Sort by *
3.
Les addictions des jeunes
aux drogues illicites
et à l’alcool : un enjeu
de prévention et de prise
en charge
Les jeunes constituent un public sensible aux risques liés
à la consommation d’alcool et de drogues illicites. Leur
cerveau, qui n’atteint sa pleine maturité qu’à l’âge de 25 ans,
est particulièrement vulnérable aux conduites addictives,
surtout dès 12 ans, âge des premières expérimentations,
voire des hospitalisations.
La Haute Autorité de santé (HAS) définit les conduites
addictives comme l’ensemble des pratiques de
consommations susceptibles d’induire une addiction,
qu’elles soient considérées comme usage simple (sans
caractère pathologique) ou comme mésusage (usage
à risque, nocif ou dépendant). L’addiction se caractérise
par des comportements qui incluent un ou plusieurs
71
72
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
des éléments suivants : altération du contrôle de la consommation de la substance
en cause, consommation compulsive, poursuite de la consommation en dépit de
ses conséquences négatives pour l’individu ou son entourage et besoin impérieux
de consommer la substance
1
.
La Cour des comptes a centré son enquête sur les addictions des jeunes à l’alcool et
aux drogues illicites
2
. La présente enquête n’a pas intégré le tabac dans son champ
d’instruction dans la mesure où la Cour a, en mai 2024, réalisé une enquête sur la
« santé respiratoire » faisant état des effets délétères du tabagisme et proposant
des recommandations de santé publique
3
.
La Cour s’est notamment attachée à évaluer le nombre de jeunes concernés par
les addictions à l’alcool ou aux drogues illicites, ainsi que les conséquences de ces
addictions sur leur santé mentale et physique. Elle s’est appuyée sur les enquêtes
et rapports scientifiques déjà existants. Elle a également confié à un institut la
réalisation d’un sondage, ciblé sur les pratiques de consommation d’alcool et de
drogues illicites et la perception que les 15-25 ans ont de ces produits, auquel
10 000 jeunes ont répondu.
L’enquête s’est concentrée sur les aspects sanitaires et sociaux de la prise en charge des
addictions, et non sur ses aspects judiciaires et pénaux
4
. L’efficacité de l’organisation
des soins, les outils de sensibilisation et de coordination entre les acteurs, ont été
examinés, en France et à l’étranger, en particulier au Danemark, en Écosse et en Islande.
GRAPHIQUE N° 1 | Proportion de jeunes considérant l’alcool et les drogues illicites
comme dangereux
Alcool
Drogues illicites
15-17 ans
12-14 ans
18-24 ans
90 %
80 %
70 %
60 %
50 %
40 %
30 %
20 %
10 %
0 %
Source : sondage CSA pour la Cour des comptes
1.
HAS,
Diagnostic du trouble de l’usage d’opioïdes,
2022.
2.
Parmi celles-ci, on compte notamment le canabis, la cocaïne et ses dérivés comme le crack, les
psychostimulants (cocaïne, amphétamines), ou encore les opioïdes (héroïne, fentanyloïdes).
3. Cour des comptes,
La santé respiratoire - Un enjeu de « santé environnement » insuffisament pris en
considération,
communication à la commission des affaires sociales du Sénat, mai 2024.
4.
Cour des comptes,
L’Ofast et les forces de sécurité intérieure affectées à la lutte contre le trafic de stupéfiants,
observations définitives, novembre 2024.
73
Chiffres clés
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
46,3
%
des jeunes âgés de 18 à
24 ans en 2023 disaient avoir
consommé au moins une fois
dans leur vie du cannabis.
3,5 % affirmaient en faire un
usage quotidien
× 10
commencer à consommer de
l’alcool au début de l’adolescence
multiplie par dix le risque de
devenir alcoolodépendant à l’âge
adulte, par rapport à une initiation
plus tardive, vers l’âge de 20 ans
260
consultations jeunes consommateurs,
réparties en 540 lieux pour l’accueil,
l’information, l’évaluation, la prise
en charge brève et l’orientation des
jeunes et de leur entourage
Source : réponse de la direction générale de la santé
au questionnaire envoyé dans le cadre de l’enquête
230 000
jeunes de 18 à 24 ans
seraient concernés par
les addictions au cannabis
1 jeune sur 10
s’estime dépendant aux drogues
illicites ou à l’alcool
Les jeunes ont aujourd’hui une consommation préoccupante de drogues et d’alcool,
qui les expose à des risques d’addiction et a des conséquences sur leur santé
mentale et physique (I). La réponse sanitaire et médico-sociale se révèle insuffisante
et inadaptée, tant en termes d’accès aux soins que de financement (II). Une politique
de prévention des addictions plus ambitieuse doit être mise en œuvre sans tarder pour
en limiter les effets, souvent irréversibles (III).
I.
Une jeunesse française
particulièrement touchée
La consommation de drogues pose un problème de santé publique majeur en
raison du risque d’addiction qu’elle cause et des maladies dont elle est un facteur
de risque et d’aggravation. En France, les jeunes de 12 à 25 ans sont particulièrement
touchés par le phénomène de consommation, en particulier les 18-25 ans, chez qui
elle augmente.
A.
Une consommation qui reste élevée
Le niveau de consommation de drogues et d’alcool est suivi drogue par drogue
dans notre pays mais, en termes épidémiologiques, l’addiction n’est pas mesurée.
1.
Une consommation en baisse chez les mineurs,
mais toujours préoccupante chez les majeurs
Les principales substances illicites consommées sont le cannabis, la MDMA (ecstasy),
la cocaïne, les champignons hallucinogènes et le LSD
5
. À cela s’ajoute le phénomène
de polyconsommation, c’est à dire l’usage d’au moins deux produits.
Chez les mineurs, une baisse des niveaux d’usage d’alcool de cannabis est observée
depuis 2010. Entre 2018 et 2022, la consommation régulière d’alcool est passée chez
les lycéens de 16,7 % à 5,3 %, avec toutefois des risques d’usages problématiques,
comme des alcoolisations ponctuelles importantes
(« binge drinking »)
fréquentes.
Sur la même période, l’usage régulier du cannabis est passé de 6,2 % à 2,9 %
6
. Ces
résultats, très positifs, restent toutefois à confirmer dans la durée.
74
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
5. Au cours des douze mois précédant l’enquête 2023 de l’Observatoire français des drogues et des
tendances addictives (OFDT), ces drogues avaient été consommées par respectivement 22,9 %, 3,9 %, 3 %,
2,4 % et 1,8 % des 18-24 ans. L’OFDT est un groupement d’intérêt public qui a pour objectif d’éclairer ses
membres fondateurs, les pouvoirs publics, ainsi que les professionnels du champ et le grand public, sur le
phénomène des drogues licites et illicites et des tendances addictives, incluant les jeux d’argent et de hasard.
6.
OFDT,
Les usages de substances psychoactives chez les collégiens et lycéens,
2022.
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
75
La situation est plus contrastée pour les majeurs. En effet, chez les 18-25 ans, entre
2017 et 2023, l’usage au cours des douze derniers mois a augmenté pour l’ecstasy
ainsi que, de façon plus légère, pour la cocaïne, le LSD, l’héroïne et le crack
7
.
En 2023, 46,3 % des jeunes âgés de 18 à 24 ans disaient avoir expérimenté le
cannabis et 3,5 % reconnaissaient en faire un usage quotidien.
En ce qui concerne l’alcool, selon Santé publique France, 2,6 % des 18-24 ans
déclaraient en 2021 consommer quotidiennement de l’alcool. Ce taux est l’un des
plus élevés parmi les pays de l’Union européenne.
2.
Un niveau élevé par rapport à la moyenne européenne
S’agissant des drogues illicites, la consommation des jeunes en France est, selon
les données disponibles, parmi les plus importantes de l’Union européenne.
En effet, toutes drogues illicites confondues, 28 % des jeunes de 15 à 24 ans
auraient dans notre pays consommé des produits stupéfiants dans l’année, contre
une moyenne de 16,9 % dans l’Union européenne
8
.
Les jeunes français se situent au-dessus de la moyenne européenne pour la
consommation de cocaïne et de LSD, mais en-dessous pour la consommation
d’amphétamines et d’ecstasy
9
.
GRAPHIQUE N° 2 | Estimation de la consommation d’alcool et de drogues illicites
des 15-24 ans au moins une fois dans les douze derniers mois en France
et dans l’Union européenne
Moyenne UE
France
90 %
80 %
70 %
60 %
50 %
40 %
30 %
20 %
10 %
0 %
Alcool
Toutes
drogues
illicites
Cannabis
Cocaïne
MDMA
(Ecstasy)
LSD
Amphétamines
Source : European Drug Report 2024
Lecture : en France, 23,5 % des 15-24 avaient consommé du cannabis dans les 12 mois précédant l’enquête
7.
OFDT et SpF,
Les niveaux d’usage des drogues illicites en France en 2023,
Tendances, 2024 et
Les niveaux
d’usage des drogues illicites en France en 2017
, Tendances, 2018.
8.
9.
https://www.euda.europa.eu/data/stats2024/gps_en. L’enquête européenne retient la tranche d’âge des
15-24 ans.
76
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
3.
