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Séance solennelle d’installation du 27 mai 2019
Discours de Catherine Hirsch de Kersauson,
Procureure générale près la Cour des comptes
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Merci Monsieur le Premier président de me donner la parole et de votre propos élogieux à
mon égard,
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Ministre chargé des relations avec le Parlement,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les hautes personnalités,
Mes chers collègues,
Permettez-
moi
de
m’associer
aux
propos
de
bienvenu
e
du Premier
président
et de vous remercier d’avoir bien voulu prendre de votre temps pour rehausser, par votre
présence, la solennité de cette audience.
Je
ressens
profondément,
Monsieur
le
ministre,
l’honneu
r
que
le
Président
de la République et le Go
uvernement m’ont
fait en me nommant Procureure générale près
la Cour des comptes. J’ai conscience que d’autres membres de notre compagnie, à la Cour
et hors la Cour, justifiaient de qualités et de titres au moins aussi éminents. Je vois donc
plutôt dans ma nomination, la volonté de saluer une carrière marquée
par l’attachement
aux juridictions financières depuis mon intégration comme conseillère référendaire.
J’ai
depuis
, vous l’avez rappelé
Monsieur le Premier président, exercé les fonctions
de rapporteure, de secrétaire générale, de présidente de chambre régionale des comptes
et de présidente de chambre.
Parlant de mon attachement aux juridictions financières, je pense autant à chacune des
institutions qui les composent qu’au réseau qu’elles
forment ensemb
le ainsi qu’à leurs
membres.
C’est pourquoi je so
uhaite ici remercier les magistrats et personnels de la Cour
et des chambres régionales des comptes et tout particulièrement ceux de la 2
e
chambre, et
ceux des chambres régionales Pays de la Loire et Auvergne Rhône Alpes
, qui m’ont tant
apporté.
Comment
,
aujourd’hui,
dans
cette
grand
-chambre,
ne
pas
rendre
hommage
aux magi
strats envers qui j’éprouve une gratitude particulière
.
Charles Renard, Jean-François Collinet et Jean Picq, qui ont été mes présidents
à la 6
e
puis à la 3
e
chambre et qui m’ont appris, avec bienveillance, l’exigence des travaux
de la Cour.
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Hélène Gisserot, qui a largement modelé le Parquet général, et dont Jean-François Bénard,
son successeur, disait à son entrée en fonction
, qu’elle était
«
une incarnation féminine du
magistrat idéal
». C’est évidemment pour moi une fierté immense de m’inscrire dans cette
lignée.
Gilles Johanet dont vous avez, Monsieur le Premier président, évoqué les qualités
professionnelles et humaines remarquables
, qualités que j’
ai éprouvées au secrétariat
général de la Cour où il m’a accueillie
. Prendre sa suite est à la fois facile et difficile. Facile,
car il a forgé au Parquet général une équipe parfaitement soudée et professionnelle ; difficile,
car son talent, connu de tous, ne manquera pas de souligner, par contraste,
les insuffisances de sa successeure.
Les Premiers présidents, Pierre Joxe, François Logerot et Philippe Séguin qui ont fait
résolument basculer les juridictions financières dans le XXI
e
siècle,
qu’il s’agisse
de l’exercice des missions de certification et d’évaluation, des travaux communs à la Cour
et aux chambres régionales et territoriales des comptes, ou de la communication externe.
Vous avez, Monsieur le Premier président, poursuivi et amplifié ce mouvement
de modernisation avec la réforme juridictionnelle, la réorganisation des chambres
de la Cour, les regroupements de chambres régionales,
l’amélioration du processus
de programmation et de réalisation des travaux communs à la Cour et aux chambres
régionales
et l’adaptation de notre institution à la transformation numérique, pour ne citer que
quelques-uns des chantiers auxquels vous vous êtes attelé. Le Parquet général a été
pleinement acteur de ce mouvement continu de modernisation. Soyez assuré,
Monsieur le Premier président, de mon engagement dans la poursuite de la modernisation
des juridictions financières.
*
Permettez-moi, au moment où je prends mes fonctions, de vous livrer mes premières
réflexions sur la place du Parquet général, dont les attributions sont précisément définies par
le code des juridictions financières. Rassurez-vous, je ne vous les présenterai pas toutes,
tant le champ de l’intervention
du parquet est vaste. Je souhaite plutôt vous dire dans quel
état d’esprit j’aborde la fonction de Procureur général.
