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Chapitre XIII
Les pensions d’invalidité :
des évolutions nécessaires,
un retour à l’emploi à favoriser
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_____________________ PRÉSENTATION_____________________
Les pensions d'invalidité sont versées par la sécurité sociale aux
assurés dont la capacité de travail ou de gain
648
est fortement réduite à la
suite d’un accident ou d’une maladie n’ayant pas une origine
professionnelle.
Le régime général concentre près de neuf bénéficiaires de ces
pensions sur dix, ainsi que l’essentiel des dépenses. Celles
-ci couvrent à la
fois les dépenses de prestations et celles découlant des droits liés à
l’invalidité en matière de retraite et d’exonération du ticket modérateur
649
pour
l’essentiel des frais de santé.
En 2019
650
, la Cour observait que l’invalidité était un dispositif mal
connu et peu suivi, malgré des dépenses dynamiques. Six ans plus tard, elle
a souhaité examiner si la dépense poursuivait sa progression rapide et
analyser les déterminants de son évolution. Elle a aussi cherché à évaluer,
dans l’intérêt des assurés et des comptes sociaux, le fonctionnement du
dispositif dans le régime général et sa capacité à favoriser le retour à
l’emploi quand l’état de santé des personnes s’améliore.
Le nombre élevé de bénéficiaires de pensions d’invalidité, dont la
majorité est jugée «
absolument incapable
» de travailler selon les termes
du code de la sécurité sociale, contribue à l’importance des dépenses,
même si celles-ci ont crû moins rapidement au cours des dernières
années
(I). L’efficience du dispositif serait améliorée si l’invalidité était
mieux suivie et si les médecins-
conseils de l’assurance maladie, qui
décident des mises en invalidité, étaient mieux outillés pour apprécier la
capacité de
travail et de gain des assurés (II). Le retour à l’emploi,
lorsqu’il est possible, est un enjeu essentiel pour les assurés comme pour
les finances sociales, ce qui nécessite une intensification des actions en
amont de la mise en invalidité et en matière de prévention de la
désinsertion professionnelle (III).
648
La capacité de gain désigne la capacité de l’assuré à
se procurer «
la rémunération
soumise à cotisations et contributions sociales qu'il percevait dans la profession qu'il
exerçait avant la date de l'interruption de travail suivie d'invalidité ou la date de la
constatation médicale de l'invalidité
» (article L 341-1 du code de la sécurité sociale).
649
Part de la dépense de santé restant à la charge de l’assuré.
650
Cour des comptes, « Les pensions
d’invalidité
: une modernisation indispensable au
service d’un accompagnement renforcé des assurés
»,
rapport sur l’application des lois
de financement de la sécurité sociale
, chapitre IV, 2019.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
417
Chiffres-clés 2023
Le régime général a versé une pension d’invalidité à un peu plus de
700 000 assurés en décembre 2023, dont 57 % de femmes, et à plus de
830 000
assurés au moins une fois pendant l’année
651
. Les dépenses de pensions
d’invalidité du régime général se sont élevées à 7,5
Md€, auxquelles s’ajoute
0,3
Md€ de dépenses d’allocation supplémentaire d’invalidité (minimum social).
L’assuré admis en invalidité est placé dans l’une trois catégories
déterminant le montant de sa pension, selon qu’il est capable d’exercer une
activité rémunérée (catégorie
1), qu’il est absolument incapable d’exercer une
profession (catégorie
2), ou qu’il est, en outre, dans l’obligation d’avoir recours
à l’assistance d’une tierce personne pour les actes ordinaires de la vie
(catégorie 3). En décembre 2023, 27 % des personnes en invalidité étaient en
catégorie 1, 71 % en catégorie 2 et 2 % en catégorie 3. Par rapport aux hommes,
les femmes étaient plus fréquemment en catégorie 1 (30 % contre 23 %).
L’invalidité recouvre souvent plusieurs pathologies. Sur près de
67 000
avis médicaux favorables à une admission en invalidité à l’initiative de
l’assurance maladie, en moyenne an
nuelle de 2021 à 2024, les pathologies les
plus fréquemment déclarées comme motif principal sont les épisodes ou
troubles dépressifs (12 400), les tumeurs malignes du sein (3 200), les accidents
vasculaires cérébraux et les lombalgies basses (1 500 chacun).
I -
Un dispositif encadré qui indemnise
un nombre élevé d’assurés
La réglementation soumet l’indemnisation de l’invalidité à des
conditions médicales et administratives strictes. Les dépenses de pensions
d’invalidité ont cessé de croître depuis 2020 mais res
tent élevées en raison
d’un nombre important de bénéficiaires.
A -
Une indemnisation soumise à des conditions strictes
La reconnaissance de l’invalidité est soumise à des conditions à la
fois administratives et médicales. Elle donne droit à une prestation
contributive
652
, qui peut être
complétée par des prestations d’assistance
.
651
L’écart est notamment lié aux décès et aux départs à la retraite en cours d’année.
652
Elle est servie en contrepartie de cotisations versées et dépend des rémunérations perçues.
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418
1 -
Un rôle central du médecin-
conseil de l’assurance maladie
dans le placement en invalidité
La reconnaissance de l’invalidité fait intervenir deux services distincts
:
d’une part les services administratifs de la caisse primaire d’assurance maladie
(Cpam), d’autre part les échelons locaux du service médical, services
déconcentrés de la caisse nationale d’assurance maladie (Cnam).
Un processus médico-administratif complexe
Est considéré comme invalide un assuré dont la capacité de travail
ou de gain est réduite d’au moins deux tiers en raison d’un événement de la
vie d’origine non professionnelle
653
. L’invalidité est reconnue par le
médecin-
conseil de l’échelon local du service médical, à la suite d’une
demande directe de l’assuré ou, le plus souvent, à l’occasion d’un contrôle
de l’arrêt de travail, lorsque l’état de santé s’est stabilisé, ou au terme du
délai maximum de 36 mois de versement des indemnités journalières pour
arrêt maladie. L’a
vis du médecin-
conseil précise la catégorie d’invalidité.
Pour être éligible à une pension d’invalidité, l’assuré doit en outre être
affilié à la sécurité sociale depuis au moins 12 mois et avoir exercé une activité
professionnelle minimale
654
au cours de l’année précédant l’interruption de
travail intervenue avant l’admission en invalidité ou la constatation de
l’invalidité. Ces conditions sont vérifiées par la Cpam à qui l’assuré adresse
sa demande de pension.
La Cpam notifie à l’assuré la décision d’attrib
ution de sa pension
655
qui lui est versée chaque mois, en tenant compte d’éventuelles évolutions
de sa situation ou de ses revenus. La pension d’invalidité peut être
supprimée si la capacité de travail ou de gain de l’assuré s’améliore.
