Les interventions récentes de la
Cour dans le secteur des sports
A compter de 1999, la Cour a entrepris un cycle de contrôles sur le
secteur sportif et le rôle qu’y exerce le ministère chargé des sports.
Jusqu’en 2004, dix fédérations sportives ont été contrôlées, soit en raison
de l’importance de leurs budgets, soit à cause des difficultés
institutionnelles ou financières auxquelles elles paraissaient confrontées :
équitation, football, basket-ball, sports de glace, voile, tir, judo, rugby,
ski, tennis. Cette série de contrôles a été complétée par des enquêtes sur la
situation des conseillers techniques sportifs placés auprès des fédérations
par le ministère chargé des sports, sur les comptes et la gestion du comité
national olympique et sportif français (CNOSF), ainsi que sur la gestion
du fonds national de développement du sport (FNDS). Tous ces contrôles
ont donné lieu à des interventions de la Cour, celui de la fédération
française de football ayant fait l’objet d’une insertion au rapport public
annuel 2001.
Une synthèse des contrôles effectués dans le secteur des sports a
été insérée au rapport public annuel 2003 sous le titre «
L’Etat et le
mouvement sportif national
».
S’agissant de l’action du ministère chargé des sports, elle critiquait
l’absence de coordination entre les interventions de l’Etat et des
collectivités territoriales, alors que ces dernières jouent un rôle croissant,
notamment en matière d’équipements sportifs. Si, par procédure
d’agrément, le ministère peut déléguer des missions de service public aux
fédérations, il s’est avéré qu’aucun cadre juridique précis ne déterminait
les modalités d’exercice de la tutelle qu’il lui revenait d’exercer.
S’agissant des conseillers techniques sportifs placés par le ministère
auprès des fédérations, la Cour constatait l’absence de base juridique de
ce dispositif. Elle relevait de nombreuses irrégularités en matière de
rémunération et critiquait, plus généralement, la gestion peu rigoureuse
des agents concernés, le ministère n’étant pas toujours en mesure de
préciser la nature de leurs activités, leur localisation, ni le montant de leur
rémunération. S’agissant des conventions d’objectifs encadrant les
subventions ministérielles versées aux fédérations, la Cour notait que
274
COUR DES COMPTES
cette procédure s’était longtemps réduite à un saupoudrage de crédits sur
de multiples actions d’importance très variable. Ce n’est que depuis 2001
que le ministère a voulu inscrire ses conventions dans une perspective
pluriannuelle et ainsi inciter les fédérations à se doter d’une stratégie. La
Cour soulignait enfin que, parallèlement aux subventions issues du
budget général du ministère, les crédits versés aux fédérations par le
FNDS induisaient une évidente confusion entre les sources de
financement et légitimaient des interrogations sur la raison d’être de ce
fonds.
Par ailleurs, la gestion des fédérations sportives appelait de
nombreuses critiques. Outre des dysfonctionnements récurrents des
instances dirigeantes, la Cour soulignait l’absence de contrôle de gestion,
une comptabilité analytique sommaire et la faiblesse des fonctions de
contrôle interne et externe. Elle constatait notamment les difficultés qui
ont affecté certaines opérations immobilières et le fait que le
développement des ressources commerciales des fédérations ne s’était pas
toujours accompagné d’une gestion rigoureuse des contrats et des
montages financiers.
Les évolutions constatées depuis les interventions de la Cour
A la suite des contrôles de la Cour, plusieurs évolutions sont
intervenues au sein des fédérations examinées. Quelques mois après
l’intervention de la Cour, la fédération française de ski était placée en
redressement judiciaire ; la nouvelle équipe dirigeante a pris plusieurs
mesures correctrices : comblement progressif du passif, notamment grâce
à la vente de l’immeuble servant de siège social et au relogement dans des
locaux moins coûteux, renégociation des contrats avec les partenaires
commerciaux. La fédération des sports de glace a, par ailleurs, signé en
2004 une nouvelle convention d’objectifs avec le ministère chargé des
sports, le versement de la subvention étant désormais conditionné à la
mise en oeuvre d’un plan d’économie et de restructuration qui intègre
notamment la diminution de la masse salariale. Enfin, la fédération
française de football a lancé un appel à concurrence préalablement au
choix de son mandataire pour la période 2002-2006.
