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Prélèvements sur recettes au
profit des collectivités
territoriales
Note d’analyse de l’exécution
budgétaire
2020
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
3
Avant-propos
En application des dispositions des articles L. 143-1 et L. 143-4 du
code des juridictions financières, la Cour rend publiques ses observations
et ses recommandations, au terme d’une procédure contradictoire qui
permet aux représentants des organismes et des administrations contrôlées,
aux autorités directement concernées, notamment si elles exercent une
tutelle, ainsi qu’aux personnes éventuellement mises en cause de faire
connaître leur analyse.
4
COUR DES COMPTES
Prélèvements sur recettes au profit des
collectivités territoriales
Graphique n° 1 : prélèvements sur recettes au profit des collectivités
territoriales - exécution 2020 (AE=CP, en M
)
50 528
46 465
43 781
40 326
40 890
41 999
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
2015
2016
2017
2018
2019
2020
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
5
Synthèse
Une nouvelle hausse en 2020 qui repose sur le dynamisme de
l’investissement local et les mesures exceptionnelles de soutien aux
collectivités face à la crise
Prévus à l’article 6 de la loi organique relative aux lois de finances,
les prélèvements sur recettes (PSR) constituent une technique budgétaire
particulière, qui consiste à présenter en loi de finances certaines opérations
comme des moindres recettes de l’État, et non comme des dépenses.
Les prélèvements sur recettes de l’État au profit des collectivités
territoriales, qui regroupaient 22 dispositifs en début d’exercice, ont de
nouveau progressé en 2020 pour atteindre 41 999 M
, soit 1 109 M
de
plus que l’exercice précédent. Cette hausse résulte en partie de la création
de quatre PSR supplémentaires en cours d’exercice.
Graphique n° 2 : exécution 2015-2020 (AE=CP, en M
)
Source : Cour des comptes, d’après des données de la direction du budget
Jusqu’en 2018, les PSR à destination des collectivités territoriales
avaient connu une baisse substantielle en raison de la diminution de DGF
entre 2014 et 2017 dans le cadre de la contribution au redressement des
finances publiques, puis, en 2018, du remplacement de la DGF des régions
par le transfert d’une part de TVA, dépense ne relevant pas du périmètre
des PSR. En 2019, les PSR avaient augmenté de 564 M
, principalement
au titre du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA)
en raison du dynamisme de l’investissement local.
50 528
46 465
43 781
40 326
40 890
41 999
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
2015
2016
2017
2018
2019
2020
6
COUR DES COMPTES
La hausse observée en 2020 résulte à nouveau de la croissance des
dépenses de FCTVA en fin de cycle d’investissement local, en partie
anticipée en loi de finances initiale. Ces dépenses se sont élevées à
6 406 M
contre
5 949 M
en
2019
(+ 457 M
).
Les
mesures
exceptionnelles de soutien aux collectivités ont également contribué à la
hausse des dépenses en 2020 (+ 578 M
).
La création de quatre dispositifs exceptionnels de soutien en
troisième loi de finances rectificative
La crise sanitaire et économique a conduit à la mise en place de
plusieurs dispositifs de soutien aux collectivités territoriales. La troisième
loi de finances rectificatives du 30 juillet 2020 (LFR 3) a ainsi créé quatre
PSR exceptionnels à destination des collectivités du bloc communal, des
régions d’outre-mer, de la collectivité de Corse et des collectivités d’outre-
mer.
Ces dispositifs visaient à la compensation, pour chaque collectivité
concernée, des pertes observées sur un panier de recettes en 2020 au regard
de la moyenne de ces mêmes recettes sur la période 2017-2019. Ce
mécanisme nécessitant de connaître les comptes définitifs de collectivités,
la LFR 3 prévoyait le versement d’acomptes dès le second semestre 2020,
sur la base d’une estimation des pertes de recettes subies au cours de cet
exercice.
L’évolution de la conjoncture économique au cours de l’année 2020
a conduit à revoir à la baisse les crédits de ce « filet de sécurité » budgétaire.
Du fait d’une meilleure résilience des finances des collectivités
qu’anticipé, son montant, initialement estimé à 1 081 M
, a ainsi été révisé
à 670 M
en quatrième loi de finances rectificative.
Les montants exécutés, 578 M
en 2020, s’avèrent sensiblement
inférieurs aux prévisions initiales. L’établissement des compensations
définitives, sur la base des comptes 2020, bien qu’évalué à 380 M
en LFI
2021, ne devrait donc pas faire peser de risque budgétaire significatif à
l’État. Toutefois, un amendement au projet de loi de finances pour 2021 a
prolongé le dispositif de filet de sécurité du bloc communal pour les seules
recettes fiscales
1
. Le montant prévisionnel reste modéré, avec une avance
estimée à 80 M
en 2021 et 80 M
en 2022. La principale perte de recette
attendue porte en effet sur la CVAE et devrait être compensée par le rebond
des autres recettes fiscales.
1
Article 74 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
7
Un FCTVA présentant toujours des écarts importants entre
prévision et exécution, dont l’automatisation a été reportée à 2021
Les dépenses de FCTVA se sont élevées à 6 406 M
en 2020, soit
un écart de 406 M
par rapport aux prévisions, qui fait suite à l’écart de
300 M
observé en 2019.
Comme l’année précédente, cet écart de prévision peut s’expliquer
par la complexité de la détermination du montant prévisionnel du FCTVA
en loi de finances initiale. Cependant, en raison du contexte sanitaire,
l’exercice 2020 a donné lieu au vote de quatre lois de finances
rectificatives, promulguées respectivement le 23 mars, le 25 avril,
le 30 juillet et le 30 novembre 2020.
Les dépenses de FCTVA pour 2019, qui se sont élevées à 5 949 M
,
étaient donc connues lors du vote de ces derniers textes, de même que les
dépenses d’investissement local, en hausse de 12,3 % en 2019. Dans ces
conditions, en dépit des incertitudes relatives à la fin d’exercice, la sous-
budgétisation des dépenses de FCTVA aurait pu être anticipée et conduire
à un ajustement des prévisions en troisième ou quatrième loi de finances
rectificative.
Plusieurs fois repoussées, l’automatisation progressive du FCTVA
à compter de 2021 doit être l’occasion de mesurer l’impact de
l’élargissement du périmètre de son assiette à certaines dépenses de
fonctionnement.
La poursuite de la progression des transferts de l’État aux
collectivités territoriales
Les prélèvements sur recettes ne représentent qu’une partie – moins
de la moitié en montant – des transferts financiers de l’État aux collectivités
territoriales. Ces derniers incluent en particulier les crédits de la mission
Relations avec les collectivités territoriales
, les subventions d’autres
ministères, des contreparties de dégrèvements et des transferts de fiscalité.
Les transferts financiers de l’État à destination des collectivités
territoriales se sont accrus de
2 Md
2
en 2020 pour atteindre
114,4 Md
,
poursuivant la hausse observée en 2018 (+ 5,8 Md
) et 2019 (+ 5,6 Md
).
Si la progression des prélèvements sur recettes à destination des
collectivités territoriales (+ 1,1 Md
) explique en partie cette tendance,
celle-ci est avant tout la conséquence de la hausse des contreparties de
2
Les données en rouge dans la présente note reposent sur des estimations
provisoires, en l’attente de la communication des données définitives par la
direction du budget
.
8
COUR DES COMPTES
dégrèvements consécutive à la suppression progressive de la taxe
d’habitation sur la résidence principale pour 80 % des ménages, et à la
substitution de l’État aux contribuables locaux concernés (+ 4 Md
en
2020).
Hors effets de périmètre liés en particulier à la réforme de
l’apprentissage (- 2 Md
), les autres transferts de l’État présentent des
variations moins substantielles.
Graphique n° 3 : transferts de l’État aux collectivités territoriales
entre 2015 et 2020 (en Md
)
Source : Cour des comptes
Une fragmentation des transferts financiers aux collectivités
préjudiciable à la lisibilité d’ensemble de ces financements
Dans un récent rapport consacré au cadre organique et à la
gouvernance des finances publiques
3
, la Cour soulignait la fragmentation
marquée des finances publiques nationales, source de liens financiers
croisés et croissants entre administrations publiques, préjudiciable à
l’appréhension et au contrôle par les parlementaires et les citoyens des
moyens alloués aux différentes politiques publiques.
3
Cour des comptes,
Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et
de la gouvernance
. La Documentation française, novembre 2020, 159 p., disponible sur
www.ccomptes.fr.
50,5
46,5
43,8
40,3
40,9
42,0
32,1
33,3
35,4
36,1
37,6
36,7
10,9
12,0
11,9
15,7
18,9
22,9
102,3
101,3
101,0
106,8
112,4
114,4
0,0
50,0
100,0
150,0
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Transferts
financiers
Autres transferts
Formation et
apprentissage
Mission RCT
Subventions
ministères
TVA des régions
Contrepartie de
dégrèvements
Fiscalité transférée
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
9
Ce constat s’applique en particulier aux prélèvements sur recettes,
composés de contributions de natures diverses et qui ne se distinguent pas
fondamentalement des crédits budgétaires tels que ceux de la mission
Relations avec les collectivités territoriales
.
Comme le recommande ce rapport, à cadre constitutionnel constant,
il serait souhaitable de regrouper l’ensemble des transferts financiers de
l’État au bénéfice des collectivités territoriales au sein d’une nouvelle
mission budgétaire conservant le nom de l’actuelle mission
Relations avec
les collectivités territoriales
.
Sans attendre une éventuelle modification de la loi organique
relative aux lois de finances (LOLF) qui permettrait de regrouper
l’ensemble des transferts dans une nouvelle mission budgétaire, ainsi que
le propose le rapport précité, la Cour recommande de supprimer les
prélèvements sur recettes qui ne relèveraient pas d’une stricte application
de l’article 6 de la LOLF, ou qui ne présenteraient pas un caractère global
et automatique, et d’inscrire les crédits correspondants dans une mission
existante du budget de l’État.
10
COUR DES COMPTES
RECOMMANDATIONS
Projet de recommandation n° 1
(réitérée)
:
Saisir l’opportunité
de l’automatisation de la gestion du FCTVA pour mesurer
l’impact de l’élargissement du périmètre de l’assiette du FCTVA
à certaines dépenses de fonctionnement.
Projet de recommandation n° 2
(reformulée)
:
Dans l’attente
d’une modification de la LOLF, supprimer les prélèvements sur
recettes qui ne correspondraient pas à une application stricte des
critères de l’article 6 de la LOLF, ou qui ne présenteraient pas un
caractère global et automatique, en inscrivant les crédits
correspondants dans une mission existante du budget de l’État.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
11
Sommaire
Introduction
...................................................................................
13
1
ANALYSE DE L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE
...................
15
1.1
Des crédits en progression dès la loi de programmation
initiale
...................................................................................
15
1.2
Des dispositifs de soutien mis en place et ajustés par les lois
de finances rectificatives
......................................................
18
1.3
Une exécution de nouveau en hausse en 2020
.....................
21
1.4
Perspectives associées à la trajectoire budgétaire
.................
23
2
POINTS D’ATTENTION PAR PSR
.......................................
25
2.1
Une stabilisation de la dotation globale de fonctionnement à
périmètre constant
................................................................
