Trois aménagements à vocation
culturelle et de loisirs
_____________________
PRÉSENTATION
____________________
La croissance de la demande de produits touristiques à dimension
culturelle ou de loisirs a été très rapide. Le nombre de visiteurs des seuls
parcs de loisirs est ainsi passé de 1 million en 1987 à 34 millions en
2002. Cet attrait a conduit certaines collectivités territoriales à
s’impliquer dans un secteur dont elles attendent des retombées
économiques et des effets en termes d’image et de tourisme.
Des projets fort divers se sont multipliés : mise en valeur
touristique
du
patrimoine,
aménagement
d’un
site
naturel
ou
archéologique,aménagement de sites industriels ou écomusées, création
d’équipements nouveaux, combinant dans des proportions variées culture
et divertissement.
Les collectivités locales ont engagé dans la mise en oeuvre de ces
projets, souvent avec l’aide de l’Etat, des financements importants dans
la perspective de retombées économiques et sociales. Mais l’équilibre
financier de ces équipements repose cependant d’abord sur les
ressources issues de leur fréquentation par le public, devenue aléatoire
dans un marché très concurrentiel.
Les juridictions financières ont souligné, l’an dernier, les risques
courus dans le domaine des parcs de loisirs par la commune d’Amnéville.
Elles étendent cette année le propos après avoir examiné
trois exemples
de projets d’envergure, à connotation culturelle, ludique ou de mémoire
industrielle : le site du Pont du Gard, le parc du Futuroscope et
Cap’Découverte, dont les difficultés, différentes toutefois d’un cas à
l’autre, conduisent de nouveau à attirer l’attention sur les risques
financiers ou juridiques que peut impliquer ce type d’intervention pour
les collectivités concernées.
448
COUR DES COMPTES
I
-
L’aménagement du site du « Pont du Gard »
Le département du Gard, à l’issue de plusieurs années de
contestation et de blocage de ses premiers projets d’aménagement du site
du Pont du Gard, soutenus par l’Etat depuis 1989 au titre des « Grands
travaux », a concédé, en 1996, à la CCI de Nîmes/Uzès/Bagnols/LeVigan
la conception, la réalisation et l’exploitation d’un ensemble d’équi-
pements culturels (musée, lieux d’expositions), et environnementaux
(parcs
de
stationnement,
aménagements
paysagers,
cheminements
piétonniers …) visant à l’aménagement et la mise en valeur du site du
Pont du Gard.
Peu après l’ouverture au public, survenue partiellement et avec
retard à partir de juillet 2000, la CCI a décidé de se désengager de la
concession, pourtant prévue pour durer 50 ans, en se prévalant du déficit
de l’exploitation et d’une fréquentation décevante. Le Département du
Gard a dû prendre en charge l’indemnisation de la CCI et la couverture
des déficits, avant d’en confier la gestion à un nouvel établissement
public de coopération culturelle (EPCC) à l’issue d’une période
transitoire où la CCI a néanmoins continué à assurer l’exploitation,
période marquée par des inondations exceptionnelles qui ravagèrent une
partie des installations.
Si
les
réalisations
paraissent
de
qualité
sur
les
plans
environnemental, patrimonial et urbanistique, le projet a pâti d’une
définition hésitante et d’une pluralité d’objectifs, dont celui, resté
inabouti, de susciter activité économique et développement, celui d’une
conciliation entre la gratuité de l’accès et la nécessité de financer
l’exploitation d’installations culturelles avec des visiteurs payants.
Les prévisions de recettes avancées par la CCI se sont avérées
exagérément
optimistes,
d’autant
que
les
efforts
de
promotion
commerciale attendus de sa part sont restés approximatifs et en deçà de
ses obligations contractuelles
Alors que la notoriété et la fréquentation du site dépassent
largement les limites du Gard, le département, après avoir joué un rôle
moteur dans l’émergence du projet, en a donc confié
la réalisation à un
opérateur manquant de références, à la stratégie inconstante, sans exercer
un rigoureux contrôle sur son action, dont il devra à long terme assurer
les conséquences sur le plan financer sauf à espérer un redressement des
résultats de l’exploitation. L’opération aura également provoqué le
déséquilibre du budget de la CCI, contrainte à de sévères mesures de
rétablissement de sa situation financière.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
449
A - Un projet en gestation depuis 1987
Edifice romain, construit entre 38 et 52 après J.C., le pont sur le
Gardon est le principal vestige de l’Aqueduc conduisant vers Nîmes les
eaux de la source d’Uzès. Universellement connu, restauré au XIXème
siècle, inscrit en 1986 au patrimoine mondial de l’UNESCO, le « Pont du
Gard », bien qu’appartenant à l’Etat, fait figure d’emblème du
département du Gard, responsable du cours d’eau et de la voie
empruntant l’ouvrage routier accolé au XVIIIème siècle,
propriétaire des
principales emprises foncières avec les communes environnantes de Vers
Pont du Gard, Castillon et Remoulins.
Le prestige du monument incrusté
dans son environnement méditerranéen a conféré au site le caractère d’un
haut lieu touristique, d’autant que l’accès en est gratuit, de même que le
franchissement de la rivière, dont les abords se prêtent à la baignade et la
détente estivales. Le nombre de visiteurs du site était estimé à 1, voire
1,3 million de personnes, par année.
Le département du Gard a cherché de longue date à valoriser le site
du Pont du Gard à travers des projets d’aménagement visant à permettre
une protection et une mise en valeur de son cadre environnemental,
exposé à une fréquentation incontrôlée, et à permettre un développement
d’activités porteuses en termes d’emploi et d’image.
Entre 1987 et 1994, furent engagées des études, débouchant sur des
projets de grande envergure et d’une crédibilité variable : aménagement
d’une grotte et d’une carrière, parc d’attraction, musée... L’opération fut
assimilée en 1989 aux « Grands Travaux » appelés à bénéficier d’aides
importantes du FEDER et de l’Etat, pour un coût
initialement évalué à
320 MF HT, puis ensuite réduit à 208 MF HT, alors même que les
versions successives du projet soumis à enquête publique soulevaient de
vives oppositions, tenant, au-delà du coût, à l’impact sur l’environnement,
à leur fidélité au site historique ou à l’ampleur des acquisitions foncières.
Le département, pour permettre l’adhésion des communes
riveraines, a suscité la création, intervenue en 1991, du Syndicat mixte
d’aménagement du Pont du Gard, dont il assurait l’essentiel du
financement, et qui fut investi de la maîtrise d’ouvrage des réalisations à
venir. Par convention, cette maîtrise d’ouvrage fut ensuite déléguée en
1992 à la société d’économie mixte départementale, en charge des
acquisitions foncières, qui fit procéder aux études de maîtrise d’oeuvre.
450
COUR DES COMPTES
La chambre régionale des comptes de Languedoc-Roussillon avait
alors formulé un bilan critique des actions engagées par le département,
en s’interrogeant sur l’utilité des dépenses d’études et de maîtrise
d’oeuvre engagées pour un montant alors estimé à environ 4,3 M€. Elle
avait également relevé des errements dans l’utilisation des fonds
départementaux consacrés à la promotion du site, dont le rapport public
de 1997 s’était fait l’écho.
B - La prise en charge puis l’abandon du projet par la CCI
A la suite d’un changement d’exécutif départemental survenu lors
du renouvellement de l’assemblée délibérante en 1994, le département du
Gard a confié l’étude, la réalisation puis l’exploitation des équipements à
la CCI de Nîmes/Bagnols/Uzès/Le Vigan au travers d’une convention de
« concession », d’une durée de cinquante ans, conclue le 2 juillet 1996,
pour un montant prévisionnel de 24,45 M€ HT d’investissements, portés
par avenants à 31,73 M€ HT, hors acquisitions foncières et études
antérieures.
Le
projet
était
financé
principalement
par
l’Union
Européenne, l’Etat, le département, la CCI. La CCI devait notamment
financer sa participation à l’aide d’emprunts, l’équilibre des comptes
devant être acquis grâce aux résultats escomptés de l’exploitation.
Le programme comprenait, sur une emprise de 185 hectares, des
aménagements paysagers, des parcs de stationnement payants, des
bâtiments à caractère de musée et lieux d’expositions et la réhabilitation
d’un hôtel, des boutiques et de la restauration.
Le choix de la CCI, qui avait à son actif la réalisation de Port
Camargue, le premier port de plaisance européen et la gestion de
l’aéroport de Nîmes, était alors justifié par la volonté de s’appuyer sur
une structure garante de l’intérêt public local qui présentait de surcroît
l’avantage d’être sous la tutelle du ministère de l’économie et des
finances alors même que l’Etat participait au financement de l’opération.
Le nouveau projet, dont la maîtrise d’oeuvre fut confiée par la CCI
au même cabinet d’architectes que les précédentes versions inabouties,
maintenant ainsi pendant 15 ans un même intervenant, reprenait, à une
échelle moindre, notamment sur le plan foncier, certaines caractéristiques
des programmes antérieurs, tels que la réalisation de bâtiments
(exposition muséographique, bar-restaurant, services), de locaux à
vocation évènementielle, de parcs de stationnement et d’aménagement de
sentiers thématiques.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
451
Comme ses précédentes versions, le projet tentait de répondre à
plusieurs objectifs : aménagement des accès et des abords du monument,
élimination d’ouvrages parasites, protection de l’environnement et des
rives, préservation du Pont, captation d’une clientèle et de recettes
(stationnement, animations payantes, bar, restauration, boutiques),
création et développement d’activités économiques induites dans la
proximité grâce au savoir-faire de la CCI, expression d’une ambition
culturelle et éducative, organisation d’évènements, de séminaires et de
manifestations,
l’ensemble
contribuant
à
la
communication
institutionnelle du Département.
Le contrat initial prévoyait la gratuité d’accès au site pour les
habitants du département du Gard. Au regard de la nécessaire égalité de
traitement entre usagers du service public, un avenant a étendu en 1997 ce
principe à l’ensemble des visiteurs, en contrepartie d’un versement
forfaitaire de 228 674 € au concessionnaire, somme manifestement peu
représentative des effets de cette contrainte sur l’équilibre de l’opération
alors même que la situation financière de la CCI était fragile.
Alors que l’inauguration était prévue pour coïncider avec le
passage à l’an 2000, la réalisation a connu des retards, et le site n’a été
effectivement ouvert au public qu’en juin 2000, l’espace muséographique
en mars 2001. Puis, au vu d’une fréquentation et de recettes décevantes
au cours de la seule
première année complète
d’exploitation, le nouvel
exécutif de la CCI, suite aux élections consulaires de 2000, arguant de la
détérioration rapide de sa situation financière induite par la gestion du site
et compte tenu de la procédure d’alerte dont elle faisait l’objet sur ses
comptes de l’exercice 2001, a souhaité se désengager au plus vite du
dispositif contractuel, et renoncer à assurer l’exploitation, déficitaire, des
installations dont la compagnie consulaire était initialement investie pour
cinquante années. Un protocole d’accord fut négocié avec le syndicat
mixte et le département, prélude à un retrait de la CCI en juin 2002.
La CCI a néanmoins continué à assurer la gestion du site jusqu’à sa
prise en charge par l’établissement public de coopération culturelle, après
la liquidation du syndicat mixte originel en 2003. Cette période
transitoire, entre la fin officielle de la concession (juillet 2002) et la prise
de responsabilité de l’EPCC, a été marquée par des inondations
exceptionnelles qui ravagèrent une partie des installations. Elle a
également été caractérisée par
une certaine précarité juridique,
compensée par le recours à un prestataire de service extérieur chargé
d’assurer un contrôle de la facturation. Les 70 personnes employées par la
CCI pour la gestion du site ont été reprises par le nouvel établissement
public.
452
COUR DES COMPTES
Si les statuts de l’EPCC, conformément aux principes définis par la
loi qui les a créés
158
, prévoient une forte présence de l’Etat au sein de son
instance dirigeante, le département du Gard en reste le financeur
prépondérant, à qui incombe la charge exclusive de la couverture des
déficits. Les recettes d’exploitation ne couvriraient à ce jour que 54 % des
dépenses d’exploitation.
C - L’association entre le département et la CCI
1 -
Le choix de confier le projet à la CCI
Le choix du Département du Gard de confier à la CCI la
conception, la réalisation et l’exploitation future du site apparaît
hasardeux, du fait de l’absence de références de la compagnie consulaire
dans le pilotage d’opérations de cette nature, étrangères à son champ
d’intervention habituel, de sa structure financière fragile et de sa faible
capacité à mobiliser les forces économiques locales autour du projet.
Alors qu’un recours à la concurrence aurait été une pratique de
bonne gestion, le département apparaît ainsi s’être exposé au brusque
revirement stratégique de son partenaire dont il a surestimé la capacité à
s’impliquer dans un processus à long terme, indépendamment des
alternances électorales consulaires.
Le renouvellement des instances dirigeantes de la chambre
consulaire fin 2000, et notamment le changement de président, s’est en
effet accompagné d’une appréhension différente du projet, alors même
que la réalisation était terminée et que la gestion commerciale devait
débuter. Ainsi le plan stratégique élaboré par les instances dirigeantes en
1999 et 2000 qui mettait la priorité sur l’entreprise et la gestion
d’équipements a perdu de son actualité, les considérations financières
devenant prégnantes, compte tenu de la situation précaire de la CCI.
Le choix de la CCI peut paraître dès lors
en contradiction avec
celui d’une durée de 50 années convenue dans la concession. Le
département
en a payé le prix lors de la rupture de la concession en
renonçant à sanctionner
les manquements contractuels de la CCI compte
tenu des charges de gestion qui pesaient sur elle et en l’indemnisant pour
11,614 M€ au titre de la reprise des biens de la concession.
158) La formule de l’EPCC a été créée par la loi du 4 janvier 2002 et ses modalités de
fonctionnement n’ont été précisées par circulaire que le 18 avril 2003.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
453
2 -
Une pluralité d’objectifs, de nombreux acteurs
et des choix malheureux
Le département et la CCI paraissent avoir poursuivi des objectifs
nombreux et contradictoires tels que protection du patrimoine et de
l’environnement, politique culturelle, souhait d’équilibrer l’exploitation
avec des recettes alors que la fréquentation du site est essentiellement
gratuite. L’objectif de promotion économique et touristique gardoise fut
spécifié en des termes trop généraux, au-delà de la réalisation d’un local
exposant les terroirs et leurs productions.
Le concédant tout comme son concessionnaire ont mal apprécié la
difficulté qu’il y avait à modifier la pratique des visiteurs du pont du Gard
habitués à y voir, pour l’essentiel, un espace de promenade et non un lieu
de pratiques culturelles payantes, et il n’a pas été pris l’exacte mesure de
la complexité des procédures administratives nécessaires pour mener à
bien une opération de cette envergure.
La multiplicité des sources de financement du projet a imposé au
projet des contraintes supplémentaires, telles que la réalisation de
l’opération dans le cadre des grands travaux et la nécessité d’une
ouverture du site pour les festivités de l’an 2000, en décalage avec les
possibilités opérationnelles.
Le programme dit « muséographique », qui privilégiait une
scénographie active avec des techniques de projections spatiales et des
reconstitutions,
a
mobilisé
de
très
nombreux
intervenants.
Un
commissariat général avait pour mission de superviser l’ensemble des
opérations réalisées par huit chefs de projet qui coordonnaient, chacun,
l’intervention
de maîtres d’oeuvre pour la scénographie et le cas échéant
le graphisme ainsi que les interventions des
entreprises et prestataires de
services.
La complexité organisationnelle a suscité des difficultés de
coordination et des juxtapositions de prestations entre les intervenants.
L’insuffisance de moyens en personnel de la CCI a du être pallié par un
recours
répété à des assistants au maître d’ouvrage.
Parmi les décisions malheureuses figure la réalisation de
constructions scénographiques sur la rive droite, qui furent dévastées par
une crue exceptionnelle du Gardon le 9 septembre 2002. La destruction
de l’éphémère installation artistique de mise en lumière du pont, d’un
coût global de 2 M€, manifeste également que, malgré son coût, sa
conception était imparfaitement adaptée aux excès notoires du cours
d’eau. La réhabilitation des zones et parties détruites fut achevée en mars
2005, hormis la mise en lumière, abandonnée.
454
COUR DES COMPTES
Etablissement public assurant à la fois la représentation du monde
industriel et commercial et des missions d’intérêt général, la CCI pouvait
apparaître à même de susciter une valorisation de l’équipement et de
favoriser des retombées économiques locales. Il s’avère que le principal
avantage retiré par les entreprises locales a concerné l’attribution des
commandes et marchés lors de la réalisation des travaux, et, dans ce
registre, des pratiques critiquables sur le plan du respect des règles de la
commande publique ont été relevées.
Concessionnaire du site, la CCI intervenait en qualité de maître
d’ouvrage public, assujetti au code des marchés publics. Le déroulement
de l’opération s’est accompagné cependant de nombreux manquements
aux principes de concurrence et d’égalité de traitement des candidats dans
les procédures utilisées, d’une utilisation irrégulière de la procédure du
marché négocié, d’un fractionnement abusif des marchés, d’un recours à
des prestataires sélectionnés sans réelle mise en concurrence, débouchant
parfois sur une saisine de la commission de prévention des conflits
d’intérêts de l’organisme consulaire.
