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3
La construction, la rénovation et
l’entretien des collèges
: mieux articuler
les actions de l’Éducation nationale
et des départements
_____________________ PRÉSENTATION_____________________
C'est avec François Guizot, ministre de l'instruction publique, qu'a
été votée, le 28 juin 1833, la loi déléguant la gestion des aspects matériels
des écoles aux communes tandis que l’État conservait la responsabilité de la
formation des maîtres. Un siècle et demi plus tard, la loi du 22 juillet 1983,
modifiée et complétée par celle du 25 janvier 1985, a instauré un partage
des compétences en matière scolaire selon des principes simples : à l'État la
responsabilité de l'enseignement, aux départements la prise en charge des
conditions matérielles de son organisation (bâtiments, équipements,
dépenses de fonctionnement) ainsi que la gestion des personnels
correspondants. Depuis le 1
er
janvier 1986, la gestion des bâtiments des
collèges, devenus établissements publics locaux d'enseignement (EPLE),
relève des collectivités départementales. Ces dernières ont notamment
l’obligation d’assurer les dépenses de construction et grosses réparations
ainsi que les dépenses de fonctionnement associées. Il en va de même pour
les régions s’agissant de la gestion des lycées.
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336
Depuis cette date, les dépar
tements n’ont cessé de voir leur rôle
croître en matière éducative. L’évolution de la part de leurs budgets
consacrée à l’éducation, comme le déploiement de stratégies patrimoniales,
illustrent cette réalité. Une évolution analogue pourrait être observée quant
aux investissements des régions en faveur des lycées, mais la Cour a choisi
de concentrer son enquête sur le premier cycle du second degré, qui se
déroule au collège, car il concerne tous les élèves d’une génération.
Ceux-ci ont par la suite des parcours plus diversifiés
183
.
Cet investissement croissant porte les départements à aller au-delà
de leurs obligations réglementaires pour prendre toute leur place dans
un processus de co-
construction du service public de l’éducation aux côtés
de l’État.
L’évolution de la société, comme l’aspiration des usagers, mettent en
lumière les enjeux auxquels doit faire face le système éducatif français, dont
la tradition centralisatrice s’est accommodée d’une forte hétérogénéité des
situations locales. Les nouveaux défis à relever concernent la prise en
compte des problématiques environnementales et sanitaires, la sécurité et
l’accessibilité, mais aussi l’adaptation des locaux des collèges aux pratiques
pédagogiques, actuelles et futures, de l’École du XXI
e
siècle.
L’en
quête dont a résulté le présent chapitre a été réalisée par la
Cour auprès des administrations centrale et déconcentrées du ministère de
l’éducation nationale et de la jeunesse. Elle a également donné lieu à
l’examen, par quatre chambres régionales des com
ptes (Auvergne-Rhône-
Alpes, Hauts-de-France, Île-de-France, Pays de la Loire), de la gestion
des collèges dans quatre départements aux caractéristiques très diverses
(Allier, Mayenne, Oise et Seine-Saint-Denis).
Au terme de ses investigations, la Cour relève que, malgré une
politique volontariste des départements, de fortes inégalités territoriales
demeurent (I). Le processus de co-
construction devant guider l’exercice
de responsabilités partagées doit encore être consolidé (II), afin de
permettre une adap
tation du service public aux besoins de l’éducation
du XXI
e
siècle (III).
183
Lycée dans la voie générale, technologique ou professionnelle, ou bien apprentissage
et formation professionnelle ou emploi.
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LA CONSTRUCTION, LA
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337
I -
La persistance d’inégalités fortes
En 2003, dans son rapport sur la gestion du système éducatif
184
, la
Cour avait mis en lumière le nombre limité de collectivités territoriales
dis
posant d’un inventaire complet de l’état des bâtiments scolaires objets du
transfert. Elle avait alors souligné le mauvais état des bâtiments transférés,
constaté un net retard en matière d'entretien et relevé des insuffisances dans
les conditions de mise
en œuvre de la décentralisation. Cela a conduit les
départements, dans un premier temps, à se concentrer sur des travaux
urgents, avant d’élargir leur stratégie et de recruter les personnels nécessaires
pour mieux prendre en compte les besoins pédagogiques et éducatifs.
La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a
confié aux départements de nouvelles responsabilités en matière de
restauration, d’hébergement, d’accueil et d’entretien des collèges et leur a
transféré des personnels assurant ces missions
185
. Dans son rapport
d’octobre
2009 sur la conduite par l’État de la décentralisation, la Cour a
souligné la cohérence de ce rattachement avec la répartition de l’immobilier et
de son entretien, tout en en signalant certaines limites. Il a en effet aussi eu pour
conséquence de disperser la gestion des agents concernés entre plusieurs
collectivités sur un même ressort géographique et de pérenniser l’éclatement
des équipements du cycle secondaire, pourtant parfois situés sur un même site.
Enfin, le numérique est devenu un axe de politique éducative, inscrit
dans la loi de refondation de l’école de la République du 8 juillet 2013, qui
a créé un « service public du numérique éducatif » dont, en 2019, la Cour
a mis en évidence le caractère inégalitaire et contrasté du déploiement selon
les territoires
186
.
Aujourd’hui, les départements portent de multiples orientations qui
dépassent même le cadre des compétences que la loi leur reconnaît et les
ont a amenés à devenir de véritables acteurs de la communauté éducative.
184
Cour des comptes,
La gestion du système éducatif
, rapport au président de la
République, avril 2003.
185
Il s’agit principalement des techniciens et ouvr
iers de service (TOS) des
établissements scolaires du second degré.
186
Cour des comptes,
Le service public numérique pour l’éducation, Un con
cept sans
stratégie, un déploiement inachevé
, rapport public thématique, juillet 2019.
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338
Les compétences obligatoires des départements
Au titre de ses compétences obligatoires, le département assure :
-
la construction, la rénovation et l’entretien de l’ensemble des collèges
publics, dont il est le propriétaire ;
-
la détermination et le versement des dotations aux collèges publics pour
leur fournir les moyens de fonctionner ;
-
la participation aux charges de fonctionnement des collèges privés sous
contrat d’association
;
-
l’acquisition et la maintenance des infrastructures
numériques et des
équipements informatiques des collèges publics ;
-
le recrutement et la gestion des personnels d’accueil, de maintenance, de
restauration et d’entretien des collèges publics
;
-
la définition de la carte scolaire en matière de collèges (secteurs de
recrutement des collèges publics) ;
-
la restauration scolaire, en privilégiant les produits locaux et une
alimentation de qualité (Agrilocal01) ;
-
le transport scolaire (uniquement pour les élèves en situation de handicap).
Ces politiques volontaristes sont cependant marquées par la
persistance de fortes inégalités de situations, qui ne permettent pas d’offrir
à tous les collégiens des conditions matérielles de scolarisation homogènes.
Certains départements disposent en effet de marges de manœuvre plus
étroites en raison de capacités financières plus faibles et d’une dynamique
démographique, source de besoins financiers supplémentaires.
A -
Une hétérogénéité des situations départementales
1 -
Des disparités patrimoniales
et socio-démographiques importantes
Les départements ont dû répondre à deux types de besoins majeurs,
les premiers résultant de l’état du patrimoine qui leur a été transféré, les
seconds de l’évolution des effectifs scolarisés.
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339
Le transfert du patrimoine s'est déroulé dans un contexte incertain et
parfois conflictuel. Les lacunes des procès-verbaux de remise ont conduit
les collectivités à faire établir des diagnostics plus complets, ce qui a
retardé le lancement de programmes de travaux d’envergure, comme en
Seine-Saint-Denis. Le transfert de c
ompétences n’entraînant pas le
transfert de propriété, celle-ci est parfois demeurée très émiettée : en
Mayenne, cinq collèges n’ont toujours pas fait l’objet de transfert pour des
raisons tenant à des difficultés à retrouver l’origine de la propriété.
Dans
bien des cas, le patrimoine des collèges présentait un état d’entretien médiocre.
Aussi nombreux sont les départements qui, pour répondre aux attentes des
usagers, ont assumé dans la durée un effort de rénovation de ce patrimoine.
Les départements sont également traversés par des dynamiques
démographiques inégales. La croissance de la population est globalement
plus forte dans les aires d’attraction des villes, près des littoraux à l’ouest
et au sud. Entre 2013 et 2018, le département de la Seine-Saint-Denis a
ainsi connu un taux annuel moyen d’augmentation de sa population 2,5 fois
supérieur à la moyenne nationale. La tranche d’âge des 0
-14 ans a crû dans
ce département de 11,1 %
187
quand la part des moins de 15 ans diminuait
de 5,6 % en Mayenne. La courbe démographique apparaît alors comme le
principal facteur impactant les stratégies patrimoniales des départements.
187
Ce qui représente 37 317 élèves en plus à scolariser en 10 ans.
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340
Carte n° 1 :
état en 2020 et évolution entre 2010 et 2020 de la répartition
des effectifs de collégiens en France métropolitaine et outre-mer
France métropolitaine + DROM :
3,4 M d’élèves, 5,6
%
Source :
Cour des comptes d’après DEPP, Géographie de l’école, 2021
Un territoire en forte croissance démographique doit assurer un
niveau élevé d’investissement afin de pourvoir aux besoins d’une
population en expansion. Depuis 1986, le département de Seine-Saint-
Denis a dû construire 25 nouveaux collèges et en reconstruire 40 quand
celui de la Mayenne n’en a édifié aucun.
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ET DES DÉPARTEMENTS
341
D’autres critères peuvent également entrer en jeu, comme celui du
poids de l’enseigneme
nt privé. Le département
n’ayant l’obligation de
participer
qu’aux
seules dépenses de fonctionnement de ces établissements,
un fort taux de collèges privés, comme c’est le cas dans l’ouest de la
France,
allège
d’autant
la
charge
départementale
en
matière
d
’investissement. En revanche, en diminuant les effectifs d’élèves par
classe, le classement d’établissements en éducation prioritaire fait
augmenter les besoins en espaces d’enseignement
188
.
Le cadre réglementaire de subventionnement des collèges privés
Le département doit, dans le respect du principe de parité établi par
la loi dite « Debré » du 31 décembre 1959, apporter aux établissements
privés sous contrat des moyens budgétaires leur permettant de compenser
les frais de personnels (hors enseignants et personnels administratifs) et
leurs coûts de fonctionnement. Il peut leur accorder également des
subventions d’investissement, dans la limite de 10
% de leurs dépenses de
fonctionnement, hors aides publiques, conformément à la loi dite
« Falloux » du 15 mars 1850.
L
es caractéristiques géographiques d’un territoire ont également des
répercussions sur la gestion des collèges, les zones urbaines étant soumises
à des contraintes plus fortes du fait d’un prix du foncier plus élevé et de la
raréfaction des terrains disponibles.
2 -
Des dotations partiellement décorrélées des réalités scolaires
En 1986, les départements consacraient aux collèges 4,1 MdF, soit
l’équivalent de 1,1 Md€ (en
2020). Ce montant a plus que quintuplé
(x
5,6), pour atteindre 6,2 Md€ en 2020. Dan
s le même temps, la part des
dépenses correspondantes dans l'ensemble des dépenses des départements
a doublé, passant de 3,12 % en 1986 à près de 6 % en 2021.
Cet effort a principalement porté sur les dépenses d’équipement, dont la
part dans les budgets des départements a plus que triplé entre 1987 (5,84 %)
189
et aujourd’hui (20,7
%). Aussi la proportion consacrée au fonctionnement des
dépenses réalisées par les départements en faveur des collèges a-t-elle
parallèlement diminué, passant de 77 % en 1986 à 51,5 % en 2021.
188
L’enseignement adapté peut également demander des aménagements de bâtiments
ou des compléments d’équ
ipements. La réforme du collège de 2016 a également induit
des modifications en termes de besoins en locaux.
189
Cour des comptes,
La décentralisation
et l’enseignement du second degré
, rapport
public particulier, février 1995.
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342
Pour aider les départements à faire face à ces dépenses nouvelles,
l’État a mis en place un système de compensation financière, assuré par
une augmentation de la dotation générale de décentralisation (DGD) pour
le fonctionnement et par l’attrib
ution de la dotation départementale
d’équipement des collèges (DDEC) pour l’investissement.
Le montant de l’augmentation de la DGD est déterminé en fonction
des dépenses effectuées par l’État avant le transfert et actualisé par le taux
d’évolution de la do
tation globale de fonctionnement (DGF).
La détermination initiale de la DDEC a été faite selon les règles de
droit commun, c’est
-à-dire en retenant la base de l'année précédant le
transfert de compétence, soit 1985. Jusqu’au 31 décembre 2007, son montant
était réparti entre l’ensemble des départements en fonction de critères
reflétant la capacité d’accueil des collèges et l’évolution de la population. À
compter de 2008, la DDEC a été forfaitisée
190
. En conséquence, le montant
de la DDEC, fixe depuis 2009, se
trouve décorrélé de l’évolution des effectifs
de collégiens et de la superficie des bâtiments scolaires. Cette forfaitisation
pénalise notamment les départements en augmentation démographique et
socialement les plus défavorisés. En sens inverse, elle avantage ceux qui
connaissent une baisse de leurs effectifs. Cette situation crée des inégalités
que le principe constitutionnel de péréquation vise pourtant à corriger
191
.
Le taux de couverture par la DDEC des dépenses d’investissement
affectées par les départements aux collèges est ainsi très disparate, sous
l’effet
de
variations
démographiques
différentes
et
de
priorités
d’investissement propres à chaque département. Sur la période 2015
-2019,
il s’est inscrit dans une échelle de 7,59
% en Vendée à 84,25 % dans les
Ardennes
192
, la moyenne nationale se situant à 15,61 %. Certains
départements, soumis à une forte pression démographique, comme la
Seine-Saint-
Denis, voient ainsi leurs dépenses d’investissement couvertes
à hauteur de seulement 9,28 %, quand des départements en déprise, comme
l’Allier ou la Mayenne, bénéficient d’une couverture proportionnellement
plus importante, de respectivement 18,71 % et 17,76 %.
190
Article 41 de la loi n° 2017-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008. La
part reçue par chaque département est figée à partir de la moyenne actualisée des
dotations reçues au cours des dix années précédentes.
191
Cour des comptes,
Concours financiers de l’État et disparités de dépenses des
communes et de leurs groupements
, communication à la commission des finances de
l’Assemblée nationale, octobre 2016.
192
Le taux de couverture du département des Ardennes se distingue particulièrement de
l’ensemble. Le taux de couverture du second départeme
nt le mieux pourvu (celui des
Hautes-Alpes) atteint 68,84 %.
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343
Tableau n° 1 :
taux de couverture par la DDEC des dépenses
d’investissement affectées aux collèges par les département
s
Montants cumulés sur la période 2015-2019 (en
)
Dépenses d’investissement,
(hors remboursement
de la dette)
DDEC reçue
Taux de couverture des
dépenses d’investissement
(moyenne)
Mayenne
35 835 293
6 363 615
17,76 %
Allier
43 788 494
8 194 390
18,71 %
Oise
125 462 998
19 782 940
15,77 %
Seine-Saint-Denis
432 651 624
40 148 940
9,28 %
Ardennes
10 756 852
9 062 720
84,25 %
Vendée
113 503 272
8 611 705
7,59 %
Total national
8 976 389 076
1 401 593 492
15,61 %
Source : Observatoire des finances et de la gestion publique locales
193
En sus de la DDEC, l’État peut également apporter un soutien aux
projets de rénovation des collèges par le biais de dispositifs spécifiques
194
.
Une partie de l’enveloppe du plan de relance
195
, priorisée sur trois
orientations (la transition écologique, la résilience sanitaire et la rénovation
du patrimoine) a ainsi été affectée à la création, la transformation et la
rénovation des collèges. De même, les actions relatives au bâti scolaire sont
éligibles au financement des fonds eur
opéens structurels et d’investissement
pour la période 2021-2027. Elles peuvent également être financées dans le
cadre du plan de relance de l’Union européenne.
193
L’Observatoire des finances et de la gestion publique locales (OFGL) a été créé en
2016. Son portail de données constitue un sous-domaine du portail des ministères
économiques et financiers.
194
Il est également possible de citer les programmes portés par la Banque des territoires,
l’Agence de l’environnement et de la ma
î
trise de l’énergie (A
deme), la Fédération nationale
des collectivités concédantes et régies (FNCCR) ou encore par l’Agence natio
nale pour la
rénovation urbaine (ANRU) en direction des quartiers défavorisés.
195
Plan de relance dont 650
M€
de crédits supplémentaires ont été affectés à la dotation
de soutien à l’investissement local (DSIL), 300
M€
à la dotation de soutien à
l’investiss
ement des départements (DSID) et 50
M€
dédiés aux équipements sportifs.
Selon le ministère de l’éducation nationale, e
nviron 1 000 collèges ont bénéficié, dans ce
cadre, de travaux pour un montant total de 400
M€
, dont 200
M€
de subventions de l’État.
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344
Aucun bilan n’a cependant été communiqué à la Cour, alors même
que l’ensemble des concours eur
opéens en faveur des collectivités
gagnerait à être consolidé par le ministère de l’intérieur
qui est chargé du
suivi de la programmation des crédits des fonds structurels européens.
Le rapport sur l’utilisation de la DSIL, pilotée par
la direction
géné
rale des collectivités locales (DGCL), montre qu’en 2020, sur
541,8
M€
de dotations, pas moins de 65,6
M€
ont été utilisés pour la
« Création, transformation et rénovation des bâtiments scolaires
196
».
Le choix des dossiers retenus favorise les collectivités qui font
preuve de dynamisme. Très souvent, les délais fixés pour prétendre au
bénéfice d’un dispositif sont tels qu’ils avantagent celles d’entre elles
disposant déjà de dossiers finalisés ou sur le point de l’être. À
titre
d’illustration, 97
% de la somme reçue par le département de la Mayenne
dans le cadre du Plan de relance (1,33
M€
) a été affectée à des projets
prévus dans le programme pluriannuel d’investissement (PPI) adopté en
2018. Ces recettes offrent donc davantage une opportunité pour compléter
le financement de projets dont la réalisation était déjà programmée qu’elles
ne constituent un réel levier pour répondre aux priorités du plan de relance.
Même si
l’effet levier constaté pour la
DSIL est de 4,4
197
,
l’éparpillement des ministères impliqués dans l’attribution de concours
financiers en faveur du bâti scolaire complexif
ie l’accès à ces fonds pour les
départements moins dotés en capacités d’ingénierie et d’expertise internes.
Alors que le ministère chargé de l’éducation affiche une ambition
en ce domaine, il ne dispose pas des éléments consolidés de bilan du
soutien fina
ncier de l’État à l’investissement en faveur des collèges. Le
suivi des crédits du plan de relance ne fait pas exception. La place du
ministère apparaît marginale au cœur de la gouvernance interministérielle,
alors même qu’il pourrait y jouer un rôle plus
prononcé, en veillant, par
exemple, à conditionner une partie des aides allouées par l’État à la
rénovation du bâti scolaire. Les bâtiments éducatifs représentent en effet
une part majoritaire (54 %) des 280 millions de mètres carrés
d’immobilier
des collectivités territoriales.
196
L
e rapport n’établit pas de distinction entre écoles, collèges et lycées.
197
Ce qui signifie que pour 1
€ de subvention octroyé par l’État, les collectivités
territoriales ont investi 4,4
€ dans des projets financés à ce titre.
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345
B -
Des stratégies patrimoniales ambitieuses
1 -
Un pilotage en quête de performance
Faute de pouvoir s’appuyer sur un état des lieux complet, et en
l’absence de garantie réelle sur la qualité des données concernant les
bâtiments en 1986, la programmation des investissements par les
départements n’a que rarement débouché sur un document synthétique
programmant les différents chantiers à entreprendre. La plupart des
opérations prévues dans les PPI
198
sont restées, jusque dans les années
2000, mal évaluées, entraînant fréquemment des dépassements de coûts,
ainsi que des reports voire des abandons de projet.
Peu à peu, même si elle demeure variable d’un département à l’autre,
la qualité de la programmation des investissements s’est améliorée. L
es
départements ont développé des méthodes de recueil et de hiérarchisation des
besoins mais aussi des processus de pilotage en « coût global » permettant de
disposer d’une vision complète du niveau de dépenses engendré par un nouvel
équipement, tant en in
vestissement qu’en fonctionnement. Le département de
l’Oise a ainsi centralisé ses données bâtimentaires dans une application qui
lui permet d’optimiser sa gestion immobilière
199
. Le pilotage des
investissements reste toutefois de qualité inégale d’un département à l’autre.
Leur suivi est parfois rendu difficile par l’absence d’autorisations de
programme spécifiques et de système d’information adapté.
2 -
Un effort financier des départements marqué par des disparités
Lors des premières années ayant suivi le transfert des collèges aux
départements, la décision, s’étant rapprochée du terrain, a permis de mieux
satisfaire les besoins, dans un contexte de forte croissance démographique.
Les investissements consacrés aux collèges ont été multipliés par cinq
200
.
Devenue u
n véritable outil au service d’une politique éducative globale, la
compétence de gestion des bâtiments s’est peu à peu articulée avec les
orientations pédagogiques, dans la perspective d’une approche globale de
la vie de l’élève dans l’établissement.
198
La loi du 22 juillet 1983 a
chargé les régions et les départements d’établir des programmes
prévisionnels d’investissement (PPI) relatifs aux établissements placés sous leur responsabilité.
199
Le
Building Information Modeling
exploitation est un processus qui centralise
l’ensemble de
s données du bâtiment sur une seule plateforme et permet de mettre en
corrélation des informations et d’optimiser
la gestion immobilière du département.
200
Sénat,
rapport fait au nom de la mission commune d’information chargée de dresser
le bilan de la décentralisation et de proposer les améliorations de nature à faciliter
l’exercice des compétences locales
, r
apport d’information
n° 447, juin 2000.
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346
Schéma n° 1 :
les
interventions d’un conseil départemental
dans le domaine des collèges
Source :
Cour des comptes d’après le Schéma pluriannuel des collèges publics 2019
-2026 du département
du Finistère
Au cours de l’année 2021, les départements ont consacré 4,9 Md€
201
aux collèges. Se décomposant en dépenses de fonctionnement (2,5
Md€) et en
dépenses d’investissement (2,4 Md€), cet engagement n’a cessé de se
renforcer. Entre 2010 et 2021, les dépenses totales en faveur des collèges
(fonctionnement et investissement) ont progressé de 14,2 %.
Cette hausse masque toutefois de fortes disparités entre départements,
expliquées par plusieurs facteurs, parmi lesquels l’état du patrimoine existant
201
Les finances des collectivités locales en 2022
, Pré-
rapport de l’Observatoire des
finances et de la gestion publique locales, OFGL, DGCL.
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347
et l’augmentation du nombre de collégiens
202
dans certains territoires. Selon
la direct
ion de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP)
203
,
si les départements ont consacré, en 2019, 1 720
en moyenne par collégien,
cinq départements ont dépensé plus de 2 400
. La Lozère et la Haute-Marne
figurent en tête de classement, en raison d’un effort d’investissement soutenu
cette même année. La Seine-Saint-Denis se place juste après, avec 2 460
par collégien, dont 1 110
pour l’investissement. À l’inverse,
15
départements ont dépensé moins de 1 400
par collégien. La Moselle et le
Maine-et-Loire affichent la dépense moyenne la plus basse, avec moins de
1 200
par collégien. Dans l’Allier et l
e Cantal, le quart des dépenses est
consacré aux transports scolaires
204
.
Carte n° 2 :
dépenses des départements par collégien
public et privé sous contrat, 2019
France métropolitaine + DROM (hors Mayotte) : 1 720
Source :
Cour des comptes d’après DEPP, Géographie de
l’école, 2021
202
L’état du patrimoine existant joue sur la nécessité de gros entretien voire de
réhabilitation tandis que l’augmentation du nombre de collégiens peut nécessiter la
construction de nouveaux collèges ou bâtiments.
203
DEPP,
Géogr
aphie de l’école 2021
, n° 13.
204
La compétence de gestion des transports scolaires a été transférée des départements aux
régions par la loi NOTRé du 7 août 2015 à compter de la rentrée scolaire 2017. Ce transfert
a toutefois été assorti de la possibilité offerte aux régions de déléguer leur nouvelle
compétence, en tout ou partie. C’était le cas de la région Auvergne
-Rhône-Alpes en 2019.
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COUR DES COMPTES
348
L’analyse des dépenses d’équipement des départements en faveur des
collèges met en évidence des écarts entre départements allant d
’un montant
moyen annuel de 2,15
M€
dans les Ardennes à 78,05
M€
en Seine-Saint-
Denis
205
. Le département francilien a en effet poursuivi ces dernières années
une politique de construction, de rénovation et de modernisation de ses collèges.
Le coût moyen de construction des collèges en Seine-Saint-Denis
Le coût moyen
206
de construction (travaux neufs, hors locaux
provisoires, aménagements extérieurs et VRD3) constaté sur les collèges
créés ou reconstruits par le département de la Seine-Saint-Denis, sur la
période 2005-
2020, s’élève
à :
Source : Cour des comptes
Le département explique la différence de coût entre la maîtrise d’œuvre
publique et les partenariats publics privés par l’intégration aux PPP d’éléments
programmatiques particuliers (gymnase, cuisines centrales, internat). La
comparaison des coûts moyens par m² apparaît donc plus représentative.
Les
différences
observées
entre
départements
s’expliquent
principalement par l’état du
patrimoine existant et la dynamique démographique.
Ainsi, un collégien ardennais bénéficie d’un niveau d’équipement annuel moyen
de 123
quand un collégien du Val-de-Marne reçoit 1 284
, la moyenne
nationale se situant à 684
par collégien du public et par an.
Une grande hétérogénéité caractérise les modalités d’intervention
des départements en faveur des collèges. Certains choix d’int
ervention
reposent sur une obligation légale, comme la mise en accessibilité des
bâtiments, alors que d’autres relèvent d’une volonté locale propre allant au
-
delà des compétences règlementaires.
205
OFGL, Zoom sur les dépenses des départements sur la période 2015-2021.
206
Ces coûts moyens sont établis à partir des coûts constatés par opération, à la date de
mise en service, sans actualisation. Les opérations de maîtrise d'ouvrage publique
(MOP) sont généralement plus anciennes que les opérations partenariat public-privé
(PPP). Les dates de valeur sont donc assez différe
ntes, ce qui réduit d’autant la
différence de coût entre ces deux procédures.
Procédure
Coût moyen
HT
par collégien
Coût moyen
HT par m² de surface
de plancher
MOP
21 900
2 040
PPP
24 465
2 135
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RÉNOVATION ET L’ENTR
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ACTIONS DE L’ÉDUCATI
ON NATIONALE
ET DES DÉPARTEMENTS
349
II -
La co-construction du service public
à consolider
L'article L. 211-
1 du code l’éducation
207
ne réduit pas le «
service
public national
»
de l’éducation au seul ministère de l’éducation mais fixe
pour mission à l’État la répartition des moyens consacrés à l’éducation
«
afin d’assurer en particulier l’égalité d’accès au
service public
». Il lui
confie ainsi un rôle de régulateur à l’échelle nationale. Toutefois, cet
objectif de déploiement homogène du service public rencontre parfois des
limites, par exemple quant aux conditions d’accès aux ressources
numériques, liées à la complexité de son système de gouvernance.
L’état technique du parc des collèges, la sécurité, l’accessibilité, la
performance énergétique, mais aussi l’adaptation des bâtiments aux
pratiques pédagogiques, constituent autant d’enjeux communs à l’État et
aux départements. Ils sont cruciaux pour le bon fonctionnement du service
public de l’éducation.
Au-delà de la volonté de dialogue des acteurs, le processus de co-
construction des décisions sur des sujets relevant de compétences partagées
entre les départements, chargés des bâtiments, des équipements et des
services logistiques et l’État, responsable des enseignements, des
programmes scolaires et de la pédagogie, n’est à ce jour pas suffisamment
structuré. Le système éducatif français demeure en effet centralisé : 55,2 %
des décisions concernant le collège sont prises au niveau de l’État central,
contre 23,8 %
pour l’ensemble des pays de l’Organisation de coopération
et de développement économiques (OCDE), selon l’OCDE
208
.
207
A
ux termes de l’a
rticle L. 211-1 du code de l'éducation,
« l'éducation est un service
public national, dont l’organisation et le fonctionnement sont assurés par l’
État, sous
réserve des compétences attribuées par le présent code aux collectivités territoriales
pour les associer au développement de ce service public »
.
208
OCDE,
Perspectives des politiques de l’éducation –
France
, juin 2020. Seules 26 %
des décisions sont prises au niveau régional ou départemental pour le collège
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COUR DES COMPTES
350
Tableau n° 2 :
exemples de répartition des compétences
dans
l’éducation par
pays
Intervention sur
les bâtiments,
infrastructures
et équipements
(matériels
informatiques
et logiciels)
Gestion
&rémunération
des enseignants
Gestion &
rémunération
des agents
techniques
Acquisition du matériel
pédagogique
Établissement
des programmes
scolaires &
harmonisation
pédagogique
France
Collectivités
État
Collectivités
État dans le 2
nd
degré,
communes dans le premier
degré/apports volontaires des
collectivités dans les collèges
et lycées
État
Allemagne
Communes
Länder
(hors Bavière)
Communes
Communes
Länder
Suède
Communes
Communes
Communes
Communes
État
Angleterre
Autorité locale
(hors académies)
Autorité locale
(hors académies)
Autorité locale
(hors académies)
Autorité locale
(hors académies)
État
Source : Cour des comptes
Au niveau central, les réformes structurantes font l’objet d’échanges
avec les associations d’élus. Cependant ces concertations n’apparaissant
pas suffisamment adaptées aux modalités de mise en œuvre d’une action
publique plus décentralisée, une instance de dialogue entre le ministère de
l’éducation nationale et les collectivités territoriales a été mise en place.
Elle s’est réunie pour la première fois le 22 septembre 2022
209
.
A -
Une gouvernance à faire évoluer
1 -
Un pilotage central encore à construire
Plus de 40 ans après sa dernière contribution et la publication de
référentiels,
le ministère de l’éducation nationale a dressé le constat d’une
capacité inégale des territoires
210
à développer des projets adaptés et de la
209
Étaient rassemblés ce jour-là, autour du ministre, des représentants de Régions de
France, de l'Assemblée des départements de France et de l
’A
ssociation des maires de
France, mais aussi de France urbaine, de Villes de France,
de l’A
ssociation des petites
villes de France (APVF) et
de l’A
ssociation des maires ruraux de France (AMRF).
210
Cf. Olivier Klein, maire de Clichy-sous-Bois,
Favoriser la rénovation du patrimoine
scolaire des quartiers populaires pour créer une école moderne et attractive
, rapport
interministériel de mars 2017.
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LA CONSTRUCTION, LA
RÉNOVATION ET L’ENTR
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ON NATIONALE
ET DES DÉPARTEMENTS
351
nécessité d’une action plus co
hérente de sa part pour appuyer les
collectivités territoriales. Il a donc décidé de se doter, en 2019, d’une
cellule sur le bâti scolaire rattachée au secrétariat général, ayant vocation à
coordonner les actions du ministère autour de trois grands thèmes : le suivi
de l’état bâtimentaire des établissements, la prévention des risques et la
capacité de conseil auprès des collectivités maîtres d’ouvrage
Les réflexions préalables à cette démarche n’ont pas été partagées
avec les associations représentatives des collectivités territoriales. Les
travaux de la cellule sur le bâti scolaire s’appuient toutefois sur les résultats
d’une concertation lancée en février 2021
211
. Ils se traduisent notamment par
la mise à disposition de guides thématiques et de référentiels destinés aux
services de l’éducation nationale et aux collectivités territoriales
212
. La
cellule dispose de six équivalents temps plein et s’appuie également sur des
référents répartis dans toutes les académies, pour relayer les informations.
Alors que le ministère était resté en retrait sur le sujet du bâti scolaire
depuis les premières lois de décentralisation
213
, les représentants des
collectivités n’ont pas manqué de soulever des interrogations au sujet de
l’articulation des travaux de cette cellule avec
le principe constitutionnel
de libre administration des collectivités territoriales, déplorant des risques
d’empiétements sur leurs champs de compétences propres.
Au vu du surcroît de complexité que cette situation peut provoquer, se
pose en définitive la
question de la bonne articulation entre l’État et les
collectivités dans le champ des compétences décentralisées et de la nécessité
de coordonner des acteurs publics dont les objectifs peuvent éventuellement
diverger. Il y aurait un intérêt à formaliser davantage les modalités de cette
articulation et à faire en sorte que l’État, désormais stratège en tant que garant
ultime de l’intérêt général, garantisse, par son intervention, le
déploiement
homogène du service public national de l’éducation.
211
Les trois associations représentatives des collectivités locales chargées de cette
compétence ont demandé à être associées à la consolidation des résultats de cette
enquête et réclamé davantage de visibilité sur les besoins de l
’é
ducation nationale en
termes d
apprentissage sur le temps d
enseignement afin de définir la faisabilité
technique et financière des futurs programmes d
investissement.
212
Guide
Bâtir le collège
à disposition sur le site « Bâti scolaire » du ministère de
l’
éducation nationale.
213
Dans son rapport précité de février 1995, la Cour observait que la suppression de tout
service technique au 1
er
janvier 1990 ne permettait plus au ministère de disposer d
une vision
cohérente du patrimoine scolaire et donc de suivre son état physique.
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COUR DES COMPTES
352
2 -
Une proximité avec les services déconcentrés du ministère
de
l’éducation nationale variable d’un territoire à l’autre
En matière patrimoniale, les relations entre les départements et
l’administration déconcentrée du ministère se situent le plus souvent au
niveau du di
recteur académique des services de l’éducation nationale
(DASEN).
Des temps d’échanges sont souvent organisés en sus des
instances prévues par le code de l’éducation
214
. Cependant, la qualité et la
fréquence de tels échanges relèvent davantage de pratiques individuelles que
de circuits administratifs formalisés, ce qui laisse place à des modalités de
gouvernance très variables d’un territoire à l’autre, révélatrices d’une
structuration insuffisante du pilotage local. L’absence d’indicateurs de
performance com
muns permettant d’évaluer conjointement la politique
éducative portée par chacun des acteurs en est une illustration.
Les départements indiquent également entretenir de bonnes relations,
bien que
de nature et d’intensité
variables, avec les établissements publics
locaux d'enseignement (EPLE). Ces relations s’organisent à deux niveaux
:
des échanges directs sur des questions du quotidien et des échanges plus
formels dans le cadre d’instances partenariales rassemblant les personnels de
direction de l’ensem
ble des EPLE du territoire.
Un interlocuteur unique pour les collèges dans l’Allier
Dans les services du département de l’Allier, trois directions
travaillent avec les collèges : la direction des services et usages numériques
(DSUN), la direction des bâtiments et de la logistique (DBL) et la direction
de la jeunesse et de l’éducation (DEJ), chargée d’assurer l’interface avec les
collèges. La DEJ est quotidiennement en contact avec les principaux et leurs
adjoints gestionnaires. Un interlocuteur unique y est identifié pour assurer
les relations avec chaque établissement sur les différentes thématiques
(ressources humaines, numérique, finances ou encore restauration).
Des
élus
départementaux
sont
membres
des
conseils
d’administration des collèges. Leur participation varie d’un établissement
à l’autre, mais ces conseillers départementaux apparaissent comme les
relais obligés des demandes formulées par le collège, surtout lorsque celui-
ci rencontre des difficultés (quartier défavorisé, territoire rural).
214
Deux instances de consultation existent
à l’échelon
local : les conseils académiques
de l’éducation nationale (CAEN) et les conseils départementaux de l’éducation
nationale (CDEN). D
’autres instances de dialogue existent sur des périmètres restreints,
comme les comités départementaux de l’école inclusive (CDEI).
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RÉNOVATION ET L’ENTR
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ET DES DÉPARTEMENTS
353
3 -
Une nécessaire refonte des modalités de pilotage des EPLE
Au quotidien, les EPLE sont soumis à une double relation :
hiérarchique du côté des services de l’État et fonctionnelle en lien avec les
services départementaux.
Fonctionnaires de l’État, les adjoints
-gestionnaires
215
occupent des
fonctions d’encadrants fonctionnels des adjoints techniques territoriaux des
établissements d’enseignement (ATTEE)
216
. Placés sous l’autorité du
principal, ils sont identifiés comme les interlocuteurs des départements sur
des sujets comme les travaux, la gestion des ressources humaines et la
gestion budgétaire. La loi dite « 3DS » du 21 février 2022 a fait évoluer leur
position et les place dorénavant sous l’autorité fonctionnelle de la collectivité
territoriale quand ils agissent dans les domaines de compétence du
département, à savoir la restauration, l’entretien général et la maintenance
des infrastructures et équipements des collèges.
À leurs côtés, les équipes de direction des collèges ont la charge
d’assurer le pilotage de leur é
tablissement. Les outils à leur disposition
217
ne sont toutefois que rarement coconstruits avec les départements. Ainsi,
lorsqu’ils existent, les contrats d’objectifs ne concrétisent le travail en
commun de l’EPLE, des services académiques et de la collectiv
ité que dans
une minorité de départements
218
.
Afin d’introduire un véritable processus de complémentarité entre
les différents acteurs, les modalités de gestion, de dialogue et de pilotage
doivent évoluer, pour assurer davantage de proximité et de souplesse avec
les départements. Cela passe notamment par leur intégration plus forte au
dialogue de gestion mené par les services académiques
219
, mais aussi par
215
Le chef d’établissement est secondé par un adjoint gestionnaire pour les tâches de
gestion matérielle, financière et administrative.
216
Ex TOS (personnels techniciens, ouvriers et de service), les ATTEE sont chargés des tâches
nécessaires au fonctionnement des services matériels des établissements d’enseignement,
principalement dans les domaines de l’accueil, de l’hébergement, de l’hygiène, de la
maintenance mobilière et immobilière, de l’entretien des espaces verts et de la restauration.
217
Le pilotage d’un EPLE se matérialise par plusieurs outils
: projet d’établissement,
démarche d’évaluation de l’EPLE, contrat d’objectifs
et dialogue de gestion.
218
Lorsqu’un contrat existe, il n’est en effet signé par la collectivité que dans 40
% des
cas
, selon le sondage réalisé par la Cour des comptes auprès d’un panel de chefs
d’établissement dans le cadre de son enquête intitulée «
Mobiliser la communauté
éducative autour de son projet d’établissement
».
219
Selon le même sondage, 100 % des départements ayant répondu disent souhaiter être
davantage associés au processus de contractualisation mené entre les services
académiques et les EPLE.
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354
la conclusion de pactes territoriaux pour le second degré entre l’éducation
nationale, les collèges et les départements
220
.
B -
La carte scolaire, un enjeu commun
d’aménagement
territorial et de mixité
1 -
Un instrument nécessairement concerté
Une enquête menée par le Sénat auprès des élus locaux et dévoilée le
26 janvier 2022
221
fait état des relations ambiguës que ceux-ci entretiennent
avec l'institution scolaire. S’ils jugent positivement le maillage scolaire,
49 %
d’entre eux estiment que l’établissement de la carte scolaire reste une
source de tension avec l’éducation nationale. Pourtant, l
a scolarisation des
collégiens est une compétence partagée par le département et par la direction
des services départementaux de l’Éducation nationale (
DSDEN)
222
et se
gère donc nécessairement en concertation.
La carte scolaire rattache chaque élève à un établissement public en
fon
ction de son lieu d’habitation. Les évolutions sociales et démographiques
à l’œuvre depuis une trentaine d’années impliquent une nouvelle approche
des processus de scolarisation. Quand le peuplement change, la carte scolaire
est naturellement appelée à évoluer.
Les espaces en croissance
démographique deviennent vite sous-équipés en établissements scolaires
tandis que ceux en déprise sont confrontés au phénomène inverse.
Pour les collèges, cette compétence de sectorisation n’a été
transférée aux département
s qu’à l’occasion de
«
l’acte 2
» de la
décentralisation en 2004. Les départements déterminent la localisation des
établissements et leur secteur de recrutement, tandis que les informations
sur les caractéristiques socio-
économiques et le pouvoir d’affecta
tion des
élèves sont détenus par les inspecteurs d’académie. L’efficacité d’un tel
partage des compétences repose dès lors sur un «
pari hasardeux
»
223
, à
220
Ces contrats identifieraient l’ensemble des ressources mobilisées et fixeraient, à partir
d’un diagnostic partagé, les objectifs à atteindre pour contribuer à la réussite des élèves.
221
À l’occasion d'une Agora de l’éducation organisée sur le thème
« Ref
onder l’école
de demain »
.
222 La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a confié
au département le soin de définir les secteurs géographiques de recrutement des collèges
publics ; toutefois, le directeur académique des services de l
éducation nationale (DASEN)
procède à l’affectation des élèves et décide d’éventuelles dérogations aux secteurs scolaires.
223
Catherine Agulhon et Joao Palma,
Sectorisation et assouplissement de la carte
scolaire. Des actions segmentées et contradictoires
, Éducation & formations, juin 2013.
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RÉNOVATION ET L’ENTR
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ET DES DÉPARTEMENTS
355
savoir la capacité des deux institutions à partager des informations et, plus
globalement, à travailler ensemble.
L’ouverture et la fermeture des collèges
Dans le cadre du partage des compétences organisé par la loi,
l’ouverture ou la fermeture d’un collège ne peut être décidée qu’au terme
d’une procédure complexe, qui fait intervenir, d’une part, le représ
entant de
l’État et, de l’autre, les organes compétents du département (art. L. 421
-1
du code de l’éducation)
224
. Ces mesures relèvent ainsi d’une codécision. Le
Conseil d’État a en effet jugé, dans une décision du 18 juillet 2018
225
, que
la décision de ferm
eture d’un collège ne saurait intervenir qu’au terme d’une
procédure permettant de recueillir l’accord tant du représentant de l’État que
des organes compétents du département concerné.
L’ouverture ou la fermeture d’une classe, dès lors qu’elle n’entraîne
pas la création ni la suppression d’un établissement, relève quant à elle du
recteur de l’académie.
2 -
L’impact des procédures d’affectation sur la mixité sociale
et scolaire des collèges
Pour autant, à l’échelle locale, la carte scolaire représente un
véritable levier pour impulser des dynamiques nouvelles en matière
d’aménagement territorial et de mixité au collège. La décision de créer ou
de fermer des établissements scolaires constitue, de toute évidence, un
choix de politique publique éminemment stratégique, non seulement en
termes d’aménagement du territoire mais aussi en termes de promotion de
la mixité sociale.
Peu de départements en déprise démographique se sont saisis de la
compétence de sectorisation pour modifier la carte d’implantation de leurs
co
llèges et fermer des établissements, à l’exemple des départements de la
Mayenne ou de l’Allier, et plus particulièrement de l’agglomération de
Montluçon, dont les taux d’occupation des collèges apparaissent
significativement inférieurs à la moyenne nationale.
224
Article L. 421-
1 du code de l’éducation
: «
Les collèges […] sont des établissements
publics locaux d
’enseignement. […]. Ces établissements sont créés par arrêté du
représentant de l
État sur propositi
on […] du département […]
».
225
Conseil d'État, 18 juillet 2018, req. n° 420047.
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COUR DES COMPTES
356
De même, une enquête de l’inspection générale de l’administration de
l’éducation nationale, menée auprès des collèges du département de la
Somme, a permis de démontrer au regard des effectifs et de leur évolution
qu’un collège pourrait être fermé. Cepe
ndant, soucieux de préserver un
maillage territorial de proximité, le président de la collectivité n’a pas
entériné de fermeture de collège.
Dans de telles circonstances, l’élaboration de conventions ruralité,
favorisée par le ministère, peut apparaître comme un levier de réflexion partagée
sur le bon maillage territorial dans un contexte de baisse démographique.
Les travaux du Centre
national d’étude des systèmes scolaires
(CNESCO)
226
montrent que la ségrégation sociale et scolaire
227
dès le
collège varie de 2 % à 27 % selon les départements
228
.
Pour remédier à cette ségrégation, la loi du 8 juillet 2013
d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la
République a confié une nouvelle mission au service public de l’éducation
:
celle de veiller à la mixité sociale des publics scolarisés dans les
établissements d’enseignement.
Le programme mixité dans le département
de la Haute-Garonne
Le conseil départemental de la Haute-Garonne a engagé en 2017 un
programme visant à favoriser la mixité sociale dans les collèges de
l’agglomération toulousaine. Les élèves de CM2 relevant des secteurs de
deux collèges du quartier du Mirail classés en REP + ont progressivement
été affectés à leur entrée en 6
ème
dans 11 établissements plus favorisés de
l’aggloméra
tion. La décision a été prise de fermer le collège Raymond
Badiou à la rentrée 2020 et le collège Bellefontaine à la rentrée 2022. En
parallèle, deux nouveaux collèges (Saint-Simon et Guilhermy) ont ouvert
en septembre 2022 dans des secteurs socialement mixtes, afin de permettre
un équilibre social dans les futurs effectifs.
226
CNESCO, Étude Ly-Riegert,
Mixité sociale et scolaire, ségrégation inter et intra
établissement dans les collèges et lycées français
, juin 2015.
227 La ségrégation sociale mesure les différences entre les catégories socio-professionnelles
des familles au sein d’un établis
sement. La ségrégation scolaire mesure les différences de
niveaux des élèves en fonction des notes obtenues au diplôme national du brevet.
228 Les territoires où la ségrégation est plus faible sont des départements fortement ruraux
(Lozère, Ariège, Lot, Aude) tandis que les départements ayant la plus forte ségrégation sociale
sont essentiellement des départements urbains (les Hauts-de-Seine et Paris se dégagent nettement).
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LA CONSTRUCTION, LA
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ETIEN DES COLLÈGES :
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ON NATIONALE
ET DES DÉPARTEMENTS
357
Au total, en complément des moyens humains également déployés
par le ministère de l’éducation nationale, le département a consacré 56
M€
à ce dispositif, dont 0,9
M€
par an en mesure
s d’accompagnement.
Les premières évaluations du dispositif en soulignent les effets
positifs sur les résultats des élèves
229
.
La prévision et l’accompagnement des évolutions démographiques
revêtent une grande importance pour éviter que des situations marquées de
fortes ségrégations scolaires et sociales ne persistent et n’impactent la
construction du choix d’un parcours de formation. L’offre disponible sur
un territoire conditionne en effet très fortement les choix d’orientation
scolaire des élèves et de leur famille, qui privilégient le plus souvent la
proximité géographique
230
. Or, nombre de départements hésitent à prendre
des décisions aussi lourdes de conséquences.
Dans leur rapport sur l’assouplissement de la carte scolaire remis en
2013
231
, avant que l’ob
jectif de mixité sociale ne soit inscrit dans le code
de l’éducation, les inspections générales de l’éducation nationale relevaient
que «
sur le terrain
[le concept de mixité sociale]
n’était qu’une référence
aléatoire de l’action des représentants de l’ad
ministration déconcentrée de
l’État,
des chefs d’établissement, et des conseils généraux
: presque toujours
cité dans le discours mais rarement moteur de l’action des uns et des autres
»
.
Près d’une dizaine d’années plus tard, le constat demeure. Malgré
s
on inscription dans le code de l’éducation, l’objectif de mixité sociale
demande toujours à être rendu opérationnel.
229
Selon un bilan du dispositif mixité sociale présenté le 6 octobre 2021, 63 % des élèves de la
première promotion du collège Badiou à Toulouse à avoir bénéficié du dispositif de mixité
sociale ont obtenu le diplôme national du brevet (DNB) (contre 50 % auparavant) et un tiers a
eu plus de 12 (contre 4,6 % dans les précédentes promotions de collégiens de cet établissement).
230
Cour des comptes,
L’orientation à la fin du collège
: la diversité des destins scolaires selon
les académies
, communication à la commission des finances de l’Assemblée nationale,
septembre 2012.
231
Inspection générale de
l’
éducation nationale (IGEN)/Inspection générale de
l’administration de l’
éducation nationale et de la recherche (IGAENR),
Conséquences
des mesures d’assouplissement de la carte scolaire après 2007
, juin 2013.
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COUR DES COMPTES
358
C -
Des dimensions du service public à améliorer
1 -
Un déploiement encore très inégal du service public
du numérique éducatif
La loi du 8 juillet
2013 d’orientation et de programmation pour la
refondation de l'école de la République a créé un nouveau service public, celui
du numérique éducatif. Elle s’est attelée à préciser les modalités de prise en
charge de ses dépenses : si les ressources numériques «
spécifiquement
conçues pour un usage pédagogique »
sont à la charge de l’État, la
maintenance est du ressort des collectivités compétentes (art. L. 211-8). Parmi
celles-
ci, l’effort cumulé des départements a mobilisé 860
M€
entre 2013 et
2017, la dépense moyenne par collégien s’établissant à 77
.
Dans son rapport sur le numérique éducatif
232
, la Cour a mis en évidence
des écarts majeurs dans l’engagement des collectivités. Malgré des efforts
financiers conséquents, le dépl
oiement de ce service public s’est opéré de façon
très inégale sur le territoire. Depuis lors, en réponse aux recommandations de la
Cour, un référentiel du socle d’équipement numérique de base pour les collèges
a été élaboré et diffusé par le ministère. Cette démarche globale combine la prise
en compte de l’ensemble des éléments concourant à la qualité du service public,
à savoir les infrastructures et les équipements, qui relèvent de la compétence
des collectivités, ainsi que la mise à disposition des ressources éducatives et la
formation des enseignants, qui incombent à l’État.
2 -
Santé et sécurité des élèves :
créer des conditions d’accueil
plus favorables
Pour créer les conditions les plus favorables au bien-être et à la santé
des élèves, ainsi qu’à
leur réussite scolaire, la question de la sécurité au
sein et aux alentours du collège comme celle de l’état des sanitaires sont
loin d’être anodines
: elles sont posées tant par les élèves eux-mêmes que
par les enseignants. Dans ce domaine, la responsabilité es
t à l’évidence
collective car pour améliorer la situation, la démarche d’éducation doit
accompagner la rénovation matérielle, la garantie de la sécurité et la
propreté des sanitaires.
232
Cour des comptes,
Le service public du numér
ique pour l’éducation
: un concept
sans stratégie, un déploiement inachevé
, rapport public thématique, juillet 2019.
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359
a)
La question non résolue des sanitaires
L’état des toilettes est révélateur de l’ambiance d’un collège. C’est
également un élément influant sur le climat scolaire.
De nombreux départements ont déjà agi pour améliorer les sanitaires,
tant l’état globalement très dégradé des toilettes dans les collèges est une
situation connue. Ce problème chronique a en effet été soulevé dans de
nombreux rapports publics
233
.
En 2013, une enquête menée par l’Observatoire
national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement a
ainsi relevé que 34 % des collégiens renonçaient à utiliser les toilettes, 23 % des
élèves se plaignaient de la propreté des sanitaires, 12 % dénonçant le non-
respect de l’intimité et 19
% relevant un matériel fortement dégradé.
Conscients de ce problème, les départements tentent d’y apporter des
réponses par différents biais : groupes de travail, projets collaboratifs et
autres formes de réflexion sur la question. Quarante-deux départements
consultés par l
’Assemblée des départements de France (
ADF) dans le cadre
de son « enquête Collèges 2020/2021 » se sont engagés dans des travaux liés
à l’amélioration ou la création de sanitaires. Le département de la Mayenne
a ainsi installé des portes vitrées à l’entrée de sanitaires pour améliorer la
sécurité des usagers.
« Les sanitaires du futur » : un projet innovant au collège Fabien à
Saint-Denis (93)
Face aux dégradations répétées des sanitaires du collège, entraînant
des coûts de maintenance très importants, le département de la Seine-Saint-
Denis a mené un projet-pilote de rénovation au collège Fabien à Saint-Denis.
Afin d’enrayer ce phénomène et d’améliorer le niveau de sécurité et
de confort des lieux, un travail participatif a été mené, incluant les élèves,
les équipes éducatives et les équipes techniques. Afin de renforcer le
sentiment d’appropriation de
cet espace par les élèves, ils ont été sollicités
pour aménager les lieux et les rendre plus agréables à fréquenter
(décoration, installation de miroirs et poubelles, installation de haut-parleurs
diffusant des messages de sensibilisation ou un programme musical).
Toutefois, aucune norme officielle n’existe en la matière. Le guide
«
Bâtir l’École –
Collège », diffusé début 2022 par le ministère, se limite à
préconiser un nombre cible minimal de blocs sanitaires, laissant chaque
collectivité libre d’adapter
l’aménagement de ces espaces. Cette absence
233
Cf., à titre l’illustration, le rapport du Conseil de l’enfance et de l’adolescence du
28 mai 2021 consacré à la traversée adolescente des années collège ; Assemblée
nationale, rapport d’information de février 2020 sur les menstruations.
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COUR DES COMPTES
360
de réglementation peut surprendre alors qu’elle existe pour le milieu
professionnel par le biais de dispositions figurant dans le code du travail.
b)
L’enjeu de la sécurisation et de l’accessibilité des bâtiments
Comme tous les établissements recevant du public (ERP), les EPLE
doivent obéir à des normes d’accessibilité. Face aux difficultés rencontrées
pour atteindre l’objectif dans les délais fixés, le législateur a décidé en 2014
d’allonger le délai de mise en a
ccessibilité des ERP en rendant obligatoire
l’élaboration d’un agenda d’accessibilité programmée (ADAP), désormais
inclus dans les projets d’investissement des départements.
Même si certains départements atteindront prochainement l’objectif
d’une mise en
accessibilité de l’ensemble de leurs collèges, cette
problématique semble prise en compte de manière inégale d’un territoire à
l’autre. Selon l’Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des
établissements d’enseignement, seuls 26,2
% des établissements du second
degré disposaient, en 2018, d’un
«
registre public d’accessibilité
», rendu
pourtant obligatoire par un décret du 28 mars 2017.
Dans le domaine de la sécurité, une étude sur le ressenti des collégiens
vis-à-
vis des bâtiments qu’ils
fréquentent montrait en 2017 que ceux-ci
procèdent à une distinction des espaces scolaires selon qu’ils les considèrent
« sûrs » ou « dangereux »
. Ils ressentiraient ainsi de l’insécurité dans les
espaces du dehors (devant le collège et l’arrêt de bus), les espaces d’intimité
(toilettes et vestiaires), les espaces de circulation (escaliers et couloirs) et
enfin l’espace de détente (cour de récréation). Ces lieux théoriquement
surveillés restent donc considérés comme moins sécurisants.
Les travaux de sécurisation réalisés par le département de la Mayenne
Le département de la Mayenne a financé l’installation de sonneries
différenciées (lancement d’alertes, gestion des emplois du temps, diffusion
d’informations) dans chaque collège pour un montant total de 47
3 000
. Il
a également réalisé des travaux de sécurisation périmétrique (portails
automatisés, clôtures complétées, contrôle des visiteurs et pilotage des
ouvertures à distance) d’un montant total de 1
M€
environ sur la période
2016-2021
234
.
En matière de s
écurisation, l’action des départements passe
principalement par la pose de clôtures, la maintenance des portails
234
Ces travaux ont fait l’objet d’une participation du Fonds interministériel de
prévention de la délinquance (FIPD) à hauteur de 80 542
sur la période 2016-2020.
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361
motorisés et le déploiement de dispositifs de contrôle d’accès et de
vidéoprotection. En parallèle, des obligations pèsent sur chaque EPLE
prév
oyant notamment l’élaboration d’un plan particulier de mise en sûreté
face aux risques majeurs (PPMS)
235
. Les textes correspondants ne
réservent cependant pas de place particulière aux collectivités territoriales,
alors même qu’elles sont compétentes en mati
ère de patrimoine scolaire et
par ailleurs employeurs d’une partie du personnel présent dans
l’établissement
. Selon le ministère, une refonte du cadre applicable à
l’élaboration des PPMS, prévoyant l’association systématique des
collectivités, devait êt
re engagée avant la fin de l’année 2022.
III -
Une nécessaire adaptation aux besoins
du
service public de l’éducation du XXI
e
siècle
Aucun des textes législatifs récents en matière éducative ne fait
référence à l’architecture scolaire, alors que l’explosion des
technologies,
la crise sanitaire ou le changement climatique révèlent l’inadaptation de la
plupart des établissements pour répondre à ces défis. La dernière loi ayant
abordé cette question est la loi du 11 juillet 1975 relative à l’éducation, dite
« loi Haby ».
Pourtant, une conception nouvelle de ce que doit être un EPLE
émerge peu à peu. Les impacts de l’architecture et de l’aménagement sur
la qualité de vie et le bien-être des élèves sont maintenant reconnus. La
communauté éducative est aussi à l’origine d’exigences nouvelles
repensant une organisation spatiale propice à un climat scolaire apaisé et à
de nouvelles pratiques pédagogiques.
Bien des départements ont développé une réflexion volontariste en
la matière, en demandant parfois au ministère de s’y
associer. Ils se
heurtent toutefois à de nombreuses contraintes financières, techniques,
voire culturelles, qui ralentissent ces adaptations.
235
Depuis l
instruction interministérielle du 13 avril 2017, deux PPMS doivent être élaborés :
le PPMS « risques majeurs » et le PPMS « attentat/intrusion ». Au moins trois exercices de
simulation doivent être réalisés chaque année,
dont au moins un exercice PPMS attentat/intrusion.
Des exercices spécifiques de sécurité incendie doivent être organisés par ailleurs.
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COUR DES COMPTES
362
A -
L’incontournable prise en compte des enjeux
environnementaux et de gestion de crise sanitaire
1 -
L’intégration prog
ressive des normes environnementales
et la lutte contre les épisodes caniculaires
Les préoccupations liées au développement durable ont d’abord
conduit les départements à privilégier les travaux visant à diminuer la
consommation énergétique des collèges. La hausse actuelle du coût de
l’énergie a rendu leurs efforts en ce sens indispensables. Les départements
sont également confrontés au défi d’orienter davantage leurs actions en
faveur de projets visant à augmenter la performance environnementale des
bâtiments scolaires et à prendre en compte le changement climatique dans
l’entretien de leur patrimoine.
Le report de quelques jours de l’épreuve du brevet des collèges en juin
2019, en raison de la canicule, ou plus récemment la fermeture
d’établissements
à l
a suite d’
épisodes de forte chaleur de juin 2022, ont en effet
révélé le caractère inadapté de certains établissements pour faire face à de tels
épisodes climatiques. Les collectivités situées dans les zones les plus exposées
sont aujourd’hui contraintes d
e trouver rapidement des solutions efficaces
permettant aux EPLE de rester ouverts lors des épisodes de forte chaleur.
Pour répondre aux nouvelles normes environnementales
236
, les
départements intègrent progressivement ces enjeux à leur programme
d’investi
ssement.
Plusieurs
stratégies
peuvent
être
distinguées
237
.
Certaines collectivités privilégient les projets mettant l’accent sur la bonne
gestion des équipements et une attention accrue aux comportements
d’usage. Ces préoccupations ont conduit le département
de la Mayenne à
installer des capteurs dans plusieurs salles témoins au sein des EPLE afin
de suivre les consommations pour mieux les adapter en fonction du taux
d’occupation des locaux. D’autres départements se sont engagés dans
des
projets plus ambitieu
x impliquant des investissements d’ampleur
:
236
Ces obligations couvrent notamment la nécessité de connaître les consommations et
émissions de CO
2
. À partir du 1
er
juillet 2022, tout projet de construction de bâtiment
d
enseignement
primaire
et
secondaire
doit
répondre
à
la
réglementation
environnementale RE2020 avec le triple objectif de diminuer l’impact carbone des
bâtiments, poursuivre l’amélioration de leur performance énergétiq
ue et en garantir la
fraîcheur pendant les étés caniculaires.
237
Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies,
Rapport sur la rénovation énergétique des bâtiments scolaires
, février 2020.
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363
changement de moyen de chauffage, isolation des façades, restructuration
lourde du bâtiment, etc. Ces différentes orientations peuvent faire l’objet
d’une formalisation sous la forme de référentiels
-types
Le référentiel environnemental pour les collèges de la Seine-Saint-Denis
Le
programme-type
départemental
pour
la
construction,
la
reconstruction ou la rénovation des collèges de Seine-Saint-Denis contient
une série d’engagements, avec pour objectif d’assurer
des travaux de
construction et de rénovation durables pour les collèges. Sont ainsi
répertoriés :
l’utilisation raisonnée de l’énergie et des ressources naturelles
en eau, la limitation des pollutions, la lutte contre le changement climatique
et la prise en compte de la nature et de la biodiversité par une végétalisation
plus importante des espaces.
Des installations complémentaires sont également mises en place afin de
lutter contre les épisodes caniculaires : aménagement de « cours oasis »,
déploiement de revêtements de sol
avec un coefficient d’absorption élev
é afin de
lutter contre les îlots de chaleur, végétalisation des toitures et des pourtours, etc.
L’intégration de ces normes environnementales se fait de manière
progressive et inégale d’un territoire à l’autre. Le ministère de l’éducation
nationale ne dispose pas d’un diagnostic consolidé au niveau national, mais
estime à environ 20 %
la part du parc de l’enseignement secondaire rénové
de façon assez performante.
Les adaptations nécessaires sont coûteuses et parfois difficiles à
mettre en place, notamment au sein des bâtiments anciens, comme l’illustre
le cas du collège Jacques Monod à Compiègne. Même s’il n’est pas
possible d’en déterminer le montant exact, la part des concours financiers
de l’Éta
t visant la performance énergétique reste encore marginale
238
.
L’efficacité
énergétique
et
les
avantages
accessoires
que
les
investissements devraient procurer (amélioration de la santé, lutte contre le
changement climatique, réduction des factures d’énergie
et de la pollution
atmosphérique, etc.) n’apparaissent pas comme des facteurs déterminants
lors de l’affectation des fonds à des projets d’investissement concernant les
collèges. Pourtant, le Conseil général de l’économie, de l’industrie, de
l’énergie et
des technologies a estimé à environ 40
Md€ le montant des
238
«
Les concours financiers de l’État souffrent d’un rapportage imprécis sur la
thématique particulière de la rénovation énergétique des bâtiments scolaires, qui
mériterait d’être affiné […]
»
, Rapport du Conseil général de l’économie, de l’industrie,
de l’énergie et des technologies
, février 2020.
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364
dépenses à réaliser avant 2030 pour atteindre l’objectif de réduction de
40 %
de la consommation d’énergie finale inscrit dans le décret tertiaire
239
,
sans obérer les besoins de constructions nouvelles et de restructurations
importantes de bâtiments vétustes ou obsolescents.
2 -
La ventilation des espaces et la circulation des usagers,
des points de faiblesse identifiés
La crise sanitaire a également fait ressortir les limites bâtimentaires
des collèges
. En sus du manque de points d’eau, de l’inadaptation des
réfectoires aux mesures de distanciation sociale, la gestion des espaces et
de la circulation des usagers s’est parfois révélée problématique. Les chefs
d’établissement
240
se sont parfois heurtés à des difficultés structurelles
empêchant une réelle ventilation des espaces. Le besoin d’équipement en
capteurs de CO
2
a par ailleurs été régulièrement évoqué à cette occasion,
mettant en lumière des frontières de partage des responsabilités parfois
floues en
tre les collectivités territoriales et l’État.
La crise sanitaire a aussi pu révéler un manque de dialogue des services
de l’État avec les gestionnaires du bâti scolaire, la communauté éducative et
les usagers, notamment au moment de l’élaboration des prot
ocoles. Les
établissements se sont parfois trouvés dans des situations complexes, devant
faire face à des recommandations difficiles
à mettre en œuvre (ouverture des
fenêtres alors que de nombreux bâtiments sont équipés de fenêtres scellées ou
respect des distanciations sociales dans des espaces contraints). Certains
établissements ont dû revoir à la baisse la jauge des collégiens accueillis, ce
qui, de fait, a altéré la qualité de la continuité pédagogique.
Ces limites ont conduit certains départements à réexaminer leurs
plans de rénovation et de construction des collèges.
239
Le décret n° 2019-
771 du 23 juillet 2019 pris pour l’application de l’article 175 de la loi
du 23
novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique,
dite « loi ELAN
», impose aux propriétaires et locataires d’un éta
blissement abritant des
activités tertiaires du secteur public ou du secteur privé, de réduire leurs consommations
d’énergie sur l’ensemble de leur parc. Les bâtiments de plus de 1
000 m
2
sont désormais
soumis à ce texte, dit « décret tertiaire », qui fixe des obligations de réduction de la
consommation d’énergie finale de 40
% en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050.
240
Un guide élaboré par la cellule bâti scolaire du
ministère de l’
éducation nationale et de la
jeunesse (MENJ) et de la coordination interministérielle du plan de rénovation énergétique
des bâtiments a été publié pour aider les gestionnaires des équipements scolaires à améliorer
le confort thermique de ces bâtiments pendant les vagues de chaleur.
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365
B -
Le déploiement de bâtiments polyvalents
et au service du bien-être de tous
1 -
L’amélioration du climat scolaire et la prévention des violences
Enjeu essentiel en termes d’épanouissement des
collégiens mais
aussi de performance du système éducatif, la prévention des violences au
collège contribue à éviter une dégradation du climat scolaire. La recherche
scientifique, et notamment les enquêtes du programme international pour
le suivi des acqui
s des élèves (PISA) de l’OCDE, montrent qu’un climat
scolaire serein favorise la réussite des élèves, fait diminuer les problèmes
de décrochage professionnel des enseignants et a un impact sur le
décrochage et l’absentéisme
des élèves.
Des enquêtes de victimation et de climat scolaire sont régulièrement
menées par le ministère de l’éducation nationale. Il en ressort que les
locaux jouent un rôle très important dans la dégradation ou l’amélioration
de ce climat, les principaux facteurs de risque étant des locaux bruyants,
inconfortables, non différenciés, dégradés, sales ou encore inadaptés. Au
collège, dans un climat scolaire globalement serein, 25 % des élèves et 9 %
des enseignants
241
se sentent en insécurité aux abords mais beaucoup moins
dans l’enceinte
de l’établissement. L’implication des départements sur
cette question apparaît donc essentielle et peut permettre d’orienter des
aménagements ou réaménagements. Cela a notamment été le cas en
Mayenne, avec la réalisation de travaux au niveau de l’entrée d’un collège
de Laval dont les enquêtes avaient mis en évidence le caractère anxiogène.
Pour autant, le ministère de l’éducation nationale ne dispose pas
d’élément pour établir un bilan du recours au fonds interministériel de
prévention de la délinquance (FIPD) pour les établissements scolaires.
2 -
La recherche de modularité dans les pratiques pédagogiques
Les nouvelles pratiques pédagogiques incitent à concevoir des salles
de cours dont la configuration permet à l’enseignant de dépasser le rapport
frontal à l’élève et d’accueillir des groupes d’élèves de tailles différentes
241
Insee Références
Édition 2021
Dossiers
Au collège, dans un climat scolaire
globalement serein...
, décembre 2021.
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366
(classe entière, travail en groupes et travail autonome). Les établissements
orientent donc leurs exigences vers davantage de modularité dans les
espaces afin de répondre au mieux aux besoins spécifiques de chaque élève.
Certains espaces, comme le hall d’accueil, le centre de documentation et
d’information (CDI) ou les espaces extérieurs peuvent alors être investis
sous forme de « tiers-lieux » ou lieux de vie pour les collégiens. Des
réflexions auxquelles la communauté éducative a été associée ont pu
conduire, dans certains collèges de l’Allier, à placer les CDI au rez
-de-
chaussée de l’établissement, et dans la mesure du possible à proximité des
salles d’études, afin de faciliter leur accès l
ors de la pause méridienne.
Un tiers-lieu au collège Lakanal à Foix
Le collège Lakanal à
Foix a équipé une ancienne salle d’étude avec du
mobilier modulable et des espaces hybrides, afin d’accueillir élèves et
enseignants en dehors des salles de classe. Ce tiers-lieu a vocation à évoluer et
à s’adapter aux besoins des usagers qui le font vivre
: cercles de lecture, théâtre,
relaxation, réalisation de petites vidéos ou prises de vues photographiques etc.
Ce lieu polyvalent et spacieux permet aux élèves d’éch
anger dans
différents espaces grâce à la modularité des équipements. Durant l’année
scolaire 2021/2022, une classe de troisième du collège a mené une réflexion
sur le thème de la liberté en lien avec les nouvelles technologies, et réalisé sur
un des murs de la salle une fresque monumentale, inaugurée le 28 juin 2022.
Cette réflexion sur les nouveaux usages peut aussi être l’occasion de
repenser les modalités de travail des enseignants au sein des
établissements. Dans les Landes, les salles de classe peuvent ainsi
communiquer pour favoriser l’intervention de plusieurs enseignants et le
mobilier présente des caractéristiques favorisant la modularité et le travail
collaboratif.
Le développement d’espaces de travail individuels (bureaux)
ou collectifs (salles de réunion) peut aussi permettre de favoriser la
concertation et le travail interdisciplinaire
242
.
242
Selon le sondage réalisé par la Cour en 2022 auprès 4
098 chefs d’établissement, 52
%
des collèges ne disposent pas d’espaces dédiés au travail collaboratif des enseignants.
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367
Un parangonnage des pratiques engagé en Seine-Saint-Denis
Le département a bénéficié d’un financement de la Banque de
Développement du Conseil de l’Europe (BDCE
) pour réaliser en 2019 une
étude
sur
la
conception
d’établissements
scolaires
et
d’espaces
d’apprentissage en Seine
-Saint-Denis, en association avec des experts
internationaux en architecture scolaire et recherche en éducation. Cette
étude a permis de mettre en perspective les atouts et les pistes
d’améliorations des pratiques du département comparativement à ce qui est
fait à l’étranger, en Finlande et en Italie notamment et certaines conclusions
ont intégré le programme type et le référentiel du département.
Afin d’être adaptés aux besoins, ces
outils sont souvent construits
en concertation avec tous les usagers, directs (collégiens, agents,
personnels de la communauté éducative) ou indirects (parents) des
collèges. Des spécialistes en ergonomie peuvent également être associés.
Dans l’Oise, une enquête annuelle est menée conjointement avec les
services départementaux pour recueillir les besoins.
Enfin, la crise sanitaire a accéléré le développement des pratiques
d’enseignement à distance. Afin d’assurer
une continuité pédagogique pour
les élèves, de nombreux départements ont ainsi mis en place une politique
d’équipement numérique des familles et d’accès à la connexion (mise à
disposition de clés 4G pour les élèves ou les enseignants, notamment). La
connexion
est
cruciale
pour
pouvoir
envisager
des
modalités
d’enseignement
« hors les murs », voire même des mutualisations de cours
entre plusieurs établissements, permettant d’assurer une offre de formation
(langues rares, etc.) plus importante ou de répondre, dans une certaine
mesure, aux problématiques de continuité du service public de l’éducation
dans des zones très rurales lorsqu’il n’y a pas de titulaires remplaçants.
Une
brigade de remplacement constituée de sept enseignants titulaires
n’exerçant qu’en v
isioconférence a ainsi été mise en place à la rentrée 2022
dans l’académie de Nancy
-Metz.
3 -
L’optimisation de l’usage des locaux des collèges
Par destination, les locaux scolaires sont utilisés pour les activités
d’enseignement 35 semaines par an, soit 67
% du temps. De plus, la baisse
des effectifs dans certaines zones conduit à un surdimensionnement de
certains locaux. Cette situation est coûteuse pour les départements, qui
financent un patrimoine en partie inoccupé. Elle prive également la
population d’
un accès à des équipements publics.
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368
Pour y remédier, le code de l’éducation permet aux départements
d’autoriser l’utilisation des locaux et les équipements des collèges pendant
les périodes au cours desquelles ils ne sont pas occupés
243
. Cette possibilité
est cependant peu exploitée, en raison à la fois de facteurs culturels et de freins
techniques, notamment quand les bâtiments ne disposent pas d’accès séparé.
En Moselle, la construction des nouveaux collèges prend désormais en compte
ces besoins de mutualisation, avec la création de salles polyvalentes dotées
d’un accès et de sanitaires séparés. En Meurthe
-et-Moselle, plusieurs collèges
ont ouvert des espace
s dotés d’équipements
numériques, animés par un
volontaire en service civique, en dehors du temps scolaire,
à d’autres
usagers tels que des associations et des maisons de retraite, afin de
permettre à un public plus large de bénéficier des équipements et
d’élargir
l’accès aux technologies de l’information et
la communication.
Les départements en situation de déprise démographique sont les plus
concernés par cette question. Ainsi, dans l’Allier, le département a été conduit,
dans un souci de maîtrise de ses charges de fonctionnement, à prendre certaines
mesures allant de la non-
utilisation d’étages entier
s de certains établissements
à la désaffectation de certains bâtiments situés dans l’emprise des collèges et
antérieurement réservés au service public de l’éducation.
Des initiatives de rapprochement avec le premier degré sont également
en cours d’expérim
entation. Ainsi, de nombreux collèges alliérois assurent la
préparation des repas pour des élèves du premier degré et deux collèges
accueillent des élèves de CM2 une fois par semaine. Une expérimentation
plus aboutie, visant à l’intégration de classes de
CM1 et CM2 au sein du
collège de Jaligny (Allier), est également en projet. Ces initiatives sont
toutefois confrontées à une complexité juridique importante, faute de statut
juridique support pour rapprocher écoles élémentaires et collèges
244
.
Une conception différente des établissements émerge peu à peu,
facilitant le travail des enseignants et les apprentissages des élèves, grâce à
une organisation spatiale repensée, facilitée lorsque les équipements
numériques sont de bon niveau. La lenteur du processus
d’évolution
témoigne cependant des résistances tant culturelles que juridiques qui
constituent autant de freins à la diffusion de ce concept nouveau.
243
Les activités des organismes qui en bénéficient doivent être compatibles avec la nature des
installations, l
aménagement des locaux et le fonctionnement normal du service. Ils doivent
également respecter les principes de neutralité et de laïcité.
244
La loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance
n’a finalement
pas retenu la proposition, formulée dans le cadre des travaux parlementaires, consistant
à créer une nouvelle catégorie d’EPLE (les
« établissements public locaux des savoirs
fondamentaux »
) spécialement destinée au rapprochement entre écoles élémentaires et
collèges (sur le territoire de recrutement d’un collège).
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369
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Depuis
la
décentralisation,
les
départements
ont
réalisé
d’importants effo
rts financiers pour rénover et améliorer les bâtiments
dévolus aux collèges et construire de nouveaux établissements. Les
investissements ainsi consentis, mais également l’efficacité d’une gestion
plus proche et mieux informée des besoins locaux, ont permi
s d’améliorer
sensiblement la qualité de leur installation immobilière par rapport à la
situation prévalant avant 1982.
Cependant, les modalités d’articulation entre l’action du ministère
de l’éducation nationale et celle des départements révèlent toujo
urs une
certaine complexité et montrent des limites. Les conditions de la gestion
actuelle devraient être améliorées dans le sens notamment d’une plus
grande prise en compte des différences de situation entre collectivités.
Tout en acceptant une certaine diversité des interventions des
départements, propre à la décentralisation, l'État doit rester garant, par
ses pouvoirs de régulation, du déploiement homogène d’un service public
national de l’éducation sur l’ensemble du territoire.
Dans ce contexte, la Cour formule les recommandations suivantes :
1.
assurer une concertation interministérielle réelle entre le secrétariat
général du ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse et le
ministère de l’intérieur et des outre
-mer (direction générale des
collec
tivités locales) relative à l’attribution des concours financiers en
faveur du bâti scolaire (ministère de l’éducation nationale et de la
jeunesse, ministère de l’intérieur et des outre
-mer [DGCL], ministère
de la transition écologique et de la cohésion des territoires) ;
2.
conditionner
le soutien financier de l’État aux projets d’investissement en
faveur des collèges permettant d’accroître l’efficacité énergétique et le
respect des normes environnementales (ministère de l’intérieur et des
outre-mer [DGCL], ministère de la transition écologique et de la
cohésion des territoires) ;
3.
renforcer la péréquation dans le calcul de la DDEC en faveur des
départements où les besoins sont les plus importants (ministère de
l’intérieur et des outre
-mer [DGCL], ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires) ;
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COUR DES COMPTES
370
4.
intégrer systématiquement des objectifs et des priorités relatifs aux
investissements immobiliers en faveur des collèges dans les contrats
tripartites entre établissements, académies et départements afin
d’améliorer l’articulation des politiques publiques entre le ministère
de l’éducation nationale et de la jeunesse et les départements
(ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse)
;
5.
associer systématiquement les départements à la conception ou la
révision des plans particuliers de mise en sécurité (PPMS) (ministère
de l’éducation nationale et de la jeunesse).
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Réponses
Réponse de la Première ministre
............................................................
373
Réponse du président du conseil départemental de l’Allier
....................
377
Réponse du président du conseil départemental de la Mayenne
.............
378
Réponse du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis
......
382
Réponse du président du conseil départemental de la Haute-Garonne ... 386
Réponse du président du conseil départemental de la Haute-Marne
......
390
Réponse de la présidente du conseil départemental de la Lozère
...........
391
Destinataires n’ayant pas d’observation
Madame la présidente du conseil départemental de l’Oise
Monsieur le président du conseil départemental des Ardennes
Madame la présidente du conseil départemental de Maine-et-Loire
Monsieur le président du conseil départemental de la Moselle
Monsieur le président du conseil départemental du Val-de-Marne
Destinataires n’ayant pas répondu
Monsieur le président du conseil départemental de la Vendée
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RÉPONSE DE LA PREMIÈRE MINISTRE
Vo
us m’avez adressé un
e insertion au rapport public annuel de la
Cour des comptes sur la construction, la rénovation et l’entretien des
collèges par les départements. Il appelle de ma part les réponses suivantes.
1-
Concernant les dotations d’investissement
gérées par la DGCL et
bénéficiant aux départements, en faveur de l’entretien et de la rénovation
des collèges et la concertation entre avec le ministère de l’éducation
nationale et de la jeunesse (recommandation n° 1) :
L’amélioration de la qualité et de l’accès aux services publics
scolaires est l’une des priorités de la dotation de soutien à l’investissement
des départements (DSID). La DSID concourt largement au soutien des
projets d’investissement en faveur des collèges, puisqu’en 2021 ceux
-ci
représentaient environ 37 %
de l’enveloppe nationale (212
M€
) et des
projets subventionnés.
Comme vous le soulignez, le plan de relance a permis l’ouverture
en 2021 de deux enveloppes supplémentaires, de DSIL et de DSID
respectivement dotées de 650 et 300
M€
, tournées vers la rénovation
énergétique. 357 projets soutenus par la DSID « rénovation thermique »
portaient sur la rénovation énergétique de collèges, soit 63 % des projets.
Pour la DSID, de même que pour la dotation de soutien à
l’investissement local (DSIL), la dotation d’équipement des territoires
ruraux (DETR) et la dotation politique de la ville (DPV), il est laissé, dans
le cadre des orientations législatives, une latitude nécessaire aux préfets
dans les choix des projets à soutenir, au regard des circonstances et priorités
locales ainsi que de la situation financière des collectivités concernées.
En cela, une phase de concertation, au niveau central et en amont de
l’attribution des subventions ne s’avère ni conforme aux règles encadrant
ces dotations, ni opérationnelle pour garantir une mise en œuvre
efficace et
rapide des crédits. En revanche, les préfets seront invités à communiquer la
liste des projets relatifs aux collèges retenus aux directeurs académiques des
services de l’éducation nationale, afin de mieux informer ceux
-ci des
subventions d’investissement attribuées par l’État.
2-
Concernant les accompagnements financiers de l’État pour l’efficacité
énergétique des collèges (recommandation n° 2) :
Les efforts déployés par l’État pour accompagner les départements
dans leur effort de rénovation des bâtiments sont très importants alors
même que la gestion de patrimoine immobilier fait désormais partie
intégrante des compétences dévolues aux départements, depuis le transfert
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374
en pleine propriété des établissements en application de la loi liberté et
responsabilités locales du 13 août 2004.
L’État a notamment mis en place
:
-
un soutien financier, à travers la DSIL et la DSIS, à hauteur d'environ
600
M€
chaque année depuis 2018. À l'occasion du Plan de Relance,
en 2021, ce sont près de 1,3
Md€, qui ont é
té consacrés à la rénovation
du patrimoine bâti des collectivités locales, dont les écoles, les collèges
et les lycées représentent près de la moitié. Ce montant exceptionnel a
notamment permis de financer plus de 5 900 projets de rénovation. Ce
programme de soutien se poursuit en 2022 et se renforcera en 2023
avec la mise en place d’un fonds vert dédié à la transition écologique
du patrimoine immobilier des collectivités territoriales ;
-
un
soutien
en
ingénierie
territoriale
et
des
dispositifs
d’accompagnement avec notamment l’appui de l’État à travers le
programme « CEE ACTEE »
. Ce programme déployé sur l’ensemble
du territoire vise à accélérer la rénovation énergétique du parc des
collectivités à travers l’apport de financement via des appels à
manifestat
ion d’intérêt pour le recrutement d’économes de flux ou
l’achat d’équipement de suivi de travaux de rénovation. La première
phase
du
programme
(ACTEE
1)
a
permis
de
mobiliser
12 500
communes et ACTEE 2 le prolonge aujourd’hui. En outre, des
organismes tels
que l’ADEME ou le CEREMA apportent leur soutien
pour accompagner les collectivités à travers la publication de guides
de méthode autour des stratégies et gestes pour agir efficacement sur
la performance énergétique et la gestion d’un parc immobilier.
Ces actions sont prioritaires dans un contexte de crise énergétique
et visent à accompagner les collectivités pour leur permettre d’atteindre
les objectifs du dispositif « Eco Energie Tertiaire » qui vise une réduction
des consommations énergétiques de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 %
en 2050 des bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m².
3-
S’agissant de la recommandation de la Cour visant à renforcer la
péréquation dans le calcul de la DDEC au profit des départements en forte
croissance démographique (recommandation n° 3) :
Si la répartition péréquée antérieure rencontrait l’acceptation
majoritaire des départements, principalement en raison du dynamisme
annuel de la DDEC, le dispositif n’en soulevait pas moins de nombreux
griefs (obsolescence des critères de répartition, faible évolution des
effectifs constatés, lourdeur et complexité du recueil des données, risque
contentieux) qui ont conduit à la réforme de 2008, décidée d’un commun
accord entre l’État et les départements.
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LA CONSTRUCTION, LA
RÉNOVATION ET L’ENTR
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ET DES DÉPARTEMENTS
375
La réforme de 2008 a donc permis de simplifier un dispositif jugé
complexe en offrant une plus grande simplicité et stabilité dans la
répartition des crédits. La part de chaque département a ainsi été
cristallisée en tenant compte de la recette péréquée perçue au cours des
dix dernières
années. Cette solution a également permis d’accroître la
prévisibilité budgétaire des crédits perçus par les départements.
Une nouvelle péréquation, à enveloppe globale constante,
conduirait inévitablement certains départements à constater une baisse de
leur dotation.
Plus généralement, la DDEC est un mécanisme visant à compenser
financièrement le transfert d’une compétence aux départements dont le
montant est à la fois garanti et fondé sur un coût historique, conformément
à l’article 72
-2 de la Constitut
ion. La DDEC n’a pas vocation à couvrir
l’intégralité des dépenses d’investissement des départements consacrés
pour les collèges qui sont, comme le montre la Cour des comptes dans son
rapport, largement couvertes par les autres recettes des collectivités.
4-
Concernant
la
recommandation
n° 4,
consistant
à
intégrer
systématiquement des objectifs et des priorités relatifs aux investissements
immobiliers en faveur des collèges dans les contrats tripartites entre
établissements, académies et départements afin
d’améliorer l’articulation
des politiques publiques entre le ministère de l’éducation nationale et de
la jeunesse et les départements :
Les réflexions préalables à la démarche du MENJ relative au bâti
scolaire ont été pleinement partagées avec les associat
ions d’élus.
En effet, le ministère a lancé sa démarche générale au mois de juillet
2019, et, dès septembre 2019, les associations d’élus ont été associées à
des échanges avec le MENJ. Entre septembre 2019 et juin 2022,
15
réunions d’échanges (bilatérales ou avec l’ensemble des associations)
se sont tenues avec elles.
Non seulement ce partage des réflexions a été accueilli
favorablement par les associations d’élus, mais près de 500 collectivités
ont sollicité directement l’expertise des services du ministèr
e pour les
accompagner ou simplement échanger afin de nourrir leurs réflexions et
leurs projets. Plusieurs centaines d’élus ont également contribué
directement à la concertation publique. Un réseau de référents « bâti
scolaire » est en cours de structuration dans les académies afin
d’accompagner les projets portés par les collectivités territoriales.
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376
Par ailleurs, une nouvelle instance de dialogue au niveau national
s’est réunie pour la première fois le 22 septembre 2022. Présidée au plus
haut niveau minist
ériel, elle a permis aux directions d’administration
centrale concernées de présenter aux associations d’élus les projets de
réforme ayant un impact direct sur les collectivités. Des groupes de travail
thématiques seront créés sur de nouvelles réformes ou sur des sujets
récurrents : simplification, orientation, numérique, bâti scolaire.
Le ministère a diffusé en juin 2022 un ensemble de guides « Bâtir
l’école
» pour un bâti scolaire plus adapté aux enjeux contemporains, dont
celui de la transition écologique.
Ces guides répondent à plusieurs autres enjeux évoqués dans le
rapport : santé et sécurité, sécurité, sanitaire, modularité, mutualisation
des équipements. Ils sont accessibles sur batiscolaire.education.gouv.fr.
Le contrat d’objectifs qui lie l’établissement et l’autorité académique
peut être élargi sous la forme d’un contrat tripartite à la collectivité de
rattachement. S’ils le souhaitent, les conseils départementaux pourraient
davantage se saisir de cette possibilité, notamment pour renforcer la
comp
lémentarité de leurs apports avec de ceux de l’État, dans le respect des
priorités propres à chaque collège.
5- Concernant la recommandation n° 5 visant à associer systématiquement
les départements à la conception ou la révision des plans particuliers de
mise en sécurité (PPMS) :
Le MENJ va refondre avant la fin de l’année 2022, en lien avec les
départements, le cadre applicable à l’élaboration des PPMS. Celui
-ci
précisera les modalités d’association des collectivités, qui sera systématique.
6- Enfin, conce
rnant l’une des remarques de la Cour invitant le MENJ à
rechercher plus de modularité dans les pratiques pédagogiques :
Cet objectif est précisément l’un des enjeux de la démarche
notre
école, faisons-
là ensemble, engagée sur l’ensemble du territoire natio
nal,
sur la base du volontariat des équipes pédagogiques de chaque école,
collège et lycée.
Il s’agit de permettre à chaque communauté éducative de s’emparer
des questions propres à son école ou établissement. Le périmètre des
échanges est donc laissé au libre choix des acteurs locaux sur tout ou
partie des trois dimensions structurantes de la politique éducative :
-
en premier lieu, la réussite de tous les élèves afin de déployer leurs
pleines potentialités ;
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LA CONSTRUCTION, LA
RÉNOVATION ET L’ENTR
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ON NATIONALE
ET DES DÉPARTEMENTS
377
-
en second lieu, la réduction des inégalités (continuum entre les
différents temps de l’enfant et activités proposées, mixité sociale et
scolaire, ouverture culturelle, aide à l’orientation, égalité filles
-
garçons, etc.) ;
-
enfin, le bien-être (santé des élèves, climat scolaire, lutte contre les
violences, transition écologique, inclusion de tous les élèves, relation
avec les parents, etc.), pour que chaque élève se sente accueilli,
encouragé dans ses efforts et ses réussites.
Cette démarche est l’occasion d’associer les collectivités en
général, et les départements en particulier pour les collèges, aux échanges.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL
DE L’ALLIER
Vous m'avez transmis par mail le chapitre relatif à la construction,
la rénovation et l'entretien des collèges par les départements, destiné à
figurer dans le rapport annuel 2023 de la Cour des comptes.
Le d
épartement de l'Allier va mettre en œuvre la fin du processus de
régularisation des transferts de propriété.
Sur les éléments conclusifs et les recommandations formulées,
assurer une concertation interministérielle réelle entre le secrétariat général
du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse et le ministère de
l'intérieur et des outre-mer (direction générale des collectivités locales)
relative à l'attribution des concours financiers en faveur du bâti scolaire
(ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, ministère de l'intérieur
et des outre-mer (DGCL), ministère de la transition écologique et de la
cohésion des territoires) est un point favorable.
Le conditionnement du soutien financier de l'État aux projets
d'investissement en faveur des collèges permettant d'accroitre l'efficacité
énergétique et le respect des normes environnementales (ministère de
l'intérieur et des outre-mer -DGCL, ministère de la transition écologique
et de la cohésion des territoires), ne devra pas se faire sans prendre en
compte le fait que des départements, comme le département de l'Allier, se
sont déjà emparés de la problématique et engagés dans le processus de
l'accroissement de l'efficacité énergétique. Les subventions et soutiens
financiers n'étant pas rétroactifs, il conviendrait que les acteurs
départementaux qui se sont emparés de la problématique et commencent à
la financer, ne soient pas lésés.
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378
Sur le renforcement de la péréquation dans le calcul de la DDEC
en faveur des départements où les besoins sont les plus importants
(ministère de l'intérieur et des outre-mer -DGCL, ministère de la transition
écologique et de la cohésion des territoires), il conviendra que les
départements dits en déprise démographique ne se retrouvent pas
défavorisés dans le renforcement de la péréquation dans le calcul de la
DDEC (dotation départementale de l'équipement des collèges) car ces
derniers ont un patrimoine à entretenir, un niveau de sécurité à avoir et un
maillage du territoire à maintenir sans pour autant négliger la
problématique de la carte scolaire.
En matière d'intégration systématique des objectifs et des priorités
relatifs aux investissements immobiliers en faveur des collèges dans les
contrats tripartites entre établissements, académies et départements afin
d'améliorer l'articulation des politiques publiques entre le ministère de
l'éducation nationale et de la jeunesse et les départements, il conviendra
de respecter le principe que les départements sont les financeurs des
investissements immobiliers des collèges. La concertation est plus que
souhaitable, mais la décision terminale sera aussi conditionnée par les
capacités budgétaires des départements qui voient de plus en plus leur
budget contraint.
L'association systématique des départements à la conception ou la
révision des plans particuliers de mise en sécurité (PPMS) (ministère de
l'éducation nationale et de la jeunesse) est un point positif.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL
DE LA MAYENNE
Vous avez bien voulu me transmettre un chapitre dédié à la
construction, à la rénovation et l’entretien des collèges par les
départements et destiné à figurer dans le rapport public annuel 2023 de la
Cour des comptes.
J’ai pris connaissance avec
beaucoup d’attention de ce projet, qui
appelle de ma part, plusieurs observations.
En premier lieu, vous citez à plusieurs reprises la Mayenne parmi
les territoires devant faire face à une déprise démographique et regrettez
que nous n’ayons pas usé de la
compétence que nous donne le législateur
en matière de sectorisation pour «
modifier la carte d’implantation de
leurs collèges et fermer des établissements ».
J’entends parfaitement que la contrainte budgétaire d’une part et
l’enjeu de bonne gestion des deniers publics d’autre part, doivent conduire
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379
à s’interroger sur la pérennité de certains établissements ou sur
d’éventuelles mutualisations entre établissements. Toutefois, sur un
territoire tel que la Mayenne, à dominante rurale, les difficultés de mobilité
d’une part, et le désengagement de nombreux services publics étatiques
d’autre part, appellent une réponse spécifique et justifient la présence
d’équipements structurants sur l’ensemble du territoire. Il existe en outre
sur notre territoire, un enjeu sp
écifique s’agissant du maillage territorial
des établissements d’enseignement public dans un contexte de taux de
scolarisation important de nos collégiens dans l’enseignement privé
(41 %
). Vous reconnaissez d’ailleurs l’enjeu d’aménagement du territoire
que constitue la sectorisation. Je soulignerai par ailleurs que les effectifs
des collèges publics demeurent à un niveau suffisant pour garantir une
dynamique d’établissement et une certaine émulation entre les élèves.
J’ajoute
que
la
sectorisation
des
coll
èges
mayennais
a
naturellement évolué depuis que le législateur nous en a confié la
responsabilité. Ce levier nous a permis de mieux répartir les collégiens
entre les établissements au regard des dynamiques et des capacités
d’accueil des établissements d’a
utre part, tout en visant un objectif de
mixité sociale dont vous rappelez par ailleurs tous les enjeux.
En outre, je crois que nous avons su transformer une contrainte (notre
faible dynamisme démographique) en opportunités. D’abord,
l’opportunité
d’offrir
et de garantir d’excellentes conditions d’apprentissage aux
collégiens. Ainsi, les taux d’occupation plus faibles que la moyenne
nationale nous ont permis, sans doute plus facilement que dans d’autres
territoires, de gérer les conséquences de la crise sanitaire et de permettre à
tous les collégiens de reprendre le chemin du collège dès la fin des différents
confinements. Ensuite, l’opportunité d’accueillir dans nos locaux d’autres
publics, et notamment, d’autres élèves dans une logique de mutualisation
que
vous appelez de vos vœux par ailleurs. C’est notamment le cas en
matière de restauration : plusieurs de nos collèges, comme les collèges
Francis Lallart à Gorron ou Louis Launay à Landivy, accueillent dans leurs
salles de restauration des élèves des écoles primaires communales.
Sur un point connexe, s’agissant de l’optimisation de l’usage des
locaux des collèges, vous soulignez l’intérêt de permettre l’utilisation des
locaux et des équipements des collèges pendant les périodes au cours
desquelles ils ne sont pas occupés. Sachez que de telles mutualisations
existent en Mayenne. Ainsi, la salle de musique du collège Léo Ferré à
Ambrières-les-
Vallées, ouverte sur l’extérieur, est également utilisée par
l’école de musique. De même, l’amphithéâtre du collège Pau
l Emile Victor
à Château-Gontier-sur-
Mayenne est utilisé par des tiers. J’ajoute que le
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COUR DES COMPTES
380
nouveau collège en cours de construction en centre-ville de Laval sera
résolument ouvert sur le quartier et ses habitants.
En deuxième lieu, vous évoquez l’intégration
progressive des
nouvelles normes environnementales dans les programmes d’investissement
des départements et distinguez dans ce cadre deux types de collectivités :
celles qui privilégient les projets mettant l’accent sur la bonne gestion des
équipements et
l’évolution des comportements d’une part et celles qui
« se
sont engagées dans des projets « plus ambitieux »
(terme qui m’apparaît
inadéquat) impliquant des investissements d’ampleur
»
d’autre part.
Vous avez classé la Mayenne dans la première catégorie, rappelant
l’attention que nous portons à la qualité de l’air dans les établissements,
attention qui nous a par exemple conduits dans le cadre de la gestion de la
crise sanitaire à mettre à disposition des collèges publics et privés du
territoire des capteurs de CO
2
. Il aurait intéressant d’évoquer également
l’important travail partenarial réalisé depuis de nombreuses années entre
les s
ervices départementaux et les établissements d’enseignement en vue
de réduire les consommations de fluides par des adaptations techniques
ciblées, notamment des chaudières ou des équipements de restauration,
par les usages (le département soutient et accompagne les établissements
(41 %) engagés dans le challenge CUBEs par exemple), ou par
l’utilisation de produits respectueux de l’environnement pour l’entretien
des locaux (acquisition de nettoyeurs vapeurs dans toutes les cuisines, et
expérimentation dans onze collèges de l’opération
« 5 produits Écolabel
pour tout entretenir »).
Il me semble en outre que le département de la Mayenne relève
également de la seconde catégorie que vous identifiez. Il m’importe de citer
ici l’Agenda Bas carbone porté par le
conseil départemental de la Mayenne,
Agenda qui vise à atteindre la neutralité carbone en 2040 et qui se traduit,
dans chacune des politiques départementales, par le déploiement
d’ambitieux plans d’actions. Ainsi, conformément à l’engagement politique
que nous avons pris devant les Mayennais, et dans le respect des obligations
que fixe le décret du 23 juillet 2019 dit « décret tertiaire », le programme
pluriannuel d’investissement des collèges publics prévoit de consacrer
chaque année 2
M€
(sur un total de 5
M€
) à la réhabilitation thermique des
bâtiments des collèges
isolation des façades, restructuration des bâtiments,
changement des huisseries, développement des chaufferies bois…
J’ajoute que même si la très grande majorité de nos c
ollégiens a la
chance de bénéficier d’un environnement préservé en proximité des
collèges, nous portons une attention particulière à la végétalisation des
cours de récréation. Ainsi, les collèges Pierre Dubois et Jacques Monod à
Laval, situés en zone urbai
ne, ont fait l’objet d’un réaménagement de leurs
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RÉNOVATION ET L’ENTR
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ET DES DÉPARTEMENTS
381
cours en vue d’en améliorer le confort et de renforcer la place de la nature
sur un espace initialement très minéral.
Par ailleurs, l’agenda d’accessibilité programmée (ad’ap) est
également intégré dans le
PPI collèges et l’ensemble des établissements
répondront aux normes d’accessibilité d’ici 2024 (à
l’exception d’un collège
dont la fermeture est programmée d’ici 2026). Le
département de la
Mayenne s’est en effet engagé dans la démarche de
« territoire 100 %
inclusif » porté par le m
inistère des solidarités, de l’autonomie et des
personnes handicapées. Dans ce cadre, comme pour l’engagement
climatique que j’évoquais précédemment, nous appréhendons l’enjeu de
l’inclusion de manière transversale et veillons à
la promouvoir sous toutes
ses formes et dans toutes nos politiques publiques.
En troisième lieu, s’agissant du service public du numérique
éducatif, je vous confirme que nous favorisons son développement en
Mayenne. Dans le cadre du plan numérique collèges 2020-2024, nous
avons ainsi consacré 1,3
M€
en 2021 et plus de 2
M€
en 2020 à
l’équipement informatique des collèges.
Notre politique se décline en trois volets.
Le premier volet porte sur le renouvellement annuel des terminaux
fixes mais surtout mobiles à hauteur de 20 %, favorisant les pédagogies
innovantes. Le taux d’équipement des collèges mayennais est ainsi de 1 PC
pour 3 élèves. Pour l’ensemble de ces équipements, le
département a fait
le choix, dans un objectif de numérique responsable, d’allonger la durée
de vie des terminaux à cinq ans minimum en contractualisant en parallèle
une extension de garantie pour assurer un bon fonctionnement des
matériels. Les terminaux renouvelés sont recyclés ou reparamétrés et mis
à disposition des collégiens ou des enfants confiés à la protection de
l’enfance qui n’en disposent pas. Le deuxième volet du plan consiste en
l’installation de vidéoprojecteurs interactifs dans toutes les salles. Enfin,
le troisième volet permet aux collèges d’acquérir des matériels spécifiques,
tels que des casques de réalité virtuelle ou augmentée ou des imprimantes
3D, dans une enveloppe annuelle de 5 000
par établissement.
Je précise enfin que chaque collège dispose d’une couverture
intégrale wifi « indoor » depuis 2018 permettant une mobilité accrue au
sein du collège. Ce même wifi permet également dans des conditions
sécurisées, l’accès à des périphé
riques grand public non gérés (BYOD), et
notamment du matériel personnel des enseignants. Les collèges, en outre,
seront tous raccordés à la fibre d’ici à juin 2023 (c’est déjà le cas pour la
moitié d’entre eux).
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COUR DES COMPTES
382
En quatrième et dernier lieu, s’agissant d
es modalités de pilotage
des EPLE, je me réjouis que la loi ait renforcé l’autorité fonctionnelle du
département sur les adjoints-gestionnaires quand ils agissent dans nos
domaines de compétence, et notamment dans le domaine de la
restauration. En Mayenne, cette évolution va renforcer les liens déjà
étroits entre les s
ervices départementaux et les équipes de l’Éducation
nationale. Certaines instances internes font d’ailleurs l’objet d’un co
-
pilotage entre la vice-présidente enseignement, jeunesse et citoyenneté du
conseil départemental et le d
irecteur académique, à l’instar du
« groupe
de pilotage collèges » qui réunit au moins une fois par semestre, des
représentants
des
chefs
d’établissement,
des
représentants
des
gestionnaires ainsi que les différentes directions du département
impliquées dans la gestion des collèges.
Tels sont les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL
DE LA SEINE-SAINT-DENIS
Vous m'avez transmis en date du 28 octobre 2022 le chapitre destiné
à figurer dans le rapport public annuel 2023 de la Cour des comptes,
portant sur la construction, la rénovation et l'entretien des collèges par le
département.
Je me réjouis que votre juridiction se soit saisie de ce sujet
fondamental qu'est le service public de l'éducation. Votre chapitre met en
évidence le rôle prépondérant que les collectivités jouent sur le plan
éducatif, dans le cadre de leurs compétences de construction, maintenance
et entretien des collèges, et très souvent au-delà. Il décrit avec fidélité les
défis que nous devons relever en partenariat avec l'État : la transition
écologique, l'adaptation aux nouvelles pratiques pédagogiques, la mixité
sociale et scolaire...
Le département de la Seine-Saint-Denis a fait de l'éducation une
priorité et a fait le choix d'aller au-delà de ses compétences obligatoires
dans ce domaine.
Ceci se traduit par un engagement financier colossal en la matière,
notamment dans le cadre de nos plans d'investissements successifs, qui
démontre notre volonté d'offrir aux collégien(ne)s des collèges publics du
département les meilleures conditions d'apprentissage.
Comme le souligne le chapitre, la Seine-Saint-Denis fait partie des
cinq départements ayant consacré plus de 2 400
de dépenses annuelles
par collégien(ne)s en 2021 (dont 1 110
pour l'investissement).
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Je rajouterai que depuis 2011, le département a investi 1
Md€
dans
son patrimoine collégien.
De plus, notre dernier plan Éco-collège, voté en 2020 pour la période
2020-2030, prévoit la rénovation de 43 collèges, la construction de huit
nouveaux établissements et met en avant une politique de maintenance
rénovée pour un total d'un nouveau milliard d'euros sur 10 ans.
Par sa politique éducative, le département souhaite porter fortement
les ambitions de transition écologique qui irriguent toutes les politiques
départementales, et c'est à ce titre que votre rapport met en lumière notre
programme type environnemental.
Dans ce domaine, votre recommandation de conditionner le soutien
financier de l'État aux projets d'investissement en faveur des collèges (via
la DSIL et les fonds européens notamment) permettant d'accroître
l'efficacité énergétique et le respect des normes environnementales
apparaît tout à fait logique.
Toutefois, à ce jour, les dotations en investissement attribuées au
département pour la construction et la rénovation des collèges sont très
loin d'être à la hauteur des plans d'investissement que nous engageons et
le département de la Seine-Saint-Denis n'identifie pas de dispositif
européen nous accompagnant dans la direction que vous indiquez.
Le chapitre souligne la persistance d'inégalités fortes, et notamment
une hétérogénéité des dynamiques démographiques et socio-économiques
face à laquelle l'État ne joue pas suffisamment son rôle de garant du
déploiement homogène du service public national de l'éducation. Vous
insistez sur le manque de péréquation et en particulier sur les inégalités
induites par la forfaitisation de la DDEC, décorrélée depuis 2009 de
l'évolution démographique. Ainsi, comme le décrit le chapitre, alors que le
taux de couverture par la DDEC des dépenses d'investissement affectées
aux collèges s'établit à 15,61 % nationalement, elle n'est que de 9,28 % en
Seine-Saint-Denis, contre 113,15 % dans les Ardennes.
Cela souligne un réel désengagement de l'État national,
particulièrement alarmant s'agissant de notre territoire, le plus jeune de
France métropolitaine et marqué par des déséquilibres économiques et
sociaux évidents. Le département est largement engagé pour prendre
le relais et a continué d'augmenter les moyens qu'il consacre aux politiques
éducatives, convaincu qu'il s'agit d'un investissement durable.
Pour autant, notre conviction est que le service public de l'éducation
doit rechercher avant tout l'égalité réelle entre tous ses usager(e)s ; or, et
votre rapport le démontre, le financement par l'État des dépenses
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d'éducation pénalise les départements qui connaissent une forte
dynamique démographique, c'est-à-dire précisément ceux où les enjeux
sont les plus importants quantitativement. C'est pourquoi le département
ne peut qu'adhérer à vos différentes préconisations visant à revoir en
profondeur l'allocation des moyens dans le domaine de l'investissement en
faveur des collèges publics pour mettre fin à un système de financement
qui va à rebours des objectifs d'égalité.
Ce constat de manque de péréquation des investissements du bloc
local n'est par ailleurs qu'un pan des déséquilibres territoriaux que connait
la politique éducative dans notre pays. Ceci doit conduire à interroger la
politique conduite par l'État sur son champ de compétence. Bien qu'elle ne
soit pas l'objet du chapitre, il s'agit en effet d'une variable majeure pour
permettre l'égalité réelle. Dit autrement, pour que nous réussissions
collectivement, tous les efforts déployés par les collectivités doivent être
suivis d'effets par une politique ambitieuse de la part de l'éducation
nationale, en particulier dans les territoires les plus en difficulté. Ainsi, à
titre d'exemple, seul un(e) enseignant(e) sur deux est remplacé(e) dans le
secondaire en Seine-Saint-Denis, contre 78 % en moyenne nationale,
faisant ainsi perdre jusqu'à 20 % d'heures de cours aux collégien(ne)s
scolarisé(e)s sur le territoire.
Le département regrette d'ailleurs les difficultés à obtenir des
données de l'Éducation nationale pour mieux guider ses politiques
publiques et pour pouvoir demander au ministère des moyens à la hauteur
du défi éducatif que nous rencontrons.
Le système scolaire français fait régulièrement l'objet de rapports
qui rappellent à quel point il reste inégalitaire et corrélé à l'origine sociale
des élèves. Dans un département jeune et populaire comme le nôtre, ces
inégalités sont encore plus flagrantes alors même qu'il regorge de
potentialités et de talents.
La publication récente de l'Indice de positionnement social (IPS)
des écoles, collèges et lycées, suite à la condamnation par le tribunal
administratif de Paris du ministère de l'éducation nationale, démontre
qu'au-delà du fort taux de collèges classés en éducation prioritaire (61 %),
le département compte de très nombreux collèges en deçà de l'IPS national.
Cet IPS met également en lumière les disparités fortes entre les collèges
privés et publics du département.
Dans une période où le ministre de l'éducation nationale met en
avant la question de la mixité sociale et scolaire, il semble essentiel, comme
le souligne votre chapitre, que nos deux institutions puissent travailler
ensemble à une plus grande mixité de nos EPLE. La sectorisation est
comme vous le soulignez un des leviers. Cependant, elle ne peut seule
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suffire quand les territoires sont très homogènes socialement, comme c'est
le cas dans plusieurs communes du département. Ceci doit également
conduire à interroger les moyens alloués par l'État à l'éducation sur notre
territoire ainsi qu'à revoir la carte des formations qui concentre sur Paris
des filières et formations d'excellence ou spécifiques par exemple.
Le chapitre souligne par ailleurs la nécessité d'une approche globale
visant à améliorer le climat scolaire des collèges. C'est ce que fait le
département en associant à ses compétences obligatoires un projet éducatif
départemental ambitieux visant à ouvrir le champ des possibles pour chaque
élève du département. Mais là encore cette amélioration du climat des EPLE
ne pourra se faire que dans une collaboration plus étroite avec les acteurs
de l'Éducation nationale. Associer les collectivités au PPMS comme vous le
recommandez est intéressant, mais la dégradation du climat scolaire est
multifactorielle et il est essentiel d'activer d'autres leviers : stabilité des
équipes éducatives, formation des personnels, politiques de prévention...
La crise sanitaire a donné de la visibilité à des métiers jusqu'alors
peu reconnus comme celui des agent(e)s techniques des collèges. Cette
population d'agent(e)s doit faire l'objet d'une attention particulière de la part
de l'Éducation nationale qui dispose de l'autorité fonctionnelle. Il est donc
indispensable que le Rectorat porte avec nous, de façon claire, les
possibilités nouvelles offertes par la loi 3DS. Il en va de l'efficacité du service
public et de la qualité de vie au travail de ces agents publics. Le domaine de
la restauration scolaire doit lui aussi pouvoir compter sur l'engagement de
l'ensemble des acteur(rice)s. Transformer notre restauration scolaire en une
restauration durable participe aux objectifs posés par la Loi EGalim, mais
c'est aussi un enjeu majeur de santé publique, de réduction des inégalités
sociales et de promotion de l'égalité environnementale.
Enfin, j'estime qu'il est nécessaire de continuer à travailler
fortement sur la relation qui nous lie aux usager(e)s des collèges : élèves,
parents, équipes éducatives, équipes de direction. Cet esprit de
coéducation, bien que rappelé dans de nombreux textes de l'Éducation
nationale, doit devenir une réalité vécue.
Votre
rapport
souligne
les
innovations
bâtimentaires
des
départements et du nôtre en particulier qui a fait l'objet d'un rapport riche
de la BDCE. Mais comme le souligne ce rapport, l'appropriation réelle des
potentialités éducatives et pédagogiques offertes par les programmes
fonctionnels de nos collèges doit faire l'objet d'un rapport renforcé aux
usager(e)s. De même, les services publics, surtout sur un territoire comme
le nôtre, doivent être les plus accessibles possible aux usager(e)s.
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386
L'école fait toujours en France l'objet de débats passionnés. Avec
engagement et pragmatisme, je souhaite avec l'exécutif départemental
démontrer que notre école publique en Seine-Saint-Denis est riche
d'innovations et de projets ambitieux. Je souhaite que les familles qui y
vivent et s'y installant fassent confiance en la qualité de nos collèges
publics en y inscrivant leurs enfants sans être tentées de mettre en place
des stratégies d'évitement scolaire qui conduisent à renforcer une
ségrégation néfaste pour chacun(e).
Notre politique d'investissement traduit parfaitement cette volonté.
Cependant, tant que le ministère de l'éducation nationale n'allouera pas
davantage de moyens à notre département, n'assurera pas un remplacement
effectif des enseignant(e)s absent(e)s, la seule volonté départementale ne
permettra pas de rendre plus attractifs nos collèges publics qui font l'objet
d'évitement par certaines familles, sur un territoire en pleine mutation. Si
notre département a, comme le souligne votre rapport, été au rendez-vous
de l'investissement pour une éducation de qualité en Seine-Saint-Denis en
dégageant des moyens exceptionnels, nous sommes encore en attente du
même engagement « hors norme », pour reprendre les mots d'un ancien
Premier ministre, du ministère de l'
É
ducation nationale.
RÉPONSE DU
PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL
DE LA HAUTE-GARONNE
Rendre opérationnel l'objectif de mixité sociale inscrit dans le code
de l'éducation, passe nécessairement, comme le souligne la Cour des
comptes, par une conjonction des volontés politiques des collectivités
territoriales et des services déconcentrés de l'éducation nationale.
La compétence du conseil départemental en matière d'implantation
des collèges et de définition de leur secteur de recrutement (article 123-1
du code de l'éducation) est effectivement un outil primordial pour l'atteinte
des objectifs de mixité sociale.
Pour être efficace, il nécessite toutefois une mobilisation forte de
l'éducation nationale dont les moyens doivent être adaptés finement aux
besoins locaux.
Ainsi, le département de la Haute-Garonne est engagé dans la
poursuite d'un objectif non négociable d'amélioration de l'équilibre social
des 100 collèges de son territoire et, notamment, de ceux de l'agglomération
toulousaine, fortement impactés par une urbanisation ségrégative.
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Aussi, la majorité départementale a-t-elle adopté, dès son arrivée
en 2016, un dispositif unique en France d'amélioration de la mixité sociale
pour les cinq collèges du territoire, tous implantés dans Toulouse, inscrits
en réseau d'éducation prioritaire renforcé, projet pour lequel le
Département a investi plus de 56
M€
.
Dans un contexte de forte évolution démographique (le département
de la Haute-Garonne compte en moyenne plus de 1 000 collégiens
supplémentaires chaque année), la mesure majeure de ce programme
d'amélioration de la mixité sociale a consisté en la fermeture progressive
des deux collèges les plus stigmatisés du quartier du Mirail à Toulouse.
Les collèges Raymond Badiou et Bellefontaine scolarisaient plus de 80 %
d'élèves issus de familles très défavorisées et les mesures classiques de
sectorisation s'avéraient totalement inopérantes.
Les élèves du quartier ont progressivement été sectorisés et affectés,
à leur entrée en 6
e
à partir de la rentrée 2017 pour le secteur de Raymond
Badiou, puis 2019 pour le secteur de Bellefontaine, dans 11 établissements
au profil social favorisé, ayant de la place et accessibles en transport
scolaire en 30 à 40 minutes. Le nombre moyen d'élèves issus du Mirail à
intégrer chaque classe de 6
e
de ces établissements se situe aux alentours
de cinq pour des classes volontairement limitées à 25 élèves.
Pour réussir, ce dispositif comporte un important volet de mesures
d'accompagnement. Ainsi, le département a investi 900 000 euros pour la
création de transports dédiés avec accompagnement des élèves dans les
cars, mais aussi la création d'offres associatives pour renforcer le lien avec
les familles et, au sein des établissements dits « d'accueil », aider au climat
scolaire.
Il faut noter la coopération de grande qualité de la part des
différents directeurs des services départementaux de l'éducation nationale
qui se sont succédés sur ce programme et des équipes enseignantes
des 11 collèges d'accueil avec la création d'un réseau de « maîtres mixité »
faisant le lien écoles-collèges, la nomination d'enseignants référents dans
chaque établissement concerné, l'affectation d'assistants d'éducation
supplémentaires, mais, surtout, des classes de 6
e
limitées à 25 élèves pour
la bonne intégration de tous les élèves.
L'évaluation du dispositif, sur la première cohorte ayant passé le
diplôme du brevet des collèges a été suivie durant les quatre premières
années et réalisée en partenariat avec l'éducation nationale et l'université
Toulouse Jean Jaurès grâce à l'embauche au Conseil départemental d'une
doctorante en contrat CIFRE.
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388
Tout d'abord, notons que les résultats au diplôme du brevet des
collèges des cent premiers élèves ont été très sensiblement améliorés et les
choix d'orientation plus ambitieux. Ainsi, le choix laissé à ces élèves,
comme l'a décidé le département en concertation entre la direction des
services académiques et le conseil régional, d'intégrer les lycées de
rattachement des secteurs de leur collège d'accueil a été saisie par quatre
élèves sur cinq. Toutefois, il apparaît que cette liberté de choix laissée aux
familles exige d'investir plus efficacement encore dans leur information et
leur accompagnement à l'orientation.
Outre ces résultats, l'évaluation sociologique a clairement démontré
que la dynamique de socialisation des élèves issus des secteurs REP+ et
leur rapport à la norme (règles disciplinaires et usages) est la même que
pour l'ensemble des élèves des nouveaux collèges d'affectation (ils ne se
distinguent pas comme sous-groupe culturel). Leur bien-être dépend en
conséquence de la qualité de la vie scolaire et de la politique menée par
l'établissement pour améliorer le climat scolaire ainsi que de la formation
des enseignants.
L'évaluation pointe par ailleurs que les critères mobilisés dans
l'éducation prioritaire pour diagnostiquer la situation des élèves en
difficultés perdent manifestement de leur consistance quand les élèves
intègrent un environnement social et scolaire hétérogène. En conséquence,
la formation des personnels enseignants en vue d'améliorer la gestion des
classes hétérogènes et l'établissement d'un diagnostic quand un élève est
en difficulté nous paraît devoir être maintenue, voire renforcée.
De même, cette évaluation confirme surtout que la décision des
services académiques de maintenir chaque année la limitation des effectifs
des classes de sixième à 25 élèves est contributive d'une meilleure
intégration de l'ensemble des élèves au collège. Cette mesure ayant porté
ses fruits, il nous paraît nécessaire de l'acter comme essentielle pour la
continuité du programme, mais aussi de la généraliser à toutes les classes
de 6ème des collèges du territoire dans un contexte d'aggravation des
inégalités dans notre société.
De même, la création de référents mixité (enseignants et AED) au
sein des établissements contribue au suivi du dispositif et à l'information
de l'ensemble des personnels. L'attribution d'une mission spécifique pour
les maîtres inter-degré, dorénavant maîtres mixité sociale, permet de
garantir le suivi des élèves et leur adaptation en faisant le lien entre le
secteur de provenance et le nouveau collège d'affectation.
Enfin, le partenariat avec les associations de quartier (Contrat local
d'accompagnement à la scolarité, cogestion des exclusions avec les
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établissements, accompagnement des familles, accueil des principaux dans
le quartier pour rencontrer les familles) joue un rôle fondamental d'axe de
transmission entre les familles du secteur REP+ éloignées et les nouveaux
établissements d'affectation. Ces acteurs sont désormais connus, reconnus
et légitimes. Il nous paraît nécessaire de pérenniser leur action dans le
dispositif.
Cette politique ambitieuse de mixité sociale tient aussi son succès
parce qu'elle n'est pas déconnectée d'autres mesures de co-éducation mises
en place par le département en compléments des actions de l'éducation
nationale. Ainsi, le « Parcours laïque et citoyen », doté d'un budget de
900 000 euros propose aux enseignants un catalogue de 294 actions
innovantes d'apprentissage des valeurs de la République et de la laïcité, les
« ateliers du midi » permettent aux établissements de créer des partenariats
locaux afin de développer des actions citoyennes, culturelles, ludiques ou
sportives à destination des élèves pour enrichir la pause méridienne. Cette
offre éducative complémentaire proposée par le département à tous
les collèges, publics et privés sous contrat d'association avec l'État,
participent à un meilleur climat scolaire. Elle sera encore renforcée dès la
prochaine année scolaire par un dispositif spécifique de lutte contre le
harcèlement scolaire et le cyberharcèlement.
Autre mesure participant à l'ambition de la mixité sociale et de la
réussite scolaire de tous les élèves, le dispositif d'aide à la restauration
scolaire mis en
œu
vre par le département de la Haute-Garonne permet aux
familles disposant de revenus modestes de bénéficier d'une aide pouvant
aller jusqu'à la gratuité totale. Ainsi, 42 % des demi-pensionnaires
bénéficient de ce dispositif, soit plus de 25 000 élèves.
Le dispositif d'amélioration de la mixité sociale des collèges de la
Haute-Garonne nécessite d'être pérennisé et étendu à l'ensemble des
secteurs du territoire départemental présentant un développement urbain
encore trop peu équilibré. Les moyens de l'éducation nationale doivent être
renforcés sur la période clé de l'entrée au collège et notamment sur la
transition école-collège.
Enfin, le rôle de l'enseignement privé s'inscrit manifestement à
contre-courant des efforts faits pour un meilleur équilibre social des
établissements. En Haute-Garonne, des discussions ont été menées dès 2017
avec l'enseignement privé sous contrat pour faire comprendre les enjeux de
la mixité sociale et inviter les OGEC à prendre leur part. Le département a
d'ailleurs adopté un dispositif financier incitatif indexé sur le taux de respect
de la mixité sociale dans les établissements publics et privés.
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Malgré ces dispositions, l'écart s'est encore creusé entre les
établissements publics, plus hétérogènes du fait du dispositif mis en œuvre
et les établissements privés scolarisant toujours plus d'élèves issus des
familles les plus favorisées.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL
DE LA HAUTE-MARNE
Par courrier du 28 octobre 2022, vous m 'avez transmis des extraits du
chapitre destiné à figurer dans le rapport public annuel 2023 de la Cour des
comptes relatif à « la construction, la rénovation et l'entretien des collèges par
les départements » afin que je vous apporte d'éventuels compléments.
La lecture de ce chapitre m'amène à vous apporter les éléments
complémentaires suivants.
En effet, en juillet 2000, le conseil départemental a décidé la mise en
œuvre d'un programme ambitieux
« plan collège » de plus de 150
M€
pour
permettre de rénover ou de reconstruire intégralement les collèges de
Haute-Marne selon les dernières normes définies par l'Éducation nationale.
L'objectif étant d'offrir aux élèves comme aux enseignants un cadre de
travail agréable avec des moyens pédagogiques adaptés et performants.
L'autorisation de programme a été augmentée pour répondre à cet objectif.
Le conseil départemental de la Haute-
Marne a mis en œuvre une
politique volontariste dans les domaines de la qualité environnementale et
des économies d'énergie, allant bien au-delà de la réglementation
thermique en vigueur et préfigurant ainsi les constructions de demain.
Depuis 2002, le « plan collèges » se poursuit avec déjà 17 collèges,
sur les 23 établissements publics comprenant actuellement 6 900 élèves,
refaits à neuf ou reconstruits pour plus de 214
M€
d'investissements. Les
établissements rénovés ou reconstruits, dans le cadre du « plan collège »
offrent des structures soucieuses du confort d'accueil de chacun et tenant
compte des nouveaux besoins pédagogiques.
Au-delà des collèges reconstruits, le même intérêt est porté au
niveau d'équipement pour les autres établissements.
De plus, tous les collèges bénéficient d'un équipement informatique
performant et innovant tenant compte des nouveaux besoins pédagogiques
(Espace Numérique de travail (ENT), tableaux interactifs (TBI), matériel
de projection, etc.).
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391
Ainsi tous les collégiens haut-marnais profitent des usages du
numérique qui se sont développés aussi grâce au déploiement du réseau
Haute Marne Numérique.
Le conseil départemental de la Haute-Marne veille à ce que les
enfants des territoires ruraux aient les mêmes chances que ceux des villes.
Les collégiens haut-marnais bénéficient d'un cadre de travail, d'une
ambiance sereine et des équipements propices à leur réussite scolaire.
RÉPONSE DE LA
PRÉSIDENTE DU CONSEIL
DÉPARTEMENTAL DE LA LOZÈRE
J'ai bien reçu le chapitre destiné à figurer dans le rapport public
annuel 2023 de la Cour des comptes sur « la construction, la rénovation et
l'entretien des collèges par les départements », et je vous en remercie.
Dans ce chapitre sont abordées les disparités de dépenses
consacrées
aux
collèges
et
le
maintien
de
la
carte
scolaire
indépendamment des évolutions démographiques.
S'agissant de la 1
ère
partie sur les dépenses des collèges, le département
de la Lozère, caractérisé par la faiblesse de sa population (1,13 % de la
population française), se distingue en dépassant largement la moyenne
nationale de 1 720
par élève avec plus de 2 400
de dépenses par élève.
Depuis le transfert de la compétence, le département de la Lozère a
toujours eu la volonté d'une action soutenue en direction de ces collèges
qu'ils soient publics ou privés, les objectifs étant d'améliorer les conditions
de travail des équipes pédagogiques et offrir la meilleure qualité
d'enseignement à nos enfants.
Depuis 2015, au vu de l'état du patrimoine existant, il a
spécifiquement œuvré pour la modernisation d
es bâtiments et a entrepris
d'importants travaux de rénovation, de mise en conformité, d'accessibilité
(PPI de 20
M€
), d'extension ou de création de nouvelles entités. À compter
de 2023, il s'engage dans un vaste programme de rénovation énergétique
des bâtiments (projet de 15
M€
).
En parallèle, une équipe mobile, composée de cinq agents
de la collectivité, assure les travaux d'entretien, d'amélioration et les
réparations courantes.
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392
Le département intervient également dans l'équipement numérique
et nouvelles technologies avec le renouvellement régulier du parc
informatique, l'équipement en tablettes, salles multimédia, classes mobiles
et le raccordement à la fibre optique.
Indépendamment de la dépense obligatoire de la dotation de
fonctionnement, le département contribue aussi à soutenir les actions
menées au sein des établissements comme le soutien financier au transport
vers les équipements sportifs, le dispositif « Collège au cinéma » le
programme d'aide à l'achat de matériel pédagogique, les projets
pédagogiques d'établissements (ateliers théâtre, cinéma, scientifiques,
éducation à l'environnement, sections sportives, voyages scolaires). Il porte
aujourd'hui le projet alimentaire territorial avec le recours aux circuits
courts et la lutte contre le gaspillage alimentaire dans les cantines.
Il soutient enfin les spécificités de certains établissements comme
la section Jeunes Sapeurs-Pompiers proposée par le collège du Bleymard.
Comparées
aux
effectifs,
les
dépenses
réalisées
donnent
effectivement un ratio bien supérieur à la moyenne nationale. Il convient
toutefois de prendre en compte que le retard pris notamment dans la mise
en œuvre de l'agenda d'accessibilité programmé des collèges a été rattrapé
et achevé sur la mandature 2015-2021 représentant un volume de dépenses
concentré sur la période.
S'agissant du 2
e
volet sur la carte scolaire, le département compte
13 collèges publics et cinq collèges privés. Leur implantation offre un
maillage satisfaisant pour la population en recherche de proximité au regard
de son éclatement sur le territoire, En réponse aux spécificités du territoire
(relief, conditions climatiques, habitat dispersé) le département a également
lourdement investi dans le développement de l'internat afin d'éviter
aux élèves des temps de trajets trop longs et favoriser ainsi leur réussite
scolaire. À ce titre 4 collèges sont labellisés « internat d'excellence ».
Les politiques initiées depuis plusieurs années pour l'attractivité et
le développement du territoire permettent une stabilisation des effectifs
collégiens autour de 3 600 élèves. L'accueil de nouvelles populations,
la scolarisation de quelques enfants des départements limitrophes (Gard,
Hérault, Ardèche) développe la mixité sociale au sein des établissements.
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