OBSERVATIONS PORTANT SUR CERTAINES FONCTIONS
275
Par ailleurs, le contrôle du FNDS avait
notamment conduit la Cour
à s’interroger sur la cohérence de ses financements en faveur des
mouvements sportifs avec ceux versés directement par le ministère à ces
mêmes mouvements et souligner la nécessité d’une réponse rapide à la
suppression prévue du fonds au 1
er
janvier 2006, en raison de
l’incompatibilité d’un tel dispositif avec la nouvelle loi organique relative
aux lois de finances (LOLF). Le ministère a décidé de substituer au fonds
un Centre national de développement du sport (CNDS), établissement
public administratif, qui associera l’Etat et le mouvement sportif.
Enfin, depuis l’insertion au rapport public 2003 sur « L’Etat et le
mouvement sportif national », plusieurs mesures ont été prises pour
clarifier la gestion des fédérations et conforter le rôle du ministère chargé
des sports. Cette orientation s’est concrétisée par la loi du 1
er
août 2003 et
la loi du 21 juin 2004 modifiant la loi du 16 juillet 1984 relative à
l’organisation et à la promotion des activités physiques et sportives.
D’une part, ces textes visent à donner plus de solidité et de
transparence à la gestion des fédérations. Ces dernières disposent
désormais d’une plus grande latitude d’organisation de leur cadre
statutaire, à la condition qu’elles se dotent d’un règlement financier. Une
période transitoire a été prévue jusqu’au 31 janvier 2005 pour permettre
aux fédérations de se mettre en conformité avec ces nouvelles
dispositions. En outre, les lois précitées ont pris plusieurs mesures
destinées à inciter les fédérations à revoir leurs partenariats commerciaux,
en leur ouvrant notamment la possibilité de créer des sociétés financières
chargées de gérer les recettes issues de l’organisation de manifestations,
ou de signer des conventions avec leur ligue professionnelle en matière de
droits d’exploitation audiovisuelle.
D’autre part, des mesures récentes sont venues renforcer le rôle du
ministère chargé des sports en faveur du mouvement sportif, même si
cette préoccupation se trouve, de fait, limitée par l’importance croissante
des activités commerciales dans ce secteur. S’agissant des principes, la loi
précitée du 1
er
août 2003 confère une valeur législative au principe
d’unité au sein de chaque fédération entre les différentes formes de
pratiques - sport amateur et sport professionnel - et de nécessaire
solidarité financière entre les deux. Cette affirmation n’est pas restée sans
effet puisque la fédération française de football et la ligue de football
professionnel ont décidé que le football amateur pourra bénéficier d’un
reversement d’une part des droits de retransmission télévisée des
compétitions professionnelles.
276
COUR DES COMPTES
Le ministère entend, par ailleurs, améliorer le dispositif des
conventions d’objectifs qu’il signe avec les fédérations sportives,
notamment grâce à la mise en place d’un système de comptabilité
analytique qui doit servir d’outil de dialogue lors des négociations des
conventions et permettre ainsi de mieux justifier les réalisations des
actions et projets soutenus par les fonds publics. Le ministère s’est, en
outre, doté d’une cellule de veille pour déceler en amont les difficultés de
gestion des fédérations sportives et étudier avec elles les mesures de
nature à les surmonter. Cette cellule a également rédigé un guide du
règlement financier que toutes les fédérations ont dû adopter en 2005.
Par ailleurs, le décret du 28 décembre 2005 a donné une base
juridique aux missions des conseillers techniques sportifs placés par le
ministère auprès des fédérations. Ce texte prévoit notamment la signature
de conventions-cadres entre le ministère et les fédérations, qui précisent
le nombre d’agents concernés ainsi que les conditions de leur gestion. Il
prévoit également un dispositif d’évaluation par le ministère des services
rendus par ces agents, sur la base de lettres de mission précisant les tâches
qui leur sont confiées.
