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Chapitre IV
La certification des comptes du régime
général de sécurité sociale par la Cour
des comptes : un premier bilan
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UN PREMIER BILAN
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PRESENTATION
_______________________
Au titre de sa mission d’assistance au Parlement et au gouvernement
dans le contrôle de l’application des lois de financement d
e la sécurité
sociale, prévue par l’article 47
-2 de la Constitution, la loi organique du
2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale a confié
à la Cour, à compter de 2006, le mandat permanent de certifier la
régularité, la sincérité et la fidélité des comptes du régime général de
sécurité sociale. En application de dispositions du code de la sécurité
sociale (article LO. 111-3-VIII) et du code des juridictions financières
(article LO 132-2-1), la Cour remet au Parlement et au Gouvernement,
avant le 30 juin suivant le dernier exercice clos, un rapport rendant compte
des vérifications qu’elle a effectuées à cette fin.
Chaque année, la Cour exprime ainsi neuf positions distinctes sur
des états financiers dans lesquels, pour 2011, étaient retracés au total
459,8
Md€ de produits et 390,3
Md€ de charges, soit 23
% et 19,6 % du
PIB
95
:
-
cinq positions sur les comptes combinés
96
de l’activité de
recouvrement et des quatre branches de prestations du régime
général : maladie, accidents du travail-maladies professionnelles (AT-
MP), famille et vieillesse ;
-
quatre positions sur les comptes des établissements publics nationaux
de l’Etat, têtes des réseaux d’organismes de base et entités
combinantes
: l’agence centrale des organismes de sécurité socia
le
(ACOSS) pour l’activité de recouvrement, la caisse nationale des
allocations familiale
s (CNAF), la caisse nationale de l’
assurance
maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) pour les deux branches
maladie et AT-
MP et la caisse nationale d’assurance viei
llesse des
travailleurs salariés (CNAVTS). Les positions sur les comptes des
établissements publics constituent une déclinaison de celles sur les
comptes des branches, qui intègrent ces derniers.
95 .
Cet écart traduit le fait que les organismes de l’activité de
recouvrement
(URSSAF et ACOSS) recouvrent des cotisations et contributions sociales et des
impositions pour le compte d’attributaires extérieurs au régime général. S’agissant des
produits et charges des seules branches du régime général, il recouvre pour cette
même année un déficit de 17,4
Md€ au total.
96.
Des comptes combinés sont établis au titre d’entités qui composent un même
groupe, ne sont toutefois pas liées entre elles par un lien de participation (à la
différence des comptes consolidés), mais bénéficient de relations suffisamment
proches (affectio familiale), ou d’un accord, ou d’une direction commune pour en
induire un comportement commun.
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Au-delà de la vérification de la conformité des états financiers au
référentiel qui leur est applicable, la certification des comptes du régime
général de sécurité sociale apporte une contribution majeure à la qualité et
à la transparence des comptes
publics de la France, s’agissant
d’une
composante essentielle des finances publiques de notre pays. Elle constitue
aussi un puissant levier de modernisation de la gestion, en termes de
fiabilité
des
procédures,
de
maîtrise
des
risques
financiers
et
d’amélioration du service rendu aux assurés sociaux.
A l’issue du second
cycle triennal d’audit (2009 à 2011), la Cour a
souhaité
établir
un
premier
bilan,
par
nature
provisoire,
des
transformations dont la certification a été l’élément moteur et de celles qui
demeurent à réaliser afin de lui permettre de lever des réserves ou des
éléments constitutifs de refus de certification des comptes..
Après avoir présenté la stratégie d’audit qu’elle met en œuvre (I), la
Cour dresse l’état des lieux des chantiers engagés par les organismes du
régime général afin de renforcer la maîtrise des risques financiers qui ont
une incidence sur la fiabilité des comptes et, ce faisant, sur la maîtrise des
finances sociales et la qualité du service public (II) et souligne la
persistance de points de blocage à la transparence des comptes du régime
général, dont la levée dépend de décisions ministérielles (III).
I -
La stratégie d’audit de la Cour
Dans l’exercice de sa mission, le certificateur est confronté au
risque d’audit, c’est
-à-dire au risque de ne pas détecter une anomalie
significative dont son opinion sur les comptes devrait tenir compte. Il doit
donc s’attacher à identifier les risques ayant une incidence sur les
comptes, à en apprécier la portée et à mettre en œuvre à cette fin des
vérifications appropriées.
Dans le cadre de sa mission de certification des comptes du régime
général, la Cour applique des normes, met en œuvre une organisation et
retient des axes prioritaires de travaux destinés à réduire à un niveau
acceptable le risque d’audit, dont le niveau est particulièrement élevé au
regard des caractéristiques du régime général.
A
Les normes appliquées par la Cour
La certification des comptes est une opinion écrite et motivée
qu’exprime, sous sa propre responsabilité, un organisme indépendant sur
les comptes d’une entité. Elle a pour objet de procurer l’assurance
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raisonnable que les états financiers (compte de résultat, bilan et annexe)
sont, dans l’ensemble de leurs éléments significatifs, réguliers et sincères
et qu’ils donnent une image fidèle du résultat, du patrimoine et de la
situation fin
ancière au regard d’un ensemble de principes et de règles.
Le Parlement, le Gouvernement, les conseils d’administration des
organismes nationaux du régime général, qui ont notamment pour
mission d’approuver les comptes et, au
-delà, les assurés sociaux, les
redevables des prélèvements affectés au financement du régime général,
les tiers avec lesquels les organismes de ce dernier entretiennent des
relations financières sont les destinataires des opinions (« positions ») de
la Cour.
La Cour effectue ses travaux dans le cadre des dispositions du code
des juridictions financières (qui fixent notamment des règles de
contradiction avec les organismes nationaux du régime général et leurs
administrations de tutelle
97
et de collégialité dans l’établissement des
conclusions de la Cour) et en se référant aux normes internationales
d’audit édictées par la fédération internationale des experts comptables
(IFAC) ou normes ISA (International Standards on Auditing). Ces
normes impliquent l’utilisation de critères d’audit rela
tifs aux flux
d’opérations, aux soldes des comptes de fin de période, ainsi qu’à la
présentation et aux informations fournies dans les états financiers :
existence,
exhaustivité,
exactitude,
indépendance
des
exercices
comptables, valorisation des opérations et intelligibilité des comptes.
La référence aux normes ISA concourt à assurer une communauté
d’approches d’audit avec les commissaires aux comptes, qui certifient les
comptes d’autres organismes et régimes de sécurité sociale
98
et de
protection sociale avec lesquelles le régime général a des relations
financières. En effet, les normes d’exercice professionnel (NEP)
homologuées par arrêté du Garde des Sceaux qui s’appliquent aux
mandats des commissaires aux comptes en France assurent la
transposition des normes ISA.
Cette proximité revêt une importance particulière en raison de la
réalisation par les entités du régime général d’opérations pour le compte
d’entités tierces et vice
-versa. De ce fait, la Cour des comptes et les
commissaires aux comptes ont besoin de recueillir des éléments
d’information et d’appréciation de la part de l’autre certificateur pour
l’exercice de leur propre mission ou mandat.
97. Notamment en ses articles R. 137-1 à R. 137-4.
98. Depuis 2008, leurs états financiers sont soumis à une obligation de certification
des comptes par un ou plusieurs commissaires aux comptes.
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En 2011, les dispositions juridiques instaurées à cet effet
99
ont été
appliquées en faveur des commissaires
aux comptes de l’Unédic, de
l’association pour la gestion du régime d’assurance des créances des
salariés (AGS) et, avec un objet plus étroit, du RSI, dont les cotisations et
contributions sociales sont recouvrées par les URSSAF. A ce titre, la
Cour a effectué des diligences particulières pour leur compte.
A l’avenir,
la Cour sera amenée à solliciter les commissaires aux comptes des
régimes de sécurité sociale qui effectuent des opérations pour le compte
de l’activité de recouvrement du régime général
, notamment le RSI et le
régime agricole.
B
Les implications des caractéristiques du régime
général sur l’organisation des travaux
La Cour effectue ses vérifications dans des délais stricts. Pour s’en
tenir aux seuls travaux finaux sur les comptes, elle dispose de vingt jours
calendaires pour adresser aux organismes nationaux et à leurs autorités de
tutelle l’ensemble des observations d’audit comportant des demandes de
correction dans les comptes, avant que les comptes de résultats et les
bilans qui lui ont été communiqués dans une version provisoire (au 10
mars) n’acquièrent un caractère définitif (au 30 mars). Comme la Cour l’a
déjà souligné
100
, ce court délai se trouve amoindri par des différés de
transmission d’une partie des pièces permettant de justifier les com
ptes.
En dehors des échéances calendaires, l’organisation des travaux
mise en œuvre par la Cour est dictée par les caractéristiques des branches
et de l’activité de recouvrement du régime général.
1
Un périmètre d’audit particulièrement étendu et complexe
Le régime général constitue le principal régime de sécurité sociale.
