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17 juillet 2023
ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LA GESTION
QUANTITATIVE
DE L’EAU EN PÉRIODE
DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
Cahier territorial n° 10
Pays de la Loire
Sous-bassin de la Sèvre nantaise
et sous-bassin du Lay
Rapport public thématique
Juillet 2023
SOUS EMBARGO
17 juillet 2023
SOUS EMBARGO
17 juillet 2023
Sommaire
Synthèse
.........................................................................................................
5
Introduction
...................................................................................................
7
Chapitre I
La situation de la ressource en eau et l’importance
des prélèvements
..........................................................................................
11
I - La disponibilité et la qualité de la ressource en eau
..................................
11
A -
Le problème du bouchon vaseux dans l’estuaire de la Loire
..........................
11
B - La pression sur la quantité de la ressource : première cause
de la dégradation de la qualité de l’eau en Vendée
...............................................
12
II - La répartition des prélèvements entre les différentes activités
et les conflits d’usage
.....................................................................................
13
A -
L’augmentation des prélèvements quels que soient les territoires
et les usages
..........................................................................................................
13
B -
Un risque fort de conflits d’usages en Vendée
................................................
14
III - Les effets du changement climatique en avance par rapport
aux prévisions de l’étude «
Explore 2070 »
...................................................
15
Chapitre II La planification de la gestion des eaux
face au changement climatique
...................................................................
17
I - Une gouvernance ne prévenant pas suffisamment les conflits
d’intérêts
........................................................................................................
17
II - Une planifica
tion devant davantage s’appuyer sur des études
.................
18
A - Un Sage à la portée limitée sur la gestion quantitative
dans le sous-bassin de la Sèvre nantaise
...............................................................
18
B -
La nécessité d’une étude «
hydrologie milieux usages climat »
dans le sous-bassin du Lay
...................................................................................
19
Chapitre III
Les mesures visant à réduire les prélèvements d’eau
et à mieux partager la ressource
................................................................
23
I - Les mesures de court terme
: l’exemple d’une gestion unique
et collective des prélèvements d’eau pour l’irrigation dans
le sous-bassin du Lay
.....................................................................................
23
II -
Les mesures d’urgence
: la réduction de la consommation
en période de crise
.........................................................................................
25
A - Une coordination difficile entre les logiques départementale
et de bassin dans le sous-bassin de la Sèvre Nantaise
...........................................
25
B -
Des mesures plus précises pour l’irrigation que pour l’alimentation
en eau potable dans le sous-bassin du Lay
............................................................
26
III - Les mesures de long terme visant à réduire les prélèvements
sur la ressource en eau
...................................................................................
27
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COUR DES COMPTES
4
Chapitre IV La sécurisation de la couverture des besoins en eau
et la préservation des milieux aquatiques
..................................................
31
I -
L’encouragement à la modification des modes de consommation
............
31
II -
L’augmentation de la capacité technique des infrastructures
et du stockage
.................................................................................................
32
A -
La difficile articulation des barrages d’alimentation en eau potable
avec les besoins des milieux naturels
....................................................................
32
B - Des réserves de substitution sécurisant sans réduire structurellement
l’irrigation sur le sous
-bassin du Lay
....................................................................
33
III -
L’élargissement de la ressource utilisable
..............................................
34
IV - La préservation des milieux aquatiques et les solutions fondées
sur la nature dans le Marais poitevin
..............................................................
36
Liste des abréviations
..................................................................................
37
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Synthèse
Dans le cadre de l’enquête commune à la Cour et aux chambres
régionales des comptes relative à la gestion quantitative de l’eau en période
de changement climatique, un cahier territorial propre à la région Pays de
la Loire a été établi. Le territoire de cette région fait quasi intégralement
partie du bassin hydrographique Loire-Bretagne. Deux sous-bassins
versants représentatifs de sa diversité y ont été examinés : le sous-bassin
de la Sèvre Nantaise et celui du Lay. La Sèvre-
Nantaise est un affluent d’un
grand fleuve, la Loire. Le Lay est un petit fleuve côtier qui traverse le
département de la Vendée.
Les deux sous-bassins étudiés sont confrontés à une dégradation de
la qualité de leur ressource en eau, renforcée par l’origine essentiellement
superficielle des eaux prélevées. Alors que le problème du bouchon vaseux
est propre à l’estuaire de la Loire en Loire
-Atlantique, la pression sur la
quantité de la ressource est la première cause de la non atteinte du bon état
écologique des cours d’eau vendéens.
En
dépit de la raréfaction de la ressource, les prélèvements d’eau
brute poursuivent leur progression, quel que soit le sous-bassin considéré :
+ 8 % pour le sous-bassin de la Sèvre Nantaise entre 2015 et 2019 et
+ 17 % pour celui du Lay entre 2012 et 2019. Les prélèvements
augmentent également quels que soient les usages. La répartition des
prélèvements à part presque égale entre l’irrigation et l’eau potable crée un
risque fort de conflits d’usages sur le
sous-bassin de la Sèvre Nantaise
(60/40) comme celui du Lay (48/52). Il existe également un risque de
conflits entre les différents usagers de l’eau potable en Vendée où
la forte
hausse des prélèvements s’explique d’abord par
la satisfaction des besoins
grandissants des industries agroalimentaires.
L’examen
des deux sous-bassins met en évidence une gouvernance
ne prévenant pas suffisamment les conflits d’intérêts. Il révèle également
la nécessité d’études objectivant les volumes maximums susceptibles
d’être prélevés compatibles avec la disponibilité de la re
ssource et son
renouvellement.
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COUR DES COMPTES
6
Le cas du sous-
bassin de la Sèvre Nantaise, qui s’étend sur quatre
départements, illustre la complexité de la gestion de crise en cas de
sécheresse. Cette situation vient en partie
du fait que l’État n’a pas tranché
entre une logique hydrologique et une logique territoriale. Dans le
sous-
bassin du Lay, l’application d’une logique hydrologique aux
prélèvements d’eau pour l’irrigation aboutit à des mesures de restriction
beaucoup plus précises que pour l’eau potable.
Ce dernier usage peut être
priorisé par rapport aux besoins des milieux naturels, sans que l’on sache
si les seuils d’alerte et de crise fixés dans les documents de planification
sont atteints.
C’est le cas
a fortiori
lors des périodes de crise, où l’absence
de distinction entre les différents
usagers de l’eau potable conduit à
privilégier les usages professionnels notamment industriels de
l’eau
potable par rapport aux besoins des milieux naturels et aux autres usages
professionnels (irrigation, autres).
Les actio
ns d’économies d’eau ne sont pas prioritaires
, quels que
soient les usages et le sous-
bassin considéré. S’agissant des prélèvements
pour l’eau potable, les modalités de tarification ne sont pas incitatives. Ni
les particuliers et encore moins les gros consommateurs ne sont encouragés
à adapter leurs besoins à la ressource disponible. Néanmoins une bonne
gestion patrimoniale du réseau, notamment à travers un suivi des
délégataires,
limite les pertes d’eau. S’agissant des prélèvements d’eau
pour l’irrigation, il existe un fort besoin de données.
Dans les deux sous-
bassins examinés, l’interconnexion des réseaux
constitue
une
solution
de
sécurisation
privilégiée.
Deux
types
d’infrastructures essentielles y permettent également d’augmenter les
capacités de stockage. La gestion des barrages d’alimentation en eau
potable s’articule difficilement avec les besoins des milieux naturels. Les
réserves de substitution occupent une place centrale dans la politique de
gestion quantitative de la ressource sur le secteur de la nappe du
sous-bassin du Lay (coût de 13,8
M€, subventionné à hauteur de 65
% par
des fonds publics). Elles
sécurisent l’irrigation
, sans la réduire
structurellement, et posent notamment la question des sécheresses
hivernales. Les solutions fondées sur la nature se limitent au Marais
poitevin.
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Introduction
Le territoire de la région Pays de la Loire fait quasi intégralement
1
partie du bassin hydrographique Loire-Bretagne
d’une superficie de
156 870 km
2
. Le préfet de la région Centre-Val de Loire est préfet
coordonnateur de ce bassin. Pour le Marais poitevin, qui s’étend en partie
sur la région, ce rôle est tenu par le préfet de la Nouvelle-Aquitaine.