Les signes d’une concurrence imparfaite sont apparus à travers la
participation très faible d’entreprises extérieures au département, une
fréquente dispersion des offres, des soumissions anormalement hautes par
rapport aux estimations de la maîtrise d’oeuvre et des désistements
d’entreprises en cours de
consultation.
Des carences dans l’information de l’assemblée délibérante ont été
relevées tout comme des irrégularités dans le fonctionnement des
commissions d’appel d’offres tant dans leur
composition que dans leurs
interventions.
3 -
Le défaut d’appréciation de l’équilibre de l’exploitation
A partir de mai 1998, le ministère de l’économie et des finances,
dans l’exercice de sa tutelle sur l’organisme consulaire, avait
manifesté
sa réticence à soutenir le projet en conditionnant l’autorisation de mettre
en place les emprunts nécessaires au montage de l’opération
à
l’amélioration du plan prévisionnel de financement et en créant, sous la
responsabilité du préfet, un comité de suivi de la concession.
La contribution du concessionnaire a été ainsi
financée par la
mobilisation de deux emprunts dont les charges de remboursements se
sont ajoutées au coût des études préalables et d’investissements financés
en crédit bail tandis qu’il devait compter avec le retard de versement de
certaines subventions.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
455
Les conséquences financières du choix de la gratuité d’accès au
monument sur l’exploitation future ont été imparfaitement évaluées tout
comme furent surestimées, par la CCI,
les recettes d’exploitation issues
principalement de la fréquentation du musée, des boutiques
et des parcs de
stationnement. Contrainte par la précarité de sa situation financière, la CCI
a, contrairement à ses engagements contractuels, réalisé des économies sur
ses charges de personnel et sur les dépenses de promotion, qui se sont
limitées à quelques actions dans les médias locaux.
La politique tarifaire mise en place est apparue instable et peu lisible
avec cinq modifications tarifaires entre juillet 2000 et mai 2002. La
signalétique est apparue peu efficace.
Les efforts de la CCI pour promouvoir le site et ses aménagements
paraissent modestes, notamment par rapport aux exigences du cahier des
charges de la concession. Peu de contacts furent noués avec les autocaristes
et les tour-opérateurs, dont l’essentiel des clients, entre 300 et 400 000 par
an, visitaient le site sans être attirés vers l’espace muséographique payant,
situation à laquelle l’EPCC s’est depuis efforcé de remédier.
D - Bilan de l’opération : une réalisation de qualité, un
coût élevé et une exploitation très déficitaire
L’aménagement du site a reçu le prix de l’art urbain en 2004 qui
récompense des démarches d’opérateurs qui défendent notamment la
qualité architecturale et le respect de l’environnement. Si l’opération
présente en effet
de réels acquits sur le plan environnemental, en matière
de stationnement, de mise en valeur et de préservation du site, la
fréquentation muséographique connaît néanmoins des résultats décevants,
de même que les espérances de retombées économiques et touristiques.
Outre le poids des études et des actions de communication supportées entre
1987 et 1995 et sa contribution au financement des équipements dans le
cadre de la concession à la CCI entre 1995 et 2002 (2,8 M€), le
Département a supporté le poids de l’indemnisation de la CCI pour la
reprise des biens de la concession (11, 614 M€) et est désormais engagé
dans la couverture des déficits postérieurs au 1
er
juin 2002, de l’ordre de
3 M€ par an depuis 2003.
L’enveloppe globale initialement prévue pour l’opération (24,45 M€
hors acquisitions foncières et études antérieures à 1996) a été portée à
31,73 M€ par avenants, avec une réduction corollaire des prestations à
réaliser en matière de parcs de stationnement et de constructions, et des
majorations de dépenses de muséographie (doublement) ou d’honoraires
versés à de multiples concepteurs et prestataires en ingénierie culturelle.
456
COUR DES COMPTES
Selon le plan établi en novembre 1999, le montant prévisionnel des
recettes pour l’année 2001 (première année pleine d’ouverture au public)
devait atteindre 12,189 M€ HT. Elles s’établirent en fait à 3,656 M€ HT,
avec 60.000 entrées payantes environ au lieu des 360.000 attendues. La
déception a concerné surtout les recettes de la billetterie permettant
d’accéder aux espaces d’exposition (musée, salle de projection, espace
enfants), alors même que l’accès au monument romain et aux parcours
piétonniers était et est resté gratuit, que la signalétique est discrète, et que
la promotion commerciale, demeurée embryonnaire, fut pénalisée par
l’ouverture manquée lors du passage à l’an 2000 avec son cortège
médiatique escompté.
La CCI, qui s’était déjà endettée pour 9,37 M€ pour contribuer au
financement de l’opération, a supporté pour sa part
une perte totale de
9 M€, aggravant une situation financière déjà fragile, se traduisant en
2001 par un déficit de trésorerie sur la concession de 10,9 M€, exigeant
de recourir à des concours bancaires à hauteur de 6,7 M€ au 31 décembre
2001 et des retards dans le règlement des fournisseurs. La situation a
conduit son commissaire aux comptes à déclencher en avril 2002, par une
procédure d’alerte, les comptes 2001 manifestant les signes d’une menace
sur la continuité de l’activité de la compagnie consulaire. Elle a été
conduite, pour rétablir son équilibre financier, à réduire ses effectifs,
céder des actifs (dont un ensemble immobilier de 400 appartements à Port
Camargue) pour 5 M€ et recourir à un emprunt sur 15 ans pour 4 M€. Au
surplus, l’assemblée générale de la CCI a adopté, en novembre 2001, un
budget pour 2002 excluant la concession du Pont du Gard, faute de
pouvoir présenter un budget global en équilibre conforme aux exigences
réglementaires, qui lui furent alors rappelées par la tutelle préfectorale. Le
budget exécuté de la concession a affiché un solde débiteur de 2, 747 M€
au 31 décembre 2002. La détérioration de sa situation financière a enfin
durablement pesé sur la capacité de la CCI à se maintenir ou s’impliquer
dans des projets stratégiques avec ses partenaires publics locaux, et son
périmètre d’intervention apparaît aujourd’hui significativement réduit par
rapport à 1996.
Un sensible redressement du nombre de visiteurs payants est
annoncé depuis la reprise de l’exploitation par l’établissement public de
coopération culturelle en 2003, dont les effets sur la contribution du
département à l’équilibre d’exploitation sont à confirmer.
Il ne semble pas que le nombre de touristes drainé par le site ait été
accru depuis la mise en service des nouveaux aménagements, dont
l’impact direct sur la consommation touristique gardoise reste à valider.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
457
La CCI qui s’était engagée à développer un pôle économique
autour du site, n’a pris aucune initiative en la matière. Aucun complexe
hôtelier n’existe ainsi à proximité et les autocaristes ont recours,
principalement, aux ressources hôtelières d’Avignon, dans le département
voisin du Vaucluse, signe que le Pont du Gard ne constitue pas encore,
faute d’infrastructures d’accueil suffisantes, un élément central d’une
politique touristique intégrée.
______________________
CONCLUSION
_____________________
Inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, le Pont du Gard, par
sa renommée et son attractivité, dépasse la seule sphère d’intervention du
département, investi d’une mission de préservation et de mise en valeur
d’un site de portée universelle. L’opération souligne à l’évidence les
difficultés éprouvées par la collectivité territoriale pour définir, faire
réaliser et gérer un tel programme. Au-delà des circonstances ayant
entouré la définition des réalisations et le choix des acteurs, l’exemple de
l’aménagement du site du Pont du Gard, monument appartenant à l’Etat,
illustre les limites de l’implication d’un acteur local, le département,
dans une opération d’aménagement dont l’impact dépasse très largement
son
cadre territorial et dont l équilibre financier repose sur des
prévisions de recettes incertaines.
Nouvelle formule de gestion des services publics culturels instituée
par la loi du 4 janvier 2002, l’établissement public de coopération
culturelle (EPCC) du Pont du Gard est le premier du genre à avoir été
créé. Il faut souhaiter qu’en associant notamment le département et
l’Etat, il saura réduire les contraintes qui pèsent sur l’exploitation et
obtenir à terme des résultats conformes aux multiples objectifs assignés à
l’aménagement du site du Pont du Gard. Alors que l’opération a été
assimilée à des grands travaux financés par l’Union Européenne, l’Etat,
le Département, la CCI et, à une moindre échelle, la Région, le
financement des déficits d’exploitation qu’elle engendrera semble
néanmoins devoir rester à la seule charge du département du Gard.
458
COUR DES COMPTES
II
-
Le parc du Futuroscope (Vienne)
Le Parc du Futuroscope est un parc à thèmes orienté vers le
multimédia et les technologies cinématographiques et audiovisuelles du
futur, situé dans le département de la Vienne, à 7 kilomètres au nord de
Poitiers, sur les communes de Chasseneuil-du-Poitou et Jaunay-Clan. Il
est intégré au sein d'un technopôle implanté sur 200 hectares qui
comprend
notamment
un palais des congrès, un parc hôtelier de 1 900
chambres, 150 000 m² de bureaux d’entreprises, une partie de l'université
de Poitiers, une école d'ingénieurs et plusieurs autres
organismes publics.
Créé en 1984 à l’initiative du Conseil général de la Vienne, le Parc
du Futuroscope a ouvert ses portes en 1987, à partir de deux attractions
exploitées par une société d’économie mixte locale contrôlée par le
département de la Vienne. Il s’est ensuite développé en proposant de
nouvelles attractions (écrans géants, images en relief, projection à 360°,
sièges en mouvement) qui ont suscité jusqu’à 2,8 millions de visites en
1997, la clientèle bénéficiant d’une sortie d’autoroute ainsi que d’une
gare TGV depuis 2000. La notoriété internationale du premier parc de
loisirs public français s’est peu à peu établie et a incontestablement
contribué à dynamiser l’image du département et de la région, tout en
stimulant l’activité économique locale.
Cet engouement a décidé le département de la Vienne à confier en
2000 au secteur privé son exploitation commerciale, tout en conservant la
propriété des infrastructures, ce qui a conduit à la privatisation de la
SEML.
La diminution de fréquentation survenue à partir de 1999 pour
atteindre 1,6 million de visites en 2002 a finalement provoqué le
désengagement de l’entreprise
puis la reprise par une société d’économie
mixte dénommée « SEML nouvelle du Parc du Futuroscope », détenue à
l’origine à 60 % par le département de la Vienne.
Dans ce contexte, la viabilité économique et juridique de cette
société est directement liée aux perspectives de fréquentation et à la
normalisation de ses rapports avec le département, son principal
actionnaire.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
459
A -
La gestion du parc par la « SEML nouvelle du Parc
du Futuroscope »
1 -
Les conditions de cession puis de reprise du parc par le
département
La cession en 2000 de la SEML au groupe Amaury a été décidée
par le conseil général qui avait préalablement statué sur trois points :
−
l’abandon du caractère de service public de l’activité du parc de
loisirs et la formalisation des relations avec la SEML exploitante
par un bail administratif ;
−
l’évaluation préalable des actifs de la SEML par une banque
d’affaires ;
−
la cession à un repreneur que devait apporter cette même
banque.
La vente de la SEML d’exploitation a été réalisée pour 42,23 M€,
ce qui a entraîné une plus-value pour le département de près de 41,16 M€.
Mais la gestion par l’opérateur privé s’est rapidement avérée un
échec et a provoqué des pertes qui ont atteint des montants importants en
2000 et 2001.
Le département, estimant que l’avenir du Futuroscope était en jeu,
a été conduit à intervenir en faveur de cet équipement considéré comme
structurant. Il a décidé la reprise de la gestion par une « SEML nouvelle
du Parc du Futuroscope » qui a racheté les actifs de la société pour un
montant de 18,5 M€, cette dernière participant au capital de la nouvelle
SEML pour 7,796 M€. A cet effet, un protocole d’accord a été conclu en
septembre 2002.
Le capital de la SEML nouvelle (40 000 000 €) a été constitué
comme suit en novembre 2002 :
Département de la Vienne :
24 000 000 €
Région Poitou-Charentes :
8 000 000 €
Groupe Amaury :
7 796 000 €
Dexia :
220 000
€
Divers privés :
400 €
460
COUR DES COMPTES
Dès le premier exercice complet d’exploitation, les pertes ont
atteint près de 18 M€ en 2003. Au 31 décembre 2004, le total des pertes
accumulées représentait 97 % du capital social, porté entre-temps de 40 à
54 M€. Une nouvelle augmentation de capital a suivi en 2005 pour
aboutir à un montant de 65,6 M€.
Après un déficit d’exploitation de 9 M€ en 2005, qui représente
néanmoins un léger redressement pour la SEML, le département,
actionnaire majoritaire, a dû à
nouveau intervenir en portant le capital à
71,4 M€ en février 2006, avant de décider en juin 2006 une réduction du
capital suivie d’une recapitalisation. L’arrivée de nouveaux actionnaires
privés devrait permettre de porter leur part à un minimum de 23 % à la
suite du désengagement total du groupe Amaury, prévu dès la constitution
de la société nouvelle.
Il apparaît ainsi que le département, actionnaire majoritaire, s’est
vu contraint, du fait de l’absence de rentabilité du parc, d’intervenir
continuellement pour éponger les pertes en apportant depuis l’origine
d’importants
fonds
publics
locaux.
Les
charges
(investissements
immobiliers et mobiliers, apports en capital, dotations, frais annexes …)
se sont montées à 351,1 M€,
les produits (cession, produits fiscaux,
redevances, loyers, dividendes…) ont atteint 112,9 M€, ce qui représente
une charge nette pour le département qui peut être évaluée à un minimum
d’environ 240 M€ de la création du parc (1984) à fin 2005, sans compter
les divers financements publics évoqués ci-après, ni les recapitalisations
décidées en 2006.
2 -
L’activité et l’équilibre de la gestion
Même si la SEML nouvelle n’a pas permis au parc de retrouver sa
fréquentation de 2002, le Futuroscope conserve son rang international et
demeure l’un des trois premiers parcs de loisirs français les plus visités en
France et en tout cas le plus important parc financé majoritairement par
des collectivités publiques, en l’occurrence le département de la Vienne
(66,8 % du capital en août 2006) et accessoirement la région Poitou-
Charentes (6,5 % du capital).
Le nombre de visites comptabilisées par la SEML a atteint 1 435
000 pour 1 113 000 visiteurs en 2005 (un visiteur pouvan revenir
plusieurs fois). Sont distinguées les visites payantes, en progression
modeste ces trois dernières années (1 351 240 en 2005), les visites
« événementielles » résultant de manifestations diverses en plus forte
progression sur la même période
(12 246 en 2005) et les entrées gratuites
(71 661 visites en 2005, soit 5 % du total).
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
461
La diversité de l’origine géographique des visiteurs confirme la
notoriété du parc : 40 % pour le Grand Ouest, 20 % pour l’Ile de France,
30 % pour le reste du territoire et 10 % pour l’étranger (Espagne et
Royaume Uni pour les trois quarts).
La fréquentation est très concentrée sur la période d’avril à août
pour les visiteurs individuels, les groupes et entrées gratuites se
concentrant sur les périodes creuses, les visites scolaires enregistrant une
chute de 50% par rapport au pic de fréquentation en 1997.
Le chiffre d’affaires de la SEML (54,9 M€ en 2005) provient à
45 % de la billetterie, dont la progression suit celle de la fréquentation, à
45 % des prestations associées (dont la restauration), elles-mêmes en
progression significative depuis 2002, et enfin de l’activité des boutiques,
plutôt stagnante (8 %), au moins jusqu’en 2005.
Du fait des difficultés structurelles liées à l’évolution de la
fréquentation, l’abaissement du seuil de rentabilité a constitué une priorité
pour la SEML, qui a été conduite à agir sur les charges d’exploitation tout
en visant une croissance du chiffre d’affaires.
En matière de charges, la société a pu réaliser des économies sur
les charges de maintenance et d’entretien (20 % du total) qui ont été
externalisées dans des conditions favorables, ainsi que sur les charges de
personnel (40 % du total), avec une diminution de 30 % des effectifs
depuis 2002 et une réduction de l’équipe de direction qui s’est notamment
traduite par la suppression du poste de directeur général adjoint, directeur
du parc.
En ce qui concerne les recettes d’exploitation, l’allongement en
2005 de la période d’ouverture en décembre (+ 86 000 entrées) a permis
de masquer la stagnation de la fréquentation en haute saison, tandis que
l’augmentation régulière des tarifs de la billetterie (15 % pour les billets
plein tarif sur la période 2002/2007), atténuée par des opérations
promotionnelles, n’a eu qu’un faible impact sur le chiffre d’affaires, le
panier moyen par visiteur n’augmentant pas significativement par
ailleurs. En revanche, les recettes du parking constituent une ressource
évolutive et rentable du fait de l’amortissement de l’infrastructure. A
noter également que les réservations via le site Internet augmentent
fortement depuis 2003, assurant une progression des ventes à moindre
coût.
Ces efforts de gestion, s’ils méritent encore des prolongements
dans certains domaines, ne permettent pas de dégager un excédent brut
d’exploitation
susceptible
de
financer
le
renouvellement
des
investissements (« petit équilibre »). Cette situation rend nécessaire un
soutien continu de son principal actionnaire public qui prend en charge
462
COUR DES COMPTES
par ailleurs une grande partie des équipements immobiliers et qui
intervient financièrement selon des modalités qui restent perfectibles.