La difficulté d’évaluer l’addiction
D’un point de vue épidémiologique, la France ne dispose pas d’un système
d’information ni d’un dispositif de suivi du nombre de jeunes qui souffrent
d’addiction. Les statistiques portant sur ceux qui sont accueillis à l’hôpital (13 349
en 2023 en médecine et en psychiatrie) ou dans les structures médico-sociales
spécialisées, ne sont pas non plus d’un secours suffisant. En effet, la prise en charge
intervient en général seulement quand la dépendance est déjà avancée, ce qui laisse
de côté une partie de la population concernée.
Les chiffres les plus significatifs proviennent des accueils dans les structures
médico-sociales spécialisées, en dépit du fait que les données de base sont incom-
plètes
10
. Il est ainsi possible d’estimer à 210 000, tous âges confondus, le nombre
de personnes accueillies chaque année en France dans les centres de soins,
d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA). Parmi elles, 72 000
sont de nouveaux patients, dont près de 16 000, soit 22 %, ont moins de 25 ans.
Il n’est toutefois pas possible d’additionner les chiffres des hospitalisations et des
accueils dans des services médico-sociaux (13 349 et 16 000), car les parcours de
soins reposant sur les deux structures sont fréquents, même s’ils ne sont à ce jour
tracés dans aucun système d’information. De plus, ces données ne rendent pas
compte des jeunes qui, bien que souffrant d’addictions, ne sont suivis dans aucun
de ces types d’établissements.
Trois méthodes d’estimation du nombre de jeunes souffrant d’addictions
aux drogues
La première méthode s’appuie sur les données de l’Office des nations unies
contre la drogue et le crime (ONUDC)
11,
qui évalue le nombre de personnes
souffrant d’un trouble lié à l’usage de la drogue (hors alcool et tabac) à
une sur quatre-vingt-une dans le monde, soit 1,2 % de la population. Si
l’on applique ce
ratio
à la population des jeunes de 12 à 25 ans en France,
évaluée par l’Insee à 10,8 millions de personnes au 1
er
janvier 2024
12
, le
nombre de jeunes concernés par les addictions à toutes les drogues (hors
alcool) pourrait s’élever à 130 000. Cette évaluation présente toutefois
de nombreuses limites méthodologiques et doit donc être prise avec
précaution, car elle repose sur un
ratio
calculé à l’échelle mondiale, alors
que chaque pays a des niveaux d’usage différents.
La deuxième méthode repose sur les enquêtes
« ESCAPAD »
de l’OFDT.
Il résulte de la dernière d’entre elles, portant sur des données de 2022,
10. OFDT,
Caractéristiques des personnes prises en charge dans les CSAPA en 2021,
2024. Cette étude se fonde
sur le retour de 132 CSAPA, quand il en existe plus de 500 en France, et procède donc d’une extrapolation.
11. Créé en 1997, l’Office des nations unies contre la drogue et le crime est un organe du Secrétariat des
Nations unies chargé d’assister les États membres dans la réalisation de l’objectif de sécurité et de justice
pour tous en rendant le monde plus sûr face à la criminalité, aux drogues et au terrorisme.
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
77
que 21,8 % des consommateurs de 17 ans présenteraient un risque élevé
d’usage problématique ou de dépendance au cannabis. L’OFDT estime que
le risque d’usage problématique concernerait au total 8,6 % de l’ensemble
des jeunes de 17 ans et celui de dépendance, 4,8 % (6,1 % des garçons
et 3,5 % des filles)
13
. Si l’on retient ces ratios et si on les applique aux
18-25 ans, dont le nombre est calculé par l’Insee, l’usage problématique de
cannabis concernerait environ 480 000 jeunes de 18 à 25 ans et le risque
de dépendance, 272 000 d’entre eux. Eu égard aux biais propres à toute
extrapolation, cette estimation reste cependant indicative et ne prend pas
en compte les autres drogues illicites ni l’alcool.
Enfin, l’enquête réalisée à la demande de la Cour des comptes sur la
perception et les pratiques de 10 000 jeunes de 12 à 24 ans vis-à-vis de la
drogue et de l’alcool
14
fait ressortir que plus d’un jeune sur dix s’estime
dépendant à l’une de ces substances, c’est-à-dire indique en consommer
régulièrement et avoir du mal à s’en passer. Cela signifierait que plus d’un
million de jeunes jugent avoir un problème de dépendance. La limite de ce
chiffrage vient de ce qu’il s’agit de déclarations sans validation médicale,
qui renseignent donc plus sur la perception que sur la réalité des addictions.
GRAPHIQUE N° 3 | Pourcentage de jeunes ayant le sentiment d’être concernés
par la dépendance à l’alcool ou aux drogues illicites
20 %
18 %
16 %
12 %
10 %
8 %
6 %
4 %
2 %
0 %
14 %
12-14 ans
15-17 ans
18-24 ans
Source : sondage CSA pour la Cour des comptes
La difficulté d’estimer plus précisément le nombre de jeunes concernés par les
addictions sur la base des données actuelles plaide donc pour que le ministère de
la santé développe des outils de mesure des addictions des jeunes aux drogues et à
l’alcool, en s’appuyant notamment sur des bases de données médico-administratives
qui restent encore largement à construire.
13. OFDT, Les drogues à 17 ans. Analyse de l’enquête ESCAPAD 2022, mars 2023.
14.
Consumer Science & Analytics (CSA),
Drogues et addiction chez les 12-24 ans,
mai 2024.
78
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
4.
Des facteurs de vulnérabilité de nature sanitaire et sociale
Selon l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives, la survenue
d’une addiction repose sur trois composantes : l’individu, le produit et l’environnement.
Les études scientifiques
15
identifient, parmi ces éléments, le niveau familial, où
entrent en jeu l’intensité des conflits, la perception d’un manque de proximité avec
les proches, des troubles psychologiques voire psychiatriques chez les parents
ou encore l’exposition récurrente aux conduites de consommation. L’initiation
à certaines conduites addictives comme l’alcool se fait souvent dans le cercle
familial. Les parents et, plus largement, l’entourage familial, jouent un rôle clé
en matière de sensibilisation, de prévention et de repérage.
En outre, certains individus ont des prédispositions génétiques qui les rendent plus
vulnérables aux addictions ou à l’apparition de pathologies psychiatriques.
D’autres facteurs de risques doivent être pris en compte, comme l’influence de
l’environnement social (stress, contexte social et amical
16
, présence de troubles
psychiques de proches…) ou l’exposition au marketing lié à l’alcool, qui peut inciter
les jeunes à en consommer.
Enfin, l’initiation précoce constitue une vulnérabilité spécifique. Ainsi, commencer
à consommer de l’alcool au début de l’adolescence multiplie par dix le risque de
devenir alcoolodépendant à l’âge adulte, par rapport à une initiation plus tardive,
vers l’âge de 20 ans
17
.
TABLEAU N° 1 | Profil des jeunes qui déclarent la consommation de drogues
comme dangereuse
64 %
…ont déjà fumé un joint
(vs 74 % jamais fumé)
60 %
…de ceux
qui considèrent
la consommation
…ont déjà pris
des drogues de synthèse
(vs 72 % jamais pris)
76 %
de drogues comme
dangereuse…
…ne s’estiment pas
concernés directement
ou indirectement
par la dépendance
(vs 45 % concernés)
Source : sondage CSA pour la Cour des comptes
15.
Voir par exemple l’article de X. Laquielle et K. Liot :
Addictions : définitions et principes thérapeutiques,
L’information psychiatrique, 2009
16.
L’addiction au cannabis est fortement associée au fait d’avoir eu des amis fumeurs au moment de
l’adolescence.
17.
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
79
B.
Des conséquences sanitaires et sociales profondes
et durables
Jusqu’à 25 ans, le cerveau d’un individu est en développement. Il est par conséquent
plus vulnérable aux effets des drogues et de l’alcool. Les effets psychiques et
sanitaires peuvent ainsi intervenir pour un jeune consommateur sans même qu’il
n’existe de complication addictive.
1.
Des effets préoccupants sur la santé mentale et le bien être des jeunes
Les drogues illicites et l’alcool ont un impact sur la santé mentale et le bien-être
quand ils sont consommés de manière précoce et régulière.
L’usage précoce et régulier de cannabis, en particulier avant 25 ans, est un facteur
de risque de troubles psychiques et socio-comportementaux
18
: altération des
performances psychomotrices et cognitives, isolement social, troubles de la
mémoire, difficultés de concentration, troubles du langage et de la coordination
motrice, troubles anxieux comme les attaques de panique ou les bouffées d’angoisse.
Le cannabis est aussi un facteur d’aggravation des troubles psychiques que sont
la dépression, pouvant conduire au suicide, et les pathologies psychiatriques.
Certaines études indiquent ainsi que l’usage de cannabis favorise le déclenchement
de la schizophrénie, d’autant plus lorsque cet usage est précoce
19
. La cocaïne est
également réputée provoquer des épisodes psychotiques chez le consommateur
20
.
2.
Un risque de morbidité et de mortalité accru chez les jeunes
Les études montrent que les personnes ayant fumé à la fois du tabac et du cannabis
risquent de développer un cancer bronchopulmonaire significativement plus tôt
que les personnes seulement tabagiques.
