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Réponse du service à compétence nationale aux observations définitives de la Cour.
Compiègne, le 31 juillet 2024
Le SCN remercie la Cour des comptes pour ces observations qui constituent une base de réflexion
dans laquelle l’établissement pourra puiser à l’avenir les orientations de sa gestion et de son
développement. Nous souhaitons cependant apporter aux observations de la Cour les réponses ou
compléments d’informations figurant ci-après.
Concernant la mise en place d’une comptabilité analytique
(Recommandation n°1)
Mettre en œuvre une comptabilité analytique répond à plusieurs conditions :
- Réaliser une étude d’impact de la réorganisation financière
- Connaître le coût annuel de la masse salariale (T2) de Blérancourt au regard des effectifs qui y sont
affectés
- Proratiser le coût de la masse salariale des fonctions support (administratives, techniques, direction-
nelles), celles-ci étant exercées à Compiègne
- Identifier en année N les projets de l’année N+1 et leurs coûts
- Notifier des crédits dans un budget propre à l’établissement de Blérancourt
- Assurer le suivi financier (budgétaire, d’exécution budgétaire et comptable) dans l’outil Chorus
- Programmer le besoin de crédits de fonctionnement, d’investissement, de restauration et de crédits
MH (tableau de conférence budgétaire pour Blérancourt)
- Clarifier les périmètres d’intervention entre Compiègne, Blérancourt et l’AC.
Il est nécessaire de concevoir de nouveaux outils de gestion adaptés à cette recommandation.
Concernant le Musée franco-américain
(Recommandation n°2)
Le statut de ce musée trouve son origine dans trois actes, dont deux passés par A. Morgan elle-même :
-
Don du domaine par A. Morgan à la Commune de Blérancourt (29 juin 1925)
- Donation du domaine par la Commune de Blérancourt aux Musées nationaux (21 octobre 1926)
- Donation par A. Morgan des collections du Musée aux Musées nationaux (8 août 1929)
Le transfert des collections de ce musée national à une collectivité territoriale, au-delà du problème
qu’il présenterait au regard de la loi de 2002 sur les musées codifiés au Code du Patrimoine, poserait la
question du respect de la volonté de la donatrice, qui s’inscrit dans un contexte historique déterminé
motivant son acte.
Concernant la mise en place d’un PPI
(Recommandation n°4)
Le château de Compiègne a mis en place dès 2020 un PPI au niveau de l’établissement estimé chaque
année à 1M€ et intégrant divers travaux sous maîtrise d’ouvrage SCN. Le tableau d’investissement
contenant les projets priorisés (P1/P2/P3) par la direction est présenté lors de la conférence budgétaire
annuelle et lors de la réunion annuelle avec le SMF.
La dotation allouée par le SMF tient compte de la cohérence des projets dans leur inscription
pluriannuelle, des priorités au regard de l’urgence et de la capacité à les financer.
C1 Données Internes
La mise en œuvre d’un PPI plus large au sens de la Cour ne peut relever de la compétence du SCN du
fait du pilotage par le SMF et d’acteurs multiples intervenant sur ce domaine (OPPIC, UDAP, ACMH…)
Concernant les réunions de programmation des travaux
(Recommandation n° 5)
Ces réunions ont lieu régulièrement.
Concernant les collections sans lien avec le Château de Compiègne
(Recommandation n°6)
Les collections sans lien avec l’histoire du Château de Compiègne sont numériquement faibles. Il s’agit
de quelques tapisseries, vestige de l’éphémère Musée de la tapisserie mis en place au tournant du XXe
siècle et d’environ 400 chaises légères destinées à l’usage public (dépôt du Mobilier National ; une
première moitié de ces chaises vient d’être restituée, la seconde devrait l’être en fin d’année).
La question des objets dits « liturgiques », cession de 1935 aux Musées Nationaux, tend vers une
solution. Le Centre des Monuments Nationaux est intéressé par un transfert d’affectation des éléments
provenant du Panthéon. Ceux en rapport avec le sacre du Charles X pourraient être repris par le
Mobilier National ou faire l’objet d’un transfert d’affectation au Palais du Tau à Reims, comme l’ont déjà
été les éléments déposés par le Château à cette institution dans les années 1950. Enfin, les cessions et
dépôts divers du Prince et de la Princesse Napoléon ont été récolés. A l’issue de ce récolement, toutes
les pièces qui ne faisaient pas l’objet d’un dépôt officiel ont été restituées à la famille.
