C
OUR DES
C
OMPTES
Médecins et hôpitaux
des armées
Octobre 2010
L
a présente synthèse est destinée à faciliter la lecture et
le commentaire du rapport de la Cour des comptes qui,
seul, engage la juridiction.
Les réponses des administrations et des organismes inté-
ressés sont insérées dans le rapport public.
Avertissement
Synthèse
du
Rapport public thématique
Sommaire
3
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Les effectifs et les compétences nécessaires
aux missions du serivce de santé des armées 7
2
Le soutien apporté aux troupes
en opérations extérieures . . . . . . . . . . . . . . .11
3
La médecine d’unité . . . . . . . . . . . . . . . . . . .15
4
Les hôpitaux d’instruction des armées . . . . .17
5
Le coût de la médecine hospitalière
pour le budget de la défense
. . . . . . . . . . . .21
Conclusion générale
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .24
Recommandations
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .25
Introduction
5
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Depuis les guerres de la révolution jusqu’aux opérations extérieures en
Afghanistan, au Liban ou au Tchad, les personnels médicaux et paramédicaux du ser-
vice de santé des armées doivent garantir aux militaires blessés les meilleurs chances de
survie et la plus grande préservation possible de leur intégrité physique. Il s’agit d’un
devoir moral de la Nation. Il s’agit aussi d’un impératif stratégique : le chef d’état-
major des armées doit être assuré qu’en toutes circonstances et en tout lieu le service de
santé sera en mesure de soigner les soldats envoyés en opérations.
Service inter-armées placé sous l’autorité directe du chef d’état-major des armées,
le service de santé des armées emploie 15 600 personnes, dont plus de 2 000 médecins
et internes et 4 500 infirmiers, qui exercent dans 316 services médicaux d’unité, neuf
hôpitaux d’instruction des armées, quatre écoles de santé, un institut de recherche bio-
médicale, une pharmacie centrale des armées et cinq centres de ravitaillement sanitaire.
Le coût du fonctionnement annuel du service s’est établi à plus de 1,3 Md€ en 2009.
Il est financé à hauteur de 860 M€ par le ministère de la défense et de 450 M€ par
les recettes de son activité hospitalière (versements des caisses de sécurité sociale, des
mutuelles et des patients).
Aux termes du contrat opérationnel fixé par le chef d’état-major des armées, le
service de santé des armées doit pouvoir soutenir le déploiement de 10 000 hommes sur
le territoire national, de 5 000 hommes dans des opérations d’évacuation et de 30 000
hommes en projection à distance du territoire métropolitain. Il s’est organisé à cette fin
de manière quasi autonome par rapport au système civil de santé publique.
Ses neuf hôpitaux militaires ont pour vocation première d’assurer, d’une part, la
formation et le maintien des compétences des personnels médicaux et, d’autre part, d’ac-
cueillir les militaires blessés. Leur capacité globale est d’environ 2 700 lits, soit l’équi-
valent du CHU de Toulouse.
Depuis la suspension de la conscription, pour préserver ses neuf hôpitaux, le ser-
vice de santé des armées a décidé de les ouvrir largement aux civils. 90 % de leur acti-
vité est aujourd’hui civile.
Ainsi, la médecine militaire est à l’intersection de deux politiques – une politique
de défense et une politique de santé publique- dont les objectifs, les modes de gestion, les
logiques d’organisation et les publics sont différents. La conciliation de ces deux poli-
tiques est difficile. C’est l’examen des solutions retenues par le service de santé des
armées pour conduire sa double mission qui fait l’objet du présent rapport public thé-
matique.
7
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
1
Les effectifs
et les compétences
nécessaires aux missions
du service de santé des
armées
Les besoins du
contrat opérationnel
Le contrat opérationnel fixé par le
chef d’état-major des armées prévoit
que le service de santé des armées
apporte un soutien santé en toutes cir-
constances aux 340 000 militaires des
trois armées et de la gendarmerie.
Au 31 décembre 2009, les effectifs
globaux du service de santé des armées
répondaient aux besoins définis par son
contrat opérationnel, sauf s'agissant des
infirmiers de blocs opératoires pour les-
quels il manquait un quart des effectifs
requis. Ce déficit doit être comblé car il
s'agit là de personnels qualifiés indispen-
sables au bon fonctionnement du dispo-
sitif chirurgical à l'arrière comme en
opérations.
Le dispositif permanent est com-
plété par la participation active des
réservistes qui jouent un rôle important,
y compris en opérations extérieures. Le
service de santé doit donc s’assurer que
les réservistes sont effectivement dispo-
nibles en toutes circonstances, ceux-ci
ayant souvent d’autres engagements (au
titre de la sécurité civile, de la Croix
rouge, des services départementaux
d’incendie et de secours etc.) qui pour-
raient entrer en concurrence en cas de
crise. Les praticiens quittant le service
de santé doivent être encore davantage
incités à s’inscrire dans la réserve opéra-
tionnelle à l’issue de leur contrat.
La formation du
personnel
Le recrutement
et la formation initiale
Les conditions particulières d’exer-
cice de la médecine militaire et son
attractivité limitée pour des médecins
déjà diplômés obligent le service de
santé français - comme la plupart de ses
homologues étrangers- à recruter la
grande majorité de ses médecins dès la
première année de formation universi-
taire.