25
2.2
Des dispositifs exceptionnels de soutien moins mobilisés
qu’anticipés
..........................................................................
26
2.3
Un FCTVA présentant toujours des écarts importants entre
prévision et exécution dont l’automatisation est à nouveau
reportée à 2021
.....................................................................
28
2.4
Une démarche de performance qui ne correspond pas au
périmètre des PSR
................................................................
32
3
LES MOYENS CONSACRÉS PAR L’ÉTAT AU
FINANCEMENT DES COLLECTIVITES
TERRITORIALES
....................................................................
37
3.1
La poursuite de la progression des transferts financiers de
l’État aux collectivités en 2020
............................................
37
3.2
Les prélèvements sur recettes : un dispositif dérogatoire à
reconsidérer
..........................................................................
43
3.3
La nécessité d’une vision globale des modalités de
financement des collectivités territoriales
............................
45
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
13
Introduction
Prévus à l’article 6 de la loi organique relative aux lois de finances,
les prélèvements sur recettes (PSR) constituent une technique budgétaire
particulière, qui consiste à présenter en loi de finances certaines opérations
comme des moindres recettes de l’État, et non comme des dépenses.
Les prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales,
au nombre de 22 en début d’exercice, sont composés de contributions de
natures et de montants et d’objectifs très divers.
Certains
de
ces
prélèvements
contribuent
à
abonder
le
fonctionnement courant des collectivités (27,5 Md
en 2020), en
particulier à travers la dotation globale de fonctionnement (DGF), dont le
montant est stable depuis plusieurs exercices à périmètre constant
(26,8 M
).
D’autres visent à favoriser l’investissement public local (7,4 Md
4
).
C’est notamment le cas du fonds de compensation pour la TVA (6,4 Md
),
ainsi que des dotations pour l’équipement des établissements scolaires
(990 M
).
Enfin,
plusieurs
de
ces
PSR
relèvent
de
compensations
d’exonérations consenties par la loi ou de compensations de pertes de
recettes à la suite de réformes fiscales (6,5 Md
), résultant de réformes de
la fiscalité locale ou de dispositions spécifiques.
La survenue de la crise sanitaire et économique au premier trimestre
2020 a conduit à la création, en troisième loi de finances rectificative, de
quatre PSR exceptionnels de soutien au collectivités
5
, destinés à compenser
partiellement leurs pertes de recettes. Ce « filet de sécurité » a occasionné
578 M
de dépenses supplémentaires en 2020.
4
Ce montant est légèrement surévalué en raison de la comptabilisation dans le FCTVA
de versements relatifs à des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales.
Ces versements, faibles, n’ont pu être distingués de la part de FCTVA relative aux
dépenses d’investissement.
5
Un PSR de soutien aux recettes fiscales et domaniales des collectivités du bloc
communal (549 M
consommés en 2020), un PSR de soutien aux recettes fiscales
particulières des régions d’outre-mer (27,2 M
), un PSR de soutien aux recettes fiscales
particulières de la collectivité de Corse (dépense reportée sur 2021) et un PSR de
soutien aux recettes fiscales particulières des collectivités d’outre-mer (1,4 M
).
14
COUR DES COMPTES
Graphique n° 4 : répartition des prélèvements sur recettes au profit
des collectivités territoriales (montants en M
)
Source : Cour des comptes
Les prélèvements sur recettes de l’État au profit des collectivités
territoriales se sont élevés à 41 999 M
en 2020, soit une progression de
1 109 M
par rapport à l’exercice précédent.
Cet accroissement résulte principalement de la hausse des
versements de FCTVA (+ 457 M
) sous l’effet de la croissance de
l’investissement public local en fin de cycle électoral, et d’autre part des
mesures exceptionnelles de soutien aux collectivités liées au contexte
sanitaire et économique (+ 578 M
).
31 517
27 629
27 605
27 503
5 999
6 509
6 939
7 396
6 215
6 188
6 346
6 521
578
43 781
40 326
40 890
41 999
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
2017
2018
2019
2020
PSR (total)
Crise
Compensat
ion
Investisse
ment
Fonctionne
ment
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
15
1
ANALYSE DE L’EXÉCUTION
BUDGÉTAIRE
1.1
Des crédits en progression dès la loi de
programmation initiale
Les prélèvements sur recettes (PSR) au profit des collectivités
territoriales s’élevaient à 41 247 M
6
en loi de finances initiale pour 2020,
soit une progression de 672 M
par rapport à l’exercice précédent.
Cette hausse résulte avant tout de la progression tendancielle de
certains prélèvements sur recettes, en particulier du fonds de compensation
de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) et des compensations
d’exonérations relatives à la fiscalité locale.
Tableau n° 1 : la budgétisation initiale des PSR à des destinations
des collectivités territoriales
(en
M
)
LFI
2019
Mesures
de
périmètre
Tendanciel
Mesures
nouvelles
Variables
d'ajustement
LFI
2020
Écart
(M
)
Écart
(%)
PSR
CT
40 575
86
705
28
-148
41 247
672
1,7 %
Source : Cour des comptes, d’après des données de la direction du budget
1.1.1 Des mesures de périmètre qui se compensent
partiellement
Plusieurs mesures de périmètre sont intervenues en 2020,
conduisant à une diminution nette des PSR de 86 M
.
La recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) à La
Réunion et à Mayotte a conduit à une réfaction de la dotation globale de
fonctionnement (DGF) de 98 M
, à laquelle s’est ajoutée une réfaction de
25 M
du fonds de mobilisation départementale pour l’insertion inscrit sur
la mission
Relations avec les collectivités territoriales
. La DGF a
également fait l’objet d’une réfaction de 5 M
afin d’abonder la dotation
biodiversité
inscrite sur la mission
Relations avec les collectivités
territoriales
.
6
Les autorisations d’engagement (AE) étant égales aux crédits de paiement (CP).
16
COUR DES COMPTES
À l’inverse, deux PSR ont été institués par la LFI 2020 au profit,
d’une part, de la Polynésie française (91 M
) et d’autre part, des régions
(123 M
). La dotation globale d’autonomie au bénéfice de la Polynésie
française était jusque-là inscrite sur le programme budgétaire
Conditions
de vie outre-mer
. Le second PSR, assure la neutralité financière de la
réforme de l'apprentissage pour les régions, une fois pris en compte le
versement d'une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur
les produits énergétiques (TICPE).
1.1.2 Une progression tendancielle du FCTVA et des
compensations de fiscalité locale
L’évolution tendancielle des dépenses, évaluée à 705 M
, explique
en grande partie la progression des PSR en LFI 2020. Elle concerne
principalement deux prélèvements sur recettes.
Selon les hypothèses retenues, le FCTVA progresse de 351 M
pour
atteindre 6 Md
, du fait de la hausse de l’investissement local sur la période
2018-2020, qui correspond à la fin du cycle électoral communal. Cette
anticipation dans le cadre de l’élaboration de la loi de finances initiale est
en réalité sous-évaluée, ainsi qu’il sera développé ci-après (cf. partie 2.3).
Les compensations d’exonérations relatives à la fiscalité locale
progressent pour leur part de 359 M
du fait du dynamisme de la fiscalité
locale. Ce poste, prévu en augmentation de 123 M
dans le PLF, a été
abondé de 236 M
par voie d’amendement lors de la discussion
parlementaire
7
.
L’évolution tendancielle des autres PSR est globalement neutre
(- 5 M
), les tendances haussières des uns compensant les tendances
baissières des autres. En particulier, une hausse de 22 M
du PSR au profit
de la Corse, anticipée en raison de la hausse des produits de TICPE, a été
compensée par la diminution attendue de 24 M
de la compensation des
pertes de bases de la contribution économique territoriale en raison de sa
sous-exécution sur les derniers exercices.
7
Dont 226 M
liés à l’exonération de taxe d’habitation des personnes fragiles
exonérées en 2018 et 10 M
pour la compensation des exonérations destinées aux petits
commerces.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
17
1.1.3 Une incidence limitée de la loi Engagement et proximité
Afin de financer les mesures contenues dans la loi
Engagement et
proximité
8
au bénéfice des communes de moins de 1 000 habitants, la
dotation
élu local
a été majorée de 28 M
entre la LFI 2019 et la LFI 2020.
Créée en 1992, cette dotation vise à compenser les dépenses
obligatoires des communes entraînées par les dispositions législatives
relatives aux autorisations d'absence, aux frais de formation des élus locaux
et à la revalorisation des indemnités des maires et adjoints.
1.1.4 Une minoration au titre de l’enveloppe normée
L’article 16 de la loi de programmation des finances publiques pour
2018-2022 plafonne les concours de l’État aux collectivités territoriales. Le
montant total des prélèvements sur recettes, à l’exclusion du FCTVA, et
des crédits de la mission
Relations avec les collectivités territoriales
ne
peut dépasser, à périmètre constant, un montant annuel déterminé, précisé
à l’article précité.
Afin de respecter cette enveloppe normée, certains prélèvements sur
recettes, appelés variables d’ajustement, font l’objet d’une minoration en
loi de finances initiale pour compenser la hausse d’autres postes de
l’enveloppe normée, qu’il s’agisse d’autres prélèvements sur recettes ou de
crédits de la mission
Relations avec les collectivités territoriales
.
Les modalités d’établissement de cette minoration sont complexes
et peu documentées. Le
jaune
budgétaire consacré aux transferts de l’État
aux collectivités territoriales présente longuement le dispositif mais
n’apporte aucune explication sur le montant proposé en loi de finances, pas
plus que le projet de loi de finances lui-même.
Le choix des variables d’ajustements, i.e. des prélèvements sur
recettes sur lesquelles la minoration annuelle est appliquée, est déterminé
par la loi de finances. La loi de finances pour 2020 (article 73) a ainsi
étendu leur périmètre, qui inclut désormais le PSR de compensation des
pertes de recettes liées au relèvement du seuil d’assujettissement des
entreprises au versement transport.
Les variables ont été minorées à hauteur de 148 M
, répartis sur
trois prélèvements sur recettes :
8
Loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et
à la proximité de l'action publique.
18
COUR DES COMPTES
- 44 M
sur la dotation pour transferts de compensations
d'exonérations de fiscalité directe locale (dite
dot carrée
), dont 24 M
pour
les départements et 20 M
pour les régions ;
- 59 M
sur la dotation de compensation de la réforme de la taxe
professionnelle (DCRTP), dont 10 M
pour le bloc communal et 49 M
pour les régions ;
- 45 M
sur le PSR relatif au versement transport (bloc communal).
S’agissant de la répartition de ces modulations, comme en 2019, la
minoration des variables d’ajustement est effectuée au prorata des recettes
réelles de fonctionnement de leurs bénéficiaires.
1.2
Des dispositifs de soutien mis en place et
ajustés par les lois de finances rectificatives
La loi de finances pour 2020 prévoyait une exécution des PSR de
l’État à destination des collectivités territoriales à hauteur de 41,25 Md
.
La crise sanitaire a rapidement conduit à la mise en place de
plusieurs dispositifs de soutien aux collectivités territoriales, certains
prenant la forme de nouveaux prélèvements sur recettes créés en troisième
loi de finances rectificative
9
. Ces mécanismes reposent sur le principe
d’une compensation partielle des pertes de recettes des bénéficiaires par
rapport aux exercices antérieurs.