Carte n° 1 :
la région Pays de la Loire et les bassins hydrographiques
Source : site OIEau 2017
1
Seules huit des neuf communes de l’ancien canton de Landivy, au coin nord
-ouest de
la Mayenne, appartiennent au bassin hydrographique Seine-Normandie.
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8
Le réseau hydrographique de la région est principalement constitué
par la Loire et ses affluents, dont les principaux sont le Thouet, l’Authion,
la Maine
2
, le Layon, l’Èvre, l’Erdre et la Sèvre Nantaise, ainsi que le petit
Acheneau dont les eaux proviennent du lac de Grand-Lieu, un des plus
grands lacs naturels d’eau douce de France à la superficie très fluctuante.
Sur la côte atlantique, des marais (Brière, Marais Breton, Marais
d’Olonne et Marais Poitevin) et quelques fleuves côtiers bretons ou
vendéens, comme le Brivet, en Loire-
Atlantique, la Vie, l’Auzance et le
Lay, en Vendée, forment les seules eaux douces superficielles naturelles.
La région Pays de la Loire a connu une forte dynamique
démographique, surtout au début des années 2000. Elle continue d’être
dans les trois premières régions de métropole les plus dynamiques, mais
cette croissance démographique se ralentit et concerne surtout la
Loire-Atlantique (principal
ement l’agglomération nantaise) et, dans une
moindre mesure, l’agglomération angevine. Le reste du territoire voit
globalement sa population se stabiliser.
Au sein de la région Pays de la Loire, la chambre a fait le choix de
cibler deux territoires distincts correspondant à des sous-bassins versants :
le sous-bassin de la Sèvre Nantaise et celui du Lay. Ces deux sous-bassins
sont différents et, à cet égard, représentatifs de la diversité hydrographique
de la région voire du bassin hydrographique Loire-Bretagne.
La Sèvre-Nantaise
3
est un affluent d’un grand fleuve, la Loire.
Le Lay
4
est un petit fleuve côtier qui traverse le département de la
Vendée. S’ils sont tous deux sujets à des tensions sur la ressource,
l’enjeu de la gestion quantitative de l’eau en p
ériode de changement
2
Constituée de la Mayenne, qui a reçu les eaux de l’Oudon, et de la Sarthe, qui a reçu
les eaux du Loir
3
La Sèvre Nantaise, longue de 141,8 km, est le dernier grand affluent de la Loire. Elle
prend sa source dans les Deux-Sèvres et a son exécutoire à Nantes. La Sèvre Nantaise
traverse
d’abord
une zone de petites collines, est rejointe par un petit affluent, l’Ouin,
avant de parcourir l’Est du bocage vendéen et de poursuivre sa course à la frontière du
Maine-et-Loire pour terminer en Loire-
Atlantique où elle reçoit l’eau de trois affluents,
la Moine, la Sanguèze et la Maine.
4
Le Lay, long de 118,81
km, est le principal cours d’eau de la Vendée, où il prend sa
source et où il se jette dans l’Océan Atlantique
au niveau de la baie de l’Aiguillon
, ce
qui lui vaut la qualification de fleuve.
Il a quelques affluents comme l’Yon ou la
Smagne d’environ 50
kms. Le Lay résulte de la confluence du Petit et du Grand Lay au
niveau de la commune de Mareuil-sur-Lay-Dissais. En 1790, ils avaient été retenus
pour donner le nom de « Deux-Lays » au département qui se constituait alors dans
le Bas-Poitou. Mais afin de ne pas froisser la susceptibilité des députés élus dans la
région, avec le jeu de mots les deux laids, on leur p
référa le nom d’une rivière beaucoup
moins considérable, la Vendée (L. Fouladou,
La Vendée 1900-1920
, 2005).
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LA GESTION QUANTITAT
IVE DE L’EAU EN PÉRI
ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
CAHIER TERRITORIAL DES PAYS DE LA LOIRE
9
climatique ne se pose pas dans les mêmes termes. Il est identifié de
longue date sur le sous-bassin du Lay, classé en zone de répartition des
eaux (ZRE) depuis 1994.
Le sous-bassin de la Sèvre Nantaise couvre un territoire de
2 350 km
2
, en partie dans les Deux-Sèvres, en Vendée, dans le
Maine-et-Loire et la Loire-Atlantique.
Le bassin du Lay couvre un territoire de 2 200 km
2
, soit un tiers de
la superficie de la Vendée. Il peut se diviser en trois secteurs : le bocage en
amont, la plaine avec le Lay dit « réalimenté » et le Marais poitevin (pour
partie) en aval.
Ces sous-bassins incluent les nappes de leur sous-sol, quand bien
même une nappe pourrait se situer dans plusieurs sous-bassins, comme les
nappes du Marais poitevin.
Carte n° 2 :
sous-bassin de la Sèvre Nantaise
Source : EPTB de la Sèvre Nantaise
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COUR DES COMPTES
10
Carte n° 3 :
sous-bassins du département de la Vendée
Source : département de la Vendée
La chambre régionale des comptes Pays de la Loire a contrôlé deux
organismes porteurs de schémas d’aménagement
et de gestion des eaux
(Sage)
: l’établissement public territorial de bassin (EPTB) de la Sèvre
Nantaise et le syndicat mixte du bassin du Lay (SMBL)
. S’y sont ajoutés
les contrôles de deux syndicats d’alimentation en eau potable
: le syndicat
mixte Atlant
ic’eau et le syndicat mixte Vendée eau
5
. Les services de l’État,
directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) de la
Loire-
Atlantique et de la Vendée, ont également fait l’objet d’une enquête.
Des entretiens ont enfin été menés avec la direction départementale des
territoires (DDT) de Maine-et-
Loire, la chambre régionale d’agriculture et
l’établissement public du Marais poitevin (EPMP).
5
CRC Pays de la Loire,
syndicat mixte du bassin du Lay (SMBL
), 2022
CRC Pays de la Loire,
EPTB de la Sèvre Nantaise
, 2023
CRC Pays de la Loire, s
yndicat mixte Atlantic’eau,
2023
CRC Pays de la Loire,
syndicat mixte Vendée eau
, 2023.
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17 juillet 2023
Chapitre I
La situation de la ressource en eau
et l’importance des prélèvements
I -
La disponibilité et la qualité
de la ressource en eau
A -
Le problème du bouchon vaseux
dans l’estuaire de la Loire
Les masses d’eau souterraine sont peu nombreuses tant en
Loire-Atlantique que sur le bassin de la Sèvre Nantaise, en raison de la
nature géologique du sol du massif armoricain. Elles sont surtout
constituées de nappes alluviales
6
(notamment celles de la Loire et de la
Vilaine) ainsi que de quelques petites nappes sédimentaires qui servent
de sources secondaires d’approvisionnement en eau potable
. Elles ne
contribuent qu’à 14,4
% du total des prélèvements en eau potable dans
le département. Or, si ces nappes réagissent fortement à la pluviométrie
(bon état quantitatif), leur état chimique est médiocre. Il peut conduire,
régulièrement, à des fermetures de points de captage temporaires de
longue durée (presque 30 ans à Machecoul), voire définitives,
(143 ouvrages abandonnés pour la seule alimentation en eau potable
selon le bureau de recherche géologique et minière - BRGM, en 2016).
6
Les nappes alluviales sont des réservoirs souterr
ains dont la couche perméable à l’eau
est constituée d’alluvions, soit des matériaux non consolidés.
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17 juillet 2023
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12
L’état écologique des masses d’eau superficielles est encore plus
préoccupant. S
eule la Loire est en bon état. La situation s’est dégradée,
plusieurs cours d’eau passant d’un état moyen ou médiocre à mauvais, alors
même que cette tendance à la dégradation est ancienne, identifiée, et faisait
l’objet d’un objectif ambitieux,
cependant revu à la baisse dans les schémas
directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (
Sdage) successifs
7
.