Le service de santé a consacré envi-
ron 105 M€ en 2009 au recrutement et à
la formation initiale de son personnel,
essentiellement dans le cadre de quatre
écoles militaires placées sous sa respon-
Les effectifs et les compétences
nécessaires aux missions du service
de santé des armées
8
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
sabilité : les écoles de Lyon, Bordeaux et
du Val de Grâce pour la formation des
praticiens, et l’école de Toulon pour la
formation des personnels paramédi-
caux.
Les étudiants en médecine sont
recrutés après le baccalauréat à l’issue
d’un concours très sélectif. Ils bénéfi-
cient durant un an d’une préparation
intensive, en complément de celle four-
nie par l’université, pour préparer les
épreuves du numerus clausus. Les écoles
du service de santé sont ainsi les meil-
leures
classes
préparatoires
à
ce
concours, gratuites et même rémunérées
(54 à 68 % de réussite).
Les étudiants reçus sont élèves offi-
ciers puis officiers, rémunérés pendant
toute leur scolarité. Les élèves infir-
miers, sous-officiers dès leur réussite au
concours, bénéficient d’un régime com-
parable. La rémunération des élèves
représente la moitié des dépenses des
écoles du service de santé.
En contrepartie, les élèves des
écoles du service de santé des armées
souscrivent un engagement dont la
durée a été allongée en 2004 pour tenir
compte de l’augmentation de la durée
des études. Les élèves médecins doivent
ainsi 12 à 16 ans de service à l’Etat à l’is-
sue de leurs études. Les élèves infirmiers
doivent 8 ans, soit proportionnellement
à leur temps d’étude, deux fois plus que
les médecins.
La Cour a relevé que l’aspect dissua-
sif du remboursement des frais de scola-
rité était atténué dans la pratique. Ainsi,
les anciens élèves rejoignant l’une des
trois fonctions publiques bénéficient de
mesures de bienveillance qui limitent la
portée du remboursement de leurs frais
de scolarité. La Cour demande au minis-
tère de la défense et au comptable du
Trésor public d’appliquer strictement les
règles en vigueur en matière de rem-
boursement des études rémunérées par
l’Etat.
Le coût des écoles
Le coût annuel de la scolarité par
élève (hors sa propre rémunération) est
d’environ 42 000 euros. Ce coût élevé,
alors que 93 % de la formation sont dis-
pensés dans des universités civiles, tient
à un taux d’encadrement particulière-
ment élevé (un personnel administratif
ou de soutien pour 2,8 élèves à Lyon et
Bordeaux).
Pour réduire ce coût de fonctionne-
ment d’environ un tiers, le regroupe-
ment des écoles de santé de Lyon et
Bordeaux sur le site de Lyon a finale-
ment été décidé et la première promo-
tion exclusivement lyonnaise a com-
mencé sa scolarité à la rentrée 2009. Il
faut toutefois souligner que ce regrou-
pement préconisé à plusieurs reprises
par la Cour aura mis près de trente ans à
se réaliser puisqu’il était prévu dès la
création de la nouvelle école de Lyon en
1981.
En outre, le déménagement de
l’école des infirmiers de Toulon vers le
site lyonnais n’a pas été envisagé alors
Les effectifs et les compétences
nécessaires aux missions du service
de santé des armées
9
Synthèse
du Rapport public
thématique de la
Cour des comptes
que 40 M€ ont été investis pour
construire une nouvelle école d’infir-
miers sur le même site.
La formation
militaire des
praticiens
La formation spécifique aux besoins
du service de santé ne représente que
4 % du temps de formation des étu-
diants entre la deuxième et la sixième
année. Le service de santé des armées a
reconnu que cette formation était insuf-
fisante et le dispositif est en cours de
révision. Les exigences accrues des opé-
rations extérieures, en particulier en
Afghanistan, nécessitent une formation
spécifique, notamment militaire, plus
importante, que celle-ci soit assurée
dans des écoles du service de santé ou
par d’autres écoles d’officiers.
11
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
2
Le soutien apporté
aux troupes en
opérations extérieures
Des personnels
engagés sur de
multiples théâtres
d’opérations
Le service de santé des armées est
chargé du soutien médical des armées
françaises engagées sur tous les théâtres
d’opérations extérieures. En moyenne,
compte tenu des rotations des person-
nels, 1 600 personnes et 30 équipes chi-
rurgicales
(1)
ont été déployés chaque
année depuis 2005. Parmi ces opéra-
tions, celle en Afghanistan est la plus
exigeante en raison de l'importance des
troupes à soutenir, de la nature des opé-
rations militaires et des responsabilités
assumées au sein de l'alliance atlantique.
Le service de santé reste toutefois moins
sollicité jusqu'à présent que ses homo-
logues américain et britannique.
L’absence d’indicateurs
pour les délais
d’évacuation
Les autorités militaires font état de
leur satisfaction pour la qualité du ser-
vice assuré en opérations extérieures par
le service de santé. La Cour relève
cependant que contrairement à son
homologue britannique, le service de
santé n’a pas développé d’indicateurs ou
de statistiques sur les délais d’évacuation
des blessés qui permettraient d’attester
du respect des standards OTAN. Ceux-
ci définissent une durée maximale pour
évacuer les blessés.
