités journalières pour accident du travail ou maladie professionnelle
(AT-MP) sont en progression de 5,9
% par an (4
Md€ en 2023). Leur durée
88
Les IJ pour maternité et invalidité ne sont pas comptabilisées dans
l’Ondam.
89
Drees,
Arrêts maladie : au-delà des effets de la crise sanitaire, une accélération
depuis 2019
, décembre 2024.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
105
moyenne a fortement augmenté, de 67
jours en 2019 à 83 en 2023
(+
24
%), alors que le nombre de bénéficiaires est en recul (-
7
%). En
2023, le nombre moyen de journées indemnisées est hétérogène sur le
territoire, allant de 59 dans la Marne à 122 en Seine-Saint-Denis.
La dynamique des dépenses, les écarts entre départements et les
résultats limités de la lutte contre les fraudes détectées (42
M€ en 2024,
soit 0,3 % du total des dépenses) appellent à améliorer la compréhension
de ces dynamiques et à renforcer les actions de maîtrise de ces dépenses.
2 -
Un suivi des nouvelles conventions à resserrer
En 2023, de nombreuses négociations conventionnelles entre la caisse
nationale
de l’assurance maladie et les professionnels de santé ont abouti et
un règlement arbitral concernant les médecins a été rendu. L’effet financier
de ces nouvelles dispositions a porté principalement sur l’exercice 2024 pour
environ 1
Md€, y compris une éco
nomie de 0,2
Md€ pour les biologistes. Il
a été provisionné en mesures nouvelles de l’Ondam 2024.
La progression des dépenses de ces seules professions a globalement
atteint 3,5 % en 2024, au-delà du taux de progression du sous-objectif des
soins de ville fixé à 3,2 % en LFSS pour 2024. Une telle hausse ressort pour
plus de la moitié de la poursuite de la dynamique des dépenses d’honoraires
(1,8
%). Ce constat s’observe pour l’évolution des honoraires des médecins
spécialistes, des infirmiers et des masseurs-kinésithérapeutes.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
106
Tableau n° 20 :
décomposition de l’évolution des honoraires
des professionnels de santé bénéficiant de nouvelles dispositions
conventionnelles ou arbitrales depuis 2023
en M€
Variation
honoraires
2023-2024
%
Effet
2024 des
conventions
signées
en 2023
%
Dynamique
des dépenses
d’honoraires
%
Honoraires médicaux
et dentaires
904
3,2 %
646
2,2 %
258
0,9 %
Dont généralistes
et spécialistes
887
4,2 %
547
2,5 %
340
1,6 %
Dont chirurgiens-
dentistes
- 224
- 4,8 %
65
1,5 %
- 289 - 6,5 %
Honoraires
paramédicaux
837
5,4 %
279
1,7 %
558
3,4 %
Dont infirmiers
480
5,1 %
135
1,4 %
345
3,5 %
Dont masseurs-
kinésithérapeutes
252
5,2 %
106
2,1 %
146
2,8 %
Prise en charge
cotisations
202
7,9 %
0,0 %
202
7,4 %
Biologistes
(mesures d'économie)
- 192
- 5,3 %
- 200
- 5,8 %
8
0,2 %
Transporteurs
sanitaires
232
3,8 %
205
3,3 %
27
0,4 %
Autres conventions
31
10,6 %
31
9,7 %
0 - 0,1 %
Total honoraires
(hors produits de
santé et hors covid)
2 014
3,5 %
961
1,6 %
1 052
1,8 %
Note : les effets des conventions sont des estimations
; la dynamique des dépenses d’honoraire
s est calculée comme
le résidu entre la variation des honoraires et l’effet estimé des conventions.
Source : Cour des comptes à partir des données de la direction de la sécurité sociale
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
107
Ces évolutions sont à apprécier en tendance, sur plusieurs années.
Par conséquent, il est nécessaire de renforcer les mécanismes de pilotage
des conventions pour s’assurer d’une évolution des dépenses d’honoraires
qui soit globalement conforme à l’obje
ctif de progression des soins de ville
fixé par la LFSS. Cela concerne en particulier la nouvelle convention
médicale entre la Cnam et les médecins signée le 4 juin 2024 pour la
période 2025-2029 (1,6
Md€) qui ne prévoit qu’une seule clause de rendez
-
vous en septembre 2025.
