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FINANCES ET COMPTES PUBLICS
ANALYSE DE L’EXÉCUTI
ON
BUDGÉTAIRE 2022
Compte de concours financier avancés
à
l’audiovisuel public
Avril 2023
Sommaire
SYNTHÈSE
..................................................................................................................................
5
RECOMMANDATION UNIQUE
.............................................................................................
7
INTRODUCTION
.......................................................................................................................
9
CHAPITRE I ANALYSE
DE L’EXÉCUTI
ON BUDGÉTAIRE
.........................................
11
I - LA PROGRAMMATION INITIALE ET LES LFR
.......................................................................
11
II - LA GESTION DES CRÉDITS ET SA RÉGULARITÉ
.................................................................
15
III -
L’
A
NALYSE DE L’ÉVOLUTIO
N DE LA DÉPENSE ET DE SES COMPOSANTES PAR
RAPPORT À
L’ANNÉE PRÉCÉDENTE
.............................................................................................
16
IV - LES PERSPECTIVES ASSOCIÉES À LA TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE
..........................
18
V -
L’INCIDENCE DES DÉPENSES SUR L’ENVIR
ONNEMENT
..................................................
19
CHAPITRE II
POINTS D’ATTENTION
PAR PROGRAMME
........................................
21
CHAPITRE III MOYENS CONSACRÉS
PAR L’ÉTAT À LA POLI
TIQUE DE
L’AUDIOVISUEL PUBLIC
.....................................................................................................
23
I - LES DÉPENSES FISCALES
.............................................................................................................
23
II -
L’ÉVOLUTION DE LA D
ÉPENSE TOTALE (BUDGÉTAIRE,
FISCALE, EXTRA-
BUDGÉTAIRE) SUR MOYENNE PÉRIODE
......................................................................................
25
Synthèse
L’exercice 2022 représentait la dernière année de la trajec
toire pluriannuelle de
diminution des dotations de l’État aux entreprises de l’audiovisuel public, qui prévoyait 190
M€
d’économies entre 2018 et 2022.
La transformation de l’audiovisuel s’est poursuivie, avec le vote de la loi n°2022
-1157
du 16 août 2022
de finances rectificative pour 2022, actant d’une part la disparition dès le 1
er
janvier 2022
de la contribution à l’audiovisuel public, adossée à la taxe d’habitation, elle
-même
supprimée en 2023, d’autre part le maintien des recettes du compte de conco
urs financiers
«
Avances à l’audiovisuel public
» grâce à l’affectation d’une fraction du produit de la taxe sur
la valeur ajoutée (TVA), qui induit des effets fiscaux importants (notamment l’assujettissement
à la taxe sur les salaires).
Dès 2022, cette su
ppression s’est accompagnée de mécanismes de compensations des
effets induits par la réforme, afin de préserver les moyens permettant aux six entités concernées
(France Télévisions, Radio France, Arte, France Media Monde, Institut national de
l’audiovisuel
, TV5 Monde)
de faire face à leurs engagements et à leurs besoins. Les contrats
d’objectifs et de moyens signés en 2021 ont été reconduits pour couvrir une période transitoire
pendant laquelle doit s’ouvrir une réflexion stratégique sur les conditions de f
inancement
pérennes à moyen et long terme de l’audiovisuel public.
La réforme de l’audiovisuel public est donc restée à ce jour au milieu du gué, l’article 6
de la loi n°2022-1157 ne prévoyant aucune modalité de financement au-delà du 31 décembre
2024. L’
année 2023 doit, de ce fait, constituer un tournant dans la réflexion stratégique portant
sur le financement à long terme de ce secteur, ce point étant au centre des négociations qui
seront menées sur les nouveaux contrats d’objectifs et de moyens.
La Cou
r recommande que soit évaluée l’incidence environnementale des dépenses
relatives à l’audiovisuel public dans la perspective de la préparation du budget 2024.
Recommandation unique
Évaluer l’impact environnemental des dépenses de l’audiovisuel public dans le budget vert dès
le PLF 2024
(ministère chargé des comptes publics)
.
Introduction
La mission
Avances à l’audiovisuel public
est un compte de concours financiers qui
permettait ju
squ’en 2022 de retracer les conditions d’affectation du produit de la contribution à
l’audiovisuel public (CAP), imposition de toute nature au sens de l’article 3 de la LOLF
1
, aux
sociétés et à l'établissement public visés par les articles 44, 45 et 49 de la loi n° 86-1067 du 30
septembre 1986 modifiée, relative à la liberté de communication. Cette recette était complétée
par le remboursement par le budget de l’État des dégrèvements à la contribution à l’audiovisuel
public.
Depuis sa création, au 1
er
janvier 2006, le compte retraçait, en dépenses, le montant des
avances à chacun de ces organismes et, en recettes, les remboursements d’avances. Ces derniers
ne constituaient pas à proprement parler des remboursements réels par les organismes
audiovisuels publics, mais un jeu d’écritures conduisant à alimenter le compte par deux flux
:
le produit de la contribution à l’audiovisuel public et la valeur du montant des dégrèvements.
De fa
it, les crédits affectés à l’audiovisuel public sont intégralement inscrits en dépenses
d’opérations financières (titre
7 dans la nomenclature de la LOLF) et la mission ne compte
aucun emploi, ni dépense de personnel
: ils peuvent s’analyser comme des dota
tions.
A compter de 2022, et jusqu’au 31 décembre 2024, la CAP est supprimée et les recettes
du compte sont assurées par une fraction de la TVA (ainsi que, pour la seule année 2022, à
hauteur de 100 M€, des recettes sur la CAP des professionnels qui avaien
t été versée par avance
et sont remboursées par ailleurs).
La mission comprend six programmes. Avec 64 % des crédits de la mission en 2022
2
, le
programme
France Télévisions
est largement prépondérant, suivi par
Radio France
(16,7 %),
Arte (7,6 %) et
France Media Monde
(7 %) tandis que les programmes
Institut national de
l’audiovisuel
et
TV5 Monde
ne représentent respectivement que 2,4 % et 2 % des crédits de la
mission.