B -
Les relations avec le département de la VIENNE
La société agit dans un cadre conventionnel qui la lie étroitement
au département de la Vienne, à la fois actionnaire majoritaire et
propriétaire bailleur des infrastructures.
1 -
Les financements publics au bénéfice de la SEML
La SEML a bénéficié sous diverses formes d’interventions
publiques.
En premier lieu, les augmentations de capital qui ont représenté
31,4 M€ entre 2004 et 2006 (26,6 M€ pour le département et 2 M€ pour
la région) ont permis la poursuite de l’exploitation de la SEML et
pourraient, pour la part revenant aux actionnaires publics, être
considérées comme des avantages concurrentiels au sens des règles
communautaires. En 2006, la SEML a procédé à une opération de
recapitalisation (« coup d’accordéon ») qui s’est traduite pour les
actionnaires publics par une perte de 57,9 M€ (48,4 M€ pour le
département et 9,5 M€ pour la région). A l’issue de cette opération, le
capital de la SEML s’est établi à 6,6 M€, dont 4,84 M€ apportés par les
deux collectivités locales.
Ensuite, le bail administratif consenti à la SEML par le
département pour la jouissance des infrastructures, s’il prévoyait à
l’origine une redevance annuelle représentant 5 % de la valeur brute des
actifs, a fait l’objet de plusieurs abandons de créances entre 2003 et 2006,
pour un total de près de 17 M€. Puis la redevance a été réduite à 2,5 % de
la valeur des actifs, avant d’être ramenée « dans l’attente d’un retour à
meilleure fortune » à 1,25 % pour les exercices 2005 à 2007. Or, dès
2002, la chambre régionale des comptes de Poitou-Charentes avait relevé
que le niveau initialement fixé à 5 % était insuffisant pour couvrir la
charge théorique d’amortissement des investissements assumés par le
département
159
.
Par ailleurs, le département a accordé à la société une garantie
d’emprunt de 1 M€ en 2004 et s’est substitué à la SEML pour rembourser
au groupe Amaury une partie des 16 M€ qu’elle lui devait au titre de la
reprise des biens (soit un montant de 11,2 M€).
159) Relevé d’observations définitives (ROD) - Département de la Vienne - 13 mai
2002.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
463
De même, divers abandons de créances ont été accordés par le
département pour le paiement des pénalités de retard du loyer pour les
exercices 2003 à 2005, mais leur montant reste modique (0,5 M€
environ).
Enfin, la gare du Futuroscope, utilisée à 50 % environ par des
clients du parc,
a été financée par le département pour un montant de
9,3 M€. Ce dernier a également pris en charge chaque année des
opérations de communication bénéficiant au parc (2,3 M€ en 2003,
1,5 M€ en 2004 et en 2005, puis 3 M€ en 2006), pour un total de plus de
8 M€.
Le total des financements publics versés entre 2002 et 2006 par le
département et dans une moindre mesure par la région peut ainsi être
évalué à
près de 100 M€. Or, certaines de ces aides sont susceptibles de
contrevenir aux dispositions nationales et communautaires.
Au plan national, la loi du 27 février 2002, confirmée par la loi du
13 août 2004, soumet à une convention préalable avec la région le
financement de toute aide d’une collectivité versée au titre du
développement économique, ce qui n’a pas été appliqué. Par ailleurs
l’article L 1522-5 du CGCT interdit les avances aux SEM lorsque les
pertes accumulées réduisent les capitaux propres à la moitié du capital
social, ce qui a été le cas entre 2003 et 2006.
Au plan communautaire, certaines aides accordées à la SEML, qui
exerce une activité concurrentielle, pourraient également être considérées
comme irrégulières, d’une part, parce qu’elles ne rentrent pas dans les
« compensations publiques » admises le cas échéant pour les « services
d’intérêt économique général » et, d’autre part, parce qu’elles n’ont pas
été notifiées à la commission européenne.
Ainsi, la société s’est exposée au risque de non reconduction des
aides, voire à celui du remboursement provisoire ou définitif des aides
perçues, ce qui
serait, compte tenu de leur caractère financièrement
indispensable, susceptible de remettre en cause la continuité de
l’exploitation.
2 -
Les conventions avec le département
Le département a fait le choix de confier la gestion du Parc par bail
administratif, au terme duquel la SEML ne serait qu’un locataire chargé
d’exploiter les infrastructures mises à sa disposition.
Le bail a été conclu en 1999 et a fait l’objet de plusieurs avenants
dont l’un supprime en 2003 la disposition initiale selon laquelle l’activité
exercée ne saurait être considérée comme un service public.
464
COUR DES COMPTES
Depuis l’origine, et du fait de nombreuses stipulations exorbitantes
du droit commun figurant dans le bail, une incertitude existe néanmoins
sur la qualification de l’activité exercée par la SEML qiu pourrait relever
éventuellement de la délégation de service public.
En effet, si cette activité n’est pas évidente pour un parc récréatif,
elle ne saurait être totalement écartée du fait de l’intervention directe du
département dans la gestion de la société. En effet, celle-ci s’est
notamment traduite par les conditions imposées par le département à la
SEML dans le protocole d’accord de 2002, par l’élaboration par
l’assemblée départementale de la politique générale de la société, par
l’octroi d’avantages tarifaires spécifiques en faveur du département ou
par la mise à disposition gratuite des infrastructures, obtenue par exemple
en 2003 et 2005 pour accueillir le championnat du monde de boxe WBA.
En outre, d’autres parcs récréatifs ont pu faire l’objet de
délégations de service public et la commission européenne a pu, dans le
cas d’un parc ouvert en 2006 en France, retenir la qualification de service
d’intérêt économique général, sous réserve d’une définition précise des
obligations associées.
La décision du département d’expurger en 2006 le bail
administratif de plusieurs clauses exorbitantes du droit commun ne saurait
mettre un terme à l’ambiguïté qui subsiste dans la nature juridique de ses
relations avec la SEML.
La clarification des relations du département et de la SEML n’est
donc pas achevée et pèse pour une grande part sur les perspectives
d’évolution du Parc.
C -
Les perspectives d’évolution du parc
Alors que le marché très concurrentiel des parcs récréatifs n’est pas
actuellement en expansion, les améliorations apportées à la gestion
atteignent leurs limites et si la SEML parvenait à l’équilibre, ce qui est
peu probable à moyen terme, celui-ci resterait précaire.
1 -
Les marges de manoeuvre actuelles
Les augmentations de recettes à venir ne peuvent qu’être limitées,
l’augmentation des tarifs risquant de nuire à la fréquentation, comme le
montrent les tarifs pratiqués par d’autres parcs de loisirs et les analyses
conduites par la SEML elle-même auprès de sa clientèle. Une marge de
progression existe néanmoins en matière de restauration et d’activité des
boutiques, même si elle reste aléatoire, car sujette à l’évolution de la
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
465
conjoncture et du pouvoir d’achat des visiteurs. Le tarif des parkings
semble avoir atteint un palier après les fortes augmentations de
2005/2006. Quant aux droits éventuels perçus pour l’exportation du
concept du Futuroscope à l’étranger, telle qu’elle est actuellement
envisagée, ils ne peuvent représenter un apport substantiel.
En matière de dépenses, la société a réussi à stabiliser ses charges
de structure, notamment en matière de personnel et de maintenance, et la
diminution des charges réelles de fonctionnement ont diminué entre 2003
et
2005
alors
même
que
l’activité
progressait.
Les
économies
envisageables sur d’autres postes semblent désormais limitées, sauf à
diminuer radicalement la période d’ouverture du Parc, ce qui pourrait par
ailleurs avoir des retombées commerciales négatives.
L’équilibre
à
court
terme
suppose
selon
la
SEML
une
fréquentation supérieure à 1,6 million de visites, soit 150 000 visites de
plus qu’en 2005, à conditions inchangées en matière de tarifs, de
prestations, de période d’ouverture et de niveau de loyer.
2 -
Les perspectives à moyen et long terme
Seules une fréquentation très nettement supérieure au niveau actuel
et une augmentation significative du « panier moyen » de chaque visiteur
(41 € en 2005) pourraient permettre d’envisager un véritable équilibre
d’exploitation à moyen terme. C’est pourquoi la société doit poursuivre
son action sur ces deux facteurs, même s’ils sont tributaires du contexte
économique général, de l’image du parc ou des comportements des
consommateurs.
En tout état de cause, cet équilibre resterait fragile car il suppose le
maintien des conditions financières favorables accordées par le
département, que ce soit en tant que bailleur ou qu’actionnaire principal.
Il suppose aussi pour préserver l’image de modernité du parc que des
investissements soutenus et récurrents soient effectués pour renouveler
les attractions proposées et maintenir son attrait commercial.
A terme, le Futuroscope ne semble donc pouvoir réaliser un
excédent brut d’exploitation qu’à la double condition que le maître
d’ouvrage public intervienne pour assurer le renouvellement de l’offre et
qu’il prenne en charge certaines « dépenses de service public » au sens de
la réglementation européenne, sous réserve toutefois que le caractère de
« service d’intérêt économique général » soit reconnu en tout ou partie à
l’équipement.
466
COUR DES COMPTES
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Dans un souci de bonne gestion, la SEML doit d’abord
poursuivre
les efforts entrepris pour maîtriser ses charges d’exploitation et
augmenter son chiffre d’affaires.
Pour diminuer les risques résultant de l’octroi d’aides publiques
qui compensent l’insuffisance de sa rentabilité, elle doit également
s’assurer que les acteurs publics qui concourent à alléger ses charges :
- se conforment aux règles nationales en matière d’interventions
économiques des collectivités locales ;
- s’inscrivent le cas échéant dans la cadre dérogatoire des
compensations de service public ou des aides notifiées
préalablement pour respecter le cadre communautaire.
Une clarification des relations juridiques avec le département de
la Vienne, qui se fondent sur un bail administratif, devra également être
poursuivie si la volonté des deux opérateurs
est d’éviter une possible
requalification en délégation de service public qui ne saurait être
totalement écartée malgré les modifications récentes apportées au bail
initial.
En tout état de cause, et quelles que soient les modalités de
l’intervention de la collectivité publique en faveur du Parc, la
transparence recherchée dans la définition et le niveau des aides
accordées doit se doubler d’un souci d’évaluer de manière continue
les
effets induits du Parc en matière économique et touristique, seuls
susceptibles de rendre légitime la mobilisation permanente d’importants
fonds publics locaux
en faveur de cet équipement.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
467
III
-
L'opération Cap’Découverte
A - Une opération globale de reconversion
1 -
La reconversion d’un site minier
Après la décision de fermeture des dernières mines souterraines
d’Albi-Carmaux dans le Tarn, l’Etat avait tenté, au milieu des années 80, de
redonner un avenir au charbon en ouvrant une mine à ciel ouvert à Blaye-
les-Mines. Le 30 juin 1997, face à la concurrence du charbon importé dont
le coût de revient est bien inférieur, les Houillères du bassin du centre et du
midi (HBCM) sont contraintes de fermer cette mine, laissant un site en
friche de plus de 800 ha s’étendant sur le territoire de 5 communes rurales
du Carmausin
160
.
Fin 1997, à l’issue d’un concours international d’idées qui oriente la
reconversion de cette zone en un site touristique consacré aux loisirs, les
cinq communes concernées et celle de Carmaux, qui regroupent une
population d’environ 20 000 habitants, forment un syndicat intercommunal
dit « de la Découverte » (SID) pour porter le projet. Après plusieurs études
exploratoires, le syndicat arrête, par délibération du 24 mars 2000, le
programme
d’aménagement
d’un
complexe
de
loisirs,
nommé
Cap’Découverte, articulé autour de 3 pôles : un pôle "sports et loisirs"
(activités de glisse et nautiques), un pôle "spectacles" et un pôle "mémoire"
(musée, parc des Titans
161
et jardin botanique). Le Comité interministériel
d’aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 18 mai 2000
avalise un projet financé à 80 % par des subventions publiques, notamment
de l’Union européenne et de l’Etat.
L’engagement des crédits de l’Etat et de l’Europe avait pour
contrepartie l’implication de la région Midi-Pyrénées et du département du
Tarn dans l’opération. Ces collectivités ayant toutefois souhaité limiter leur
participation à l'investissement, il en est résulté la constitution en octobre
2000 d’une seconde structure publique le Syndicat mixte d’aménagement
de la Découverte (SMAD), regroupant à parts égales
la région Midi-
Pyrénées, le département du Tarn et le SID. Chargé uniquement de la
maîtrise
d’ouvrage
des
opérations
d’aménagement
sur
la
zone
d’aménagement concerté (ZAC) le SMAD se retrouve ainsi propriétaire de
l’essentiel des équipements de Cap’Découverte, ceux-ci étant mis à
disposition du SID depuis 2002, moyennant le paiement d'une redevance
d'utilisation.
160) Blaye-les-Mines, Cagnac-les-Mines, Le Garric, Saint-Benoît-de-Carmaux et
Taïx.
161) Exposition d’engins d’extraction minière.
468
COUR DES COMPTES
Il apparaît en réalité aujourd'hui que les promoteurs de l'opération
n'ont pas suffisamment pesé les conséquences de cette dualité de
structures. Elle fausse la vision d’ensemble de l’opération : le SMAD
décide des investissements à réaliser sans avoir à les exploiter, tandis que
le SID, organisme gestionnaire, ne dispose pas des actifs correspondants,
ni ne supporte les conséquences de leur usure et de leur remplacement.
A
cet égard, la redevance d’utilisation prévue n'ayant jamais été acquittée
par le SID et son abandon ayant été formellement acté en 2005 pour ne
pas aggraver la situation financière de ce dernier, le SMAD se trouve
privé d'une ressource courante destinée à couvrir ses charges et
s’appauvrit d’autant. Elle est aussi source de complications juridiques,
fiscales
162
et de coûts administratifs supplémentaires.
2 -
La réalisation et le financement de Cap’Découverte
Lors du CIADT de mai 2000, le montant prévisionnel
163
des
dépenses de l’opération Cap’Découverte avait été évalué à 54,9 M€ HT,
dont 48,2 M€ d’études et travaux et 6,7 M€ de dépenses administratives
(frais de gestion, financiers et de communication), financé à hauteur de
48,8 M€ par des subventions publiques
164
et de 6,1 M€ par la vente d’une
partie des terrains du site déclarés en zone d’aménagement concertée
(ZAC). En 2006, le coût définitif du complexe, achevé 3 ans plus tôt,
englobant l’ensemble des dépenses engagées, est estimé à 66 M€ HT,
représentant une hausse de 20%
par rapport au coût prévisionnel
initial
165
.
Parmi les travaux complémentaires et les modifications de
programme décidés au cours du chantier figurent des terrassements
supplémentaires concernant la piste de ski,
suite à un glissement de
terrains (2,7 M€) sur un site en forte pente composé de terrains
remblayés, ou encore le changement de localisation du Parc des Titans
après la signature des marchés de travaux.
162) Le SMAD doit acquitter à la place du SID la TVA collectée fictivement sur la
redevance qu'il aurait dû payer, restituant ainsi progressivement le montant de
l'exonération de TVA dont il a bénéficié sur certaines de ses immobilisations.
163) Actualisations et révisions de prix incluses. Ce coût est exclusif des dépenses
d'investissement réalisées sur la zone de la cokerie et le centre d'appel de Carmaux,
deux opérations également portées par le SID mais situées en dehors du site de Cap’
Découverte.
164) 15,3 M€ de crédits FEDER, 15,3 M€ de crédits Etat et 6,1 M€ de chacune des
collectivités suivantes : SID, région Midi-Pyrénées, département du Tarn.
165) Non comptés 2,3 M€ de réclamations déposées par 5 entreprises attributaires de
marchés de travaux pour des prestations supplémentaires réalisées et non réglées.
Dans ce montant, les actualisations et révisions de prix se révèlent inférieures au
montant estimé initialement (1,33 M€ contre 1,403 M€)
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
469
La hausse du coût de l'opération (+ 10 M€, hors frais financiers)
n'a été que partiellement compensée par des compléments de subventions
(+2,5 M€) -
leur montant s’élevant in fine à 51,3 M€ - Il en est résulté un
déséquilibre du plan de financement auquel le maître d'ouvrage a remédié
par le recours à une ligne de trésorerie, génératrice de frais financiers
supplémentaires (1 M€) à imputer à l'opération. Le recours à cette
modalité de financement, partiellement justifié par le versement tardif de
subventions, a atteint 22,9 M€ en 2004, avant d’être réduit à 4 M€ en
2006 par un remboursement partiel permis par
le versement d'un solde de
subventions attendues et par la consolidation en 2005 de 12 M€ sous
forme
d’emprunts
dont
la
charge
de
remboursement,
faute
d'autofinancement,
devra être supportée par les membres du SMAD.
B - Les difficultés d'exploitation du complexe
Dès son ouverture, le complexe Cap'Découverte a été confronté à
des difficultés techniques. Le remplissage insuffisant du lac artificiel, en
raison de la baisse de la nappe phréatique résultant du manque de
précipitations
166
, n'a
pas permis la mise en place en 2003 d'une partie des
activités nautiques. La piste de ski synthétique n'a pu être installée à la
date prévue en raison d'un drainage insuffisant du terrain. Le système
monétique permettant le contrôle d'accès et de paiement électronique des
activité, après des pannes nombreuses et régulières obligeant les
organisateurs à oeuvrer manuellement, a finalement été abandonné en
juillet 2004.