2 -
Des pensions liées aux salaires passés, éventuellement
complétées par des prestations
d’assistance
Le montant de la pension dépend de la catégorie d’invalidité. Il est
calculé en fonction de la moyenne des salaires perçus au cours des
653
Article L. 341-1 et suivants du code de la sécurité sociale et règlement du régime
d’assurance invalidité
-décès des travailleurs indépendants.
654
600 heures de travail ou des cotisations équivalentes à celles dues sur un salaire
correspondant à 2 030 fois le Smic horaire.
655
Les recours amiables et contentieux contre les décisions relatives aux pensions
d’invalidité sont limités, avec des taux inférieurs respectivement à 3
% et à 1 % en 2023.
Le juge a
donné tort à l’assurance maladie dans 0,2
% des contentieux.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
419
dix meilleures années de la carrière, dans la limite du plafond de la sécurité
sociale. La pension est encadrée par un minimum et un maximum. Elle est
revalorisée annuellement en fonction de l’inflation observée. Les
personnes en invalidité de catégorie 3 perçoivent, en outre, 1 288,13
€ au
titre de la majoration pour tierce personne (MTP), qui compense
forfaitairement leurs
besoins spécifiques d’accompagnement au quotidien
.
Tableau n° 34 :
barème des pensions d’invalidité
dans le régime général au 1
er
avril 2025
Catégorie
Part du salaire
de référence
Minimum
mensuel
Maximum
mensuel
1
30 %
335,29
1 177,50
2
50 %
335,29
1 962,50
3
50 % + MTP
1 623,42
3 250,63
Source : Cnam
Les montants moyens de pension d’invalidité augmentent avec la
catégorie, compte tenu du barème (fraction croissante du salaire de
référence et, pour la catégorie 3, majoration pour tierce personne). Les
femmes perçoivent des pensions plus faibles en moyenne que celles des
hommes en raison des écarts de salaire de référence.
Tableau n° 35 :
montant mensuel moyen de la pension d’invalidité
par genre et par catégorie dans le régime général en décembre 2023
Catégorie 1
Catégorie 2
Catégorie 3 (*)
Femmes
576
850
2 094
Hommes
675
1 060
2 184
Ensemble
612
945
2 149
Note
: hors allocation supplémentaire d’invalidité, (*) y compris
majoration pour tierce personne.
Source : Cnam
Le titulaire d’une pension peut demander à bénéficier d’une allocation
supplémentaire d’invalidité. Cette prestation différentielle garantit un
montant mensuel minimum de revenus.
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COUR DES COMPTES
420
L’allocation supplémentaire d’invalidité
Le minimum de ressources mensuelles en cas d’invalidité est porté,
depuis le 1
er
avril 2025, à 914,85
€ pour une personne seule et à 1
601
pour un couple. Ainsi, une personne seule percevant le minimum de pension
d’invalidité (335,29
€) sans autres ressources bénéficie en outre de 579,56
au titre de l’allocation supplémentaire d’i
nvalidité
656
. En 2023, 9 % des
personnes en invalidité bénéficiaient de cette allocation.
À
ces pensions peuvent s’ajouter des rentes d’invalidité au titre de
contrats de prévoyance. En 2023, 73 % des entreprises déclaraient avoir
mis en place une garantie d
e prévoyance en cas d’invalidité
657
. Les
14,2 millions de salariés des branches professionnelles comptant plus de
100 000 salariés ayant mis en place un accord de prévoyance étaient
couverts à 99,9
% contre le risque d’invalidité de catégories
2 et 3, et à
80 % contre celui de catégorie 1
658
. Le nombre de bénéficiaires de rentes
d’invalidité au titre de la prévoyance n’est pas précisément connu, mais les
prestations correspondantes s’élevaient à 3,2
Md€ en 2022
659
.
B -
Des dépenses moins dynamiques depuis 2020
mais un coût qui reste important
Le niveau
des dépenses d’invalidité
reste élevé
en raison d’un
nombre de bénéficiaires important, et le coût pour le régime général est
accru par des droits connexes.
656
Les revalorisations de cette allocation en 2020 et 20
21 n’ont pas permis de porter
son montant (899,56
€ en 2024) au niveau de celui de l’allocation aux adultes
handicapés (AAH), soit 1 016,05
€. En 2023, 75
% des bénéficiaires de l’allocation
supplémentaire d’invalidité ont complété cette allocation avec l’
AAH.
657
S
elon le baromètre du centre technique des institutions de prévoyance et de l’institut
de sondage Ifop d’octobre 2023.
La convention collective nationale de retraite et de
prévoyance des cadres prévoit une couverture complémentaire obligatoire en cas de
décès mais facultative pour ce qui concerne l’invalidité.
658
Centre technique des institutions de prévoyance,
Les accords de branche en
prévoyance
, 2024.
659
Drees, «
Le profil des bénéficiaires d’une pension d’invalidité
»,
Les retraités et les
retraites
, édition 2024.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
421
1 -
Une progression du nombre d’invalides interrompue depuis 2020
Entre 2010 et 2019, le nombre de bénéficiaires de pensions
d’invalidité
du régime général
a progressé d’environ
3 % par an. Il fluctue
depuis entre 700 000 et 720 000 assurés.
Graphique n° 40 :
nombre de travailleurs indépendants et de salariés
du régime général
bénéficiaires d’une pension d’invalidité
en décembre de chaque année (2015-2023)
Note : les effectifs des travailleurs indépendants en invalidité ont été ajoutés à ceux du régime général
avant leur intégration à ce régime en 2020 pour conserver un champ homogène sur toute la période.
Source
: Cour des comptes, d’après les données de la Cnam
La forte progression jusqu’en 2019 s’explique essentiellement par
la réforme des retraites de 2010, qui a reculé
l’âge minimum légal de départ
à la retraite de 60 à 62 ans. En effet, le nombre des bénéficiaires de pensions
d’invalidité croît
avec l’âge et la pension d’invalidité est remplacée par une
pension de retraite pour inaptitude à un âge qui correspondait alors à l’âge
minimum légal de départ à la retraite
660
.
Un tel effet ne se produira pas à la suite de la réforme de 2023 qui a
repoussé l’âge minimum légal de départ à la retraite de 62 à 64
ans. En
effet, la réforme a maintenu à 62
ans l’âge de la retraite pour inaptitude,
faisant désormais
de l’inaptitude un motif de départ anticipé à la retraite.
660
Articles L. 341-15 et 16 du code de la sécurité sociale. La personne en invalidité doit
préalablement en faire la demande mais, si elle continue à travailler, elle peut continuer
à cumuler ses revenus d’activité avec sa pension d’invalidité jusqu’à 67 ans
.