La Cour a régulièrement souligné ses préoccupations sur la pérennité du mode de
fi
nancement des sociétés de l’audiovisuel public dans un contexte de disparition programmée
de la taxe d’habitation à laquelle elle était adossée. Les travaux de consolidation du mode de
financement après le 31 décembre 2024 doivent être menés au cours de l’
année 2023.
Aucune recommandation formelle n’avait été formulée au titre de l’exécution budgétaire
2021.
1
En comptabilité nationale, cette contribution est considérée comme une recette publique hors prélèvements
obligatoires.
2
Calculés sur la dotation post LFR.
COUR DES COMPTES
10
Mission compte d’avances a l’audiovisuel public
Programme 841
France Télévisions
Programme 842
Arte France
Programme 843
Radio France
Programme 844
France Médias Monde
Programme 845
Institut national de l’audiovisuel (INA)
Programme 846
TV5 Monde
Graphique n° 1 :
m
ission Comptes d’avances à l’audiovisuel public
-
exécution 2022 (CP, en M€)
Source : Cour des comptes, fichier AEBE
2386,17
284,13
583,74
264,17
89,66
77,10
3685,00
0,00
500,00
1000,00
1500,00
2000,00
2500,00
3000,00
3500,00
4000,00
1
2
3
4
5
6
7
millions
programmes
Chapitre I
Analyse de l’exécuti
on budgétaire
La mission regroupe six programmes correspondant aux cinq sociétés de l’audiovisuel
public (France Télévisions, Arte France, Radio France, France Médias Monde, TV5 monde) et
à l’Institut national de l’audiovisuel (INA).
Dans le cadre du
projet de transformation de l’audiovisuel public engagé en 2018, une
diminution globale des dotations publiques de la mission était prévue sur la période 2018-2022,
à hauteur de 190
M€ par rapport à la somme prévue aux contrats d’objectifs et de moyens
con
clus entre 2015 et 2017. Ce plan avait pour objectifs d’adapter le secteur à son
environnement, notamment technologique, et de contribuer au redressement des finances
publiques par une exigence d’efficacité accrue. La baisse des dotations s’est poursuivie
sur la
période conformément à la trajectoire d’économies.
L’année 2022 représentait la dernière année du plan de transformation de l’audiovisuel
public engagé par le précédent gouvernement en 2018. Toutefois, dans le cadre du plan de
relance et de la cris
e sanitaire, les six entreprises de l’audiovisuel public ont bénéficié dès 2021
d’un soutien financier exceptionnel de 73 M€, réparti entre les exercices 2021 et 2022, visant à
soutenir la création, compenser le recul des ressources publicitaires et affronter la gestion de
crise. En 2022, France Télévisions et Radio France ont perçu respectivement 22,5 M€ (reportés
de 2021) et 5 M€ de crédits budgétaires au titre du plan de relance.
L’année 2022 est surtout marquée par la suppression de la contribution à l’audiovisuel
public, dite « redevance », puisque la loi n°2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative
pour 2022 (LFR1) la supprime au 1er janvier 2022 et prévoit les conditions dans lesquels les
recettes du compte de concours financiers « Avances à
l’audiovisuel public
» sont maintenues,
grâce à l’affectation d’une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
I -
La programmation initiale et les LFR
La loi de finances initiale pour 2022 a attribué au secteur une dotation globale de 3 625,2
M€
HT, en baisse de 17,3 M€ par r
apport à la LFI pour 2021 (- 0,5 %), hors crédits relance.
La loi de finances pour 2022 a alloué, hors crédits relance :
-
à France Télévisions, une dotation de 2 357,3 M€ HT, en baisse de 14 M€ par rapport à
2021 (-0,6 %) ;
COUR DES COMPTES
12
-
à Radio France, une dotation de 576,7 M€ HT, inférieure de 2,6 M€ à celle de 2021
(-0,45 %) ;
-
à ARTE France, une dotation de 272,9 M€ HT, en baisse de 0,4 M€ par rapport à 2021 ;
-
à France Médias Monde, une dotation de 254,2 M€ HT, en baisse de 0,4 M€ par
rapport à
2021 ;
-
à l’Institut national de l’audiovisuel (INA), une dotation de 87,9 M€ HT, stable par rapport
à 2021.
-
à TV5 Monde une dotation stable par rapport à 2021 (76,2 M€).
Tableau n° 1 :
évolution des
dotations initiales, en M€ TTC
2018
2019
2020
2021
2022
LFI 2023
Evolution
2018-22
France télévisions
2 567,9
2 543,1
2 481,9
2 421,0
2 406,803
2 430,514
- 161,1
Arte France
285,4
283,3
281,1
279
278,646
303,464
- 6,8
Radio France
608,8
604,7
599,6
591,4
588,792
623,406
- 20,0
FMM
263,2
261,5
260,5
260
259,563
284,734
- 3,6
INA
90,4
89,2
88,2
89,7
89,738
93,629
- 0,7
TV5 Monde
79
77,7
77,7
77,7
77,774
79,966
- 1,2
Total
3 894,7
3 859,6
3 789,0
3 719,0
3 701,3
3 815,7
- 193,4
Source
: Cour des comptes d’après données budgétaires
Hors crédits de relance, l’évolution des dotations initiale est donc bien
conforme à la
trajectoire définie dans le projet de transformation de l’audiovisuel public. Corrigée des effets des
plan de relance, c’est une diminution de 165,9 M€ qui peut être constatée sur la période.
En 2022, 22,5 M€ ont été alloués à France Télévisions et 5 M€ à Radio France au titre du
plan de relance. La variation nette entre 2021 et 2022 demeure toutefois négative pour toutes les
entités.