Fait plus important, la fréquentation n'a pas été à la hauteur des
prévisions. Les études de faisabilité envisageaient qu’un régime de
croisière serait atteint dès la 4
ème
année, avec 615 000 visiteurs
représentant 660 000 entrées payantes
167
. Or de 2003 à 2005, le nombre
annuel d’entrées payantes sur l’ensemble des trois pôles n’a jamais
excédé 65 000, soit moins de 10% du niveau estimé. Le seul complexe de
sports et loisirs devait attirer 340 000 visiteurs annuels pour 374 750
entrées payantes. Celles-ci se sont élevées à 48 500 en 2003,
34 050 en
2004 et
moins de 40 000 en 2005. Le pôle des spectacles (maison de la
musique) n'a enregistré que quelques milliers de visiteurs, contre 113 250
166) Le plan d'eau artificiel actuel (cote 130 NGF), réalisé au fond de la fosse de
l’ancienne mine à ciel ouvert, est alimenté par remontée naturelle des eaux et se situe
sous le niveau de la nappe phréatique (cote 220 NGF), nécessitant la présence
permanente de deux pompes pour stabiliser son niveau et éviter l'immersion d’une
partie des installations du complexe « sports et loisirs », avec un coût de
fonctionnement annuel qui avoisine les 90 000 €.
167)
Un même visiteur pouvant pratiquer plusieurs activités.
470
COUR DES COMPTES
prévus, et le pôle mémoire 25 000 entrées, essentiellement au musée de la
mine, contre 140 000 escomptées, dont 80 000 au jardin carbonifère.
L’écart
important
entre
les
prévisions
et
la
réalité
des
fréquentations a plusieurs causes.
En premier lieu des handicaps difficiles à surmonter se sont révélés
déterminants. La zone de chalandise retenue s’est avérée trop large,
alors
que le site est, de surcroît, d’un accès peu aisé tant par la route que par le
rail. La difficulté de cibler la clientèle potentielle
168
et le concept
insuffisamment clair du produit n’ont pas facilité l’insertion du parc
dans
une offre de loisirs devenue très concurrentielle
169
.
La mauvaise anticipation de l’importance de ces handicaps a eu
d’autant plus d’impact que l’on envisageait des niveaux de fréquentation
manifestement trop ambitieux.
En Midi-Pyrénées seules des villes dotées d’un patrimoine
historique et religieux exceptionnel sont susceptibles d’attirer chaque
année un public aussi nombreux que celui qui était envisagé.
Les promoteurs du projet invoquent aussi comme explication le
fait que l'opération réalisée est assez différente du projet. Ainsi, tous les
équipements envisagés n'ont pas été réalisés. Faute d'intérêt des
opérateurs privés, il a été renoncé à la construction de structures
d'hébergement pouvant accueillir jusqu'à 1 600 personnes simultanément,
la capacité d'accueil étant à ce jour de 165 lits ;
le tracé de la piste de ski
a été modifié et sa longueur réduite ; le jardin botanique est de même
moins étendu que prévu ; enfin le parc des Titans a été laissé à l'abandon.
On peut toutefois se demander si ces réductions du programme
n'ont pas eu, au contraire, pour conséquence de limiter l'ampleur d'un
déficit rendu inévitable
170
par l’insuffisante attractivité du site et tout un
ensemble de contraintes et de risques que les études et expertises initiales
n’ont pas su correctement anticiper.
168) 80% des visiteurs se sont avérés être des résidents de 15 à 30 ans, alors que cette
tranche de la population n’excède pas les 200 000 personnes dans la zone principale
de chalandise (moins d’une heure de trajet).
169) Cap'Découverte cumule les thématiques, engendrant une offre que les
professionnels du secteur considèrent comme peu lisible et nuisant à son attractivité.
En outre les villes situées dans la zone présumée d'attraction disposent souvent
d'équipements ou mettent en oeuvre des spectacles concurrents.
170) La plupart des parcs régionaux qui ont tenté de se transformer en parcs de
destination n'ont pas vu leur fréquentation augmenter de manière significative (cf
étude: "Parcs de loisirs: Etat du marché et facteurs d'évolution", AFIT,
2004).
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
471
C - L'impossibilité d'assurer l'équilibre financier de
l'opération
Les écarts constatés entre réalisation et prévision remettent
aujourd’hui en cause l’économie de l’opération.
La chambre régionale des
comptes de Midi-Pyrénées a ainsi estimé que les dépenses de
fonctionnement des seules activités du complexe "sports et loisirs" ne
seraient susceptibles d'être couvertes qu'à partir d'un seuil de 200 000
visiteurs payants annuels, fréquentation très éloignée de celle observée
171
.
La réalisation du "petit équilibre" financier
172
des trois pôles de la
Découverte, nécessiterait quant à elle 340 000 entrées payantes
173
.
L'insuffisance des recettes d'exploitation a eu pour conséquence le
déséquilibre des comptes du SID, syndicat gestionnaire, celui-ci allant
jusqu'à s'abstenir de voter ses budgets. Elle a aussi mis en difficulté les
six communes membres du syndicat. La chambre régionale des comptes de
Midi-Pyrénées a, dans ces conditions, été saisie par le préfet du Tarn, d'une
part, du défaut d'équilibre réel du budget primitif de 2004 et du refus de
vote des budgets primitifs 2005 et 2006 du SID, d'autre part, du défaut
d'équilibre réel des budgets des six communes membres pour 2005 et 2006,
lesquels ne comportaient pas les participations nécessaires pour équilibrer
le budget du SID.
Ses avis ont conduit le préfet du Tarn à devoir régler d'office les
budgets du syndicat et des communes. L'arrêté préfectoral pris en 2005
pour le syndicat a ainsi prévu l'inscription en recettes, outre le produit de la
vente d'actifs et une subvention exceptionnelle de la Région de 1,2 M€, une
augmentation de la participation des communes membres. L'obtention par
les communes d'aides exceptionnelles de l'Etat a permis, cette année-là,
d'éviter une forte hausse de la pression fiscale. Toutefois, en raison d'une
insuffisance récurrente de recettes d'exploitation, la chambre a été saisie
dans les mêmes conditions en 2006 du budget primitif 2006 du SID et de
ceux des six communes. Ses propositions au préfet, en l'absence de recettes
d'autofinancement et de nouvelles aides de l'Etat ou d'autres collectivités
171) Toutes choses égales par ailleurs, sur la base des données comptables de l'année
2004, et non comptées les dépenses d'entretien général du site qui ne sont pas reprises
dans le budget annexe dédié à ces activités (budget "sports et loisirs").
172) Dans ce cas de figure, la couverture des charges d'investissement n'est pas
recherchée.
173) Les opérations liées à la zone d'activité de la cokerie et au centre d'appel de
Carmaux ne sont pas prises en compte dans ce bilan. Ces 2 opérations ont vocation à
être couvertes par des loyers et des produits de cessions de terrains, avec un retour sur
investissement, compte tenu des subventions reçues, sur treize ans sur la base d'un
taux d'actualisation de 4%.
472
COUR DES COMPTES
ont comporté une augmentation de la fiscalité de 3,6 M€ sur l’ensemble de
ces six communes, représentant en moyenne une augmentation de 81% du
produit de leurs taxes directes locales. A situation inchangée, le déficit
annuel du SID sera dans les prochaines années au minimum de l’ordre de
3,5 M€, ce qui révèle le caractère très négatif du bilan financier de cette
opération et rend insoutenable pour les contribuables locaux la poursuite de
cette activité.
D - Un bilan socio-économique décevant
et un avenir incertain
Cap’Découverte a été conçu comme une opération de reconversion
du territoire susceptible d’induire des externalités socio-économiques, avec
pour objectif la redynamisation du bassin d’emploi du Carmausin affecté
par la fin des activités d’extraction charbonnière. Le SID escomptait, au
début de l’année 2000, la création de 250 emplois directs et 1 000 emplois
induits, par l’implantation ou l’extension d’entreprises dans la région.
Jusqu’en 2006, le nombre total d’emplois directs publics et privés
créés sur la ZAC de la Découverte n’a jamais dépassé 160, dont la moitié
de saisonniers. Les retombées socio-économiques envisagées initialement
par le syndicat ne sont donc pas au niveau des espoirs suscités. Les
300 emplois indirects du centre d’appels à Carmaux, dont la construction a
été décidée antérieurement, ne peuvent pas en toute rigueur être
comptabilisés au bénéfice du seul complexe Cap’Découverte.
Ainsi les effets positifs tirés de l'opération n'apparaissent-ils pas
aujourd'hui à la hauteur de l'effort financier consenti par les collectivités
publiques (66 M€ HT). Il est à cet égard regrettable que, dans un contexte
de rareté de la ressource publique, cette opération n’ait pas fait l’objet d’un
éclairage plus complet sur sa rentabilité socio-économique, mettant en
balance les avantages attendus et les coûts supportés par la collectivité. On
peut de même regretter que les décideurs publics n’aient pas cherché à
valider les choix d’investissement en examinant une hypothèse basse
(scénario pessimiste) de fréquentation et en réalisant des études de
sensibilité de la rentabilité économique du projet à la dégradation de
certaines hypothèses et en étudiant, le cas échéant, des solutions de
réversibilité.
L’ampleur des aides exceptionnelles accordées directement aux
deux syndicats et aux communes membres du SID pour qu'elles
s'acquittent de leur participation à l'équilibre des comptes du syndicat suffit
à démontrer le caractère insoutenable de la poursuite de l’activité de
Cap’découverte dans les conditions actuelles. Le constat s'impose
notamment que les communes membres du SID n'ont pas la surface
financière requise pour porter l'opération de la Découverte.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
473
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Dans tous les cas, la poursuite de l’activité de Cap’Découverte ne
sera viable que si des décisions déterminantes sont prises, susceptibles de
réduire
considérablement
les
charges
d’exploitation du
syndicat
intercommunal de la découverte. Une première étape logique serait sa
fusion avec le syndicat mixte d’aménagement (SMAD), l'hypothèse d'une
fermeture totale ou partielle ne pouvant être écartée, à la lumière d'un
bilan socio-économique de la poursuite de l'activité.
La gravité de la situation actuelle constitue un défi qui impose
une
collaboration étroite de tous les acteurs publics impliqués : l’Etat, la
région Midi-Pyrénées, le département du Tarn et les six communes
membres du SID.
****
________________
CONCLUSION GENERALE
_______________
Au-delà des remarques propres à chacun des cas particuliers
présentés ci-dessus, la Cour souhaite tirer quelques enseignements
communs à toutes ces opérations.
- Les évaluations de fréquentation doivent être particulièrement
prudentes. Le nombre de visiteurs n’est pas indéfiniment croissant,
surtout dans un secteur devenu très concurrentiel, qu’il s’agisse des
loisirs ou du tourisme culturel, et les comportements évoluent parfois
assez vite. Il en va
de même des retombées économiques.
- Les systèmes et les structures de gestion doivent être adaptés au
type d’opération concerné. La surface financière des exploitants doit être
suffisante, notamment pour faire face aux exigences de renouvellement
des équipements qui sont très fortes, en particulier pour les parcs à
thème, et pèsent lourdement sur les équilibres financiers des exploitants.
Le recours à des opérateurs privés par le biais de la concession n’est en
aucune manière une panacée, mais une telle présence dans un montage
financier peut servir d’utile clignotant en matière de risques encourus et
d’analyse de la rentabilité.
Si dans certains cas, le recours à l’établissement public de
coopération culturelle peut aider à la mise en place d’une solution
professionnelle, la jeunesse de la formule ne permet pas encore d’en tirer
un bilan ; elle ne peut en tout cas, à elle seule, résoudre les risques
financiers inhérents à certaines de ces
réalisations.
474
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DU MINISTRE DES PETITES ET MOYENNES
ENTREPRISES, DU COMMERCE, DE L’ARTISANAT ET DES
PROFESSIONS LIBÉRALES
A LA PARTIE
« I
-
L’AMENAGEMENT DU SITE DU « PONT DU GARD »
J’ai l’honneur de vous faire savoir que je n’ai pas d’objection à
formuler sur l’ensemble des analyses de la Cour des comptes.
Toutefois, j’appelle votre attention sur les dispositions issues de la loi
n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises et
de ses décrets d’application en cours d’élaboration qui devraient permettre,
en déconcentrant l’autorité de tutelle, d’exercer un contrôle plus étroit sur
les initiatives des chambres de commerce et d’industrie dans le domaine
notamment des opérations d’aménagement.
Le projet de décret relatif à la tutelle financières prévoit, en effet,
dans son article 29 que :
« Les délibérations relatives aux actes mentionnés ci-après sont
exécutoires dès qu’elles ont été approuvées par le Préfet :
……………
4° - Les projets de conventions, d’avenants et de renouvellement de
conventions par lesquelles l’établissement reçoit délégation de la gestion
de services ou d’équipements publics. »
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL DU GARD
A LA PARTIE
« I
-
L’AMENAGEMENT DU SITE DU « PONT DU GARD »
Il apparaît important de souligner que le Département s’est impliqué
depuis 1987 dans un programme d’aménagement du site du Pont du Gard
retenu par le Secrétariat d’Etat aux
Grands Travaux. Cette décision faisait
suite à l’inscription de cet ouvrage au patrimoine mondial de l’UNESCO
depuis 1986.
La volonté départementale visait, outre la mise en valeur du Pont et
sa consolidation, à créer autour de l’ouvrage des structures commerciales
d’accueil et d’animation en cohérence avec ce monument antique le plus
visité de France.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
475
Le programme a été élaboré en étroite collaboration avec un Comité
Scientifique créé en janvier 1988 et composé d’éminents spécialistes en
archéologie, architecture antique et protection de la faune et de la flore, et
présidé par M. Guy Barruol, Directeur de recherche au C.N.R.S et
Inspecteur général de l’archéologie.
Par ailleurs, le Conseil général a été amené à retenir un concepteur
au terme de procédures et modalités conformes au Code des marchés publics
pour la conception des ouvrages relatifs à l’opération pour la « Protection
du site historique et écologique du Pont du Gard ».
Au regard du rapport présenté ci-avant, il convient de formuler
quelques observations en réponse même si, pour certaines, elles concernent
des situations ne relevant pas de décisions de l’actuelle majorité du
Département, et notamment de son Président, élu initialement en 2001.
1 - sur le choix de la CCI comme entité responsable de la gestion
Lors du changement de majorité en 1994, le Département conscient
de l’ampleur prise par le projet - on parle alors de 44 M€ - a souhaité
recentrer le programme, procéder à son adaptation,
mais aussi approfondir
la dimension culturelle axée sur l’histoire de la romanité.
On assiste, paradoxalement mais nécessairement à une continuité du
programme initial ainsi qu’à un souci d’opérationnalité qui conduit au choix
d’un concessionnaire « local ».
La désignation de la Chambre de Commerce et d’Industrie ( CCI ),
bien qu’effectuée en l’absence de mise en concurrence, n’est pas contraire
aux dispositions du Code des marchés publics ante 2001, le principe de
soumission entre personnes publiques découlant d’un arrêt du Conseil d’Etat
de 1998 ( CE, 20 mai 1998, Communauté de communes du Piémont de Barr,
n°188235).
La CCI détenait des références locales qui sont, à l’époque, apparues
significatives et marquantes avec la réalisation de Port Camargue, premier
port de plaisance européen, ainsi que celle de l’aéroport de Nîmes, mais
aussi par une grande expérience dans le secteur du logement social.
En outre, la dimension économique de l’impact d’un aménagement
d’un secteur éminemment touristique orientait naturellement le choix vers ce
prestataire.
Le site unique et l’opération « prototype » engagée mais surtout la
volonté de conserver l’identité locale du paysage et de l’environnement
favorisaient la recherche d’un intervenant local mais aussi d’une structure
garante de l’intérêt public.
476
COUR DES COMPTES
Il paraissait intéressant, enfin, de confier à cette structure
d’émanation étatique et sous tutelle du Ministère de l’Economie et des
Finances l’aménagement et l’exploitation d’un site pour lequel l’Etat
participait à
hauteur de 20% au financement.
La qualité de personne publique du concessionnaire et l’absence de
contraintes juridiques spécifiques imposées par les textes ont conduit à
l’élaboration concertée d’un traité de concession, donnant l’apparence d’une
certaine souplesse, mais témoignant du souci du Syndicat Mixte d’un partage
des
risques
compatibles
avec
la
nécessaire
confiance
entre
les
cocontractants.
2 - sur le principe de la gratuité d’accès
S’agissant de l’impact du principe de la gratuité, il semble essentiel
d’insister
sur
le
caractère
politique d’une
telle
décision
émanant
d’assemblées délibérantes démocratiquement élues et responsables.
En effet, et le choix de la CCI comme concessionnaire procédait de la
même logique, la dimension incontestablement d’intérêt général que le
Syndicat mixte – et donc l’ensemble de ses membres – a souhaité conférer au
projet d’aménagement du site impliquait que l’accès restât gratuit. Au-delà
des arguments juridiques qui auraient pu justifier telle ou telle discrimination
tarifaire, il a semblé essentiel de traduire la volonté politique d’assurer un
libre accès et une libre circulation au sein d’un monument historique et
éminemment culturel par la mise en place d’une gratuité pour le seul accès
au site.
