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REPUBLIQUE FRANÇAISE
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Lycée de Bellevue de Fort-de-France
Exercices 2013 à 2015
Agence comptable : Lycée de Bellevue
Jugement n° 2019-0016
Séance plénière et publique du 10 décembre 2019
Prononcé le 27 décembre 2019
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS,
LA CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES DE LA MARTINIQUE,
Vu
,
le code des juridictions financières ;
Vu
,
le code général des collectivités territoriales ;
Vu
,
le code de l
éducation ;
Vu
, l
article 60 de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 portant loi de finances pour 1963
modifiée, notamment, par l
article 90 de la loi de finances rectificative
n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;
Vu
, le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et
comptable publique ;
Vu
, le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du VI de
l
article 60 de la loi de finances pour 1963 modifiée ;
Vu
,
les lois et règlements relatifs à l
organisation, à la gestion et à la comptabilité des
établissements locaux d
enseignement ;
Vu
,
les comptes rendus par Mme Z, en sa qualité de comptable du lycée Bellevue de
Fort-de-France, du 9 novembre 2011 au 31 décembre 2015 ;
Vu
,
le réquisitoire n° 2019-09 du 26 juin 2019 de M. Fabrice LANDAIS, procureur
financier, saisissant la chambre à fin d
instruction sur des faits susceptibles
d
engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme Z ;
Vu
,
la décision n° 13/2019 du 26 juin 2019 du président de la chambre régionale des
comptes attribuant à M. Serge MOGUÉROU, président de section, l
instruction du
jugement des comptes financiers du lycée Bellevue ;
Vu
,
la notification du réquisitoire et de cette décision d
attribution d
instance à Mme Z
par lettre recommandée du 4 juillet 2019 (accusé de réception du 9 juillet 2019) ;
2
Vu
,
la notification du réquisitoire et de la décision d
attribution d
instance au proviseur
du lycée Bellevue de Fort-de-France, par lettre du 3 juillet 2019 dont il a été accusé
réception le 8 juillet 2019 ;
Vu
, les lettres d
instruction, accompagnées d
un questionnaire, adressées par le
rapporteur, le 4 juillet 2019, au chef d
établissement et à Mme Z, les invitant à faire
part de leurs observations et à produire toutes les pièces utiles complémentaires ;
Vu
,
la lettre du rapporteur, en date du 4 juillet 2019, invitant le directeur régional des
finances publiques de la Martinique à communiquer le montant des garanties
constituées par la comptable sur la période en jugement ;
Vu
, l
absence de réponse du proviseur ;
Vu
, les réponses de Mme Z, par lettre du 19 juillet 2019 enregistrée au greffe
le 20 juillet 2019 ;
Vu
,
la notification, le 25 novembre 2019, de la date de la séance publique à Mme Z et
au proviseur du lycée de Bellevue ;
Vu
,
le courrier transmis par Mme Z en date du 9 décembre 2019 enregistré au greffe le
même jour ;
Vu
, l
ensemble des pièces du dossier ;
Vu
, les
conclusions
n° 2019-083-CJU-048
du
procureur
financier
en
date
du 19 novembre 2019 ;
Après avoir entendu, lors de l
audience publique, M. René PARTOUCHE, en
remplacement de M. Serge MOGUÉROU, rapporteur initial du rapport d
évocation, et
M. Fabrice LANDAIS, procureur financier, en ses observations ;
En l
absence des parties ;
Première charge : Paiements imputés au compte 6245
« Voyages
Etudes
Visites
- Sorties »
Attendu
que le réquisitoire n° 2019-09 du 26 juin 2019 susvisé a retenu que Mme Z est
susceptible d
avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire pour avoir manqué
aux obligations qui lui incombent en matière de contrôle de la validité de la dette,
s
agissant de l
exactitude de la liquidation, de l
intervention des contrôles préalables
prescrits par la réglementation et de la production des pièces justificatives, dans la mesure
où elle a payé des dépenses relatives à des transports aériens aux agences de voyages
Sélectour et AVS Voyages en l
absence de contrats écrits, d
indication du taux de TVA
applicable, de référence à la délibération autorisant la passation de marchés et d
indication
du prix du marché ;
Attendu
que les informations relatives à ces paiements sont récapitulées dans le tableau
ci-après :
3
Mandatement des voyages scolaires 2015-2016
Mandat
Date
Montant
HT
Montant
TTC
Créancier
Objet
Pièce justificative
57
25/02/2015
15 372,80
15 372,80
AVS Voyages
Transport aérien (Suisse)
Facture du 27/01/2015
82
10/03/2015
16 120,00
16 120,00
Sélectour
Transport aérien (Bruxelles)
Facture du 10/03/2015
145
07/04/2015
22 810,00
22 810,00
AVS Voyages
Transport aérien (New-York) Facture du 20/03/2015
382
03/09/2015
20 895,00
20 895,00
AVS Voyages
Transport aérien (Italie)
Facture du 02/09/2015
Total
75 197,80
75 197,80
Sur l
existence d
un manquement
Sur l
absence d
indication du taux de TVA applicable
Attendu
que le réquisitoire a retenu que la comptable a pris en charge et réglé les mandats
précités sans tenir compte de l
absence de montant et de taux de TVA sur les factures
transmises ; que l
article C de l
annexe I des pièces justificatives précise :
« Aucun
formalisme autre que celui prévu par le code général des impôts n
est exigé pour les
factures ou les mémoires à titre de pièce justificative. Il suffit que les mentions suivantes
y figurent explicitement :
[…] 6. Le montant et le taux de taxe sur la valeur ajoutée
légalement applicable ou, le cas échéant, le bénéfice d
une exonération »
;
Attendu
que Mme Z a produit une édition de l
article 262 du code général des impôts qui
prévoit que
» sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée les transports aériens ou
maritimes de voyageurs en provenance ou à destination de l
étranger ou des collectivités
et départements d
outre-mer »
, ainsi qu
un extrait du bulletin officiel des finances
publiques-impôts précisant
« qu
il est admis que les factures émises par les agences de
voyages et les organisateurs de circuits touristiques ou en leur nom et pour leur compte,
remises à des clients assujettis ne mentionnent pas directement la TVA afférente aux
opérations du régime spécifique »
;
Attendu
que, même si les factures doivent comporter la mention relative à la TVA ou de
son exonération, l
absence de mention pour une facture à destination d
un organisme qui
ne reverse pas de TVA ne remet pas en cause l
exactitude des calculs de liquidation ;
qu
ainsi, la responsabilité de l
agent comptable ne peut être engagée pour ce motif ;
Sur l
absence de contrat écrit prévu par la nomenclature des pièces justificatives
