Chapitre X
« Mon espace santé » : des conditions
de réussite encore à réunir
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_____________________ PRÉSENTATION_____________________
Après plusieurs échecs coûteux, les pouvoirs publics ont entrepris de
relancer le dossier médical partagé sous une forme rénovée, dénommée
«
l’espace numérique de santé
» et connue du public sous le nom de « Mon
espace santé ». Ce nouveau dispositif, institué par la loi n° 2019-774 du
24 juillet 2019, repose principalement sur le dossier médical partagé et
l’enrichit de nouvelles fonctionnalités. En outre, des chantiers importants
sont engagés pour assurer la connexion avec les systèmes d’information des
hôpitaux et des pr
ofessionnels libéraux. L’ensemble poursuit plusieurs
finalités : une plus grande autonomie des patients dans la gestion de leurs
données, un meilleur suivi par chaque assuré social de sa santé, une maîtrise
collective accrue des conditions de déploiement du numérique en santé.
En application de la loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020, un
compte « Mon espace santé » a été créé automatiquement en 2022 pour tous
les assurés sociaux, sauf pour ceux ayant exercé un droit d’opposition. Cette
opération ne constitue
toutefois que la première étape d’un projet dont la
mise en œuvre complète doit s’étendre sur plusieurs années. L’enjeu pour les
pouvoirs publics est d’assurer une alimentation suffisante des dossiers
médicaux partagés par les professionnels de santé libéraux, les hôpitaux et
les établissements médico-
sociaux, et d’inciter à l’utilisation des données et
des services contenus dans ces espaces numériques personnels pour une
meilleure prise en charge des patients.
La Cour a examiné ce projet de manière à en cerner les principales
caractéristiques, à s’assurer que sa mise en œuvre correspondait aux
finalités recherchées, mais aussi à identifier les risques et les conditions de
sa réussite. Elle constate que « Mon espace santé » constitue un projet aux
enjeux im
portants, qui peut contribuer à l’amélioration de la prise en charge
des assurés sociaux (I). Pour la réussite de ce projet, les contraintes de
sécurité informatique à satisfaire sont nombreuses et les usages du dispositif
doivent être développés (II).
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338
Chiffres-clés
Nombre de comptes ouverts : 65,1 millions, dont 15 % activés en
janvier 2024.
Dépenses prévisionnelles jusqu’en 2027
: 0,7
Md€ par la caisse
nationale d’assurance maladie (Cnam) + une partie des 2
Md€ de dépenses
du Ségur du numérique.
I -
Un projet aux enjeux importants,
qui peut contribuer à améliorer la prise
en charge des patients
Dans le contexte de la mise en œuvre du plan gouvernemental
« Ma santé 2022 » et de la feuille de route du numérique en santé, la loi
n° 2019-774 du 24 juillet 2019 a créé « Mon espace santé »
443
. Cet espace
santé numérique est composé essentiellement du dossier médical partagé,
complété par d’autres services. La loi n° 2020
-1525 du 7 décembre 2020 a
posé le principe de son déploiement à l’ensemble de la population,
in
tervenu en juillet 2022 après une phase d’expérimentation en
2021.
A -
Un dispositif fondé sur le dossier
médical partagé auquel sont adjoints
des services complémentaires
Le dossier médical partagé est un dispositif relativement ancien,
institué en 2004, mais son déploiement a achoppé à plusieurs reprises. Les
pouvoirs publics ont donc changé d’approche avec «
Mon espace santé ».
1 -
Les précédents échecs de déploiement
du dossier médical partagé
Le dossier médical partagé avait été créé par la loi n° 2004-810 du
13 août
2004 dans l’optique d’améliorer la coordination des soins grâce au
partage des données de santé du patient entre les professionnels de santé
assurant sa prise en charge. La mise en place de ce dossier médical
443
La dénomination légale de ce dispositif (article L. 1111-13-1 du code de la santé
publique) est «
l’espace numérique de santé
».
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
339
dématérialisé avait également pour objectif de permettre des économies sur
les dépenses d’assurance maladie, en réduisant les actes redondants.
Par deux fois, en 2004 d’abord, en 2010 ensuite, lors d’une tentative
de relance de dispositif, les politiques publiques visant à déployer le dossier
médical partagé ont échoué : le nombre de dossiers créés est resté très
limité jusqu’en 2016, pour des raisons tenant à la fois à la complexité du
dispositif et à une gouvernance inadaptée. Durant cette période, les
dépenses consacrées au dispositif se sont cumulées en vain, pour un total
que la Cour a estimé à au moins 210
M€ entre 2004 et 2011
444
.
En application de l’article 96 de la loi n° 2016
-41 du 26 janvier 2016,
la caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) s’est vu confier la
conception, la mise en œ
uvre et l'administration du dossier médical partagé
445
. Le nombre de dossiers créés a augmenté
: à la fin de l’année 2021,
10,1 millions étaient ouverts, ce qui est resté toutefois nettement en-deçà de
l’objectif assigné à la Cnam
446
. Surtout, leur contenu s’
est révélé pauvre,
faute d’être alimenté par les médecins lors des prises en charge de patients.
En conséquence, même avec cette nouvelle gouvernance, le dossier médical
partagé n’est pas parvenu à devenir un outil de coordination des soins.
Dans un rapport de novembre 2017
447
, la Cour avait relevé que le
dossier médical partagé ne serait vraiment efficace qu’aux conditions
d’être ergonomique, interopérable et de contenir toutes les informations
utiles pour le traitement des patients. Elle avait relevé le ris
que qu’il se
heurte, d’une part, à la réticence des patients, qui peuvent demander que
certaines informations n’y figurent pas et, d’autre part, aux difficultés des
systèmes d’information hospitaliers pour les alimenter.
2 -
Un dossier médical partagé relancé et complété
par des services supplémentaires
Principale composante de « Mon espace santé », le dossier médical
partagé constitue un lieu de stockage sécurisé, sous la responsabilité de la
444
Cour des comptes,
Le coût du dossier médical personnel
, juillet 2012
(communication à la commission des finances de l’Assemblée nationale).
445
Elle relevait précédemment du groupement d’intérêt public «
Asip santé », devenu
l’agence du numérique en santé.
446
La convention d’objectifs et de gestion conclue entre l’État et la Cnam pour la période
2018 à 2022 avait prévu que le nombre de DMP ouverts passe de 3,5 à 40 millions.
447
Cour des comptes,
L’avenir de l’assurance maladie
, rapport public thématique, en
ligne sur www.ccomptes.fr.