Par la suite, des perspectives financières plus favorables qu’anticipé
ont permis de revoir à la baisse les crédits correspondants en quatrième loi
de finances rectificative
10
.
En définitive, les montants relatifs à ces dispositifs exceptionnels de
soutien restent modérés au regard de l’ensemble des PSR à destination des
collectivités territoriales, de même qu’en comparaison des autres
dispositifs exceptionnels mis en place par l’État en 2020.
9
Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.
10
Loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
19
Graphique n° 5 : de la LFI à l’exécution 2020 (en M
)
Source : Cour des comptes
1.2.1 La crise sanitaire a conduit à la création de quatre PSR
en troisième loi de finances rectificative
Les deux premières lois de finances rectificatives ont eu une
incidence mineure sur les prélèvements sur recettes de l’État à destination
des collectivités territoriales
11
.
Les principaux dispositifs de soutien aux collectivités ont été
introduits par la troisième loi de finances rectificatives du 30 juillet 2020
(LFR 3), conduisant à la création de quatre PSR spécifiques :
-
un PSR de soutien aux recettes fiscales et domaniales des collectivités
du bloc communal (article 21), pour un montant alors estimé à 993 M
dont 425 M
à destination d’Ile-de-France Mobilités ;
-
un PSR de soutien aux recettes fiscales particulières des régions
d’outre-mer (article 22) pour un montant de 60 M
;
-
un PSR de soutien aux recettes fiscales particulières de la collectivité
de Corse (article 23), pour un montant de 8 M
;
-
un PSR de soutien aux recettes fiscales particulières des collectivités
d’outre-mer (article 24), pour un montant de 7 M
.
11
La dotation élu local a été majorée de 8 M
en LFR 2.
20
COUR DES COMPTES
Ces quatre dispositifs reposent sur un principe identique, à savoir la
compensation des pertes observées sur certaines recettes en 2020 au regard
de la moyenne de ces mêmes recettes sur la période 2017-2019.
La LFR 3 prévoyait le versement d’acomptes dès 2020 sur le
fondement d’une estimation des pertes de recettes subies au cours de cet
exercice, puis d’un ajustement en 2021.
Les crédits inscrits en loi de finances étaient cohérents avec les
estimations alors disponibles, et notamment celles formulées en juillet
2020 dans le rapport dit Cazeneuve
12
, élaboré dans le cadre de la mission
confiée par le Premier ministre au président de la délégation aux
collectivités territoriales et à la décentralisation de l’Assemblée nationale,
Jean-René Cazeneuve, sur l’impact de la crise sur les finances locales.
1.2.2 Des crédits revus à la baisse en quatrième loi de
finances rectificative
L’évolution de la conjoncture économique au cours de l’année 2020
a conduit à revoir à la baisse les crédits du « filet de sécurité » budgétaire
à destination des collectivités créé en LFR 3. Du fait d’une meilleure
résilience des finances des collectivités qu’anticipé, son montant,
initialement estimé à 1 081 M
, a ainsi été révisé à 671 M
.
Tableau n° 2 : ajustement des PSR de soutien aux collectivités
(en M
)
LFR3
LFR4
Écart
PSR de soutien aux recettes fiscales et domaniales
du bloc communal
993
625
- 368
PSR de soutien aux recettes fiscales particulières
des régions d’outre-mer
60
37
-24
PSR de soutien aux recettes fiscales particulières
des COM
7
1
-6
PSR de soutien aux recettes fiscales particulières de
la collectivité de Corse
8
8
0
Total
1 068
671
-397
Source : Cour des comptes, d’après des données de la direction du budget
Les résultats d’exécution tendent à confirmer la légitimité de ces
ajustements et écartent l’hypothèse d’une sous-budgétisation, ces crédits
n’ayant pas été consommés dans leur totalité en 2020.
12
Jean-René Cazeneuve,
Impact de la crise du Covid 19 sur les finances locales et
recommandations
, 29 juillet 2020.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
21
Par ailleurs, indépendamment des dispositifs liés à la crise sanitaire,
la quatrième loi de finances rectificative (LFR 4) a donné lieu à une
minoration de 179 M
du prélèvement sur les recettes de l'État au titre de
la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale. Les résultats
d’exécution (2 497 M
) sont très proches des montants de la LFR 4
(2 490 M
), ce qui témoigne d’une optimisation opportune de la prévision.
1.2.3 Une exécution supérieure aux prévisions en raison de la
progression du FCTVA
L’exécution des PSR à destination des collectivités territoriales
atteint 41 999 M
en 2020, soit 253 M
de plus que les prévisions établies
en quatrième loi de finances rectificative. Ainsi que l’indique la direction
du budget, ce niveau d’exécution est le fruit de deux dynamiques
contraires.
Le dynamisme des dépenses d’investissement des collectivités a
conduit à une sur-exécution du FCTVA de 405 M
, ce qui avait déjà été le
cas en 2019 avec une sur-exécution de 300 M
. Ce point, déjà soulevé par
la Cour, fait l’objet d’un développement spécifique dans la deuxième partie
de la présente note.
À l’inverse, malgré une diminution des prévisions en quatrième loi
de finances rectificative, les dispositifs exceptionnels de soutien aux
collectivités ont donné lieu à des dépenses moindres qu’anticipé, soit
549 M
pour le bloc communal, 27,2 M
pour les régions d’outre-mer et
1,4 M
pour Saint-Pierre-et-Miquelon, l’exécution du PSR de soutien à la
collectivité de Corse ayant été reportée sur l’exercice 2021 du fait de
« difficultés de traitement ». Hormis ce dernier cas, les sous-exécutions
sont directement liées à l’amélioration progressive des prévisions de
recettes fiscales et domaniales des collectivités.
Trois PSR « historiques » de compensation ont également donné
lieu à des sous-consommations : la
dot carrée
à hauteur de 26 M
, le PSR
au profit de la Corse de 11 M
et le PSR de compensations de pertes de
bases de CET et de redevance des mines de 31 M
.
1.3
Une exécution de nouveau en hausse en 2020
Dans la continuité de 2019, les prélèvements sur recettes de l’État
au profit des collectivités territoriales ont de nouveau progressé pour
atteindre 41 999 M
en 2020, soit 1 109 M
de plus que l’exercice
précédent.
22
COUR DES COMPTES
Graphique n° 6 : exécution 2015-2020 (AE=CP, en M
)
Source : Cour des comptes, d’après des données de la direction du budget
Jusqu’en 2018, les PSR destinés aux collectivités territoriales
avaient connu une baisse substantielle en raison de la diminution de DGF
entre 2014 et 2017 dans le cadre de leur contribution au redressement des
finances publiques, puis, en 2018, du fait du remplacement de la DGF des
régions par le transfert d’une part de TVA, dépense ne relevant pas du
périmètre des PSR
13
.
En 2019, les PSR avaient augmenté de 564 M
, principalement en
raison du dynamisme de l’investissement local
14
.
Cette tendance s’est poursuivie en 2020 avec des dépenses de
FCTVA à hauteur de 6 406 M
(+ 457 M
). L’exécution du FCTVA a été
principalement déterminée par l’assiette des dépenses éligibles de l’année
2019 (environ 67 % du FCTVA) qui ont été tout particulièrement
dynamiques (+ 11,8 % selon la direction du trésor). Les dépenses liées aux
investissements de l’année 2020 sont restées dynamiques jusqu’en avril,
limitant l’effet de baisse lié d’une part au cycle électoral, d’autre part à la
crise sanitaire et économique.
Dans le même temps, les PSR exceptionnels mise en place au titre
du soutien aux collectivités face à la crise ont conduit à un surplus de
dépenses de 668 M
, dont 425 M
à destination d’Île-de-France Mobilités.
Le PSR de compensation d’exonérations de fiscalité directe locale
progresse de 137 M
entre 2019 et 2020, sous l’effet, d’une part, de la
13
Cour des comptes,
Note d’exécution budgétaire 2018 relatives aux PSR au profit des
collectivités territoriales
. Disponible sur www.ccomptes.fr.
14
Cour des comptes,
Note d’exécution budgétaire 2019 relatives aux PSR au profit des
collectivités territoriales
. Disponible sur www.ccomptes.fr.
50 528
46 465
43 781
40 326
40 890
41 999
0
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
2015
2016
2017
2018
2019
2020
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
23
hausse de la compensation de l’exonération de taxe d’habitation pour les
personnes de condition modeste (106 M
) et d’autre part, de la croissance
de la compensation de CFE pour les entreprises réalisant moins de 5 000
de chiffres d’affaires (17 M
). Pour rappel, ces dépenses correspondent
aux prévisions telles qu’ajustées en quatrième loi de finances rectificative.
Les principales autres variations résultent des effets de périmètre
précédemment mentionnés. La diminution de 104 M
de la DGF,
principalement du fait de la recentralisation du RSA à La Réunion et à
Mayotte, est en partie compensée par la création de deux PSR au profit de
la Polynésie française (91 M
) et des régions (123 M
) dans le cadre de la
réforme de l’apprentissage.
Enfin, la dotation
élu local
a, pour sa part, connu une augmentation
(+ 36 M
) en conséquence de la loi
Engagement et proximité
et de la
possibilité donnée aux collectivités de revaloriser les indemnités des élus
communaux. Une seconde part de la dotation a été créée et le montant de
cette dotation avait été porté à 93 M
en LFI 2020 (contre 65 M
en LFI
2019). La LFR 2 avait à nouveau majoré cette dotation de 8 M
, pour
étendre le bénéfice de la seconde part de la dotation.
1.4
Perspectives associées à la trajectoire
budgétaire
À l’exception du FCTVA, les prélèvements sur recettes destinés aux
collectivités territoriales sont intégrés à l’enveloppe normée des concours
financiers fixée à l’article 16 de la loi de programmation des finances
publiques 2018-2022. Cette disposition encadre strictement l’évolution
globale de ces concours, constitués des prélèvements sur recettes hors
FCTVA et des crédits de la mission
Relations avec les collectivités
territoriales
. Si elle ne fait plus directement référence à l’article 16 de la
loi de programmation, la loi de finances applique toujours à certains
prélèvements sur recettes, appelés variables d’ajustement, une minoration
destinée à compenser la hausse d’autres postes de l’enveloppe normée,
qu’il s’agisse d’autres prélèvements sur recettes ou de crédits de la mission
Relations avec les collectivités territoriales
(cf. partie 1.1.4 ci-avant pour
la mise en
œ
uvre de ces variables d’ajustement en 2020).
Au sein de cette enveloppe, certains PSR sont eux-mêmes répartis
au sein d’une enveloppe fermée, fixée chaque année par la loi de finances,
à l’instar de la DGF ou de la dotation
élu local
. Les évolutions de certaines
composantes de ces PSR sont ainsi financées par minoration à due
concurrence d’autres composantes de ces prélèvements (par exemple via
24
COUR DES COMPTES
l’écrêtement de la DGF). Ces PSR ne présentent donc pas de risques de
soutenabilité par rapport aux montants fixés en loi de finances.