En ce qui concerne le mandat n° 82 émis au profit de la société Sélectour
Attendu
que Mme Z a payé, par mandat n° 82, du 10 mars 2015, une facture de 16 120
à l
agence Sélectour au titre d
un voyage à Bruxelles du 22 mars au 2 avril 2015 alors
qu
elle ne disposait pas de contrat écrit prévu par les dispositions de l
article 11 du code
des marchés publics et de la nomenclature des pièces justificatives ;
Attendu
que, selon l
article 11 du code des marchés publics, dans sa rédaction issue du
décret n° 2011-1853 du 9 décembre 2011,
« Les marchés et accords-cadres d
un montant
égal ou supérieur à 15 000
HT sont passés sous forme écrite [
]
» ;
4
Attendu
que la comptable précise que
« Le devis de la société SELECTOUR a été établi
le 4 mars 2015 pour un départ le 23 mars 2015. Il n
était plus possible dans ces délais
de faire voter l
autorisation de signer un contrat écrit par le conseil d
administration, la
date limite d
option étant fixé par l
agence au 6 mars 2015 »
;
Attendu
que l
établissement a contracté avec Sélectour alors que le marché n° 2014.003
signé avec AVS Voyages pour des prestations similaires était alors en vigueur,
contrevenant ainsi aux dispositions de l
article 77 du code des marchés publics qui prévoit
que
« III. - Pour des besoins occasionnels de faible montant, le pouvoir adjudicateur peut
s
adresser à un prestataire autre que le ou les titulaires du marché, pour autant que le
montant cumulé de tels achats ne dépasse pas 1 % du montant total du marché, ni la
somme de 10 000 euros HT. Le recours à cette possibilité ne dispense pas le pouvoir
adjudicateur de respecter son engagement de passer des commandes à hauteur du
montant minimum du marché lorsque celui-ci est prévu »
;
Attendu
que la facture de Sélectour excédait ce seuil ; qu
ainsi, en l
absence de
proposition financière clairement définies, Mme Z n
a pas pu effectuer l
intégralité des
contrôles de la liquidation auxquels elle était tenue ;
Attendu,
cependant, que Mme Z a produit un certificat administratif signé du proviseur
le 10 mars 2015, soit à la même date que le mandat de paiement litigieux ; que ce certificat
est ainsi rédigé :
« Je, soussigné Chantal DAUX, proviseur du Lycée de Bellevue, atteste
qu
il n
existe pas de contrat écrit de passation de marché entre le Lycée de Bellevue et la
Société Fléchon pour la fourniture de billets d
avion et de prestations associées pour
l
exercice 2015 »
;
Attendu
que la production d
un certificat administratif de l
ordonnateur pour attester de
l’existence d’un contrat non
écrit pour les marchés supérieurs au seuil fixé par l
article
11 du code des marchés publics dégage la responsabilité personnelle et pécuniaire du
comptable public ; que, par conséquent, la responsabilité personnelle et pécuniaire de
Mme Z ne peut pas être engagée pour le paiement du mandat n° 82 en l
absence de contrat
écrit ;
En ce qui concerne les mandats n° 57 et 145 émis au profit de la société AVS
Attendu
que le procureur financier a relevé que Mme Z a payé à la société AVS, le
25 février 2015 et le 7 avril 2015, respectivement, les mandats n° 57 et n° 145 se
rapportant aux voyages en Suisse (du 10 au 15 janvier 2015) et à New York et Boston (du
7 avril 2015 au 16 avril 2015) alors que l
acte d
engagement, signé le 3 juin 2014 par
l
ordonnateur avec le prestataire et ayant pour objet
« Marché des voyages scolaires et
missions »
pour la période du 1
er
septembre 2014 au 30 juin 2015, ne mentionne pas le
montant du marché et renvoie à des annexes financières non produites ;
Attendu
que, pour l
’année scolaire
2014-2015, par acte administratif n° 2014.04.10.13
du 10 avril 2014,
le conseil d’administration a autorisé
le chef d
’établissement à passer
un marché de voyages et de prestations de service pour un an à partir du
1
er
septembre 2014 ; que cet acte du conseil d
administration a invité le directeur à
engager la procédure en vue de la conclusion de ce marché mais ne lui a pas donné le
pouvoir de le signer ;
Attendu
que cette délibération de principe n’est pas
requise par les textes et qu’elle ne
peut pas se substituer à celle nécessaire pour que l’autorité exécutive signe ledit marché
;
5
que, seule, la délibération autorisant l’exécutif à signer le marché est obligatoire
; que
celle-ci
doit approuver l’acte d’engagement tel qu’il sera signé, lequel mentionne,
notamment, l’identité des parties contractantes et le montant des prestations
;
Attendu,
par ailleurs, que le rapport de présentation du marché conclu par le lycée avec
la société AVS précise qu
’il es
t passé selon la procédure adaptée visée à l
article 28 du
code des marchés publics (MAPA) et qu
il s
agit d
un
« marché fractionné selon la
formule dite « à bons de commande »
; que le paragraphe A de l
annexe G de l
article
D. 1617-19 prévoit, pour les marchés passés par référence à l
article 28 du code des
marchés publics, les mentions suivantes : l
identification des parties contractantes, la
référence à la délibération autorisant la personne publique à passer le marché, la définition
de l
objet du marché et le prix ou modalités de sa détermination ;
Attendu
qu
une délibération spécifique devait donc intervenir pour autoriser le chef
d
établissement à signer le marché avec la société AVS pour l
année scolaire 2014-2015 ;
que cet acte n
a pas été produit
et que l’acte d’engagement du marché n’en fait pas
mention ; que, p
ar conséquent, le chef d’établissement ne disposait pas de l’autorisation
pour signer l
acte d
engagement du marché ;
Attendu
que l
acte d
engagement renvoie à des annexes financières non jointes aux
mandats ; que la comptable a produit les annexes manquantes ainsi que plusieurs pièces
relatives à la passation et à l
attribution du marché (PV de la commission d
appel d
offre,
rapports de présentation, lettre d
attribution) mais que les annexes financières qui
présentent dans un tableau les prestations offertes par la société, notamment les
pourcentages de remises accordées, le montant des commissions sur chaque catégorie de
billetterie (aérienne nationale et internationale, ferroviaire nationale et étranger) ne sont
pas suffisantes pour la détermination du prix des prestations justifiant les mandats n° 57
et 145 ;
Attendu
q
u’
aux termes du paragraphe I de l
article 60-I de la loi n° 63-156
« les
comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles
qu’ils sont tenus d’assurer en matière […] de dépenses […] dans les conditions prévues
par le règlement général de la comptabilité publique. La responsabilité personnelle et
pécuniaire prévue ci-
