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FINANCES ET COMPTES PUBLICS
ANALYSE DE L’EXÉCUTI
ON
BUDGÉTAIRE 2023
Compte d’affectation spéciale
« Gestion du
patrimoine
immobilier de l’
État »
Avril 2024
Sommaire
SYNTHÈSE
..................................................................................................................................
5
RÉCAPITULATIF DES RECOMMANDATIONS
.................................................................
7
INTRODUCTION
.......................................................................................................................
9
CHAPITRE I LES RÉSU
LTATS DE L’EXERCICE
..........................................................
11
I - UNE EXÉCUTION CONFORME AUX RÈGLES BUDGÉTAIRES
............................................
11
II - DES RECETTES REDYNAMISÉES PAR DES CESSIONS EXCEPTIONNELLES
...............
12
III - DES ENGAGEMENTS EN RETRAIT, DES PAIEMENTS EN FORTE HAUSSE
..................
15
IV - DES ENGAGEMENTS PLURIANNUELS MIEUX MAÎTRISÉS AU REGARD
DES DISPONIBILITÉS DU COMPTE
.........................................................................................
15
V - UNE MOBILISATION DU FONCIER PUBLIC QUI RESTE LIMITÉE
...................................
16
A - La restructuration des sites de défense
.................................................................................................
16
B - La décote « Duflot »
.............................................................................................................................
16
CHAPITRE II LES GRANDES COMPOSANTES DE LA DÉPENSE
.............................
19
I - LES OPÉRATIONS STRUCTURANTES ET DE CESSION
.........................................................
19
II -
L’ENTRETIEN À L
A CHARGE DU PROPRIÉTAIRE
...............................................................
20
A - Les dépenses de gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état
..........................
20
B - La maintenance à la charge du propriétaire
..........................................................................................
21
CHAPITRE III LES PERSPECTIVES
.................................................................................
23
I - UN PROGRAMME « DÉSENDETTEMENT » INACTIF DEPUIS SIX EXERCICES
..............
23
II - LA RECHERCHE DE NOUVEAUX MODES DE VALORISATION DU PARC
IMMOBILIER
....................................................................................................................................
23
III - UNE PERFORMANCE CONTRASTÉE
......................................................................................
25
A -
Le ratio d’occupation des surfaces
.......................................................................................................
26
B - Les bureaux remis au Domaine et restés inoccupés depuis au moins trois ans
....................................
27
C - Des indicateurs qui ne prennent pas encore pleinement en compte les objectifs de transition
écologique
............................................................................................................................................
27
ANNEXES
..................................................................................................................................
29
Synthèse
Le compte d’affectation spéciale (CAS)
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
retrace les recettes et les dépenses liées à certaines opérations portant sur le patrimoine
immobilier de l’État dans une logique de mutualisation interministérielle. Conçu initialement
pour établir un équilibre entre recettes tirées de la cession ou de la valorisation de biens ne
relevant plus du domaine public d’une part et dépenses d’investissement dans de nouveaux
bâtiments d’autre part, il devait aussi retracer la contribution d’une gestion immobilière active
au désendettement de l’État.
Le volume d’o
pérations du compte a fortement augmenté en 2023 : il a atteint 524,3
M€
en recettes et 458,3
M€ en dépense, contre respectivement 298,0
M€ et 348,1
M€ en 2022. Le
résultat positif de 66,0
M€ vient s’ajouter au solde cumulé excédentaire, qui atteint le niv
eau
élevé de 707,1
M€ fin 2023.
En 2023, le niveau des recettes perçues est marqué par un ressaut conjoncturel lié à la cession
de biens exceptionnels. Les dépenses engagées et décaissées, hors apurement des restes à payer,
sont restées stables par rapport
à l’étiage des cinq dernières années
, étant relevé que les paiements,
c’est
-à-dire le niveau de consommation des CP, progressent nettement par rapport à 2022, qui
constituait un point bas.
Des résultats de l’exercice
marqués par un rebond des recettes, sans garantie de
leur pérennité, et un effort d’apurement des restes à payer
L’analyse de l’exécution budgétaire 202
3
, qui ne s’est pas écartée des principes et des
règles applicables, fait apparaître que :
-
les recettes (524,3
M€)
sont supérieures à la prévision (480,0
M€)
et ont presque doublé
par rapport à celles encaissées en 2022 (298,0
M€)
grâce à plusieurs opérations
exceptionnelles
ainsi qu’
à des recettes de cession (hors opérations rares) et des redevances
relativement dynamiques ; toutefois le nombre de biens cédés est sensiblement plus faible
que celui observé ces cinq dernières années ;
-
la
consommation des autorisations d’engagement
(356,0
M€)
est moins élevée que celle de
l’année 2022
(437,3
M€)
et en deçà de la prévision (480,0
M€)
, le CAS ayant cessé en 2023
de porter les engagements du programme « Résilience I ». La consommation des crédits de
paiement (458,3
M€)
connaît en revanche une
augmentation d’un tiers par rapport à
l’exécution de 2022
(348,1
M€) et est
également supérieure à la prévision (340,0
M€)
, en
raison notamment
d’une acquisition d’ampleur non prévue
et
d’un apurement
notable des
restes à payer ;
-
le
solde dégagé par le CAS en fin d’exercice
est confortable : avec 707,1
M€,
la trésorerie
disponible représente deux fois le montant des restes à payer et des AE affectées.
COUR DES COMPTES
6
Le compte d’affectation spéciale, un modèle économique
à la croisée des chemins
Le CAS a représenté 3,5 % des
crédits de l’
État
en faveur de l’immobilier
en 2023, jouant
ainsi un rôle
toujours plus modeste au sein de la politique immobilière de l’État.
Si à la fin de
l’exercice 202
3, sa situation budgétaire ne pose pas de difficultés particulières, la pérennité de
son modèle économique est incertaine.
Le niveau de ses recettes est en effet amené à se réduire à moyen terme, en raison de la
raréfaction des biens attractifs pour la vente et des cessions exceptionnelles, particulièrement
rémunératrices. Par ailleurs, les modifications des conditions de travail, essentiellement le
télétravail, risquent de réduire les besoins en surface de bureaux, libérant à moyen terme des
surfaces tertiaires dont la vente pourrait constituer une opportunité. Mais ce même contexte
pourrait rendre la valorisation des biens plus difficile à réaliser sur un marché des surfaces de
bureau en transformation.
Ces perspectives ont
conduit la direction de l’immobilier de l’État (
DIE) à chercher,
depuis plusieurs exercices, à diversifier davantage les ressources du CAS pour lui permettre de
disposer de recettes récurrentes et adaptées au financement de projets immobiliers pluriannuels.