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422
Graphique n° 41 :
répartition par âge et par genre des bénéficiaires
d’une pension d’invalidité du régime général en décembre 2023
Source
: Cour des comptes, d’après les données de la Cnam
Un autre facteur de hausse entre 2015 et 2019 est lié à la croissance
de la population âgée de 50 à 62 ans, qui concentre les trois quarts des
bénéficiaires de pensions d’invalidité. Cet effet est amplifié par la hausse
de l’emploi des seniors, qui augmente la part de ceux éligi
bles à une
pension d’invalidité
661
. Enfin, la part des personnes en invalidité à chaque
âge a augmenté sur cette période
, pour des raisons qui n’ont fait l’objet
d’aucune analyse.
Le retournement à la baisse en 2020
662
et 2021 a été dû à la crise
sanitaire : les mises en invalidité des assurés ont été retardées car les
médecins-conseils
n’
ont pu constater la stabilisation de leur état de santé
en raison des confinements. Après le rattrapage observé en 2022, la baisse
en 2023 reste, à ce jour, inexpliquée.
L’évolution du nombre de bénéficiaires de pensions d’invalidité
devrait rester modérée
à l’avenir
. Selon les projections démographiques de
l’Insee, l’
effectif de la population âgée de 50 à 62 ans aurait atteint un point
haut en
2023 et la tendance s’inverserait ensuite avec une baisse de 0,6
%
par an en moyenne au cours des dix années suivantes.
661
Drees,
Arrêts maladie : au-delà des effets de la crise sanitaire, une accélération
depuis 2019
, Études et Résultats n° 1321, décembre 2024.
662
Hors l’effet de l’intégration des travailleurs indépendants au régime général.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
423
2 -
Des dépenses de prestations aux évolutions heurtées
La Cour constatait en 2019 le dynamisme des dépenses de pensions
d’invalidité pour
la période allant de 2011 à 2018. Entre 2018 et 2023, leur
progression a été plus modérée : hors allocation supplémentaire
d’invalidité, elles ont augmenté à champ constant
663
de 15,5 %, soit à peine
plus que l’inflation (+
13,9 %).
L’évolution des dépenses d’invalidité au cours de la période résulte
de trois facteurs :
-
principalement, un effet volume dû à l’augmentation du nombre des
bénéficiaires résultant de l’intégration des travailleurs indépendants en
2020 et du rattrapage en 2022 des retards d’entrée
s dans le dispositif
du fait de la crise sanitaire ;
-
un effet lié à la revalorisation des pensions, marqué en 2022
664
du fait
de l’inflation
;
-
un effet prix, dû notamment à l’augmentation des salaires de référence
en 2023.
Graphique n° 42 :
décomposition de l’évolution annue
lle des dépenses
de pensions d’invalidité du régime général entre 2019 et 2023 (en %)
Note
: y compris majoration pour tierce personne, hors allocation supplémentaire d’invalidité.
Source
: Cour des comptes, d’après les données et la méthodologie de la
Cnam
663
L’intégration des travailleurs indépendants dans le champ du régime général a
conduit à une augmentation de 300
M€ de la dépense en 2020 pour ce régime.
664
Revalorisations de 1,8 % au 1
er
avril 2022 et de 4 % au 1
er
juillet 2022.
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424
3 -
Un coût annuel total pour le régime général
d’environ 10
Md€
En 2023, les prestations versées au titre de l’invalidité se sont
élevées à 7,8 Md€. Une appréhension complète des coûts de l’invalidité
pour le régime général nécessite de prendre en compte deux facteurs
supplémentaires.
L’invalidité ouvre droit à une exonération du ticket modérateur pour
l’ensemble des frais de santé, à l’exception des médicaments à service
médical rendu modéré et faible. Le coût de cet avantage a été estimé par la
Cour à environ 270
M€ en 2023.
L’invalidité permet aussi de valider des trimestres pour la retraite et
de partir à la retraite à taux plein dès l’âge de 62
ans au titre de l’inaptitude.
Selon la caisse nationale d’assurance vieillesse, le coût de ces avantages éta
it
de 2,3
Md€ en 2020 pour le régime général. Ce coût intègre celui lié à l’octroi
du minimum contributif, minimum de pension du régime général dont
l’obtention est conditionnée au taux plein
: 42 % des retraités précédemment
en invalidité en bénéficient a
lors qu’ils seraient, sinon, 9
%
665
.
En prenant en compte ces avantages indirects, le coût de l’invalidité
pour le régime général atteint un montant de l’ordre de 10
Md€ par an.
Toutefois, une partie de ces dépenses, non évaluée, devrait être imputée à
la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) au
lieu de la branche maladie, dans la mesure où les AT-MP ne sont pas tous
déclarés comme tels
666
.
II -
Une gestion
de l’invalidité
à améliorer
La gestion
de l’invalidité par la Cnam est fragilisé
e par une
organisation complexe, à la performance en demi-teinte, et un traitement
hétérogène des demandes de pension. La maîtrise du risque invalidité est
affectée par un outillage insuffisant des médecins-conseils pour apprécier
la capacité de travail et de gain des assurés.
665
L’invalidité donne aussi droit à des avantages au régime complémentaire Agirc
-
Arrco (attribution de points au titre des périodes d’invalidité
et annulation des
coefficients d’abattement)
.
666
La commission sur la sous-déclaration des AT-MP (article L. 176-2 du code de la
sécurité sociale) n’évalue pas ces dépenses, qui sont difficiles à identifier, en raison de
conditions d’accès différentes
aux dispositifs de rente AT-
MP et de pension d’invali
dité.
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IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
425
A -
Un pilotage et une qualité de service à renforcer
Le pilotage du dispositif par la Cnam n’inclut pas de gestion du
risque lui-
même et se concentre sur l’efficience et la qualité du service.
L’effort de mutualisation et de dématérialisa
tion de la gestion doit être
poursuivi pour améliorer la qualité de service et réduire les disparités de
traitement.
1 -
Un dispositif insuffisamment piloté
La convention d’objectifs et de gestion 2023
-2027 de la Cnam est
plus ambitieuse en matière d’invalidi
té que la précédente, qui passait pour
l’essentiel ce sujet sous silence. Elle s’engage à améliorer la qualité de
service et à consolider la performance de gestion
667
. Pour autant, cette
ambition n’est pas pleinement traduite dans les différents outils de ge
stion
partagés entre la Cnam et les organismes du réseau.
Les indicateurs nationaux relatifs à la gestion administrative de
l’invalidité sont instables dans le temps
668
. Le système d’information doit
être unifié pour consolider des données produites au niveau local,
insuffisamment exploitées. Il en résulte un déficit d’analyse sur l’invalidité,
pourtant nécessaire à la mise en œuvre d’une gestion active de ce risque et à
l’appréciation de la performance et de la qualité du service rendu. La Cnam
a créé en décembre 2024 une direction de projet pour préparer le changement
des outils de production de données et améliorer l'homogénéité de leur
traitement sur le territoire.