dessus se trouve engagée dès lors […] qu’une dépense a été
irrégulièrement payée […]
»
;
Attendu
qu
en application, des articles 19 et 20 du décret n° 2012-1246 du
7 novembre 2012, il en est ainsi lorsqu
’un
comptable effectue un paiement sans vérifier
la liquidation de la créance et sa conformité à un contrat écrit qui doit la fonder, sans
vérifier l’existence de l’autorisation habilitant à le signer l’auteur de l’acte présenté à
l’appui du paiement
;
Attendu
qu
en vertu des dispositions susmentionnées, Mme Z n
a pas réalisé les
contrôles que lui imposent la réglementation ;
qu’en
prenant en charge et en payant les
mandats n° 57 et 145 sans disposer des pièces justificatives suffisantes pour pouvoir
vérifier
l’habilitation du sign
ataire du marché et
l’exactitude de la liquidation de la
dépense, Mme Z a manqué à ses obligations et a engagé sa responsabilité personnelle et
pécuniaire en vertu de l
article 60-I précité ;
Attendu
qu
il ne pourrait en être autrement que si la comptable pouvait exciper des
circonstances de force majeure ;
6
Attendu
que Mme Z n
a pas fait valoir de circonstances de force majeure mais de
dysfonctionnements internes au poste comptable qui pourront être admis, le cas échéant,
à l
appui d
une demande de remise gracieuse, en cas de débet ;
En ce qui concerne le mandat n° 382 émis au profit de la société AVS
Attendu
que le réquisitoire a retenu les mêmes manquements, s
agissant du mandat
n° 382 du 3 septembre 2015 relatif au voyage en Italie qui s
est déroulé du
29 septembre 2015 au 9 octobre 2015 ; que ce mandat
, d’un montant de 20
895
€,
se
rattache à un acte d
engagement signé le 3 juillet 2015 par l
ordonnateur avec la société
AVS et ayant pour objet
« Marché des voyages scolaires et missions »
pour l
année
scolaire 2015-2016 ;
Attendu
que la comptable a produit, à l’appui du mandat, une délibération du conseil
d’administration du lycée en date du 3 mars 2015, rendue exécutoire le 4
mars 2015,
approuvant le voyage, une facture
pro forma
du 20 avril 2015 d’un mo
ntant de 20 895
revêtue du
« bon pour accord »
et de la signature du proviseur, et la facture du même
montant ;
Attendu
que
, pour l’année scolaire 2015
-2016, par acte administratif n° 2015-07-07-04
du 7 juillet 2015, le conseil d
administration a autorisé le chef d
établissement à signer
un MAPA de prestations
« Voyages et missions »
avec la société AVS Voyages pour une
durée d
un an à compter du 1
er
septembre 2015 ; que cette délibération ne prévoit pas de
montant ;
Attendu
que l
engagement du marché avec la société AVS a été signé par l
ordonnateur
le 3 juillet 2015,
c’est
-à-dire antérieurement à la délibération
du conseil d’administration
du 7 juillet 2015 ; que la délibération a été transmise à l
autorité académique le
9 juillet 2015 ;
qu’elle
a acquis le caractère exécutoire le 23 juillet 2015 ;
Attendu
qu
’en dépit du caractère exécutoire de la délibération autorisant la passation du
marché au moment du paiement, l’acte d’engagement ne fait aucune référence à cette
délibération,
en méconnaissance des dispositions du paragraphe A de l’annexe G de la
nomenclature des pièces justificatives précitée ;
que, dès lors, la comptable n’était pas en
mesure de vérifier la validité de la signature de ce marché par l’ordonnateur
;
Attendu
que le rapport de présentation du marché conclu par le lycée avec la société AVS
précise qu
’il es
t passé selon la procédure adaptée visée à l
article 28 du code des marchés
publics (MAPA) et qu
il s
agit d
un
« marché fractionné selon la formule dite « à bons
de commande »
;
Attendu
que l’
acte d
engagement renvoie à des annexes financières non jointes aux
mandats ; que la comptable a produit les annexes manquantes ainsi que plusieurs pièces
relatives à la passation et à l
attribution du marché (PV de la commission d
appel d
offres,
rapports de présentation, lettre d
attribution) mais que les annexes financières qui
présentent dans un tableau les prestations offertes par la société, notamment les
pourcentages de remises accordées, le montant des commissions sur chaque catégorie de
billetterie (aérienne nationale et internationale, ferroviaire nationale et étranger) ne sont
pas suffisantes pour la détermination du prix des prestations justifiant le mandat n° 382 ;
Attendu
que les comptables publics sont tenus de s
assurer de la régularité extrinsèque
des justifications produites en application de l
article D. 1617-19 du CGCT ; que cette
7
obligation doit les amener à s
assurer de la compétence de l
auteur de l
acte présenté à
titre de pièce justificative ;
Attendu
q
u’
aux termes du paragraphe I de l
article 60-I de la loi n° 63-156
« les
comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles
qu
ils sont tenus d
’assurer en matière […] de dépenses […] dans les conditions prévues
par le règlement général de la comptabilité publique. La responsabilité personnelle et
pécuniaire prévue ci-
dessus se trouve engagée dès lors […] qu’
une dépense a été
irrégulièrement payée […]
»
;
Attendu
qu
en application, des articles 19 et 20 du décret n° 2012-1246 du
7 novembre 2012, il en est ainsi lorsqu
’un
comptable effectue un paiement sans vérifier
la liquidation de la créance et sa conformité à un contrat écrit qui doit la fonder, sans
vérifier l’existence de l’autorisation habilitant à le signer l’auteur de l’acte présenté à
l’appui du paiement
;
Attendu
qu
en vertu des dispositions susmentionnées, Mme Z n
a pas réalisé les
contrôles que lui imposent la réglementation ; que, par conséquent, en prenant en charge
le mandat n° 382 et en procédant à son paiement, Mme Z a manqué à ses obligations et a
engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire en vertu de l
article 60-I précité ;
Attendu
qu
il ne pourrait en être autrement que si la comptable pouvait exciper des
circonstances de force majeure ;
Attendu
que Mme Z n
a pas fait valoir de circonstances de force majeure mais de
dysfonctionnements internes au poste comptable qui pourront être admis, le cas échéant,
à l
appui d
une demande de remise gracieuse, en cas de débet ;
Sur l
existence d
un préjudice financier
Attendu
que le préjudice financier résulte d
une perte provoquée par une opération de
décaissement ou d
un défaut de recouvrement d
une recette ; que ce préjudice financier
se traduit par un appauvrissement patrimonial définitif de la personne publique ;
En ce qui concerne les mandats n° 57 et 145
Attendu
que, par acte n°2014.09.29.10 visé par l
autorité académique et reçu au plus tard
par cette autorité le 9 octobre 2015, le conseil d
administration a approuvé le voyage en