Concernant le projet de réserves
(Recommandation n°7)
La Cour a identifié une problématique liée aux réserves tout comme a pu le faire le prestataire COSEBA
en charge de la réalisation du Schéma Directeur de sécurité – incendie. Cette thématique doit être
abordée dans un contexte plus global intégrant différents paramètres de gestion tels que leur externali-
sation, leur rationalisation, leur sécurisation, leur protection et leur pertinence au regard des objets et
œuvres entreposées.
Ce sujet fait l’objet d’une prochaine réunion de travail avec les acteurs ministériels concernés (SMF-
MH), programmée en septembre à la demande du secrétaire général du SCN.
Concernant le Musée national de la voiture (MNV)
(Recommandation n°8)
Les collections du MNV
Aucune restauration d’envergure n’a été entreprise (en dehors du landaulet Krieger en 2014-2015, de
14 harnais en 2022-2023 et de 7 traîneaux en 2023) depuis le lendemain de la guerre. Les urgences et
urgences absolues définies à l’issue du chantier global des collections par les différents rapports des
restaurateurs sont éloquentes sur ce point. Un projet de programmation pluriannuelle des restaurations
figure dans l’avenant au PSC de 2018.
La Cour préconise le report voire l’annulation du projet de rénovation du MNV sans préciser le devenir
de ces collections exceptionnelles, tout aussi qualitatives que celles des musées de Lisbonne, Vienne
ou Munich mais différentes dans leur composition : il ne s’agit pas de collections royales ou impériales
mais d’un panorama exhaustif de l’histoire de la carrosserie et de la technique autant hippomobile
qu’automobile, principalement française du milieu du XVIII
e
siècle au début du XX
e
siècle pour l’instant,
l’ambition du projet étant de poursuivre l’écriture de cette histoire. Le report ou l’annulation du projet
de rénovation est une remise en cause de la conservation des collections pour les générations futures,
mission première d’un musée.
C1 Données Internes
Projet du MNV, urgences patrimoniales et architecturales
Il a été démontré depuis de nombreuses années que la rénovation du MNV est une priorité au regard
de l’urgence patrimoniale. En effet, les collections de véhicules (à l’exception de celles conservées en
nouvelles réserves extérieures) sont actuellement stockées dans des conditions ne permettant pas leur
conservation en raison de la vétusté des bâtiments.
De 2012 à 2019, les défaillances de la verrière ont entraîné des fuites d’eau ainsi qu’un débordement
régulier des chéneaux sur les collections qui ont été en partie bâchées pendant cette période,
entraînant de nombreuses dégradations (taches irréversibles d’humidité, développement de micro-
organismes, infestations). D’autre part, le réseau d’évacuation des eaux pluviales situé sous la cour des
Cuisines provoque des remontées d’eau qui inondent certains espaces, entraînant une humidité
relative élevée. L’inaction en matière patrimoniale met donc en péril la collection du MNV.
Les travaux tels que prévus dans l’APD conditionnent la conservation d’objets parmi les plus précieux
des collections hippomobiles et automobiles dans le monde. Ce sont à ce jour, dans l’enceinte du
château, les seuls objets dans ce cas. La stratégie de rénovation du MNV s’inscrit dans un cercle
vertueux où la rénovation du bâti a parmi ses objectifs la mise en sécurité sanitaire des collections.
Annuler ce projet revient à admettre implicitement la mise en péril de collections nationales.
L’ancien projet d’un MNV au Haras
La localisation du MNV au Haras a été remise en cause par le ministère dès avant 2018, notamment en
raison du coût élevé de cet aménagement (auquel serait venu s’ajouter celui de la rénovation des
espaces anciennement dévolus au MNV au sein du château). Par ailleurs, le plan des Haras se prêtait
mal à la présentation de véhicules. Enfin, le MNV constituant l’attrait majeur du Château de Compiègne
pour le public, il apparaissait déraisonnable de le dissocier du site principal. C’est en raison de ces
considérations que le Ministère de la culture ne s’est pas porté acquéreur des bâtiments du Haras lors
de leur mise en vente par l’IFCE en février 2016. Cette décision de l’administration s’est traduite en
2017 dans la formulation de l’appel à candidature pour le poste de directeur du SCN.