Du point de vue de l’audit des comptes, il a pour principales
caractéristiques l’importance des masses financières en jeu, la volumétrie
des opérations effectuées et comptabilisées, qui se chiffrent chaque année
à plusieurs centaines de millions, la gestion de ces opérations dans le
cadre de traitements automatisés d’information, qui en sécurisent la
réalisation, mais engendrent aussi des risques systémiques en cas d’erreur
de développement
des programmes informatiques et l’intensité des
99. Loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 et décret du 21 juin 2011,
dont les dispositions sont codifiées dans le code des juridictions financières.
100. Rapport de certification des comptes du régime général de sécurité sociale pour
l’exercice 2011, p. 15 –
16.
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transferts d’information et des flux financiers entre les organismes du
régime général et entre ces derniers et des organismes tiers.
Au sein de chacune des activités ou branches, les opérations se
rattachent à des catégories distinctes fondées sur la nature des
prélèvements et des cotisants (activité de recouvrement) ou l’objet des
prestations et des transferts financiers avec des tiers (branches).
Les opérations relatives aux prélèvements et aux prestations sont
effectuées, dans le cadre d’applications ou de modules informatiques
multiples, par un grand nombre d’organismes, qui sont dotés de la
personnalité morale (341 au total pour le régime général pris dans son
ensemble).
Prises individuellement, les opérations comptabilisées portent sur
des montants limités, voire infimes au regard des postes des comptes de
résultat et des bilans qui retracent, surtout pour les premiers, des montants
considérables.
L’atomicité des opérations conduit à faire reposer à tit
re principal
l’appréciation du risque d’anomalies significatives dans les comptes sur
un examen approfondi du contrôle interne, c’est
-à-
dire de l’ensemble des
dispositifs automatisés (contrôles intégrés aux systèmes d’information) ou
en tout ou partie manu
els (procédures, actions de contrôle…) qui
concourent à prévenir le risque d’anomalies de portée significative dans
les comptes ou qui permettent de détecter et de corriger en temps voulu
ces anomalies.
2
Les modalités de couverture du périmètre d’audit
Devant le nombre et la diversité des flux financiers, des
applications informatiques et des organismes constitutifs des branches et
de l’activité de recouvrement du régime général, la Cour déploie son
approche d’audit dans un cadre pluriannuel, délègue la réalisation d’une
partie de ses travaux à des prestataires de service placés sous son contrôle
et s’appuie chaque fois que cela est pertinent sur les travaux de l’audit
interne, en allégeant ainsi les siens.
L’organisation des travaux dans le cadre de cycles t
riennaux
permet à la Cour d’étaler dans le temps l’examen des principaux
processus d’activité, des risques et des dispositifs de contrôle interne mis
en œuvre afin de les couvrir, de revenir périodiquement sur des points
d’audit et, dans l’intervalle, de suivre les actions mises en œuvre par les
organismes du régime général afin de pallier les faiblesses qu’elle a
relevées. En règle générale, les systèmes d’information sont audités dans
le cadre d’une approche pluriannuelle, le contrôle interne des processu
s
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faisant appel à une intervention humaine est examiné selon une
périodicité au plus biennale et les états financiers eux-mêmes sont audités
chaque année.
Compte tenu des compétences très
spécialisées qu’appelle ce type
de travaux, la Cour fait appel chaque année, dans le cadre de procédures
d’appel d’offres, à des prestataires de service pour auditer les systèmes
d’information (audits d’application et contrôles généraux informatiques,
portant notamment sur la validation des développements informatiques, la
gestion des problèmes et des incidents et la sécurité physique et logique
des systèmes d’information). De manière ponct
uelle, la Cour recourt aussi
à des prestataires pour apprécier certaines estimations comptables.
La Cour effectue ses travaux dans les organismes nationaux, en
leur double qualité d’organismes dont elle certifie les comptes et de têtes
des réseaux dont elle certifie les comptes combinés. Bien qu’elle ne
certifie pas les comptes des organismes de base, la Cour opère des
vérifications dans un
e sélection d’entre eux, afin de dégager des
problématiques de portée nationale
et, à travers l’audit des organismes les
plus importants, de couvrir une part élevée des flux financiers de la
branche.
Les comptes des organismes de base font l’objet d’une v
alidation
par les agents comptables des organismes nationaux. Ce dispositif repose
sur la mise en œuvre de contrôles sur les comptes locaux et d’audits sur
place et sur pièces. Par nature, il a des finalités plus étroites que la
certification : les agents
comptables des organismes nationaux s’assurent
de la correcte application des prescriptions de ces derniers, mais ne
procèdent pas dans le cadre de la validation à un exa
men de l’
adéquation
de ces prescriptions aux risques, comme le fait la Cour en sa qualité
d’auditeur externe indépendant
. Dans cette limite, la Cour apprécie, en
application des normes internationales d’audit,
dans quelle mesure elle
peut s’appuyer sur les conclusions des audits de validation des comptes
(nature des objectifs, points audités et documentation des conclusions).
Par ailleurs, la Cour exploite les audits effectués par les
départements d’audit rattachés aux ordonnateurs (directeurs) sur des
processus de gestion et des organismes locaux.
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La place de la validation des comptes dan
s la stratégie d’audit
de la Cour
En permettant de couvrir un périmètre plus étendu d’organismes, la
validation des comptes des organismes de base par les agents comptables
des organismes nationaux permet de démultiplier les objectifs et cibles de
la certification des comptes par la Cour.
A cet égard, elle tient une place plus importante dans la stratégie
d’audit de la Cour
pour les branches dont les flux financiers sont
fractionnés entre un grand nombre d’organismes
de base à ressort
départemental (famille, maladie et AT-MP pour les prestations), que pour
celles dont l
’activité est concentrée sur un nombre plus réduit
d’organismes
: branches dont les organismes ont une compétence
régionale (vieillesse, AT-MP pour la tarification des cotisations et activité
de recouvrement compte tenu de la place particulière de l’URSSAF de
Paris et de la région parisienne et, depuis cette année, de la régionalisation
par étapes des autres URSSAF) ou pour partie nationale (depuis 2008,
activité de recouvrement compte tenu de
l’attribution à certaines URSSAF
de la gestion de l’ensemble des comptes cotisants de
s mêmes grandes
entreprises). Dans ce second cas de figure, la Cour est en effet à même de
couvrir une part plus importante des flux financiers par ses propres travaux
dans
une sélection d’
organismes de base.
En permettant aux agents comptables des organismes nationaux
d’en assurer un suivi régulier et précis, la validation des comptes a permis
de renforcer la maîtrise des risques financiers affectant les opérations
effectuées et, de ce fait, comptabilisées par les organismes de base, qui
constituent une part prépondérante des opérations retracées par les
ensembles d’états financiers soumis à une certification par la Cour.
Cependant, la portée de la validation sur la fiabilité de ces derniers
est amoindrie par le fait que les agents comptables des organismes
nationaux n’utilisent pas
les audits de validation des comptes
comme l’un
des moyens d’assurer
l’exactitude de la comptabilité. D’une part, les
programmes de contrôle des comptes
101
mis en œuvre par les
départements d’audit de validation des comptes ne sont pas définis en
fonction d’un recensement exhaustif et précis des risques comptables qui,
compte tenu de leur nature, ne peuvent être couverts par les contrôles
effectués par l
’autre département de l’agence comptable, celui qui est
chargé
d’établir les états financiers. D’autre part,
les erreurs de
comptabilisation que relèvent les auditeurs de la validation des comptes ne
donnent pas systématiquement lieu à des corrections, même limitées au
seul bilan d’entrée de l’exercice suivant. Aucune correction n’est ainsi
apportée aux états financiers des branches maladie et AT-MP.
101. Révision des comptes dans le langage courant.
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Les axes prioritaires des travaux
Les vérifications de la Cour se concentrent sur quatre enjeux
principaux, dont les deux premiers sont couverts par des travaux destinés
à apprécier la capacité du contrôle interne à prévenir, à détecter et à
corriger des anomalies significatives dans les comptes.
1
Les risques d’erreurs affectant les opérations effectuées et
, de
ce fait, comptabilisées
A la différence des entreprises, les organismes de sécurité sociale
n’ont, sauf exception limitée, aucune faculté de choix quant à l’objet, aux
conditions ou au prix des prestations immatérielles qu’ils rendent aux
redevables d
e prélèvements et aux assurés sociaux. L’assujettissement,
l’assiette, le taux et l’affectation des cotisations et contributions sociales
et des impositions, l’attribution et le calcul des prestations légales
102
et
les transferts financiers en provenance ou à destination de tiers ont pour
origine des lois et des règlements qui fixent de manière détaillée les
règles applicables. Lorsqu’ils disposent d’une telle faculté (cas des
prestations d’action sanitaire et sociale), les organismes de sécurité
sociale ont fixé des règles auxquelles les opérations doivent se conformer.
Dans le cadre de sa mission de certification des comptes, la Cour
évalue par conséquent le risque, la fréquence et l’incidence financière des
erreurs qui affectent les opérations comptabilisée
s du fait soit d’écarts
entre les règles de gestion appliquées par les organismes du régime
général (dans le cadre notamment des systèmes d’information) et les
règles de droit, soit d’erreurs dans l’application de règles de gestion elles
-
mêmes correctes (d
u fait notamment d’erreurs d’analyse de la situation
d’un assuré ou d’un redevable ou d’erreurs matérielles).