Outre le risque de mortalité lié à une overdose, la consommation chronique de cocaïne,
d’ecstasy, d’amphétamine ou de cannabis expose à un risque accru d’accidents vas-
culaires cérébraux, même si un lien causal unique est difficile à établir en raison de
l’existence d’autres facteurs de risques associés
21
. Ces substances sont en outre
fréquemment impliquées dans les accidents cardiaques comme l’infarctus du myocarde.
Par ailleurs, certains modes d’administration du produit présentent des risques
infectieux. Ainsi, l’usage de drogues par voie injectable ou sniffée constitue un
vecteur de transmission du VIH et de l’hépatite C. Les drogues peuvent aussi être
toxiques pour le foie
22
.
18.
Inserm,
Conduites addictives chez les adolescents. Usages, prévention et accompagnement,
Collection
Expertise collective, Paris, 2014
19.
C Hjorthøj et alii,
Association between cannabis use disorder and schizophrenia stronger in young males
than in females,
Psychological Medicine, 2023.
20.
E. Tahmazov, S. Berrouiguet, M. Walter, C. Lemey,
Psychose induite par cocaïne,
French Journal of
Psychiatry, 2019
21.
Philippe Hantson,
Complications neurovasculaires aiguës liées à la consommation de la cocaïne, des
amphétamines et du cannabis,
Réanimation, 2010
22.
Camille Mouilleron,
Effets hépatobiliaires des substances utilisées par les usagers de drogues : revue de la
littérature,
Sciences du Vivant, 2021.
S’agissant du risque de mortalité, une étude internationale montre que la
consommation d’alcool
23
, chez les plus jeunes, est un facteur de conduite à risque
causant des accidents de la route ou encore des automutilations. La même étude
met en évidence une différence selon les sexes, les hommes étant plus touchés
par la mortalité prématurée liée à la consommation d’alcool que les femmes. Enfin
l’alcool est aussi un facteur de risque de cancer (près de 8 000 nouveaux cas de
cancer du sein seraient liés à sa consommation
24
), mais aussi de pathologies
cardiovasculaires et digestives et de maladies du système nerveux.
II.
Une offre de soins sanitaire et médico-sociale
insuffisamment ciblée sur les jeunes
La prise en charge sanitaire et sociale des jeunes souffrant d’addictions aux
drogues illicites et à l’alcool n’est pas adaptée aux besoins. Elle ne cible pas
assez les jeunes et les places disponibles sont insuffisantes, à l’hôpital comme
dans le secteur médico-social.
A.
Une prise en charge inadaptée à la jeunesse
Le repérage, l’accompagnement et la prise en charge font intervenir aussi bien la
médecine de ville que l’hôpital et le secteur médico-social, mais tardivement et
sans véritable coordination ni adaptation au parcours de soins des jeunes.
1.
Un premier recours insuffisamment présent
Les médecins généralistes en ville, en association avec la médecine et les infirmières
scolaires, devraient jouer un rôle clef en matière de sensibilisation, d’information et
d’orientation. Cependant leur méconnaissance des problèmes liés aux addictions,
à commencer par leur dépistage, est l’un des principaux freins à une prise en
charge avancée. Selon une enquête de la direction de la recherche, des études, de
l’évaluation et des statistiques (Drees) du ministère de la santé, la détection des
conduites addictives n’est entreprise de manière systématique par les médecins
généralistes que dans 43 % des cas pour la consommation d’alcool et 24 % pour
celle de cannabis
25
.
Les deux-tiers des praticiens déclarent ne pas connaître les démarches de repérage
précoce et d’intervention brève, procédures de prévention visant à identifier un
comportement de consommation de substance psychoactive et à inciter à la
80
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
23.
Max G. Griswold, Nancy Fullman et alii
Alcohol use and burden for 195 countries and territories,
1990–2016: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study,
Lancet 2018, 392, 1015–1035.
24.
Centre international de recherche sur le cancer,
Les cancers attribuables au mode de vie et à
l’environnement en France métropolitaine,
2018.
25.
Drees,
Les médecins généralistes face aux conduites addictives de leurs patients,
2021.
baisse des consommations
26
. Ils ont toutefois recours aux structures spécialisées,
mais pas assez à celles destinées aux jeunes : 26 % d’entre eux seulement ont eu
recours à une consultation jeunes consommateurs (CJC), structure d’accueil spéci-
fique pour les 12-25 ans (voir ci-après). Il est donc souhaitable de mieux informer
les médecins de premier recours sur l’importance du repérage précoce et sur la
nécessité de déclencher le plus rapidement possible une prise en charge adaptée.
2.
Un dispositif hospitalier faiblement dimensionné et trop généraliste
À l’hôpital, l’accueil et le soin des personnes souffrant d’addictions comprennent
des consultations, une activité de liaison, des bilans d’évaluation, ou encore des
sevrages simples ou complexes
27
. Peu d’établissements disposent toutefois de
services spécifiquement consacrés à la jeunesse, alors même que les soins qui lui
sont adaptés doivent être prodigués par des spécialistes de troubles psychiatriques
infanto-juvéniles ou de troubles de l’addiction des adolescents et jeunes adultes.
L’estimation du nombre de places disponibles pour soigner les addictions n’est
pas assurée de façon régulière par le ministère de la santé. Mais, sur la base d’une
enquête menée par ce dernier, à laquelle les hôpitaux n’ont cependant pas tous
répondu, le nombre de lits d’hospitalisation ouverts à toute la population a pu
être chiffré à 6 224 en 2021
28
, avec une durée moyenne de séjour de 21 jours pour
sevrage simple.
À cela s’ajoutent les équipes de liaison et de soins en addictologie (ELSA), créées
par la circulaire du 26 septembre 2008 relative à la filière hospitalière de soins en
addictologie
29
. Cette circulaire prévoit que les équipes de liaison exercent dans les
établissements hospitaliers disposant d’une structure d’urgence. En 2021, seules
351 ELSA ont été recensées, pour 693 structures d’urgences. Leur intervention sur
tout le territoire n’est donc pas assurée, notamment en raison des insuffisances de
la démographie médicale.
Comme les ELSA, les accès aux courts séjours et aux consultations hospitalières
d’addictologie devaient être déployés partout où sont implantés des services
d’urgences. Cet objectif n’a pas non plus été atteint.
Il conviendrait donc, pour accélérer le déploiement des ELSA et des accès aux courts
séjours, de renforcer l’implication des établissements supports des groupements
hospitaliers de territoire, en modifiant, le cas échéant, la circulaire précitée du
26 septembre 2008
30
.
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
81
26. Selon la HAS, le repérage précoce
« concerne la consommation déclarée et repose sur un questionnaire
qui évalue le risque encouru du consommateur. L’objectif est de repérer les consommations à risque de
dommages, à l’aide de seuils quand ils existent »
. L’intervention brève consiste à analyser les résultats des
questionnaires de consommation (HAS,
Outil d’aide au repérage précoce et intervention brève : alcool,
cannabis, tabac chez l’adulte,
2014).
27.
La filière hospitalière a été définie par la circulaire N° DHOS/02/2008/299 du 26 septembre 2008 relative
à la filière hospitalière de soins en addictologie.
28.
Selon la DGOS, à partir d’un questionnaire adressé en 2023 et auquel ont répondu 500 hôpitaux.
29. Circulaire N° DHOS/02/2008/299 du 26 septembre 2008 relative à la filière hospitalière de soins en addictologie.
30.
Une telle refonte a été annoncée par la direction générale de l’offre de soins (DGOS) dans le cadre de
l’enquête et devrait avoir lieu courant 2025.
82
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
Un soin innovant : l’exemple du service spécialisé
dans le traitement des troubles de l’addiction
chez l’adolescent à l’Institut Mutualiste Montsouris
Parmi les quelques services spécialisés dans la prise en charge des jeunes
atteints par des addictions, celui de psychiatrie de l’Institut Mutualiste
Montsouris (IMM) est cité comme une référence par les professionnels
du secteur. L’approche globale des jeunes et la prise en charge de leur
environnement familial et social sont l’une des spécificités de la méthode
mise en place. L’atout du service réside dans son organisation du travail
décloisonnée : les spécialisations médicales d’addictologie, de psychiatrie,
de pédopsychiatrie, de médecine interne, sont affectées simultanément
à plusieurs unités.
Un autre aspect intéressant de l’approche déployée à l’IMM est l’accent
mis sur la prévention des rechutes et la prise en charge précoce. L’hôpital
de jour d’évaluation et d’orientation y propose un repérage avancé et un
traitement pendant huit semaines sans hospitalisation. Ces innovations
se révèlent bénéfiques en termes de guérison et moins coûteuses qu’une
hospitalisation à temps plein pour sevrage.
3.
Un secteur médico-social fragile et cloisonné
Dans le secteur médico-social, la prise en charge des personnes souffrant d’addictions
est assurée essentiellement dans les centres de soin, d’accompagnement et de
prévention en addictologie (CSAPA) et dans les centres d’accueil et d’accompagnement
à la réduction des risques pour les usagers de drogues (CAARUD). Les premiers
remplissent des missions de prévention, d’accueil, d’information, d’évaluation ou
encore d’orientation. Les seconds sont conçus comme des centres de soins pour
les usagers de drogues et proposent aussi du matériel pour prévenir les infections.