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340
Cnam, des données de santé de chaque titulaire
448
. Y figurent notamment
les traitements prescrits, y compris les vaccinations, les ordonnances
électroniques, les résultats de biologie médicale, le compte rendu des
examens d’imagerie médicale, ou encore les comptes rendus opératoires et
lettres de liaison consécutifs à une hospitalisation.
« Mon espace santé » adjoint au dossier médical partagé un
ensemble de services complémentaires, visant à en développer l’usage et
donc la qualité des informations incluses.
Une messagerie, développée par la Cnam, doit permettre d'échanger
avec les professionnels de santé, à leur initiative. Les données sont
cryptées, donc inaccessibles à des tiers.
Un agenda a également été développé par la Cnam pour suivre
et planifier les rendez-vous, notamment en se synchronisant avec les
plateformes de prise de rendez-vous référencées au catalogue de services.
Cet agenda, dont le déploiement est prévu pour le premier trimestre
de 2024, doit inclure les rappels de vaccination en fonction de l’âge,
du sexe et des vaccins précédents, ainsi que les dépistages préconisés
(cancer du sein ou colorectal par exemple). Il transformerait « Mon espace
santé » en carnet de santé numérique et interactif.
Les titulaires de comptes ont aussi la possibilité de compléter leur profil
médical afin de permettre aux pr
ofessionnels de santé de disposer d’une vision
de leur état de santé ainsi que de leurs directives médicales anticipées.
Enfin, de nouveaux services sont proposés sous la forme
d’applications développées par des acteurs privés ou publics et référencées
par
le ministère chargé de la santé après avis d’une commission
ad hoc
449
.
Ces applications tierces visent à répondre à des besoins de prévention, de
diagnostic, de soins ou de suivi social et médico-social. Elles doivent, en
application de la loi, garantir la protection des données.
448
Pour la gestion de « Mon espace santé », la Cnam recourt à deux prestataires dans le
cadre de marchés publics arrivant à échéance en 2025
: Wordline pour l’hébergement
des DMP, et Atos pour la gestion des autres fonctionnalités (création de comptes,
identification, gestion des consentements, de la messagerie professionnelle, de
l’agenda, du bouquet d’applications, etc.), entreprise confrontée en janvier 2024 à des
incertitudes sur sa pérennité.
449
Commission placée auprès du ministre chargé de la santé, co-présidée par la
déléguée au numérique en santé et par le directeur général de la Cnam et associant des
représentants d’usagers des services numériques et des personnalités qualifiées dans les
différents domaines des outils numériques en santé.
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
341
En janvier 2024, 28 applications tierces étaient ainsi disponibles
pour les utilisateurs, mais leurs données ne peuvent pas encore être
échangées avec les autres composantes de « Mon espace santé ». Un
référentiel, défini par un arrêté du 23 octobre 2023 et comportant de
nouveaux critères de sécurité
450
, devrait permettre à ces applications
d’échanger des données avec le dossier médical partagé sous réserve de
l’accord des utilisateurs. Elles pourraient, par exemple, utiliser les comp
tes
rendus de biologie médicale.
B -
Un changement d’échelle par rapport
aux tentatives précédentes
« Mon espace santé
» témoigne d’une plus grande ambition que les
tentatives précédentes de création d’un dossier médical partagé
: un
déploiement d’emblée à l’échelle de l’ensemble de la population et une
mise à niveau des systèmes d’information des professionnels de santé pour
qu’ils puissent interagir. En conséquence, les enjeux financiers du projet
sont importants.
1 -
Une couverture de l’ensemble de la population
en 2022
L’approche antérieure impliquait une démarche active du patient
auprès de son médecin traitant ou d’un organisme d’assurance maladie
pour la création des dossiers médicaux partagés. Au contraire, la loi de
2020 a retenu le principe d’une ouverture
automatique, sauf exercice d’un
droit d’opposition d’un compte pour chacun des assurés sociaux. Dans le
courant de l’année 2022, 65,1
millions de comptes ont été ainsi ouverts, ce
qui en fait une initiative sans réel équivalent à l’étranger
451
.
La loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 prévoit une consultation de la
Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) pour tout projet
de loi ou de décret relatif à la protection des données à caractère personnel ou
au traitement de ce type de données. La Cni
l n’a toutefois pas été consultée sur
le principe de la création automatique et généralisée des dossiers médicaux
450
À titre d’exemple, l’exploitant de l’application tierce doit avoir adopté une politique
de sécurité des systèmes d’information, et la certification en tant qu’hébergeur des
données de santé est requise
pour héberger l’application.
451
L
e Danemark et l’Estonie
ont déployé, dans les années 2000, des dossiers patients
électroniques très intégrés, pour des populations respectives de 5,9 et 1,3 millions
d’habitants. Des dossiers médicaux électroniques ont été d
éployés en Espagne et en
Italie, mais sous la responsabilité des régions et non à l’échelle nationale. En
Allemagne, le déploiement est assuré par les compagnies d’assurance maladie.
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partagés car l’article, non
-
prévu dans le projet de loi initial, a résulté d’un
amendement. Dans ce contexte, les échanges, nourris, entre le ministère et la
Cnil, n’ont porté que sur les mesures de mise
en œuvre.
2 -
Une mise à jour nécessaire des logiciels
des professionnels de santé et des hôpitaux
La logique même des comptes « Mon espace santé
» est qu’ils soient
alimentés et utilisés par les professionnels de santé
452
à l’occasion de la prise
en charge des patients. Concrètement, les professionnels de santé
consulteraient et alimenteraient les dossiers médicaux partagés au moyen de
leurs logiciels professionnels, comme les logiciels de gestion de cabinet des
médecins libéraux ou les dossiers patients informatisés dans les hôpitaux.
La possibilité de tels échanges de données dépend d’un important
travail de préparation technique, destiné à assurer l’interopérabilité du
dossier médical partagé avec l
es différents systèmes d’information
concernés, ainsi que de la mise en œuvre de mesures de sécurité informatique
adéquates. L’insuffisance de cette préparation, lors des tentatives
précédentes de déploiement du dossier médical partagé, avait contribué à leur
échec. Les développements informatiques à effectuer sur les logiciels
professionnels nécessitent la définition de référentiels communs et des
moyens financiers pour rémunérer les éditeurs informatiques. Les
programmes de financement prévoient un montant total de 715
M€,
dont 592
M€ pour le volet sanitaire et 123
M€ pour le volet médico
-social.
3 -
Un dispositif mobilisant d’importants moyens financiers
La Cnam devrait engager d’ici à 2027 un budget de l’ordre de
0,7
Md€ au titre du développement des applica
tifs du dossier médical
partagé, de la messagerie sécurisée, de l’agenda partagé et de prestations
d’hébergement confiées, après appel d’offres, à des prestataires.
