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OUVERTURE DE LA JOURNÉE DE TRAVAIL ENTRE INSTITUTIONS
SUPÉRIEURES DE CONTRÔLE ORGANISÉE DANS LE CADRE DE
LA PRÉSIDENCE FRANÇAISE DE L’UNION EUROPÉENNE (PFUE)
Lundi 14 mars
Palais Cambon
Allocution de Pierre Moscovici,
Premier président de la Cour des comptes
Mesdames, Messieurs,
Chères et chers collègues,
C’est avec un grand plaisir que je m’adresse à vous aujourd’hui depuis la
Grand’chambre de la Cour des comptes. La rencontre entre institutions supérieures
de contrôle est toujours un moment privilégié pour initier de nouvelles réflexions et
renforcer nos liens de coopération.
Je me réjouis que cette rencontre ait lieu aujourd’hui
ici, dans l’enceinte de la Cour des comptes, avec la Cour des comptes européenne, des ISC
européennes et extra-européennes.
Les institutions supérieures de contrôle jouent un rôle fondamental dans nos
démocraties,
pour garantir la transparence des dépenses publiques ainsi que pour rendre
effectif l’obligation de rendre compte. Le contexte actuel nous démontre une fois
de plus,
malheureusement de façon tragique, que la démocratie et la paix ne sont jamais des acquis
et doivent faire l’objet d’une attention constante.
Dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, il me
paraissait nécessaire
d’engager une conférence internationale, qui permette de réunir
les ISC.
L’événement sur l’avenir de l’Europe, qui se tiendra sur les deux prochains jours, a
ainsi un double objectif : favoriser le partage de connaissances et de compétences entre
institut
ions supérieures de contrôle aujourd’hui et engager une véritable discussion citoyenne
sur l’avenir de l’Europe demain.
Cet évènement est d’une grande importance pour la Cour des comptes, la France et
l’Union européenne.
Trois raisons principales expliqu
ent ma volonté d’inscrire la Cour des
comptes au cœur de cette dynamique :
Tout d’abord, je suis profondément attaché au projet européen et ma carrière le
reflète
j’ai notamment été ministre en charge des affaires européennes,
commissaire européen et j’
ai exercé à deux reprises le mandat de député européen.
Cette dimension européenne, j’en suis fier et je souhaiterais que nous puissions tous
ressentir ce sentiment de fierté, mais aussi d’honneur et d’attachement lorsque nous
évoquons l’Europe !
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Ensuite, et cela tient plus au contexte actuel, nous avons vécu et connaissons
encore une crise sanitaire sans précédent,
qui a affecté nos vies personnelles et
professionnelles tant au niveau sanitaire, économique, social voire même
philosophique et existentiel. Dans quel monde souhaitons-nous évoluer demain ?
Quelles valeurs souhaitons-nous affirmer et revendiquer en tant que principes
cardinaux de nos sociétés ?
Enfin, le retour de la guerre sur le continent européen et les menaces nouvelles
qu’elle fait peser
sur notre espace démocratique
ne font que renforcer la
nécessité d’avancer sur la coopération entre nos Etats et nos institutions. La violation
du droit international et de la souveraineté ukrainienne par la Russie a entraîné une
guerre dont les conséquences humaines et économiques sont désastreuses pour
l’ensemble de notre continent, mais d’abord et avant tout pour le peuple ukrainien.
Nous devons, dans tous les domaines, continuer à montrer notre unité et notre
volonté d’agir ensemble, avec force et déter
mination.
Sans prétendre entièrement répondre à ces questions et couvrir l’ensemble de ces
enjeux, le forum que nous organisons souhaite faire émerger des solutions concrètes
pour construire l’avenir de l’Europe dans ce nouveau contexte international.
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Retournons au thème du jour : « l’avenir de l’Europe post
-crise sanitaire » !
La pandémie de Covid-19 est l'une des crises les plus déstabilisatrices que nous
ayons jamais connues.
Au-delà des bouleversements sanitaires et sociaux, cette crise a eu
de lourdes conséquences sur les situations économiques et financières des États membres
de l’Union européenne. Le PIB de l’UE a ainsi chuté de 6,8 % en 2020, nécessitant une
intervention massive et rapide des pouvoirs publics. La baisse drastique de l’activ
ité
conjuguée aux dispositifs de soutien du tissu productif et des revenus des ménages et des
entreprises a provoqué une dégradation très importante des finances publiques. Au sein de
la zone euro, le déficit budgétaire est ainsi passé de 0,5 % du PIB en 2019 à 7,2 % en 2020
tandis que le ratio dette/PIB a atteint 98 % et 90,7 % dans l’UE.
Les institutions supérieures de contrôle ont, elles aussi, fait face aux nombreux défis
soulevés par cette crise.