Si les mesures exceptionnelles de soutien aux collectivités ne
portaient que sur l’exercice 2020, un amendement au cours du débat
parlementaire a conduit à reconduire le filet de sécurité destiné aux
communes et à leurs groupements dans la loi de finances initiale pour 2021.
L’incidence financière de cette mesure est délicate à évaluer et
dépendra de l’évolution de la situation sanitaire et économique au cours de
l’année. Alors qu’un rebond est attendu en 2021 pour la plupart des recettes
concernées par le dispositif, l’ampleur de sa mobilisation dépendra avant
tout de la dynamique des produits de CVAE.
Il est également à noter que le budget 2021 donne lieu à une mesure
de périmètre significative avec la mise en
œ
uvre de la réforme de la
fiscalité locale. La loi de finances initiale pour 2021 prévoit ainsi 540 M
de dépenses au titre des compensations relatives à la fiscalité locale, alors
que celles-ci se sont élevées à 2 497 M
en 2020. L’écart est intégré aux
transferts de fiscalité (hors PSR) destinés à compenser la suppression de la
taxe d’habitation.
Hors mesures exceptionnelles liées à la crise sanitaire ou mesures
de périmètre, la dynamique d’évolution des PSR en 2021 sera conditionnée
par celle du FCTVA. Alors que 6 406 M
ont été dépensés en 2020, la loi
de finances initiale pour 2021 anticipe une consommation de 6546 M
en
2021. Cet écart de 140 M
, qui tient compte du caractère cyclique des
dépenses d’investissement public local, est très inférieur à l’évolution
annuelle constatée en 2018 (+ 510 M
), 2019 (+ 430 M
) et 2020
(+ 457 M
).
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
25
2
POINTS D’ATTENTION PAR PSR
2.1
Une stabilisation de la dotation globale de
fonctionnement à périmètre constant
Principal prélèvement sur recettes à destination des collectivités
territoriales, la DGF est restée stable à périmètre constant en 2020. Elle
représentait 26 843 M
de dépenses, soit 104 M
de moins qu’en 2019,
dont une réfaction de 98 M
liée à la recentralisation du RSA à La Réunion
et à Mayotte et une réfaction complémentaire de 5 M
afin d’abonder la
dotation biodiversité inscrite sur la mission
Relations avec les collectivités
territoriales
.
Au sein de cette enveloppe, les dotations de péréquation ont de
nouveau progressé. S’agissant de la péréquation communale, la hausse
s’est élevée à 180 M
comme en 2019, après + 200 M
en 2018. Elle a été
répartie à égalité entre la dotation de solidarité urbaine (DSU) et la dotation
de solidarité rurale (DSR). S’agissant de la dotation d’intercommunalité, le
rythme annuel de progression fixé en loi de finances pour 2019 a été
poursuivi en 2020 (+ 30 M
). De même, les dotations de péréquation
départementale ont progressé de 10 M
.
Par ailleurs, l’année 2020 a été marquée par une réforme des
modalités de répartition de la péréquation verticale destinée aux communes
des départements d’outre-mer , prévue par la loi de finances pour 2020.
Cette réforme a augmenté la quote-part prélevée sur les dotations de
péréquation communales et a ainsi conduit à une nette hausse des montants
répartis (279 M
, soit + 8 % par rapport à 2019). A également été créée, au
sein de la DACOM, une dotation de péréquation des communes des
départements d’outre-mer (DPOM), d’un montant de 28 M
.
La loi de finances initiale pour 2020 a également mis en place un
nouveau régime dérogatoire de calcul de la DGF allouée aux communes
nouvelles, pour les communes créées après les élections municipales, plus
simple et plus lisible. La LFI a également facilité la possibilité d’une
répartition dérogatoire de la DGF des communes au sein d’un EPCI en
fonction d’un accord local.
D’autre part, depuis 2018, les collectivités locales disposent
d’informations utilisables leur permettant de reconstituer le montant des
dotations, notamment de la DGF, qui leur sont dues en application des
textes. Cette avancée a été réalisée dans le contexte de la réforme de la
26
COUR DES COMPTES
procédure de notification des attributions des DGF (article L. 1613-5-1 du
code général des collectivités territoriales
15
).
La loi de finances pour 2021 prévoit une nouvelle stabilisation de la
DGF à périmètre constant. Le principal enjeu à venir concernant cette
dotation porte moins sur son enveloppe globale que sur les modalités de sa
répartition entre collectivités. La réforme de la fiscalité locale et celle des
impôts de production ont en effet rendu nécessaire de procéder à une
modification du périmètre des « indicateurs financiers » tels que le
potentiel fiscal ou le potentiel financier, utilisés pour répartir les dotations
et les fonds de péréquation. Dans l’attente de la fixation de nouveaux
paramètres pertinents, la LFI 2021 a institué une « fraction de correction »
appliquée de manière progressive jusqu’en 2028, destinée à éviter que ce
changement de périmètre n’ait des impacts déstabilisateurs sur le niveau
des dotations perçu par les collectivités.
2.2
Des dispositifs exceptionnels de soutien moins
mobilisés qu’anticipés
La crise sanitaire a conduit l’État à mettre en place plusieurs
dispositifs de soutien aux collectivités territoriales, quatre d’entre eux
prenant la forme de nouveaux prélèvements sur recettes créés aux articles
21 à 24 de la troisième loi de finances rectificatives du 30 juillet 2020.
Tableau n° 3 : PSR exceptionnels de soutien aux recettes des collectivités
(En M
)
LFR3
LFR4
Exécution
PSR de soutien aux recettes fiscales et
domaniales du bloc communal
993
625
549
PSR de soutien aux recettes fiscales particulières
des régions d’outre-mer
60
36,5
27,2
PSR de soutien aux recettes fiscales particulières
des COM
7
1,4
1,4
PSR de soutien aux recettes fiscales particulières
de la collectivité de Corse
8
7,7
0
Total
1068
671
578
Source : Cour des comptes, d’après des données de la direction du budget
15
Article L. 1613-5-1, CGCT : « Les attributions individuelles au titre des composantes
de la DGF mentionnées aux articles L. 2334-1 et L. 3334-1 peuvent être constatées par
arrêté du ministre chargé des collectivités territoriales publié au Journal officiel. Cette
publication vaut notification aux collectivités territoriales et aux établissements publics
de coopération intercommunale ».
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
27
Ces quatre dispositifs reposent sur un principe de « filet de
sécurité », la dotation octroyée étant égale à la différence entre les pertes
observées sur certaines recettes en 2020 et la moyenne de ces mêmes
recettes sur la période 2017-2019.
Ce mécanisme nécessitant de connaître les comptes définitifs de
collectivités, la LFR 3 prévoyait le versement d’acomptes dès le second
semestre 2020, sur la base d’une estimation des pertes de recettes subies au
cours de cet exercice, avant un ajustement en 2021 une fois les comptes
2020 arrêtés.
Les montants exécutés, 578 M
en 2020, s’avèrent sensiblement
inférieurs aux prévisions de la LFR 3 (1 068 M
), en raison d’une situation
des
finances
locales
plus
favorables
qu’anticipé
à
l’été
2020.
L’établissement des compensations définitives, sur la base des comptes
2020, bien qu’évalué à 380 M
en LFI 2021, ne devrait donc pas faire peser
de risque budgétaire significatif à l’État
16
.
Les incertitudes relatives à la situation sanitaire pourraient toutefois
conduire à de nouvelles mesures, comme cela a été le cas en 2020 avec la
création de ces prélèvements sur recettes exceptionnels.
Alors que le projet de loi de finances pour 2021 ne prévoyait pas
leur renouvellement, un amendement a prolongé le dispositif de filet de
sécurité du bloc communal sur les seules recettes fiscales
17
. Le montant
prévisionnel reste modéré, avec une avance estimée à 80 M
en 2021 et à
80 M
en 2022. La principale perte de recette attendue porte en effet sur la
CVAE et devrait être compensée par le rebond des autres recettes fiscales.
16
La LFI pour 2021 prévoit 380 M
à ce titre, dans le cadre d’un PSR de compensation
des pertes de recettes du bloc communal qui inclut également la prolongation du filet
de sécurité du bloc communal sur les seules recettes fiscales (80 M
) et la compensation
des DMTO des communes de moins de 5 000 habitants (50 M
).
17
Article 74 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.
28
COUR DES COMPTES
2.3
Un FCTVA présentant toujours des écarts
importants entre prévision et exécution dont
l’automatisation est à nouveau reportée à 2021
2.3.1 Une exécution sensiblement supérieure aux prévisions
malgré plusieurs lois de finances rectificatives
Les dépenses de FCTVA se sont élevées à 6 406 M
en 2020, soit
un écart de 406 M
par rapport aux prévisions, qui fait suite à l’écart de
300 M
observé en 2019.
Tableau n° 4 : écart entre la prévision en LFI et l’exécution du
FCTVA (2015-2019)
(en M
)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Exécution
5 615
5 216
5 009
5 519
5 949
6 406
Prévision en
LFI
5 961
6 047
5 524
5 612
5 649
6 000
Écart
-346
-831
-515
-93
300
406
Source : Cour des comptes, d’après des données de la direction du budget
Comme l’année précédente, cet écart de prévision peut s’expliquer
par la complexité de la détermination du montant prévisionnel du FCTVA
en loi de finances initiale, 80 % de l’assiette n’étant pas connu au moment
de la prévision. En effet, le montant prévisionnel du FCTVA de l’année N
est calculé sur la base des dépenses N-2 des collectivités bénéficiant du
régime de versement de droit commun (environ 22 % de l’assiette), des
dépenses N-1 des collectivités bénéficiant du régime de versement anticipé
(environ 62 % de l’assiette) et des dépenses N des collectivités bénéficiant
du FCTVA l’année même de la dépense (environ 16 % de l’assiette).
Ainsi, pour établir en 2019 la prévision du montant de FCTVA à
inscrire en loi de finances pour l’année 2020 :
- seules les dépenses 2018 sont connues, soit environ 21 % de
l’assiette du FCTVA ;
- les dépenses 2019, qui correspondent aux dépenses réalisées sur
l’ensemble de l’année, ne sont pas connues dans leur intégralité ; des
hypothèses d’évolution doivent donc être prises ;
- les dépenses 2020 qui correspondent aux dépenses de l’année
suivant celle de la prévision ne peuvent qu’être estimées sur la base
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
29
d’hypothèses d’évolution tenant en particulier à l’évolution de la
conjoncture aussi bien qu’au stade du cycle électoral local.
La prévision est également rendue complexe par les aléas de gestion.
Ainsi, 55 % du FCTVA est versé de septembre à décembre et 40 % dans
les dernières semaines. La liquidation manuelle est contrainte par
l’organisation des préfectures et la date de clôture de l’exécution. Selon la
direction du budget, la réforme de l’automatisation de la gestion du
FCTVA prévue à compter du 1
er
janvier 2021 (voir ci-après) a pu conduire
les préfectures à liquider les stocks de FCTVA davantage que les années
précédentes.
Ces contraintes peuvent expliquer l’écart observé entre les dépenses
effectives de FCTVA et la prévision effectuée en loi de finances initiale.
Cependant, en raison du contexte sanitaire, l’exercice 2020 a donné
lieu au vote de quatre lois de finances rectificatives, promulguées
respectivement le 23 mars, le 25 avril, le 30 juillet et le 30 novembre 2020.