Certaines de ces structures dépendent d’établissements de santé, d’autres sont
gérées par des associations. Chacune a son fonctionnement propre, sans que le
lien avec la médecine de ville et le secteur hospitalier fasse toujours l’objet d’un
protocole. De même, l’absence de système d’information partagé fait qu’il n’est pas
toujours possible d’assurer le suivi des patients entre établissements médico-sociaux
et hospitaliers, ce qui peut créer des ruptures dans le parcours de soin.
Ces structures sont peu fréquentées par les jeunes. En 2019, les moins de 25 ans
représentaient seulement 5,8 % des personnes prises en charge par les CSAPA.
Dans les CAARUD, la proportion de moins de 25 ans était de 10 % pour les femmes
et 5 % pour les hommes.
Ces structures devraient davantage jouer leur rôle de prévention et d’orientation.
Il revient aux agences régionales de santé de les soutenir, quand c’est nécessaire,
pour leur permettre d’exercer pleinement leurs fonctions.
Enfin le seul dispositif spécifique aux jeunes - celui des
« consultations jeunes
consommateurs »
(CJC), aujourd’hui au nombre de 260 (réparties en 540 points
d’accueil) - paraît sous-dimensionné. Créées en 2004, les CJC ont pour mission
d’assurer gratuitement l’accueil, l’information, l’évaluation, la prise en charge
brève et l’orientation des jeunes et de leur entourage par un médecin, un infirmier
ou un psychologue. Elles sont rattachées aux CSAPA et financées par leur dotation.
Elles font l’objet d’études qualitatives dans certains territoires et sont jugées utiles
et pertinentes par les agences régionales de santé (ARS) mais n’ont pas été évaluées
nationalement.
Le ministère de la santé ne dispose pas d’informations nationales sur leur activité.
Certaines ARS se sont en revanche intéressées au fonctionnement dans leur
ressort du dispositif des
« consultations jeunes consommateurs »
. En Bretagne,
par exemple, en 2023, 2 091 jeunes atteints d’une addiction à l’alcool et aux
drogues ont ainsi été suivis dans 16 CJC, soit 131 jeunes par CJC, pour un coût
moyen de 540 euros par jeune et par an.
Une évaluation au niveau national des CJC semble nécessaire. En fonction des
résultats de cette évaluation, leur développement pourra être préconisé, afin de
renforcer leurs moyens humains et leur déploiement sur le territoire, au plus près
des besoins.
4.
La nécessité d’une meilleure coordination pour fluidifier
le parcours de soins
L’articulation entre la médecine de ville, le secteur sanitaire et le secteur médico-social
mériterait d’être renforcée pour assurer la continuité des soins et du suivi, éviter les
ruptures dans les parcours de soins, et ainsi renforcer l’efficacité de la prise en charge
des jeunes.
Certaines agences régionales de santé cherchent à améliorer la coordination des
intervenants. Dans la région Grand Est, par exemple, des commissions départe-
mentales d’addictologie coordonnent l’ensemble des acteurs de l’offre de soins.
En Normandie, des pôles de prévention ont été créés pour assurer la concertation
entre les acteurs locaux de la prise en charge des addictions. Il pourrait donc
être envisagé de confier, dans chaque ARS, la coordination de l’offre de soins en
addictologie au référent santé mentale infanto-juvénile, en lui demandant de
suivre spécifiquement les addictions aux drogues et à l’alcool.
L’amélioration de la coordination des soins dans les ARS doit aussi faciliter l’accès
des patients à l’information. La région Bourgogne-Franche-Comté a ainsi créé et
mis en ligne un répertoire de l’offre de soins en addictologie. Une telle démarche
pourrait utilement être généralisée, en ciblant spécifiquement les soignants et les
établissements spécialisés dans la jeunesse.
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
83
B.
Des modalités de financement peu propices
au pilotage de la dépense
Chaque structure est régie par un système de financement particulier, sans qu’il
soit toujours possible d’identifier les dépenses relatives aux jeunes et aux addictions
aux drogues.
1.
Des dispositifs disparates et mal ciblés
Le financement des activités hospitalières relève de plusieurs mécanismes, ce qui
nuit à sa lisibilité. Ainsi, il n’est pas possible de calculer les coûts d’hospitalisation
des jeunes souffrant d’addictions aux drogues. Seuls ceux qui résultent de soins
prodigués par les services de médecine peuvent être établis avec précision, car ils
font l’objet d’un suivi dans le cadre de la tarification à l’activité des établissements
31
.
Dans les services de psychiatrie, les coûts liés au soin des patients souffrant d’addiction
ne peuvent pas être identifiés en raison du mode de financement propre à ce secteur
32
.
Les équipes de liaison et les consultations hospitalières sont, quant à elles, financées
respectivement par le fonds d’intervention régional (FIR) et par une mission d’intérêt
général (MIG). Une telle différence est source de complexité alors que les équipes
sont souvent les mêmes. Une unification des financements permettrait de donner
une meilleure lisibilité aux actions territoriales et de définir une stratégie régionale
adaptée aux besoins
33
.
Dans le secteur médico-social, le financement des établissements se fait par le
volet médico-social de l’objectif national des dépenses d’assurance-maladie, et
demeure tout aussi peu traçable
Il importe donc de mieux identifier le financement des prises en charge à l’hôpital
et dans les établissements médico-sociaux pour améliorer la visibilité et le pilotage
de l’offre de soins aux jeunes souffrant d’addictions.
2.
Un manque de lisibilité du fonds de lutte contre les addictions
Un fonds de lutte contre les addictions (FLCA), géré conjointement par l’État et
la Caisse nationale d’assurance maladie, a été créé en 2018. Doté d’un budget
annuel de 130 M€ depuis 2020, il contribue au financement d’actions réalisées dans
le cadre des plans nationaux de lutte contre les addictions. Si les financements
visent des actions nationales ou locales
34
, le FLCA ne distingue pas toujours ses
financements en fonction de la nature de l’addiction.
84
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
31.
Ainsi, selon l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, en 2023, 15 113 séjours ont été
recensés, pour un coût total de 11,7 M€.
32.
Dans les secteurs de la psychiatrie et des soins médicaux et de réadaptation, qui ne sont pas financés par
la tarification à l’activité mais par des dotations, il n’est pas possible d’évaluer le coût d’une hospitalisation
spécifique, faute de comptabilité analytique au niveau de chaque établissement.
33.
Des travaux sont actuellement menés par la DGOS pour faire évoluer les modalités de financement des
établissements de santé afin d’améliorer leur lisibilité.
34.
Au niveau régional, sur 388 projets financés, 181 visaient les jeunes. Un montant de 15,8 M€ y a été
alloué. À l’échelle locale, 187 projets ont été financés pour un montant de 1,2 M€.
Concernant les projets ciblant spécifiquement les jeunes, sur la période 2018-2023,
hors tabac et addictions comportementales, 30 M€ ont été investis pour la
réalisation de campagnes
d’information, de sensibilisation ou de prévention,
des appels à manifestations d’intérêt ou encore des actions de recherche. Il n’est
pas possible d’isoler les financements propres à la lutte contre l’alcool et les drogues
illicites, souvent englobés dans des programmes plus vastes. Les autorités sanitaires
gagneraient à identifier les dépenses relatives à la lutte contre les addictions
des jeunes aux drogues et à l’alcool afin d’en évaluer l’efficacité et d’en renforcer
le pilotage.
III.
La nécessité d’une politique de prévention
plus ambitieuse et mieux coordonnée
Pour prévenir les addictions, il importe d’agir le plus tôt possible, et avant que
les problèmes ne se manifestent. L’implication de l’environnement familial est
indispensable, tout comme une politique de prévention assise sur des campagnes
de communication et de sensibilisation des jeunes. Cependant les efforts en la
matière sont encore insuffisants, comme le montrent notamment les résultats du
sondage réalisé à la demande de la Cour auprès des jeunes
35
.
La lutte contre les addictions des jeunes implique ainsi de mobiliser tous les acteurs
publics, au niveau national comme territorial - y compris au sein de l’Éducation
nationale - ainsi que les lieux d’accueil et d’accompagnement sanitaire et social
comme les maisons des adolescents.
Une politique de communication plus active doit donc être conçue et partagée par
l’ensemble des acteurs. Un contrôle plus ferme des conditions dans lesquelles les
jeunes ont accès aux drogues illicites et à l’alcool doit être mis en place.
A.
Faire émerger un objectif de politique publique partagé
Les exemples réussis des politiques conduites dans les pays du Nord plaident pour
une approche plus volontaire et plus transversale de la prévention et du soin des
addictions des jeunes aux drogues illicites et à l’alcool. Elle doit aussi se fixer des
objectifs chiffrés de diminution de leur consommation.
1.
Une impulsion interministérielle trop faible
L’action des pouvoirs publics français s’appuie sur une stratégie interministérielle
36
pilotée par la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites
addictives (Mildeca), placée sous l’autorité du Premier ministre.
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
85
35.
28 % des jeunes citent ces demandes comme prioritaires, les classant en tête des propositions d’actions.