ANALYSE DE L’EXÉCUTI
ON BUDGÉTAIRE
13
Tableau n° 2 :
e
ffets du plan de relance, en M€ TTC
Dotation
2021
Dotation
2022
Plan de
relance
2021
Plan de
relance
2022
Total
crédits
2021
Total
crédits
2022
Variation
nette entre
2021 et
2022
France Télévisions
2421,1
2406,8
22,5
22,5
2 443,6
2 429,3
-14,3
Radio France
591,4
588,8
15,0
5,0
606,4
593,8
-12,6
Arte France
279,0
278,7
5,0
0,0
284,0
278,7
-5,4
FMM
260,0
259,6
0,5
0,0
260,5
259,6
-0,9
INA
89,7
89,7
2,0
0,0
91,7
89,7
-2,0
TV5 Monde
77,7
77,8
0,5
0,0
78,3
77,8
-0,5
Total
3719,0
3701,3
45,5
27,5
3 764,5
3 728,8
-35,7
Source : Cour des
comptes d’après données budgétaires
COUR DES COMPTES
14
La réforme du financement de l’audiovisuel public
La redevance audiovisuelle, créée en 1933 (assise sur les postes de radio) et étendue en 1949,
faisait l’objet de critiques récurrentes, liées par exemple au caractère obsolète d’une taxe sur la
possession d’un téléviseur, alors même que les pratiques numériques ont largement fait évoluer les
usages. Elle n’était pas progressive, dans la mesure où chaque foyer f
iscal devait la payer
indépendamment de son revenu
3
. Enfin, adossée à la taxe d’habitation sur les résidences principales
qui disparaît définitivement en 2023, elle avait nécessairement vocation à évoluer.
Sa suppression, annoncée le 7 mars 2022 et confirmée en conseil des ministres le 11 mai 2022,
est actée par la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 qui supprime la
contribution définie, à titre principal, aux articles 1605 à 1605 ter du Code général des impôts. Elle
remplace le produit de cette imposition par l’affectation au secteur public de l’audiovisuel d’une
fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
Le paragraphe VI de l’article 46 de la loi n° 2005
-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour
2006 qui ouvre dans les écritures du Trésor un compte de concours financiers, intitulé « Avances à
l’audiovisuel public », est ainsi modifié par les dispositions de l’article 6 de la loi de finances
rectificative pour 2
022, qui abrogent l’article 1605 du Code général des impôts. Elles prévoient, pour
les années 2023 et 2024, que les recettes du compte de concours financiers « proviennent (…) d’une
fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée déterminée chaque année par la loi de finances de
l’année » et, pour l’année 2022, que « les recettes du compte de concours financiers (…) sont
constituées, d’une part, des remboursements d’avances correspondant au produit de la contribution à
l’audiovisuel public à hauteur de
100 000 000 € et, d’autre part, d’une fraction du produit de la taxe
sur la valeur ajoutée à hauteur de 3 585 003 724,00 € ». En effet, alors qu’il avait initialement été
envisagé de remplacer la CAP par une dotation budgétaire, un rapport sur « la réforme du financement
de l’audiovisuel public
» remis au Premier ministre par l’Inspection générale des finances (IGF) et
l’Inspection générale des affaires culturelles (IGAC), rendu public le 13 juillet 2022, mettait en
exergue le risque de volatilité voire d’
attrition des financements.
3
Ainsi, l’exposé de
s motifs du projet de loi de finances rectificative pour 2022 mentionnait-il que la contribution
« tenait insuffisamment compte des capacités contributives des redevables et ne reflétait plus la réalité des usages
du service public de l’audiovisuel
».
ANALYSE DE L’EXÉCUTI
ON BUDGÉTAIRE
15
Le Conseil constitutionnel, saisi par deux recours émanant respectivement de plus de 60
députés et de plus de 60 sénateurs contre la loi de finances rectificative pour 2022, a rendu une
décision le 12 août 2022. S’il rappelait
que la libre communication des pensées et des opinions,
garantie par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789 « ne serait pas
effective si le public auquel s’adressent les moyens de communication audiovisuels n’était pas
à
même de disposer, aussi bien dans le cadre du secteur privé que dans celui du secteur public, de
programmes qui garantissent l’expression de tendances de caractère différent dans le respect de
l’impératif d’honnêteté de l’information », il estimait que l
es garanties de financement données étaient
suffisantes sous deux réserves d’interprétation. Il incombera au législateur, dans les lois de finances
pour les années 2023 et 2024 d’une part, et pour la période postérieure au 31 décembre 2024, de
déterminer le montant des recettes du compte de concours financiers « afin que les sociétés et
l’établissement de l’audiovisuel public soient à même d’exercer les missions de service public qui
leur sont confiées », le Conseil constitutionnel soulignant qu’il resterai
t « le juge du respect de ces
exigences ». Par ailleurs, le Conseil estimait que le principe du financement par une redevance
spécifique ne constituait pas un principe fondamental reconnu par les lois de la République et qu’il
appartenait bien au législate
ur de modifier, s’il le jugeait nécessaire le principe fixé par l’article 109
de la loi du 31 mai 1933 qui avait pour la première fois institué cette «
redevance pour droit d’usage
»
sur les installations réceptrices de radiodiffusion.
II -
La gestion des crédits et sa régularité
Les crédits versés aux entreprises publiques ont été directement affectés par la loi n°2022-
1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022. La LFR1 ayant supprimé la CAP au
1
er
janvier 2022, les contribuables initialement assujettis n’ont pas été r
edevables et ceux qui
avaient commencé à l’acquitter avant sa suppression ont été remboursés.
Compte tenu de ses modalités de recouvrement, la suppression totale et définitive de la
taxe d’habitation (TH) sur les résidences principales à compter des impos
itions établies au titre
de 2023 rendait en tous les cas nécessaire une évolution de la CAP des particuliers, jusque-là
due par toute personne physique imposable à la TH au titre d’une résidence, dès lors qu’elle
détenait au 1
er
janvier de l’année d’imposition, pour l’usage privatif de son foyer, un téléviseur
ou un dispositif assimilé. La CAP des particuliers était ainsi émise et recouvrée sur le même
avis d’imposition que la TH.