Les dépenses de FCTVA pour 2019, qui se sont élevées à 5 949 M
,
étaient donc connues lors du vote de ces derniers textes, de même que les
dépenses d’investissement local 2019, en hausse de 12,3 % par rapport à
2018.
La direction du budget précise que si le taux de consommation des
crédits au 15 novembre 2020 (80 % de la prévision en loi de finances
initiale) était supérieur à 2019 (74 %), les données relatives aux dépenses
ouvrant droit à des versements en 2020 en application du régime N-1
(dépenses d’investissement 2019), une fois connues et analysées à l’été,
sont venues conforter la prévision retenue dans le cadre de la LFI, à savoir
une exécution du FCTVA à hauteur de 6 Md
. Pourtant, au regard de la
hausse des dépenses d’investissement local en 2019, il était peu probable
d’obtenir un montant comparable, en 2020, à l’exécution 2019, sauf à
prévoir un effondrement de l’investissement suffisamment conséquent
pour compenser les hausses de 2018 et 2019.
Dans ces conditions, en dépit des incertitudes relatives à la fin
d’exercice, la sous-budgétisation des dépenses de FCTVA aurait pu être
anticipée et conduire à un ajustement des prévisions en troisième ou
quatrième loi de finances rectificative.
30
COUR DES COMPTES
2.3.2 Une automatisation reportée à 2021 et mise en
œ
uvre
de manière progressive
Dans son référé du 11 juin 2015 sur les concours financiers de l'État
aux collectivités territoriales
18
, la Cour avait recommandé de rationaliser la
gestion du FCTVA. L’automatisation de la gestion de ce fonds doit
permettre la simplification et l’harmonisation des règles de gestion du
FCTVA tout en améliorant la sécurité juridique et comptable de son
exécution. Elle doit également faciliter la prévision budgétaire en
permettant aux services de l’État de disposer de l’assiette éligible sans
dépendre des aléas liés aux demandes formulées par les collectivités.
Une mission interministérielle a mené depuis le 20 janvier 2017 des
travaux techniques afin d’expertiser les conditions de faisabilité de la
réforme du FCTVA. Ces travaux ont été conduits avec les administrations
concernées (DGCL, DGFIP, direction du budget, DMAT, AIFE, services
des préfectures) en associant les associations d’élus. Ils ont notamment eu
pour objet de définir une méthode de travail, les principes, scénarios et
simulations
d’évolution
permettant
une
simplification
et
une
harmonisation des règles de gestion du FCTVA.
L’avancement de ces travaux a permis d’introduire le principe de la
mise en
œ
uvre de l’automatisation de la gestion du FCTVA dans le cadre
de l’article 156 de la loi de finances 2018 qui prévoyait une mise en
œ
uvre
au 1er janvier 2019.
Les travaux de la mission ont cependant relevé des difficultés qui
ont motivé un premier report de l’automatisation d’un an, autorisé par
l’article 258 de la loi de finances pour 2019. Toutes les questions relatives
à la neutralité budgétaire de l’automatisation n’ayant pas été résolues, le
projet a été à nouveau reporté d’un an par l’article 249 de la loi de finances
pour 2020, avec une mise en
œ
uvre à compter du 1
er
janvier 2021.
L’article 251 de la loi de finances pour 2021 prévoit une application
progressive de la réforme, débutant par l’automatisation, en 2021, pour les
seuls bénéficiaires du versement du FCTVA l’année de réalisation de la
dépense, puis étendue en 2022 et 2023 respectivement aux bénéficiaires en
régime de versement N-1 et N-2. Cette réforme n’inclut donc pas, à ce
stade, une révision des régimes de versements du FCTVA.
L’approche retenue dans le cadre de l’automatisation du FCTVA,
établie sur la base des plans de comptes appliqués par les collectivités
locales, modifie l’actuel dispositif de liquidation du FCTVA : l’éligibilité
18
Les concours financiers de l’État aux collectivités locales -
l’exécution des
prélèvements sur les recettes de l’État et la gestion du FCTVA
. Cour des comptes, référé
du 11 juin 2015. Disponible sur www.ccomptes.fr..
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
31
au FCTVA d’une dépense sera ainsi basée sur son imputation comptable et
non sur une analyse juridique préalable fondée sur les textes applicables.
Certaines situations particulières nécessiteront de maintenir une
gestion non automatisée, sur la base de l’actuel dispositif de déclaration au
FCTVA (« gestion manuelle »), afin de permettre aux collectivités locales
de continuer à bénéficier du FCTVA. C’est notamment le cas de dépenses
actuellement éligibles et qui ne peuvent être inscrites sur un compte de
l’assiette automatisée.
Selon la direction du budget, cette réforme n’a pas vocation à
produire des économies compte tenu de l’élargissement de l’assiette
automatisée et d’un versement automatique limitant les cas de non recours
ou les erreurs des collectivités. Elle estime le surcoût lors de la montée en
charge à environ 240 M
, surcoût néanmoins lissé avec la mise en
œ
uvre
progressive de l’automatisation.
En tout état de cause, le déploiement de l’automatisation devra être
concomitant à un effort de fiabilisation de l’imputation comptable des
dépenses payées sur les comptes concernés éligibles au FCTVA. Dans son
référé de 2009 relatif aux concours financiers de l’État aux collectivités
locales, la Cour avait déjà recommandé de « contrôler systématiquement
l’éligibilité des dépenses déclarées au titre du FCTVA ».
Dans sa note d’exécution budgétaire de 2019, la Cour recommandait
de saisir l’opportunité de l’automatisation de la gestion du FCTVA pour
mesurer l’impact de l’élargissement du périmètre de l’assiette du FCTVA
à certaines dépenses de fonctionnement.
La direction du budget soutient cette recommandation. Elle souligne
que la LFI 2020 a élargi le FCTVA aux dépenses de fonctionnement
d'entretien des réseaux qui devraient monter en charge jusqu'en 2022
compte tenu des régimes de versement. De plus en 2020, la LFR 3 a élargi
l'assiette du FCTVA aux dépenses de fonctionnement des services
informatiques en nuage (cloud) avec un taux spécifique de 5,6 % à compter
du 1
er
janvier 2021. Ainsi, la totalité de ces dépenses seront incluses dans
le dispositif à compter de l'année 2023.
Pour sa part, la DGCL précise que dans le cadre la période transitoire
de mise en
œ
uvre, l'automatisation ne pourra qu'apporter des réponses
partielles, probablement marquées par la typologie des bénéficiaires entrés
dans le champ de la réforme. Néanmoins, elle permettra à terme de
renforcer la prévision, la gestion ainsi que l’anticipation de l'exécution
budgétaire du FCTVA. En effet, contrairement au dispositif actuel qui ne
permet pas de connaître la répartition des attributions selon les dépenses
imputées dans les comptes par nature des collectivités locales,
32
COUR DES COMPTES
l’automatisation s’appuie sur ces comptes, qui depuis 2017 retracent de
manière spécifique les recettes de FCTVA perçues au titre des dépenses de
fonctionnement éligibles. L'automatisation du FCTVA permettra de
connaître la répartition des attributions en fonction des montants imputés
sur les comptes de dépenses, notamment de fonctionnement, éligibles au
FCTVA, dès lors que l'ensemble des bénéficiaires seront entrés dans le
champ de la réforme.
La Cour reconduit donc cette recommandation, qui a vocation à être
mise en
œ
uvre de manière progressive à mesure que le périmètre de
l’automatisation sera étendu.
Projet de recommandation n° 1. Saisir l’opportunité de
l’automatisation de la gestion du FCTVA pour mesurer
l’impact de l’élargissement du périmètre de l’assiette du
FCTVA à certaines dépenses de fonctionnement.
2.4
Une démarche de performance qui ne
correspond pas au périmètre des PSR
Les objectifs et
indicateurs de performance associés aux
prélèvements sur recettes à destination des collectivités territoriales sont
décrits en annexe du projet annuel de performance relatif à la mission
Relations avec les collectivités territoriales
19
.
Ils n’ont pas été modifiés en
2020.
Alors qu’une partie d’entre eux portent sur la DGF, d’autres
objectifs et indicateurs – relatifs à la péréquation horizontale ou au
coefficient d’intégration fiscale – dépassent le cadre des prélèvements sur
recettes.
A contrario
, les PSR autres que la DGF, et en particulier le
FCTVA, ne sont associés à aucun indicateur dans les projets et rapports
annuels de performance.
2.4.1 Des objectifs de performance associés à la DGF
Le premier objectif associé aux PSR à destination des collectivités
vise à « garantir une gestion des dotations adaptée aux contraintes des
19
La loi organique relative aux lois de finances ne prévoit pas l’obligation de fixer aux
prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales des objectifs et des
indicateurs dans des conditions identiques à celles qui s’appliquent aux crédits
budgétaires. Ils ne font donc pas l’objet d’un projet annuel de performance dédié.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
33
collectivités locales ». Deux indicateurs ont été retenus : d’une part, le
nombre, le montant moyen et le volume des rectifications opérées en cours
d’année sur la DGF et le FSRIF et, d’autre part, les dates de communication
de la DGF.
Concernant le premier indicateur, le principal axe de progrès
concernait le second sous-indicateur, le montant moyen des rectifications.
En 2019, celui-ci atteignait 396 000
, soit plus de dix fois l’objectif visé
(moins de 30 000
).
La DGCL souligne que cet indicateur peut parfois être « pollué »
par des phénomènes marginaux ayant un impact sur le résultat final : ainsi,
la non communication à la DGCL d’une seule donnée peut avoir un impact
sur les dotations et fonds perçus par l’ensemble des communes d’un EPCI.
De même, une rectification prise en application d’une décision de justice
peut avoir pour effet de dégrader le résultat d’une année donnée alors même
que le fait générateur se situe plusieurs années auparavant.
Le second indicateur visait à communiquer les dotations (part
forfaitaire et péréquation de la DGF) avant le 31 mars 2020. Cet objectif
n’a pas été atteint, ces dernières ayant été mises en ligne le 6 avril.
Cependant, le contexte de crise sanitaire a conduit à décaler les dates
limites de vote des budgets locaux, limitant de fait la pertinence de cet
indicateur en 2020.
Le second objectif assigné aux PSR vise à « assurer la péréquation
des ressources entre collectivités ». Les indicateurs afférents portent sur les
volumes financiers consacrés à la péréquation verticale, d’une part, et
horizontale, d’autre part.
Le premier indicateur, qui concerne la péréquation verticale, porte
donc à nouveau sur la DGF. La péréquation verticale bénéficie par la loi de
finances d’une dynamique positive puisque celle-ci accroît sa part chaque
année au sein de la DGF. L’indicateur ne fait ainsi que constater
mécaniquement les choix de la représentation nationale : si cette mesure
peut être utile pour orienter le débat public, il ne s’agit donc pas d’un
indicateur de performance, dans la mesure où le niveau atteint ne résulte
pas d’une performance plus ou moins élevée des services de l’État, mais
des montants arrêtés en loi de finances.
En 2019, les résultats pour chacune de ces composantes - 34,09 %
pour les communes et de 17,47 % pour les département - correspondaient
aux cibles.
34
COUR DES COMPTES
2.4.2 Des indicateurs qui dépassent le cadre des PSR et ne
correspondent pas à une mesure de performance
Le second indicateur du deuxième objectif de performance associé
aux PSR porte sur la péréquation horizontale pour les communes, les
départements et les régions.
S’il peut apparaître utile de regrouper les indicateurs de péréquation,
les différents dispositifs de péréquation horizontale ne relèvent pas des
prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et ne
peuvent donc en mesurer la performance.
De même que pour la péréquation verticale, ces indicateurs sont
normalisés, les montants de péréquation étant rapportés à des montants
caractéristiques des recettes des collectivités concernées. Ainsi, le premier
sous-indicateur rapporte le montant de péréquation communale à la somme
des potentiels financiers des communes. Le deuxième sous-indicateur
correspond au rapport entre le montant de péréquation horizontale des
départements et la somme de leurs potentiels financiers. Le dernier sous-
indicateur, relatif à la péréquation horizontale régionale, a été mis en place
à la suite de la création en 2013 d’un fonds national de péréquation des
ressources des régions et de la collectivité territoriale de Corse. Il est
calculé par rapport aux ressources qui ont succédé à la taxe professionnelle
versée aux régions qui constituent l’assiette du fonds.
Les valeurs de ces sous-indicateurs attestent d’un taux de
péréquation horizontale faible et peu significatif. Il s’établissait en 2019 à
1,81 % pour les communes, 1,85 % pour les départements et 2,37 % pour
les régions.
Outre le fait que ces indicateurs ne concernent pas des prélèvements
sur recettes, ils ne mesurent pas non plus une performance des services
puisque leurs valeurs reflètent les montants des fonds de péréquation tels
qu’établis en loi de finances.
Du reste, la Cour réitère l’observation formulée dans sa note
d’exécution budgétaire de l’exercice 2017, partagée par la direction du
budget qui estime, à ce titre, que les indicateurs de performance purement
quantitatifs ne permettent pas réellement d’éclairer le Parlement sur
l’efficacité du dispositif : la mesure de l’impact de la péréquation ne devrait
pas se limiter à son montant annuel total rapporté à la masse de la DGF, au
volume des recettes ou aux potentiels financiers. Elle devrait aussi porter
sur la résorption des écarts de richesse qui est l’objectif poursuivi par ces
dispositifs.
Comme la Cour l’a déjà recommandé dans ses travaux relatifs aux
concours financiers de l’État aux collectivités locales, l’intensification des
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
35
dispositifs de péréquation devrait être soumise à une évaluation plus
systématique de leur efficacité. Le caractère insuffisamment discriminant
de certains dispositifs (que les constats de la Cour contribuent à mettre en
lumière) et les effets de seuil qui en affectent le calcul, ont été largement
documentés ces dernières années.
Dans cette perspective, ainsi que le soulignent la DGCL et la
direction du budget, un nouvel indicateur a été créé en 2021. Il vise à
identifier la part des communes dont le potentiel financer est
significativement rehaussé grâce à l’intervention de la péréquation
verticale. Cet indicateur vise à mesurer plus concrètement l’effet de la
péréquation sur les ressources des communes les plus fragiles, en évaluant
la part de communes dont le potentiel financier par habitant cesse d’être
inférieur à 75 % de la moyenne de la strate après intervention de la
péréquation verticale.
Enfin, le troisième objectif assigné aux PSR au profit des
collectivités territoriales vise à « consolider le développement de
l’intercommunalité ». Il s’agit de « veiller à ce que les groupements à
fiscalité
propre
soient
effectivement
des
acteurs
centraux
du
développement local ».
L’indicateur retenu pour mesurer l’atteinte de cet objectif est le
niveau du coefficient d’intégration fiscal pour les communautés
d’agglomération, d’une part, pour les communautés de communes à
fiscalité professionnelle unique, d’autre part, et pour les communautés de
communes à fiscalité additionnelle, enfin. Les ratios ciblés en 2019 sont
globalement atteints et même dépassés s’agissant des deux premières
catégories d’EPCI. Cet indicateur a été étendu au CIF des métropoles dans
le PAP 2021.
À nouveau, cet indicateur, qui présente une utilité certaine pour le
débat public mais ne porte pas sur les prélèvements sur recette, traduit la
difficulté à élaborer des indicateurs de performance spécifiques alors que
les PSR ne relèvent pas toujours de dépenses pilotables et qu’ils
s’inscrivent dans un cadre plus général de relations financières entre l’État
et les collectivités territoriales.
2.4.3 Une absence d’indicateurs pour les PSR autres que la
DGF
La dotation globale de fonctionnement est le seul prélèvement sur
recettes à destination des collectivités territoriales à faire l’objet d’un
objectif de performance.
36
COUR DES COMPTES
Les autres prélèvements ne sont pas suivis dans ce cadre. C’est en
particulier le cas du FCTVA, qui représente pourtant 6 406 M
de dépenses
en 2020, soit 15 % des prélèvements sur recettes.
Si des ajustements des objectifs et indicateurs de performance ont
été effectués dans le projet annuel de performance 2021, celui-ci ne
comporte toujours pas d’objectif pour les PSR autres que la DGF.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
37
3
LES MOYENS CONSACRÉS PAR
L’ÉTAT AU FINANCEMENT DES
COLLECTIVITES TERRITORIALES
3.1
La poursuite de la progression des transferts
financiers de l’État aux collectivités en 2020
3.1.1 Les PSR ne constituent qu’une partie des transferts de
l’État aux collectivités territoriales
Les prélèvements sur recettes ne représentent qu’une partie des
transferts financiers de l’État aux collectivités territoriale, lesquels
regroupent une grande diversité de dispositifs de financement.
Graphique n° 7 : Transferts de l’État aux collectivités territoriales -
cadre budgétaire
Source : Cour des comptes
D’un point de vue budgétaire, ces transferts relèvent conjointement
de prélèvements sur recettes, de crédits de missions budgétaires dont la
mission
Relations avec les collectivités locales
, des crédits de comptes
spéciaux et de transferts de fiscalité.
38
COUR DES COMPTES
Ces dispositifs font l’objet d’une annexe spécifique aux projets de
loi de finances, intitulée
Transferts de l’État aux collectivités territoriales
,
qui inclut également une présentation des dispositifs de péréquation
horizontale et une annexe dédiée au compte d’avances aux collectivités
territoriales.
Les transferts financiers de l’État aux collectivités territoriales, qui
représentaient
114,4 Md
en 2020, se composent de trois ensembles.
Les concours financiers directs de l’État aux collectivités (43 % des
transferts financiers en 2020), au sein desquels se trouvent les prélèvements
sur recettes de l’État au profit des collectivités territoriales, rassemblent la
totalité des contributions financières spécifiquement destinées aux
collectivités et leurs groupements. Ils abondent leurs budgets de façon
globale et sont libres d’emploi. Les PSR représentent 85 % de ces
concours, le solde étant constitué des crédits du budget général relevant de
la mission
Relations avec les collectivités territoriales
et, depuis 2018, de
la part de TVA versée aux régions.
À ces concours financiers directs, il convient d’ajouter les
subventions des ministères autres que celles de la mission
Relations avec
les collectivités territoriales
, les contreparties de dégrèvements législatifs,
le produit des amendes de police de la circulation et des radars, les
subventions pour travaux divers d’intérêt général pour obtenir le montant
des transferts financiers, hors fiscalité transférée et hors formation
professionnelle
(77,5 Md
). Les dégrèvements représentent désormais près
de 20 % des transferts financiers et sont appelés à devenir de plus en plus
significatifs suite à la réforme de la taxe d’habitation mise en
œ
uvre à
compter de 2018.
Enfin, le total des transferts financiers de l’État aux collectivités
inclut, outre les concours financiers directs, les subventions ministérielles
et les dégrèvements d’impôts locaux, la fiscalité transférée (36,7 Md
) et
le financement budgétaire de la formation professionnelle et de
l’apprentissage (1,2 Md
).
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
39
Schéma n° 1 : décomposition des transferts financiers de l’État aux
collectivités territoriales (AE, PLF 2020)
Source : Direction du budget
20
3.1.2 Des transferts financiers de nouveau en hausse en 2020
Pris dans leur globalité, les transferts financiers de l’État à
destination des collectivités territoriales se sont accrus de
2 Md
en 2020
pour atteindre
114,4 Md
, poursuivant la hausse observée en 2018
(+ 5,8 Md
) et 2019 (+ 5,6 Md
).
20
Transferts financiers aux collectivités territoriales
, annexe au projet de loi de
finances pour 2020.
40
COUR DES COMPTES
Graphique n° 8 : transferts de l’État aux collectivités territoriales
entre 2015 et 2020 (en Md
)
Source : Cour des comptes
Plusieurs facteurs cumulatifs expliquent cette progression, le
principal concernant les contreparties des dégrèvements liés à la
suppression de la taxe d’habitation.
Une progression des concours financiers en partie due aux
mesures exceptionnelles liées à la crise sanitaire
Le montant des concours financiers à destination des collectivités,
qui regroupent les prélèvements sur recettes, la mission
Relations avec les
collectivités territoriales
et la TVA des régions, progresse de 1,04 Md
pour s’établir à 49,63 Md
.
Les prélèvements sur recettes à destination des collectivités
territoriales ont en effet connu une forte progression en 2020 (+ 1,1 Md
,
cf. partie 1.4). Celle-ci résulte principalement de la hausse des dépenses de
FCTVA en fin de cycle électoral (+ 457 M
) ainsi que des PSR
exceptionnels mis en place au titre du soutien aux collectivités face à la
crise. Ces derniers ont conduit à un surplus de dépenses de 668 M
, dont
425 M
à destination d’Ile-de-France Mobilités.
La hausse des concours concerne également la mission
Relations
avec les collectivités territoriales
, dont les dépenses se sont élevées à
4,41 Md
en AE et 3,62 Md
en CP, soit respectivement 565 M
et
178 M
de plus qu’en 2019. Ainsi que développé dans la note d’exécution
budgétaire relative à cette mission, ces hausses sont principalement la
50,5
46,5
43,8
40,3
40,9
42,0
32,1
33,3
35,4
36,1
37,6
36,7
10,9
12,0
11,9
15,7
18,9
22,9
102,3
101,3
101,0
106,8
112,4
114,4
0,0
50,0
100,0
150,0
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Transferts
financiers
Autres transferts
Formation et
apprentissage
Mission RCT
Subventions
ministères
TVA des régions
Contrepartie de
dégrèvements
Fiscalité transférée
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
41
conséquence de la création de la DSIL exceptionnelle dans le cadre du plan
de relance (+ 578 M
AE sur 2020) et d’un concours exceptionnel pour
l’achat de masques dont l’exécution s’élève à 134 M
AE et 129 M
en CP
en 2020.
Les mesures exceptionnelles de soutien de l’État aux collectivités
dans le cadre de la crise ont ainsi concerné les prélèvements sur recettes, la
mission
Relations avec les collectivités territoriales
, mais également le
compte d’avances aux collectivités territoriales
21
(cf. note d’exécution
budgétaire correspondante).
Il est à noter que la progression des concours financiers en 2020
échappe à l’enveloppe normée prévue à l’article 16 de la loi de
programmation des finances publiques pour 2018-2022 (cf. partie 1.1.4).
D’une part, cette norme exclut le FCTVA, d’autre part, les mesures de
soutien exceptionnelles ont été neutralisées dans le calcul de l’enveloppe
normée du budget 2021
22
.
Outre les mesures de relance et de préservation des recettes des
collectivités, la crise de la Covid-19 et les confinements associés ont fait
chuter la consommation et donc le produit de TVA revenant aux régions,
sous le niveau garanti de 4 025 M
23
. Pour la première fois, un versement
complémentaire de 17,9 M
a été réalisé en janvier 2021 pour compenser
les pertes de recettes de 2020.
Hors concours financiers, des transferts en augmentation sous
l’effet de la réforme de la taxe d’habitation
Le principal facteur d’augmentation des transferts financiers aux
collectivités en 2020 est la hausse des contreparties de dégrèvements
consécutive à la suppression progressive de la taxe d’habitation.
Entre 2018 et 2020, l’État s’est progressivement substitué aux
contribuables éligibles – soit 80 % des foyers fiscaux - pour le paiement de
21
La troisième loi de finances rectificative a permis aux départements éligibles de
bénéficier d’avances sur leurs recettes de DMTO. La quatrième loi de finances
rectificative a également créé un dispositif d’avances remboursables destiné à
compenser les pertes de recettes des autorités organisatrices de la mobilité. Ces avances
transitent sur le compte d’avances à divers services de l’État ou organismes gérant des
services publics.
22
Ainsi que le suggère le jaune budgétaire relatifs aux transferts de l’État aux
collectivités annexé au PLF 2021. Du reste, ce même document présente le calcul de la
minoration des variables d’ajustement comme étant établi sur la base des lois de
finances initiales. Or toutes les mesures exceptionnelles de 2020 ont été prises en lois
de finances rectificatives.
23
Article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
42
COUR DES COMPTES
la taxe sur les résidences principales, à hauteur de 30 % en 2018, 65 % en
2019 et 100 % en 2020. Les contreparties de dégrèvements augmentent
ainsi de 4,04 Md
en 2020, après des hausses de 3,81 Md
en 2018 et
3,18 Md
en 2019.
Les subventions des ministères autres que le ministère de l’intérieur
sont en diminution de
262 M
en 2020, malgré des enveloppes budgétaires
initialement supérieures à celles de 2019. Le montant global de ces
subventions, variable d’année en année et difficilement prévisible,
connaissait une tendance à la hausse depuis plusieurs exercices (2,54 Md
en 2015, 3,58 Md
en 2019 puis
3,32 Md
en 2020).
Hors fiscalité transférée et formation professionnelle, les transferts
de l’État sont en hausse de
4,89 Md
en 2020. Cette progression est en
partie compensée par la mise en
œ
uvre de la réforme de l’apprentissage de
2018
24
, qui en modifie les acteurs et le financement, avec pour conséquence
une diminution de 2,02 Md
des transferts en 2020.
Tableau n° 5 : transferts de l’État aux collectivités territoriales entre
2015 et 2020 (en Md
)
en Md
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2020-
2019
PSR (A)
50,53
46,47
43,78
40,33
40,89
42,00
1,11
dont DGF
36,65
33,31
30,88
26,97
26,95
26,84
-0,10
dont FCTVA
5,62
5,22
5,01
5,52
5,95
6,41
0,46
dont allocations compensatrices
1,89
1,64
1,98
2,06
2,36
2,50
0,14
dont mesures de soutien
0,00
0,00
0,00
0,00
0,00
0,58
0,58
dont autres PSR
6,37
6,31
5,91
5,77
5,63
5,67
0,04
Mission RCT (hors crédits TDIL) (B)
2,65
2,73
3,31
3,50
3,40
3,60
0,20
TVA des régions (C)
0,00
0,00
0,00
4,20
4,29
4,03
-0,27
Concours financiers (D=A+B+C)
53,18
49,19
47,09
48,03
48,58
49,63
1,04
Subventions d’autres ministères (E)
2,54
3,15
2,85
3,11
3,58
3,32
-0,26
Subventions TDIL (F)
0,10
0,09
0,08
0,07
0,04
0,02
-0,02
Contrepartie de dégrèvements (G)
10,91
12,00
11,90
15,71
18,89
22,93
4,04
Produits amendes (H)
0,64
0,64
0,67
0,69
0,57
0,66
0,08
24
Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir
professionnel.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
43
Transferts financiers de l'État hors
fiscalité transférée et formation
professionnelle (I=D+E+F+G+H)
67,36
65,07
62,59
67,60
71,66
76,55
4,89
Fiscalité transférée (hors formation
professionnelle et apprentissage) (J)
32,06
33,32
35,38
36,08
37,55
36,71
-0,84
Financement formation
professionnelle et de l'apprentissage
(K)
2,84
2,93
3,08
3,15
3,19
1,16
-2,02
Total
des
transferts
financiers
(I+J+K)
102,26
101,31
101,04
106,83
112,40
114,42
2,02
Source : Cour des comptes
3.2
Les prélèvements sur recettes : un dispositif
dérogatoire à reconsidérer
Prévus par l’article 6 de la loi organique relative aux lois de finances,
les prélèvements sur recettes constituent une technique budgétaire
particulière, qui consiste à présenter en loi de finances certaines opérations
comme des moindres recettes de l’État, et non comme des dépenses. Ils ne
font donc pas l’objet de crédits budgétaires. Ce dispositif contribue à la
fragmentation des flux financiers entre administrations publiques et
mériterait dès lors d’être reconsidéré.
Dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire des PSR au profit
des collectivités territoriales relative au budget 2019, la Cour rappelait les
conditions dans lesquelles la loi organique relative aux lois de finances
(LOLF) du 1
er
août 2001 avait introduit le dispositif de prélèvements sur
recettes, malgré les critiques formulées dès les années 1970 par la Cour, et
avis négatif du Conseil d’État formulé sur ce point en décembre 2000.
N’étant ni des recettes, ni des dépenses, les prélèvements sur recettes
se situent dans un « entre-deux ». Les règles juridiques et les procédures
qui les encadrent ne sont pas précisées, ce qui fragilise leur
comptabilisation. À titre d’exemple, le décret sur la gestion budgétaire et
publique de 2012 ne précise pas quelles règles leur sont applicables. Ils
échappent ainsi aux règles relatives à la mesure de la performance, à la
justification au premier euro, à la régulation budgétaire et à la norme de
dépenses pilotables.
Les PSR au profit des collectivités territoriales regroupaient par
ailleurs 25 dotations en 2020, pour des montants allant de quelques
44
COUR DES COMPTES
millions d’euros à près de 27 M
pour la DGF. Cette dispersion extrême
des montants se double de règles de calcul très différentes, qui posent des
questions de lisibilité au sein même de la catégorie des prélèvements sur
recettes de l’État, chacune de ces dotations ayant un objet bien spécifique.
Dans le prolongement des notes d’analyse de l’exécution budgétaire
et des recommandations de la Cour formulées dans son référé précité
du 11 juin 2015 relatif à la gestion des concours financiers de l’État et des
engagements pris par le Premier ministre dans sa réponse du 17 août 2015,
les propositions de simplification et de fiabilisation de l'exécution des PSR
n’ont toujours pas donné lieu à un texte de nature réglementaire dans lequel
seraient mieux décrites les règles qui s'appliquent actuellement à
l'exécution budgétaire et comptable de ces prélèvements.
Dans sa note d’exécution budgétaire de 2019, la Cour recommandait
de supprimer les prélèvements sur recettes d’un faible montant et attribués
à un nombre restreint de collectivités territoriales en inscrivant, le cas
échéant, les crédits correspondants dans une mission existante du budget
de l’État. Cette recommandation visait en particulier les prélèvements sur
recettes n’ayant aucun caractère « global et automatique » pour reprendre
les termes issus de la doctrine du Conseil d’État
25
.
La direction du budget partage l’analyse de la Cour des Comptes
selon laquelle l’architecture actuelle des concours financiers de l’État aux
collectivités territoriales, en particulier en ce qui concerne la distinction
entre PSR et dotations budgétaires, pourrait être simplifiée, dans un
contexte de hausse tendancielle du nombre de PSR.
La direction du budget indique que si le montant et le nombre
restreint de bénéficiaires pourraient constituer l’un des critères pertinents
pour cette rationalisation, le caractère pilotable de la dépense pourrait
également être envisagé. Elle rappelle enfin qu’il appartient le cas échéant,
au seul législateur de procéder à d’éventuels ajustements, un PSR ne
pouvant être créé ou supprimé que par la loi.
La DGCL considère que les PSR présentent, pour la majorité d’entre
eux, des différences significatives avec les missions du budget général et
que leur disparition n’est pas souhaitable. Se référant aux termes de l’article
6 de la LOLF, elle indique que certains couvrent des charges confiées aux
collectivités par la loi, et un grand nombre compensent des exonérations,
des réductions ou des plafonnements d’impôts établis au profit des
collectivités, et diffèrent en cela des dépenses inscrites sur le budget
général de l’État.
25
Voir
supra
.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
45
Dès lors, la DGCL estime que si un travail pourrait être mené pour
distinguer, PSR par PSR, s’ils répondent bien à ces conditions, la définition
actuelle telle que posée par l'article 6 de la LOLF permet d'offrir un critère
pertinent.
Si la recommandation de 2019 n’a pas été mise en
œ
uvre, ces
réponses suggèrent des critères alternatifs qui pourraient être pris en
compte pour une simplification de l’architecture budgétaire encadrant les
relations financières entre l’État et les collectivités territoriales.
Une simplification fondée sur l’application stricte des critères de
l’article 6 de la LOLF
26
pourrait d’ailleurs avoir une incidence
conséquente, dans la mesure où il n’est pas établi que la DGF et le FCTVA
relèvent de cette définition.
La recommandation pourrait dès lors être réitérée et reformulée pour
proposer de supprimer les PSR qui ne relèveraient pas d’une application
stricte des critères de l’article 6 de la LOLF, ou qui ne présenteraient pas
un caractère global et automatique, en référence à la doctrine du Conseil
d’Etat.
Projet de recommandation n° 2. (reformulée)
Dans
l’attente d’une modification de la LOLF, supprimer les
prélèvements sur recettes qui ne correspondraient pas à
une application stricte des critères de l’article 6 de la
LOLF, ou qui ne présenteraient pas un caractère global
et automatique, en inscrivant les crédits correspondants
dans une mission existante du budget de l’État.
3.3
La nécessité d’une vision globale des modalités
de financement des collectivités territoriales
La simplification proposée concernant les prélèvements sur recettes
pourrait s’inscrire dans un cadre plus général de clarification des relations
financières entre État et collectivités. Dans un récent rapport consacré au
26
Il est à noter que l’article 6 de la LOLF ouvre la possibilité de prélèvements sur
recettes lorsque certaines conditions sont réunies, sans pour autant faire de cette
possibilité une obligation. À ce titre, il est à noter que les compensations de
dégrèvements sont inscrites dans une mission budgétaire et non dans un PSR.
46
COUR DES COMPTES
cadre organique et à la gouvernance des finances publiques
27
, la Cour
soulignait la fragmentation marquée des finances publiques nationales,
source de liens financiers croisés et croissants entre administrations
publiques, préjudiciables à l’appréhension et au contrôle par les
parlementaires et les citoyens des moyens alloués à une politique publique.
La direction du budget partage le constat de la Cour du
morcellement des transferts financiers aux collectivités locales. La DGCL,
qui renvoie, dans
sa réponse, à ce rapport sur la gouvernance des finances
publiques, estime également que les conditions d’examen actuelles de la
loi de financement ne favorisent pas une vision consolidée des enjeux
financiers liés aux collectivités locales, et qu’une organisation nouvelle du
débat parlementaire pourrait permettre de mieux appréhender l’ensemble
des enjeux relatifs aux financiers locales.
Comme le recommande le rapport précédemment cité, à cadre
constitutionnel constant, il serait possible de regrouper l’ensemble des
transferts financiers de l’État au bénéfice des collectivités territoriales au
sein d’une nouvelle mission budgétaire conservant le nom de l’actuelle
mission
Relations avec les collectivités territoriales
. Cette mission, qui
inclurait notamment les prélèvements sur recettes destinés aux collectivités
territoriales, permettrait de clarifier les modalités de financement des
collectivités territoriales et répondrait par ailleurs à l’objectif d’une
présentation de l’ensemble des moyens consacrés par l’État aux politiques
publiques.
27
Cour des comptes,
Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et
de la gouvernance
. La Documentation française, novembre 2020, 159 p., disponible sur
www.ccomptes.fr.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS
TERRITORIALES
47
Graphique n° 9 : simulation d’une nouvelle mission Relations avec
les collectivités territoriales
Source : Cour des comptes
28
Au sein de cette nouvelle mission, la répartition des moyens entre
les différents instruments juridiques (dotations budgétaires et prélèvements
sur recettes) pourrait évoluer avec le temps, dans le sens d’une
rationalisation du financement des collectivités territoriales. À titre
d’illustration, le regroupement des différents fonds de soutien aux
investissements locaux pourrait être envisagé au sein d’un programme de
crédits d’investissement.
28
Cour des comptes,
Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et
de la gouvernance
. La Documentation française, novembre 2020, 159 p., disponible sur
www.ccomptes.fr.
48
COUR DES COMPTES
Annexe n° 1 : liste des publications récentes de la Cour des
comptes en lien avec les politiques publiques concernées
par la NEB
Cour des comptes,
Rapport sur la situation et les perspectives des finances
publiques locales et de leurs établissements publics, fascicule 1
. La
Documentation
française,
juin
2020,
190
p.,
disponible
sur
www.ccomptes.fr.
Cour des comptes,
Rapport sur la situation et les perspectives des finances
publiques locales et de leurs établissements publics, fascicule 2
. La
Documentation française, décembre 2020, 118 p., disponible sur
www.ccomptes.fr.
Cour des comptes,
Les finances publiques : pour une réforme du cadre
organique et de la gouvernance
. La Documentation française, novembre
2020, 159 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES49
Annexe n° 2 : suivi des recommandations formulées au titre de l’exécution budgétaire 2019
Recommandation formulée au
sein de la note d’exécution
budgétaire 2019
Réponse de l’administration
Analyse de la Cour
Appréciation par
la Cour du degré
de mise en
œ
uvre*
1
Dans l’attente d’une modification
de la LOLF, supprimer les
prélèvements sur recettes d’un
faible montant et attribués à un
nombre restreint de collectivités
territoriales en inscrivant, le cas
échéant, les crédits correspondants
dans une mission existante du
budget de l’État
Réponse de la DB
La direction du Budget partage l’analyse de la Cour des Comptes
selon laquelle l’architecture actuelle des concours financiers de
l’État aux collectivités territoriales, en particulier en ce qui
concerne la distinction entre PSR et dotations budgétaires,
pourrait être simplifiée, dans un contexte de hausse tendancielle
du nombre de PSR. Le critère proposé par la Cour (faible montant
et nombre restreint de bénéficiaires) apparaît comme l'un des
critères pertinents qui pourrait présider, le cas échéant, à une
rationalisation des PSR.
Il convient toutefois de souligner que le cadre juridique applicable,
tel qu’il résulte en particulier de l’article 6 de la LOLF et de la
jurisprudence du Conseil constitutionnel, est pleinement respecté
par l’architecture actuelle. Il appartient, le cas échéant, au seul
législateur de procéder à d’éventuels ajustements, un PSR ne
pouvant être créé ou supprimé que par la loi.
Dans un rapport récent consacré à la
gouvernance des finances publiques, la Cour
recommandait de supprimer les PSR et de
regrouper les transferts financiers de l’État
à destination des collectivités territoriales
dans une mission unique.
Il est donc proposé de réitérer et reformuler
la
recommandation
portant
sur
une
suppression des PSR, sans attendre une
modification de la LOLF, en se fondant sur
un recensement de ces prélèvements et une
analyse de leur adéquation avec les termes
de l’article 6 de la LOLF.
Non mise en
œ
uvre
50
COUR DES COMPTES
La direction du Budget rappelle par ailleurs que la transformation
en dotation budgétaire d'un PSR n'a qu'un faible impact sur le
caractère pilotable ou rigide de la dépense (une dotation de
compensation constitutionnellement due n’est pas davantage
pilotable sous forme de dotation budgétaire que sous forme de
PSR). À cet égard, le caractère pilotable de la dépense peut
constituer une summa divisio plus pertinente que la distinction
PSR/dotation.
Réponse de la DGCL
Les PSR présentent bien, en tout cas pour la majorité d’entre eux,
des différences significatives avec les missions du budget général.
Aux termes de l’article 6 de la LOLF, des recettes peuvent être
rétrocédées aux collectivités soit pour couvrir des charges leur
incombant, soit pour compenser des exonérations, des réductions
ou des plafonnements d’impôts établis à leur profit. Ainsi:
- Certains PSR couvrent des charges confiées aux collectivités par
la loi et qui ne peuvent donc plus s'analyser comme charges de
l'État ;
- Un grand nombre de PSR compensent des exonérations, des
réductions ou des plafonnements d’impôts établis au profit des
collectivités, et diffèrent donc largement des dépenses inscrites sur
le budget général de l’État.
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES51
Par ailleurs, la LOLF et la jurisprudence sont strictes à la fois pour
encadrer les conditions de création d'un PSR (cf. décision 2019-
784 DC).
Dès lors, si un travail pourrait être mené pour distinguer, dotation
par dotation et PSR par PSR s'ils répondent bien à ces conditions
(la question de leur montant étant, à cet égard, relativement
indifférente), la définition actuelle telle que posée par l'article 6 de
la LOLF permet d'offrir un cadre pertinent.
Un travail spécifique a par ailleurs été mené en 2020 pour mieux
mesurer la performance de certains indicateurs de performance
des PSR. Il pourra être poursuivi en 2021.
2
Saisir l’opportunité de
l’automatisation de la gestion du
FCTVA pour mesurer l’impact de
l’élargissement du périmètre de
l’assiette du FCTVA à certaines
dépenses de fonctionnement.
Réponse de la DB
La DB soutient la recommandation de la Cour sur la mesure de
l'impact de l'élargissement du FCTVA aux dépenses de
fonctionnement; Elle sollicite en ce sens la DGFiP chaque année
depuis 2018 soit l'année de montée en charge des dépenses de
fonctionnement éligibles au FCTVA à savoir les dépenses de
bâtiments publics et de voirie depuis le 1er janvier 2016). Pour
2019, l'estimation du FCTVA en fonctionnement s'élevait à
229 M
. Toutefois, la LFI 2020 a élargi le FCTVA aux dépenses de
fonctionnement d'entretien des réseaux qui devraient monter en
charge jusqu'en 2022 compte tenu des régimes de versement. De
plus en 2020, la LFR 3 a élargi l'assiette du FCTVA aux dépenses
de fonctionnement des services informatiques en nuage (cloud)
Il
est
proposé
de
renouveler
cette
recommandation qui aura vocation à être
mise
en
œ
uvre
conjointement
à
l’automatisation progressive du FCTVA à
compter du 1
er
janvier 2021.
Non mise en
œ
uvre
52
COUR DES COMPTES
avec un taux spécifique de 5,6 % à compter du 1er janvier 2021.
Ainsi, la totalité de ces dépenses seront incluses dans le dispositif à
compter de l'année 2023.
Réponse de la DGCL :
L'article 251 de la loi de finances pour 2021 a acté l'entrée en
vigueur de l'automatisation du FCTVA au 1er janvier 2021. Ainsi
les dépenses exécutées par l'ensemble des bénéficiaires à compter
du 1er janvier 2021 entreront dans le champ de l'automatisation.
Cependant cela implique une entrée progressive des bénéficiaires
du FCTVA, en fonction de leur régime de versement. En 2021 seuls
les bénéficiaires relevant du régime de versement en année N vont
être concernés soit entre 10 à 15 % des montant de FCTVA versés.
Seront ensuite également intégrés en 2022 les bénéficiaires du
régime de versement en N+1 puis en 2023 l'ensemble des
bénéficiaires. Par conséquent dans le cadre cette période
transitoire l'automatisation ne pourra qu'apporter des réponses
partielles
probablement
marquées
par
la
typologie
des
bénéficiaires entrés dans le champ de la réforme. Néanmoins, elle
permettra à terme de renforcer la prévision, la gestion ainsi que
l’anticipation de l'exécution budgétaire du FCTVA. En effet,
l'automatisation du FCTVA permet de fonder les attributions du
FCTVA à partir d'une assiette de comptes éligibles et non plus sur
une logique d'examen individuel des dossiers, à l'aune de critères
PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES AU PROFIT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES53
définis par des dispositions législatives et réglementaires. Le
dispositif actuel ne permet pas notamment de connaître la
répartition des attributions selon les dépenses imputées dans les
comptes par nature des collectivités locales mais permet seulement
de connaître la répartition entre fonctionnement et investissement,
notamment par la création de comptes spécifiques de recettes de
FCTVA en fonctionnement, correspondant aux dépenses rendues
éligibles par les articles 34 et 35 de la loi de finances pour 2016.
Ainsi, à partir des comptes des collectivités locales, il est possible
d’identifier pour les bénéficiaires du FCTVA et pour l’État le
montant des attributions au FCTVA sur le périmètre des dépenses
de fonctionnement éligibles. En effet, des comptes spécifiques ont
été créés dans les instructions budgétaires et comptables au 1er
janvier 2017 pour retracer ces recettes de FCTVA perçues au titre
des dépenses de fonctionnement éligibles : « 744 » pour les
instructions M14, M52, M57, M61, M831 et M832 et « 7581 » pour
l'instruction M4. Ainsi, l'automatisation du FCTVA permettra de
connaître la répartition des attributions en fonction des montants
imputés
sur
les
comptes
de
dépenses,
notamment
de
fonctionnement, éligibles au FCTVA, dès lors que l'ensemble des
bénéficiaires seront entrés dans le champ de la réforme.
* Totalement mise en
œ
uvre, mise en
œ
uvre incomplète, mise en
œ
uvre en cours, non mise en
œ
uvre, refus, devenue sans objet
54
COUR DES COMPTES