En application des normes internationales d’audit, la Cour effectue
par ailleurs des travaux destinés à apprécier la portée du risque de fraude
interne et externe.
2
Les risques d’anomalies affectant les enregistrements
comptables au regard des opérations effectuées
Des applications informatiques distinctes sont utilisées pour gérer
les opérations relatives aux cotisations, contributions et impositions, aux
prestations sociales et à la gestion administrative des organismes
102.
Y compris le remboursement d’actes de soins effectués à l’hôpital ou en clinique
ou la prise en charge de séjours en établissement médico-social.
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(ressources humaines, achats) d’une part et pour en assurer la
comptabilisation d’autre part. Des erreurs, notamment de paramétrage des
systèmes
d’information,
sont
susceptibles
d’af
fecter
la
correcte
intégration
(« déversement »)
dans
la
comptabilité
générale
des
informations relatives aux opérations effectuées.
La Cour vérifie l’exhaustivité et l’exactitude de la prise en compte
dans la comptabilité générale des informations issues de la production. A
cet effet, elle s’attache à identifier et, lorsqu’il existe, à suivre un chemin
de révision de la comptabilisation des opérations effectuées par les
organismes du régime général des applications de production vers les
applications de comptabilité générale et vice versa.
3
Les risques de sur ou de sous-évaluation du résultat
Le résultat annuel de chacune des branches du régime général
(maladie, AT
–MP, famille et vieillesse) constitue le point d’audit
déterminant de l’examen des états financ
iers proprement dits.
Dans le cadre de l’examen de la formation des résultats annuels
des branches, la Cour s’assure de la conformité aux principes comptables
généraux du traitement des diverses opérations, de la permanence des
méthodes, de la constitution de provisions pour risques et charges au titre
de l’ensemble des passifs et de la correcte évaluation des enregistrements
comptables qui résultent d’une estimation
103
. En effet, la variation d’un
exercice à l’autre de ces enregistrements est susceptible d’a
voir une
incidence importante sur le résultat de l’exercice. La Cour apprécie la
pertinence des méthodes d’estimation appliquées et des paramètres
utilisés à ce titre, le réalisme des hypothèses retenues et la fiabilité des
sources d’information et des opé
rations de calcul.
4
La qualité de l’information financière
Les états financiers entrant dans le périmètre d’audit de la Cour
comprennent le compte de résultat, le bilan et l’annexe aux comptes.
Document comptable à part entière, l’annexe procure des informa
tions
importantes pour comprendre celles indiquées dans le compte de résultat
103. Produits à recevoir de cotisations,
de contributions sociales et d’impositions
(23,7
Md€ au titre des seules branches du régim
e général au 31 décembre 2011),
provisions pour dépréciation de créances sur les prélèvements précités et sur des trop-
versés de prestations aux assurés sociaux (13,3
Md€), provisions pour risques et
charges relatives à des rappels de prestations, à des remboursements en instance de
liquidation et à des litiges non dénoués à la clôture de l’exercice au titre des
prélèvements et des prestations (14,7
Md€).
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et le bilan
: les règles comptables, l’incidence sur les comptes des faits
marquants de l’exercice, les changements comptables (corrections
d’erreurs, changements de méthode de comptabilisation ou d’estimation),
les méthodes d’estimation comptable, le détail de la consistance des
postes du compte de résultat et du bilan, la variation de la trésorerie entre
le début et la fin de l’exercice (dans le cadre d’un tableau des flux de
trésorerie) et les engagements hors bilan (engagements donnés et reçus)
qui dépassent le cadre de ce dernier.
La
Cour
vérifie
de
manière
approfondie
la
complétude,
l’exactitude et le degré de précision de l’information procurée par les
états financiers, nota
mment l’annexe.
*
*
*
Pour exprimer ses positions, la Cour recourt à l’ensemble des
formes généralement utilisées en matière de certification d’états
financiers en conformité avec les normes internationales d’audit. Ces
normes prévoient qu’une opinion sa
ns réserve ne peut être émise si des
difficultés significatives sont identifiées. En fonction de la nature de ces
difficultés, une certification avec réserve(s), un refus de certifier ou
encore une impossibilité de certifier doit alors être exprimé.
Au reg
ard de la nature et de l’intensité des constats que ses
vérifications conduisent à établir, la Cour a ainsi refusé de certifier les
comptes de l’activité de recouvrement (2007), de la branche famille (2006
à 2008 et 2011), de la branche vieillesse (2008 et 2009) et de la branche
AT-MP (2010 et 2011) et a certifié avec des réserves les comptes de la
branche maladie (ensemble des exercices) et des autres branches et de
l’activité de recouvrement pour les exercices autres que ceux précités.
En effet, la certif
ication des comptes n’est pas un exercice
linéaire : en fonction de ses constats, la Cour peut être amenée à modifier
son opinion, -
des comptes certifiés avec des réserves au titre d’un
exercice pourront faire l’objet d’un refus de certification au titre d’un
exercice ultérieur-, à formuler de nouvelles réserves ou à lever des
réserves existantes pour tout ou partie de leurs éléments.
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115
Le tableau ci-après retrace les positions exprimées par la Cour
ainsi que le nombre de réserves ou de motifs de refus de certification :
Activité/branche
2006
2007
2008
2009
2010
2011
Recouvrement
Réserves
(3)
Refus
(11)
Réserves
(10)
Réserves
(5)
Réserves
(9)
Réserves
(8)
Maladie
Réserves
(7)
Réserves
(9)
Réserves
(7)
Réserves
(6)
Réserves
(6)
Réserves
(5)
AT-MP
Réserves
(4)
Réserves
(5)
Réserves
(2)
Réserves
(3)
Refus
(3)
Refus
(5)
Famille
Refus
(9)
Refus
(7)
Refus
(7)
Réserves
(7)
Réserves
(5)
Refus
(6)
Vieillesse
Réserves
(7)
Réserves
(4)
Refus
(10)
Refus
(7)
Réserves
(7)
Réserves
(6)
Total
30
36
36
28
30
30
II - Les progrès encore inaboutis des organismes
pour maîtriser les risques d’anomalies dans les
comptes
En révélant des risques avérés ou potentiels d’anomalies dans les
opérations effectuées et comptabilisées, la certification des comptes
constitue un puissant levier
d’amélioration de la fiabilité des comptes et,
au-delà, de progrès portant sur des objets plus larges : la correcte
application des décisions du législateur et de l’autorité réglementaire,
l’égalité de traitement et la qualité réelle du service rendu aux
bénéficiaires de prestations sociales et aux redevables de prélèvements
sociaux et la sécurisation des recettes et des dépenses sociales.
Ainsi, les quatre organismes nationaux du régime général ont
engagé des actions, pour certaines d’envergure, destinées
à pallier les
risques financiers dont la Cour a constaté qu’ils n’étaient pas couverts
avec une efficacité suffisante par les dispositifs de contrôle interne en
vigueur : la correcte intégration des informations relatives aux opérations
effectuées dans la comptabilité générale
; l’attribution erronée, pour un
montant erroné ou l’absence d’attribution de prestations
; l’absence
d’exhaustivité de la collecte des prélèvements sociaux.
L’étendue, la portée et la rapidité de déploiement de ces actions
apparaissent cependant hétérogènes, ce qui traduit une appropriation
inégale de la certification des comptes entre les différentes branches et, en
leur sein, entre les agences comptables et les services ordonnateurs.
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116
A
La certification des comptes : un révélateur des
insuffisances de la gestion
La certification des comptes du régime général de sécurité sociale
a été instaurée par la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de
financement de la sécurité sociale. L’exercice 2006 constituait le premier
exercice d’a
pplication de cette procédure nouvelle. Les entités auditées
ont donc disposé d’un temps très court pour s’y adapter. Certes, des
travaux préparatoires avaient été effectués. Cependant, ils reposaient sur
une acception étroite de la portée de ce nouvel exercice et sur une vision
optimiste de la situation réelle des composantes du régime général au
regard de ses attendus. L’exercice par la Cour de sa nouvelle mission de
certification a révélé des insuffisances de la gestion, qui ont une incidence
significative sur la fiabilité des états financiers des branches et de
l’activité de recouvrement du régime général.
1
Le manque de justification des opérations comptabilisées
Au commencement de ses travaux, la Cour a été confrontée à une
difficulté de portée générale à obtenir les éléments permettant de justifier
les enregistrements comptables ayant pour origine une opération
effectuée ou une estimation.
Cette difficulté résultait de la conception prédominante du rôle de
la comptabilité dans les organismes de sécurité sociale
: celle d’une
fonction passive d’enregistrement, en aval, par des écritures de débit et de
crédit, des opérations effectuées par les services ordonnateurs, sans
maîtrise réelle des montants comptabilisés.
Ainsi, les produits, charges, créances et dettes relatifs aux
prélèvements sociaux et aux prestations étaient retracés dans les
documents comptables sous la forme uniquement de montants globaux.