En raison de la différence d’adossement de la CAP des particuliers (à la taxe
d’habitation)
et des professionnels (à la TVA), ce remboursement s’est effectué par des canaux comptables
différents.
Concernant la CAP des particuliers mensualisés perçue depuis le début de l’année 2022,
les montants recouvrés ont été imputés sur le montant de TH mis en recouvrement ou, le cas
échéant, remboursés aux contribuables concernés sans avoir été au préalable affectés aux
recettes du compte de concours financiers, à l’instar des trop
-
perçus de taxe d’habitation, via
solde du compte d’acompte des
personnes en cause.
COUR DES COMPTES
16
Tableau n° 3 :
évolution des foyers assujettis à la CAP
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Nombre de foyers assujettis
27,25
27,43
27,59
27,68
27,77
27,6
27,61
0
dont foyers payants
23,59
23,08
23,16
23,15
23,19
23,00
22,98
0
dont foyers exonérés
3,66
4,35
4,43
4,53
4,58
4,6
4,62
0
Source : Fichiers de taxation relatifs au rôle général de TH (le nombre de foyers assujettis renvoie
aux foyers détenteurs d’un
poste de télévision au titre de l’année n’ayant pas coché la case de «
non-détention » dans la déclaration IR. Quant à ceux
exonérés, il
s’agit des foyers détenteurs d’un poste de télévision et ayant un code exonération renseigné dans le fichier TH
(exemple
: bénéficiaire d’une allocation adulte handicapé, exonération vieux parents…).
Concernant la CAP des professionnels : les montants recouvrés ont été affectés aux
recettes du compte de concours financiers à hauteur de 100
M€ comme prévu par la LFR1, le
surplus (13
M€) étant affecté à la ligne 1499 «
recettes diverses » des recettes du budget général.
Ces montants ont été remboursés aux contribuables concernés via le programme 200
« Remboursements et dégrèvements
d’impôt d’E
tat ».
La loi n°2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 (LFR1) a supprimé
la CAP au 1
er
janvier 2022 et prévu que les recettes du compte de concours financiers « Avances
à l’audiovisuel public
» se composeraient de 100
M€ de CAP des
professionnels et 3,585
Md€ de
fraction de TVA.
Les montants prévus en recettes (3,685
Md€) visaient à
tenir compte du fait que la CAP
recouvrée due par les professionnels serait affectée aux recettes du compte de concours financiers
et remboursée par ailleurs, contrairement à la CAP des particuliers. Au regard des exercices
précédents, une prévision de 100
M€ a ainsi été inscrite en LFR1, au titre de la CAP des
professionnels. D’autre part, il s’agissait d’équilibrer le compte de concours financiers, don
t les
dépenses ont été prévues à hauteur de 3,685
Md€ en LFR1 contre 3,701
Md€ en LFI pour 2022,
afin de neutraliser les effets fiscaux liés à la suppression de la CAP.
En effet, la CAP étant jusque-là assujettie à la TVA, sa suppression impliquait deux effets
fiscaux pour les entités de l’audiovisuel public dès 2022
:
-
pour les six entités, à compter d’août 2022, la fin du reversement de 2,1% de TVA à l’
État
sur la dotation qui leur est versée chaque mois, impliquant une réduction de la dotation
annuelle pour éviter un trop perçu par les entités ;
-
pour certaines d’entre elles, la prévision d’une perte du droit à déduction intégrale de TVA
sur leurs factures fournisseurs, que l’
État a compensé.
III -
L’
a
nalyse de l’évolution de la dépense
et de ses composantes par rapport à
l’année précédente
Aucune modification n’a été apportée aux indicateurs de perf
ormance de la mission depuis
le PLF 2022. Les comptes certifiés par les commissaires aux comptes des organismes de
ANALYSE DE L’EXÉCUTI
ON BUDGÉTAIRE
17
l’audiovisuel public, éclairés par les explications qui sont fournies tout au long de l’année dans le
cadre du dialogue de gestion, notamment
lors de la préparation des conseils d’administration,
fournissent aux administrations des informations d’une qualité satisfaisante. Le Contrôle général
économique et financier (CGEFI) transmet aussi aux instances de gouvernance des sociétés
nationales de
programme (France Télévisions, Radio France, France Médias Monde) et d’ARTE
France des audits salariaux retraçant notamment l’évolution des effectifs et des rémunérations par
catégorie de salariés.
L’élaboration de chaque projet annuel de performance (PAP
) et rapport annuel de
performance (RAP) donne lieu à une saisine des organismes et à un important travail de
fiabilisation, de contrôle et d’analyse des données. Le PAP de l’année n+1 élaboré à l’été de
l’année n est également l’occasion de présenter une prévision d’exécution ajustée pour l’année n.
Dans le PAP de la mission, la justification au premier euro (« JPE ») est en principe mise en œuvre
au moyen d’un compte de résultat prévisionnel détaillé qui correspond à celui établi dans le plan
d’affaires du COM de l’organisme, corrigé d’éventuels ajustements et de la description des enjeux
et des objectifs de l’année à venir
4
. Le RAP présente le réalisé de l’année considérée, en termes
d’activité et de comptes (compte de résultat et bilan), théoriqu
ement en cohérence avec le rapport
de gestion et les comptes approuvés par le conseil d’administration. Toutefois, la date de remise
du RAP contraint à le produire en amont du conseil d’administration qui examine le rapport de
gestion et les comptes.
Le montant des dépenses nécessaires pour l’accomplissement des missions de service public
et pour la réalisation des principaux objectifs stratégiques de chacun des organismes de
l’audiovisuel public –
définis dans les COM
est donc évalué en tenant compte des plans d’affaires
des COM et d’éventuels ajustements liés à l’activité des entreprises (no
tamment en 2020-2022,
l’impact de la pandémie de Covid
-19). En 2020-2022, la trajectoire de ressources publiques des
plans d’affaires des COM a été ajustée à la lumière des comptes de résultat prévisionnels, des
budgets adoptés en conseil d’administration ou de surveillance en début d’année, du niveau de
ressources propres, des plans de financement des principaux projets d’investissement et des
hypothèses d’évolution de la masse salariale et des effectifs. Chaque année, le niveau des dépenses
nécessaires est déterminé sur la base de projections budgétaires produites par les entreprises, qui
ne sont pas des opérateurs au sens de la LOLF, mais des sociétés anonymes (sauf l’INA, qui est
un EPIC), dont les dirigeants bénéficient par nature d’une large autonomie
de gestion.