36.
Stratégie interministérielle de mobilisation contre les conduites addictives 2023-2027.
86
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
Cette stratégie manque toutefois d’objectifs de santé publique clairs, notamment
en termes de diminution de la consommation d’alcool et de drogues chez les jeunes.
Elle vise ainsi à faire reculer l’âge des expérimentations, à réduire les consommations de
produits psychoactifs, à prévenir les conduites addictives des enfants et jeunes
adultes, à rendre les produits moins accessibles, ou encore à lutter contre la
criminalité, la violence et l’insécurité liées aux trafics, sans que des cibles chiffrées
ne soient mentionnées.
Il conviendrait donc que la stratégie interministérielle portée par la Mildeca définisse
des objectifs de baisse de la consommation d’alcool et de drogue chez les jeunes,
chiffrés par le ministère de la santé et inscrits dans un calendrier pluriannuel, en
s’appuyant sur des mesures dont la mise en œuvre serait cadencée dans le temps.
Une plus grande mobilisation du ministère de l’éducation nationale est également
nécessaire. L’âge étant l’un des principaux facteurs de vulnérabilité, les collèges,
les lycées et les établissements d’enseignement supérieur ont en effet un rôle-clé à
jouer pour identifier les jeunes à risque, les sensibiliser aux dangers des drogues et
les conseiller.
Des outils ont été mis à disposition des personnels de l’Éducation nationale sur le
site Éduscol
37
. À ce stade, aucun suivi ne permet d’en mesurer la mise en œuvre.
Une stratégie nationale de développement des compétences psycho-sociales chez
les enfants et les jeunes (CPS)
38
a été lancée. Il s’agit de renforcer les compétences
sociales, émotionnelles et cognitives des jeunes pour améliorer leur capacité à
s’intégrer et à entrer en relation avec les autres. Selon l’Organisation mondiale
de la santé, cette démarche permet de prévenir les conduites à risque et a un
effet favorable sur la santé mentale, le climat scolaire et la réussite éducative des
jeunes. Entre 2018 et 2021, 240 projets ont été financés par le fonds de lutte contre
les addictions, pour un montant total de 26 M€. Après évaluation, il pourrait être
pertinent d’accélérer la mise en œuvre de ce programme.
2.
Un pilotage territorial à mieux coordonner et à dynamiser
Au niveau régional, la situation est contrastée mais se caractérise par un manque
de dynamisme, même si douze des dix-huit ARS ont déjà signé des feuilles de route
régionales avec la Mildeca. Il convient d’inciter les agences restantes à faire de même.
Dans cinq agences régionales de santé, le projet régional de santé ne comporte
aucun chapitre spécifique sur les addictions. Certaines ARS prévoient toutefois de
définir dans ce domaine une feuille de route régionale.
Une impulsion plus forte est donc nécessaire pour harmoniser les pratiques et veiller à la
déclinaison, dans tous les projets régionaux de santé, de la feuille de route de la Mildeca.
Les projets régionaux de santé doivent par ailleurs se fixer quelques objectifs clairs en
termes de diminution de la consommation de drogue et d’amélioration de l’accès aux
soins des jeunes souffrant d’addictions, notamment dans le secteur médico-social.
38. Instruction interministérielle n° DGS/SP4/DGCS/DGESCO/DJEPVA/DS/DGEFP/DPJJ/DGESIP/
DGER/2022/131 du 19 août 2022 relative à la stratégie nationale multisectorielle de développement des
compétences psychosociales chez les enfants et les jeunes – 2022-2037
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
87
Les exemples de l’Islande et du Danemark :
une mobilisation de toute la société pour une prévention renforcée
Le Danemark a déployé le programme
« MOVE »
, qui mobilise dans les
territoires tous les acteurs, associatifs, soignants, éducatifs, élus locaux,
autour d’un programme de prévention ambitieux. Il permet aux jeunes
de 15 à 25 ans de bénéficier d’un suivi individualisé, avec un entretien
d’évaluation, douze séances de traitement hebdomadaires et un traitement
de suivi pendant six mois. Des liens sont établis entre les acteurs pour que
les jeunes qui suivent le programme aient accès à des aides (logement,
formation, aide à la recherche d’emploi et aux services sociaux). La moitié
des jeunes interrogés 21 mois après le début de traitement ne consommaient
plus de drogue et étaient davantage insérés socialement. Des analyses
économiques ont aussi établi que le programme MOVE coûtait moins cher
que les traitements standards de prise en charge de la toxicomanie et de
l’alcoolisme. Les économies réalisées par la société s’élèvent en moyenne à
environ 27 000 couronnes danoises, soit 3 600 € par personne au cours des
cinq premières années suivant la participation des jeunes au traitement
39
.
L’Islande a aussi obtenu de bons résultats avec des actions fortes :
l’interdiction de la publicité pour de l’alcool et de la vente d’alcool aux
moins de 20 ans, l’édiction d’un couvre-feu à 22 heures pour les moins de
16 ans, ou encore l’investissement dans la construction d’aires sportives et
le développement associatif, ont permis de réduire nettement l’alcoolisme
et la consommation de cannabis chez les jeunes. Entre 1998 et 2018, le
pourcentage des jeunes de 15 à 16 ans qui se sont trouvés au moins une fois
en état d’ébriété sur une période d’un mois est passé de 42 % à 5 % et la part
de ceux qui ont consommé du cannabis serait passée de 17 % à 5 %
40
.
Un autre facteur de succès est le fait que, comme au Danemark, tous les
acteurs publics ont été mobilisés : les associations de jeunesse, les missions
locales et les structures sportives et, plus généralement, tous les lieux
fréquentés par les jeunes. L’Islande a également veillé à l’implication des
jeunes pour renforcer leur adhésion aux traitements.
B.
Des outils plus efficaces à mettre en place
Il importe de prévenir le plus tôt possible les comportements à risques des jeunes
grâce à des informations sur les risques encourus, et de s’appuyer sur une large palette
d’outils, intégrant une action sur la vente d’alcool.
39.
Autorité danoise des Affaires sociales et du Logement,
Fem kritiske succesfaktorer for implementering af
MOVE,
avril 2024.
40. Gudberg Konrad Jonsson et Harvey Milkman,
Perspective: Iceland Succeeds at Preventing Teenage
Substance Use,
Future Governments Vol: 7, 2019.
1.
Des campagnes de communication destinées à la jeunesse
à repenser
La France n’a pas déployé de campagne de communication d’ampleur pour
prévenir la consommation de drogues, mobiliser toute la société sur ce thème
et mieux impliquer la jeunesse
41
. Son absence est motivée par des doutes sur
l’efficacité de cet outil. De fait, la campagne dénommée
National Youth Anti-Drug
Media Campaign,
conduite entre 1999 et 2002 aux États-Unis, s’est révélée contre-
productive. Elle a en effet entraîné une normalisation de la consommation du
cannabis chez les jeunes
42
. En revanche, celle intitulée
Above the Influence,
lancée
également aux États-Unis et qui visait à lier autonomie et non-consommation de
drogues
43
, a eu des effets positifs. Ces épisodes mettent en évidence l’importance
de veiller à la manière dont le message est formulé. Ils ne remettent pas en cause
l’utilité même de ces vastes campagnes de communication.
Il convient donc de poursuivre ces efforts pour utiliser les bons termes et les
bons canaux d’expression, notamment les réseaux sociaux populaires auprès des
jeunes, et d’amplifier la dynamique de communication de prévention en santé
44
.
La Mildeca a ainsi noué un partenariat avec l’application de discussion
Snapchat
,
qui permet aux contenus destinés à la prévention de la consommation de drogues
et des conduites addictives d’être proposés au sein d’un portail éducatif applicatif,
« Heads Up »
. Cette initiative doit être évaluée et, le cas échéant, utilisée à l’appui
du lancement d’une campagne ciblée d’information et de sensibilisation des jeunes
sur la prévention des addictions aux drogues et à l’alcool.
2.
Une action résolue à mener sur le prix de vente
des boissons alcooliques
Dans les conclusions du sondage réalisés à la demande de la Cour auprès des
jeunes, l’une des propositions les plus fréquemment formulées par ces derniers
est de limiter la vente d’alcool, en particulier d’en faire respecter l’interdiction par
des sanctions renforcées, et même d’en augmenter le prix.
L’article L. 3342-1 du code de la santé publique interdit la vente d’alcool aux
jeunes de moins de 18 ans. La publicité est autorisée sur Internet, sauf sur des
sites principalement destinés à la jeunesse ou consacrés au sport ou à l’activité
physique.
La vente à des mineurs de boissons alcooliques est punie de 7 500 € d’amende
depuis la loi du 21 juillet 2009. Il en est de même de l’offre de ces boissons à titre
gratuit à des mineurs dans les débits de boissons et tous les commerces ou lieux
88
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
41.
Des campagnes plus limitées ont toutefois été déployées, comme « C’est la base », mise en œuvre par
Santé publique France en 2023.
42.
Robert Hornik, Lela Jacobsohn, Robert Orwin, Andrea Piesse, Graham Kalton,
Effects of the National
Youth Anti-Drug Media Campaign on youths
,
American Journal of Public Health, 2008.