Enfin, conscient qu’un recensement exhaustif des équipements
sportifs conditionne la mise en oeuvre d’une politique publique efficace
en faveur du sport, le ministère s’est engagé, depuis l’été 2004, dans une
telle opération, l’objectif étant de déboucher fin 2005. Parallèlement, les
fédérations ont été invitées par le ministère à élaborer des plans
pluriannuels
territorialisés
des
équipements
qu’elles
estiment
indispensables au développement de leur discipline, ainsi qu’à l’accueil et
à l’organisation en France des compétitions internationales. Ce travail
vise à valoriser les investissements publics, à rationaliser leur gestion et
leur exploitation ainsi qu’à faciliter la concertation des fédérations avec
les collectivités territoriales en matière d’équipements, trop longtemps
déficiente.
OBSERVATIONS PORTANT SUR CERTAINES FONCTIONS
277
RÉPONSE DU MINISTRE DE LA JEUNESSE, DES SPORTS
ET DE LA VIE ASSOCIATIVE
L’insertion de la Cour sur « Les interventions récentes de la Cour
dans le secteur des sports » reprend bien les réponses qui ont pu être
apportées tant par le Parlement que par le ministère sur les évolutions de la
politique sportive : suppression du Fonds national pour le développement du
sport (FNDS) et création du Centre national pour le développement du sport
(CNDS), plus grande latitude apportée par la loi à la gestion des fédérations
et outils destinés à faciliter le contrôle interne (règlement financier,
comptabilité analytique) et externe (cellule de veille ministérielle), évolution
de
l’actuel
dispositif
contractuel
vers
des
conventions
d’objectifs
pluriannuelles, clarification des relations commerciales entre les partenaires
du sport professionnel et maintien du lien de solidarité, financière
notamment, entre le sport professionnel et le sport amateur, réalisation du
recensement (national) des équipements sportifs, espaces et sites de
pratiques, cadre réglementaire des missions des conseillers techniques
sportifs.
RÉPONSE DU MINISTRE DÉLÉGUÉ AU BUDGET ET
A LA RÉFORME DE L’ETAT
La Cour des comptes s’est notamment interrogée au cours de son
contrôle du Fonds national pour le développement du sport (FNDS) sur « la
cohérence de ses financements en faveur des mouvements sportifs avec ceux
versés directement par le ministère à ces mêmes mouvements ». La Cour
questionnait également le ministère sur « la mise en place d’une réponse
rapide à la suppression du fonds au 1
er
janvier 2006, en raison de
l’incompatibilité d’un tel dispositif avec la nouvelle loi organique relative
aux lois de finances (LOLF) ».
Le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie souhaite
apporter une réponse sur ce point en complément des éléments proposés par
le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Il a été demandé et obtenu du ministère de la jeunesse, des sports et
de la vie associative (MJSVA) un décroisement des flux financiers entre
l’Etat et le FNDS. La double intervention de ces structures concernait
notamment les subventions aux fédérations et aux équipements sportifs des
collectivités locales.
278
COUR DES COMPTES
Le dispositif proposé à compter du 1
er
janvier 2006 permet une
nouvelle répartition des compétences qui exclut tout financement croisé entre
le budget du ministère et le Centre national pour le développement du sport
(CNDS) :
- au CNDS incombe ce qui relève d’un impact territorial direct : la
part régionale (subventions de fonctionnement aux clubs, comités et ligues)
et les subventions d’équipement aux associations et collectivités locales, ainsi
que le soutien aux actions conduites par le Comité national olympique et
sportif français (CNOSF).
- au budget général du MJSVA (programme « sport ») incombe ce qui
relève de la politique nationale : les conventions d’objectifs entre le
ministère et les fédérations sportives et le financement des équipements de
l’Etat (établissements nationaux).