En raison de la suppression de la CAP en LFR1 pour 2022 et de la restitution des montants
mensualisés versés avant la suppression de cet impôt, aucun prélèvement pour frais d'assiette et de
recouvrement (FAR
), anciennement adossés à la TH et d’un montant forfaitaire de 1€ par avis, ne
subsiste au titre de 2022.
L’intégralité des dépenses de la mission est inscrite en titre 7 (dépenses d’opérations
financières). L’exécution des dépenses du compte est conforme aux prévisions post LFR1
.
44
Compte tenu de la négociation des avenants aux COM 2020-
2023 qui a eu lieu à l’automne 2022, les PAP 2023
ne comportent pas de compte de résultat prévisionnel.
COUR DES COMPTES
18
Tableau n° 4 :
e
xécution des dépenses par programme (M€)
, TTC
En M€ (TTC)
CP
841
842
843
844
845
847
France
Télévisions
Arte
Radio
France
FMM
INA
TV5
Monde
Total
LFI 2022
2 406,8
278,6
588,8
259,6
89,7
77,8
3 701,3
Total des crédits
ouverts post LFR1
2 386,2
284,1
583,7
264,2
89,7
77,1
3 725,0
Crédits disponibles
2 386,2
284,1
583,7
264,2
89,7
77,1
3 725,0
Crédits consommés
2 386,2
284,1
583,7
264,2
89,7
77,1
3 725,0
Source : DGMIC
IV -
Les perspectives associées à la trajectoire budgétaire
Conformément au texte de la LFR1 pour 2022, les recettes du compte de concours financiers
seront donc uniquement composées d’une fraction de TVA en 2023 et 2024. La loi de finances
initiale pour 2023 attribue au secteur une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA)
de 3 815,7 M€ en hausse de 114,4M€ par rapport à la loi de finances initiale pour 2022 (3701,3
M€ HT) et de 90,7 M€ par rapport aux crédits ouverts post LFR1.
Ce niveau de dotation
est censé intégrer les dépenses déjà engagées, ainsi que la
compensation des surcoûts liés à l’inflation, au glissement de la masse salariale et aux effets
fiscaux induits par la suppression de la contribution à l’audiovisuel public, soit d’une part la
perte d
u droit à déduction intégrale de TVA sur les factures fournisseurs, d’autre part le nouvel
assujettissement à la taxe sur les salaires (estimé à 42,6
M€ en 2023), autre effet fiscal qui
n’interviendra qu’à partir de 2023.
En effet, en raison de la suppression de la CAP par la LFR et son remplacement dans le
cadre du financement de l’audiovisuel public par une fraction de TVA non assujettie à la TVA,
le chiffre d’affaires des six entités du secteur ne sera plus assujetti à la TVA à 90
% ou plus
5
.
Par
conséquent, les entités de l’audiovisuel public seront assujetties à la taxe sur les salaires.
D’après les évaluations réalisées par les entités et leur tutelle, cette taxe sera d’un montant
global d’environ 100
M€ en année pleine à compter de 2024. Dans
la mesure où cet
assujettissement est fondé sur la composition du chiffre d’affaires de l’année N
-1, les entités de
l’audiovisuel public devront acquitter cette taxe à compter de 2023, la CAP ayant été supprimée
en 2022. En outre, le montant de la taxe sur les salaires en 2023 sera pondéré dès lors que les
entités de l’audiovisuel public ont reversé de la TVA sur la dotation publique perçue de janvier
à juillet 2022.
5
La taxe sur les salaires concerne les employeurs domiciliés ou établis en France qui ne sont pas assujettis à la
TVA sur l’année de versement des rémunérations, ou qui le sont sur moins de 90% de leur chiffre d’affaires sur
l’année précédant celle du verse
ment des rémunérations.
ANALYSE DE L’EXÉCUTI
ON BUDGÉTAIRE
19
Le Gouvernement s’est engagé à compenser cette charge nouvelle lors de la fixation de
la trajectoire financière du secteur. Les montants prévus en 2023 communiqués au Parlement
dans le cadre du PLF 2023 sont de 22,4 M€ pour France TV, 0,8M€ pour Arte France, 12 M€
pour Radio France, 5,3M€ pour France Médias Monde, 1,5M€ pour l’INA et 0,6 M€ pour
TV5
Monde, soit un total de 42,6 M€.
La loi de finances pour 2023 (compte de concours financiers) alloue :
-
à France Télévisions, une dotation de 2
430,5 M€, en hausse de 73,2 M€ par rapport à 2022
(+ 3 %) ;
-
à Radio France, une dotation de 623,4 M€, en hausse de 46,7 M€ à celle de 2022
(+ 8 %) ;
-
à ARTE France, une dotation de 303,5 M€ en hausse de 30,5 M€ par rapport à 2022 (+
11
%);
-
à France Médias Monde, une dotation de 284,7 M€, en hausse de 30,5 M€ par rapport à
2022 (+ 12 %);
-
à l’Institut national de
l’audiovisuel (INA), une dotation 93,6 M€, en hausse de 5,7 M€ par
rapport à 2022 (+ 6%).
-
à TV5 Monde une dotation de 80 M€, en hausse de 3,8 M€ par rapport à 2022 (+
5%).
Il n’y a plus de crédits de relance prévus pour l’année 2023.
