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LA SÉCURITÉ SOCIALE
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La sécurité sociale
Chaque année, dans le rapport sur l’application des lois de
financement de la sécurité sociale, la Cour formule des recommandations :
certaines constituent plutôt des orientations destinées à servir de guide
pour l'action publique, d'autres sont plus précises et susceptibles d'une
traduction en mesures législatives
5
, réglementaires, ou qui supposent
parfois seulement l’évolution de pratiques administratives. Elles visent
toutes à souligner les points essentiels des insertions et à prolonger les
analyses de la Cour par des propositions de réforme.
S’agissant des mesures les plus significatives, de nature
législative, la LFSS 2008 intègre nombre de dispositions qui
correspondent à de précédentes recommandations formulées dans les
RALFSS des dernières années. Résultant parfois d'amendements
parlementaires, les suites ainsi données dans dix-sept articles de la loi
de financement pour 2008
6
traduisent la qualité du dialogue entretenu
par la Cour avec les services des ministères de tutelle et avec le
Parlement.
***
La recommandation n° 13 du RALFSS de 2007 suggérait de
« réexaminer ou plafonner les exonérations de cotisations sociales
applicables à la plus-value d'acquisition des stocks-options, aux
déductions forfaitaires spécifiques dont bénéficient certaines
professions et aux avantages de départ en retraite et de
licenciement ».
5) Pour ne donner qu'un exemple, la loi organique relative aux lois de financement
du 2 août 2005 a ainsi intégré nombre de recommandations, notamment relatives
aux comptes ou à l’ONDAM.
6) En outre, parmi les articles censurés par le Conseil constitutionnel, au motif qu’ils
constituaient des cavaliers ne pouvant figurer dans une loi de financement de la
sécurité sociale, plusieurs correspondaient à des propositions antérieures de la Cour.
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COUR DES COMPTES
L'article 13 de la LFSS institue, pour les attributions
d'options de souscription ou d'achat d'actions et sur les
attributions d'actions gratuites, accordées à compter du 16 octobre
2007, une contribution patronale, dont le taux est fixé à 10 %, sur
une assiette égale soit à la « juste valeur des options telle qu'elle
est estimée pour l
établissement des comptes consolidés en
application des normes comptables internationales », soit « à
25°% de la valeur des actions sur lesquelles portent ces options, à
la date de décision d
'
attribution » ; ainsi qu'une contribution
salariale, « dont le taux est fixé à 2,5 % », sur le montant de
l'avantage défini par le code des impôts ».
L'article 16 est relatif à la contribution
instituée, à la
charge de l'employeur et au profit de la CNAVTS, sur les
indemnités versées en cas de mise à la retraite d'un salarié à
l'initiative de l'employeur. Le taux est fixé à 50 % (25 % pour les
indemnités versées avant le 31 décembre 2008).
La disposition relative aux stock-options et attributions
gratuites d’actions ne se traduira par des recettes nouvelles, pour
sa part salariale, qu’au-delà du délai d’exercice des options, soit
pas avant 2009 et en pratique très peu avant 2012. En revanche, la
contribution patronale devrait générer 250M€ de recettes dès
2008.
Quant à la deuxième disposition, relative à la taxation de
certaines indemnités de départ en retraite, elle ne s'étend pas aux
indemnités de licenciement, ce qui risque d'inciter l'employeur à
verser plutôt une indemnité de licenciement au salarié.
La recommandation n° 20 du RALFSS 2007 visait à « mettre en place
des mécanismes de pénalisation financière complétant les dispositifs
incitatifs existants afin de mieux répartir l’offre de soins sur le
territoire et de préserver l’égal accès aux soins ».
Les articles 46, 47 et 48 précisent que des mesures
notamment incitatives doivent être prises, après concertation avec
les organisations les plus représentatives des professionnels de
santé, pour aboutir à une meilleure régulation de la répartition de
ces derniers sur le territoire national.
Ces mesures sont cependant
en retrait par rapport aux
intentions initiales du Gouvernement, pour prendre en compte
l’opposition manifestée par les internes devant toute limitation au
principe de la liberté d’installation.
LA SÉCURITÉ SOCIALE
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La
recommandation
n° 21
du
RALFSS
2007
proposait
de
« poursuivre les transferts de compétences entre professionnels de
santé ».
L'article 40 autorise les infirmiers à effectuer certaines
vaccinations sans prescription médicale.
Cet article prolonge sur un point présentant des enjeux
significatifs les transferts de compétence déjà autorisés par la
précédente loi de financement, qui permet depuis le printemps
2007 aux opticiens-lunetiers d'effectuer le renouvellement de
verres correcteurs, dans le cadre d’une prescription médicale
initiale, et aux infirmiers
de prescrire certains dispositifs
médicaux.