Il est d’ailleurs à noter que le traité de concession prévoyait la
compensation au profit du concessionnaire du manque causé par cette
gratuité, attestant par là-même de la volonté du Syndicat mixte de ne pas
grever la gestion de l’opérateur consulaire.
3 - sur l’absence de convention de résiliation
Comme la Cour des Comptes le constate elle-même, la CCI a décidé
de se désengager de la gestion du site, alors que le traité de concession
courrait pour 50 ans. C’est cette situation que l’exécutif départemental issu
des élections cantonales de 2001 a eu à gérer dans l’urgence. Pour autant,
un certain nombre de garanties juridiques et financières ont alors été prises.
Ainsi, une convention de résiliation a été régulièrement établie en
deux exemplaires signés le 30 juillet 2002 entre le Président du SMPG et le
Président de la CCI. Elle a fait l’objet d’un dépôt auprès du représentant de
l’Etat le 17 octobre 2002.
Les actes passés par la CCI durant cette période transitoire ne
semblent pas présenter de fragilité juridique particulière, dans la mesure où
ils étaient prévus par le protocole de sortie de la concession, dans le cadre
de lois et règlements en vigueur.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
477
En ce sens, la passation des marchés pour l’entretien et le nettoyage
du Pont du Gard ainsi que pour la surveillance nocturne du Pont
constituaient des actes de gestion courante qui figuraient parmi les
obligations de la CCI au terme de la convention de résiliation. Les délais
imposés par les procédures du Code des marchés publics nécessitaient une
nécessaire anticipation qui ne pouvait émaner d’un établissement public
juridiquement inexistant.
Par ailleurs, il a été fait appel à un prestataire de service extérieur
chargé notamment d’un contrôle de la facturation durant la période
transitoire.
4 – Sur le bilan global de l’opération
4-1 – Sur l’absence de sanctions coercitives à l’encontre de la CCI :
La résiliation de la concession est la conséquence directe de la
surestimation par la CCI elle-même, de sa capacité tant technique que
financière, à assumer un tel projet.
Néanmoins, on doit noter au crédit de la CCI qu’elle a réussi le
réaménagement du site qui a reçu le prix de l’art urbain 2004 qui a
récompensé sa démarche d’opérateur au regard de la qualité architecturale,
la qualité de la vie sociale et le respect de l’environnement.
L’absence de sanction à l’encontre du concessionnaire témoigne des
nombreuses concertations entre les représentants du syndicat et de la
structure gestionnaire. De telles mesures coercitives ne pouvaient être
envisagées au regard de l’importance des charges de gestion nécessaires à
une dynamisation en terme de fréquentation de la structure.
Le SMPG aussi bien que le Conseil Général du Gard, ont exécuté le
contrat de concession de bonne foi. Il convenait toutefois de constater – à la
demande expresse de la CCI –
l’impossibilité immédiate de rentabiliser la
gestion de la concession, notamment du fait d’une conception essentiellement
commerciale d’une telle structure, alors même que la concession avait été
prévue pour 50 ans.
4-2 – Sur la création d’un établissement public de coopération culturelle
(EPCC) :
Dans la continuité des orientations culturelles arrêtées pour le site et
conscient de la nécessité de confier la gestion du site à une structure de droit
public, le comité syndical a décidé de recourir à la création d’un EPCC,
nouveau mode de gestion des services culturels institué par la loi du 4
janvier 2002.
Les responsables de ce nouveau type d’établissement public ont
parfaitement
conscience
de
la
nécessité
d’engager
une
politique
promotionnelle forte ainsi que de développer l’accueil de manifestations
culturelles, de séminaires au sein d’une structure parfaitement adaptée.
478
COUR DES COMPTES
En ce sens, la gestion du site du Pont du Gard est assurée depuis le 1
er
mai 2003 par un établissement public de coopération culturelle qui regroupe
l’Etat, le Conseil général du Gard, les communes de Remoulins, Vers et
Castillon du Gard.
Ce nouvel établissement public met en oeuvre une véritable politique
de service public, l’accès au Pont du Gard demeurant libre et gratuit, qui
porte sur quatre points :
Ö
Reprendre et terminer l’aménagement du site
Suite aux inondations de septembre 2002, l’ensemble de la rive droite
– bâtiments et espaces verts – a été réhabilité, ainsi que l’ancien parking
situé en rive gauche. Le bâtiment rive droite a été aménagé pour accueillir
des séminaires/congrès. Par ailleurs, dans le bâtiment rive gauche, la salle
d’exposition temporaire a été équipée.
Ö
Mettre en place une politique d’animation culturelle
La réalisation d’évènements contribue à animer la vie sociale,
augmenter la notoriété du site et à accroître ses recettes.
Plusieurs manifestations ont été créées :
•
certaines à destination plus particulièrement d’un public
local et régional : « Garrigue en fête », « Rendez-vous à la
rivière », soirées théâtrales et cinéma.
•
d’autres
pour
un
public
national
et
international :
expositions temporaires, concerts, théâtre de rue.
Un effort tout particulier a porté sur l’offre pédagogique, ce qui
permet de répondre aux attentes des scolaires quel que soit le niveau d’étude,
dans la logique d’intérêt général qui structure ce projet.
Ö
Investir dans le domaine de la communication et de la
commercialisation
Il s’agit :
•
d’augmenter la fréquentation des visiteurs en groupe en démarchant les
grands opérateurs mondiaux ;
•
d’augmenter la fréquentation des visiteurs individuels grâce à une
politique de communication plus présente en région et en utilisant les
évènements pour obtenir des retombées média au niveau national ;
•
d’augmenter le niveau des recettes en rendant payants certains services
(parking des autocars…), en créant de nouveaux produits (visites
guidées, audioguides…), en reprenant en direct la restauration sur site
(qui est une prestation stratégique pour les groupes) et en adaptant la
tarification pour les visiteurs locaux (carte d’abonnement annuelle au
parking) notamment pour les familles (forfait famille 20€ parking inclus
qui permet de visiter l’ensemble du site).
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
479
Ö
Disposer d’outils de prévision et de contrôle
Sur le plan financier et comptable
, l’établissement fonctionne avec le
système informatique SAP qui permet de traiter à partir d’une saisie unique :
•
la comptabilité des engagements,
•
la prévision budgétaire,
•
l’analyse des écarts prévision/réalisation,
•
l’analyse des activités
budgétaires du site, qui après un
travail réalisé avec un prestataire de service extérieur ont été
classées en quatre catégories :
o
culturel payant,
o
culturel gratuit,
o
non culturel payant,
o
non culturel gratuit.
Sur le plan commercial
, deux études sont menées chaque année :
•
une auprès des visiteurs du site pendant la période estivale
(échantillon : 1000 personnes) pour connaître l’origine des visiteurs ,
leur comportement sur le site et leur appréciation des prestations
proposées.
•
l’autre auprès de la population locale (échantillon 300 personnes)
pour mesurer la notoriété du site, son taux de visite, l’appréciation de
ses prestations, et mesurer l’impact des événements organisés et des
campagnes de communication.
Ces outils permettent d’affiner les plans d’action et les budgets.
Les premiers résultats de ces différentes actions sont les suivants :
•
Maintien de la fréquentation générale du site à 1 200 000 visiteurs ;
•
Accroissement des entrées dans les musées : 230 000 en 2005 ;
•
Augmentation des recettes d’exploitation qui couvrent 54% des
dépenses d’exploitation ;
L’analyse financière des différentes activités du site et des contraintes
liées à ces activités permet :
•
une bonne lisibilité de l’affectation des contributions publiques,
•
la détermination d’objectifs financiers pertinents et réalistes pour
l’EPCC.
480
COUR DES COMPTES
En 2005, une étude sur les retombées économiques du site du Pont du
Gard a été réalisée par un cabinet spécialisé, qui aboutit aux conclusions
suivantes :
•
chiffre d’affaire généré directement et indirectement par le site :
135 M€
•
emplois générés, directs et indirects : 1209
•
valorisation des retombées « presse » : 2,8 M€
•
impôts générés directement et indirectement : 21,5 M€
Ces retombées, de niveau comparable à celles générées par le Mont St
Michel par exemple, confortent la politique d’aménagement et d’animation
de ce site.
Ces retombées se répartissent ainsi :
•
50% en Languedoc Roussillon (dont
32% pour le département du
Gard),
•
38% en Provence Alpes Côte d’Azur.
Cette analyse montre que le rayonnement du site va au-delà du seul
département du Gard.
C’est bien ce qui a été, semble-t-il,
pris en compte par le Conseil
Régional du Languedoc Roussillon lorsqu’il a décidé de rejoindre l’EPCC
Pont du Gard et de participer à son financement.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE DE COMMERCE ET
D’INDUSTRIE DE NÎMES
A LA PARTIE
« I
-
L’AMENAGEMENT DU SITE DU « PONT DU GARD »
L’insertion au rapport public de la Cour sur l’aménagement du site
du Pont du Gard est un condensé élégamment fait du rapport de la Chambre
Régionale des Comptes du Languedoc-Roussillon sur le même sujet. Mais la
phase de concentration tend à rendre caricaturales certaines remarques de
la Chambre Régionale contre lesquelles la CCI de Nîmes s’était déjà élevée.
Les quelques lignes qui suivent visent à tenter de redresser une image qui
nous paraît devenir inexacte à force d’être sommaire.
Le site du Pont du Gard, célèbre dans le monde entier, était dans un
état de délabrement avancé au début des années 90. Après les diverses
tentatives relatées par la Cour, la CCI s’est trouvée être la seule entité apte
sur le territoire à porter le projet de réhabilitation.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
481
Ce projet a été conduit sans hésitation stratégique, mais avec une
définition progressive intégrant les différentes opinions exprimées par les
élus locaux, les associations, les historiens, et les services de l’Etat.
L’atteinte de ce consensus normal dans un Etat démocratique s’est faite au fil
des années et a conduit à des modifications du programme pour répondre au
mieux aux attentes de tous.
Le résultat est salué par tous, et même le projet de rapport de la Cour
le rappelle. Ce point est en lui-même essentiel : le site est réhabilité et est
bien réhabilité.
Le chantier a été mené par la CCI d’une façon qui mérite d’être
signalée - et l’équipe actuelle de la CCI n’est pas celle qui a mené le chantier
- puisque aucun contentieux sérieux ne s’est élevé sur la construction et que
l’on ne déplore à ce jour aucun dommage mettant en jeu la garantie
décennale. La Cour croit devoir moquer le fait que certaines installations ont
été balayées par les eaux en septembre 2002. Il convient de rappeler que le
bâtiment Rive Droite a été implanté à un mètre au dessus du plus haut niveau
connu des crues avant 2002. Et le système d’éclairage était pour partie
implanté dans un ancien lit du Gardon, mort depuis suffisamment longtemps
pour que des numéros de parcelle avec appropriation privée aient été
attribués aux terrains correspondants. L’eau a emporté toutes ces parcelles,
la terre et les arbres qu’elles contenaient. La Cour est-elle sûre que son siège
ne serait pas inondé si une crue de la Seine s’élevait à Paris à un mètre au
dessus du plus haut niveau connu ? On peut par ailleurs rappeler que les
dégâts ont été relativement bien indemnisés grâce à la qualité des polices
d’assurance de la CCI et à l’énergie avec laquelle elle s’est battue pour
obtenir le remboursement.
Les budgets n’ont pas dérapé, et les augmentations ont résulté de
choix concertés. La construction a été faite globalement au prix prévu. La
Chambre Régionale a cru – à tort, à notre avis - devoir soulever des
irrégularités sur les marchés et le résumé de la Cour semble renforcer cette
idée. La Chambre Régionale n’a pas étayé de façon sérieuse son propos et
elle ne prouve pas ce qu’elle écrit comme nous le lui avons signalé. Les
quelques cas cités par elle, et pour lesquelles l’application de la procédure
peut laisser à désirer, représentent des montants mineurs par rapport au
total du chantier et ne remettent pas en cause le sérieux de l’ensemble.
En particulier, l’importance des réponses locales n’est pas le signe
d’une préférence du donneur d’ordre mais bien la manifestation de l’intérêt
des entreprises locales pour un chantier important par son montant et par
son prestige pour l’économie régionale. La CCI, en incitant les entreprises
locales à participer à la compétition, n’a fait que son rôle d’animateur de
l’économie. L’Etat agit de même en ce moment avec le projet ITER.
482
COUR DES COMPTES
La saisine de la commission de prévention de conflits d’intérêts n’a
été faite que pour répondre aux exigences s’appliquant aux CCI pour les
marchés potentiellement passés avec des entreprises dans lesquelles les élus
ont des intérêts. La force essentielle des CCI est d’être composées de chefs
d’entreprises, et ces chefs d’entreprises ne peuvent être systématiquement
absents des marchés importants sur leur territoire. Les textes prévoient les
conditions dans lesquelles la passation de marché est possible. La
commission de prévention de conflits d’intérêts est là pour vérifier ces
conditions, et le fait de la consulter n’est pas, bien au contraire, le signe
d’une anomalie de concurrence. La CCI a répondu clairement sur les
dossiers correspondant à des entreprises dans lesquelles ses élus ont, ou sont
supposés par la Chambre Régionale, avoir des intérêts. Résumer la
problématique du Pont du Gard à cette affaire est sans doute inadapté.
La véritable problématique du réaménagement du site du Pont du
Gard réside dans le choix politique fait en 1997. Le projet conduit par la CCI
avait été établi sur le principe d’un paiement du réaménagement par les
visiteurs. Sur initiative politique et administrative, l’avenant de 1997 a
imposé la gratuité d’accès. Il n’a pas prévu de compensation financière
puisqu’il accorde à la CCI la compensation déjà donnée pour la gratuité
accordée d’origine aux gardois alors que le manque à gagner s’élevait à 3
millions d’euros environ. A posteriori, et pour des équipes nouvelles qui
n’étaient pas en charge à l’époque, l’acceptation de cet avenant déséquilibré
par la CCI a été une erreur. Il est facile de dire aujourd’hui qu’il aurait fallu
refuser l’avenant. Si la CCI l’avait fait, il est probable, qu’une fois de plus, la
réhabilitation du site aurait échoué.
En n’organisant pas la compensation, l’avenant de 1997 était
juridiquement imparfait. Il était également économique incomplet. Dès lors
que le visiteur n’était plus le payeur du coût de réaménagement, seule la
collectivité, c'est-à-dire le contribuable pouvait être le payeur. Or, le schéma
résultant de l’avenant n’organisait pas le financement par la collectivité. Les
promoteurs du projet, concédant et concessionnaire, ont voulu imaginer que
les recettes des visites de l’exposition pourraient compenser le manque à
gagner sur les recettes des entrées sur le site. C’était sans doute négliger un
détail : les visiteurs viennent visiter le site et voir le pont. Ils n’ont pas
nécessairement envie de voir une exposition payante lorsqu’ils ont obtenu
gratuitement leur souhait.
Les critiques de la Chambre Régionale, reprises par la Cour, sur la
gestion de la CCI après ouverture du site réhabilité au public sont celles
soulevées par les promoteurs du projet, désabusés de ne pas avoir poursuivi
leur oeuvre à son terme. Elles sont à notre avis infondées. En particulier, le
fait que la CCI aurait procédé, contrairement à ses engagements
contractuels,
à des économies sur les charges de personnel et sur les
opérations de promotion n’est pas établi. La CCI l’a déjà signalé, sans
succès, à la Chambre Régionale. La CCI fait par ailleurs observer que les
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
483
dépenses de promotion augmentaient le déficit de l’exploitation, sans
augmenter les recettes car elles contribuaient à le renommée du site et à
l’accueil de visiteurs nouveaux, venant gratuitement mais créateurs de
charges complémentaires d’exploitation.
Enfin, les retombées économiques du réaménagement ne peuvent se
mesurer sur une période trop courte. La CCI devait y travailler dans une
deuxième phase. Elle le fait effectivement même si elle n’est plus
concessionnaire du site, au travers de sa participation à l’animation du Pays
Uzège Pont du Gard aux côtés des collectivités territoriales.
La CCI n’a pas abandonné le projet. L’équipe arrivée à la direction
de la CCI a constaté l’écart signalé entre la volonté politique de gratuité et
l’organisation juridique faisant peser cette gratuité sur la seule CCI. Elle a
tenté d’apporter des solutions à ce problème y compris avec un schéma
organisé autour de la Caisse des Dépôts, établissement public. Le choix
politique a écarté ces solutions avant même un examen approfondi de leurs
conséquences financières. Le concédant se refusant à compenser la gratuité,
il ne restait à la CCI qu’à faire constater la nécessaire réunion entre la
volonté politique et l’organisation juridique : l’exploitation devait être
réalisée par une entité pouvant bénéficier de l’argent du contribuable. Telle
est l’organisation mise en place par le Département du Gard qui s’est
substitué au concédant.
La chambre régionale a déclaré fragile le montage juridique ayant
permis la transition entre la CCI et l’établissement public à caractère
culturel qui assure l’exploitation. Le schéma était original ; il a résisté à
l’épreuve des inondations, à la confrontation avec les assureurs et il a permis
une transition douce. Est-ce là le signe d’une fragilité ?
