COUR
DES
COMPTES
LA
SÉCURITÉ
SOCIALE
SEPTEMBRE 2008
SOMMAIRE
I
Pages
Réponses
Introduction générale
Première partie
– La situation des comptes
sociaux 2007
C
HAPITRE
I
L
ES COMPTES SOCIAUX EN
2007
I. Les tableaux d’équilibre
Recommandations
II. L’évolution des comptes sociaux en 2007
III. Les relations entre l’Etat et la sécurité sociale
IV. La dette de la sécurité sociale
Synthèse
Recommandations
V. L’évolution des ressources du régime général
depuis 2001
Recommandations
C
HAPITRE
II
L’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES
D
’
ASSURANCE MALADIE
I. Les réalisations de l’ONDAM 2007
Synthèse
Recommandation
II. Les dépenses de soins infirmiers dans
l’ONDAM 2007
Recommandations
1
3
5
7
16
16
32
36
45
46
46
57
59
61
76
77
77
91
445
446
C
OUR DES COMPTES
II
Pages
Réponses
III. L’ONDAM et les négociations
conventionnelles
Synthèse
Recommandations
C
HAPITRE
III
L
ES PROGRAMMES DE QUALITE ET
D
’
EFFICIENCE
I. Les conditions de mise en oeuvre
II. Les améliorations à apporter aux PQE
Synthèse
Recommandations
C
HAPITRE
IV
L
ES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
I. Les contrôles classiques des COREC
II. Les contrôles dans le cadre du réseau d’alerte
III. Les créances prescrites
IV. Le contrôle interne dans les caisses de
mutualité sociale agricole
V. Les contrôles effectués sur l’Etat employeur
Recommandations
91
112
113
115
117
126
129
130
131
133
136
144
149
155
160
448
SOMMAIRE
III
Pages
Réponses
Deuxième partie
– La gestion des risques
C
HAPITRE
V
L
E FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET TRANSFERTS DE CHARGE
ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
I. La dépense finale de santé : qui finance quoi ?
II. Une relative stabilité depuis 1996
III. Les mesures de transfert introduites depuis la
loi du 13 août 2004
IV. Coût et effets de la couverture complémentaire
Synthèse
Recommandation
C
HAPITRE
VI
L
ES PHARMACIES D
’
OFFICINES ET LEURS
TITULAIRES LIBERAUX
I. Un réseau officinal excédentaire au regard de la
réglementation
II. La rémunération de l’officine
III. Les revenus des pharmaciens
Synthèse
Recommandations
C
HAPITRE
VII
L’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
I. Une diversité de téléservices
II. Des choix structurants à venir
161
163
165
172
177
185
191
192
193
195
201
214
220
221
223
226
240
453
458
459
C
OUR DES COMPTES
IV
Pages
Réponses
III. Le pilotage administratif, juridique et financier
Synthèse
Recommandations
C
HAPITRE
VIII
L
ES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
I. La politique de restructuration des
établissements de santé
II. Le bilan des restructurations
III. Les conditions d’une relance des
restructurations
Synthèse
Recommandations
C
HAPITRE
IX
L
ES SYSTEMES D
’
INFORMATION DANS LES
ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
I. Les constats faits au
niveau des établissements
II. Le pilotage national des systèmes
d’information hospitaliers
III. L’appui régional aux projets des
établissements en matière de systèmes
d’information hospitaliers
IV Le financement du système d’information
hospitalier
Synthèse
Recommandations
253
261
262
263
266
279
298
303
304
305
308
319
324
327
331
331
463
470
SOMMAIRE
V
Pages
Réponses
C
HAPITRE
X
L
ES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
I. Un dispositif peu simplifié
II. Un dispositif plus coûteux que prévu
III. Le libre choix d’activité
IV. Le libre choix du mode de garde
Synthèse
Recommandations
C
HAPITRE
XI
A
SPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE
RETRAITE
I. Les outils de pilotage des régimes de retraite
Synthèse
Recommandations
II. L’adossement des régimes spéciaux aux
régimes de droit commun
Recommandations
III. Les minima de pension
Synthèse
Recommandations
C
HAPITRE
XII
L
E SUIVI DES PRECEDENTES
RECOMMANDATIONS
I. Le suivi des recommandations effectué par les
administrations
333
335
340
343
346
355
356
357
359
365
365
366
377
377
393
393
395
397
472
476
486
C
OUR DES COMPTES
VI
Pages
Réponses
II. La situation des UGECAM
III. Le retrait de fonctions des directeurs et agents
comptables des organismes de base du régime
général de sécurité sociale
IV. La gestion du risque accidents du travail et
maladies professionnelles
V. L’examen du dispositif spécifique prévu pour
les victimes de l’amiante
Synthèse
Conclusion générale
Annexe
Liste récapitulative des recommandations
Réponses des ministres
Réponses des organismes
Glossaire
401
405
410
421
424
425
427
433
443
491
DÉLIBÉRÉ
_____
Conformément aux dispositions de l’article L. 132-3 du code des
juridictions financières, la Cour des comptes, délibérant en chambre du
conseil, a adopté le présent rapport.
Ce texte a été arrêté au vu des projets qui avaient été communiqués
au préalable aux administrations et aux organismes concernés, et après
qu’il a été tenu compte, quand il y avait lieu, des réponses fournies par
ceux-ci. En application des dispositions susvisées, ces réponses sont
jointes au rapport ; elles engagent la seule responsabilité de leurs auteurs.
***
Étaient présents : M. Séguin, premier président, MM. Pichon, Picq,
Babusiaux, Mmes Bazy
Malaurie, Cornette, Ruellan, MM. Hernandez,
Descheemaeker, présidents de chambre, M. Sallois, président de chambre
maintenu en activité, MM. Billaud, Berthet, de Mourgues, Malingre,
Hespel, Richard, Devaux, Arnaud, Bayle, Bouquet, Gillette, Duret, Martin
(Xavier-Henri), Cardon, Thérond, Mme Froment-Meurice, M. Beysson,
Mme Bellon, MM. Gasse, Moreau, Ritz, Mme Levy-Rosenwald, MM.
Pannier,
Lebuy,
Lesouhaitier,
Lefas,
Durrleman,
Cazala,
Gauron,
Alventosa, Lafaure, Mme Morell, MM. Gautier, Morin, Braunstein,
Mme Saliou (Françoise), MM. Levy, Deconfin, Mme Ulmann, MM.
Barbé, Tournier, Vermeulen, Mmes Colomé, Seyvet, MM. Bonin, Vachia,
Vivet, Mme Moati, MM. Mollard, Cossin, Davy de Virville, Diricq,
Lefebvre, Mme Aubin-Saulière, MM. Sabbe, Pétel, Martin (Christian),
Valdiguié, Ténier, Lair, Mme Trupin, M. Corbin, Mme Froment-Védrine,
MM. Rigaudiat, Ory-Lavollée, Korb, de Gaulle, Mmes Saliou (Monique),
Carrère-Gée,
MM.
Uguen,
Zérah,
Guédon,
Mme Gadriot-Renard,
MM. Martin (Claude), Bourlanges, Le Méné, Urgin, Baccou, Schwarz,
conseillers maîtres, MM. Gleizes, Lemasson, Schaefer, Zeller, d’Aboville,
Limodin, André, Cadet, Blanc, Pélissier conseillers maîtres en service
extraordinaire, M. Rabaté, conseiller maître, rapporteur général.
Etait présent et a participé aux débats : M. Bénard, Procureur
général.
Etait présent en qualité de rapporteur et n’a donc pas pris part aux
délibérations : M. Queyranne, auditeur.
Madame Mayenobe, secrétaire général, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
F ait à la Cour, le 9 septembre 2008.
Les travaux, dont ce rapport constitue la synthèse,
ont été effectués par :
- M. Jean-François Carrez, MM. Alain Gillette. Christian Cardon,
Mmes Martine Bellon, Marianne Lévy-Rosenwald, MM. André Gauron,
Michel Braunstein, Jean-Pierre Bonin, Noël Diricq, Laurent Rabaté,
conseillers maîtres ;
- M. Emmanuel Roux, Mmes Pascale Bouzane de Mazery,
Stéphanie Bigas-Reboul, conseillers référendaires ;
- M. Maximilien Queyranne, Mme Barbara Falk, auditeurs ;
- Mme Béatrice de Casson, MM. Clément Contan. Sébastien
Gallée, Mme Anny Golfouse-Buet, MM. Jacques Minery, Frédéric Salas,
Fabrice Lenseigne, rapporteurs ;
- Mmes Sylvie Apparitio, Martine Koci-Cillario, assistantes ;
- Mme Camille L’Hernault, expert ;
Mme le Dr. Yvette Ract, M. Eduardo Gelbstein.
Ce projet de rapport a été délibéré par la 6
ème
chambre de la Cour le
10 juillet 2008 sous la présidence de Mme Rolande Ruellan, présidente de
chambre.
Ce projet a ensuite été arrêté par le comité du rapport public et des
programmes du 22 juillet 2008 présidé par M. Philippe Séguin, premier
président, et a été communiqué, en totalité ou par extraits, aux
administrations et organismes concernés.
L’examen des réponses des administrations et organismes a été
effectué par la 6
ème
chambre le 29 août 2008.
________________
INTRODUCTION GENERALE
_________________
Dans une première partie, le présent rapport porte sur les éléments
propres à l’année 2007 : la Cour rend son avis sur « la cohérence des
tableaux d’équilibre » et procède à une « analyse de l’ensemble des
comptes »
1
des organismes inclus dans le champ des LFSS.
L’examen de la mise en oeuvre de l’objectif national de dépenses
d’assurances maladie (ONDAM) est complété par des analyses plus
ciblées, portant sur la régulation des dépenses de soins infirmiers et sur
l’articulation entre l’ONDAM et les négociations conventionnelles.
La Cour examine ensuite les programmes de qualité et d’efficience
(PQE) joints à la LFSS pour 2008 qui ont pour objet d’améliorer la
performance des politiques sociales.
Enfin, comme la loi l’a prévu, le rapport rend compte des
« contrôles et avis émis en 2007 par les organismes de contrôle placés sous
sa surveillance » dans le cadre des COREC et du réseau d’alerte ainsi que
des contrôles effectués par les URSSAF sur le respect par l’Etat de ses
obligations d’employeur
2
.
Une deuxième partie présente les travaux effectués par la Cour sur
la gestion des risques sociaux. Pour la branche maladie, sont présentées
des insertions relatives au développement des dossiers médicaux en ligne,
au réseau officinal et aux revenus des pharmaciens et à la répartition des
financements entre assurance obligatoire, complémentaires et ménages.
Les dépenses hospitalières, qui représentent près de la moitié des
dépenses de l’assurance maladie, font l’objet de deux insertions, l’une
relative
aux
restructurations
hospitalières,
l’autre
aux
systèmes
d’information
3
.
La branche retraite fait l’objet d’analyses portant successivement
sur le pilotage des régimes, sur les opérations d’adossement de certains
régimes au régime général et sur le minimum de pensions ou « minimum
contributif ». Enfin, une insertion est relative aux aides aux jeunes enfants
distribuées par la branche famille.
1. Ces deux missions sont explicitement prévues par l’article LO 132-3 du code des
juridictions financières (CJF)
2. Conformément aux dispositions prévues, d’une part dans l’article précité LO 132-3,
d’autre part au L. 111-6, du CJF.
3. Dans ce dernier cas, les travaux dont « rend compte » ce rapport ont été réalisés en
liaison avec les chambres régionales des comptes, dans le cadre du « programme
trisannuel de travaux » prévu à l’article L. 132-3-2 du CJF.
C
OUR DES COMPTES
2
Comme
les
années
précédentes,
des
recommandations
ou
orientations accompagnent et prolongent les constats effectués. Une
analyse particulière est consacrée, dans le présent rapport, au suivi des
recommandations précédentes, tel qu’il apparaît dans le bilan annuel
qu’en dresse le Gouvernement, à l’intention du Parlement. La Cour a
souhaité revenir en outre plus particulièrement sur certaines de ses
recommandations, encore insuffisamment suivies d’effet.
PREMIERE PARTIE
LA SITUATION DES COMPTES
SOCIAUX 2007
5
Chapitre I
Les comptes sociaux en 2007
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
7
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Conformément à l’article LO. 132-3 du code des juridictions
financières, le présent chapitre « comprend l’avis de la Cour sur la
cohérence des tableaux d’équilibre relatifs au dernier exercice clos ». En
application de la loi organique du 2 août 2005 (LOLFSS), ces tableaux, qui
retracent les résultats annuels d’ensemble des régimes et organismes de
sécurité sociale pour 2007, sont présentés en vue de leur approbation dans
le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
Ce chapitre expose, dans sa première partie, l’avis de la Cour sur
les tableaux d’équilibre de 2007 et les vérifications afférentes. Distinct de
la certification des comptes du régime général, cet exercice tient compte
cependant de l’opinion qu’elle a exprimée sur les comptes de 2007. Les
tableaux d’équilibre servent également de fondement à l’analyse de
l’évolution des comptes de la sécurité sociale en 2007, présentée dans la
deuxième partie du chapitre et effectuée notamment en référence aux
prévisions votées par le Parlement. La Cour revient ensuite sur les
relations entre l’Etat et la sécurité sociale, afin d’éclairer les évolutions
constatées en 2007 et d’apprécier la pertinence des informations
financières disponibles.
Ce chapitre évoque enfin, comme les années précédentes, la
situation financière des régimes et examine spécifiquement la question du
financement de la dette de la sécurité sociale et de son coût. La dernière
partie du chapitre dresse un panorama de l’évolution des ressources du
régime général depuis 2001, qui constitue le prolongement d’une analyse
effectuée sur la période 1980-2000, publiée par la Cour dans son rapport
sur la sécurité sociale de 2001.
I - Les tableaux d’équilibre
Etablis par la direction de la sécurité sociale, les tableaux
d’équilibre se présentent sous la forme de comptes de résultat simplifiés,
avec trois agrégats : les « dépenses », les « recettes » et les « soldes ». Ils
portent sur trois sous-ensembles distincts : le régime général, l’ensemble
des régimes obligatoires de base de sécurité sociale dont les résultats sont
présentés par branche et les organismes concourant à leur financement.
Les tableaux sont établis pour trois exercices : l’exercice clos, l’année en
cours et celui de la loi de financement (aux termes de la loi, les tableaux
d’équilibre prévisionnels pour 2008 et 2009 du PLFSS pour 2009 ne font
pas l’objet d’un avis de la Cour).
C
OUR DES COMPTES
8
A
–
Le cadre de la mission de la Cour
Conformément aux dispositions de la LOLFSS, la Cour a exprimé
un premier avis sur les tableaux d’équilibre dans son rapport sur la
sécurité sociale de 2007, au titre de l’exercice clos au 31 décembre 2006.
A cette occasion, elle avait défini le cadre normatif de cette
nouvelle mission
4
, destinée à « exprimer l’appréciation de la Cour sur la
cohérence d’ensemble de la présentation des résultats annuels de la
sécurité sociale ». Cette appréciation porte sur trois éléments :
-
les processus de centralisation et de contrôle des comptes des régimes
et organismes, en amont de leur consolidation dans les tableaux
d’équilibre ;
-
les règles retenues pour établir les tableaux d’équilibre (consolidation
des comptes), en particulier leur conformité aux principes comptables
applicables à la sécurité sociale ;
-
la comparabilité des tableaux d’équilibre d’une année sur l’autre
(permanence des méthodes).
La portée de l’avis avait également été précisée. En particulier, la
Cour soulignait que, par nature, son avis ne visait pas à apprécier les
comptes des régimes et organismes pris individuellement mais qu’il tenait
compte des conclusions des missions de certification légale ou
contractuelle réalisées par des auditeurs indépendants, dont le régime
général audité directement par la Cour.
Les vérifications mises en oeuvre par la Cour au titre des tableaux
d’équilibre de 2007 s’inscrivent dans un cadre inchangé par rapport à
2006.
B
–
Les tableaux d’équilibre de l’exercice 2007
Objet de l’avis de la Cour, les tableaux d’équilibre présentés ci-
dessous lui ont été transmis avec la signature du directeur de la sécurité
sociale et figureront dans le projet de loi de financement pour 2009.
4. Voir rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, chapitre I. Celui-ci avait été
préfiguré dans le rapport sur la préparation à la certification des comptes de la sécurité
sociale de septembre 2006.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
9
Tableau d’équilibre par branche du régime général
En Md€
Recettes
Dépenses
Solde
Maladie
144,4
149,0
-4,6
Vieillesse
85,7
90,3
-4,6
Famille
54,6
54,4
0,2
Accidents du travail et maladies professionnelles
10,1
10,6
-0,5
Total (après neutralisation des transferts entre branches)
290,0
299,5
-9,5
Source :
Direction de la sécurité sociale
Tableau d’équilibre par branche des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale
En Md€
Recettes
Dépenses
Solde
Maladie
167,6
172,6
-5,0
Vieillesse
169,0
172,9
-3,9
Famille
55,1
54,9
0,2
Accidents du travail et maladies professionnelles
11,6
12,0
-0,4
Total (après neutralisation des transferts entre branches)
398,3
407,4
-9,1
Source :
Direction de la sécurité sociale
Tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des
régimes de base
En Md€
Recettes
Dépenses
Solde
Fonds de solidarité vieillesse
14,4
14,3
0,1
FFIPSA
14,3
16,5
-2,2
Source :
Direction de la sécurité sociale
C
–
La construction des tableaux d’équilibre de 2007
Dans son avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre de
l’exercice 2006, la Cour avait souligné l’absence de garanties suffisantes
en termes de contrôle et de traçabilité des opérations sous-tendant leur
établissement (centralisation, contrôle et consolidation des comptes des
régimes et organismes) et l’assurance limitée qui en découlait quant à la
correcte ventilation des résultats par branche de l’ensemble des régimes.
En outre, leur cohérence avec les comptes des régimes et
organismes était affectée par l’existence d’un retraitement des données
comptables établies par ces derniers, consistant à contracter certains
produits et charges (présentation « en net ») et ayant pour effet de minorer
artificiellement leur montant au regard des règles comptables applicables,
sans incidence, cependant, sur les « soldes » de l’exercice.
C
OUR DES COMPTES
10
La Cour avait cependant observé que la permanence des méthodes
d’établissement des tableaux d’équilibre permettait leur comparabilité
d’une année à l’autre.
1
–
Une amélioration limitée de leur mode d’élaboration
En réponse aux observations formulées par la Cour l’an dernier,
plusieurs éléments concourant à une amélioration des modalités
d’établissement des tableaux d’équilibre pour 2007 ont été observés. Une
démarche visant à contrôler les données comptables des régimes et
organismes intégrées dans les tableaux d’équilibre a été mise en place et
la traçabilité des opérations de consolidation comptable a été renforcée.
Cependant,
ces
évolutions
ont
une
incidence
limitée
sur
l’assurance apportée à la Cour quant à la cohérence entre les comptes
annuels arrêtés par les régimes et organismes (pour certains examinés par
des auditeurs indépendants) et leur restitution sous une forme agrégée
dans les tableaux d’équilibre.
En effet, s’il est désormais possible d’examiner la décomposition
des tableaux d’équilibre par régime et par branche, les contrôles effectués
à partir des comptes annuels par la mission comptable permanente (MCP)
rattachée au ministère chargé de la sécurité sociale, restent insuffisants.
La démarche récemment engagée en réponse aux attentes de la Cour a
vocation à être précisée et structurée afin d’apporter des éléments
d’assurance probants sur lesquels elle pourrait se fonder pour exprimer
son avis.
En outre, alors que les dispositions réglementaires fixent au
15 avril n+1
5
la date de communication des comptes par les régimes à la
MCP en vue de leur contrôle, celle-ci ne disposait pas, à la mi-juillet 2008
des comptes de l’ensemble des régimes et organismes importants, limitant
de facto le champ possible de ses contrôles. Cette situation, déjà
soulignée par la Cour l’an dernier, doit impérativement évoluer.
Si les vérifications effectuées par la Cour n’ont pas mis en
évidence d’anomalie majeure dans la reprise des comptes, seule une
assurance limitée peut être apportée sur la ventilation des charges et
produits par branche. En outre, elles ont été limitées par l’indisponibilité
des comptes de certains régimes et organismes évoquée précédemment.
5. Arrêté du 30 décembre 2005. Cette date correspond à la date à laquelle sont arrêtés
définitivement les comptes.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
11
2
–
La persistance d’opérations injustifiées de contraction des
comptes
Les tableaux d’équilibre des régimes donnent toujours lieu aux
retraitements critiqués depuis 2006 par la Cour
6
, qui conduisent à une
minoration injustifiée des dépenses et recettes affichées et les éloignent
de la présentation des résultats faite par les régimes et organismes dans
leurs comptes annuels.
Ces retraitements correspondent à des contractions de charges et de
produits, sans incidence sur les soldes. Ils ont un impact de 17,7 Md€
pour le régime général et de 21,2 Md€ pour l’ensemble des régimes. Il
doit notamment être souligné que les tableaux d’équilibre de 2007 ne
portent pas trace des charges et produits exceptionnels pourtant
comptabilisés dans les comptes du régime général suite aux observations
exprimées par la Cour, dans le cadre de la certification, sur la
comptabilisation de l’opération d’extinction partielle des dettes de l’Etat
(5,1 Md€).
Pour la direction de la sécurité sociale, ces retraitements se
justifient par le fait qu’ils donnent une vision « économique » de
l’équilibre annuel des régimes et branches dans la mesure où ils corrigent
certains soldes comptables et tendances d’évolutions dépourvus de
signification. Cependant, les lois de financement de la sécurité sociale
répondent au cadre unique de la comptabilité d’engagement (droits
constatés). Le plan comptable des organismes de sécurité sociale
(PCUOSS), référentiel réglementaire appliqué par les organismes, devrait
donc constituer, par principe, la seule grille de lecture possible de leurs
résultats annuels et de leur situation financière.
En outre, le caractère « économique » d’un solde ou flux
comptable est indéfini et potentiellement extensible. S’il est possible
d’admettre que la contraction des dotations et reprises de provisions
statistiques traduit mieux la réalité des flux financiers annuels, tel n’est
évidemment pas le cas pour certains éléments constitutifs de dépenses,
comme les charges liées à la prise en charge des cotisations sociales des
praticiens
et
auxiliaires
médicaux
ou
les
charges
de
gestion
administrative, minorées par les produits d’activités annexes.
Tel n’est pas non plus le cas pour les charges ayant un caractère de
pertes, comme les pertes de créances de cotisations sociales, qui viennent
6. Contraction des charges et produits constatés par la CNAMTS au titre de la prise en
charge des cotisations des praticiens et auxiliaires médicaux, des pertes sur créances
de cotisations avec les produits de cotisations, des charges et produits de gestion
courante, des dotations et reprises de provisions.
C
OUR DES COMPTES
12
diminuer le montant des produits de cotisations de l’année. En sens
inverse, il peut être observé que les flux financiers entre la CNAMTS et
la CNSA, bien que « gonflant » les charges et produits de la branche
maladie en raison des règles comptables qui leur sont propres, ne font pas
l’objet d’une contraction, alors qu’ils n’ont pourtant pas de signification
économique particulière
7
.
La certification, à partir de 2008
8
, des comptes des régimes et
organismes autres que le régime général par des commissaires aux
comptes ne peut qu’accroître la nécessité d’assurer la cohérence des
tableaux d’équilibre avec les comptes dont ils sont issus. La Cour réitère
ainsi sa recommandation d’abandonner les retraitements n’ayant pas de
justification comptable. L’abandon des retraitements injustifiés serait sans
incidence sur la série historique des soldes des régimes et la comparabilité
dans le temps des évolutions des produits et des charges serait assurée par
la série tirée des rapports de la commission des comptes de la sécurité
sociale
9
.
Il conviendrait donc que la DSS engage une réflexion de fond sur
l’ensemble des opérations auxquelles elle procède pour l’établissement
des tableaux d’équilibre afin d’abandonner celles qui sont comptablement
injustifiées.
3
–
La terminologie imparfaite des tableaux d’équilibre
Bien que la LOLFSS indique que les tableaux d’équilibre retracent
des flux de « recettes » et de « dépenses » ainsi que des « soldes », cette
dénomination reflète imparfaitement la nature des montants présentés.
Les résultats traduits par les tableaux d’équilibre ont vocation à être
appréhendés en tenant compte de deux précisions méthodologiques.
D’une part, les flux ne correspondent pas à des recettes et dépenses
au sens, communément admis, de la comptabilité budgétaire, mais bien à
des produits et charges comptables, même s’ils sont minorés par les
retraitements évoqués précédemment. Ils sont d’ailleurs dénommés
« produits et charges nets » par la commission des comptes de la sécurité
sociale. D’autre part, les « soldes » correspondent strictement à
7. Selon la DSS, cette question devrait être réglée dans le cadre d’une révision du
traitement comptable, qui sera soumise au Haut conseil de la comptabilité des
organismes de sécurité sociale (HCICOSS) d’ici la fin de 2008.
8. Article 31-III de la LFSS pour 2006.
9. Les rapports de la CCSS présentent deux tableaux, l’un relatif aux comptes bruts
l’autre aux comptes retraités dits nets.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
13
l’agrégation des résultats comptables et n’ont qu’une relation éloignée
avec la notion de solde de trésorerie que ce terme désigne souvent.
4
–
L’incidence de l’opinion de la Cour sur les comptes du
régime général
Les vérifications effectuées par la Cour dans le cadre de la
certification des comptes du régime général l’ont conduite à constater
qu’au regard du référentiel comptable en vigueur, le déficit de l’exercice
2007 est sous évalué de près d’1 Md€
10
en raison d’irrégularités
comptables portant sur trois opérations de l’exercice 2007.
Celles-ci concernent d’abord le rattachement aux résultats de 2007
des acomptes de CSG sur revenus de placement, exigibles au titre de
janvier 2008 ; ensuite, la compensation intégrale du coût des exonérations
sur les heures supplémentaires, inscrite dans les comptes sans attendre de
disposition en loi de finances et enfin l’absence de comptabilisation au
compte de résultat de la régularisation à la baisse des créances de
cotisations du régime général.
Cette situation, dont la responsabilité incombe aux administrations
de tutelle, a conduit la Cour à refuser de certifier les comptes de l’activité
de recouvrement, pilotée par l’ACOSS. Les irrégularités relevées ont une
incidence directe sur les résultats des branches maladie et retraite dont le
déficit est minoré respectivement de 0,7 Md€ et de 0,3 Md€. Elles sont en
revanche sans incidence significative sur les soldes des branches famille
et accidents du travail et maladies professionnelles
11.
En outre, comme en 2006, la Cour s’est déclarée dans
l’impossibilité de certifier les comptes de la branche famille en raison
notamment des insuffisances du contrôle interne et de la sous évaluation
de certaines charges, estimée à 0,3 Md€. Elle a certifié les comptes des
autres branches avec des réserves, celles-ci n’appelant toutefois pas,
compte tenu de leur nature ou d’une impossibilité de les chiffrer
précisément, une correction des résultats de l’exercice.
Les tableaux d’équilibre présentés dans le projet de loi de
financement pour 2009 sont fondés sur les comptes tels qu’ils ont été
10. Voir rapport de certification des comptes du régime général, p. 38 et p. 42.
11. L’excédent de la branche famille passerait de 156 M€ à 226 M€ et le déficit de la
branche AT-MP de 455 M€ à 488 M€.
C
OUR DES COMPTES
14
arrêtés
12
par les régimes et organismes, lesquels n’intègrent pas les
observations faites par la Cour sur les irrégularités comptables à l’issue de
sa mission de certification des comptes, le 30 juin 2008.
D
–
L’avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre
En application de l’article I-VIII-2 de la loi organique relative aux
lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS) du 2 août 2005, la
Cour des comptes a procédé à des vérifications sur les tableaux
d’équilibre par branche, établis sous la responsabilité du ministre chargé
de la sécurité sociale. Ils seront présentés dans le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2009 et soumis à l’approbation du
Parlement. Sur la base des vérifications effectuées, la Cour exprime l’avis
suivant :
Même si les vérifications effectuées par la Cour ont montré des
progrès dans le mode d’élaboration des tableaux d’équilibre, il demeure que
seule une assurance limitée peut être apportée sur la cohérence entre les
comptes des régimes et organismes et ces tableaux d’équilibre en raison d’un
contrôle insuffisant des données comptables en amont. Ils intègrent, d’autre
part, des retraitements sans justification comptable, consistant à contracter les
charges et les produits.
En outre, ces tableaux sont fondés sur les comptes tels qu’ils ont été
arrêtés par les régimes, lesquels n’intègrent pas les observations que la Cour
a faites sur les irrégularités comptables qui l’ont conduite à refuser de
certifier les comptes de l’activité de recouvrement du régime général de
sécurité sociale. Cette situation améliore de 1,0 Md€ les résultats d’ensemble
présentés dans le tableau d’équilibre du régime général et dans celui de
l’ensemble des régimes de sécurité sociale.
E
–
Les conséquences de l’avis de la Cour
La Cour présente ci-dessous des tableaux d’équilibre rectifiés qui
incluent les corrections des irrégularités comptables susvisées et la
suppression des retraitements contestés
13
.
12. Les modalités d’arrêté et d’approbation des comptes étaient encore variables, pour
l’exercice 2007, selon les régimes. Un décret en préparation prévoit de les unifier.
L’approbation des comptes par le conseil d’administration interviendra après qu’il a
pris connaissance du rapport de certification des comptes.
13. Le tableau relatif aux fonds de financement n’est pas modifié (voir supra).
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
15
Tableau d’équilibre par branche du régime général
En Md€
Recettes
Dépenses
Solde
Maladie
156,5
161,8
-5,3
Vieillesse
87,4
92,3
-4,9
Famille
57,3
57,1
0,2
Accidents du travail et maladies professionnelles
11,0
11,5
-0,5
Total (après neutralisation des transferts entre branches)
307,3
317,7
-10,5
Source :
Cour des comptes
Tableau d’équilibre par branche des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale
En Md€
Recettes
Dépenses
Solde
Maladie
181,9
187,6
-5,7
Vieillesse
171,7
175,9
-4,2
Famille
57,8
57,6
0,2
Accidents du travail et maladies professionnelles
12,6
13,0
-0,4
Total (après neutralisation des transferts entre branches)
418,9
429,0
-10,1
Source :
Cour des comptes
La commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) a
examiné les résultats du régime général le 18 juin 2008
14
, alors qu’elle
n’avait pas encore connaissance des opinions de la Cour. Ces résultats ont
été repris sans changement dans les tableaux d’équilibre du PLFSS pour
2009.
Si l’opportunité d’une adaptation du calendrier de la CCSS paraît
devoir être examinée, il convient, en tout état de cause, d’accompagner
toute communication financière sur les comptes du régime général
antérieure à l’expression de l’opinion de la Cour, des précautions qui
s’imposent de manière usuelle pour des données financières non encore
auditées.
Plus généralement, depuis que les comptes du régime général sont
soumis à certification, l’implication de la CCSS dans la communication
des résultats de l’année passée ne peut conduire qu’à un risque de
confusion, son intervention étant à tort assimilée à une forme de
validation des comptes. La Cour recommande donc, à nouveau, de
recentrer les missions de la CCSS sur les prévisions. Un changement de
sa dénomination contribuerait à cette clarification indispensable.
14. Cette commission prend connaissance, au printemps, des comptes du régime
général pour l’année précédente et, à l’automne, des comptes de l’ensemble des
régimes de base.
C
OUR DES COMPTES
16
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
1.
Améliorer le dispositif de contrôle des comptes des organismes
intégrés aux tableaux d’équilibre.
2.
Mettre fin à la pratique de présentation des résultats intégrant des
retraitements sans justification comptable.
3.
Accompagner toute communication financière sur les résultats des
régimes de sécurité sociale, antérieure à l’expression des opinions de la
Cour et des commissaires aux comptes, des précautions d’usage.
4.
Recentrer la CCSS sur ses missions de prévision et modifier sa
dénomination en conséquence.
II - L’évolution des comptes sociaux en 2007
Les observations de la Cour sur les comptes du régime général ou
sur la construction du tableau d’équilibre conduisent à proposer des
données rectifiées. Pour autant, il n’a pas paru souhaitable de se fonder
sur celles-ci pour présenter les évolutions de l’exercice 2007, par régimes
ou par branches. Afin d’assurer l’homogénéité des données présentées et
leur cohérence avec celles qui seront présentées dans le projet de loi de
financement pour 2009, les commentaires relatifs à l’évolution des
comptes sont donc fondés sur les données des tableaux d’équilibre du
PLFSS pour 2009 et des LFSS antérieures.
A
–
Les résultats d’ensemble
1
–
Les résultats du régime général
Dans le tableau qui suit, une double comparaison est effectuée : en
premier lieu entre les réalisations de 2007 et celles de l’année
précédente ; et en second lieu entre les réalisations et les prévisions. Ce
sont ces prévisions rectifiées qui ont été retenues comme point de
comparaison avec les comptes de 2007, dans la mesure où elles ont fait
l’objet d’un vote plus récent du Parlement (LFSS 2008). Bien entendu, la
comparaison entre prévisions et réalisations serait très différente, si l’on
retenait les prévisions initiales, dans la mesure où les prévisions de déficit
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
17
ont été réévaluées à la hausse de près de moitié
15
, entre le PLFSS pour
2007 et le PLFSS pour 2008 qui les a rectifiées.
Résultats du régime général
En M€
Tableaux d’équilibre
Réalisés
2006
Prévisions
initiales
(en LFSS 2007)
Prévisions
rectifiées
(en LFSS 2008)
Réalisés
2007
Maladie
AT – MP
Famille
Retraite
-5 936
-59
-891
-1 854
-3 898
84
-729
-3 504
-6 203
-366
-499
-4 584
-4 629
-455
156
-4 572
Régime général
-8 740
-8 046
-11 652
-9 500
Source :
Comptes combinés des branches (exécution), LFSS (prévisions)
Le déficit d’ensemble du régime s’établit à -9,5 Md€ en 2007, en
hausse de 8,7 % par rapport à 2006. Il est plus dégradé que les prévisions
initiales de la loi de financement pour 2007 (-8,0 Md€), mais en net retrait
par rapport aux prévisions rectifiées présentées dans la LFSS pour 2008
(-11,7 Md€).
L’évolution des résultats par rapport à 2006 traduit des situations
contrastées selon les branches : si le déficit de la branche maladie se
réduit nettement et si le résultat de la branche famille devient légèrement
excédentaire pour la première fois depuis 2003, le déficit de la branche
retraite et, dans une moindre mesure, celui de la branche AT-MP
enregistrent une forte dégradation. A l’exception de la branche retraite,
les résultats de l’exercice diffèrent sensiblement des prévisions.
Le tableau qui suit présente le passage, par branche, des prévisions
aux réalisations
16
. Il fait apparaître que l’essentiel des écarts entre
prévisions et réalisations résulte du dynamisme inattendu des produits de
cotisations sociales (+1,0 Md€) et de CSG (+1,1 Md€ dont 0,8 Md€ au
titre des revenus de placement), auquel plusieurs facteurs contribuent
(voir infra).
Les impôts et taxes affectés (ITAF) apparaissent à l’inverse en
recul de 0,3 Md€. En effet, les prévisions de septembre 2007 intégraient
par hypothèse
17
un financement d’1 Md€ au titre des exonérations de
cotisations sur les heures supplémentaires. Si ce montant était cohérent
15. La révision du déficit résultait principalement de la réévaluation des dépenses
maladie (+2,4 Md€) et retraite (+1,1 Md€) et des exonérations de cotisations
(+0,6 Md€), partiellement compensée par une révision des cotisations (+0,4 Md€).
16. Les éléments précédés d’un (-) minorent le résultat prévisionnel.
17. En l’absence de disposition législative à cette date.
C
OUR DES COMPTES
18
avec l’estimation du coût des exonérations annoncé à cette date, il s’est
révélé excessif au regard des réalisations (0,6 Md€).
Décomposition des écarts entre prévisions et réalisations
En M€
Maladie
AT-MP
Famille
Vieillesse
Régime général
Prévision 2007 rectifiée (LFSS 08)
-6 203
-366
-499
-4 584
-11 652
Cotisations effectives
259
142
27
616
1 043
Cotisations prises en charge par l’État
2
-27
48
9
33
Cotisations prises en charge par la
sécurité sociale
-80
-19
-99
CSG
834
183
1 017
ITAF
-167
20
-17
-154
-318
Contributions publiques
-19
0
120
8
109
Transferts entre organismes (nets)
105
-113
238
-264
-36
Prestations
297
-221
60
34
170
prestations légales
-90
-226
-32
17
-330
prestations extra-légales
37
0
136
18
191
autres prestations
-9
10
30
0
31
provisions et pertes sur créances de
prestations
360
-5
-75
-1
279
Charges nettes de gestion courante
91
10
38
-15
124
Autres produits et charges
252
100
-24
-221
107
Résultat 2007 réalisé
-4 629
-455
156
-4 572
-9 500
Source :
Cour des comptes
2
–
Les résultats consolidés des régimes obligatoires de base et
des fonds de financement
Le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base s’établit
à -9,1 Md€ en 2007 contre -7,8 Md€ en 2006. En tenant compte des
résultats des fonds de financement des régimes sociaux (FSV et FFIPSA),
ce déficit atteint -11,0 Md€, après -10,2 Md€ en 2006.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
19
Résultats des régimes obligatoires de base
En M€
Tableaux d’équilibre
Réalisés
2006
Prévisions
initiales
(en LFSS 2007)
Prévisions
rectifiées
(en LFSS
2008)
Réalisés
2007
Régime général
Régimes spéciaux
Régimes agricoles
dont exploitants agricoles
Régime social des indépendants
CNRACL
-8 740
229
-93
-222
412
369
-8 046
-71
-72
-217
284
453
-11 652
-111
-111
-286
339
111
-9 500
-98
-91
-219
105
465
Ensemble des régimes de base
-7 823
- 7 452
-11 423
-9 119
FSV
FFIPSA
-1 259
-1 296
-664
-2 100
-292
-2 300
151
-2 230
Déficit d’ensemble (régimes +
fonds de financement)*
-10 156
-9 999
-13 729
-10 979
*Le FFIPSA reprenant le déficit du régime des exploitants agricoles, ce dernier est
déduit pour le calcul du total des besoins de financement.
Source :
Cour des comptes
3
–
Evolution des résultats depuis 2003
Le déficit d’ensemble des régimes de sécurité sociale et des fonds
est resté constamment supérieur à 10 Md€ depuis 2003, confirmant le
caractère structurel de l’insuffisance des ressources.
2003
2004
2005
2006
2007
Régime général
-11,5
-13,2
-11,6
-8,7
-9,5
Tous régimes
-11,7
-12,8
-11,6
-7,8
-9,1
Fonds de financement
-0,9
-1,4
-3,4
-2,6
-2,1
Total*
-12,6
-14,1
-14,4
-10,2
-11
*Le total tient compte de la déduction des résultats du régime des exploitants
agricoles, traduit à la fois dans les résultats des régimes et dans ceux des fonds.
Source :
Cour des comptes
B
–
Les évolutions retracées dans les tableaux
d’équilibre des régimes de base
1
–
Les faits marquants de l’exercice
a)
Evolutions dans l’architecture des comptes sociaux
A la différence de l’année 2006, qui avait vu évoluer l’architecture
des comptes avec, notamment, l’incidence de la création de la CNSA et la
fusion des régimes des travailleurs indépendants dans le RSI, les comptes
C
OUR DES COMPTES
20
sociaux de 2007 traduisent peu de modifications de périmètre. Les
principales évolutions concernent la mise en place, au 1
er
avril 2007, de la
caisse d’assurance maladie des industries électrique et gazière (CAMIEG)
et, au 30 juin 2007, de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel
de la SNCF (CPRPSNCF).
Ces évolutions n’ont pas d’effet sur les comptes. La CAMIEG a
reçu la gestion des prestations anciennement assurée par les caisses
mutuelles complémentaires et d’action sociale de la branche des IEG, les
personnels de la branche restant affiliés, de droit, au régime général pour
les prestations de base en nature du régime
18
.
.
La création de la CPRP
SNCF était, quant à elle, consécutive à l’adoption par la SNCF des
normes comptables internationales au 1
er
janvier 2007
19
.
b)
Elargissement du périmètre des recettes fiscales affectées
Les impôts et taxes affectés (ITAF) représentent une part
croissante des produits des régimes de sécurité sociale (26 % en 2007)
20
.
En 2007, plus d’une trentaine d’impôts et taxes sont affectés aux régimes
de base, hors CSG et autres prélèvements sociaux. Pour cette seule année,
quatre nouvelles recettes fiscales ont été affectées, en tout ou partie, à la
sécurité sociale, tandis que la part de certaines recettes antérieurement
affectées a évolué. Au total, le supplément de recettes fiscales affectées
représente 1,8 Md€ en 2007.
Deux points, relatifs à la compensation des exonérations, doivent
être signalés :
-
d’une part, l’entrée en vigueur du dispositif d’exonérations de
cotisations sociales sur les heures supplémentaires, issu de la loi en
faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (TEPA) du 21 août
2007, a donné lieu à l’affectation de recettes fiscales en lois de
finances
21
, évaluées à 4,1 Md€ en année pleine
22
. A l’instar du
mécanisme en vigueur pour le financement des allègements généraux
de cotisations en 2006, non reconduit en 2007, ces lois de finances
comprennent une disposition organisant l’exacte compensation par
l’Etat de la perte de cotisations supportée par les régimes : en cas
18. Voir rapport public thématique « les institutions sociales des industries électriques
et gazières », avril 2007, pages 34-38.
19. Voir chapitre XI – Aspects de la gestion des régimes de retraite.
20. L’évolution des ressources du régime général est analysée infra.
21. Art. 6, LFR 2007 : 22,38 % de la taxe sur les véhicules de société (TVS), art. 53,
LFI 2008 : 50,57 % de la TVS, intégralité de la TVA sur les alcools et de la
contribution sociale sur les bénéfices.
22. PLF 2008, exposé des motifs de l’article 28.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
21
d’insuffisance de recettes fiscales, l’écart constaté « fait l’objet d’une
régularisation par la plus prochaine loi de finances suivant la
connaissance du montant définitif de la perte ».
Dans les comptes de 2007, les produits d’impôts et taxes affectés à ce
dispositif d’exonération s’élèvent à 0,65 Md€ dont 0,6 Md€ pour le
régime général. Comme l’a souligné la Cour dans le rapport de
certification des comptes du régime général, ces produits équilibrent
exactement la perte de cotisations estimée au titre de l’année, dans la
mesure où, sans attendre de disposition en loi de finances, un montant
de 0,2 Md€ a été inscrit en comptabilité pour compenser l’insuffisance
des recettes fiscales effectivement perçues. Pour autant, cet engagement
n’a pas été reconnu par l’Etat dans sa comptabilité générale
23
, ce qui
illustre les difficultés d’application de la disposition précitée dont la
portée normative se limite à une injonction pour l’avenir ;
-
d’autre part, le financement des allègements généraux de cotisations
pour 2007 (dispositif « Fillon »), assuré par affectation d’impôts et
taxes depuis le 1
er
janvier 2006, a été modifié par trois lois de finances
successives (LFI 2007, LFR 2007, LFI 2008). En l’absence de
reconduction du mécanisme de compensation « par la plus prochaine
loi de finances » qui prévalait en 2006, ces évolutions avaient pour
objet d’ajuster le niveau des recettes fiscales affectées sur celui des
pertes de cotisations estimées
24
.
Ainsi, la part de la taxe sur les salaires antérieurement affectée à
l’Etat (5 %) ainsi qu’une fraction des droits de consommation sur les
tabacs (8,61 %) ont été affectées aux régimes de base en 2007, pour un
montant évalué à 1,4 Md€ et concernant à 95 % le régime général. Ces
taxes ont notamment permis de compenser, à hauteur de 0,4 Md€, des
remboursements de cotisations effectués par l’ACOSS à l’initiative des
cotisants, suite à la réévaluation des allègements de cotisations, elle-
même consécutive à l’évolution de la définition légale de leur assiette. Au
total, les impôts et taxes affectés au financement des allègements
généraux pour 2007 permettent juste d’équilibrer le coût du dispositif
selon le principe des « droits constatés » (21,8 Md€, en hausse de
11,8 %)
25
.
23. Depuis 2007, les recettes fiscales affectées sont comptabilisées en tant que dettes
au bilan de l’Etat.
24. Toutefois, ces ajustements n’ont pas suivi la procédure prévue par l'article L. 131-
8 du code de la sécurité sociale, qui prévoit qu'en cas d’écart supérieur à 2 % entre le
montant constaté des exonérations et celui des impôts et taxes, le gouvernement doit
recueillir l'avis d'une commission présidée par un magistrat de la Cour.
25. Les comptes combinés de l’ACOSS indiquent un léger excédent pour le régime
général (8 M€).
C
OUR DES COMPTES
22
Enfin, l’évolution de la répartition des droits de consommation sur
les tabacs
26
, a conduit à réduire la part affectée au financement de la
CNAMTS de 32,46 % à 30 %, pour un effet estimé à -0,3 Md€ en 2007 et
à affecter une fraction de 1,69 % (0,1 Md€) au financement des frais
financiers supportés par le régime général au titre des dettes de l’Etat. Le
budget de l’Etat ne bénéficie plus, quant à lui, de la part de cette recette
(11,51 %) qui lui était affectée en 2006.
c)
Les autres mesures affectant les produits
Deux mesures ayant eu un effet significatif en 2006 n’ont pas
connu d’équivalent en 2007. D’une part, les branches retraite et AT-MP
du régime général avaient bénéficié d’un relèvement des taux de
cotisation au 1
er
janvier 2006. D’autre part, les produits de CSG de 2006
enregistraient l’effet de la taxation de l’ensemble des plans d’épargne
logement ouverts depuis plus de 10 ans, évalué à 1,8 Md€ dont 1,5 Md€
pour le régime général.
Pour autant, les produits de CSG sur les placements enregistrent,
en 2007, une croissance plus importante que prévu (+4,4 % au lieu d’une
baisse estimée de 15 %, soit un supplément de produits de 0,8 Md€ pour
le régime général par rapport aux prévisions de septembre 2007), sous le
double effet d’une sous évaluation de l’assiette et du changement de
méthode comptable indiqué ci-dessous.
En effet, les règles comptables relatives aux prélèvements sociaux
collectés par les services fiscaux (CSG et prélèvements sur revenus du
patrimoine, des placements et des jeux) ont évolué en 2007 et sont
désormais conformes aux principes de la comptabilité d’engagement. Ce
changement de méthode comptable a eu pour effet l’inscription, au
compte de résultat, de produits à recevoir évalués à 0,4 Md€ pour le
régime général
27
, soit environ 40 % du supplément de CSG constaté par
rapport aux prévisions.
26 . Le rendement de cette taxe s’élève à 9,6 Md€ en 2007, tous affectataires
confondus.
27. 0,6 Md€ pour l’ensemble des affectataires.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
23
d)
La dégradation de la situation financière du régime général
En dépit de l’extinction par l’Etat d’une partie de ses dettes envers
le régime général pour 5,1 Md€, les besoins de financement de ce régime
ont continué à s’accroître en 2007 (-7,5 Md€), atteignant 20,1 Md€ au
31 décembre 2007 après un point bas à 24,9 Md€ fin septembre (voir
infra).
Cette situation a pour conséquence un alourdissement significatif
des charges d’intérêt, qui s’élèvent à 648 M€ en 2007 après 271 M€ en
2006.
2
–
L’évolution des résultats du régime général
a)
La branche maladie
Données issues des tableaux d’équilibre
En M€
Réalisations
Variation
2006/2007
Tableau
d’équilibre
2006
Tableau
d’équilibre
2007
Prévision
2007
rectifiée
en valeur
en %
Ecart
réalisation/
prévision
(1)
(2)
(3)
(2-1)
(2-3)
CHARGES NETTES
143 442
149 049
149 729
5 607
3,9
-680
Prestations
prestations légales
prestations extra-légales
autres prestations
dotations nettes aux provisions
pertes sur créances irrécouvrables
123 094
121 048
427
656
924
39
128 130
126 471
380
708
529
42
128 427
126 381
417
699
895
35
5 036
5 424
-46
52
-395
2
4,1
4,5
-10,9
7,9
-42,8
5,5
-297
90
-37
9
-366
6
Transferts entre organismes
13 832
14 096
14 227
264
1,9
-131
Charges financières
130
255
258
125
96,1
-3
Charges nettes de gestion courante
4 956
4 984
5 075
28
0,6
-91
Autres charges
1 431
1 585
1 743
154
10,8
-158
PRODUITS NETS
137 506
144 420
143 527
6 914
5,0
894
Cotisations effectives
cotisations sociales des actifs
cotisations des inactifs
autres cotisations sociales
majorations et pénalités
reprises nettes de provisions
pertes sur créances irrécouvrables
62 331
62 261
503
161
192
-22
-763
64 606
64 437
524
199
191
1
-746
64 347
64 119
513
222
195
26
-727
2 274
2 176
21
39
-2
23
17
3,6
3,5
4,2
24,0
-0,8
-105,7
-2,2
259
319
11
-23
-4
-25
-19
Cotisations prises en charge par
l’Etat
1 365
1 611
1 609
246
18,0
2
Cotisations prises en charge par la
sécurité sociale
200
160
240
-39
-19,7
-80
CSG
47 139
49 793
48 959
2 654
5,6
834
ITAF
12 909
13 359
13 527
450
3,5
-167
Contributions publiques
413
398
417
-15
-3,7
-19
Transferts entre organismes
10 677
11 930
11 956
1 253
11,7
-26
Produits financiers
10
10
0
0
-2,1
10
Autres produits
2 463
2 553
2 471
90
3,7
82
Résultat net
-5 936
-4 629
-6 203
1 307
-22,0
1 573
Source :
Cour des comptes, à partir des données de la DSS
C
OUR DES COMPTES
24
Le déficit de la branche s’est réduit d’1,3 Md€ en 2007, à 4,6 Md€,
compte tenu d’une progression des produits plus forte que celle des
charges. Il s’inscrit en repli d’environ 25 %, soit 1,6 Md€, par rapport à la
prévision de septembre 2007, du fait d’une surévaluation des charges
prévisionnelles de 0,7 Md€, dont 0,4 Md€ au titre des provisions sur
prestations légales et d’une sous-évaluation des produits de 0,9 Md€,
notamment de CSG et de cotisations sociales (voir supra).
Afin d’appréhender l’évolution du résultat de l’exercice, la
CNAMTS a indiqué, dans ses comptes combinés, le montant du résultat
dit courant, excluant l’effet des opérations non reconductibles de 2006
comme de 2007. Selon ces estimations, le déficit courant s’élève à
-5,7 Md€ en 2007, compte tenu d’éléments positifs non récurrents évalués
à 1,1 Md€ dont 0,8 Md€ de CSG, contre -7,4 Md€ en 2006 du fait du
produit exceptionnel lié à la taxation des PEL de plus 10 ans (1,5 Md€).
L’évolution des dépenses des régimes maladie est commentée dans
le chapitre II consacré à l’ONDAM. Par ailleurs, les charges de
prestations légales comprennent, à hauteur de 10,7 Md€, les prestations
médico-sociales prises en charge par la CNSA, qui trouvent leur exacte
contrepartie en produits.
b)
La branche AT-MP
Données issues des tableaux d’équilibre
En M€
Réalisations
2006
Prévision
initiale
(LFSS 2007)
Prévision
rectifiée
(LFSS 2008)
Réalisations
2007
2007/
2006
Ecart entre
réalisation
et prévision
rectifiée
(1)
(2)
(3)
(3/1)
(3-2)
Produits nets
9 796
10 251
9 992
10 175
+3,9%
183
Charges nettes
9 854
10 167
10 358
10 630
+7,9%
272
Résultat
-59
84
-366
-455
ns
-89
Source :
LFSS et DSS
La forte dégradation du solde de la branche est imputable en quasi-
totalité à des corrections demandées par la Cour dans le cadre de la
certification des comptes 2006, comptabilisées en 2007. Celles-ci
concernent la répartition des dépenses hospitalières avec la branche
maladie (-0,2 Md€) et la dépréciation des créances de la branche envers le
fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante
(FCAATA), fonds non doté de la personnalité morale (-0,2 Md€) et sans
perspective de retour à l’équilibre à moyen terme.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
25
Par ailleurs, dans le cadre de ses travaux en vue de la certification
des comptes 2007, la Cour a constaté des insuffisances dans les
processus, notamment informatiques, destinés à mettre à jour les
informations fondant la liquidation des cotisations AT-MP. Celles-ci
créent une incertitude, dont l’incidence financière est difficile à apprécier,
quant au montant des cotisations mises en recouvrement.
En effet, contrairement aux autres cotisations, les cotisations AT-
MP sont liquidées à partir des salaires déclarés par les entreprises et des
taux de cotisation déterminés par les CRAM. Or, les tests effectués par la
Cour ont mis en évidence des divergences importantes entre les
informations détenues par les CRAM et celles dont disposent les
URSSAF. La CNAMTS et l’ACOSS ont engagé une démarche commune
d’analyse destinée à définir les actions de fiabilisation nécessaires
28
.
c)
La branche retraite
Données issues des tableaux d’équilibre
En M€
Réalisations
Variation
2006/2007
Tableau
d’équilibre
2006
Tableau
d’équilibre
2007
Prévision
2007
rectifiée
en
valeur
en %
Ecart
réalisation/
prévision
(1)
(2)
(3)
(2-1)
(2-3)
CHARGES NETTES
84 850
90 302
89 984
5 452
6,4
318
Prestations
prestations légales
prestations extra-légales
dotations nettes aux provisions
pertes sur créances
irrécouvrables
77 850
77 543
281
22
3
82 613
82 298
286
25
4
82 647
82 315
304
25
4
4 763
4 755
5
3
1
6,1
6,1
1,8
13,2
19,5
-34
-17
-18
1
0
Transferts entre organismes
5 800
5 956
5 897
157
2,7
59
Charges financières
257
492
473
235
91,7
18
Charges nettes de gestion
900
937
922
37
4,1
15
Autres charges
43
303
44
260
597,9
259
PRODUITS NETS
82 995
85 730
85 400
2 735
3,3
330
Cotisations effectives
cotisations sociales des actifs
autres cotisations sociales
majorations et pénalités
reprises nettes de provisions
pertes sur créances
irrécouvrables
58 020
57 677
523
190
106
-477
60 200
59 827
614
188
34
-463
59 584
59 233
568
193
20
-430
2 180
2 149
90
-2
-72
14
3,8
3,7
17,3
-1,0
-67,9
-3,0
616
594
46
-5
14
-33
Cotisations prises en charge par
l’Etat
1 110
1 290
1 281
181
16,3
9
ITAF
6 144
7 296
7 450
1 152
18,7
-154
Contributions publiques
131
139
131
9
6,6
8
Transferts entre organismes
17 388
16 628
16 833
-760
-4,4
-205
Produits financiers
4
3
0
-1
-29,2
3
Autres produits
199
174
120
-25
-12,7
53
Résultat net
-1 855
-4 572
-4 584
-2 717
146,5
12
Source : Cour des comptes, à partir des données de la DSS
28. Voir rapport de certification des comptes du régime général 2007, page 31.
C
OUR DES COMPTES
26
Le déficit de la branche s’élève à -4,6 Md€ contre -1,9 Md€ en
2006. Il n’est conforme aux prévisions qu’en raison du supplément de
cotisations constaté en fin d’année, qui permet de compenser l’incidence
d’évolutions non prévues.
La forte dégradation du résultat traduit le dynamisme des charges
de prestations légales (+6,1 %, dont 1,8% au titre de la revalorisation des
pensions), qui augmentent près de deux fois plus vite que les produits.
Cette évolution résulte des effets conjugués de l’arrivée à l’âge de la
retraite des générations du « baby boom » et de l’absence de
ralentissement des demandes de départ anticipé en retraite, dont le coût
atteint 2,1 Md€ en 2007 après 1,8 Md€ en 2006. Fin 2007, 454 500
retraités ont bénéficié de cette mesure entrée en vigueur au 1
er
janvier
2004. Le nombre total de titulaires d’une pension (de droit propre ou/et de
droit dérivé) servie par le régime général s’établit à 11,9 millions à fin
2007, contre 11,4 millions à fin 2006 (+3,5 %).
En outre, la branche retraite enregistre une croissance des produits
moindre que la moyenne du régime général qui s’établit à 4,4 %. En effet,
la réduction du nombre de chômeurs notifié par l’UNEDIC au FSV
29
, qui
fonde le montant que ce dernier verse à la CNAVTS au titre de la prise en
charge des cotisations retraite des chômeurs, a conduit à réduire le
transfert financier correspondant du FSV de 7,6 Md€ en 2006 à 7,0 Md€
en 2007. Cette réduction est l’un des facteurs explicatifs du léger
excédent dégagé par le FSV en 2007 (151 M€ voir infra).
Dans le cadre de la certification des comptes du régime général, la
Cour a d’ailleurs souligné que l’absence de rattachement des résultats du
FSV à la branche retraite, à hauteur de la quote-part de la branche dans
l’ensemble des prestations non contributives qu’il finance
30
, ne permet
pas d’avoir une image fidèle de ses résultats. Compte tenu de
l’amélioration du résultat du FSV et à la différence de l’an dernier, ce
rattachement réduirait légèrement le déficit de la branche retraite pour
2007.
29. Les données notifiées par l’UNEDIC au FSV comportent une baisse du nombre de
chômeurs indemnisés (2,3 millions en moyenne annuelle contre 2,53 millions en
2006) et de celui des chômeurs non indemnisés (1,59 million contre 1,71 million en
2006).
30. 88,1 % en 2007.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
27
d)
La branche famille
Données issues des tableaux d’équilibre
En M€
Réalisations
Variation
2006/2007
Tableau
d’équilibre
2006
Tableau
d’équilibre
2007
Prévision
2007
rectifiée
en
valeur
en %
Ecart
réalisation/
prévision
(1)
(2)
(3)
(2-1)
(2-3)
CHARGES NETTES
53 391
54 461
54 761
1 070
2,0
-301
Prestations
prestations légales
prestations extra-légales
autres prestations
dotations nettes aux provisions
pertes sur créances irrécouvrables
40 977
37 463
3 337
0
75
102
42 231
38 574
3 495
0
59
103
42 291
38 542
3 632
30
-18
104
1 254
1 111
158
0
-16
1
3,1
3,0
4,7
-50,6
-20,9
1,2
-60
32
-136
-30
77
-2
Transferts entre organismes
6 819
6 815
7 061
-4
-0,1
-246
Charges financières
2
8
2
7
368,9
7
Charges nettes de gestion courante
1 585
1 589
1 627
4
0,2
-38
Autres charges
4 009
3 817
3 781
-192
-4,8
36
PRODUITS NETS
52 500
54 617
54 263
2 116
4,0
354
Cotisations effectives
cotisations sociales des actifs
majorations et pénalités
reprises nettes de provisions
pertes sur créances irrécouvrables
30 128
30 340
109
9
-331
31 090
31 274
110
51
-345
31 063
31 269
112
0
-318
962
933
1
42
-14
3,2
3,1
0,7
440,5
4,1
27
4
-1
51
-27
Cotisations prises en charge par l’Etat
581
707
659
127
21,8
48
Cotisations prises en charge par la
sécurité sociale
262
257
275
-6
-2,1
-19
CSG
11 084
11 657
11 473
573
5,2
183
ITAF
3 494
3 945
3 963
451
12,9
-17
Contributions publiques
6 296
6 582
6 462
286
4,5
120
Transferts entre organismes
16
19
27
3
15,7
-8
Produits financiers
70
64
45
-6
-9,1
19
Autres produits
568
296
295
-273
-48,0
0
Résultat net
-891
156
-499
1 047
-117,5
655
Source :
Cour des comptes, à partir des données de la DSS
L’amélioration du résultat de la branche famille, devenu
bénéficiaire, traduit le ralentissement de la croissance de ses charges de
prestations, qui s’établit à +3,1 % après +4,5 % en 2006 et, de manière
plus générale, la dynamique des produits (+4,0 %), qui croissent deux fois
plus vite que les charges (+2,0 %).
L’inversion apparente de tendance par rapport aux prévisions de
septembre 2007, qui indiquaient un résultat déficitaire de 0,5 Md€, résulte
pour l’essentiel d’éléments conjoncturels ou ponctuels, notamment la
dynamique inattendue de la CSG, ou l’opération de régularisation des
cotisations d’AVPF envers la CNAVTS évoquée précédemment. La
moindre progression des charges d’action sanitaire et sociale, qui
contribue à l’amélioration relevée, est délicate à interpréter compte tenu
C
OUR DES COMPTES
28
des constats effectués par la Cour et la CNAF elle-même dans le cadre de
la certification des comptes
31
. En effet, si celle-ci reflète l’effet restrictif
des nouvelles politiques d’action sociale, elle est également susceptible
de traduire un report de charges sur l’année 2008.
Par ailleurs, l’évolution d’ensemble des prestations légales
(+3,0 %) recouvre des tendances contrastées en fonction des prestations.
Elle doit être mise en regard de la faible évolution du nombre de
bénéficiaires de prestations (+0,5 %)
32
.
Evolution des prestations légales
En M€
Réalisations
Variation
2006/2007
Tableau
d’équilibre
2006
Tableau
d’équilibre
2007
Prévision
2007
rectifiée
en
valeur
en %
Ecart
réalisation/
prévision
Prestations légales
allocations en faveur de la famille
allocations et aides pour la garde
des jeunes enfants
allocation de rentrée scolaire
allocations de logement familial
allocation en faveur des handicapés
Frais de tutelle et autres
37 463
15 922
10 441
1 390
3 616
5 798
297
38 574
16 196
10 911
1 381
3 672
6 113
301
38 542
16 183
10 965
1 378
3 702
6 000
314
1 111
274
471
-9
56
315
4
3,0
1,7
4,5
-0,6
1,6
5,4
1,4
32
12
-54
3
-30
113
-13
Source :
Tableaux de centralisation des données comptables (CNAF)
Les allocations en faveur de la famille progressent de 1,7% compte
tenu d’une croissance modérée des allocations familiales (+1,5 % soit
0,2 Md€), légèrement plus faible que la revalorisation de la base
mensuelle de calcul des allocations familiales au 1
er
janvier 2007
(+1,7 %) et d’une légère baisse de la natalité. L’allocation de parent isolé
(API), prise en charge par l’Etat, reste stable à 1,1 Md€, malgré la baisse
du nombre de bénéficiaires (-5,5 %) et la mise en place, au 1
er
janvier
2007, d’un dispositif de subsidiarité avec l’allocation de soutien familial.
31. Voir rapport précité, pages 95-96 et 104.
32 . Cette évolution traduit un changement de méthode statistique, le suivi des
bénéficiaires s’effectuant désormais avec un champ modifié, puisque les mesures
intègrent désormais les bénéficiaires d’un contrat aidé ou d’un dispositif de retour à
l’emploi (RMA, RSA) même s’ils ne perçoivent pas de prestations légales.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
29
En revanche, les prestations en faveur de la petite enfance
enregistrent une croissance de 4,5 % en raison de la poursuite de la
montée en charge de la PAJE, dont le nombre de bénéficiaires a augmenté
de 5%. Le volet « complément du mode de garde » est particulièrement
dynamique (+32 % soit +0,9 Md€) tandis que l’extinction des dispositifs
antérieurs à la PAJE se poursuit.