A cet égard, je fais miens les mots de Philippe Séguin : «
le Procureur général, placé près la
Cour, en est en réalité partie intégrante
».
Le Procureur général est partie intégrante de la Cour lorsque, par ses réquisitoires,
il introduit les instances devant la juridiction.
C’est là à m
es yeux un rôle essentiel,
qui doit constituer une priorité pour le Parquet
, tout comme l’exercice du ministè
re public près
la Cour de discipline budgétaire et financière.
Le Parquet est également partie intégrante de la Cour
par la sécurité qu’il apporte
à
la qualité de l’ensemble de
ses travaux, contrôles des comptes et de la gestion, enquêtes
transversales, évaluations de politiques publiques, analyse des finances publiques,
certification. Ses conclusions garantissent en particulier la régularité des procédures
et la pertinence des analyses juridiques notamment, développées dans les rapports,
y compris à l
’appui des propositions de
saisine du juge pénal ou de la Cour de discipline
budgétaire et financière.
Partie intégrante de la Cour, le Procureur général
l’est assurément par
sa fonction
consultative
sur l’organisation
générale de ses travaux et sur son fonctionnement.
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J’attacherai
également
, comme l’ont fait mes prédécesseurs, une importance toute
particulière à la fonction d’animation de l’action des
procureurs financiers près les chambres
régionales et territoriales des comptes. Je suis heureuse de les sa
luer aujourd’hui
et de leur exprimer
ma confiance. Je me risquerai à dire qu’ils font corps avec le Parquet
général et qu’ils sont, par le réseau qu’ils forment
avec lui
, une incarnation de l’unité
des juridictions financières.
Mesdames et mes
sieurs les hauts magistrats de l’ordre judiciaire, je sais la qualité
et l’intensité
des relations nouées par le parquet général de la Cour avec les juridictions
et les autorités administratives chargées d’un pouvoir de sanction. Je souhaite ici vous
assurer de la poursuite de ce dialogue fructueux et indispensable au bon exercice de nos
missions respectives.
*
La période récente a montré l’ampleur des attentes de nos concitoyens à l’égard
des institutions publiques.
Vous avez récemment organisé, Monsieur le Premier président, une journée consacrée au
dépouillement
des mentions relatives à la Cour et
aux chambres régionales
et territoriales des comptes émanant des participants au grand débat national. Les messages
qui nous sont adressés expriment
d’abord
la confiance en les juridictions financières. Mais
ils expriment aussi le souhait que leurs recommandations soient davantage
suivies d’effets
ou que les irrégularités et les fautes de gestion
qu’elles mettent en évidence
soient plus
systématiquement sanctionnées.
Les juridictions financières ne peuvent en effet se contenter de dénoncer publiquement les
manquements
qu’elles découvrent en contrôlant les gestions publiques
; elles doivent être
en
mesure
de
sanctionner
les
personnes
qui
en
sont
responsables.
Cette lancinante question de la refonte de la responsabilité des gestionnaires
et des comptables publics, à laquelle était déjà
consacré le colloque d’avril 2005 organisé
par le Premier président Philippe Séguin, appelle des réformes indispensables.
Vous l’avez
régulièrement évoqué dans vos prises de parole publiques, M. le Premier président,
ainsi que mon prédécesseur
, notamment à l’occasion de notre
audience solennelle
de rentrée du 17 janvier dernier.
Monsieur le Premier président, vous avez souhaité confier à la rapporteure générale
le pilotage d’un groupe de travail
, en vue de
faire des propositions d’évolution
des
régimes
de
responsabilité
des
comptables
comme
des
ordonnateurs,
dont les fonctions, bien que de plus en plus imbriquées, ne doivent pas conduire à renoncer
aux principes de séparation et d’indépendance
qui constituent le fondement de notre ordre
public financier. Sachez que, sous mon autorité, le Parquet général mettra son expertise
au service de ce groupe de travail qui doit permettre à la Cour de contribuer efficacement
aux réflexions que le Gouvernement a décidé d’engager sur ce sujet.
D’une manière plus générale, soyez assurés Monsieur le Premier président et vous tous,
mes chers collègues, que votre Parquet général, avec le concours des procureurs financiers
près les chambres régionales et territoriales des comptes, continuera à jouer pleinement son
rôle et à vous apporter un concours attentif.
Je vous remercie.