Ainsi, les redevances et loyers ont représenté un quart des recettes totales en 2023. Elles ne sont
toutefois pas de nature à compenser le tarissement prévisible des recettes de cessions.
Cet affaiblissement prévisible des recettes risque de réduire les capacités d’action du CAS
alors que les projets, notamment les travaux de gros entretien, doivent désormais intégrer les
coûts liés à la rénovation énergétique des bâtiments et à leur adaptation au changement
climatique. Le récent rapport de la Cour des comptes
sur la politique immobilière de l’État
relève à cet égard que
les besoins d’investissement pour l’ensemble des bâtiments publics
sont
estimés à un montant compris entre 140 et 150
Md€ à l’horizon 2050.
Le CAS
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
,
comme l’ensemble de la politique
immobilière de l’État
, doivent
faire rapidement l’objet
d’
une réforme de son organisation
actuelle qui apparaît aujourd’hui inadaptée pour faire
face aux investissements massifs à
entreprendre pour assurer la mise aux normes et l’adaptation des bâtiments publics au
changement climatique.
Dans ce cadre, l
a perspective de création d’une foncière de l’
État en 2025, évoquée par
le ministre, dans laquel
le l’incitation des ministères à la
rationalisation, à la mutualisation et à
la rénovation passerait par le versement de loyers, amènerait nécessairement à faire évoluer le
modèle du CAS.
Récapitulatif des recommandations
1.
(Recommandation nouvelle) : Afficher dans le projet de loi de finances pour 2025 la
stratégie de valorisation de l’ensemble des biens, y compris exceptionnels,
assortie
d’une
prévision des recettes du CAS
(Direction de l’immobilier de l’État)
.
Introduction
Le compte d’affectation spéciale (CAS)
Gestion du patrimoine immobilier de l’État
, dont
l’article 47 de la LFI pour 2006 définit les princ
ipes de fonctionnement, est placé sous la
responsabilité de la direction de l’immobilier de l’État.
Il a vocation à mutualiser les recettes issues des cessions d’actifs immobiliers
et des
redevances domaniales ou de loyers afin de financer des opérations immobilières structurantes
1
et des dépenses d’entretien dites «
du propriétaire »
2
réalisées au profit des services de l’État et
de ses opérateurs. À travers le CAS, les ministères occupants qui cèdent certains de leurs
bâtiments se voient rétrocéder une part significative des produits de cessions
via
des « droits de
tirage » pour 50 % des recettes encaissées
3
et, par là même, sont en principe incités à rationaliser
le parc immobilier qu’ils occupent
la Cour ayant cependant relevé dans son rapport sur la
politique immobilière de l’État publié en décembre 2023 que les résultats enregistrés sur ce
front étaient restés insuffisants
4
.
Fin 2023, le CAS comporte deux programmes :
-
le programme 721 -
Cont
ribution des cessions immobilières au désendettement de l’État
,
qui n’est pas doté de crédits,
-
le programme 723 -
Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État
, divisé en
douze budgets opérationnels de programme (BOP) centraux
correspondant aux
ministères, qui disposent de délégations de gestion pour exécuter les dépenses
, deux BOP
centraux mutualisés et vingt-quatre BOP déconcentrés destinés aux opérations suivies par
les préfets de région
5
.
Compte d’affectation spéciale «
gestion du pa
trimoine immobilier de l’
État »
Programme
721
Contribution des cessions immobilières au désendettement de l’État
Programme
723
Opérations immobilières et entretien des bâtiments de l’État
1
Acquisitions, constructions, restructurations, dépenses préalables à la cession.
2
Maintenance préventive ou corrective, mise en conformité, remise en état, contrôles réglementaires et
diagnostics, par opposition à l’entretien courant, qui incombe à l’occupant
sur ses propres crédits budgétaires,
même si, en pratique, des recouvrements peuvent exister.
3
Les 50
% restants sont mutualisés pour les dépenses d’entretien.
4
Cf. Cour des comptes,
La politique immobilière de l’état, une réforme nécessaire pour aborder les enjeux à venir
,
communication à la commission des finances de l’Assemblée nationale, décembre 2023.
5
Tandis que les préfets de département gèrent chacun une unité opérationnelle (UO).
COUR DES COMPTES
10
Graphique n° 1 :
recettes
et dépenses exécutées (en M€)
Source : x
Graphique n° 2 :
évolution du solde de trésor
erie (en M€)
Source : x
298,0
437,3
348,1
524,3
356,0
458,3
Recettes
AE consommées
CP consommés
2022
2023
707,1
Chapitre I
Les résultats de l’exercice
Le tableau suivant présente l’évolution du CAS en 202
3
et le solde en fin d’exercice.
Tableau n° 1 :
données
de l’exécution budgétaire du
CAS en 2023
En M€
AE
CP
Recettes
Trésorerie
Restes
à payer
Solde fin 2022 (a)
173,4
575,3
s.o.
641,1
392,5
Crédits non reportés (b)
- 13,8
0
Crédits ouverts en LFI et LFR (c)
380,0
340,0
Dont LFI
480,0
340,0
Dont LFR
0
0
Crédits annulés en LFR
- 100,0
- 300,0
Mouvements de crédits (d)
5,5
5,5
Solde disponible (e)=(a)+(b)+(c)+(d)
545,1
620,8
Exécution (f)
- 356,0
- 458,3
524,3
66,0
- 102,3
Solde fin 2023 (g)=(e)+(f)
189,1
162,5
s.o.
707,1
290,2
Dont AE affectés
46,8
Mouvements de crédits = reports de crédits + crédits ouverts sur fonds de concours
Source : Cour des comptes, à partir des données DIE
I -
Une exécution conforme aux règles budgétaires
L’exécution budgétaire du CAS ne s’est pas écartée des principes et des
règles
applicables. En particulier :
-
aucun virement,
ni transfert de crédits n’est intervenu entre le budget général et le CAS,
dans le respect du II. de l’article 20 de la loi organique relative aux lois de finances du
1
er
août 2001 (Lolf) ;
-
les recettes du CAS ont été complétées par des versements du budget général à hauteur de
33,6
M€, soit 9,8
8 % des crédits de paiement initiaux du CAS, dans la limite de 10 % fixée
par le I. de l’article 21 de la Lolf
;
COUR DES COMPTES
12
-
le total des dépenses engagées ou ordonnancées en
cours d’année n’a pas excédé le total
des recettes constatées, conformément au II. du même article 21 ;
-
en application de ce même article, les montants des
autorisations d’engagement
(AE) ou
des crédits de paiement (CP) non consommés en 2022 et reportés en 2023, qui
s’établissaient respectivement à 1
59,6
M€ et
575,3
M€,
n’ont
pas excédé le solde de
trésorerie du compte fin 2022, soit 641,1
M€.