Enfin, l’allocation aux adultes handicapés, prise en charge par
l’Etat, reste en forte croissance (+5,4 % après +5 % en 2006), du fait
d’une revalorisation de son montant de 1,8 %
33
au 1
er
janvier 2007 et de
la croissance du nombre de bénéficiaires de 1,3 %. La variation résiduelle
(+2,3 %) correspond à un changement de méthode d’évaluation des
prestations à rattacher à l’exercice.
3
–
Les résultats des autres régimes de base
Les résultats de la plupart des autres régimes de base sont
équilibrés par des financements extérieurs ou par un mécanisme de
cotisations d’équilibre des employeurs. Leurs résultats sont donc
globalement proches de l’équilibre. Les mécanismes d’équilibrage sont
divers et, dans certains cas, plusieurs mécanismes coexistent pour un
même régime en fonction des risques qu’il gère. Ils se distinguent des
compensations entre régimes, dont les finalités sont différentes.
Parmi les principaux dispositifs d’équilibrage, on distingue :
-
l’intégration financière au régime général, c'est-à-dire la prise en
charge du déficit par ce dernier ; ce mécanisme, qui représente un coût
d’1,0 Md€ pour la CNAMTS et 0,3 Md€ pour la CNAVTS, concerne
les branches maladie et retraite du régime des salariés agricoles et de la
caisse qui gère les avantages des ministres des cultes34, la branche
maladie du régime des militaires et les branches maladie et AT-MP du
régime des marins ;
-
les subventions d’équilibre de l’Etat, versées à la plupart des régimes
spéciaux de retraite, principalement ceux de la SNCF, des marins et
des ouvriers de l’Etat ; elles s’élèvent à 3,8 Md€ en 2007 ;
-
les cotisations d’équilibre des employeurs, qui concernent les régimes
d’employeurs non dotés d’une personnalité juridique distincte de ces
derniers, notamment l’Etat. Elles représentent 2,8 Md€ en 2007.
33. Le montant de l’AAH suit la revalorisation des prestations du minimum vieillesse.
34. En 2006, le régime des cultes a été supprimé : la CAVIMAC gère les avantages du
régime général destinés à cette population (art. 75, LFSS 2006).
C
OUR DES COMPTES
30
En outre, le régime des exploitants agricoles fait l’objet d’un
équilibrage par le FFIPSA (voir infra). Les déficits de la couverture de
base du régime social des indépendants sont, quant à eux, équilibrés par
l’attribution, à due proportion, de la contribution sociale de solidarité à la
charge des sociétés (3,3 Md€ en 2007). Le reliquat de cet impôt a été
versé au FSV pour 0,5 Md€ (voir infra).
Enfin, le financement du régime de retraite des IEG a été
partiellement adossé à la CNAVTS au 1
er
janvier 2005, au titre des
prestations équivalentes à celle du régime général. Son coût net annuel est
d’environ 0,2 Md€ pour la CNAVTS, compte non tenu de la fraction de la
soulte versée au FRR qui en assurera la gestion jusqu’en 2020 (3,1 Md€)
et des produits financiers engendrés par cette dernière (0,7 Md€ au
31 décembre 2007). Ses conditions de reversement à la CNAVTS, qui
doivent être fixées par une convention, ne sont pas arrêtées à ce jour
35
.
C
–
La situation des fonds de financement
1
–
Le fonds de solidarité vieillesse
Créé en 1993, le fonds de solidarité vieillesse (FSV) finance des
avantages de retraite à caractère non contributif servis par certains
régimes. Ainsi il prend en charge les majorations de pensions pour
enfants et conjoints à charge (3,9 Md€ en 2007), les allocations du
minimum
vieillesse
(2,7 Md€),
ainsi
que
certaines
cotisations,
essentiellement au titre de la validation des périodes de chômage
(7,6 Md€). A elle seule, la branche retraite du régime général bénéficie de
près de 90 % des concours du FSV, qui représentent environ 15 % de ses
produits techniques.
Pour la première fois depuis 2000 et contrairement aux prévisions
pour 2007, le résultat du FSV est légèrement excédentaire (0,15 Md€),
sous le double effet de la croissance de la CSG et de la réduction des
prises en charge de cotisations des chômeurs consécutive à la réduction
du nombre de chômeurs. La forte hausse de la contribution sociale de
solidarité à la charge des sociétés (+8,2 % pour l’ensemble des
affectataires)
36
, dont le solde après affectation au RSI est versé au FSV,
contribue également à cette amélioration.
35. Voir chapitre XI – Aspects de la gestion des régimes de retraite.
36. La C3S est recouvrée par le RSI pour le compte de l’Etat.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
31
Comptes annuels du fonds de solidarité vieillesse
En Md€
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
CSG, prélèvement social de 2%
Contribution CNAF
37
C3S
Autres
10,1
0,5
0,6
0,8
9,5
1,0
0,6
0,1
9,7
1,9
0,9
ns
10,0
2,0
1,3
0,1
10,3
2,1
0,2
0,1
11,1
2,2
0,2
0,1
11,6
2,3
0,5
0,1
Produits
12,0
11,1
12,5
13,4
12,7
13,6
14,5
Prises en charge de prestations
Prises en charge de cotisations
Autres
5,5
6,0
0,5
5,6
6,7
0,1
5,8
7,4
0,3
5,9
7,9
0,2
6,2
8,4
0,1
6,4
8,2
0,1
6,6
7,6
0,1
Charges
12,1
12,4
13,4
14
14,7
14,8
14,3
Résultat
-0,1
-1,4
-0,9
-0,6
-2,0
-1,3
0,2
Source :
FSV
Alors que la LFSS 2007 prévoyait, selon les hypothèses les plus
conservatrices (scénario bas), un retour à l’équilibre du FSV en 2009, avec
un résultat cumulé de -0,5 Md€ sur la période 2008-2010, les prévisions
annexées à la LFSS 2008 traduisent une vision plus optimiste. Sur la
période 2008-2010, les résultats cumulés atteindraient 2,4 Md€ et 5,6 Md€
jusqu’en 2012. Dans le scénario haut, les excédents cumulés 2008-2012
s’élèveraient à 7,2 Md€. Toutefois, l’ampleur de ces excédents suppose la
poursuite à la fois de la décrue du chômage et d’une croissance forte de la
CSG et du prélèvement social de 2 % sur les revenus du capital, dont
l’évolution pourrait pâtir de la crise financière.
La Cour estime que ces excédents devraient être prioritairement
affectés à la résorption des déficits cumulés du FSV, qui atteignent
4,8 Md€
38
, au 31 décembre 2007 et dont le coût financier est de facto
supporté par la CNAVTS au travers des créances non rémunérées que
détient cette dernière sur le FSV (5,8 Md€ au 31 décembre 2007).
Cette affectation au désendettement du FSV privera le FRR d’une
recette potentielle complémentaire et ne lui laissera comme ressources
récurrentes que le produit de la fraction du prélèvement social de 2 % qui
lui est affecté (1,8 Md€ en 2007 contre 1,5 Md€ en 2006) et le produit de sa
gestion financière (2,7 Md€ en 2007 contre 2,1 Md€ en 2006). Les capitaux
propres du FRR atteignent 30,6 Md€ au 31 décembre 2007 contre 27,5 Md€
fin 2006.
Ceux-ci représentent moins de 20% de l’objectif assigné au FRR
lors de sa création en 2000. Seul un désendettement du FSV permettrait de
lui affecter d’éventuels excédents futurs et de lui apporter un complément
de ressources, sans lequel il ne pourra remplir pleinement sa mission.
37. Prise en charge, à compter de 2003, de 60 % des majorations pour enfants.
38. Résultats cumulés depuis la création du FSV, minorés des versements au FRR.
C
OUR DES COMPTES
32
2
–
Le FFIPSA
Le fonds de financement des prestations sociales des non salariés
agricoles, créé par la loi de finances pour 2004, a pour mission d’assurer
le financement du régime des exploitants agricoles. Conformément à la
loi, ses comptes retracent, outre le financement, l’ensemble des charges et
produits du régime.
Au 31 décembre 2007, les déficits cumulés du FFIPSA s’élèvent à
4,9 Md€ pour un endettement net de 4,7 Md€
39
. La situation financière
du FFIPSA s’est à nouveau nettement dégradée en 2007, avec un déficit
de 2,2 Md€ après 1,3 Md€ en 2006. En effet, en dépit d’une hausse
contenue des charges techniques (+0,1 Md€), qui bénéficient de la non
reconduction de charges ponctuelles de 2006 et de l’effet de la
régularisation de la prise en charge de l’APL pour 2005, les produits
techniques se contractent de 0,6 Md€ dans la mesure où, en 2006, un
changement de méthode comptable avait conduit à comptabiliser
l’équivalent de treize mois de taxes sur les tabacs. En outre, les frais
financiers font plus que doubler par rapport à 2006, à 0,2 Md€.
La Cour réitère ses recommandations relatives à la recherche d’une
solution pérenne pour le financement du régime des exploitants agricoles
et à la suppression du FFIPSA.
III - Les relations entre l’Etat et la sécurité sociale
A
–
La reconstitution partielle des dettes de l’Etat
envers le régime général
La situation financière des régimes de sécurité sociale pâtit de la
persistance de dettes de l’Etat qui grèvent une capacité de financement
déjà mise à mal par des résultats structurellement déficitaires. Dans la
comptabilité générale de l’Etat, les passifs envers la sécurité sociale
atteignent 6,0 Md€ au 31 décembre 2007, après 9,1 Md€ en 2006, dont
4,6 Md€ pour le seul régime général (contre 7,2 Md€ au 31 décembre
2006).
39. Ce solde tient compte de la reprise par l’Etat du solde des dettes hérité du BAPSA
pour 0,6 Md€ et de la trésorerie disponible pour 0,4 Md€.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
33
Les dettes envers les autres régimes ont diminué, mais uniquement
grâce à la reprise par l’Etat de la dette du FFIPSA héritée du BAPSA
(voir supra).
Vis-à-vis du régime général en revanche, en 2007, en dépit
de l’opération d’extinction des dettes de l’Etat d’un montant de 5,1 Md€,
dont la Cour a critiqué l’absence de comptabilisation en charge
budgétaire dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de
l’Etat
40
, elles se sont partiellement reconstituées.
Décomposition des passifs de l’Etat envers le régime général
41
En M€
Situation au 31/12/2007
Total RG
CNAF
ACOSS
CNAMTS
CNAVTS
Dettes (A) (1)
1 022,3
612,9
406,5
0,6
2,3
Charges à payer (B)
3 559,1
1 241,9
2 036,7
272,2
8,3
Provisions (C)
130,8
0,0
0,5
130,3
Passifs (D=A+B+C)
4 712,2
1 854,8
2 443,7
272,8
140,9
Créances (E)
106,9
72,9
11,7
17,5
4,8
Passifs nets en comptabilité au
31/12/2007 (F=D-E)
4 605,3
1 781,9
2 432,0
255,3
136,1
(1) Dont dettes 2007 réglées en
période complémentaire(G)
740,3
543,3
197,0
Passifs nets après versements en
période complémentaire (H=F-G)
3 865,0
1 238,6
2 235,0
255,3
136,1
Source :
Cour des comptes (à partir de la comptabilité de l’Etat)
Comme en 2006, les travaux effectués en vue de la certification
des comptes de l’Etat et de ceux du régime général ont mis en évidence
une divergence d’appréciation entre les organismes de sécurité sociale et
l’Etat quant au caractère exigible ou non des dettes à la fin de 2007.
Celle-ci n’a pas d’impact sur le montant total des passifs, mais
uniquement sur leur présentation au bilan de l’Etat : les insuffisances de
crédit de 2007 sont présentées en charges à payer alors qu’elles
constituent des dettes compte tenu du caractère certain à la fois de leur
échéance et de leur montant
42
.
Au total, sur les 3,8 Md€ de passif net après versements en période
complémentaire, la Cour a estimé à 2,8 Md€ le montant total des dettes au
40. Cependant, l’Etat a suivi la Cour dans la traduction en comptabilité générale de
cette opération partielle d’extinction par le biais de la caisse de la dette publique (cf.
acte de certification p. 4) Voir également le rapport sur les résultats et la gestion
budgétaire (exercice 2007) pp. 9 à 11.
41. Dans les comptes du régime général, les créances nettes envers l’Etat s’élèvent à
4,2 Md€ compte tenu de l’absence, justifiée, de réciprocité comptable de certaines
opérations (provisions notamment).
42. Voir rapport de certification des comptes de l’Etat (2007), page 46.
C
OUR DES COMPTES
34
31 décembre 2007
43
et à 1,0 Md€ le montant des charges à payer, qui
correspondent à une estimation statistique des charges à rattacher à
l’exercice.
Ces dettes concernent en premier lieu la compensation des
exonérations ciblées de cotisations sociales (1,5 Md€). Pour une large
part concentrées sur les programmes 102 et 103
44
de la mission travail et
emploi, dont la sous dotation chronique a été encore récemment soulignée
par la Cour
45
, elles portent tant sur des dispositifs anciens (apprentissage
et DOM, 0,7 Md€) que récents, dont la montée en charge est rapide
(zones de revitalisation rurale, services à la personne, contrats de
professionnalisation, 0,7 Md€). Les charges rattachables à l’exercice, au
titre des déclarations de cotisations de fin d’année, ont été estimées
statistiquement à 0,5 Md€ par l’ACOSS
46
, portant l’engagement total de
l’Etat à 2 Md€ après versements en période complémentaire.
Elles ont également trait aux prestations gérées par la CNAF pour
le compte de l’Etat (0,9 Md€), dont 0,4 Md€ au titre de l’AAH et 0,3 Md€
au titre de l’ALS, incluant les prestations de décembre versées à terme
échues (le 5 janvier 2008) mais liquidées en décembre. En tenant compte
des charges de fin d’année évaluées à 0,3 Md€
47
, le passif de l’Etat vis-à-
vis de la CNAF, net des versements en période complémentaire, s’élève à
1,2 Md€.
Enfin, l’aide médicale d’Etat reste fortement sous budgétée : alors
que son coût atteint 470 M€ en 2007, en tenant compte de l’évaluation
des charges du quatrième trimestre pour 120 M€, comptabilisées en
produits à recevoir par la CNAMTS, les crédits versés ont été limités à
205 M€.
***
La reconstitution rapide des dettes de l’Etat à l’égard du régime
général, constatée à peine quelques mois après l’opération d’extinction de
5,1 Md€ de dettes antérieures, appelle, dès 2008, des mesures appropriées
en loi de finances en vue de leur règlement. Sur les 2,8 Md€ de dettes
constatées au 31 décembre, 1,7 Md€ correspondent à une insuffisance de
versement du fait de l’absence de crédits en loi de finances.
43. Ce montant correspond aux dettes nées en 2007 (2,5 Md€), à un reliquat de dettes
antérieures à 2007 (0,1 Md€) et à une dette comptabilisée en doublon (0,2 Md€)
44. Programmes 102 « accès et retour à l’emploi » et 103 « accompagnement des
mutations économiques, sociales et démographiques ».
45. Voir notamment le rapport sur les résultats de la gestion budgétaire 2007, page
207.
46. Elles sont comptabilisées en produits à recevoir par l’ACOSS.
47. Voir note précédente.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
35
En outre, de nouvelles dettes risquent de se créer en 2008 du fait
que les crédits inscrits dans la loi de finances 2008, sont apparus dès
l’origine nettement insuffisants, notamment en matière de prise en charge
des exonérations. En effet, les crédits d’intervention des programmes 102
et 103 de la mission travail et emploi ont été reconduits pour les montants
inscrits en LFI 2006 et 2007
48
.
Un dispositif visant à prévenir la reconstitution d’impayés a été
mis en place pour 2008, sous la forme d’une instruction du ministre du
budget, des comptes publics et de la fonction publique
49
. Celle-ci a
notamment conduit à réviser le processus d’élaboration des conventions
annuelles, qui doivent désormais porter sur un montant correspondant aux
crédits inscrits en LFI minorés de la mise en réserve de précaution et
limiter à trois le nombre de versements annuels
50
.
Toutefois, ces dispositions, certes utiles, ne permettent pas de
prévenir la reconstitution de dettes envers le régime général due à
l’insuffisance récurrente de crédits votés en loi de finances. Si des
ajustements sont inévitables en année n+1, un rapprochement des
montants inscrits en loi de finances avec les prévisions de dépenses à la
charge de l’Etat qui sont connues avec une relativement bonne précision
limiterait la reconstitution des dettes : le vote de la loi de finances
rectificative de fin d’année autorise les ajustements au plus près de
prévisions rectifiées de dépenses pour l’année en cours.
La Cour souligne la nécessité de porter les crédits budgétaires
destinés à la sécurité sociale au niveau des prévisions de dépenses des
organismes telles qu’elles sont adoptées dans les lois de financement. En
outre, le règlement des dettes nées en 2007 appelle une solution à court
terme fondée sur l’inscription des crédits budgétaires correspondants.
B
–
Les limites de l’« état semestriel »
des dettes de l’Etat
En application de l’article 17 de la LOLFSS, le gouvernement doit
remettre au Parlement « un état semestriel des sommes restant dues par
l'Etat aux régimes obligatoires de base ». Il remet au Parlement un
document intitulé « état semestriel des dettes de l’Etat », établi en
trésorerie au sens de l’article L. 139-2 du code de sécurité sociale relatif à
la neutralité des flux de trésorerie entre l’Etat et la sécurité sociale.
48. Rapport sur les résultats de la gestion budgétaire, page 208.
49. Instruction du 17 décembre 2007 aux ministres et secrétaires d’Etat.
50. Ces conventions doivent également être signées avant le 15 janvier. La convention
avec l’ACOSS, qui porte sur les exonérations ciblées ainsi que l’AAH et l’API, a été
signée le 31 décembre 2007. En revanche, la convention avec la CNAMTS au titre de
l’AME n’est pas signée à ce jour.
C
OUR DES COMPTES
36
Comme l’indiquait déjà la Cour l’an dernier
51
, ce document ne
retrace pas une situation des dettes au sens comptable du terme, c'est-à-
dire des montants que l’Etat devra décaisser, de manière certaine, afin
d’éteindre ses obligations envers les organismes de sécurité sociale. De ce
fait, il ne donne qu’une vision partielle des « sommes dues par l’Etat »
visées par la LOLFSS, lesquelles ne peuvent s’entendre qu’en « droits
constatés »
52
.
Il ne permet pas non plus un suivi budgétaire de la consommation
de crédits, information qui serait sans doute également utile au Parlement.
Ainsi, alors que l’ « état semestriel » devrait présenter des
montants cohérents en lecture directe avec ceux inscrits dans la
comptabilité générale de l’Etat, il présente un solde des « dettes » de
l’Etat de 3,0 Md€ au 31 décembre 2007, dont 1,7 Md€ envers le régime
général, sensiblement différent des informations issues de la comptabilité.
Ce montant correspond à la fraction des dettes de l’Etat relative aux
dépenses de l’année décaissées par les organismes à la date du
31 décembre. Il exclut en particulier les prestations versées par la branche
famille (AAH, API) liquidées en décembre et versées le 5 janvier 2008
(0,9 Md€)
La Cour a pris note de l’engagement de la direction de la sécurité
sociale d’accompagner le prochain état semestriel au 31 décembre d’une
note méthodologique. Elle réitère cependant sa recommandation de
communiquer au Parlement un état cohérent avec la comptabilité en
droits constatés (en ce sens qu’il puisse s’en déduire grâce à un tableau de
passage)
et
de
l’accompagner
d’un
document
de
suivi
de
la
consommation des crédits budgétaires.
IV - La dette de la sécurité sociale
Alors que l’équilibre des régimes sociaux est au centre de la loi
organique de 2005 sur les lois de financement de la sécurité sociale, on
constate à nouveau une accumulation de résultats déficitaires financés par
des ressources de trésorerie.
51. Voir le rapport sur la sécurité sociale, septembre 2007, pp. 47-48.
52. Selon les principes de la comptabilité générale, une dette correspond à un passif
certain dont le montant et l’échéance sont connus avec certitude. Elle n’est donc pas
nécessairement exigible.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
37
A la mi 2008, les perspectives financières des différentes branches
et le volume des financements à court terme mobilisés par l’ACOSS et le
FFIPSA rendent nécessaire une nouvelle restructuration de la dette de la
sécurité sociale pour en assurer l’amortissement et en réduire le coût.
A
–
Une dette en progression constante
1
–
Périmètre et montant
Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances
publiques, la Cour analyse les différentes composantes de la dette de la
sécurité sociale, somme de la dette portée par la caisse d’amortissement
de la dette sociale (CADES) et de la dette des administrations de sécurité
sociale au sens de l’INSEE.
53
Cette dette a fortement progressé au cours
des douze dernières années, passant de 41,3 Md€ à la fin 1996, année de
création de la CADES, à 129,9 Md€ à la fin 2007.
La loi organique sur le financement de la sécurité sociale ne traite
de cette dette qu’au travers de deux dispositions relatives à la CADES :
d’une part, elle prévoit la fixation par le Parlement d’un objectif annuel
d’amortissement de la dette des régimes obligatoires de base, d’autre part,
elle subordonne « tout nouveau transfert de dette à la CADES » à « une
augmentation des recettes de la caisse permettant de ne pas accroître la
durée d’amortissement de la dette sociale ».
Par ailleurs, le Parlement fixe annuellement les plafonds de
ressources non permanentes destinées à couvrir les besoins de trésorerie
infra-annuels des régimes
54
. Toutefois, comme la Cour l’a souligné
53. Dans la typologie établie par l’INSEE, la dette des administrations de sécurité
sociale (ASSO) comprend notamment la dette de l’ACOSS (20,3 Md€ fin 2007), celle
des hôpitaux (16,7 Md€), celle de la MSA-FFIPSA (5,2 Md€), celle de l’UNEDIC
(9,9 Md€), enfin celle d’organismes divers (2,7 Md€). Dans le rapport de la Cour de
juin 2008 sur la situation et les perspectives des finances publiques, le chiffre retenu
pour la dette de la CADES est celui de 75,0 Md€, correspondant à la dette au sens de
Maastricht (dette brute moins titres d’Etat).
54. Le programme de qualité et d’efficience (PQE) annexé au PLFSS 2008, relatif au
financement, fixe trois objectifs relatifs à la dette, assortis d’indicateurs. Voir sur cette
question le chapitre III relatif aux programmes de qualité et d’efficience.
C
OUR DES COMPTES
38
depuis plusieurs années, ces plafonds ont été détournés de leur objet et
relevés chaque année à concurrence des déficits prévisionnels des régimes
obligatoires de base, sauf en cas de reprise de dettes par la CADES
55
.
Plafonds des ressources non permanentes votés en LFSS
En Md€
LFSS
2004
LFSS
2005
LFSS
2006
LFSS
2007
LFSS
2008
Régime général
33,0
13,0
18,5
28,0
36,0
Régime des exploitants agricoles (FFIPSA)
4,1
6,2
7,1
7,1
8,4
Caisse nationale de retraite des agents des
collectivités locales
0,5
0,5
0,55
0,35
0,25
Fonds spécial des pensions des ouvriers des
établissements industriels de l’Etat
0,05
0,15
0,15
0,15
Caisse autonome nationale de la sécurité
sociale dans les mines
0,2
0,2
0,3
0,3
0,4
Caisse nationale des industries électriques et
gazières
0,5
0,475
0,5
0,55
Caisse de retraite de la RATP
0,05
0,05
0,05
Caisse de prévoyance et de retraite de la
SNCF
1,7
Source :
LFSS
Pour le régime général, dont la trésorerie est centralisée par
l’ACOSS, ainsi que pour le régime des exploitants agricoles, dont le
financement est assuré à travers le FFIPSA
56
, le mécanisme des plafonds
d’avance est clairement utilisé pour couvrir non pas un besoin de
trésorerie courant, mais un déficit provenant du décalage entre les
dépenses et les recettes de sécurité sociale.
Pour appréhender la dette issue des régimes obligatoires de base de
sécurité sociale et des fonds concourant à leur financement, il est donc
nécessaire d’ajouter à la dette de la CADES une part des ressources non
permanentes mobilisées par l’ACOSS pour le compte du régime général
et par le FFIPSA. L’objectif des organismes de sécurité sociale étant de
terminer l’année avec une trésorerie aussi faible que possible,
55. En 2005, l’abaissement du plafond de ressources non permanentes du régime
général correspond au transfert à la CADES des déficits cumulés de la branche
maladie au 31 décembre 2003 et des déficits prévisionnels au titre des exercices 2004
à 2006.
56. L’analyse n’inclut pas l’endettement en fin d’année des régimes spéciaux, ce
d’autant plus que la facilité de trésorerie octroyée pour 2007 à la caisse de prévoyance
et de retraite du personnel de la SNCF n’a pas été utilisée par cette dernière. La
trésorerie du régime continue d’être assurée par la SNCF, ce qui se traduit par une
dette de la caisse à l’égard de l’entreprise de 1,4 Md€ à la fin 2007.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
39
l’endettement à court terme apparaissant à leur bilan en fin d’exercice
peut être considéré comme représentatif de la dette portée par l’ACOSS
57
et par le FFIPSA.
La dette de ces organismes peut ainsi être évaluée à 97,5 Md€, en
progression de 7 % par rapport à 2006
58
.
Dette de la sécurité sociale (périmètre LFSS)
En Md€
31.12.06
31.12.07
CADES
59
75,4
72,7
ACOSS (régime général)
12,7
20,1
FFIPSA (régime des exploitants agricoles)
3,1
4,7
Total
91,2
97,5
Source :
Cour des comptes
2
–
Les composantes de la dette de la sécurité sociale
a)
La dette portée par la CADES
La CADES a été créée en 1996 pour refinancer et apurer la dette
de l’agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS)
résultant des déficits cumulés du régime général de la sécurité sociale.
Elle est autorisée à emprunter sur les marchés financiers (appel public à
l’épargne et émission de titres négociables représentatifs d’un droit de
créance). Ses ressources sont constituées à titre principal du produit de la
contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS).
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a fixé un
objectif d’amortissement de la dette de 2,5 Md€, rectifié à 2,6 Md€ dans
la loi de financement suivante. Le résultat dégagé par la CADES lui a
permis d’éteindre sa dette à hauteur de 2 578 M€, en ligne avec les
prévisions rectifiées de la LFSS pour 2008.
Au 31 décembre 2007, le montant de la dette reprise par la CADES
s’élevait à 107,6 Md€. Compte tenu des amortissements effectués,
l’endettement net résiduel de la caisse atteignait 72,9 Md€ (contre
75,4 Md€ à la fin 2006).
57. La dette du fonds de solidarité vieillesse à l’égard de la CNAVTS est incluse dans
celle de l’ACOSS.
58. L’augmentation serait plus importante si l’Etat n’avait pas procédé à l’extinction
de ses dettes envers le régime général antérieures à 2007 (elle aurait atteint 13,4 %).
59. Pour la CADES et le FFIPSA, les chiffres figurant dans le tableau correspondent à
l’endettement net en fin d’année de ces organismes.
C
OUR DES COMPTES
40
Situation nette de la CADES au 31 décembre 2007
En Md€
Total de dette votée
110,4
Dette reprise
107,6
Total de CRDS perçue
55,4
* Capital amorti estimé
34,7
* Intérêts payés
20,7
Situation nette
– 72,9
Source :
CADES
b)
La dette de l’ACOSS et du FFIPSA
En dépit de l’extinction par l’Etat d’une partie de ses dettes envers
le régime général pour 5,1 Md€, les besoins de financement du régime
général ont continué à s’accroître en 2007 (-7,5 Md€) pour atteindre
20,1 Md€ au 31 décembre 2007. Outre le besoin de financement induit
par les déficits du régime général, la trésorerie du régime général
supporte le poids des dettes de l’Etat (4,2 Md€
60
) et du FSV (5,8 Md€) à
son égard.
Jusqu’à la fin 2007, dans le cadre d’une convention de mandat, la
CCMSA assurait la gestion de la trésorerie du FFIPSA et finançait son
découvert par des ressources d’emprunt. L’organisation du financement et
de la gestion de trésorerie du régime a été revue à la fin de 2007 pour être
confiée en totalité au FFIPSA, qui négocie désormais directement auprès
d’établissements bancaires des ouvertures de crédit à court terme (OCC).
A la fin 2007, la situation nette négative du FFIPSA atteignait 5,1 Md€,
contre 2,7 Md€ à la fin 2006.
3
–
L’alourdissement des charges d’intérêt
Alors que jusqu’en 2004 la CRDS était affectée aux deux tiers à
l’amortissement de la dette, les derniers transferts de dette ont entraîné un
alourdissement des charges d’intérêts supportées par la CADES, qui ont
atteint 3,1 Md€ en 2007 et dépassé pour la première fois l’amortissement
annuel de la dette. La CADES escomptait pour les années suivantes une
stabilisation des frais financiers. Si cette projection tenait compte de la
perspective d’une remontée des taux courts, elle n’intégrait pas celle
d’une nouvelle reprise de dette par la CADES.
60. Voir note 40 page 33.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
41
CRDS annuelle et répartition entre intérêts payés par la CADES et dette
amortie
Répartition entre intérêts et dette amortie
0
1000
2000
3000
4000
5000
6000
7000
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008(est)
crds
intérêts
dette amortie
Source :
CADES
Source :
CADES
Dette votée, reprise et amortie et situation nette de la CADES
-100 000
-80 000
-60 000
-40 000
-20 000
0
20 000
40 000
60 000
80 000
100 000
120 000
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
(est)
2009
(est)
Dette votée
Dette reprise
situation nette
dette amortie
C
OUR DES COMPTES
42
La dégradation de la situation financière du régime général a par
ailleurs pour conséquence un alourdissement significatif des charges
d’intérêt de l’ACOSS, qui se sont élevées à 648 M€ en 2007 (après
271 M€ en 2006. Celles du FFIPSA atteignent 186 M€ (contre 86 M€).
Si on ajoute aux charges financières de la CADES les intérêts
payés par l’ACOSS et par le FFIPSA la charge d’intérêt totale induite par
la dette de la sécurité sociale a été de 3,9 Md€ en 2007, en progression de
30 % par rapport à 2006.
Charges d’intérêt
En M€
2006
2007
CADES
61
2 661
3 101
ACOSS
271
648
FFIPSA
86
186
Total
3 018
3 935
Source :
Cour des comptes
B
–
Une restructuration inévitable
1
–
L’absence de perspective proche de retour à l’équilibre
Depuis la loi organique du 2 août 2005, les lois de financement de
la sécurité sociale doivent contenir pour l’année de la loi et les trois
années suivantes un tableau des objectifs de dépenses et des prévisions de
recettes de chacune des branches des régimes et des fonds concourant à
leur financement.
Alors que les prévisions annexées à la LFSS pour 2007 laissaient
entrevoir un retour à l’équilibre en 2010 pour le régime général en
hypothèse basse (et un excédent de 4,7 Md€ sous des hypothèses
économiques plus favorables), les prévisions révisées de la LFSS pour
2008 repoussent à 2012 les perspectives de rééquilibrage.
Pour le FSV, l’amélioration des résultats annuels, observée en
2007, devrait, selon les prévisions de la LFSS pour 2008, se poursuivre.
En revanche, le déficit prévisionnel annuel du FFIPSA devrait
s’accentuer pour atteindre 3,1 Md€ en 2010.
Les déficits anticipés pour les exercices à venir auront pour effet
d’augmenter la dette de la sécurité sociale constatée à la fin 2007. Selon
61. Pour la CADES il s’agit de la charge d’intérêts nette des produits de placement
(soit le produit net bancaire).
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
43
les prévisions annexées à la loi de financement pour 2008, le déficit
cumulé du régime général et du FSV devrait être compris entre 19,7 Md€
et 24,1 Md€ sur la période 2008-2011, tandis que celui du FFIPSA
devrait atteindre 8,5 Md€. Cette situation appelle une restructuration en
profondeur du financement de la dette de la sécurité sociale.
2
–
Les limites des financements à court terme
a)
Un profil d’endettement déconnecté des perspectives financières
de la sécurité sociale
L’utilisation de facilités de trésorerie pour financer les déficits du
régime général et du FFIPSA a pour conséquence d’accroître la part de
l’endettement financée par des ressources à court terme.
Profil de la dette de la sécurité sociale (périmètre LFSS)
En Md€
Court terme
(< 1 an)
Moyen terme
Long terme
(> 5 ans)
Total
CADES*
11,9
22,6
37,6
72,1
ACOSS
20,1
20,1
FFIPSA
4,7
5,1
Total
37,1
22,6
37,6
96,9
%
38%
23%
39%
100%
*Il s’agit ici de l’endettement sur titres
Source :
Cour des comptes
Alors que la dette à moins d’un an représente 17 % de
l’endettement de la CADES, le pourcentage de dette à court terme monte
à 38 % en incluant dans l’analyse l’endettement de l’ACOSS et du
FFIPSA. Le choix de durées supérieures ou égales à quatre ans serait plus
adapté à une situation caractérisée à la fois par la nécessité d’un portage
sur longue période de la dette et par l’absence, en l’état actuel, d’une
perspective de retour rapide à l’équilibre du régime général et du
FFIPSA.
b)
L’impact des tensions qui affectent les marchés financiers
Les emprunteurs sont confrontés depuis l’été 2007 (suite à la crise
des crédits hypothécaires américains) à une raréfaction des liquidités et à
une perspective de remontée des taux courts, anticipée par un
renchérissement des ressources à deux mois, qui se situaient à la mi 2008
à 70 points de base au-dessus du taux au jour le jour. Toutefois, les
organismes mentionnés dans les lois de financement de la sécurité sociale
n’ont été que modérément touchés en 2007.
C
OUR DES COMPTES
44
Le financement du découvert de l’ACOSS
En particulier, l’ACOSS se trouve en partie protégée d’une forte
remontée des taux de marché par les conditions de financement prévues
par la convention qui la lie à la Caisse des dépôts et consignation (CDC).
Cette convention lui assure des ressources de trésorerie prédéterminées
(outre une avance d’une durée maximale de six mois, des avances
mobilisables à 24 heures), tarifées sur une base de taux au jour le jour,
(EONIA) plus une marge fixée avant la crise. Ainsi en 2007, l’ACOSS a
eu recours 55 fois aux avances prédéterminées de la CDC, pour un
montant total de 184,7 Md€ et 104 fois aux avances de 24 heures, pour
50,8 Md€. Au 31 décembre 2007, les encours étaient de 10,5 Md€ pour
les avances à 2 mois et de 1,04 Md€ pour celles à 24 heures.
L’ACOSS a aussi la possibilité d’émettre des billets de trésorerie
(BT) dont le plafond fixé initialement à 6,5 Md€ a été relevé à l’automne
2007 à 11,5 Md€. Au 31 décembre, l’encours de BT s’élevait à 8,5 Md€
souscrits par l’Etat qui ont été remboursés le 12 janvier 2008
62
.
La marge maximale perçue par la CDC, selon les termes de la
convention financière 2006-2010, ne permet pas à celle-ci de répercuter le
coût des ressources à 1 ou 2 mois (qui ont atteint, lors de périodes
récentes, jusqu’à 80 points de base au-dessus du jour le jour) mobilisées
le cas échéant sur les marchés pour financer le découvert permanent de
l’ACOSS
63
.
Mettant en avant les effets de la crise financière sur les marchés de
taux, la CDC a annoncé un durcissement de ses conditions financières en
2008, en cas de découvert dépassant 25 Md€. Ses réticences à envisager
en tout état de cause la mise à disposition d’un montant d’avances
supérieur à 31 Md€ montrent que le mécanisme des refinancements
permanents à court terme, outre qu’il est contraire à l’esprit de la loi, se
heurte désormais aux contraintes de marché subies par la CDC.
Le financement du découvert du FFIPSA
Pour financer son découvert, le FFIPSA quant à lui négocie des
lignes de crédit auprès d’établissements bancaires (cf. supra). Le niveau
atteint par son besoin de financement, l’absence de perspective de
62. La Cour a critiqué dans son rapport sur les résultats de la gestion budgétaire de
l’Etat l’émission de billets de trésorerie fin décembre, réservés à l’Etat, qui lui permet
de réduire facialement la dette publique au 31 décembre. Toutefois elle permet aussi à
l’ACOSS de réduire son exposition aux marchés en fin d’année.
63 . Une partie du financement apporté par la Caisse des dépôts provient des
ressources propres dont elle dispose pour financer ses missions d’intérêt général.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
45
redressement de ses comptes et la crise des marchés financiers ont pesé
sur le bouclage de son financement pour 2008.
Les lignes de crédit négociées avec des établissements bancaires
64
,
dans la limite fixée par le Parlement (8,4 Md€), sont pour l’essentiel
tarifées sur une base Euribor qui dépend des durées des différents tirages.
Ce dispositif répercute pleinement sur l’emprunteur la différence entre le
taux au jour de jour et le taux interbancaire de un à dix mois (la différence
entre l’Euribor à deux mois et l’EONIA atteignait 75 points de base le
23 juin 2008).
La signature de la CADES
Présente depuis plusieurs années sur le marché des emprunts en
devises (qu’elle adosse systématiquement à des produits neutralisant le
risque de change), la CADES a continué d’émettre en 2007 à des
conditions proches de celles des meilleurs emprunteurs de taille
comparable (KFW allemande et banque européenne d’investissement),
alors que les emprunts en euros émis par le Trésor voyaient leurs
conditions se dégrader par rapport à celles obtenues par le Bund
allemand. Les taux obtenus par la CADES demeurent cependant
supérieurs de 10 à 15 points de base à ceux exigés du Trésor français.
Tout nouveau transfert de dette à la CADES, exigera d’abord
l’affectation de nouvelles ressources pérennes pour respecter l’article 20
de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale
qui interdit d’accroître la durée d’amortissement de la dette sociale. Ainsi
dans l’hypothèse d’un transfert supplémentaire de 30 Md€, 2,4 Md€ (soit
une hausse de 0,2 point de CRDS, c’est-à-dire une augmentation de 40 %
de cette cotisation) de ressources nouvelles devraient être dégagées.
________________________
SYNTHESE
_________________________
Dans un contexte d’augmentation prévisible de l’endettement du
régime général et du FFIPSA et de tensions sur les marchés financiers, la
Cour estime que priorité devrait être donnée à une remise à l’équilibre des
comptes sociaux et au renforcement des mesures susceptibles d’enrayer la
dérive des dépenses par rapport aux ressources disponibles.
Par ailleurs, il appartient à la loi de finances de prévoir les crédits
nécessaires d’une part, pour apurer dans des conditions normales, tant
budgétaires que comptables, les créances nées d’une insuffisance de
crédits votés en 2007 et, d’autre part, pour abonder ceux votés en LFI 2008
64. Il s’agit d’une ligne de crédit de 8,0 Md€ avec un syndicat bancaire mené par
CALYON et d’une ligne de crédit de 0,4 Md€ négociée avec la société générale.
C
OUR DES COMPTES
46
afin de faire face à l’intégralité des dépenses à la charge de l’Etat et
d’éviter la reconstitution d’une nouvelle dette.
Enfin, le plafond des ressources non permanentes devrait être à
l’avenir fixé au niveau requis par les seuls besoins de trésorerie infra-
annuels, ce qui implique de recourir à des ressources de moyen et long
terme pour financer l’endettement. En tout état de cause, dans le respect de
la loi organique, tout nouveau transfert de dettes à la CADES devra être
accompagné de l’abondement d’une ressource pérenne sur toute la durée
de l’amortissement de cette dette, qu’elle qu’en soit la nature.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
5.
Financer les dettes des régimes par des ressources à long terme
conformes à leur nature.
6.
Réduire les plafonds de ressources non permanentes à un niveau
correspondant à la seule couverture de leurs besoins de trésorerie
courants.
7.
Asseoir tout nouveau transfert de dette à la CADES sur des
ressources pérennes.
V - L’évolution des ressources du régime général
depuis 2001
Dans son rapport annuel sur la sécurité sociale de 2001, la Cour
avait dressé un panorama des ressources du régime général de 1980 à
2000. Elle y formulait plusieurs constats :
-
la structure des recettes avait été modifiée avec la montée en
puissance de la contribution sociale généralisée (CSG) ;
-
la nature des recettes était relativement cohérente avec la nature,
universelle ou contributive, des prestations, sauf dans la branche
famille où la part de cotisations sociales était encore élevée ;
-
les relations financières entre l’Etat et la sécurité sociale s’étaient
complexifiées du fait de financements croisés, de règles hétérogènes de
facturation des services mutuellement rendus et de l’écran constitué
par plusieurs fonds de financement.
La Cour a souhaité revenir en 2008 sur la question du financement
du régime général, afin de mettre en évidence les évolutions les plus
récentes de sa structure et notamment celles liées aux dispositifs
d’exonérations de charges.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
47
A
–
Les évolutions de la structure du financement
1
–
Une dynamique des dépenses plus forte que celle des recettes
sur la période 2000-2007
Entre 2000 et 2007, les dépenses nettes du régime général ont
augmenté de 84,4 Md€, pour atteindre 290,2 Md€ contre 205,8 Md€ en
2000. En 2007, elles représentaient 15,34 % du PIB contre 14,30% en
2000, soit une augmentation de 1,04 point.
Sur la même période, les recettes ont augmenté de 68,7 Md€ et
n’ont donc couvert l’augmentation des dépenses qu’à hauteur de 81 %.
Cette croissance des recettes a résulté presque exclusivement de la
dynamique de leur assiette. En effet, les augmentations de taux ont été
limitées
65
, sauf pour la CSG sur les revenus du capital et des jeux
(respectivement de 0,85 et 2,15 points).
Une autre assiette que celle des revenus d’activité n’aurait pas
donné des résultats très différents. Sur longue période, les deux
principales assiettes envisageables, revenus d’activité ou consommation
des ménages, augmentent au mieux comme le PIB, voire légèrement
moins vite. De même, les revenus du patrimoine, qui ont connu une forte
croissance entre 1983 et 2006, reculent très légèrement sur la période
2000-2006 et cette assiette est trop faible pour constituer une alternative
possible. Seuls les revenus de remplacement voient leur part dans le PIB
augmenter régulièrement du fait de la croissance des effectifs concernés.
65. 0,2 point de cotisations retraite plafonnée et 0,1 point de cotisations AT-MP en
2006 ; 0,15 point de CSG sur les revenus d’activités et d’allocation chômage et
0,55 point sur certaines pensions de retraite.
C
OUR DES COMPTES
48
Part de différents agrégats dans le PIB (1983-2006)
En Md€
1983
1990
2000
2006
Evolution
1983-2006*
Evolution
2000-2006*
Montant
2006
Consommation
57,1%
56,1%
54,4%
55,0%
-2,2
0,6
993,2
Salaires et
traitements bruts
40,9%
37,5%
38,3%
38,1%
-2,8
-0,2
689,1
Revenus de
remplacement
13,6%
13,6%
14,5%
15,3%
1,7
0,8
277,3
EBE + revenu
mixte (**)
15,7%
14,9%
14,5%
15,0%
-0,7
0,5
271,5
Revenus du
patrimoine
5,1%
6,2%
6,6%
6,5%
1,4
-0,1
118,4
Dépenses nettes
du régime général
13,4%
13,8%
14,3%
15,4%
1,9
1,1
277,6
*L’évolution est présentée en points de PIB
**La catégorie « EBE+ revenus mixtes » représente le solde d’exploitation des
entreprises (sociétés et entreprises individuelles)
Source :
DREES, CCSS 07 et calculs de la Cour.
Dès lors, les ressources ne peuvent pas s’ajuster automatiquement
aux dépenses. En l’absence de recettes nouvelles ou d’une moindre
croissance des dépenses, le solde du régime général est appelé à se
dégrader. Ainsi, entre 2001 et 2007, il est passé d’un excédent de 1,2 Md€
à une suite continue de déficits annuels de plus de 10 Md€ par an en
moyenne depuis 2003.
2
–
La part croissante des impôts et taxes
La part des cotisations sociales, qui représentaient 97 % des
produits du régime général en 1980 et 67 % en 2000, a continué à
décroitre et n’en représente plus que 59 % en 2006 (même si, en volume,
les cotisations sociales des salariés et des employeurs ont augmenté,
puisqu’elles représentaient 165,1 Md€ contre 128,4 Md€ en 2000, soit
une hausse de 28,6 %).
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
49
Montant des cotisations sociales en miliards d'euros de 2006 et part dans
les ressources du régime général depuis 1983
0
20
40
60
80
100
120
140
160
180
1983
1985
1987
1989
1991
1993
1995
1997
1999
2001
2003
2005
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
100%
Montant des cotisations sociales en volume
Part des cotisations sociales dans les ressources du régime général
Source :
DSS et calculs de la Cour
Cette évolution est la conséquence de l’augmentation des impôts et
taxes dont la part dans les ressources du régime général est passée en
dix ans de moins de 5 % à plus de 30 %.
-
le produit de la CSG représente 24,2 % des ressources du régime
général. Il s’est établi en 2007 à 61,4 Md€ contre 42,5 Md€ en 2000,
soit une progression de 44,5 % due à la fois au dynamisme et à
l’élargissement de l’assiette ainsi qu’à l’augmentation des taux. Son
rendement est élevé puisqu’un point représente 10,7 Md€ de recettes
en 200766.
-
la baisse du poids des cotisations sociales supportées par les
entreprises, observée entre 1984 et 2000 (de 9,6 % du PIB à 7,2 %),
s’est poursuivie : en 2006 elles représentaient 5,8 % du PIB, les
entreprises assurant désormais moins de 44 % des contributions au
régime général contre près de 60 % au début des années 1980.
Toutefois, le poids respectif des entreprises et des ménages dans le
total des ressources a peu varié depuis 2000, dans la mesure où les deux
tiers des impôts et taxes affectés (ITAF) qui financent le régime général
depuis 2006, en compensation des pertes de recettes induites par les
exonérations de charges, sont dues par des employeurs (taxe sur les
salaires) ou des entreprises (taxes pharmaceutiques).
66. Contre 8,94 Md€ en 2001, ce qui correspond à 9,98 Md€ de 2007 (selon les
calculs de la CCSS).
C
OUR DES COMPTES
50
Répartition du financement du régime général (1983 - 2006)
0%
20%
40%
60%
80%
100%
19
8
3
1
98
4
19
8
5
1
986
19
8
7
1988
19
8
9
1990
19
9
1
1992
19
9
3
1994
1
99
5
19
9
6
1
99
7
19
9
8
1
999
20
0
0
2001
20
0
2
2003
20
0
4
2005
20
0
6
Ménages
Entreprises
Etat
Source :
DSS-pour la méthodologie de calcul, voir rapport de la CCSS de septembre
2006, p. 94.
3
–
Une convergence au plan européen
Les réformes des cotisations sociales conduites depuis un quart de
siècle se sont inscrites dans une tendance à la convergence au niveau
européen, vers un financement de la protection sociale de plus en plus
équilibré entre cotisations, contributions publiques et autres ressources.
En 1990, les cotisations sociales représentaient 79 % des ressources de
l’ensemble de la protection sociale en France contre 64 % en moyenne en
Europe -soit un écart de 15 points. En 2005, ce taux était tombé à 66 %,
contre 59 % en moyenne- soit un écart de 7 points. A l’inverse, des pays
comme le Danemark ou la Suède, qui financent leurs dépenses de
protection sociale très majoritairement par des contributions publiques,
ont désormais davantage recours à des cotisations sociales.
Part des cotisations sociales dans le financement de la
protection sociale (1990-2005)
0%
20%
40%
60%
80%
100%
France
Espag
ne
A
llemagne
U
E 15
Italie
Royaume
Uni
Pays-Bas
Suède
Dane
mark
1990
1995
2000
2005
Source :
Données annuelles d’Eurostat et calculs de la Cour
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
51
Toutefois, les évolutions en termes de type de recettes n’ont pas été
accompagnées en France d’une modification significative de la part des
différentes assiettes dans le total. Les revenus d’activité sont encore la
source de financement principale de toutes les branches du régime
général, la diversification s’étant faite surtout à travers la CSG, dont
l’assiette est elle-même composée aux trois quarts de revenus d’activité.
Le taux global de prélèvement au titre de la protection sociale est de
58,3 % sur les salaires, à comparer avec 7,1 % pour les revenus de
remplacement et 2,4 % pour la consommation
67
.
B
–
La réforme des cotisations sociales
Dès les années 1980, les pouvoirs publics, après avoir écarté la
proposition de substituer une assiette assise sur la valeur ajoutée à celle
sur les salaires et achevé le déplafonnement de la plupart des cotisations,
ont engagé une profonde réforme des cotisations sociales à la fois
salariales et patronales. Trois objectifs ont été poursuivis : élargir
l’assiette des prélèvements pour faire face à des besoins de financement
croissants, assurer une plus grande équité dans le financement de
prestations devenues universelles et défendre l’emploi et la compétitivité
par l’allègement du coût du travail sur les bas salaires.
1
–
Le remplacement d’une partie des cotisations salariales par
la CSG
La création de la CSG, intervenue en 1991, a eu pour objet
d’élargir l’assiette des seuls revenus d’activité à l’ensemble des revenus
(revenus de remplacement, de patrimoine, de placement, des jeux et
d’activité avec un nombre limité d’exonérations
68
). Son taux est
proportionnel et elle finance des prestations de nature universelle :
branches maladie et famille, fonds de solidarité vieillesse (FSV) et caisse
nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
Le rendement élevé de cette contribution sociale d’assiette large en
fait un bon instrument de financement de la sécurité sociale. La CSG a été
utilisée soit pour apporter des ressources nouvelles soit pour se substituer
à des cotisations salariales. Mais la poursuite du mouvement de
substitution
aux
cotisations
salariales
qui
subsistent
-indemnités
67. Source : DREES.
68. Prestations familiales, revenus de remplacement des personnes non imposables à
l’impôt sur le revenu si elles ne sont également pas imposables à la taxe d’habitation
(sinon taux réduit), certains revenus du capital (livret A, livret jeune, livret de
développement durable, livret d’épargne populaire…).
52
C
OUR DES COMPTES
journalières (0,75 points) et pensions de retraite (6,65 points sous plafond
et +0,10 points déplafonnés)- se heurte au fait que celles-ci sont liées à
l’ouverture de droits directement rattachés à l’activité professionnelle
Lors de sa création la CSG s’est substituée à des cotisations
familiales patronales. Toutefois, cette solution s’est révélée très complexe
à mettre en oeuvre. En effet, pour neutraliser l’impact de la hausse des
prélèvements sur le salaire net et de la baisse des charges pour
l’employeur, la cotisation salariale d’assurance vieillesse plafonnée a été
ramenée de 7,6 % à 6,55 %, tandis qu’une cotisation patronale
d’assurance vieillesse déplafonnée était créée au taux de 1,6 points. Toute
nouvelle substitution de CSG à des cotisations patronales se heurte à la
nécessité de restituer dans le salaire direct l’équivalent du prélèvement
qui serait opéré sur les revenus des salariés, en substitution à un
prélèvement sur l’employeur.
2
–
La baisse des charges patronales et leur financement
Après avoir réduit le taux des cotisations (employeurs) familiales
une première fois de 9 % à 7 % à l’occasion de leur déplafonnement total,
puis à 5,4 % lors de la création de la CSG, les pouvoirs publics ont ciblé
les allégements de cotisations sur des publics, zones géographiques ou
secteurs d’activité particuliers. Au 1
er
septembre 2007, on comptait
51 dispositifs particuliers, pour un montant estimé de 6,4 Md€, dont
seulement 60 % soit 3,8 Md€ sont compensés par l’Etat à la sécurité
sociale - sous forme de dotations budgétaires. Toutefois, ce sont surtout
des mesures générales qui ont été mobilisées au titre de la politique de
l’emploi.
a)
Le poids des exonérations générales de cotisations sociales
Les exonérations générales visant à alléger le coût du travail des
emplois peu qualifiés se sont développées à partir de 1993 et ont connu
une forte accélération (+50 %) lors du passage aux 35 heures. La loi du
17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et à l’emploi,
dite loi Fillon, a simplifié les dispositifs précédemment existants en
instaurant une réduction générale dégressive des cotisations patronales de
26 points au niveau du SMIC, s’annulant à 1,6 SMIC. Elle s’applique aux
employeurs du secteur privé hors particuliers employeurs et aux
employeurs du secteur public de nature industrielle et commerciale, sauf
pour leurs salariés affiliés à des régimes spéciaux.
Au 1
er
juillet 2007, le taux d’exonération au niveau du SMIC pour
les entreprises de moins de 20 salariés est passé de 26 % à 28,1 % du
salaire brut, soit l’intégralité des cotisations sociales patronales des
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
53
branches maladie, famille et retraite. Au total, les cotisations sociales sont
aujourd’hui
progressives
jusqu’à
1,6 SMIC,
proportionnelles
de
1,6 SMIC jusqu’au plafond de la sécurité sociale, puis légèrement
dégressives au delà
69
.
La loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du
pouvoir d’achat (loi TEPA) a instauré un dispositif complémentaire
d’exonérations sur les heures supplémentaires et complémentaires qui, à
la différence des exonérations bas salaires, concernent tous les salariés
quel que soit leur niveau de salaire et aussi bien la part patronale
(exonérée au même taux que les heures de base pour les salaires
inférieurs à 1,6 SMIC et bénéficiant en plus, pour tous, d’une réduction
forfaitaire) que salariale (exonération totale).
Entre 2000 et 2006, le taux de croissance moyen des exonérations
générales s’est établi à 9 % par an. En 2007, leur coût s’élevait à
20,6 Md€, soit 13 % du montant des cotisations patronales du régime
général. Elles concernaient 11 millions de salariés.
Montant des mesures d’exonérations (régime général)
En M€
1993
70
1997
2000
2003
2005
2006
2007
Exonérations à
vocation générale
614
6 977
10 961
15 039
16 360
18 369
20 629
Exonérations heures
supplémentaires
614
Exonérations ciblées
1 272
2 519
2 308
2 330
2 609
3 303
3 867
Mesures
compensées
Total mesures
co
mpensées
1 886
9 496
13 269
17 369
18 970
21 67 2
25 110
Mesures non
compensées
Total mesures non
compensées
1 313
2 024
2 390
2 167
2 073
2 353
2 692
Coût total des exonérations
3 199
11 520
15 659
19 536
21 043
24 025
27 802
Source :
ACOSS
En 2007, le montant total de l’ensemble des dispositifs
d’exonérations a atteint 27,8 Md€, dont 21,2 Md€ ont fait l’objet d’une
compensation sous la forme d’une affectation d’impôts et taxes et
3,8 Md€ d’une dotation budgétaire. En 2008, leur coût attendu est estimé
par le PLFSS à 32,3 Md€, y compris plus de 4 Md€ au titre des
exonérations sur les heures supplémentaires prévues par la loi TEPA. Ce
69. Au-delà du plafond, les prélèvements destinés à la sécurité sociale sont quasiment
proportionnels lorsqu’on y intègre les cotisations obligatoires dues aux institutions de
retraite complémentaire.
70. Données établies en encaissement / décaissement (jusqu’en 1996).
54
C
OUR DES COMPTES
coût représente environ 10 % des recettes du régime général ou de l’Etat
et 70 % du déficit de ce dernier.
b)
Les modalités de financement des exonérations
Le principe de compensation intégrale des exonérations est posé
par l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale. Seules les
exonérations créées avant cette loi ou dont une loi postérieure prévoit
explicitement la non compensation ne donnent pas lieu à compensation.
En 2007, sur 27,8 Md€, 2,7 Md€ n’étaient pas compensés à la sécurité
sociale.
Les exonérations ciblées
Les exonérations ciblées sont compensées par des dotations, votées
au titre des programmes budgétaires correspondant à la politique
sectorielle à laquelle elles participent. Toutefois, l’estimation initiale des
dotations budgétaires utilisées est chroniquement insuffisante. En outre,
le remboursement par l’Etat des sommes dues n’intervient qu’avec retard.
Ainsi pour l’année 2007, l’Etat a accumulé vis-à-vis de la sécurité sociale
une nouvelle dette de 1,7 Md€ à ce titre.
Les exonérations générales
En ce qui concerne les exonérations bas salaires, elles ont fait
l’objet d’une compensation au franc ou à l’euro près jusqu’à la loi de
finances pour 2006. Cette compensation a revêtu des formes différentes
au fil du temps : concours budgétaires de 1993 à 2000, prise en charge par
le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de
sécurité sociale (FOREC), lui-même alimenté par des impôts et taxes
affectés, de 2001 à 2003, puis, à partir de 2004, concours budgétaires.
La loi de finances pour 2006 (art. 56) a profondément modifié le
mécanisme de financement des exonérations générales. D’une part, elle
est revenue au principe, qui avait présidé à la création du FOREC, d’une
affectation d’un « panier fiscal » d’impôts et taxes sans toutefois recréer
l’écran qu’il avait constitué. D’autre part, la garantie d’une compensation
à l’euro l’euro, maintenue en 2006, disparaît à partir de 2007.
L’Etat affecte depuis 2006 un panier de taxes pour compenser les
pertes de recettes dues aux exonérations bas salaires. Celui-ci est
constitué de huit taxes hétéroclites, peu lisibles et diversement
dynamiques. En outre, trois taxes ont été ajoutées pour compenser (à
l’euro près) la perte due aux exonérations sur les heures supplémentaires.
Toutefois, dans la mesure où les paramètres des exonérations n’ont jamais
été stabilisés, la composition du panier de taxes est constamment
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
55
modifiée pour suivre le rythme de progression des exonérations sur les
bas salaires : ainsi, la loi de finances rectificative pour 2008 a dû abonder
le panier 2007 à hauteur de 1 Md€.
Bien que le panier ait été constitué pour évoluer comme la masse
salariale, le choix de le déconnecter du montant exact des exonérations
s’est trouvé mis en échec dès la première année. Non seulement le
montant global a dû être réévalué, mais la répartition entre les
bénéficiaires
du
produit
de
ces
taxes,
qui
devait
être
arrêtée
définitivement, a dû être réajustée par un arrêté du 4 mars 2008.
Autrement dit, pour préserver les ressources de la sécurité sociale,
toute modification du dispositif d’exonération et toute revalorisation du
SMIC allant au-delà de l’augmentation du salaire horaire moyen doivent
s’accompagner d’un ajustement du panier de taxes affectées. A cet égard,
pour éviter que les revalorisations du SMIC n’augmentent le montant des
exonérations, la Cour a recommandé dans son rapport au Parlement sur
l’intégration des exonérations dans un barème
71
de supprimer toute
référence au SMIC dans la fixation du seuil de sortie des exonérations :
celui-ci pourrait être déterminé en euros ou en pourcentage du plafond de
la sécurité sociale.
En outre, l’affectation d’un nombre réduit d’impôts (autant que
possible à assiette large et dynamique) permettrait de renforcer la
transparence et la lisibilité de ces compensations.
c)
L’évaluation des dispositifs d’exonération
Les dispositifs ciblés
En 2007, la Cour a procédé à la demande de la commission des
finances de l’Assemblée nationale à une enquête sur les exonérations en
faveur des territoires et des secteurs d’activité
72
. Il ressort de ces analyses
que ces dispositifs ne font pas l’objet d’une évaluation financière
suffisante, sont peu lisibles et mal contrôlés. Les données disponibles
montrent que leur impact sur l'emploi est limité au regard des efforts
financiers importants consentis par les finances publiques. La Cour
71. Communication à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de
l’Assemblée nationale sur l’intégration dans un barème des taux de cotisations
patronales et des exonérations bas salaires et sur les heures supplémentaires, Cour des
comptes, mai 2008.
72. Communication à la commission des finances, de l’économie générale et du plan
de l’Assemblée nationale sur les exonérations de charges sociales en faveur des
territoires et des secteurs d’activité, Cour des comptes, octobre 2007.
56
C
OUR DES COMPTES
recommandait un réexamen de ces différents dispositifs à la lumière des
résultats d'évaluations ciblées.
Les mesures générales
La Cour a également procédé à la demande de cette même
commission à une évaluation de l’efficacité des mesures d’exonération
sur les emplois peu qualifiés
73
. Elle avait conclu en premier lieu que si
aucune évaluation ne démontre un effet négatif sur l’emploi, l’ampleur de
l’effet positif observé dépend, pour une large part, de l’ampleur de la
substitution entre travail qualifié et travail non qualifié, laquelle est trop
peu connue et trop peu assurée. En particulier, la Cour avait souligné que
l’effet global peut résulter de deux effets très différents -mais qui peuvent
être complémentaires- : un effet de déplacement entre secteurs au profit
de ceux qui emploient beaucoup de peu qualifiés et un effet baisse de prix
qui suscite un surcroit de demande, donc d’activité.
En second lieu, la Cour avait observé que les évaluations étant
effectuées « toutes choses égales par ailleurs » ne tiennent pas compte en
particulier de la revalorisation du SMIC intervenue au cours de la même
période, qui a été d’une ampleur comparable à celle des allègements
(26 points d’allégement et 28 % d’augmentation du SMIC). Le résultat a
été une forte progression du pourcentage de salaires bénéficiant des
exonérations « bas salaires », passé de 40 % en 1995 à plus de 50 % en
2003. Dans ces conditions, la Cour estimait que l’effet net des
exonérations traduit plutôt un ralentissement des destructions d’emploi
qu’une augmentation des créations.
En troisième lieu, dans l’industrie, si les exonérations de charges
sociales ont permis durant dix ans d’accompagner des mutations
inévitables vers des modes de production nécessitant des qualifications
plus élevées, cette problématique semble désormais dépassée, tandis que
dans le secteur tertiaire et notamment dans la grande distribution, elle
procure des rentes de situation que rien ne justifie.
Enfin, la Cour relevait que les études disponibles ne mettaient pas
en évidence d’effet de « trappe à bas salaires » dont la crainte avait
justifié le relèvement du seuil d’exonération à 1,8 SMIC avant qu’il ne
soit ramené à 1,6 SMIC.
Ces constats justifient qu’une attention particulière soit apportée
aux facteurs qui contribuent le plus à l’augmentation du coût des
73. Communication à la commission des finances, de l’économie générale et du plan
de l’Assemblée nationale sur les exonérations de charges sociales en faveur des peu
qualifiés, Cour des comptes, septembre 2006.
LES COMPTES SOCIAUX EN
2007
57
exonérations pour les finances publiques. La Cour a recommandé un
meilleur ciblage des exonérations
74
, d’une part, en les limitant aux
entreprises de moins de 20 salariés ou en resserrant la plage de 1,6 à 1,3
SMIC et, d’autre part ,comme indiqué précédemment, en fixant le point
de sortie en euros ou en pourcentage du plafond de la sécurité sociale en
lieu et place du SMIC.
Par ailleurs, ces mesures et en particulier la loi TEPA, ont
fortement complexifié les contrôles des URSSAF -à l’origine facilités par
la simplicité d’un dispositif de cotisations auto-liquidées à partir de taux
proportionnels et uniformes sur une assiette large- et ont accru les risques
de contentieux et de fraude. En effet, les informations demandées aux
entreprises sont de plus en plus nombreuses et plus difficilement
vérifiables, en l’absence de déclaration sociale nominative, dont le projet
est actuellement à l’étude.
D’une manière plus générale, ce système est rendu complexe par
l’assignation à un même instrument de politique publique d’objectifs
multiples et conflictuels. C’est le cas notamment des exonérations,
utilisées successivement et souvent concomitamment pour favoriser des
publics particuliers, la réduction du temps de travail, le temps partiel, la
lutte contre la délocalisation des industries, la compétitivité, la lutte
contre le chômage (en particulier des moins qualifiés) et finalement le
pouvoir d’achat. Une plus grande simplicité des flux financiers ne pourra
donc être atteinte que si l’Etat met en oeuvre ses politiques publiques en
ayant davantage recours à ses propres outils qu’à des instruments relevant
de la sécurité sociale.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
8.