Ce chantier informatique est, à lui seul, le troisième chantier informatique
le plus coûteux parmi ceux recensés par la direction interministérielle du
numérique
453
.
452
Médecins libéraux, radiologues, biologistes médicaux, pharmaciens d’off
icine,
hôpitaux et établissements médico-sociaux, avant une prochaine extension aux
dentistes, aux sages-femmes et aux infirmiers.
453
Source : panorama des grands projets numériques de la Dinum (juin 2023).
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
343
À ce montant, il convient d’ajouter une part importante des dépenses
prévues au titre du Ségur du numérique
454
, dont l’enveloppe totale est de
2
Md€ (1,4
Md€ pour le volet sanitaire et
0,6
Md€ pour le volet médico
-
social). Le Ségur du numérique finance notamment la mise à jour des
logiciels pour l’alimentation et la consultation du dossier médical partagé.
Ces dépenses seront refinancées par l’Union européenne
455
avant le
31 décembre 2026
si les trois objectifs suivants sont atteints d’ici à la fin
2024 : au moins 40 millions de dossiers créés, au moins 15 millions de
documents provenant des professionnels de santé et des hôpitaux, au moins
410 000 dossiers usagers informatisés actifs dans les établissements et
services médico-sociaux. Seule la dernière condition reste à remplir et
devrait pouvoir être satisfaite dans les délais requis
456
.
Le Ségur du numérique en santé
Lancé en août 2021, le Ségur du numérique en santé est une composante
du plan national de relance et de résilience proposé par la France et validé par
l’Union européenne dans le cadre de son plan de relance Next Generation de
l’Union européenne. Son objet est d’accélérer le développement des outils
numériques dans le secteur de la santé. Il finance des développements
informatiques devant permettre l’interopérabilité des systèmes d’information
des différents acteurs de la santé avec le dossier médical partagé. Il constitue
donc un élément essentiel de « Mon espace santé ».
Il finance d’autres projets tels que l’ordonnance numérique en ville,
la modernisation du système d’envoi de feuilles de soin électroniques
ou la sécurisation des moyens d’identification él
ectronique pour les
professionnels de soin.
Il est doté d’une enveloppe totale de 2
Md€, allouée aux
établissements de santé et médico-
sociaux ainsi qu’aux professionnels
libéraux, ou aux éditeurs informatiques.
Participent enfin à ces dépenses les moyens alloués au groupement
d’intérêt économique Sesam
-Vitale (14
M€), ainsi que les crédits
budgétaires alloués à l’agence du numérique en santé (9
M€) pour élaborer
des référentiels d’interopérabilité et de sécurité, mais aussi pour abonder le
454
455
Le Ségur du numérique est l’une des composan
tes du plan national de relance et
de résilience adopté par l’Union européenne en 2021 dans le cadre du plan de relance
Next Generation EU
.
456
1 552 dossiers usagers informatisés ont été créés en juin 2023.
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344
fonds de concours qui finance les dépenses engagées par la délégation au
numérique en santé
457
.
L’agence du numérique en santé
Constituée sous forme de groupement d’intérêt public, l’agence du
numérique en santé
assiste depuis 2020 le ministère chargé de la santé pour
la conduite de ses projets numériques.
Elle prépare notamment les référentiels qui précisent les conditions
techniques que les systèmes d’information des professionnels libéraux,
des hôpitaux et cliniques, et des établissements médico-sociaux doivent
respecter pour interagir avec les dossiers médicaux partagés. Elle participe
au fonctionnement budgétaire du Ségur du numérique en santé, en finançant
l’acquisition par ces différents acteurs de logiciels respectant ces
référentiels.
Elle intervient également sur les applications tierces en définissant
les référentiels techniques que les exploitants de ces applications doivent
respecter et les opérations de vérification à assurer.
C -
Un projet dont les objectifs ont été réorientés
sans évaluations préalables
La mise en place de « Mon espace santé » traduit un élargissement
des attentes par rapport à ce qui avait prévalu initialement pour le dossier
médical partagé, mais sans qu’ait été réalisée l’évaluation préalable prévue
par les textes.
1 -
Une approche renouvelée
À sa création, en 2004, le dossier médical partagé répondait
principalement à une préoccupation de partage de l’information entre les
professionnels de santé, responsables de la prise en charge du patient. Il
avait également pour objectif de réduire le nombre d
’actes redondants, en
permettant aux médecins de prendre connaissance des examens déjà
effectués, dans une optique d’économie de dépenses d’assurance maladie.
457
Au sein du ministère chargé de la santé, la délégation au numérique en santé
est chargée de mettre en œuvre la stratégie du numérique en santé selon le d
écret
n° 2023-373 du 15 mai 2023.
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
345
En 2019, la loi instituant « Mon espace santé » a été guidée par des
préoccupations différentes
458
.La recherche d’économies n’est plus
revendiquée
; il s’agit désormais de faciliter la vie quotidienne de l’usager
en lui permettant de disposer de l’ensemble de ses documents de santé de
manière dématérialisée, de lui donner la possibilité de mieux suivre sa santé
au quotidien, d’accéder à de nouveaux services dans le cadre d’un
catalogue d’applications dont le contenu doit s’étoffer dans le temps, de
maîtriser ses données de santé avec la faculté de les mettre à disposition,
ou non, d’un professionnel de santé ou d’un de ces nouveaux services.
À terme, les données cliniques figurant dans les dossiers médicaux
partagés pourraient, une fois anonymisées et pseudonymisées, contribuer
à enrichir le système national des données de santé
459
. Un projet de
règlement
de l’Union européenne sur l’espace européen des données de
santé, en cours de discussion, devrait en définir le cadre.
Avec les applications tierces, le développement des services
numériques, qui doivent répondre aux besoins des assurés sociaux et qui sont
porteurs
d’innovations,
est
laissé
à
l’initiative
des
acteurs.
Les
administrations publiques se bornent à créer des services-socles (dossier
médical partagé, messagerie sécurisée, agenda) et à piloter le développement
des applications tierces en mettent notamment à disposition des acteurs un
corpus de référentiels d’interopérabilité, de sécurité ou d’éthique.
Outre ces finalités, « Mon espace santé » entend contribuer à
personnaliser les actions de prévention, à soutenir l’innovation, à développer
de nouve
aux services, et à mieux maîtriser les conditions d’hébergement des
données de santé.
2 -
Une valeur ajoutée non-étayée par une évaluation préalable
La Cour a exposé
460
les critères dont le respect, au moment de la
conception d’un projet public, concourent à la
qualité de de la dépense
publique : identification du problème à résoudre et de la valeur ajoutée de
la réponse publique, objectifs clairs, hiérarchisés et quantifiés. Les études
458
Finalités exprimées dans l’étude d’impact à l’appui du projet de loi ainsi que dans
un rapport préparatoire
Accélérer le virage numérique
de Mme Annelore Coury et
M. Dominique Pon, 2018. Ces finalités ont été réaffirmées dans la nouvelle feuille de
route ministérielle sur le numérique en santé présentée pour les années 2023 à 2027.