En l’absence d’une comptabilité auxiliaire à la comptabilité générale, il
n’était pas possible d’en con
naître le détail par cotisant ou par
bénéficiaire de prestation. Sous l’effet d’un manque de reconnaissance de
la fonction comptable, les outils informatiques qui lui sont consacrés
n’avaient pas fait l’objet d’investissements suffisants.
Au-delà même de l
’absence de comptabilité auxiliaire, la tenue de
la comptabilité de la branche vieillesse connaissait des faiblesses
particulières. En effet, la mise en place d’un nouvel outil de gestion des
pensions de retraite (outil retraite) à compter de 2003 ne s’éta
it pas
accompagnée de celle d’un déversement automatisé à partir de cet outil
des informations relatives aux pensions dans l’outil de comptabilité
générale. Dès lors, les pensions de retraite demeuraient comptabilisées à
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UN PREMIER BILAN
117
partir d’états papier issus d’une c
haîne des paiements mise en place dans
les années 1970. Pour autant, l’agence comptable de la CNAVTS n’avait
pas formalisé aux organismes de son réseau (dont elle-même en tant que
caisse pour l’Ile
-de-France) les consignes à suivre, qui reposaient dès lors
sur la culture orale des collaborateurs des agents comptables.
En outre, les liaisons entre les agences comptables et les directions
statistiques étaient inexistantes ou défaillantes. De ce fait, les produits de
prélèvements sociaux et les charges de prestations sociales comptabilisés
n’étaient pas corroborés sur un plan statistique par des revues analytiques
permettant de vérifier la cohérence de leur évolution par rapport à
l’exercice précédent. S’agissant des estimations comptables, qui ont une
incidence déterminante sur la formation des résultats des branches du
régime général, les agences comptables se contentaient d’enregistrer les
chiffres que leur communiquaient les directions statistiques, sans
demander d’éléments de justification. De fait, les mét
hodologies précises
des calculs, l’identité des fichiers utilisés à cette fin et l’enchaînement des
données n’étaient pas formalisés. Seuls en avaient une connaissance
précise les collaborateurs qui avaient conçu les méthodologies et
effectuaient les calculs des estimations comptables.
2
Les faiblesses de la conception des processus dématérialisés
Historiquement, les organismes de sécurité sociale mettent en
recouvrement les prélèvements sociaux et attribuent les prestations à
partir de données déclarées sur des supports papier par les cotisants, les
assurés ou des tiers déclarants (autres organismes sociaux par exemple).
En permettant de réduire les tâches de saisie de ces informations, le
développement des procédés dématérialisés a permis de réaliser des gains
de productivité et de prévenir des risques d’altération des informations
prises en compte. Cependant, la Cour a aussi constaté que, fréquemment,
la dématérialisation des opérations ne s’était pas accompagnée de la mise
en place des garanties indispensab
les à l’exhaustivité des prélèvements
sociaux et au versement à bon escient des prestations sociales.
S’ils constituent depuis le milieu des années 1990 le point d’entrée
des déclarations annuelles de données sociales (DADS) dans le système
fiscal et socia
l, les organismes de la branche vieillesse n’ont pas été dotés
de pouvoirs de sanction à l’égard des employeurs défaillants
(ces
pouvoirs relèvent exclusivement des URSSAF et de l’administration
fiscale). En outre, les organismes de l’activité de recouvrem
ent et ceux de
la branche vieillesse n’effectuent pas de contrôles sur la cohérence de
l’assiette
salariale
des
prélèvements
sociaux
sur
les
revenus
professionnels déclarés dans les bordereaux récapitulatifs de cotisations et
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118
les tableaux récapitulatifs annuels
104
avec les salaires pris en compte
pour la détermination des droits à la retraite des assurés qui sont déclarés
dans les DADS. Dans le cadre de l’audit des comptes, des éléments
statistiques ont permis de réduire le niveau du risque d’erreur ou de
fra
ude inhérent à l’absence de rapprochement de ces éléments déclaratifs.
Sa maîtrise effective est cependant tributaire de la mise en place de la
déclaration sociale nominative (DSN)
105
.
Au début des années 1990, la CNAVTS a mis en place des
dispositifs d’alim
entation automatisée des comptes de carrière des assurés
sociaux par des équivalents-salaires et des périodes assimilées à des
périodes de cotisation que lui notifient d’autres organismes sociaux au
titre du versement de prestations ouvrant des droits à la retraite.
Cependant, la CNAVTS n’avait pas passé de conventions avec les
organismes émetteurs en vue de définir les moyens permettant de garantir
la fiabilité des données. S’agissant des périodes assimilées au titre du
chômage indemnisé, elle n’en avait pas défini les règles d’attribution dans
le cahier des charges remis à l’Unédic. Au titre des années 1991 à 2007
comprise, l’Unédic a notifié à la CNAVTS une période assimilée dès le
premier jour d’indemnisation, alors que la législation prévoit l’attributi
on
d’une période assimilée à compter de 50 jours révolus. A la suite
d’interrogations de la Cour, la CNAVTS a découvert cette erreur, ce qui a
permis d’interrompre pour l’avenir l’acquisition à tort de droits à pension
de retraite à ce titre. Compte tenu de la difficulté à revenir sur le passé, les
ministres ont dû en revanche valider les droits acquis à tort par les assurés
nés avant 1955.
S’agissant des remboursements de dépenses de soins, les
organismes de la branche maladie sont autorisés depuis 2005 à régler les
factures télétransmises par les professionnels de santé en dehors de la
présence des pièces justificatives (feuilles de soins, ordonnances et
accords préalables). En l’absence de dématérialisation des pièces
justificatives, les organismes de la branche maladie ne rapprochent que
ponctuellement les paiements des actes et prescriptions qui en sont en
principe la cause. De manière spécifique, la base informatique des
remboursements n’est pas reliée à celle où sont enregistrés les refus
d’accord pré
alable. Dès lors, les règlements de prestations en nature
incorporent nécessairement, dans une mesure qu’il est impossible
d’évaluer, des versements relatifs à des prescriptions inexistantes,
104. Lesquels constituent, sur un plan juridique, des documents annexes à la DADS.
L’absence de production de ces documents (par environ 5
% des employeurs) ne
donne pas lieu à l’application de sanctions.
105. Voir Chapitre XVIII - Les indemnités journalières versées au titre de la maladie
par le régime général.
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UN PREMIER BILAN
119
différentes des prescriptions réellement effectuées ou pour lesquelles
l’accord préalable a été refusé ou soumis à des conditions non remplies.
3
L’inadaptation des dispositifs de contrôle interne
En application de dispositions réglementaires du code de la
sécurité sociale instaurées en 1993, le directeur et l'agent comptable des
organismes de base doivent concevoir et mettre en place, en commun, un
dispositif de contrôle interne respectant les préconisations de l'organisme
national et permettant de maîtriser les risques, notamment financiers. Au
titre de ses attributions
relatives à l’exécution des recettes et des dépenses
et à la gestion de la trésorerie, l’agent comptable doit établir un plan de
contrôle prenant place dans le dispositif de contrôle interne de
l’organisme et respectant les instructions fixées par le nive
au national.
La Cour a constaté que ce cadre, novateur à l’origine, ne
constituait pas une base suffisamment solide à la maîtrise des risques de
portée financière qui affectent les activités des branches et de l’activité de
recouvrement du régime général de sécurité sociale.
En l’absence d’une obligation en ce sens, les organismes nationaux
n’avaient pas pris l’initiative de mettre en œuvre des plans de contrôle
propres à leurs activités, alors même que ces dernières portent sur des
domaines sensibles (comme le recouvrement direct de cotisations et
contributions sociales et d’impositions pour l’ACOSS ou la gestion des
référentiels nationaux pivots de l’identification et des données de carrière
des assurés pour l’ensemble des régimes de sécurité sociale pour
la
CNAVTS).
En outre, le rôle des organismes nationaux dans la conception et le
pilotage
des
dispositifs
de
contrôle
interne
des
branches
était
insuffisamment affirmé. Si les organismes nationaux prescrivaient aux
organismes de leurs réseaux d’effectuer ce
rtains contrôles, ces demandes
s’adressaient principalement aux agents comptables, alors que la maîtrise
d’une grande partie des risques est tributaire de procédures internes aux
services des ordonnateurs. Souvent, la définition des actions de contrôle
éta
it imprécise. Dans tous les cas, les organismes nationaux n’avaient pas
organisé les circuits d’information nécessaires à la vérification de la
réalité des actions de contrôle et à la connaissance de leurs résultats.
4
La méconnaissance de la qualité finale de la production
Chaque année, les organismes du régime général de sécurité
sociale traitent en masse plusieurs dizaines de millions d’opérations en
faisant application d’une réglementation complexe et évolutive. Afin de
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prévenir des erreurs de portée fina
ncière, ils mettent en œuvre des
contrôles a priori sur les prestations liquidées préalablement à leur mise
en paiement et/ou des contrôles a posteriori sur les prestations servies.