Réduire sensiblement la plage actuelle des exonérations générales et
déconnecter leur seuil de sortie des évolutions du SMIC, en l’exprimant en
euros ou en pourcentage du plafond de sécurité sociale.
9.
Réexaminer la composition du panier fiscal affecté en compensation
des exonérations.
10.
Réexaminer les dispositifs d’exonérations ciblées à la lumière de
l’évaluation de leur efficacité et de leur efficience.
74. En outre, toutes les conséquences devraient être tirées de la volonté, exprimée par
le législateur à l’occasion de la LFSS pour 2007, de renforcer la logique assurancielle
des cotisations AT-MP en les excluant expressément du bénéfice des exonérations
générales. A l’occasion d’un éventuel resserrement du dispositif d’allègements,
souhaitable pour les finances publiques, pourraient également être exclues de son
bénéfice les cotisations de la branche vieillesse.
59
Chapitre II
L’objectif national de dépenses
d’assurance maladie
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
61
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Les dépenses d’assurance maladie sujettes à régulation sont
retracées dans un objectif national de dépenses d’assurance maladie
(ONDAM), dont la valeur est fixée chaque année par la loi de financement
de la sécurité sociale (LFSS). Pour 2007 l’ONDAM était fixé à 144,8 Md€,
soit une augmentation de 2,6 % par rapport à une base de référence de
141,1 Md€. Cet objectif a été fortement dépassé en 2007, de plus de 3 Md€.
Un tel écart, sensible en cours d’année, a d’ailleurs justifié la mise en
oeuvre, pour la première fois, de la procédure d’alerte prévue par la loi du
13 août 2004. Cet écart, par son ampleur, a conduit la Cour à en
rechercher et en analyser les causes.
Au-delà de la description des faits ayant marqué la mise en oeuvre de
l’ONDAM 2007, le présent chapitre analyse tout d’abord les modalités de
construction de l’ONDAM, puis les réalisations de ses principales
composantes (en masse financière) relatives aux soins de ville, aux
établissements de santé et au secteur médico-social. Deux éclairages
thématiques portant sur les dépenses de soins infirmiers libéraux d’une
part, sur l’articulation entre l’ONDAM soins de ville et les négociations
conventionnelles d’autre part, complètent cette présentation.
I - Les réalisations de l’ONDAM 2007
A
–
L’ONDAM de 2007 : vue d’ensemble
1
–
La construction de l’ONDAM
L’ONDAM de 2007 a le même périmètre que celui de 2006, à une
modification mineure près
75
, les observations formulées par la Cour sur
ce point en 2007 n’ayant pas été suivies d’effet
76
. Le montant de chacun
de ses sous-objectifs a été fixé en appliquant à la base retenue (les
dépenses concernées de 2006 telles qu’elles étaient estimées en septembre
2006 au moment de l’élaboration de la LFSS pour 2007) un taux
d’évolution prévisionnel, tenant compte à la fois de l’évolution
tendancielle des dépenses et des économies escomptées. Mais ces bases et
ces taux ont été déterminés pour 2007 de façon particulièrement irréaliste.
75. Les dépenses des instituts de formation en soins infirmiers ayant été transférées
aux collectivités locales, 74 M€ de crédits ont été retirés de la base de l’ONDAM de
2007.
76. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, pp. 64-65.
62
C
OUR DES COMPTES
ONDAM 2007 : bases, taux d’évolution et montants votés
En Md€
Sous-objectifs
Base
Taux d’évolution
Montants votés
Dépenses de soins de ville
65,9
+ 1,1 %
66,7
Dépenses relatives aux établissements
de santé tarifés à l’activité
45,7
+ 3,7 %
47,4
Autres dépenses relatives aux
établissements de santé
17,7
+ 3,0%
18,2
Contribution de l’assurance maladie aux
dépenses en établissements et services
pour personnes âgées
4,3
+ 8,3 %
4,7
Contribution de l’assurance maladie aux
dépenses en établissements et services
pour personnes handicapées
6,6
+ 5,6 %
7,0
Dépenses relatives aux autres modes de
prise en charge
0,6
+ 7,6 %
0,7
TOTAL ONDAM
141,1
+ 2,6 %
144,8
Source :
Direction de la sécurité sociale
a)
Les bases
Pour chaque sous-objectif, la base de référence est fixée en
fonction des réalisations prévues pour l’année en cours, puisqu’elles ne
peuvent pas être encore connues exactement au moment du vote de la
LFSS. La détermination de la base procède également du choix des
pouvoirs publics de prendre en compte, en tout ou partie, le dépassement
prévu de l’ONDAM de l’année qui se termine.
La base retenue pour les soins de ville (65,9 Md€) avait sous-
estimé de 0,8 Md€ environ les dépenses réelles correspondantes de 2006
(66,7 Md€, selon le constat finalement effectué par la CCSS en septembre
2007) : ces dépenses réelles de 2006 étaient donc d’emblée égales au
sous-objectif fixé pour les soins de ville en 2007 (66,7 Md€). Ce dernier
paraissait dès lors impossible à respecter du moins à législation constante.
Au
contraire,
les
bases
des
sous-objectifs
relatifs
aux
établissements de santé (63,5 Md€) étaient supérieures de 120 M€ aux
dépenses réelles de ces établissements (63,4 Md€) ; mais ces prévisions
prudentes étaient loin de compenser l’insuffisance de la base des soins de
ville.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
63
b)
Le taux
Bien que le Parlement ait porté de 2,5 à 2,6 % le taux de
progression prévu pour l’ONDAM, ce dernier était largement inférieur à
l’évolution tendancielle des dépenses estimée à l’automne 2006 (+4,5 %),
car la LFSS tablait sur la réalisation de 3 Md€ d’économies, dont 2,8 Md€
dans le secteur des soins de ville, incluant plus de 2,0 Md€ d’économies
sur les médicaments et 460 M€ dans le secteur des établissements de
santé.
Le taux d’évolution prévu pour les soins de ville (de 1,1 %)
77
était
en particulier nettement inférieur à ceux des autres sous-objectifs, en
raison notamment d’une diminution de 2,5 % attendue des dépenses de
produits de santé (médicaments, dispositifs médicaux et produits
d’origine humaine).
2
–
La mise en oeuvre
Les transferts opérés entre sous-objectifs de l’ONDAM après le
vote de la LFSS ont représenté des montants limités en 2007
78
. En
revanche, les réalisations se sont écartées rapidement des prévisions
initiales.
a)
La procédure d’alerte et ses résultats
L’année 2007 a vu la première mise en oeuvre de la procédure
d’alerte instaurée par la loi du 13 août 2004 portant réforme de
l’assurance maladie. Dans ce cadre, il revient au comité d’alerte sur
l’évolution des dépenses d’assurance maladie, lorsqu’il constate un risque
de dépassement d’une ampleur supérieure à un seuil réglementaire
79
, de
déclencher une procédure conduisant à des propositions de mesures de
redressement.
Cette procédure a été déclenchée en mai 2007 à la suite d’une
prévision de dépassement de l’ONDAM de l’ordre de 2 Md€, supérieure
de 900 M€ au seuil d’alerte. Les propositions d’économies émanant de la
CNAMTS, du RSI ainsi que de la CCMSA ont porté sur un montant
77. Le PLFSS proposait pour ce sous-objectif un taux encore plus irréaliste de 0,8 %,
que le Parlement a porté à 1,1 %.
78. Ils ont réduit de 3 M€ le sous-objectif des soins de ville et de 79 M€ ceux des
établissements de santé au profit des secteurs des établissements médico-sociaux
(+81 M€) et des autres modes de prise en charge (+1 M€).
79. Le seuil en vigueur est de 0,75
% de l’ONDAM, soit 1,1 Md€ en 2007.
64
C
OUR DES COMPTES
s’échelonnant, selon les évaluations du comité d’alerte, entre 430 M€ et
800 M€ (pour l’année 2007).
Le montant annoncé des mesures de redressement retenues sur
cette base par le Gouvernement en juillet 2007 était de 417 M€ pour
2007. Ces économies consistaient principalement en une plus grande
responsabilisation des assurés (modification du plafond de la participation
forfaitaire de 1 €, pénalisation des consultations réalisées hors du
parcours de soins) et des baisses de tarifs de certains actes ou dispositifs
médicaux et de prix pour certains médicaments.
Compte tenu de la date de mise en oeuvre des mesures, leur
incidence ne pouvait être que très limitée pour l’année 2007 (250 M€),
comme l’a par la suite souligné le comité d’alerte le 30 mai 2008
80
.
b)
Les modifications introduites fin 2007 par la LFSS pour 2008
La LFSS comporte chaque année des dispositions portant révision
de l’ONDAM de l’année en cours.
Préparée à l’automne 2007, la LFSS pour 2008 a ainsi rectifié à la
hausse
trois
sous-objectifs
de
l’ONDAM
de
2007,
concernant
respectivement les soins de ville (augmentés de 2,8 Md€), les
établissements pour personnes âgées et les dépenses relatives aux autres
modes de prise en charge. Le total de l’ONDAM a été porté de
144,8 Md€ à 147,7 Md€ (+2,9 Md€).
Cette révision prenait en compte les estimations de la CCSS de
septembre 2007 qui prévoyait à l’époque une augmentation des soins de
ville en 2007 de 4,1 %.
c)
Les réalisations de 2007 constatées en 2008
Le tableau qui suit indique les données les plus récentes –qui ne
devraient plus être modifiées qu’à la marge- quant aux réalisations pour
2007.
80. L’effet report de ces mesures d’économies pour 2008 a été estimé, en revanche, à
700 M€.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
65
ONDAM 2007 – Réalisations
En Md€
Sous-objectifs
Réalisations
Écart par
rapport à
l’objectif
Taux
d’évolution
constatés
Dépenses de soins de ville
69,8
3,1
+4,6 %
ONDAM hospitalier
81
65,5
-0,2
+3,3 %
ONDAM médico-social
82
, dont :
sous-objectif personnes âgées
sous-objectif personnes handicapées
11,8
4,8
7,0
0,0
+6,7 %
+9,3 %
+5,0 %
Dépenses relatives aux autres modes
de prise en charge
0,8
0,1
+3,6 %
TOTAL ONDAM
147,8
3,0
+4,2 %
Source :
Commission des comptes de la sécurité sociale de juin 2008
Les dépenses d’assurance maladie relevant du périmètre de
l’ONDAM se sont élevées à 147,8 Md€ en 2007, contre 141,8 Md€ en
2006, ce qui correspond à une augmentation de 4,2 % en valeur, contre
3,1 % en 2006. La progression des dépenses du champ de l’ONDAM, qui
s’était ralentie chaque année de 2002 à 2006, est donc repartie à la hausse
en 2007 et l’objectif fixé pour 2007 a été dépassé de 3 Md€, dérapage
beaucoup plus important que ceux constatés depuis 2003.
Taux d’évolution annuel constaté des dépenses du champ de l’ONDAM
et dépassement annuel de l’ONDAM par ces dépenses
En Md€ courants
2002
2003
2004
2005
2006
2007
Évolution des
dépenses constatées
+7,1 %
+6,4 %
+4,9 %
+4,0 %
+3,1 %
+4,2 %
Dépassement annuel
de l’ONDAM
3,9
0,6
0,5
0,2
1,2
3
Source :
Direction de la sécurité sociale et INSEE. Le dépassement de l’ONDAM de
2007 est provisoire
3
–
L’incidence sur la détermination de l’ONDAM de 2008
Les derniers résultats disponibles permettent également de
constater à nouveau que la révision de l’ONDAM de 2007 décidée fin
2007 par la LFSS pour 2008 était insuffisante, particulièrement en ce qui
81. L’ONDAM hospitalier regroupe les sous-objectifs des « dépenses relatives aux
établissements de santé tarifés à l’activité » et des « autres dépenses relatives aux
établissements de santé » ; il recouvre toutes les dépenses de l’assurance maladie au
profit des établissements, que ces derniers soient publics ou privés.
82. L’ONDAM médico-social regroupe les sous-objectifs relatifs aux contributions de
l’assurance maladie concernant respectivement les personnes âgées et handicapées.
66
C
OUR DES COMPTES
concerne les soins de ville : alors que le dépassement sur le sous-objectif
soins de ville était évalué en septembre 2007 à 2,8 Md€, son montant
révisé en juin 2008 a été, comme vu plus haut, de l’ordre de 3 Md€. Il
s’ensuit un manque en base de 330 M€ qui rendra d’autant plus difficile
le respect du sous-objectif des soins de ville fixé pour 2008. Dans son
avis du 30 mai 2008, le comité d’alerte a ainsi estimé que ce sous-objectif
pourrait être dépassé de 700 M€ à 900 M€ en 2008, conséquence de
l’insuffisance de la base et de la non réalisation d’une partie des
économies prévues.
B
–
Les dépenses de soins de ville
Le dépassement de l’ONDAM est dû presque exclusivement à la
progression de 4,6 % des dépenses de soins de ville, qui ont atteint
69,8 Md€ pour l’ensemble des régimes, dépassant ainsi de 3,1 Md€ le
sous-objectif concerné. Ce dérapage a trois causes :
-
la sous-estimation déjà évoquée de la base de référence retenue pour
les soins de ville (770 M€) ;
-
la non réalisation des économies prévues sur les médicaments, les
dépenses de produits de santé ayant augmenté de 5,0 % au lieu de
diminuer de 2,5 % (environ 1 250 M€) ;
-
au-delà des seuls médicaments, l’accélération de l’ensemble des
dépenses de soins de ville (4,6 % contre 2,6 % en 2006 et 1,1 % de
taux de progression retenu par la LFSS pour 2007 pour ce sous-
objectif).
Évolution prévisionnelle des dépenses de soins de ville du régime général
en 2007 (métropole)
En Md€
Montants en 2007
Évolution par rapport aux dépenses
constatées en 2006
Honoraires médicaux
15,1
+ 3,9 %
- dont généralistes
4,9
+ 5,2 %
- dont spécialistes
7,6
+ 3,4%
Honoraires paramédicaux
5,5
+ 8,3%
- dont infirmières
2,8
+ 9,5 %
Indemnités journalières
7,4
+ 3,6%
Transports des malades
2,3
+ 5,2 %
Laboratoires
2,6
+ 1,4 %
Médicaments
- dont remboursés à 100 %
17,7
10,5
+ 4,6 %
+ 6,2 %
Dispositifs médicaux
3,2
+ 11,3 %
Total soins de ville
55,1
+4,9 %
Source :
Rapport de la CCSS de juin 2008
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
67
1
–
Les économies non réalisées sur les médicaments
Le respect du sous-objectif des soins de ville passait par la
réalisation de 2 803 M€ d’économies, dont 2 072 M€ sur les produits de
santé
83
grâce à :
-
l’effet report de mesures prises en 2006 (évalué à 575 M€, dont
220 M€ au titre du développement des génériques) ;
-
la poursuite du plan médicaments de 2005 pour 1 096 M€ (dont
300 M€ de nouvelles initiatives concernant les génériques, 107 M€ de
développement des grands conditionnements, 209 M€ de baisses de
prix ciblées de médicaments et dispositifs médicaux) et 420 M€
d’actions de maîtrise médicalisée des dépenses portant notamment sur
la
réduction
de
la
consommation
des
statines,
antibiotiques,
anxiolytiques et hypnotiques ;
-
300 M€ de mesures nouvelles, dont 100 M€ de réduction des
prescriptions hospitalières en ville, 50 M€ de prélèvement sur les
grossistes
et
150 M€
d’économies
diverses
(notamment
par
l’établissement d’une liste de médicaments non liés aux affections de
longue durée -ALD- et ne devant donc pas bénéficier de la prise en
charge à 100 % réservée à ces derniers).
Le total des mesures précitées ne représente que 1 971 M€,
101 M€ d’économies sur les médicaments n’étaient donc pas explicités
84
.
Les résultats de ces dispositifs ont été très inférieurs aux ambitions
affichées, les dépenses de médicaments proprement dits ayant augmenté
pour le régime général de 4,6 % (et de 6,2 % pour ceux destinés aux
ALD, remboursés à 100 %) et celles des dispositifs médicaux de 11,3 %,
d’après la CCSS de juin 2008. Seules les dépenses de laboratoires ont été
stabilisées (+1,4 %).
Les économies réalisées sur les soins de ville grâce aux mesures
initiales n’ont en effet représenté que 752 M€, grâce aux génériques
(280 M€), à la maîtrise médicalisée (259 M€), aux baisses de prix ciblées
(170 M€), à l’adaptation des conditionnements (23 M€) et à la réduction
83. Ce montant cumule deux postes souvent distingués par la DSS, l’un relatif aux
économies attendues du plan médicament, qui relève de l’Etat et consiste
essentiellement en des baisses des prix et l’autre portant sur la maîtrise médicalisée,
négocié par les partenaires conventionnels et visant à une réduction des volumes de
prescription, notamment de produits de santé.
84. La DSS, consciente de cette lacune, la sous-estime néanmoins, tout en précisant
qu’une « économie supplémentaire non fléchée à ce stade de 78 M€ est nécessaire au
respect de l’objectif ».
68
C
OUR DES COMPTES
de la prise en charge des médicaments non liés à des ALD (20 M€). Au
total, l’écart entre les économies attendues et réalisées s’élève pour les
seuls produits de santé à 1 250 M€
85
; il est significatif du caractère
irréaliste des économies annoncées lors de l’adoption de la LFSS pour
2007, qui représentaient plus de 10 % de l’ensemble des dépenses de
médicaments et de dispositifs médicaux du régime général.
2
–
Le dérapage des autres dépenses
Tous les autres postes de dépenses de soins de ville ont augmenté
beaucoup plus que le taux de 1,1 % assigné par la loi à ce sous-objectif,
selon les estimations de la CCSS de juin 2008. Les honoraires médicaux
ont progressé de 3,9 % contre 2,9 % en 2006 (+3,4 % pour les spécialistes
et +5,2 % pour les généralistes), en raison de l’épidémie de grippe du
début de l’année, de l’effet report de la revalorisation de consultation
accordée le 1
er
août 2006 et de la nouvelle augmentation décidée le
1
er
juillet 2007 (portant la consultation à 22 €).
Les honoraires paramédicaux ont, quant à eux, progressé de 8,3 %
contre 6,8 % en 2006, dont 9,5 % pour les infirmières (cf. infra). Le
transport des malades a augmenté de 5,2 %, rythme inférieur à celui de
2006 (9 %).
Les indemnités journalières sont également reparties à la hausse
(+3,6 %), alors que leur progression avait été enrayée depuis 2003.
L’augmentation particulièrement forte des indemnités liées aux accidents
du travail (+5,8 %) est un effet constaté de l’amélioration de l’emploi.
C
–
L’ONDAM hospitalier
La LFSS pour 2007 avait fixé l’ONDAM hospitalier à 65,7 Md€,
contre 63,7 Md€ en 2006, soit 47,4 Md€ pour le sous-objectif des
dépenses relatives aux établissements de santé tarifés à l’activité et
18,2 Md€ pour le sous-objectif des « autres dépenses » de ces
établissements. L’ONDAM hospitalier avait été ainsi construit de manière
à contenir à +3,5 % la progression des dépenses, soit +3,7 % pour le
premier sous-objectif et +3,0 % pour le second.
85. A ces mesures d’économie se sont ajoutées celles du plan mis en oeuvre dans le
cadre de la procédure d’alerte (cf. supra) dont l’impact en 2007 avait été estimé à
217 M€ en matière de médicaments (nouvelles baisses de tarifs ciblées pour 47 M€,
mesures de lutte contre la fraude pour 100 M€ et développement du tiers payant pour
les génériques pour 15 M€). Là encore, on constate un écart semblable entre
économies prévues et réalisées, le plan d’alerte n’ayant engendré selon la DSS que
77 M€ d’économies sur les produits de santé sur les 217 M€ escomptés.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
69
La CCSS de juin 2008 a estimé que les dépenses de l’assurance
maladie au profit des établissements s’établiraient à 65,5 Md€, soit une
progression de 3,3 %. L’ONDAM hospitalier resterait ainsi inférieur de
170 M€ à l’objectif assigné pour 2007. Le taux de progression de ces
dépenses est toutefois supérieur à celui constaté en 2006 (+2,9 %). Ce
résultat provisoire doit être toutefois apprécié avec précaution en raison
de la réforme du mode de calcul des versements de l’assurance maladie
aux hôpitaux au titre de la T2A d’une part, de la dégradation des comptes
des établissements de santé d’autre part.
En effet, l’année 2007 a été marquée par des retards de
transmission de données d’activité de la part des hôpitaux
86
.
Dans ce contexte, la détermination du montant de charges à
rattacher à l’année 2007 -qui prend la forme de provisions calculées par le
ministère de la santé- a été rendue très délicate. En définitive, ces
provisions ont été calculées par référence aux montants prévus dans
l’ONDAM hospitalier. Ce choix du ministère de la santé revenait à
afficher nécessairement un respect de l’ONDAM hospitalier pour sa
partie relative au secteur public
87
.
Par ailleurs, comme la Cour l’a déjà relevé, l’accroissement du
besoin de financement des hôpitaux traduit de fortes tensions financières
dans certains établissements
88
soulignées par la mise en oeuvre de la
tarification à l’activité.
86. Ces retards sont consécutifs à une modification, intervenue en 2007, du mode de
calcul des sommes dues par l’assurance maladie : alors qu’initialement, un coefficient
forfaitaire était appliqué aux tarifs, les ARH doivent dorénavant, séjour par séjour,
neutraliser le reste à charge en prenant en compte de nouvelles données de la part des
hôpitaux, en sus des données PMSI. C’est l’association de ces deux catégories de
données qui s’est avérée problématique pour les établissements.
87. Ces provisions passées en 2007 ont fait l’objet d’une réserve de la part de la Cour
dans le cadre de ses missions de certification des comptes du régime général.
88. Le déficit 2007 est estimé par la DGFIP à 663 M€ pour les comptes de résultats
principaux. Il est sensiblement accru par rapport à l’exercice précédent.
70
C
OUR DES COMPTES
1
–
La construction de l’ONDAM hospitalier de 2007
Répartition de l’ONDAM hospitalier de 2007
En M€
Dépenses 2006
retenues en base
2007
Taux d’évolution
prévus pour 2007
Objectifs
2007
Sous-objectif des établissements
de santé tarifés à l’activité
45 781
3,7 %
47 452
dont ODMCO
89
40 179
2,8 %
41 317
dont MIGAC
5 602
9,5 %
6 134
Sous-objectif des autres dépenses
des établissements
17 725
3 %
18 251
faisant l’objet d’un arrêté (ODAM
+ OQN)
16 642
2,8 %
17 109
dont ODAM
14 826
2,5 %
15 199
dont OQN
1 816
5,2 %
1 910
dont autres publics
517
1,5 %
525
dont autres privés
237
1,5 %
241
dont FMESPP
327
15,0 %
376
Total ONDAM hospitalier
63 506
3,5 %
65 703
Source :
Direction de la sécurité sociale
La LFSS pour 2007 a fixé le taux de progression de l’ONDAM
hospitalier à 3,5 %, comme en 2006, compte tenu d’une évolution
tendancielle des dépenses hospitalières estimée à +4,2 % et d’un montant
de 460 M€ d’économies à réaliser par les établissements de santé.
Ces deux taux sont supérieurs à celui de la progression réelle des
dépenses hospitalières en 2006 (+2,9 %) : cette surestimation de la
tendance a facilité le respect de l’objectif, les dépenses du champ de
l’ONDAM hospitalier n’ayant augmenté que de 3,3 % en 2007.
Toutefois, les taux de progression prévus pour trois postes de
dépense sont supérieurs au taux global. Cet écart illustre également les
particularités observées dans la construction de l’ONDAM hospitalier :
-
l’ODMCO devrait progresser de 2,8 %, contre 2,5 % pour l’ODAM
car une augmentation de 12 % des dépenses de médicaments
89. Objectif des dépenses d’assurance maladie commun aux activités de médecine,
chirurgie, obstétrique et odontologie (ODMCO), mission d’intérêt général et d’aide à
la contractualisation (MIGAC), objectif des dépenses d’assurance maladie (ODAM),
objectif quantifié national relatif aux activités de psychiatrie et de soins de suite et de
réadaptation (OQN), fonds pour la modernisation des établissements de santé publics
et privés (FMESPP).
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
71
remboursés en sus des prestations MCO était prévue, pour le
remboursement intégral de certains médicaments dans le cadre du plan
cancer, par exemple ;
-
l’OQN devait augmenter de 5,2 % à cause des capacités nouvelles
créées en matière de soins de suite et de réadaptation ;
-
le taux de progression de 9,5 % des MIGAC était justifié par
561,1 M€ de mesures nouvelles incluant 176,3 M€ au titre des plans de
santé publique, 114,7 M€ de charges de personnel nouvelles, 99 M€ de
charges d’investissement et 159,3 M€ « d’autres mesures », qui
semblent constituer un volant de sécurité permettant d’aider les
établissements publics de santé en situation de déficit et notamment les
CHU. Plus du tiers (33,9 %) des crédits des MIGAC sont d’ailleurs
consacrés aux aides à la contractualisation qui permettent aux ARH
d’accorder des dotations spécifiques à certains établissements.
2
–
La progression des dépenses d’assurance maladie au profit
des établissements
a)
Les économies réalisées
Le montant de l’ONDAM hospitalier avait été fixé en prévoyant
460 M€ d’économies pour l’assurance maladie dans les établissements :
100 M€ grâce à l’augmentation du forfait journalier, de 15 € en 2006 à
16 € en 2007 ; 80 M€ par l’effet report de la mise en place en 2006 d’un
forfait de 18 € pour tout acte ou série d’actes supérieur à 91 € et 280 M€
« par l’amélioration de la gestion hospitalière », en application du plan
d’économies de l’assurance maladie
.
En juillet 2007, une économie supplémentaire de 100 M€ a été
programmée, fondée sur le développement potentiel de la chirurgie
ambulatoire, dans le cadre du plan d’alerte consécutif à l’avis du comité
d’alerte de mai 2007. Cette mesure ne pouvait pourtant guère avoir de
résultats concrets dès 2007.
La DHOS estime en juin 2008 que l’augmentation du forfait
journalier a rapporté 71 M€ dans les hôpitaux publics et que le forfait de
18 € a procuré une recette de 88 M€, supérieure à la prévision. Elle ne
peut en revanche évaluer les autres économies et notamment pas celles
relevant de « l’amélioration de la gestion hospitalière ».
b)
Les réalisations par secteur
Le tableau qui suit résume la progression des dépenses entre les
deux années 2007 et 2006, à partir des données encore provisoires sur
72
C
OUR DES COMPTES
2007, rapportées aux données équivalentes, à la même période, pour
2006, puis aux données désormais définitives disponibles pour ce même
exercice.
Les dépenses constatées en 2006 et 2007
En M€
2006
Comptes
provisoires
mars 2007
2006
Comptes
définitifs
mars 2008
2007
Comptes
provisoires
mars 2008
Établissements publics
52 268
52 251
53 978
a- Établissements publics
dont
ODMCO
MIGAC
ODAM
51 881
31 514
5 427
14 940
51 815
31 468
5 420
14 921
53 521
32 120
6 193
15 209
b- autres frais d’établissements publics
387
436
453
Établissements privés
10 964
10 901
11 105
FMESPP
327
327
373
Total établissements de santé
63 560
63 479
65 456
Source :
DSS
Le respect de l’ONDAM hospitalier semble résulter avant tout de
deux évolutions contraires : pour les cliniques privées, la forte croissance
de l’activité observée après le lancement de la réforme de la tarification à
l’activité se modère (+1,87 % en 2007 contre +3,5 % en 2006), tandis que
dans le cas des hôpitaux publics, la croissance constatée des dépenses de
l’assurance maladie s’est accélérée (+3,3 % contre +2,2 % en 2006).
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
73
D
–
L’ONDAM médico-social
L’ONDAM médico-social est l’agrégat retraçant les financements
de l’assurance maladie destinés à couvrir les prestations de soins au sein
des établissements et services médico-sociaux prenant en charge des
personnes handicapées ou des personnes âgées. Il est d’usage de désigner
par ce terme l’ensemble que forment aujourd’hui les quatrième et
cinquième sous-objectifs de l’ONDAM.
1
–
L’évolution de l’ONDAM médico-social
En Md€
ONDAM MS
voté
ONDAM MS
réalisé
ONDAM total
voté
ONDAM
total réalisé
ONDAM MS/
ONDAM voté
ONDAM MS/
ONDAM réalisé
2000
N.D
7,11
N.D
103,01
N.D
6,9%
2001
7,70
7,56
105,70
108,77
7,3%
7,0%
2002
8,29
8,28
112,79
116,72
7,3%
7,1%
2003
9,00
9,00
123,50
124,60
7,3%
7,2%
2004
9,80
9,70
129,70
130,40
7,6%
7,4%
2005
10,90
10,80
134,90
135,10
8,1%
8,0%
2006
11,00
11,00
140,70
141,80
7,8%
7,8%
2007
11,70
11,70
144,80
147,8
8,1%
7,9%
Source :
Cour des comptes
Entre 2000 et 2007, les dépenses du champ de l’ONDAM médico-
social ont augmenté de 64,6 %, alors que l’ensemble des dépenses sous
ONDAM ont augmenté de 43,4 %. Dans ces conditions, l’ONDAM
médico-social représente en 2007 près de 8 % des dépenses réalisées dans
le champ de l’ONDAM contre près de 7 % initialement.
Cette augmentation de la part de la composante médico-sociale
dans l’ensemble de l’ONDAM concerne essentiellement le secteur relatif
aux personnes âgées et s’est fait sentir à partir de 2004.
Une sous-consommation de l’ONDAM médico-social a cependant
été constatée jusqu’en 2005. Si tel n’est plus le cas depuis 2006, c’est en
raison du changement de nature de l’ONDAM médico-social intervenu
cette année, qui, par effet de la loi, conduit à une exacte coïncidence entre
les prévisions et les réalisations. Les écarts à l’objectif se manifestent
désormais sous une autre forme.
74
C
OUR DES COMPTES
2
–
La nouvelle nature de l’ONDAM médico-social
Depuis 2006 et la mise en place du nouveau circuit financier
consécutif à la création de la Caisse nationale de solidarité pour
l’autonomie (CNSA), l’ONDAM médico-social ne retrace plus des
prestations à encadrer et réguler, mais uniquement la part de ces dépenses
mises à la charge de l’assurance maladie. L’agrégat ainsi soumis au vote
du Parlement se définit comme une contribution dont le montant n’est
plus susceptible de varier.
La totalité des prestations effectivement versées aux établissements
et services
médico-sociaux (ESMS) fait cependant l’objet d’un
encadrement sous la forme d’un objectif global de dépenses (OGD), mais
qui est extérieur à l’ONDAM et donc distinct de celui-ci.
En complément de l’ONDAM médico-social voté par le
Parlement, le financement de ces dépenses est assuré par un apport
financier de la CNSA. Tant l’OGD que cet apport financier sont fixés par
voie d’arrêté, le Parlement n’étant informé de leur montant prévisionnel
que dans le cadre de l’annexe 8 au PLFSS dont la lisibilité est faible.
Dans le cadrage financier ainsi retenu pour 2007, l’OGD a été
arrêté à 12,9 Md€, la contribution de l’assurance maladie à 11,8 Md€
90
et
l’apport financier de la CNSA à 1,1 Md€.
Outre sa complexité, le dispositif dorénavant en vigueur réduit
donc l’ONDAM médico-social à l’inscription d’une écriture d’ordre
91
dans les comptes des régimes d’assurance maladie pour un montant égal à
ce qui a été prévu initialement. Le Parlement est donc appelé à voter sur
une contribution au financement d’un montant global de dépenses
(l’OGD) qui demeure déterminé par l’administration.
Pour une meilleure information du Parlement, il conviendrait que
la répartition du financement de ces dépenses entre l’assurance maladie et
la CNSA soit présentée de manière plus lisible dans le cadre de l’annexe
8 au PLFSS.
90. La différence entre l’ONDAM médico-social (11,7 Md€) et le montant auquel
s’est référé l’administration (11,8 Md€) s’explique par les opérations de fongibilité
pratiquées postérieurement au vote de la LFSS.
91. L’ONDAM médico-social ne donne pas lieu à un paiement de la part des régimes
d’assurance maladie en direction de la CNSA. Le seul décaissement qui intervient
entre ces organismes consiste en l’apport de la CNSA, égal à la différence entre,
d’une part, le remboursement dû par la CNSA aux régimes au titre des versements aux
établissements et, d’autre part, l’ONDAM médico-social. Cf. rapport de certification
des comptes du régime général de sécurité sociale - exercice 2007, page 72.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
75
3
–
Les modalités d’élaboration de l’ONDAM médico-social
Les conditions d’élaboration de l’ONDAM médico-social se
distinguent de celles qui prévalent pour les autres composantes de
l’ONDAM, en ce qu’elles s’insèrent dans un processus plus global
conduisant également à la fixation des dépenses autorisées des ESMS
ainsi qu’à celle de l’OGD.
La détermination de l’apport financier de la CNSA implique le
calcul d’un montant tendanciel, assis sur le montant prévisionnel de
recettes de la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA)
92
. Pour
le secteur des personnes âgées, ce montant est égal à 40 % des recettes
attendues et pour les personnes handicapées, le taux de référence est de
12,7 %
93
.
A ce montant tendanciel, un supplément est susceptible d’être
apporté, sur décision des pouvoirs publics, par un prélèvement sur les
excédents antérieurs de la CNSA.
La détermination tant des dépenses autorisées que de l’OGD
implique la détermination d’une base de référence et de mesures
nouvelles. Cette base n’est pas construite à partir des prévisions de
réalisation
94
, mais à partir des objectifs de l’année antérieure et compte
tenu de diverses opérations de rebasage ou de débasage.
Concernant en particulier l’OGD, cette déconnexion entre la base
et les réalisations alimente le risque de sous-consommation, dans un
contexte de montée en charge des dépenses médico-sociales pour
répondre aux besoins des personnes handicapées d’une part, à l’impact de
la montée de la dépendance, d’autre part.
92. Pour le secteur des personnes âgées, le taux de 40 % résulte directement des
dispositions du code de l’action sociale et des familles et pour les personnes
handicapées, le taux résulte d’un vote du conseil de la CNSA dans le cadre d’une
fourchette fixée par le CASF.
93. Dans le budget de la CNSA, ces recettes de CSA sont affectées à la section 1,
dédiée au financement des établissements et services médico-sociaux.
94. Ni la CNSA, ni les administrations centrales ne connaissent d’ailleurs le montant
des dépenses effectives des ESMS, faute de remontée des comptes financiers.
76
C
OUR DES COMPTES
4
–
Les réalisations
Si aucun écart n’est plus susceptible d’intervenir par rapport à
l’ONDAM médico-social voté, les phénomènes de dépassement ou de
sous-consommation demeurent et se mesurent maintenant par la
différence entre les prestations payées aux ESMS et l’OGD.
En 2007, l’impact financier des écarts au niveau de l’OGD entre
les prévisions (12 920 M€) et les réalisations (12 489 M€), soit une sous
consommation globale de 431 M€, se fait dorénavant sentir dans les
comptes de la CNSA et non plus dans ceux des régimes d’assurance
maladie comme cela était le cas jusqu’en 2006. Le niveau de l’ONDAM
médico-social étant désormais figé, cette sous-consommation globale
implique une moindre sollicitation de la CNSA que prévu d’un montant
identique, ce qui génère des réserves équivalentes dans les comptes de la
CNSA.
Prévisions et réalisations pour 2007
En Md€
Personnes handicapées
Personnes âgées
Total
Prévu
Réalisé
Prévu
Réalisé
Prévu
Réalisé
OGD
7,232
7,289
5,688
5,200
12,920
12,489
ONDAM médico-social
6,996
6,996
4,795
4,795
11,791
11,791
Apport financier CNSA
0,236
0,293
0,893
0,405
1,129
0,698
Source :
CNSA
En 2007, la sous-consommation globale de 431 M€ correspondait à
une sous consommation dans le secteur des personnes âgées de 487,7 M€
et à une surconsommation de 57 M€ dans le secteur des personnes
handicapées
95
.
S’agissant du secteur des personnes âgées, la sous-consommation
constatée en 2007 (487,7 M€) est en forte augmentation. Elle n’a été que
de 289,7 M€ en 2006 et de 142,7 M€ en 2005. Cette sous-consommation
croissante tient au fait que l’utilisation de ces moyens n’intervient que
lors de l’installation effective des places autorisées dans les ESMS
laquelle est susceptible de connaître des retards importants du fait
notamment des délais de signature des conventions tripartites.
95. Le résultat réel est proche de l’équilibre, une erreur d’imputation liée à des
établissements situés en Belgique ayant majoré les charges.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
77
Ces nouvelles modalités de financement des établissements
médico-sociaux pourraient en outre par leur complexité et par
l’éclatement induit des responsabilités entre l’assurance maladie et la
CNSA, nuire au pilotage de ces dépenses.
________________________
SYNTHESE
_________________________
Le dépassement de l’ONDAM de 2007 (3 Md€) a été beaucoup plus
élevé que celui de 2006 (1,2 Md€), en raison du caractère irréaliste des
bases retenues pour les soins de ville et de la progression élevée des
dépenses de ce sous-objectif (4,6 %), supérieure à la fois au taux voté par
le Parlement (2,6 %) et à l’évolution constatée en 2006 (3,1 %). Les
économies attendues, en particulier sur les produits de santé, n’ont été
réalisées que très partiellement, ce qui amène à s’interroger sur la
sincérité des objectifs affichés en la matière par le Gouvernement.
Le respect du sous-objectif relatif aux établissements de santé
n’exclut pas les risques de dérapage non retracés dans les réalisations de
l’ONDAM de 2007, qu’il s’agisse de l’effet des nouveaux modes de calcul
des versements de l’assurance maladie aux hôpitaux ou du creusement des
déficits des comptes des établissements hospitaliers.
L’ONDAM médico-social pour sa part porte désormais sur une
contribution à un objectif global de dépenses arrêté par le Gouvernement,
conduisant à une nécessaire coïncidence entre le montant voté et la
réalisation effective. Le suivi de cet agrégat ne suffit donc plus à constater
les phénomènes de sous consommation ou de dépassement qui continuent à
se manifester dans les faits.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
11.
Mieux expliciter dans l’annexe 8 au PLFSS le montant prévisionnel
et les réalisations de l’OGD, ainsi que la répartition du financement entre
l’assurance maladie et la CNSA.
II - Les dépenses de soins infirmiers dans
l’ONDAM 2007
_____________________
PRESENTATION
_______________________
En 2007, les dépenses constatées de soins infirmiers libéraux,
incluses dans le sous-objectif des soins de ville de l’ONDAM, sont de
4 097 M€, en croissance de +8,3 % par rapport à celles de 2006.
78
C
OUR DES COMPTES
Cette forte augmentation, déconnectée de celle des soins de ville pris
dans leur ensemble (+4,6 %), s’inscrit dans une phase d’accélération :
+5,3 % en 2005, +7,6 % en 2006 et près de +10 % au cours du premier
trimestre 2008
96
malgré l’instauration d’une participation forfaitaire de 50
centimes par acte paramédical dès le 1
er
janvier 2008.
Cette situation préoccupante a conduit la Cour à analyser l’origine
d’une telle progression au cours des trois derniers exercices et à apprécier
l’impact potentiel de la nouvelle convention infirmière, applicable depuis
le 26 juillet 2007
97
.
A
–
Les caractéristiques de la croissance depuis 2005
Depuis 2005, la hausse des dépenses de soins infirmiers délivrés en
ville est due principalement à deux facteurs qui se sont cumulés en fin de
période : d’abord l’augmentation de la quantité d’actes réalisés à laquelle
s’est ajouté, à partir du 26 juillet 2007, un effet prix découlant des
revalorisations tarifaires accordées par la nouvelle convention.
1
–
Des séries hétérogènes
Les dépenses de soins infirmiers libéraux constatées dans
l’ONDAM proviennent des données comptables des caisses : il s’agit des
dépenses remboursées tous régimes en France entière, exprimées en
droits constatés (date de soins). Toutefois, pour analyser les facteurs de
croissance de ce poste de dépenses qui n’est d’ailleurs isolé dans
l’ONDAM que depuis 2004, il est nécessaire de recourir à d’autres
sources d’informations, en particulier le système national interrégimes
fourni par la CNAMTS (SNIR) et la série statistique démarrée en 1994
(régime général-CNAMTS) : en raison de leur hétérogénéité, celles-ci
présentent des écarts significatifs non seulement en montants, mais aussi
en taux d’évolution. Ainsi, selon les sources, le taux de croissance affiché
pour 2007 varie de +8,3 % à +9,7 %.
96. L’évolution des dépenses du régime général, en date de remboursement, a été de
+9,9 % au cours du premier trimestre (par rapport au premier trimestre de l’année
précédente).
97. La nouvelle convention a été conclue le 22 juin 2007 et approuvée par arrêté le
25 juillet 2007.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
79
Caractéristiques des principales sources utilisées
En M€
France
Régimes
Date de
comptabilisation
Dépenses
remboursables
ou remboursées
Montants
2007
Croissance
2007/2006
ONDAM
Entière
Tous
Soins
Remboursées
4 097
8,3 % *
RG ONDAM
Entière
RG
Soins
Remboursées
3 177
8,7 % *
Série RG 94
Métro
RG
Soins
Remboursées
2 861
9,7 %
Série RG 94
Métro
RG
Soins
Remboursables
3 112
9,7 %
SNIR
Métro
Tous
Liquidation
Remboursables
3 726
9,0 %
SNIR + DOM
Entière
Tous
Liquidation
Remboursables
3 958
9,3 %
*Source DSS : ces deux chiffres sont calculés par rapport à la base 2006 non corrigée
des reprises de provisions
Source :
Cour des comptes
La comparaison de ces séries hétérogènes permet au demeurant de
cerner quelques facteurs d’évolution depuis 2005 dont il ne sera plus fait
état par la suite :
-
le taux de remboursement moyen de l’assurance maladie obligatoire
sur la dépense reconnue est demeuré stable (avec un taux très élevé de
91,9 %), après une baisse de 1,2 point intervenue en 2004
98
;
-
la part du régime général dans le total des dépenses de soins
infirmiers s’accroît (de 75,98 % en 2004 à 77,54 % en 2007), ce qui
entraîne mécaniquement une croissance pour le régime général
supérieure à celle des dépenses tous régimes (+7,93 % au lieu de
+7,20 % en taux de croissance annuels moyens (TCAM) sur les trois
derniers exercices) ;
-
les dépenses des DOM connaissent une croissance beaucoup plus
forte que celles de la France métropolitaine (de l’ordre de 35 % contre
23 % sur les trois derniers exercices - source CNAMTS, SNIR sans et
avec DOM) ;
-
enfin, les dépenses constatées en décaissements (SNIR) présentent
des à-coups importants au cours de ces trois exercices qui incitent à
raisonner en tendance sur plusieurs exercices
99
.
98. Cette baisse de 1,2 point du taux de prise en charge par l’AMO est intervenue en
2004, avec la modification des modalités d’exonération des actes supérieurs à K50
(actes associés). Une nouvelle baisse de ce taux est également intervenue en 2008
avec l’instauration de la participation forfaitaire de 50 centimes par acte paramédical
(non chiffrée pour l’instant).
80
C
OUR DES COMPTES
2
–
Une quantité d’actes croissant à plus de 5 % par an
Afin de mieux cerner les éventuelles ruptures de tendance
survenues au cours des trois derniers exercices, les TCAM ont été
calculés sur trois périodes différentes.
Le rythme et les composantes de la croissance en volume
2007
(2007/2006)
TCAM
2007/1995
TCAM
2007/2000
TCAM
2007/2004
Quantité globale d’actes réalisés (en
milliers)
dont actes médicaux infirmiers
(AMI)
100
dont actes infirmiers de soins AIS
426 964
(+5,8 %)
274 152
(+5,8 %)
152 812
(+5,7 %)
+4,1 %
+6,1%
+1,5 %
+5,2 %
+7,8 %
+1,6 %
+5,1 %
+5,7 %
+4,1 %
Démographie des professionnels
55 646
(+4,4 %)
+1,9 %
+2,0 %
+3,8 %
Quantité d’actes par professionnel
(APE*)
8 316
(+2,4 %)
+2,7 %
+4,0 %
+3,4 %
*APE : actifs à part entière, c'est-à-dire professionnels conventionnés actifs au
31 décembre, non installés dans l'année, non à temps partiel et ayant moins de 65
ans ; ils représentent 93,4 % des professionnels et évoluent au même rythme.
Source :
Cour des comptes d’après le SNIRAM
Cette comparaison apporte les éclairages suivants :
-
c’est à partir de 2000 que le rythme de croissance de la quantité totale
d’actes réalisés s’est accéléré, pour se stabiliser autour de +5 % par an,
avec une légère décélération depuis 2004 ;
-
en revanche, depuis 2004, les causes de cette croissance se sont
modifiées de manière importante, la démographie des infirmiers
99. Selon les indications de la CNAMTS, un report important s’est produit de 2005
sur 2006, dû aux perturbations de liquidation que l’introduction de la T2A et de la
CCAM aurait engendrées ; le rapprochement des séries en décaissements et en droits
constatés suggère davantage un report de 2006 sur 2007.
100. Les actes sont exprimés dans la nomenclature à l’aide de deux lettres-clefs, AIS
pour les actes infirmiers de soins (nursing avec gardes et séances de soins infirmiers à
domicile dont toilettes) et AMI pour les actes médicaux infirmiers (actes techniques).
Ces lettres-clefs sont affectées de coefficients : le coefficient le plus souvent affecté
aux actes en AIS est de 3 (soit 30 minutes de temps passé), mais la cotation des actes
en AMI est différenciée (avec une moyenne constatée de 1,6, soit 16 minutes en
moyenne).
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
81
libéraux devenant le facteur prédominant : stabilisé autour de +2 % par
an sur longue période, le rythme annuel de croissance du nombre de
professionnels a en effet quasiment doublé depuis 2004 (les causes en
sont évoquées plus loin) ;
-
dans le même temps, la quantité d’actes réalisés par professionnel a
néanmoins continué de progresser (+3,4 % depuis 2004) avec une
légère décélération en 2006 et 2007 (+2,0 % et +2,4 %) ;
-
cette augmentation est en réalité encore plus importante car l’activité,
réalisée
par
les
infirmiers
libéraux
dans
les
établissements
d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et incluse
dans les honoraires comptabilisés par le SNIR, a été progressivement
remplacée par celle d’infirmiers salariés au cours de cette période.
Quant à l’effet de structure (évolution de la lourdeur moyenne des
actes réalisés), mesuré par l’évolution du nombre moyen de coefficients
par acte, il est légèrement négatif : -0,3 % par an sur la période. En effet,
si la cotation moyenne des actes est demeurée parfaitement stable (1,6 en
AMI et 3,2 en AIS), la quantité d’actes techniques dont le coefficient est
plus bas (AMI) a progressé un peu plus que celle des actes en AIS.
L’introduction envisagée pour 2008 de la vaccination antigrippale cotée
AMI 2
101
(alors que les injections sont cotées AMI 1) devrait jouer en
sens inverse.
3
–
Un effet prix intervenant en fin de période
Après les revalorisations tarifaires très importantes accordées par
la convention de 2002, pour un montant proche de 300 M€
102
en année
pleine -soit plus de 10 % des honoraires de l’époque- et étalées sur deux
exercices (2002 et 2003), aucune revalorisation des tarifs n’est intervenue
jusqu’à la convention de juillet 2007.
Celle-ci comporte des revalorisations sur tous les honoraires
(117 M€ sur les AMI, 99 M€ sur les AIS, 120 M€ sur l’indemnité
forfaitaire de déplacement et 5 M€ sur la majoration de dimanche) et crée
une prestation AMI 2 (9 M€) pour les vaccinations antigrippales : le
surcoût de cette dernière disposition devrait être gagé par la diminution
des honoraires médicaux. Ces mesures représentent un montant
101. A ce jour, cette tarification proposée par les parties signataires à la convention
n’a pas été fixée, les syndicats infirmiers ayant refusé de siéger dans la commission ad
hoc.
102. 100 M€ sur les actes en AIS revalorisés pour la première fois depuis leur création
en 1992, 60 M€ sur les actes en AMI revalorisés en 1999, enfin 130 M€ sur les frais
de déplacement.
82
C
OUR DES COMPTES
supplémentaire d’honoraires versés aux infirmiers de 350 M€ (la
demande initiale de la fédération nationale des infirmiers -FNI- exposée
en 2006 avait été estimée à plus de 800 M€ par la CNAMTS) et, pour la
sécurité sociale, un supplément de dépenses remboursées de 321 M€ en
année pleine
103
. En y ajoutant les 2 M€ d’augmentation de l’aide à la
télétransmission et de l’indemnisation pour formation, il en résulte une
recette supplémentaire totale pour les infirmiers de 352 M€ et à un coût
total pour la sécurité sociale de 323 M€.
La convention a programmé l’étalement de ces mesures sur les
deux exercices 2007 et 2008, les rendant applicables le 26 juillet 2007 et
le 1
er
août 2008 (voir infra pour le caractère conditionnel de la seconde
étape) : en découle un effet prix théorique de 65 M€ en 2007, 159 M€ en
2008 et 97 M€ en 2009 sur les remboursements en nature de la sécurité
sociale
(c'est-à-dire
sans
compter
l’aide
à
la
télétransmission,
l’indemnisation pour formation et la prise en charge des cotisations
sociales).
4
–
Des conséquences favorables sur le pouvoir d’achat des
infirmiers libéraux
Malgré une croissance en volume de leur activité, les infirmiers
libéraux avaient connu une baisse de 5 % de leur pouvoir d’achat
104
entre
1995 et 2001, due à la faiblesse des revalorisations tarifaires et à
l’augmentation simultanée de leur taux de charges. Depuis 2002, en
revanche, leur pouvoir d’achat a augmenté de +34,5 % (soit +5,1 % en
moyenne par an sur six ans, de 2002 à 2007
105
).
Il s’agit au demeurant d’une progression en dents de scie : +25,9 %
sur les deux exercices 2002 et 2003 consécutifs à la signature de la
convention de 2002 et +6,8 % de 2004 à 2007. L’étalement des mesures
tarifaires fixées par la nouvelle convention de 2007 doit produire un
impact important en 2008 et 2009.
103 . Les méthodes de valorisation (en particulier la prise en compte des effets
volume) n’ont pas été indiquées à la Cour.
104. Le revenu brut est calculé en déflatant les honoraires perçus (source SNIR) du
taux de charge (source CNAMTS : de 40 % en 2000, il était de 38,7 % en 2005,
dernière année connue ; pour 2006 et 2007, le taux de 40 % a été retenu (pour tenir
compte notamment de la hausse des carburants). Le pouvoir d’achat s’obtient en
déflatant le revenu brut de l’indice des prix à la consommation.
105. En 2007, les honoraires par professionnel et par an sont en moyenne de 71 125 €
et le revenu brut de 42 675 € (calculé comme indiqué en note 9).
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
83
Il convient de préciser que, faute d’informations existantes sur le
sujet
106
, cette analyse ne prend pas en compte les honoraires que les
infirmiers libéraux peuvent percevoir en sus et qui leur sont payés
directement par les services de soins infirmiers à domicile (SSIAD, voir
plus loin).
B
–
Une capacité de régulation dégradée
Au vu de ces éléments, force est de constater que les principaux
problèmes structurels de la profession, relevés par la Cour dans son
rapport de 2006 (qui analysait la période 1992-2004), n’ont fait que
s’aggraver au cours des trois derniers exercices : absence de maîtrise de la
démographie (en quantité globale comme en répartition géographique),
absence de maîtrise de l’activité produite (en particulier de la nature des
soins délivrés).
1
–
Une démographie dérégulée
L’effectif des infirmiers libéraux, qui représente une part mineure
des infirmiers diplômés d’Etat (IDE) : 55 646 sur 483 380 en 2007, soit
11,5 %, augmente fortement depuis 2004, après une période de croissance
stabilisée à moins de 2 % par an entre 1995 et 2000, puis une stagnation
totale entre 2000 et 2003.
Leur nombre moyen pour 100 000 habitants est passé de 83 en
2004 à 87 en 2006, sans que les fortes disparités locales se soient
atténuées (de 1 à 5 par région et de 1 à 7,5 par département en excluant la
Corse
107
).
Cette augmentation de l’effectif, qui n’a cessé de s’accélérer
(+2,39 % en 2004, +3,11 % en 2005, +3,77 % en 2005, +4,41 % en
2007), résulte de la conjonction de trois éléments, indépendants des
besoins de la population par ailleurs mal définis :
-
l’augmentation régulière du nombre total d’IDE
108
dont les flux
entrants (nouveaux diplômés) sont supérieurs aux flux sortants. Il
106 . L’assurance maladie ne connaît pas ces honoraires, mais uniquement les
dotations qu’elle verse aux structures, figurant dans l’objectif médico-social
(personnes âgées).
107. Aux extrêmes : 28 dans les Hauts-de-Seine, 260 en Corse. Hors la Corse, les
départements où la densité est la plus élevée (entre 202 et 212) sont les Bouches-du-
Rhône, les Pyrénées-Orientales, l’Hérault et le Gard.
108. Mesurée par l’écart entre l’effectif de l’année n et de l’année n-1, enregistré dans
ADELI.
84
C
OUR DES COMPTES
convient toutefois de préciser à cet égard que le nombre de nouveaux
diplômés sortant des institutions de formation des soins infirmiers
(IFSI) est toujours nettement inférieur au quota de places ouvertes à
l’entrée en IFSI chaque année : ainsi, les quotas de places ont été
relevés en 2000 de 18 436 à 26 436, en 2003 à 30 000, enfin en 2008 à
30 342, soit +63 % au total, alors que les nouveaux diplômés -à
considérer en année n+3- sont passés de 15 262 à 20 982 entre 2002 et
2006, soit +37 %.
Quotas et flux entrants-sortants des IFSI
10000
15000
20000
25000
30000
35000
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
quotas (année n)
IFSI entrants (année n)
sortants (année n+3)
Source :
Cour des comptes d’après les arrêtés fixant les quotas et l’étude annuelle de
la DREES sur la formation des professions de santé
-
la situation du marché de l’emploi infirmier, sans doute moins tendue
que pendant la mise en place des 35 heures dans les établissements ;
-
enfin le raccourcissement à deux ans de la durée d’expérience en
structure exigée entre la sortie de l’école et l’installation en ville
(conformément à l’avenant n° 6 de la convention de 2002 du 25 juin
2004), qui s’est étalé sur 2005 et 2006 (en commençant par les
départements à plus faible densité)
109
.
109. Les nouvelles installations d’infirmiers libéraux sont donc décalées de six ans par
rapport aux promotions d’entrants en IFSI jusqu’en 2004, de cinq ans depuis 2007.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
85
Evolution des effectifs depuis 2000
90
95
100
105
110
115
120
125
130
135
140
145
150
155
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
indice 100 = 2000
effectif IDE
effectif IDEL
sortants IFSI nouveaux diplômés
Source :
Cour des comptes d’après l’étude annuelle de la DREES sur la formation
des professions de santé, le répertoire ADELI et le SNIR
En conséquence, la part des infirmiers libéraux dans l’effectif total
des IDE augmente à partir de 2007, alors qu’elle avait chuté de 2000 à
2004 puis stagné en 2005 et 2006 ; cette tendance haussière semble
devoir se poursuivre.
2
–
Une évolution récente de l’activité contraire aux objectifs
poursuivis depuis plus de 15 ans
Depuis 1992, la CNAMTS s’est efforcée de cantonner l’activité de
nursing des infirmiers libéraux, principalement constituée de soins de
toilettes, d’abord en l’isolant (création d’une lettre clef AIS particulière),
puis en gelant ce tarif jusqu’en 2002, enfin en organisant un dispositif
destiné à transférer une partie de ces soins sur les auxiliaires de vie ou les
familles, lequel a finalement pris la forme de la démarche de soins
infirmiers (DSI) à partir de 2002
110
.
Deux raisons économiques ont été avancées de manière constante
pour expliquer cet objectif : d’une part l’aide à la dépendance ne requiert
pas l’intervention d’infirmiers diplômés, intervention qui en renchérit le
coût, d’autre part cette activité apparaît comme une variable d’ajustement
des revenus des infirmiers libéraux, car elle est principalement réalisée
dans les zones de surdensité infirmière.
110. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2006, pp. 15-28.
86
C
OUR DES COMPTES
Il existe en outre une offre de soins infirmiers largement
substituable à celle des professionnels libéraux et spécifiquement
organisée pour pourvoir aux soins de nursing à domicile : les services de
soins infirmiers à domicile (SSIAD) dont l’une des caractéristiques est de
recourir à des aides-soignants salariés pour réaliser l’activité de nursing.
Les SSIAD
Ces services comportent en moyenne dix personnes dont 80 %
d’aides-soignants, organisées autour d’un infirmier salarié coordonnateur.
85 % de leurs interventions concernent des soins de nursing.
Les SSIAD, financés à 100 % par dotation de l’assurance maladie,
peuvent recourir à des infirmiers libéraux qu’ils rémunèrent alors en
honoraires.
Créés à partir de 1980, ils sont en progression constante : 91 478
places installées dans 2 000 services environ en 2006 selon la DGAS contre
81 458 places en 2004, pour une dépense de 1,1 Md€ en 2007 (+9,7 % en
moyenne par an depuis 2005). Le plan solidarité grand âge de juin 2006
prévoit la création de 6 000 places nouvelles tous les ans à partir de 2006 et
de 7 500 à partir de 2010.
Depuis 1999, la répartition entre activité de nursing et actes
techniques des infirmiers libéraux a évolué jusqu’en 2005 dans le sens
souhaité : alors qu’ils représentaient 48 % du nombre d’actes et 67 % des
coefficients (représentatifs du temps passé) en 1999, les actes en AIS ne
représentent plus que 36 % des actes et 53 % des coefficients en 2007.
Bien
qu’aucune
étude
disponible
ne
vienne
étayer
cette
hypothèse
111
, la réforme du financement des établissements d’héberge-
ment pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), progressivement mise
en oeuvre depuis 1999, a dû contribuer à cette amélioration : en effet,
avant la réforme, les soins infirmiers techniques et de nursing réalisés
dans les établissements y étaient dispensés par des infirmiers libéraux
dont les prestations étaient facturées en honoraires et remboursées aux
assurés résidents comme s’il s’agissait de soins de ville
112
. Avec cette
réforme, l’activité infirmière a été incluse dans les forfaits versés par
l’assurance maladie aux EHPAD, lesquels ont été incités par ailleurs à
111. Une étude intitulée EHPAD 4 a été lancée par la CNAMTS en 2004 auprès des
caisses, mais n’a produit aucun résultat. En 2008, un plan de contrôle par les caisses
des possibles doubles paiements a été défini (forfait et remboursement de soins de
ville).
112. En 2001, le montant d’honoraires d’actes infirmiers figurant dans les soins de
ville mais réalisés en établissements avait été estimé à 445 M€, dont 369 M€ d’actes
en AIS.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
87
faire appel à des infirmiers salariés. Ce nouveau mode de financement a
donc dû engendrer une diminution des actes facturés en AIS.
Cependant, depuis 2005, la situation s’est nettement dégradée : la
croissance annuelle des actes de nursing (AIS) a été en moyenne de
+4,1 %, alors qu’elle n’a été que de +0,8 % entre 1995 et 2004. Ce
rythme tend à rejoindre celui des actes techniques en AMI, qui ont
augmenté de +5,7 % depuis 2005 (contre +6,3 % depuis 1995).
On peut regretter que, dans ce contexte, les conventions de 2002 et
de 2007 aient mis fin au gel des tarifs des actes en AIS.
C
–
Les effets incertains de la nouvelle convention
Les accords conventionnels -convention nationale et protocole
relatif à la régulation démographique- signés le 22 juin 2007
113
par les
quatre syndicats représentatifs
114
ont été perçus comme des textes
novateurs, susceptibles d’amorcer une véritable restructuration de la
profession, car remettant en cause certains fondements de l’exercice
libéral en vigueur. Le protocole, en effet, met fin au principe de
conventionnement automatique à l’installation dans les zones identifiées
comme surdenses. Par ailleurs, le partage des tâches entre médecins et
infirmiers, que le rapport Berland a préconisé de réorganiser dès 2003, a
commencé d’être modifié : deux mesures, mentionnées dans la nouvelle
convention et introduites dans les LFSS de 2007 et 2008, ont renforcé le
rôle propre des infirmiers en leur accordant le droit de prescrire certains
dispositifs médicaux
115
ainsi que la faculté de réaliser certaines
vaccinations antigrippales sans prescription médicale préalable
116
.
Toutefois, sans sous-estimer la portée de ces dispositions, la
convention de 2007 n’est pas de nature, en l’état, à endiguer rapidement
la forte croissance des dépenses de soins infirmiers en ville : elle met un
terme définitif aux instruments de régulation dont la logique avait été
113. Précédés d’un protocole signé le 17 avril 2007.
114. En 2006, quatre syndicats ont été déclarés représentatifs : la fédération nationale
des infirmiers (FNI) -10 % des effectifs- seule signataire des conventions de 1992 et
1997, convergence infirmière -3 %- seule signataire de la convention de 2002,
l’organisation nationale des syndicats d’infirmiers libéraux (ONSIL) -3 %- et le
syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (SNIIL) -4%-.
115. LFSS 2007 article 51, décret n° 2007-551, arrêté du 13 avril 2007.
116. Décrets du 29 août 2008 : les infirmiers sont désormais habilités à pratiquer
l'injection du vaccin antigrippal sans prescription d'un médecin, à l'exception de la
première injection, pour les personnes âgées et celles souffrant de certaines
pathologies lourdes.
88
C
OUR DES COMPTES
posée à partir de 1991, en particulier les seuils d’activité
117
et la
démarche de soins infirmiers, sans pour autant les remplacer par de
nouveaux mécanismes, immédiatement applicables. Son efficacité, à
terme, dépendra donc de la bonne fin des travaux et des accords dont elle
dessine les pistes, mais dont les fortes implications corporatistes rendent
le résultat incertain.
Certes, les négociations prévues par la nouvelle convention
donnent l’impression d’aborder des thématiques nouvelles telles que la
place de l’infirmier libéral dans le parcours de soins coordonné ou dans
l’accompagnement des pathologies chroniques
118
, mais elles s’inscrivent
en
réalité
dans
deux
problématiques
anciennes,
structurellement
conflictuelles, auxquelles les conventions précédentes ont apporté des
solutions insuffisantes en raison des fortes résistances rencontrées :
-
l’étendue des compétences infirmières et de leur rôle propre en
matière de soins, de prévention, d’éducation et de coordination (au sein
du binôme médecin - infirmier, socle des soins primaires) ;
-
la juste fonction de l’infirmier dans la prise en charge des personnes
dépendantes (au sein du trinôme infirmier -aide soignant- auxiliaire de
vie) que complexifie l’existence de plusieurs offres concurrentes ou
complémentaires, financées de manière différente et gérées en tuyaux
d’orgue par des acteurs distincts (les partenaires conventionnels, l’Etat
et la CNSA depuis 2006).