Suisse pour un coût de 24 815
dont 20 425
pour le transport des élèves et 2 150
pour
le transport des accompagnateurs ; que l
organe délibérant a bien manifesté
préalablement son consentement à ces dépenses ; que le montant payé par mandat n° 57
est inférieur au montant inscrit au budget prévisionnel ; qu
ainsi, le préjudice financier
n
est pas constitué ;
Attendu
que, par acte n° 2014.09.29.12 visé par l
autorité académique le 3 octobre 2014,
le conseil d
administration a approuvé le voyage à New-York et Boston, pour un coût de
51 960
dont 22 500
pour le transport des élèves et 1 800
pour le transport des
accompagnateurs ; que l
organe délibérant a bien manifesté préalablement son
consentement à ces dépenses ; que le montant payé par mandat n° 145 est inférieur au
montant inscrit au budget prévisionnel ; qu
ainsi, le préjudice financier n
est pas
constitué ;
8
En ce qui concerne le mandat n° 382
Attendu
que, par acte n° 2015.03.03.03 visé par l
autorité académique le 4 mars 2015, le
conseil d
administration a approuvé le voyage en Italie pour un coût de 23 455
dont
16 950
pour le transport des élèves et 2 260
pour le transport des accompagnateurs,
soit un total pour le transport de 19 210
; que l
organe délibérant a bien manifesté
préalablement son consentement à ces dépenses mais pour un montant inférieur à celui
du mandat, qui est de 20 895
; que le mandat excède de 1 685
l
autorisation conférée
à l’ordonnateur
;
Sur le lien de causalité entre le manquement et le préjudice (mandat n° 382)
Attendu
que le lien de causalité entre les manquements reprochés à Mme Z et le préjudice
financier causé au lycée de Bellevue est établi par le simple fait que les dépenses ont été
irrégulièrement payées, que la comptable a ouvert sa caisse sans effectuer les contrôles
dont elle était chargée ;
Sur les obligations mises à la charge de la comptable du fait des manquements
constatés
En ce qui concerne les mandats n° 57 et 145
Attendu
que la responsabilité de Mme Z est engagée en application du deuxième alinéa
du VI de l
article 60 de la loi du 23 février 1963 pour avoir réalisé le paiement des mandats
n°57 et 145 au vu d’un acte incomplet car ne comportant pas la mention du prix des
prestations et dépourvu de valeur contractuelle.
Attendu
que
l’
article 60-VI de la loi n° 63-156 précise que, si le manquement du
comptable n
a pas causé de préjudice financier à l
organisme concerné,
« le juge des
comptes peut l
obliger à s
acquitter d
une somme arrêtée, pour chaque exercice, en
tenant compte des circonstances de l’
espèce »
; que le décret n° 2012-1386 du
10 décembre 2012 a fixé le montant maximal de cette somme
« à un millième et demi du
montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré »
;
Attendu
que le cautionnement de l
agence comptable du lycée général et technologique
de Bellevue au cours de la période en jugement était de 157 000
;
qu’ainsi
, Mme Z
pourrait avoir à acquitter par manquement et par exercice, de la somme maximale de
235,50
€, s’agissant des mandats n°
57/2014 et 145/2014 ;
Attendu,
par ailleurs, qu’en application de
l
article 60-IX de la loi n° 63-156, lorsqu
un
manquement sans préjudice porte sur une dépense qui, en application d
un contrôle
sélectif n’a pas été contrôlé,
l
existence et la qualité de ce contrôle peuvent faire partie
des circonstances de l
espèce que le juge prend en compte pour fixer la somme non
rémissible ;
Attendu
qu’en
l
espèce, le comptable a déclaré ne pas être informée
de l’existence de ce
dispositif ;
Attendu
qu’il sera fait une juste appréciation des circonstances de l’espèce en
en mettant
à la charge Mme Z une somme irrémissible de 100
au titre de l’exercice 2014.
9
En ce qui concerne le mandat n° 382
Attendu
qu
aux termes du paragraphe VI de l
article 60 de la loi du 23 février 1963
précitée
«
Lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à
l
’organisme public concerné […], le comptable a l’
obligation de verser immédiatement
de ses deniers personnels la somme correspondante »
;
Attendu
que Mme Z doit être rendue débitrice de la somme de 1 685
, somme
augmentée des intérêts de droit à compter du 9 juillet 2019, date de la notification du
réquisitoire à la comptable ;
Attendu
qu
il revient au juge des comptes d
apprécier si le manquement du comptable
s
est opéré dans un champs couvert par un contrôle hiérarchisé de la dépense ; que Mme Z
précise que,
«
Concernant la mise en œuvre d’
un contrôle sélectif des dépenses du Lycée
de Bellevue, validé par la DRFIP, je ne peux vous répondre, ignorant l
existence d
un tel
dispositif »
; qu
ainsi, le paiement des mandats en cause ne relève pas du champ d
’un
contrôle sélectif de la dépense ;
Attendu
que, les règles du contrôle sélectif de la dépense n
ayant
pas été mises en œuvre
entre 2013 et 2015, la somme laissée à la charge de Mme Z par le ministre chargé du
budget ne pourra être inférieure à 3/1 000
e
du montant du cautionnement prévu pour le
poste comptable, conformément au IX de l
article 60 de la loi du 23 février 1963 précité,
soit 471
;
Deuxième charge : Paiements imputés aux comptes 6245
« Voyages
Études
Visites
Visites
Sorties »
et 6288
« Autres dépenses »
Attendu
que, par le réquisitoire susvisé, le procureur financier a requis la chambre de se
prononcer sur la responsabilité de Mme Z au motif que la comptable est susceptible
d
avoir engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire pour avoir manqué aux
obligations qui lui incombent en matière de contrôle de la validité de la dette, s
agissant
de l
exactitude de la liquidation, de l
intervention des contrôles préalables prescrits par la
réglementation et de la production des pièces justificatives, avant le paiement des mandats
suivants relatifs à des voyages scolaires ;
Mandats de paiement relatifs à des voyages scolaires
Compte
Date
Montant
Créancier
Voyage
Pièces jointes
6288
47
25/02/2013
42 964,00
Nacel SAS
Miami
Facture du 20/02/2013
6245
56
04/03/2013
18 107,95
Air France
Miami
Facture du 25/02/2013
6245
362
16/09/2013
1 194,58
Sélectour
Washington
Facture du 16/04/2013
6245
362
16/09/2013
593,26
Sélectour
Washington
Facture du 08/02/2013
6245
362
16/09/2013
8 776,29
Sélectour
Washington
Facture du 08/02/2013
6245
362
16/09/2013
588,76
Sélectour
Washington
Facture du 08/02/2013
6245
362
16/09/2013
1 293,12
Sélectour
New-York
Facture du 25/04/2013
6245
362
16/09/2013
18 672,25
Sélectour
New-York
Facture du 23/04/2013
6245
362
16/09/2013
6 800,00
Sélectour
New-York
Facture du 30/04/2013
Sous-total 2013
98 990,21
10
6245
120
17/03/2014
4 566,88
Sélectour