Par ailleurs, conformément aux principes et règles applicables aux comptes d’affectation
spéciale,
la direction de l’immobilier de l’État doit, dans le cas des opérations d’investissement,
qui constituent par définition une part importante de l’activité du CAS, affecter les AE
disponibles préalablement à leur consommation, celle-ci devant intervenir dans les deux ans de
leur affectation
6
pour que soit autorisé leur éventuel report au-delà.
À cet égard, les autorisations d’engagement affectées non engagées (AEANE) représentent,
fin 2023, 66,3
M€
, soit 37
% du solde des AE susceptibles d’être reporté
es, contre 60,7 % fin
2022 et 81,3 % deux ans auparavant.
Ce progrès mérite d’être relevé.
II -
Des recettes redynamisées par des cessions exceptionnelles
Comme les années passées, les recettes du compte comprennent à titre principal le produit
des cessions de biens immobiliers. Celles-ci sont complétées par trois catégories de recettes du
domaine public :
-
les redevances des concessions ou autorisations de toute nature ;
-
les redevances des logements concédés par l’État dont il est propriétaire ;
-
les loyers et indemn
ités d’occupation
;
-
depuis l’intervention de l’article 93 de la LFI pour 2019
, les redevances et loyers du
domaine public et privé dont le ministre des Armées est le gestionnaire.
Tableau n° 2 :
recettes du CAS en 2023
En M€
Exécution 2022
LFI 2023
Exécution 2023
Total des recettes
298,0
480,0
524,3
Cessions immobilières
157,1
370,0
366,7
Redevances domaniales et loyers
98,4
110,0
118,5
Versements du budget général
40,9
0
33,6
Fonds de concours
1,6
0
5,5
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et données DIE
Le montant total de recettes encaissées par le CAS en 2023 (524,3
M€) est plus élevé que
la prévision (+9,2 %)
et bien supérieur à celui de l’année précédente
(+ 75,9 %).
6
Article 158 du décret GBCP.
LES RÉSULTATS DE L’E
XERCICE
13
Les recettes issues de cessions immobilières de 2023 (366,7
M€) ont en effet été plus de
deux fois supérieures à celle encaissées en 2022 (157,1
M€).
Ce résultat est lié au double effet
d’une année 2022 marquée par l’absence d’une opération exceptionnelle
initialement prévue et
à la réalisation, en 2023, de la cession de trois
biens d’exceptions pour un total de 176,2
M€
,
notamment deux immeubles parisiens
, l’hôtel du Timbre et l’immeuble Pyramides du ministère
de la culture, ce dernier ayant
fait l’objet d’un bail emphytéotique de 99 ans
7
. Le CAS a
également perçu le montant de la cession aux collectivités territoriales
alsaciennes d’une
quote-part d
e l’
ensemble strasbourgeois Osmose
acquis par l’
État pour accueillir des services
du Parlement européen
8
.
Par ailleurs, hors cessions exceptionnelles, le montant des recettes de cessions
immobilières atteint en 2023 un niveau un peu plus élevé (190,5
M€) que l’étiage constaté les
années précédentes (157,1
M€ en 2022, 164,8
M€ en 2021, 157,5
M€ en 2020)
9
. Le nombre de
biens cédés en 2023 (645) est légèrement inférieur au niveau à celui de 2022 (661) et de 2021
(687)
10
. Les tensions qui ont pu être observées sur le marché immobilier à la suite du relèvement
des taux d’intérêt n’ont pas eu d’effets sur les r
ecettes du CAS eu égard à la nature particulière
des biens cédés, peu affectés par le tassement des prix.
S’agissant des redevances et recettes assimilées, que la DIE a entrepris depuis 2016 de
redynamiser, leur niveau est tel désormais qu’elles ne jouent
plus seulement
un rôle d’appoint
pour le CAS, mais participent significativement à son fonctionnement avec 22,6 % de ses
recettes en 2023, même si elles en constituaient un tiers en 2022 et 2021. Le montant des
redevances encaissé (118,5
M€)
est légèrement supérieur à la prévision et à celui des années
précédentes
11
qui avait notamment été affecté par la cession de biens pourvoyeurs de
redevances non négligeables
12
.
Enfin, les recettes du CAS ont été complétées en 2023 par des versements du budget
général à hauteur de 33,6
M€. Ils correspondent à la contribution d’autres programmes pour le
financement d’opérations portées par le CAS, notamment le financement de la quote
-part de
l’ensemble «
Osmose » à Strasbourg acquis
par l’État
13
.
7
La cession de l’
« Hôtel du Timbre » à Paris a été signée en 2022 mais son produit encaissé en janvier 2023 pour
79,1
M€
. La
cession sous la forme de bail emphytéotique de l’immeuble parisien «
Pyramides » occupé par le
ministère de la culture a été effectuée pour un montant de 65
M€.
Dans ce type de bail, le locataire dispose d'un
droit réel sur le bien qui lui permet par exemple de l'hypothéquer ou de le sous-louer. La seule action impossible
est la vente du bien.
8
Ensemble immobilier « Osmose
» à Strasbourg acquis par l’État dont une quote
-part a été cédée à la Région
Grand-
Est, la Collectivité d’Alsace, l’Eurométropole et la Ville de Strasbourg pour 32,1
M€.
9
Hors cessions exceptionnelles, 10 biens supérieurs à 2
M€ ont été cédés, dont 5 pour un montant supérieur à
4
M€
, dont un immeuble en RDC pour 11,4
M€, le site du CNRS à Meudon pour 7,5
M€, un immeuble à Toulouse
pour 6,85
M€ et un autre à Strasbourg pour 6,4
M€.
10
567 en 2020, 704 en 2019 et 655 en 2018.
11
98,4
M€ en 2022 et 103
M€ en 2021.
12
À titre d’exemple, la cession en 2021 de l’ensemble immobilier des Thermes de Vichy, permettait d’encaisser
1,9
M€ de redevances annuelles. Trente biens de l’État génère
nt en effet des redevances domaniales supérieures à
500 000
€ annuels.
13
À ce titre 26
M€ du programme 348 ont été versés au CAS. Le programme de la police nationale a également
alimenté le CAS à hauteur de 2,5
M€ pour financer un projet de la DGSI à Montrouge.
COUR DES COMPTES
14
Si les montants des deux principaux postes pourvoyeurs de recettes du CAS, les cessions
et les redevances, ont dépassé les montants moyens constatés ces dernières années, à savoir
respectivement 160
M€ et 110
M€
, ils ne peuvent être considérés comme des facteurs de
pérennisation des recettes du CAS. En effet le niveau de recettes lié à des opérations rares
(supérieures à 25
M€)
est moins important depuis plusieurs années,
ainsi que l’illustre le
graphique suivant
, alors qu’elles constituaient u
ne part majeure des recettes du compte sur toute
la période 2013-2019.