Le bouchon vaseux
dans l’estuaire de la Loire
est susceptible de
dégrader fortement la quantité
d’eau disponible pour l’alimentation en eau
potable lorsque se conjugue, en été, grandes marées et faible débit. Le
bouchon remonte toujours plus loin le cours de la Loire atteignant
dorénavant, notamment lors des sécheresses de 2019 et 2022, les sites de
captages. Or les deux tiers
de l’eau potable produite en Loire
-Atlantique
proviennent de ces captages.
B -
La pression sur la quantité de la ressource :
première cause de la dégradation de la qualité de l’eau
en Vendée
La première cause de la non-atteinte du bon état écologique en
Vendée est la pression sur la quantité de la ressource
8
.
18
% des cours et plans d’eau y faisaient l’objet d’observations en
« assec », pour « assèchement », de fin mai à fin septembre 2021
9
. Le
cours d’eau du Lay présentait en 2015
un état écologique moyen à
médiocre.
Les
nappes
sont
relativement
peu
importantes
et
principalement
situées
en
bordure
du
Marais
poitevin
10
.
Elles
présentaient en 2015 un état quantitatif médiocre, ainsi qu’un état
chimique médiocre pour la majorité d’entre
elles
11
.
7
Objectif du Sdage 2010-2015 : 68
% des masses d’eau en bon état sur le département
;
objectif du Sdage 2016-2021 : 39 % ; constaté en 2013 : 2 % ; constaté en 2021 : moins
de 2 %.
8
Plan d’action opérationnel territorialisé (PAOT) 2019
-2021 de la Vendée.
9
Eaux et milieux aquatiques
, Les chiffres clés, édition 2020.
10
Nappe du Dogger alimentant le Marais poitevin et les marais de bordure, nappe du
Lias inférieur, nappe de la plaine.
11
Il s’agit des dernières données de
surveillance disponibles, rapportées à la Commission européenne en application de la
directive cadre sur l’eau (DCE).
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LA GESTION QUANTITAT
IVE DE L’EAU EN PÉRI
ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
CAHIER TERRITORIAL DES PAYS DE LA LOIRE
13
II -
La répartition des prélèvements entre
les différentes activités et les conflits d’usage
A -
L’augmentation des prélèvements quels que soient
les territoires et les usages
Dans le sous-bassin de la Sèvre Nantaise, entre 2015 et 2019, le
volume d’eau do
uce prélevé a augmenté de 8 %, passant de 28,3 millions
de m
3
(Mm
3
) à 30,6 Mm
3
, dont presque 60
% pour l’irrigation. Les
prélèvements pour l’eau potable augmentent de 4
%. Sur une période plus
longue (2009-
2019), l’augmentation est encore plus significativ
e :
+ 12,6
% pour l’irrigation et + 15,7
% pour l’eau potable. Si l’on tient
compte du fait que les prélèvements classés en « eau souterraine » par la
banque nationale des prélèvements (BNPE) sont en réalité très
majoritairement des captages dans la nappe
de plans d’eau ou de cours
d’eau, et donc dépendent des eaux de surface, la quasi
-totalité de ces
prélèvements pour l’irrigation et pour l’eau potable proviennent des eaux
de surface.
À l’échelle du département de la Loire
-Atlantique, sur la même
période 2009-2019, la progression des prélèvements agricoles est encore
plus marquée : + 19,6
% pour l’irrigation et +
9,3
% pour l’eau potable. Les
prélèvements
pour
l’eau
potable
continuent
d’augmenter
car
la
consommation, totale ou par abonné, augmente. La consommation totale
s’accroît de 15,9
% entre 2016 et 2021 sur le seul territoire du département
couvert par Atlantic’eau.
Graphique n° 1 :
évolution
de la consommation moyenne d’eau
potable par abonné domestique
sur le territoire d’Atlantic’eau
(en m
3
par abonné)
Source : CRC
Pays de la Loire, d’après les données d’Atlantic’eau
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COUR DES COMPTES
14
De même dans le sous-bassin du Lay, entre 2012 et 2019, le volume
d’eau douce prélevé a augmenté d’environ 17
% pour atteindre 53,4 Mm
3
en 2019. Si les irrigants ne sont plus les premiers préleveurs depuis 2017,
leurs prélèvements augmentent (+ 4,6 %)
12
. L
a production d’eau potable
explique majoritairement l’augmentation des prélèvements (+
32,2 %).
Graphique n° 2 :
la répartition des prélèvements par usage
sur le sous-bassin du Lay (en m
3
)
Source : CRC Pays de la Loire
, d’après
les données de la banque nationale des prélèvements
B -
Un risque fort de conflits d’usages
en Vendée
La répartition des prélèvements entre l’irrigation et l’eau potable
crée un risque fort de conflits d’usages sur le sous
-bassin de la Sèvre
Nantaise (60/40) comme celui du Lay (48/52).
Par ailleurs, à l’échelle du département de la Vendée, la forte hausse de
12,5
% entre 2009 et 2019 des prélèvements destinés à la production d’eau
potable s’explique tant par la croissance démographique et l’activité
touristique sur le littoral mises en avant par Vendée eau que par la satisfaction
des besoins grandissants des industries agroalimentaires (+ 13 % entre 2012 et
12
Le président du SMBL a indiqué qu’une période de huit ans était
trop courte pour
expliquer cette évolution autrement que par les variations météorologiques.
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LA GESTION QUANTITAT
IVE DE L’EAU EN PÉRI
ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
CAHIER TERRITORIAL DES PAYS DE LA LOIRE
15
2017 à nombre d’abonnés agroalimentaires constant).
21
% de l’eau p
otable
en Vendée est consommée par 0,2 % des abonnés dits « gros consommateurs »
(consommant plus de 6 000 m³ par an)
13
en 2020. À cet égard, les volumes
vendus par type d’abonnés (particuliers, collectivités, gros consommateurs,
etc.) devraient être rendus publics.
III -
Les effets du changement climatique
en avance par rapport aux prévisions de l’étude
« Explore 2070 »
Sur les deux sous-bassins étudiés, la chambre a comparé
14
, d’une
part, l
es données prospectives de l’
étude de référence du BRGM « Explore
2070 »
15
, et
d’autre part,
les données présentes de la banque hydro.
Cette comparaison
permet d’établir que
le risque de dégradation de
l’état quantitatif anticipé dans cette étude
est déjà réalisé pour les eaux de
surface
16
: les évolutions observées correspondent à ce que les simulations
annonçaient intervenir dans 25 à 40 ans.
L’impact, contrasté sur l’année, peut être précisé
: la période des
basses eaux
, ou période d’étiage,
commence plus tôt
; l’
étiage, déjà très
bas, diminue encore ; les débits augmentent entre les mois de novembre et
janvier à la faveur d’une plus grande pluv
iométrie
17
.
13
Cette catégorie regroupe en grande majorité des industries agroalimentaires, puis le
tourisme et des campings, ainsi que certaines exploitations agricoles d’élevage
(abreuvement en eau des animaux).
14
Voir pour plus de détails : CRC Pays de la Loire,
EPTB Sèvre Nantaise, SMBL
;
15
EXPLORE 2070 (equipement.gouv.fr)
16
Rapport de la chambre régionale des comptes Pays de la Loire sur le syndicat mixte
bassin du Lay (SMBL).
17
L’étude HMUC en cours sur le bassin de la Sèvre Nantaise invite d’ailleurs à nuancer
ce dernier constat au moins en début de période : les débits du mois de novembre se
situent dans les faits entre ceux d’avril à mai.
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16
Graphique n° 3 :
comparaison des débits actuels et futurs à Tiffauges
(Sèvre Nantaise)
Source
: CRC Pays de la Loire, d’après
étude « Explore 2070 » et banque hydro
« GR4J » et « ISBA-MODCOU » correspondant à deux modèles hydrologiques, auxquels
les données prévisionnelles issues de modèles climatiques ont été intégrées
La diminution de la ressource en eau dans la période de basses eaux
est une donnée effective à prendre en compte (courbe noire se situant
majoritairement sous la courbe grise).
L’étude «
Explore 2070 » anticipe également une dégradation de
l’état quantitatif des eaux souterraines avec une bais
se de leur recharge de
25 % à 30
% à l’horizon 2050, par rapport à un état de référence
correspondant à la période 1961-1990.