Compte tenu du nombre d’opérations, ces contrôles n’en couvrent qu’une
par
t variable. En outre, lorsqu’ils sont effectués, ils ne détectent pas la
totalité des erreurs.
Préalablement à l’instauration de la certification des comptes, les
organismes du régime général ne s’étaient pas dotés de mesures de la
qualité financière de leur
production ni, a fortiori, n’avaient
fixé
d’objectifs volontaristes d’amélioration de cette dernière.
Les contrôles mis en œuvre par les agents comptables étaient
présumés prévenir ou permettre de corriger efficacement les erreurs de
portée financière.
Cependant, il n’existait pas d’éléments probants
permettant de le démontrer.
Au sein du régime général, la CNAVTS était la plus avancée dans
la voie d’une appréciation de la qualité finale de la production, à travers
l’inscription dans les contrats plurian
nuels de gestion avec les organismes
de base de la branche (CPG) d’un indicateur relatif à la fréquence des
pensions de retraite liquidées et mises en paiement, après ou sans contrôle
des agences comptables, ayant une erreur supérieure à 10 % de leur
montant. Cependant, la CNAVTS ne mesurait pas la fréquence et le
montant total des erreurs affectant les pensions de retraite mises en
paiement après ou sans contrôle.
B
Les progrès réalisés par les organismes du régime
général
L’ensemble des organismes nationaux
du régime général ont
engagé des chantiers destinés à remédier aux constats de la Cour. Certains
chantiers ont abouti, ce qui a permis à la Cour de lever des réserves sur
les comptes. D’autres demeurent inachevés, mais ont cependant permis
d’atténuer le degré de criticité des risques qu’elle a relevés.
1
La justification des enregistrements comptables
Les organismes nationaux du régime général ont effectué des
progrès importants afin de justifier les montants enregistrés dans les états
financiers qu’ils étab
lissent. Ceux, encore conséquents, qui demeurent à
réaliser se situent dans leur prolongement.
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UN PREMIER BILAN
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a)
Les montants comptabilisés au titre des opérations effectuées
Les
branches
maladie
et
accidents
du
travail-maladies
professionnelles sont aujourd’hui dotées d’un
e comptabilité auxiliaire qui
permet de justifier les charges, les créances et les dettes relatives aux
prestations légales (soins de ville, indemnités journalières, pensions
d’invalidité et rentes d’accidents du travail et maladies professionnelles),
en les ventilant entre les assurés sociaux.
A ce stade, la branche famille ne s’est pas dotée d’une comptabilité
auxiliaire des prestations légales. Cependant, un lien (dit «
piste d’audit
»)
peut être établi entre les opérations relatives aux prestations légales dans
l’outil de production et la traduction qui en est donnée dans l’outil de
comptabilité générale.
L’activité de recouvrement a ouvert un chantier informatique
destiné à mettre en place une comptabilité auxiliaire par attributaire au
niveau des compt
es des cotisants dans l’outil de production des URSSAF.
Par anticipation à son achèvement, elle a remédié à la rupture en plusieurs
endroits de la piste d’audit entre les montants enregistrés dans les
comptes cotisants dans cet outil et les montants répartis entre attributaires
dans celui de comptabilité générale, en mettant en place des éléments
d’analyse qui couvrent aujourd’hui la plus grande partie des produits
notifiés aux différents attributaires
106
. A ce jour, la rupture de la piste
d’audit n’est cepen
dant pas compensée pour la plus grande partie des
encaissements
107
, ni pour les charges
108
.
La branche vieillesse n’est toujours pas dotée d’une comptabilité
auxiliaire et les prestations légales demeurent comptabilisées à partir
d’états papier issus de la chaîne des paiements, dans l’attente de la mise
en place d’un progiciel de gestion intégrée comptable (dont le
déploiement devrait commencer d’ici à la fin de cette année). La
CNAVTS procure cependant des éléments d’analyse qui permettent
d’atténuer, sans le faire disparaître, le risque d’un classement erroné des
charges de prestations légales au regard de la nature des pensions en
paiement. En outre, elle a défini à l’attention des organismes de son
réseau des procédures de comptabilisation des prestations légales.
106 .
A l’exception notamment des réductions de produits liées aux allègements
généraux de cotisations sociales et du versement transport.
107.
A l’exception de ceux affectés à l’Unédic et à l’AGS, qui bénéficient d’éléments
de justification spécifiques.
108. Admissions en non-valeur, remises sur créances et annulations de créances.
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122
b)
Les montants comptabilisés au titre des estimations comptables
L’ACOSS a mis en place une formalisation détaillée des
estimations comptables, ce qui a permis à la Cour de les auditer, de
constater le caractère parfois inadapté de tout ou partie de leur
méthodologie et d’en obtenir la modification. Ainsi, l’agence a mis fin à
l’absence d’évaluation des produits à recevoir relatifs aux prélèvements
sociaux sur les revenus de remplacement versés par les cotisants rattachés
aux URSSAF
109
(2010) et à la surévaluation des produits à recevoir
relatifs aux cotisants du secteur public (2011). A ce jour, elle n’a
cependant pas modifié la méthodologie d’estimation des provisions pour
dépréciation de créances, dont le caractère très agrégé et les distorsions
généra
lisées sont à l’origine d’une réserve récurrente de la Cour.
La CNAMTS a mis en place une documentation détaillée relative
aux provisions pour risques et charges issues d’une estimation effectuée
par la direction des statistiques (prestations en nature facturées
directement par les professionnels de santé et par les établissements de
soins et médico-
sociaux et prestations en espèces). Par ailleurs, l’agence
technique pour l’information sur l’hospitalisation (ATIH) a formalisé la
méthodologie qu’elle appliqu
e pour estimer les provisions hospitalières.
La Cour a validé la méthode d’estimation appliquée par la CNAMTS. En
revanche, l’absence d’exhaustivité des provisions évaluées par l’ATIH a
contribué à l’expression par la Cour d’une réserve sur les comptes 201
1
de la branche maladie.
2
La refonte des dispositifs de contrôle interne
Les observations de la Cour ont favorisé une prise de conscience,
parfois récente, des organismes nationaux du régime général sur la
nécessité de renforcer la définition, le contenu et le suivi des actions de
contrôle prescrites aux organismes de base.
Depuis le premier exercice de certification, l’agent comptable de la
CNAMTS a étendu le périmètre, renforcé le contenu et mis en place des
modalités de suivi de la mise en œuvre des plan
s de maîtrise socle (PMS),
qui intègrent dans un cadre commun, fondé sur une représentation des
processus de gestion et des risques qui leur sont associés, les actions de
maîtrise des risques devant être effectuées par les services ordonnateurs
comme par ceux des agences comptables.
A partir de 2008, l’agent comptable de la CNAVTS a défini des
instructions nationales de contrôle à l’attention des agents comptables des
109. Assurances, caisses de sécurité sociale et employeurs de salariés.
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UN PREMIER BILAN
123
organismes du réseau, qui faisaient jusque-là défaut, puis a engagé le
remplacement du référentiel national de contrôle interne (RNCI), dont la
Cour avait souligné l’inadaptation, par un référentiel unique de maîtrise
des risques (RUN-MR) intégrant là encore les actions de contrôle relevant
des ordonnateurs. Ce nouveau cadre de référence a été déployé en 2011
au titre de deux processus clefs mis en œuvre par les organismes de base
de la branche vieillesse (carrière et retraite).
En 2011 également, l’ACOSS a diffusé auprès des principaux
organismes de son réseau une cartographie des risques appelant la mise
en œuvre d’actions d’origine nationale ou, de manière supplétive, locale,
destinées à réduire le niveau des risques associés aux principaux
processus de gestion. En toute fin d’année, elle a diffusé dans l’ensemble
de son réseau un plan national de maîtrise des risques (PN-MR).
Les cadres nationaux de contrôle interne précités déployés par la
CNAVTS (RUN-
MR) et par l’ACOSS (cartographie des risques et PN
-
MR) apparaissent de nature à renforcer la maîtrise des risques identifiés
par la Cour. Cependant, ils sont trop récents pour autoriser une
appréciation conclusive sur leur portée.
S’agissant de la branche famille, la formalisation depuis quelques
années d’un plan national de maîtrise des risques ne constitue pas à elle
seule une condition suffisante à la maîtrise des risques de portée
financière qui affectent les prestations servies et comptabilisées. En effet,
les caractéristiques du dispositif de contrôle interne dans la branche ne
procurent qu’une assurance limitée sur la maîtrise du risque d’a
nomalie
de portée significative affectant les comptes, ce qui a conduit la Cour à
refuser de certifier les comptes 2011 (voir 3
infra).
3
La fixation de plafonds d’erreurs à ne pas dépasser
Dès le premier exercice de certification (2006), la Cour a demandé
à la CNAVTS d’établir des mesures de la fréquence et de l’incidence
financière des erreurs qui affectent les prestations légales, que ces
dernières aient été ou non contrôlées préalablement à leur mise en
paiement. Par la suite, la Cour a invité la CNAVTS à inscrire dans la
nouvelle convention d’objectifs et de gestion (COG) avec l’Etat et dans
les contrats pluriannuels de gestion (CPG) avec les organismes de son
réseau (années 2009-2013) des objectifs pertinents de réduction de la
fréquence et de l’incidence financière des erreurs. Sous la condition d’une
fiabilité maintenue des indicateurs, la réalisation des objectifs de la COG
permettrait à la Cour de lever sa réserve sur ce point. En l’état, les
indicateurs font cependant apparaître une qualité dégradée des pensions
de retraite produites par une part importante des organismes du réseau.