Enfin, le suivi des dépenses des soins de ville est aussi à renforcer
pour mieux comprendre les évolutions atypiques par profession et par
territoires, en volumes d’actes et en prix, et, le cas échéant, y remédier.
Des dynamiques de haus
se d’honoraires marquées
et hétérogènes
90
De 2022 à 2023, les honoraires des masseurs-kinésithérapeutes ont
progressé de 7 %. Cette évolution tient en bonne partie à une hausse de leur
effectif de 4 % (78 769 en 2024)
91
ainsi qu’à une augmentation du
montant
moyen de leur honoraires par praticien de 3 %. Les évolutions sont
contrastées selon les départements (de + 8 % dans la Meuse à - 4 % en
Lozère).
Les honoraires des médecins spécialistes progressent aussi de 7 %
de 2022 à 2023. Comme leur effectif reste relativement plus stable
(55 911 professionnels fin 2023, + 1 % par rapport à 2022), cette évolution
tient à une hausse du montant moyen national d
’
honoraires de 6 %. Des
écarts d’évolution entre départements sont particulièrement marqués
:
+ 24 % en Haute-Saône
, -
4 % dans le Gers.
B -
Une impasse financière des hôpitaux publics
appelant une impérative restructuration
de l’offre de soins
En 2024, les dépenses du sous-objectif des établissements de santé
s’élèvent à 105,5
Md€
, en progression de 2,5 % par rapport à 2023. Cette
évolution maîtrisée, inférieure d’un point à l’évolution générale de
l’Ondam, est à relativiser. Elle s’accompagne d’une aggravation continue
du déficit des hôpitaux publics que la progression de l’activité aurait dû
permettre de réduire.
90
91
De 2019 à 2023, la hausse de l’effectif des masseurs
-kinésithérapeutes était de 14 %.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
108
1 -
Un
retour au niveau d’activité d’avant la crise sanitaire
En 2024, l’activité des hôpitaux publics et des établissement privés à
but non lucratif
92
a progressé de 2,9 % par rapport à 2023. Une telle
évolution est supérieure à celle des cliniques privées (+ 0,6 %) pour la
première fois depuis la crise covid. Les hôpitaux publics ont, dans leur
ensemble, enfin dépassé leur niveau d’activité d’avant la crise sanitaire, de
1 % par rapport à 2019. Les cliniques privées avaient déjà franchi ce cap en
2023 et leur activité est désormais supérieure de 4,4 % par rapport à 2019
93
.
Cette évolution générale recouvre néanmoins des situations
contrastées. En 2024, le niveau d’activité de 20
% des hôpitaux publics et
de 10 % des cliniques privées restait encore inférieur de plus de 10 % à leur
activité en 2019. À
ce titre, ces établissements ont encore bénéficié d’un
appui financier dit de sécurisation modulée à l’activité (SMA) mis en place
lors de la crise sanitaire (ex-garantie de financement) pour un total de
0,8
Md€
. Ce dispositif est supprimé à compter de 2025.
2 -
Un modèle économique devenu insoutenable
Une nouvelle dégradation du déficit des hôpitaux publics est
attendue en 2024. Il atteindrait, selon des estimations provisoires, entre
2,8
Md€
et 3
Md€
(budget principal), contre 1,9
Md€ en 2023. La part de
ceux en déficit passerait de 56 % en 2023 à 66 % en 2024. Un nombre
croissant rencontre des difficultés de trésorerie et assure avec des délais le
règlement de ses cotisations sociales et impôts
94
. La dégradation du déficit
des hôpitaux publics s’est poursuivie malgré leur retour à leur niveau
d’activité de 2019.
La dégradation du résultat a porté sur l’exploitation, dont le déficit
est passé de 0,7
Md€ en 2022, à 1,6
Md€ en 2023 et à un montant estimé
à
3,2
Md€ en 2024
95
. Le résultat financier, qui correspond pour l’essentiel
aux charges de dette, reste déficitaire (0,8
Md€), comme le résultat
exceptionnel (0,4
Md€). L’évolution du résultat d’exploitation en 2024
92
Données
sur le champ de l’activité séjours
en médecine, chirurgie et obstétrique en
incluant les séan
ces d’une durée inférieure à 24
heures, hors actes et consultations
externes et hospitalisation à domicile.