Les deux sous-bassins étudiés sont donc confrontés à une
dégradation de la qualité de leur ressource en eau, renforcée par l’origine
essentiellement superficielle des eaux prélevées. En dépit de la raréfaction
de la ressource, les prélèvements d’eau brute poursuivent leur progression
quel que soit le sous-bassin considéré.
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Chapitre II
La planification de la gestion des eaux
face au changement climatique
I -
Une gouvernance ne prévenant pas
suffisamment les conflit
s d’intérêts
Dans les deux sous-
bassins étudiés, il a été relevé l’absence de
stratégie de prévention des conflits d’intérêts. Ce constat s’est vérifié tant
au niveau du premier collège des collectivités locales de la commission
locale de l’eau (Cle) élabo
rant le Sage et dont la composition est arrêtée
par le préfet qu’au niveau des comités syndicaux, bureaux et commissions
des syndicats d’alimentation en eau potable.
Des
risques d’
une interférence entre un intérêt public et des intérêts
publics ou privés qui serait de nature à influencer ou à paraître influencer
l’exercice indépendant, impartial et objectif de leurs fonctions par ses
membres ont pourtant été relevés. Des dispositifs devraient donc être
formalisés
(déclaration d’intérêts,
obligation de déport, etc.)
18
. Le syndicat
Atlantic’eau a fait partiellement évoluer son règlement intérieur en ce sens.
Par ailleurs, en
raison de l’obligation de se conformer à la
composition fixée par le code de l’environnement, la répartition des sièges
du deuxième collège des usagers de la Cle du Lay
n’est pas représentative
18
Art. 2 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique :
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18
de l’importance respective des différents usages.
Par exemple, ce collège
ne réunit pas toutes les sensibilités de la profession agricole. Les membres
de la Cle sont toutefois unanimes pour souligner
la qualité de l’écoute qui
y règne.
II -
Une planification devant davantage
s’appuyer sur des études
Tant le sous-bassin de la Sèvre Nantaise que celui du Lay sont
couverts par des Sage. Une étude « hydrologie milieux usages
climat » (HMUC) est en cours dans le premier et se fait attendre dans le
second.
A -
Un Sage à la portée limitée sur la gestion
quantitative dans le sous-bassin de la Sèvre nantaise
Le Sage de la Sèvre Nantaise a été adopté en 2015 en même temps
que le nouveau Sdage Loire-
Bretagne. Pourtant l’articulation entre leurs
dispositions n’est pas optimale
. L
a définition du débit objectif d’étiage
(DOE) n’est pas la même
. Le
mois d’octobre disparaît de la période de
basses eaux dans le Sage. Les points de référence diffèrent entre les deux
documents. Entre la période allant de 2001 à 2011, puis de 2011 à 2021, le
nombre de franchissements
des DOE s’accroît fortement en début d
e
période d’étiage (avril et mai)
19
.
Une étude volume prélevables très détaillée avait été réalisée lors de
l’élaboration du
Sage. Elle
avait permis d’objectiver des volumes
maximums précis susceptibles d’être prélevés sur le sous
-bassin dans le
respect des débits biologiques. Pourtant
aucune norme contraignante n’a
finalement été adoptée par la Cle. Aucun niveau de volume prélevable ne
figure donc dans le Sage.
Alors que l
’établissement porteur de
Sage a lancé à la fois une étude
« hydrologie milieux usages climat
» (HMUC) et une stratégie d’identification
des territoires prioritaires d’action, il a été recommandé que les résultats de
l’étude soit effectivement pris en compte lors d’une future révision d
u Sage et
que des volumes prélevables soient fixés dans son règlement.
19
L’étude HMUC en cours sur le bassin de la Sèvre Nantaise montre que le respect des
DOE se dégrade également en septembre.
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IVE DE L’EAU EN PÉRI
ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
CAHIER TERRITORIAL DES PAYS DE LA LOIRE
19
B -
La nécessité d’une étude «
hydrologie milieux usages
climat » dans le sous-bassin du Lay
Le Sage du bassin du Lay a été adopté en 2011. En application du
schéma directeur d’aménagement
et de gestion des eaux (Sdage)
Loire-Bretagne 2010-2015, il a fixé une règle importante en matière de
gestion quantitative de la ressource en eau sur le secteur de la nappe, à
savoir la détermination d’un volume prélevable pour l’irrigation dans la
nappe a
u printemps et à l’été de 4,8
Mm
3
, ramené à 4,18 Mm
3
dans le
contrat territorial de gestion quantitative (CTGQ) du secteur Lay pris pour
son application. Cela représente une réduction en période d’étiage par
rapport à un volume de référence de 8,32 Mm
3
en 2003.
Mais le Sage
du Lay, dont l’élaboration aura pris plus de 11
ans, n’a
pas été modifié depuis plus de 10 ans. Sa mise en compatibilité avec le
Sdage Loire-Bretagne 2016-2021, puis 2022-2027, est par suite nécessaire.
Ce temps long, qui s’explique en
partie par les modalités concertées de la
gouvernance, n’apparaît pas adapté à l’urgence climatique.
En particulier, l’absence d’étude
HMUC
ne permet pas de s’assurer
que le volume cité de 4,18 Mm
3
et les indicateurs de milieu
20
déterminés
dans les documen
ts de planification restent d’actualité pour satisfaire les
besoins des différents usages et milieux au regard de la ressource
disponible dans le contexte du changement climatique. Or, le Sage doit
prendre en compte les adaptations nécessaires à ce changement depuis la
loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006.
Le SMBL a fait valoir que
sa candidature à un appel à manifestation d’intérêt avait été retenue
. Il
pourrait ainsi bénéficier d’un financement intégral par l’AELB et l’État de
l’étude HMUC
, laquelle doit débuter au printemps 2023, à la suite de la
validation du cahier des charges par la Cle.
La cohérence du Sage du bassin du Lay avec les Sage voisins est
assurée par
l’établissement public du Marais poitevin (EPMP)
.
20
Les débits objectifs des cours d’eau n’ont pas évolué de
puis 2000 et les niveaux
objectifs des marais depuis 2011.
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COUR DES COMPTES
20
L’établissement public du
Marais poitevin (EPMP)
Le sous-bassin du Lay se situe en partie sur le Marais poitevin, lequel
est alimenté par d’autres
sous-bassins
Sèvre niortaise et Vendée
recoupant au total deux régions et quatre départements. L’objectif de
préservation du Marais poitevin a ainsi rendu nécessaire une coordination
entre ces différents sous-bassins.
Cette coordination est principalement assurée par une structure
dédiée à travers
l’EPMP
.
Il s’agit d’
un établissement public national
administratif relevant de la tute
lle du ministère chargé de l’environnement
21
.
Sa création a initialement été motivée par la volonté politique d’apaiser une
situation tendue dans le Marais poitevin
22
.
Même si des difficultés sont relevées dans l’utilisation de ses outils
fonciers et sa mis
sion d’organisme unique de gestion collective (OUGC)
23
,
l’efficacité et la légitimité de l’EPMP font l’objet d’une reconnaissance
unanime. Il
a contribué à faire avancer la notion d’intérêt collectif auprès de
nombreux acteurs défendant leurs intérêts individuels
24
.
L’EPMP
assure notamment la cohérence entre les Sage et a
développé le
système d’information sur l’eau du Marais poitevin
(SIEMP)
centralisant toutes les informations relatives à la gestion quantitative de
l’eau
(indicateurs de milieu, décisions des comités de gestion, etc.),
favorisant ainsi la transparence de cette gestion auprès du grand public et
des
acteurs de l’eau
via une cartographie et des graphiques dynamiques.
Dans le contexte du changement climatique, le désengagement
souhaité de l’État, à travers la disparition de l’EPMP, pourrait déstabiliser
le territoire.
Cependant l
’articulation
de la politique de gestion quantitative de
l’eau avec la planification des activités économiques autre que l’irrigation
et avec l’urbanisme est encore faible
.