Une très faible part
des effectifs mobili-
sée en opérations
extérieures
Le déploiement des personnels du
service de santé en opérations exté-
rieures ne représente qu’au plus 200
emplois en équivalent-temps plein sur
un plan annuel, soit 2,4 % des effectifs
________
(1) Une équipe chirurgicale est composée d’un chirurgien orthopédiste, d’un chirurgien
« viscéraliste », d’un anesthésiste-réanimateur et d’infirmiers de bloc opératoire.
Le soutien apporté aux troupes
en opérations extérieures
12
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
qui peuvent être projetés. Le service de
santé des armées remplit sans difficulté
particulière les missions qui lui sont
dévolues en l’état des opérations mili-
taires actuelles.
L’impact de la participation aux opé-
rations extérieures est donc globalement
limité pour le secteur hospitalier.
L’effort pèse surtout sur les spécialistes
en chirurgie orthopédique et viscérale et
sur les anesthésistes-réanimateurs. Il est
très inégalement réparti puisque, entre
2002 et 2008, 35 % de ces spécialistes ne
sont jamais partis et 20 % ne sont partis
qu’une fois (c'est-à-dire deux mois ou
moins).
L’adaptation à
l’évolution des
conflits
Les nouvelles conditions
d’emploi des forces
Le service de santé doit répondre
aux nouvelles conditions d’emploi des
forces, notamment en Afghanistan où
de petites unités militaires sont déta-
chées auprès des forces afghanes et se
trouvent loin des postes de secours. Cela
l’oblige à réviser le modèle traditionnel
de médicalisation de l’avant pour se rap-
procher du concept américain qui fait
reposer une partie du secours médical
sur les militaires eux-mêmes. De nou-
veaux modules de formation des soldats
ont été ainsi mis au point permettant,
pour les plus avancés, la pratique de
geste de nature médicale par des soldats
ou des infirmiers. Les conditions de
mise en œuvre de ces gestes mériteraient
d’être précisées au plan juridique.
Le service de santé, qui dispose
d’importants services psychiatriques
dans ses hôpitaux, ne s’est en revanche
pas suffisamment impliqué dans le déve-
loppement de la détection et du suivi
des troubles psychiques éventuels des
militaires ayant participé à des opéra-
tions. Les armées ont donc développé
leurs propres pratiques et services psy-
chologiques.
Le transport des blessés
Jusqu’en 2006, l’Etat n’avait pas les
capacités aériennes pour rapatrier plus
de deux blessés graves en même temps,
en utilisant des Falcon médicalisés.
Ainsi, en mai 2002, lors de l’attentat de
Karachi contre des agents de la DCN, la
France a dû faire appel au soutien de
l’Allemagne qui a envoyé au Pakistan un
Airbus médicalisé de la Bundeswehr. Il a
dès lors été décidé de développer un kit
dénommé « Morphée », qui permet la
médicalisation en quelques heures d’un
avion KC 135 de l’armée de l’air et le
transport d’un plus grand nombre de
blessés graves, avec toutes les capacités
de réanimation nécessaires. Entré en
service mi-2006, le premier kit sera
complété par un deuxième en 2010. Les
équipements d’évacuation sanitaire res-
teront cependant moins importants que
ceux dont disposent nos partenaires
Le soutien apporté aux troupes
en opérations extérieures
13
Synthèse
du Rapport public
thématique de la
Cour des comptes
allemands, ce qui doit inciter les armées
à mutualiser ces moyens lourds et coû-
teux.
Les capacités d’évacuation sanitaire
des blessés des zones de combat vers les
antennes chirurgicales restent à amélio-
rer. Le manque d’hélicoptères et d’équi-
pages de l’armée de l’air ne permet pas
de le faire aujourd’hui dans des condi-
tions pleinement satisfaisantes, ce qui
explique le recours aux hélicoptères
américains à plusieurs reprises en
Afghanistan.
La mutualisation avec les
alliés
La coopération entre service de
santé des armées alliées est indispensa-
ble. Elle existe au plan bilatéral (en par-
ticulier avec les Allemands) et dans le
cadre de l’OTAN. Mais les coopérations
opérationnelles n’ont pas donné suffi-
samment lieu jusqu’à maintenant à de
véritables mutualisations, sauf avec
l’Allemagne. Sur le modèle de la coopé-
ration franco-allemande, des progrès
doivent être en faits avec nos principaux
alliés, en dépit des réticences des armées,
pour mutualiser davantage les matériels
et les pratiques.
L’activité civilo-militaire
L’aide médicale apportée aux popu-
lations locales par le service de santé des
armées sur tous les théâtres où il est
engagé est un élément essentiel de l’ac-
tion civilo-militaire des armées qui vise à
favoriser l’acceptation des troupes
étrangères. Elle rencontre des limites
opérationnelles et sécuritaires. L’activité
chirurgicale en opération
apparaît tou-
tefois excessivement faible (un acte tous
les trois jours au Liban, trois par jour au
Tchad). Les capacités sont sous-utilisées
et les équipes ont une activité insuffi-
sante pour maintenir leur qualification.