L’antécédent du plan de soins infirmiers, finalement introduit sous
la forme édulcorée de la démarche de soins infirmiers après dix ans de
négociations et déjà abandonné, a montré qu’il y avait loin de l’intention
à la mise en oeuvre. La nécessité d’obtenir désormais une signature de
l’ensemble des syndicats
119
dont les aspirations demeurent souvent
divergentes n’a fait que renforcer la difficulté de l’exercice.
Sans détailler l’ensemble des dispositions conventionnelles, les
points suivants méritent d’être précisés :
117 . L’application des seuils d’activité a été suspendue dès 2004 (avenant
conventionnel n° 5).
118. LFSS 2007, article 91-II (mise en place de programmes d'accompagnement des
patients atteints de pathologies chroniques) ; mise en place par la CNAMTS depuis
mars 2008 d’une phase expérimentale du programme « Sophia », destiné aux patients
diabétiques de plus de 18 ans, en ALD, fondé sur le principe du volontariat.
119. L’article L. 162-15 du CSS (issu de la loi relative à l’assurance maladie de 2004)
prévoit que l’opposition formée par deux syndicats représentant le double des
organisations signataires peut faire obstacle à l’entrée en vigueur d’un texte
conventionnel.
L
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OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
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ASSURANCE MALADIE
89
-
au mécanisme des seuils doit se substituer une démarche de maîtrise
médicalisée de l’activité infirmière individuelle, inspirée de celle en
vigueur auprès des médecins et fondée sur l’élaboration progressive de
recommandations et références professionnelles par la HAS : le
premier thème d’application retenu est celui de la prescription des
dispositifs médicaux évoquée ci-dessus, mais l’avenant qui devait
définir avant le 31 décembre 2007 les modalités de « retour » financier
à la profession des dépenses évitées n’est pas paru ;
-
quant à la démarche de soins infirmiers, dont l’objet était à la fois
d’octroyer aux infirmiers un pouvoir d’autoprescription encadré par le
médecin et de transférer une partie des soins de nursing sur les
auxiliaires de vie (cf. supra), elle est supposée être redéfinie par un
groupe de travail (qui préexistait à la convention) : les propositions qui
devaient être faites dès le mois de septembre 2007 et au plus tard le
30 juin 2008 ne sont, pour l’instant, pas connues
120
;
-
enfin,
le
projet
emblématique,
qualifié
de
rationalisation
démographique dans la convention infirmière, repose sur un principe
introduit dès le protocole du 17 avril 2007, repris dans celui du 22 juin
et dans la convention : la régulation doit se fonder sur une définition
préalable des besoins en soins infirmiers, appelés à croître avec le
vieillissement de la population et s’appliquer à la totalité de l’offre, ce
qui inclut les SSIAD et les centres de soins infirmiers (CSI)
directement concurrents de l’offre libérale, mais implique également
les EHPAD et les hospitalisations à domicile qui délivrent des
prestations de nature théoriquement différentes et complémentaires
(hébergement pour les premiers, charge en soins plus lourde pour la
seconde). Une mission a été confiée en ce sens par le ministre à l’IGAS
en avril 2007 dont les résultats, communiqués en février 2008
121
(c'est-à-dire postérieurement à la signature de la convention qui s’y
réfère explicitement), débouchent moins sur des solutions immédiates
que sur des perspectives de travaux et d’expérimentations à engager.
Constatant en effet que la création de la CNSA n’a pas corrigé la
gestion cloisonnée des diverses composantes de l’offre de soins infirmiers,
déjà critiquée par la Cour à plusieurs reprises
122
, le rapport de mission de
l’IGAS insiste en particulier sur le paradoxe suivant : « On dispose d’un
système de régulation de l’offre SSIAD par les services de l’Etat, mais aucun
véritable système d’information pour asseoir les décisions. Du côté de
l’assurance maladie et du suivi de l’offre libérale, on dispose d’un système
120. Aucune indication n’a été fournie à la Cour.
121. Note RM2008-017P, rendue publique en juin 2008.
122 . Voir le rapport public thématique sur les personnes âgées dépendantes de
novembre 2005 et le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2006.
90
C
OUR DES COMPTES
d’information sophistiqué et performant, mais aucun mécanisme de
régulation collective n’est mis en place ».
Ainsi, la comparabilité des services rendus par ces deux types d’offres
est en fait impossible, puisque les SSIAD sont principalement appréhendés à
travers leurs capacités (nombre de places) et non en fonction du volume et de
la nature de leur activité (nombre d’actes en AMI et AIS des infirmiers
libéraux).
Les préconisations de l’IGAS concernent donc au premier chef
l’amélioration de la connaissance qui suppose une mise en commun des
données entre les divers gestionnaires et conditionne toute réorganisation
sérieuse, fondée à la fois sur l’analyse quantitative et qualitative des services
rendus et la définition des besoins d’une population vieillissante.
Dans le même temps, malgré l’ampleur manifeste du chantier
ouvert, les syndicats d’infirmiers ont été incités à négocier rapidement les
« modalités de mise en place d’un dispositif expérimental de régulation
démographique de la profession » afin que se concrétise le plus
rapidement possible un accord jugé politiquement très important : d’une
part, la LFSS 2008 (article 46) en a posé la base législative, d’autre part,
la deuxième étape de revalorisations prévue pour le 1
er
août 2008 (article
9-1 de la convention) est conditionnée par « l’engagement de la
profession dans les mesures structurantes sur la répartition de l’offre de
soins ». Il a été exposé aux syndicats que cette étape ne pourrait donc
entrer en vigueur qu'après signature d'un avenant conventionnel
comportant des mesures effectives de régulation démographique de la
profession.
De leur côté, les syndicats infirmiers ont concrétisé le principe
vertueux de rationalisation globale de l’offre en posant immédiatement
comme condition essentielle à leur accord qu’aucune place de SSIAD ne
soit créée dans les zones surdenses où les nouveaux conventionnements
leur seraient refusés : cette revendication que sous-tendait le protocole du
17 avril 2007 répond à la préoccupation constante des infirmiers libéraux
de préserver leur activité de nursing
123
. La ministre leur a donné
satisfaction par lettre adressée aux syndicats le 17 juin 2008.
L’avenant prévu a finalement été signé le 4 septembre 2008. Il fixe
au 1er avril 2009 le démarrage concret d’un dispositif expérimental de
123. Dès la convention de 1992, cette position s’exprimait à travers cet article, repris
dans les textes suivants : « les caisses expriment leur volonté de s’abstenir, pendant la
durée de la convention, de toute action tendant au développement des organismes de
distribution de soins infirmiers pouvant être considérés par les infirmières comme
étant susceptibles de nuire à l’exercice libéral de leur profession dans le cadre du
régime conventionnel ».
L
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OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
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ASSURANCE MALADIE
91
régulation
démographique.
La
seconde
étape
de
revalorisation
(légèrement supérieure à celle prévue initialement) s’appliquera à
compter de la même date.
Ce résultat positif se fait cependant au prix d’un risque de
limitation des places de SSIAD pourtant susceptibles d’assurer de
manière adaptée et à moindre frais la prise en charge des soins de nursing
aux personnes âgées.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
12.
Etablir par région une estimation prospective des besoins de la
population en soins infirmiers techniques d’une part, en soins de nursing
d’autre part.
13.
Redéfinir la contribution optimale des différents intervenants aux
soins de nursing (infirmiers, aides-soignants et auxiliaires de vie) et en
tirer les conséquences en termes d’évolution des modes d’exercice (libéral
et salarié) et d’organisation (en cabinet, en groupe ou en structure).
III - L’ONDAM et les négociations conventionnelles
_____________________
PRESENTATION
_______________________
La Cour a déjà examiné la politique conventionnelle entre les
professions de santé et l’assurance maladie et analyse chaque année, dans
son rapport sur la sécurité sociale, la mise en oeuvre de l’objectif national
de dépenses d’assurance maladie (ONDAM). Cependant, elle n’avait plus,
depuis 2001, examiné l’articulation de ces deux outils de régulation.
L’ONDAM voté chaque année par le Parlement dans le cadre de la
loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) arrête un montant
prévisionnel de dépenses d’assurance maladie soumises à régulation. Les
accords conventionnels, négociés entre les caisses d’assurance maladie et
les professions de santé exerçant en ville, fixent les tarifs de leurs actes et
l’évolution de leurs revenus et portent également depuis quelques années
sur l’organisation de l’offre de soins.
La loi relative à l’assurance maladie du 13 août 2004 d’une part, la
loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale
(LOLFSS) du 2 août 2005 d’autre part, ont rénové les modalités
d’articulation de ces deux mécanismes. Le législateur a entendu, par une
fiabilisation de l’ONDAM et une responsabilisation accrue des partenaires
conventionnels, renforcer les leviers de la maîtrise annuelle des dépenses
d’assurance maladie. L’institution d’un ONDAM pluriannuel devait par
92
C
OUR DES COMPTES
ailleurs permettre un pilotage à moyen terme des dépenses de santé, seul à
même de peser durablement sur les déterminants structurels de leur
évolution. La présente enquête procède à un premier bilan de ces réformes.
A
–
La recherche d’une meilleure articulation dans un
cadre annuel
1
–
Deux logiques différentes
a)
L’ONDAM, un objectif annuel de dépenses évaluatives
Jusqu’en 1996 et l’institution des LFSS, la régulation des dépenses
de sécurité sociale reposait sur l’adoption ponctuelle de plans de
redressement pour faire face aux déficits récurrents de la branche
maladie, mais sans parvenir à les résorber durablement. L’ONDAM
devait répondre à ces insuffisances, en inscrivant la régulation des
dépenses d’assurance maladie dans un cadre annuel.
Cependant, à la différence du budget de l’Etat, l’ONDAM ne
constitue pas un plafond limitatif de dépenses, mais un objectif
prévisionnel de dépenses, dont l’éventuel dépassement ne remet pas en
cause les prestations dues aux assurés. En outre, l’ONDAM est défini
comme un agrégat de nature économique, distinct des dépenses des
régimes de sécurité sociale qui sont retracées selon des règles comptables.
Cet outil de régulation hybride avait paru pouvoir néanmoins être
rendu opposable aux professions de santé par la mise en oeuvre de
procédures de sanction en cas de dépassement, telles qu’en avait
instituées l’ordonnance du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée
ou la LFSS pour 2000, mais celles-ci ont toutes échoué.
Dénué de caractère normatif, l’ONDAM voté chaque année par le
Parlement a été systématiquement dépassé, à l’exception de la première
année de mise en oeuvre (1997) et de l’année 2005
124
.
b)
Une négociation pluriannuelle avec les professionnels de santé
Depuis la loi du 3 juillet 1971, les rapports entre les caisses
d’assurance maladie et les médecins exerçant en ville reposent sur des
conventions nationales conclues pour cinq ans. Cet outil de régulation,
124. En 2005 toutefois et contrairement aux autres années, le dépassement n’a été que
très limité.
L
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OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
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ASSURANCE MALADIE
93
progressivement étendu à l’ensemble des professions intervenant en ville,
entre en vigueur après approbation par arrêté du ministre de la santé.
Il confère des droits étendus aux professionnels de santé
adhérents
125
et permet aux assurés de se faire rembourser totalement ou
partiellement les honoraires versés.
Les revalorisations tarifaires, accordées aux professions de santé
dans le cadre de ces négociations conventionnelles, constituent ainsi un
des facteurs de progression des dépenses d’assurance maladie entrant
dans le champ de l’ONDAM. La bonne articulation de ces deux
mécanismes de régulation est donc essentielle pour garantir le respect de
l’ONDAM voté par le Parlement. Mais, comme la Cour l’a montré, les
précédentes tentatives de les intégrer dans une même démarche se sont
révélées décevantes.
2
–
Une rénovation parallèle des deux outils
Depuis 2004, les deux procédures de fixation de l’ONDAM d’une
part, de la négociation conventionnelle d’autre part, ont été réformées
sans amélioration de leur articulation.
a)
Une volonté de fiabiliser l’ONDAM
Depuis 2004, les conditions d’élaboration et de suivi de l’ONDAM
ont été rénovées, afin de renforcer l’efficacité de cet outil de régulation.
Le vote d’un ONDAM plus précis devait en particulier lui conférer une
plus grande opposabilité à l’égard des partenaires conventionnels.
Le Parlement s’est en effet vu reconnaître par la LOLFSS le
pouvoir de voter des sous-objectifs au sein de l’ONDAM, alors qu’il ne
se prononçait auparavant que sur son seul montant global. Ainsi,
l’enveloppe de dépenses de soins de ville, jusque là arrêtée par le
Gouvernement après la promulgation de la LFSS, est désormais
déterminée par un texte de niveau législatif. Cependant, si cette évolution
offre davantage de visibilité aux dépenses de soins de ville, elle ne donne
pas à ce sous-objectif davantage d’effet contraignant à l’égard des
partenaires conventionnels.
La loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie (LAM) crée
pour sa part un comité chargé d’alerter le Gouvernement et le Parlement
en cas de dépassement de l’ONDAM. Elle renforce ainsi le contrôle de la
125. Par exemple pour les médecins de secteur I la prise en charge partielle des
cotisations maladie au régime général, retraite (avantage supplémentaire vieillesse) et
famille par les régimes d’assurance maladie qui jouent le rôle d’employeur.
94
C
OUR DES COMPTES
mise en oeuvre de l’ONDAM, en permettant de vérifier que l’évolution
des dépenses est conforme à l’objectif voté par le Parlement. Le comité
d’alerte est appelé notamment à mesurer l’impact des revalorisations
accordées aux professionnels de santé en cours d’année. Il remplit donc
un rôle potentiellement dissuasif à l’égard des partenaires conventionnels,
puisque tout dépassement de l’ONDAM supérieur à 0,75 % donne lieu à
l’adoption de mesures de redressement. De manière plus subtile, il agit
préventivement sur le Gouvernement et le Parlement, en les incitant à
définir un ONDAM crédible, sous peine du déclenchement d’une
procédure d’alerte qui traduirait leur incapacité à maîtriser l’évolution des
dépenses.
b)
Une recherche accrue d’efficacité dans la conduite des
négociations
L’UNCAM, un négociateur unique aux responsabilités élargies
L’union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM),
créée par la LAM pour rassembler la caisse nationale d’assurance maladie
(CNAMTS), la caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA) et
le régime social des indépendants (RSI), est désormais chargée de
négocier et signer les accords conventionnels.
L’organisation de la procédure de négociation a été renouvelée : le
directeur général de l’UNCAM a, dans le cadre des orientations fixées par
son conseil et sur la base d’un mandat défini par le collège des directeurs
des trois caisses nationales, la responsabilité pleine et entière des
négociations. Précédemment cette responsabilité était assurée principale-
ment par le président du conseil d’administration de la CNAMTS
126
.
Le champ des négociations conventionnelles a également été élargi
à l’organisation des soins, afin d’associer les professions de santé aux
évolutions de l’assurance maladie et d’offrir à l’UNCAM des marges de
négociation en échange de l’octroi de revalorisations tarifaires. La Cour a
jugé que cette réforme risquait de subordonner l’organisation du système
de soins aux objectifs d’optimisation des revenus des professionnels de
santé
127
.
126. En outre, le pouvoir de substitution de l’Etat, jusque là prévu en cas de carence
des partenaires conventionnels, est remplacé par l’intervention d’un arbitre, désigné
par les partenaires conventionnels ou, à défaut, par le président du haut conseil pour
l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM).
127. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007.
L
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OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
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ASSURANCE MALADIE
95
Une nouvelle stratégie de négociation
Forte de ces nouvelles compétences, l’UNCAM a réorienté la
stratégie de négociation avec les professions de santé et le contenu des
accords qui les lient. La convention du 12 janvier 2005 avec les syndicats
de médecins en a défini les grands principes, étendus progressivement
aux autres professions de santé.
L’UNCAM
a
privilégié
jusqu’à
présent
une
négociation
permanente avec les professionnels de santé, tandis qu’auparavant les
caisses nationales tentaient d’en différer le calendrier afin de minimiser
l’impact des accords conventionnels sur les dépenses de santé. Elle en
attend une moindre pression sur les demandes de revalorisation, en
prévenant les phases de crispation et souhaite enserrer les syndicats
représentatifs dans un ensemble d’engagements et de contreparties. Les
négociations
interviennent
désormais
à
un
rythme
infra-annuel,
l’UNCAM ayant conclu depuis le 1
er
janvier 2005 une convention et
vingt-sept avenants avec les médecins, six conventions et dix huit accords
avec les autres professions de santé.
Le morcellement des thèmes de négociation constitue le deuxième
principe mis en oeuvre par l’UNCAM. Elle entend ainsi éviter une
concentration des négociations sur des éléments de rémunération jugés
symboliques par les professions de santé et dont la revalorisation aurait
un impact massif sur les dépenses (à l’exemple du tarif de consultation
des généralistes, dont l’augmentation de 1 € représente environ 300 M€
de dépenses supplémentaires en année pleine). La stratégie de l’UNCAM
repose donc sur une segmentation des mesures de revalorisation,
notamment dans le cadre de la mise en oeuvre de la classification
commune des actes médicaux (CCAM) techniques pour les médecins
spécialistes
128
ou par la création de majorations ou de forfaits pour les
médecins généralistes.
Pour ces derniers cependant, cette stratégie s’est traduite par un
surcoût important, il est vrai dans un contexte de revalorisation du rôle du
médecin généraliste, lié notamment à la mise en place du parcours de
soins coordonné et de rattrapage des écarts de rémunération qui s’étaient
accentués sur la période récente avec les médecins spécialistes.
3
–
Une articulation insuffisante des deux mécanismes
L’absence de liens entre les négociations conventionnelles et
l’ONDAM entraîne une moindre opposabilité de ce dernier et nuit à sa
128. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, p. 226 et suivantes.
96
C
OUR DES COMPTES
fiabilité. Elle se traduit également par une efficacité amoindrie des
négociations conventionnelles du point de vue de la maîtrise des
dépenses. L’année 2007 aura révélé l’ensemble de ces dysfonction-
nements et conduit à l’adoption de premières mesures correctrices.
a)
Un ONDAM fragilisé
L’absence de délégation formelle aux partenaires conventionnels
La fixation par le Gouvernement d’un objectif de dépenses de
soins de ville avait constitué jusqu’en 2000 le principal mécanisme
d’articulation entre l’ONDAM et les négociations conventionnelles. Cela
permettait éventuellement de subordonner l’octroi de revalorisations
tarifaires au respect de cet objectif.
Cet objectif de dépenses était défini au sein de l’ONDAM, dans le
cadre d’un avenant annuel à la convention d’objectifs et de gestion liant
l’Etat aux caisses nationales d’assurance maladie. Il couvrait les dépenses
d’honoraires et de prescription des professionnels de santé libéraux,
jusqu’à ce que la LFSS pour 2000 crée, au son sein, un sous-objectif dit
objectif de dépenses délégué (ODD) aux régimes d’assurance maladie.
Cet ODD, qui ne concernait que les dépenses d’honoraires, a été
supprimé par la LFSS pour 2003.
Désormais, si le code de la sécurité sociale impose à l’UNCAM de
conclure des accords conventionnels « dans le respect des objectifs fixés
en LFSS », aucun mécanisme de délégation des dépenses n’est formalisé.
Les partenaires conventionnels négocient donc sans cadrage financier
préalable. En conséquence de cette absence d’opposabilité de l’ONDAM,
le programme de qualité et d’efficience maladie annexé au PLFSS 2008
fixe un objectif de dépassement de l’ONDAM limité à 0,75 %, au lieu de
viser un respect de l’objectif voté par le Parlement. Une telle approche
revient à considérer que l’ONDAM est un simple outil de prévision et
non un outil opposable de régulation des dépenses d’assurance
maladie
129
.
La LAM n’ayant pas formalisé le périmètre des dépenses sujettes à
régulation dans le cadre des accords conventionnels, il revient à leurs
signataires, comme l’indique la convention nationale du 12 janvier 2005,
d’en définir le champ.
129. Le programme de qualité et d’efficience maladie, qui constitue un dispositif de
pilotage à moyen terme des dépenses de sécurité sociale par la performance, inclut
plusieurs indicateurs relatifs à l’ONDAM et aux négociations conventionnelles. Voir
chapitre III relatif aux programmes de qualité et d’efficience (PQE).
L
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OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
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ASSURANCE MALADIE
97
L’UNCAM a donc privilégié une maîtrise médicalisée des
dépenses portant sur les seules prescriptions et ne fait aucune référence à
l’ONDAM. En effet, ce dispositif entend mettre fin à toute maîtrise
comptable des dépenses de ville, c'est-à-dire à tout encadrement
quantitatif des revalorisations accordées aux professionnels ou de leurs
prescriptions. Il vise une inflexion structurelle de dépenses de certains
produits de santé ou de certaines prestations, en faisant évoluer de façon
collective les pratiques de prescription des médecins et cible les produits
pour lesquels une surconsommation est constatée par rapport à d’autres
pays
aux
caractéristiques
sanitaires
équivalentes.
Les
accords
conventionnels déclinent donc sur cette base des thèmes de maîtrise (les
antibiotiques, les statines, les arrêts de travail…) fixent des objectifs
chiffrés d’inflexion des tendances de consommation et parfois quantifient
les économies attendues.
L’absence de sanctions associées au dépassement de l’ONDAM
Aucun dispositif juridique n’a été établi pour donner à l’ONDAM
une valeur contraignante sur les négociations conventionnelles à venir.
Entre
1996
et
2004,
plusieurs
mécanismes
avaient
été
successivement mis en place pour sanctionner un éventuel dépassement
de l’objectif soins de ville. D’abord limités aux médecins, ces
mécanismes de sanction collective mis en place par l’ordonnance du
24 avril 1996, puis individualisés par la LFSS pour 1999, devaient être
étendus à l’ensemble des professions sujettes à accords conventionnels
par la LFSS pour 2000, sous la forme de baisses automatiques des tarifs
(système dit des « lettres-clefs flottantes »). Cependant, ces dispositifs
n’ont jamais fonctionné, suite à des annulations contentieuses dans un
premier temps, par manque de volonté politique par la suite.
Confirmant l’inflexion déjà inscrite en LFSS pour 2003, la LAM
ne prévoit aucun mécanisme permettant, même a posteriori, d’assurer une
opposabilité de l’ONDAM aux négociations conventionnelles. Cette
question a été laissée à nouveau à l’appréciation des partenaires
conventionnels qui n’ont mis en place qu’un système d’incitation positive
par intéressement financier aux économies réalisées. La convention du
12 janvier 2005 prévoit ainsi qu’une partie des dépenses supposées
évitées dans le cadre de la maîtrise médicalisée pourrait être utilisée pour
valoriser la rémunération des actes. Conformément à la COG 2006-2009,
la même logique inspire l’avenant n° 23 à la convention médicale, conclu
le 29 mars 2007, qui met en place un dispositif de prévention, décliné sur
la base d’indicateurs pour chaque médecin et pouvant donner lieu à une
revalorisation sur trois ans des conditions d’exercice de la médecine
générale.
98
C
OUR DES COMPTES
Une articulation insuffisante qui nuit à la fiabilité de l’ONDAM
L’absence d’articulation formalisée entre les deux mécanismes
affecte les conditions d’élaboration de l’ONDAM. Ce dernier résulte en
effet d’opérations successives conduisant, à partir d’une estimation
tendancielle de l’évolution des dépenses, à ajouter des provisions pour
mesures nouvelles puis à déduire des économies attendues. L’intégration
des surcoûts résultant de revalorisations tarifaires intervenues l’année
précédente ou qui pourraient résulter des négociations conventionnelles à
venir, ainsi que les économies attendues des engagements de maîtrise
médicalisée, donnent lieu à des opérations de « bouclage », dont les
modalités nuisent à la fiabilité de l’ONDAM.
Des provisions pour revalorisation sous-évaluées
La constitution de provisions pour des revalorisations tarifaires qui
pourraient intervenir l’année suivante est un exercice de prévision soumis
à un certain nombre d’aléas tenant aux incertitudes inhérentes à toute
négociation, à la date de conclusion des accords (plus elle est tardive, plus
son coût est limité pour l’année en cours) et au montant des
revalorisations finalement accordées.
Mais, sous ces réserves, la Cour a observé une tendance à sous-
provisionner les accords conventionnels pour les professions les plus
coûteuses en revalorisation. Ainsi, aucune provision n’a été constituée en
2006 pour les médecins qui se verront accorder, selon les évaluations de
la CNAMTS, 162 M€ de revalorisations pour la seule année 2006. En
LFSS pour 2007, le projet d’ONDAM soumis au Parlement excluait
sciemment toute provision pour les médecins, alors que de fortes
pressions s’exerçaient sur l’UNCAM pour revaloriser la consultation des
généralistes et aussi pour revoir la situation des infirmières, dont la
convention nationale arrivait pourtant à échéance en février 2007.
Ce sous-provisionnement tient parfois également au manque
d’information du ministère sur la politique conventionnelle menée par
l’UNCAM. Ainsi, la nouvelle convention nationale des masseurs-
kinésithérapeutes, conclue le 3 avril 2007, n’avait pu être provisionnée
dans l’ONDAM de 2007, la DSS n’ayant pas été informée par l’UNCAM
de son intention de conclure un tel accord.
Des objectifs d’économie surévalués
Les économies attendues dans le cadre de l’ONDAM portent
essentiellement sur le sous-objectif soins de ville (86 % des 3,3 Md€
d’économies attendues en 2007), dont plus de la moitié résulte de la
politique du médicament menée par l’Etat (générication, baisse de
prix…). Les économies prévues dans les accords conventionnels font
L
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OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
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ASSURANCE MALADIE
99
l’objet d’une prévision dans l’ONDAM, qui a tendance à être surestimée
par rapport aux engagements conventionnels des médecins
130
.
Comparaison entre économies attendues dans l’ONDAM et engagements
de maîtrise médicalisée des partenaires conventionnels
En M€
2005
2006
2007
Economies ONDAM
1 200
890
688
Engagements conventionnels portant
sur divers postes individualisés
998
791
623
Source :
Tableau Cour, d’après données DSS et CNAMTS
Cette surestimation tient pour partie à la volonté de la DSS de
peser sur les engagements des partenaires conventionnels, définis
postérieurement au vote des ONDAM pour 2005 et 2006. Pour 2007
cependant, les engagements de maîtrise médicalisée des professions
médicales étaient connus lors de la construction de l’ONDAM, puisqu’ils
avaient été pris dans l’avenant n° 12 du 3 mars 2006. Mais le montant des
économies attendues n’y était pas chiffré, contrairement aux engagements
pris par la CNAMTS dans le cadre de sa COG 2006-2009.
La DSS n’en a pas moins inclus dans l’ONDAM 80 M€
d’économies de maîtrise médicalisée non identifiées afin d’afficher un
taux d’évolution volontariste.
Au final, les conditions de prise en compte des surcoûts d’une part,
des économies d’autre part, qui pourraient résulter de futurs accords
conventionnels affectent la sincérité de l’ONDAM.
b)
Des résultats incertains pour la maîtrise des dépenses
Une information insuffisante du Gouvernement et du Parlement
Les
modalités
de
suivi
des
accords
conventionnels
ou
d’information du Parlement ou du Gouvernement ne font l’objet d’aucune
obligation précise. La LFSS pour 2003 délègue ainsi aux partenaires
conventionnels l’appréciation de la cohérence des engagements qu’ils
signent
131
, mettant fin à la procédure stricte de suivi instaurée par la
LFSS pour 2000, que la Cour avait d’ailleurs jugée inapplicable. Elle
obligeait en effet les caisses nationales à transmettre au Parlement et au
Gouvernement plusieurs rapports d’équilibre en cours d’année destinés à
130. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, p. 73 et suivantes.
131. Article L. 162-14-1 du CSS.
100
C
OUR DES COMPTES
démontrer que les revalorisations accordées s’inscrivaient dans le cadrage
financier découlant de l’ONDAM.
Les partenaires conventionnels ont choisi de charger des instances
paritaires constituées aux niveaux national, régional et local, de la mise en
oeuvre de la maîtrise médicalisée et du suivi de ses résultats. Dans le
cadre de la convention médicale du 12 janvier 2005, une commission
nationale réunit les caisses nationales d’assurance maladie, le conseil
national de l’ordre des médecins et les syndicats représentatifs et pilote
l’ensemble du dispositif de maîtrise médicalisée. Elle est en particulier
chargée du suivi des résultats de chaque région et de proposer toute
mesure de nature à permettre le respect des objectifs d’économies. Cette
commission, qui ne s’est réunie qu’une seule fois par an en 2006 et en
2007, apparaît néanmoins davantage comme un organe de dialogue entre
gestionnaires de l’assurance maladie et syndicats de médecin que comme
une instance de pilotage de la maîtrise médicalisée. En particulier, les
mesures prises en 2007 par la CPN n’apparaissaient pas de nature à
répondre au fort dynamisme des dépenses d’assurance maladie,
puisqu’elles n’envisageaient que l’envoi d’un courrier aux commissions
paritaires locales pour les inciter à « définir des plans d’action,
notamment en termes d’information des praticiens sur les objectifs à
poursuivre et sur leur pratique ».
L’information du Gouvernement repose sur la transmission par
l’UNCAM des accords conclus pour approbation
132
, accompagnés le plus
souvent d’éléments d’explication. Cependant, le coût de plusieurs accords
conclus en 2006 et en 2007 avec les syndicats de médecins n’a pas été
chiffré et le ministère peine à vérifier les données financières relatives à
la CCAM technique, les chiffrages transmis n’étant pas jugés assez
détaillés.
L’information du Parlement sur les négociations conventionnelles
repose depuis la LAM, à titre principal, sur le rapport que l’UNCAM est
chargée de lui transmettre (ainsi qu’au Gouvernement) avant le 15 juin,
dans lequel elle formule des propositions pour assurer le respect de
l’ONDAM pluriannuel
133
(cf. infra). Chacune des caisses nationales a
jusqu’ici élaboré un rapport distinct, transmis sous couvert de l’UNCAM.
La CNAMTS, dans le cadre de son rapport annuel, y présente de sa
propre initiative un bilan de la politique conventionnelle menée par
l’UNCAM. Mais les informations y demeurent lacunaires, puisqu’elles
portent à titre essentiel sur les médecins et présentent un bilan
déséquilibré de ces accords, en valorisant surtout les économies qui
132. Article L. 162-15 du CSS.
133. Article L. 111-11 du CSS.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
101
résulteraient de la maîtrise médicalisée et en évoquant de manière plus
laconique ou en occultant parfois les surcoûts qu’ils génèrent.
L’obligation
d’information
pesant
sur
l’UNCAM
apparaît
donc
insuffisante pour permettre au Parlement d’apprécier la manière dont elle
a mis en oeuvre l’ONDAM.
Des évaluations optimistes
Le bilan réalisé par les partenaires conventionnels a eu tendance à
surestimer les économies générées par la maîtrise médicalisée en 2005
comme en 2006. Des évaluations concurrentes réalisées par le ministère
de la santé, il ressort que cette surestimation des résultats provient de
deux facteurs.
Le premier tient aux modalités de calcul des économies. Celles-ci
constituent en réalité de moindres dépenses, puisqu’elles résultent de
l’infléchissement de la croissance tendancielle des remboursements pour
un produit de santé ou une prestation donnée. Dès lors, la définition des
hypothèses de croissance tendancielle sous-jacentes aux engagements de
maîtrise médicalisée est essentielle pour déterminer l’ampleur de l’effort
de maîtrise. Les évaluations de la DSS pour 2005 montrent des écarts
sensibles avec celles de la CNAMTS sur les produits de santé, qui
viennent minorer fortement les économies générées.
Evaluation des économies de maîtrise médicalisée pour 2005 sur les
produits de santé
EN M€
Tendances sous
jacente
Taux d’évolution
réalisés
Montants
d’économie
réalisés
CNAMTS
DSS
Objectifs
d’inflexion
de la
tendance
CNAMTS
DSS
Objectifs
conventionnels
d’économie
CNAMTS
DSS
Antibiotiques
0 %
-0,2 %
-10 %
-3,8 %
4,3 %
91
35
6
Statines
11 %
13 %
-12,5 %
1,9 %
4,6 %
161
122
9
Psychotropes
0 %
-4 %
-10 %
-3,3 %
-2,7 %
33
11
2
TOTAL
168
17
Note de lecture : les montants des économies réalisées sur le poste statines divergent
fortement entre la CNAMTS et la DSS, cette dernière retenant une évolution
tendancielle supérieure et une moindre inflexion des dépenses.
Source :
Tableau Cour, d’après données CNAMTS et DSS
Le second facteur d’écart tient aux modalités de comptabilisation
des économies. La CNAMTS comptabilise les économies en valeur et
prend donc en compte pour les médicaments les effets de baisse de prix et
de générication qui ne relèvent pas des négociations conventionnelles. La
DSS les isole, jugeant que l’UNCAM ne peut agir que sur les seuls
volumes.
102
C
OUR DES COMPTES
En 2006, pour un objectif d’économies attendues de 791 M€, ces
différences méthodologiques conduisent la DSS à évaluer les résultats de
la maîtrise médicalisée à 461 M€, contre 581 M€ pour la CNAMTS
134
.
Aucune évaluation des résultats de la maîtrise médicalisée n’a été réalisée
par la DSS pour 2007.
Un impact limité sur la maîtrise des dépenses
Des revalorisations coûteuses
Si l’UNCAM est parvenue depuis 2005 à relancer la vie
conventionnelle, en concluant de nouvelles conventions nationales avec
les principales professions de santé (médecins en 2005, chirurgiens-
dentistes en 2006, infirmières, masseurs-kinésithérapeutes, sages femmes
et pédicures podologues en 2007), cette politique aura été coûteuse en
revalorisations tarifaires. Selon les évaluations de la DSS
135
, l’impact
cumulé des revalorisations entre 2005 et juillet 2007 pour l’ensemble des
professions de santé intervenant en ville s’élèverait à 2,2 Md€ (en année
pleine).
Ces
évaluations
n’intègrent
cependant
pas
les
mesures
d’économie sur les tarifs décidées dans le cadre des accords
conventionnels, évaluées par la DSS à environ 230 M€ en 2006
136
et à
150 M€
137
en 2007 (en année pleine).
134. L’évaluation de la DSS porte sur un objectif global de dépenses de 766 M€ (voir
le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, pp. 73-74).
135. Ces chiffres résultent pour chaque année d’une évaluation ex ante de l’effet en
année pleine des mesures de revalorisation, sur la base des dépenses constatées. Leur
cumul sur moyenne période ne peut donner qu’un ordre de grandeur.
136. Pour l’essentiel tenant à la baisse de tarifs de certains actes d’analyse de biologie
médicale (95 M€) et à la moindre prise en charge des cotisations sociales des
chirurgiens-dentistes (140 M€).
137. Economies résultant des mesures de redressement ayant suivi le déclenchement
de la procédure d’alerte le 29 mai 2007, consistant pour l’essentiel en une baisse de
tarifs de certains actes de biologie et de radiologie.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
103
Revalorisations accordées entre 2003 et juillet 2007
En M€
Impact en année pleine
Professions
Mesures
2003
Mesures
2004
Mesures
2005
Mesures
2006
Mesures à
juillet 2007*
Impact total
depuis 2003
Omnipraticiens
73
1
370
292
273
1 009
Spécialistes
121,3
62,6
308
117
143,5
138
752,4
Biologistes
0
0
0
0
2,5
2,5
Chirurgiens-
dentistes
66,3
0
0
311,6
138
0
377,9
Sages-femmes
37,9
2
0
0
0
39,9
Infirmières
118,8
2,7
0
0
155
276,5
Masseurs
21,3
33,1
0
40
87
181,4
Orthophonistes
2,7
0
0
10
0
12,7
Transports sanitaires
40
10
63
33
0
146
Montant total des
revalorisations
481,3
111,4
741
803,6
659
2 796,3
*Impact en année pleine des accords conclus entre janvier et juillet 2007.
Source :
DSS
La période 2005-2007 est caractérisée par un montant brut annuel
moyen de revalorisations tarifaires (735 M€) supérieur à celui constaté
sur la période précédente, même si l’année 2002 avait connu un fort pic
selon d’autres évaluations réalisées par la CNAMTS (1 317 M€, compte
non tenu des chirurgiens-dentistes, des orthophonistes, sages-femmes et
transports sanitaires). Les revalorisations accordées entre janvier 2005 et
juillet 2007 représentent une part importante des montants d’honoraires
perçus en 2006 : 12 % pour les médecins (généralistes et spécialistes) et
5,3 % pour les infirmières.
Des objectifs et des résultats de maîtrise médicalisée en recul
Au regard des évaluations de la CNAMTS, les objectifs et les
résultats de la maîtrise médicalisée tendent à diminuer sur la période
2005-2007 pour les médecins.
Ainsi, le montant total d’économies attendues passe de 998 M€ en
2005 à 623 M€ en 2007, soit une baisse de 38% en trois ans. Les résultats
de la maîtrise médicalisée connaissent une diminution encore plus
marquée (50 %), de 721 M€ en 2005 à 397 M€ en 2007. La CNAMTS
138. La CNAMTS présente des chiffres proches à l’exception des revalorisations
accordées aux chirurgiens dentistes en 2006 estimées à 206 M€ et aux spécialistes en
2007 (100 M€), pour lesquelles sont déduites des mesures d’économies (moindre
prise en charge des cotisations sociales pour les chirurgiens dentistes, baisses de tarifs
pour certaines spécialités).
104
C
OUR DES COMPTES
souligne néanmoins que la maîtrise médicalisée, désormais étendue aux
pharmaciens et aux établissements de santé, permettrait en 2007
d’afficher des résultats de 607 M€.
Cette diminution tendancielle des ambitions et des résultats de la
maîtrise médicalisée dans le cadre de la convention médicale illustre la
difficulté de maintenir des efforts d’économie à moyen terme, à l’image
de la difficulté à peser durablement sur la consommation de soins. Et ce
d’autant plus que certaines des économies supposées reconductibles
peuvent ne pas être durables, au contraire des revalorisations qui restent
quant à elles presque toujours acquises.
Au final, l’information sur les revalorisations accordées aux
professionnels de santé est très lacunaire, tandis que l’évaluation des
économies de maîtrise médicalisée est systématiquement surestimée. En
outre, aucun bilan coûts avantages des accords conventionnels conclus
depuis 2005 n’a été réalisé tant par l’UNCAM que par le ministère de la
santé. Les modalités de pilotage et de contrôle de la politique
conventionnelle n’apparaissent donc pas à la mesure des enjeux
financiers. Dès lors que la convention médicale prévoit un système
d’intéressement aux économies réalisées, il est nécessaire de conditionner
les revalorisations accordées aux résultats effectivement obtenus.
c)
Une défiance croissante des acteurs de la régulation
Un sous-objectif soins de ville irréaliste au regard des mesures
d’économie décidées
A la suite de l’adoption de la réforme de l’assurance maladie en
2004, une inflexion sensible de la progression des dépenses de soins de
ville a été observée, mais sur une courte période. Ainsi, alors qu’en 2004,
cette progression s’élevait à +4,4%, les dépenses auront décéléré en 2005
(+3,1 %) et 2006 (+2,6 %
139
).
Cette relative modération aurait pu permettre un respect durable du
sous-objectif soins de ville. Or, si en 2005 les dépenses de soins de ville
ont été inférieures de 430 M€ au sous-objectif voté dans la LFSS, les
exercices suivants ont été marqués par des dépassements croissants. En
2006, le sous-objectif soins de ville avait été, il est vrai, fixé de manière
irréaliste au regard des mesures d’économie annoncées (+0,9 % par
rapport à la base de 2005), conduisant à concentrer l’essentiel du
139. En valeur. Rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS)
de septembre 2007.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
105
dépassement de l’ONDAM (+1,1 Md€ par rapport à l’objectif voté) sur ce
sous-objectif
140
.
Pour 2007 et alors même que les dépenses de soins de ville
s’accéléraient au cours du deuxième semestre de 2006, le Gouvernement
a proposé au Parlement le vote d’un ONDAM soins de ville en
progression de 0,8 %. Estimant que cette progression ne permettait
aucune revalorisation des honoraires, le Parlement a, pour la première
fois, voté un sous-objectif soins de ville supérieur à celui proposé par le
Gouvernement, en portant son évolution à 1,1 %. Cependant, ce sous-
objectif devrait être largement dépassé. La CCSS a ainsi estimé, dans sa
note d’avril 2008, que le taux de progression de ce sous-objectif pour le
régime général devrait s’établir à 4,6 %, entraînant un dépassement de
3,1 Md€ du montant du sous-objectif voté.
Pour que l’ONDAM constitue un outil crédible d’encadrement des
négociations conventionnelles, le sous-objectif soins de ville doit être fixé
à un niveau réaliste au regard des économies prévues en LFSS. En effet,
l’UNCAM pouvait difficilement invoquer les limites fixées par un sous-
objectif dont les partenaires conventionnels connaissaient, dès le vote de
la LFSS pour 2007, le caractère délibérément sous-évalué. Le rôle
préventif du comité d’alerte sur la fixation du taux de progression de
l’ONDAM, qui semblait avoir fonctionné les deux premières années, n’a
pu ainsi pleinement jouer son rôle en 2007 dans un contexte
d’accélération des dépenses de soins de ville et en raison de la volonté du
Gouvernement d’afficher une réduction du déficit de l’assurance maladie
en 2007.
Une intervention croissante du Parlement et du Gouvernement
Les interventions du Gouvernement et du législateur dans le champ
des négociations conventionnelles se sont multipliées à partir du vote de
la LFSS pour 2007. Ils ont adressé des messages contradictoires à
l’UNCAM et aux professions de santé, en les encourageant à octroyer des
revalorisations, tout en renforçant dans le même temps l’encadrement de
leurs marges de manoeuvre.
A l’initiative du Gouvernement, le Parlement a inclus dans la
LFSS
pour
2007
un
amendement
enjoignant
les
partenaires
conventionnels d’aboutir avant le 3 janvier 2007 à un accord sur la
création d’un nouvel espace tarifaire ouvert à certaines spécialités
exercées en secteur 1, dit « secteur optionnel », qui leur aurait permis de
facturer des dépassements à l’assurance maladie. A défaut, il prévoyait de
140. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, pp. 63-67.
106
C
OUR DES COMPTES
conférer à l’Etat un pouvoir de substitution pour une période limitée. Cet
amendement, déclaré contraire à la Constitution par le Conseil
constitutionnel
141
, a été repris dans une loi du 30 janvier 2007.
Le ministre de la santé a également fait publiquement pression sur
l’UNCAM au printemps 2007 afin qu’elle accorde une revalorisation de
la consultation des généralistes à 23 €. Fin 2007 ensuite, la ministre de la
santé, dans un contexte de manifestations contre le projet d’une
réglementation du lieu d’installation des nouveaux médecins inscrit dans
le PLFSS pour 2008, a annoncé qu’elle préparerait « le cadrage de la
négociation que l’UNCAM conduira au premier semestre 2008 », alors
que le code de la sécurité sociale dispose que le conseil de l’UNCAM fixe
les orientations relatives à la négociation des accords conventionnels.
La ministre est à nouveau intervenue dès le mois de décembre
2007 en annonçant l’extension du dispositif de la permanence des soins,
qui vise à rémunérer les médecins de garde ou d’astreinte en soirée, la
nuit, les dimanche et jours fériés, aux lundi 24 et 31 décembre
142
.
L’avenant n°27 à la convention médicale, conclu le 19 décembre et
prévoyant un tel dispositif a été approuvé en conséquence par un arrêté du
21 décembre. Or, si l’Etat a un rôle à jouer en matière de permanence des
soins, notamment par l’action des préfets pour la définition des secteurs
géographiques d’astreinte, le code de la sécurité sociale confie néanmoins
aux partenaires conventionnels la détermination des modes de rémunéra-
tion de la permanence des soins
143
.
Au final, la mise en oeuvre de la LAM aura montré toute la
difficulté de stabiliser durablement un dispositif de régulation des soins
de ville, le nouvel équilibre prévoyant de responsabiliser l’UNCAM et les
professions de santé dans la réforme de l’assurance maladie ayant été
rapidement et fréquemment remis en cause.
Une volonté de mieux encadrer la politique conventionnelle
Plusieurs dispositions de la LFSS pour 2008 visent à pallier
certaines des insuffisances constatées dans le pilotage de la politique
conventionnelle.
La
LFSS
pour
2008
a
entendu
tout
d’abord
renforcer
l’individualisation des objectifs de maîtrise médicalisée. Elle institue la
141. Au motif que les amendements du Gouvernement introduisant des mesures
nouvelles dans une LFSS doivent en premier lieu être soumis à l’Assemblée nationale
(DC 2006-544 du 14 décembre 2006).
15. Pour un coût estimé à 750 000 € (à raison de 150 € par médecin participant).
143. Article L. 162-5-16° du CSS.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
107
possibilité d’un contrat, reposant sur des engagements de maîtrise
médicalisée liant le praticien volontaire à sa caisse primaire d’assurance
maladie et prévoit une rémunération complémentaire à ce titre. Par cette
disposition, l’Etat a souhaité renforcer les contraintes pesant sur les
professionnels de santé, l’usage des contrats individuels préexistants
ayant été jugé trop marginal. Cependant, la mise en oeuvre de ce nouveau
dispositif pourrait s’avérer difficile, l’individualisation des accords
conventionnels
étant
mal
acceptée
par
les
représentants
des
professionnels de santé.
Afin de remédier aux surestimations constatées, la LFSS 2008 fait
ensuite obligation à la CNAMTS de distinguer dans ses évaluations
l’effet prix de l’effet volume
144
, en prévoyant que
«
les engagements
conventionnels sur les dépenses liées aux prescriptions sont exprimés en
volume, indépendamment de toute évolution tarifaire ».
La même loi vise également à conférer davantage d’opposabilité à
l’ONDAM à l’égard des partenaires conventionnels. Le déclenchement de
la procédure d’alerte le 29 mai 2007 n’avait en effet pas empêché
l’UNCAM de conclure avec les syndicats d’infirmiers une nouvelle
convention nationale le 22 juin, pour un coût estimé à 68 M€ pour 2007
(155 M€ en année pleine). Or, dans le même temps, les caisses nationales
étaient
invitées
à
proposer
des
mesures
de
redressement
au
Gouvernement, afin de permettre le respect de l’ONDAM voté. Pour
remédier à cette contradiction, la LFSS pour 2008 a créé un mécanisme
de suspension de l’entrée en vigueur des accords conventionnels, en cas
de risque sérieux de dépassement de l’ONDAM constaté par le comité
d’alerte.
La LFSS prévoit enfin une suspension automatique de l’entrée en
vigueur des revalorisations, pour une durée de six mois après leur
approbation par arrêté, afin de minimiser leur impact sur l’ONDAM en
cours de mise en oeuvre. Mais à court terme, cette disposition aura eu
l’effet inverse de celui escompté, puisque les partenaires conventionnels
ont accéléré leurs négociations afin d’y échapper, en obtenant ainsi une
approbation de leurs accords avant le 1
er
janvier 2008, date d’entrée en
vigueur de la mesure. Sept accords ont en conséquence été conclus entre
mi octobre et mi décembre, dont deux conventions nationales (sages-
femmes et pédicures podologues). La ministre de la santé a approuvé par
arrêté six de ces accords avant la fin 2007, alors que la procédure
d’approbation tacite aurait permis une entrée en vigueur en 2008 et donc
le report de six mois des revalorisations.
144. Ainsi que l’avait demandé la Cour (voir le rapport sur la sécurité sociale de
septembre 2007).
108
C
OUR DES COMPTES
B
–
L’esquisse d’une articulation pluriannuelle
1
–
Un nouveau cadre pluriannuel
A l’absence d’articulation entre l’ONDAM voté chaque année par
le Parlement et les négociations conventionnelles devait répondre un
encadrement à moyen terme des dépenses d’assurance maladie, reposant
sur un ONDAM pluriannuel et sur un étalement des revalorisations
tarifaires.
a)
La création d’un ONDAM pluriannuel
La régulation annuelle des dépenses d’assurance maladie dans le
cadre de l’ONDAM a été complétée à partir de 2004 par la recherche
d’un cadrage à moyen terme des dépenses. La réforme de l’assurance
maladie prévoyait ainsi un retour à l’équilibre de la branche à horizon
2007.
Le vote de la LOLFSS a confirmé cette évolution, avec notamment
la création d’un cadrage pluriannuel des finances sociales annexé à la
LFSS, décrivant les prévisions de recettes et de dépenses des branches et
organismes concourant au financement des régimes et fixant un ONDAM
pour les quatre années à venir.
La LAM associe l’UNCAM à la mise en oeuvre de ce cadrage, en
lui confiant la responsabilité, dans le cadre d’un rapport annuel transmis
au Parlement et au Gouvernement avant le 15 juin, de proposer « les
mesures nécessaires pour atteindre l’équilibre prévu par le cadrage
pluriannuel des dépenses d’assurance maladie »
145
.
Certes, l’ONDAM pluriannuel, qui ne fait pas l’objet d’un vote
formel du Parlement, ne se substitue pas pour autant à l’ONDAM annuel
mais le Gouvernement lui accorde néanmoins une primauté, puisque les
prévisions de recettes et les objectifs de dépenses fixés chaque année
doivent en principe lui être conformes.
b)
Une gestion à moyen terme des négociations conventionnelles
On retrouve une perspective analogue, de recherche d’un horizon
temporel plus large, en ce qui concerne les négociations conventionnelles.
Un premier indice est lié aux effets reports. Certes, les
revalorisations tarifaires accordées par l’UNCAM ont par nature un
145. Article L. 111-11 du CSS.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
109
impact sur plusieurs exercices et la multiplication des accords depuis
2005 a conduit à une forte croissance de ces effets reports, qui sont passés
de 10 M€ en 2001, à près de 360 M€ en 2006.
Mais on note surtout que l’UNCAM a privilégié une stratégie
d’étalement des revalorisations tarifaires sur plusieurs exercices. Ainsi, la
mise en place de la CCAM technique, entamée par un avenant de février
2005 à la convention médicale, a été réalisée en plusieurs étapes, la
dernière étant intervenue au 1
er
janvier 2008.
En 2007, l’UNCAM a reporté l’entrée en vigueur de certaines des
revalorisations accordées aux professionnels de santé afin de minimiser
leur coût pour l’ONDAM de 2007. Elle a également souhaité renforcer à
cette
occasion
l’opposabilité
de
l’ONDAM
aux
partenaires
conventionnels.
Ainsi, l’avenant n° 23 à la convention médicale a fixé au 1
er
juin
2008 l’entrée en vigueur d’une nouvelle revalorisation de la consultation
de 1 euro, à condition que des marges de manoeuvre soient permises par
la LFSS pour 2008. Pour les infirmières, l’UNCAM a suivi la même
stratégie, en conditionnant en outre certaines des revalorisations
accordées dans le cadre de la nouvelle convention nationale du 22 juin
2007 à l’engagement de la profession dans la mise en place d’un
mécanisme d’encadrement de la liberté d’installation.
La LFSS pour 2008 accentue cette évolution en prévoyant que
toute mesure de revalorisation des tarifs d’honoraires, rémunérations et
frais accessoires entre en vigueur à l’expiration d’un délai de six mois
après l’approbation par arrêté (cf. supra).
2
–
Des outils insuffisants
Les décisions de revalorisation tarifaire tout comme les mesures
d’économie ont un impact à moyen terme sur les dépenses de santé
entrant dans le champ du sous-objectif soins de ville. Il est dès lors
essentiel que l’UNCAM dispose, par la fixation d’un ONDAM
pluriannuel crédible, d’un cadrage à moyen terme pour les négociations
avec les professions de santé. Or, l’ONDAM pluriannuel actuel ressort
davantage d’un outil de communication que d’un véritable levier de
régulation des dépenses de santé, en l’absence de cadrage des dépenses,
d’une part, de répartition des efforts de maîtrise d’autre part.
110
C
OUR DES COMPTES
a)
Un objectif irréaliste de rééquilibrage du solde de la branche
maladie à moyen terme
L’institution de l’ONDAM annuel devait permettre un pilotage des
dépenses d’assurance maladie basé sur la définition d’une norme de
progression. Ce nouveau mode de régulation visait à déconnecter les
dépenses de l’évolution des recettes, pour éviter la tentation de mesures
nouvelles en haut de cycle. La définition d’un ONDAM pluriannuel
s’inscrivait dans la même logique.
Pourtant, les deux premiers exercices de cadrage pluriannuel ont
privilégié un objectif de rééquilibrage du solde du régime général (ainsi
que de l’ensemble des régimes), à moyen terme. Le ministère de la santé
a ainsi proposé une évolution des dépenses de santé très volontariste.
Certes, l’annexe B à la LFSS pour 2008 remet partiellement en cause
cette approche en écartant un retour à l’équilibre de la branche maladie,
même à horizon 2012, pour le scénario central (ONDAM progressant
tendanciellement de 2 % sur la période). Elle maintient cependant cet
objectif de retour à l’équilibre pour le seul régime général dans le cadre
d’un scénario alternatif (ONDAM à +1,5 %).
Prévision de soldes de la branche maladie (tous régimes et régime
général)
2007
2008
2009
2010
2011
2012
Tous
régimes
-4,6
-2,8
0,5
LFSS 2006
(ONDAM : 2,2 %)
RG
-3,5
-1,7
0,6
Tous
régimes
-4,0
-2,7
-0,5
2,0
LFSS 2007
(ONDAM 2,2 %)
RG
-3,9
-2,3
-0,1
2,4
Tous
régimes
-6,6
-4,1
-4,8
-4,3
-3,7
-3,2
LFSS 2008
(ONDAM 2 %)
RG
-6,2
-4,2
-4,7
-4,1
-3,6
-3,0
Source :
Annexe B à la LFSS 2006, 2007 et 2008.
Cette évolution peut paraître heureuse, car les prévisions
pluriannuelles de soldes avaient précédemment été fixées à un niveau
irréaliste, même pour le scénario économique le plus prudent (qualifié de
bas), au risque de décrédibiliser l’exercice du cadrage pluriannuel
146
.
Mais, même avec des soldes négatifs prévus pour la branche maladie en
LFSS pour 2008, le cadrage pluriannuel qui lui est annexé requiert
146. Ainsi, pour les années 2007 et 2008, les prévisions de solde de la branche
maladie du régime général en LFSS 2008 conduisent à un accroissement de plus de
2 Md€ du déficit par rapport à celles de la LFSS 2006 ; et l’ampleur du décalage entre
les premières prévisions et celles de la LFSS 2008 s’accentue sensiblement pour 2009
et 2010, avec entre 5 Md€ et 6 Md€ de dégradation par an.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
111
encore, pour être respecté, des efforts d’économie massifs. Ainsi, les
projections tendancielles réalisée par la DSS au stade de l’élaboration de
la LFSS pour 2008 prévoyaient que le déficit « spontané » de la branche
maladie s’établirait à -13,7 Md€ en 2011, contre -3,6 Md€ prévus par
l’annexe B. Il faudrait donc dégager pour cette seule année une dizaine de
milliards d’euros d’économies.
Dès lors, l’ONDAM pluriannuel restant fixé en fonction d’un
objectif de rééquilibrage du solde à moyen terme, sa progression est donc
calculée en vue de cet objectif et non au regard de l’évolution
tendancielle
des
dépenses
d’assurance
maladie
et
des
mesures
susceptibles de l’infléchir.
Le cadrage pluriannuel annexé à la LFSS
pour 2006
prévoyait
ainsi une norme de progression moyenne de l’ONDAM de 2,2 % en
valeur pour la période 2007-2009. Le Gouvernement s’est trouvé de ce
fait dans l’impossibilité de proposer pour 2007 un ONDAM compatible
avec ce taux de progression, puisqu’il l’aurait conduit à retenir un taux de
1,8 % en valeur, soit une stabilité des dépenses de santé hors inflation,
supposant des mesures d’économies substantielles. Le PLFSS
pour 2007
a dès lors plutôt retenu une progression de l’ONDAM à 2,5 %, portée à
2,7 % par le Parlement. Bien que l’ONDAM se soit ainsi écarté de son
cadrage pluriannuel, il devrait être largement dépassé en exécution, la
note d’avril 2008 de la CCSS évaluant sa progression à 4,6 % en 2007.
Le cadrage pluriannuel annexé à la LFSS pour 2008 fixe pour sa
part l’ONDAM pluriannuel à un niveau qui pourrait paraître moins
volontariste en termes d’économies attendues, puisqu’il retient (selon les
scénarios) une progression de 1,5 % ou 2 % en volume (soit 3,1 % à
3,6 % en valeur, avec une inflation prévisionnelle fixée à 1,6 %)
147
. Mais
cette progression est inférieure à celle qui était attendue pour le PIB.
Compte tenu de l’estimation initiale des progressions tendancielles
(+5,4 % en valeur pour la CNAMTS, soit près de 4 % en volume), on voit
que l’objectif 2008 resterait donc difficile à atteindre, faute de mesures
d’économie correspondant à l’inflexion visée et dans un contexte où se
profile une nouvelle augmentation de la valeur de la consultation
148
.
147. Ce choix d’une norme de progression en volume, s’il permet d’écarter le risque
d’une erreur de prévision de l’inflation, rend cependant moins lisible son articulation
avec l’ONDAM annuel qui est exprimé en valeur, le Parlement votant un montant de
dépenses pour l’exercice à venir.
148. Pour autant, la ministre de la santé n’a pas attendu que le comité d’alerte rende
un avis sur l’évolution des dépenses de santé pour annoncer en mars 2008 que les
conditions étaient réunies pour porter le tarif des médecins généralistes à 23 €.
112
C
OUR DES COMPTES
b)
Une documentation insuffisante des efforts de maîtrise
L’ONDAM pluriannuel fixé en annexe à la LFSS apparaît au total
insuffisamment documenté pour constituer un levier de régulation
contraignant pour l’ensemble des acteurs.
Dans cette annexe, les prévisions de dépenses de la branche
maladie se distinguent, en ce qu’elles se fondent sur un ONDAM
pluriannuel qui constitue un taux d’évolution après mesures d’économie
alors que les prévisions de dépenses des branches famille et retraite
reposent seulement sur l’évolution tendancielle. Or, le passage d’une
évolution tendancielle des dépenses d’assurance maladie à un objectif
incluant des mesures d’économie n’est pas explicité, ce qui ne permet pas
d’apprécier les efforts de redressement à réaliser sur les quatre années à
venir.
On peut noter comme un point positif qu’une contre-expertise s’est
récemment développée sur ce sujet, qui permettrait d’améliorer la qualité
des
prévisions
tendancielles :
le
HCAAM,
le
conseil
d’analyse
économique et la CNAMTS ont réalisé sur la période récente des
exercices de prévision à moyen et long terme de l’évolution des dépenses
de santé, en retenant des facteurs de progression parfois différents.
Pour autant, jusqu’ici, l’annexe B ne détaille pas les mesures
d’économie envisagées pour « tenir » l’ONDAM annuel et n’en précise
pas davantage le montant. Dès lors le cadrage pluriannuel ne paraît pas en
mesure de constituer l’outil de programmation pourtant indispensable des
économies sur plusieurs années, afin que la mise en oeuvre progressive
des réformes permette d’infléchir durablement le comportement des
prescripteurs et des consommateurs de soins.
________________________
SYNTHESE
_________________________
Le choix de déconnecter les négociations conventionnelles de
l’ONDAM voté annuellement par le Parlement comme la volonté de les
inscrire dans un cadre de gestion pluriannuel, n’ont pas permis d’assurer
le respect du sous-objectif soins de ville en 2006 comme en 2007.
Les marges de manoeuvre des partenaires conventionnels ont été
excessives, faute d’encadrement préalable par l’ONDAM et d’un suivi
rigoureux a posteriori. Cette situation a contribué à renforcer la tendance
de l’Etat à réinvestir progressivement leur champ. Les conditions
d’élaboration des ONDAM annuel et pluriannuel n’ont pas permis de
fiabiliser cet outil, qui fait l’objet d’un affichage volontariste non appuyé
sur des mesures d’économies crédibles. Il ne parvient donc pas à peser
durablement sur les négociations conventionnelles.
L
’
OBJECTIF NATIONAL DE DEPENSES D
’
ASSURANCE MALADIE
113
Dans ce contexte, il conviendrait que l’Etat réexamine dans son
ensemble le dispositif de régulation des soins de ville, afin d’une part de
fiabiliser l’ONDAM et de renforcer son caractère opposable et d’autre
part de mieux lier à celui-ci le programme des négociations et d’encadrer
les revalorisations tarifaires ainsi accordées aux professionnels de santé.
Le cadrage pluriannuel annexé à la loi de financement, pour peu qu’il soit
au préalable suffisamment fiabilisé, pourrait fournir à l’UNCAM une
trajectoire à moyen terme des revalorisations qu’elle serait habilitée à
accorder aux professions de santé dans le cadre du renouvellement de
leurs conventions nationales pour cinq ans.
Enfin, le non respect des règles du jeu fixées par la loi de 2004
conduit à s’interroger sur leur pertinence. La Cour a déjà observé que la
délégation accordée aux outils conventionnels est excessive. Elle constate
ici qu’elle n’est pas respectée, ce qui contribue à enlever sa cohérence au
dispositif de régulation des dépenses.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
14.
Améliorer la sincérité de l’ONDAM et du cadrage pluriannuel
annexé à la LFSS, en documentant l’évolution tendancielle des dépenses
d’assurance maladie et les économies sous-jacentes.
15.
Instaurer (dans le rapport annuel de l’UNCAM transmis en juin au
Parlement et au Gouvernement) une obligation d’information sur les
résultats de la maîtrise médicalisée et sur le coût des revalorisations
tarifaires.
16.
Tenir compte des résultats de la maîtrise médicalisée pour l’octroi
de revalorisations tarifaires.
115
Chapitre III
Les programmes de qualité et
d’efficience
LES PROGRAMMES DE QUALITE ET D
’
EFFICIENCE
117
_____________________
PRESENTATION
_______________________
La loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de
la sécurité sociale a redéfini la liste des rapports et annexes qui
accompagnent le PLFSS de l’année et a notamment prévu que la première
des neuf annexes présenterait les « programmes de qualité et d’efficience
(PQE) relatifs aux dépenses et aux recettes de chaque branche de la
sécurité sociale ».
Présentés incomplets à titre exploratoire en annexe au PLFSS pour
2007, les PQE ont été joints pour la première fois au PLFSS pour 2008,
conformément au calendrier de mise en oeuvre prévu par la loi organique.
Bien au-delà d’une obligation formelle de présentation de données,
les PQE traduisent une démarche ambitieuse qui vise à la fois à améliorer
l’information du Parlement et à contribuer à l’analyse de la performance
des politiques sociales.
Pour cette première année, la Cour a donc examiné les choix
effectués par les administrations pour mettre en oeuvre ces objectifs et à
identifier les évolutions possibles, à partir d’un examen de cinq PQE
(maladie, accidents de travail, retraite, famille et financement).
I - Les conditions de mise en oeuvre
La loi organique a défini des objectifs ambitieux mais très
généraux, ce qui a rendu nécessaire des choix, de principe ou de méthode,
pour sa mise en oeuvre.