V -
L’incidence des dépenses sur l’environnement
La seule mention faite du compte de concours financiers «
Avances à l’audiovisuel public
sur l’environnement
», au sein du rapport sur l’impact environnemental du budget de l’Etat,
consiste à rattacher le CCF à un ensemble de 15 m
issions qui ne font pas l’objet d’une fiche
dédiée «
dans la mesure où l’impact environnemental des dépenses qui y sont rattachées est
totalement neutre
», c’est
-à-
dire considéré sans impact sur l’environnement. On note toutefois
que la méthodologie présentée pour évaluer cette « neutralité » des dépenses concernées
n’explicite aucun des aspects ayant conduit à considérer ce compte de concours comme
entièrement neutre.
Or, ainsi que le souligne au demeurant l’avis de l’Assemblée nationale sur le PLF 2023
qu
i y consacre une partie, la responsabilité des entités de l’audiovisuel public est double à cet
égard, d’une part en tant qu’elles engagent leur responsabilité sociétale (pour des activités par
nature fortement énergivores), d’autre part à l’égard de leur
public à travers les choix de
programmation et le traitement de l’information. Toutes les entités sont d’ailleurs engagées
dans des projets de transformation écologique à travers leurs documents stratégiques et en
particulier l’axe 5 des COM 2020
-2022 (« être une entreprise de médias exemplaire »),
COUR DES COMPTES
20
comprenant un indicateur de «
l’évolution de l’empreinte carbone des émissions directes et
indirectes associées à la consommation d’énergie exprimée en tonne équivalent CO
2
»
6
.
Les prochains COM 2024-2028 pourraient comporter un objectif de protection de
l’environnement et de lutte contre le réchauffement climatique. La Cour s’interroge sur
l’absence d’évaluation de l’impact environnemental de ces dépenses dans le budget vert et
souhaiterait connaître les
éléments de méthodologie qui ont conduit à décider d’une
« neutralité
» de l’ensemble de la dépense concernée, dans la mesure où l’affectation de la
contribution à l’audiovisuel public, jusqu’à présent, comme celle de la fraction de TVA,
aujourd’hui, à de
s dépenses précisément identifiées permet bien de les analyser comme des
dotations ayant un impact concret en gestion (sobriété du parc immobilier et informatique etc.).
Le ministère de la culture, tout en confirmant la mobilisation des entreprises de
l’au
diovisuel public sur ces enjeux, souligne que «
le ministère de l’action et des comptes
publics » (donc, le ministre délégué chargé des comptes publics auprès du ministre de
l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique) est en c
harge de
l’élaboration du budget vert.
La direction du budget manifeste son désaccord sur cette recommandation sans apporter
aucun élément méthodologique précis nouveau de calcul, et présentant seulement un
argument d’autorité selon lequel il serait «
considéré que la majorité des dépenses consacrées
à l’audiovisuel n’ont pas d’impact significatif sur l’environnement
». Cette affirmation, non
étayée sur des données, mériterait au moins d’être explicitée en note dans le projet budget
vert. Dès lors, la Cour maintient sa recommandation.
_______________________ RECOMMANDATION UNIQUE _______________________
La Cour recommande
d’évaluer l’impact environnemental des dépenses de l’audiovisuel
public dans le budget vert dès le PLF 2024 (ministère chargé des comptes publics).
6
Ainsi le bilan carbone d’Arte France, réalisé par la chaîne en 2019 sur les données de 2017, cité dans
l’avis, a
-t-il révélé que 94 % de ses émissions globales étaient dues à la production de programmes audiovisuels
par des producteurs extérieurs, incitant la chaîne à travailler avec ses partenaires sur la réduction de leur propre
empreinte dans les activités menées pour son compte.
Chapitre II
Points
d’attention p
ar programme
Les comptes des organismes de l’audiovisuel public 2022 sont arrêtés au printemps 2023.
S’
agissant de France Télévisions (programme 841), le compte de résultat 2022 apparaît à
l’équilibre au niveau du résultat d’exploitation après versement de 5,9 M€ d’intéressement et
avant transformation et impact de la liquidation de Salto. Celui-ci atteint
46 M€ dans les
comptes 2022 en intégrant la perte d’exploitation pour 2022 (24 M€) ainsi que le plan de
liquidation pour 2023.
S’agissant d’ARTE France (programme 842), la dernière prévision (de décembre 2022)
présente un résultat à l’équilibre comme en budget initial. L’entreprise faisait état à cette
occasion d’ajustements marginaux par rapport au budget initial 2022.
Concernant Radio France (programme 843), la dernière prévision d’exécution budgétaire
présentée en octobre 2022 anticipe un résultat net légèrement déficitaire, à -
1,7 M€ alors que le
budget initial (BI) 2022 prévoyait un résultat net excédentaire à +1,3 M€. Malgré une prévision
favorable de ses produits d’exploitation hors produits sur partenariats réciproques (+4 M€ par
rapport au budget i
nitial 2022) notamment liée aux recettes publicitaires (+ 3,1 M€ par rapport
au BI 2022), l’entreprise anticipe des charges d’exploitation en hausse en 2022 principalement
en raison de l’impact de l’inflation sur son résultat 2022 à hauteur de 3,2 M€.
S’agissant de France Médias Monde (programme 844), d’après la dernière prévision
d’exécution disponible (présentée à son conseil d’administration de décembre 2022),
l’entreprise anticipe un résultat net 2022 à l’équilibre, en amélioration de 2,5 M€ par rap
port au
budget initial. Cette amélioration est notamment liée à une diminution de certaines charges de
l’entreprise (renégociations de contrats, baisse des amortissements du fait du décalage
d’investissements etc.) et à une légère amélioration des ressources propres de l’entreprise.
S’agissant de l’Institut national de l’audiovisuel (programme 845), la dernière prévision
d’exécution disponible fait apparaître un résultat net à l’équilibre et un résultat d’exploitation
en déficit de -
1,5M€. La prévision anticipe une progression du niveau de chiffre d’affaires de
l’Institut à 42,5 M€, en progression de 9,8% (3,8 M€) par rapport au budget initial 2022 et de
5,7% (2,3 M€) par rapport à 2021.