La définition d’une véritable politique
de l’action civilo-militaire du service de
santé est donc souhaitable.
15
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
3
La médecine d’unité
Une activité peu
adaptée aux
priorités
opérationnelles
La mission des médecins
et infirmiers
Les médecins et infirmiers militaires
des services médicaux d’unité sont pré-
sents sur les bases des différentes
armées (en métropole, outre-mer et
auprès des forces pré-positionnées), à
bord des navires et dans les écoles mili-
taires. Ils assurent le soutien santé au
quotidien des militaires, conseillent le
commandement, participent à la prépa-
ration opérationnelle des troupes et
fournissent les effectifs nécessaires à la
tenue des postes de secours en opéra-
tions extérieures mais aussi, pour cer-
tains d’entre eux, sur le territoire natio-
nal (cas par exemple des services médi-
caux des brigades de sapeurs-pompiers
de Paris et Marseille). Le dispositif est
complété par des équipes de dentistes et
de vétérinaires.
L’activité médicale
Les médecins des forces armées ont
des tâches spécifiques qui ne permettent
pas de comparer directement leur acti-
vité à celle de leurs confrères civils de
médecine générale. Leur activité médi-
cale stricto sensu apparaît cependant fai-
ble, de l’ordre de 6 à 7 consultations par
jour. Près des trois quarts des consulta-
tions de soins se font pour des motifs ne
relevant pas du service.
La préparation
opérationnelle
L’organisation actuelle de la méde-
cine d’unité, largement héritée de l’ar-
mée de conscription, ne peut pas être
considérée
comme
optimale
pour
répondre aux exigences opérationnelles
nouvelles des armées françaises. Elle ne
garantit pas en particulier une pratique
suffisante des actes d’urgence (une ving-
taine d’actes d’urgence par an et par
médecin en moyenne). L’absence de
politique d’encouragement à prendre
part aux gardes d’urgence dans les hôpi-
taux militaires ou civils ne permet pas
aujourd’hui de compenser la faiblesse de
la préparation opérationnelle.
Les soins ne relevant pas
de la défense
Une part importante du temps de
travail des médecins d’unité est consa-
crée à délivrer aux militaires ou à leurs
ayants-droits des soins sans lien avec le
service. Outre le fait que ce type de
La médecine d’unité
16
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
médecine ne contribue que partielle-
ment à l’entretien des compétences
médicales nécessaires en opération, la
Cour souligne que, en dépit de la recom-
mandation faite en 2002, ces soins
continuent d’être délivrés gratuitement.
Le manque à gagner pour l’Etat peut
être évalué à environ 10 millions d’euros
par an. Or, dans le même temps, un
grand nombre de militaires ont recours
aux services de la médecine civile pour
des actes en relation avec le service et
qui sont alors remboursés par le service
de santé des armées à l’assurance mala-
die. En 2008, en dépit des efforts du ser-
vice de santé des armées pour en limiter
la croissance, la facture s’est élevée à
plus de 10 millions d’euros. Il y a un
paradoxe à maintenir une médecine
« civile » gratuite au profit des militaires
et de leurs familles tandis qu’un nombre
important de militaires recourent à la
médecine publique pour des soins ou
des examens en lien avec l’exercice de
leur fonction.
La rationalisation
inachevée
du dispositif
Le nombre de services
médicaux
L’éparpillement entre de multiples
unités de 316 petits services médicaux
explique en partie la faible productivité
médicale. La création des bases de
défense devrait permettre de regrouper
davantage les équipes au sein de centres
médicaux desservant une plus grande
population de militaires. La priorité doit
être donnée à la poursuite de rationalisa-
tion engagée du dispositif outre-mer et
dans les forces pré-positionnées.
La logique de regroupement des ser-
vices médicaux d’unité rencontre des
réticences « culturelles » fortes des
médecins comme des chefs de corps,
attachés les uns et les autres à la grande
proximité entre les médecins et les sol-
dats.
La poursuite de
l’inter-armisation
L’inter-armisation permet, d’une
part, de développer la polyvalence et la
mobilité du personnel pour gagner en
réactivité opérationnelle et, d’autre part,
de mutualiser des moyens dispersés. La
réforme conduite en 2005 apparaît posi-
tive mais doit être complétée pour ren-
forcer l’autorité des directeurs régionaux
(en métropole) et des directeurs interar-
mées (outre-mer) du service de santé sur
les personnels des services médicaux
d’unité.
17
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
4
Les hôpitaux d’instruction
des armées
La mission militaire
des hôpitaux des
armées
Les hôpitaux militaires ont pour
mission d’assurer la formation du per-
sonnel médical et paramédical et de soi-
gner les militaires au titre des accidents
de service. Dans le cadre des opérations
extérieures, ils fournissent des équipes
chirurgicales et des spécialistes envoyés
sur les théâtres d’opérations. Ils accueil-
lent enfin les blessés rapatriés.
Les hôpitaux d’instruction des
armées sont dotés d’un budget global de
l’ordre de 800 millions d’euros. Plus de
la moitié du financement repose sur une
contribution de l’assurance maladie
(416 M€ en 2009) liée aux soins réalisés
au bénéfice des patients civils. Les neuf
hôpitaux d’instruction des armées
emploient 8 400 personnes dont 677
médecins et disposent de 2 700 lits.