21
Art. L. 213-12-1 du code de
l’
environnement introduit par art. 158 de la loi n° 2010-
788 du 12 juillet
2010 portant engagement national pour l’environnement dite
« Grenelle 2 », art. R. 213-49-1 à 24 du code de
l’
environnement.
22
Voir notamment rapport du CGEDD,
Évaluation à mi-
parcours de la mise en œuvre
du plan d’action g
ouvernemental pour le Marais poitevin 2003-2012
, plan faisant suite
à la perte du label parc naturel régional de 1996 à 2013 et à la condamnation de la
France par la cour de justice des communautés européennes (CJCE) sur le fondement
d’une insuffisante app
lication de la directive dite « oiseaux ».
23
Transmission tardive des rapports annuels par la chambre d’agriculture notamment.
24
Rapport du CGEDD,
Le Marais Poitevin : état des lieux actualisé des actions menées
à la suite du plan gouvernemental 2003-2013 et orientation
, juin 2016 ; évaluation du
CTGQ réalisée par l’AELB en 2021
.
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IVE DE L’EAU EN PÉRI
ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
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21
L
’examen des deux sous
-bassins met en évidence une gouvernance
ne luttant pas suffisamment contr
e les conflits d’intérêts. Il révèle
également la nécessité d’études objectivant les volumes maximums
prélevables, compatibles avec la disponibilité de la ressource et son
renouvellement.
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17 juillet 2023
Chapitre III
Les mesures visant à réduire
les pr
élèvements d’eau et à mieux
partager la ressource
I -
Les mesures de court terme :
l’exemple d’une gestion unique et collective
des prélèvements d’eau pour l’irrigation
dans le sous-bassin du Lay
Dans le sous-
bassin du Lay, les prélèvements d’eau pour l’irrigation
agricole font l’objet d’une procédure spécifique
: l’autorisation de
prélèvements est sollicitée, pour le compte de l’ensemble des
1 500 irrigants, par
l’EPMP, désigné
OUGC de manière assez originale par
la loi
25
. La « gestion courante » est déléguée à l
a chambre d’agriculture
Pays de la Loire pour la partie du bassin du Lay la concernant.
La première autorisation unique pluriannuelle (AUP) 2016-2022
sollicitée par l’EPMP a été annulée par les juridicti
ons administratives.
25
Art. L. 213-12-1 et R. 213-49-4 du code de
l’
environnement.
SOUS EMBARGO
17 juillet 2023
COUR DES COMPTES
24
L’annulation par les juridictions administratives de l’AUP
2016-
2022 des prélèvements d’eau pour l’irrigation agricole
Les motifs de l’annulation de l’AUP 2016
-2022, appliquant le
volume cité de 4,18 Mm
3
, confirment la nécessité
d’études pour objectiver
l’équilibre relevé. La cour administrative d’appel de Bordeaux
26
a confirmé
sur le fond le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 9 mai 2019
27
,
en retenant qu’alors même que l’autorisation avait pour objet de définir des
volumes autorisés, elle méconnaissait le principe de gestion équilibrée et
durable de la ressource en eau dès lors notamment que l’instruction de la
demande d’autorisation avait été faite au regard de «
volumes cibles » sans
détermination préalable de « volumes prélevables
» et que l’État ne
produisait aucun élément permettant d’estimer que ces «
volumes cibles »
avaient été déterminés de façon à garantir, compte tenu de la capacité du
milieu naturel à supporter des prélèvements, le bon état quantitatif de la
ressource en eau, qui est un objectif de l’autorisation.
Par ailleurs, l’autorisation, qui avait pour effet d’augmenter les
prélèvements sur l’année à la faveur des prélèvements hivernaux destinés
au
remplissage des retenues de substitution, était incompatible avec les
plans d’aménagement et de gestion durable (PAGD) des
Sage Sèvre
niortaise et Vendée.
La seconde AUP 2021-2025 a été délivrée le 9 novembre 2021
28
.
Elle prévoit le volume d’eau maximal annuel dont le prélèvement est
autorisé
réparti
par
secteurs.
S’agissant
du
sous-bassin
du
Lay
correspondant à trois unités de gestion, aucune baisse ni hausse de ce
volume en période d’étiage à l’échéance 2025 n’e
st fixée, dès lors que ce
bassin hydrologique est considéré comme à l’équilibre.
Par ailleurs, i
l existe un enjeu fort d’équité et de transparence dans
la répartition des prélèvements d’eau pour l’irrigation, essentiellement
basée sur la capacité des installations notamment de pompage en 2015.
En plus d’être unique, la gestion des prélèvements d’eau pour
l’irrigation agricole sur le sous
-bassin du Lay est dite collective. La
profession peut appliquer aux prélèvements autorisés des mesures
d’autolimitation
concertées
pour
éviter
ou
retarder
les
mesures
préfectorales plus restrictives.
26
CAA Bordeaux, 15 juin 2021,
Ministre de la Transition écologique c/ Association
Nature environnement
.
27
TA Poitiers, 9 mai 2019,
Association Nature environnement 17
, n° 1701657, C+.
28
Arrêté
préfectoral interdépartemental portant AUP d’eau pour l’irrigation
agricole à
l’EPMP et approbation du plan de répartition 2021
.
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ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
CAHIER TERRITORIAL DES PAYS DE LA LOIRE
25
Mais cette gestion collective est plus ou moins poussée selon les
secteurs. Sur le secteur du bocage amont où les prélèvements pour
l’irrigation sont essentiellement issus des plans d’eau, leur gestion apparaît
insuffisamment encadrée
: peu d’indicateurs de milieu, absence de
protocole de gestion collective, difficultés dans la transmission des relevés
de compteurs, non recensement de certains plans d’eau faute notamment
de contrôle, fiabilité incertaine des volumes réellement consommés.
Sous la réserve d’une étude HMUC confirmant la pertinence des
indicateurs
de milieu fixés dans les documents de planification, c’est sur le
secteur de la nappe que la gestion des prélèvements pour l’irrigation est la plus
aboutie avec notamment un protocole de gestion collective qui définit des
mesures d’autolimitation
29
, déclenchées en fonction du franchissement des
indicateurs de milieu, y associe des sanctions volumétriques en cas de non-
respect et une obligation de compteurs avec télétransmission en 2027. Cette
gestion collective apparaît efficace pour éviter de franchir les s
euils d’alerte et
de crise des indicateurs de milieu déclenchant la gestion administrative.
II -
Les mesures d’urgence
: la réduction
de la consommation en période de crise
A -
Une coordination difficile entre les logiques
départementale et de bassin dans le sous-bassin
de la Sèvre Nantaise
La durée d’application des mesures de restriction en période de
sécheresse ne cesse d’augmenter en Loire
-Atlantique :
Tableau n° 1 :
nombre de jours d’application des dispositifs de crise
en Loire-Atlantique
2016
2017
2018
2019
2020
2021
70
105
114
118
132
192
Source : DDTM de la Loire-Atlantique
29
Les protocoles adoptent les principes du report, du 31 mai au 19 septembre (été), des
volumes autorisés non consommé du 1
er
avril au 30 mai (printemps) et du
fractionnement par quinzaine, du 31 mai au 19 septembre (été), des volumes autorisés
non consommées.
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COUR DES COMPTES
26
Sur le sous-bassin de la Sèvre Nantaise, le régime de cette gestion
de
crise
est
organisé
depuis
juin
2021
par
un
arrêté
cadre
interdépartemental de sécheresse (ACS). Certaines de ses dispositions sont
contradictoires et autorisent des dérogations individuelles régulières.
Le problème
qui se pose à l’autorité préfectorale est surtout celui
de
la coordination entre la logique départementale et la logique de bassin.
Chacun des quatre départements du sous-bassin dispose de son
propre arrêté cadre sécheresse, applicable sur l’ensemble du territoire
départemental non couvert par l’ACS du sous
-bassin de la Sèvre Nantaise
et, le cas échéant, un autre ACS d’un autre sous
-
bassin. À l’inverse, il
existe des A
CS pour d’autres sous
-bassins, eux aussi souvent
interdépartementaux et parfois des ACS spécifiques à certaines activités.