43. Michael D. Slater, Kathleen J. Kelly, et alii,
Assessing media campaigns linking marijuana non-use with autonomy
and aspirations: “Be Under Your Own Influence” and ONDCP’s “Above the Influence”,
Prevention Science, 2011.
44. Selon la Mildeca, les campagnes sont utiles pour développer une meilleure appréhension des risques,
afin de mieux s’en prémunir et savoir les réduire. Les jeunes peuvent être avertis des dangers liés aux diverses
consommations. Santé publique France, de son côté, réalise un travail en amont du lancement des campagnes de
communication.
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
89
publics. La loi impose en outre à tout vendeur d’alcool d’exiger du client une preuve
de sa majorité, notamment par la production d’une pièce d’identité
45
.
La Cour avait relevé en 2016 que ces obligations n’étaient pas toujours respectées
46
.
L’enquête dont est issu le présent chapitre a montré que c’est encore le cas. En effet,
des achats tests montrent qu’une majorité de magasins continuent de vendre de
l’alcool aux mineurs. Une enquête menée par Addictions France en 2021 a révélé
que la moitié des magasins testés n’affichait pas la signalétique d’interdiction de
vente aux mineurs. Dans 80 % des cas, il était possible d’acheter de l’alcool sans que
la carte d’identité soit demandée. Lorsqu’elle l’était, la vente avait tout de même
lieu dans six cas sur dix
47
. Il importe particulièrement, sur ce sujet aux conséquences
potentiellement lourdes pour les jeunes, que la loi soit pleinement respectée.
L’introduction d’un prix minimum des boissons alcooliques pourrait aussi se révéler utile
pour détourner les jeunes de l’alcool. L’instauwn d’un prix plancher, fondé sur la teneur
en éthanol des produits alcooliques, est susceptible d’être efficace
48
. Son impact se
concentrerait en effet principalement sur les produits les moins chers, qui sont consom-
més de manière disproportionnée par les gros buveurs. Au Royaume-Uni, le National
Institute for Clinical Excellence (NICE) a souligné dès 2012 l’intérêt de ce dispositif pour
protéger les jeunes à partir de 18 ans. En Colombie-Britannique, les prix minimums
ont été progressivement ajustés à la hausse entre 1989 et 2010. En moyenne, chaque
augmentation de 10 % des prix minimums a été suivie d’une réduction de 10 % de la
consommation, de 32 % de la mortalité et de 9 % des hospitalisations dues à l’alcool
pour l’ensemble de la population. En Écosse, un prix minimum a été instauré en 2018. Il
est crédité d’une réduction globale de 13,4 % des décès et de 4,1 % des hospitalisations
imputables à l’alcool et d’une baisse de la consommation de 3 %. Les baisses de ventes
les plus importantes ont concerné les produits dont le prix avait le plus augmenté
49
.
D’autres éléments tendent à prouver qu’une telle mesure pourrait avoir un impact
important sur la consommation d’alcool des jeunes. Une enquête a ainsi montré
que les moins de 25 ans citaient le prix comme critère le plus important lorsqu’ils
choisissent un produit alimentaire
50
. Les réponses à l’enquête réalisée auprès des
jeunes à la demande de la Cour des comptes indiquent que 67 % d’entre eux jugent
cette mesure efficace. Elle avait déjà été recommandée par la Cour
51
et envisagée
dans des rapports parlementaires
52
.
45.
Depuis l’adoption de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la
santé et aux territoires (dite
« loi HPST »
), l’interdiction de vente des boissons alcooliques a été instaurée
pour tous les mineurs. Ensuite, la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a édicté
une obligation, pour la personne qui délivre des boissons alcooliques, d’exiger une preuve de majorité.
46.
Cour des comptes,
Les politiques de lutte contre les consommations nocives d’alcool,
rapport public
thématique, juin 2016.
47.
https://addictions-france.org/datafolder/uploads/2021/10/DP_AddictionsFrance_Testing.pdf
48.
Une étude française menée par Fabrice Etilé a ainsi montré qu’agir sur les prix constitue un levier
efficace pour réduire la consommation.
49.
minimum-unit-pricing-policy-is-protecting-lives
50.
Enquête Toluna Harris Interactive pour France assos santé :
Les Français et les enjeux de santé liés à leur
environnement de vie
,
décembre 2023.
51.
Cour des comptes,
Les politiques de lutte contre les consommations nocives d’alcool,
rapport public
thématique, juin 2016.
52.
Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale,
Rapport d’information en conclusion des
travaux du Printemps social de l’évaluation,
juin 2023 et Mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité
sociale et commission des finances,
La fiscalité comportementale en santé : stop ou encore ?,
mai 2024.
90
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
La légalisation et l’augmentation de la consommation du cannabis
Il existe trois catégories de systèmes juridiques dans le monde : les
pays qui interdisent la consommation de cannabis (dont la France),
ceux qui en ont dépénalisé la consommation sans pour autant en
légaliser la commercialisation (32 pays dans le monde) et ceux qui
ont complètement légalisé le cannabis, c’est-à-dire qui autorisent
tant sa consommation que sa commercialisation (12 pays).
Dans la première catégorie, c’est-à-dire les pays qui ont interdit l’usage
du cannabis, figurent notamment la France, l’Irlande, la Suède et le
Danemark. Ainsi, en France, l’article L. 3421-1 du code de la santé publique
dispose
que
« l’usage illicite de l’une des substances ou plantes classées
comme stupéfiants est puni d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros
d’amende »
. Il ajoute toutefois que l’action publique peut être éteinte
par le versement d'une amende forfaitaire d’un montant de 200 €.
La deuxième catégorie est composée des pays ayant dépénalisé l’usage du
cannabis (ce qui signifie que l’État renonce à poursuivre les consommateurs
de cannabis). Ils sont au nombre de 32, l’un des plus anciens étant les
Pays-Bas, depuis le 1
er
janvier 1976. Parmi les autres pays concernés se
trouvent aussi l’Espagne, le Portugal, l’Autriche, l’Italie ou la Grèce.
Enfin la troisième catégorie est celle des pays ayant abrogé l’interdiction
de consommer du cannabis, et l’ayant donc légalisé. Ces pays sont au
nombre de 12 dont l’Uruguay, qui est le premier à l’avoir fait, en 2013,
suivi par onze États, dont trois européens : Malte, le Luxembourg et,
depuis le 1
er
avril 2024, l’Allemagne, sous des conditions strictes.
Quels que soient leurs objectifs, la légalisation et la dépénalisation
du cannabis conduisent souvent à une hausse de sa consommation,
avec des conséquences du point de vue de la lutte contre les
addictions. Ainsi, le nombre d’individus déclarant avoir consommé
du cannabis dans l’année a augmenté de sept points au Canada
53
.
En Uruguay, dans les cinq ans qui ont suivi la légalisation, le
nombre de consommateurs de cannabis a progressé de 30 %
54
.
53.
Le taux de consommation de cannabis était de 14,8 % en 2017, année précédant la légalisation,
54.
Investigación y Evaluación | JND (www.gub.uy) (Cette étude ne distingue pas les jeunes de 12 à 25 ans
du reste de la population).
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
91
Au sein de l’Union européenne, 21 pays autorisent le cannabis médical,
dont la France, à titre expérimental. La France autorise aussi la vente du
cannabidiol (CBD), une substance naturellement présente dans la plante
de cannabis (ou chanvre). Il se distingue du tétrahydrocannabinol (THC),
principal composé psychoactif du cannabis, et n’est pas classé comme
stupéfiant ou psychotrope. À ce jour, aucune étude sérieuse n’a été produite
en France sur les effets sanitaires de la consommation du CBD.
Le sondage réalisé à la demande de la Cour a montré que 43 % des
jeunes de 12 à 25 ans considéraient la légalisation du cannabis comme
inefficace pour prévenir les addictions aux drogues. 22 % considèrent
la légalisation comme efficace, 23 % comme moyennement efficace et
12 % n’ont pas d’avis.
Conclusion et
recommandations
La consommation de drogues illicites et d’alcool par les jeunes,
leur banalisation parfois, et les effets coûteux sur les plans sociaux
et économiques des addictions, sont un enjeu de santé publique
majeur et ce d’autant plus que la situation reste préoccupante en
France.
La réussite des politiques de prévention et de lutte contre ce fléau
mises en œuvre dans les pays du Nord montre que la lutte contre
les addictions peut être conduite plus efficacement. Elle passe par
une politique de prévention et de soin ambitieuse, conçue pour
mobiliser toute la société, afin de préserver l’avenir des jeunes de
12 à 25 ans.