Graphique n° 3 :
évolution des recettes du CAS
Source : Cour des comptes, à partir des données DIE
Cette situation d’ensemble s’explique par
la réduction des ventes de biens attractifs au fur
et à mesure des cessions depuis 2006. La
direction de l’immobilier de l’État (DIE) considère
ainsi que 70 % des 1 526 biens immobiliers déclarés inutiles et remis au Domaine fin 2023 sont
« Difficiles », « Très difficiles » ou « Improbables
» à céder, ce qui l’oblige à rechercher des
modalités de valorisation alternatives (cf.
infra
§ 3.2).
La vente de plusieurs biens d’exception en 2023 prouve toutefois que le potentiel de
recettes lié à ce type de cessions peut encore constituer une ressource substantielle pour le CAS,
de surcroît dans le cadre d’une optimisation croissante de l’occupation des bâtiments publics
qui devrait permettre à moyen terme de libérer de nouveaux biens pour les valoriser par des
cessions ou des locations. Le gouvernement a en effet affiché en février 2023 un objectif
ambitieux de réduction des surfaces de travail des agents publics (16 à 18 m²/résident)
14
.
Il serait donc opportun de construire une prévision des recettes attendues des opérations
de valorisation à venir, notamment
s’agissant des
opérations exceptionnelles
, afin d’évaluer le
potentiel des recettes de cession que pourrait encore percevoir le CAS dans les prochaines
années. En réponse aux observations de la Cour, l
e Directeur de l’immobilier de l’État
a indiqué
14
Circulaire de la Première ministre du 8 février 2023.
0,0
100,0
200,0
300,0
400,0
500,0
600,0
700,0
800,0
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
Redevances et autres recettes
Recettes des cessions unitairement supérieures ou égales à 25 M€
Recettes des cessions unitairement inférieures à 25 M€
LES RÉSULTATS DE L’E
XERCICE
15
souscrire à cette recommandation et a précisé à la Cour que cette prévision de recettes serait
documentée dans le PAP du programme 723 -
Opérations immobilières et entretien des
bâtiments de l’État
annexé au projet de loi de finances pour 2025.
III -
Des engagements en retrait, des paiements en forte hausse
Le tableau suivant retrace l’exécution des crédits sur le CAS.
Tableau n° 3 :
crédits immobiliers ouverts et consommés en 2023 sur le programme 723
En M€
Consommé(e)s en 2022
Ouvert(e)s en LFI 2023
Consommé(e)s en 2023
Autorisations d'engagement
437,3
480,0
356,0
Crédits de paiement
348,1
340,0
458,3
Source : documents budgétaires et données DIE
Alors que l’année 2022 avait été marquée par une hausse des autorisations d’engagement
(+ 29,6 % par rapport à 2021) liée à la croissance des engagements du ministère des Armées et
les projets portés par le programme « Résilience I »
15
, 2023 se caractérise par un volume d’AE
plus contenu (- 18,6 %) et inférieur à la prévision (- 25,8 %). En effet, le ministère des Armées
a retrouvé une consommation d’AE similaire à celle de 2021 et ne représente plus que 36
%
des engagements contre 55,9
% en 2022. Par ailleurs, l’appel à projets «
Résilience » ne connaît
qu’un reliquat d’engagemen
ts en 2023.
Le montant des crédits de paiement décaissés en 2023 est supérieur à la prévision
(+ 34,8
%) et bien plus élevé que l’exécution de 2022 (+
31,6 %), qui se caractérisait par une
baisse des paiements dans un contexte où la pandémie puis la crise énergétique avaient pesé sur
le calendrier d’exécution des projets immobiliers.
Cette hausse des crédits exécutés en 2023
provient des projets immobiliers structurants (cf. Chapitre II) et d’un apurement important des
restes à payer accumulés les années antérieures (cf. V).
Par ailleurs, la part des dépenses consacrées à l’entretien du propriétaire (cf.
infra
chapitre
II, point II) continue à progresser entre 2022 et 2023 (+ 7,2 % en CP), ce qui est conforme à
l’objectif fixé par le responsable de
programme.
IV -
Des engagements pluriannuels mieux maîtrisés au regard
des disponibilités du compte
La prévision des restes à payer repose sur l’hypothèse d’un rythme de consommation des
AE et CP proche de celui observé en moyenne, ce que la nature des opérations financées rend
en réalité très incertain.
15
Les engagements du programme « Résilience I
» portent essentiellement des dépenses d’entretien du propriétaire
pour réduire la consommation d’énergie
s fossiles des bâtiments publics.
COUR DES COMPTES
16
Tableau n° 4 :
évolution des restes à payer du programme 723
Restes à payer
du programme
723 (en
M€)
Solde au
31 déc.
2022
AE
consommées
en 2023
CP consommés en 2023
Solde au
31 déc.
2023
sur AE consommées
avant 2023
sur AE consommées
en 2023
PAP 2023
310,0
480,0
- 170,0
- 170,0
310,0
Exécution
392,5
356,0
- 256,4
- 201,9
290,2
Source
: direction de l’immobilier de l’État
Le solde des restes à payer a significativement diminué entre 2022 et 2023 (- 26 %) pour
s’établir à 290,2
M€ fin 2023
, soit une baisse de 102,3
M€ par rapport à fin 2022
. En effet, un
effort d’apurement des restes à payer a été engagé
en 2023. Il a notamment été porté par le
ministère des Armées, les ministères économiques et financiers, le m
inistère de l’Intérieur, les
services du Premier ministre et la préfecture de la région Ile-de-France qui représentaient 65 %
des restes à payer début 2023. Le ministère des Armées représente à lui seul 43 % de
l’apurement des restes à payer avec 110,3
M€
acquittés en 2023.
Le solde combiné des restes à payer et des AE affectées, qui correspond aux opérations
immobilières en cours ou sur le point d’être lancées, atteint
50,4 % de la trésorerie
disponible, niveau bien inférieur celui de
l’année passée (
71,2 %).
V -
Une mobilisation du foncier public qui reste limitée
Deux dispositifs juridiques dérogatoires prévoient que
l’État
peut céder, au-delà même
d’une marge raisonnable de négociation, un actif immobilier à un prix inférieur à celui du
marché.
A -
La restructuration des sites de défense
Depuis 2009, l’État peut céder à l’euro symbolique aux communes qui en font la demande
les emprises reconnues inutiles par le ministère des Armées dans le cadre de ses opérations de
restructuration.
Mis en place jusqu’au 31 décembre 2014 par l’article 67 de la loi de finances
pour 2009, ce dispositif a été prorogé jusqu’au 31 décembre 2019 par la loi de finances pour
2015 (article 39), puis au 31 décembre 2024 par la loi de finances pour 2020 (article 228).