459
Cour des comptes,
Le système national des données de santé : un vaste gisement
d’informations à mieux exploiter,
Ralfss 2024, chapitre XI.
460
Cour des comptes,
Situation et perspective des finances publiques
, juin 2023.
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346
d’impact à l’appui des projets de loi, ainsi que les évaluations préalables,
visent à éclairer la décision publique à la lumière de ces points.
Le calendrier resserré de déploiement de « Mon espace santé »,
prévu initialement pour être achevé avant fin 2022, n’a pas permis de réaliser
d’évaluation socio
-économique préalable. Par ailleurs, sa généralisation ne
résultant pas d’un projet de loi, elle n’a pas fait l’objet d’une étude
d’impact. Il en résulte une carence dans l’appréciation de la valeur ajoutée
de « Mon espace santé », que les réflexions produites dans le cadre de la
feui
lle de route du numérique en santé n’ont pas compensé.
D -
Une prise en charge des patients
potentiellement améliorée
L’utilisation de «
Mon espace santé » par les patients et les
professionnels de santé est susceptible de contribuer, à plusieurs
égards, à l’a
mélioration des prises en charge.
1 -
Des évolutions envisageables à court terme
En premier lieu, « Mon espace santé » est susceptible de constituer
un support pour le développement de la prévention. La convention
d’objectifs et de gestion entre l’État et la C
nam pour la période 2023 à 2027
prévoit ainsi de faire usage de ce dispositif pour diffuser les invitations aux
rendez-vous de prévention organisés par les organismes de la branche
maladie, ainsi que pour être le support de messages de prévention
personnal
isés. Au début de l’année 2024, un décret était en préparation
pour traduire cette orientation en fonctionnalités.
« Mon espace santé » permettra ainsi, pour autant que le titulaire ne
s’y oppose pas, un ciblage des actions de prévention en fonction de l’â
ge
et du sexe du titulaire, ce qui peut présenter un intérêt pour le dépistage
collectif de certaines maladies. À partir de 2024, il est prévu que cette
personnalisation se fasse en fonction de données comme la consommation
de tabac ou la pratique d’une ac
tivité physique.
En deuxième lieu, au regard des applications tierces déjà référencées,
« Mon espace santé » peut favoriser les relations entre les patients et les
hôpitaux ou cliniques, en simplifiant certaines démarches administratives
(préadmissions, questionnaires de sortie). De surcroît, la messagerie peut
permettre au corps médical un suivi pré et postopératoire des patients,
notamment pour les femmes enceintes ou les personnes subissant une
intervention chirurgicale.
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
347
En troisième lieu, et conformément à la vocation originelle du
dossier médical partagé, la centralisation des documents de santé dans
un même espace peut favoriser la coordination des soins, en facilitant
par exemple la communication au médecin traitant des résultats d’une
hospitalisation de son patient, particulièrement utile pour la prise en charge
des enfants ou des personnes atteintes de maladies chroniques.
En quatrième lieu, la consultation du dossier médical partagé peut,
grâce aux données de synthèse disponibles et aux documents de santé qui
l’auront alimenté, contribuer à l’amélioration de la pertinence des soins en
facilitant l’accès du médecin à l’historique médical d’un nouveau patient,
par la fonction dite de « bris de glace
», qui peut donner au praticien l’accès
au dossier sauf opposition expresse du titulaire.
Ces potentialités pourraient être limitées par la faculté donnée à tout
titulaire d’un compte de masquer tout ou partie des données
461
. En
septembre 2023, plus de 93 % des titulaires avaient cependant opté pour
une visibilité sans restriction. En outre, le volet de synthèse médicale
présentant les patholog
ies, traitements et allergies du titulaire, n’est pas
toujours complété par le médecin traitant, ni versé dans le dossier médical
partagé, malgré l’obligation prévue par les textes. Enfin, contrairement aux
dispositions règlementaires, le dossier médical partagé ne comportait pas
encore, en début d’année 2024, de données issues du dossier
pharmaceutique, même si des travaux ont été engagés pour y remédier
462
.
2 -
Des perspectives d’accès à la télésurveillance médicale
Il est attendu une contribution de « Mon espace santé » au soutien
de l’innovation dans le domaine de la e
-santé. La stratégie quinquennale
d’accélération du numérique en santé (2021
- 2025), dotée de 718
M€, vise
en effet, au sein du plan France 2030, à favoriser l’émergence de solutions
innovantes e
n faveur d’une médecine davantage préventive, garantissant le
traitement sécurisé et éthique des données de santé.
461
Le titulaire du compte peut masquer à tout moment un document à tout professionnel
de santé, sauf à ceux qui les ont déposés
ainsi qu’
au médecin traitant, qui a le statut
d’administrateur
. La Cnil considère que cette faculté de masquage constitue une
garantie essentielle des patients pour la protection de leur vie privée.
462
La Cnam a engagé avec le Conseil national de l'ordre des pharmaciens et l'agence
du numérique en santé une étude visant à analyser la faisabilité de l'intégration des
données de dispensation médicamenteuse du dossier pharmaceutique dans le DMP.
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348
Des applications en attente de référencement concernent ainsi la
télésurveillance médicale pour améliorer la prise en charge des personnes
atteintes de maladies chroniques telles que des insuffisances cardiaques,
rénales, respiratoires ou le diabète. La télésurveillance améliore la survie des
patients grâce à la prévention des complications et des récidives
463
. Elle peut
optimiser le parcours de soins en réduisant les hospitalisations en urgence.
« Mon espace santé » constitue ainsi un projet de grande ampleur,
mobilisant d’importants moyens publics. Pour autant, malgré les potentialités
qu’il recèle d’amélioration de la prise en charge des pati
ents, les finalités
auxquelles il doit répondre restent encore trop générales. Une meilleure
intégration dans la stratégie nationale de santé 2023-2027
464
, avec une
définition plus précise des attentes des pouvoirs publics quant à sa
contribution à l’amélioration de l’état de santé de la population, serait
nécessaire pour répondre aux risques identifiés du projet.
II -
De nombreuses contraintes de sécurité
des données, des usages à développer
Pour que « Mon espace santé » réponde aux objectifs qui lui sont
assign
és, il doit satisfaire aux contraintes qu’impose la sécurité des données
qui y sont déposées et surtout entrer rapidement dans les habitudes des
patients et des professionnels de santé.