La caisse nationale n’est pas en mesure d’évaluer l’intégralité des
coûts de gestion de l’
invalidité. Elle estime le coût des services administratifs
à 35,4
M€ en 2023, dont 31
M€ de masse salariale et 4,4
M€ d’autres frais
(postes informatiques, amortissements, frais de déplacement, etc.). Pour le
service médical, elle n’évalue à ce jour que l
a masse salariale, soit 18,7
M€.
Au total, les coûts de gestion de l’invalidité évalués par la Cnam sur
un périmètre incomplet s’élevaient à 54,1
M€ en 2023
669
. Faute de données,
le suivi de leur évolution dans le temps, pourtant nécessaire, n’est pas assur
é.
667
Elle prévoit de garantir des paiements rapides et homogènes, de développer les téléservices
depuis le compte Ameli et de simplifier les démarches lors du passage à la retraite.
668
Issus du référentiel national du processus et des contrats pluriannuels de gestion,
18
indicateurs relatifs à l’invalidité étaient suivis en 2022, 8
en 2023, dont seulement
5 communs entre les deux exercices.
669
Par ailleurs, elle estime les coûts d’investissement dans les systèmes d’information
sur le champ de l’invalidité
à 3,6
M€.
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426
2 -
Une disparité de moyens alloués, partiellement mutualisés
La gestion administrative de l’invalidité fait partie des processus
progressivement mutualisés par la Cnam à partir de 2017 dans le cadre plus
général de la démarche de travail en réseau de l’as
surance maladie
(Tram)
670
. La Cpam de résidence conserve la relation de proximité avec
l’assuré mais la gestion administrative de son dossier d’invalidité
est
assurée par l’un des 29
pôles Tram.
Cette mutualisation a permis d’harmoniser les pratiques et de
renforcer la productivité des techniciens spécialisés sur ce dispositif
complexe, dont une partie des tâches a été automatisée. Alors que le
nombre d’assurés en invalidité augmentait de 7
% entre 2019 et 2023,
l’effectif des pôles Tram chargé de leur gesti
on a baissé de 10 %.
Toutefois, la répartition de cet effectif rapporté au nombre
d’invalides reste hétérogène selon les territoires, sans que cela se justifie
par le nombre de demandes de pension d’invalidité, d’invalides de
catégorie 3 ou de bénéficiair
es de l’allocation supplémentaire d’invalidité
.
En 2023, un agent administratif du pôle Tram de Saint-Lô gérait 2,4 fois
plus d’invalides qu’à Digne. Une plateforme d’entraide entre les Cpam
permet aux caisses mieux dotées de mettre à disposition une partie de leurs
techniciens en renfort conjoncturel auprès de caisses en difficulté.
Des disparités sont également constatées dans la répartition de
l’effectif du service du contrôle médical chargé de l’invalidité, qui a baissé
de 13,5 % entre 2019 et 2023
671
, principalement en raison de la pénurie de
médecins-conseils. Ainsi, un agent du service du contrôle médical en
Provence-Alpes-
Côte d’Azur et Corse suivait deux fois plus d’invalides
qu’en Bretagne en 2023.
Un projet d’intégration du service médical au sein d
es Cpam est en
cours. Il serait souhaitable, à cette occasion, d’étudier la pertinence d’une
mutualisation de la gestion médicale de l’invalidité, dans une perspective
d’harmonisation des pratiques.
670
Axe 4 de la convention d’objectifs et de gestion 2014
-2017 de la Cnam.
671
216 équivalents temps plein étaient chargés du processus invalidité dans les échelons
locaux du service médical en 2023.
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RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
427
3 -
Une qualité de service à conforter pour une meilleure équité
de traitement
Selon l’enquête de satisfaction réalisée par la Cnam en 2024, le taux
de satisfaction des assurés en invalidité (78 %) est supérieur de 12 points à
celui de l’ensemble des assurés bénéficiant d’un revenu de remplacement
de l’assurance m
aladie.
Toutefois, l’hétérogénéité de traitement résultant de la disparité des
moyens alloués doit être réduite. En 2022, un assuré en arrêt de travail dans
le Centre-Val de Loire entrait en invalidité en moyenne 75,4 jours plus tard
qu’en
Auvergne-Rhône-
Alpes. Sans que cela en soit la seule cause, l’écart
entre les effectifs chargés de l’invalidité dans les deux régions
dépasse
20 %. En 2023, le taux
d’
entrée en invalidité au terme du délai maximum
de 36 mois de versement des indemnités journalières était quatre fois plus
faible en Grand-Est que dans les Hauts-de-France.
La gestion de l’invalidité a été en partie dématérialisée, permettant
d’améliorer la fiabilité et les délais de traitement. Depuis 2022, les assurés
ayant un compte
Ameli
672
doivent remplir puis transmettre en ligne leurs
déclarations de ressources sur l’honneur pour vérifier et ajuster le montant
de leur pension. Cette automatisation a permis de renforcer la performance
du service.
Les résultats doivent toutefois encore être améliorés car la Cnam
n’atteint pas tous les objectifs qu’elle s’est fixés
: le taux d’erreurs dans
l’attribution des pensions d’invalidité est certes inférieur à 2
% ; il doit en
revanche être réduit pour l’allocation supplémentaire d’invalidité, pour
laquelle il reste supérieur à 5
%. L’objectif de traitement des dossiers de
demande de mise en invalidité dans un délai de 60
jours n’est pas atteint
pour une partie des salariés, ni pour les travailleurs indépendants
673
.
Le logiciel
Scapin
, utilisé pour l’inst
ruction, la gestion et le
paiement des pensions d’invalidité
, est vieillissant. Son interopérabilité,
notamment avec
Ameli
, est instable, ce qui oblige les gestionnaires à des
saisies manuelles
, sources d’erreurs
. Une nouvelle version, prévue pour
2026, doit permettre de consolider dans une interface unique toutes les
données relatives à un assuré, ce qui facilitera le travail des agents qui
doivent aujourd’hui consulter une multitude d’outils pour traiter un dossier
.
672
Environ 85 % des assurés en invalidité ont un compte Ameli.
673
84,5 % des dossiers de travailleurs indépendants ont été instruits en 60 jours en 2022
pour un objectif de 90
% fixé par la Cnam. L’indicateur n’était plus suivi en 2023. Il
était de 85,4 % pour les salariés qui sollicitent directement leur mise en invalidité.
Sécurité sociale 2025 – mai 2025
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COUR DES COMPTES
428
Le déploiement du dispositif de ressources mensuelles
674
, qui permettrait
de préremplir les déclarations sur l’honneur des ressources,
initialement
prévu en 2024
, n’interviendra pas avant 2026, avec le nouvel outil de
gestion administrative de l’invalidité.
Après plusieurs retards, le calendrier de développement des
téléservices et de refonte des outils doit être respecté pour améliorer la
qualité de service et mobiliser davantage les pôles Tram sur des missions
de contrôle et d’accompagnement des situations les plus complexes.
