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COMMUNIQUÉ DE PRESSE
3 avril 2023
Évaluation de politique publique
LA STRATÉGIE NATIONALE DE RECHERCHE EN
INTELLIGENCE ARTIFICIELLE
L’intelligence artificielle (IA), qui ambitionne de reproduire l’intelligence humaine par
l’utilisation de l’informatique et des mathématiques, a émergé dès les années 1950, sous
l’influence notamment des travaux d’Alan Turing. Selon l’OCDE, les start-up spécialisées
dans l’IA ont attiré près de 12 % du capital-investissement mondial au cours du premier
semestre de 2018, par rapport à 3 % en 2011. Les publications de recherche ont connu une
tendance similaire, avec plus de 1,2 million de publications en 2019 contre moins de 40 000
en 2010. Par conséquent, l’IA est devenue une priorité croissante des autorités publiques.
L’adoption depuis 2017 par de nombreux États de plans nationaux pour encourager son
développement en témoigne. En France, une stratégie nationale pour l’intelligence
artificielle (SNIA) a été lancée en mars 2018, initialement dotée de 1 527 M€ de
financements publics pour la période 2018-2022, suivie, en novembre 2021, par une
nouvelle phase dite d’« accélération » annoncée pour la période 2022-2025, avec comme
objectif de renforcer la compétitivité et l’attractivité de la France dans ce domaine. Le
rapport publié ce jour par la Cour des comptes constitue une évaluation
in itinere
de la SNIA,
qui porte sur les volets « recherche » et « enseignement supérieur », soit les principaux
volets en matière de financement.
Une priorité donnée à la recherche qui a permis d’éviter un décrochage
En 2018, la France a été l’un des premiers pays à l’échelle mondiale à s’être doté d’un plan
formalisé pour l’IA. Dans un premier temps, la stratégie française a donné la priorité à la
recherche en IA. Outre les 30 % des financements qui lui étaient alloués pour la période 2018-
2022, la recherche a ainsi fait l’objet d’un plan spécifique, la SNRIA, dont la coordination a été
confiée à l’opérateur Institut national de recherche en informatique et en automatique (Inria).
Depuis son lancement, la majorité des mesures prévues dans le cadre de la SNRIA a été mise
en œuvre. En formalisant une stratégie, les pouvoirs publics ont donné un signal politique fort
sur l’importance de l’IA pour la recherche française. La Cour constate cependant que l’efficacité
de la stratégie n’est pas avérée. Sur la période analysée, en nombre de publications en IA et sur
un total de 47 pays comparés, la France conserve difficilement une place au 10e rang à l’échelle
mondiale, et se maintient au 2e rang au niveau européen. La Cour des comptes recommande
donc que les financements mobilisés soient davantage suivis. Sur le volet recherche, 554,6 M€
ont
in fine
été engagés sur la période 2018-2022. Enfin, dans une perspective d’attractivité des
talents, certains outils de financement gagneraient à être pérennisés.
Un écosystème d’excellence dont la pérennité doit être garantie
L’orientation principale de la stratégie consiste en la constitution de pôles d’excellence en IA,
via la labellisation d’instituts interdisciplinaires en IA (3IA), la mise en place de chaires
individuelles, puis l’identification de centres d’excellence en dehors des instituts 3IA.
Les synergies entre centres d’excellence doivent être renforcées, en s’inscrivant notamment
dans une démarche plus systématique de valorisation réciproque de leurs travaux. Cela
contribuerait à améliorer leur visibilité, tant au niveau national qu’international, ainsi que
l’image de marque de la France pour attirer des talents étrangers. En parallèle, une clarification
des missions des centres d’excellence 3IA et hors 3IA apparaît nécessaire et doit s’accompagner
d’une révision de la temporalité des financements alloués aux instituts labellisés (actuellement
de quatre ans), qui repose sur une logique de trop court terme pour permettre des effets de
leviers. De plus, la Cour relève que si la stratégie a donné un signal fort pour favoriser la visibilité
des formations pour les jeunes talents, il importe désormais de pérenniser les financements
nécessaires à cette dynamique. L’évaluation montre que la SNRIA a permis une structuration
des acteurs de la recherche en IA, alors que l’IA n’était pas identifiée comme discipline en tant
que telle, même si elle doit encore gagner en maturité. Pour l’améliorer, procéder à une
adaptation de la gouvernance et du pilotage de la stratégie devient urgent et pourrait être
l’occasion de construire une vision commune et globale de l’action publique en IA, alors que les
mesures décidées en ce domaine restent dispersées au sein de plusieurs politiques publiques.
La stratégie d’accélération, opportunité d’une approche frugale, de confiance et
européenne renforcée
Si la stratégie nationale de recherche n’a pas encore permis de renforcer la position de la France
au niveau mondial, le premier volet a permis d’éviter un décrochage scientifique depuis 2018.
Le second volet est à présent déterminant pour enfin améliorer le positionnement de la France
en IA dans la compétition mondiale. Cette « stratégie d’accélération en IA » est recentrée sur
l’objectif de formation des talents - priorité jusqu’ici peu prise en compte. Les financements
totaux consacrés à cette priorité s’élèvent à 776 M€. Cependant, le nombre actuellement limité
de formateurs publics de haut niveau pourrait contrarier les ambitions affichées. Ainsi,
l’approche française gagnerait à s’intégrer encore davantage dans l’approche européenne via
divers programmes de soutien comme « Horizon Europe » et « pour une Europe numérique ».
La confiance – le fait qu’une IA se caractérise par son interprétabilité, son explicabilité, sa
transparence et une identité « responsable – et la frugalité – le fait qu’elle soit durable et
respectueuse de l’environnement – sont ainsi deux des quatre axes structurants du programme
et équipements prioritaires de recherche (PEPR) de 73 M€ adossé à la stratégie d’accélération.
Enfin, la Cour note que, sur le volet recherche, les priorités sont recentrées dans cette seconde
phase sur l’attractivité des talents et la prise en compte d’enjeux sociétaux, tels que la confiance
dans l’IA et la frugalité dans son utilisation.
Lire le rapport
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Julie Poissier
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