Le Centre national d’enseignement à
distance (CNED)
(
référé 9 février 2006)
Le Centre national d’enseignement à distance (CNED) est présent
sur
tous
les
segments
de
l’enseignement
et
de
la
formation
professionnelle à distance, dont il est le premier prestataire national et
européen avec 325 000 usagers et clients. En application de la loi
organique sur la loi de finances (LOLF), cet établissement public
national est devenu l’un des principaux opérateurs du programme
« soutien de la politique de l’éducation nationale » de la mission
interministérielle enseignement scolaire.
A la suite du contrôle des comptes et de la gestion du CNED, la
Cour a adressé le 9 février 2006 ses observations au ministre de
l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Elle indiquait qu’il était prioritaire et urgent de parvenir à une
clarification des missions et des objectifs du CNED, cette imprécision
pouvant pour partie expliquer le relatif déclin de ses activités de service
public et de marché. Les inscriptions ont en effet baissé en 2005 d’un
cinquième par rapport à 1997, deux facteurs ayant à cet égard conjugué
leurs effets : une anticipation inégale des évolutions de la demande
(généralisation des supports numériques, tutorat « en ligne ») et le
développement d’offres concurrentes sur un marché de plus en plus
compétitif (organismes privés d’enseignement à distance, cours à
domicile, cahiers de vacances,…).
La Cour constatait tout d’abord qu’aucun texte réglementaire ne
permettait de situer l’enseignement à distance par rapport aux
dispositions
générales relatives à l’enseignement et à la formation
professionnelle
.
Cette lacune entraîne une précision insuffisante du cadre juridique
régissant les relations du CNED avec ses usagers et ses clients : les
principales décisions relatives aux modalités de financement de ses
actions - qu’il s’agisse de la subvention pour charges de service
public allouée par le ministère de l’éducation ou du tarif de ses
prestations - ne peuvent dès lors être clairement fondées.
54
COUR DES COMPTES
Dans sa réponse, le ministère a indiqué que le délai écoulé depuis
2002 - année de publication du statut rénové du CNED - pour
délimiter le cadre juridique de ses missions s’expliquait par le fait
qu’une définition législative préalable était nécessaire : celle-ci a
été apportée par l’article 11 de la loi d’orientation et de
programmation pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005, qui a été
codifié à l’article L. 131-2 du code de l’éducation. Toutefois, ainsi
que l’avait souligné la Cour, le ministère a reconnu que cette
disposition législative nécessite désormais la mise en place de
textes réglementaires précisant notamment les modalités d’accès
aux activités de service public et les conditions de développement
des activités de marché.
La Cour constatait en particulier que l’établissement ne menait pas ses
missions de service public à partir d’une définition assez précise, qu’il
s’agisse de ses activités dans le cadre de la scolarité obligatoire ou des
autres.
Le ministère a confirmé dans sa réponse que l’enseignement à
distance assuré par le CNED pendant la durée de la scolarité
obligatoire faisait
« partie intégrante de sa mission de service
public ».
Dans ce cadre, l’établissement intervient, soit de façon
subsidiaire par rapport à l’enseignement en présence (élèves
empêchés pour un motif objectif qui sera précisé dans les textes
réglementaires pris en application de l’article L. 131-2 précité),
soit
de
façon
complémentaire
(matières
obligatoires
non
dispensées
par
l’établissement
public
d’enseignement).
Le
ministère a également indiqué à la suite des observations de la
Cour, qu’il était nécessaire de donner un fondement réglementaire
à la pratique actuelle qui voit l’inspecteur d’académie émettre un
avis conforme sur la scolarisation à distance des élèves jusqu’à
16 ans.
Le ministère a par ailleurs précisé que les missions de service
public du CNED comprenaient également, en dehors de la scolarité
obligatoire, l’ensemble des enseignements dispensés par les
établissements du second degré jusqu’au baccalauréat et au-delà
(STS, classes préparatoires), la formation initiale assurée dans le
cadre des conventions conclues avec les universités et la formation
continue
des
personnels
administratifs
et
enseignants
de
l’éducation nationale, notamment en ce qui concerne les
LE CENTRE NATIONAL D’ENSEIGNEMENT A DISTANCE (CNED)
55
formations préparant aux concours internes (
27
).