Le réhabilitation du site du Pont du Gard par la CCI, en partenariat
avec les collectivités et les services de l’Etat nous apparaît, avec le recul,
avoir été un succès architectural et technique. Le choix politique fait pour un
paiement par le contribuable a sa justification sur un site de cette qualité et
de cette réputation. Et peut-être est-il vain de vouloir parler d’équilibre de
l’exploitation.
La
CCI
a
financièrement
souffert
de
cette
situation,
mais
contrairement à ce que prétend la chambre régionale qui n’a pas étayé ses
assertions, elle l’a fait sans diminuer ses efforts en faveur des entreprises et
du développement économique et en cédant avec soin des actifs dont elle
devait se séparer par souci d’efficacité et de bonne gestion.
L’histoire oubliera sans doute les péripéties et retiendra l’essentiel :
un site exceptionnel réhabilité de façon heureuse.
484
COUR DES COMPTES
REPONSE DU MINISTRE D’ÉTAT, MINISTRE DE L’INTÉRIEUR
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
A LA PARTIE « II
-
LE PARC DU FUTUROSCOPE (VIENNE) »
En réponse à l’analyse formulée par la Cour, le ministère de
l’intérieur et de l’aménagement du territoire estime pertinent d’évoquer, à
l’appui de cette analyse, quelques éléments complémentaires qui ne figurent
pas dans le projet d’insertion au rapport public.
Imaginé en 1984, le Futuroscope de Poitiers, parc de loisirs créé par
le département de la Vienne, a ouvert en 1987.
La gestion de ce parc de loisirs fut confiée à l’origine à une société
d’économie mixte locale, la SEML du Parc du Futuroscope qui avait pour
objet l’exploitation du parc et la conception et la réalisation d’opérations
d’aménagement et d’animation du parc dans le cadre de conventions de
mandat et de prestations de services passées avec le département.
Cette SEML fut créée le 21 mars 1987, le président du conseil général
de la Vienne assurant la présidence du conseil de surveillance puisque le
département était l’actionnaire majoritaire (détenant 69,3 % du capital
social), et que les autres actionnaires relevaient du secteur privé.
Après plusieurs années d’exploitation, le conseil général a souhaité
concéder la gestion du Futuroscope, dont la fréquentation fut en
augmentation constante jusqu’en 1997, à une entreprise du secteur privé.
Ainsi, l’exploitation fut confiée au printemps 2000 au groupe Amaury, le
département de la Vienne cédant les actions détenues dans la SEML qui
devenait alors une société anonyme de droit commun.
Toutefois, à la fin de l’année 2002, devant les difficultés croissantes
rencontrées, dues largement à la baisse de la fréquentation du parc depuis
1997 faute d’un renouvellement des équipements et d’un investissement
suffisants, les pertes cumulées s’élevaient à 35 millions d’euros pour un
chiffre d’affaires d’environ 90 millions d’euros ; dans ces conditions, le
département a décidé de reprendre le contrôle du Futuroscope.
Ainsi, par décision du 23 septembre 2002, l’assemblée départementale
décida à nouveau la création d’une SEML dénommée « SEML nouvelle du
Parc du Futuroscope », qui reprenait au 1er novembre 2002 l’exploitation du
parc de laquelle le groupe Amaury se retirait le 31 octobre. Le président du
conseil général fut désigné en qualité de président du conseil de surveillance
de cette nouvelle SEML, dont le capital, de 40 millions d’euros, était détenu à
80% conjointement par le département (24 millions d’euros) et la région (8
millions d’euros) et, à hauteur de 20%, par des actionnaires privés,
essentiellement le groupe Amaury (7,8 millions d’euros), qui devait ensuite se
désengager complètement.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
485
Parallèlement, un protocole d’accord a été signé le 18 septembre
2002 entre le conseil général et le groupe Amaury. Il a pour objet de définir
les modalités d’organisation des opérations de transfert d’actifs de la société
du parc du Futuroscope (depuis lors absorbée par la Société des Editions Ph.
Amaury), ainsi que celles de reprise d’engagements, de reprise des stocks et
de transferts des contrats liés à l’exploitation du site du Futuroscope.
Toutefois, à partir de novembre 2002, les pertes d’exploitation se sont
aggravées.
La Cour rappelle la genèse de ce dossier et insiste sur trois points : la
gestion du parc par la « SEML nouvelle du parc du Futuroscope », les
relations avec le département de la Vienne, et enfin les perspectives
d’évolution du parc.
Le ministère de l’intérieur et de l’aménagement du territoire constate
que depuis 2002, les efforts de gestion mis en oeuvre nécessitent en outre un
soutien continu du principal actionnaire pour assurer l’équilibre de cette
société. Ces interventions en capital survenues à plusieurs reprises entre
2002 et 2006 soulèvent effectivement des interrogations au regard du droit
national comme du droit communautaire. Ce type d’apport pourrait en effet
être analysé comme un système d’aide dont l’objectif est effectivement de
limiter des pertes d’exploitation.
En réalité, les relations entre le département de la Vienne et cette
SEML sont particulièrement complexes. Les augmentations successives de
capital entre 2004 et 2006, la garantie d’emprunt accordée par la région
pour se substituer ensuite à la société dans le cadre d’un remboursement au
groupe Amaury au titre de la reprise de biens, les abandons de créance et
enfin le financement de la gare du Futuroscope constituent des aides
économiques consenties directement ou indirectement par une collectivité
publique, au profit d’un équipement certes à finalité principalement
commerciale, mais qui est singulier en France dans sa conception
économique et son rayonnement régional.
La Cour estime en outre que le bail administratif conclu entre le
département et la SEML pourrait être requalifié en délégation de service
public. Toutefois, il convient de préciser que seul le juge administratif
pourrait requalifier définitivement ce montage.
Ce montage juridique complexe permet toutefois de préserver un outil
dont les perspectives d’évolution méritent d’être mieux orientées. La Cour
conclut que le maître d’ouvrage public (le département) devra intervenir
constamment pour assurer le renouvellement de l’offre et prendre en charge
les dépenses de service public.
Il est cependant difficile de se prononcer sur la rentabilité de cet outil
qui réclame des investissements permanents pour fidéliser le public et une
communication accrue pour élargir la zone de chalandise.
486
COUR DES COMPTES
Le ministère de l’intérieur et de l’aménagement du territoire souscrit
aux recommandations de la Cour, et réfléchit avec le conseil général aux
solutions permettant de mieux insérer l’outil dans le cadre prévu par le droit
communautaire en le qualifiant de service d’intérêt économique général.
S’agissant des relations de la société avec le conseil général, il conviendrait
en particulier de s’orienter vers un contrat de délégation de service public
qui fera apparaître clairement les obligations et les compensations qui en
résulteraient pour les finances publiques.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE CONSEIL GÉNÉRAL
DE LA VIENNE
ET DU PRÉSIDENT DU DIRECTOIRE DE LA SEML NOUVELLE
DU PARC DU FUTUROSCOPE
A LA PARTIE « II
-
LE PARC DU FUTUROSCOPE (VIENNE) »
Avant tout, le Département et la Société s’associent pleinement au
rapport de la Cour des comptes qui rappelle que « la notoriété internationale
du premier parc de loisirs français a incontestablement contribué à
dynamiser l’image du département et de la région, tout en stimulant l’activité
économique locale ».
De même, le Département et la Société se réjouissent du constat
partagé avec la Cour et selon lequel « le Parc du Futuroscope conserve son
rang international et demeure l’un des trois premiers parcs de loisirs
français les plus visités ». En outre, il est fortement apprécié que le rapport
souligne à maintes reprises les « efforts de gestion » réalisés depuis 2002 par
l’équipe de direction de la nouvelle SEML exploitante.
A la lumière de ces constats, les observations critiques formulées par
la Cour méritent d’être relativisées et, sur certains points, rectifiées.
D’une part, le Département et la Société réfutent l’analyse de la Cour
selon laquelle les relations juridiques entre le Département de la Vienne et la
SEML nouvelle du Parc du Futuroscope nécessiteraient une « clarification »
ou une « normalisation ». A cet égard, la Cour n’ignore rien des mérites du
nouveau bail administratif s’inscrivant dans un contexte modifié par l’entrée
au capital de nouveaux actionnaires, au nombre desquels figure la Caisse
des Dépôts et Consignations.
D’autre part, le Département et la Société contestent le fait que le
soutien financier dont bénéficie la SEML ne serait pas conforme aux règles
nationales et communautaires en matière d’interventions économiques.
En effet, pour le Département, les financements dont a profité le Parc
du Futuroscope de la part du Département de la Vienne trouvent leur
justification dans sa qualité d’actionnaire majoritaire et dans les retombées
économiques et sociales du Futuroscope sur l’ensemble du territoire
départemental.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
487
En outre, la Société fait plus particulièrement observer que l’analyse
de la Cour relative aux « financements publics » dont aurait bénéficié le
Parc du Futuroscope est à la fois incomplète, économiquement inexacte et
juridiquement contestable dans certaines de ses qualifications.
Incomplète tout d’abord, car la Cour semble ignorer les ressources
dont la collectivité départementale a pu bénéficier du seul fait du
Futuroscope, telles que les cessions d’actions ou la perception de loyers qui
représentent un montant de 55 millions d’euros limitant en réalité l’ensemble
des contributions publiques proprement dites à 19 millions d’euros (cf.
tableau en annexe
).
Économiquement inexacte ensuite, dès lors que la Cour semble
intégrer dans ses calculs des sommes résultant, soit des conditions consenties
à la SEML par son bailleur au niveau du marché (notamment pour le niveau
de la redevance du bail), soit des frais à la charge du Département car
relevant de la compétence et des affaires départementales (notamment les
frais de communication du Département autour du Futuroscope).
Juridiquement contestable enfin, parce que les autres concours
financiers n’affectent pas la libre concurrence intra-communautaire compte
tenu des spécificités du Parc et ne sauraient donc constituer des aides
publiques.
Enfin, contrairement à la Cour, le Département est convaincu que le
redressement actuel de la SEML Nouvelle du Parc du Futuroscope et, à
moyen terme, les perspectives d’un retour à l’équilibre, ne dépendent pas
uniquement de facteurs extérieurs et des concours financiers dont elle
bénéficie de la part de son actionnaire public. Ainsi, le retour annoncé à
l’équilibre du Parc est à mettre au compte des capacités managériales de
l’équipe dirigeante de la SEML exploitante que le Conseil Général a
constamment soutenue par sa politique d'investissement et responsabilisée en
lui fixant des objectifs qui devraient permettre d'équilibrer les comptes de la
société en 2008-2009. Ainsi, dans un contexte délicat de reprise d’une
activité majeure et structurante pour l’économie départementale, ces choix
stratégiques ont abouti en moins de 3 ans à des résultats très encourageants.
***
RÉPONSE AUX OBSERVATIONS DE LA COUR
A – La gestion du parc par la « SEML nouvelle du Parc du Futuroscope »
1. Les conditions de cession puis de reprise du Parc par le Département
Selon la Cour, l’absence de rentabilité du Parc aurait contraint le
Département à intervenir financièrement au soutien de cette activité.
488
COUR DES COMPTES
Toutefois, le chiffre avancé de 240 millions d’euros de charges nettes
sur la période 1984 à 2005 doit être apprécié à l’aune des apports
économiques et sociaux de l’activité du Parc du Futuroscope sur le territoire
du Département de la Vienne. Ainsi, sur la période 1987-2005, l’action du
Conseil Général au profit du Futuroscope aura permis de générer un
supplément de chiffre d’affaires des entreprises de la Vienne évalué à
3,7 milliards d’euros, un surplus de revenus supplémentaires pour les
habitants de la Vienne de l’ordre de 2,1 milliards d’euros et enfin, la
création de 6350 emplois.
Le rapport de la Cour des comptes ne mentionne pas ces données
pourtant essentielles.
B – Les relations avec le Département de la Vienne
1- Les financements publics au bénéfice de la SEML
La Cour soutient que certaines des interventions publiques dont aurait
bénéficié le Parc du Futuroscope soulèveraient des interrogations quant à
leur régularité juridique.
Le Département et la Société ne partagent pas ce point de vue.
B. 1.1
En premier lieu
, selon l’analyse de la Cour, les recapitalisations et
augmentations de capital de la SEML nouvelle du Parc du Futuroscope
décidées par le Département entre 2004 et 2006 seraient assimilables à un
« avantage concurrentiel » au sens du droit communautaire.
Or, une telle qualification est démentie par la réalité.
En effet, ces opérations de capital ont permis au Département
d’obtenir le contrôle capitalistique de la gestion de la Société, ce qui
constitue une réelle contrepartie et
correspond au principe même de
l’actionnariat public majoritaire des SEML.
Surtout, ainsi que le souligne le rapport de la Cour des comptes, les
augmentations de capital « ont permis la poursuite de l’exploitation de la
SEML ». L’objectif du Département était d’éviter le risque de cessation de
paiement de la Société, ce qui suffit à légitimer les recapitalisations en cause.
En effet, la survie de cette entreprise revêtant un intérêt départemental
immanent, il était de la responsabilité du Conseil Général d’agir en tant
qu’ « actionnaire avisé », c’est-à-dire d’assurer la pérennité de l’activité du
Parc du Futuroscope dont les retombées sur le territoire de la Vienne sont
considérables,
notamment
en
termes
d’emploi,
d’investissement,
et
d’implantation de nouvelles entreprises.
Du reste, tout autre comportement de cet actionnaire public
majoritaire n’aurait, à juste titre, pas manqué de lui être reproché.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
489
En tout état de cause, l’affirmation de la Cour selon laquelle
l’opération de recapitalisation se serait traduite par une perte de 48,4 M€
pour le Département n’est pas pertinente. En effet, en 2000, le Département
avait cédé le Par cet le Palais des Congrès à la Société Amaury, laissant au
profit du Département une plus-value
de 45,4 M€. Or, c’est cette somme qui
a été réinvestie dans la SEML nouvelle du Parc du Futuroscope.
Au demeurant, en se limitant à une approche strictement financière, la
Cour paraît négliger les apports économiques et sociaux de l’activité du
Parc du Futuroscope sur le territoire du Département de la Vienne.
Or, sur ce terrain, la Société souligne que, compte tenu des retombées
économiques considérables induites par la présence de la Société sur le
territoire du Département de la Vienne, il est normal que cette entreprise ait
pu ponctuellement profité du soutien de la collectivité lorsque sa pérennité
était menacée.
Enfin, les pertes en capital constatées sont très largement liées à la
reprise du passif laissé par l’exploitant privé et ne sont nullement à mettre
sur le compte d’une gestion départementale du Futuroscope. Bien au
contraire, le bilan de la gestion semi-publique du Parc est en tous points plus
satisfaisant que la gestion strictement privée opérée pendant la période
2000-2002.
B.1.2
En deuxième lieu
, la Cour critique les conditions financières attachées
au bail administratif conclu entre la SEML et le Département.
Selon la Cour, les remises de loyer et la réduction de la redevance
d’occupation consenties à la SEML par le Département entre 2002 et 2006
seraient assimilables à des aides illicites.
Le Département et la Société réfutent cette analyse juridique.
Tout d’abord, un abandon de créance ne constitue pas par essence
une aide illicite.
Ensuite et surtout, les réductions successives de la redevance
d’occupation n’ont pas été décidées pour accorder un avantage, et encore
moins une libéralité, à la SEML exploitante, mais uniquement pour les
raisons suivantes :
D’une part, le Département n’a fait que
tirer les conséquences du
contexte économique difficile de l’activité des parcs de loisirs,
en
procédant à un alignement du montant des redevances sur les prix du
marché, dans la mesure où le montant de la redevance initiale (alors fixé à
5% de la valeur des actifs affermés) avait été notoirement surestimé. A cet
égard, il y a lieu de comparer ce montant avec
le niveau des prix du
marché locatif dans le secteur des parcs de loisirs de taille
490
COUR DES COMPTES
comparable.
Ainsi, sur la période 2001-2004, le parc Nausica a versé une
redevance d’affermage représentant 2 % du montant des biens mis à sa
disposition par la ville de Boulogne-sur-Mer. Sur la même période, le parc
de La Cité de l’Espace s’est acquitté d’une redevance correspondant à 1,7 %
des biens affermés. En outre, la SEML exploitante fait observer que la
circonstance que, mise à part elle, aucun autre opérateur ne se soit porté
candidat à l’attribution du bail administratif lors de la procédure de mise en
concurrence lancée au printemps 2006 confirme, s’il en était besoin, que le
niveau de redevance pratiqué jusqu’alors, et repris dans l’offre de la SEML,
ne constitue pas un avantage déterminant.
D’autre part, et en tout état de cause, compte tenu des difficultés
d’exploitation rencontrées par le groupe Amaury à partir de 2001, il aurait
été politiquement irresponsable de la part du Département de laisser
péricliter la première et principale activité départementale participant au
rayonnement culturel et au dynamisme économique de la Vienne.
Aussi, le Département a bien agi en actionnaire et bailleur avisé en
adaptant le niveau du loyer aux conditions du marché.
En tout état de cause, la Société fait plus particulièrement remarquer
que les observations de la Cour ne rendent que partiellement compte de la
réalité. Certes, les loyers dus par la SEML ont fait l’objet de réductions, mais
cette évolution n’a pas été linéaire. Ainsi, le loyer a été augmenté en 2001,
pour être porté à 5 488 164 € en raison des investissements réalisés par le
Département dans le Parc.