Il s’est traduit par des moindres recettes d’un montant total de 303
M€ sur la période
2009-2022. En 2023, elles se sont élevées à 1,1
M€, un niveau moindre qu’en 2022 (2,4
M€).
B -
La décote « Duflot »
Afin de favoriser la production de logements, en tout ou partie socia
ux, l’État peut céder
16
un terrain, bâti ou non, de son domaine privé, pour un prix inférieur à la valeur vénale de ce
dernier, telle que déterminée par la DIE en tenant compte du prix du foncier libre de référence.
16
Ce principe général a été posé par l’article 95 de la l
oi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion
sociale et figure au I. de l’article L. 3211
-7 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P).
LES RÉSULTATS DE L’E
XERCICE
17
En application de la loi du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur
du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, la décote
ainsi accordée peut représenter jusqu’à la totalité de la valeur vénale (contre 35
% auparavant).
Fin 2023, le dispositif de la décote « Duflot » reste peu utilisé malgré les besoins en la
matière et les directives adressées aux préfets pour relancer le dispositif
17
:
Tableau n° 5 :
décotes « Duflot » accordées entre 2013 et 2023
Source
: direction de l’immobilier de l’État
17
Une circulaire du Premier ministre du 13 décembre 2021 a appelé les préfets à réaliser un inventaire exhaustif
des emprises mobilisables puis à lancer en 2022 des appels à manifestation d’intérêt pour relancer le dispositif.
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
Total
Nombre de cessions
1
11
19
34
20
18
11
3
8
3
7
135
Décote (en M€)
1,1
27,1
48,5
29,8
27,6
70,2
17,3
2,6
12,3
2
4
242,5
COUR DES COMPTES
18
___________________________ RECOMMANDATION ___________________________
La Cour formule la recommandation suivante :
1.
(Recommandation nouvelle) : Afficher dans le projet de loi de finances pour 2025 la
stratégie de valorisation de l’ensemble des biens, y compris exceptionnels, assortie d’une
prévision des recettes du CAS (d
irection de l’immobilier de l’État).
Chapitre II
Les grandes composantes de la dépense
Les dépenses financées sur le CAS concernent, en priorité, les immeubles de bureau et de
logement
dont l’État est propriétaire et résultent, d’une part, d’opérations structurantes et de
cession et, d’autre part, d’actions d’entretien «
lourd ».
Elles sont récapitulées dans le tableau suivant.
Tableau n° 6 :
dépenses
immobilières détaillées par action (en M€)
Consommé(e)s en 2022
Ouvert(e)s en LFI 2023
Consommé(e)s en 2023
Opérations structurantes
et de cessions
AE
173,8
310,0
211,1
CP
151,3
170,0
247,4
Entretien à la charge
du propriétaire
Gros entretien, réhabilitation, mise en conformité et remise en état
AE
196,8
103,0
82,6
CP
132,1
106,0
147,0
Maintenance à la charge du propriétaire
AE
50,9
51,0
51,1
CP
49,7
45,0
51,9
Contrôles réglementaires, audits, expertises et diagnostics
AE
15,7
16,0
11,2
CP
14,9
19,0
12,0
TOTAL
AE
437,3
480,0
356,0
CP
348,1
340,0
458,3
Source : documents budgétaires et données DIE
I -
Les opérations structurantes et de cession
Ces opérations concernent :
-
les travaux de remise à neuf, de restructuration ou d’agrandissement et, plus largement,
tous ceux qui visent, par des modifications structurelles, à en améliorer le potentiel de
services, donc la valeur vénale ;
-
les frais accessoires directement liés à la cession d’un bien
: organisation matérielle,
expertises techniques, honoraires, etc.
COUR DES COMPTES
20
La consommation des AE en 2023 est inférieure au montant ouvert en LFI (- 31,9 %) en
raison du décalage à 2024 d’opérations comme «
Quai d’Orsay XXI
» (estimée à 70
M€) et le
projet Saint Mandé du ministère de la transition écologique (estimé à 4
M€). La consommation
d’AE en 2023 s’établit
toutefois à un niveau supérieur à celle de 2022 (+ 21,5 %) en raison des
engagements portés par le ministère des Armées
et du ministère de l’Europe et des
affaires
étrangères, qui représentent 57 % des projets engagés en 2023.
Ce sont notamment les opérations portées par ces deux ministères qui ont tiré à la hausse
les crédits de paiement. Leur consommation en 2023 a été significativement supérieure à la
prévision (+ 45,5 %) et à celle de
l’année précédente (+
63,5 %).
Ces écarts s’expliquent
notamment par
l’acquisition non prévue du bâtiment «
Osmose » à Strasbourg pour un montant
de 64,3
M€, dont la moitié a été cédée aux quatre collectivités
locales concernées
18
et est ainsi
venue abonder les ressources du CAS. Cette acquisition non programmée correspond à la
volonté des pouvoirs publics de conforter le siège du Parlement européen sur le territoire
français.
En 2023, la consommation des crédits de paiement des opérations structurantes continue
d’être tirée par la poursuite du déploiement des projets des mi
nistères des Armées (relogement
de services parisiens à Tours, regroupement de services sur le site Fort neuf de Vincennes),
pour près de 80
M€.
II -
L’entretien à la charge du propriétaire
L’entretien du propriétaire, aussi appelé entretien «
lourd », recouvre des dépenses de
natures diverses.
A -
Les dépenses de gros entretien, réhabilitation,
mise en conformité et remise en état
Cette catégorie de dépenses correspond aux travaux significatifs réalisés sur le bâti et les
équipements qui ont pour but de restaurer le potentiel de services de ces derniers, mais pas de
l’augmenter contrairement aux opérations structurantes (cf.
supra
§ 2.1).
Il s’agit, en pratique,
de remédier à des situations de vétusté et d’obsolescence technique par
:
-
la mise en conformité avec les réglementations en vigueur (désamiantage, rénovation des
ascenseurs, etc.) ;
-
la remise en état des composants essentiels d’un bâtiment (toiture, plomberie, chaufferie,
etc.), notamment pour contribuer à leur performance énergétique ;
-
le remplacement d’équi
pements en fin de vie ;
-
la réalisation d’adaptations fonctionnelles.
18
L’acquisition de l’immeuble «
Osmose
» a été financé en totalité par le CAS, en AE et en CP. L’avance de
trésorerie effectuée par le CAS a été compensée en partie par un versement du budget général de 26
M€. Le
montant de la revente aux collectivités locales d’une quote
-
part de l’opération s’élève à 32,1
M€.