A contrario
, toutes
les
autres
prestations
de
l’établissement
(enseignement
parascolaire, formation professionnelle continue) relèvent du
secteur marchand et leurs tarifs, acquittés par les inscrits ou les
financeurs, ne peuvent être inférieurs au prix de revient. Le
ministère précise que, dans cette catégorie, il
« convient d’inclure
les
demandeurs
d’emplois
qui
relèvent
de
la
formation
professionnelle continue et plus particulièrement des dispositions
du Livre IX du code du travail »
.
La Cour constatait que la mise en oeuvre de la LOLF aurait
normalement dû s’accompagner d’une justification plus précise du
montant de la subvention pour charges de service public et des
modalités de tarification
.
Elle soulignait que cette définition devait être
une étape préalable au contrat d’objectifs dont la négociation s’était
engagée avec l’établissement.
Le ministère a en effet confirmé que la fixation du périmètre du
service public assuré par l’établissement devrait permettre à
l’avenir de clarifier et
simplifier sa politique tarifaire, et de mettre
un terme aux contournements tarifaires qui amenaient certains
inscrits en formation permanente à accéder indûment aux
conditions les plus favorables.
Les élèves qui suivent auprès du CNED des enseignements au titre
de l’obligation scolaire bénéficieront de la gratuité, en application
des dispositions de l’article L. 132-1 du code de l’éducation, aux
termes duquel «
l’enseignement public dispensé dans les écoles
maternelles et les classes enfantines et pendant la période
d’obligation scolaire définie à l’article L. 131-1 est gratuit
». Cette
mission sera en conséquence intégralement financée par la
subvention pour charges de service public.
Pour les publics qui suivent, au delà de la scolarité obligatoire, des
enseignements relevant du service public, le principe retenu par le
ministère est celui du paiement d’une redevance dont le montant
sera calculé en prenant notamment en compte les coûts spécifiques
identifiés par le CNED et liés à l’enseignement à distance
(fabrication des supports, routage, envoi ou traitement électronique
des copies corrigées…), à l’exclusion des frais strictement
pédagogiques (salaires des enseignants). Dans cette hypothèse, la
27) En revanche, le ministère n’a pas encore arrêté de position en ce qui concerne les
préparations aux concours externes, dont il indique qu’il est difficile de les retenir
dans le cadre des missions de service public du CNED, compte tenu des règles du
droit de la concurrence applicables en ce domaine.
56
COUR DES COMPTES
subvention pour charges de service public compenserait la
différence entre le coût supporté par l’opérateur et le montant de la
redevance versée par l’usager. Le même raisonnement sera
appliqué aux personnels de l’éducation nationale préparant des
concours internes.
Le ministère précise par ailleurs que, pour l’ensemble des autres
publics qui s’inscrivent au CNED pour suivre des enseignements
ne relevant pas du service public, l’établissement devra appliquer
un prix tenant compte de l’ensemble des coûts supportés, ce qui
viendra mettre un terme à certains tarifs subventionnés par
l’établissement.
Toute
remise
tarifaire
accordée
pour
ces
prestations qui relèvent du secteur marchand devra être autorisée,
en conformité avec le droit de la concurrence, par le conseil
d’administration et ne pourra être prise en compte dans le calcul de
la subvention pour charges de service public.
La Cour avait par ailleurs souligné la difficulté d’apprécier dans la
clarté la performance du CNED, dans la mesure où les crédits couvrant
l’activité de cet établissement sont éclatés entre deux programmes, pour
les personnels enseignants intervenant au sein de l’établissement
(premier degré, deuxième degré), et le programme de soutien de la
politique de l’éducation nationale, pour l’action générale du CNED en
tant qu’opérateur.