Roumanie
Facture du 18/02/2014
6245
594
09/01/2014
4 400,00
AVS Voyages
Canada
Facture du 19/11/2013
6245
1
23/01/2014
4 400,00
AVS Voyages
Canada
Facture du 19/11/2013
6245
56
18/02/2014
5 760,00
AVS Voyages
Canada
Facture du 19/11/2013
6245
252
02/05/2014
15 421,60
Air France
Allemagne
Facture du 28/04/2014
6245
365
24/06/2014
15 470,00
Sélectour
Boston
Facture du 30/04/2014
6245
570
17/11/2014
549,00
Sélectour
Montana
Facture du 21/07/2014
6245
570
17/11/2014
6 247,99
Sélectour
Montana
Facture du 07/05/2014
6245
570
17/11/2014
8 661,52
Sélectour
Montana
Facture du 13/05/2014
6245
257
09/05/2014
6 429,00
AVS Voyages
Italie
Facture du 05/05/2014
6245
365
24/06/2014
7 500,50
AVS Voyages
Italie
Facture du 10/06/2014
6245
430
09/09/2014
7 500,50
AVS Voyages
Italie
Facture du 10/06/2014
6245
365
24/06/2014
2 430,00
Air France
Madrid
Accord commercial
6245
470
23/09/2014
19 079,28
Air France
Madrid
Relevé du 17/09/2014
6245
526
10/10/2014
22 905,00
AVS Voyages
Londres
Facture du 26/09/2014
6245
644
17/12/2014
7 255,25
Costa Croisière Costa Magica "Point financier"
6245
644
17/12/2014
1 049,34
Costa Croisière Costa Magica "Point financier"
Sous-total 2014
139 625,86
Total
238 616,07
Sur l
existence d
un manquement
Attendu
que, selon le réquisitoire, le caractère exécutoire des délibérations autorisant les
voyages en cause n
étaient pas établi lors de la primo-instruction ; que, par ailleurs,
plusieurs factures jointes aux mandats ne mentionnaient pas
« le montant et le taux sur la
valeur ajoutée légalement applicable ou, le cas échéant, le bénéfice d
une exonération »
;
qu
enfin, plusieurs mandats de paiement dépassaient le seuil de 15 000
HT et n
’étaien
t
pas appuyés d
’un
contrat écrit ;
En ce qui concerne le caractère exécutoire des actes
Attendu
qu
en vertu de l
article R. 421-54 du code de l
éducation, les délibérations
relatives au financement des voyages scolaires sont des actes relatifs au fonctionnement
de l
établissement qui, pour devenir exécutoires en application du I de l
article L. 421-
14, sont transmis au représentant de l
Etat ou, par délégation de ce dernier, à l
autorité
académiques ; que ces délibérations deviennent exécutoires 15 jours après leur
transmission, obligatoire, justifiée par la date de l
accusé réception émis par l
autorité
académique de contrôle ;
Attendu
que Mme Z a produit un ensemble de pièces qui permettent de justifier du
caractère exécutoire des actes au moment des paiements litigieux ; qu
elle précise dans
sa réponse que
« [
] le Lycée ne recevait pas systématiquement d
accusé de réception
des autorités de contrôle pour les actes et procès-verbaux
[…]
. Afin de m
assurer du
caractère exécutoire des délibérations portant sur les affaires financières, un deuxième
envoi était réalisé par l
intendance avec demande de cachet sur le bordereau d
envoi
attestant du dépôt des pièces »
;
11
Attendu
que, compte tenu du délai supérieur à 15 jours constaté entre les actes et les
paiements, il peut être considéré qu
en l
absence d
observation ou d
opposition du
contrôle de légalité, les actes étaient exécutoires au moment des paiements effectués par
Mme Z, même si les documents produits ne comportaient pas tout le formalisme requis,
telle la date de d
acquisition du caractère exécutoire qui doit être mentionnée par
l
ordonnateur ou la date de publication ou d
affichage de l
acte administratif ;
Attendu
, par conséquent, que l
agent comptable n
a pas manqué à l
obligation de vérifier
l
intervention des contrôles préalables prescrits par la réglementation ;
En ce qui concerne l
absence d
indication du taux de TVA applicable
Attendu
que, même si les factures doivent comporter la mention relative à la TVA ou à
son exonération, l
absence de cette mention sur une facture à destination d
un organisme
qui ne reverse pas la TVA ne remet pas en cause l
exactitude des calculs de liquidation ;
qu
ainsi, la responsabilité de l
agent comptable ne peut pas être engagée pour ce motif ;
En ce qui concerne certaines pièces justificatives produites (mandat n° 644)
Attendu
que, par mandat n° 644 du 17 décembre 2014, Mme Z a payé 7 255,58
€ et
1 049,34
à la compagnie Costa Croisières ; que ces paiements correspondent au solde
d
une croisière programmée début 2015 pour les élèves d
une classe de BTS Tourisme
de l
établissement ; qu
à l
appui de ce mandat, figuraient des
« points financiers »
; que
ces
« points financiers »
ne comportent ni le nom, ni la raison sociale du créancier, ni la
référence de son inscription au répertoire du commerce ou au répertoire des métiers, ni
son numéro de SIREN ou de SIRET ; qu
ils ne mentionnent pas le lycée de Bellevue (le
débiteur) ; que les coordonnées bancaires ne donnent aucune indication sur l
identité du
titulaire du compte ; que, par conséquent, ces pièces justificatives se révèlent insuffisantes
pour justifier le paiement du mandat n° 644 ;
Attendu
qu
en vertu de l
article 19 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, les
comptables publics sont tenus d
exercer en matière de dépenses le contrôle
« [...]du
caractère libératoire du paiement, de la validité de la dette dans les conditions prévues à
l
article 20 »
; que l
article 20 du même texte précise qu
en ce qui concerne la validité de
la créance, le contrôle porte sur
« [...] l
exactitude de la liquidation ; l
intervention des
contrôles préalables prescrits par la réglementation et la production des pièces
justificatives [...] »
; que, par ailleurs, l
article 37 du même décret précise que, lorsque
des irrégularités sont constatées à l
occasion de l
exercice du contrôle prévu à l
article 19,
« les comptables publics suspendent les paiements et en informent l
ordonnateur [...] »
;
Attendu
qu
en prenant en charge et en payant ce mandat appuyé de pièces justificatives
insuffisantes, voire inadéquates, Mme Z a manqué à l
obligation
de s’assurer du
caractère
libératoire du règlement et de la validité de la dette, sans que des circonstances de force
majeure, qui n
ont pas été alléguées par le comptable, puissent atténuer sa responsabilité ;
En ce qui concerne l
absence de contrat écrit (mandats n° 56, 362 et 365)
Attendu
qu
il est reproché à Mme Z d
avoir payé en 2013 les mandats n° 56 à la
compagnie Air France et 362 à l
agence Sélectour, ainsi qu
en 2014, le mandat n° 365 à
l
agence Sélectour ; que ces mandats dépassent le seuil de 15 000
sans être appuyés du
contrat écrit prévu par la nomenclature des pièces justificatives prévues à l
article 11 du
12
code des marchés publics et comportant les mentions prévues au paragraphe A de
l