A
–
Les objectifs de la loi organique
1
–
Les textes
L’article LO 111-4 du code de la sécurité sociale, modifié par
l’article 2 de la loi organique de 2005, définit dans son III - 1° les PQE :
« sont jointes au PLFSS de l’année des annexes : 1° présentant
pour les années à venir les programmes de qualité et d’efficience relatifs
aux dépenses et aux recettes de chaque branche de la sécurité sociale ; ces
programmes comportent un diagnostic de situation appuyé notamment sur
les données sanitaires et sociales de la population, des objectifs retracés
au moyen d’indicateurs précis dont le choix est justifié, une présentation
des moyens mis en oeuvre pour réaliser ces objectifs et l’exposé des
C
OUR DES COMPTES
118
résultats atteints lors des deux exercices clos et le cas échéant, lors de
l’année en cours (...) ».
L’exposé des motifs de la loi organique précisait qu’il s’agissait
« d’introduire une démarche objectifs-résultats, dans le prolongement de
celles engagées par les conventions d’objectifs et de gestion liant l’Etat et
les caisses nationales de sécurité sociale et en s’inspirant de la démarche
introduite par la loi organique relative aux lois de finances » (LOLF) du
1
er
août 2001.
Les divers éléments constitutifs de cette démarche sont donc :
-
« un diagnostic de situation appuyé notamment sur les données
sanitaires et sociales de la population », qui étend aux autres branches
la transmission de données synthétiques sur les différentes politiques
sociales, qui n’existait que pour la seule branche maladie (ancienne
annexe A) ;
-
« des objectifs retracés au moyen d’indicateurs précis dont le choix
est justifié », qui constituent la véritable novation, en cherchant à
introduire une démarche de performance fondée sur des objectifs
quantifiés dans le champ des politiques sociales ;
-
enfin « une présentation des moyens mis en oeuvre pour réaliser ces
objectifs
et
l’exposé
des
résultats
atteints »,
mettant
plus
spécifiquement l’accent sur les leviers d’action et sur les résultats des
politiques.
2
–
L’interprétation donnée sur le périmètre à couvrir
Des objectifs aussi complexes et ambitieux devaient être
interprétés et c’est d’ailleurs pourquoi un projet exploratoire, précédé
d’une introduction méthodologique, a été présenté en 2006 en annexe au
PLFSS
pour
2007,
puis
soumis
à
l’examen
des
commissions
parlementaires. Plusieurs questions liées au périmètre retracé par les PQE
devaient en particulier être tranchées.
a)
Le choix d’une extension à l’ensemble de la protection sociale
Devait-on
dans
le
PQE
retraites
intégrer
les
retraites
complémentaires ou s’en tenir aux seuls régimes de base ? Devait-on dans
le PQE familles se limiter aux seules « prestations familiales », au sens du
code de la sécurité sociale ou intégrer d’autres prestations dont le montant
tient compte du nombre d’enfants et qui sont servies par les caisses
d’allocations familiales, comme les allocations logement ou le revenu
minimum d’insertion (RMI) ? Devait-on intégrer l’effet du quotient
familial et plus largement les dépenses fiscales en faveur des familles ?
LES PROGRAMMES DE QUALITE ET D
’
EFFICIENCE
119
Ces questions, parmi d’autres, n’ont pas reçu de réponse
univoque : les données présentées, dans la partie introductive de cadrage
comme dans celle relative aux objectifs et aux indicateurs qui les
accompagnent, correspondent à un périmètre variable.
Pour la branche famille, associé à l’objectif n° 2 « d’aider les
familles vulnérables », l’indicateur n° 2-1 « impact redistributif des
prestations familiales, des minima sociaux et des allocations logement
pour des ménages de même composition familiale » correspond à une
définition large de la politique familiale. Elle est justifiée notamment par
l’incidence importante des allocations logement sur cet effet redistributif.
De même, pour la branche retraite, les deux indicateurs associés à
l’objectif n° 1 « d’assurer un niveau de vie adapté aux retraités », le
« taux de remplacement net pour une carrière entière au SMIC » (n° 1-1),
ou l’indicateur de « comparaison entre les ressources des retraités et des
actifs » (n° 1-2) intègrent les pensions versées par les régimes
complémentaires obligatoires, voire les autres ressources des personnes
âgées. A l’inverse, l’un des indicateurs associés à l’objectif n°3 « garantir
la solidarité entre retraités », relatif « à la part des nouvelles pensions du
régime général portées au minimum contributif » ne correspond qu’au
seul périmètre du régime général.
Il ne pouvait y avoir de réponse unique et de périmètre invariable,
selon les objectifs et leurs diverses déclinaisons en indicateurs. D’une
manière générale, cependant, le choix a été fait le plus souvent d’une
extension du périmètre décrit à l’ensemble des opérateurs de la protection
sociale obligatoire, régimes de base et complémentaires. Selon la présen-
tation méthodologique des PQE jointe au PLFSS pour 2007 l’objectif est
en effet de dépasser le champ des régimes retracés par les lois de
financement et « d’exprimer une politique globale dont la LFSS n’est
qu’un des instruments, afin que le PLFSS puisse constituer le lieu d’un
débat transversal et global sur les politiques sociales. […] Les PQE sont
plus larges que les projets annuels de performance (prévus par la LOLF et
limités aux financements de l’Etat) dans la mesure où la démarche
retenue se veut globale ».
b)
La difficulté d’identifier les principaux responsables
La conséquence logique de ce premier choix est de rendre plus
difficile l’identification des responsables des politiques. La question est
déjà complexe dans le champ des politiques de l’Etat, pour les
C
OUR DES COMPTES
120
programmes de la loi de finances
149
. Mais il est encore plus difficile de
désigner un responsable unique pour des objectifs aussi larges que ceux
inclus dans les PQE. En outre, comment traduire la responsabilité
particulière des partenaires sociaux par exemple pour des objectifs
comme ceux de « diminuer le taux d’accidents de travail » ou
« d’améliorer leur réparation », inclus dans le PQE de la branche
accidents de travail et maladies professionnelles ? Or un objectif général,
signalé dans la note précitée comme « premier », est bien de « moderniser
la gestion publique par une responsabilisation des acteurs ».
Dans le document exploratoire, produit à l’automne 2006, aucun
responsable n’était identifié. Dans l’annexe produite à l’automne 2007, en
revanche, sont identifiés pour chaque indicateur, non seulement les
producteurs techniques, responsables de la sélection et de la fiabilité des
données (la DREES est le plus souvent indiquée à ce titre) mais aussi
« les
responsables
administratifs
portant
les
politiques
à
titre
principal »
150
.
Sont ainsi cités à ce titre, pour les différents indicateurs du PQE
famille, la DSS ou la DGAS (à 5 reprises), la CNAF (à 4 reprises) ou
encore la DGEFP
151
ou la CNAMTS. De même, la CNAMTS (citée 11
fois) et la DHOS (citée 8 fois) sont le plus souvent indiqués (parfois
d’ailleurs conjointement) au regard des 23 indicateurs du PQE maladie.
Cela ne signifie pas pour autant, bien entendu, que les directeurs de ces
deux institutions puissent être considérés comme responsables du « taux
d’effort et du reste à charge des familles selon le mode de garde, le
revenu et la configuration familiale, »
152
ou des « inégalités territoriales
de répartition des médecins spécialistes »
153
, pour ne donner que ces
seuls exemples, même s’ils ont évidemment un rôle important à jouer.
c)
L’introduction d’un PQE financement
Un troisième choix a été fait, portant sur le nombre de PQE
présentés. La loi organique avait prévu cinq PQE : quatre pour chacune
149. Comme le soulignent les rapports successifs de la Cour sur la gestion budgétaire.
Voir en dernier lieu le rapport pour 2007, pp. 113-115.
150 . Les PQE annexés au PLFSS pour 2008 ont ainsi cherché à intégrer les
observations faites sur ce point par les commissions parlementaires.
151. Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle.
152 . Indicateur 3-3 associé à l’objectif 3 « concilier vie familiale et vie
professionnelle ».
153. Sous-indicateur de l’indicateur n° 1-1 associé à l’objectif de lutte contre « les
inégalités territoriales », qui constitue l’objectif n° 1 du PQE Maladie.
LES PROGRAMMES DE QUALITE ET D
’
EFFICIENCE
121
des branches (maladie, AT-MP, retraite et famille) et un cinquième relatif
à « l’invalidité et aux dispositifs gérés par la CNSA »
154
. En réalité, pour
le PLFSS 2007, comme pour celui de 2008, l’annexe n° 1 a distingué six
programmes en ajoutant au texte de la loi organique un PQE relatif au
« financement ».
Cet ajout s’explique par la particularité de la mission de
recouvrement, qui n’est pas une « branche », mais qui pour le régime
général est organisée de manière distincte, donne lieu à une COG
particulière et dont l’importance justifie un suivi particulier.
On peut se demander cependant si la présentation de ce PQE
n’aurait pas dû être distinguée, par rapport aux autres, en privilégiant les
données de cadrage et en limitant les objectifs : on voit mal en effet
quelle peut être la portée de l'objectif de « soutenabilité financière », dans
la mesure où les responsables administratifs à titre principal, selon
l’expression des PQE, n’ont qu’une responsabilité limitée en la matière,
les choix structurants relevant à l’évidence du niveau politique.
B
–
La méthodologie retenue
1
–
La référence aux projets annuels de performance
La définition d’indicateurs pour chacun des objectifs (voire des
sous-objectifs) s’inspire du travail accompli pour les programmes joints
aux lois de finances, en application de la LOLF. Chaque année en effet
sont désormais annexés au projet de loi de finances initiale des « projets
annuels de performance » (PAP), qui donnent lieu ensuite à un bilan sous
la forme des « rapports annuels de performance » (RAP) annexés au
projet de loi de règlement. Les PQE annexés aux PLFSS transposent ainsi
cette démarche, en condensant les deux temps de la prévision et du bilan
en un seul.
Ainsi, dans le PQE famille, on distingue quatre « objectifs », de
portée très générale : « contribuer à la compensation financière des
charges de famille », « aider les familles vulnérables », « concilier vie
familiale et vie professionnelle », enfin « garantir la viabilité financière
154. L’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale énumère les quatre branches (du
régime général), qui correspondent aux quatre PQE. Un amendement parlementaire en
a ajouté un cinquième relatif aux « dépenses et aux recettes des organismes qui
financent et gèrent des dépenses relevant de l’objectif national des dépenses
d’assurance maladie », cette périphrase désignant en fait les dépenses relatives à
« l’invalidité et aux dispositifs gérés par la CNSA », selon le titre du fascicule qui lui
est consacré.
C
OUR DES COMPTES
122
de la branche ». Pour certains de ces objectifs, on a distingué des sous-
objectifs
155
: par exemple, au sein de « l’aide aux familles vulnérables »
(objectif n° 2), « la redistribution verticale » et « l’action sur la
pauvreté ». Et pour chacun, ont été sélectionnés les indicateurs jugés les
plus pertinents pour rendre compte du bon avancement des politiques
considérées.
Exemple de la structure des objectifs et indicateurs des PQE
PQE famille :
-
avec 4 objectifs dont « aider les familles vulnérables »
o
avec 2 sous-objectifs dont « action sur la pauvreté » ;
square4
avec 3 indicateurs dont % d’enfants sous le seuil de
pauvreté ;
•
avec 2 sous-indicateurs (toutes familles et seules
familles monoparentales).
2
–
L’accent mis sur les indicateurs d’efficacité
a)
Un choix justifié par l’existence des COG
Le guide méthodologique pour l’application de la LOLF, commun
au Gouvernement et au Parlement, distingue trois types d’indicateurs :
-
les indicateurs d’efficacité, qui rapportent les résultats aux objectifs
fixés ;
-
les indicateurs d’efficience, qui rapportent les résultats aux moyens
mis en oeuvre ;
-
et les indicateurs de qualité de service.
Or, comme on le perçoit d’ailleurs dans ces exemples, les objectifs
et les indicateurs présentés dans les PQE pour 2008 ont visé surtout à
apprécier l’efficacité, entendue de manière très globale comme l’atteinte
des objectifs finaux d’une politique, au risque d’ailleurs de s’écarter de la
lettre de la loi et des termes de « qualité et d’efficience ».
Ce parti a été justifié dans le document introductif pour 2007 : si
« les PAP ont ainsi pour objet d’approcher la performance de la gestion
publique […] cette démarche relève des COG dans le champ de la
LFSS ». La DSS en conclut que les PQE n’ont pas vocation à interférer
155. Aucun terme n’est indiqué pour traduire une présentation qui regroupe souvent
(mais pas de manière systématique) plusieurs indicateurs au sein d’un même objectif.
LES PROGRAMMES DE QUALITE ET D
’
EFFICIENCE
123
dans la gestion des caisses de sécurité sociale et écarte donc, sauf
exception
156
, les objectifs et indicateurs d’efficience dans la gestion.
De fait, les COG, qui font d’ailleurs l’objet d’une annexe distincte
jointe au PLFSS
157
, contiennent déjà, pour les différentes branches du
régime général et pour les régimes les plus importants, les indicateurs qui
permettent de suivre la traduction en actions des orientations stratégiques
fixées par accord entre les caisses et les tutelles. Un accent mis sur les
objectifs de « qualité de service » ou sur le coût de gestion aurait conduit
au moins pour partie à dupliquer sans profit des données déjà disponibles,
avec en outre le risque d’une interférence dans un calendrier et un
dialogue conventionnel bien établis.
Pour autant, d’autres indicateurs d’efficience sont concevables.
Mais ils sont complexes à construire dès lors qu’ils sont limités au champ
des dépenses financées par la sécurité sociale.
156. Quelques doublons existent entre les indicateurs inclus dans les PQE et ceux des
COG : il en est ainsi en particulier pour le PQE financement, pour lequel trois
indicateurs - et notamment le taux des restes à recouvrer - sont extraits de la COG
passée entre l’Etat et l’ACOSS. D’autres, comme le coût de 100 € recouvrés par le
régime général, en sont transposés. C’est également le cas pour le PQE maladie, en ce
qui concerne les indicateurs relatifs à la gestion du risque.
157. Le contenu de cette annexe (n° 2) a évolué, en répondant partiellement à la
commission des finances de l’Assemblée nationale, qui avait demandé « pour une
lecture croisée des deux annexes, que la structure de l’annexe 2 (soit) revue, afin
d’être présentée par branche et non par génération de conventions d’objectif et de
gestion ».
C
OUR DES COMPTES
124
b)
L’incidence de la démarche de « coordination ouverte »
Une autre raison, plus ponctuelle, de privilégier l’appréciation de
l'efficacité a été le souhait d’inscrire les PQE dans la démarche
européenne de « méthode ouverte de coordination »
158
(MOC). Plusieurs
des objectifs et indicateurs associés retenus par les PQE sont dérivés de
ces travaux : ainsi, l’objectif d’« assurer un niveau de vie adapté aux
retraités » ou celui d’« accroître l’emploi des salariés âgés », la cible
retenue étant même dans ce dernier cas commune aux Etats membres
(que le taux d’emploi des personnes âgées de 55 à 64 ans dépasse 50 %
en 2010). Il en est de même, en ce qui concerne l’incidence des politiques
familiales sur le taux de pauvreté des ménages, ou pour plusieurs
objectifs retenus dans le domaine de la santé.
C
–
Une mise en oeuvre progressive
1
–
Des données encore manquantes
De manière générale et tout particulièrement pour le choix des
données de cadrage, ont été retenues des données ou des indicateurs déjà
disponibles ou qui pouvaient l’être assez aisément afin d’assurer un
renseignement rapide des PQE et d’en minimiser le coût de production.
De ce fait, le choix des indicateurs et des cibles, seulement
esquissé pour 2007, est plus complet dans le PLFSS 2008, même si
certains indicateurs ne sont pas encore produits en 2008.
Dans le cas de la gestion hospitalière par exemple, abordé dans le
PQE maladie, seuls deux sous-indicateurs étaient renseignés en 2007, 11
indicateurs ou sous-indicateurs restant sans fiche descriptive ou sans
données chiffrées. En 2008, sur les 14 indicateurs et sous-indicateurs
relatifs aux secteurs hospitaliers, 12 font l’objet de données chiffrées.
158. Cette démarche consiste à décider en commun d’objectifs généraux dans le
champ des politiques sociales et à les traduire en indicateurs comparables. Bien que la
protection sociale ne relève pas des compétences de l’Union européenne, les chefs
d’Etat et de Gouvernement réunis à Lisbonne en mars 2000 ont retenu le principe
d’une coordination reposant sur une méthode commune : « les Etats membres
s’accordent sur des thèmes [...] et sur les objectifs communs [...]. Les progrès des
Etats membres dans la voie des objectifs ainsi déterminés font l’objet d’un suivi à
l’aide d’indicateurs qui sont ainsi déterminés en commun ». Le comité de la
protection sociale, qui regroupe des hauts fonctionnaires des Etats membres, a adopté
en mai 2006 une liste d’indicateurs sociaux, destinés à mesurer les progrès dans les
domaines suivants : accès aux soins, inclusion sociale et pensions. Cette démarche a
en outre introduit une distinction (qui n’existe pas pour les PAP) entre indicateurs de
contexte et indicateurs de performance, plus spécifiques aux politiques engagées.
LES PROGRAMMES DE QUALITE ET D
’
EFFICIENCE
125
Par ailleurs, un indicateur initialement envisagé en juin 2006 était
le ratio rapportant la durée « cotisée » à la durée « validée ». Il n’a pas été
renseigné. La commission des affaires sociales du Sénat a souhaité son
remplacement par le nombre d’années validées « gratuitement » par les
principaux régimes. Cet indicateur n’a pas encore été produit. Or, même
si le dénombrement des trimestres validés « gratuitement » est en pratique
relativement complexe à calculer, cette donnée apparaît particulièrement
pertinente au regard de l’objectif « garantir la viabilité financière des
régimes de retraite ».
Le tableau qui suit résume pour les six PQE les données fournies
par catégories et témoigne de l’ampleur du travail engagé :
Nombre de données annexées au PLFSS pour 2008 par PQE
PQE
Indicateurs
de cadrage
Objectifs
Sous-
objectif
(Sous)
indicateurs
associés
Cibles chiffrées
(5/4)
(1)
(2)
(3)
(4)
(5)
Maladie
11
5
11
43
14 (33%)
AT-MP
14
3
7
15
0
Retraite
17
5
10
27
6 (22%)
Famille
14
3
7
15
3 (20%)
CNSA
7
4
-
11
0
Financement
14
5
6
24
5 (21%)
Total
77
25
41
135
25 (18%)
Source :
Cour des comptes, à partir des PQE
Malgré quelques progrès entre les PQE pour 2007 et ceux
présentés pour 2008, la définition des cibles chiffrées est encore très
insuffisante : moins de 20 % des indicateurs. Et parmi eux, de nombreux
indicateurs relatifs à la « soutenabilité financière » des branches ou aux
recettes du PQE financement paraissent assez factices. Pour le reste, la
plupart des indicateurs sont seulement accompagnés d’orientations encore
vagues (évolution souhaitée « en hausse » ou « en baisse »).
De même, force est de constater que les PQE 2008, contrairement
aux termes de la loi organique, ne contiennent encore ni présentation des
moyens mis en oeuvre pour atteindre les objectifs énoncés ni, dans
nombre de cas, les résultats pluriannuels permettant de mesurer des
évolutions.
C
OUR DES COMPTES
126
2
–
Des pratiques diverses selon les PQE
La présentation des annexes, désormais distinguées au sein d’un
fascicule pour chaque PQE, a été voulue homogène. Pour autant, on note
que les six PQE ne sont pas tous au même niveau d’élaboration.
L’effort en général accompli pour compléter les données par des
comparaisons internationales n’a ainsi pas été fait pour le PQE relatif aux
accidents de travail et aux maladies professionnelles (alors que de telles
comparaisons pourraient justement mettre en évidence que la France
connaît un taux d’accidents graves supérieur à la moyenne des pays de
l’OCDE et de l’Union européenne).
Enfin, on constate que le degré de concertation, par exemple avec
les caisses nationales du régime général, a été très variable d’un PQE à
l’autre : si la CNAF a été associée à la réflexion et à la sélection des
objectifs et des indicateurs, en revanche la CNAMTS ne l’a été que très
peu pour le PQE maladie.
Au total, des marges de progrès évidentes apparaissent, ne serait-ce
que par la généralisation à tous les PQE des « meilleures pratiques », de
concertation élargie ou de mobilisation des données existantes au plan
international. Ces progrès resteront cependant trop limités s’ils ne
s’accompagnent pas d’un réexamen plus approfondi.
II - Les améliorations à apporter aux PQE
Deux objectifs sont poursuivis par les PQE : la production d’une
information synthétique et diversifiée, couvrant l’ensemble des politiques
retracées dans les PLFSS, d’une part ; et d’autre part la définition
d’objectifs et de cibles susceptibles de mobiliser les acteurs de ces
politiques, dans leur diversité. Pour chacun de ces deux objectifs, des
marges de progrès peuvent être mises en évidence.
A
–
Mieux distinguer les données de cadrage des
objectifs
Un premier progrès serait de mieux séparer les données à visée
informative de celles qui relèvent d’objectifs fixés aux caisses nationales
ou à leurs tutelles.
D’une manière générale, ne devraient figurer dans la deuxième
partie (« objectifs-résultats ») de chaque PQE que des indicateurs
susceptibles d’actions correctives menées par le ou les responsables et
conduisant à des résultats mesurables. Or bien souvent, les leviers,
LES PROGRAMMES DE QUALITE ET D
’
EFFICIENCE
127
permettant aux responsables désignés d’agir, paraissent limités ou de très
long terme : ainsi pour « le taux d’emploi (comparé) des femmes et des
hommes de 15 à 64 ans », inséré dans le PQE famille ; ou pour l’âge
effectif du départ à la retraite, inclus dans le PQE retraite comme relevant
de la responsabilité de la CNAVTS. Il conviendrait que ces indicateurs,
dès lors que le lien avec l’action des administrations et organismes
responsables est trop indirect ou trop lointain, soient considérés comme
des données de cadrage et renvoyés dans la première partie.
En outre, l’inclusion de données figurant dans les deux parties
devrait s’accompagner d’une exigence plus forte, en ce qui concerne leur
fiabilité. Or on constate dans quelques cas que cette rigueur est
insuffisante. Ainsi, les résultats de l’indicateur du PQE maladie relatif au
« taux d’atteinte des objectifs conventionnels en matière de maîtrise
médicalisée » sont fournis par la CNAMTS, alors que la DSS les sait
surévalués
159
.
B
–
Donner un contenu plus opérationnel aux PQE
L’objectif principal, pour les indicateurs des PQE comme pour
ceux de la LOLF, ne se limite pas à améliorer l’information, mais est bien
de contribuer à accroître la performance des politiques publiques. Leur
apport réel dépend cependant d’une démarche d'ensemble : analyse
stratégique préalable et définition d'objectifs suffisamment précis et
opérationnels, choix d'indicateurs pertinents, enfin équilibre entre les
actions visant l'efficacité et celles visant l'efficience.
1
–
Des priorités stratégiques mieux explicitées
Les différents PQE ont identifié des objectifs, que l’on peut
qualifier de « stratégiques », mais qui correspondent en réalité plus à des
grands domaines d’action qu’à des choix politiques formalisés. Les
options qui pourraient définir une véritable stratégie de branche ne sont
pas explicitées : pour ne donner qu’un exemple emprunté au PQE
accidents de travail, faut-il différencier le niveau des cotisations selon
leur fréquence ou plutôt développer la prévention en entreprises ? Les
indicateurs cités à l’appui de cet objectif (dans le PQE AT-MP) illustrent
certes ces deux différents aspects, mais sans qu’ils soient articulés dans
une vision d’ensemble comportant la définition de priorités.
La démarche des PQE n’a pu encore, dans son état actuel, se
fonder sur une analyse stratégique ministérielle ou de branche. Il
conviendrait donc qu’une telle stratégie soit explicitée.
159. Cf. chapitre II relatif à l’ONDAM.
C
OUR DES COMPTES
128
En second lieu, cette stratégie ne peut être mise en oeuvre que si
elle est déclinée sous la forme d’objectifs et de sous-objectifs bien définis
et dont la réalisation peut être suivie de manière précise. Or tel n’est pas
le cas à ce jour.
On peut même envisager que certains au moins des objectifs ou
des sous-objectifs fassent l'objet d'une déclinaison par opérateurs ou par
territoires. Une description de la chaîne de décisions, destinée à mettre en
oeuvre les objectifs généraux, paraîtrait également pouvoir compléter de
manière utile la présentation actuelle.
2
–
Des progrès attendus dans le choix des indicateurs et la
détermination des cibles
Les indicateurs retenus (et encore plus nettement les cibles fixées)
traduisent souvent de manière encore décevante les enjeux des branches.
Ainsi, en ce qui concerne l’accès à l’offre de garde pour la petite enfance
(suivis dans le PQE famille, dont il constitue une des dimensions
essentielles) : l'un des indicateurs relatifs à l'offre, très global, se voit fixer
une cible correspondant aux normes européennes mais nettement
inférieure au niveau déjà atteint, alors que l'objectif national est bien de
progresser dans l'accueil des jeunes enfants.
Autre exemple de l'incohérence des cibles affichées, la cible
associée à l'indicateur de l'ONDAM, dans le PQE maladie, est que le
dépassement de l'ONDAM n'aille pas au-delà de 0,75 %, ce qui paraît
contradictoire avec la nécessité de respecter le vote du Parlement
160
.
De manière générale, on relève une réflexion encore très
insuffisante sur le lien entre les indicateurs, les cibles et les capacités des
responsables identifiés à progresser dans la direction retenue.
Certes, le choix des indicateurs associés aux objectifs est destiné à
évoluer. Mais il conviendrait que cette évolution soit accompagnée par
une instance d’appui méthodologique afin d’améliorer le contenu des
PQE. Il pourrait être envisagé par exemple de s’inspirer de l’expérience
acquise dans les autres domaines de la gestion publique par le comité
interministériel d’audit des programmes (CIAP), constitué pour évaluer
périodiquement dans le cadre de la LOLF le découpage des programmes
et actions, le choix des objectifs et indicateurs associés et la qualité et la
fiabilité des données chiffrées produites. Un organisme analogue au CIAP
pourrait remplir ce type de mission pour les PQE.
160. Cf. chapitre II relatif à l’ONDAM.
LES PROGRAMMES DE QUALITE ET D
’
EFFICIENCE
129
3
–
Développer les indicateurs d’efficience
La volonté déjà signalée de démarquer les PQE des COG s'est
traduite
par
une
prédominance
des
indicateurs
d'efficacité.
Or
l'appréciation de la performance gagne à associer des indicateurs
complémentaires, certains relatifs à l'efficacité, d'autres relatifs à
l'efficience (on peut en effet considérer pour simplifier que la
préoccupation de qualité correspond tantôt à la recherche d’efficacité,
tantôt à la recherche d’efficience).
Certes, les COG signées entre les caisses nationales du régime
général et des principaux autres régimes couvrent une large partie de ces
aspects. Mais certains indicateurs d'efficience, qui ne relèvent pas des
COG, paraîtraient très utiles. Ainsi, s'agissant de l'offre de places pour la
petite enfance, un indicateur (n° 3-3) compare les taux d’effort des
familles selon les modes de garde. Les écarts de coûts selon ces mêmes
modes, quant à eux, ne sont que signalés dans un simple indicateur de
cadrage (n° 9 relatif au « coût des différents modes de garde pour les
finances publiques »), ce qui semble implicitement donner à penser que le
principe du « libre choix » conduit à considérer comme seconde la
question de l’efficience de ces modes de garde.
De même pour les indicateurs relatifs aux politiques de prévention,
incluses dans le PQE maladie : la mise en regard des moyens, d'ailleurs
expressément prévue par la loi organique, complèterait utilement les
données fournies sur certains de ces objectifs.
________________________
SYNTHESE
_________________________
La loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de
la sécurité sociale a engagé une démarche allant au-delà du seul souci de
lisibilité de l’action publique et de meilleure accessibilité des données et
visant en particulier « à introduire une démarche objectifs-résultats (…) en
s’inspirant de la démarche introduite par la loi organique relative aux lois
de finance (LOLF) ». Comme pour cette dernière, la mise en oeuvre d’une
telle réforme est nécessairement progressive.
Cependant, pour atteindre les objectifs affichés et afin que les PQE
ne restent pas des documents d’information synthétisant pour le Parlement
des données disponibles par ailleurs, des progrès sont nécessaires : pour
décliner les objectifs stratégiques en objectifs opérationnels, pour mieux
décrire les chaînes de responsabilités et définir des cibles plus précises et
mobilisatrices. Un accent moins exclusif sur les indicateurs d'efficacité
permettrait en outre de donner sa place à la recherche d'une plus grande
efficience.
C
OUR DES COMPTES
130
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
17.
Décliner les orientations générales des PQE en objectifs précis et
opérationnels, pouvant faire l’objet d’un suivi.
18.
Décrire pour chaque objectif la contribution de chacun des acteurs
concernés aux décisions et à la mise en oeuvre.
19.
Compléter
les
indicateurs
d'efficacité
par
des
indicateurs
d'efficience qui ne soient pas redondants avec ceux des COG.
20.
Prévoir une mission d’appui méthodologique pour améliorer les
objectifs et indicateurs des PQE.
131
Chapitre IV
Les contrôles sous la surveillance de la
Cour
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
133
I - Les contrôles classiques des COREC
_____________________
PRESENTATION
______________________
En application de l’article L.O. 132-3 du code des juridictions
financières, la Cour présente chaque année une synthèse des rapports et
avis produits par les comités régionaux d’examen des comptes des
organismes de sécurité sociale (COREC) qui réunissent dans chaque
région, sous la présidence du trésorier payeur général de région, le
directeur régional des affaires sanitaires et sociales (DRASS) et le chef du
service régional de l’inspection du travail, de l’emploi et de la protection
sociale agricole (SRITEPSA). Ainsi qu’il a été exposé dans les rapports des
années précédentes, ce dispositif est supprimé depuis le 1
er
janvier 2008.
Pour leur dernière année de fonctionnement, les COREC ont eu en
2007 une activité très diversifiée. Ils ont rendu 41 rapports traditionnels et
30 au titre du futur réseau d’alerte, soit un total de 71 rapports d’audit. A
cette activité se sont ajoutées trois enquêtes thématiques : mise en place du
contrôle interne dans les caisses de MSA (22 rapports), examen des
créances prescrites (50 rapports), suivi de la mise en place des nouveaux
réseaux du régime social des indépendants (7 rapports) et du régime
minier (3 rapports)
161
, soit un total de 82 enquêtes. En outre, la Cour a
conduit de son côté six audits dans le cadre du réseau d’alerte.
Il est rendu compte ci-après de ces différents contrôles.
A
–
Les contrôles réalisés
Le nombre des organismes de sécurité sociale a continué de
diminuer entre fin 2006 et fin 2007 (-17%) en raison essentiellement de la
réforme intervenue dans le régime maladie des IEG. En revanche, peu de
mouvements ont été observés dans le régime général entre les deux
exercices même si la branche recouvrement, dont l’objectif est de
parvenir à une URSSAF par département en 2009, a initié de nouvelles
fusions en 2008. Le réseau famille indique un objectif identique pour
2010, mais l’essentiel du chemin reste à faire.
161. Ces dix rapports relatifs aux réseaux en pleine transformation seront exploités
dans le prochain rapport sur la sécurité sociale, afin de mieux apprécier les évolutions
de ces régimes.
134
C
OUR DES COMPTE
Les organismes de sécurité sociale en 2007*
Organismes de
sécurité sociale
Organismes de
regroupement
de caisses
Organismes
conventionnés
fin
2006
fin
2007
fin
2006
fin
2007
fin
2006
fin
2007
UCANSS
1
1
CRAM et CRAV
18
18
CPAM
128
128
CAF
123
123
URSSAF
101
101
Unions et fédérations
98
98
CGSS et assimilées
6
6
SLM-SLI-Mutuelles
38
37
Total régime général*
513
en 2006
512
en 2007
Régimes agricoles
67
51
55
41
1
1
Régime social des
indépendants
31
31
118
118
URCAM
22
22
Régime minier
23
8
Régime des IEG
– Retraite
– Maladie
1
107
1
1
Autres régimes spéciaux
16
7
TOTAL GENERAL*
954
en 2006
793 en 2007
* Cumul tous organismes, hormis les établissements publics nationaux.
Source :
Direction de la sécurité sociale
Pour 2007, les 41 contrôles effectués par les COREC se
répartissent comme suit :
-
18 dans le réseau de l’assurance maladie (13 CPAM, 1 CRAM, 3
UGECAM et 1 centre informatique) dont trois contrôles approfondis et
six visant à la levée d’une réserve antérieure ;
-
11 dans le réseau famille, soit 10 CAF et un centre de traitement
informatique ;
-
2 URSSAF ont été contrôlées ;
-
pour le régime général, en outre, ont été examinées la caisse générale
de sécurité sociale de Guadeloupe et la caisse de sécurité sociale de
Mayotte. Il sera rendu compte l’an prochain de ces deux derniers
travaux, dans le cadre d’une revue plus complète sur la situation des
caisses dans les DOM et les collectivités à statut particulier traitant
notamment du pilotage assuré par les tutelles et les caisses nationales ;
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
135
-
sept dans le réseau de la mutualité sociale agricole : quatre caisses
départementales
ou
pluri-départementales
et
trois
organismes
périphériques (un centre informatique, deux regroupements) ;
-
pour les autres régimes, seule a été examinée selon la procédure
classique,
la
caisse
vieillesse
invalidité
maladie
des
cultes
(CAVIMAC).
B
–
Le sens des avis rendus
Les avis, dont aucun n’est défavorable, se répartissent ainsi :
Nature des avis rendus par les COREC
Régime
Branche
Favorable
Recommandation
Réserve
Total
Maladie et AT-MP
12
5
3
20
Famille
3
6
2
11
Régime
général
Recouvrement
1
1
2
Mutualité sociale agricole
6
1
7
Autres régimes
1
1
*Les réserves sont le plus souvent accompagnées de recommandations, non
mentionnées dans la colonne voisine. Les réserves de la branche maladie concernent
les caisses ultra-marines et une UGECAM.
Source :
COREC et Cour des comptes
C
–
Remarques générales résultant des avis rendus
Pour leur dernière année de fonctionnement, les COREC se sont
principalement intéressés aux recommandations antérieurement formulées
parfois transformées en réserves quand elles étaient restées sans suite. Les
réserves ou recommandations ont souvent porté sur deux points
semblables :
-
la lenteur relative de la mise en place de véritables procédures de
contrôle interne. Le plus souvent, les protocoles existent, dès lors que
les caisses nationales ont diffusé les outils appropriés. En revanche,
l’appropriation locale des procédures, indispensable en raison de
l’autonomie d’organisation des organismes
162
, est souvent incomplète
et la réalité des contrôles rarement vérifiable ;
-
la détection et le recouvrement des indus sont parfois défaillants,
surtout le second, sauf dans le réseau des URSSAF ; dans plusieurs
CPAM ou CAF, les insuffisances du recours contentieux sont
manifestes et génèrent des prescriptions de créances ; surtout, la liaison
162. Même si les systèmes informatiques ont un puissant effet contraignant.
136
C
OUR DES COMPTE
entre le recouvrement amiable, qui incombe au comptable et le
recouvrement contentieux, qui relève de l’ordonnateur, demande des
procédures rigoureuses et parfaitement encadrées qui n’existent pas
encore suffisamment.
II - Les contrôles dans le cadre du réseau d’alerte
A
–
Les principes du réseau d’alerte
Malgré la disparition des COREC, la Cour a souhaité poursuivre
ses contrôles sur les organismes de base. La certification, en effet, ne
couvre pas l’efficacité ou l’efficience de la gestion, mais seulement la
qualité des comptes, étendue à celle du contrôle interne.
Avec le concours des administrations qui participaient aux travaux
des COREC, la Cour a décidé de se concentrer sur les organismes dont
les indicateurs donnent à penser qu’ils sont, ponctuellement ou
durablement, en difficulté. Le choix des indicateurs, puis la sélection des
organismes à auditer sont effectués en collaboration entre la Cour, les
administrations participantes et les caisses nationales.
Les contrôles effectués en 2007 sur la base des résultats de 2005
connus en 2006 ont été nombreux : dans le régime général, 13 CPAM, 8
CAF et 9 URSSAF, auxquels il faut ajouter, hors régime général, 6
caisses ou fédérations de caisses de la mutualité sociale agricole (CMSA).
Ils avaient pour but de vérifier l’exactitude et la pertinence des
indicateurs, d’en examiner l’évolution et pour finir d’en réitérer les
observations utiles pour les organismes concernés. Globalement, ce
système d’alerte par indicateur se trouve validé.
B
–
Remarques de portée générale
Si la situation relative des indicateurs pris individuellement varie
assez fortement d’une année à l’autre, la relative stabilité des classements
d’ensemble -exception faite de la branche recouvrement- témoigne de
réalités durables qui conduisent à deux remarques générales.
La première tient à l’incidence de la taille des organismes sur leurs
performances techniques. La complexité et le renouvellement rapide de la
législation supposent en effet des pôles de compétence que des structures
trop petites ne peuvent créer. Pour autant des organismes importants mais
dispersés sur de nombreux centres de production indifférenciés,
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
137
rencontrent des difficultés similaires, faute d’unités spécialisées dans les
traitements les plus complexes.
La deuxième tient à la faible productivité de certaines très grandes
structures, en particulier en région parisienne. L’analyse montre qu’elle
ne résulte pas tant du gigantisme que d’une inadaptation des structures à
la taille et aux évolutions technologiques. L’évolution des CPAM
franciliennes en 2006 montre pourtant qu’il est possible, sous certaines
conditions, de faire évoluer cette situation. Si elles demeurent en effet
parmi les caisses les moins performantes, des réductions de coût très
sensibles ont été notées notamment dans l’Essonne, les Hauts-de-Seine, le
Val-de-Marne et le Val-d’Oise.
C
–
Remarques relatives au régime général
1
–
Les branches maladie et AT-MP
a)
Des progrès sans effet sur la situation relative des organismes
contrôlés
Les 13 organismes contrôlés sont assez représentatifs de la
diversité des CPAM : organismes départementaux de petite taille ou
infra-départementaux
163
(Haute-Corse,
Lozère,
Metz,
Maubeuge,
Tourcoing, Strasbourg, Elbeuf, Tarn et Garonne, Territoire-de-Belfort),
organismes départementaux de taille significative (Alpes Maritimes) et
enfin deux très importantes caisses de la région parisienne : Cergy et
Paris.
De façon générale, quelles que soient les caisses, l’évolution du
coût du bénéficiaire actif pondéré (BAP) ou celle de la productivité du
pôle production sont toujours plus lentes que celle des autres indicateurs.
Et si des progrès sont constatés, ils ne modifient pas le classement
d’ensemble. Par exemple, chaque agent traitait en 2005 à Paris 26 430
décomptes. On en est à 27 644 en 2006, mais cela n’améliore en rien la
position relative de la caisse dans la mesure où la progression de la
productivité est générale dans le réseau. La même observation vaut pour
le Val d’Oise et pour Elbeuf.
163. Quand les organismes sont désignés par un nom de ville, qui est leur siège, c’est
qu’ils sont infradépartementaux, Paris excepté. Les organismes départementaux sont
désignés par le nom du département.
138
C
OUR DES COMPTE
b)
Les CPAM gérant un petit nombre de bénéficiaires
La caisse de Lozère constitue un cas particulier car vient d'être
constituée dans ce département
164
une entité « organismes de sécurité
sociale de Lozère ». La CPAM, la CAF, l’URSSAF et l’union
immobilière ont depuis longtemps une équipe de direction commune.
Cependant, les éléments constitutifs ayant conservé pour le moment la
personnalité morale, il n’est pas possible, en l’absence de comptabilité
analytique, d’assurer que le coût supporté par chacun correspond
exactement à sa part réelle des charges communes
165
.
En outre, c’est à Mende qu’a été installée la plate-forme de
services (en fait l’accueil téléphonique) commune aux CPAM du Gard, de
l’Hérault et de Lozère, ce qui a permis une forte croissance des effectifs,
passés de 2004 à 2006 de 61 à 91 équivalents temps plein (ETP). On est
donc en présence d’une démarche originale : d’un côté, pour maintenir la
permanence des services publics dans une zone très dépeuplée, il est
procédé au regroupement des structures dans une logique inter branche.
Mais, de l’autre, pour éviter les inconvénients d’une activité trop
généraliste avec de faibles moyens, la caisse est engagée dans plusieurs
expériences de mutualisation dans une logique interne aux branches. Il est
encore trop tôt pour tirer des conclusions de cette expérience.
Les autres caisses présentent de grandes différences, mais toutes
ont en commun l’inachèvement de la démarche de contrôle interne,
pourtant engagée de longue date dans la branche. En fait, comme le
montre très bien l’exemple de la CPAM de Metz, deux démarches se sont
succédé dont la mise en cohérence a parfois pris du temps. Intervenue en
premier, la certification qualité s’est voulue tournée vers la clientèle :
célérité de traitement des dossiers et des réponses aux questions. La
démarche de contrôle interne, elle, est tournée vers l’exactitude et la
régularité des opérations finalement retracées dans les comptes. Dans
certaines caisses (Maubeuge), l’essentiel des efforts s’est porté sur la
certification, le contrôle interne est embryonnaire. Dans la plupart des
autres, la traduction locale des plans de maîtrise socle diffusés par la
CNAMTS, qui exige un important travail de mise à plat (et de
modification, le cas échéant) des procédures locales est loin d’être
achevée. En outre, la traçabilité des contrôles est fréquemment
insuffisante.
164. Arrêté du 17 juin 2008.
165. Par exemple, la responsable ressources humaines de l’ensemble est rémunérée
par la CPAM, mais l’agent qui l’aide dans ses travaux est rémunéré par l’URSSAF.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
139
Enfin, dans ces caisses où la démarche de mutualisation constitue
manifestement un impératif, on observe de très grandes différences selon
les régions. Les CPAM de Franche-Comté, par exemple, ont engagé un
processus multiforme. En revanche, dans le Nord, la mutualisation,
hormis la plate-forme téléphonique, est longtemps restée un sujet de
discussions, comme le montre le cas de Maubeuge. On notera cependant
qu’une démarche de mutualisation mal maîtrisée peut nourrir des
réticences. C’est le cas en Moselle, où la répartition des apports en
personnel à la mutualisation entre Metz, Sarreguemines et Thionville ne
paraît pas encore stabilisée.
c)
Les autres caisses
Les indicateurs de la caisse des Alpes-Maritimes étant contrastés -
certains excellents, d’autres mauvais- un contrôle s’imposait, dont il
résulte que les principaux dysfonctionnements semblent liés au passé (des
difficultés à l’agence comptable), même si des problèmes ponctuels
subsistent, notamment dans le domaine des créances prescrites.
Les caisses du Val-d’Oise et de Paris, dont les sureffectifs sont
anciens
166
, connaissent des évolutions contrastées. La CPAM du Val-
d’Oise s’est engagée dans une vigoureuse réorganisation et va diminuer le
nombre de ses sites de production de 23 à 11 et en même temps les
spécialiser. Dans le même temps, elle est parvenue à réduire le coût du
BAP de plus de 5 % entre 2005 et 2006. En revanche, le projet
d’entreprise mis tardivement en place à Paris ne semble pas suffisamment
conçu dans cette optique. La fonction d’accueil physique y est en cours de
refonte, mais paraît encore surdimensionnée. Outre les permanences
implantées de manière discutable dans 51 structures (dont 15 hôpitaux),
on comptera à terme 23 centres spécialisés recevant le public, certains
très proches les uns des autres, ainsi que des points d’accueil spécialisés
destinés aux publics précaires. A quoi il faut ajouter le projet de cinq
agences dédiées aux professionnels de santé, dont le nombre laisse
perplexe.
Le circuit du courrier, qui à lui seul induit des délais importants,
est complexe et confus. Le contrôle interne, difficile dans pareil cadre,
demeure insuffisant, la gestion des créances est mal maîtrisée, comme le
montre l’examen des créances prescrites (voir infra), du fait d’un manque
d’harmonisation entre les services de l’ordonnateur et ceux du comptable.
La fréquence des rejets de liquidation dit « Iris » restait élevée au moment
166. Ce qui se traduit par une sous-productivité des pôles production et fonctions-
support et donc pour des coûts de gestion unitaires excessifs.
140
C
OUR DES COMPTE
du contrôle. Depuis lors cependant, des procédures d’analyse
167
ont été
instaurées. Enfin, les fonctions support représentent le quart du personnel
de l’organisme. La gestion des ressources humaines par exemple mobilise
3,2 % de l’effectif de la caisse, ce qui est manifestement excessif. En
d’autres termes, il conviendrait d’infléchir le projet d’entreprise de la
CPAM de Paris dans le sens d’une meilleure efficience.
2
–
La branche famille
Les indicateurs d’alerte ont principalement mis en évidence les
difficultés de deux types d’organismes : en premier lieu, ceux qui
correspondent à un petit département (Haute-Saône) ou à une subdivision
de département (Elbeuf, Aubenas -étudiée en même temps qu’Annonay
pour disposer d’une vue complète sur l’Ardèche- et Roubaix-Tourcoing) ;
en second lieu, deux organismes de la région parisienne (Yvelines et
Seine Saint-Denis). La seule caisse uni-départementale de taille moyenne
ayant donné lieu à alerte et contrôle est celle de Saint-Brieuc.
a)
Les problèmes des caisses à faible effectif de bénéficiaires
Dans ces caisses, différents problèmes structurels se cumulent, qui
se résument à l’inadéquation des moyens aux besoins. De façon générale,
plus la caisse est petite, plus est grand le poids relatif des fonctions
support. A fortiori, si la population couverte n’augmente pas, la
productivité globale ne peut s’améliorer que faiblement.
Cependant, il existe des cas d’hypertrophie manifeste de ces
fonctions. Tel est le cas à Roubaix-Tourcoing, avec 8 agents ETP
168
dédiés à l’informatique (moyenne : 5,4 pour les CAF du même groupe),
18,2 ETP relevant du secteur études et organisation et 15,3 ETP consacrés
au service de gestion des biens, du budget et des marchés (contre 8,7),
alors que les services de production sont sous-dotés (67,9 ETP contre
81,6). La traduction de cette situation sur les résultats est sans appel : le
solde de pièces à traiter en fin de mois est excessif.
Par ailleurs, certaines de ces petites caisses éprouvent, parfois,
quelque difficulté à se désengager de leurs oeuvres (crèches notamment),
spécialement quand la situation y est dégradée : la moitié de
167. L’exploitation typologique de ces rejets est seule de nature à en permettre la
diminution. Un travail conduit à la CPAM de Maubeuge a ainsi permis de mettre en
lumière une typologie des erreurs et un fichier des professionnels inexpérimentés, ce
qui a induit la production de documents standardisés adressés ensuite aux intéressés.
168. Chiffre calculé en équivalents temps plein. Il y a davantage d’agents à cause des
temps partiels.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
141
l’absentéisme de la CAF d’Elbeuf provient de la crèche, avec 31,5 jours
d’arrêt
en
moyenne
par
personne
en
2006.
La
communauté
d’agglomération doit reprendre cette structure.
Certaines CAF de ce type montrent des signes d’engorgement qui
peuvent se manifester diversement. Par exemple, certaines ont peu
d’indus et un taux de recouvrement de ceux-ci satisfaisant. Mais à la CAF
d’Annonay,
ce
résultat,
en
2005,
s’explique
par
l’absence
de
rapprochements avec les ASSEDIC, le CNASEA et l’ANPE
169
(on note
le même phénomène en Haute-Saône en 2006). Or les échanges
d’informations fréquents avec ces organismes sont un moyen très efficace
pour vérifier l’exactitude des déclarations. La faiblesse du contrôle
explique ainsi le peu d’indus.
A l’évidence, certaines fonctions ne peuvent pas être exercées à
l’échelle de si petites structures à des coûts raisonnables. La mutualisation
est une solution minimale, mais indispensable. Or force est de constater
qu’elle n’est guère développée dans les caisses contrôlées et, si l’entraide
fonctionne (cas d’Aubenas aidée par Annonay), c’est parfois au détriment
de la CAF qui apporte l’aide.
b)
La CAF de Saint-Brieuc
La CAF de Saint-Brieuc illustre fort bien les répercussions
fâcheuses que peuvent avoir les décisions d’une période antérieure. De
1995 à 2003, cette CAF n’a formé aucun technicien conseil. Subitement,
en 2004, elle en a recruté une quinzaine, mais les techniciens ne sont
entrés en fonction qu’en 2006
170
. Pendant ce temps, la situation du
service prestations s’est fortement dégradée. Il y a été fait face grâce à
divers expédients : fermetures momentanées de points d’accueil ou de
l’accueil téléphonique, recours à des CDD inexpérimentés, externalisation
de la saisie... Ces diverses mesures se sont répercutées sur l’absentéisme
du service de production et, plus généralement, sur l’ambiance de
travail
171
, sans que les résultats se redressent significativement.
169 . Les rapprochements étant à nouveau faits en 2006 à Annonay, les indus
croissent. La CAF explique ses difficultés de 2005, entre autres, par des anomalies
alors rencontrées dans les chaînes de traitement informatique.
170. Il faut deux ans pour qu’un technicien devienne pleinement opérationnel.
171. Les conclusions d’un audit demandé par le comité d’hygiène, de sécurité et des
conditions de travail (CHSCT) ont conduit le DRASS à organiser, avec l’accord de la
direction de la caisse, un audit conjoint avec l’inspection du travail.
142
C
OUR DES COMPTE
c)
Les CAF de la région parisienne
Les CAF de la région parisienne, de façon générale, ne sont pas les
plus performantes du réseau. La CAF des Yvelines et celle de Seine Saint
Denis ont fait l’objet d’un contrôle en raison d’indicateurs très dégradés.
De 2005 à 2006, la position relative de la CAF des Yvelines s’est
améliorée par rapport au reste du réseau, mais pas celle de la Seine Saint
Denis. Dès leur création en 1991, ces deux caisses étaient en situation de
sureffectifs. La CAF de Seine-Saint-Denis a pu pour l’essentiel les
résorber du fait de la conjonction de différents facteurs
172
. Il n’en va pas
de même dans la CAF des Yvelines : bien que son coût moyen par
allocataire ait diminué de 8,7 % entre 2004 et 2006, il dépasse encore de
18,4 % le coût moyen national. Il est vrai que ces organismes, d’une part,
doivent faire face à une importante rotation de la population couverte
173
et d’autre part hébergent des services communs aux CAF de la région
parisienne, sans une comptabilité analytique permettant de faire
suffisamment
la
part
des
choses.
Une
comptabilité
analytique
expérimentale est toutefois en cours de mise en place dans les Yvelines
qui permettra, une fois généralisée, un contrôle de gestion dans toute la
branche.
3
–
Le recouvrement
Les huit URSSAF contrôlées par les COREC
174
et celle de l’Aube,
contrôlée par la Cour, se caractérisent, à l’exception de Lyon et, dans une
moindre mesure, du Haut-Rhin, par leur petite taille. Toutes ces unions
ont pour cadre d’action leur département, à trois exceptions : Lyon, qui se
partageait lors du contrôle le Rhône avec Villefranche/Saône
175
, Belfort-
Montbéliard, qui résulte de la fusion récente (2005) des anciennes unions
éponymes ; et enfin Ajaccio, qui couvre l’ensemble de la collectivité
corse.
172. Départs en retraite non remplacés, augmentation de la population départementale
(aujourd’hui arrêtée) ainsi que plus grande complexité des dossiers à traiter. En effet,
selon les aides et les populations visées, la durée de traitement des dossiers est très
variable. L’indicateur de coût global pondéré établi par la CNAF prend en compte ces
facteurs, mais trop faiblement, selon la caisse.
173. 22 % par an dans les Yvelines.
174. Cantal, Corse, Eure et Loir, Roanne, Haut-Rhin, Lyon, Haute-Saône, Belfort-
Montbéliard.
175. L'arrêté du 28 mai 2008 crée l'URSSAF du Rhône par fusion des URSSAF de
Lyon et de Villefranche-sur-Saône.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
143
L’union fusionnée de Belfort-Montbéliard doit être mise à part. Ses
difficultés semblent avoir été momentanées et liées à la fusion elle-même.
Seul reste un coût de fonctionnement élevé, mais il est dû à des
sureffectifs qui devraient se résorber dans les années à venir.
Le même problème de coût existe dans les URSSAF du Cantal, de
Corse
176
, de Haute-Saône, pour les mêmes raisons. Il se résout ou devrait
se résoudre progressivement. Toutefois, on notera que l’union du Haut-
Rhin, signalée pour ce problème en 2005, ne l’est plus en 2006. En outre,
bien d’autres petites URSSAF n’ont pas le même problème.
De façon générale, il y a peu d’indicateurs qui, d’une année sur
l’autre, donnent les mêmes signes de faiblesse dans la même URSSAF, la
seule exception étant l’union de Roanne, avec des difficultés récurrentes
dans la répartition des cotisations entre branches. L’union de l’Aube
présente des symptômes assez voisins.
Cependant, on observe qu’une part des difficultés tient sans doute
à la complexité croissante de la réglementation applicable. A cet égard, la
réorganisation, à Lyon -qui est une des URSSAF les plus importantes de
France- du service de gestion des comptes cotisants en deux pôles
spécialisés (grandes et moyennes entreprises, petits employeurs) dans
chacun desquels les agents ont conservé une pluricompétence depuis
l’affiliation jusqu’au recouvrement forcé, a permis de meilleurs résultats,
tandis que le développement du rappel téléphonique des cotisants
défaillants a abouti à une amélioration significative du taux de
recouvrement et à la diminution du délai de transmission, si besoin, au
service contentieux. Comme une petite URSSAF ne peut pas, faute de
personnel, faire la même chose, il convient d’en tirer les conséquences en
termes de mutualisation ou de fusion. Encore faut-il que celle-ci soit
lisible et compréhensible par tous, ce qui n’est pas toujours le cas, comme
le montre l’exemple de l’Aube dont l’URSSAF est insérée dans plusieurs
réseaux distincts de mutualisation.
D
–
Le régime agricole
Les contrôles ont porté sur six caisses ou fédérations de caisses :
fédération des Côtes normandes
177
(Calvados et Manche), fédération
Grand Sud (Aude et Pyrénées-Orientales), caisse du Coeur de Loire,
(fusion des caisses du Cher et du Loiret) et enfin les caisses
unidépartementales de l’Indre, de l’Oise et du Var.
176. Laquelle doit compter en outre avec des frais de sécurisation élevés et une
indemnité (règlementaire) compensatoire versée au personnel pour frais de transport.
177. Où étaient en cause seulement des délais comptables aujourd’hui rattrapés.
144
C
OUR DES COMPTE
La caisse Coeur de Loire et la fédération Grand Sud ont été
signalées pour leur coût net de gestion excessif et une proportion trop
importante de prestations payées au titre de l’exercice antérieur, Les
caisses mettent en avant dans leur réponse l'incidence des réorganisations
suite à fusion. Pour le coût de gestion, une diminution a depuis été
observée dans les deux cas, mais dans une proportion équivalente à celle
de l’ensemble du régime
178
.
Les caisses unidépartementales de l’Indre, du Var et de l’Oise -
cette dernière en cours de fusion au sein de la fédération de Picardie-
présentent des motifs d’alerte différents. L’Oise et l’Indre se caractérisent
par un coût de gestion élevé, au contraire du Var qui, malgré une
dégradation, est encore en deçà de la moyenne nationale. Dans un
contexte de réduction de la population couverte, seuls de gros efforts de
productivité permettront une amélioration. Ils semblent possibles, si on
titre profit des réorganisations engagées (ou si, dans le cas du Var, on
procède aux choix indispensables, pour insérer la caisse dans une
structure plus large).
III - Les créances prescrites
Les organismes de sécurité sociale détiennent beaucoup de
créances de montants très divers et souvent assez faibles. La
règlementation prévoit la possibilité d’abandon des faibles créances ainsi
que l’admission en non valeur de celles dont le débiteur est introuvable
ou insolvable. Les autres créances doivent être suivies. Or, elles ne le sont
pas toujours et se trouvent donc prescrites, tout en restant inscrites dans
les bilans.
Une opération d’apurement des comptes devrait être engagée sous
peu. Les règles (qui doivent faire l’objet d’un décret en conseil d’Etat) en
seraient les suivantes : admission en non valeur des créances prescrites
avant le 1
er
janvier 2006, sous réserve d’un provisionnement intégral et de
l’existence de dispositifs de nature à en éviter le renouvellement.
Les contrôles des COREC dont il est rendu compte ci-après ont
constitué la dernière étape d’un travail entrepris sur cette question par la
direction de la sécurité sociale dès 1996, date à laquelle les créances
178. Dans le contexte général de la mutualité sociale agricole, où la population
couverte, en général, diminue, les gains d’efficience sont très difficiles à réaliser. Les
réductions d’effectifs sont pourtant importantes : 30 agents en moins en Grand Sud en
2006-2007, 25 en Coeur de Loire en 2007.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
145
prescrites avaient été évaluées à 1 Md€. Les COREC ont dressé par
sondage en 2007 un état des lieux actualisé dont il est rendu compte ici.
A
–
L’implication des têtes de réseau
L’implication des caisses nationales des trois réseaux contrôlés par
les COREC (famille, maladie et recouvrement), dans la prévention des
créances prescrites, pour récente qu’elle soit parfois, s’est traduite dans
divers
dispositifs
de
contrôle
interne.
En
revanche,
les
outils
informatiques utilisés ne présentent pas encore toutes les fonctionnalités
requises.
1
–
Des instructions à peu près complètes
Dans le recouvrement, les initiatives les plus anciennes de
l’ACOSS ont coïncidé avec les premiers travaux de la DSS s’inquiétant
du traitement local peu rigoureux des créances prescrites. Depuis lors,
l’ACOSS a diffusé un ensemble d’instructions et de standards de
pratiques recommandées (SPR) couvrant le champ concerné. Un SPR
relatif à la prévention de la prescription sera diffusé dans le réseau en
2008.
Dans la branche maladie, les instructions de la CNAMTS, moins
nombreuses, se bornent à répercuter les instructions techniques de la
DSS. En revanche, le plan de maîtrise socle (PMS) défini par la
CNAMTS identifie bien le risque. Le niveau d’achèvement des plans de
maîtrise locaux, qui sont la déclinaison locale des PMS, était cependant
très variable au moment des contrôles. L’organisation insatisfaisante des
services peut également constituer une source de dysfonctionnements
(comme à Paris ou dans les Alpes-Maritimes).
Dans la branche famille enfin, les instructions sont nombreuses
mais récentes (de 2006 essentiellement). La CNAF a élaboré en 2005 un
plan qui recense un grand nombre d’actions spécifiques. Quasiment tous
les organismes locaux se sont dotés des outils appropriés, en général
régulièrement actualisés, mais des problèmes de coordination entre
services ont toutefois été soulignés par les COREC. Des protocoles de
gestion des créances entre le directeur et l’agent comptable ont été
élaborés dans certaines caisses et devraient remédier à ces difficultés.
146
C
OUR DES COMPTE
2
–
Des outils informatiques perfectibles
a)
Le recouvrement
Le système informatique national (SNV2) présente les principales
fonctionnalités nécessaires pour une gestion efficace des créances :
intégration des actes interruptifs ou suspensifs, automatisation des envois
ou encore suivi des titres transmis aux huissiers, extraction d’états
périodiques. Ces derniers ne fournissent toutefois qu’une liste des
créances présumées prescrites et une vérification complémentaire
approfondie est nécessaire. Il est fait état de cette difficulté en Vendée et
dans le Calvados (le SNV2 n’indiquant pas le motif de la prescription, il
faudrait tenir les dossiers à la main) ou encore de l’obligation pour les
agents de calculer eux-mêmes la date de prescription dans les Bouches du
Rhône (le SNV2 n’indiquant pas de date de prescription en fonction des
événements encodés).
b)
La branche maladie
L’application nationale Dettes est la base centrale unique,
permettant la gestion et la comptabilisation des créances et des dettes.
Des interfaces existent entre les applications Dettes, Progrès (pour la
liquidation des dossiers) et Copernic (logiciel comptable). L’applicatif
connaît cependant des limites puisqu’il identifie bien les créances
prescrites en tant qu'outil de comptabilité auxiliaire mais ne permet pas
effectivement d'en assurer le suivi. Les organismes locaux ont donc le
plus souvent mis au point des tableurs pour compléter le suivi des
créances, assurer leur recouvrement et en prévenir la prescription.
Ainsi, les auditeurs ont constaté à la CPAM de Paris qu’il n’était
pas possible d’effectuer automatiquement des relances, des mises en
demeure et des contraintes. Les créances prescrites ne pouvaient pas être
individualisées et le motif de la prescription ne pouvait être connu. Le
suivi des échéanciers était dès lors manuel. En Haute-Corse, le suivi des
titres transmis aux huissiers est effectué au moyen d'un applicatif local.
A la CPAM des Yvelines, il a été noté que les requêtes pour la
surveillance de la prescription ou la sélectivité des poursuites n'existaient
pas. Le service juridique s'est doté d'outils internes qui imposent de
longues saisies de données. Des extractions de l’applicatif sont effectuées
manuellement et retraitées mensuellement. Des remarques assez proches
ont été notées à Quimper et dans les Alpes-Maritimes.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
147
c)
La branche famille
Dans la branche famille, les systèmes d’information sont
relativement complets, bien que certains outils soient très récents.
L’applicatif national CRISTAL permet la gestion de la phase amiable.
CORALI, autre applicatif national fonctionnant en interface avec
CRISTAL
179
, intègre depuis 2006, dès l’implantation d’une créance, un
système de surveillance de la prescription à partir de l’enregistrement et
du suivi des actes interruptifs et suspensifs, à condition que les faits
générateurs soient saisis.
Selon les COREC, ces applications souffrent cependant de défauts
significatifs : l’application systématique d’une prescription biennale
fausserait le recensement, imposant une vérification manuelle ; les motifs
de prescription seraient trop peu explicites ; le suivi individualisé des
créances serait difficile ; la répartition des versements sur plusieurs
créances en cas de multi-créances impossible.
B
–
Les observations des COREC
Les rapports ont mis en lumière une utilisation globalement
conforme des procédures d’admission en non valeur, annulation, abandon
de créances ou remise gracieuse, ainsi qu’une gestion satisfaisante des
créances prescrites dans de nombreux organismes. En témoignent
notamment les caisses qui n’ont plus laissé se prescrire de créances
depuis plusieurs exercices (CPAM de Tourcoing, Saint-Quentin et
Quimper, CAF de la Manche, de la Corrèze et du Lot-et-Garonne). Dans
d’autres organismes en revanche, la situation est moins satisfaisante, soit
en raison d’une mauvaise évaluation de l’antérieur, soit parce que les
dispositifs de prévention ne sont pas encore pleinement efficaces.
1
–
Dans la branche recouvrement
La plupart des URSSAF auditées ont mis en place un plan de
contrôle interne ou des mesures spécifiques visant à prévenir la
prescription des créances. Il s’agit dans certains organismes d’une
organisation récente datant seulement de 2006, voire 2007.
Sur le total de 42 M€ examinés dans 13 URSSAF, les COREC ont
cependant estimé que trois caisses devaient encore fiabiliser le montant
susceptible d’être apuré : Corse, Aude et Lille. Ces deux dernières ne
179. Ce qui répond à l’une des observations formulées par la Cour à l’occasion du
premier travail de synthèse mené en 2004 sur les créances prescrites.
148
C
OUR DES COMPTE
présentaient pas, de surcroît, selon les auditeurs, un dispositif
suffisamment développé de prévention.