A -
Des contraintes de sécurité des données
à mieux prendre en compte
1 -
Des risques de transfert de données concernant
les applications tierces à bien circonscrire
Le fonctionnement des applications tierces est susceptible de s’appuyer
sur des sous-
traitants localisés à l’étranger, donnant lieu à des transferts de
463
C’est le principe du suivi par reporting des patients ou
Patient Reported Outcomes
,
dit de « prévention secondaire ».
464
Prévue par l’article L. 1411
-1-1 du code de la santé publique, la stratégie nationale
de santé a pour objet, dans un horizon all
ant jusqu’à 10 ans
, de déterminer les domaines
d'action prioritaires et des objectifs d'amélioration de la santé et de la protection sociale
contre la maladie.
L’adoption de cette stratégie doit être précédée d’une consultation
publique, qui venait de débu
ter au moment de l’enquête de la Cour.
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ENCORE À RÉUNIR
349
données
465
. Il en résulte un enjeu de protection des données personnelles
de santé confiées à « Mon espace santé ».
Les traitements de données effectués en dehors de l’Union européenne
à la suite de transferts ne sont pas régis par les règles protectrices du règlement
général sur la protection des données (RGPD). La Commission européenne
peut toutefois constater, sous la forme d’une décision dite «
d’adéquation
»,
que le pays tiers a mis en place des garanties suffisantes pour permettre le
transfert hors UE de données des citoyens européens.
S’agissant des États
-
Unis, une telle décision d’adéquation a été prise
par la Commission européenne en juillet 2023. Cependant, le cadre
juridique des transferts de données sur ce fondement demeure fragile. La
Cour de justice de l’U
nion européenne avait annulé en 2020 une première
décision de la Commission autorisant les transferts de données vers les
Etats-Unis
466
. La nouvelle décision de juillet 2023 fait elle-
même l’objet
de plusieurs recours contentieux, non encore tranchés.
En tout état de cause, la vérification du respect des conditions posées
par la décision de juillet 2023 implique de s’assurer a priori que les sous
-
traitants américains sollicités par l’exploitant d’une application tierce font
bien partie d’une liste dressée par
l’administration fédérale américaine.
Comme pour les autres critères, qu’ils concernent la sécurité ou les
autres rubriques du référentiel, une vérification a posteriori est également
prévue dans le cadre d’une procédure d’audit définie par la réglementat
ion
en 2023
467
. Une telle procédure ne pourra néanmoins être effective que si
l’agence du numérique en santé dispose des moyens budgétaires suffisants
pour la mettre en œuvre.
2 -
Des risques d’accès illégitime
aux données des patients
Le fonctionnement de « Mon espace santé » requiert un niveau
de protection élevé pour éviter les intrusions indésirables impliquant des
465
Un transfert de données s’entend comme t
oute communication, copie ou
déplacement de données personnelles ayant vocation à être traitées dans un pays tiers à
l’Union européenne
(source : Cnil).
466
CJUE, 16 juillet 2020,
Data Protection Commissioner / Maximillian Schrems
et Facebook Ireland
- aff. C-311/18, dite « Schrems II ».
467
Arrêté du 20 novembre 2023 relatif à la procédure d'audit des outils et services
numériques référencés au catalogue de service de l'espace numérique de santé.
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COUR DES COMPTES
350
données de santé sensibles
468
. En même temps, il n’a d’intérêt que si ces
données sont partagées avec fluidité entre les acteurs prenant en charge un
patient. La satisfaction simultanée de ces deux impératifs constitue le défi
technique principal pour la réussite du projet dans la durée.
Ce défi est d’autant plus difficile à relever que la menace de
cyberattaques est forte, en particulier sur les hôpitaux
469
, et que les éléments
figurant dans le dossier médical partagé sont susceptibles d’être téléchargés
par les établissements ou par les professionnels de santé. Un programme
d’actions «
cyber-accélération et résilience des établissements » a été adopté
par le ministère chargé de la santé au printemps 2023 pour les protéger
de ces attaques, avec une mise en œuvre au cours des prochaines années.
En outre, les dossiers médicaux partagés sont sujets à des intrusions
illégitimes de professionnels de santé
470
.
Jusqu’à présent, l’enjeu de telles
intrusions était faible en raison du maigre contenu des dossiers. Toutefois, si
le rythme d’alimentation s’accroît conformément aux objectifs poursuivis, la
question pourra devenir plus sensible. La tentation de telles intrusions se
manifeste déjà pour certains dossiers informatisés de patients dans les
hôpitaux
471
. Un tel accès est néanmoins traçable et donne lieu à une
information du titulaire, lequel est donc en mesure de se plaindre auprès des
instances ordinales ou de l
a justice pénale, en cas d’intrusion illégitime.
3 -
La prise en compte des mesures de sécurité informatique
dans l’organisation des soins
L’importance des enjeux de sécurité informatique est prise en compte
dans les référentiels de l’agence du numérique en
santé sur les questions
d’identification
et
d’authentification
des
assurés
sociaux
ou
des
professionnels de santé intervenant sur « Mon espace santé ». Pour fiabiliser
l’identification des patients, une procédure de qualification a été prévue, par
laquelle
les médecins doivent vérifier qu’à un identifiant national de santé
472
468
L’article 9 du RGPD retient que les données relatives à la santé font partie
des données sensibles, dont le traitement est en principe interdit.
469
En témoignent les cyberattaques ayant affecté en 2022 et en 2023 les centres
hospitaliers de Corbeil-Essonnes, Villefranche-sur-Saône ou Versailles.
470
Dans un avis du 3 novembre 2022, la Cnil avait insisté sur le fait que seules les
informations du DMP nécessaires à la prise en charge des patients devaient être
consultées par les professionnels de santé.
471
Dans quelques cas médiatisés, les dossiers d’hospitalisation de personnalités publiques
ont été recherchés par des personnels ne faisant pas partie de l’équipe de soins.
472
Identifiant à utiliser lors de la prise en charge d’un patient. C’es
t dorénavant le
numéro d’inscription au registre national des personnes physiques (numéro de sécurité
sociale) qui est utilisé (article L. 1111-8-1 du code de la santé publique).
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ENCORE À RÉUNIR
351
donné correspond bien la personne qu’il est censé désigner. Cette procédure,
impliquant la vérification par le médecin d’une pièce d’identité du patient,
peut même, dans certains logiciels référencés au titre du Ségur du numérique,
bloquer l’accès au dossier si elle n’est pas respectée.
Toutefois, le fait de devoir procéder à cette vérification a constitué
une source de difficultés techniques et a suscité des réserves de principe
de la pa
rt de praticiens libéraux qui estiment qu’elle ne relève pas des
tâches du médecin. Face à ces difficultés, une procédure simplifiée de
qualification a été mise en place en 2023, permettant au professionnel
d’attester lui
-
même de l’identité du patient lorsqu’il le connaît déjà.