La réduction des effectifs, les difficultés pratiques liées au travail à
domicile sans accès aux systèmes et aux fichiers, l’incapacité à réaliser des audits lorsque
les visites physiques n’étaient pas possibles sont autant de problématiques qui se sont
posées à nous. D’un point de vue stratégique, nos instit
utions ont aussi été confrontées au
risque de leur mise à l’écart par des processus de prise de décision spécifiques aux temps
de crise.
Ce contexte, s’il a fortement bouleversé les programmes et méthodes de travail des
ISC, a également constitué une opp
ortunité pour renforcer leur rôle dans l’évaluation
de la qualité de la dépense publique.
Je souhaite rappeler que pour faire face à la
pandémie, les moyens publics déployés ont été d’une ampleur inédite. Si cette action était
nécessaire, pour préserver l’
activité et nourrir la croissance à venir, elle va durablement
peser sur le déficit et la dette publics. En tant qu’organes indépendants chargés de contrôler
l’utilisation des ressources publiques, les ISC ont ainsi un rôle à jouer.
Dans les différentes phases de la crise, les ISC ont réagi rapidement et ont affecté des
ressources importantes à l'évaluation et à l'audit des mesures prises.
Au début de la
crise et face aux réponses d’urgence déployées, les ISC ont garanti que les dépenses
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publiques d’urgen
ce soient effectuées conformément aux règles applicables. Par la suite, les
ISC ont contribué à évaluer l’impact des dépenses publiques engagées en masse pendant
l’épidémie. Ainsi, la Cour des comptes française, qui est l’exemple que je connais le mieux, a
publié un rapport en septembre 2021 évaluant «
Les dépenses publiques pendant la crise et
le bilan opérationnel de leur utilisation
».
L’expertise de ces institutions est aujourd’hui d’autant plus nécessaire que les plans
de relance engagés par les gou
vernements nationaux et soutenus par l’Union
européenne doivent assurer un financement de l’économie à même d’assurer une
reprise solide et durable, au service des transitions jumelles, écologique et
numérique.
De façon significative, les 19 chapitres de notre
rapport public annuel 2022
, que
j’ai remis au Président de la République en février, portent sur la gestion de la crise sanitaire
par les acteurs publics français. Il ne s’agit plus seulement d’analyser nos comportements
dans l’urgence, mais de valide
r notre résilience et notre capacité à remédier aux faiblesses
structurelles que la crise a révélées ou accentuées. Le déploiement de ces mesures, qui
s’étalera sur plusieurs années, nécessitera très certainement de nombreuses évaluations et
publications des institutions supérieures de contrôle.
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Les tables rondes organisées au cours de cette journée de travail auront pour
ambition de mener une réflexion sur les contrôles réalisés dans la période de crise
sanitaire et sur l’avenir des institutions sup
érieures de contrôle dans le nouveau
contexte que nous connaissons :
La séance d’ouverture
, tenue par Monsieur Klaus-Heiner Lehne, président de la
Cour des comptes européennes, Monsieur Paolo Gentiloni, Commissaire européen
aux Affaires économiques et monétaires - présents en visioconférence
et moi-
même sera ainsi suivie de 4 tables-rondes.
La matinée
sera consacrée au bilan de l’intervention des ISC lors de la crise en
évoquant aussi bien le contrôle de l’efficacité et de l’efficience de l’action publ
ique
contre le Covid-19 que celui de la régularité de la dépense durant cette période.
La deuxième partie de la journée
sera davantage prospective et traitera des
méthodes et innovations des ISC face à la crise sanitaire à partir du nécessaire
renforcement de leur dimension européenne et de leur modernisation.
Ces tables-
rondes seront ainsi l’occasion pour de nombreux intervenants de haut
-
niveau de partager leur expérience de ces derniers mois et d’échanger autour de leurs
propositions pour l’avenir.
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Pour conclure je ferai miens les mots bien connus de Jean Monnet : «
l’Europe se fera
dans les crises et sera la somme des solutions apportées à ces crises
».
Plus que
jamais, cet adage doit nous inspirer.
Tentons, aujourd’hui et demain, de donner rais
on à
Jean Monnet en étant force de propositions nouvelles, innovantes et surtout en adéquation
avec vos aspirations.
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Je parlais en introduction du lien qui nous lie en tant qu’institutions supérieures de
contrôle ; j’aime à penser, qu’en multipliant et
en pérennisant ces rencontres, ce lien
deviendra plus fort et pérenne !
C’est à travers de tels moments d’échanges que nous
construirons l’Europe puissante dont nous avons besoin dans ces temps de crise que nous
traversons.
Je vous souhaite une bonne jo
urnée de conférences et d’échanges !
Merci beaucoup !