LES GRANDES COMPOSANTES DE LA DÉPENSE
21
Ces opérations enregistrent, comme les années précédentes, les consommations les plus
importantes, en AE comme en CP (82,6
M€ en AE et 147
M€ en CP). Le niveau d’engagement
est toutefois inférieur à 2022 (- 58 %) car cette dernière année se caractérisait par une hausse
des engagements liés aux projets portés par le programme « Résilience I » pour le financement
de projets de réduction de la consommation d’énergie fossile des bâtiments de l’État pour
l’hiver 2022/2023.
La consommation des CP a été supérieure à la programmation (+ 38,7 %), tirée par les
décaissements du ministère des Armées en hausse par rapport à 2022 (47
M€ contre
27
M€).
18,5
M€ de CP ont été consommés pour financer des
projets du dispositif « Résilience I » ayant
été décalés sur 2023.
B -
La maintenance à la charge du propriétaire
La maintenance à la charge du propriétaire a pour objet de préserver ou de restaurer le
fonctionnement normal d’un immeuble et de ses équipements. Elle recouvre des travaux de
moindre importance, de nature :
-
préventive, réalisés, selon les cas, de manière systématique (en fonction d’un échéancier),
condition
nelle (en cas de franchissement d’un seuil d’usure ou de sous
-performance) ou
anticipée (suite à un diagnostic ou un audit alertant d’une dégradation prévisible)
;
-
corrective, à visée curative (pérenne) ou palliative (temporaire).
La consommation des crédits de paiement, à hauteur de 51,9
M€,
s’est
faite en 2023 à un
niveau supérieur de celui envisagé en LFI (+ 15,3 %), mais
s’est avérée
proche de celle de 2022.
La loi impose à l’État
, comme à tout propriétaire, que les bâtiments occupés par ses
services fassent régulièrement l’objet de contrôles et de diagnostics techniques afin de s’assurer
du bon fonctionnement des installations et de leur conformité aux normes et réglementations.
Le niveau des dépenses de cette nature nouvellement engagées et dépensées sur le CAS
en 2023 reste stable.
Chapitre III
Les perspectives
La logique de fonctionnement du CAS a atteint ses limites
. Outre qu’il ne contribue plus
au désendettement de l’
État depuis plusieurs années, sa participation au financement de la
politique immobilière de l’État
reste largement minoritaire par rapport au financement
via
les
missions budgétaires ministérielles. Le « mur
» d’investissement nécessaire à la mise aux
normes et à l’adaptation du parc immobilier au changement climatique, estimé
entre 140 et
150
Md€ à l’horizon 2050
19
, appelle une réforme en profondeur des instruments de la politique
immobilière, incluant le CAS.
I -
Un programme « désendettement » inactif depuis six
exercices
Depuis le 1
er
janvier 2018, le CAS ne comporte plus qu’un seul programme encore actif,
le programme 721 -
Contribution des cessions immobilières au désendettement de l’État
n’étant
plus doté de crédits.
La contraction actuelle des recettes du CAS et l’extension, depuis 2017, de son périmètre
aux dépenses d’entretien du propriétaire excluent qu’il puisse contribuer, avant longtemps, au
désendettement de l’État
sauf à refaire de ce derni
er un objectif explicite assorti d’objectifs
quantifiés.
Le maintien du programme 721 répond
en l’état
à la préoccupation, formelle, de respecter
l’article 20 de la LOLF selon lequel un CAS est une mission au sens de l’article 7 de cette même
loi, c’est
-à-dire
« un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie »
,
au nombre minimum de deux, donc.
II -
La recherche de nouveaux modes de valorisation
du parc immobilier
La charte de gestion du CAS vise à garantir une exécution budgétaire maîtrisée, le
lancement de toute nouvelle opération immobilière étant conditionné par l’encaissement de
19
Cf. Cour des comptes,
La politique immobilière de l’état, u
ne réforme nécessaire pour aborder les enjeux à
venir
, communication à la commission des finances de l’Assemblée nationale (décembre 2023).
COUR DES COMPTES
24
recettes de cession équivalentes, qui constituent à ce titre des « droits de tirage » pour le
ministère à l’origine de la cession pour 50
% des recettes encaissées et une mutualisation
interministérielle des 50
% restants pour des dépenses d’entretien.
La DIE y voit un outil
incitatif pour les services de l’État et les établissements publics nationaux pour s’engager dans
des projets immobiliers dont l’un des vole
ts est la densification des surfaces. Dans les faits
cependant, la DIE
n’a pas toujours appliqué ce mécanisme
, par exemple en ne mutualisant pas
systématiquement la part prévue des ressources
issues d’une cession
20
ou en gageant la
réalisation d’opérations
immobilières sur des droits de tirage
acquis par d’autres ministères
21
.
Pour des projets immobiliers de grande ampleur, le recours à d’autres supports
budgétaires a pu être préféré, comme dans le cas de la rénovation des cités administratives, pour
laquelle le programme 348
22
a été spécialement créé, ou de la rénovation thermique des
bâtiments publics qui a été portée par le programme 362
23
.
Cette situation, accentuée par la difficulté croissante de céder les biens inoccupés, a
conduit à ce que le CAS ne compte plus en moyenne que 3,5
% des crédits de l’
État en faveur
de l’immobilier, qui pour la majorité reposent sur les programmes support des ministères
24
.
À la suite du deuxième comité de la transformation publique du 29 octobre 2018, qui
relevait que
«
le modèle d’une valorisation du parc par la seule cession […] s’est essoufflé et
n’est pas soutenable
»
,
une mission avait été lancée pour étudier les modalités d’une meilleure
valorisation locative des biens inutilisés, y compris par leur occupation temporaire.
Ses conclusions ont conduit la DIE à définir une nouvelle stratégie patrimoniale qui
consiste notamment à :
-
recourir plus systématiquement à des dispositifs de location de longue durée, en particulier
pour des biens les plus remarquables (cf. l’hôte
l de Grenelle
25
et le bâtiment Pyramides du
ministère de la culture) ;
-
relancer la politique de cessions par un recours aux outils numériques (site internet
modernisé, annonces immobilières, enchères en ligne
, lancement d’expérimentations pour
relancer la commercialisation des biens jugés illiquides
26
) et la création d’une cellule
« commercialisation » comprenant des experts issus du secteur privé ;
20
Cas du projet du plateau de Saclay.
21
Cas des « avances sur droits de tirage » accordées au ministère des affaires étrangères en juin 2018 et à la mission
« Pouvoirs publics »
en 2019, 2020 et 2021. Le ministère des Armées bénéficie de l’intégralité des produits de
cessions (principe inscrit dans la charte du CAS et plus récemment dans la loi de programmation militaire).
22
Programme 348 -
Performance et résilience des bâtiments de l’État et de ses opérateurs
.
23
Programme 362 -
Écologie
du plan de Relance de 2020.