Selon le ministère chargé de la santé, le déploiement de l’application
« carte vitale
» permettra à terme d’apporter toutes les garanties requises.
En milieu hospitalier, la perspective de l’accès au dossier médical
partagé d’un pati
ent via son dossier hospitalier rend plus sensible le besoin
de prévenir les risques d’accès illégitimes. Dans cette optique, il est prévu, à
l’horizon 2026, la généralisation d’une authentification à double facteur
473
.
Elle pourrait s’appuyer sur la carte d
u professionnel de santé
474
,à la condition
que chacun en possède une, c’est
-à-
dire qu’il soit inscrit au tableau de son
ordre professionnel, ce qui est loin d’être le cas pour les infirmiers.
Ces mesures sont nécessaires pour sécuriser l’accès aux dossiers d
es
patients hospitalisés, dont le contenu devrait prochainement être mieux relié
à celui des dossiers médicaux partagés. Elles devront s’accompagner de
mesures d’organisation en milieu hospitalier pour éviter d’affecter les
conditions de déroulement des so
ins, notamment dans les services d’urgence.
B -
Une montée en puissance pour l’instant
en-deçà des attentes
L’un des facteurs conditionnant la réussite de «
Mon espace santé »
réside dans le rythme d’alimentation en documents médicaux par les
professionnels de santé. Malgré les efforts déployés et une réelle montée
en puissance du nombre de téléversements, un certain retard est constaté.
473
Dispositif de sécurité informatique consistant à compléter l’usage d’un mot
de passe
par une autre procédure, comme la saisie d’un code reçu par courriel ou par SMS.
474
Il s’agit d’une carte d’identité professionnelle remise aux professionnels de santé
inscrits au tableau de leur ordre professionnel ainsi que dans le répertoire des
professionnels de santé tenu par l’agence du numérique en santé.
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352
1 -
En dépit de l’ouverture de la totalité des espaces,
une alimentation très progressive
Les comptes « Mon espace santé » ne seront utilisés dans la durée
que s’ils sont correctement alimentés par les professionnels de santé, les
hôpitaux et les établissements médico-sociaux. Il était ainsi attendu que le
nombre de documents versé chaque année dans les dossiers médicaux
partagés passe de quatre par habitant en 2023 (soit 250 millions de
documents) à dix en 2025, et reste au-dessus de ce seuil par la suite.
À cet effet, une obligation d’alimentation par les professionnels de
santé et par les hôpitaux a été mise en place
475
, sans toutefois être assortie
d’une sanction, ce qui en limite la portée. En outre, des référentiels précisant
les modalités techniques d’alimentation ont été élaborés par l’agence du
numérique en santé et l’acquisition de logiciels conformes à ces référentiels
est financée dans le cadre du Ségur du numérique. Toutefois, seulement deux
référentiels ont une force contraignante
476
et la procédure au terme de
laquelle la sanction peut être prononcée n’est pas encore définie.
2 -
Des premiers retards qui commencent à se manifester
L’alimentation des dossiers médicaux partagés par les professionnels
de santé et par les hôpitaux a nettement augmenté : 56 millions de documents
ont été téléversés en 2022, 148 millions en 2023. Ce flux est néanmoins
resté nettement inférieur à l’objec
tif de 250 millions cité plus haut.
Ce retard d’alimentation provient notamment de la médecine de
ville, du fait de la réticence de nombreux médecins libéraux à procéder aux
vérifications d’identité
477
des patients qu’ils traitent, ce qui empêche le
versemen
t des informations qu’ils détiennent dans les dossiers médicaux
partagés de ces patients.
En outre, des erreurs ont affecté les conditions d’utilisation des
solutions logicielles financées par le Ségur du numérique et ont ralenti leur
déploiement, notamment pour les laboratoires de biologie médicale et pour
475
Le principe de l’obligation d’alimentation avait été posé par la lo
i n° 2009-879
du 21 juillet 2009 mais la liste des documents concernés a été définie par un arrêté du
26 avril 2022.
476
Référentiel relatif à l’identifiant national de santé et
référentiel de sécurité et
d’interopérabilité relatif à l’accès des professionnels de santé au DMP.
477
Dans le cadre d’une procédure dite de qualification de l’identifiant national de santé,
dont l’objet est de sécuriser les conditions d’accès et d’alimentation des DMP.
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ENCORE À RÉUNIR
353
les centres d’imagerie. En conséquence, le ministère chargé de la santé a
été conduit à repousser à fin 2023 une échéance importante
478
, initialement
prévue en avril, et a organisé en janvier 2024 une nouvelle phase
d’acquisition de logiciels pour la biologie médicale hospitalière.
Enfin, l’ergonomie des logiciels pour l’alimentation des dossiers
médicaux partagés est parfois mise en cause car entraînant des opérations
que les médecins estiment trop longues ou trop complexes. Une
simplification de ces logiciels apparaît souhaitable, notamment pour
permettre une alimentation automatique des dossiers médicaux partagés,
ce qui lèverait les contraintes opérationnelles pesant sur les médecins.
C -
Une mobilisation nécessaire
pour lever les freins à l’utilisation
Le développement de l’usage du dossier médical partagé suppose de
lever les freins initiaux toujours existants chez les professionnels de santé
et chez les usagers.
1 -
Convaincre les médecins d’utiliser «
Mon espace santé »
« Mon espace santé » est guidé principalement par des préoccupations
d’amélioration de la vie quotidienne des usagers et de l’autonomie individuelle
dans la gestion des données de santé. Il est peu probable que ce dispositif
puisse s’implanter
durablement si les médecins, plus proches interlocuteurs
des patients, n’en font pas usage dans leur pratique clinique.
Pour les établissements hospitaliers, la consultation des dossiers
médicaux partagés reste limitée car elle n’est possible qu’au traver
s du
portail internet exploité par la Cnam, et non directement dans les systèmes
d’information de l’hôpital
479
. En mars 2023, en dehors des recherches
d’identifiant de document, seuls 22
établissements avaient consulté un
dossier médical partagé selon le gro
upement d’intérêt économique Sesam
-
Vitale. Inclure la consultation du dossier médical partagé parmi les critères
d’attribution de la dotation incitant à la qualité (IFAQ) apparaît donc
souhaitable pour orienter les hôpitaux vers une plus grande utilisation.
478
Date limite pour la mise en paiement du solde dû aux éditeurs à la suite de la livraison
de logiciels professionnels conformes aux spécifications des référentiels élaborés par
l’
agence du numérique en santé.