La Cour formule à cet effet les recommandations suivantes :
1.
conduire une étude épidémiologique sur la situation des
jeunes souffrant d’addictions
(ministère de la santé et
de l’accès aux soins, Observatoire français des drogues
et des tendances addictives, Santé publique France)
;
2.
dresser un état des lieux, agrégé nationalement, de l’offre
médico-sociale destinée aux jeunes en état de dépendance aux
drogues ou à l’alcool et doter la stratégie interministérielle
de mobilisation contre les conduites addictives d’objectifs
chiffrés de réduction de la consommation de drogue
et d’alcool chez les jeunes
(ministère de la santé et de
l’accès aux soins, Caisse nationale de l’assurance maladie,
Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les
conduites addictives, Observatoire français des drogues
et des tendances addictives, Santé publique France)
;
92
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
3.
mobiliser les acteurs du monde éducatif, sanitaire et médico-
social pour sensibiliser les jeunes aux risques addictifs des
drogues illicites et de l’alcool, ainsi que pour repérer et
orienter les jeunes consommateurs
(ministère de l’éducation
nationale, ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche, ministère de la santé et de l’accès aux soins)
;
4.
lancer une campagne d’ampleur destinée aux jeunes
pour les sensibiliser aux effets nocifs de la consommation
de drogues illicites et d’alcool
(ministère de la santé et
de l’accès aux soins, Mission interministérielle de lutte
contre les drogues et les conduites addictives)
;
5.
mettre en place un prix minimum de l’unité d’alcool pur
contenu dans chaque boisson, pour prévenir et réduire
notamment la consommation des jeunes
(ministère de
la santé et de l’accès aux soins, ministère du budget et
des comptes publics)
(recommandation reformulée).
93
LES ADDICTIONS DES JEUNES AUX DROGUES ILLICITES ET À L’ALCOOL
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
94
Réponses reçues
à la date de la publication
Réponse de la ministre d’État, ministre de l’Éducation nationale,
de l’enseignement supérieur et de la recherche
.........................................................
94
Réponse du président de la Mission interministérielle de lutte
contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA)
.......................................
97
Réponse de la directrice générale de Santé publique France
..................................
98
Destinataires n’ayant pas répondu
Madame la ministre de la santé et de l’accès aux soins
Monsieur le ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget
et des comptes publics
Monsieur le directeur général de la Caisse nationale de l’assurance maladie
Réponse de la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale,
de l’enseignement supérieur et de la recherche
Vous avez adressé un chapitre destiné à figurer dans le rapport public annuel 2025
de la Cour des comptes et intitulé « les addictions des jeunes aux drogues illicites et
à l’alcool : un enjeu de prévention et de prise en charge ».
Je souhaite porter à votre connaissance mes remarques sur la recommandation n° 3
adressée à mon département ministériel, et formulée en conclusion de ce projet de
chapitre, par laquelle la Cour préconise de
« mobiliser les acteurs du monde éducatif,
sanitaire et médico-social pour sensibiliser les jeunes aux risques addictifs des drogues
illicites et de l’alcool, ainsi que pour repérer et orienter les jeunes consommateurs »
.
Je rappelle l’importance de la participation des acteurs du monde éducatif à la
sensibilisation des jeunes aux risques d’addiction et des actions conduites en la
matière.
S’agissant tout d’abord de la prévention primaire réalisée à l’école, dans le cadre
des comités d’éducation à la santé, la citoyenneté et l’environnement (CESCE),
chaque établissement scolaire du second degré met en œuvre des actions de
sensibilisation et de prévention en direction des élèves et de leurs parents,
notamment en matière de prévention des conduites addictives.
Le CESCE s’appuie sur l’expertise du pôle santé / social (médecin scolaire, infirmier
scolaire, assistant de service social scolaire, notamment). Ce pôle peut proposer
l’organisation de séances de prévention conduites par ses soins et / ou s’appuyer
sur l’expertise de partenaires extérieurs locaux : référent police nationale, unité
éducative en milieu ouvert de la protection judiciaire de la jeunesse (UEMO-PJJ),
maison des adolescents (MDA), consultation jeune consommateur (CJC), centres
d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de
drogues (CAARUD).
Par ailleurs, le service social en faveur des élèves (SSFE), service social spécialisé de
l’Éducation nationale, est chargé de conduire la politique de prévention des conduites
addictives et de mettre en œuvre un accompagnement social individualisé.
Les conduites addictives, repérées chez les collégiens et les lycéens, se manifestent
bien souvent à la suite d’un décrochage scolaire. Dans ce cas, le SSFE doit se fixer
pour objectif de limiter la consommation du jeune en l’orientant vers une prise en
charge médico-sociale adaptée. À ce titre, les MDA et les CJC sont des relais de
premier plan.
Dans des situations plus aigües, les conduites addictives peuvent révéler des difficultés
éducatives intrafamiliales, voire des dysfonctionnements familiaux graves. Le SSFE a
vocation à soutenir le jeune et sa famille en sollicitant une mesure de protection de
l’enfance dans un cadre administratif si possible, judiciaire le cas échéant.
Lorsque les conduites addictives repérées chez le jeune engendrent des conduites
délictuelles avec des retentissements sur le parcours scolaire et/ ou le parcours de
vie, le SSFE pourra, après évaluation de la situation, solliciter une mesure judiciaire
d’investigation éducative auprès du parquet des mineurs. Dans la majorité des
situations rencontrées, I’UEMO-PJJ contacte l’assistant de service social de
l’établissement scolaire en vue de co-construire, avec le jeune, un parcours scolaire
adapté, conformément aux préconisations de la circulaire n°
2015-121 du 3 juillet 2015.
Il y a lieu de souligner également l’importance de la formation continue des
personnels sociaux (assistants de service social et conseillers techniques) et de
santé intervenant dans les établissements d’enseignement du second degré. Ces
personnels bénéficient régulièrement, notamment par le biais de leur réunion de
service ou d’invitation à des colloques, de l’expertise des partenaires experts de
cette problématique. À cet égard, il convient de citer le lien régulier établi entre
la mission métropolitaine des conduites à risques et les services de l’Éducation
nationale, pour la région Île-de-France, ou l’appui du réseau des MDA et des
CAARUD, sur l’ensemble du territoire.
RÉPONSES REÇUES À LA DATE DE LA PUBLICATION
95
En outre, à l’école, dans le cadre de la stratégie nationale multisectorielle de
développement des compétences psychosociales (CPS) chez les enfants et les
jeunes 2022-2037, plusieurs mesures ont été mises en œuvre :
-
création de délégations académiques ;
-
formation des personnels ;
-
généralisation de cours d’empathie dans les écoles ;
-
publication de ressources et mise en ligne d’une page Éduscol dédiée.
Les inspecteurs d’académie ont été formés à la mise en œuvre des comités
territoriaux chargés du suivi de cette stratégie et, notamment, des programmes
« probants » (par exemple : Unplugged) qui contribuent à la prévention des
conduites addictives.
Dans l’enseignement supérieur, la lutte contre les addictions et les conduites
addictives est un enjeu majeur, désormais inscrit dans le code de l’éducation : la
mission de prévention des conduites addictives est assignée aux établissements
et aux services de santé étudiante, réformés par le décret n° 2023-178 du 13 mars
2023 relatif aux services universitaires et interuniversitaires de santé étudiante,
modifiant les articles D. 714-20 à D. 714-27 du code.
En effet, l’entrée dans la vie étudiante se traduit par l’éloignement du foyer familial,
de nouveaux rythmes de vie, une pression académique, qui génèrent des sources
de stress et une fragilisation de la santé mentale des étudiants susceptibles
d’induire diverses consommations de produits psychoactifs. C’est dans un objectif
de prévention primaire qu’une information est délivrée à chaque étudiant et qu’un
examen de santé systématique est proposé à tout étudiant au cours de son cursus
dans l’enseignement supérieur.
La stratégie de mon ministère s’articule autour de la construction d’outils de
réduction des risques et plus largement, d’une réflexion sur la mise en place d’un
cadre d’études favorisant la promotion de la santé, au sens du bien-être physique,
mental et social. L’environnement est entendu au sens des différents lieux de vie
étudiants : les locaux et espaces d’études ou de formation, de restauration, d’activités
physiques, de logement, d’activités culturelles. Une réflexion s’organise autour du
concept d’université promotrice de santé, lieu protecteur pour ses étudiants ; une
animation nationale contribue à cette réflexion. Les établissements conduisent
des actions en faveur de la promotion d’environnements favorables à la santé, qui
reposent sur une démarche décloisonnée entre les services. Les services de santé
étudiante et les étudiants relais santé jouent un rôle clé dans ces dispositifs.
Dans cet esprit, un premier appel à manifestation d’intérêt a permis de conduire
4 projets dans des établissements (universités et écoles d’ingénieurs) entre 2022
et 2025. Il a été suivi d’un second appel à projet concernant 4 grandes écoles. Ces
projets, financés par la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les
conduites addictives ont permis de mobiliser des actions multiples et des outils
variés. Les expérimentations qui en sont issues ont vocation à être capitalisées.
En outre, dans le cadre de la stratégie nationale multisectorielle de développement
des CPS chez les enfants et les jeunes 2022-2037, que j’évoquais
supra
, une feuille
de route est dédiée au déploiement des CPS dans l’enseignement supérieur. Le
renforcement de la mobilisation de ces compétences chez les étudiants et les
personnels permettra ainsi de lutter plus efficacement contre les addictions.
Enfin, un guide dédié à l’accompagnement des organisateurs de week-end
d’intégration et de rassemblement festifs a été publié en septembre 2024. Une
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
96
RÉPONSES REÇUES À LA DATE DE LA PUBLICATION
97
large communication y a été associée. La majorité des 62 services de santé
étudiante développent des actions de réduction des risques, en lien avec les
partenaires de leurs territoires.