Plusieurs autorités préfectorales doivent donc agir en composant avec
plusieurs arrêtés ayant des champs territoriaux et des mesures différentes.
Cette complexité administrative s’accroît
du fait qu’un seul arrêté
préfectoral par semaine peut être édicté, pour faciliter la communication
externe. L’arrêté d’un préfet porte donc, une fois par semaine, sur les
portions du territoire départemental non couvert par un ACS de sous-bassin
et sur les portions d’un sous
-bassin incluses dans le territoire départemental
couvert par l’ACS de ce sous
-
bassin. La désignation d’un préfet
coordonnateur ne résout pas les difficultés, d’autant qu’il ne peut
disposer
d’une délégation de signature des autres préfets
concernés.
Ainsi, la complexité de la gestion de crise en cas de sécheresse vient
en partie
du fait que l’État n’a pas tranché entre une logique hydrologique
et une logique territoriale, c’est
-à-dire entre une politique de gestion
quantitative qui se fonde
d’abord sur la ressource en eau et non sur les
compétences habituelles liées à d’autres politiques publiques
(cadre
départemental).
B -
Des mesures plus précises pour l’irrigation
que pour l’alimentat
ion en eau potable
dans le sous-bassin du Lay
Sur le sous-bassin du Lay, la gestion administrative de crise des
prélèvements d’eau pour l’irrigation agricole est encadrée et coordonnée.
Elle est prévue annuellement dans un arrêté cadre interdépartemental
applicable dans le Marais poitevin du 1
er
avril au 31 octobre. Celui-ci
délimite des zones d’alerte correspondant aux unités de gestion collective.
Il détermine des seuils d’alerte, d’alerte renforcée et de cr
ise en fonction
de courbes ou niveaux de gestion globalement issus des indicateurs de
milieux fixés dans le Sdage et le PAGD du Sage.
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IVE DE L’EAU EN PÉRI
ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
CAHIER TERRITORIAL DES PAYS DE LA LOIRE
27
L’arrêté cadre applicable aux autres usages, en particulier
l’alimentation en eau potable, est moins précis quant aux mes
ures de
restriction. Par exemple, le remplissage des mares de chasse créées après
2006, pourra être interdit « si la situation le justifie ». Les débits réservés,
déjà bas, des barrages pourront être réduits sans qu’aucun débit chiffré ne
soit associé au franchissement des taux de remplissage des barrages qui
déclenchent les mesures.
À cet égard, la gestion des barrages peut prioriser l’usage en eau potable
par rapport aux besoins des milieux naturels, sans que l’on sache si les seuils
d’alerte et de crise
fixés dans les documents de planification sont atteints.
De plus, a
ucune mesure de restriction n’est appliquée aux usagers
professionnels intérieurs
30
de l’eau potable, notamment industriels
. Ces
derniers, en se confondant
avec les autres usagers de l’ea
u potable au sein
du réseau, bénéficient de la réduction des débits réservés. L’usage non
prioritaire professionnel prime alors sur l’usage prioritaire lié aux besoins
des milieux naturels. L’usage professionnel intérieur eau potable prime
également sur les autres usages professionnels (irrigation, autres). Sa
participation à l’effort d’économie en période de sécheresse est donc faible.
III -
Les mesures de long terme visant à réduire
les prélèvements sur la ressource en eau
Les actions d’économies d’eau ne
sont pas prioritaires quels que
soient les usages et le sous-bassin considéré.
S’agissant des prélèvements pour l’eau potable, les modalités de
tarification ne sont pas incitatives (
cf. infra
). L’efficacité des programmes
de maîtrise des consommations est
limitée par l’absence de ciblage sur les
gros consommateurs et un budget peu ambitieux (moins de 1 % du budget
total pour Vendée eau).
Néanmoins, en Vendée, une gestion patrimoniale ambitieuse, à
l’origine de la performance du réseau, limite les pertes d’eau : rendement
de 88
% supérieur à la moyenne nationale, objectif d’indice linéaire de
perte assigné aux délégataires faisant l’objet de pénalités en cas de
non-respect
31
, taux de renouvellement s’approchant de 1
%, dépenses
annuelles de 15
M€, bonne conn
aissance du réseau. La performance du
30
Eau potable utilisée
à l’intérieur de locaux.
31
1,1
M€ entre 2012 et 2020.
Mais
la carte de la production d’eau potable ne correspond
pas à celle des Sage et donc des bassins versants. Si cela peut se justifier par
l’interconnexion du réseau, une organisation se fondant sur le
s bassins versants
permettrait de davantage prendre en considération l’état de la ressource.
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COUR DES COMPTES
28
réseau revêt une importance croissante avec son interconnexion et
l’augmentation des consommations. Aujourd’hui, les « volumes perdus »
de 6,11 Mm
3
représentent un « manque à gagner » estimé à 2,63
M€ par
an.
De même en Loire-
Atlantique, Atlantic’eau a ajouté dans ses
conventions de délégation de service public, à l’indice suivi habituellement
(indice linéaire des volumes non comptés), un objectif de taux de
rendement ainsi que des obligations contractuelles connexes (programme
obligatoire de recherche de fuites ou de suivi des consommations illicites).
Surtout, il a renforcé sa politique de pénalités hydrauliques (suivi précis et
augmentation des pénalités). Il a également élaboré une analyse
technico-financière extrêmement fine de son réseau, actualisée très
régulièrement, qui lui permet de projeter des dépenses de renouvellement
à venir en hausse constante : 16,7
M€ en 2023
, 18,79
M€ en 2026
, 19,5
M€
entre 2027 et 2030, puis 20,3
M€ de 2031 à 2035.
S’agissant
des
prélèvements
pour
l’irrigation,
les
actions
d’économies et plus généralement la réduction du volume prélevable sur
l’ensemble de l’année n’
ont pas été privilégiées pour atteindre, sur le
secteur de la nappe du sous-bassin du Lay, le volume prélevable au
printe
mps et à l’été de 4,18
Mm
3
. En effet, celles-ci ont participé, à hauteur
de 20 % environ, à
l’objectif
du contrat territorial de gestion quantitative
(CTGQ). Elles ont représenté 4 % du budget consacré à celui-ci
32
. Au final,
la surface utile agricole (SAU)
irriguée n’a pas évolué
(11,8 % de la SAU
totale au niveau départemental et 37,5 % de la SAU irriguée au niveau
régional).
Enfin, sur le sous-bassin de la Sèvre Nantaise comme celui du Lay,
la chambre régionale d’agriculture des Pays de la Loire n’a pas été en
mesure de fournir de données sur la SAU irriguée, son évolution, encore
moins sur le volume d’eau prélevé par hectare irrigué, ni sur le
type
d’exploitations (conventionnelle, biologique, etc.) ou de cultures (grandes
cultures, cultures spécialisées, etc.) auxquelles ces volumes sont destinés.
32
La réserve de substitution, si elle s
e traduit par des économies d’eau en période
d’étiage, repose sur le principe d’une substitution des prélèvements d’étiage p
ar des
prélèvements hivernaux. Elle
n’entraîne donc pas d’économie sur l’année
.
Les actions d’économies d’eau ont été financées à hauteur de 61
% en moyenne par
l’AELB, le reste étant à la charge de la chambre d’agriculture. Le volume prélevable a
égalemen
t été réduit sans mesure d’accompagnement technique ou financier.
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17 juillet 2023
LA GESTION QUANTITAT
IVE DE L’EAU EN PÉRI
ODE DE CHANGEMENT
CLIMATIQUE
CAHIER TERRITORIAL DES PAYS DE LA LOIRE
29
Ainsi, le cas du sous-bassin de la Sèvre Nantaise illustre la difficile
coordination entre les logiques départementale et de bassin dans la gestion
de crise. Dans le sous-bassin du Lay, les mesures de restriction sont plus
précises pour l’irrigation que pour l’alimentation en eau potable.
Les actions d’économies d’eau ne sont pas prioritaires quels que
soient les usages et le sous-bassin considéré. Néanmoins une bonne gestion
patrimoniale du réseau à travers notamment un suivi des délégataires limite
les p
ertes d’eau. S’agissant des prélèvements d’eau pour l’irrigation, il
existe un fort besoin de collecte de données.