479
C’est la deuxième vague du programme SONS qui a vocation à l’organiser, avec une
échéance prévisionnelle au début de l’année 2025.
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354
Les consultations des dossiers médicaux partagés sont également
peu nombreuses par les médecins libéraux, alors même qu’elles sont
techniquement déjà possibles à partir de leurs logiciels de gestion de
cabinet. Les médecins ne se sont donc pas encore emparés, au printemps
2023, du dossier médical partagé dans leur pratique clinique. Leurs
représentants rencontrés par la Cour ont exprimé leurs doutes sur les
améliorations de prise en charge que le dossier médical partagé permettrait
et leurs réserves sur la complexité ressentie de son utilisation. La question
de l’implication des professionnels de santé reste donc entière et constitue
un des facteurs décisifs de l’échec ou du succès du projet.
2 -
Recueillir l’adhésion du grand public
« Mon espace santé » ne pourra entrer durablement dans les usages
quotidiens que s’il suscite l’adhésion du grand public. Outre la question de
l’alimentation, cette adhésion implique un accroissement conséquent du
taux d’activation, dans un contexte où une part de la population res
te
éloignée des usages numériques.
Une fois « Mon espace santé » ouvert à la suite de la procédure
automatique effectuée en 2022, son utilisation effective est subordonnée à
son activation par le titulaire. En janvier 2024, seule 15 % de la population
avait activé son compte. Cette situation apparaît destinée à durer : dans ses
projections réalisées en vue de la convention d’objectifs et de moyens
conclue avec l’Etat en juillet 2023, la Cnam a retenu l’hypothèse que la
moitié seulement des comptes serait activée à la fin de 2026.
Certes, ce défaut d’activation ne fait pas obstacle à l’alimentation,
ni à la consultation des dossiers médicaux partagés par les professionnels
de santé. En revanche, l’utilisation du compte comme carnet de santé
électronique ou comme outil individualisé pour des actions de prévention
dépend de l’activation.
En outre, la faible activation affecte l’utilisation de la messagerie
sécurisée par les professionnels de santé ou par les hôpitaux : faute de
savoir si un compte a été activé
ou non, ces derniers n’ont aucune assurance
que les messages adressés aux patients par ce biais soient bien lus. Il en
découle un risque d’utilisation persistante des services de courriel ou de
messagerie instantanée entre les patients et leurs médecins pour échanger
sur les données cliniques, à rebours de l’objectif recherché.
La faiblesse du taux d’activation apparaît ainsi comme un facteur
entravant l’usage du compte «
Mon espace santé ».
Dans l’immédiat, même si des campagnes de communication ont été
en
gagées pour inciter à l’activation des comptes, la priorité stratégique
reste l’alimentation. L’intérêt de la population est escompté à partir de la
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
355
réception de notifications de versement de documents dans les dossiers
médicaux partagés, lors de leur alimentation par les professionnels de
santé. Pour autant, à l’heure actuelle, et alors que l’alimentation
automatique est déjà en place, cet effet n’est pas encore perceptible.
La Cnam a réalisé à l’automne 2023 une campagne d’information
orientée sur les premiers usages de « Mon espace santé », en ciblant les
femmes enceintes et les parents de jeunes enfants, dont le suivi de la santé
exige de régulières visites de contrôle et de vaccination. Il conviendra de
sensibiliser également les malades chroniques, notamment ceux qui ne
disposent pas de dispositifs de coordination de leur suivi (cas complexes,
cancérologie).
Une catégorie particulièrement sensible va être celle pour laquelle
l’accès au numérique est une difficulté, ce qui concerne
15 % de la
population
selon l’Insee
480
. Les personnes âgées, peu diplômées, aux
revenus modestes, vivant seules ou en couple sans enfant, ou encore
résidant dans les territoires d’outre
-mer sont les plus touchées par le défaut
d’équipement comme par le manque de compétences. Ell
es peuvent
recouper les populations pour lesquelles « Mon espace santé » est le plus
utile : personnes âgées et malades chroniques.
L’éloignement du numérique s’est manifesté à l’occasion de
l’ouverture généralisée des comptes. La procédure requiert d’info
rmer
chacun de la mise à disposition de cet espace numérique et de la possibilité
d’y faire opposition. L’information devait être effectuée par courrier
électronique ou, à défaut, par voie postale. Il a fallu recourir à cette dernière
dans 23 % des cas.
Pour accompagner les publics éloignés du numérique dans le
déploiement de « Mon espace santé
» à l’échelle locale, l’agence du
numérique en santé et l’agence nationale de la cohésion des territoires ont
financé, dès 2022, 18 postes de conseillers numériques
481
: ils forment
des ambassadeurs bénévoles qui accompagnent la prise en main de
« Mon espace santé » par les usagers. En 2022, 1 605 ambassadeurs ont été
formés et 48 041 personnes sensibilisées.
480
Insee Première n°1953, 22 juin 2022.
La définition de l’illectronisme englobe le non
-
usage prol
ongé d’internet et le manque de compétences numériques de base.
481
Ce dispositif est venu compléter celui des maisons France service, dont le réseau se
compose de plus 2 600 guichets uniques de proximité, regroupant sur leurs sites
plusieurs administrations (santé, famille, retraite, droit, logement, impôt, recherche
d’emploi, accompagnement au numérique).
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COUR DES COMPTES
356
En 2023, la délégation au numérique en santé a prévu d’engag
er,
comme ambassadeurs, les acteurs de la santé
482
et de la médiation
numérique, parmi les associations et les collectivités locales. La feuille de
route du numérique en santé pour les années 2023 à 2027 fixe l’objectif de
former 10
000 médiateurs d’ici juin
2026.
D -
Des risques de dépassement
des dépenses prévues
En dépit des moyens importants alloués à « Mon espace santé »,
les dépenses qu’occasionne sa mise en place pourraient être supérieures
aux prévisions.
1 -
Une accélération des dépenses de la Cnam
« Mon espace santé » entraîne une forte mobilisation de moyens
budgétaires et humains pour la Cnam, qui n’avait pas été prévue dans la
convention d’objectifs et de gestion 2018
-2022. Dans ces conditions, et
comme l’a relevé l’Igas
483
, la conduite de ce chantier a été faite au
détriment d’autres projets.
La montée en charge conduit à une accélération des dépenses de la
Cnam. Inférieures à 10
M€ jusqu’en 2019, elles sont passées à 56,9
M€ en
2021 puis à 109,6
M€ en 2022. Elles devraient atteindre 150
M€ annuels de
2023 à 2027. Cela résulte de la mise en place de nouvelles fonctionnalités,
du volume croissant de documents, de la multiplication des usages, du
renforcement des exigences de sécurité dans le contexte d’amplification des
menaces de cyberattaques, de la
construction du catalogue d’applications et
d’exigences accrues pour l’ergonomie, l’agenda et la messagerie sécurisée.