B.1.3
En troisième lieu
, la Cour ne saurait reprocher au Département de
s’être « substitué à la SEML » pour le remboursement de la somme due au
groupe Amaury au titre de la reprise des actifs .
En effet, cette garantie à première demande a été accordée en
septembre 2002, soit avant même la création de la SEML Nouvelle du Parc
du Futuroscope.
En réalité, il s’agissait d’une condition déterminante de la volonté de
contracter du groupe Amaury, cet engagement autonome ayant notamment
pour objet de garantir la bonne exécution des obligations de reprise du
Département portant sur le prix global des titres et sur le remboursement du
compte courant.
Dans ces conditions, la Société voit mal dans quelle mesure cette
garantie à première demande accordée à une entreprise par le Département
avant même sa création, et à laquelle elle est totalement étrangère, pourrait
prêter le flanc à la critique sur le terrain des aides publiques.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
491
B.1.4
En quatrième lieu
, c’est à tort que la Cour qualifie « d’abandon de
créance » le renoncement du Département aux pénalités contractuelles de
retard - dont elle relève au demeurant le caractère « modique » - dans le
paiement du loyer par la SEML.
En effet, dans la mesure où l’application des pénalités de retard n’est
pas d’ordre public, aucune règle de droit ne s’oppose à ce que la collectivité
bailleresse décide en opportunité d’y renoncer.
En l’occurrence, en raison tant du caractère minime du retard
imputable à la SEML que du niveau très modique des pénalités en jeu, c’est à
juste titre que le Département a pu décider que le paiement de pénalités ne
s’imposait pas. Ainsi, la Société fait observer que le loyer 2003 a été payé
avec deux mois de retard seulement. Quant au loyer 2004, il n’a pas été payé
en retard, puisque le Conseil général avait, lors de sa séance du 8 novembre
2004, décidé de reporter au 30 juin 2005 la date du paiement des loyers pour
2004, délai qui a été respecté.
B.1.5
En cinquième lieu,
il n’est pas anormal que la gare du Futuroscope
ait été partiellement financée par le Département, alors pourtant qu’elle est
utilisée à 50% par les clients du Parc.
Tout d’abord, la Société rappelle qu’elle verse au Département une
redevance annuelle de 65 000 € pour l’occupation de surface d’accueil et de
vente dans la gare du Futuroscope.
Ensuite, le Département fait observer que la vocation de cet
équipement n’est pas uniquement d’assurer la desserte du Parc : il constitue
un élément structurant dans le domaine des transports collectifs pour la
desserte du nord de l’agglomération de Poitiers et contribue à l’accessibilité
de la technopôle et du pôle Universitaire et de Recherche installés sur le site.
B.1.6
En
sixième
lieu
,
la
circonstance
que
certaines
actions
de
communication ayant eu un impact favorable pour le Parc aient été engagées
et financées par le Département de la Vienne ne saurait prêter le flanc à la
critique.
En effet, compte tenu de l’impact considérable du Parc du
Futuroscope sur le développement économique, social et touristique du
territoire de la Vienne, il est parfaitement logique et justifié que les
différentes collectivités publiques concernées aient décidé de promouvoir
leur propre image en s’appuyant sur celle du Futuroscope.
492
COUR DES COMPTES
Bien plus, pour la Société, c’est par un juste retour des choses que ces
actions, présentant un intérêt indiscutable pour l’ensemble des intervenants,
ont pu avoir des effets positifs permettant de compléter les efforts de l’équipe
dirigeante de la Société pour relancer l’activité du Parc du Futuroscope.
B.1.7
En septième lieu
, au terme de son énumération, la Cour des comptes
évalue à une somme de 100 M€ le montant des financements publics versés
entre 2002
et 2006 par le Département en faveur du parc du Futuroscope.
Le Département et la Société contestent cette estimation qui leur
paraît très largement erronée et décontextualisée.
En effet, les interventions publiques dont le Parc du Futuroscope a
bénéficié ne peuvent s’apprécier qu’au vu des retombées économiques et
sociales profondes qu’a eues ce pôle, incontournable et unique en son genre,
sur le territoire du Département de la Vienne.
De même, l’approche adoptée par la Cour ne prend pas en compte le
« profit » en termes socio-économiques et touristiques que les collectivités
locales ont retiré du soutien départemental apporté au Parc du Futuroscope.
Pour le Département, l’importance des financements publics profitant
au Parc ne se mesure qu’à l’aune de sa volonté de promouvoir son
développement en s’appuyant sur celui du Futuroscope.
En outre, la Cour n’a pu parvenir à ce résultat qu’en prenant en
compte le capital initial apporté par les collectivités départementales et
régionales à hauteur de 35 millions d’Euros ainsi que les actions de
communication conduites par le Département ou la Région (pour 6 millions
et non pas 8 millions d’euros), alors pourtant que ces dépenses ont eu pour
objet et pour effet de renforcer leur attractivité et celle de leur zone de
développement économique.
De même, la Cour semble avoir pris en compte une subvention
d’investissement accordée par la Ville de Poitiers, alors que cette somme
correspondait à un versement réalisé en contrepartie de la réalisation de
travaux liés aux transports publics et ne peut donc être assimilée à un
financement ayant bénéficié au Parc du Futuroscope.
Enfin, la Cour a également comptabilisé le renoncement aux pénalités
de retard, pratique courante dans les relations d’affaires, et qui ne saurait en
aucun cas être assimilée à une aide apportée à la SEML.
La prise en compte de ces éléments a conduit la Cour à des résultats
erronés et en toute hypothèse surestimés.
Par ailleurs, la Société indique que,
sur un plan strictement financier,
il serait logique que soient déduites de ce décompte certaines ressources
perçues du fait
du
Futuroscope
et
réinvesties
par
la
collectivité
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
493
départementale. Ainsi,
le produit de la cession des titres de l’ancienne SEML
au groupe Amaury, celui de la cession des titres de la SA du Palais des
Congrès à la SEML additionnés aux montants
des loyers perçus représentent
en montants cumulés la somme de 54.9 millions d’euros de fonds privés. Par
suite, la mobilisation nette de fonds publics depuis 2002 a été de 19 millions
d’euros (
cf. tableau en annexe)
.
B.1.8
En huitième lieu
, le Département conteste l’analyse de la Cour selon
laquelle les financements publics dont a bénéficié le Parc du Futuroscope
auraient dû faire l’objet d’une convention préalable entre la Région et le
Département.
En effet, les différentes interventions du Département dans la SEML
ne sont pas assimilables à des aides au développement économique au sens
de
l’article L. 1511-2 du Code Général des Collectivités Territoriales : si le
Département est intervenu en faveur de
sa SEML, c’est uniquement en sa
qualité d’actionnaire public majoritaire et non en tant que collectivité locale
aidant une entreprise privée. Dès lors, une telle convention n’était ni
nécessaire ni adaptée.
B. 1.9
En neuvième lieu,
le Département et la Société réfutent l’analyse de la
Cour selon laquelle les soutiens publics dont a bénéficié le Parc du
Futuroscope seraient susceptibles de contrevenir aux règles communautaires
relatives aux aides publiques.
En effet, une telle position est doublement contestable.
(i) Tout d’abord, elle fait fi de la circonstance que, sur le marché
concurrentiel des parcs de loisirs, le Parc du Futuroscope offre une gamme
de spectacles qui le distingue entre tous et rend son offre non-substituable à
d’autres parcs de loisirs de même ampleur.
Dans ces conditions, nonobstant sa clientèle étrangère le Parc ne peut
être considéré comme évoluant sur un marché pertinent au sens du droit
communautaire et, par suite, la condition d’affectation du commerce intra-
communautaire nécessaire pour l’application de la réglementation sur les
aides étatiques ne saurait être remplie.
(ii) En tout état de cause, le Département et la Société réfutent le
qualificatif « d’aides » s’agissant des financements publics qui ont profité au
Parc du Futuroscope.
Par suite, les risques évoqués dans le rapport de la Cour ne sont pas
caractérisés.
494
COUR DES COMPTES
2 – Les conventions avec le Département
Selon la Cour, l’ensemble des actes régissant les relations entre le
Département et la SEML matérialiserait un contexte évocateur d’une
délégation de service public, alors pourtant qu’elle relève elle-même que
« cette activité n’est pas évidente pour un parc récréatif », et alors en outre
qu’une délibération du Conseil général a expressément exclu cette
qualification.
Sur ce terrain, le Département et la Société ne peuvent davantage
souscrire à l’analyse de la Cour.
Ainsi, l’intervention directe du Département dans la gestion de la
SEML est inhérente à sa qualité d’actionnaire public majoritaire et s’inscrit
dans le droit fil des règles applicables aux SEM locales.
En outre, les prétendus avantages tarifaires qu’aurait consentis le
Parc du Futuroscope au Département sur certaines des prestations réalisées
au bénéfice de la collectivité ont été prévus par une convention signée en
septembre 2006. Ces avantages tarifaires n’ont au demeurant porté que sur
des montants marginaux.
Ensuite, contrairement à ce qu’indique la Cour, la mise à disposition
du Parc pour l’organisation du championnat du monde de boxe WBA en
2003 et 2005 ne s’est pas faite à titre gratuit et désintéressé : les retombées
en termes d’image dont a bénéficié le Parc du Futuroscope auprès des 4,5
millions de téléspectateurs du Championnat de boxe méritent d’être prises en
compte. Aussi, est-il
permis de rapprocher cette audience du coût d’une
campagne de publicité nationale d’une durée équivalente.
Enfin, le rapprochement fait par la Cour avec la qualification de
« service
public »
retenue
par
un
autre
parc
récréatif
n’est
pas
convaincante : ainsi que le souligne le rapport, c’est « sous réserve d’une
définition précise des obligations associées » à la gestion du parc concerné
qu’une telle qualification a pu lui être conférée.
Or, de telles obligations exorbitantes du droit commun ne se
retrouvent pas dans le bail administratif conclu entre la SEML et le
Département. En effet, en juin 2006, le Département a adapté la formule
contractuelle le liant à la SEML pour tenir compte du contexte économique
renouvelé, notamment en modifiant le bail administratif conclu entre la
collectivité et la SEML.
A cette occasion, les clauses relatives à la durée d’ouverture
obligatoire ainsi qu’au respect de l’image du Parc et de la destination des
biens ont été supprimées.
Dans ces conditions, les relations entre la SEML et le Département ne
sont pas susceptibles d’être « requalifiées » en délégation de service public.
Qui plus est, selon les conclusions de Monsieur S. BRACONNIER,
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
495
Professeur de droit public à l'Université de Poitiers, Directeur du Master
Marchés Publics et délégations de Service Public, interrogé sur le statut du
bail du Futuroscope, en comparaison d’une délégation de service public ou
d’un bail commercial, la solution du bail administratif choisie par le
Département présente toutes les garanties de viabilité juridique et de
faisabilité pratique.
C- Les perspectives d’évolution du Parc
Sur ce point, le Département et la Société ne partagent pas l’analyse
pessimiste de la Cour selon laquelle il est peu probable qu’à moyen terme, la
SEML parvienne à l’équilibre.
Au contraire, un retour à l’équilibre sur la base d’objectifs réalistes
semble atteignable d’ici quelques années du fait d’une part, des moyens
humains et financiers dont dispose la SEML et, d’autre part, de la confiance
de ses actionnaires historiques et de ses nouveaux actionnaires au nombre
desquels figure la Caisse des Dépôts et Consignations.
1 – Les marges de manoeuvre actuelles
Ainsi que le relève la Cour, il existe en termes de recettes, des marges
de progression, notamment sur la
restauration et les boutiques, cette
dernière activité ayant connu une progression de 25% en 2006.
En outre, la Société étudie la mise en marché à moyen terme de
nouvelles formules différenciées suivant les cibles de clientèle susceptibles de
développer les ventes et d’améliorer les marges, la cible la plus significative
à cet égard étant représentée par le tourisme d’affaires.
Par ailleurs, la Société ne partage pas le scepticisme exprimé par la
Cour quant aux possibilités d’exporter le concept du Parc à l’étranger.
Plusieurs sollicitations reçues par la SEML sont en cours d’étude.
En ce qui concerne les dépenses, il est exact et très satisfaisant, ainsi
que le note la Cour, que la SEML ait réussi à stabiliser ses charges de
structure, notamment en matière de personnel et de maintenance.
Cependant, contrairement à la Cour, les dirigeants de la SEML
considèrent qu’il est encore possible de faire des économies sur d’autres
postes. Ainsi, la SEML mène actuellement des négociations qui lui permettent
d’espérer réaliser de nouvelles économies sans nuire à la qualité de l’offre.
2 – Les perspectives à moyen et à long termes
En dépit du pessimisme de la Cour qui semble douter que la SEML
parvienne à atteindre un équilibre d’exploitation à moyen terme, le
Département est convaincu que le Parc du Futuroscope est en voie de
parvenir à ce résultat.
En effet, depuis la création de la nouvelle Société par le Département
en partenariat avec la Région Poitou-Charentes, la fréquentation du Parc a
augmenté de 17% et le chiffre d’affaires a augmenté de 22% en 3 ans. Dans
496
COUR DES COMPTES
le même temps, les charges de l’entreprise ont été réduites de manière
significative - malgré la perte substantielle des allègements de charges
sociales du dispositif de Robien, soit plus d’un million d’euros - et les pertes
de l’entreprise ont été diminuées de 12 millions d’euros.
Les dirigeants de la Société ont comme objectif un retour à l’équilibre
pour 2008-2009, qui désormais peut être atteint avec une évolution de 10%
de la fréquentation, une croissance de 5% du panier moyen et une maîtrise
des charges de la Société.
Rapprochée des progressions enregistrées ces 3 dernières années,
bien supérieures aux objectifs fixés, la progression escomptée paraît réaliste.
Aussi, on ne saurait faire dépendre le redressement du Parc du
Futuroscope des seuls facteurs conjoncturels extérieurs et du « soutien
financier » accordé par le Département.
Bien au contraire, le Département est persuadé que, dans un contexte
délicat de reprise d’une activité majeure et structurante pour l’économie
départementale, les mérites de l’équipe dirigeante du Parc et les choix
stratégiques arrêtés ne doivent pas être remis en cause mais encouragés.
Sur ce terrain, les responsables du Futuroscope ajoutent en outre
qu’ils agissent dans une logique d’entreprise qui ne peut être contestée, sur
la base d’objectifs raisonnables, et qui n’implique aucun concours du
Département assimilable à une aide publique, dans un environnement
conjoncturel par définition aléatoire, et un marché très concurrentiel à
l’instar de toute activité marchande.
Telles sont les réponses que le Département de la Vienne et la SEML
nouvelle du Parc du Futuroscope entendent apporter au rapport public
annuel de la Cour des comptes.
***
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
497
Annexe
Bilan (cession – rachat Futuroscope) 2000-2006
RECETTES
Vente SEML Futuroscope et SEML Destination …….
42 228
+ intérêts…………………………………………………...
+ 1 143
- apports du Département dans ces deux SEML………
- 1 069
Ventes SEML Palais des Congrès………………………
+ 3 087
Plus-Value…………………………………………………
45 389
+ loyers encaissés 2002-2006…………………………..
9 569
TOTAL RECETTES POUR LE DEPARTEMENT.
54 958
DÉPENSES DEPARTEMENT
- Capital SEML nouvelle…………………………..…….
52 640
(1)
- Rachat à la SA Amaury (échéance 2006)…………….
5 455
+ échéance 2007 non encore payée……………………
5 860
(prévision)
63 955
Coût pour le Département…………………………
....
8 997
Dépenses région…………………………………………
10 000
19 M€
(1)
l’échéance 2005 du rachat à la SA Amaury est comprise dans ce montant.
498
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DU MINISTRE D’ÉTAT, MINISTRE DE L’INTÉRIEUR
ET DE L’AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE
A LA PARTIE «
III
-
L'OPERATION CAP’DECOUVERTE »
La Cour des comptes analyse de manière très approfondie, dans
son rapport annuel, les nombreuses difficultés rencontrées pour
l’exploitation du site de Cap’Découverte.
Ces difficultés ont plusieurs origines qui tiennent à des problèmes
techniques rencontrés pratiquement dès l'origine, ainsi qu'à une
estimation de fréquentation très largement surévaluée.
Il en est résulté une impossibilité d’assurer l’équilibre financier de
l’exploitation.
Face à cette situation et aux incertitudes pesant sur la continuité
de l’activité, la Cour recommande dans ses conclusions de réduire
sensiblement les charges d’exploitation du syndicat intercommunal de la
Découverte (SID) qui gère le site. Elle recommande en outre, la fusion
entre le SID et le syndicat mixte d’aménagement de la Découverte
(SMAD), maître d’ouvrage des équipements.
Enfin, la Cour estime que la gravité de la situation impose une
collaboration étroite entre les acteurs publics, l’Etat, la région, le
département et les six communes membres du SID.
Le rôle de l’Etat dans cette affaire particulièrement complexe et
financièrement délicate s’inscrit pleinement dans les recommandations de
la Cour. En effet, le versement en 2005 et 2006 d’une aide financière de
2,1 M€ (montant cumulé sur les deux exercices) aux communes membres
du SID s’est accompagné de la mise en place d’un véritable pacte
financier négocié avec les acteurs locaux pour permettre la poursuite de
l’activité du site.
L’ensemble des démarches engagées par l’Etat dans ce dossier est
rappelé ci-après.