La recommandation n° 27 du RALFSS 2007 était de « faire aboutir la
réforme
des
critères
d'admission
au
remboursement
des
médicaments et (de) réviser de manière plus régulière la liste des
médicaments remboursables, en permettant la prise en compte de
critères médico-économiques dans les deux cas ».
L'article 41 donne compétence à la Haute Autorité de
santé (HAS) pour émettre des recommandations et des avis
médico-économiques sur les stratégies de soins, de prescription ou
de prise en charge les plus efficientes.
La possibilité ainsi donnée à la HAS d'intégrer les
considérations médico-économiques devrait permettre de mieux
prendre les décisions d’admission au remboursement.
La recommandation n° 39 du RALFSS 2007 préconisait de « mieux
prendre en compte la progression du coût de l'enfant avec l'âge
dans les majorations des allocations familiales et dans l'allocation
de rentrée scolaire ».
L'article 93 permet de faire varier l'allocation de rentrée
scolaire en fonction de l'âge de l'enfant.
La recommandation de principe a ainsi été suivie (étant
rappelé que ces modulations devraient être effectuées à coût
nul pour la branche selon la Cour).
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COUR DES COMPTES
La recommandation n° 42 du RALFSS 2007 était de « recentrer la
tutelle de l'Etat en cohérence avec le renforcement des pouvoirs de
la caisse centrale de MSA prévue par la COG 2006-2009, et la n° 43
était d’« accélérer la restructuration du réseau de caisses afin
notamment de dégager des économies de gestion et des gains de
productivité ».
L'article 102 permet à la CCMSA d'assurer un meilleur
pilotage de son réseau, ce qui se traduira notamment par la
possibilité d'accélérer les fusions prévues entre caisses.
L'extension des pouvoirs de la CCMSA lui permet désormais
de jouer pleinement le rôle d’une tête de réseau.
La recommandation n° 3 du RALFSS 2006 suggérait, «concernant
la régulation des dépenses, si la situation l'exige, (de) prendre des
mesures infra-annuelles d'ajustement selon des modalités plus
efficaces que celles qui ont été appliquées en 2005 ».
L'article 36 prévoit de mieux articuler la politique
conventionnelle de négociation tarifaire et la réalisation de
l'ONDAM
en
cours
d'année,
en
instituant
une
période
d'observation de six mois pour toute mesure tarifaire ou en
décalant l'effet des mesures tarifaires au 1
er
janvier de l'année
suivante en cas de déclenchement de la procédure d'alerte.
Ces mesures qui visent à mieux maîtriser l'ONDAM sont
importantes sur le plan symbolique. Leur impact financier direct
reste limité cependant, puisqu'elles conduisent seulement à
retarder les mesures de six mois.
Les recommandations n° 35 du RALFSS 2005 et n° 26 du RALFSS
2007 demandaient respectivement d'« étudier la faisabilité d'une
évolution du mode de rémunération des médecins généralistes qui
séparerait ce qui devrait relever du paiement à l'acte et ce qui
devrait relever du forfait » ; puis de « conduire sans tarder une
réflexion sur l'articulation du paiement à l'acte et du paiement au
forfait des médecins généralistes ».
L'article 44 met en place un dispositif expérimental sur
cinq ans à partir de 2008, portant sur de nouveaux modes de
rémunération des professionnels de santé complétant le paiement
à l’acte ou s'y substituant.
LA SÉCURITÉ SOCIALE
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Quant à l'article 43, il permet des contrats individuels
entre caisses primaires et professionnels de santé sur la base
d'engagements individualisés pour diverses actions de prescription,
de prévention et de coordination des soins. Ces contrats donnent
lieu à des contreparties financières à définir.
La réflexion nécessaire sur l'évolution des paiements à l'acte et au
forfait doit conduire à ne pas additionner les dispositifs, comme
cela a déjà été fait, mais plutôt à envisager de vrais dispositifs de
substitution. Pour peu que les dispositifs de substitution qui y sont
évoqués soient privilégiés, l'article 44 peut représenter un premier
pas dans cette démarche.
La recommandation n° 3 du RALFSS 2004 visait, « pour les
transports, (à) élaborer un référentiel médical de transport
opposable à l'ensemble des prescripteurs, y compris hospitaliers ;
revoir la réglementation du transport de malades et réorganiser
avec la profession le transport d'urgence de jour ».
L'article 37, outre l’extension de la procédure de mise sous
accord préalable à l’ensemble des domaines de prescription des
médecins, prévoit pour les transports en ambulance une procédure
spécifique de mise sous accord préalable qui s’ajoute à celle
globale existant déjà en matière de transport sanitaire.