2 -
Des risques de dépassement de l’enveloppe
prévue pour le Ségur du numérique
Entre 2020 et 2022, 0,9
Md€ ont été dépensés au titre du Ségu
r du
numérique, dont 0,5
Md€ pour l’acquisition de logiciels conformes aux
référentiels de l’agence du numérique en santé et 0,3
Md€ pour les
programmes d’incitations à l’usage. Il est probable que la trajectoire de
dépenses couvertes par le Ségur du numérique soit dépassée.
482
Caisses primaires d’assurance maladie, agences régionales de santé, groupements
régionaux d’appui au développement de la e
-santé.
483
Igas,
Évaluation de
la convention d’objectifs et de gestion 2018
-2022 avec la Cnam
et recommandations en vue de son renouvellement
(rapport 2022-027 R, janvier 2023).
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
357
La première enveloppe pourrait être dépassée en raison des
négociations en cours sur une nouvelle mise à jour des logiciels des
professionnels de santé et des hôpitaux
484
. Une publication du cahier des
charges était prévue à l’automne 20
23 à la suite de négociations entre le
ministère chargé de la santé et les représentants du secteur de l’édition
informatique mais elle a été reportée à la fin du premier semestre 2024,
éventuellement de façon échelonnée.
En tout état de cause, compte tenu des priorités identifiées par le
ministère chargé de la santé, les améliorations fonctionnelles attendues
pour cette deuxième vague impliquent un saut technologique plus
important que celui de la première. Enfin, le périmètre du dossier médical
partagé va
être élargi à d’autres professions de santé (chirurgiens
-dentistes,
sages-femmes infirmiers).
Ces risques de dépassement sont accrus par la nécessité de
dégager des financements pour le plan de prévention des menaces de
cyberattaques des hôpitaux et cliniques, à hauteur de 100
M€, alors que
l’engagement initialement prévu était de 10
M€. À cela s’ajoute le
financement du volet médico-social du Ségur du numérique. Selon les
estimations de la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie,
l’enveloppe affec
tée (0,6
Md€) est en mesure de financer l’équipement
de 36 300 établissements médico-
sociaux d’ici fin 2025, soit 78 % des
46 000 établissements actuels.
De surcroît, l’arrivée à leur terme en 2023 des programmes
d’accompagnement des hôpitaux dans leur tra
nsformation numérique conduit
l’État à poursuivre leur financement par un nouveau programme, qui pourrait
inclure une incitation financière aux usages du dossier médical partagé de
2024 à 2028
485
.
Pour autant que ces financements soient nécessaires, ils
vien
draient en sus de l’enveloppe de 2Md€ définie initialement.
Le risque est donc important que le coût final du projet soit plus
élevé qu’anticipé, notamment pour les dépenses du Ségur du numérique.
Un suivi plus resserré apparaît nécessaire.
484
Cette mise à jour, qualifiée de deuxième vague, a pour objet
d’organiser la
consultation des dossiers médicaux partagés à partir des logiciels des hôpitaux et de
renforcer la sécurité et d’améliorer l’ergonomie des logiciels professionnels pour
répondre aux demandes des professionnels de santé.
485
Les programmes qui arrivent à leur terme sont Sun-es, qui relève du Ségur du
numérique et dont l’objet est d’inciter les hôpitaux à faire usage de «
Mon espace
santé
» et Hop’en, piloté par la direction générale de l’offre de soins, pour moderniser
les sy
stèmes d’information hospitaliers. Le nouveau programme s’appelle Hop’en 2.
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COUR DES COMPTES
358
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Généralisé à l’ensemble de la population en 2022, «
Mon espace
santé » est un projet informatique public ambitieux par son ampleur et par
les transformations qu’il vise à induire dans le système de soins pour les
patients. Sa sensibilité est liée aux échecs de ses prédécesseurs, dont
l’ambition était pourtant moindre, et à ses enjeux importants pour le
ministère chargé de la santé, la Cnam, les professionnels de santé, les
hôpitaux et établissements médico-sociaux, et pour le secteur de
l’édition
informatique qui doit en organiser le soubassement technique.
La priorité est actuellement donnée à la mise en place des
conditions d’alimentation du dossier médical partagé et à la définition des
modalités de sa consultation par les acteurs du monde de la santé. Il faudra
ensuite en développer l’usage, de même que celui des services attachés de
messagerie sécurisée et de calendrier, et pour les applications tierces
développées à partir des données incluses dans ces dossiers.
« Mon espace santé » constitue ainsi un projet de longue haleine.
L’adhésion du public reste encore comptée, avec un taux d’activation de
15
% en janvier 2024, sans qu’il soit établi si les personnes ayant procédé
à cette activation sont celles pour qui le dispositif sera le plus utile.
Plus inquiétante est la réserve dont font preuve de nombreux
médecins pour alimenter et pour utiliser le dossier médical partagé, alors
que « Mon espace santé
» ne pourra être un succès s’ils restent en retrait.
Enfin, la mise en place d’un catalogue d’applications tierces
référencées par l’État devra susciter l’adhésion, pour autant qu’il n’en
résulte pas de mésusages de la part des exploitants ni de défaut de
protection des données individuelles. Il sera essentiel de garantir la
sécurité et le
s conditions d’usage des données, sans dégrader l’ergonomie
du système ni limiter de ce fait le référencement des applications.
En conséquence, la Cour formule les quatre recommandations de
gestion suivantes :
35.
modifier les conditions de référencement des logiciels des médecins
libéraux afin de rendre possible l'alimentation automatique des
dossiers médicaux partagés (ministère du travail, de la santé et des
solidarités, agence du numérique en santé) ;
36.
faire de la consultation des dossiers médicaux partagés un critère
de l’attribution des dotations d’incitation financière à la qualité aux
hôpitaux publics et aux cliniques privées (ministère du travail, de la
santé et des solidarités) ;
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MON « ESPACE SANTÉ » : DES CONDITIONS DE RÉUSSITE
ENCORE À RÉUNIR
359
37.
prévoir les moyens adéquats pour permettre à l’agence du numérique
en san
té de s’assurer de l’atteinte des critères obligatoires de sécurité
par les éditeurs de leurs applications tierces (ministère du travail, de
la santé et des solidarités) ;
38.
prévoir les moyens adéquats pour s’assurer de l’efficacité et de
l’effectivité des m
esures de protection des données personnelles
transférées en dehors de l’Union européenne lors de l’utilisation
des applications tierces (ministère du travail, de la santé et des
solidarités).
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