I- Analyse de la situation par le ministère de l'intérieur et de
l'aménagement du territoire
En 1984 la récession charbonnière a été l’un des éléments
déterminants dans le classement en pôle de conversion de la zone Albi-
Carmaux . Des mesures successives d’aide à la reconversion (plans
triennaux de développement économique, plan d’accompagnement) ont
été mises en place.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
499
Dans le contexte de la fermeture des dernières mines d’Albi-
Carmaux, l’Etat a tenté, au milieu des années 80, de redonner un avenir
au charbon en autorisant en 1986 le creusement de « la Découverte »,
mine à ciel ouvert à Blaye-les Mines.
Face à la concurrence du charbon importé dont le coût de revient
est sensiblement inférieur, l’exploitation de la seconde tranche
initialement
prévue
a
été
interrompue
et
un
premier
plan
d’accompagnement économique du bassin minier a été mis en place par
l’Etat.
En 1995, la décision d’arrêter définitivement l’exploitation à
compter de 1997 a été prise ce qui a conduit à laisser en friche plus de
760 ha comprenant une gigantesque fosse de plus de 220 mètres de
profondeur et de plus d’1,2 km de diamètre située dans le périmètre de
six communes du Carmausin.
Un second plan d’accompagnement financé par l’Etat a été mis en
oeuvre pour trois ans prévoyant notamment la réhabilitation du site de la
Découverte et proposant aux collectivités locales de lancer conjointement
un appel à projets.
L'ensemble des acteurs publics et économiques locaux se sont
alors mobilisés autour d'un projet fédérateur pour la reconversion du
bassin minier.
Le Comité de Bassin pour l’emploi du nord du Tarn (instance de
réflexion créée en 1984
pour proposer un schéma de redéploiement
économique du carmausin ), avec l’appui de l’Etat, des collectivités
locales et de l’agence pour le développement industriel de la région Albi-
carmaux (ADIRAC) a procédé en octobre 1996 au lancement d’un
concours international d'idées et d’appels à projets auprès de
concepteurs, opérateurs et groupements d’investisseurs avec comme
enjeu de produire un nouveau positionnement du Carmausin dans le Tarn
et en Midi-pyrénées grâce à une diversification de son économie et de ses
centres d’intérêt.
Dans la perspective d’assurer la maîtrise d’ouvrage du projet
d’ensemble, le Syndicat Intercommunal de la Découverte (SID) a été
constitué le 7 octobre 1997 entre les six communes partageant le passé
minier (20 000 habitants environ dont 10 000 sur Carmaux) pour porter
le projet et gérer le site.
Par délibération du 24 mars 2000, le SID a, au vu d’une étude de
positionnement général du projet conduite en 1998 et de plusieurs études
ponctuelles exploratoires, arrêté le programme d’aménagement du site
qui s'articule autour de 3 thèmes :
500
COUR DES COMPTES
¾
Pôle sportif et activités de plein air sur le thème de la
glisse ;
¾
Pôle spectacle avec un centre de pratiques musicales, un
théâtre de verdure de 1 000 places et un lieu d'accueil des
festivals ;
¾
Pôle mémoire avec notamment le Musée-mine de Cagnac.
Un volet hébergement est venu compléter le pôle loisirs, sa
réalisation et sa gestion relevant de promoteurs privés.
Le comité interministériel d’aménagement et de développement du
territoire (CIADT) du 18 mai 2000 a considéré qu’un soutien financier
important de l’Etat était nécessaire pour favoriser la réussite des projets
engagés et pour appuyer la volonté démontrée par les acteurs locaux
d’enrayer le déclin de leur région et validé le projet présenté de 54,9 M€
HT (dont 48,2 M€
d’études et de travaux et 6,7 M€ de dépenses
administratives)
financé à
80%
par
des
subventions
publiques,
notamment de l’Union européenne et de l’Etat.
L’engagement des crédits de l’Etat et de l’Europe avait pour
contrepartie l’implication de la région Midi-Pyrénées et du département
du Tarn dans l’opération. Ces collectivités ayant toutefois souhaité
limiter leur participation à l’investissement, il en est résulté la
constitution, le 2 octobre 2000, d’une seconde structure publique, le
syndicat mixte d’aménagement de la Découverte (SMAD), regroupant à
parts égales, la Région Midi-Pyrénées, le Département du Tarn et le SID.
Après transfert d’une partie importante des compétences initiales
du SID, ce syndicat est devenu maître d’ouvrage des opérations
d’aménagement du site, chargé de l’acquisition des terrains, des études
de définition et des travaux de construction des infrastructures et
équipements publics. Propriétaire de l’essentiel des immobilisations du
site de la Découverte il les met à disposition du SID depuis 2002,
moyennant le versement d’une redevance d’utilisation.
La gestion des pôles "mémoire" et "spectacles" est assurée en
régie par le SID tandis que les activités de sports et de plein air ont été
confiées,
dans
le
cadre
d'une
régie
intéressée,
à
la
société
TRANSMONTAGNE, par ailleurs société gestionnaire de plusieurs
stations de sports d'hiver et qui dispose de références dans ce domaine.
L’exploitation du site de Cap’Découverte par le SID a débuté en
juillet 2003. Très rapidement, il s’est avéré que les recettes d’exploitation
seraient très largement inférieures aux estimations et ne permettraient
pas d’assurer l’équilibre financier de l’exploitation.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
501
Lors de l’adoption en juillet 2004 du compte administratif au titre
de l’exercice 2003, le déficit ressortait à 3,8 M€, ce qui est apparu
important mais pas nécessairement alarmant pour une première période
d'exploitation.
L’adoption du budget supplémentaire pour 2004 par le SID a
néanmoins conduit les services préfectoraux à saisir la chambre
régionale des comptes de Midi-pyrénées au motif que les recettes
destinées à couvrir ce déficit étaient incertaines.
La chambre a, dans son avis du 8 décembre 2004 préconisé de
couvrir le déficit d’exploitation en faisant appel aux contributions des six
communes membres.
Les budgets primitifs pour 2005 adoptés par les six communes
membres du SID ne comportant pas les mesures suffisantes pour résorber
le déficit 2004, ils ont été transmis à la CRC le 27 mai 2005.
Il faut en parallèle indiquer que le comité syndical du SID n’a pas
adopté le compte administratif au titre de l’exercice 2004, de même que
le budget primitif pour 2005, ce qui a également conduit le préfet à saisir
à nouveau la CRC.
Dans son avis du 30 juin 2005, la Chambre a fixé le montant du
déséquilibre à couvrir par les contributions des communes membres du
SID à 14,9 M€,
en l’absence de toute autre contribution provenant d’une
collectivité extérieure.
La chambre a toutefois estimé que pouvaient être écartés la
contribution du SID au SMAD ainsi que le provisionnement d’une
dépense de fonctionnement. Ces corrections ont permis de ramener le
montant à couvrir par les communes membres à 12,9 M€.
La Chambre a également relevé dans son avis l'impossibilité, pour
les seules communes membres, de prendre à leur charge l'intégralité du
montant à couvrir sachant que leurs contributions s'élevaient à
212 345 €. C’est la raison pour laquelle la chambre a proposé un plan de
redressement sur trois ans prévoyant de reporter une partie du solde à
couvrir sur 2006 et 2007 (4,67 M€), ce qui a permis d'abaisser pour 2005
à 8,24 M€ le montant à couvrir.
Parallèlement à la procédure de contrôle budgétaire, le préfet,
avec l'assistance technique de l'administration centrale (DGCL), a, dès
2004, engagé une concertation avec le président du Conseil régional, le
président du Conseil général, le président du SID et les maires des six
communes membres afin de maintenir l’exploitation du site. Il faut en
effet préciser que la dissolution du syndicat et l’arrêt de l’activité
auraient eu des conséquences financières (de l’ordre de 35 M€ a minima
d’après la chambre) et sociales considérables.
502
COUR DES COMPTES
II - Face à cette situation, l’engagement financier de l’Etat s'est imposé
comme indispensable
L’Etat s’est engagé à l’automne 2005 à verser aux six communes
membres la somme de
1,4 M€
pour éviter une augmentation déraisonnable
de la fiscalité locale pesant sur une population à la situation économique
parfois difficile.
Cet engagement fort de l’Etat a été le facteur déclenchant pour
impliquer plus étroitement les communes membres du syndicat, le Conseil
général et le Conseil régional, ce dernier ayant versé à son tour en 2005
une subvention "d'équilibre" de
1,2 M€
.
L’implication du Conseil général s’est matérialisé par la décision
d’acquérir le musée de la mine pour un montant de
2,28 M€
.
Si l’on ajoute à cela deux autres cessions d’immobilisations pour un
peu plus de 1 M€, la contribution des communes membres pour couvrir les
dépenses a été fixée à
3,7 M€
(dont 1,4 M€ pris en charge par l’Etat).
L’engagement financier de l’Etat a été poursuivi en 2006
avec le
versement d’une nouvelle subvention exceptionnelle aux communes
membres de 700 000 € après l’avis de la chambre régionale des comptes
en date du 11 juillet 2006 (qui faisait suite à l’absence de vote des budgets
primitifs par les communes membres et le SID).
La combinaison des efforts entrepris depuis 2005 a permis
d’initier un redressement de la situation financière du syndicat
. En effet,
l’examen du budget pour 2006 du SID (budget principal et budgets
annexes) et de l’exécution au titre de l’exercice 2005 tel qu’il ressort de
l’avis de la chambre régionale des comptes du 11 juillet 2006 montre un
début d’amélioration entre 2004 et 2005.
En effet, le déficit de la section de fonctionnement (consolidation du
budget principal et des budgets annexes) pour 2005 a été ramené à 3,1 M€
contre 4,2 M€ en 2004.
Le règlement d’office du budget du SID (budget principal et budgets
annexes) pour 2006 confirme l’amélioration constatée en 2005.
En effet, outre la subvention de 700 000 € versée par l’Etat aux
communes membres, le Conseil régional a versé une aide de 800 000 € au
SID.
Surtout, les communes ont marqué leur volonté de contribuer à
l’assainissement de la situation en accroissant très sensiblement leurs
participations par rapport à 2005 (soit en augmentant la pression fiscale,
soit en réalisant des économies de charges, soit en prélevant sur leur
épargne). La commune de Carmaux a, en particulier, versé une
contribution complémentaire de 2,5 M€.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
503
On le constate, l’engagement de l’Etat comme des exécutifs locaux
est bien réel, afin de permettre la poursuite de l’activité du site de
Cap’Découverte.
III - Les perspectives pour l’avenir
Il est aujourd'hui délicat de prévoir la situation financière du
syndicat gestionnaire du site pour 2007. Cependant, plusieurs éléments
permettent de considérer que l’amélioration constatée depuis 2005
devrait se poursuivre. En effet, un plan de redressement adopté par les
collectivités en juin 2006 contient des mesures rigoureuses pour restaurer
l’équilibre financier des budgets, portant sur la réduction des charges de
fonctionnement courant. Par ailleurs, sur un plan institutionnel, la fusion
des deux structures (SID et
SMAD) devrait intervenir au début de
l’année 2007. Toutefois dès la fin de l’année 2006, des mesures de
rapprochement des deux structures vont se concrétiser avec le transfert
de la compétence « gestion du site de la Découverte » du SID au profit du
SMAD.
Enfin, le SID a en 2006, lancé la procédure d’une nouvelle
délégation de service public pour la gestion des équipements du site. Des
négociations sont actuellement en cours avec les candidats retenus.
RÉPONSE DU MINISTRE DÉLÉGUÉ AU BUDGET ET A LA
RÉFORME DE L’ÉTAT, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT
A LA PARTIE «
III
-
L'OPERATION CAP’DECOUVERTE »
Ainsi que le rappelle la Cour, l’exploitation de la Découverte de
Carmaux (Tarne), mine de charbon à ciel ouvert, par les Houillères du Bassin
du Centre-Midi a été arrêtée en 1997. Pour conduire le réaménagement de cet
espace, le syndicat intercommunal de la Découverte (SID) regroupant les 6
communes concernées a été constitué. Un concours d’idées international en
1997 a conduit le SID a décider de reconvertir le site en parc de loisirs nommé
« Cap’Découverte ».
Le dispositif financier déployé pour la création de ce parc de loisirs est
conséquent, tant par les crédits arrêtés lors du comité interministériel
d’aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 18 mai 2000,
que par les crédits de réindustrialisation et les subventions excptionnelles
décidés par la suite.
Le financement du futur parc de loisirs a été estimé à 54,88 M€ lors de
la préparation du CIADT de 2000 portant sur le « volet territorial Tarn ». Les
différents fonds mobilisés pour cette opération de l’Etat a été fixée à 15,244
M€, pris en charge pour moitié par le ministère de l’industrie sur les crédits
504
COUR DES COMPTES
du Fonds d’industrialisation des bassins miniers (FIBM), et par le ministère
de l’aménagement du territoire (FNADT), et une dotation de 15,244 M€ a
également été réservée sur les crédits du FEDER. Le solde du financement
devait être assuré par des subventions des collectivités territoriales et un
emprunt.
Par ailleurs, le CIADT du 18 mai 2000 a décidé d’une participation de
9,147 M€ sur la période de 2000-2002 sur crédits FIBM
174
pour la
réindustrialisation des autres composantes du bassin.
En 2000, a dotation usuelle du FIBM pour l’ensemble des bassins
miniers a été complétée par une enveloppe exceptionnelle de 15,244 M€, dont
7,622 M€ réservés plus spécifiquement au bassin minier d’Albi-Carmaux pour
respecter les engagements gouvernementaux. La Direction des ressources
énergétiques et minérales a mis à a dispositif du préfet du Tarne, dès
l’exercice 2000, une dotation de crédits FIBM de 10,67 M€, dont 7,622 M€ au
profit du projet Cap’Découverte et 3,048 M€ en soutien des projets industriels
du bassin.
Les Charbonnages de France (CDF), responsables de la gestion du
FIBM, ont signé une convention d’un montant de 7,622 M€ avec le SMAD
175
le 7 juin 2001 conformément aux décisions du CIADT du 18 mai 2000.
Une
réunion
interministérielle
du
22 février
2002
a
décidé
d’augmenter la participation du FIBM et du FNADT à cette opération pour
tenir compte d’un surcoût résultant notamment d’appels d’offres supérieures
aux estimations initiales, dont 3,050 M€ au titre du FIBM par redéploiement
des crédits disponibles sur le reste du bassin.
Une deuxième convention d’un montant de 3,050 M€ a été signée
entre CDF et le SMAD le 9 juillet 2002 conformément à la décision
interministérielle en date du 22 février 2002.
Les appels de fonds, la vérification des factures et les contrôles
relatifs à ces deux conventions ont été réalisés selon les procédures en
vigueur pour la gestion du FIBM. Ces opérations ont été effectuées en étroite
liaison avec la Préfecture du Tarn et les services compétents de l’Etat au
niveau local. Les deux conventions ont été soldées en 2006. La totalité de
l’aide prévue a été versée au SMAD.
174) Afin de permettre l’intervention du FIBM sur le projet « Cap’Découverte », son
action a été étendue au secteur du tourisme dans le bassin d’Albi-Carmaux, par
dérogation à la circulaire du 26 décembre 1997 relative aux modalités de
fonctionnement du FIBM qui précise que le secteur industriel et les services propres à
l’industrie constituent le champ d’application normal du fonds.
175) Le CIADTa pris la décision de verser la participation de l’Etat au syndicat mixte
d’aménagement de la Découverte (SMAD) assurant la maîtrise d’ouvrage de
l’opération et associant le conseil régional et le conseil général du Tarn.
TROIS AMÉNAGEMENTS A VOCATION CULTURELLE
ET DE LOISIRS
505
Enfin, en application de l’article L. 2335-2 du code général des
collectivités territoriales (CGCT), « Sous réserve des dispositions de l’article
L. 1524-4, des subventions exceptionnelles peuvent être attribuées par arrêté
ministériel à des communes dans lesquelles des circonstances anormales
entraînent des difficultés financières particulières ». Les six communes du
Syndicat Intercommunal de la Découverte (Carmaux, Saint-Benoît-de-
Carmaux, Cagnac-les-Mines, Blaye-les-Mines, Le Garric, Taix) bénéficient
de ce dispositif depuis 2005. C’est en raison des difficultés financières
rencontrées du fait de la gestion du parc de loisirs que la demande de
subvention exceptionnelle se fonde. En 2005, un montant de 1 400 000 €
avait été accordée par l’Etat. Cette aide sera reconduite pour moitié et pour
solde de tout compte en 2006, soit 700 000 €.
En effet, à compter du 1
er
janvier 2007, les déficits d’exploitation
pourraient être mis à la charge du département du Tarn et de la région Midi-
Pyrénées. Par ailleurs, le Comité départemental olympique et sportif (CDOS)
du Tarn a déposé le 7 novembre 2006 un plan de reconversion du parc afin
de le transformer en pôle régional multisports. Les collectivités territoriales
concernées et le syndicat intercommunal doivent faire part de leur décision à
la fin du mois de décembre.
L’accumulation de subventions publiques décrite, face à un projet qui
ne remplit pas ses objectifs initiaux, en termes de coûts d’exploitation comme
de fréquentation, pose la question de la viabilité de l’activité du parc de
loisirs Cap’Découverte. Une étude économique doit donc être menée par les
pouvoirs publics pour décider des suites à donner.