24
Sur un total de crédits de paiement de 9,2
Md€ dans la LFI 2023, cf. Cour des comptes, «
La politique
immobilière de l’État
», décembre 2023, p. 76. Par ailleurs, le CAS représente un sixième des investissements
«
immobilier de l’État
» annuels moyens dep
uis 2012 (calculé sur un total d’investissement annuel moyen de
1,7
Md€ (acquisitions, constructions, travaux lourds immobilisés et gros entretien –
renouvellement) et une
moyenne de ces dépenses financées par le CAS de 260
M€).
25
L’Hôtel de Grenelle a fait en 2021 l’objet d’un bail emphytéotique de 99 ans et a permis la perception d’une
recette de 30,2
M€ au profit du CAS.
26
Notamment expérimentation lancée en 2023 en région Auvergne-Rhône-Alpes (identification des biens peu ou
pas liquides, proposition annuelle de traitement de ces biens avec demande de financement par le CAS, compte
rendu annuel).
LES PERSPECTIVES
25
-
dynamiser le produit des redevances domaniales, en modernisant leurs barèmes afin de
prendre en compte les avantages de toutes natures que procure le bien (nomenclature
AMBRE
27
) et en optimisant et modernisant l’activité de location des biens immobiliers de
l’
État
(via le nouveau site des locations immobilières de l’
État
28
).
Cette démarche doit encore être poursuivie et adaptée aux effets de moyen terme liés aux
nouveaux usages (télétravail, espaces partagés, dématérialisation accrue des échanges avec les
usagers, etc.).
Bien que les recettes du CAS, hors opérations exceptionnelles, se maintiennent à un étiage
moyen de 270
M€ annuel depuis plusieurs années, l’avenir du CAS se pose au regard de deux
éléments
: d’une part la pérennité de ce niveau de recettes dépend de la capacité de l’État
à
poursuivre la valorisation de biens exceptionnels, dont le vivier ne semble pas tari vu les
opérations réalisées en 2023
; d’autre part, la perspective de création d’une foncière de l’État
en 2025, évoquée en novembre 2023 par le ministre délégué chargé des comptes publics et dans
laquelle l’
incitation des ministères à la sobriété foncière, à la mutualisation et à la rénovation
énergétique des bâtiments publics passera par le versement de loyers et amènera si elle se réalise
à repenser profondément le CAS
29
.
En tout état de cause, comme le rappelle le récent rapport de la Cour sur la politique
immobilière de l’État
30
, il importe d’engager rapidement une réforme de l’organisation actuelle
de cette politique qui apparaît aujourd’hui «
largement inadaptée à une gestion efficace et
durable de l’immobilier de l’État et aux travaux majeurs à entreprendre
», notamment ceux
liés à l’adaptation des bâtiments publics au changement climatique.
III -
Une performance contrastée
L’utilisation des crédits
du
CAS doit permettre la réalisation d’opérations immobilières
structurantes ou d’entretien du propriétaire avec l’objectif principal «
d’optimiser le parc
immobilier de l’État
».
Pour rendre compte de la performance de sa gestion au regard de cet objectif, le projet
annuel de performance lui associe les deux indicateurs suivants :
-
le
rendement d’occupation des surfaces ;
-
les surfaces de bureaux remis au Domaine, inoccupées depuis 36 mois ou plus.
27
Aide à la modernisation des barèmes portant sur les redevances.
28
Le site facilite la consultation des annonces par le public, la mise en œuvre des mesures d
e publicité et de
sélections préalables à la délivrance des titres d’occupation du domaine, et permet depuis 2023 aux candidats
d’effectuer leur candidature en ligne.
29
Le rapport de l’IGF et du CGEDD «
Immobilier de l’État
: une nouvelle architecture pour professionnaliser »
d’avril 2022 envisage une refonte de la maquette budgétaire des politiques de l’immobilier de l’État et préconise
de créer une nouvelle mission budgétaire qui rassemblerait un programme dédié au gros entretien/renouvellement
du parc im
mobilier de l’État et un second portant les crédits dédiés aux projets nouveaux.
30
Cf. Cour des comptes,
La politique immobilière de l’état, une réforme nécessaire pour aborder les enjeux à
venir
, communication à la commission des finances de l’Assemblée
nationale (décembre 2023).
COUR DES COMPTES
26
A -
Le ratio
d’occupation des surfaces
Cet indicateur est présenté
au niveau du CAS pour l’ensemble du parc et il est décliné,
par ailleurs, sur le périmètre plus restreint d’une douzaine de programmes du budget général. Il
était exprimé, jusqu’en 2021, en nombre de mètres carrés (m²) de surface utile nette
31
(SUN)
par poste de travail et, depuis 2022, en m² de surface utile brute
32
(SUB) afin de tenir compte
de l’évolution des espaces et des modes de travail (espaces partagés, télétravail
33
). Cet
indicateur doit ainsi permettre de mieux évaluer les efforts de densification
et d’optimisation
des surfaces de la politique immobilière de l’État
. À terme, la notion de « poste de travail »
devrait être remplacée par celle, plus précise, de « résident ».
La circulaire de la Première ministre du 8 février 2023 a défini une cible de 16 m
2
(SUB)
par résident dans les zones où le marché est tendu et/ou dans les services où le télétravail est
sensiblement déployé et, dans tous les cas, un plafond de 18 m
2
par résident.
En pratique, les surfaces visées sont celles des bureaux, qui représentaient 31 % environ
de la SUB du parc occupé par les services de l’État fin 2021. Le rendement d’occupation est
calculé, d’une part, en se fondant sur les déclarations des occupants dans l’outil de gestion
immobilière dit « référentiel technique
» et, d’autre part, à l’aide des mesures de surfaces
renseignées dans le module immobilier « RE-FX » du progiciel Chorus.
Pour 2023
, la DIE estime la valeur de l’indicateur à 23,
1 m²/poste de travail
34
et fixe une
cible de 23,4 m²/poste de travail pour 2024 alors que le taux constaté en 2022 se situe à
24,76 m²/poste de travail
35
. La Cour des comptes estime dans son rapport précité de décembre
2023 que l’atteinte de la cible de 16
m²/résident correspond à une réduction théorique de plus
de 30 % de la surface du parc
immobilier de l’
État.
La fiabilité relative des informations utilisées
36
pour les calculs et l’effet sur l’indicateur
du « mitage »
37
des surfaces rendra nécessaire, selon la DIE,
d’examiner son évolution sur une
période suffisamment longue.
31
Surface horizontale disponible et dégagée de toute emprise sise à l’intérieur des locaux, mais dont sont exclus
les éléments structuraux, les locaux techniques hors combles et sous-sols.