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Suivant une préconisation de la Cour, la CNAMTS a également
instauré en 2009 des indicateurs de fiabilité des prestations en nature et en
espèces (indemnités journalières) au titre des risques maladie, maternité
et accidents du travail-maladies professionnelles et inscrit des plafonds
d’erreurs de portée financière à ne pas dépasser dans la COG et les CPG
(années 2010-2013). Dans son rapport de certification des comptes 2011,
la Cour a relevé que le niveau retenu pour l’objectif de fiabilité des
prestations en nature concourrait à maîtriser le risque d’erreurs de portée
financière mais, qu’en revanche, l’objectif de fiabilité des indemnités
journalières était insuffisamment rigoureux. Pour 2012 et les années
suivantes, la CNAMTS a fixé celui-ci à un niveau conforme à
l’appréciation de la Cour. Cependant, les indicateurs s’établissent à un
niveau
supérieur
aux
objectifs
fixés.
En
outre,
ils
reflètent
incomplètement l’incide
nce financière des erreurs qui affectent la
production de prestations en nature et d’indemnités journalières : en
raison d’un encadrement procédural insuffisant, les contrôles sur
échantillons qui concourent à la détermination des indicateurs ne
détectent pas la totalité des erreurs.
Si elle a mis en place des instruments de mesure des erreurs
financières qui affectent les prestations légales, la CNAF n’assigne pas
aux organismes de son réseau d’objectifs portant sur des plafonds
d’erreurs de portée financi
ère à ne pas dépasser, mais uniquement des
objectifs portant sur des nombres de contrôles à réaliser. De surcroît, ces
objectifs quantitatifs de contrôles portent sur un nombre de faits
générateurs, c’est
-à-
dire d’éléments constitutifs d’une prestation (pa
r
exemple les éléments justificatifs de l’identité du titulaire de prestation),
et non sur la totalité des éléments constitutifs de la prestation (comme les
éléments justificatifs de l’identité, de la situation familiale et des
ressources par exemple). Pou
r les réaliser, les CAF jouissent d’une
grande autonomie dans le choix des actions de contrôle à effectuer (dites
cibles de contrôle). Elles ont ainsi la faculté d’opter pour des actions de
contrôle faciles à réaliser et à faible rendement financier, plutôt que pour
des actions plus complexes permettant de prévenir des volumes financiers
plus importants d’erreurs.
Dans ces conditions, le contrôle interne de la branche n’a pu
prévenir en 2011 une augmentation des erreurs de portée financière qui
affectent les prestations servies par la branche famille au-delà du niveau,
déjà très élevé, atteint en 2010, ce qui a conduit la Cour à changer de
position et à refuser de certifier les comptes 2011.
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UN PREMIER BILAN
125
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Une appropriation encore hétérogène des enjeux
sous-jacents à la certification
Comme le montre la nature des éléments constitutifs des positions
de la Cour, le régime général ne constitue pas un ensemble homogène. De
fait, les branches et l’activité de recouvrement sont inégalement avancées,
entre elles et selon les domai
nes concernés, dans l’appropriation des
constats de la Cour qui dessinent les évolutions ayant vocation à être
apportées aux processus de gestion afin de mieux sécuriser les recettes et
les dépenses. En leur sein, les différents acteurs sont inégalement
responsabilisés sur cet enjeu déterminant.
1
Des différences sensibles entre les branches
Pour une part, la levée des réserves exprimées par la Cour, en
matière notamment de justification des enregistrements comptables, est
tributaire d’évolutions lourdes et complexes des systèmes d’information.
En outre, les chantiers informatiques et organisationnels rendus
nécessaires par les constats de la Cour peuvent être concurrencés, en
termes de ressources à mobiliser, par d’autres chantiers susceptibles
d’avoir à term
e une incidence favorable sur la maîtrise des risques de
portée financière (notamment la concentration des réseaux autour d’un
nombre plus réduit d’organismes de base
110
, qui devrait favoriser une
homogénéité accrue des dispositifs de contrôle interne au niveau local).
Cependant,
la
permanence
d’un
nombre
élevé
d’éléments
constitutifs de refus de certification ou de réserves dans les positions de la
Cour paraît avant tout liée à des différences d’appropriation des constats
du certificateur.
L’ACOSS tend à faire de la certification des comptes l’un des
catalyseurs, pour certains sujets le principal, de la transformation des
modes de travail et du pilotage des organismes de son réseau.
La CNAMTS tient compte des observations de la Cour sur des
points importants, notamment le niveau souhaitable des objectifs de
fiabilité des prestations en nature et des indemnités journalières et la
fiabilisation de l’estimation des provisions pour rappels de prestations.
Cependant, en dehors des risques professionnels (branche AT-MP), la
certification des comptes a des effets d’entraînement encore limités dans
110. Départementalisation des CPAM (2010), départementalisation des CAF (2011) et
départementalisation (2009), puis régionalisation des URSSAF (2012-14), complétées
par l’attribution à certains organismes d’une compétence nationale sur l’ensemble des
établissements d’une même grande entreprise.
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les domaines relevant des services placés dans la ligne hiérarchique des
directeurs (ordonnateurs). Le chantier relatif à la dématérialisation des
pièces justificatives n’est pas assorti d’un terme précis.
S’agissant de la branche vieillesse, la Cour a fait très tôt le
diagnostic des principales insuffisances du contrôle interne. La CNAVTS
a adopté des décisions volontaristes destinées à objectiver la situation et
réduire la
fréquence et l’incidence financière des erreurs qui affectent les
pensions liquidées et mises en paiement (voir B- 3- supra
). Dans d’autres
domaines, les évolutions sont plus lentes. Ainsi, le chantier majeur de la
sécurisation des données de carrière reçues des autres organismes sociaux
a des contours imprécis, tend à se déporter dans le temps et comporte à ce
jour peu de réalisations concrètes. Un autre chantier, moins complexe, n’a
pas même été engagé
: l’absence à tort de révision de certaines pensions,
au détriment généralement des assurés, à la suite de la réception de
données de carrière postérieurement à leur attribution.
Historiquement, l’identification des bénéficiaires des prestations
servies par les CAF était exclusivement assurée par un numéro propre à
chacune d’entre elles. Il n’existait aucun dispositif permettant de vérifier
qu’une même personne ne bénéficiait pas de prestations identiques auprès
de plusieurs CAF. A la suite des observations de la Cour, la CNAF a mis
en place en 2008-2009 un référentiel national des bénéficiaires (RNB),
qui fait reposer l’identification de ces derniers sur le numéro national
d’identification (NIR), a renforcé la qualité des identifiants au regard des
données de l’INSEE («
certification des NIR ») et a mis en place des
requêtes destinées à détecter les multi-affiliations. Par la suite, la Cour a
constaté un ralentissement de la démarche de fiabilisation des comptes
dans un contexte marqué par la réorganisation du réseau des CAF. La
CNAF a engagé une démarche de refonte du dispositif de contrôle interne
de la branche dont de premiers effets sont attendus en 2012.
2
Une influence encore trop limitée de la certification sur les
ordonnateurs
Un obstacle important à l’appropriation des constats de la Cour
tient au fait
, qu’à l’origine, la certification des comptes était perçue
comme l’affaire des seuls agents comptables, les directeurs ne se sentant
pas réellement concernés. Si elle est aujourd’hui en passe d’être
surmontée pour l’ensemble des organismes nationaux, cett
e difficulté est
encore sensible dans un grand nombre d’organismes de base, au détriment
de la qualité de la production retracée dans leurs états financiers.
Alors que les contrôles a priori ou a posteriori des agences
comptables constituent historiquement le principal dispositif de contrôle
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UN PREMIER BILAN
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interne, les moyens humains affectés à ces missions par les directeurs des
organismes de base tendent à diminuer, parfois de manière plus que
proportionnelle à la réduction globale des effectifs des organismes, alors
que les gains de productivité constatés dans les activités relevant des
ordonnateurs (affiliation des assurés, liquidation des prestations et
administration générale) pourraient autoriser des redéploiements internes.
Ces évolutions tendent à remettre en cau
se l’étendue et la
profondeur des contrôles des agences comptables et, au-delà, à affaiblir la
capacité du contrôle interne à prévenir ou à corriger la présence
d’anomalies significatives dans les états financiers.
III - La nécessaire révision de certaines positions
des autorités de tutelle dans le domaine comptable
L’ordonnance de 1996 relative aux lois de financement de la
sécurité sociale a posé le principe de valeur législative de tenue des
comptes des organismes de sécurité sociale en droits constatés : les
produits et les charges de l’exercice comptable ne sont pas constitués par
les encaissements et les décaissements, mais par les entrées et les sorties
prévisibles de ressources qui trouvent leur origine dans des événements
propres à l’exercice comptable.