93
Voir aussi le rapport à la commission des comptes de la Sécurité sociale
,
octobre
2024, fiche 3.3
A
nalyse de l’activité hospitalière après la
crise sanitaire
.
94
Le montant des sommes à payer à ce titre en fin d’exercice, selon les comptes
combinés des hôpitaux publics, est passé de 3,8
Md€ en 2019 à 5,3
Md€ en 2023.
95
Les données de ce paragraphe sont issues de l’application
Diamant
de la DGFIP et
encore provisoires pour 2024.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
109
suggère une désorganisation du modèle économique avec un effet ciseau
entre des charges (+ 3,5 %) plus dynamiques que les produits (+ 2,4 %).
Les charges sont tirées notamment par les dépenses de personnel (+ 4,6 %),
malgré la stabilité des effectifs (+ 0,3 %
), les dépenses d’énergie ayant par
ailleurs baissé de 50
%. L’annulation des crédits mis en réserve du sous
-
objectif des établissements de santé (304
M€) affecte aussi le montant des
recettes versées aux établissements.
Graphique n° 9 :
évolution des déficits des hôpitaux publics
(en Md€) et de leur activité
(en base 100 2019)
Sources : ministère chargé de la santé, mise en forme Cour des comptes
La situation financière est devenue intenable et rend nécessaire une
réorganisation de l’offre de soins des établissements de santé. Elle est d’autant
plus indispensable que la qualité des soins est dégradée : la Haute Autorité de
santé (HAS) a refusé la certification à 4 % des établissements de santé et
estimé que la qualité des soins est à améliorer pour 8 %
96
; les déclarations
d’événements indésirables graves
à la HAS sont en hausse ; les disparités de
pratiques médicales entre territoires persistent
97
. Les pouvoirs publics
devraient établir un nouvel ordre de priorité des aides à l’investissement et
procéder à des regroupements de services au sein des groupements
hospitaliers de territoires, notamment en chirurgie, dans l’objectif d’une offre
graduée de soins.
96
Une seconde visite aura lieu dans les deux ans. Données d’avril 2025.
97
Institut de recherche et de documentation en économie de la santé
, Atlas des
variations de pratiques médicales
, 2024.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
110
Des aides à l’investissement hospitalier à prioriser
(Ségur de la santé)
La caisse d’amortissement de la dette sociale a emprunté 13
Md€
pour financer le désendettement des établissements de santé (6,5
Md€) et
relancer l’investissement hospitalier (6,5
Md€) de 2021 à 2029. Ce
financement exceptionnel n’est pas comptabilisé dans l’Ondam. La Cour a
critiqué la programmation de ces aides, dispersées entre de trop nombreux
établissements et projets, conduisant à un risque de relance de l’endettement
hospitalier
98
. À mi-parcours, les résultats de cette initiative sont limités.
Malgré les premiers décaissements de 3,3
Md€
, de 2021 à 2024, sur
le total prévu de 6,5
Md€ d’ici 2029, l’encours de la dette des hôpitaux
publics demeure au même niveau qu’en 2020 (30
Md€) ce qui ne permet
pas d’en réduire la charge d’intérêt.
Sur les 6,5
Md€ d’aide aux investissements, seuls 2
Md€ ont été
contractualisés entre les agences régionales de santé et les hôpitaux. Ce
niveau de contractualisation, encore faible, laisse une marge pour reprioriser
les aides du Ségur afin de financer la réorganisation de l’offre régionale de
soins dans le cadre des groupements hospitaliers de territoire. En outre, le
réemploi des aides à l’investissement des plans Hôpital 2007 et 2012 n’a
pas encore été arbitré.
C -
Une indispensable transformation
des établissements médico-sociaux,
au-delà des aides ponctuelles
Face à la dégradation des comptes des établissements et services
médico-sociaux (ESMS), des aides ponctuelles ont été décidées sur crédits
de l’Ondam.