B -
Une capacité de travail et de gain à mieux évaluer
Les décisions d’attribution de pension d’invalidité varient
sensiblement d’un
département
à l’autre et sont parfois en décalage avec la
capacité de travail des assurés. Une évaluation de la capacité de gain
mobilisant des outils plus performants, et intervenant de façon plus
régulière, permettrait de limiter ces incohérences.
1 -
Des décisions d’attribution de pension hétérogènes,
sources
d’
incohérences
Le taux de personnes en invalidité dans la population active variait
en 2021 de 1,3 % à 4,8 % selon les départements métropolitains
675
. Ces
écarts peuvent s’expliquer en partie par la structure par âge de la
population, son état de santé et les possibilités d’emploi offertes par le
marché local du travail.
Malgré un effort de super
vision des dossiers d’invalidité par les
médecins-chefs, les décisions de mise en invalidité à la demande de
l’assuré varient aussi fortement. En 2023, la part des dossiers acceptés
parmi les demandes variait de 31 % à 85 % selon les départements.
674
Base de données relatives aux revenus connus de l’administration fiscale.
675
En l’absence d’informations
disponibles
sur le nombre d’assurés dans chaque
département, ce taux rapporte le nombre de personnes en invalidité à la population
active âgée de 15 à 64 ans, fournie par
l’Insee
pour l’année 2021.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
429
Carte n° 4 :
taux d’attribution des pensions d’invalidité
en proportion des demandes directement adressées
par les assurés en 2023 (en %)
Source
: Cour des comptes d’après les données de la Cnam
Selon la Cnam, ces différences pourraient s’expliquer par les
particularités socio-économiques des territoires et par des degrés variables de
connaissance par les assurés des conditions à réunir pour que leur invalidité
soit reconnue. La diversité des pratiques médicales a toutefois aussi une
responsabilité
: au sein d’une même région, l’Occitanie, le taux d’acceptation
des demandes de mise en invalidité par l’assurance maladie variait ainsi de
près de un à trois selon les échelons locaux du service médical en 2023.
Les catégories d’invalidité attribuées peuvent, par ailleurs, être en
décalage avec la situation de certains assurés : en novembre 2024, 69 %
des salariés placés en invalidité et considérés comme pouvant travailler
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COUR DES COMPTES
430
(catégorie 1) exerçaient une activité professionnelle
; c’était aussi le cas de
21 % des salariés de catégorie 2 et de 6,4 % de ceux de catégorie 3
676
,
censés en être « absolument incapables ». Ces proportions ont augmenté
depuis 2018.
Graphique n° 43 :
proportion de salariés invalides
exerçant une activité professionnelle (2018-2024)
Lecture : catégorie 1 : échelle de gauche ; catégories 2 et 3 : échelle de droite.
Source
: Cour des comptes d’après les données de la Cnam
La direction de la sécurité sociale a cherché à réformer les catégories
d’invalidité
pour les simplifier et mieux les faire correspondre aux
capacités de travail et de gain des assurés placés en invalidité. Elle
souhaitait aussi
corriger l’asymétrie entre la capacité de gain pour entrer en
invalidité, qui doit être réduite des deux tiers, et celle pour en sortir, qui
doit correspondre à au moins 50 % de la capacité de gain antérieure. Elle
voulait enfin inciter
à la reprise et à l’accroissement d’une activité
professionnelle.
La difficulté d’atteindre simultanément l’ensemble de ces
objectifs l’a conduite à renoncer à modifier les catégories existantes.
676
Cette activité peut toutefois être très partielle. Pour les travailleurs indépendants, le
taux d’emploi était plus élevé encore
: 79 % en catégorie 1, 54 % en catégorie 2 et 21 %
en catégorie 3.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
431
2 -
Des médecins-conseils mal outillés pour apprécier
la capacité de travail
En matière de prestations d’invalidité, contrairement aux rentes
d’accident du travail et de maladie professionnelle, les services du contrôle
médical ne disposent d’aucun barème associant path
ologies et incapacité
permanente de travail. Les médecins-conseils expliquent cette absence par
le fait que l’invalidité ne résulte pas d’un traumatisme ou d’une lésion
circonscrite mais d’un état général de santé, qui trouve son origine dans
une ou plusieurs pathologies.
Cette difficulté existe également dans le domaine du handicap.
Toutefois, un guide-
barème permet, dans ce cas, d’évaluer les
conséquences de l’incapacité sur la vie quotidienne de la personne. Afin de
réduire l’hétérogénéité des pratiques
d’attribution des pensions, la Cour a
préconisé en 2010, puis à nouveau en 2019, la création d’un référentiel de
l’invalidité cohérent avec le guide
-barème du handicap
677
.
Ces recommandations n’ont pas été mises en œuvre mais les
services du contrôle médica
l disposent depuis 2015 d’un outil d’aide à la
décision de mise en invalidité, qui mesure les capacités restantes de l’assuré
pour seize activités
678
de la vie quotidienne et qui produit un avis indicatif.
Comme la Cour l’avait déjà relevé en 2019, cet outil
reste peu utilisé par
les médecins-
conseils, même s’il est aujourd’hui plus largement utilisé par
les infirmiers de l’assurance maladie qui instruisent les demandes.
Dans ces conditions,
l’appréciation de la réduction de la capacité de
gain susceptible de conduire à une mise en invalidité continue de reposer
exclusivement sur l’expérience et le jugement du médecin
-conseil.
Pour mesurer la capacité
d’un assuré
à occuper un emploi, le
médecin-conseil doit en principe prendre en compte les caractéristiques du
poste, les possibilités de reclassement au sein de l’entreprise, la capacité de
l’assuré à être formé à une nouvelle activité professionnelle, ainsi que la
situation sur le marché local
du travail. Il dispose de peu d’informations
sur ces éléments et évalue, pour l’essentiel, la capacité de gain résiduelle
des assurés sur la base de leur état de santé et de leur situation sociale.
677
Cour des comptes, «
L’invalidité et l’inaptitude dans le régime général
»,
rapport
sur l
’application des lois de financement de la sécurité sociale
, chapitre XV, 2010 et
«
Les pensions d’invalidité
; une modernisation indispensable au service
d’un
accompagnement renforcé des assurés »,
rapport sur l
’application des lois de
financement de la sécurité sociale,
chapitre IV, 2019
.
678
Les seize items retenus par l’application permettent d’évaluer, entre autres, la
capacité d’apprentissage et d’appli
cation des connaissances, la capacité à exécuter une
ou plusieurs tâches, à communiquer, à porter, déplacer et manipuler des objets, à
marcher et se déplacer et à interagir avec autrui.
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COUR DES COMPTES
432
La mise en place d’une commission pluridisciplinaire pour
assister
le médecin-conseil dans sa prise de décision a été expérimentée en 2023 à
l’initiative de la direction de la sécurité sociale et de la Cnam. Cette
commission, composée d’un médecin du travail et d’un représentant du
réseau des Cap emploi
679
, spécialistes du maintien en emploi, devait
éclairer le médecin-conseil dans les cas jugés complexes.