SOUS EMBARGO
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SOUS EMBARGO
17 juillet 2023
Chapitre IV
La sécurisation de la couverture
des besoins en eau et la préservation
des milieux aquatiques
I -
L’encouragemen
t à la modification
des modes de consommation
Les modalités de tarification de l’alimentation en eau potable ne sont
pas incitatives. Les particuliers et encore moins les gros consommateurs ne
sont encouragés à adapter leurs besoins à la ressource disponible.
En Vendée, le classement en ZRE de 57 % de la ressource utilisée
pour la distribution d’eau potable devrait entraîner le réexamen des
modalités de tarification.
Aujourd’hui, la tarification n’est pas progressive.
Au contraire, les entreprises et davantage encore les gros consommateurs
paient l’eau moins chère que les particuliers. Cela représente un « manque
à gagner » de 1,28
M€ par an. Si le même prix est appliqué du 1
er
juillet au
31 août dans le but de lisser les consommations, cet objectif n’est
pas atteint
et cette période estivale ne correspond qu’en partie à la période d’étiage
.
En Loire-
Atlantique, pour le syndicat Atlantic’eau, l
e seul tarif
progressif résulte du franchissement du seuil des 150 m
3
. Or, le volume
moyen d’eau facturé passe de
83,5 m
3
par abonnement domestique en 2017
à 86 m
3
en 2020 et 2021. Ainsi, la progressivité exclut tous les
consommateurs domestiques et les tarifs pour les plus gros consommateurs
sont ensuite dégressifs. En outre, pour les consommateurs domestiques, la
règlementation
33
impose une communication (sur la facture) prenant
33
Annexe V du CGCT prévue à l’art. D.
2224-1. Le décret n° 2007-675 du 2 mai 2007
précise les informations contenues dans le RPQS, notamment la tarification de l’eau et
la présentation d’un
e facture «
pour une consommation de référence d'un ménage
définie par l'Insee
».
SOUS EMBARGO
17 juillet 2023
COUR DES COMPTES
32
comme référence une consommation de 120 m
3
. Ce volume n’est pas
cohérent avec le volume moyen effectivement constaté par Atlantic’eau
pour ses abonnés. Cette norme de communication, qui présente certes
l’avantage de faciliter les comparaisons
nationale
s, n’est pas susceptible
d’attirer l’attention de l’usager sur une éventuelle différence entre sa
consommation et la consommation moyenne de son territoire.
II -
L’augmentation de la capacité tec
hnique
des infrastructures et du stockage
Deux types d’infrastructures essentielles permettent d’augmenter
les capacités de stockage dans les sous-bassins étudiés : les barrages
d’alimentation en eau potable et les retenues de substitution.
A -
La difficile a
rticulation des barrages d’alimentation
en eau potable avec les besoins des milieux naturels
En Vendée, les prélèvements d’eau brute pour l’eau potable sont
essentiellement réalisés au moyen de barrages construits entre 1939 et
1998. Les règlements d’eau
de ces barrages
n’ont pas été mis à jour et
contreviennent depuis plus de huit ans à la loi en ce qui concerne les débits
dits « réservés ». C
es derniers débits qui transitent à l’aval immédiat des
barrages sont inférieurs aux débits minimums biologiques garantissant en
permanence la vie, la circulation et la reproduction des espèces vivant dans
les eaux
34
. Il peut être relevé que, dans le même temps, quatre règlements
d’eau attribuent des volumes à l’irrigation qui prennent la forme de
prélèvements directs
dans les retenues ou de lâchers d’eau des barrages à
la demande des associations d’irrigants moyennant facturation.
34
Art. L. 214-18 d
u code de l’
environnement.
À l’issue de la
loi n° 2006-1772 du
30 décembre 2006
sur l’eau et les milieux aquatiques
(LEMA), le débit minimal ne doit
pas être inférieur au dixième du module du cours d'eau en aval immédiat ou au droit de
l'ouvrage correspondant au débit moyen interannuel [débit qui devrait s’écouler
naturellement dans le cours d’eau en l’absence d’impact de toutes les activités
humaines], évalué à partir des informations disponibles portant sur une période
minimale de cinq années, ou au débit à l'amont immédiat de l'ouvrage, si celui-ci est
inférieur. Des valeurs de débit minimal différentes selon les périodes de l'année peuvent
être fixées, sous réserve que la moyenne annuelle de ces valeurs ne soit pas inférieure
aux débits minimaux définis précédemment. En outre, le débit le plus bas doit rester
supérieur à la moitié des débits minimaux précités. Pour les ouvrages existants, les
obligations instituées par la loi devaient être respectées avant le 1
er
janvier 2014.
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CLIMATIQUE
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33
Sur le bassin de la Sèvre Nantaise, les barrages de Ribou-Verdon,
dans l’agglomération choletaise (Maine
-et-Loire) posent des problèmes
similaires. L
e soutien d’étiage est inefficace, au regard du DOE, et n’est en
réalité pas piloté. La gestion quotidienne ne porte en effet que sur la quantité
d’eau disponible pour l’alimentation en eau potable, au regard d’un objectif
ancien non objectivé et relativement excessif (approvisionnement de
l’ensemble de l’agglomération de Cholet pendant 10
mois sans aucune pluie,
sans tenir compte de la consommation effective bien inférieure).
B -
Des réserves de substitution sécurisant sans réduire
structurellement l’
irrigation sur le sous-bassin du Lay
Sur le secteur de la nappe du sous-bassin du Lay, la substitution des
prélèvements d’eau pour l’irrigation en période d’étiage par des
prélèvements hivernaux occupe une place centrale dans la politique de
gestion quantitative de la ressource. En effet, la construction, entre 2014 et
2019, de cinq réserves de substitution
, remplies l’hiver et utilisées au
printemps et à l’été,
a participé, à hauteur de 60
% environ, à l’atteinte du
volume prélevable dans la nappe pour l’irrigation au printemps et à l’été de
4,18 Mm
3
. Elle a représenté 96 % du budget consacré à cet objectif.
Ces réserves ont en effet représenté un coût de 13,8
M€,
subventionné à hauteur de 65 % par des fonds publics. Le paiement du
solde à charge par les irrigants de la zone ne les a pas incités à renoncer à
l’irrigation
,
mais à davantage valoriser ce qu’ils appellent des «
droits
d’eau
» en s’orientant vers des cultures à plus fort
e valeur ajoutée.
Graphique n° 4 :
répartition du financement des réserves
(prévisionnel) en
€ HT
Source : évaluation des actions pour le retour à une gestion quantitative équilibrée de la
ressource en eau sur le Marais poitevin, bassins Lay, réalisée par l’AELB, p.
101
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34
Les réserves de substitution ont été construites et sont exploitées par
le biais d’une délégation de s
ervice public, débutant le 1
er
avril 2014 pour
une durée de 15 ans, à la
compagnie d’aménagement des coteaux de
Gascogne (CACG). Celle-ci collecte les redevances, établit des contrats
avec les irrigants, garantit la fiabilité des relevés déclarés par ces derniers
et peut appliquer des sanctions financières en cas de non-respect des règles
de fonctionnement. Les consommations sont enregistrées dans une base de
données mutualisée.
Une application SMS permet d’informer les irrigants
des mesures de gestion et de leur volume prélevable.
Si les réserves de substitution apparaissent comme une solution pour
faire remonter les niveaux de la nappe et du Marais poitevin en période
d’étiage, elles posent
notamment la question des sécheresses hivernales. En
effet, un déf
icit de précipitation l’hiver
risque de compromettre le
remplissage des réserves
et l’atteinte
du niveau de nappe autorisant le
remplissage
35
. À cet égard, le préfet a dérogé
en 2017 à la règle qu’il a fixée
en autorisant le remplissage au-delà du 31 mars, considérant les pertes
économiques évaluées par la chambre d’agriculture, en faisant primer le
remplissage et donc l’irrigation, sur le niveau
à venir de la nappe au
printemps et donc la préservation des milieux. Si la DDTM de la Vendée
s’est prévalu, en r
éponse aux observations provisoires de la chambre, que
le préfet s’était fondé sur une disposition du
Sdage Loire-Bretagne
2016-2021, reprise dans celui de 2022-2027, elle ne justifie pas que la
condition d’une «
hydraulicité printanière nettement supérieure à la
normale
» exigé pour l’application de cette disposition était remplie.