Un précédent contrôle de l’URSSAF
de Lille avait pointé des
faiblesses dans l’utilisation de l’outil SNV2 et des lacunes dans la
compréhension et l’utilisation des règles de suspension de prescription.
Depuis lors l’union a mis en oeuvre des mesures diversifiées de
redressement, mais des créances ont continué à être notées comme
prescrites en 2007 (près de 250 000 € au 30 septembre). A l’URSSAF de
l’Aude, les traitements de surveillance issus du SNV2 ne paraissaient pas
maîtrisés, compte tenu des difficultés rencontrées lors du contrôle pour
obtenir un état fiable et stabilisé des créances prescrites.
2
–
Dans la branche maladie
Sur le montant total des créances prescrites recensées dans les
CPAM contrôlées (24 M€ environ, dont plus du tiers à Paris), une
proportion importante (56 %) restait à fiabiliser à l’issue des contrôles sur
place. D’autres montants ne l’ont été que pendant l’audit.
A la CPAM de Paris, les rapporteurs ont jugé que certaines
créances prescrites avaient pu échapper au recensement car le plan de
maîtrise local était trop récent et la supervision encore inexistante. L’écart
s’est ainsi révélé important entre le montant des créances de gestions
techniques prescrites au début de l’audit (3,9 M€) et le montant final
après contrôle (8,8 M€
180
). En outre, au jour de l’audit, le protocole de
gestion des créances techniques entre le directeur et l’agent comptable
n’était pas signé. L’automatisation des relances n’était toujours pas
opérationnelle. Divers dysfonctionnements graves ont été notés dès la
phase de constat de la créance, traduisant un défaut de maîtrise du risque
de prescription : absence de dossier justificatif ou même notification de la
créance dans un délai supérieur au délai de prescription. Sur l’échantillon
de créances saisies dans Dettes en 2007 et contrôlées par le COREC il est
ressorti que presque la moitié (48 %) comportait une mention « dossier
non trouvé », « sans acte », « chèque non encaissé » ou encore « créance
saisie et notifiée hors délai de prescription ».
Le rapport de contrôle de la CPAM des Alpes maritimes est assorti
de 18 recommandations, dont certaines concernent l’état récapitulatif :
des créances non prescrites s’y trouvaient, alors que d’autres réellement
prescrites n’y figuraient pas. La conclusion est qu’une demande
d’apurement ne serait pas susceptible de recevoir un avis favorable.
180. Auxquels il faut ajouter près de 2,4 M€ de créances prescrites concernant les
gestions budgétaires.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
149
Enfin, à la CPAM de Corrèze, l’état des lieux arrêté au
31 décembre 2006 s’est révélé erroné : créances enregistrées à tort
comme prescrites et réciproquement. Par ailleurs, certains dossiers n’ont
pu être retrouvés. Cette situation a conduit le nouvel agent comptable à
mettre en oeuvre un plan d’actions.
3
–
Dans la branche famille
Les rapports de contrôle font état de deux montants encore à
fiabiliser. Dans les Alpes-Maritimes, des incertitudes demeurent sur le
bien fondé de la présomption de prescription et donc sur le nombre et le
montant des créances réellement prescrites. A l'inverse certaines créances
prescrites ne sont pas recensées. A Montpellier, l’opération d’extraction
menée en 2006 a entraîné la découverte de dossiers de créances déclarées
à tort prescrites.
4
–
Observations finales
Malgré ces observations, les créances prescrites restant dans les
comptes des caisses des trois réseaux du régime général contrôlés par les
COREC ont paru dans leur grande majorité correctement évaluées et
gérées. Ce constat contraste avec les conclusions de 2004, qui avaient
relevé des situations insatisfaisantes dans près de la moitié des
organismes contrôlés.
Au total, le risque de prévention est donc de mieux en mieux pris
en compte dans les dispositifs de contrôles interne déployés dans les
caisses locales. Certains organismes peinent cependant à mettre en place
des circuits et des procédures véritablement sécurisés. La question des
créances prescrites n’est alors que l’une des traductions d’un problème
organisationnel plus vaste. Ce point devrait encore mobiliser l’attention
des caisses nationales qui ont déjà, sous réserve des perfectionnements
encore nécessaires, mis à jour leurs applications informatiques.
IV - Le contrôle interne dans les caisses de
mutualité sociale agricole
En 2007, les COREC ont examiné comment les 22 CMSA
181
contrôlées avaient mis en oeuvre le dispositif conçu par la caisse centrale.
181 . Ou fédérations de CMSA. Il y avait, au 31 décembre 2006, 49 CMSA ou
fédérations.
150
C
OUR DES COMPTE
Ils ont cherché également à en mesurer les effets en termes de
sécurisation du fonctionnement et d’évolution des taux d’erreurs.
A
–
Pilotage et organisation
1
–
Une démarche partant de la caisse centrale
La démarche de contrôle interne dans le régime agricole a été
initiée par le décret du 26 juin 2003, soit dix ans après le régime général.
La caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA) a
privilégié une politique de contrôle interne « par le haut » : un référentiel
national des processus métiers par type d’organismes a donc été élaboré
ainsi qu’un référentiel des « bonnes pratiques » associées. Les caisses
locales ont été invitées à un travail d’évaluation et d’analyse de leurs
procédures de travail avant de mettre en oeuvre les « bonnes pratiques.
Dans une seconde phase, il devait être procédé à la recherche des risques
résiduels et des actions de parade correspondantes. Seule la première
phase était en voie d’achèvement lors du contrôle des COREC.
2
–
Des dispositifs locaux trop disparates
Certaines caisses n’ont pas souhaité se doter d’une véritable
structure en charge du contrôle interne ; dans d’autres, malgré la
désignation d’un coordonnateur et de référents, la démarche ne paraît pas
avoir conduit à la modification des pratiques.
Certaines caisses n’ont pas établi, ou très tardivement, de protocole
de contrôle interne entre le directeur et l’agent comptable et les plans de
contrôle interne sont parfois de simples transpositions du plan national
sans travail préalable d’analyse des enjeux et risques locaux.
Ainsi à la CMSA d’Ile-de-France, le directeur général a délégué
tous ses pouvoirs à l’agent comptable pour mener à bien les opérations
s’attachant au contrôle interne. Cette délégation, non formalisée, a valeur
de protocole implicite pour la caisse, mais fait peser des doutes sur la
capacité de l’organisme à maîtriser un risque lié à un processus où
interviennent les services de l’ordonnateur et ceux du comptable.
L’organisation mise en place dans la CMSA de Corse ne prévoit ni
groupe de travail, ni outil, ni personnel propre (hors la coordinatrice du
contrôle interne) et il n’y a pas de plan de contrôle interne.
Au sein de la CMSA du Pas-de-Calais, le plus récent protocole est
très éloigné des principes du protocole national et, selon le rapport des
COREC, n’est pas conforme à l’esprit et à la lettre du contrôle interne.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
151
Dans les Deux-Sèvres, le plan national tient lieu de plan local.
L’objectif prioritaire de la caisse est de mettre en place les bonnes
pratiques dans les meilleurs délais et de procéder aux vérifications
comptables. En
Lorraine
également, la caisse n’avait pas élaboré de plan
de contrôle interne lors du contrôle COREC. Il n’était donc pas possible
de connaître les actions prioritaires mises en place.
3
–
Une démarche nationale peu relayée localement
Les outils nationaux mis à disposition du réseau par la caisse
centrale, jugés parfois rigides et peu adaptés aux contextes locaux, parfois
comme ne présentant pas toutes les fonctionnalités désirées, ne sont pas
toujours utilisés. L’outil Malices notamment, qui sert à bâtir des requêtes
sur les données saisies dans l’outil « contrôle interne », est très critiqué.
Des applications locales ont parfois été développées en parallèle.
Mais certaines ont été jugées par les COREC moins performantes que
l’outil national (Pas-de-Calais) ou nécessitant une double saisie (Ile-de-
France).
Les bilans annuels demandés de réalisation des actions inscrites
dans le plan de contrôle interne des organismes sont encore trop souvent
succincts. Les audits, qui devraient permettre d’évaluer l’application dans
le temps des bonnes pratiques, sont embryonnaires. Beaucoup de caisses
attendraient une initiative de la caisse centrale sur ce sujet. Les autres
cantonnent la démarche à l’examen de quelques procédures ou bonnes
pratiques, sans audit global de l’ensemble du dispositif.
B
–
La mise en oeuvre des bonnes pratiques
Les « bonnes pratiques » validées par le comité de pilotage
national ont été diffusées dans le réseau par lots, selon un rythme
trimestriel, jusqu’au début de 2008. Leur réception, mise à l’étude et
validation dans les caisses locales, ont été examinées par les COREC, qui
ont mesuré également combien de pratiques locales avaient été préférées
et subsistaient dans les organismes.
1
–
Une validation trop souvent automatique
Deux constats ressortent des contrôles : d’une part, la plupart des
caisses se sont efforcées de suivre le calendrier de diffusion des bonnes
pratiques en négligeant la phase d’étude et d’analyse. Les dossiers
examinés sont alors sommaires et peu explicites. A contrario, quelques
caisses procèdent à une véritable étude détaillée de leurs pratiques locales
152
C
OUR DES COMPTE
avant de valider la bonne pratique nationale. Paradoxalement, le retard
que cette démarche leur fait accumuler paraît un bon signe.
Malgré l’importance du travail pris en charge par la caisse
centrale, nombre de caisses locales se contentent d’une validation quasi
automatique
des
bonnes
pratiques
nationales,
sans
rénover
significativement leur fonctionnement. Les modes d’organisation retenus
visent alors essentiellement à remplir l’obligation de remontée rapide des
informations à la caisse centrale.
Par exception, les caisses engagées dans une opération de
regroupement ou de fusion, ont tiré un meilleur parti du contrôle
interne
182
, car l’analyse et la validation des bonnes pratiques leur ont
permis d’harmoniser leurs procédures sur les différents sites concernés.
De la même façon, la démarche d’analyse des risques est peu
aboutie. La majorité des caisses attendent sur cette question les initiatives
de la caisse centrale. La définition en 2004 de risques associés aux bonnes
pratiques et d’actions de parade recommandées a été appréciée
localement, mais est restée sans suite.
2
–
L’efficacité des bonnes pratiques n’est pas mesurée
L’un des objectifs du contrôle était de mesurer l’effet des bonnes
pratiques sur les résultats des contrôles : diminution des indus, des
rappels, des corrections de données administratives… Or la majorité des
caisses sont dans l’incapacité de le faire, car elles ne disposent d’aucun
indicateur quantitatif ou qualitatif à cet effet. La mesure du niveau de
sécurisation offert par le dispositif est donc insuffisante.
Le contrôle, par les COREC, de la mise en oeuvre de quatre bonnes
pratiques, a fait apparaître des failles dans les procédures et un défaut
assez général de suivi et d’évaluation par les caisses locales. Leurs
conclusions conduisent à considérer avec prudence l’indicateur de taux de
couverture du référentiel de contrôle interne, qui, déclaratif, ne traduit que
très imparfaitement la réalité des organismes.
182. Le mouvement de concentration qui impacte actuellement la mutualité sociale
agricole se déroule en général en deux temps : dans un premier temps, est constituée
une fédération qui devient l’employeur unique des agents des caisses constitutives et
organise des mutualisations ; dans un deuxième temps, les caisses fusionnent et la
fédération se fond dans une caisse unique.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
153
C
–
Les vérifications comptables
Les agents comptables des caisses doivent procéder à la
vérification par sondage des cotisations et des prestations liquidées. Ces
vérifications, qui préexistaient au contrôle interne mais doivent désormais
s’y intégrer, portent, soit sur des thèmes locaux relevant du choix des
organismes, soit sur des cibles nationales.
1
–
Vérifications comptables et contrôle interne
Depuis 2007, la caisse centrale diffuse une instruction relative à la
vérification comptable incluant le contrôle du respect des bonnes
pratiques. Cette coordination entre les deux versants du contrôle interne
n’est pas encore entièrement perçue dans les caisses et les COREC ont
relevé, le plus souvent, l’absence de lien entre la sécurisation des
procédures et les résultats des vérifications. En fait, dans la majorité des
cas, l’instruction de la caisse centrale ne donne lieu à aucun
développement complémentaire local. Les procédures de contrôle
proprement dites sont rarement formalisées.
La constitution d’échantillons n’obéit que peu souvent à une
méthodologie précise, ce qui rend délicate l’extrapolation des résultats à
l’ensemble des opérations de même nature. Les vérificateurs comptables
disposent d’une grande autonomie dans l’organisation et la réalisation de
leur travail, qui paraît assez peu encadré et ne fait presque jamais l’objet
d’une supervision par l’agent comptable.
2
–
Les taux d’erreurs restent élevés
Les taux d’erreurs relevés par les COREC sont en apparence
élevés. Cela peut s’expliquer, au moins temporairement, dans les
fédérations confrontées aux changements de métier des techniciens. Ainsi
dans la CMSA de Lorraine, le taux global moyen d’erreurs constatées qui
s’établissait à 3,71 % en 2005, s’est élevé à 9,34 % en 2006.
Dans l’ensemble des caisses de l’échantillon, les taux d’erreur avec
incidence financières en tous domaines vont de 0 % en Corse
183
à
10,75 % en Gironde
184
(moyenne : 5,54 %, médiane : 4,31 %) et, en
183. En Corse, ainsi, les anomalies détectées mais rectifiées n’étaient pas décomptées
dans les erreurs.
184 . Ces erreurs seraient essentiellement dues à des dossiers d'indemnités
journalières. Le taux serait retombé à 2,4 % en 2007.
154
C
OUR DES COMPTE
prestations familiales, s’étagent de 0 % en Corse, à 19,61 % en Alsace
(moyenne : 6,74 %, médiane : 3,91 %).
Les taux d'erreurs nuls sont généralement interprétés comme des
signaux d’alerte, faisant craindre une défaillance grave des contrôles.
Dans l'hypothèse la plus favorable ils trouvent leur origine dans une
réorganisation et une rationalisation du traitement des dossiers (création
d'unités spécialisées, regroupement des dossiers complexes). Dans
d'autres cas en revanche, ils tiendraient à des défaillances dans le mode de
comptage des anomalies.
Deux sources principales d’erreurs ont été recensées par les
COREC : les erreurs de saisie
185
et la mauvaise application de la
législation. La prépondérance de ces motifs milite pour la recherche de
solutions adaptées (regroupement des dossiers complexes, ouvertures
d’unités spécialisées, formations complémentaires…), ce qui ne semble
pas encore le cas dans toutes les entités. La sécurisation en amont, dans
les applicatifs eux-mêmes, souhaitée par certaines caisses, ne saurait les
dispenser d’effectuer un travail approfondi d’analyse de leurs taux
d’erreur. Des réponses adaptées devraient en particulier pouvoir être
apportées par le biais du choix des thèmes locaux de contrôle.
De la même façon que les résultats des contrôles sont peu analysés,
le suivi des corrections et plus largement des mesures prises pour prévenir
la reproduction des erreurs, est insuffisant. Des réponses trop tardives,
laconiques ou inadéquates ont été relevées sur ce point.
***
Même si la plupart des caisses déclarent être à jour dans la mise en
oeuvre des bonnes pratiques, la réalité est plus contrastée. Un dispositif
plus directif, laissant moins de place à l’auto-appréciation locale du bien
fondé des bonnes pratiques ou des actions de parade à mettre en oeuvre,
pourrait conforter la démarche. Mais il devrait s’accompagner d’un effort
pédagogique sur le bien fondé et l’utilité pour tous du contrôle interne.
L’audit des plans locaux de contrôle interne devrait devenir une
priorité. Il donnerait à la caisse centrale une information plus précise sur
la réalité du déploiement de son dispositif. En outre, cet audit sera
indispensable à l’agent comptable de la CCMSA pour valider,
conformément aux normes applicables, les comptes des caisses et
fédérations du réseau. A leur tour, les commissaires aux comptes chargés
de la certification des comptes combinés devront apprécier la qualité et
l’efficacité de cet audit. C’est dire qu’il s’agit là d’un enjeu stratégique.
185. Selon la caisse d’Alsace, deux cinquièmes de ses erreurs tiennent à l’encodage
géographique. Une automatisation aurait été mise en place pour en éviter le
renouvellement.
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
155
V - Les contrôles effectués sur l’Etat employeur
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Les charges sociales versées par l’Etat ont atteint 10 739 M€ en
2007, dont 5 550 M€ de cotisations d’assurance maladie et 2 972 M€ au
titre des allocations familiales, sur la base de la législation actuellement
appliquée (mais la Cour a déjà souligné le caractère contestable des
réductions d’assiette et de taux dont bénéficient les employeurs
publics)
186
.
L’article 74 de la loi de financement de la sécurité sociale pour
2004 prévoit que la Cour contrôle les paiements des contributions
sociales dont sont redevables les administrations centrales de l’Etat, les
services déconcentrés étant contrôlés par les URSSAF et les CGSS. La
juridiction a rendu compte, dans ses précédents rapports, des contrôles
effectués sur les collaborateurs occasionnels et sur le ministère de la
justice. Ce chapitre présente les contrôles auxquels la Cour a procédé en
2008 sur le ministère de l’agriculture et de la pêche (MAP) ainsi que les
contrôles réalisés pour la première fois par les URSSAF sur les services
déconcentrés de l’Etat.
A
–
Le contrôle du ministère de l’agriculture et de la
pêche
1
–
Une gestion de personnel très centralisée
Bien que doté d’un large réseau de services déconcentrés et
d’établissements d’enseignement technique, ce ministère se caractérise
par la forte centralisation de la gestion de son personnel, puisque moins
de 7 % des 44 489 agents recensés dans le ministère à la mi-2008 étaient
gérés au niveau local (pour l’essentiel des contractuels locaux et des
agents du ministère affectés dans les services déconcentrés en
collectivités d’outre-mer hors DOM
187
).
186. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, p. 158 et suivantes :
« Le montant de la perte de recettes peut donc être estimé à environ 4,5 Md€ pour
l’ensemble du secteur public, dont 3,1 Md€ pour l’Etat (…) ».
187 . Les crédits de personnel liquidés et payés localement servent également à
financer l’action sociale, les vacations de jurys d’examen ainsi que les heures
occasionnelles des enseignants de l’enseignement technique et supérieur agricole
gérés dans les services régionaux de formation.
156
C
OUR DES COMPTE
Le ministère de l’agriculture a restreint le champ de la gestion
locale, en faisant passer de nouvelles catégories de personnel sur les
circuits de paiement centraux. Compte tenu des risques en termes de
sécurité juridique et de qualité des contrôles inhérents à ce mode de
gestion, le ministère s’est fixé comme objectif l’élimination de la paie par
mandatement dans les services déconcentrés au 1
er
janvier 2009.
Cet objectif a déjà été réalisé pour le paiement des vacations des
membres des jurys de concours, qui, jusqu’en 2005, étaient payés par
mandat par les directions régionales de l’agriculture sur des crédits
délégués par l’administration centrale. Le passage à la paie sans
ordonnancement préalable (PSOP) pour tous les intervenants constituera
un progrès même si les premières applications ont suscité, dans un
premier temps, des retards de paiement aujourd’hui en phase de
résorption.
La gestion de personnel centralisée s’appuie sur une chaîne de
traitement de l’information intégrée, de la saisie des données au niveau
local à la génération des mouvements de paie à destination du Trésor
public. Cette organisation de la PSOP au sein du ministère de
l’agriculture favorise l’harmonisation des pratiques des gestionnaires.
Elle constitue un élément de sécurisation du traitement des rémunérations
et par là même du paiement des contributions sociales de l’Etat
employeur. Les contrôles réalisés sur le flux des données ne garantissent
pas pour autant la qualité des paramètres introduits dans l’application.
Dès lors, comme l’a souligné un audit de l’inspection générale des
finances, il est souhaitable que le ministère mette en place une véritable
politique
de
contrôle
interne,
associant
contrôles
thématiques
transversaux et exploitation systématique des anomalies décelées par le
réseau du Trésor public.
2
–
Les contrôles effectués par la Cour
La Cour a procédé à deux types d’investigations :
a)
Contrôle par sondages
Les contrôles réalisés sur les cotisations payées pour un échantillon
de 120 agents font ressortir un nombre assez élevé d’anomalies (seules 94
fiches sont considérées comme tout à fait correctes) mais dont l’incidence
financière
est
faible.
Ces
anomalies
concernent
notamment
les
rémunérations accessoires versées par d’autres ministères à des agents du
MAP ou à des agents dont le statut est susceptible de changer en cours
d’année (atteinte de l’âge de la retraite).
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
157
La Cour a également examiné l’utilisation de crédits de
fonctionnement assimilables à des compléments de rémunération, parmi
lesquels on peut signaler les dossiers de liquidation pour l’acquisition de
vêtements. Certains agents du MAP bénéficient en effet annuellement
d’une «allocation d’habillement » remise sous forme de bons de
commandes individuels. Dans la mesure où cette dépense ne correspond
pas à la prise en charge d’une contrainte professionnelle, elle devrait être
réintégrée dans les primes et indemnités et comme telle être soumise aux
prélèvements sociaux imposés par le statut des agents bénéficiaires (CSG
et CRDS pour les titulaires, ensemble des contributions et des cotisations
pour les non titulaires).
b)
Examen des avantages en nature
Aucun avantage en nature n’est intégré par le ministère de
l’agriculture et de la pêche dans le calcul de ses cotisations et
contributions sociales. Certains agents du ministère bénéficient cependant
de prestations susceptibles d’être ainsi qualifiées, notamment de
l’attribution de logements de fonction, en particulier dans l’enseignement
agricole.
A la demande de la Cour, un recensement du parc de logements de
fonction a été entrepris, faisant ressortir trois situations :
-
celle des logements affectés aux agents de l’administration centrale et
des services déconcentrés, peu nombreux (une vingtaine de logements)
et répartis de manière diverse sur l’ensemble du territoire ;
-
celle des logements gérés par la direction de l’enseignement
supérieur, plus nombreux, certains établissements d’enseignement
disposant d’un parc immobilier important ;
-
celle des logements dont bénéficient les agents de l’enseignement
technique agricole, sur lesquels le ministère ne dispose d’aucune
information depuis la mise en oeuvre des lois de décentralisation, qui
ont transféré aux régions le patrimoine des établissements publics
d’enseignement technique.
158
C
OUR DES COMPTE
L’absence de logique fonctionnelle dans la répartition de ce parc
entre les agents et les services peut dans certains cas conduire à mettre en
doute la « nécessité absolue de service » alléguée pour justifier la gratuité
de la mise à disposition.
Il serait nécessaire que le ministère mette en place un processus
permettant l’identification des avantages en nature par les gestionnaires
de paie, y compris pour l’enseignement supérieur et pour l’enseignement
technique agricole et assure le paiement des cotisations et contributions
sociales correspondantes.
B
–
Les contrôles effectués par les URSSAF sur les
services déconcentrés
1
–
Les contrôles effectués
Alors avoir réalisé des « contrôles tests » de différents services
pendant les années 2005 et 2006, les URSSAF ont procédé, en 2007, au
contrôle de plusieurs services déconcentrés de l’Etat dans le domaine de
l’action sociale et de la santé (DRASS et DDASS), du travail et de la
formation professionnelle (DRTEFP et DDTEFP) et de la jeunesse et les
sports (DRDJS, DDJS, CREPS), sur la base d’un plan de contrôle
national. Pour chacun des ministères concernés, un échantillon de quatre
à six régions a été retenu comme cible de contrôle, représentant un total
de 80 services déconcentrés. Ces contrôles ont mobilisé 294 « jours
inspecteurs ».
La synthèse de ces contrôles établie par l’ACOSS fait ressortir
dans l’ensemble une bonne application de la législation de sécurité
sociale par les services déconcentrés de l’Etat. Les URSSAF ont
néanmoins procédé à des redressements, pour des montants relativement
modestes (1,1 M€).
Les principaux points de redressement relevés sont les suivants :
-
cotisations versées pour des vacataires (notamment correcteurs et
membres des jurys de concours), médecins et membres des comités
médicaux : l’absence de justification du statut de fonctionnaire de
membres de jurys pour lesquels seules la CSG et la CRDS ont été
acquittées a conduit les URSSAF à appliquer aux indemnités versées
les taux de cotisation du régime général ;
-
prestations d’action sociale : les redressements effectués tiennent
souvent au défaut de production de pièces justificatives des dépenses
engagées, les circulaires administratives réglementant l’octroi de ces
LES CONTROLES SOUS LA SURVEILLANCE DE LA
C
OUR
159
prestations permettant souvent d’en faire l’abstraction, contrairement
aux dispositions qui régissent les contrôles des URSSAF ;
-
frais professionnels : les indemnités de changement de résidence ont
systématiquement fait l’objet de redressements, pour des raisons tenant
à l’absence de production de justificatifs de dépenses, le décret du
20 mai 1990 fixant les conditions d’attribution de ces sommes en
dispensant les bénéficiaires ;
-
avantages en nature : des rappels à la législation ont été faits à propos
de l’utilisation de véhicules, dont l’usage strictement professionnel
n’est pas toujours démontré selon les URSSAF. Contestant les motifs
avancés pour justifier la mise à disposition gratuite de certains
logements de fonction, les URSSAF ont effectué des redressements
concernant des logements attribués par «nécessité absolue de service ».
L’incapacité de l’administration à préciser le statut de certains
personnels employés comme vacataires, la tendance à la forfaitisation qui
rompt le lien entre la charge supportée par l’agent du fait de son activité
professionnelle et la somme versée par l’employeur, sont à l’origine de la
majorité des redressements effectués par l’URSSAF.
Ces contrôles ont mis au jour, par ailleurs, la discordance entre
l’exigence systématique de production de pièces imposée par les
URSSAF aux entités contrôlées et la simplification des procédures de
gestion des personnels de l’Etat initiée par l’administration. Faute de
résoudre cette contradiction de fond, les contrôles effectués en 2007 et les
nouvelles investigations lancées en 2008 risquent de déboucher sur des
impasses.
2
–
Les améliorations attendues des obligations déclaratives de
l’Etat employeur
Les inspecteurs du réseau de recouvrement sont actuellement dans
l’impossibilité de comparer les effectifs et les cotisations liquidées,
notamment pour les personnels titulaires dont les chiffres sont globalisés
pour la majorité des services déconcentrés d’une même région
188
, dans
l’avis de crédit adressé par les trésoreries générales aux URSSAF. La
réforme des modalités déclaratives de l’Etat engagée après le vote de la
LFSS pour 2004 devrait faciliter l’exercice de ce contrôle par le réseau de
recouvrement.
188. Ce n’est pas le cas des services déconcentrés de l’agriculture, pour l’essentiel
gérés en centrale et dont les rémunérations sont payées par la PGT et la Trésorerie
Générale des Hauts-de-Seine (cf. supra).
160
C
OUR DES COMPTE
Une étape importante a été franchie début 2008 pour l’ensemble
des paies versées sans ordonnancement préalable aux agents titulaires et
non titulaires de l’Etat, qui représentent plus de 93 % des rémunérations
servies. Le recouvrement des cotisations afférentes à ces rémunérations a
été centralisé auprès de 24 organismes de la branche recouvrement (plus
deux CGSS pour les trésoreries des DOM). Le nouveau dispositif mis en
place a entraîné la suppression de l’avis de crédit global utilisé pour les
agents titulaires comme pièce déclarative unique, ce document étant
remplacé par des bordereaux récapitulatifs de transmission similaires à
ceux utilisés par les employeurs privés. A compter du 31 janvier 2009, les
URSSAF recevront également des tableaux récapitulatifs annuels
magnétiques.
Les travaux engagés pour la mise en place de l’opérateur national
de paie (ONP), qui doivent aboutir au 1
er
janvier 2012, se traduiront par la
suppression de la paie après ordonnancement, par une centralisation des
flux de paiement et par une intégration plus poussée de la chaîne de
traitement de l’information. Il importe que les obligations de l’Etat au
regard de la législation sur la sécurité sociale soient prises en compte en
amont dans l’élaboration du cahier des charges de l’ONP.
La plus grande sécurité offerte par ce dispositif et l’évolution des
modalités déclaratives permettront sans doute de revoir la ligne de
partage entre les interventions de la Cour et celles du réseau de
recouvrement, dont les pratiques et les leviers d’action ne sont pas
identiques (impossibilité pour la Cour de procéder à des redressements, le
pouvoir coercitif des URSSAF trouvant a contrario sa limite dans le
caractère insaisissable des biens appartenant à l’Etat). Les diligences
exercées en matière de contrôle interne, dans le cadre de la certification
des comptes de l’Etat, contribueront également à sécuriser le respect par
l’Etat employeur de ses obligations sociales déclaratives et contributives.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
21.
Identifier et intégrer dans l’assiette des cotisations sociales les
avantages en nature octroyés au titre des logements de fonction, y compris
lorsque le parc de logements appartient aux collectivités territoriales (cas
de l’enseignement technique agricole).
22.
Concilier la volonté de simplification administrative et les exigences
posées par le contrôle des obligations contributives de l’Etat employeur
DEUXIEME PARTIE
LA GESTION DES RISQUES
163
Chapitre V
Le financement des dépenses de santé :
répartition et transferts de charge entre
contributeurs depuis 1996
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
165
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Les nouvelles participations forfaitaires instaurées dans la LFSS
2008 visent à organiser un transfert de charge estimé à 800 M€ en
direction des ménages : massives et inacceptables pour les uns, modestes et
inéluctables pour les autres, elles s’inscrivent dans une démarche de
responsabilisation des assurés qui constituait l’un des objectifs de la loi du
13 août 2004 : infléchir la croissance de la consommation de soins en
augmentant la charge directe des ménages.
Les nombreuses mesures qui en ont découlé ainsi que la perspective
de réformes en matière de financement de la couverture maladie, qualifiées
d’ores et déjà de structurelles, ont conduit la Cour à porter son attention
sur la répartition du financement de la dépense de santé entre les
financeurs que sont l’assurance maladie obligatoire (AMO), les assurances
complémentaires (AMC), l’Etat et les ménages.
A cette fin, la Cour a souhaité faire le point sur la situation en 2006,
analyser les évolutions marquantes au cours de la dernière décennie
189
et
procéder à une estimation des changements intervenus suite à la loi de
2004.
En outre, malgré l’insuffisance d’informations pertinentes, il est
apparu nécessaire de compléter cette approche macro-économique
focalisée sur les versements directs (ou dépense finale) de chaque
financeur, car elle ignore
certaines propriétés de la couverture maladie, à
savoir son coût et son caractère plus ou moins équitable vis-à-vis de la
population.
I - La dépense finale de santé : qui finance quoi ?
A
–
Les informations disponibles
Les comptes nationaux de la santé répartissent la dépense de santé
entre les agents économiques qui, par leurs versements directs, en
assurent la charge finale : ils permettent ainsi d’estimer à la fois le niveau
de socialisation de la couverture maladie (dépense finale couverte par des
189. Ce sujet a aussi donné lieu à un rapport au Sénat, établi à la demande de ce
dernier.
C
OUR DES COMPTES
166
fonds publics
190
) et son niveau de mutualisation (part de la dépense finale
relevant d’une couverture assurantielle obligatoire et complémentaire).
Les tableaux annuels des dépenses de santé par type de financeur
Les comptes nationaux de la santé sont des comptes satellites
191
de
la comptabilité nationale élaborés par la direction de la recherche, des
études, de l’évaluation et des statistiques (DREES). Ils présentent chaque
année
192
, la contribution de chaque financeur à la dépense de santé
(France entière) dans un tableau intitulé « dépenses de santé par type de
financeur » : y figurent les montants versés directement par l’AMO, les
AMC et les ménages, auxquels s’ajoutent l’Etat, les collectivités locales et
les entreprises.
Les comptes nationaux de la santé constituent l’unique source
d’informations exhaustive pour examiner la répartition du financement de
la dépense de santé entre tous les agents économiques ; les autres sources
d’informations (comptes de la protection sociale, comptes de la sécurité
sociale,
informations
statistiques
en
provenance
des
assurances
complémentaires) ne cernent, par construction, qu’un ou plusieurs des
financeurs, mais jamais la totalité d’entre eux.
Les comptes nationaux de la santé ventilent la dépense de santé en
différents agrégats, le plus large étant celui de la dépense courante de
santé (DCS) ; toutefois, pour mesurer la contribution des agents
économiques, le plus utilisé est celui de la consommation de soins et de
biens médicaux (CSBM) qui correspond en gros au périmètre des
prestations en nature, c’est à dire au sous-ensemble de la consommation
individualisée de soins donnant lieu à remboursements.
190. Les fonds publics correspondent au secteur institutionnel des administrations
publiques -APU- au sens de la comptabilité nationale.
191. Comptes satellites au même titre que les comptes de la protection sociale ou du
handicap par exemple.
192. Le dernier exercice présenté dans les comptes nationaux de la santé est celui de
2006 ; comme l’ensemble de la comptabilité nationale, ils reposent sur un système
d’évaluation triennal glissant : en année « n », un compte provisoire de l’année « n-1 »
est estimé, un compte semi-définitif de l’année « n-2 » est établi et un compte définitif
de l’année « n-3 » est arrêté. Les corrections apportées au compte provisoire sont
parfois significatives.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
167
Répartition du financement selon les agrégats considérés en 2006
En M€
Financeurs
AMO
AMC
Ménages
Autres
193
Total
Consommation de soins et
biens médicaux
120 586
20 436
13 407
2 136
156 565
Parts dans la CSBM
77,02 %
13,05 %
8,56 %
1,36 %
100,00%
Dépense courante de santé
146 932
25 425
13 459
12 494
198 309
Parts dans la DCS
74,09 %
12,82 %
6,79 %
6,30 %
100,00 %
Source :
Cour des comptes d’après les comptes nationaux de la santé (base 2000)
Plus de 8 % de dépenses connexes sont néanmoins exclues de la
CSBM, en raison des conventions qui régissent l’ensemble de la
comptabilité nationale. Ainsi, le concept de santé utilisé dans la base de
référence actuellement en vigueur
194
est le suivant : « ensemble d’actions
concourant à la prévention et/ou au traitement d’une perturbation
provisoire de
l’état de santé ».
Cette définition emporte les conséquences suivantes :
-
depuis le changement de base, les dépenses financées à 100 % par
l’AMO en direction des unités de soins de long séjour et des EHPAD
-5,2 Md€ en 2006- sont sorties de la CSBM et figurent ailleurs comme
dépenses pour les malades ;
-
les dépenses de prévention -5,8 Md€-, même individualisées, sont
aussi exclues de la CSBM parce qu’il s’agit d’actions ne donnant pas
lieu à facturation et remboursement de prestations ;
-
la part des cotisations sociales des professionnels de santé prise en
charge par l’assurance maladie (2,3 Md€) est aussi exclue de la CSBM
puisqu’il ne s’agit pas de prestations en nature (remboursement de
soins aux assurés) ; pourtant, cette aide octroyée aux professionnels de
santé en contrepartie d’une facturation d’honoraires sans dépassements
(le plus souvent par les médecins de secteur 1) constitue une dépense
similaire à celle des dépassements facturés aux AMC et aux ménages
par les médecins du secteur 2 et inclus dans la CSBM.
En réintégrant les trois catégories de dépenses examinées ci-
dessus, l’agrégat de la consommation de soins passe de 78,95 %
(156 565 M€) à 85,66 % (169 868 M€) de la dépense courante de santé
193. Autres : « Etat-CMUC » dans la CSBM, auxquels s’ajoutent les collectivités
locales et les entreprises dans la dépense courante de santé (DCS).
194. La base actuelle de référence est la base 2000, qui s’est substituée à la base 1995
à l’occasion de la présentation des comptes de l’exercice 2003.
C
OUR DES COMPTES
168
(198 309 M€). Les parts de financement des agents économiques sont
alors les suivantes :
Répartition du financement de la consommation de soins élargie
En M€
Montant
AMO
AMC
Ménages
Etat-CMUC
Entreprises
CSBM
156 565
77,0 %
13,1 %
8,6 %
1,4 %
Soins aux personnes
âgées en établissements
5 200
100,0 %
Aide indirecte
(subventions)
2 282
100,0 %
Sous-total
164 047
78,1 %
12,5 %
8,2 %
1,3 %
Prévention isolée
5 821
15,6 %
63,5 %
21,9
%%
TOTAL agrégat élargi
169 868
75,9 %
12,0%
7,9 %
3,4 %
0,8 %
En grisé : n’apparaissent pas comme contributeurs
Source :
Cour des comptes d’après les comptes nationaux 2006 (base 2000)
B
–
La dépense finale de santé hors AMO : des
confusions possibles
La dépense de santé, hors dépense finale supportée par l’assurance
obligatoire, requiert certaines précisions.
1
–
La couverture complémentaire ne se limite à la dépense finale
des AMC
La totalité de la couverture complémentaire ne se limite pas à la
dépense finale des AMC (20 436 M€ en 2006), car elle comporte
également les dépenses de la CMUC qui ne sont pas visibles dans la
présentation des comptes nationaux de la santé : la majeure partie de la
CMUC (celle gérée par les organismes de base) se trouve en effet
intégrée, de manière erronée, dans la dépense finale du 4
ème
financeur
intitulé « Etat-CMUC »
195
pour 1 436 M€, alors que la part gérée par les
organismes complémentaires (211 M€) se trouve incluse dans les
dépenses attribuées aux AMC.
Au
total,
les
remboursements
au
titre
de
la
couverture
complémentaire représentent donc 21 872 M€, soit 14 % de la CSBM et
non 13 %. Le reste à charge, c'est-à-dire le cumul de la dépense finale des
195. L’Etat finance en outre 700 M€ qui se trouvent agrégés avec la CMUC distribuée
par les organismes de base dans les comptes nationaux de la santé : 448 M€ pour
l’aide médicale d’Etat, 168 M€ pour les hôpitaux militaires et 84 M€ pour les anciens
combattants.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
169
ménages et de la couverture complémentaire totale est donc de 35,3 Md€
en 2006 (21 872 M€ + 13 407 M€), soit 23 % de la CSBM.
CMUC : dépenses théoriques, dépenses réelles
Le montant total de la CMUC vu ci-dessus (1 647 M€ = 211 M€ +
1 436 M€) n’est d’ailleurs pas celui qui a été réellement déboursé par les
organismes
de
base
ou
complémentaires
pour
rembourser
leurs
bénéficiaires : il s’agit des paiements dus par le fonds de financement de la
CMU, calculés sur la base du forfait par bénéficiaire (85 € par trimestre ou
340 € par an en 2006) multiplié par le nombre de bénéficiaires. La Cour
estime qu’en 2005, par exemple, la dépense réelle des CPAM au titre de la
CMUC a été supérieure d’environ 120 M€
au montant qui lui a été payé
par le fonds : ce solde non compensé se trouve de facto intégré dans les
dépenses du régime obligatoire.
2
–
La répartition entre ménages et AMC est incertaine
Depuis 2003, suite à une réorganisation peu maîtrisée de la collecte
des données auprès des mutuelles, les montants de prestations versées par
les AMC sont incertains
196
.
Ainsi, le montant de 20,4 Md€ attribué aux AMC semble minoré
de près de 1 Md€ (914 M€ dont 862 M€ au titre des mutuelles), si l’on
observe les montants financiers communiqués à la Cour par les
groupements professionnels des assureurs complémentaires
197
.
La part de financement des AMC à la CSBM serait en ce cas
supérieure de 0,5 point (13,64 % au lieu de 13,05 %)
198
.
Or, les versements directs des ménages exposés dans les comptes
nationaux de la santé sont un solde calculé par différence entre les
montants totaux de dépenses et les montants supportés par les autres
financeurs AMO, Etat et AMC. Dans ce cas, la participation des ménages
à la CSBM, chiffrée à 8,56 %, ne serait que de 7,98 %.
196. A partir de l’exercice 2007, I'ACAM a fourni des informations concernant les
prestations des mutuelles. Selon la DREES, la prise en
compte de cette nouvelle
source conduirait à réévaluer de 700 M€ environ les prestations des seules mutuelles.
197. Fédération nationale de la mutualité française, centre technique des institutions
de prévoyance et fédération française des sociétés d’assurance.
198 . Une minoration similaire d’environ 1 Md€ se lit lorsqu’on compare les
cotisations perçues par les AMC, telles que retracées dans le fonds de financement
CMU, avec celles communiquées par les groupements professionnels.
C
OUR DES COMPTES
170
3
–
Le reste à charge est constitué pour près d’un tiers de
dépassements
La dépense totale supportée par les AMC et les ménages n’est pas
assimilable au co-paiement, à savoir le ticket modérateur et les
participations forfaitaires (forfait journalier hospitalier, forfait de 18 € et
participations sur les actes médicaux instaurées en 2005). En 2006, le co-
paiement ne représente en effet que la moitié du reste à charge.
En revanche, les dépassements de tarifs opposables (soit
d’honoraires des médecins et des dentistes, soit des prix des produits
inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables -LPPR- dont
l’optique) sont en revanche supérieurs à 10 Md€ et en représentent près
du tiers : il ne s’agit là ni de dépenses hors panier de soins remboursable
par l’AMO, ni de dépenses non présentées au remboursement, mais de
dépenses supplémentaires afférentes aux prestations incluses dans le
panier de soins de l’AMO.
En outre, les dépassements ne pouvant être facturés aux
bénéficiaires de la CMUC (environ 7,6 % de la population totale), la
proportion d’un tiers indiquée ci-dessus est en réalité supérieure pour le
reste des personnes.
Répartition du reste à charge en 2006
tous dépassements
10,3 Md€
29%
hors panier et non
présenté au
remboursement
7,4 Md€
21%
co-paiement
18,3 Md€
50%
Source Cour des comptes
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
171
La méconnaissance des dépassements sur les produits de la
LPPR
199
fait obstacle à une comparaison dans le temps de cette partie
problématique du reste à charge, qu’aucun dispositif n’a effectivement
régulée à ce jour et qui livre les assurés à l’inégalité des prises en charge
complémentaires.
C
–
La répartition du financement selon les soins ou
biens médicaux
La répartition du financement est très différente selon les soins ou
biens médicaux. Ainsi, la part directement payée par les ménages est très
faible pour les soins hospitaliers avec, cependant, une différence notable
entre les établissements publics et privés. La dépense finale des ménages
est également très faible pour les transports et les laboratoires d’analyses
avec moins de 3 % ; elle est en revanche très élevée avec plus de 25 %
pour certaines dépenses comme les soins dentaires (inclus dans les soins
ambulatoires) ou l’optique (incluse dans les autres biens médicaux).
199. En 2006, les dépassements sur honoraires étaient de 5,6 Md€ (2,1 Md€ pour les
médecins et 3,5 Md€ pour les dentistes), mais les informations existantes ne
permettent pas d’indiquer un montant exact des dépassements sur les produits de la
LPPR, vraisemblablement compris dans une fourchette située entre 3,5 Md€ et
4,5 Md€. Le diagramme retient 3,5 Md€.
C
OUR DES COMPTES
172
Les catégories de dépenses de la CSBM en 2006 : parts et contributions
des financeurs
En M€
Dépenses par catégorie
Montants
Structure
Parts des financeurs
AMO
AMC
Ménages
Autres
Hôpitaux du secteur public
54 151
34,59%
94,21%
2,68%
1,90%
1,20%
Hôpitaux du secteur privé
15 707
10,03%
83,92%
9,23%
5,54%
1,32%
1
Sous-total : Soins hospitaliers
69 858
44,62%
91,90%
4,15%
2,72%
1,23%
- Médecins
19 881
12,70%
70,64%
18,28%
9,40%
1,67%
- Auxiliaires
9 689
6,19%
80,89%
9,18%
9,17%
0,76%
- Dentistes
9 080
5,80%
34,75%
34,71%
28,28%
2,26%
Laboratoires d'analyses
4 135
2,64%
74,03%
21,29%
2,86%
1,82%
2
Sous-total : Soins ambulatoires
42 785
27,33%
65,67%
20,38%
12,32%
1,63%
3
Transports de malades
3 083
1,97%
94,10%
3,23%
1,96%
0,71%
Officines pharmaceutiques
200
31 942
20,40%
67,51%
18,92%
12,09%
1,48%
Autres biens médicaux (optique,
prothèses, orthèses, VHP, petits
matériels et pansements)
8 898
5,68%
43,00%
30,02%
26,00%
0,98%
4
Sous-total : biens médicaux
40 840
26,08%
62,17%
21,34%
15,12%
1,37%
CSBM (1+2+3+4)
156 565
100,00%
77,02%
13,05%
8,56%
1,36%
En montants
156 565
120 586
20 436
13 407
2 136
Source :
Cour des comptes d’après les comptes nationaux de la santé 2006 (base
2000)
II - Une relative stabilité depuis1996
Au cours des dix dernières années, la répartition du financement de
la CSBM s’est peu modifiée, l’évolution - en plus ou en moins- de chaque
contributeur étant inférieure à un point.
La relative stabilité des parts de chaque contributeur, constatée de
1996 à 2006
201
, contraste avec les périodes précédentes, essentiellement
marquées par l’extension de la couverture obligatoire et, en conséquence,
par une forte augmentation de la part financée par l’AMO qui, de 1950 à
1980 est passée de 50 % à 80 % de la CSBM.
200. Y compris rétrocession hospitalière.
201. Source DREES : cinquante années de dépenses de santé : une rétropolation de
1950 à 2005 (mai 2007).
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
173
Répartition de la dépense de CSBM par financeur en 1996 et 2006
AMO
AMC
Ménages
Autres
Total
2006
77,02 %
13,05 %
8,56 %
1,36 %
100,00%
1996
76,96 %
12,63 %
9,28 %
1,13 %
100,00%
Ecarts
2006 / 1996
+0,06 point
+0,42 point
-0,72 point
+0,23 point
Source :
Cour des comptes d’après les comptes nationaux de la santé (base 2000)
Certaines modifications sont cependant intervenues au cours de la
période.
A
–
La population bénéficiant d’une couverture
complémentaire a augmenté
Seule la contribution des ménages a diminué en part relative depuis
1996 :
cette
faible
diminution
s’explique
principalement
par
l’augmentation
de
la
population
bénéficiant
d’une
couverture
complémentaire (AMC + CMUC) et non par une amélioration de la
couverture par bénéficiaire
202
: de 1996 à 2006, la part de la population
ainsi couverte est passée de 84,0 % à 92,8 %
203
.
B
–
Deux mouvements de fond se sont neutralisés
La répartition du financement de la CSBM a évolué sous l’effet de
deux mouvements concomitants qui ont affecté la structure des
prestations consommées et le taux moyen de prise en charge de l’AMO et
se sont neutralisés.
1
–
La structure de la consommation s’est fortement modifiée
Au cours des dix dernières années, la structure de la consommation
s’est déformée en faveur des soins ou des produits les moins remboursés
par l’AMO, ce qui aurait dû diminuer la part de financement de cette
dernière :
202. Alors que la croissance annuelle moyenne de la population couverte par les
AMC est supérieure de 0,57 point à celle de la population totale consommante, celle
de la dépense totale des AMC n’est supérieure que de 0,35 point à celle de la CSBM :
il en résulte que le niveau moyen de couverture complémentaire par assuré a
légèrement diminué.
203. Ce taux de 92,8 % est celui constaté par l’enquête santé et protection sociale
(ESPS) de 2006 dont l’exploitation a été présentée en avril 2008.
C
OUR DES COMPTES
174
-
la part des soins hospitaliers, qui représente 44,6 % de la CSBM en
2006, a diminué de plus de 4 points depuis 1996 ;
-
dans le même temps, la part des biens médicaux a progressé de
3,5 points (de 22,6 % à 26,1 % de la CSBM) ;
-
le troisième bloc de dépenses (soins ambulatoires) est resté stable (de
27,2 % à 27,3 %).
Cette déformation de la structure de consommation s’inscrit
d’ailleurs dans une tendance de long terme qui a démarré au début des
années 1980.
2
–
Le niveau moyen de prise en charge de l’AMO sur les biens
médicaux a beaucoup augmenté
Cependant, le niveau moyen de prise en charge par l’AMO des
biens médicaux, quand bien même il demeure moins important que celui
des prestations hospitalières et ambulatoires, a progressé de 6,5 points
dans le même temps, en passant de 55,7 % à 62,2 % (plus de 5 points
pour les seuls médicaments dont le taux est passé de 62,2 % à 67,5 %).
Cette augmentation du niveau de prise en charge a neutralisé la réduction
de financement de l’AMO que le changement de structure de
consommation aurait dû entraîner.
Au total, on constate que la stabilité de la répartition du
financement de la CSBM, prise globalement et examinée plus haut,
résulte de changements importants par catégorie de prestations.
En appliquant à la CSBM totale de 2006 la structure de
consommation et les taux de prise en charge moyens de 1996, on peut
valoriser l’ampleur de ces deux mouvements.
Valorisation des deux mouvements conjugués entre 1996 et 2006
En M€
Total des deux effets
AMO
AMC
Ménages
Autres
Soins hospitaliers
-5 995
+133
-654
-8
Soins ambulatoires
-344
-493
+867
+192
Biens médicaux
+6 077
+911
-1 651
+167
CSBM
+97
+663
-1 122
+363
de 2004 à 2006
- 549
+ 520
+ 52
- 23
Source :
Cour des comptes
Ainsi de 1996 à 2006, les effets conjugués de ces deux
modifications ont accru la dépense de l’AMO de 6 Md€ sur les biens
médicaux : la déformation de la structure de consommation en explique
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
175
56 % (3,4 Md€) et l’augmentation du taux moyen de remboursement
44 % (2,6 M€).
De même, la diminution de la part des ménages est la résultante de
mouvements divers : les ménages pris globalement sont très nettement
gagnants sur les biens médicaux avec une réduction de leurs versements
équivalente à 1 651 M€ toutes choses égales par ailleurs, un peu moins
sur les soins hospitaliers (-654 M€), mais ils perdent de manière
significative sur les soins ambulatoires qui augmentent leur contribution
de +867 M€. Cette différenciation des gains et pertes selon le type de
prestations doit être soulignée, car les assurés pris individuellement ne
présentent pas le même profil de consommation selon leur âge et leur
niveau de revenu.
C
–
Ces évolutions s’inscrivent dans une dynamique de
croissance
La présentation des financements en parts de CSBM comporte des
limites et nécessite d’être complétée :
-
la part prépondérante de l’AMO conduit en effet à estomper
l’ampleur des évolutions des trois autres participations ;
-
l’évolution de la part relative de chaque financeur (augmentée ou
réduite) masque que ces phénomènes de transferts s’opèrent dans une
dynamique générale de croissance : ainsi, la diminution de 0,72 points
sur dix ans de la participation directe des ménages au financement de
la CSBM a correspondu à une augmentation annuelle moyenne en
valeur de +3,7 %.
Rapportée aux agrégats nationaux, la consommation de soins et
biens médicaux (156,6 Md€) représente 12,1 % de la consommation
effective totale des ménages (1 292,8 Md€) en 2006. En 1996, elle
représentait 11,4 % (100,4 Md€ sur 877,3 Md€).
C
OUR DES COMPTES
176
Comptabilité nationale et CNS (exercice 2006) : le poids de la CSBM
Comptabilité
nationale
CNS
Santé /
Total
Consommation effective
des ménages
204
1 292,8 Md€
CSBM :
156,6 Md€
12,1 %
dont dépenses finales des
ménages
205
993,2 Md€
Ménages + AMC :
33,8 Md€
206
3,4 %
dont dépenses
individualisables des APU
2 76,0 Md€
AMO + Autres :
122,8 Md€
44,5 %
Source :
Cour des comptes
Evolution en valeur de chaque participation financière à la CSBM au
regard de quelques indicateurs
En %
2006/1996
Croissance
totale
Taux de
croissance
annuel moyen
CSBM
55,9
4,54
Dépense finale AMO
56,0
4,55
Dépense finale AMC
61,2
4,89
Dépense finale ménages
43,9
3,70
Dépense finale autres financeurs
87,8
6,50
Reste à charge AMC + ménages
53,8
4,40
Population totale
6,0
0,58
dont âgée> 75 ans
42,6
3,61
Population bénéficiant d’une couverture complémentaire
17,1
1,59
Population couverte par les AMC
12,0
1,14
PIB en valeur
41,4
3,52
Consommation effective totale des ménages
47,4
3,95
Consommation finale totale des ménages
45,5
3,82
Revenu disponible brut
46,3
3,88
Revenu disponible ajusté
207
47,5
3,96
Source :
Cour des comptes d’après les comptes nationaux de la santé 2006 (base
2000) et les indicateurs de l’INSEE
204. La consommation effective recouvre l’ensemble des biens et services qu’utilisent
effectivement (ou consomment) les ménages, quelle que soit la manière dont ils sont
financés, ce qui dans le domaine de la santé correspond en gros à la CSBM.
205. La dépense de consommation finale recouvre les dépenses que les ménages
supportent directement : dans le domaine de la santé, elle correspond à la part de
CSBM financée par les ménages, augmentée de la contribution des AMC.
206. 33,8 Md€
= 13,4 Md€ (versements directs des ménages) + 20,4 Md€ (prestations
versées par les AMC).
207. Revenu ajusté : revenu disponible brut augmenté des transferts sociaux en nature.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
177
La CSBM en valeur a connu une croissance annuelle moyenne de
4,54 %, supérieure de plus d’un point à celle du PIB (+3,52 %) et de
0,6 point à la consommation effective totale des ménages (+3,95 %). Sur
l’ensemble de la période, ces écarts de rythme de croissance
ont
représenté, en montants, un surplus de CSBM de 14,7 Md€ (par rapport
au rythme du PIB) et de 8,6 Md€ (par rapport au rythme de la
consommation effective totale).
Dans ce contexte, la contribution de l’AMO a connu une
croissance similaire à celle de la CSBM (en effet, sa part est restée
stable), alors que la dépense finale des ménages (+3,7 % en moyenne par
an) a connu une évolution inférieure de 0,84 point à celle de la CSBM (sa
part a en effet diminué) et celle des AMC une évolution supérieure de
0,35 point à celle de la CSBM (la population couverte par les AMC a en
effet augmenté).
Enfin, la dépense finale supportée conjointement par les ménages
et les AMC a augmenté en moyenne de 4,40 % par an : de 33,8 Md€ en
2006, elle a donc augmenté plus vite que le revenu disponible des
ménages (de 0,5 point par rapport au revenu brut et de 0,4 point par
rapport au revenu ajusté).
III - Les mesures de transfert introduites depuis la
loi du 13 août 2004
La
loi
du
13 août
2004
a
introduit
une
démarche
de
responsabilisation des assurés, un de ses objectifs affichés étant
d’infléchir la croissance de la consommation de soins en augmentant la
charge directe des ménages.
L’hypothèse centrale sur laquelle a reposé cette démarche est celle
d’une élasticité entre le niveau de la charge directe laissée aux assurés et
leur niveau de consommation, la régulation par l’offre de soins étant dès
lors considérée comme nécessaire mais non suffisante. Les principes
affichés qui complétaient cette hypothèse sont de deux ordres : d’une
part, les transferts financiers effectifs seraient moindres, à terme, que
ceux estimés ab initio puisque la consommation est précisément appelée à
diminuer, d’autre part, cette incitation à une moindre consommation ne
conduirait pas à dégrader le recours aux soins utiles, car elle se
concentrerait sur des soins inutiles ou de confort.
L’instrument principal de cette nouvelle politique, dont le seul
antécédent est l’éphémère ticket modérateur d’ordre public introduit en
1979, a résidé dans les contrats responsables applicables en théorie à
C
OUR DES COMPTES
178
partir de la fin de 2005 : ceux-ci permettent aux pouvoirs publics
d’intervenir dans la définition du panier de soins remboursables par les
assureurs complémentaires, qui bénéficient en contrepartie d’une
incitation fiscale. Selon l’enquête déclarative réalisée par la DREES
auprès d’un échantillon de complémentaires, les contrats responsables
concerneraient près de 100 % des contrats les plus souscrits (appelés
« contrats modaux »)
208
.
Une analyse des informations relatives à cette période récente est
donc apparue nécessaire.
A
–
Le chiffrage ex ante des mesures de transfert
Contrairement aux comptes nationaux de la santé qui enregistrent
la résultante de diverses évolutions, cette seconde approche tente de
cerner l’impact financier théorique, en année pleine et toutes choses
égales par ailleurs, de chaque mesure modifiant les règles de prise en
charge et officiellement applicable de 2004 et 2008.
L’ensemble des mesures réputées produire des économies pour
l’AMO est estimé ex ante par le ministère et la CNAMTS
209
. Parmi
celles-ci, la Cour n’a retenu que les mesures s’accompagnant d’un
transfert de charge voulu entre financeurs. La Cour a en outre pris en
compte deux modifications du mode de rémunération des opérateurs de
soins ayant induit un transfert de charge : il s’agit de la T2A et de
l’augmentation des rémunérations forfaitaires des médecins financées à
100 % par l’AMO
210
.
C’est sur cette base qui figure dans la colonne AMO du tableau ci-
dessous, que la Cour en a ensuite évalué les transferts sur la couverture
complémentaire et les ménages en utilisant des hypothèses rustiques de
répartition, aucune clef de répartition constatée par type de prestation
208. Etudes et résultats n° 635, mai 2008 (page 2).
209. Elles sont généralement convergentes à quelques exceptions près, comme le
montant des participations forfaitaires de 2008, la participation de 18 € aux actes
supérieurs à 91 € ou le rendement de l’ordonnancier bizone. La Cour a retenu les
estimations de la DSS, sauf pour les participations forfaitaires de 2008.
210. Celles-ci ont augmenté d’environ 560 M€ (source CNAMTS) sur la période,
dont il convient de déduire 100 M€ provenant à l’inverse de l’extinction du PIRES et
du médecin référent : au total le surcoût pour l’AMO est donc de 460 M€, ce qui
représente une économie pour les complémentaires de 157 M€, équivalent au ticket
modérateur (TM) moyen constaté de 33 % sur ces prestations. La CNAMTS avait
proposé en juillet 2007 (sans être suivie) qu’une contribution de 220 M€ soit payée à
ce titre par les complémentaires.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
179
n’étant proposée ni par le ministère ni par la CNAMTS, ni par
l’UNOCAM.
Hypothèses de répartition entre couverture complémentaire et
ménages utilisées par la Cour
- lorsqu’il s’agit d’une mesure de déremboursement (médicaments), le
transfert est réalisé sur les ménages en totalité ;
- lorsqu’il s’agit d’une mesure de responsabilisation (participations
financières ou relèvement du TM pour les actes hors parcours de soins)
non prise en charge par les contrats responsables, le transfert est également
imputé en totalité aux ménages : on a considéré que les contrats
responsables ont été appliqués à 100 % ;
- lorsqu’il s’agit d’une diminution de remboursement de l’AMO dont la
prise en charge par les AMC n’est pas prohibée par les contrats
responsables, la clef retenue pour répartir le transfert entre les ménages et
la couverture complémentaire totale (y compris CMUC) est de 8/92. Dans
ce cas de figure, la totalité du co-paiement (TM et participation forfaitaire)
a été considérée comme prise en charge par la couverture complémentaire,
même si, dans la pratique, la chose s’est un peu compliquée pour la baisse
du taux de remboursement de certains médicaments de 35 % à 15 %, les
mutuelles ayant fait connaître leur souhait, dans ce cas, de ne plus
rembourser le TM.
C
OUR DES COMPTES
180
Estimation en année pleine des transferts attendus des mesures
applicables entre 2004 et 2008
En M€
Mesures
Années
d’application
Montants transférés entre
financeurs
AMO
Complém.
Ménages
Participations forfaitaires
Forfait journalier hospitalier
-100 %
+ 92 %
+ 8 %
10,67 € à 1 3€ (décembre 2003) et FJH psy créé 9 €
2004
- 140
+ 129
+ 11
Trois augmentations successives d’1 € par an
2005 à 2007
-300
+ 276
+ 24
PF 18 € sur actes > 91 € (septembre 2006)
-100 %
+ 92 %
+ 8 %
En établissements de santé
2007
- 105
+ 97
+ 8
En ville, différé
2008
- 40
+ 37
+ 3
PF plafonnée à 50 € par an
-100 %
+ 0 %
+ 100 %
1 € par acte médical, radiologie, biologie - plafond 1 €
par jour
2005
-430
+ 430
Hausse du plafond à 4 € par jour (août 2007)
2007
- 150
+ 150
PF plafonnée à 50 € par an
2008
-100 %
+ 0 %
+ 100 %
0,50
€ par boîte de médicaments et par acte
paramédical, 2 € par transport non urgent (211)
-800
+ 800
Parcours de soins coordonné
-100 %
+ 0 %
+ 100 %
TM sur actes hors parcours + 10%
2006
-150
+ 150
TM sur actes hors parcours + 20%
2007
-150
+ 150
Dépassements autorisés
2006
+ 25
Médicaments
Déremboursement avec perte de rendement de 10% dû
aux reports de prescription (40-0 en taux constaté)
2006
- 270
- 373
+ 643
Baisse de taux veinotoniques. 35 à 15 (40-20 en taux
constaté) avec baisse de prix de 15 %
2006
- 132
+ 121
+11
Veinotoniques déremboursés (20-0 en taux constaté)
avec baisse de 20 % de la consommation
2008
- 106
- 422
+ 528
Baisse de taux 35-15 (40-20 en taux constaté) de 41
autres médicaments
2007
- 20
+ 18
+ 2
Déremboursement de 41 autres médicaments à 15 %
(20-0)
2008
- 15
- 77
+ 92
Mesures relatives aux ALD
-100 %
+ 92 %
+ 8 %
Ordonnancier bizone
2005 à 2007
- 213
+ 196
+ 17
Médicaments à 35 % non exonérés en ALD / maîtrise
médicalisée
2008
- 170
+ 156
+ 14
Transferts induits
T2A (212)
2004 – 2006
-100 %
+ 92 %
+ 8 %
- 250
+ 230
+ 20
Rémunérations forfaitaires des médecins
2004 – 2007
+ 100 %
- 100 %
0
+ 157
-157
Total
- 3 284
+ 231
+3 078
211. Plafonds par jour : 2 € pour les actes paramédicaux, 4 € pour les transports
212. Le HCAAM indique un montant supplémentaire de TJP de 100 M€ sur les exercices 2004
et 2005 (source DGCP) ; les données de la DGCP indiquent pour 2006 une croissance de
220 M€ des produits de classe II (dont 100 M€ au titre du FJH), d’où une augmentation de
120 M€ pour les TJP. L’augmentation totale de 220 M€ des TJP doit en outre être majorée
pour tenir compte des PSPH : 220 * 1,15 = 250 M€.
Source :
Cour des comptes d’après les estimations d’économie AMO du ministère et de la
CNAMTS
211
212
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
181
B
–
Deux constats essentiels sur les transferts
théoriques
1
–
Les transferts de charge ne concernent pas que les « soins de
confort »
Dans cette estimation, les transferts identifiés comme faisant suite
aux mesures décidées depuis 2004, représentent une diminution de
3,3 Md€ des dépenses d’AMO : la moitié est produite par le médicament
(y compris les mesures spécifiques aux ALD et la participation forfaitaire
par boîte introduite en 2008), 850 M€ par les soins ambulatoires avec
principalement les participations forfaitaires sur les actes et les pénalités
du parcours de soins coordonné, enfin 800 M€ par l’hôpital. Cette
répartition relativise l’affirmation selon laquelle ces transferts n’auraient
pour objet que les produits de confort.
2
–
Les transferts impactent principalement les ménages, mais ne
semblent pas infléchir la tendance de consommation
La diminution de la part de l’AMO s’obtient principalement par un
transfert sur les ménages, la charge supplémentaire de la couverture
complémentaire étant mineure : cette répartition est liée à l’application
des contrats responsables par les assureurs complémentaires.