annexe G à ladite nomenclature ;
Sur le mandat n° 56 au bénéfice de la compagnie Air France
Attendu
que le mandat n° 56 du 4 mars 2013, pour un montant de 18 107,95
€, a été réglé
par la comptable en l’absence de contrat écrit
;
Attendu
qu’en réponse à ce grief, Mme
Z a produit un accord commercial conclu le
30 octobre 2012 entre le lycée et la société Air France pour le voyage à Miami du 14 au
25 mars 2013, pour un montant de 21 795,20
HT et 22 320,20
TTC ; que cet accord,
signé par l
ordonnateur, mentionne notamment les conditions de règlement du prix et
comporte les autres mentions prévues par l
annexe, à l
exception de celle de la
délibération ayant autorisé la passation du marché ;
Attendu
que l
accord du 30 octobre 2012 qui annulait le précédent accord du
17 octobre 2012 a été lui-même annulé par l
accord du 28 novembre 2012 ; que le prix
TTC est resté inchangé ; que ce nouvel accord n
est revêtu d
aucune signature ; qu
’en
outre, cette pièce ne figurait pas à l
appui du paiement et n
a été produite qu
en réponse
au réquisitoire ;
Attendu
qu
en payant ce mandat
d’un montant
supérieur au seuil fixé par l
article 11 du
code des marchés sans le contrat écrit prescrit par la nomenclature des pièces
justificatives, la comptable a manqué à son obligation de contrôle de la validité de la dette
sans que des circonstances de force majeure puissent atténuer sa responsabilité ;
Sur le mandat n° 362 au bénéfice de l
agence de voyage Sélectour
Attendu
qu
en 2013, au titre du contrat de voyage à New-York, le total des paiements à
l
agence SELECTOUR
s’élève à
26 765,37
dont un paiement de 18 672,25
, le tout
réglé par mandat n° 362 du 16 septembre 2013 ;
Attendu
qu
en réponse au réquisitoire, la comptable a produit un certificat administratif
en date du 29 avril 2013 par lequel l
ordonnateur atteste
« qu
il n
existe pas de contrat
écrit de passation de marché entre le lycée de Bellevue et la société SELECTOUR
Richard Fléchon Voyages pour la fourniture de billets d
avion pour le voyage à New-
York du 16 au 25 mai 2013 pour un montant de 19 971,87
»
; que, toutefois, le montant
figurant sur le certificat correspond au montant du devis ;
Attendu
que la production d
un certificat administratif pour attester de l
absence de
contrat écrit pour les marchés supérieurs au seuil fixé par l
article 11 du code des marchés
publics
peut être admise comme pièce justificative à l’appui du paiement (
Conseil d
État,
8 février 2012,
CCAS de Polaincourt
) ; qu
ainsi, le certificat administratif conduit à
écarter le manquement de la comptable en ce qui concerne le mandat n° 362 ;
Sur le mandat n° 365 au bénéfice de l
agence de voyage Sélectour
Attendu
qu
en ce qui concerne le mandat n° 365 du 24 juin 2014, la facture de Sélectour
s
élève à 15 470
; que le comptable n
a produit aucun justificatif ;
Attendu
, par conséquent,
qu’
en prenant en charge et en payant ce mandat, Mme Z a
manqué au contrôle de la validité de la dette auquel elle était tenue et, de ce fait, a engagé
13
sa responsabilité personnelle et pécuniaire, sans que des circonstances de force majeure
puissent atténuer sa responsabilité ;
Sur l
existence d
un préjudice financier
Attendu
qu
il revient au juge des comptes d
apprécier l
effectivité du préjudice financier
résultant d
une perte provoquée par une opération de décaissement ou d
un défaut de
recouvrement d
une recette, et se traduisant par un appauvrissement patrimonial définitif
de la personne publique ;
Attendu
que Mme Z conteste le préjudice en ces termes :
« Je n
estime pas que les
manquements reprochés, concernant la charge n°2, aient constitué un préjudice pour
l
établissement. En effet, les délibérations concernant les voyages étaient, de mon point
de vue, exécutoires [
]. L
engagement juridique de l
ordonnateur constituait de fait une
charge pour l
établissement »
;
Attendu
que, par actes n° 2012.06.21.10 (voyage à Miami), n° 2013.30.09.11 (voyage à
Boston), n° 2014.09.29.01 (croisière Costa), n° 2014.04.10.02 (croisière Costa), le
conseil d
administration du lycée a approuvé les projets de voyage et le budget de
transport consacré à ces voyages ; que les montants approuvés n
ont pas été dépassés par
les paiement effectués qui n
ont donc pas causé de préjudice à l
établissement ;
Attendu
que l
article 60-VI de la loi n° 63-156 précise que, si le manquement du
comptable n
a pas causé de préjudice financier à l
organisme concerné,
« le juge des
comptes peut l
obliger à s
acquitter d
une somme arrêtée, pour chaque exercice, en
tenant compte des circonstances de l
espèce »
; que le décret n° 2012-1386 du
10 décembre 2012 a fixé le montant maximal de cette somme
« à un millième et demi du
montant du cautionnement prévu pour le poste comptable considéré »
;
Attendu
que le cautionnement de l
agence comptable du lycée général et technologique
de Bellevue au cours de la période en jugement était de 157 000
; qu
ainsi, Mme Z
pourrait avoir à acquitter par manquement et par exercice, de la somme maximale de
235,50
, s
agissant des mandats n° 56/2013 et 644/2014 ;
Attendu,
par ailleurs,
qu’
en application de l
article 60-IX de la loi n° 63-156, lorsqu
un
manquement sans préjudice porte sur une dépense qui, en application d
un contrôle
sélectif n
a pas été contrôlé, l
existence et la qualité de ce contrôle peuvent faire partie
des circonstances de l
espèce que le juge prend en compte pour fixer la somme non
rémissible ;
Attendu
qu
en l
espèce, la comptable a déclaré ne pas être informée de l
existence de ce
dispositif ;
Attendu
, en application du paragraphe VI, alinéa 2, de l
article 60 modifié de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963, qu
il sera fait une juste appréciation des circonstances de
l
espèce ainsi que des sommes en cause en mettant à la charge de Mme Z, une somme
irrémissible de 50
au titre de l
exercice 2013 et de 100
au titre de l
exercice 2014 ;
Troisième charge : Paiements imputés au compte 6576
« Aide sociale aux élèves »
14
Attendu
que le réquisitoire du procureur financier a retenu qu
en payant en 2015 seize
mandats collectifs à concurrence de 29 638,43
, imputés au compte 6576
« Aides
sociales aux élèves »
au titre du fonds social pour les cantines et du fonds social des
lycéens, Mme Z paraissait avoir manqué à ses obligations en matière de contrôle de la
validité de la dette, s
agissant de la production des pièces justificatives, dès lors que ces
mandats n
étaient pas appuyés de la délibération exécutoire du conseil d
administration
de l
établissement se prononçant sur les conditions d
octroi et les modalités de ces aides