Cohérence scientifique du PSC
La décision relative à la rénovation du MNV in situ résulte des réunions d’orientation préalables à la
rédaction du complément au PSC, tenues au SMF et auxquelles ont participé la direction et la
conservation du musée. Comme tout PSC, ce texte a fait l’objet d’une présentation en commission
scientifique des musées nationaux le 10 mai 2019, suite à laquelle il a été validé par les instances
compétentes. Les études relatives au projet de rénovation du MNV (APS et APD) ont fait l’objet d’une
lettre de mission du directeur général des patrimoines à l’OPPIC. Le suivi de ces études a été assuré par
le SMF. L’APS a été présenté le 6 juin 2023. L’APD, présenté le 30 avril 2024, n’a pas suscité de réserve
de la part de l’établissement ni de sa tutelle.
L’avenant au PSC prévoit une présentation tournante des collections du MNV, de façon à produire un
renouvellement d’attractivité auprès du public. Ce dispositif permet :
- Une présentation aérée des collections permettant au public de mieux les appréhender
- Une présentation de certains véhicules hippomobiles attelés quand les harnais ont été conservés,
démarche scientifiquement pertinente et spectaculaire
- La restauration des œuvres non exposées dans de bonnes conditions, ce qui est impossible dans l’état
actuel.
C1 Données Internes
Cette solution est aujourd’hui adoptée par la plupart des musées de véhicules lorsqu’ils entreprennent
leur rénovation (voir l’évolution actuelle du Conservatoire Citroën). Les réserves extérieures ont permis
de procéder à cette rotation des collections, de façon encore limitée en raison des difficultés
rencontrées dans le mouvement des œuvres
L’attractivité du MNV
L’étude de 2016 visée par la Cour correspond à une période où le MNV était partiellement fermé, la
partie des collections la plus prisée par le public n’étant pas accessible. L’écart statistique dont il est fait
état (22% / 94%) n’a donc pas de signification réelle. En revanche, il apparaît que le Château de
Compiègne accueillait régulièrement, antérieurement à la fermeture de la cour des Cuisines au public,
plus de 200 000 visiteurs par an. Ce résultat éloquent permet de considérer que le MNV constitue bel
et bien l’attrait majeur pour le public comme le montre par ailleurs le succès remporté par les
expositions
Concept Car. Beauté pure
et
Vitesse.
Les éléments de comparaison fournis par l’établissement en réponse aux questions de la Cour
s’appuient non seulement sur des musées dédiés essentiellement à l’automobile, mais également sur
des musées exclusivement hippomobiles : Lisbonne (182 000 visiteurs en 2022), Marstallmuseum de la
résidence de Nymphenburg (300 000 visiteurs par an en moyenne), La Cour formule un avis sur la
qualité des collections du MNV, estimant qu’elles sont moins prestigieuses que celles de Lisbonne, ce
qui est contredit par l’ensemble des spécialistes du sujet.
Il convient également de rappeler que la cour des Cuisines, où se trouvent les véhicules les plus
importants et les plus monumentaux des collections, a été fermée de 2001 à 2019. Seules quelques
salles du MNV étaient alors occasionnellement ouvertes au public. Cette situation a empêché toute
opération de promotion de l’institution. La réouverture totale du MNV en 2019 s’est opérée avec les
moyens limités de l’établissement. Il est évident que le niveau antérieur ne peut être retrouvé
instantanément après une fermeture de dix-neuf ans. Néanmoins, l’augmentation du nombre de
visiteurs durant l’année 2023, confirmée par une nouvelle augmentation observée sur le premier
semestre 2024 (+ 7 % 2023-2024) est en elle-même significative à cet égard.
La restauration de la cour des Cuisines et de sa verrière Art déco, point central du MNV, associe à
l’impératif de rénovation du bâtiment une amélioration de l’attractivité du château en direction du
public familial et populaire. Premier musée créé au Château de Compiègne en 1927, le MNV, loin
d’être une entité subsidiaire, est la clé du succès public de l’établissement.