Elles doivent laisser place à des mesures structurelles
d’organisation pour que
les ESMS gagnent en efficience.
1 -
Une situation financière en forte dégradation
En 2023, le déficit de l’ensemble des établissements et services pour
personnes âgées et en situation de handicap
99
s’établit à 2,1
Md€, contre
1,2
Md€ en 2022.
98
Cour des comptes,
La situation financière des hôpitaux après la crise sanitaire
, 2023.
99
En 2023, il existe 7 062 Ehpad, 4 350 ESMS pour personnes adultes en situation de
handicap et 2 589 pour enfants. Les données financières de 2024 ne sont pas disponibles.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
111
La situation financière des établissements d’hébergement pour
personnes âgées dépendantes (Ehpad) est la plus dégradée : 59 % sont
déficitaires, tous statuts confondus, pour un déficit total de 1,6
Md€. Les
Ehpad publics et privés non lucratifs sont à 64 % déficitaires. Leur situation
s’explique par la dégradation des taux d’occupat
ion
100
, une insuffisante
revalorisation des tarifs de prise en charge de la dépendance par les conseils
départementaux
et une structure de coût très sensible à l’inflation
. Par
contraste, celle des établissements commerciaux s’améliore, 63
% d’entre
eux étant en excédent (+ 4 points en 2023).
Les établissements et services dans le champ du handicap montrent
aussi des signes de fragilité financière. Selon une analyse de la moitié des
structures
101
, leur déficit atteint 0,5
Md€ en 2023, en hausse de
21 %. Fin
2023, 49 % des établissements pour adultes étaient déficitaires et 33 % de
ceux pour enfants. À
l’instar des E
hpad, le déséquilibre est plus marqué
pour les établissements gérés par des hôpitaux publics.
2 -
Un effort financier à orienter vers des réformes structurelles
Depuis 2023, des crédits relevant de l’Ondam ont été mobilisés pour
soutenir des Ehpad et services à domicile en difficulté financière, ce qui a permis,
à court terme, d’éviter des cessations de paiement, voire des fermetures (242
M€
en 2023, 286
M€ en 2024). Une nouvelle aide exceptionnelle de 300
M€ a été
inscrite en LFSS pour 2025.
Il s’agit d’un transfert de charges pour la sécurité
sociale qui endosse ainsi un rôle de garant pour les acteurs du secteur, en partie
sous-financés dans des champs
comme celui des frais d’hébergement, ne relevant
pas de la sécurité sociale.
Les aides financières ponctuelles mobilisées depuis 2023 ont été
mises en œuvre par des
commissions locales
102
sélectionnant les
établissements médico-sociaux éligibles. Ces concertations ont permis de
diagnostiquer la nature des difficultés des ESMS, mais les financements
accordés n’ont pas été assortis de mesures d’efficience, notamment auprès
des Ehpad publics, de petite taille, dont les installations sont souvent
vétustes. Les mesures décidées par la loi du 8 avril 2024 portant mesures
pour bâtir la société du bien vieillir et de l'autonomie doivent désormais
être pleinement mises en œuvre, notamment l’obligation de
coopérer au
sein de groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux
afin d’engager
100
Le taux d’occupation
a chuté de 5 points de 2019 à 2023 et remonte en 2024.
101
Seule la moitié des ESMS a passé un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens
avec les agences régionales de santé et établi un état réalisé des recettes et des dépenses.
102
Mises en place depuis septembre 2023, elles réunissent le directeur général de
l’ARS, le président du département, les services de la direction régionale des finances
publiques, des Urssaf, de l’assurance maladie et de la banque des territoires
.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
112
des regroupements, de rationaliser l’offre et de permettre davantage de
mutualisations (achats, etc.).
En amont, une meilleure coordination est à rechercher entre les
acteurs (établissements de santé, médico-sociaux, services de soins
infirmiers à domicile) afin d’améliorer la qualité des soins aux personnes
fragilisées par l’âge ou le handicap, d’éviter les passages aux urgences et
les prises en charge tardives plus couteuses.