A
u moment de l’entrée en vigueur de la certification des comptes
du régime général, quelque dix années plus tard, les organismes du
régime général et leurs autorités de tutelle n’avaient cependant tiré que
des conséquences limitées de ce principe.
Dans le cadre de sa mission de certification des comptes, la Cour a
exprimé des observations dont la prise en compte par les organismes
nationaux du régime général et par leurs autorités de tutelle a permis
d’améliorer la sincérité et l’image fidèle donnée par les
états financiers
des branches et de l’activité de recouvrement du régime général.
Cependant, ces derniers continuent à comporter des omissions ou des
imperfections dont la correction est tributaire de décisions ministérielles.
A
Le maintien du FSV à l’écart
des comptes de la
branche vieillesse du régime général
Malgré des demandes réitérées de la Cour,
l’arrêté du 27 novembre
2006 qui fixe les règles de combinaison des comptes des organismes de
sécurité sociale n’a pas été modifié afin de permettre une combin
aison du
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FSV avec la CNAVTS, établissement public et entité combinante de la
branche vieillesse.
A défaut d’une intégration du FSV à son périmètre de
combinaison
111
, la branche vieillesse du régime général comptabilise au
titre de l’exercice des produits rel
atifs à des prises en charge de
cotisations et de prestations par le FSV qui, en réalité, correspondent pour
le FSV à des produits de l’exercice suivant.
En effet, l
e FSV connaît un déficit structurel, lié à l’insuffisance
des ressources dont il est doté.
N’étant par ailleurs pas autorisé à r
ecourir
à l’emprunt, il est dans l’impossibilité
d’effectuer des versements à
hauteur de la totalité des produits de prises en charge de cotisations et de
prestations qu’il notifie aux régimes de sécurité sociale. De ce
fait, une
partie des produits de la branche vieillesse au titre de l’exercice donne
lieu à des versements du FSV uniquement au cours de l’exercice suivant,
par prélèvement sur les produits de ce dernier.
En l’absence de rattachement de la quote
-part du résultat
déficitaire du FSV induite par les prises en charge de cotisations et de
prestations attribuées à la branche vieillesse du régime général, le déficit
de cette dernière (6
Md€
en 2011) est minoré par rapport à la réalité des
ressources de l’exercice
(à hauteur de 3,4
Md€
en 2011).
B
Une application partielle du principe des droits
constatés
Malgré la date déjà ancienne de son entrée en vigueur, les
organismes nationaux du régime général et leurs autorités de tutelle
manifestent une réticence certaine à appliquer pleinement le principe de
la tenue des comptes en droits constatés. Ainsi, une part importante des
produits demeure comptabilisée en fonction d’une logique de caisse. A
défaut d’une reconnaissance des passifs correspondants, une part majeure
des
charges (ou des réductions de produits) n’est pas retracée dans les
états financiers. Depuis 2006, la Cour s’est attachée à faire évoluer ces
situations. Elle n’y est que partiellement parvenue.
1
Le maintien de la comptabilisation de certains produits en
fo
nction d’une logique de caisse
Comme la Cour le souligne régulièrement dans ses positions sur
les comptes combinés de l’activité de recouvrement, les modes de
111.
Sous la forme d’une combinaison partagée avec les autres bénéficiaires de
s
concours du FSV. A lui seul, le régime général en représente plus des 9/10
èmes
.
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UN PREMIER BILAN
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comptabilisation des cotisations et contributions sociales des travailleurs
indépendants et des impôts et taxes affectés recouvrés par les
administrations fiscale et douanière de l’Etat s’écartent du principe de la
tenue des comptes en droits constatés.
S’agissant des prélèvements sociaux à la charge des travailleurs
indépendants, le conseil de normalisation des comptes publics (CNoCP),
suivant l’analyse de la Cour, a invalidé le critère de rattachement à
l’exercice appliqué depuis 1996 par les organismes de sécurité sociale,
qui reposait sur la date d’exigibilité
-notion voisine de celle de
l’encaisse
ment-
pour
préconiser
un
critère
fondé
sur
l’exercice
d’acquisition des revenus professionnels sur lesquels sont assis ces
prélèvements
112
. Cependant, les organismes de sécurité sociale ne sont
pas parvenus à ce jour à déterminer une méthode permettant de procéder
à une estimation fiable des prélèvements sociaux de l’exercice
113
et
continuent par conséquent à comptabiliser les cotisations et contributions
sociales des travailleurs indépendants en fonction de leur exigibilité.
L’insistance des autorités de tute
lle à vouloir appliquer aux
cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants le
même critère de rattachement à l’exercice que celui retenu
-à juste titre-
pour les cotisations et contributions sociales autoliquidées par les
employeurs de salariés conduit ainsi à une impasse. Compte tenu de
l’analogie des processus (appels d’acomptes, suivis d’une régularisation
sur la base des revenus déclarés), un alignement sur le critère de
rattachement à l’exercice de l’impôt sur le revenu dans les co
mptes de
l’Etat
-la date de la déclaration des revenus-
apparaît s’imposer.
Pour ce qui concerne l’enregistrement comptable des impôts et
taxes affectés recouvrés par les services de l’Etat, la DGFIP n’entend pas
modifier ses systèmes d’information afin de
permettre aux organismes de
sécurité sociale de les comptabiliser en droits constatés. Il conviendrait à
tout le moins qu’elle mette en œuvre des mesures d’organisation
permettant de rattacher l’ensemble des notifications à une période
d’imposition
114
, de décompenser les charges (frais de gestion et pour
dégrèvement et admissions en non-
valeur) des produits qu’elle notifie et
de notifier des créances, une estimation des provisions pour dépréciation
112. Recommandation n° 2010-01 (17 novembre 2010).
113. Cette estimation se dédouble en une estimation des revenus professionnels nets
de charges et une estimation des prélèvements sociaux assis sur ces derniers,
lesquelles présentent toutes deux des difficultés majeures.
114.
En 2011, tel n’est toujours pas le cas pour la TVA dite «
sectorielle » (boissons,
tabac et biens et services médicaux).
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de créances et une estimation des provisions pour risques et charges (au
titre notamment de litiges sur des montants réglés par les redevables)
115
.
2
La constatation encore incomplète des provisions
pour risques et charges
Compte tenu de leur souhait de voir le résultat comptable être le
plus proche possible de la prévision de résultat la plus récente, les
autorités de tutelle des branches du régime général acceptent difficilement
la constitution de nouvelles provisions pour risques et charges au titre des
passifs que la Cour identifie progressivement dans le cadre de son
approche d’audit pluriannuelle.
En effet, les règles comptables applicables aux organismes de
sécurité sociale imposent d’affecter au résultat, à l’exclusion d’une
imputation directe aux capitaux propres, les corrections d’erreurs de
comptabilisation
commises à la clôture de l’exercice précédent
116
.
Au moment de l’entrée en vigueur de la certification des comptes,
les organismes du régime général de sécurité sociale comptabilisaient des
provisions pour risques et charges techniques au titre des rappels de
prestations. Sauf exception, les autres passifs n’étaient pas recensés.
La Cour a obtenu la comptabilisation de provisions pour risques et
charges au titre des remboursements aux Etats étrangers des soins
effectués à des résidents français (2006), des annulations de versement de
cotisations en faveur des régimes spéciaux de retraite en instance à la
clôture de l’exercice (2007), des réductions de produits de prélèvements
sociaux en instance à la clôture de l’exercice (2008), des litiges relatifs à
des montants réglés par les cotisants suite à des redressements (2009)
117
,
des versements pour la retraite dont le remboursement sera demandé par
les assurés, des sommes dues au titre de l’exercice aux médecins
signataires de contrats d’amélioration des pratiques p
rofessionnelles ou
115. Dans le même sens, la Cour a relevé dans son acte de certification des comptes
de l’Etat pour l’exercice 2011 des insuffisances des systèmes d’information, qui
dégradent la continuité du chemin de révision des comptes relatifs aux produits
régaliens (impôts et taxes) et des faiblesses particulières de justification des montants
affectés à des tiers (collectivités locales et organismes de sécurité sociale).
116. Avis du conseil national de la comptabilité (CNC) n° 97-06 du 18 juin 1997.
117.
L’activité de recouvrement comptabilisait déjà des p
rovisions pour risques et
charges au titre des contentieux engagés par les entreprises pharmaceutiques.
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CAPI
118
et de la part des subventions d’investissement en action sociale
restant à verser par les organismes de la branche famille à la clôture de
l’exercice (2011).
En revanche, la branche AT-MP ne comptabilise pas de provisions
pour risques et charges au titre des incidences sur les produits de
cotisations de l’exercice en cours et des exercices antérieurs des
réductions rétroactives de taux de cotisation liées au dénouement
défavorable de litiges relatifs à l’application de la législatio
n des AT-MP
qui sont pendants à la clôture de l’exercice (contestation par les
employeurs de salariés, pour des motifs de fond ou de procédure, de
l’origine professionnelle des sinistres et du taux de l’incapacité
permanente). Cette omission, qui porte sur plusieurs centaines de millions
d’euros de provisions, constitue le premier motif du refus de certification
exprimé par la Cour sur les comptes 2011 de la branche AT-MP.