Concernant l’attractivité des châteaux et la politique des publics
(Recommandation n°9)
La prédominance des gratuités s’observe dans nombre de musées. Elle atteint par exemple 72% au
Conservatoire national des Arts et Métiers, en plein cœur de Paris. Elle intègre, outre les scolaires, les
événements nationaux (Nuit des musées, Journées européennes du patrimoine…) et les 1ers di-
manches du mois. Cette offre de gratuité correspond, il n’est pas superflu de le rappeler, à l’une des
missions de service public des institutions muséales.
Il convient de rappeler quant à la question de l’attractivité un certain nombre de handicaps dont souffre
le SCN :
- Absence de billetterie en ligne
- Seulement deux guides anglophones pour les deux sites
- Équipe de conférenciers sous-dimensionnée par rapport à l’importance du site : 2 CDI équivalents à
1,5 ETP et 6 vacataires
C1 Données Internes
- Difficulté, voire impossibilité pour des raisons statutaires de mettre en place des « packages » de visite
associant au château une autre activité. Une offre groupant plusieurs activités, possible en théorie, gé-
nérerait pour l’acheteur plusieurs paiements, dont certains à l’avance et d’autres sur place.
L’installation d’un restaurant dans l’enceinte du château se heurte à un obstacle majeur qui la rend pra-
tiquement impossible : le respect de la réglementation, en particulier en ce qui concerne les circuits
denrées / déchets et le passage des tubes d’extraction des vapeurs dans un bâtiment classé.
Afin de développer son attractivité touristique auprès des visiteurs étrangers, l’établissement s’appuie,
sur Atout-France et Hauts-de-France Tourisme et participe à plusieurs actions de promotion (Eductour,
workshops, salons). Le SCN est également membre du « Club des 9 », associant neuf établissements de
l’Oise et du Val d’Oise aussi variés que l’Abbaye de Chaalis, le Château de Chantilly ou la Mer de sable,
qui élaborent en commun une stratégie de communication et de promotion touristique. Sur le plan eu-
ropéen, le SCN est membre du Réseau des Résidences royales et impériales, au sein duquel sont éla-
borées des stratégies de communication et de promotion communes. Le MNV est membre du Club des
grands musées automobiles européens, avec lequel de nombreuses opérations de communication sont
conduites (par exemple présentation de véhicules lors du salon Auto d’Epoca à Bologne, 2023). Il vient
d’intégrer le Hippomobile Heritage Network qui rassemble les plus importantes collections hippomo-
biles publiques et privées d’Europe afin de construire des projets communs de valorisation des collec-
tions.
Afin d’entretenir avec la ville de Compiègne des relations permettant de développer l’action touristique
et la communication, une réunion bimestrielle entre le SCN et les représentants de la ville de Com-
piègne et de la communauté d’agglomération a été mise en place depuis février 2024.
Il est à noter que l’un des principaux vecteurs de promotion touristique associant la ville de Compiègne
et le SCN (Ville Impériale, réseau des villes napoléoniennes) n’est plus actif, la ville de Compiègne
ayant décidé unilatéralement de quitter le réseau il y a de cela plusieurs années. Les autres villes où se
trouvent des établissements nationaux comparables (Fontainebleau, Rueil-Malmaison, Saint-Germain-
en-Laye) sont membres de ce réseau. Le second réseau napoléonien (Fédération Européenne des Cités
napoléoniennes, Itinéraire culturel du Conseil de l’Europe) ne compte pas non plus Compiègne parmi
ses membres.
En dehors des expositions coproduites avec la RMN-GP, tant à Compiègne qu’à Blérancourt, le SCN
produit en régie au minimum deux expositions par an, réalisées à partir de ses collections propres.
Ainsi en 2024, outre
Prosper Mérimée,
trois expositions sont présentées au public :
Fantastiques traî-
neaux. Charles Coypel et L’Histoire de Don Quichotte
à Compiègne,
Les Volontaires du CARD
à Blé-
rancourt. Sur la période 2018-2024, ce sont ainsi 11 expositions qui ont été présentées au public par le
SCN.
Par ailleurs, de nombreux autres aspects de la programmation culturelle du SCN non mentionnés par la
Cour sont un facteur d’attractivité: conférences, lectures (
Francis Huster lit Mérimée
), concerts ou soi-
rées
Cinéma au château
ont contribué à la fidélisation d’un public de proximité.
Rodolphe RAPETTI
Conservateur général du Patrimoine
Directeur des musées et domaine nationaux
des Châteaux de Compiègne et Blérancourt.
C1 Données Internes