32
Surface de travail, réelle ou potentielle, destinée aux agents, comprenant les surfaces de bureaux, les surfaces
de salles de réunion et les surfaces annexes de travail ; les surfaces de bureaux occupées par des archives sont
prises en compte.
33
La nouvelle notion de résident (à la différence de celle de poste de travail) permet de tenir compte du nomadisme
(travail effectué à l’extérieur des locaux).
34
PLF 2024
PAP.
35
En 2022, le taux constaté s’établissait à 24,76 m
2
/poste de travail sachant que cible
s’établi
ssait à 20 m²
de
SUB/poste de travail (note de la DIE du 19 février 2010, actualisée en 2018, sur la définition et la typologie des
surfaces de l’État).
36
Cour des comptes,
Acte de certification des
comptes de l’État –
Exercice 2021
, mai 2022.
37
Dispersion de surfaces inoccupées à la
suite de réductions d’effectifs, celles
-ci ayant pour effet, dans un premier
temps, de dégrader le rendement d’occupation des surfaces avant que, à une échéance plus éloignée, lesdites
surfaces inoccupées soient supprimées par le fait, par exemple, de réorganisations.
LES PERSPECTIVES
27
B -
Les bureaux remis au Domaine et restés inoccupés
depuis au moins trois ans
À
lui seul, l’indicateur du rendement d’occupation des surfaces ne permet pas
d’appréhender le correct dimensionnement du parc immobilier de l’État au regard de ses
besoins, qui passe aussi par la réduction des superficies durablement inoccupées, le cas échéant.
Un indicateur qui mesure la part des bureaux remis au Domaine restés inoccupés depuis
au moins trois ans est donc présenté depuis 2018 au niveau du programme 723 et exprimé en
pourcentage de la valeur comptable totale des immeubles de bureaux remis au Domaine.
Pour 2023
, la DIE estime que la valeur de l’indicateur devrait s’établir à
49,5
% en €
38
,
cible prudente fixée à un niveau plus élevé que le résultat de 2022 (47,4
% en €) et bien
supérieure à la prévision établie en 2022. En 2021 déjà, le résultat constaté, 57,6
% en €,
était
nettement supérieur à la cible prévue (39
% en €)
.
La révision constante des cibles de
cet indicateur s’explique par la difficulté croissante de
céder ce type de biens (crise de l’immobilier professionnel, notamment en Ile
-de-France ;
raréfaction des biens facilement cessibles ; choix de gestion qui impliquent la conservation de
certains bie
ns dans le patrimoine de l’État
comme des biens exceptionnels ou des biens
réemployés pour des opérations d’hébergement d’urgence) mais aussi par l’évolution favorable
du dénominateur. Depuis 2018 en effet, le stock global des bureaux remis au Domaine a
tendance à baisser, ce qui suggère une amélioration du traitement des biens facilement
« cessibles
». La lecture de cet indicateur doit donc tenir compte autant du ratio qu’il calcule
que des valeurs absolues, qui sont
in fine
l’indicateur que la DIE reconna
ît suivre pour mesurer
le dynamisme des services de l’
État en matière de remploi des biens de bureau remis au
Domaine ou de leur cession.
C -
Des indicateurs qui ne prennent pas encore pleinement en compte
les objectifs de transition écologique
Le décret du 23 juillet 2019, dit « tertiaire », a fixé des obligations de réduction de la
consommation d’énergie finale dans les bâtiments à usage tertiaire, dont les bâtiments
publics
39
.Le Gouvernement a prévu en 2020, dans le cadre du plan de relance, des crédits
spécifiquement destinés aux travaux de rénovation énergétique des bâtiments publics, propriété
de l’État ou de ses opérateurs
: 2,7
Md€ ont abondé à ce titre le programme 362
-
Écologie
dans
la loi de finances pour 2021.
Au printemps 2022, le contexte énergétique a conduit le Gouvernement à lancer un plan
exceptionnel de sobriété énergétique des bâtiments publics : la circulaire du 25 juillet 2022 de
la Première ministre fixe notamment l’objectif d’une réduction de 10
% d’ici
deux ans de la
consommation d’énergie des administrations d’État
40
.
38
PLF 2024
PAP.
39
Obligation de dégager des économies d’énergie d’au moins 40
% d’ici 2030, 50
% en 2040 et 60 % en 2050 par
rapport au niveau de 2010.
40
Document de politique transversale annexé au projet de loi de finances pour 2023, p 54.
COUR DES COMPTES
28
Des indicateurs mesurant la performance énergétique des opérations immobilières de
l’
État ont été introduits dans les programmes 348 -
Performance et résilience des bâtiments de
l’
État et de ses opérateurs
et 362 -
Écologie
, qui portent des objectifs
d’économies d’énergie
primaires
41
.
Par ailleurs, le rapport sur l’impact environnemental du budget de l’
État annexé au
PLF 2024 attribue une quote-part favorable de 15 %
42
à 41,7
M€ de dépenses portées par le
programme 723 du CAS (« opérations structurantes et cessions » et « gros entretien,
réhabilitation, mise en conformité et remise en état »). La procédure de labellisation
d’un projet
immobilier de travaux structurants financés sur ce programme implique en effet la prise en
compte de critères en matière de performance énergétique.
Or, les indicateurs retenus pour évaluer la performance du programme 723 ne permettent
pas de prendre pleinement en compte cette priorité stratégique transversale, qui recouvre à la
fois
les enjeux de performance énergétique mais aussi ceux liés à l’adaptation des bâtiments
publics au changement climatique. Certes le passage de la SUN à la SUB conduit à évaluer
davantage l’optimisation des surfaces, et donc
indirectement les efforts pour économiser des
ressources (énergies fossiles, bâti, foncier),
voire la réduction de l’artificialisation des sols,
toutefois aucun indicateur évaluant spécifiquement les efforts en matière de sobriété
énergétique et plus globalement de transition écologique
n’a été introduit dans le projet annuel
de performance 2024 du CAS.
41
Après réalisation d’audits énergétiques (P 368) ou sous la forme d’énergie finale (P 362). Le rapport sur l’effort
financier de l’État en faveur de la rénovation énergétique des bâtiments, annexé au PLF 2024, exprime
en
Watts/heure les cibles de gain énergétique pour les projets des programmes « cités administratives », « France
Relance », « Résilience 1 » (pour une part financés par le CAS) et « Résilience 2 ».
42
« climat (atténuation) » et « climat (adaptation) »
Annexes
COUR DES COMPTES
30
Annexe n° 1 :
liste des publications récentes de la Cour des comptes en
lien avec les politiques publiques concernées par la NEB
-
Cour des comptes,
La politique immobilière de l’état, une réforme nécessaire pour
aborder les enjeux à venir
, communication à la commission des finances de
l’Assemblée nationale
, décembre 2023.