L'article 38 vise à assurer un encadrement des dépenses
de
transport
en
taxi
en
prévoyant
une
obligation
de
conventionnement entre les sociétés de taxi et les caisses
d'assurance maladie fixant notamment les tarifs et les conditions
de tiers payant.
L'article 51 étend aux transporteurs sanitaires, aux taxis
et aux fournisseurs et prestataires de service un dispositif de
pénalités pour les professionnels de santé, les employeurs, les
assurés et les établissements méconnaissant les règles en vigueur.
L'article 64, enfin, prévoit un dispositif expérimental de
prise en charge des frais de transport prescrits par les praticiens
hospitaliers. Dans ce dispositif, les frais de transport concernés
sont mis à la charge des établissements expérimentateurs ; la part
de frais prise en charge par l'assurance maladie étant financée par
dotation annuelle et la participation de l'assuré versée aux
établissements concernés.
26
COUR DES COMPTES
La recommandation de la Cour relative aux transports de malades
faite dans le RALFSS 2004 n'avait, dans un premier temps, guère
été suivie d'effets. La dérive
.
fi
nancière constatée depuis (+ 8 % à
9 % d'augmentation par an, pour une dépense de 100 M€),
notamment pour les taxis (+ 15 %) a conduit les pouvoirs publics
à prendre une série de mesures visant à rendre moins dynamiques
ces dépenses et à responsabiliser les praticiens hospitaliers qui
sont à l'origine des 2/3 des prescriptions.
La recommandation n° 27 du RALFSS 2004 était de « mettre en
place dans les branches maladie et famille des budgets de gestion
administrative intégrant la totalité des dépenses de personnel ».
L'article 101 prévoit notamment, au sein de la CNAMTS,
la fusion des deux fonds nationaux de gestion administrative et du
contrôle médical, qui financent tous deux le même type de
dépenses.
Cette mesure de fusion de fonds, suggérée par la Cour pour les
branches maladie et famille, reste circonscrite à la seule branche
maladie.
LA SÉCURITÉ SOCIALE
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RÉPONSE DU MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS
ET DE LA FONCTION PUBLIQUE
L’insertion sur le suivi des recommandations formulées dans les
rapports de la Cour sur l’application des lois de financement de la sécurité
sociale appelle de ma part les observations suivantes :
1°) Comme le constate la Cour, la loi de financement de la sécurité pour
2008 s’inspire, dans plus de vingt articles, des recommandations formulées
dans les précédents rapports annuels. Ce fait confirme la pertinence des
analyses et des propositions de réforme formulées par la Cour et témoigne de
la qualité des échanges qui se sont établis avec les services des ministères et
avec le Parlement.
2°) Par sa décision n°2007-558 DC du 13 décembre dernier, le Conseil
constitutionnel a déclaré non conformes à la Constitution, au titre de
« cavaliers sociaux » ne trouvant pas leur place en loi de financement de la
sécurité sociale, certaines dispositions issues de recommandations de la Cour.
Il s’agit:
- de l’article 49, qui prévoyait de supprimer le comité de démographie
médicale institué par la loi du 13 août 2004 relative à la réforme de
l’assurance-maladie (recommandation n°19 du RALFSS de 2007) ;
- de l’article 42, qui proposait de mettre en place un mécanisme de
sanction pour les entreprises pharmaceutiques en cas de non-réalisation ou
de retard dans les études réalisées postérieurement à l’autorisation de mise
sur le marché (recommandation n° 28 du RALFSS 2007) ;
- de l’article 58 qui créait une obligation pour les fabricants ou
distributeurs de dispositifs médicaux de déclarer à l’agence française de
sécurité sanitaire des produits de santé l’ensemble des produits ou
prestations
qu’ils
commercialisent
et
le
code
correspondant
(recommandation n° 2 du RALFSS 2004).
Le Conseil constitutionnel n’ayant pas remis en cause la pertinence de
ces mesures, le Gouvernement reste déterminé à mettre en oeuvre les
recommandations de la Cour, par des moyens qui ne nécessitent pas
l’intervention d’un véhicule législatif.
3°) S’agissant par ailleurs des articles 46, 47 et 48 tendant à mettre en
oeuvre la recommandation n° 20 du RALFSS 2007, la Cour regrette que les
mesures finalement adoptées par la représentation nationale soient en retrait
par rapport aux intentions initiales du Gouvernement. Les questions liées à
l’organisation et à la répartition de l’offre de soins demeurent une priorité de
l’action gouvernementale : des engagements ont ainsi été pris pour tenir
rapidement, dès février 2008, des états généraux de l’organisation de la santé,
qui permettront de cadrer la négociation conventionnelle, que sera amenée à
conduire l’union nationale des caisses d’assurance maladie, et de préparer le
projet de loi sur l’accès aux soins prévu pour l’été.