S’agissant de TV5 Monde (programme 847), la dernière prévision d’exécu
tion disponible
(novembre 2022), table sur un résultat 2022 en équilibre
Chapitre III
Moyens consacrés
par l’État à la politique
de
l’audiovisuel public
I -
Les dépenses fiscales
Deux dépenses fiscales figurent encore dans l’annexe au PLF 2023 Voies et moyens tome
II, au titre des dépenses, dont le fait générateur est éteint et des dépenses supprimées. Elles
étaient uniquement rattachées au programme n° 841 « France télévisions » de la mission et ont
été supprimées de fait par l’article 6 de la loi n°
2022-1157 du 16 août 2022 de finances
rectificative pour 2022, qui a supprimé la contribution à l’audiovisuel
public.
Tableau n° 5 :
anciennes dépenses fiscales (
en M€
)
Numéro
Libellé
2021
exécution
2022
prévision
950101
Dégrèvement en faveur des personnes de condition modeste
620
0
950102
Dégrèvement en faveur des personnes de condition modeste
au titre des "droits acquis"
7
0
Coût total
627
0
Source : Annexe au PLF 2023, voies et moyens Tome II, Dépenses Fiscales
En 2019, dans le cadre de la LFI 2020, le taux de TVA à 2,1 % a été retiré de la liste des
dépenses fiscales
7
. La disparition de toute quantification de ce soutien de l’État au secteur qui
en résultait avait conduit la Cour à préconiser la reclassification de ce taux réduit parmi les
dépenses fiscales, dans la NEB 2019. En réalité, il est apparu que la CAP n’aurait pas dû être
imposable à la TVA (cf. encadré), mais que le maintien dérogatoire d’un mécanisme de TVA
permettait d’éviter l’as
sujettissement à la taxe sur les salaires. Il aurait donc fallu, pour disposer
d’une vision exhaustive des moyens consacrés à la politique de l’audiovisuel public, disposer
d’une estimation du montant de l’avantage correspondant à l’absence de taxation sur
les salaires
des entreprises de l’audiovisuel public, information qui n’avait pas vocation à figurer dans le
7
Montant estimé de la dépense n°740
106 à 655 M€ en 2019 et 2020
COUR DES COMPTES
24
tome « Voies et moyens
» étant donné que l’avantage procuré par le non
-
paiement d’une taxe
sur les salaires n’avait pas d’impact sur le budget de l’Etat, mais sur celui de la sécurité sociale.
Dans la NEB 2020, la Cour, tout en soulignant qu’elle ne préconisait pas l’application de la
taxe sur les salaires aux entreprises de l’audiovisuel public, demandait par conséquent que soit
examinée la possibi
lité de publier dans les documents budgétaires le montant de l’avantage
correspondant à l’absence de taxation sur les salaires des entreprises de l’audiovisuel public.
En 2021, la Cour constatait qu’à l’issue des échanges techniques engagés entre la DGMIC
et la
DB d’une part et les entreprises de l’audiovisuel public d’autre part la complexité du calcul et
l’hétérogénéité des données transmises ne permettaient pas d’envisager la mise en œuvre de la
recommandation de la Cour dans les PAP 2022, mais actait le
fait que des travaux d’estimation
étaient menés pour publier le montant de cet avantage à l’occasion du RAP 2021
8
.
Les recommandations passées de la Cour relatives
au taux de TVA à 2,1 % applicable à la CAP
Dans son rapport de 2016 sur la contribution à l’audiovisuel public, la Cour des Comptes préconisait
de
revoir les documents budgétaires présentant le bien-fondé de la dépense fiscale n° 740 106, relative au
taux réduit de TVA applicable aux entreprises de l’audiovisuel public, d’étudier les conséquences
qu’aurait la suppression de cette dépense fiscale et l’assujettissement des entreprises de l’audiovisuel
public à la taxe sur les salaires
.
La première partie de la recommandation a été mise en œuvre en 2017. Le calcul de la différence
entre l’application d’un taux standard de
20 % et le taux de 2,1 % permettait de calculer plus précisément
le montant de la dépense fiscale, à 655 M€.
En 2018, suivant la deuxième partie de la recommandation, le ministère de la Culture a examiné les
conséquences d’une éventuelle suppression de la
taxe. Il a évalué à 135 M€ l’impact net défavorable sur
le secteur si le paiement de la taxe sur les salaires remplaçait le paiement de la TVA à 2,1 %, impact alors
jugé non soutenable avant 2022.
Le ministère notait alors que cette opération entraînerait une nouvelle répartition de la charge
fiscale, les entreprises dont la masse salariale est la plus élevée se voyant davantage taxées (Radio France).
La Cour a réitéré sa recommandation en 2019, considérant que cette taxation avait pour intérêt d’inciter
à
contenir la masse salariale.
En LFI 2020, le taux de TVA à 2,1 % était retiré de la liste des dépenses fiscales
dans le cadre d’une
revue des dépenses fiscales menée en vue du PLF 2020. La disparition de toute quantification d’un soutien
de l’État au se
cteur avait conduit la Cour à préconiser la reclassification de ce taux réduit parmi les
dépenses fiscales, à l’occasion de la NEB 2019. Réinterrogée à ce sujet, en 2020, la DGFi
P
a rappelé qu’au
regard des règles de la TVA, la CAP devait être considérée comme une subvention au secteur, en principe
non imposable. Le maintien de l’application de la TVA à la CAP était donc dérogatoire
9
avec pour objectif
d’exonérer les opérateurs du paiement de la taxe sur les salaires.