Le respect du contrat opé-
rationnel
Au titre du contrat opérationnel fixé
par le chef d’état-major des armées, le
service de santé doit pouvoir fournir 48
équipes chirurgicales - formées chacune
d’un chirurgien orthopédiste, d’un chi-
rurgien « viscéraliste », d’un anesthé-
siste-réanimateur et d’infirmiers de bloc
opératoire -. Fin 2008, le service de
santé des armées ne disposait que de 37
équipes
chirurgicales.
Le
nouveau
schéma d’organisation des soins adopté
en 2009 par le service de santé des
armées prévoit que les objectifs du
contrat opérationnel seront remplis en
2015 avec l’appui des réservistes.
Le contrat opérationnel dresse la
liste des spécialités jugées nécessaires
(neurochirurgiens,
ophtalmologues,
pédiatrie) au fonctionnement des hôpi-
taux militaires. Il ne retient pas la psy-
chiatrie alors que les traumatismes psy-
chiques que peuvent subir les soldats
sont aujourd’hui reconnus. Il n’inclut
pas davantage les soins de suite et de
rééducation. L’expérience britannique
en Iraq et en Afghanistan montre pour-
tant l’importance de développer ces
structures spécialisées dont les armées
ne disposent pas aujourd’hui.
Le caractère marginal des
soins directement liés aux
armées
L’activité médicale des hôpitaux
militaires directement liée aux armées
(médecine d’expertise et d’aptitude,
soins dans le cadre d’accidents ou d’af-
fections de travail ou de service, soins
aux blessés rapatriés) est en diminution
Les hôpitaux d’instruction
des armées
18
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
régulière. Elle ne représentait plus que
5,4 % de l’activité hospitalière en 2009.
Les militaires ont en effet la même
liberté de choisir leur médecin et leur
hôpital que les civils, y compris en cas
d’accident de service. Pour des raisons
notamment pratiques, ils recourent fré-
quemment aux structures hospitalières
civiles. Il revient alors au service de
santé de rembourser les soins prodigués
dans les établissements civils, ce qui a
représenté un montant de 9,5 M€ en
2008, soit près du quart du coût directe-
ment liée aux armées réalisée par le ser-
vice.
Les autres missions
militaires des hôpitaux
Les hôpitaux militaires abritent des
modules de décontamination et de trai-
tement pour les blessés radio-contami-
nés, les grands brûlés, les victimes d’ac-
cidents de plongée…Ils participent à la
mise en œuvre des plans de prise en
charge des risques nucléaire, radiolo-
gique, biologique ou chimique (NRBC).
Toutes ces capacités sont disponibles au
profit des populations civiles. C’est le
cas notamment des unités de traitement
des grands brulés des hôpitaux Percy
(Clamart) et Sainte Anne (Toulon), par-
ticulièrement utilisées.
Les missions de formation, d’ins-
truction et d’expertise assurées par les
hôpitaux militaires sont aujourd’hui mal
comptabilisées.
Une articulation
insuffisante avec le
dispositif civil de
santé publique
Les grandes options
d’organisation
Confrontés à des mutations fonda-
mentales de leur environnement depuis
la fin de la guerre froide, les services de
santé des armées occidentales ont été
conduits à repenser l’organisation de
leurs hôpitaux. La question de l’articula-
tion entre le dispositif sanitaire civil et
les hôpitaux militaires est nécessaire-
ment au centre des réflexions. Les
réponses apportées sont diverses. Ainsi,
la Bundeswehr – qui compte encore de
nombreux appelés – a gardé des hôpi-
taux militaires en en réduisant toutefois
le nombre. Elle dispose aujourd’hui de
quatre hôpitaux militaires et d’un hôpital
civilo-militaire qui offrent 1 800 lits
pour soutenir en opérations extérieures
un nombre voisin de militaires de celui
du service français. Le Royaume-Uni a
en revanche choisi de s’adosser au dis-
positif de santé public. La totalité des
hôpitaux militaires a été fermée et une
convention a été passée avec le
« National Health Service », prévoyant
l’accueil des praticiens militaires dans 32
structures hospitalières publiques, en
particulier dans des services de trauma-
tologie. L’accueil des militaires blessés
Les hôpitaux d’instruction
des armées
19
Synthèse
du Rapport public
thématique de la
Cour des comptes
dans six hôpitaux civils est également
prévu par cette convention.
En France, après la fermeture de
centres hospitaliers concomitamment à
la suspension du service national, le ser-
vice de santé des armées a décidé de
conserver neuf hôpitaux d’instruction
répartis dans six régions, en les ouvrant
aux patients civils.
L’ouverture à la population
civile
Le service de santé des armées a
cherché à concilier une double approche
:
- conserver des hôpitaux de taille
moyenne (200 à 400 lits), dont la part
dans l’offre de soins est suffisamment
circonscrite pour leur permettre le cas
échéant d’assurer un soutien prioritaire
aux forces armées sans perturber le ser-
vice public de santé. Ils représentent
environ 2 % des capacités publiques
d’hospitalisation.