Selon le bilan de l’expérimentation établi par la Cnam, 18
% des
dossiers étudiés ont fait l’objet d’un avis divergent entre le médecin
-conseil
et l’instance collégiale. Dans les deux tiers de ces cas, l’instance collégiale
estimait possible l’exercice d’une activité professionnelle contrairement au
médecin-
conseil. L’expérimentation ne sera pas généralisée car elle a été
jugée trop consommatrice de temps dans un contexte de manque de
ressources médicales. Elle souligne toutefois l’importance de disposer
d’informations précises sur l’employabilité, en amont de la mise en invalidité.
Une allocation plus efficiente du temps médical devrait conduire à
mobiliser les équipes des services de santé au travail (infirmiers, conseillers
sociaux, psychologues, etc.), pour recueillir les informations pertinentes
sur les conditions de travail et d’emploi des assurés susceptibles d’être mis
en invalidité et les transmettre au se
rvice médical de l’assurance maladie
avant évaluation par le médecin-conseil.
3 -
Des réévaluations de la capacité de travail trop peu fréquentes
Le service du contrôle médical opère peu de révisions d’invalidité.
En 2023, seules 20 724 pensions ont été réexaminées, soit 2,9 % des
pensions versées dans l’année.
La Cnam considère qu’il n’est pas opportun
d’augmenter le nombre de ces réexamens, compte tenu de la pénurie
de
médecins-conseils et dans la mesure où ils conduisent à un maintien de la
catégorie d’inva
lidité dans 98 % des cas.
Toutefois, le faible nombre de réexamens ne garantit pas la
représentativité de ce dernier taux. Or, les réévaluations assurent le
paiement à bon droit des pensions d’invalidité et l’équité de traitement
entre les assurés. En l’a
bsence de réexamen, une personne placée en
catégorie
2 dont la capacité de gain s’améliore percevra une pension
d’invalidité plus élevée qu’une personne placée en catégorie
1, même si
leurs capacités de gain sont devenues identiques. De même, faute de
réexamen de leur situation, les personnes placées en catégorie 1 sont
maintenues en invalidité y compris lorsqu’elles ont recouvré plus de 50
%
de leur capacité de gain. Enfin, des réévaluations conduiraient, dans
certaines situations, à des économies de prestations (cf. encadré
infra
).
679
Réseau chargé de l’accompagnement dans et vers l’emploi des personn
es en
invalidité ou en situation de handicap.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
433
Comme la Cour l
’a
recommandé en 2019, il serait souhaitable
d’accorder les pensions d’invalidité de catégorie
1 pour une durée limitée
mais renouvelable, dépendant de l’âge et de l’état de santé de l’assuré.
La
situation des bénéficiaires de catégories 2 et 3 qui reprennent un emploi
devrait être systématiquement réexaminée par le médecin-conseil. Cette
information, qui figure dans la
déclaration sur l’honneur des
ressources,
pourrait donner lieu à une alerte informatisée.
Les moyens humains nécessaires à ces réexamens devraient pouvoir
être obtenus par l’entrée en vigueur, prévue au printemps 2025, du
protocole établi par la Cnam qui permet la délégation de tâches des
médecins-conseils aux infirmiers du service du contrôle médical.
L’enjeu financier du retour en emploi des personnes en invalidité
La meilleure évaluation de la capacité de travail et de gain des
personnes en invalidité est un levier essentiel pour garantir la dépense à bon
droit. Par ailleurs, favoriser le retour en emploi des personnes en situation
d’invalidité constitue
, au-
delà de l’intérêt personnel qu’elles peuvent en
retirer, un
gisement d’économies important
(cf.
infra
) :
-
1 % des personnes en invalidité de catégorie 1 reprenant un emploi adapté,
leur permettant de sortir
de l’invalidité,
représenterait une économie de
prestations de 14
M€
par an ;
-
1 % des personnes en invalidité de catégorie 2 reprenant une activité
professionnelle, les conduisant à être placés en catégorie 1, représenterait
une économie de prestations de 20
M€
par an.
III -
Un retour à
l’emploi
à favoriser
dans l’intérêt des assurés et des comptes sociaux
La Cour a recommandé en 2019 de réformer les modalités de cumul
des pensions d’invalidité avec des revenus professionnels, afin de renforcer
l’incitation à la reprise d’emploi. Des avancées importantes ont eu lieu dans
ce domaine. L’enjeu du retour en emploi des personnes souffrant de
problèmes de santé dépasse toutefois la seule question de ce cumul et
constitue notamment un enjeu financier important. En amont de la mise en
invalidité, les employeurs doivent être mobilisés de façon plus précoce, et
les interventions des acteurs de la prévention de la désinsertion
professionnelle mieux articulées.
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COUR DES COMPTES
434
A -
Des conditions de cumul invalidité-emploi rendues
plus incitatives
Jusqu’en 2022, la pension d’invalidité était supprimée en tout ou
partie dès que le montant cumulé de la pension et des revenus
professionnels dépassait pendant deux trimestres consécutifs le salaire
trimestriel moyen de la dernière anné
e d’activité. La reprise d’un emploi
pouvait ainsi se traduire par une perte de revenus
680
.
Un décret du 23 février 2022 a corrigé cet effet. Désormais la
pension d’invalidité n’est plus amputée que de la moitié (et non de la
totalité) du dépassement lorsque son montant cumulé avec celui des
revenus d’activité devient supérieur au salaire de comparaison
681
. Ce
dernier ne pouvait toutefois dépasser le plafond de la sécurité sociale.
Selon la Cnam, la nouvelle règlementation a conduit à augmenter le
montant de l
a pension d’invalidité de 65
394 bénéficiaires dont les revenus
d’activité étaient en moyenne de 20
000
€ par an.
Toutefois, du fait du
plafonnement du salaire de comparaison, elle a conduit à diminuer la
pension versée à 9 950 personnes dont le revenu ann
uel moyen d’activité
était plus élevé (27 000
€) et même à la suspendre pour 1
474 personnes
aux revenus plus élevés encore (73 000
€).
Afin de limiter le nombre de perdants, le plafond du salaire de
comparaison a été porté à 1,5 fois le plafond de la sécurité sociale
682
par un
décret du 28 juillet 2023, ce qui a conduit à restaurer ou ré-augmenter la
pension d’invalidité de près de 6
700 bénéficiaires.
La suspension de la pension d’invalidité en raison d’un dépassement
du salaire de comparaison a toutefois des conséquences importantes pour un
nombre limité d’assurés. De nombreux contrats de prévoyance conditionnent
en effet le versement de la rente d’inv
alidité et la prise en charge des
remboursements d’emprunts, prévus au contrat, au versement d’une pension
par l’assurance maladie. L’accroissement des revenus d’activité peut alors se
traduire par une baisse du pouvoir d’achat des assurés.
