COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Le 10 avril 2025
Communication au Premier ministre
IMPACTS DU SYSTÈME DE RETRAITES SUR
LA COMPÉTITIVITÉ ET L’EMPLOI
Saisie par le Premier ministre le 20 janvier 2025, et après avoir consacré un
premier rapport
à la situation financière du système de retraites et à ses perspectives, la Cour étudie dans ce
second rapport les effets des paramètres actuels du système de retraites sur la compétitivité
de l’économie française ainsi que sur l’emploi. La Cour s’est efforcée de proposer des
analyses détaillées par niveau de revenu et catégories socio-professionnelles, les enjeux
d’équité étant au c
œ
ur du système de retraites. Elle a également placé ses travaux dans une
dimension européenne, indispensable pour apprécier l’évolution de la compétitivité de
l’économie française. A l’instar du premier volet de la « mission flash » sur les retraites, ce
second rapport a vocation à servir de base utile à la délégation permanente des partenaires
sociaux.
Une augmentation inégale du taux d’emploi des personnes âgées de plus de 60 ans à la suite
des réformes des retraites
En France, le taux d’emploi des personnes âgées de 15 à 64 ans (68,4 % en 2023) a progressé
pour les 55 ans et plus, mais reste, en comparaison européenne, particulièrement faible pour
les hommes de 60 ans et plus. Cette augmentation du taux d’emploi, en France et dans les
autres pays d’Europe, est directement liée aux réformes des retraites. La réforme des retraites
de 2010
s’est ainsi traduite par une augmentation très nette de l’emploi des personnes âgées
de 55 à 60 ans
, malgré
des disparités
selon les
catégories socio-professionnelles
, le genre
et l’état
de santé. Pour les ouvriers, le recul de l’âge moyen de départ à la retraite ne s’est traduit qu’à
66 % par un allongement de la durée en emploi, contre plus
de 85 % pour les professions
intermédiaires et les cadres.
S’agissant des femmes, la réforme des retraites de 2010 a eu des
effets comparables à ceux observés pour les hommes, avec une augmentation de l’emploi après
60 ans. Cependant, cette poursuite de l’emploi s’est davantage faite à temps partiel que pour
les hommes.
Dans un contexte de dégradation de la compétitivité française depuis le début des
années 2000, l’impact du financement du système de retraites est ambivalent
Les effets des paramètres du système de retraites sur la compétitivité sont indirects. Le
financement des dépenses de retraite explique une partie de l’évolution des coûts salariaux
unitaires et donc de la compétitivité coût. Les écarts d’évolution des coûts salariaux se sont
résorbés, voire inversés, par rapport à nos principaux partenaires européens, particulièrement
dans le bas de l’éventail des rémunérations. Cette évolution s’observe notamment depuis 2013
et la politique de baisse du coût du travail en France. Cependant, la structure de cotisations
sociales en France est atypique. Elle se caractérise par d’importants allégements de cotisations
sociales au niveau du Smic et, symétriquement, par des cotisations plus élevées que chez nos
partenaires sur les niveaux de salaires les plus hauts. Cette structure permet de préserver
l’emploi peu qualifié en France, mais pourrait avoir un impact sur l’emploi très qualifié.
Des sujets d’équité au c
œ
ur des évolutions des systèmes de retraites
La France consacre près de 14 points de son produit intérieur brut (PIB) aux dépenses publiques
de retraite, soit deux points et demi de plus que la moyenne de la zone euro (mais moins que
l’Italie). L’écart avec l’Allemagne s’explique pour moitié par la différence de production de
richesse nationale et pour moitié par les paramètres du système de retraites (niveau moyen
des pensions et âge de départ à la retraite). En revanche, les différences de structures
démographiques ne jouent quasiment pas dans cet écart. Tous les pays européens sont
confrontés au vieillissement de leur population. Il conduit à prêter une attention particulière à
l’équité intergénérationnelle des systèmes de retraites ; certains pays se fixent ainsi pour
objectif une stabilité du temps passé à la retraite au cours de la vie. Les écarts persistants
d’espérance de vie impliquent également de veiller à l’équité intragénérationnelle des
systèmes de retraites. Ainsi, en France, l’écart d’espérance de vie à 65 ans entre les cadres et
les ouvriers était de 2 deux ans pour les femmes et de 3 trois ans pour les hommes en 2020-
22. Par ailleurs, l’âge moyen de départ à la retraite des retraités dont la pension est la plus
faible est plus élevé que celui des retraités dont la pension est la plus élevée. Le dispositif de
départ anticipé pour carrière longue n’a pas changé cette situation, car ses effets sont
concentrés sur les personnes qui touchent une pension moyenne.
Des mécanismes facilitant l’adaptation des paramètres des systèmes de retraite aux
évolutions démographiques et économiques
Plusieurs pays ont introduit, dans la gestion de leurs systèmes de retraites, des clauses de
revoyure pour que le niveau des cotisations, celui des pensions et l’âge de départ à la retraite
soient, le cas échéant, ajustés en fonction de l’évolution de plusieurs indicateurs
démographiques ou économiques. Ces mécanismes, comparables à celui mis en place par les
partenaires sociaux pour l’évolution des retraites complémentaires (Agirc-Arrco), doivent
permettre des adaptations prévisibles, progressives et concertées des systèmes de retraites
aux évolutions démographiques et aux circonstances économiques, notamment lorsque
celles-ci sont défavorables. Les principaux leviers qui peuvent être mobilisés dans le cadre de
ces mécanismes ont des effets différenciés sur la compétitivité et l’emploi. Une hausse des
cotisations aurait un impact négatif sur l’emploi et la compétitivité, même si son ampleur peut
varier selon que l’augmentation concerne les cotisations employeurs ou salariales et qu’elle
cible ou non les bas salaires. À l’inverse, retarder l’âge de départ à la retraite (que ce soit par
une augmentation de la durée de cotisation ou par un recul de l’âge d’ouverture des droits)
aurait un impact positif sur le taux moyen d’emploi. Cependant pour les ouvriers, les personnes
ayant des difficultés de santé et les femmes, le recul de l’âge de départ s’est traduit davantage
par un allongement du temps passé « ni en emploi ni en retraite ». Enfin, la question de l’impact
des modalités d’indexation des pensions est plus délicate : une indexation inférieure à l’inflation
aurait un faible impact sur l’emploi. Cependant, ce critère d’indexation n’apparaît pas le plus
adapté pour assurer un équilibre durable du système de retraites, alors qu’une indexation sur
les salaires favoriserait une meilleure équité intergénérationnelle.
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