La stratégie globale conduite dans l’enseignement supérieur permet de prévenir
l’entrée dans les addictions et d’accompagner la sortie des conduites addictives
pour les addictions à des produits licites comme à des substances illicites. Elle
sera poursuivie en 2025, à travers, notamment, la formalisation de la feuille de
route en matière de développement des CPS, et l’organisation d’une conférence
de prévention étudiante, qui permettra de mobiliser largement les acteurs autour
de la notion d’université promotrice de santé.
Réponse du président de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues
et les conduites addictives (MILDECA)
En premier lieu, je souhaite vous remercier pour la prise en compte de nos
observations formulées en réponse au relevé d’observations provisoires (ROP)
relatif à l’enquête de la Cour des comptes sur les addictions des jeunes aux drogues
et à l’alcool S2024-1250 transmises le 9 octobre dernier.
À la lecture du chapitre, je souhaite formuler à nouveau des remarques qui avaient
été portées à la connaissance de la Cour par la réponse au ROP de l’Observatoire
français des drogues et des tendances addictives (OFDT) et qui concernent l’existence
de deux grandes enquêtes épidémiologiques en France (Enclass et ESCAPAD) qui
permettent de documenter les évolutions des usages de substances psychoactives
Ceci doit conduire à envisager la reformulation de trois passages.
La Cour relève que
« Le niveau de consommation de drogues et d’alcool est suivi
drogue par drogue dans notre pays mais, en termes épidémiologiques, l’addiction
n’est pas mesurée. »
et que
« D’un point de vue épidémiologique, la France ne
dispose pas d’un système d’information ni d’un dispositif de suivi du nombre de
jeunes qui souffrent d’addiction ».
Étant donné la très faible prévalence du trouble de l
'
usage de substances
(addiction) en population générale adolescente, il n
'
est pas possible de mesurer
ces indicateurs auprès de cette population car les analyses statistiques ne seraient
pas exploitables, à l
'
exception du cannabis (cf.
infra
). Il ne s’agit donc pas d’une
lacune dans le dispositif d’observation scientifique des tendances addictives chez
les jeunes français. En effet, la combinaison de ces deux dispositifs de l’OFDT
(Enclass et ESCAPAD) permet de fournir des résultats scientifiques au plus haut
niveau des standards internationaux, notamment du fait de taux de réponses
excellents, dépassant les 75 %.
COUR DES COMPTES
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Réponse de la directrice générale de Santé publique France
Vous avez bien voulu nous adresser chapitre destiné à figurer dans le rapport
public annuel 2025 de la Cour des comptes et relatif aux addictions des jeunes
aux drogues illicites et à l’alcool : un enjeu de prévention et de prise en charge.
Santé publique France partage la majorité des résultats et recommandations de
cette enquête. Celle-ci couvre l’ensemble des aspects du problème : de la prise en
charge à la prévention y compris les mesures réglementaires et fiscales.
Mettre l’accent sur l’addiction des jeunes est classique en raison de l’importance
symbolique de la jeunesse pour la société et son avenir. Il est néanmoins nécessaire
de rappeler que les jeunes ne peuvent pas être considérés comme une population
à part du reste de la population. Les adolescents, jeunes adultes et les autres
adultes sont en interaction permanente et sont irrigués par les mêmes influences
culturelles, sociétales et commerciales.
Il est également nécessaire de rappeler que les consommateurs de substances
psychoactives ne souffrent pas tous d’addiction, concept d’ailleurs assez difficile
à objectiver et à mesurer comme le rappelle la Cour. Si près d’un tiers (28 %) des
jeunes Français de 15 à 24 ans ont consommé au moins un produit stupéfiant au
cours des douze derniers mois d’après le chapitre de la Cour (à comparer à l7 %
dans l’Union européenne), ils ne relèvent pas tous, loin de là, d’un dispositif de
soins et de prise en charge addictologique. Il est important d’avoir à l’esprit qu’il
existe un continuum de comportements et qu’il faut résister à la tendance de tout
classer sous une même étiquette d’addiction.
Santé publique France partage le besoin d’ajouter un volet « prévention de
l’entrée dans la consommation de substances psychoactives des jeunes » en plus
de l’approche de sortie des consommations ou de réduction des risques festifs
actuellement en place.
Ceci est réalisé entre autres par des programmes de développement des compétences
psychosociales des jeunes comme recommandé par plusieurs expertises collectives
de l’Inserm. Certains programmes européens, tel qu’Unplugged, ont été évalués
comme étant capables de réduire l’initiation de la consommation de substances
psychoactives. Dans le contexte français, il a récemment été montré que ce
programme permet un retour sur investissement de 6 € en perspective restreinte
au système de santé. Dans une perspective sociétale (incluant la valorisation des
décès
via
la valeur de la vie statistique), 1 € dépensé dans le programme permettrait
de générer 150 € en coûts évités, toutes choses égales par ailleurs.
Concernant les campagnes médiatiques de prévention, il convient d’être prudent
en raison des échecs de prévention rencontrés par le passé (effet boomerang)
et bien documentés scientifiquement, comme le rappelle la Cour. Le meilleur
argument n’est pas forcément le risque sanitaire classiquement mis en avant ; des
arguments psychologiques sur le maintien de la maîtrise sur sa propre autonomie
peuvent être proposés comme par exemple la campagne Above the influence citée
par la Cour.
Le modèle islandais, rappelé par la Cour, influencé par le chercheur américain
Milkman, et reposant sur de nombreux ressorts théoriques reconnus de modification
de l’environnement des jeunes, manquerait malheureusement de preuves empiriques
solides. Les baisses des ivresses des jeunes constatées en Islande sont identiques à
celles d’autres pays européens et les auteurs islandais des évaluations n’ont pas pu
les corréler à l’intervention. C’est ce que rappelle la Société européenne de recherche
en prévention 1 dans son position paper. Ce n’est pas l’approche inspirante qui est
critiquée, mais le besoin de renforcer l’évaluation que ce soit en Islande ou dans les
autres pays intéressés pour adopter et adapter le modèle islandais à leur contexte.
Par ailleurs il est important de mentionner que les services d’aide à distance
portés par Santé publique France, et en particulier les dispositifs Alcool info
service, Drogues info service et Écoute cannabis, sont des dispositifs de premier
recours particulièrement adaptés au public jeune. À titre d’illustration, en 2022,
sur 39 115 appels et chats traités, 4 021 proviennent de jeunes de moins de
25 ans (soit 10 % des sollicitations). L’aide à l’arrêt, les effets et risques liés aux
produits, les inquiétudes suite à un malaise physique ou psychique attribué à une
consommation, la recherche d’information sur le dépistage sont les principales
thématiques évoquées par les jeunes. Agir pour les jeunes, c’est également
s’adresser à leur entourage. 3 413 demandes d’aide et d’information provenant de
l’entourage concernent des jeunes de moins de 25 ans.
Les jeunes expriment globalement une réticence à parler de leurs consommations
avec un professionnel en face à face. Face à ce frein, l’anonymat, l’absence de
regard, l’amplitude horaire d’un dispositif d’aide à distance tel qu’Alcool info service,
Drogues info service et Écoute cannabis sont des leviers souvent facilitateurs
pour les jeunes. Répondre à leurs questions, interrogations, inquiétudes sur leurs
consommations, les encourager à consulter un professionnel de santé contribue à
une démarche globale de prévention.
Enfin, en ce qui concerne la conclusion et les recommandations :
-
La recommandation 1 porte sur la conduite d’une
« étude épidémiologique
sur la situation des jeunes souffrant d’addictions »
. Des enquêtes permettant
de décrire cette situation existent déjà, portées par l’OFDT et Santé publique
France. Il conviendrait de préciser le périmètre de l’étude épidémiologique
recommandée par la Cour.
-
La recommandation 3 mentionne les acteurs de l’éducation ; elle pourrait
être élargie à une implication renforcée de ces acteurs, aux côtés des acteurs
de la santé et de la prévention, dans la stratégie de développement des
compétences psychosociales des enfants et des jeunes dont l’efficacité a
été largement démontrée pour prévenir et limiter l’entrée des jeunes dans
les consommations de substances. La sensibilisation et le repérage sont
nécessaires mais ne suffisent pas en matière de prévention.
RÉPONSES REÇUES À LA DATE DE LA PUBLICATION
99
1.
https://euspr.org/2020/02/10/position-paper-of-the-european-society-for-prevention-research-on-the-
icelandic-model/ accédé le 31 décembre 2024
COUR DES COMPTES
| RAPPORT PUBLIC ANNUEL
100
-
Une recommandation portant sur le respect de l’interdiction de vente d’alcool
aux mineurs pourrait être formulée, au vu de l’importance et de la persistance
des contournements constatés.
-
Lancer une campagne d’ampleur destinée aux jeunes pour contribuer à la
réduction de la consommation de drogues illicites et d’alcool. L’approche
préventive de cette campagne devra être testée et l’argument de la nocivité
n’est pas nécessairement le plus efficace, comme l’indique la Cour en
mentionnant la campagne Above the influence. On peut aussi imaginer de
renforcer positivement la baisse de la consommation correspondant à des
tendances naturelles observées.