En ce qui concerne les transferts effectués sur les ménages, les
deux tiers concernent les biens médicaux (y/c le médicament) et un tiers
les soins ambulatoires, les transferts étant quasiment inexistants sur les
dépenses hospitalières ; à l’inverse, pour les AMC, la faible augmentation
de leur part résulte en fait de deux mouvements contraires : elle augmente
de plus de 700 M€ sur les dépenses hospitalières, mais est compensée en
partie par une diminution de l’ordre de 400 M€ sur les médicaments,
auxquels s’ajoute une faible diminution sur le secteur des soins
ambulatoires.
Au vu des dates théoriques d’application, rappelées dans la
colonne grisée du tableau n° 5, les montants transférés se répartissent
comme suit.
Transferts par période
En M€
AMO
Couverture complémentaire
Ménages
2004 - 2006
- 1 584
- 63
+ 1 313
2007 - 2008
- 1 700
+ 294
+ 1 765
Total
- 3 284
+ 231
+3 078
Source :
Cour des comptes
C
OUR DES COMPTES
182
Les mesures de transferts se sont donc amplifiées sur les deux
exercices 2007 et 2008, puisqu’elles produisent à elles seules plus de la
moitié des transferts étalés sur cinq ans : les participations financières de
2008 en représentent la cause principale (800 M€).
Les effets immédiats de telles mesures sont évidents : le dispositif
du parcours de soins coordonné
213
par exemple a produit une décrue
importante du recours aux spécialistes : outre que l’économie pour
l’AMO a été absorbée par des hausses tarifaires destinées à compenser,
dès l’année suivante, le manque à gagner des médecins, la tendance
lourde ne semble pas cependant avoir été modifiée : stagnation des actes
des médecins généralistes et surtout tendance haussière du recours aux
spécialistes.
Evolution des montants remboursés des actes de spécialistes
(consultations + actes techniques) avec et sans ticket modérateur en
volume et les tendances sous jacentes
En milliers d’€
495 000
505 000
515 000
525 000
535 000
545 000
555 000
janv-
03
avr-
03
juil-
03
oct-
03
janv-
04
avr-
04
juil-
04
oct-
04
janv-
05
avr-
05
juil-
05
oct-
05
janv-
06
avr-
06
juil-
06
oct-
06
janv-
07
avr-
07
CS + actes techniques
Tendance 2003-2004
Tendance 2005-mai 2007
Source :
DSS d’après CNAMTS
214
Ce constat conduit à relativiser l’effet dans le temps des transferts
organisés sur les seuls ménages qui ne bénéficient plus alors de la
213. Ce dispositif a été analysé par la Cour dans son rapport de septembre 2007.
214 . Champ : régime général, France métropolitaine, date de soins, dépenses
remboursées.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
183
mutualisation que leur apporte la couverture complémentaire ; il suggère
également que les mesures prises depuis 2004 ne résolvent pas de
manière structurelle le problème que pose le rythme de croissance des
dépenses de santé, supérieur à la croissance du PIB.
C
–
Un probable contre-transfert dans la réalité
Le rapprochement entre ces estimations théoriques et le bilan
retracé par les comptes nationaux, sur la période allant de 2004 à 2006
(les exercices suivants n’étant pas disponibles), montre cependant la
complexité de phénomènes qui interagissent ainsi que l’existence d’un
probable contre-transfert.
Rapprochement des comptes nationaux et des estimations de mesures (de
2004 à 2006)
En M€
AMO
Couverture complémentaire
Ménages
Modifications de
répartition dans les CNS
- 549
+ 520
+ 52
Estimation des montants
transférés par les mesures
- 1 584
- 63
+ 1 313
Source :
Cour des comptes
Ce rapprochement montre que la diminution de la contribution de
l’AMO enregistrée dans les comptes nationaux de la santé est inférieure
d’environ 1 Md€ à celle que devaient produire les mesures de transferts
applicables au cours de cette période. Outre que l’application des mesures
(retard, perte de rendement etc.) peut expliquer une partie de cet écart, ce
décalage conduit à émettre l’hypothèse d’une augmentation concomitante
du niveau de prise en charge de l’AMO qui neutraliserait, à hauteur des
2/3, les effets des mesures destinées à diminuer sa participation à la
CSBM (de l’ordre de 1 Md€ sur 1,5 Md€) et constituerait en quelque
sorte un contre-transfert.
De même, les parts respectives des AMC et des ménages évoluent
de manière totalement différente dans les deux séries : alors que la charge
finale des ménages devait augmenter de 1,3 Md€ sous l’effet des mesures
de responsabilisation, elle a été peu modifiée dans les CNS (+52 M€). A
contrario, la part des AMC s’est alourdie d’environ 500 M€ dans les
CNS, alors que les mesures ne devaient les concerner qu’à la marge
(-58 M€), en raison des contrats responsables. Tout se passe comme si le
transfert de financement organisé en direction des ménages avait été pris
en charge par les complémentaires et les contrats responsables pas encore
appliqués en pratique en 2006.
C
OUR DES COMPTES
184
Ces quelques éléments conduisent à s’interroger sur la portée réelle
de l’analyse produite dans le PLFSS 2008 (annexe 7) :
« La part dans le financement de la consommation de soins et de
biens médicaux prise en charge par la sécurité sociale et l’État est restée
stable depuis le début des années 1980 à hauteur de 78 %. Cette part croît
de manière structurelle via l’augmentation du nombre d’assurés qui
bénéficient d’une exonération du ticket modérateur et par la déformation
de la structure de consommation vers des soins et biens médicaux mieux
remboursés
.
À l’inverse les mesures de limitation de la prise en charge
n’ont eu qu’un impact très limité : création du secteur avec droit à
dépassement, baisse ou suppression de la prise en charge de certains
médicaments, révision des règles de prise en charge des soins liés aux
actes techniques lourds, participation forfaitaire de 1 €, parcours de
soins. »
En premier lieu, la déformation de la structure de consommation
ne conduit pas à augmenter la part des soins et biens médicaux les mieux
remboursés : c’est précisément le contraire qui s’est produit comme on l’a
vu précédemment. La part des soins hospitaliers qui sont les plus
remboursées diminue (91,9 % de taux de prise en charge AMO), alors
que la part des biens médicaux, les moins remboursés (62,17 %),
augmente.
En second lieu, si le taux de prise en charge de l’AMO augmente
sous l’effet des affections de longue durée (ALD) et/ou de la prise en
charge de médicaments innovants plus coûteux et que sa part dans la
CSBM reste globalement stable, c’est que précisément les mesures de
transfert produisent des effets qui contribuent à financer le surcroît de
charge.
Le surcoût dû à l’exonération des ALD
L’exonération constitue, comme on l’a vu, un surcoût pour l’AMO
et un transfert de charges en faveur des ménages ou des AMC. Il y avait
près de huit millions d’ALD déclarées en 2006, en augmentation nette
d’environ 250 000 par an (pour un flux entrant brut de + un million).
Le transfert financier supplémentaire qui s’opère chaque année et
consomme une partie des économies dégagées par l’instauration de
nouvelles formes de co-paiement, est de l’ordre de 250 M€ en valeur
2007 : le coût global moyen d’une ALD pour l’AMO est en effet de
l’ordre de 10 000 € (analyse de la CNAMTS sur les dépenses 2007) et la
part correspondant à l’exonération de 1 000 €, soit 10 % (ce qui
correspond à taux moyen de prise en charge par l’AMO de 90 %).
Toutefois, comme le coût de traitement des ALD connaît une forte
progression, ce transfert annuel supplémentaire, estimé à 250 M€, est
amené à s’accroître proportionnellement.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
185
Malgré l’exonération, le reste à charge des assurés déclarés en ALD est
globalement plus élevé que celui des autres assurés. Sur la seule dépense
reconnue de soins de ville, c'est-à-dire remboursable hors dépassements et
présentée au remboursement, le co-paiement moyen par assuré a été
estimé par la CNAMTS à 242 € par an après nouvelles participations
forfaitaires de 2008 (217 € avant) : 363 € en ALD (301 € avant), 220 €
hors ALD (201 € avant).
Le montant du reste à charge, non pris en compte dans cette étude, peut
être estimé à 328 € par assuré en moyenne (258 € de dépassements en ville
et 70 € de co-paiement hospitalier, principalement FJH dont les ALD ne
sont pas exonérées). En appliquant le même rapport entre ALD et non
ALD que celui constaté par la CNAMTS (faute d’informations disponibles
à ce sujet), la charge résiduelle des assurés déclarés en ALD serait alors de
492 €. Ainsi, par an, malgré l’exonération dont il bénéficie, le reste à
charge total d’un assuré en ALD doit avoisiner 855 € (363 € + 492 €).
Ainsi, plutôt qu’un
transfert entre les trois financeurs
AMO, AMC
et ménages, ces phénomènes récents traduisent davantage
un transfert
entre assurés
. Le recours accru à des soins plus coûteux qu’engendre
notamment l’augmentation du nombre des assurés en ALD est financé
partiellement par les assurés eux-mêmes.
IV - Coût et effets de la couverture complémentaire
L’analyse développée jusqu’à présent s’est limitée à la dépense
finale de santé, c'est-à-dire aux versements directs effectués par les divers
agents économiques : cette approche qui ignore à la fois la question du
financement amont et la diversité de la population consommante au
regard de critères souvent corrélés tels que l’âge, l’état de santé, la
consommation de soins et le revenu, nécessite bien entendu d’être
complétée. Les informations pertinentes en la matière sont cependant
lacunaires et approximatives.
Pour les ménages qui ont souscrit une assurance complémentaire,
les risques pesant sur le reste à charge sont mutualisés. Cet avantage
indéniable ne doit pas faire oublier néanmoins les spécificités de la
couverture
complémentaire
facultative
et
concurrentielle,
qui
la
différencient par construction de l’assurance obligatoire : d’une part, elle
est coûteuse et constitue une charge financière importante pour les
ménages qui souscrivent un contrat, d’autre part, elle est inégalitaire en
raison de la variabilité des contrats proposés tant en termes de garanties
que de primes. Un transfert de charge de l’AMO vers les AMC produit
donc mécaniquement des effets antiredistributifs.
C
OUR DES COMPTES
186
A
–
Le coût élevé de la couverture complémentaire
1
–
Les coûts de gestion
Le marché concurrentiel des assureurs complémentaires reste
éclaté, malgré une tendance récente aux regroupements, ce qui entraîne
des coûts de gestion élevés, liés notamment aux frais de prospection et de
rotation de la clientèle. Deux sources d’information différentes permettent
de les situer entre 24 % et 29 % des prestations servies en 2006 : les
comptes nationaux de la santé et le compte de résultat technique simplifié
produit par l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles. Il
s’agit là d’une approche moyenne, toutes prestations confondues.
Coûts de gestion d’après les informations de la DREES en 2006
En M€
AMC
Dont mutuelles
Dont IP
Dont SA
Coûts de gestion
4 989
3 253
846
890
Prestations gérées
20 436
11 598
3 798
5 040
Ratio coûts de gestion/prestations
24,4 %
28,0 %
22,3 %
17,7 %
Source :
Cour d’après les informations de la DREES
Sur la base des montants retracés dans les comptes de la santé qui
prennent en compte les coûts complets (frais de gestion des sinistres, mais
aussi frais d’administration et frais commerciaux), le ratio est de 24,4 %.
Celui-ci est minoré, dans la mesure où la DREES, ne disposant pas
d’informations sur les sociétés d’assurance, leur applique en réalité le
ratio de gestion constaté sur les institutions de prévoyance en 2003.
Coûts de gestion/prestations d’après les informations de l’ACAM en 2006
215
En %
AMC
Dont mutuelles
Dont IP
Dont SA
Gestion des sinistres
5,9
4,9
4,8
7,8
Frais d'acquisition
12,0
5,2
3,7
26,5
Frais généraux
11,0
14,7
5,0
9,4
Ratio coûts de gestion/prestations
28,9
24,8
13,5
43,7
Source :
Cour d’après les informations de l’ACAM (compte de résultat technique
simplifié)
En déduisant les « autres charges techniques » qui incluent
notamment les frais de gestion des prestations du régime obligatoire par
certaines mutuelles, le ratio diminue et passe à 26,2 %.
215. Les informations de l’ACAM couvrent les deux risques des soins de santé et de
la prévoyance.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
187
Les coûts de gestion imputés à l’AMO dans les comptes nationaux
de la santé de 2006 font apparaître un ratio de 5,4 % : l’ajout des coûts de
gestion du recouvrement n’augmente que faiblement ce ratio qui est alors
de 5,9 %.
Cet écart de 20 points, constaté en 2006, entre les ratios de gestion
de l’AMO et des AMC s’explique en partie par l’importance des coûts
fixes afférents à la gestion de la sinistralité : plus la part de prestations
servies est importante, moins le ratio de gestion est élevé.
2
–
Les aides coûteuses à la couverture complémentaire
a)
La complémentaire santé des bas revenus
La CMUC compte environ 4,8 millions de bénéficiaires selon les
informations du fonds de financement de la CMU : le remboursement des
forfaits
216
a représenté en 2006 une dépense de 1 647 M€, financée via le
fonds par 650 M€ de contribution prélevée sur le chiffre d’affaires santé
des OC (passé de 1,75 % à 2,5 % en 2006), par 346 M€ de dotation Etat
et par 621 M€ de taxes affectées.
L’aide à la complémentaire santé (ACS) compte environ 275 000
bénéficiaires pour une cible estimée à deux millions de personnes. La
dépense, de 40 M€ en 2006, est financée via le fonds CMU par
l’assurance maladie
217
.
b)
Les incitations à la protection sociale complémentaire
Le coût des diverses dispositions fiscales et sociales destinées à
favoriser l’extension de la couverture complémentaire a été estimé par la
Cour sur la base d’hypothèses rustiques rappelées ci-dessous, car ces
dispositions ne font l’objet d’aucun suivi.
Il s’agit des dispositions relatives aux contrats Madelin, aux
contrats collectifs d’entreprise ainsi que celles relatives à la fiscalité des
assureurs à des fins de régulation.
216. Le forfait CMUC remboursé par le fonds est passé à 340 € par an en 2006.
217. Il s’agit d’un crédit d’impôt dont bénéficient les organismes complémentaires qui
accordent une réduction de cotisations aux bénéficiaires de l’ACS et se font
rembourser par le fonds CMU. Le plafond de l’ACS a été remonté en 2007 à
8 614,55 € et le montant de l’aide de 75 € à 100 € par personne de moins de 25 ans,
150 € à 200 € par personne de 25 à 59 ans, de 250 € à 400 € par personne de 60 ans et
plus.
C
OUR DES COMPTES
188
Les contrats collectifs d’entreprise ont un poids très variable dans
le chiffre d’affaires de chacune des trois composantes des assurances
complémentaires : ainsi, en soins de santé (hors prévoyance), ils
représentent respectivement 78 % des cotisations perçues par les
institutions de prévoyance, 41 % par les sociétés d’assurance et 26 % par
les mutuelles. Les aides fiscales et sociales accordées aux employeurs et
salariés relevant des contrats collectifs ne s’appliquent qu’en cas de
contrats solidaires et responsables, ce qui conduit les assureurs à ne
pouvoir proposer, en pratique, que des contrats responsables aux
entreprises
218
.
Coût de la couverture complémentaire hors CMUC et ACS
En M€
Perte fiscale
Perte de cotisations sociales
Contrats Madelin
300
Non chiffré
Contrats collectifs
- Versant entreprises (déduction IS)
- Versant salariés (déduction IR)
1 045
1 320
1 932
Fiscalité des assureurs :
Taxe sur le chiffre d’affaires
721
Fiscalité des assureurs :
IS et TP non appliqué, non chiffré
Total
3 386
1 932
Source :
Cour des comptes
Hypothèses retenues pour les contrats d’entreprises
- le chiffres d’affaires de référence est celui du risque soins de santé
en contrats collectifs, indiqué par les groupements professionnels eux-
mêmes, c'est-à-dire 10,5 Md€ ;
- un taux de contrats responsables de 98 %, soit un CA assureurs
soumis à exonérations de 10,3 Md€ ;
- une réfaction de 14 % tenant au taux d’entreprises qui ne
participent pas au financement, soit un montant de primes entrant dans le
champ des aides de 8,8 Md€ ;
- un taux moyen d’abondement des entreprises de 58 %, soit
5,1 Md€ de primes payées par les entreprises et 3,7 Md€ par les salariés ;
- un taux moyen d’IR pour les salariés de 15 % qui s’applique au
total des cotisations versées à la complémentaire (et pas seulement à la
part salariée) ;
218. Cette situation concerne donc les IP au premier chef, qui ont d’ailleurs contesté
leur caractère éventuellement discriminatoire. Une enquête a été ouverte par la
Commission européenne fin 2007 sur ce point.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
189
- un taux moyen total de cotisations obligatoires patronales et
salariales de 37,88 % (conformément à la méthode utilisée déjà dans le
RALFSS 2007)
219
;
- un taux d’IS pour les entreprises de 33 %
220
.
Au total, les aides apportées à la couverture complémentaire
obtenues en sommant le financement de la CMUC et de l’ACS ainsi que
les aides relatives aux contrats Madelin et aux contrats collectifs
d’entreprise, peuvent être estimées à 7 005 M€ : 1 687 M€ en direction
des bénéficiaires de la CMUC et de l’ACS, 4 597 M€ en direction des
travailleurs indépendants (contrats Madelin) et salariés (contrats collectifs
obligatoires d’entreprise), 721 M€ consacrés à la politique de régulation
des contrats des assureurs privés (exonération de la taxe sur le chiffre
d’affaires).
Le montant total des aides de 7 005 M€ peut être rapproché du
montant des prestations versées au titre de la complémentaire santé, soit
21 872 M€ (20 436 M€ de prestations des AMC +1 436 M€ de CMUC
gérée par les organismes de base) : il représente 32 % des prestations
qu’elle rembourse.
Quant aux aides hors CMUC et ACS estimées ici à près de
5,5 Md€ (5 318 M€), elles ne font l’objet d’aucun suivi, qu’il s’agisse de
leur montant ou de leur efficacité.
B
–
Des effets mal connus sur les ménages
Evaluer la couverture maladie existante à l’aune de ses effets plus
ou moins redistributifs et pouvoir évaluer ainsi la variation introduite
dans cet équilibre par une mesure de transfert quelle qu’elle soit, paraît
indispensable.
Pour faire suite au développement précédent relatif à la couverture
complémentaire en entreprise, la vision générale selon laquelle la
contribution de 5,1 Md€ des employeurs et l’exonération de 1,3 Md€ sur
l’IR bénéficient aux ménages et neutralisent en quelque sorte les coûts de
gestion importants de la complémentaire santé, recouvre en réalité des
219. Il est appliqué à la contribution des employeurs (5,1 Md€) ce qui conduit à
considérer celle-ci comme un substitut de salaire ; dans le cas contraire, il convient
d’appliquer le taux de cotisations patronales, ce qui minore la perte de cotisations de
500 M€.
220. Afin d’éviter un double-compte, on a considéré que si les cotisations sociales sur
l’abondement étaient payées, elles entraîneraient une réduction des bénéfices de
1 683 M€ (5 100 M€ x 33 %) et donc une moindre réduction de l’impôt sur les
sociétés (de 638 M€, qui diminue d’autant la dépenses fiscale).
C
OUR DES COMPTES
190
situations très différentes : des avantages très supérieurs pour les 56 %
221
de la population (assurés et ayants droit) qui sont réputés couverts par la
couverture en entreprise, une aggravation de la charge pour les autres.
Toutefois, les informations actuellement disponibles ne permettent
pas de conduire une telle analyse micro-économique. Pour des raisons qui
tiennent à l’absence d’un outil statistique adapté, le bilan global des effets
redistributifs ou antiredistributifs de la couverture maladie obligatoire et
complémentaire est mal connue : pour ce faire, il serait en effet
indispensable de disposer d’un échantillon représentatif d’assurés sociaux
auquel pourraient être appariées des informations en provenance d’autres
sources, mais pour l’instant les éléments mobilisables laissent toujours de
côté les prestations remboursées par les assurances complémentaires dont
on sait, par ailleurs, qu’elles ne sont pas proportionnelles aux primes
versées.
Certains constats récents, certes partiels et élaborés à partir de
sources déclaratives, méritent cependant d’être mentionnés, ne serait-ce
que pour faire comprendre l’importance des enjeux :
-
d’une part, l’étude de l’INSEE -« France, portrait social 2007 »-
montre que l’AMO, compte tenu de l’importance des montants
financiers en cause, constitue un outil de redistribution des revenus très
puissant : quand les dépenses finales de santé individualisables des
APU sont imputées aux individus, du fait de leur masse financière, la
santé devient un des facteurs majeurs de réduction des inégalités
(36,7 %), plus important alors que les prestations familiales ou l’impôt
sur le revenu ;
-
d’autre part, l’exploitation faite par l’IRDES de l’enquête déclarative
ESPS de 2006 (parue en avril 2008) montre que les primes versées aux
assurances complémentaires par les ménages représentent 10 % du
revenu des ménages les plus pauvres et moins de 3 % pour les ménages
les plus riches, « sachant que les premiers, pour un taux d’effort trois
fois plus élevé, bénéficient de contrats offrant des garanties inférieures
à ceux des seconds ».
221 . Selon l’enquête bisannuelle réalisée par l’IRDES sur la protection sociale
complémentaire en entreprises (PSCE) auprès des
établissements employant au
moins un salarié, hors administration et hors secteur agricole
.
LE FINANCEMENT DES DEPENSES DE SANTE
:
REPARTITION ET
TRANSFERTS DE CHARGE ENTRE CONTRIBUTEURS DEPUIS
1996
191
________________________
SYNTHESE
_________________________
Au terme de ces analyses, il apparaît que la répartition du
financement des dépenses de maladie constitue une question complexe.
Au-delà des insuffisances statistiques qui limitent le champ et la
fiabilité des constats possibles, est mis en évidence le fait qu’une
multiplicité de phénomènes peut entraîner des transferts de charge entre
financeurs, voulus ou subis : à cet égard, la confrontation des deux
approches usuelles fondées respectivement sur la photographie produite
par les comptes nationaux de la santé et sur l’estimation théorique de
mesures ciblées est symptomatique.
En ce qui concerne les phénomènes les plus récents, intervenus
depuis la loi du 13 août 2004, il semble que le transfert important
d’environ 3 Md€ organisé vers les ménages dans le but d’infléchir leur
consommation de soins et, ce faisant, de diminuer la participation de
l’AMO à la dépense de santé, n’ait pas rempli tous ses objectifs : en effet,
une partie de ces mesures dégradent la mutualisation apportée par la
couverture complémentaire sans engendrer pour autant la rupture attendue
sur la croissance de la consommation. Quant aux économies ponctuelles
effectivement produites, elles sont absorbées en grande partie par
l’augmentation concomitante du niveau de prise en charge de l’AMO, en
raison notamment de la croissance des ALD.
En raison de cette compensation partielle mais importante, la
situation observée est donc plutôt celle d’une modification de la charge
entre assurés, qu’une transformation de la répartition entre financeurs.
Ce travail a également permis de montrer que le transfert de la
couverture obligatoire à la couverture complémentaire s’accompagnait de
coûts supplémentaires de gestion, lesquels sont en partie compensés, en
réalité, par les aides importantes dont bénéficie une partie de la population
(subventions, diminutions d’impôts et exonérations de cotisations sociales).
Le transfert de charge vers les AMC, organisé pour se conformer à
l’objectif de non augmentation des prélèvements obligatoires, se traduit
par une perte de ressources publiques, par des coûts de gestion sans doute
accrus, enfin par des inégalités de traitement.
Toutefois, à ce jour, ces inégalités ne peuvent pas être précisément
appréhendées, faute d’un instrument statistique idoine qui incorpore au
panel de population observé les prestations perçues des complémentaires.
C
OUR DES COMPTES
192
___________________
RECOMMANDATION
____________________
23.
Améliorer
le
système
d’information
relatif
aux
assurances
complémentaires, en particulier :
-
les
données
générales
et
exhaustives
issues
des
documents
comptables et statistiques qu’elles doivent adresser à l’autorité de
contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) ;
-
le suivi des aides apportées à la couverture complémentaire
(subventions, aides sociales et fiscales) ;
-
l’outil de simulation microéconomique permettant d’évaluer au plus
près les effets de la couverture complémentaire sur les ménages,
ventilés selon leurs caractéristiques socio-économiques
.
193
Chapitre VI
Les pharmacies d’officine et leurs
titulaires libéraux
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
195
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Ces dernières années, la Cour a consacré à la politique du
médicament de nombreux travaux dont elle a rendu compte dans les
rapports sur la sécurité sociale : en dernier lieu, la politique du
médicament (2004), la réforme de la rétrocession (2006), les dépenses de
médicaments (2007). Précédemment, la question de la distribution des
médicaments avait fait l’objet d’une insertion au rapport de 1999. Mais
elle n’avait traité ni de la question du réseau officinal ni de celles de
l’évolution des marges ou des revenus des pharmaciens qui sont ici
successivement abordées. Or, la rémunération de l’officine est un enjeu
significatif pour l’assurance maladie, la marge des pharmaciens sur les
médicaments remboursables représentant environ 5 Md€ par an.
En
France,
la
distribution
des
médicaments
en
ville
est
principalement assurée par deux types d’acteurs : les grossistes-
répartiteurs et les pharmaciens titulaires d’officine. Seuls les seconds font
l’objet de ce chapitre
222
.
I - Un réseau officinal excédentaire au regard de la
réglementation
Les données relatives aux officines et aux pharmaciens qui y
exercent reflètent le poids des surnombres, les mesures destinées à
maîtriser l’évolution du réseau étant très récentes.
A
–
Les officines et leurs titulaires
1
–
Les officines
La France comptait au 1
er
janvier 2007 22 561 officines soit une
officine pour 2 696 habitants et 37,1 officines pour 100 000 habitants,
non compris les 590 officines dans les DOM. Cette densité est une des
plus fortes de l’Union européenne. Seules la Grèce (85 officines pour
100 000 habitants), la Belgique (51) et l’Espagne (48) ont une densité
222. Ce chapitre ne traite pas non plus des initiatives en cours prises par les autorités
communautaires en vue de remettre en question le monopole de la détention du capital
de l’officine ainsi que le principe du quorum. En France, le maintien du monopole
officinal sur les produits non-remboursables est également contesté au nom des effets
de la concurrence sur le niveau des prix. Ce chapitre n’aborde pas enfin les questions
touchant à d’autres modes de distribution des médicaments.
C
OUR DES COMPTES
196
supérieure. A l’opposé, l’Allemagne (26), le Royaume-Uni (18), les Pays-
Bas (11) ont les densités les plus faibles
223
. La croissance du nombre
d’officines a été constante entre 1964
224
et 1987 (avec un rythme variant
entre 1,5 % et 3,5 % par an).
A partir de 1987, le nombre d’officines progresse faiblement
(moins de 1 % par an). Cette baisse est confirmée depuis (0,84 % en
1998, 0,02 % en 2001). Depuis 2002, le nombre d’officines régresse (-
0,13 % en 2002 et -0,22 % en 2006).
2
–
Les pharmaciens
La France comptait au 1
er
janvier 2007 28 194 pharmaciens
titulaires d’officine (inscrits en section A
225
) dont 12 922 hommes
(45,8 %) et 15 272 femmes (54,1 %) et 656 titulaires d’officine dans les
DOM (inscrits en section E). L’augmentation du nombre de pharmaciens
inscrits en section A se poursuit, mais à un rythme ralenti (entre 2,3 % et
1,85 % par an sur la période 1982-1991 ; moins de 1 % à partir de 1991 ;
0,30 % en 2006). Aux pharmaciens titulaires, il faut ajouter les
pharmaciens adjoints qui sont au nombre de 22 499
226
. Il y a donc au
total 50 693 pharmaciens pour les 22 561 officines, soit en moyenne 2,2
pharmaciens par officine.
La tendance est à l’augmentation du nombre de pharmaciens
(titulaires et adjoints) par officine comme le montre le tableau ci-dessous.
223. Il faut remarquer que les pays qui ont la densité de population la plus forte (Pays-
Bas : 386 ha/km² ; Royaume-Uni : 344 ; Allemagne : 230) ont la densité officinale la
plus faible. C’est l’inverse pour la Grèce (83), l’Espagne (86), la France (110). La
Belgique est un contre-exemple : elle a à la fois une densité de population forte (344)
et une densité officinale forte pour des raisons historiques (tradition des pharmacies
mutualistes). Un net clivage apparaît entre les pays qui conditionnent la création d’une
officine à des critères démographiques (Grèce, France, Belgique, Espagne) et les pays
dans lesquels cette création est libre (Allemagne, Royaume-Uni, Pays-Bas). Un autre
facteur explicatif est l’incidence du mode de distribution.
224. Début de la série transmise par le conseil national de l’ordre des pharmaciens
(CNOP).
225. Au sein du CNOP, qui compte au total 72 322 pharmaciens (1
er
janvier 2007), la
section A regroupe les titulaires d’officine (38,5 %), la section B les pharmaciens de
l’industrie (4,5 %), la section C les pharmaciens de la distribution en gros (2 %), la
section D les pharmaciens salariés (35,7 %), la section E les pharmaciens des DOM et
TOM (2 %), la section G les biologistes tous secteurs (10,9 %) et la section H les
pharmaciens des établissements de santé (6,7 %).
226. En exercice dans les officines.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
197
Evolution du nombre de pharmaciens par officine 1999-2006
Pharmacien
par officine
1
pharmacien
2
pharmaciens
3
pharmaciens
4
pharmaciens
5 et
plus
1999
34,4 %
46,4 %
15,7 %
3,4 %
1,1 %
2006
21,6 %
44,7 %
23,7 %
7,2 %
2,8 %
Source : CNOP
Cette situation s’explique principalement par la féminisation du
réseau et le vieillissement de la profession (l’âge moyen du pharmacien
d’officine est de 48 ans et 3 mois). Ces facteurs ont entraîné la hausse du
numerus clausus ces dernières années. Stabilisé à 2 250 inscriptions en
1
ère
année de pharmacie durant toute la période 1986-2002, le numerus
clausus remonte régulièrement depuis : 2 400 en 2003, 2 600 en 2004,
2 790 en 2005 et 2 990 en 2006.
La réglementation oblige un titulaire à recruter un adjoint dès lors
que le chiffre d’affaires de l’officine est supérieur au seuil de 1,22 M€
(fixé par le dernier arrêté en vigueur de 14 février 2008). Une enquête
menée par le ministère de la santé en 2003 a montré que cette obligation
n’était pas pleinement respectée
227
. Sur 1 715 pharmacies inspectées
(7,3 % des officines), 318 étaient en déficit de pharmacien adjoint par
rapport à la réglementation, soit 18,5 % des officines inspectées
228
.
L’enquête a montré de fortes disparités en la matière. Dans le Nord-Pas-
de-Calais, le déficit de pharmacien adjoint touchait 38 % des officines
(62 officines sur 163 inspectées). Cette situation peut s’expliquer par
plusieurs raisons : pénurie de pharmaciens, difficultés du recrutement
229
,
souci de rentabilité, nombre excédentaire d’officines.
227. Cette obligation, dont le but est de pouvoir réaliser dans des conditions optimales
la dispensation des médicaments, gagnerait à être fondée sur des critères plus fins que
la seule évolution du chiffre d’affaires.
228. Enquête effectuée par la direction de l’hospitalisation et de l’organisation des
soins en 2003. L’enquête montrait aussi l’absence, au moins momentanée, de
pharmacien (titulaire ou adjoint) dans 52 pharmacies, soit 3 % de l’échantillon. Ces
constats n’ont été suivis d’aucune sanction, ni administrative ni ordinale.
229. Il convient de noter que la rémunération du pharmacien adjoint n’est pas élevée,
par rapport à celle des titulaires : 2 370 € brut pour 35 heures en début de carrière
(indice 400 concernant 60 % des adjoints).
C
OUR DES COMPTES
198
B
–
Le poids des officines en surnombre
1
–
Le dispositif en vigueur entre 1941 et 1999
La loi du 11 septembre 1941 a mis en place la première
réglementation de l’implantation des officines
230
sur la base d’un
principe de proportionnalité entre le nombre des officines et le nombre
d’habitants dans la commune (système dit du quorum). Toute nouvelle
implantation d’une officine était subordonnée à la délivrance d’une
licence par l’autorité administrative
231
.
La loi avait toutefois institué au profit du ministre de la santé, via
les préfets, la possibilité de déroger au quorum en fonction des besoins de
la population
232
. Conçue initialement comme une mesure de caractère
exceptionnel, la voie dérogatoire l’a emporté peu à peu sur l’application
stricte de la règle du quorum au point de devenir le mode commun des
créations d’officines (dans les quartiers excentrés, près des gares, en
périphérie des villes).
2
–
L’état des surnombres
En prenant pour référence le nouveau quorum fixé par la LFSS
pour 2008 (1 officine pour 3 500 habitants pour toutes les communes
d’une population supérieure à 2 500 habitants
233
), 5 172 officines sont en
surnombre, soit 23 % des officines.
230. Avant 1941, l’implantation était libre.
231. Les quotas de population étaient les suivants : une officine pour 3 000 habitants
dans les villes d’une population supérieure ou égale à 30 000 habitants ; une officine
pour 2 500 habitants dans les villes d’une population égale ou supérieure à
5 000 habitants et inférieure à 30 000 habitants. Une loi de 1957 avait prévu un seuil
différent (1 officine pour 5 000 habitants) en Alsace-Moselle.
232. Loi du 11 septembre 1941, article 37, §4 : « Si les besoins de la population
l’exigent, des dérogations à ces règles peuvent être accordées par le ministre de la
santé publique, après avis du conseil régional de l’ordre des pharmaciens, de
l’inspecteur divisionnaire de la santé, des syndicats professionnels et du conseil
supérieur de la pharmacie ».
233. Il n’est pas pertinent d’inclure les officines dans les communes de moins de
2 500 habitants car depuis 1999 le quorum ne concerne plus les communes mais est
apprécié en fonction de zones de desserte pharmaceutique arrêtées par le préfet et qui
incluent plusieurs communes.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
199
Dans les régions qui arrivent en tête, le surnombre est très marqué
pour les grandes villes : Paris (364 surnombres pour 1 071 officines),
Marseille (107 sur 372), Bordeaux (72 sur 143)
234
.
Officines en surnombre au 1er janvier 2007
Régions
Surnombre*
Régions
Surnombre*
Ile-de-France
861
Bourgogne
162
PACA
559
Auvergne
159
Rhône-Alpes
461
Lorraine
159
Aquitaine
387
Basse-Normandie
117
Nord-Pas-de-Calais
315
Picardie
108
Midi-Pyrénées
288
Franche-Comté
102
Languedoc-
Roussillon
285
Champagne-
Ardenne
99
Bretagne
283
Haute-Normandie
96
Pays-de-la-Loire
241
Limousin
83
Centre
173
Corse
47
Poitou-Charentes
172
Alsace
15
Total général
5 172
*En fonction du quorum en vigueur au 1
er
janvier 2008
Source :
Conseil national de l’ordre des pharmaciens
C
–
Les mesures prises pour maîtriser l’évolution du
réseau et réduire le nombre d’officines
1
–
La suppression de la voie dérogatoire
La loi du 27 juillet 1999 constitue la première grande réforme de la
réglementation des ouvertures d’officine depuis 1941. Elle met fin à la
possibilité pour le préfet d’accorder une licence lorsque le quorum est
atteint. Il aura donc fallu attendre près de soixante ans pour que ce
dispositif, dont les effets étaient connus de longue date
235
, soit supprimé.
2
–
Le relèvement des seuils de population
La loi du 27 juillet 1999 n’avait pas modifié sensiblement les
règles du quorum. Le relèvement des quotas de population a été décidé
234. Ces surnombres ont été établis par le CNOP avec le quorum de 1 officine pour
3 000 habitants qui était initialement prévu dans la LFSS pour 2008.
235. Parmi ces effets, il convient de relever l’important contentieux engendré par les
créations dérogatoires.
C
OUR DES COMPTES
200
dans le cadre de la LFSS pour 2008
236
. Désormais, si la première officine
peut être créée dès le seuil de 2 500 habitants atteint, les suivantes
devront respecter par zone de desserte le seuil de 3 500 habitants par
officine supplémentaire (seuil en vigueur en Alsace-Moselle depuis
1999). La distinction entre commune de moins et de plus de
30 000 habitants est supprimée.
3
–
Le rééquilibrage du réseau par des transferts
Le régime juridique des transferts d’officines de pharmacie issu de
la loi de 1999 interdisait par principe tout transfert, même à très courte
distance, à l’intérieur de communes qui n’étaient pas excédentaires au
regard du quorum.
La loi de 2002 a assoupli la réglementation en supprimant, pour un
transfert au sein de la même commune, le critère de l’excédent
d’officines
237
. Puis la LFSS pour 2008 a rendu possibles les transferts sur
l’ensemble du territoire national
238
.
4
–
La réduction des surnombres de pharmacies au moyen de
regroupements
Pour faciliter les fusions, la loi de 1999 avait prévu des
autorisations de regroupement d’officines. Mais ce regroupement était
limité à deux officines situées dans la même commune et ne pouvait
s’effectuer que dans cette même commune. Le nombre total de
pharmaciens, titulaires ou assistants, devait demeurer le même durant
cinq ans, sauf cas de force majeure. En outre, la nouvelle pharmacie ne
pouvait être vendue avant cinq ans.
Devant le peu de succès de cette mesure
239
, la LFSS pour 2008 a
rendu possible des regroupements entre officines sans limitation de
nombre et de périmètre géographique. Le regroupement de pharmacies
236. Article 59 de la loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 (articles L. 5125-3 à 15
du code de la santé publique).
237 . Toutefois, pour un transfert dans une autre commune (mais du même
département), la règle des quotas s’appliquait entièrement (excédent dans la commune
d’origine et déficit dans la commune d’accueil).
238. L’article L. 5125-14 (CSP) fixe toutefois certaines conditions afin d’éviter que la
commune d’origine ne soit plus desservie et que la commune d’accueil soit en
surnombre.
239. Selon le CNOP, moins de cinq demandes par an entre 1999 et 2007.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
201
est envisageable y compris en vue de vendre la nouvelle entité à l’un des
protagonistes du regroupement ou à un tiers
240
.
II - La rémunération de l’officine
La rémunération de l’officine ne concerne ici que les produits
remboursables, soit plus de 80 % du chiffre d’affaires des officines.
L’évolution de ses différentes composantes a contribué à préserver un
niveau élevé de marge et donc de rémunération.
A
–
La rémunération de l’officine en métropole
Le système en vigueur en 2007 est présenté dans un premier temps,
puis les mesures, de portée limitée, décidées début 2008.
1
–
Les composantes de la rémunération en 2007
a)
Le dispositif de la marge dégressive lissée (MDL)
La réforme des marges des pharmaciens d’officine est intervenue
en 1990. Un système de tranches avec un taux dégressif de marge
241
a
remplacé un système de marge proportionnelle (de 48,5 %) du prix
fabricant hors taxe (PFHT) qui prévalait auparavant. Ce système a été
modifié plusieurs fois depuis 1990. Dans la situation actuelle, la formule
de la marge associe un montant forfaitaire de 0,53 € par boîte et trois
tranches de taux (26,1 %, 10 % et 6 %)
242
. Les deux graphiques ci-après
240. En outre, l’article L. 5125-15 organise un gel des licences pendant cinq ans. Le
dégel peut être décidé après cette période par le préfet (après avis des syndicats
représentatifs et du conseil régional de l’ordre) mais seulement si ce regroupement a
eu pour effet de « compromettre l’approvisionnement nécessaire en médicaments de
la population résidente de la commune ou du quartier d’origine » (L. 5125-3 auquel
renvoie l’article L. 5125-15).
241. Ce système fonctionne comme l’IRPP mais à l’envers. Ce qui signifie par
exemple que pour un médicament dont le prix est égal à 200 €, en appliquant les taux
en vigueur pour les trois tranches de prix, le taux de marge est de 26,1 % sur la
tranche
0-22,90 €
(=5,97 €),
10 %
sur
la
tranche
22,90-150 €
(150-
22,90*10 %=12,71), 6 % au-delà de 150 € (200-150*6 %= 3 €), ce qui donne : 5,97 +
12,71 + 3 + 0,53 = 22,21 € (taux moyen de 11,1 %).
242. Article 2, I de l’arrêté du 4 août 1987 relatif aux prix et aux marges des
médicaments remboursables, principalement modifié en 1988, 1990, 1997, 1999 et
2004.
C
OUR DES COMPTES
202
reconstituent, pour les arrêtés de marge pris depuis 1990, les taux de
marge moyens pour sept niveaux de prix.
Evolution du taux moyen de marge (1990-2004)
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
100%
Taux Moyen
1990
Taux Moyen
1997
Taux Moyen
1999
Taux Moyen
2004
1 €
2 €
5 €
10 €
0%
5%
10%
15%
20%
25%
30%
35%
40%
Taux Moyen
1990
Taux Moyen
1997
Taux Moyen
1999
Taux Moyen
2004
20 €
50 €
200 €
Source :
Cour des comptes
Le passage à la marge dégressive lissée visait à déconnecter la
marge du prix du produit au motif que la rémunération du service rendu
par le pharmacien ne devait pas suivre le prix. Or, l’évolution des taux de
marge moyens 1990-2004 montre qu’en dépit d’une diminution des taux
de marge en 1997, les pouvoirs publics sont revenus dès 1999 à la
situation antérieure à 1997. L’introduction d’une rémunération forfaitaire
par boîte de 0,53 €, outre le fait d’encourager la multiplication des
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
203
conditionnements, a contribué à augmenter les taux de marge pour les
produits dont le prix est supérieur à 10 €. Pour ces derniers, les taux de
marge moyens sont supérieurs en 2008 à ce qu’ils étaient à l’issue du
premier arrêté mettant en place la MDL.
Ainsi, on note que face au renchérissement du prix des
médicaments (le PFHT moyen est passé de 4,30 € en 1996 à 6,20 € en
2006), les pouvoirs publics n’en ont tiré aucune conséquence sur les
produits dont le prix HT est compris entre 20 et 150 €. Or, d’après les
données du groupement d’études et de recherche sur la santé (GERS) (cf.
infra), la part du chiffre d’affaires des fabricants sur les produits 20-150 €
est passée de 4,5 % en 1996 à 32,6 % en 2006.
L’introduction d’un élément forfaitaire en 1999, qui aurait pu être
le prélude à un passage vers une marge forfaitaire, a cependant laissé
subsister le principe de la proportionnalité (même dégressive). En
conséquence, cette réforme n’a pu contenir la hausse du niveau de
rémunération de l’officine résultant du renchérissement du prix des
médicaments.
b)
Une marge bonifiée pour les génériques
En vue d’encourager la diffusion des génériques, la marge réalisée
sur la vente d’un médicament générique est identique à la marge réalisée
sur le princeps
243
. Le tableau ci-dessous fait apparaître le doublement du
taux de marge qui en résulte, dans le cas très fréquent où le PFHT
générique est inférieur de moitié au PFHT princeps.
Comparaison marge princeps/marge générique
PFHT
Princeps
PFHT
générique
Marge*
Marge/princeps
Marge/générique
10 €
5 €
3,14 €
31,4 %
62,8 %
20 €
10 €
5,75 €
28,75 %
57,5 %
50 €
25 €
9,21 €
18,42 %
36,84 %
200 €
100 €
22,21 €
11,10 %
22,20 %
* La marge inclut le montant forfaitaire de 0,53 €.
Source :
Cour des comptes
Selon la CNAMTS, le surcoût brut (qui n’intègre pas les
économies dues aux génériques) de l’alignement de la marge du
générique sur le princeps a été en 2007 de 150,3 M€.
243. Arrêté du 29 avril 1999 modifié.
C
OUR DES COMPTES
204
c)
Les avantages consentis par les fabricants
Les fournisseurs peuvent consentir aux pharmaciens divers
avantages et d’abord des remises et ristournes. Celles-ci sont définies à
l’article L. 138-9 du code de la sécurité sociale. Avant la réforme
intervenue en 2008, les remises et ristournes ne pouvaient excéder par
mois et par ligne de produits (et pour chaque officine) un plafond de
2,5 % du prix des spécialités, mais pouvaient aller jusqu’à 10,74 % du
prix fabricant hors taxes pour les spécialités génériques.
Une deuxième forme d’avantage est liée à la rémunération prévue
dans le cadre d’un contrat de coopération commerciale. Depuis 2006, un
plafond
244
a encadré ces avantages financiers (20 % en 2006 puis 15 %
en 2007).
Les services de la direction générale de la concurrence et de la
répression des fraudes (DGCCRF) ont constaté que la distinction entre
des remises sur produits et une rémunération pour service commercial
était très ténue dans les faits
245
et qu’en cas de vente directe des
fabricants aux pharmaciens, la marge grossiste de 10,3 % était
systématiquement encaissée par le pharmacien, pratique non conforme à
244
.
Dont le dépassement devait se traduire par une modification des marges
applicables au prix du produit, qui ne devait plus dans ce cas être le PFHT mais le
prix d’achat effectif du revendeur. Ce plafond correspondait au PFHT net des remises
de l’article L. 138-9 (PFHT diminué de 10,74 % pour les génériques). Ainsi, tout
dépassement du plafond d’avantages financiers devait entraîner une baisse du prix
public, le prix sur lequel devaient être appliqués les taux de marges n’étant plus le
prix facial (PFHT) mais le prix réellement supporté par le pharmacien.
Il a été procédé en 2006 par la direction générale de la consommation, de la
concurrence et de la répression des fraudes au contrôle de l’application de l’arrêté du
29 décembre 2005. Celle-ci a constaté que ce plafond prévu par l’arrêté du 29/12/05
était bien respecté.
245. En matière de contrat de coopération commerciale (qui donnent lieu à des
rémunérations couramment appelées « marges arrière »), la position initiale du
ministère de l’économie a été de considérer que
les rémunérations pour service
commercial
ne devaient pas être distinguées des
remises
consenties aux officines par
leurs fournisseurs. Cette position a changé en 2002. En effet, les contrôles effectués
par le ministère sur le respect des plafonds de remises ont montré que ces plafonds
étaient rarement respectés par les officines. Sur certains génériques (par exemple
l’oméprazole), le ministère a constaté des dépassements très importants (entre 50 % et
80 % du PFHT). En raison du caractère massif de ces pratiques, aucun pharmacien n’a
été sanctionné.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
205
l’article 2, III de l’arrêté du 4 août 1987
246
. Ces deux constats ont
contribué au changement de réglementation début 2008 (cf. infra).
d)
Le cumul d’avantages pour les génériques
En raison de la marge bonifiée, d’un plafond supérieur de remises
et des marges arrière, la rémunération des pharmaciens en matière de
génériques leur est très favorable. En outre, 70 % des génériques sont
vendus directement par les laboratoires aux pharmaciens qui encaissent
ainsi la marge grossiste.
En règle générale, le PFHT du générique est depuis 2006 50 %
moins cher que le princeps. Pour un générique à 5 €, dont le prix du
princeps est de 10 €, le prix public sera calculé de la manière suivante :
-
montant forfaitaire de 0,53 € ;
-
marge (=princeps) : 26,1 % de 10 €=2,61 € ;
-
marge grossiste : 10,3
247
% de 5€
248
=0,515 ;
-
le PPHT sera donc de 5+0,53+2,61+0,515= 8,655 €.
Mais le pharmacien aura pu bénéficier d’une remise et d’une
rémunération pour service commercial pour un montant de 1,206 € :
-
remise (L. 138-9) : 10,74 % de 5 €= 0,537 €
-
coopération commerciale : 15 % de 5 €-10,74 %= 0,669 €.
Ainsi, un générique dont le PFHT est de 5 € sera acheté 3,794 €
directement au fabricant et sera vendu sur la base de 8,655 € HT. Le gain
net est de 4,861 €, soit quasiment le prix fabricant HT hors remises et
marge arrière.
L’exemple pris pour un générique au prix de 5 € est significatif. En
effet, le prix moyen d’un générique est de 6,92 €. 80 % des boîtes de
génériques ont un prix compris entre 0 et 5 €. 50 % du CA HT des
246. Il convient de remarquer qu’avant l’introduction de la marge dégressive pour les
grossistes en 1999, la marge proportionnelle était pour eux de 10,74 % du PFHT.
Ainsi, en portant en 1999 le plafond de remises aux pharmaciens à 10,74 % pour les
génériques, les pouvoirs publics avaient de ce fait crée les conditions pour que les
fabricants cèdent la marge grossiste aux pharmaciens en cas de vente directe. Dans ce
contexte, l’encaissement par les pharmaciens de la marge de 10,3 % (fixée pour les
grossistes à partir de 1999) revenait à encaisser deux fois la marge des grossistes.
247. Le taux de 10,3 % était le taux en vigueur avant la réforme de février 2008 qui a
modifié les taux de marge des grossistes-répartiteurs.
248. La marge bonifiée ne s’applique pas au grossiste-répartiteur.
C
OUR DES COMPTES
206
fabricants est réalisé sur les ventes de génériques dont le prix est compris
entre 0 et 5 €.
La mise en place de conditions financières très favorables
s’explique par la volonté des pouvoirs publics de favoriser la promotion
des génériques au travers une politique de substitution confiée aux
pharmaciens. Toutefois, on peut s’interroger sur le maintien d’un
dispositif aussi favorable pour les génériques dès lors que les taux de
substitution atteignent en 2008 plus de 80 % du répertoire
249
. Désormais,
les principaux freins à l’accroissement du marché des génériques, qui ne
sont pas liés à une éventuelle intervention du pharmacien, sont d’une part
le faible taux de prescription dans le répertoire (3,3 % de prescriptions
directes de génériques et 11 % des prescriptions en dénomination
commune internationale dans le total des prescriptions
250
) et, d’autre
part, la proportion encore faible du répertoire dans le marché des produits
remboursables (qui est passée en valeur de 17,4 % en 2005 à 21 % en
2007).
2
–
Des réformes récentes d’ampleur très limitée
a)
La réforme des remises et ristournes (2008)
La volonté des pouvoirs publics de réformer le dispositif des
marges arrière dans la grande distribution a eu une conséquence directe
sur le système de rémunération des pharmaciens. L’article 3 de la loi
« pour
le
développement
de
la
concurrence
au
service
des
consommateurs
251
» réforme en effet le dispositif des contrats de
coopération commerciale en l’intégrant dans le dispositif des remises.
Les taux de 10,74 % (plafond des remises pour les génériques) et
de 15 % (plafond des contrats de coopération commerciale) sont
supprimés au profit d’un taux, nouveau et unique, de 17 %. Les contrats
de coopération commerciale ne sont pas interdits en tant que tels mais
leur rémunération n’est plus distincte des remises.
Il convient de souligner que le plafond de 17 % ne s’applique pas
seulement aux génériques mais également aux princeps sous tarif
249. Le répertoire des génériques se définit comme l’ensemble des médicaments de
marque généricables et des génériques qui leur sont attachés. C’est au sein de ce
répertoire que s’exerce le droit de substitution des pharmaciens.
250. « Baromètre de la prescription en DCI », Observatoire du médicament de la
Mutualité française (FNMF), d’après des données IMS Health, novembre 2007.
251. Loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, dite loi Chatel.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
207
forfaitaire de responsabilité
252
(TFR). La baisse du plafond des remises
s’est donc accompagnée d’un élargissement de l’assiette des produits
pouvant bénéficier de remises. La baisse de marge exprimée en taux
devrait donc être partiellement compensée par une augmentation de la
marge en valeur.
b)
L’attribution de la marge du grossiste
Afin de compenser la perte résultant de la diminution des plafonds
de remises et marge arrière, il a été décidé de faire bénéficier le
pharmacien de la marge du grossiste en cas de vente directe. De plus, la
sortie de cette marge du plafond des remises intervient pour la totalité des
médicaments remboursables et non plus seulement pour les génériques
comme précédemment.
Au total, l’évolution des taux de marge et remises devrait porter
ceux-ci à un maximum de 53,3 % contre 62,04 % précédemment (pour un
produit dont le prix est inférieur à 22,9 €).
Comparaison taux de marge complet avant et après la loi Chatel
Rémunération
Avant Loi « Chatel »
Après Loi « Chatel »
Marges arrêté 4 août 1987
26,1 %
26,1 %
Remises art. L. 138-9
10,74 %
Coopération commerciale
15 %
17 %
Marge grossiste
10,3 %
9,93
Total
62,14 %
53, 03 %
Source :
:
Cour des comptes
Néanmoins, si on considère que le bénéfice de la marge grossiste
était illégal dans l’ancien dispositif, la réforme n’a pas été défavorable
aux pharmaciens.
B
–
Les déterminants de l’évolution de la
rémunération
Au-delà des marges réglementées et des remises, plusieurs facteurs
sont favorables à la rémunération des pharmaciens.
252. Pour certains princeps génériqués, il est appliqué un tarif de remboursement
spécifique. Le TFR permet de réaliser directement des économies sur le prix des
médicaments lorsque le taux de substitution n’est pas jugé satisfaisant.
C
OUR DES COMPTES
208
1
–
Des dépenses de médicaments et une prise en charge en
hausse
La croissance de la consommation de médicaments a été la plus
forte de tous les postes de la consommation de soins et biens médicaux :
5,9 % de taux de croissance annuel moyen entre 1995 et 2006 (pour une
moyenne CSBM de 2,9 %). En outre, le taux de prise en charge par
l’assurance maladie a augmenté ces dernières années. Il est passé, sur le
champ des médicaments présentés au remboursement, de 70,6 % en 1995
à 76,3 % en 2006
253
.
2
–
Un important effet-structure
Comme le montre le tableau ci-dessous, la répartition du chiffre
d’affaires des fabricants en fonction du prix unitaire du médicament
montre le poids pris par les médicaments dont le prix est supérieur à 20 €.
Répartition du CA en fonction du prix unitaire du médicament
Tranche PFHT
CA 1996
CA 2006
< 1 €
1,7 %
2,0 %
De 1 à 5 €
42,2 %
18,5 %
De 5 à 10 €
27,9 %
12,8 %
De 10 à 20 €
23,4 %
22,2 %
De 20 à 150 €
4,5 %
32,6 %
>150 €
0,3 %
12,0 %
PFHT moyen
4,30 %
6,90 %
Source :
GERS, 2007.
Cet effet-structure est renforcé par la sortie progressive de
médicaments de la réserve hospitalière
254
. Les médicaments remboursa-
bles issus de la réserve hospitalière ont représenté 6 % du marché
remboursable (CA PPTTC cumulé 2005-2007) et à fin 2007 0,36 % des
boîtes vendues concernaient des produits issus de la réserve. Fin 2007, la
marge brute des produits issus de la réserve représentait 2,6 % de la
marge brute des produits remboursables. La part de la réserve hospitalière
dans le marché du remboursable n’a cessé de croître. En cumulé, elle a
253. Eco-santé, CNAMTS, 2007.
254. Décret n° 2004-546 du 15 juin 2004.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
209
atteint 1 451 M€ en 2007
255
. Le prix public moyen des produits vendus y
est de l’ordre de 170 €/unité.
3
–
Un marché des génériques en progression constante
Le marché du répertoire s’est accru de 1,2 Md€ entre 2000 et 2006
(montants remboursables), décomposé entre une hausse de 1,84 Md€ pour
les génériques et une diminution de 740 M€ pour les princeps. Comme le
montre le tableau ci-dessous, le marché des génériques augmente ainsi de
manière régulière depuis 1999.
Evolution du marché des génériques 1999-2007 (champ GEMME)
En M€
Année
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
(p)
CA M€
110
240
388
453
601
853
1 109
1 439
1 644
1 960
2 215
Variation
118%
61%
16,7%
32,7%
42%
30,1%
29,7%
14,2%
19,2%
13%
Source :
GEMME
L’accroissement régulier des volumes de vente de génériques a
donc bénéficié aux pharmaciens, à la fois en raison de la marge bonifiée
et d’un plafond de remises supérieur jusqu’à fin 2007 au plafond en
vigueur pour les princeps.
4
–
Le montant des remises ne devrait pas diminuer de manière
significative
Les montants ci-dessous ont été communiqués à la Cour par la
fédération
des
syndicats
pharmaceutiques
de
France
(FSPF)
et
l’association « génériques même médicament » (GEMME), pour les
années 2006, 2007, 2008. Selon les chiffres du GEMME, les montants
2006 (440 M€) et 2007 (426 M€) sont quasiment identiques en valeur
alors même que le plafond de la coopération commerciale a baissé (de 20
à 15 % du PFHT), en raison de la croissance du marché (+19,2 % entre
2006 et 2007) liée à l’extension du périmètre sur lequel s’applique le
nouveau taux de remises.
255 . Source : fédération des syndicats pharmaceutiques de France (d’après
Pharmastat).
C
OUR DES COMPTES
210
Remises et marges arrière 2006-2008 (p)
En M€
2006
2007
2008 GEMME
2008 FSPF
Remises
163
182
377
459
Marge arrière
277
244
0
0
Marge grossiste
150 (FSPF)
196 (FSPF)
220
250
Total
590
622
597
709
Source :
GEMME, FSPF
Même si l’on considère que les chiffres FSPF sont surévalués
256
,
on constate néanmoins que dans la prévision 2008 du GEMME, la totalité
des rabais
257
consentis par les fabricants ne diminue que faiblement en
valeur (25 M€ soit -4 %) en dépit de la suppression de la rémunération
pour coopération commerciale. L’économie résultant de cette suppression
a néanmoins été évaluée par le comité économique des produits de santé
(CEPS)
à
100 M€
pour
l’assurance
maladie,
puisqu’elle
s’est
accompagnée de baisses de prix sur les médicaments génériques (-25 %
pour 2006 et 2007).
5
–
La structure économique de l’officine
Le tableau ci-dessous réalise une estimation moyenne pour une
officine, par type de produit, du pourcentage des ventes, de la
contribution à la marge et du taux de marge (incluant remises et marges
arrière).
256. En effet, l’hypothèse est que l’ensemble des achats des officines épuise le
plafond de remises.
257. On considère que la marge grossiste dont bénéficie le pharmacien s’apparente à
un rabais effectué par le fabricant.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
211
Structure économique de l’officine
Pourcentage
des ventes
Contribution
à la marge
Taux de marge brute (marge complète
incluant la coopération commerciale)
Princeps
74 %
67 %
27 %
Génériques
9 %
13 %
44 %
OTC
258
5 %
6 %
39 %
Autres*
12 %
14 %
34 %
*Dont :
médicaments
non
remboursables
à
prescription
obligatoire
et
parapharmacie. La marge du princeps et du générique est réglementée ; la marge des
produits OTC et autres est libre.
Source :
Smart Pharma Consulting (données IMS Health 2007, FSPF). Cette
estimation montre ainsi le potentiel de croissance des produits non-remboursables et
de la parapharmacie, dès lors que la suppression du monopole officinal sur ces
produits a été écartée par le ministre de la santé
259
.
C
–
La rémunération de l’officine dans les
départements d’outre-mer
Le dispositif des marges dans les DOM a longtemps été en vigueur
sans
aucune
base
légale.
Réformé
très
récemment
(mais
très
partiellement),
il
reste
malgré
quelques
mesures
correctives ?
particulièrement avantageux.
1
–
Des arrêtés sans base légale (1990-1998)
Le dispositif des marges dans les DOM a été mis en place en 1990.
Il fonctionnait sur la base de coefficients de majoration, fixés par les
préfets, des prix publics et de la marge des grossistes- répartiteurs de
258. On appelle produits OTC (« over the counter ») ceux qui sont vendus en officine
en accès libre (« devant le comptoir »). Depuis un décret du 1
er
juillet 2008, outre la
parapharmacie, la cosmétique et les compléments alimentaires, certains médicaments
non soumis à prescription médicale obligatoire sont désormais directement accessibles
aux consommateurs.
259. Néanmoins, le développement de ce segment du marché de l’officine risque de
rester limité en raison de l’étroitesse des produits à prescription médicale facultative
(PFM) non-remboursables. Cette étroitesse est liée au fait que la très grande majorité
des produits à PFM est remboursable.
Les partisans de la suppression du monopole officinal sur certains produits de
parapharmacie dits « produits frontières » ne manquent pas d’arguments. A la
demande du conseil national de la consommation, la DGCCRF a mené une enquête en
2005 qui a montré que les principaux produits de parapharmacie, vendus dans les trois
types de circuits de distribution (grande et moyenne surface, parapharmacie, officine),
le sont à des prix inférieurs en grande surface d’au moins 20 % à 30 % par rapport à
ceux pratiqués par les officines.
C
OUR DES COMPTES
212
métropole. De plus, contrairement à la métropole, la marge des grossistes-
répartiteurs est restée proportionnelle au PFHT. La marge du pharmacien
est donc la différence entre le prix de vente du grossiste et le prix local du
médicament
260
.
En 1995 cependant, l’arrêté préfectoral en vigueur à la Réunion a
été annulé par le Conseil d’Etat
261
au motif que la fixation des prix et des
marges des médicaments dans les DOM ne relevait pas de la compétence
du préfet mais des ministres des affaires sociales et de l’économie. En
effet, l’article L. 593 du code de la santé publique ne donnait pas
compétence au préfet pour fixer les prix et les taux de marge des
médicaments soumis à autorisation de mise sur le marché.
2
–
Une base légale sans arrêtés (1998-2008)
Afin de donner une base légale aux majorations, l’ordonnance
n° 98-731 du 20 août 1998 a introduit dans le code de la sécurité sociale
l’article L. 753-4, qui prévoit qu’un « arrêté des ministres chargés de la
sécurité sociale, de la santé, de l’économie et de l’outre-mer peut
déterminer des majorations applicables aux prix, fixés en application de
l’article L. 162-16-1 ou de l’article L. 162-38, des médicaments
remboursables mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article
L. 162-17 ». Selon cet article, ces majorations prennent en compte les
frais particuliers qui, dans chaque département d’outre-mer, grèvent le
coût de ces médicaments par rapport à leur coût en métropole.
L’article omettait cependant de mentionner la possibilité de
majorer, outre le prix du médicament, le taux de marge des grossistes et
des pharmaciens d’officine. Ceci explique (en partie) qu’aucun arrêté
nouveau n’ait été pris sur le fondement de cet article pour remédier à la
situation d’illégalité qui prévalait depuis l’arrêt du Conseil d’Etat. Les
260. Le calcul de la marge dans les DOM suppose de connaître le coefficient de
majoration du PFHT et du PPTC. Pour prendre l’exemple de la Guadeloupe et de la
Martinique, le coefficient de majoration du PFHT métropole était de 1,3863 (avant la
réforme de 2008). Pour un médicament au prix fabricant de 10 €, le prix vendu au
pharmacien était donc de 10 X 1,3863 =13,863 €. Et le coefficient multiplicateur du
prix public y était de 1,364. Ainsi, le prix public hors taxe était de 13,14 x
1,364=17,922. La marge du pharmacien était donc égale à 17,922-13,863=4,059 €.
Le calcul de la marge pour un pharmacien en métropole était de 2,11 (13,14-11,03
[prix d’achat au grossiste]). La marge en Guadeloupe et Martinique était donc de
92 % supérieure à celle du pharmacien en métropole pour un produit au PFHT de
10 €.