D -
Une accélération des dépenses de produits de santé,
des mécanismes de régulation à étoffer
Les dépenses nettes de produits de santé (41,7
Md€)
103
représentent
16
% des dépenses de l’Ondam. Elles relèvent aux trois
-quarts des
médicaments (30,3
Md€) et,
pour le solde, des dispositifs médicaux
(11,4
Md€). La dynamique de ces dépenses s’accélère rapidement de 3,5
%
en 2023 à 5,5 % en 2024. Les mécanismes de régulation existants
atteignent leurs limites et devraient être étoffés.
L’enjeu financier des dépens
es des produits de santé, imputées sur les deux
sous-objectifs des soins de ville et des établissements de santé, implique
d’identifier ces dépenses dans un sous
-
objectif spécifique de l’Ondam et non plus
de les laisser éclatées entre soins de ville et établissements de santé.
1 -
Des recettes atténuatives moins dynamiques,
une cause du dépassement de l’Ondam 2024
Les dépenses brutes de produits de santé sont diminuées par les
recettes atténuatives, composées de remises conventionnelles négociées
avec les entreprises de santé sur les prix publics
104
et
d’
un prélèvement sur
leur
chiffre d’affaires appelé
clause de sauvegarde
105
. Elles sont passées de
2,6
Md€ en 2019 à
10,7
Md€ en 2024.
103
La dépense nette prise en charge
par l’
assurance maladie est celle après remises et
clause de sauvegarde versées par les entreprises pharmaceutiques.
104
Des remises conventionnelles sont reversées annuellement par les entreprises
pharmaceutiques en fonction des ventes réalisées et des clauses conventionnelles
négociées par le comité économique des produits de santé (CEPS). Les montants de
l’année
n
sont arrêtés et versés en novembre de l’année
n+1.
105
La clause de sauvegarde prévoit
que lorsque l’activité du secteur, mesuré
e par son
chiffre d’affaires, dépasse un certain seuil défini annuellement en
LFSS, une
contribution soit versée par les entreprises du secteur. Le rendement de cette
contribution est plafonné à 1,6 Md
€
en 2024 et en 2025 ainsi que la contribution
individuelle due par chaque entreprise, qui ne peut excéder 10 % de son chiffre
d’affaires hors taxes réalisé en France.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
113
La dynamique des recettes atténuatives s’est fortement ralentie, passant
de 39 % par an de croissance entre 2019 et 2023 à 9 % en 2024. Leur part dans
les dépenses brutes de produits de santé s’est stabilisée à 20
% en 2024. Ce fort
ralentissement de leur rendement a été insuffisamment anticipé et explique
70
% du dépassement de l’Ondam en 2024 (0,9
Md€ sur 1,3
Md€).
La décélération des recettes atténuatives en 2024 tient, notamment,
aux remises sur les traitements délivrés en accès dérogatoire
106
. Ces
remises sont connues et calculées après la mise à disposition du traitement
sur le marché et son évaluation médico-économique, les rendant difficiles
à anticiper et sujettes à de fortes variations selon le rythme de l’innovation.
Graphique n° 10 :
évolution du montant des dépenses brutes
et nettes
des produits de santé (en Md€) et de la part
des recettes atténuatives dans les dépenses brutes (en %)
Source : direction de la sécurité sociale, mise en forme Cour des comptes
106
En vue d’
une mise à disposition rapide aux patients, la LFSS pour 2021 a introduit
deux nouveaux dispositifs dérogatoires (accès précoce et compassionnel) pour
permettre
aux médicaments susceptibles d’être innovants et répondant à un besoin
thérapeutique non couvert d’accéder au marché avant leur évaluation par la Haute
Autorité de s
anté et l’accord sur leur remboursement
et leur prix.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
COUR DES COMPTES
114
2 -
De nouveaux enjeux de souveraineté sanitaire,
une régulation par les prix moins efficace
La crise sanitaire et les tensions sur les stocks ont conduit à redéfinir les
objectifs de la politique du médicament pour mettre l'accent sur l'accès aux
traitements,
la
lutte
contre
les
pénuries
et
la
sécurisation
des
appr
ovisionnements, en complément de l’objectif de maîtrise des dépenses
107
.