680
Le risque était d’autant plus important que les salaires sont assujettis à un taux de
prélèvements sociaux de 21 %, alors que ce taux est de 6,7
% pour les pensions d’invalidité.
681
Il s’agit du
montant maximum entre le salaire annuel moyen des dix meilleures
années et celui
de la dernière année d’activité précédant le passage en invalidité.
682
Soit un montant annuel égal à 70 650
€ au 1
er
janvier 2025.
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IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
435
B -
Des employeurs à mieux mobiliser
pour favoriser le maintien en emploi
Le fait d’avoir été en arrêt maladie de plus de soixante jours une
année donnée s’accompagne d’un risque accru de transition vers le
chômage ou l’inactivité l’année suivante
683
. Ce constat souligne la
n
écessité de favoriser le retour vers l’emploi, y compris dans des conditions
adaptées, dès que l’état de santé de l’assuré le permet.
Pour permettre ce retour à l’emploi, le concours actif des
employeurs est indispensable. Contrairement à d’autres pays qui
les
sollicitent fortement, y compris financièrement, les employeurs ne sont
pas, en France, au cœur du dispositif d’insertion professionnelle des
personnes souffrant de problèmes de santé.
Les incitations au retour en emploi en Belgique et aux Pays-Bas
Dans ces deux pays, les employeurs contribuent de façon importante
à l’indemnisation des salariés placés en arrêt maladie, ce qui constitue une
incitation forte à agir pour leur retour en emploi.
En Belgique, les employeurs versent l’intégralité du salaire
durant la
première année de l’absence d’un de leurs salariés pour cause de
maladie ou
d’accident d’origine non
professionnelle. Lorsque l'incapacité de travail se
prolonge au-delà d'un an,
l’assurance obligatoire
prend le relais et verse une
indemnité d'invalidité mensuelle à l'intéressé. Depuis avril 2023, afin
d’encourager la réintégration de travailleurs malades en cas d’absence
de
longue durée, les employeurs qui emploient une personne en invalidité dans
le cadre d’une reprise progressive du travail peuvent bénéficier d’une prime.
Aux Pays-Bas, le dispositif de reprise du travail des personnes
partiellement invalides oblige les employeurs à maintenir le salaire de la
personne en arrêt de travail pendant les deux premières années de maladie
et à investir dans des mesures de réinsertion professionnelle.
Jusqu’à la loi
du 2 août 2021 portant renforcement de la santé au
travail, les employeurs n’étaient mobilisés en France que de façon
indirecte, par l’i
ntermédiaire de la médecine du travail.
683
Parmi les personnes ayant connu un arrêt maladie de plus de soixante jours, 18,9 %
des femmes et 14,2
% des hommes étaient au chômage ou en inactivité l’année suivante,
contre respectivement 7,1 % des femmes et 4,4 %
des hommes pour les salariés n’ayant
p
as connu d’arrêt de travail (Drees,
Études et Résultats
n° 938, octobre 2015).
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COUR DES COMPTES
436
La loi a ouvert la possibilité d’un rendez
-vous de liaison
684
organisé
à l’initiative de l’employeur ou du salarié, au cours duquel sont évoquées,
entre autres, les conditions d’un retour en emploi. Cette possibilité
est
toutefois encore mal connue et les rendez-vous sont peu nombreux selon
Presanse
685
. Ce dispositif mériterait de faire l’objet d’une campagne
d’information et de communication auprès des acteurs.
Les employeurs ont la responsabilité d’organiser une visite
de
reprise à l’issue de l’arrêt de travail
686
mais, dans les cas où la santé des
salariés est durablement altérée, le retour dans l’entreprise doit être préparé
en amont. C’est l’objet de la visite dite de préreprise. Celle
-ci est effectuée
par l’infirmier ou le médecin du travail et n’associe pas l’employeur. Elle
permet d’envisager les aménagements nécessaires à la reprise du poste ou
d’un nouvel emploi dans l’entreprise avant que l’employeur ne soit
consulté sur la possibilité de les mettre en œuvre.
Cette visite joue un rôle crucial pour amorcer le processus
d’adaptation des conditions de travail et d’emploi, en vue d’un retour du
salarié sur son poste ou à un autre poste. Même si elle peut désormais être
organisée dès le trentième jour d’arrêt maladie
687
, la loi de 2021 précitée a
rendu son organisation facultative, ce qui en atténue la portée.
L’accord national interprofessionnel du 10
décembre 2020, à
l’origine de la loi du 2
août 2021, visait à systématiser la visite de
préreprise au même titre que la
visite de reprise, en cas d’arrêt maladie de
longue durée. Il serait par conséquent souhaitable que la convocation à
cette visite soit rendue obligatoire. Elle devrait intervenir le plus tôt
possible afin de donner le temps à l’employeur de mobiliser tous
les leviers
à sa disposition pour favoriser le maintien en emploi.
L’employeur pourrait avoir l’obligation d’informer le service de
santé au travail des arrêts de longue durée, l’organisation de la visite de
préreprise incombant à ce service. Face à la pénurie de médecins du travail,
la possibilité ouverte par la loi du 2 août 2021 de déléguer ces visites aux
infirmiers en santé au travail devrait être exploitée, ce qui n’est pas le cas
aujourd’hui, 99
% d’entre elles étant encore réalisées par des médecin
s
688
.
684
Possible dès le trentième jour d’arrêt maladie continu ou discontinu.
685
Organisme représentatif des services de prévention et de santé au travail interentreprises.
686
Depuis le décret n° 2022-372 du 16 mars 2022
, cette visite est obligatoire à l’issue
de 60
jours au moins d’arrêt de travail contre 30
jours auparavant. À cette occasion
l’infirmier ou le médecin du travail peut émettre un avis d’inaptitude.
687
Au lieu de trois mois
avant l’entrée en vigueur du décret
du 16 mars 2022.
688
Direction générale du travail,
L’activité des services de prévention et de santé au
travail en 2023
.
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
437
C -
Des acteurs de la prévention de la désinsertion
professionnelle à mobiliser plus précocement
Les assurés dont la poursuite de l’activité professionnelle est
menacée pour raison de santé sont identifiés par le service médical et le
service social de l’
assurance maladie, par la médecine du travail, ou encore
lorsqu’ils se présentent à l’accueil des Cpam.
1 -
Un renforcement de la coordination entre
l’assurance maladie
et les services de prévention et de santé au travail à parachever
S’ils y consentent, ces a
ssurés sont pris en charge par la cellule
pluridisciplinaire de prévention de la désinsertion professionnelle de leur
service de santé au travail qui élabore, avec eux, un plan personnalisé de
retour à l’emploi. Ils peuvent également être suivis par le ser
vice social de
l’assurance maladie, qui finance, conjointement aux employeurs, des
actions dites de remobilisation
689
mises en œuvre durant les arrêts maladie.