III -
L’élargissement de la ressource utilisable
Le département de la Vendée est doté d’un plan de sécurisation de
l’alimentation en eau potable pour faire face à un déficit de la res
source par
rapport aux besoins, évalué à - 8,2 Mm
3
à l’horizon 2025 sur les secteurs
côtiers, de mai à octobre en année sèche et caniculaire. Outre
l’interconnexion des barrages et l’utilisation d’anciennes carrières comme
réserves d’eau, ce plan inclut de
ux solutions non conventionnelles en vue
d’élargir la ressource utilisable
: la réutilisation des eaux usées traitées
(RéUT) en vue de la production d’eau destinée à la consommation humaine
et la désalinisation de l’eau de mer, ce dernier projet étant susp
endu en
raison de sa consommation énergétique.
35
Il existe trois conditions au remplissage des réserves l’hiver,
fixées dans les arrêtés
préfectoraux d’autorisation. Tout d’abord, le niveau de la nappe doit atteindre une cote
piézométrique à deux points de référence. Les prélèvements doivent également respecter un
certain débit. Enfin, une période de remplissage est fixée du 1
er
novembre au 31 mars.
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Le projet de réutilisation des eaux usées traitées
à des fins de production d’eau potable en Vendée
Vendée eau porte le projet, baptisé « Jourdain
», d’une installation
de réutilisation des eaux usées traitée
s en vue de produire de l’eau destinée
à la consommation humaine. Le principe est d’intercepter, avant leur rejet
en mer, les eaux usées traitées en sortie de la station d’épuration des
Sables-
d’Olonne, puis de les réinjecter dans la retenue d’un barrage,
27 km
plus loin où se situe une usine de potabilisation, après passage dans une
unité d’affinage et une zone de transition végétalisée
via
une canalisation.
L’impact environnemental du projet est d’abord évalué au moyen d’un
démonstrateur. Le fonctionnemen
t à pleine échelle de l’installation en 2028
doit participer, à hauteur de 1 à 1,5 Mm
3
, à la compensation du déficit
identifié.
Le projet représente un coût d’investissement estimé à 22,5
M€ pour
le démonstrateur et sera subventionné par des fonds publics à hauteur de
60
% environ (agence de l’eau, région, département, FEDER). Le coût de
fonctionnement du démonstrateur, ne comprenant pas la potabilisation,
devrait se situer entre 0,76 et 1,30
€/m
3
, dont 16 à 19 % pour la
consommation énergétique. Le coût d
’investissement total incluant
l’extension s’élève à 42,5
M€.
En Loire-
Atlantique, le syndicat Atlantic’eau a décliné le
schéma
départemental 2007-2020 de
sécurisation de l’alimentation en eau potable
en huit schémas directeurs couvrant la plus grande partie de son propre
territoire d’intervention. Les travaux d’interconnexion ou de renforcement
des infrastructures prévus ont été réalisés ou sont en train de l’être. La
liaison principale de sécurisation est l’axe Sud Est
-Nord-Ouest reliant
Nantes (premier captage dans la Loire) et Férel (captage sur la Vilaine).
Les autres territoires, périphériques, sont plus à risque, notamment le
littoral (Pays de Retz), desservi par un second axe structurant à partir de
Basse-Goulaine (second captage sur la Loire). Afin de relier ces deux axes
structurants, l
a construction d’un
« feeder » de 17 km sous la Loire a
commencé (20
M€
). La recherche de nouveaux captages dans de petites
nappes locales est la seconde solution de sécurisation privilégiée, pour
augmenter la redondance en cas de problème sur la Loire (mise en
exploitation
du
forage
de
Massérac,
forage
expérimental
de
Sion-les-Mines).
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36
IV -
La préservation des milieux aquatiques
et les solutions fondées sur la nature
dans le Marais poitevin
Le Marais poitevin, en partie situé sur le sous-bassin du Lay, est la
deuxième plus grande zone humide de France après la Camargue.
L
’objectif de
sa préservation et de sa restauration est pris en compte dans
la totalité des documents de planification et à travers la politique de gestion
quantitative de la ressource en eau. Un contrat territorial milieux
aquatiques (CTMA) zones humides 2019-2023 lui est spécifiquement
consacré
. Il prévoit différents travaux d’entretien, en particulier sur le
réseau de canaux. Son coût est de 4,9 M
. Il est financé à hauteur de 50 %
par
l’AELB. Le SMBL l’anime et le coordonne, notamment
en
accompagnant les 12
autres maîtres d’ouvrage. La mise en œuvre du
CTMA du bassin du Lay est facilitée par l’exercice de la compétence
Gemapi par le SMBL sur la quasi-totalité du périmètre du SAGE, lequel
coïncide avec le périmètre du contrat. Mais le passage de la phase d’étude
à celle des travaux est parfois difficile. Les démarches administratives
peuvent s’avérer lourdes pour les
maîtres d’ouvrage.
Enfin l’EPMP fait r
éaliser depuis 2014 une étude sur le suivi de la
biodiversité en lien avec l’évolution des niveaux d’eau par l’université de
Rennes I et le CNRS, afin notamment de remédier au « caractère lacunaire des
données » en la matière
36
. Mais il utilise encore timidement ses outils fonciers
de sauvegarde des zones humides, se référant à la décision d’affectation qui
relève des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (S
afer),
laquelle privilégie l’installation de jeunes agriculteurs.
Ainsi, dans les deux sous-
bassins examinés, l’interconnexion des
réseaux constitue une solution de sécurisation privilégiée. La gestion des
barrages d’alimentation en eau potable s’articule difficilement avec les besoins
des milieux naturels. Les réserves de substitution, qui occupent une place
centrale dans la politique de gestion quantitative de la ressource sur le secteur
de la nappe du sous-bassin du Lay, sécurisent sans réduire structurellement
l’irrigation
. Elles posent notamment la question des sécheresses hivernales.
Les solutions fondées sur la nature se limitent au Marais poitevin.
36
Rapport du CGEDD,
Le Marais Poitevin : état des lieux actualisé des actions menées
à la suite du plan gouvernemental 2003-2013 et orientation
, juin 2016.
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Liste des abréviations
AELB
...........
Arrêté cadre interdépartemental de sécheresse
AELB
...........
A
gence de l’eau
Loire-Bretagne
AUP
..............
Autorisation unique pluriannuelle
BNPE
...........
Banque nationale des prélèvements quantitatifs en eau
BRGM
..........
Bureau de recherches géologiques et minières
CACG
..........
C
ompagnie d’aménagement des coteaux de Gascogne
CLE
..............
C
ommission locale de l’eau
CTGQ
...........
Contrat territorial de gestion quantitative
CTMA
..........
Contrat territorial milieux aquatiques
DDT
.............
Direction départementale des territoires
DDTM
..........
Direction départementale des territoires et de la mer
DOE
.............
D
ébit objectif d’étiage
EPMP
............
Établissement public du Marais poitevin
EPTB
............
Établissement public territorial de bassin
GEMAPI
......
Gestion des eaux et des milieux aquatiques et de la prévention
des inondations (compétence)
HMUC
...........
Hydrologie milieux usages climat (étude)
MISEN
.........
Mission interservices
de l’eau et de la nature
OUGC
..........
Organisme unique de gestion collective
PAGD
...........
P
lan d’
aménagement et de gestion durable
PAOT
...........
P
lan d’action opérationnel territorialisé
RéUT
............
Réutilisation des eaux usées traitées
SAFER
.........
S
ociété d’aménagement foncier et d’établissement rural
SAGE
...........
Schéma
d’aménagement et de gestion des eaux
SAU
..............
Surface agricole utile
SDAGE
........
S
chéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux
SIEMP
..........
S
ystème d’information sur l’eau du Marais poitevin
SMBL
...........
Syndicat mixte du bassin du Lay
ZRE
..............
Zone de répartition des eaux