La réponse ministérielle mentionne la préparation du projet annuel
de performance établi dans le cadre du projet de loi de finances
pour 2007 : ce projet identifiera les objectifs du CNED en relation
avec les missions qui lui sont assignées et précisera les indicateurs
permettant d’en assurer l’évaluation au titre de sa participation à
l’action 7 (établissements d’appui de la politique éducative) du
programme 214 (soutien de la politique de l’éducation nationale)
du budget de l’enseignement scolaire.
Le ministère a par ailleurs répondu partiellement à l’observation
précise de la Cour sur l’éclatement des crédits du CNED, en
indiquant
que
les
enseignants
en
réemploi
employés
par
l’établissement (au nombre de 667 en 2006) seraient transférés sur
son budget et financés par la subvention pour charges de service
public, ce qui permettra de mieux apprécier la performance de cet
opérateur.
***
LE CENTRE NATIONAL D’ENSEIGNEMENT A DISTANCE (CNED)
57
La Cour constate, en définitive, que les orientations annoncées par
le ministère pour faire préciser par la voie réglementaire les missions de
service public du CNED et pour établir dans la clarté ses modalités de
financement vont dans le sens qu’elle a préconisé.
Par delà une précision plus grande de ses missions, il reste
cependant que le CNED doit accroître sa réactivité face aux évolutions
actuelles, marquées par l’accroissement du nombre des opérateurs
d’enseignement à distance et la diversification croissante des produits et
services, ce dont sont convenus lors de leur audition par la Cour le
directeur général du CNED et le directeur du programme «
soutien de la
politique de l’éducation nationale
». Il apparaît en conséquence
nécessaire, compte tenu de l’ampleur et du caractère général de la baisse
d’activité du CNED pendant la période récente, d’élaborer et de
formaliser une stratégie de reconquête sur laquelle l’action de
l’établissement devra être évaluée, tant en ce qui concerne son efficience
que son efficacité.
La Cour veillera tout particulièrement à ce que les nouvelles
orientations qui ont été définies se traduisent le plus rapidement possible
dans des textes réglementaires et à ce que ceux-ci soient effectivement
appliqués. Elle sera en outre attentive à ce que soient également menés à
bien les processus d’élaboration du contrat d’objectifs et des projets
annuels qui permettront de mieux mesurer la performance future du
CNED, notamment en ce qui concerne le relèvement
indispensable de
ses parts de marché.
58
COUR DES COMPTES
RÉPONSE DU MINISTRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE, DE
L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE
Le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et
de la recherche a étudié avec attention et intérêt le rapport que la Cour a
consacré au Centre National d’Enseignement à Distance (CNED) après
examen de la réponse apportée au référé du 9 février 2006.
En complément des éléments communiqués à la Cour à cette occasion,
il souhaite apporter deux séries de précisions développées ci-après, portant,
d'une part, sur la mise en oeuvre de la clarification des missions de service
public du CNED, et, d’autre part, sur l’appréciation de la performance de
l’établissement.
I - La clarification des missions de service public du CNED et ses
conséquences du point de vue de la LOLF
Dans son référé, la Cour estimait prioritaire de clarifier le périmètre
des missions de service public assurées par le CNED afin d’asseoir sur des
bases plus cohérentes sa politique tarifaire et la subvention pour charges de
service public qui lui est allouée.
Elle constate que les orientations annoncées par le ministère pour
faire préciser par la voie réglementaire les missions de service public du
CNED et pour établir dans la clarté ses modalités de financement vont dans
le sens qu’elle a préconisé.
Le ministère confirme les orientations notifiées dans sa réponse au
référé du 9 février 2006, dont la Cour reprend les principaux développements
dans son projet d’insertion, sur l’ensemble des questions relatives à la
clarification du périmètre du service public et aux conséquences de celle-ci
sur la mise en oeuvre de la Loi Organique relative aux Lois de Finances
(LOLF).
Il rappelle que la question de la définition des missions de service
public constitue un sujet majeur pour l’avenir de cet opérateur et a fait
l’objet d’un travail important en relation avec l’établissement dès 2002 à
l’occasion de la réflexion globale sur sa politique tarifaire. L’une des
conclusions de ces travaux a rapidement mis en évidence la nécessité d’une
intervention législative permettant de fonder juridiquement la mission de
service public du CNED ; c’est la principale raison du retard dans le
règlement de cette question, à laquelle s’ajoutait en outre la nécessité de
disposer, au sein de l’établissement, d’une comptabilité analytique qu’il a
depuis mise en oeuvre.