Les assurés qui perdent leur emploi au cours ou à l’issue d’un arrêt maladie
sont orientés vers France Travail.
La multiplicité des acteurs et des points d’entrée dans le dispositif
de prise en charge du risque de désinsertion professionnelle le rend peu
lisible pour les assurés et complique l’orientation de ces derniers. Bien que
la prévention de la
désinsertion professionnelle soit l’un des objectifs
assignés à l’assurance maladie depuis près de quinze ans, ses services
communiquent encore difficilement avec ceux de la médecine du travail et
la convergence de leurs modalités de détection du risque de désinsertion
doit être organisée.
La loi du 2 août 2021 a créé un cadre de partenariat
entre l’
assurance
maladie et les services de prévention et de santé au travail afin de favoriser
la détection précoce du risque de désinsertion professionnelle. Elle prévoit
que, lorsqu’un tel risque apparaît, sous réserve de l’accord de l’assuré, le
service médical de l’assurance maladie transmette au service de prévention
et de santé au travail du salarié des informations concernant ses arrêts de
travail. En retour, le service de prévention et de santé au travail devrait
transmettre à l’assurance maladie les informations sur les conditions de
travail des assurés qui lui ont été signalés.
689
Formations, essais encadrés pour tester la compatibilité d’un poste de travail avec
l’état de sa
nté du salarié, conventions de rééducation professionnelle en entreprise, etc.
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COUR DES COMPTES
438
Ces dispositions ne sont toutefois toujours pas mises en œuvre car
des difficulté
s d’ordre juridique et technique ont retardé l’élaboration des
décrets d’application de la loi. Trois ans après la promulgation de celle
-ci,
ces textes doivent être pris dans les meilleurs délais.
2 -
Anticiper la mise en invalidité pour favoriser
un accompagnement adapté
L’article R
341-8 du code de la sécurité sociale prévoit que la mise en
invalidité intervienne dès la stabilisation de l’état de santé de l’assuré. Il n’y
a donc pas lieu de continuer à verser des indemnités journalières au-delà de
cette date, d’autant qu’elles sont généralement plus coûteuses pour la sécurité
sociale que les pensions d’invalidité
690
et que le prolongement de la période
d’inactivité des assurés est préjudiciable à leur retour à l’emploi.
Le statut d’invalide permet à l’assuré de bénéficier d’un
accompagnement renforcé, favorable au retour à l’emploi. La mise en
invalidité vaut, en effet, reconnaissance de la qualité de travailleur
handicapé. À ce titre, les personnes placées en invalidité peuvent bénéficier
de l’expert
ise des Cap emploi, sollicités par la médecine du travail dans le
cadre de l’adaptation du poste ou du reclassement dans l’entreprise. De leur
côté, les employeurs peuvent bénéficier des aides proposées par
l’association pour la gestion des fonds pour l’in
sertion professionnelle des
personnes handicapées (Agefiph). Les personnes placées en invalidité, qui
sont au chômage, peuvent être accompagnées par des équipes spécialisées,
en association avec France Travail.
La mise en invalidité reste aujourd’hui tardi
ve. Alors que de telles
situations devraient rester exceptionnelles selon la Cnam, le taux de mise
en invalidité au terme de la durée maximale de 36 mois de versement des
indemnités journalières atteignait encore 20,7 % en 2023. Il était de 17,9 %
en 2019.
690
Les indemnités journalières sont égales à 50 % du salaire de référence, contre 30 %
pour la pension d’invalidité de catégorie
1, et le salaire de référence est calculé sur les
trois derniers mois d’activité pour ces indemnités, contre les dix meilleures années pour
les pensions d’invalidité. Le plafond de salaire retenu pour le calcul des indemnités
journalières (3 243
€ bruts mensuels) est toutefois plus faible que celui util
isé pour les
pensions d’invalidité (3
864
€).
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LES PENSIONS D’INVAL
IDITÉ : DES ÉVOLUTIONS NÉCESSAIRES
UN
RETOUR À L’EMPLOI À
FAVORISER
439
Afin de limiter le nombre des mises en invalidité tardives et de
favoriser le retour à l’emploi lorsqu’il est possible, le service du contrôle
médical doit améliorer le ciblage de ses contrôles des arrêts de travail de
longue durée et les mettre en œuv
re de façon plus précoce. Dans ce but, la
Cnam testait fin 2024 une campagne de contrôle systématique des arrêts de
plus de 18 mois sans affection de longue durée exonérante. Ces efforts
doivent être poursuivis et généralisés.
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COUR DES COMPTES
440
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Le nombre de bénéficiaires de pensions
d’invalidité est élevé et la
plupart d’entre eux perçoi
ven
t un revenu de remplacement jusqu’à l
eur
retraite.
L’importance du coût global de l’invalidité pour le régime
général, environ 10 Md€ en 2023, nécessite qu
e soit mise en place une
gestion active de ce risque.
L’un des principaux enjeux est l’évaluation de la capacité de la
personne à reprendre une activité même à temps très partiel, pendant
l’arrêt de travail mais aussi une fois la mise en invalidité décidée
.
Cette évaluation est difficile. Elle dépasse les seules compétences
médicales et nécessite de prendre en compte les conditions de travail et
d’emploi. Elle requiert
des échanges plus étroits
entre l’assurance maladie
et les services de prévention et de santé au travail. Prévus par la loi du
2 août 2021 dans le cadre de la prévention de la désinsertion
professionnelle, ces échanges ne sont toujours pas effectifs en l’absence de
décrets d’application qu’il convient de prendre au plus vite.
Pour favoriser l
e retour vers l’emploi des personnes souffrant de
problèmes de santé, en amont de la mise en invalidité ou une fois celle-ci
prononcée, la Cour formule les recommandations suivantes :
45.
(Recommandation reformulée) limiter le versement des pensions
d’invalid
ité de première catégorie à une durée définie et renouvelable,
en fonction de l’âge et de l’état de santé des assurés (ministère du
travail, de la santé, des solidarités et des familles) ;
46.
accroître la fréquence des réexamens de pensions d’invalidité en
me
ttant en place une alerte en cas de reprise d’activité déclarée par
l’assuré et en mobilisant davantage les infirmiers du service médical
(Caisse nationale d’assurance maladie)
;
47.
organiser la transmission à l’assurance maladie, par les infirmiers et
les autres personnels des services de prévention et de santé au travail,
des informations relatives aux conditions de travail et d’emploi des
assurés, afin que l’assurance maladie puisse mieux évaluer leur
employabilité (ministère du travail, de la santé, des solidarités et des
familles, Caisse nationale d’assurance maladie)
;
48.
rendre obligatoire la convocation des salariés absents depuis plus de
30 jours pour raison médicale à une visite de préreprise ; à cet effet,
prévoir la transmission des informations nécessaires par leur
employeur à la médecine du travail (ministère du travail, de la santé,
des solidarités et des familles).
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