3
L’absence de mention des
engagements relatifs aux
prestations légales dans les annexes aux comptes
A la suite d’une initiative de la Cour, le conseil de normalisation
des comptes publics (CNoCP) examine depuis l’été 2011 le traitement à
réserver, dans les comptes de l’exercice, aux charges de prestations qui
ont pour origine une décision
d’attribution prise au cours de l’exercice ou
d’un exercice antérieur à ce dernier et dont le versement va se poursuivre
au titre de périodes relevant d’exercices futurs
119
.
En effet, les titulaires des prestations au 31 décembre et les ayants
droit de ces
derniers bénéficient d’engagements de droit et de fait de la
part des organismes de sécurité sociale qui ont attribué les prestations
(notamment les pensions de retraite et d’invalidité et les rentes AT
-MP).
Contrairement à la direction de la sécurité sociale et aux
organismes nationaux, la Cour estime que les charges des exercices futurs
qui résulteront des engagements donnés aux titulaires des prestations en
stock au 31 décembre et à leurs ayants droit devraient être évaluées dans
les annexes aux comptes. En effet, pour les régimes -tel le régime
général-
qui sont dépourvus de mécanisme d’équilibrage de leurs
118 . La prise en compte de cette demande de la Cour ouvre la voie à la
comptabilisation de provisions au titre des sommes dues aux médecins signataires de
contrats de performance, au titre de leur activité 2012,
dans le cadre de l’arrêté des
comptes relatif à ce même exercice.
119 .
A titre d’illustration, le cas d’une pension de retraite ayant pris effet au
1
er
septembre 2011, pour les périodes postérieures au 31 décembre 2011.
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132
résultats
120
, ces charges répondent à la définition des engagements hors
bilan posée par le plan comptable général, car elles sont susceptibles
d’engendrer des déficits et, de ce fait, d’affecter le montant ou la
consistance du patrimoine des branches.
La Cour estime que la nécessaire transparence des comptes des
régimes de sécurité sociale ne saurait durablement s’accommoder d’une
situation dans laquelle leurs principaux engagements à la clôture de
l’exercice sont occultés, alors même qu’ils sont particulièrement
significatifs et peuvent être chiffrés de manière fiable.
C
Les autres anomalies affectant le résultat de
l’exercice
Au regard des principes comptables généraux, la Cour a relevé
d’autres distorsions dans l’enregistrement des charges et des produits qui
affectent le résultat de l’exercice. A ce jour, elle n’a pas obtenu qu’il y
soit mis fin.
1
L’imputation directe de charges aux capitaux propres
L’im
putation directe aux capitaux propres, sans passage par le
compte de résultat, de produits et de charges est susceptible de fausser le
résultat de l’exercice. Dans le cadre de ses travaux, la Cour vérifie le
bien-
fondé de ce type d’imputation.
A la clôtur
e de l’exercice 2007, les teneurs de comptes n’avaient
pas accepté d’ajuster les résultats des branches du régime général des
charges correspondant à des corrections d’erreurs qui, sur le fondement
des règles applicables à la tenue des comptes des organismes de sécurité
sociale, devaient être intégrées au résultat de l
’exercice (pour un montant
de 0,3
Md€)
121
. Compte tenu d’autres distorsions, le montant total du
déficit du régime général (9,5
Md€) pour l’exercice 2007 était minoré
120 .
Par l’augmentation des taux de cotisation à hauteur de l’insuffisance de
financement ou l’affectation d’une ressource d’équilibre
: prise en charge du déficit
par un autre régime, versement d’une subvention d’équilibre par l’Etat,
affectation
d’une imposition (comme la C3S aux branches maladie et vieillesse du RSI).
121. Les règles applicables à la tenue des comptes des organismes de sécurité sociale
correspondent en substance à celles du plan comptable général. Un avis du conseil
national de la comptabilité (CNC) n° 97-06 du 18 juin 1997 impose de comptabiliser
les corrections d’erreurs dans le résultat de l’exercice. Pour leur part, les normes
comptables de l’Etat, qui s’inspirent sur ce point des normes internationales IFRS,
prévoie
nt d’imputer ces corrections directement aux capitaux propres.
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UN PREMIER BILAN
133
d’un milliard d’euros. La Cour a refusé de certifier les comptes de
l’activité de recouvrem
ent pour ce même exercice.
En revanche, les autorités de tutelle ont accepté que les teneurs de
comptes imputent aux comptes de résultats des branches du régime
général les produits liés à la dissolution du fonds des artistes auteurs, qui
avaient d’abord été affectés aux capitaux propres de l’exercice (incidence
favorable de 0,3
Md€ sur le résultat 2008 du régime général).
Dans le cadre de l’audit des comptes 2011, la Cour a à nouveau
constaté une imputation de charges aux capitaux propres, en l’espèce de
l
a branche famille, au titre de la correction d’une erreur relative à
l’absence de comptabilisation de provisions pour risques et charges
afférentes à l’exercice précédent et des dotations aux provisions de
l’exercice (pour un montant de 540
M€). Ce traitem
ent comptable relatif
à la part des subventions d’investissement en action sociale restant à
verser à la clôture de l’exercice a concouru au refus de certification des
comptes de l’exercice, que justifiaient cependant à elles seules les
insuffisances caractérisées du contrôle interne des activités de la branche.
2
Le financement des exonérations de la loi « TEPA »
Les exonérations de cotisations sociales au titre des heures
supplémentaires prévues par la loi du 21 août 2007 en faveur du travail,
de l’emploi et du pouvoir d’achat («
TEPA ») sont financées par
l’affectation de recettes fiscales recouvrées par les administrations de
l’Etat, notamment la contribution sociale sur les bénéfices (CSB).
Les recettes fiscales ainsi enregistrées au titre d’une année peu
vent
être insuffisantes au regard du coût des exonérations pour la même année.
Or, l’article 9 de la loi de finances rectificative pour 2008, toujours en
vigueur,
dispose
qu’en
cas
d’insuffisance
de
financement
des
exonérations en droits constatés dans les comptes arrêtés au 31 décembre,
l’ACOSS doit comptabiliser un «
produit à recevoir » de CSB à hauteur
de cette insuffisance.
Ce traitement comptable porte atteinte aux principes généraux de
rattachement des produits à l’exercice et conduit à améliorer à d
ue
concurrence le résultat des attributaires (branche vieillesse notamment).
En effet, le « produit à recevoir » précité (217
M€ en 2011) ne correspond
pas à un produit qui serait assis sur une assiette propre à l’exercice. Il
s’agit en fait d’un produit qui anticipe des produits de l’exercice suivant.
La suppression du dispositif d’exonération pour les entreprises
ayant au moins 20 salariés par la loi de finances rectificative du 16 août
2012 aurait vocation à s’accompagner de celle de ce mécanisme artific
iel.
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134
______________________
CONCLUSION
________________________
Six exercices comptables après son instauration, la certification des
comptes du régime général de sécurité sociale par la Cour a permis des
progrès importants. Les organismes se sont engagés dans une trajectoire
de fiabilisation de leurs comptes, de sécurisation de leurs procédures et de
maîtrise des risques d’erreur de portée financière, qui a suscité
l’engagement de multiples travaux dans le temps même où la mise en
œuvre de nombreuses réformes et la réorganisation des réseaux
mobilisa
ient fortement aussi les équipes. Il en est résulté d’ores et déjà des
améliorations souvent appréciables.
Les chantiers ainsi ouverts n’ont pu cependant encore tous aboutir
et les progrès demeurent inégaux. A ce jour, ils n’ont pas permis à la Cour
de cer
tifier sans réserve les états financiers du régime général, c’est
-à-dire
de déclarer qu’elle estime disposer d’une assurance raisonnable sur
l’absence d’anomalie significative qui pourrait les affecter.
La Cour pour sa part poursuivra sa démarche d’accompa
gnement
pour parvenir à la réalisation de cet objectif qu’elle partage avec les
organismes du régime général et leurs autorités de tutelle.
Ses constats imposent cependant que les organismes nationaux
comme leurs autorités de tutelle s’engagent plus résol
ument encore dans la
voie d’une levée progressive des réserves qu’elle a exprimées, en
accélérant les évolutions nécessaires à la sécurisation des recettes et des
dépenses et à une transparence accrue de la situation financière du
principal régime de sécurité sociale.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
A l'attention des ministères chargés de la sécurité sociale et du
budget :
11.
Définir par la voie réglementaire des objectifs et des règles
précises et opposables en matière de contrôle interne pour l’ensemble des
organismes de base et des caisses nationales en cohérence avec les
exigences de la certification.
12.
Intégrer le FSV au périmètre des comptes de la branche vieillesse
du régime général.
13.
Lever les points de blocage relatifs au traitement comptable de
certaines opérations ou situations (prélèvements sociaux des travailleurs
indépendants, impôts et taxes affectés, provisions pour litiges AT-MP et
engagements pluriannuels en matière de prestations sociales).
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