- être suffisamment attractif par une
offre de soins large et de qualité pour
trouver des patients civils en nombre
suffisant. Cela a notamment imposé des
travaux de rénovation importants dans
plusieurs
établissements.
Un
seuil
d’alerte est en revanche atteint en
matière de vétusté des matériels médi-
caux, avec un taux de vétusté voisin de
50 %. L’ouverture aux civils conduit
aussi à offrir, autour d’un pôle chirurgi-
cal fort, une large palette de spécialités,
sans lien direct avec les besoins des
armées. Pris individuellement, aucun des
hôpitaux ne présente toute l’étendue de
l’offre médicale, mais tous offrent un
plateau technico-médical étendu avec au
moins 11 spécialités. En conséquence, le
profil des hôpitaux militaires est celui
des hôpitaux généralistes civils de taille
comparable, hormis l’absence de l’obs-
tétrique dans huit établissements sur les
neuf.
Dès lors, les trois-quarts des patients
accueillis en 2009 sont « étrangers » au
monde de la défense. En termes de pro-
fil de soins, l’activité des hôpitaux d’ins-
truction des armées est civile à 94,6 %
puisque seule l’activité liée aux besoins
des armées (5,4 %) peut représenter,
jusqu’à un certain point, une spécificité.
Une inscription des hôpi-
taux militaires dans le dis-
positif de santé publique
« à la carte »
Malgré l’absence de spécificité de
leur activité médicale et la reconnais-
sance de leur mission de santé publique
depuis 2002, les hôpitaux militaires res-
tent peu intégrés dans le dispositif
national et local de santé publique. La loi
portant réforme de l’hôpital et relative
aux patients, à la santé et aux territoires
du 23 juillet 2009 a renforcé leur inser-
tion dans le dispositif de santé publique
mais le décret du 15 juillet 2009 relatif
aux attributions du ministre de la
défense a continué de réserver à ce der-
nier le soin de « définir les conditions de
la contribution du service de santé des
Les hôpitaux d’instruction
des armées
20
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
armées
à
la
politique
de
santé
publique ».
La concertation avec les autorités
régionales de santé est restée limitée. Le
schéma national d’organisation des
soins élaboré en 2009 par le service de
santé des armées, pour organiser son
offre hospitalière à horizon 2015, n’a
pas fait l’objet d’une concertation avec
les autorités civiles. L’engagement de
projets d’infrastructure ou l’achat de
matériels
médicaux
onéreux
sans
concertation avec les autorités civiles,
ont conduit à des surcapacités regretta-
bles et à des choix budgétairement coû-
teux. Ainsi, une expérience de coopéra-
tion
civilo-militaire
proposée
par
l’agence régionale de santé de Provence
Alpes Côte d’Azur, au moment où le
ministère de la défense lançait un projet
de reconstruction de son hôpital toulon-
nais (pour un montant de 240 millions
d’euros) a été refusée par le ministère de
la défense. En matière d’équipements,
l’acquisition à Toulon et au Val de Grâce
de tomographes à émission de positons
(TEP), utilisés en cancérologie, s’est
faite sans concertation avec les autorités
civiles. Il s’agit pourtant là de matériels
coûteux, sans utilité militaire, et dont
l’implantation est réglementée par le
ministre de la santé.
Une activité médicale trop
limitée
Avec un taux d’occupation des lits
de 52 %, malgré la fermeture de 10 %
des capacités hospitalières depuis 2000,
les hôpitaux militaires sont en dessous
des normes communément admises
dans les centres hospitaliers civils com-
parables (75 % en chirurgie, 85 % en
médecine). D’une façon générale, les
capacités des services ne sont pas utili-
sées de façon optimale, conforme aux
bonnes pratiques recensées par la mis-
sion nationale d’expertise et d’audit hos-
pitaliers (MEAH). L’activité des chirur-
giens a progressé depuis 2002, mais,
avec un ratio moyen de 140 séjours chi-
rurgicaux par chirurgien et par an, elle
est très inférieure à celle observée dans
des centres hospitaliers comparables
(243 séjours chirurgicaux en moyenne).
Les blocs opératoires sont sous-utilisés.
Compte tenu de l’importance de l’écart
entre hôpitaux civils et militaires, les
départs en opérations extérieures des
chirurgiens ne peuvent expliquer cette
contre-performance.
21
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
Cour des comptes
5
Le coût de la médecine
hospitalière pour
le budget de la défense
Un déficit du
système hospitalier
pesant sur le
budget de la
défense
Le déficit d’exploitation
hors norme des hôpitaux
militaires
Le déficit d’exploitation des hôpi-
taux militaires en 2009 s’est élevé à
281,3 millions d’euros. Il constitue le
premier déficit hospitalier de France.
Alors que les hôpitaux des armées ne
regroupent que 2 % des capacités hospi-
talières publiques, leur déficit d’exploita-
tion équivaut à celui cumulé de l’AP-
Hôpitaux de Paris, des Hospices civils
de Lyon et de l’AP Marseille.