Le législateur a doté le CEPS de nouveaux outils, tels que les dispositifs
d’accès dérogatoires ou l’octroi d’avantages financiers
aux industriels qui
investissent sur le territoire
108
. Ces deux dernières années, les avoirs accordés
à ce titre ont représenté 70 % des avoirs délivrés par le CEPS, soit 115
M€ en
2024, venant minorer d’autant les recettes atténuatives de dépenses.
Les objectifs de baisse de prix assignés au CEPS intégrés à la LFSS
portent sur un périmètre de plus en plus restreint. Les médicaments matures,
largement prescrits, dont les prix sont déjà bas et peu attractifs pour
l’industrie, peuvent difficilement faire l’objet de baisses supplémentaires. De
nombreux autres produits, matures comme innovants, bénéficient de clauses
de stabilité de prix, ce qui tend à réduire l’assiette sur laquelle le CEPS peut
agir et rend la régulation par les prix moins efficace. Pour autant, le plan de
baisse de prix du CEPS atteint 1,2
Md€ en
2025
109
et compte parmi les plus
ambitieux qui lui ont été assignés depuis 2010.
3 -
Face à la hausse prévisible des dépenses,
une indispensable régulation par les volumes
La régulation par les volumes de consommation et de lutte contre le
gaspillage des produits de santé doit compléter la régulation par les prix. Des
marges importantes existent, la France étant l’un des pays les plus
consommateurs de produits de santé en Eu
rope et parmi les pays de l’OCDE.
Cela implique un renforcement et un suivi plus resserré des actions
de maîtrise médicalisée et
d’
incitations à la pertinence des soins ainsi
qu’une responsabilisation accrue des prescripteurs et des
patients. À cet
égard,
les systèmes d’information offrent des potentialités de suivi des
prescriptions qui restent encore peu exploitées. Au sein du
quantum
d’économies de 2,2
Md€ prévu dans le champ des produits de santé pour
2025, 250
M€
seulement sont attendus du bon usage des médicaments.
107
Depuis la LFSS pour 2025 (art. 75), le comité économique des produits de santé doit
intégrer la sécurisation des approvisionnements dans ses critères de tarification.
108
Des « avoirs » sur remises sont accordés, minorant les montants de remises versées
par les entreprises qui produisent en France.
109
D’après le CEPS, cet objectif pourrait être majoré de 0,4
Md€ en l’absence d’accord
entre le Gouvernement et les industries de santé sur un effort d’économie
supplémentaire de 600
M€
sur le médicament.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
DES DÉRIVES CONTINUE
S DANS L’EXÉCUTION DE L’ONDAM,
UN PILOTAGE EFFICACE À RETROUVER
115
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
En 2024, les conditions étaient réunies pour que l’Ondam
soit
respecté en exécution, en l’absence d’aléa majeur et en raison d’une marge
de manœuvre liée à une inflation moindre que prévue. Pourtant, comme
pour
les deux précédents exercices, l’exécution a été significativement en
dépassement (1,3
Md€).
La dérive continue
dans l’exécution de l’Ondam
révèle une insuffisante mobilisation : des mécanismes de régulation sous-
dimensionnés et peu opérationnels, des économies partiellement réalisées
et difficiles à suivre, des mesures nouvelles qui auraient dû être priorisées.
Ce constat préoccupant fait douter de la capacité des acteurs du
système de santé et des pouvoirs publics à tenir la trajectoire de l’Ondam
d’ici à 2028. Des mesures vigoureuses doivent être appliquées pour endiguer
la dérive de l’exécution de l’Ondam, qui fragilise la sécurité sociale.
La Cour adresse, en conséquence, les recommandations suivantes
au ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle
et numérique et au ministère du travail, de la santé, des solidarités et des
familles :
4.
afin d’éviter tout nouveau dépassement de l’Ondam, définir des
mesures infra-annuelles permettant de réguler les dépenses en évitant
les répercussions sur le résultat des hôpitaux publics ;
5.
dans la perspective du projet de loi de financement de la sécurité sociale
pour 2026, préparer un programme pluriannuel de mesures de maîtrise
sur la progression des dépenses de l’Ondam en développant la
prévention en santé, en réorganisant l’offre de soins des établissements
de santé et des établissements et services médico-sociaux et en
recherchant un partage des efforts entre les acteurs du système de santé.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes