Seul le prononcé fait foi

CLÔTURE DE LA JOURNÉE DE TRAVAIL ENTRE INSTITUTIONS

SUPÉRIEURES DE CONTRÔLE ORGANISÉE DANS LE CADRE DE

LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE DE L’UNION EUROPÉENNE (PFUE)

Lundi 14 mars

Palais Cambon

Allocution de Pierre Moscovici,

Premier président de la Cour des comptes

Mesdames, Messieurs,

Chères et chers collègues,

Nous arrivons à la fin de cette première journée d’échanges. Je souhaiterais tout

particulièrement souligner la richesse et la qualité de nos débats, essentiels à

l’approfondissement de notre collaboration dans les temps que nous traversons.

J’ai désormais la lourde tâche, avec Madame Federica Mogherini, ancienne haute

représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de

sécurité et rectrice du Collège d’Europe que je remercie chaleureusement de sa

présence, de clore cette journée.

*

Comme cela a été rappelé, la crise sanitaire a eu des conséquences dramatiques, à la

fois sanitaires, sociales mais aussi économiques et financières.

L’ampleur de ce choc a

nécessité une réponse forte des pouvoirs publics, à des échelles et dans des modalités

différentes en fonction des États.

Ces circonstances exceptionnelles ont ainsi renforcé le rôle des institutions

supérieures de contrôle dans l’évaluation de la dépense publique.

Nous avons, dans la

première partie de cette journée de conférences, dressé un bilan du contrôle réalisé par les

ISC lors de la crise sanitaire en Europe.

Ainsi, notre première table-ronde s’est concentrée sur le contrôle de l’efficacité et de

l’efficience de l’action publique contre le Covid-19.

Elle a permis d’évoquer les premiers

enseignements que l’on peut tirer de l’évaluation de l’efficacité des dispositifs mobilisés en

temps de crise, à partir d’exemples concrets.

Dans la même logique, la seconde table-ronde s’est penchée sur le contrôle de la

régularité de la dépense pendant la crise sanitaire.

Trois sous-thèmes ont émergé de ces

discussions. Les contraintes inédites qui ont pesé sur le contrôle des ISC ont nécessité une

forte adaptabilité, voire parfois une transformation des contrôles. Les multiples dispositifs de

soutien massifs, peu ciblés et peu conditionnés, ont engendré de nombreuses difficultés

méthodologiques dans le contrôle. Enfin, les écarts réalisés par rapport aux règles

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d’exécution des dépenses et des recettes publiques posent la question du pouvoir de

sanction des ISC.

Ce sont ensuite les méthodes et les innovations des ISC européennes qui ont fait

l’objet des deux autres tables-rondes.

Le nouveau contexte que nous connaissons

aujourd’hui nous oblige à aller encore plus loin pour répondre aux enjeux humains,

géopolitiques et démocratiques qui émergent de la guerre en Ukraine.

Le renforcement de la dimension européenne des institutions supérieures de contrôle

est évidemment le sujet fondamental de cette journée. Si elle n’est pas nouvelle, cette

nécessité est réaffirmée par la crise sanitaire, d’abord, et par la crise en Ukraine,

surtout.

Si des avancées concrètes sont à noter dans ce domaine, des axes d’amélioration

existent, comme les contrôles parallèles et conjoints, le renforcement des comparaisons

européennes dans les contrôles et l’articulation des échelons de contrôle. Ce n’est pas

uniquement l’avenir de nos institutions qui est en jeu sur cette question, mais aussi celui de

la construction européenne et de la sauvegarde de nos démocraties, à l’heure où la guerre

est de retour sur notre continent.

Enfin, la dernière conférence a mis en évidence la nécessité d’accélérer la

modernisation des ISC européennes.

Partout, le lien entre citoyens et démocratie doit être

renforcé : c’est une conviction que je porte depuis le premier jour de mon mandat. C’est du

renforcement de ce lien que nous tirons notre légitimité.

L’accélération de la transformation

technologique impose aux ISC une plus grande agilité dans leurs travaux, tout en maintenant

l’exigence de qualité. En ce sens, le projet que j’ai initié et que nous portons depuis 2020, «

Juridictions Financières 2025 », se veut une modernisation profonde de la Cour des comptes

française afin de la rendre plus souple, plus réactive et davantage tournée vers les citoyens.

*

Avant de laisser la parole à Madame Federica Mogherini, j’aimerais conclure par deux

citations qui, je pense, reflètent l’importance de notre mission.

Le philosophe Alain

disait ainsi que «

tout pouvoir sans contrôle rend fou

» et Montesquieu, bien avant lui : «

pour

qu'on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir

arrête le pouvoir.

». Voilà notre rôle et notre contribution au bon fonctionnement de nos

démocraties. Nous devons l’exercer avec indépendance et efficacité, encore plus

aujourd’hui.

Alors que l’année 2022 pourrait marquer – nous l’espérons tous – la sortie de la crise

sanitaire, l’Europe fait face à l’un des plus grands défis de son histoire : celui du

retour de la guerre.

Je suis persuadé pourtant, dans ce contexte de crise, qu’elle

dispose des moyens pour devenir ou redevenir une « puissance ».

Je vois quatre piliers

principaux, et autant d’actions pour les incarner, sur lesquels l’Europe devrait se reposer,

mais je laisserai madame Mogherini les développer plus en détail :



Tout d’abord, la politique de santé de l'UE doit être approfondie :

cette nécessité

a été mise en évidence par la crise de la Covid-19 et cette ambition est portée

notamment par le projet EU4Health.



L’Europe doit encore renforcer sa gouvernance et ses atouts en matière

économique.

Cela doit passer par le renforcement de ses ressources propres, la

construction d’une nouvelle autonomie industrielle et l’approfondissement de la zone

euro ;



L’Europe doit être une puissance verte grâce au développement de trois

piliers :

la politique environnementale, la politique fiscale et la politique industrielle ;