Cette disposition législative a été insérée à l’article 11 de la loi du 23
avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école et codifiée
à l’article L. 131-2 du code de l’éducation.
LE CENTRE NATIONAL D’ENSEIGNEMENT A DISTANCE (CNED)
59
Comme le souligne le rapport de la Cour, il convient désormais de la
compléter par la mise en place de textes règlementaires précisant les
conditions et modalités d’accès aux activités de service public ainsi définies,
dispositif règlementaire sur lequel travaille actuellement le ministère en
concertation avec l’établissement.
C’est sur la base de cette clarification que le ministère entend faire
reposer le dialogue de gestion prescrit par la LOLF avec son opérateur,
permettant ainsi de définir précisément la contrepartie de la subvention pour
charges de service public.
L’ensemble de ces éléments permettra en outre de poursuivre le
travail de contractualisation qui doit aboutir prochainement et qui couvrira
la période 2007-2010.
II - La performance du CNED au regard des moyens attribués par le
ministère
Dans son référé, la Cour soulignait la difficulté d’apprécier dans la
clarté la performance du CNED à travers le cadre de l’architecture
budgétaire issu de la LOLF, du fait de l’éclatement des crédits couvrant son
activité entre, d’une part, les deux programmes premier et second degrés,
pour les personnels enseignants intervenant au sein de l’établissement, et,
d’autre part, le programme «soutien de la politique de l’éducation
nationale », pour l’action générale du CNED en tant qu’opérateur.
Le ministère a tenu compte des observations de la Cour et a inscrit au
projet de loi de finances pour 2007 la mesure de transfert des emplois
budgétaires, pour ce qui concerne les enseignants en réemploi, des deux
programmes premier et second degrés au profit du programme « soutien de
la politique de l’éducation nationale » et, plus particulièrement, au titre de ce
programme, au CNED.
Compte tenu du temps nécessaire à la mise en place de cette mesure
en terme de gestion, la date de prise d’effet est prévue au 1er septembre
2007, date à laquelle ces personnels enseignants, affectés au CNED, seront
rémunérés sur le budget de l’établissement. Ce transfert permettra ainsi de
mieux apprécier la performance de cet opérateur au regard des moyens dont
il dispose effectivement.
En conclusion de ses observations, la Cour estime que le CNED doit
accroître sa réactivité. Pointant l’ampleur et le caractère général de la
baisse d’activité du CNED pendant la période récente, elle juge nécessaire «
d’élaborer et de formaliser une stratégie de reconquête sur laquelle l’action
de l’établissement devra être évaluée, tant en ce qui concerne son efficience
que son efficacité ».
60
COUR DES COMPTES
Sur ce point, le ministère constate, avec la Cour, la très grande
diversité
et
l’accroissement
important
du
nombre
des
opérateurs
d’enseignement à distance et des produits et services proposés par ces
derniers.
Il suit avec intérêt et accompagne les efforts importants de
l’établissement dans la réflexion générale qu’il mène sur l’évolution de son
offre de formation en développant notamment, dans le domaine de la
formation professionnelle continue, des produits de formation adaptés à la
demande du secteur des entreprises et de leurs salariés, et en tirant le
meilleur parti possible des dispositifs qui organisent la formation tout au
long de la vie (validation des acquis de l’expérience, droit individuel à la
formation…..).
Dans le même sens, le CNED a entamé une refonte importante de son
offre de formation dans le domaine parascolaire pour lequel il propose
d’ores et déjà de nouveaux produits et services.
Dans le cadre de la contractualisation en cours, le ministère travaille
actuellement, en concertation avec l’établissement, à la formalisation d’un
projet annuel de performance identifiant les objectifs en relation avec les
missions assignées à cet opérateur et précisant en outre les indicateurs
permettant d’en assurer l’évaluation au titre de sa participation au
programme « soutien de la politique de l’éducation nationale ».