Ce déficit des hôpitaux militaires,
constant, est hors norme. Il représente
53 % des produits. A titre de comparai-
son, le code de la santé publique prévoit
la mise en œuvre d’un plan de redresse-
ment financier dès que le déficit dépasse
2 % des produits pour les centres hospi-
taliers universitaires (CHU) et 3 % pour
les
centres
hospitaliers
régionaux
(CHR). Une telle procédure est évidem-
ment théorique pour les hôpitaux d’ins-
truction des armées puisque le déficit est
couvert par la dotation du ministère de
la défense. Cela pèse sur le budget,
contraint, du ministère de la défense.
Ainsi, ce déficit hospitalier annuel pour-
rait servir à acquérir six hélicoptères
Caracal ou quatre avions de transport
C130.
Les risques liés au
passage à la tarification à
l’activité
Le passage à la tarification à l’acti-
vité, engagé depuis le 1er janvier 2009 et
qui sera achevé en 2015, peut laisser
craindre à terme une aggravation de ces
résultats et par conséquent la nécessité
d’augmenter la subvention du ministère
de la défense.
Les causes
principales du
déficit
Un niveau de charges
comparable aux établisse-
ments civils
Les rémunérations versées par les
hôpitaux militaires supportent un taux
de cotisation de retraite très supérieur à
Le coût de la médecine hospitalière
pour le budget de la défense
22
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
celui des hôpitaux civils en raison du
régime des pensions militaires. L’impact
de ce surcoût de fonctionnement doit
être relativisé car les hôpitaux militaires
ne paient pas de taxe sur les salaires (à
laquelle sont assujettis les établissements
civils) et ne supportent pas de charge
financières pour l’acquisition d’équipe-
ments ou la réalisation d’infrastructures
du fait qu’ils font partie intégrante du
budget du ministère de la défense.
Surtout, la politique conduite par le ser-
vice de santé a permis de contenir la
part de la masse salariale dans les
charges des hôpitaux militaires (65 %),
qui reste inférieure à ce qui est observé
dans les établissements civils (68 %).
Une proportion trop éle-
vée de personnels non
soignants
Les hôpitaux militaires emploient
une proportion presque double de per-
sonnels administratifs par rapport à la
moyenne civile. Ils ont également une
proportion nettement plus importante
de personnel technique et ouvrier. Un
rééquilibrage de la structure des emplois
apparaît nécessaire.
Une productivité médicale
insuffisante
En 2009, la recette moyenne d’acti-
vité de soins par médecin hospitalier
militaire représentait 665 000 euros.
Cela place les hôpitaux d’instruction des
armées dans la fourchette des 20 %
d’établissements hospitaliers moins pro-
ductifs. Certaines spécificités peuvent
contribuer à expliquer cette productivité
limitée (départs en opérations exté-
rieures, absence de l’obstétrique dans
huit établissements sur neuf) mais sans
le modifier radicalement. Les insuffi-
sances constatées constituent la contre-
partie d’une réticence à s’intégrer pleine-
ment dans le dispositif de santé civil de
santé public conduit en fait à une noto-
riété limitée auprès de la médecine de
ville et des patients civils et à une inser-
tion trop faible dans les réseaux d’ur-
gence et de soins.
Une prise en compte per-
fectible des contraintes
militaires
Afin de limiter l’impact sur le fonc-
tionnement des hôpitaux du départ du
personnel en opérations extérieures, une
planification a été établie. Ce dispositif a
fait la preuve de son efficacité opéra-
tionnelle depuis 2002. En revanche,
toutes les conséquences n’ont pas été
tirées en matière d’organisation des
soins, ce qui se traduit par une baisse
importante de l’activité chirurgicale
quand un des chirurgiens part en opéra-
tion. Il serait possible d’en atténuer l’im-
pact en améliorant le fonctionnement
des services de chirurgie.
Le coût de la médecine hospitalière
pour le budget de la défense
23
Synthèse
du Rapport public
thématique de la
Cour des comptes
Une solution à
construire avec le
monde civil
La reprise des bonnes
pratiques de la gestion
hospitalière
Le fonctionnement des hôpitaux
militaires repose pour le moment sur la
fiction d’un hôpital unique avec neuf
implantations régionales. Le service de
santé y voit la meilleure façon de répon-
dre au contrat opérationnel mais il ne
s’agit pas là d’un mode de gestion adapté
au pilotage de chaque établissement. Les
chefs d’établissements, qui doivent être
mieux formés à la gestion hospitalière,
doivent avoir des marges de manœuvre
plus importantes pour redresser les
comptes de leur hôpital. Ils doivent
aussi pouvoir s’appuyer sur des outils de
pilotage plus efficients, notamment en
matière de comptabilité analytique.
L’hypothèse du regroupe-
ment des structures
L’impact financier de la fermeture
d’un ou plusieurs établissements serait
mécanique même si, à court terme, la
période d’ajustement limiterait les gains
puisque une partie du personnel devrait
être redéployée vers d’autres établisse-
ments.
La fermeture d’établissements hos-
pitaliers supposerait de revoir le nombre
d’équipes chirurgicales et donc le
contrat opérationnel fixé par le chef
d’état-major des armées en fonction des
priorités stratégiques. Il apparaît en effet
difficile pour le service de santé des
armées de répartir un nombre de chirur-
giens inchangé sur un nombre d’hôpi-
taux moins important, sauf à accroître
encore la sous-activité, faute de patien-
tèle suffisante ou de créneaux opéra-
toires.