sociales aux élèves, telle que prévue par la rubrique 6112 de la nomenclature des pièces
justificatives ;
Attendu
que les informations relatives à ces mandats sont récapitulées dans le tableau
suivant :
Mandats de paiement d
aides sociales aux élèves (compte 6576)
Mandat
Date
Montant
Objet
Pièces jointes
24
03/02/2015
2 559,55
Internat, demi-pension, transport
Récapitulatif des demandes annoté, listes
d
attributaires
43
09/02/2015
270,00
Transport
Récapitulatifs des demandes annotés
181
30/04/2015
4 865,52
Internat, demi-pension, transport
Récapitulatifs des demandes annotés
203
15/05/2015
822,00
Demi-pension, transport, UNSS,
ordinateur
Récapitulatifs des demandes annotés
233
29/05/2015
180,00
Transport
Récapitulatifs des demandes annotés
424
25/09/2015
5 382,49
Internat, transport
Récapitulatifs des demandes annotés
452
09/10/2015
4 043,60
Internat, demi-pension, transport
Récapitulatifs des demandes annotés, listes
d
attributaires
474
14/10/2015
20,00
Tee-shirt de sport
Demande du parent d
élève, bon de sortie
de caisse avant ordonnancement
484
16/10/2015
210,00
Transport
Récapitulatifs des demandes annotés
500
09/11/2015
1 285,02
Fournitures scolaires
Factures Librairie Antillaise et Alexandre
527
23/11/2015
3 635,30
Internat, demi-pension, transport,
ouvrages
Récapitulatifs des demandes annotés,
facture Librairie Antillaise
546
30/11/2015
586,30
Transport, fournitures scolaires
Récapitulatifs des demandes annotés,
factures Librairie Antillaise et Antilles
Média Distribution
563
08/12/2015
4 949,20
Internat, demi-pension, transport,
voyages, stages, ouvrages
Récapitulatifs des demandes annotés, liste
d
attributaires, facture Librairie Antillaise
598
18/12/2015
219,00
Demi-pension, ouvrages
Liste d
attributaires, facture Librairie
Antillaise
625
31/12/2015
394,45
Internet, ouvrages
Liste d
attributaires, factures Librairie
Antillaise
648
31/12/2015
216,00
Demi-pension
Liste d
attributaires
Total
29 638,43
Sur l
existence d
un manquement
Attendu
que les paiements effectués par les comptables des établissements publics
locaux d
enseignements (EPLE) doivent être réalisés dans le respect des dispositions du
15
code général des collectivités territoriales, notamment de la nomenclature des pièces
justificatives instituée par l
annexe 1 de l
article D 1617-19 dudit code ;
Attendu
que, dans le cadre des dépenses relatives aux fonds sociaux, c
est la rubrique 6
« Interventions sociales et diverses »
qui s
applique, précisément la sous-rubrique 6112
« Aide facultative »
qui prévoit que
« le mandat de paiement doit être accompagné d
une
délibération fixant les conditions d
octroi et les modalités de l
aide. En cas de paiement
à un tiers, d
une décision de l
autorité exécutive ainsi que d
un état nominatif ou collectif
mentionnant le(s) et le montant des aides à verser ou ordre de paiement acquitté par le
bénéficiaire en cas d
urgence »
;
Attendu
que Mme Z admet qu
« il n
avait jamais été présenté de proposition de
délibération au conseil d
administration du lycée sur les conditions d
octroi et les
modalités d
aides sociales. Le chef d
établissement ne souhaitait pas qu
un barème soit
établi, qui risquait de ne pas pouvoir prendre en compte toutes les situations sociales
rencontrées »
;
Attendu
que Mme Z a payé les mandats indiqués dans le tableau ci-dessus au vu de
comptes rendus de décisions prises par une commission qui n
est pas une émanation du
conseil d
administration et auquel elle ne rend pas compte ;
Attendu
que l
argument du comptable précisant que
« le Chef d
Etablissement ne
souhaitait pas qu
un barème soit établi, qui risquait de ne pas pouvoir prendre en compte
toutes les situations sociales rencontrées »
ne peut pas être retenu
face à l’obligation
réglementaire de délibération du conseil d’administration
rendue exécutoire ;
Attendu
que les aides doivent être accordées en fonction d
un barème faisant intervenir
principalement le quotient familial ; que le conseil d
administration pouvait prévoir
certaines aides forfaitaires pour des situations exceptionnelles ;
Attendu
qu
en raison de l
absence de contrôle de la validité de la dette, particulièrement
de la vérification de la présence de l
ensemble des pièces prévues par la règlementation
permettant la prise en charge et le paiement de fonds sociaux collégien, Mme Z a engagé
sa responsabilité personnelle et pécuniaire, en vertu du paragraphe I de l
article 60 de la
loi du 23 février 1963 :
« les comptables publics sont personnellement et pécuniairement
responsables des contrôles qu
ils sont tenus d
’assurer en matière […] de dépenses […]
dans les conditions prévues par le règlement général de la comptabilité publique. La
responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-
dessus se trouve engagée dès lors […]
qu
une dépense a été irrégulièrement payée
[…]
»
;
Attendu
qu
en prenant en charge et en payant ces mandats, Mme Z a manqué au contrôle
de la validité de la dette auquel elle était tenue et, de ce fait, a engagé sa responsabilité
personnelle et pécuniaire, sans que des circonstances de force majeure, qui n
ont pas été
alléguées, puissent atténuer sa responsabilité ;
Sur l
existence d
un préjudice financier
Attendu
qu
il revient au juge des comptes d
apprécier l
effectivité du préjudice financier
résultant d
une perte provoquée par une opération de décaissement ou d
un défaut de
recouvrement d
une recette ; que celui-ci se traduit par un appauvrissement patrimonial
définitif de la personne publique ; que, s
agissant du décaissement, il devra vérifier que
16
la dépense a été réalisée par l
application des conditions de sa validité, à savoir la
conformité des critères décidés par l
organe délibérant ;
Attendu
que ni l
ordonnateur, ni la comptable n
ont produit un quelconque élément
prouvant que le conseil d
administration s
est prononcé sur les critères d
attribution des
fonds ; que rien ne permet de vérifier que les décisions d
attribution prises par la
commission
ad hoc
sont conformes aux souhaits de l
assemblée délibérante qui, selon les
réponses apportées, ne jouait pas le rôle qui lui était dévolu par la réglementation ;
Attendu
que, quand bien même les fonds sociaux auraient été attribués avec rigueur et
transparence par la commission, il revenait au conseil d
administration d
en définir les
modalités ;
Attendu
que Mme Z conteste que
« [
] les manquements reprochés concernant la
charge n°3, aient constitué un préjudice pour l
établissement, le financement de ces aides
étant assuré par des subventions en provenance du rectorat et de la région Martinique.