8
De fait, la mention suivante était présente au RAP : « Il est à noter que les six entités de l'audiovisuel public sont
exonérées du paiement de la taxe sur les salaires du fait de l'assujettissement de la contribution à l'audiovisuel public a la taxe
sur la valeur ajoutée (taux réduit de 2,1%). Le montant de cette taxe serait
d'environ 94 M€ pour l'ensemble du secteur
(estimation réalisée sur la base des rémunérations brutes versées en 2020). »
9
La DGFIP précisait que la taxation (depuis 1969) de la CAP était dérogatoire aux principes de la directive n°2006/112/UE
relative au système commun de la TVA (article 168 de la directive, transposé à l'article 271 du CGI), car la CAP perçue par les
opérateurs de l'audiovisuel n'est pas la contrepartie d'une prestation de services individualisée et à défaut de lien direct, ne
MOYENS CONSACRÉS PAR
L’ÉTAT À LA POLITIQUE DE L’AUDIOVISUEL
PUBLIC
25
Dès lors, la Cour estimait (an
nexe 3 à la NEB 2021) qu’il existait bien un soutien de l’État via cette
TVA à taux réduit, mais qu’il ne devait pas être calculé par référence à un taux normal (20 %) mais par
rapport au montant de taxe sur les salaires qui serait dû si la CAP n’était pas
assujettie à la TVA
À
compter de 2023, les entreprises de l’audiovisuel public sont assujetties à la taxe sur
les salaires, étan
t donné que leurs recettes proviennent d’une fraction de TVA non assujettie à
la TVA, ce qui provoque la disparition de cette problématique d’évaluation de la dépense
fiscale. Il est à noter que le paiement de la taxe sur les salaires par les entités de l’
audiovisuel
public aura en contrepartie un impact positif sur les recettes de la sécurité sociale.
II -
L’évolution de la dépense totale (budgétaire,
fiscale, extra-budgétaire) sur moyenne période
L’année 2022 était la dernière de mise en œuvre de la trajectoire de réduction des
dépenses définie en 2018 et a en effet abouti, même après effets des crédits du plan de relance,
à une réduction substantielle des moyens totaux consacrés à la mission.
Graphique n° 2 :
é
volution des dépenses (CP) en M€
Source : Cour des comptes
d’après données budgétaires
La remontée de la trajectoire 2023 prend en considération les projections liées aux effets
fiscaux précités, en particulier l’assujettissement à la taxe sur les salaires.
devrait pas être soumise à la TVA. Elle doit s'analyser en matière de TVA comme une subvention non imposable. Cette taxation
dérogatoire repose sur une clause de gel figurant à l’article 370 de la directive TVA, aux termes de laquelle les Etats membr
es
peuvent continuer à taxer les opérations mentionnées à l’annexe X partie A de la directive TVA lorsqu’elles étaie
nt taxées au
1er janvier 1978, dont « les activités des organismes publics de radiotélévision autres que celles ayant un caractère commercial
».
COUR DES COMPTES
26
Tableau n° 6 :
évolution des soutiens publics
à l’audiovisuel public
, HT
(M€)
2018
2019
2020
2021
2022
PLF
2023
CAP
3220,5
3236,4
3 135,50
3 188,46
100
-
Compensation dégrèvements
et mécanisme de garantie
588,6
623,3
653,5
530,56
0
-
Part affectée TOCE*
85,5
-
-
-
-
-
Fraction de TVA
3585,0
3815,7
Recettes du compte
3 894,6
3 859,6
3 789,0
3 719,0
3685,0
3815,7
Crédits plan de relance
45,5
27,5**
Total
3894,6
3236,4
3135,5
3764,5
3712,5
*suppression par le PLF 2019 de l’affectation à France Télévisions d’une part de la taxe sur les
services fournis par les
opérateurs de communications électroniques (TOCE).
** dont 22, 5M€ de crédits ouverts en 2021 pour France Télévisions mais reportés en 2022.
Source : DGMIC (hors estimation de la dépense fiscale associée au taux réduit de TVA, traité supra)
Une approche sur un temps plus long montre que si une forte baisse se constate à compter
de 2018, le montant total des dotations à l’audiovisuel public est, en LFI 2023, supérieur de
148,9
M€ au niveau 2015
10
, étant entendu que les nouvelles prévisions incluent la compensation
des effets fiscaux. Une comparaison plus pertinente montre des dotations supérieures de 58,2
M € en 2022 (LFR) par rapport à 2015.
10
Euros courants, répartis comme suit : France Télévisions (+61,1
M€), Arte France (+36,1
M€) et
France Médias
Monde (+9
M€)
; Radio France (+37,6
M€), INA (2,7 M€) et TV5 Monde 2,1M€).
MOYENS CONSACRÉS PAR
L’ÉTAT À LA POLITIQUE DE L’AUDIOVISUEL
PUBLIC
27
Graphique n° 3 :
d
otations aux sociétés de l’audiovisuel public (M€ TTC)
Source : Cour des comptes à partir des documents budgétaires
En outre, l’
État
a pu accompagner financièrement les entreprises de l’audiovisuel public
à travers des augmentations de capital, effectuées à partir du compte d’affe
ctation spéciale
«
participations financières de l’
État
», à hauteur de 33,7 M€ en 2021 dont 15,2 M€ pour France
Télévisions et 18,5M€ pour Radio France dans le cadre d’investissements de transformation.
Les travaux relatifs au mode de financement de l’aud
iovisuel public post 2024 doivent
avoir lieu dans les mois à venir. Dans ce contexte, ont été élaboré des avenants aux COM 2020-
2022 prolongeant ces derniers d’une durée d’un an (deux ans s’agissant du cas spécifique
d’ARTE France, afin d’aligner la périod
e couverte par son COM avec celle du projet de groupe
2021-
2024 d’Arte). Ces avenants s’inscrivent dans une logique conservatoire : ils reconduisent
les axes stratégiques en vigueur et actualisent les cibles qui leur sont attachées.
La prochaine génératio
n de COM conclus entre l’
État et les entreprises audiovisuelles
publiques devrait être négociée au cours de l’année 2023 à l’issue de la réflexion stratégique
qui reste largement à mener sur le secteur, afin d’assurer la pérennité et la visibilité de ces
f
inancements, dans le respect des règles d’indépendance et de pluralisme des médias.
0,0
500,0
1 000,0
1 500,0
2 000,0
2 500,0
3 000,0
3 500,0
4 000,0
4 500,0
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
LFI 2023
France télévisions
Arte France
Radio France
FMM
INA
TV5 Monde
Total