L’adossement au système
civil de santé publique
La stratégie hospitalière du service
de santé doit s’inscrire dans la perspec-
tive de l’acquisition par les praticiens
militaires des compétences toujours plus
pointues nécessaires à l’exercice de leur
mission. Pour répondre à ces besoins, le
service de santé doit s’adosser au dispo-
sitif civil de soins. Le recentrage de l’ac-
tivité médicale, conforme au contrat
opérationnel, doit être recherché avec
l’appui des autorités sanitaires civiles. Le
service de santé des armées n’a pour
objet, ni d’offrir une gamme de spéciali-
tés sans rapport direct avec les besoins
des armées, ni de développer une offre
concurrente sur un marché de santé déjà
pourvu. La stratégie médicale doit ainsi
être arrêtée conjointement avec les
agences régionales de santé. Celles-ci
devraient, en outre, se voir confier une
mission de mutualisation des infrastruc-
tures et des équipements des hôpitaux
des armées avec les établissements civils.
Conclusion générale
24
Synthèse
du Rapport public thématique de la
Cour des comptes
L
e service de santé dispose aujourd'hui des compétences humaines et des
moyens qui lui permettent de remplir le contrat opérationnel fixé par le chef
d’état-major des armées. L'organisation retenue doit cependant être amélio-
rée, voire repensée.
Ainsi, la scolarité des élèves praticiens dans des écoles spécifiques est excessivement
coûteuse alors qu'elle est assurée à plus de 90 % par les universités civiles. Les mesures
de rationalisation doivent être poursuivies. Un suivi rigoureux des anciens élèves doit
être assuré pour garantir à l’Etat la disponibilité effective des personnels qu'il a formés.
Le choix de s'appuyer sur un réseau de neuf hôpitaux militaires, qui n'était pas
le seul envisageable comme le montre l'expérience britannique- soulève quant à lui un
double problème : il ne garantit pas un niveau d’activité suffisant aux équipes médi-
cales et il est excessivement coûteux pour le budget du ministère de la défense. Il est à
cet égard peu opportun que la dotation budgétaire du ministère aux hôpitaux militaires
serve à 80 % à couvrir un déficit d’exploitation produit par une stratégie reposant sur
une activité exercée au profit essentiellement de la population civile. Le ministère de la
défense doit mieux hiérarchiser ses priorités budgétaires en faveur des dépenses les plus
utiles à la santé des soldats.
La politique d’autonomie des hôpitaux militaires doit donc être abandonnée et le
service de santé doit rechercher avec les autorités civiles une stratégie crédible de redres-
sement.
Si le service de santé des armées ne parvenait pas à améliorer substantiellement et
rapidement ses comptes hospitaliers, la question de la pérennité des hôpitaux militaires
devrait alors être clairement posée.
Recommandations
25
Synthèse
du Rapport public
thématique de la
Cour des comptes
Optimiser la formation des praticiens des
armées
Mieux intégrer dans la scolarité
des praticiens les besoins spécifique-
ment militaires du soutien santé des
forces ;
Réduire le coût de la formation
en limitant le personnel d’encadrement
des écoles du service de santé ;
S’assurer du remboursement
effectif des frais dus par les élèves ou
militaires qui démissionnent avant
l’achèvement de leurs obligations de
service.
Améliorer le soutien santé en opérations
extérieures
Poursuivre l’adaptation du sou-
tien santé aux nouvelles conditions
d’emploi des forces (formation mili-
taire, équipement, psychiatrie) ;
Accroître la coopération avec
les alliés dans le cadre des engage-
ments en coalition ;
Rendre compte des délais d’éva-
cuation des blessés en opérations exté-
rieures ;
Ouvrir plus largement les dispo-
sitifs du service de santé aux popula-
tions civiles locales afin de garantir une
activité suffisante aux praticiens mili-
taires et développer une démarche de
coopération civilo-militaire ;
Recentrer les médecins d’unité sur la pré-
paration opérationnelle
Recentrer l’activité des méde-
cins d’unité sur leur métier opération-
nel, afin de disposer de praticiens
moins nombreux mais davantage
concentrés sur la pratique de la méde-
cine militaire et d’urgence ;
Mutualiser les médecins d’unité
au sein des bases de défense afin d’ac-
croître leur activité médicale ;
Facturer aux militaires et à leurs
ayants droit les consultations et les
soins pour des raisons ne relevant pas
du service ;
Adosser l’emploi des compétences hospi-
talières sur le dispositif civil de santé publique
Fixer l’objectif de retour à
l’équilibre des comptes d’exploitation
des hôpitaux d’instruction des armée,
déterminer le calendrier pour y parve-
nir, et en élaborer les modalités avec le
dispositif civil de santé publique ;
Rechercher systématiquement
une concertation avec les Agences
régionales de santé pour la définition
des spécialités offertes par les hôpitaux
militaires ;
Organiser une mutualisation
des infrastructures et des équipements
avec les établissements publics de
santé ;
Déconcentrer et professionnali-
ser la gestion hospitalière avec l’appui
local des Agences régionales de santé
et celui de l’école nationale de santé
publique.