Des bilans d
utilisation étaient transmis aux deux financeurs, sans observation de leur
part »
;
Attendu
que le préjudice doit s
apprécier, non pas au regard de l
origine des recettes
utilisées mais de la réalisation de la dépense ; que les mandats ont bien été imputés sur le
budget du lycée ; que ces mandats ont été pris en charge et payés alors que la condition
essentielle de leur validité, la conformité aux critères décidés par l
organe délibérant,
n
était pas remplie ;
Sur le lien de causalité entre le manquement et le préjudice
Attendu
que le lien de causalité entre le manquement reproché à Mme Z et le préjudice
financier causé au lycée de Bellevue est établi par le simple fait que les dépenses ont été
irrégulièrement payées ; qu
en effet, Mme Z a ouvert sa caisse sans effectuer les contrôles
dont elle était chargée ;
Attendu
qu
aux termes du paragraphe VI de l
article 60 de la loi du 23 février 1963
précitée,
«
Lorsque le manquement du comptable […] a causé un préjudice financier à
l
’organisme public concerné […], le comptable a l’
obligation de verser immédiatement
de ses deniers personnels la somme correspondante »
;
Attendu
que, dans ces conditions, Mme Z doit être constituée débitrice de la somme de
29 638,43
, somme augmentée des intérêts de droit à compter du 9 juillet 2019, date de
la notification du réquisitoire à la comptable ;
Sur la mise en œuvre d’un contrôle hiérarchisé de la dépense
Attendu
que les règles du contrôle hiérarchisé, sélectif, de la dépense n
ont pas été mises
en œuvre en 2015
; que, par conséquent, la somme laissée à sa charge par le ministre
chargé du budget ne pourra être inférieure à 3/1 000
e
du montant du cautionnement prévu
pour le poste comptable, conformément au IX de l
article 60 de la loi du 23 février 1963
précité, soit 471
;
Par ces motifs,
17
DECIDE :
Article 1
Au titre de la première charge, Mme Z est déclarée débitrice à l
égard du lycée de
Bellevue d
une somme de 1 685
sur le fondement du 3
e
alinéa du VI de l’article 60 de
la loi n°63-156 du 23 février 1963.
Dans le cas où une remise gracieuse lui serait accordée par le ministre chargé du budget,
le reste à charge de Mme Z ne pourrait pas être inférieur à 3/1 000
e
du cautionnement du
poste comptable.
Article 2
Au titre de la première charge, Mme Z
devra s’acquitter d’une somme irrémissible
de
100
sur le fondement du 2
e
alinéa du VI de l
article 60 de la loi n°63-156 du 23 février
1963.
Article 3
Au titre de la deuxième charge, Mme Z
devra s’acquitter d’une somme irrémissible de
150
sur le fondement du 2
e
alinéa du VI de l
article 60 de la loi n°63-156 du 23 février
1963.
Article 4
Au titre de la troisième charge, Mme Z
est déclarée débitrice à l’égard du lycée
de
Bellevue d’une somme de
29 638,43
sur le fondement du 3
e
alinéa du VI de l’article 60
de la loi n°63-156 du 23 février 1963.
Dans le cas où une remise gracieuse lui serait accordée par le ministre chargé du budget,
le reste à charge de Mme Z ne pourrait pas être inférieur à 3/1 000
e
du cautionnement du
poste comptable.
Article 5
Les débets prononcés ci-dessus porteront intérêts à compter de la date de notification du
réquisitoire, soit le 9 juillet 2019, conformément aux dispositions du VIII de l
article 60
de la loi n°63-156 du 23 février 1963.
Article 6
Mme Z est déchargée de sa gestion du 9 novembre 2011 au 31 décembre 2013.
Article 7
Il est sursis à la décharge de Mme Z au titre de sa gestion du 1
er
janvier 2014 au
31 décembre 2015 dans l
attente de l
apurement des débets et des sommes irrémissibles.
Fait et délibéré en la chambre régionale des comptes de la Martinique, le
10 décembre 2019.
Présents :
18
-
M. Yves COLCOMBET, président de la chambre, président de séance,
-
MM. Alexandre ABOU, Pierre STEFANIZZI, Christian PAPOUSSAMY et
Eric PELISSON, premiers conseillers ;
En présence de Mme AZARES, greffière de séance.
A signé : M. Yves COLCOMBET, président.
Collationné, certifié conforme à la minute étant au greffe de la Chambre régionale des
comptes de la Martinique et délivré par moi, secrétaire général.
Raphaël BOYER
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce
requis, de mettre le présent jugement à exécution ; aux procureurs généraux et aux procureurs
de la République près les tribunaux de grande instance, d’y tenir la main
; à tous commandants
et officiers de la force publique de prêter main-forte lors
qu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 242-14 et R. 242-16 du code des juridictions financières, les
jugements prononcés par la chambre régionale des comptes peuvent être frappés d’appel devant
la Cour des comptes dans le délai de deux mois à compter de la notification, selon les modalités
prévues aux articles R. 242-17 et R. 242-19 du même code. Ce délai est prolongé de deux mois
pour les personnes domiciliées à l’étranger. La révision d’un jugement peut être demandée après
expi
ration des délais d’appel, et ce, dans les conditions prévues à l’article R.
242-26 du même
code.