261. Arrêt n° 118278, Mme An Hot et autres, 15 septembre 1995.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
213
arrêtés préfectoraux de 1990 ont donc continué à s’appliquer sans aucune
base légale.
Il a fallu attendre la loi de finances pour 2005 pour qu’un arrêté
ministériel puisse majorer à la fois le prix et la marge des distributeurs.
Un arrêté du 2 mai 2005, pris sur le fondement de l’article L. 753-4, a
ainsi pu légalement majorer de 16 % le prix des médicaments rétrocédés.
Cet arrêté n’était toutefois valable que jusqu’au 31 août 2005 car
une enquête permettant d’apprécier au plus juste les surcoûts liés à
l’éloignement devait être menée pour déterminer définitivement la
majoration de prix. Or, les ministres de la santé, de l’économie et de
l’outre mer n’ont missionné l’IGAS et à la DGCCRF sur ce thème qu’au
printemps 2008.
3
–
D’importantes rentes de situation
Avant la réforme de février 2008, les marges des grossistes
répartiteurs et des pharmaciens (fin 2007) étaient nettement supérieures à
la stricte application de la majoration du PPTTC.
Ecart de prix et de marge Métropole/DOM (année 2007)
Métropole*
La Réunion
Ecart
PPTTC*
237 694 604
309 716 069
+30 %
Marge grossiste
15 094 361
52 587 256
+248 %
Marge pharmacien
51 716 215
76 463 692
+47,8 %
Métropole*
Guadeloupe
Ecart
PPTTC*
139 906 097
190 831 917
+36,4 %
Marge grossiste
8 622 402
29 205 041
+238 %
Marge pharmacien
28 148 394
47 919 619
+70,2 %
Métropole*
Martinique
Ecart
PPTTC*
121 057 876
165 122 943
+36,4 %
Marge grossiste
7 684 317
24 894 532
+223 %
Marge pharmacien
25 423 517
43 253 324
+70,1 %
* A structure de consommation comparable
Source :
DSS.
4
–
La réforme en trompe l’oeil de 2008
Pour remédier à une situation marquée ainsi par diverses carences
(illégalité persistante, absence de dégressivité pour les grossistes, prix
élevés), une réforme est intervenue mais de portée réduite : l’arrêté du
7 février 2008 a régularisé le dispositif tout en le réformant a minima.
C
OUR DES COMPTES
214
Certes, la diminution du coefficient multiplicateur aboutit à une
baisse de 3 % du PPTTC
262
. Mais la dégressivité instituée pour les
grossistes reste symbolique : à structure de consommation comparable,
l’écart de la marge avec la métropole reste à +206 % pour La Réunion,
+192 % pour la Guadeloupe et +179 % pour la Martinique. Pour les
pharmaciens, l’écart avec la métropole reste à +42,5 % pour La Réunion,
+64,3 % pour la Guadeloupe et la Martinique
263
. En Guyane, le
coefficient de majoration de prix et la marge grossiste n’ont pas été
modifiés. Selon le ministère de la santé, cela s’expliquerait par la volonté
de ne pas fragiliser les officines rurales. Or, cet ajustement ne tient pas
compte du revenu moyen du pharmacien en Guyane qui est le plus élevé
des quatre DOM (plus de 130 000 € en 2006).
III - Les revenus des pharmaciens
L’examen de l’évolution du revenu des pharmaciens titulaires
porte ici sur la totalité de leur revenu d’activité (ce qui inclut les
médicaments remboursables, non-remboursables, la parapharmacie et les
autres produits vendus en officine). Il fait apparaître le maintien des
résultats malgré une légère diminution du taux de marge commerciale.
Mais la dispersion croissante peut constituer un frein à une baisse des
marges administrées, du moins si n’est pas engagé un effort plus
volontariste de regroupement des officines.
A
–
Le maintien de la rentabilité officinale
A partir des informations de la fédération des centres de gestion
agréés concernant 11 000 officines déclarant un bénéfice industriel et
commercial (BIC), la Cour a pu établir des indicateurs financiers par
tranches de BIC pour les années 2003 à 2006.
262. Le coefficient multiplicateur passe de 1,364 à 1,323 pour la Guadeloupe et la
Martinique, de 1,303 à 1,264 pour la Réunion et reste inchangé pour la Guyane (1,34).
263 . Le calcul détaillé ci-dessous explicite les déterminants de la marge des
pharmaciens. Pour reprendre l’exemple figurant à la note n° 253 page 207, le calcul
peut être fait avec le nouveau coefficient multiplicateur (1,348 pour le grossiste dans
la tranche <22,9 € et 1,323 pour le prix public). Marge grossiste-répartiteur : 10 x
1,348=13,48 ; prix public (HT) : 13,14 x 1,323=17,384. 17,384-13,48=3,904, ce qui
représente une marge du pharmacien en Guadeloupe et Martinique de 76,6 %
supérieure à la métropole pour un produit au PFHT de 10 € [Marge métropole : 13,14-
10,93=2,21].
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
215
Indicateurs économiques 2003-2006
<800 000 €
2 000 officines
<1 100 000 €
2 800
officines
<1 500 000 €
2 700 officines
<2 000 000 €
2 000
officines
<3 500 000 €
1 300
officines
CA HT moyen 2003-2006
566 681
911 201
1 005 611
1 658 497
2 357 872
TCAM CA HT
4,1 %
4,4 %
4,4 %
4,5 %
4,8 %
Taux de marge moyen
2003/2006
28,7%
28,7%
28,8%
28,9%
29,1%
Diminution du taux de marge
-2,7 %
-2,7 %
-2,4 %
-1,7 %
-2,3 %
Résultat 2005/2004
-3,3 %
-1,9 %
-1,0 %
-0,3 %
-0,2 %
Résultat 2006/2005
1,9 %
0,2 %
0,6 %
2,3 %
2 %
Résultat 2006/2003
4,2 %
2 %
3,8 %
6 %
7,4 %
Source :
FCGA. Calculs Cour des comptes
Ces informations font apparaître qu’en dépit des mesures
d’économies prises dans le cadre du « plan médicament » depuis 2005, le
résultat des officines a augmenté de manière régulière sur la période
2003-2006. On constate également que ces mesures ont eu un impact sur
les officines plus fort en 2005 qu’en 2006 alors que les économies
264
pour l’assurance maladie ont été nettement supérieures en 2006 (1,1 Md€)
qu’en 2005 (500 M€). L’hypothèse est que les facteurs d’évolution de la
rémunération décrits supra (II, B) ont joué favorablement sur la rentabilité
de l’officine.
B
–
Les revenus soumis à cotisations sociales
Les données disponibles ne permettent pas de passer d’une façon
aisée des résultats bruts des officines aux revenus des pharmaciens
titulaires.
1
–
La référence retenue
La Cour a demandé directement à la caisse d’assurance vieillesse
des pharmaciens (CAVP) des informations sur les revenus déclarés par
les pharmaciens qui servent de base au calcul des cotisations sociales
265
.
En effet, la disponibilité des revenus fiscaux est incertaine. Certes,
cette disponibilité ne présente pas de difficultés particulières pour un
pharmacien déclarant un revenu entrant dans la catégorie des bénéfices
industriels et commerciaux (BIC). Néanmoins, plus du quart des officines
264. Ne sont comptabilisées que les mesures relatives aux génériques et aux baisses
de prix ciblées.
265 . Informations issues de la déclaration commune des revenus (DCR) des
professions indépendantes, transmis annuellement à la CAVP par le RSI.
C
OUR DES COMPTES
216
sont des sociétés de capitaux (EURL, SARL, SEL
266
) assujetties à
l’impôt sur les sociétés. Dans ce cas, le revenu fiscal du titulaire est
constitué d’un revenu de gérance (ou de co-gérance) et de dividendes.
Pour reconstituer ce revenu global, il faudrait donc identifier les titulaires
d’officine dans les déclarations de revenus et isoler dans la rubrique des
revenus mobiliers ce qui a trait exclusivement au revenu tiré du bénéfice
fiscal de l’officine. Les systèmes d’information de la DGI ne permettent
pas d’opérer cette identification.
Les revenus déclarés à la CAVP ne comprennent pas davantage les
revenus mobiliers tirés de l’activité officinale et pour cette raison peuvent
être qualifiés de revenus « minorés ». On observe en effet depuis
quelques années un très fort développement des sociétés d’exercice
libéral (SEL). Alors qu’en 2000, un peu plus de 10 % des inscriptions et
reprises d’officines l’étaient en SEL, près de 50 % l’ont été en 2007. En
stock, les SEL étaient moins de 500 en 2000, elles sont au nombre de
3 637 en 2007.
Une explication avancée par la profession tient au fait qu’en raison
du vieillissement de la profession, la SEL offre plus de facilités à un
pharmacien,
qui
souhaite
diminuer
progressivement
son
activité
professionnelle, de s’associer tout en abaissant régulièrement le nombre
de ses parts voire en conserver à sa retraite. Cette explication est
pertinente en ce qu’une création de SEL sur deux concerne des
pharmaciens déjà titulaires de leur officine. Néanmoins, elle est très
incomplète.
Le développement des SEL s’explique aussi pour des raisons
d’optimisation fiscale
267
et sociale
268
. Sur le plan du revenu individuel,
la SEL permet d’augmenter la capacité de remboursement de l’emprunt
contracté pour l’achat de parts d’une officine. En effet, la SEL permet à
son ou ses gérants (dans le cas d’un collège de gérants égalitaires) de
266 . Entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, société à responsabilité
limitée, société d’exercice libéral.
267. Depuis la réforme de l’avoir fiscal en 2004, les sociétés soumises à l’IS sont
taxées au taux réduit de 15 % pour la partie du bénéfice inférieure à 38 120 € même si
elles décident de distribuer le bénéfice. Auparavant, ce taux réduit était réservé aux
sociétés qui gardaient en réserve le bénéfice plutôt que de le distribuer sous forme de
dividendes. Même si le résultat moyen d’une officine est supérieur à 38 120 €, pour
un nombre non négligeable d’officines, une partie importante du bénéfice est ainsi
soumise au taux de 15 %.
268. C’est le cas aussi pour certains médecins, cf. le rapport sur la sécurité sociale de
septembre 2007, chapitre VIII, « Les médecins libéraux : démographie, revenus et
parcours de soins », pages 210-211.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
217
s’octroyer une faible rémunération de gérance et de se distribuer des
dividendes. Cette stratégie est efficace puisque ni le RSI, ni l’ACOSS, ni
la CAVP n’appellent de cotisations sur les dividendes, considérés par le
Conseil d’Etat comme de stricts revenus mobiliers
269
. Il faut y voir là une
des raisons de l’essor de cette forme sociétaire
270
.
Cependant, la Cour de cassation a dans un récent arrêt confirmé sa
jurisprudence selon laquelle les dividendes perçus dans le cadre d’une
SEL sont des revenus d’activité professionnelle soumis à cotisations
sociales
271
. Ces jurisprudences discordantes n’assurent pas une sécurité
juridique aux organismes désireux d’appeler des cotisations sur de tels
revenus et appellent une évolution de la législation.
269. Les caisses des médecins (CARMF) et des avocats (CNBF) appelaient des
cotisations sur les dividendes (au motif qu’étant des revenus libéraux ils doivent être
considérés comme des revenus professionnels) jusqu’à une décision récente du
Conseil d’Etat du 14 novembre 2007 qui a exclu les dividendes de l’assiette sociale au
motif que la définition de l’assiette sociale (article L. 131-6 du CSS) se limite au
revenu professionnel « pris en compte » pour le calcul de l’IR. Voir le rapport du
conseil des prélèvements obligatoires sur les prélèvements obligatoires des
indépendants, p. 115 et suivantes.
270. C’est ce qui explique également l’augmentation du prix de cession des officines
ces dernières années. Le prix de cession 2006 s’est établi en moyenne nationale à huit
fois l’excédent brut d’exploitation (contre cinq à six fois l’EBE en moyenne depuis
2000). Ce renchérissement de l’officine explique et nourrit à la fois l’endettement des
pharmaciens. Il témoigne d’un mouvement de « patrimonialisation » de l’officine qui
peut constituer un frein à toute recomposition du réseau.
271. Cour de cassation, deuxième chambre civile, 15 mai 2008.
C
OUR DES COMPTES
218
2
–
Analyse des revenus
Revenus nets des pharmaciens d’officine en métropole hors revenus
mobiliers (2003-2006
272
)
Revenus 2003
Effectif
Moyen
Ecart-type
1er quartile
médiane
3ème quartile
25058
95 654 €
65 905 €
52 249 €
83 510 €
124 004 €
Revenus 2006
Effectif
Moyen
Ecart-type
1er quartile
médiane
3ème quartile
24641
96 186 €
71 549 €
48 149 €
82 563 €
125 897 €
Source :
CAVP (DCR). Les revenus dans les DOM ont été écartés en raison du
coefficient multiplicateur. Les pharmaciens des DOM (section E) représentent moins
de 2 % de l’ensemble des pharmaciens.
a)
Le décrochage des résultats et des revenus déclarés
Bien que les résultats des officines aient augmenté entre 2003 et
2006, les revenus réels pris pour base de calcul des cotisations sociales
ont régressé en termes réels. Si cette évolution tient pour partie à des
raisons économiques, la création des SEL a pu également y contribuer en
augmentant la part du revenu mobilier dans le revenu personnel du
pharmacien titulaire.
b)
Les revenus des pharmaciens sont marqués par une dispersion
croissante
On observe un net décrochage du premier quartile. En 2003, le
quart des pharmaciens avaient un revenu compris entre 0 et 52 309 €. En
2006, la fourchette s’est rétrécie, passant de 0 à 48 155 €. Cette forte
dispersion peut s’expliquer par l’érosion de la rentabilité des officines
dont le CA HT est inférieur à 1,5 M€ (cf. infra). La CAVP constate une
272. Les revenus forfaitaires ou taxés d’office ne sont pas pris en compte. L’effectif
des cotisants des deux premières années, pour lesquels l’assiette de cotisations est
constituée respectivement de 18 et 27 fois le montant de la base mensuelle des
allocations familiales (BAMF), n’est également pas pris en compte pour déterminer
les revenus moyens.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
219
augmentation depuis 2005 des régularisations de cotisations négative
273
.
L’écart entre le 1
er
quartile et la médiane reste stable de 2003 à 2006,
autour de 30 000 €.
C
–
Densité officinale et revenus des pharmaciens
Le tableau ci-dessous permet, pour les neuf départements
274
où le
revenu est le plus élevé
275
, de mettre en corrélation un fort revenu avec
un taux de surnombre peu élevé (en moyenne 16,3 %.).
Le cas des départements à revenu moyen plus élevé
Départements
Revenu
Surnombre
Aisne
135 635
18,4 %
Eure
124 646
12 %
Pas-de-Calais
124 238
16 %
Manche
120 955
20 %
Landes
120 952
25,7 %
Loir-et-Cher
120 817
9,0 %
Somme
120 709
7,9 %
Eure et Loire
120 049
19,2 %
Indre
119 554
19,2 %
Source :
CNOP, CAVP (calcul Cour des comptes)
A l’inverse, dans le tableau ci-dessous, il apparaît que dans les dix
départements pour lesquels le revenu moyen est le plus faible, le taux
moyen de surnombre est près du double (29,7 %) de celui des dix
départements au revenu moyen le plus élevé.
273 . En 2008, 35,3 % des affiliés à la CAVP (pharmaciens et directeurs de
laboratoires) ont eu une régularisation négative lors de l’appel de leurs cotisations
2006, contre 31,0 % en en 2007 (appel sur revenus 2005) et 26,7 % en 2006 (appel sur
revenus 2006). Dans le même temps, les affiliés ayant eu une régularisation positive
sont passés de 55,6 % du total des affiliés en 2006 à 45,5 % en 2008 (diminution de
dix points).
274. Le cas de la Moselle (128 155 €) n’a pas été retenu. En effet, l’application dès
1941 d’un quorum plus élevé en Alsace-Moselle aboutit à une situation de sous-
nombre par rapport au quorum appliqué dans le reste du territoire français.
275. Les données disponibles du CNOP n’ont permis cette corrélation que sur le
champ des villes de plus de 10 000 habitants avec un quorum de 1 officine pour
3 000 habitants.
C
OUR DES COMPTES
220
Le cas des départements à revenu moyen moins élevé
Départements
Revenu
Surnombre
Loire-Atlantique
86 678
12,3 %
Gironde
86 560
26,6 %
Hautes-Pyrénées
85 118
43,2 %
Isère
83 826
16,5 %
Corse
82 535
48,4 %
Rhône
81578
17,0 %
Bouches-du-Rhône
80 719
22,2 %
Alpes-Maritimes
79 368
33 %
Haute-Garonne
77 464
44,1 %
Paris
76 060
34 %
Source :
CNOP, CAVP (calcul Cour des comptes). Les départements franciliens qui
ont un revenu moyen de 87 000 € (hors Paris) n’ont pas été pris en compte en dépit
d’un taux de surnombre faible. En effet, selon une étude de l’ordre des pharmaciens,
une officine francilienne ne touche que 40 % de la population située dans sa zone de
chalandise.
Le niveau du revenu des pharmaciens paraît donc clairement
corrélé aux taux d’officines en surnombre. Le dispositif de rémunération
de l’officine aboutit ainsi à créer des rentes de situation au bénéfice des
uns pour préserver les revenus des autres, cela à la charge de l’assurance
maladie.
________________________
SYNTHESE
_________________________
Pendant près de soixante ans, des officines ont pu être créées en
dépit des règles du quorum. En ne modifiant pas le réseau existant, la
réglementation mise en place en 1941 a ouvert la voie au surnombre. Pour
contourner les effets négatifs d’une réglementation initiale qui a figé et
protégé l’existant, l’administration s’est donnée les moyens de la
contourner. Ainsi, en appliquant les nouveaux quotas de population définis
par la LFSS pour 2008, il apparaît que près du quart des officines sont en
excédent et les mesures prises en 2008 pour réduire les surnombres ne
paraissent pas de nature, par elles-mêmes, à changer cette situation.
En parallèle, la rémunération de l’officine en métropole est très
avantageuse pour le pharmacien. Les taux de marge pour les produits
supérieurs à 10 € sont plus élevés en 2008 que ce qu’ils étaient en 1990. La
marge du générique a été alignée sur celle du princeps. Les remises se
situent à des niveaux élevés. L’impact de la réforme des remises et marges
arrière intervenue début 2008 sera très limité. Dans les DOM, des rentes
de situation ont prospéré à l’abri d’un dispositif resté très longtemps
illégal et dont la réforme récente est en trompe l’oeil.
LES PHARMACIES D
’
OFFICINE ET LEURS TITULAIRES LIBERAUX
221
En outre, la fixation des marges n’a nullement tenu compte de
plusieurs facteurs favorables à l’officine tels que la croissance des ventes,
l’élévation du prix des médicaments, le maintien à un niveau élevé des
remises et marge arrière ainsi que le potentiel de croissance des produits
non-remboursables et de la parapharmacie.
L’appréciation des revenus personnels est biaisée en raison de
l’essor des sociétés de capitaux, permettant aux pharmaciens de diminuer
leur rémunération de gérance au profit de revenus mobiliers qui ne
figurent pas dans l’assiette sociale. Dès lors, la stagnation du revenu
moyen déclaré montre que les décisions prises pour réaliser des économies
sur les médicaments ont peu affecté le revenu moyen des pharmaciens.
Bien que sous-estimé, ce revenu reste élevé puisqu’il atteint presque
100 000 € en 2006 (96 186 €).
Ainsi, les mesures récentes prises pour faciliter les regroupements
ne sont pas à la hauteur des enjeux. Il est vain d’attendre que ces
regroupements se produisent, pour dans un second temps, réformer les
marges. C’est au contraire en ajustant les marges que l’on incitera les
pharmaciens à se regrouper.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
24.
Ajuster les marges en métropole pour accélérer les regroupements
d’officines.
25.
Réviser à la baisse les modalités d’incitation en faveur des
génériques, à l’exception des spécialités pharmaceutiques nouvellement
génériquées.
26.
Ajuster les marges dans les DOM afin de les rendre strictement
proportionnelles à la majoration du prix public local.
27.
Evaluer l’impact de la création des SEL sur les revenus des
pharmaciens déclarés à la CAVP.
28.
Inscrire dans la loi le principe d’assujettissement aux cotisations
sociales des revenus mobiliers perçus dans le cadre d’une SEL.
223
Chapitre VII
L’accès en ligne aux dossiers médicaux
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
225
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Les systèmes d’information de santé partagés, et notamment les
accès en ligne aux dossiers médicaux individuels, ont vocation à se
développer, dans un contexte de forte innovation technologique et
d’équipement croissant des professionnels de santé. L’utilisation des outils
informatiques, limitée dans un premier temps à la facturation et à la
gestion des soins à des fins d’économie de gestion et de rapidité du
remboursement, a été en effet étendue progressivement à l’organisation des
soins et aux pratiques médicales. Les systèmes d’information peuvent ainsi
désormais contribuer à l’amélioration de la qualité des soins et à la
maîtrise des dépenses, en particulier de prescription.
L'importance de ces enjeux a conduit la Cour à prolonger ses
travaux publiés en 2002 sur l’organisation du système SESAM Vitale et en
2007 sur l'interopérabilité des systèmes d'information. Depuis 2002, en
effet, les projets se sont multipliés et les dépenses ont été accrues sans que
pour autant un cadre suffisamment cohérent soit constitué.
C'est le cas en ce qui concerne les systèmes d’information
hospitaliers, auxquels est consacré par ailleurs dans le présent rapport une
analyse détaillée (voir infra, chapitre IX). C'est également le cas en ce qui
concerne les téléservices examinés au présent chapitre.
La Cour a contrôlé en 2007 la gestion du GIP chargé du dossier
médical personnel (DMP). La Cour a aussi examiné des projets connexes
ou concurrents, comme l'historique des remboursements, développé par la
CNAMTS, ou le dossier pharmaceutique, par le conseil national de l'ordre
des pharmaciens. Les conditions dans lesquelles ils ont été développés sont
analysées ci-après. Cet examen a conduit la Cour à constater
l’incohérence de l’ensemble de ces projets, l’ampleur des choix qui
demeuraient en suspens début 2008, des problèmes de pilotage à surmonter
ainsi que des lacunes à combler.
Le Gouvernement a annoncé en juin 2008, après les contrôles de la
Cour, des mesures
de nature à remédier aux défaillances constatées et
notamment la création d’une agence des
systèmes d’information de santé
partagés.
La Cour, prenant acte de ces annonces, souhaite rappeler les
multiples redressements ou étapes qui restent à concrétiser avant que
soient réunies les conditions nécessaires à l’aboutissement de ces projets.
C
OUR DES COMPTES
226
I - Une diversité de téléservices
Aux grandes fonctions du système de santé correspondent de plus
en plus des systèmes d’information partagés et de téléservices
276
de
santé. Une première catégorie comprend des téléservices développés
depuis une décennie dans une logique de gestion : c’est le cas du
dispositif de la carte de professionnel de santé (CPS) et de SESAM-
Vitale. Une seconde catégorie vise depuis peu à optimiser la dispensation
des soins, de la prévention et du dépistage, par des téléservices
d’échanges entre professionnels ou avec les patients, dans une logique de
sécurisation et d’efficience médicales : c’est le cas de l’ambitieux projet
de dossier médical personnel et de ses expérimentations dispersées. Enfin,
des téléservices s’adressent aux professionnels ou aux assurés dans une
logique d’aide à la décision : informations sur l’offre de soins, la qualité
de service, historique des remboursements et dossier pharmaceutique
(DP). Les développements successifs de ces services conduisent à une
grande diversité, dont la cohérence n’est pas garantie aisément
A
–
Le point de départ : SESAM Vitale et CPS
La France bénéficie en ce domaine de substantielles infrastructures
de base. La Cour a évoqué dès 2002 l’impulsion donnée par l’assurance
maladie, qui a doté d’une carte Vitale 1
277
tous les assurés et elle a
rappelé en 2007 le rôle de la CPS
278
. Conçue pour la facturation, cette
infrastructure apporte aussi un premier étage de sécurisation. Le
professionnel de santé sécurise l’accès avec sa CPS et il authentifie
l’identité du patient avec la carte Vitale de ce dernier. Il en est résulté de
considérables économies en personnels de saisie. L’objectif est que 85 %
des feuilles de soins soient ainsi traitées en 2009.
Le tableau ci-après illustre la réussite du dispositif de carte de
professionnel de santé (CPS) et de traitement des feuilles de soins
électroniques (FSE), auquel la CPS donne accès. La carte Vitale de
l’assuré permet aux professionnels de santé (colonne 2) de déclencher la
FSE (colonne 3). Ces cartes CPS et Vitale sont désormais au coeur de la
sécurisation de tout dispositif d’accès en ligne à des dossiers médicaux.
276. Un téléservice est un « système d'information permettant aux usagers de procéder
par voie électronique à des démarches ou formalités administratives » (ordonnance
n° 2005-1516 du 8 décembre 2005). Ce chapitre ne traite pas des soins à distance.
277 . Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2002, le point sur
l’organisation du système SESAM Vitale, pp. 445 et suivantes.
278. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, le partage des données
entre les systèmes d’information de santé, pp. 312 et suivantes.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
227
Evolution du nombre de cartes de professionnels de santé et de feuilles
de soins, de l’origine à janvier 2008
Au
31 décembre
1.
CPS en service
2.
Professionnels
de santé
raccordés à SV
3.
FSE transmises
(millions)
4.
FSE transmises
par PS
(col. 3/col. 2)
5.
FS papier
(millions)
1999
79 763
19 232
11
592
NC
2000
147 744
64 233
94
1 471
434
2001
192 472
94 909
330
3 483
376
2003
262 653
168 056
742
4 418
269
2005
290 792
206 628
904
4 377
216
2007
302 930
244 815
997
4 073
182
Source :
CNAMTS. La colonne 1 totalise les professionnels de santé prescripteurs
(PS) et les autres professionnels.
B
–
Une grande ambition : le DMP
Le projet le plus ambitieux, encore en développement, est celui du
dossier médical personnel (DMP), inscrit dans la loi du 13 août 2004 et
porté par un groupement d’intérêt public depuis 2005. Il a été réorienté
sur de nouvelles bases mi-2008.
1
–
Un calendrier et une organisation modifiés en 2008
Le projet de DMP avait été conçu de manière particulièrement
ambitieuse : les 61 millions de patients et les 500 000 professionnels qui
les prennent en charge, tant en établissement qu’en ville, devaient accéder
d’ici 2011 à des bases de données stockant des dossiers médicaux
personnels très détaillés. Ainsi que le soulignait dès 2005 un spécialiste,
« le projet français est à l’évidence le plus ambitieux puisqu’il prétend
faire au moins aussi bien que les programmes américains et anglais en
trois fois moins de temps et avec infiniment moins d’argent »
279.
Au début 2007, l’objectif affiché du gouvernement demeurait que
le DMP soit mis en ligne en juillet de la même année, contre toute
évidence. Selon un nouveau calendrier, mi-2008, une première version du
« cadre d’interopérabilité » et du « socle » du DMP serait expérimentée
en 2009, avant d’élargir d’ici 2012 le déploiement et la gamme des
services associés.
279. Sénat, rapport sur l’informatisation dans le secteur de la santé, par M. Jean-
Jacques JEGOU, Paris, 3 novembre 2005, p. 47.
C
OUR DES COMPTES
228
Le rapport de revue de projet de fin 2007
280
, celui, évoqué plus
loin, de la mission de relance du DMP qui l’a suivi en avril 2008 et un
rapport parlementaire ont bien analysé l’échec de la stratégie initiale. Les
objectifs assignés ou validés par les ministres successifs jusqu’au
printemps 2007 furent notoirement incompatibles avec le calendrier qu’ils
fixaient. Le comité d’orientation du GIP et ses 16 groupes de travail ont
certes permis aux parties prenantes de s’exprimer, mais l’orientation des
décisions et la surveillance de leur mise en oeuvre n’en ont pas garanti le
réalisme. L’architecture articulée autour d’un portail, d’un hébergement
de référence et d’une pluralité d’hébergeurs appelait une maîtrise
d’ouvrage très robuste, dont toutes les conditions n’ont pas été réunies.
L’Etat prévoit désormais une fusion des maîtrises d’ouvrage des
projets de systèmes d’information partagés en une unique agence des
systèmes d’information de santé partagée (ASIP). Elle regrouperait le
GIP DMP, le GIP CPS et la partie « interopérabilité » du GMSIH.
Jusqu’à cette décision, les avantages et les inconvénients des différents
modes de gestion envisagés pour le DMP -purement privés, purement
publics ou bien partagés- n’avaient pas été pleinement et en temps utile
documentés.
De
même,
l’hypothèse
d’un
seul
prestataire
pour
l’hébergement, configuration qui prévaut dans nombre de secteurs
comparables, bancaires notamment, avait été écartée sans un examen
approfondi en termes de coûts et d’efficacité, alors que le choix d’une
multiplicité d’hébergeurs simplement agréés présentait des risques, tant
de dérives commerciales que pour la confidentialité des données.
Le pilotage direct du projet par les cabinets ministériels, marqué
par des urgences successives, a été mal ciblé. Les pressions exercées pour
accélérer le processus se sont avérées contreproductives. Il était notoire -
ainsi qu’il est enfin reconnu depuis le rapport de novembre 2007- qu’un
tel projet s’étendrait en fait sur une ou deux générations d’utilisateurs.
L’accélération voulue ou validée par les ministres n’a pas laissé la
place à une réflexion suffisante sur les pré-requis techniques et
sociologiques. Elle a de surcroît laissé le champ libre à des forces
centrifuges qui en ont freiné la mise en oeuvre. La supervision du projet a
ainsi été assurée dans des conditions d’inexpérience au regard des normes
professionnelles
de
gestion
de
projets
informatiques,
sans
que
l’administration centrale dispose de l’autorité et des moyens appropriés.
280 . Inspection générale des finances, inspection générale des affaires sociales,
conseil général des technologies de l’information, rapport sur le dossier médical
personnel, Paris, novembre 2007, 87 pages. Voir aussi : Assemblée nationale,
commission des affaires culturelles, familiales et sociales, rapport sur le DMP
présenté par Jean-Pierre DOOR, Paris, janvier 2008, 179 pages.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
229
Les bonnes pratiques en matière d’informatisation et notamment de
maîtrise des risques ont tardé à être mises en place. Les expérimentations
et leur suivi ont été réalisés à la hâte, sans que leur rapport coût/efficacité
puisse être maîtrisé ni documenté à temps. Leurs conditions de sécurité et
de contrôle de qualité ont parfois été médiocres. L’analyse des débats et
des mésaventures qui entourent des projets similaires dans d’autres pays
(Etats-Unis, Grande-Bretagne, notamment) aurait pu être approfondie. Le
GIP a eu conscience de ces déficiences mais n’a pas d’emblée obtenu les
ressources humaines suffisantes pour les combler. Ces facteurs et
l’inéluctable report du DMP à une date lointaine exposent à une perte
durable de confiance et à des dépenses additionnelles pour y remédier.
2
–
Un coût imprécis
Le coût à terme de tels projets est à apprécier au regard des gains
escomptés. On verra plus loin l’insuffisance des prévisions à ce sujet. En
2007, le GIP estimait le budget total (investissements et dépenses
d’exploitation des cinq premières années) à environ 1 Md€. Le coût de
fonctionnement était évalué à une centaine de millions d’euros les années
suivantes. Les dépenses de développement du dispositif jusqu’à sa
suspension ont été de 53 M€ (colonne 6 du tableau ci-dessous). Elles
n’ont
pas
dépassé 26 %
des
budgets
proposés par
le
conseil
d’administration du GIP (colonne 1). Cette sous-consommation reflète
l’irréalisme du calendrier qui était imposé à ce dernier et accepté par lui.
Financement du GIP par le FAQSV (de 2005 à 2007)
En M€
Subventions reçues du FAQSV
1. Budget
initial du GIP
2. Décision
initiale
3. Convention
après révision
4. Recettes
constatées
5. Dépenses
constatées
2005
15,0
15,0
15,
5,3
6,1
2006
75,7
57,7
41,0
25,9
24,4
2007
119,7
119,7
27,6
22,4
22,4
Total
210,5
192,5
83,6
53,7
53,0
Source :
CNAMTS et comptes financiers du GIP. Non compris quelque 5 M€ à la
charge de la Caisse des dépôts et consignations. Le FAQSV est devenu en 2007 le
FIQCS, fonds d’intervention de la qualité et de la coordination des soins.
Le temps qui s’est écoulé et le nécessaire changement de stratégie
ont rendu inutile une partie des dépenses déjà engagées et des autres
financements expérimentaux. Le coût total, maintenant estimé à 100 M€
par an et davantage à court terme, dépendra du système choisi, qui reste à
préciser, comme de l’ampleur et du calendrier effectif de son
déploiement. Le coût de fonctionnement par dossier ouvert dépendra
également du degré d’adhésion et de fidélité au dispositif des assurés
C
OUR DES COMPTES
230
comme des professionnels et établissements de santé. S’y ajoutera le
risque que l’assurance maladie soit amenée à subventionner le
rééquipement des professionnels, dont la nécessité est évoquée plus loin.
Le GIP a envisagé un forfait de 300 € par professionnel, soit près de
70 M€. En outre, la question d’une rémunération pour chaque dossier
ouvert est restée en suspens.
C
–
Des projets complémentaires ou concurrents ?
1
–
La diversité des dossiers médicaux
a)
La diversité des usages potentiels
Le débat à propos du DMP a fait prendre conscience du caractère
peu communicant des stockages de dossiers médicaux, comme de la
diversité des objectifs et de l’inégale sécurisation des systèmes qui
hébergent les téléservices de santé ou qui doivent communiquer avec eux.
La plupart demeurent cloisonnés.
Le carnet de vaccination électronique
Un
exemple
de
dispersion
des
initiatives
est
celui
de
l’informatisation du carnet de vaccination. En application de l’article
L. 2132-1 du CSP, tout enfant est titulaire d'un carnet de santé, sous la
responsabilité de la protection maternelle et infantile des conseils
généraux. Le modèle fixé par arrêté du 5 décembre 2005 vaut certificat de
vaccination. Aucune enquête n’a déterminé l’ampleur de son utilisation.
La direction générale de la santé, qui a demandé au GIP DMP de le
prendre en compte, avait cependant considéré que son accessibilité ne
pouvait être reproduite par un système informatisé.
Un carnet de vaccination électronique est toutefois testé en ligne
depuis 2007 par le principal opérateur de télécommunications, auprès de
25 000 de ses salariés, adhérents de la seconde mutuelle française ; la
sécurité de ce service, destiné à se diversifier, est de haut niveau. Un tel
carnet dématérialisé était aussi prévu en 2007 dans un projet de décret
relatif au DMP, comme la reproduction des données du carnet de santé de
l’enfant.
A la plupart des fonctions du système de santé correspondent de
longue date des dossiers : fiche d’observation prévue par le code de
déontologie médicale, dossier commun minimum des maternités (1982),
dossier du patient hospitalisé (1991), dossier de suivi médical (loi de
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
231
1994, abrogée en 1996
281
), dossiers de spécialité développés dans les
établissements, etc. Leur numérisation a été variable selon les secteurs
(national, régional, réseau local, établissement, cabinet médical…). La loi
a tantôt innové à l’initiative des administrations, tantôt simplement ratifié,
parfois à l’écart de ces dernières, une initiative professionnelle comme
dans le cas du dossier pharmaceutique (DP).
b)
Les services mis en ligne par le régime général d’assurance
maladie
Le site AMELI (assurance maladie en ligne) de la CNAMTS est le
plus considérable dans la catégorie des téléservices à visée informative. Il
permet depuis 2006 aux 49 millions d’assurés du régime général de
consulter en ligne leur dossier administratif personnel : état civil, caisse
d’affiliation, droits, médecin traitant, paiements et remboursements de
soins des douze mois écoulés, demande de documents et déclaration de
perte de carte Vitale. Depuis 2008, les assurés du régime général peuvent
y télécharger leurs relevés mensuels : l’assurance maladie espère
économiser ainsi 1,3 € par assuré par an, en réduisant les envois postaux.
Fin avril 2008, 635 000 assurés y étaient inscrits et 8 % l’utilisaient de
manière quotidienne. Une étude associe depuis 2007 les professionnels de
santé à la définition et à la construction de nouvelles fonctionnalités.
Les professionnels de santé accèdent de même à un nombre
croissant de données sur leur activité individuelle (paiements en tiers
payant, rémunérations au titre des patients en ALD, liste de leur
patientèle, existence d’un médecin traitant…). Fin avril 2008, 135 000
d’entre eux s’y étaient raccordés, avec un taux d’utilisation quotidienne
d’environ 10%. Mais un bilan technique et financier ne peut encore être
établi, en l’absence d’objectifs et d’indicateurs de performance.
c)
La diversité des projets et expérimentations
Quelques
schémas
directeurs
régionaux
des
systèmes
d’information de santé sont élaborés, en l’absence d’un modèle national,
parfois sous l’égide de l’agence régionale de l’hospitalisation. La plupart
des expérimentations sont plus ponctuelles. Ainsi se multiplient les
marchés publics et les contrats de droit privé entre réseaux de santé ou
établissements et opérateurs, avec des protocoles et des formats de
transport, des référentiels et des niveaux de sécurité d’autant plus
281. La loi de 1994 et le décret n° 96-925 du 18 octobre 1996 avaient aussi institué un
carnet de santé, diffusé peu après à 45 millions d’exemplaires. En 2002, il était encore
détenu par 70 % des personnes interrogées lors d’un sondage, mais utilisé par
seulement 10 % d’entre elles. Il a été abrogé par la loi du 13 août 2004.
C
OUR DES COMPTES
232
hétérogènes qu’ils continuent à évoluer séparément. Ils procèdent parfois
d’un effet d’aubaine découlant des financements du GIP DMP ou du
programme Hôpital 2012. L’accès en ligne aux dossiers se développe
ainsi au sein des établissements, mais il demeure généralement fermé au
médecin de ville à l’origine de l’hospitalisation et en charge de son suivi,
comme à tout service d’urgence extérieur à l’établissement. Les résultats
d’imagerie médicale ou d’analyse sont quant à eux de plus en plus
informatisés en temps réel, mais le plus souvent encore transmis en
différé au médecin concerné, par voie postale.
S’agissant des téléservices à base de dossiers médicaux partagés
entre professionnels, voire accessibles aux patients, leur croissance est
depuis peu exponentielle. Alors que seulement 12 projets avaient été
soumis à la délibération de la CNIL entre 1989 et 2004, 48 l’ont été entre
2005 et avril 2008. A cette dernière date, s’y ajoutaient ceux qui avaient
été déclarés à la CNIL mais pas encore autorisés ou examinés par elle
(Limousin, Picardie), quoique parfois opérationnels depuis quelques
années (Franche Comté). Le projet DMP comme le dossier communicant
cancer semblent avoir eu à cet égard un effet d’entraînement -sans doute
sous-évalué en l’absence de recensement complet des initiatives locales.
Le GIP DMP a alloué à lui seul plus de 55 M€ aux expérimenta-
tions nationales (DP principalement) ou décentralisées. Il en a décaissé
25 M€ en 2005-2006, y compris pour d’éphémères démonstrateurs, puis
engagé 23 M€ en 2007 et il prévoyait en avril 2008 d’engager 7,5 M€ les
mois suivants. Le tableau ci-après compare les caractéristiques de quatre
des principaux services opérationnels en 2008 ou proches de l’être. Les
projets, notamment de plates formes de services régionaux, se
développent en l’absence de référentiels nationaux, avec le risque de
niveaux techniques hétérogènes, y compris en matière de sécurité. Ils ne
bénéficient d’aucune orientation de l'Etat ni de l’assurance maladie, en
dehors de leur éventuel agrément par le GIP DMP et il est prévu de
continuer à les encourager. Le risque augmente avec le temps que leur
interopérabilité soit très onéreuse à réaliser. Or, elle sera déterminante
pour la réduction des coûts comme pour la portabilité des dossiers d’une
profession de santé à une autre ou en cas de déménagement.
Ce morcellement incontrôlé permet certes d’expérimenter. Mais un
risque additionnel est que des dispositifs non coordonnés provoquent dans
les postes de travail des professionnels des interférences dommageables et
démobilisatrices
entre
logiciels
insuffisamment
compatibles.
Or,
l’efficacité des téléservices dépend en partie de leur simplicité d’accès et
de la confiance qu’ils inspirent. En outre, les solutions techniques sont
variables : le carnet de vaccination en ligne susvisé repose sur une carte à
puce spécifique et des composants standardisés, en dehors des contraintes
et des normes SESAM Vitale. Tout cela entraîne une dispersion onéreuse
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
233
des
moyens.
Elle
reflète
l’absence
d’alignement
des
systèmes
d’information sur une stratégie commune d’urbanisation
282
.
d)
La nécessité d’une coordination accrue
Un préalable serait donc de coordonner les objectifs. Une telle
prolifération reflète en effet des enjeux considérables et parfois antagonis-
tes. L’Etat et l’assurance maladie veulent améliorer la qualité des soins et
la maîtrise des dépenses de santé. Les professions de santé sont
soucieuses de leur indépendance, tout en évoluant vers un fonctionnement
en réseau. La défense des libertés appelle d’onéreuses précautions pour la
confidentialité des données. Les industriels sont en quête de nouveaux
débouchés qui soient solvables. Un champ aussi diversifié appelle un
pilotage particulièrement solide, qui reste à établir.
Nul n’a encore établi une cartographie des dispositifs qui ouvrirait
la voie à une convergence. Le ministère a demandé pour mi-2008 au
GMSIH et au GIP DMP un état des lieux et des propositions conduisant à
cette interopérabilité.
Depuis mars 2008, un comité des urbanistes et architectes (CUA)
réunit ces derniers, le GIE Sesam Vitale, le GIP CPS et la mission pour
l’informatisation du système de santé (MISS), sous la présidence de la
CNAMTS sans toutefois le conseil national de l’ordre des pharmaciens
(CNOP) qui gère le dossier pharmaceutique évoqué plus loin. Mais le
ministère
a
aussi
continué
à
encourager
les
expérimentations
décentralisées. Elles maintiennent certes la mobilisation des acteurs et
pourraient éclairer les choix à venir si, à l’inverse de ce qui s’est passé en
2006, les résultats étaient attendus avant de prendre des décisions. Elles
n’en appelleront pas moins d’onéreuses mises en convergence lorsque
l’Etat aura effectué un choix.
282. Une « urbanisation » d’un système d’information consiste à mettre en cohérence
sa structure conceptuelle, son organisation fonctionnelle, son architecture applicative
et son infrastructure technique, pour les aligner sur les objectifs des acteurs qui le
mettent en oeuvre et optimiser les interactions entre systèmes.
C
OUR DES COMPTES
234
Principaux téléservices publics de santé, mai 2008
WEB MEDECIN
Historique des
remboursements
Dossier
pharmaceutique
PICARDIE
Dossier médical
RHONE-ALPES
Dossier patient
partagé et réparti
Pilote
CNAMTS
CNOP
GIP Tél. de Picardie
GCS SIS-RA
Usage
Médecins
Officines
Professionnel et patient Professionnels.
Statut
Assurance maladie.
Depuis 2007.
Expérimentation
2007. Extension
2008.
Expérimentation DMP
en 2006, puis 2008.
Expérimentation DMP
en 2006, puis 2008.
Objectif
Consultation des
remboursements, par
médecins convention-
nés.
Sécuriser la dispen-
sation des
médicaments acquis
dans plusieurs
pharmacies.
Dossier partagé hôpital
et libéral, ttes équipes.
Accord CNIL demandé
pour accès patients.
Partage de données
médicales indexées
par une plateforme,
depuis professionnels
et établs.
Création et
accès
Par médecin avec CPS
(autres professionnels :
exclus)
Par pharmacien
(médecins exclus).
Libéraux avec CPS et
établiss. participant
(pharmaciens exclus)
Tous profess. de santé.
(pharmaciens inclus)
Accès
NIR du bénéficiaire.
CPS+Vitale.
Identifiant
propriétaire.
CPS+Vitale.
CPS+Vitale.
CPS+Vitale. CPS seule
si personne habilitée.
Saisie et
affichage des
données
Une fois la feuille de
soins prise en charge,
soit quelques jours
après l’achat.
En temps réel.
Temps réel ou non
selon mode de saisie.
Temps réel ou non
selon mode de saisie.
Actes
Oui
Non
Oui
Oui si indexés
Médicaments.
Si remboursés ou
signalés par le
pharmacien.
Remboursés ou non.
Prescriptions
A l’étude,
établissements.
Autres
données
Transports, indemnités,
allocations, ALD.
Non.
Résultats biologie et
radiologie.
Résultats indexés,
idem ; anapath,
traitements
Période
12 mois écoulés.
4 mois écoulés.
Non limitée.
Variable selon
sources.
Procédure de
clôture
Non.
Par patient, en
officine, à tout
moment. Clos si
0 accès en cinq ans.
Sur demande du patient.
Clôture sur demande
du patient via un
professionnel de
santé.
Hébergement
et
responsable
Assurance maladie.
Statistiques,
épidémiologie.
CNOP.
Hébergeur unique
privé. Statistiques
limitées.
GIP.
Hébergeur unique
privé.
Serveurs CHU et
CLCC. Cabinets
libéraux, réseaux
locaux.
Type
Extraction des bases de
données des organismes
d’assurance maladie.
Extraction d’une base
centralisant à cet
effet les ventes en
officine.
Réplication des données
médicales du patient
dans une base centrale.
Architecture technique
répartie fondée sur
l'indexation des
données
Masquage par
le patient
Pas de masquage, mais
certaines prestations
absentes des bases de
données (IVG...)
Patient peut refuser
l'accès.
Oui. Signalé dans
l’historique, donc
pendant quatre mois.
Non. Le patient ne peut
pas interdire l’accès.
Masquage possible par
un professionnel. Non
encore pratiqué.
Financement
CNAMTS principale-
ment (environ 10 M €).
Cf. infra.
4 000 000 € (GIP
DMP, sur crédits
CNAMTS) et
cotisations CNOP.
800 000 € (GIP DMP,
sur crédits CNAMTS) ;
200 000 € GIP
Picardie.
1 720 000 € (GIP
DMP, sur crédits
CNAMTS).
Source :
CNAMTS, CNOP, GIP Télémédecine Picardie, GCS SIS-RA.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
235
2
–
L’historique des remboursements
Pendant que des aléas retardaient le DMP, la CNAMTS a
développé son outil « historique des remboursements ». Créé comme le
DMP par la loi de 2004, il affiche les remboursements des douze mois
écoulés : consultations, imagerie, biologie, pharmacie etc. Les données
sont extraites des bases des trois régimes généraux d’assurance maladie.
Elles y sont saisies non pas lors de l’achat, comme pour le DP, mais lors
de la prise en charge plusieurs jours après. Une des pages d’accès permet
d’afficher l’ensemble des médicaments et produits de la liste des produits
et prestations (prothèses, orthèses…) remboursés, voire non remboursés
si l’information a été saisie, ainsi que les indemnités journalières.
Il est prévu qu’en 2009 les médecins urgentistes des sites
hospitaliers d’expérimentation de la carte de professionnel de santé
puissent consulter cet historique, mais il n’y a pas encore de calendrier de
saisie dans ce dernier des soins reçus en établissements. Comme le DP,
cet historique ne contribuera pleinement à prévenir les accidents
iatrogènes que lorsque que les établissements pourront l’alimenter avec
les détails appropriés des médicaments dispensés. Il ne comporte pas non
plus, à l’inverse du DP, tous les produits achetés mais non remboursés,
qu’ils aient été prescrits ou non.
a)
Un projet encore en phase de montée en charge
D’inévitables
difficultés
ont
été
rencontrées
lors
des
expérimentations, menées avec 9 437 médecins. Près de la moitié ne
disposaient pas du matériel et du logiciel (SESAM Vitale version 1.40)
du niveau approprié ; les trois-quarts ne disposaient pas de la connexion
ADSL nécessaire ; et 5 % d’entre eux ont refusé. Au total, seulement un
sixième d’entre eux utilisent l’historique des remboursements. La
CNAMTS estime qu’un dixième des quelque 200 000 médecins
concernés pouvaient y accéder au printemps 2008.
Plusieurs centaines d’agents ont été formés pour assurer cette
installation, avec un potentiel de 700 raccordements par jour ouvré. Mais
face à l’hétérogénéité des équipements informatiques des médecins, le
retard pris dans l’adoption d’une nouvelle architecture-type pour leurs
ordinateurs, évoqué plus loin, fait que la CNAMTS décline toute
responsabilité dans d’éventuelles incompatibilités entre le module logiciel
installé, par ses agents dans neuf cas sur dix, chez les médecins pour
activer l’historique des remboursements. Aussi n’est-il pas étonnant que,
présenté en 2004 comme quasiment finalisé, il ne soit déployé que depuis
peu, avec des objectifs plusieurs fois révisés à la baisse. Au 31 décembre
C
OUR DES COMPTES
236
2007, 17 400 des 35 000 médecins exerçant en ville et dotés de
l’équipement nécessaire s’étaient connectés au moins une fois par mois.
Ce dernier chiffre signifie que les deux tiers des 100 000 médecins de
ville n’avaient pas un poste de travail suffisamment complet.
b)
Un budget mal maîtrisé
Une défaillance de gestion réside dans l’absence de chiffrage
initial et donc de suivi des écarts entre prévisions et réalisations. Le coût
global entre 2005 et 2008 est déclaré à quelque 10 M€ par la CNAMTS,
1 M€ par le RSI et quelques centaines de milliers d’euros par la MSA et
les mutuelles de la fonction publique. Là encore et contrairement à un
engagement du rapport de présentation du décret de création du dispositif,
aucune estimation d’un éventuel retour sur investissement en termes
d’économies n’a été établie. Le coût réel complet n’a pas davantage été
estimé, qu’il s’agisse de celui de la mise en oeuvre et de l’utilisation chez
les médecins ou des évolutions connexes.
c)
Un objectif ambivalent et mal concerté
Au stade encore balbutiant qui a été examiné au printemps 2008
par la Cour, l’objectif, limité, de valorisation à un coût marginal par ce
téléservice des bases de données de la liquidation était atteint.
L’objectif d’ensemble restait, lui, mal défini, entre maîtrise
médicalisée de la dépense et préoccupation de santé publique. En 2004,
l’objectif affiché avait été celui d’une meilleure coordination des soins,
dans l’attente du DMP alors annoncé pour 2007. L’attente durera, mais
dès l’étude d’impact préalable au décret de 2006 l’historique était
présenté comme une mesure non plus transitoire, dans l’attente du DMP,
mais conjuguée à la mise en place de ce dernier pour « responsabiliser
l’ensemble des acteurs ».
La
maîtrise de la dépense y était
particulièrement valorisée : « une indication précise quant aux économies
attendues […] (devant être) faite lors de la phase expérimentale du
dispositif. Les investissements initiaux étant peu importants, on peut
espérer des effets financiers rapides ».
L’amélioration des pratiques de prescription grâce à une
information plus riche devait « favoriser progressivement l’émergence de
nouvelles pratiques et permettre ensuite une acceptation plus rapide du
DMP ». La CNAMTS confirmait ainsi qu’elle n’avait pas à ce stade
d’objectifs d’économies. Consacrer trop explicitement cet outil à la
maîtrise de la dépense pourrait au demeurant freiner son acceptation
comme celle du futur DMP.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
237
Pour autant, aucune réflexion approfondie quant aux places
respectives du DMP et de l’historique n’apparaît. Le projet de plan
stratégique des informations en santé (PSSIS), évoqué plus loin, n’aborde
pas non plus cette question. Force est de constater que la CNAMTS a
simultanément reçu, ou pris, un rôle marginal dans l’élaboration du DMP
et l’entière maîtrise de l’historique des remboursements. Au-delà des
différences de taille et de nature, considérables, entre les deux projets,
leur recoupement partiel fait problème dans la mesure où il n’a pas été
fondé sur une stratégie d’ensemble garantissant leur complémentarité.
La CNAMTS prévoit que le futur DMP permettra au médecin
d’interroger sans perte de temps, au cours de la même consultation,
l’historique des remboursements (cela est de même prévu pour le dossier
pharmaceutique). Mais la CNIL a noté dans sa délibération du 10 juillet
2007 autorisant la généralisation de l’historique « qu’aucune alimentation
du DMP par le service du « web médecin » ni d’accès au service du web
médecin à travers la consultation du dossier médical personnel, ne sont
actuellement prévus » et elle a considéré « qu’une telle alimentation se
heurterait à une différence de régime juridique, de finalité et de
destinataires ». La CNIL a aussi dressé un obstacle au rapprochement des
deux dossiers en exigeant un identifiant national de santé (cf. infra) pour
le DMP alors que l’historique des remboursements repose sur le seul
NIR. Quatre ans après la loi de 2004 et un an après ce traitement
différencié, aucune solution n’a été retenue pour le surmonter.
Le projet a été conduit à un niveau technique, la concertation étant
limitée aux instances techniques ou associées au programme SESAM-
Vitale. Ni les conseils d’administration des caisses nationales ni le
ministère n’ont véritablement été impliqués. Par ailleurs, alors que par
lettre du 5 avril 2005 le conseil national de l’ordre des médecins avait
notamment demandé une meilleure intégration informatique, ce service
demeure « posé » à côté du logiciel « métier » d’un médecin, même si
leurs éditeurs ont été associés au projet. Les temps d’accès sont par
exemple doublés, une fois pour le logiciel de base et une fois pour le
service, à chaque consultation. En liaison avec les éditeurs de logiciels,
tenus informés au fil du projet, une solution doit être expérimentée au
troisième trimestre 2008. Il n’est donc pas étonnant que certains y voient
non seulement une dépense prématurée quand il leur faut pour l’implanter
changer ou mettre à niveau leur ordinateur, mais aussi un outil de contrôle
par les caisses.
d)
Des protections faibles
Le bénéficiaire concrétise son accord pour que le professionnel y
accède en lui confiant à cet effet sa carte Vitale, ce qui impose sa
C
OUR DES COMPTES
238
présence et sécurise en principe l’accès. Mais les protections des données
apparaissent insuffisantes, d’autant qu’elles sont affectées par le retard
évoqué plus loin de remplacement des cartes Vitale 1 par une carte Vitale
2 qui serait sécurisée. L’assuré ne peut savoir si un professionnel a accédé
à son historique des remboursements. Quant au médecin, il ne sera pas en
mesure d’historiciser l’acceptation ou le refus de consultation de façon à
se protéger d’un recours d’un patient qui contesterait avoir autorisé
l’accès (même si le système conserve un journal des accès).
Contrairement au DP et à ce qui est prévu pour le DMP, l’assuré ne
peut rien masquer : il peut uniquement refuser l’accès à son dossier en
remettant sa carte Vitale au professionnel de santé sous cette condition.
Or la relation de confiance asymétrique qui s’établit dans le cadre du
colloque singulier du médecin et de son patient peut rendre difficile ce
refus total. Le dispositif ne présente toutefois pas les données concernant
chez les mineurs les interruptions volontaires de grossesse, modes de
contraception et maladies sexuellement transmissibles.
La principale faille concerne les risques d’intrusion extérieure sur
le poste de travail du médecin. Les échanges sont sécurisés par des
connexions chiffrées sur Internet mais les données sont en clair sur ce
poste : leur confidentialité n’est pas garantie en cas de protection
insuffisante contre les intrusions au cours d’une session. Par sécurité, le
poste de travail ne conserve pas les données consultées ; mais le risque
demeurera qu’un médecin consulte l’historique après le départ du patient,
sans son accord et sans sa présence, jusqu’à la version (HR5, en cours de
test) qui interrompra la connexion sitôt la carte Vitale retirée du lecteur.
La CNAMTS a indiqué à cet égard de manière erronée, à ce stade, aux
assurés que « votre médecin peut consulter l’historique uniquement en
votre présence […] car il a besoin de votre carte Vitale.».
***
En conclusion, il apparaît que l’historique des remboursements,
simple valorisation de données existantes, a été développé aisément,
seules les questions techniques ayant été instruites
283
. La maîtrise
283. Un amendement parlementaire a aussi conduit la CNAMTS à expérimenter à
partir de 2008 la délivrance par les médecins du protocole de soins par formulaire
électronique, avec réponse de l’assurance maladie en ligne, ainsi que des données
concernant les malades diabétiques, données ensuite inscrites dans l’historique des
remboursements. Le protocole est établi conjointement par le médecin du patient et le
médecin conseil de l'assurance maladie pour la prise en charge d’une affection de
longue durée. Il précise le diagnostic ainsi que les soins à apporter. La CNIL a
autorisé en mars 2008 une expérimentation informatique par une trentaine de
médecins. Les données seront archivées pendant 27 mois et les accès, traçables
pendant deux ans. Leur degré de confidentialité et leur protection sont à préciser.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
239
d’ouvrage et la maîtrise d’oeuvre ont été assurées par la CNAMTS, mais
sans réflexion suffisante sur les finalités et sur les risques dont est porteur
tout projet véhiculant des données médicales personnelles. L’absence de
toute possibilité de masquage des données n’a pas non plus été discutée,
seuls certains soins en tiers payant étant anonymisés. Cet outil doit donc
être intégré dans une stratégie d’ensemble et selon les mêmes exigences
qui doivent désormais prévaloir pour tout téléservice de santé exploitant
des données sensibles.
3
–
Le dossier pharmaceutique
Le DP couvrira, une fois généralisé, un champ de quelque 20 Md€
en ventes annuelles en officine. Il est expérimenté depuis juillet 2007 par
le CNOP, hors pharmacies d’établissements. Ce dernier a indiqué que
1 971 des 23 248 officines l’expérimentaient au 24 juin 2008. Elles
avaient créé 577 000 dossiers individuels. Le nombre de clients refusant
de créer un dossier est devenu inférieur à 7 %. Le taux de refus
d’inscription par un client d’un médicament dans son dossier est de 1 sur
1 500 médicaments dispensés.
Contrairement à l’historique des remboursements, le DP inclut les
achats en automédication, prescrits ou non et non remboursés. Cette
fonctionnalité sera pleinement opérationnelle une fois tous les logiciels
des pharmacies configurés à cet effet et lorsque les pharmaciens auront
pris l’habitude de demander et les clients de donner, la carte Vitale même
en l’absence de prise en charge par l’assurance maladie.
Ce service vise à détecter, avant dispensation d’un produit, tout
risque d’interaction médicamenteuse au regard des ventes antérieures,
non seulement au sein de la même pharmacie (la plupart des logiciels
d’officine le permettaient déjà), mais aussi dans une base de données
centrale qu’alimentent toutes les officines raccordées. D’août 2007 à avril
2008, 5 500 médicaments ont été délivrés après vérification, dont 2 200
dans des cas potentiellement dangereux. Le CNOP n’identifie pas encore
nationalement le nombre et la nature des redondances pharmaceutiques et
des effets iatrogènes réellement évités, mais prévoit de le faire.
Les gains en qualité de soins comme en dépenses pourraient être
substantiels en évitant des accidents nécessitant une hospitalisation. Le
dispositif autoriserait aussi une fonction d’alerte, que le ministère n’a pas
encore validée.
Le CNOP prévoit d’assurer à partir de 2010 la traçabilité de
chaque boîte vendue jusqu’au patient. D’autres échanges de données sont
à l’étude, avec les établissements hospitaliers, ainsi qu’avec les
prescripteurs pour les refus ou, après concertation avec eux, les
C
OUR DES COMPTES
240
modifications de la prescription, ou encore l’accès des médecins au DP et
prescription par eux à distance.
La carte CPS du pharmacien et la carte Vitale de l’assuré sont
nécessaires pour y accéder. En attendant un futur identifiant national de
santé, un identifiant propre au DP est engendré à partir de la carte Vitale.
Les échanges entre l’hébergeur et les officines sont chiffrés. En revanche,
l’hétérogénéité des postes de travail des officines et de leurs niveaux de
sécurité crée un risque élevé, le CNOP ne disposant pas à cet égard d’une
compétence d’agrément. Il a toutefois publié en avril 2008 une « charte
qualité pour les logiciels à l'usage de l'exercice officinal », élaborée avec
les syndicats représentatifs des pharmaciens titulaires d'officine. Les deux
tiers des logiciels proposés par les éditeurs devraient avoir subi des tests
de compatibilité, limités au DP, avant la fin 2008.
Le CNOP s’est doté de moyens performants, audités de manière
adéquate. Il a entrepris d’y ajouter des plans de continuité d’activité et de
sécurité qui faisaient défaut lors du contrôle de la Cour et de signer une
convention de services avec le GIP CPS, dont de passagères défaillances
techniques avaient perturbé le fonctionnement du DP fin 2007. Il prévoit
d’intégrer à terme ce dernier dans le DMP.
Le budget est de l’ordre de 10 M€ pour les trois années initiales,
financé pour moitié par l’assurance maladie et pour moitié par la
profession. Cette dernière prévoit d’en prendre ensuite en charge
l’intégralité. Une nouvelle fois, on doit constater l’absence de modèle
économique qui permette de valider une fourchette d’économies
potentielles directes (il conviendrait qu’un instrument économique solide
accompagne d’emblée la généralisation de tout téléservice). Suite au
contrôle de la Cour, le CNOP prévoit d’y remédier.
II - Des choix structurants à venir
La cohérence indispensable entre ces différents projets suppose des
choix de principe multiples. Alors que plusieurs décisions ont été
annoncés en juin 2008, dont une modification de la législation qui
rendrait
le
DMP
facultatif
en
supprimant
toute
réduction
des
remboursements d’assurance maladie en cas de refus du patient, les
débats se poursuivent, dans des configurations variées, quant à des choix
aussi structurants que la sécurisation des opérations, la protection des
données, la définition du poste de travail du professionnel de santé en
ville et à l’hôpital, ou encore le choix des opérateurs.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
241
A
–
Une sécurisation en devenir pour la carte Vitale 2
1
–
L’absence des certificats
La carte Vitale 2 constituera à terme un progrès majeur. Sa
sécurisation et la rapidité de sa délivrance sont deux des objectifs de la
convention d’objectifs et de gestion 2006-2009 entre la CNAMTS et
l’Etat. De leur réalisation dépend la sécurité des accès à des données
sensibles par les usagers.
La carte Vitale 1 qu’a distribuée le GIE SESAM Vitale identifie
les ayant-droits et leurs droits à une prise en charge. Mais elle ne permet
pas une authentification forte de l’assuré ni une signature sécurisée par
lui. La carte Vitale 2 lui succède progressivement depuis 2007.
Elle comporte un coprocesseur cryptographique et peut donc
accueillir des certificats électroniques permettant l’authentification de son
titulaire ainsi que la signature électronique de transactions par lui
284
.
Pourtant, en contradiction avec le calendrier initial du DMP, le décret du
14 février 2007 autorisant la carte Vitale 2 a renvoyé à un décret ultérieur
ses éventuelles fonctions de sécurité. Or, l’utilité d’implanter des
certificats électroniques dans les cartes Vitale 2 lors de leur émission était
soulignée dès avril 2006 par la direction générale de la modernisation de
l’Etat pour le développement de l’administration électronique.
L’étude n’en a été menée que fin 2007 par la CNAMTS. Le
ministère en a conclu que, hors DMP, il n’existait pas encore de services
destinés aux usagers nécessitant des fonctions de sécurité fortes et qu’il
incombait aux opérateurs de préciser leurs besoins et d’en assumer la
charge financière. Les standards des matériels et logiciels nécessaires à la
saisie du code protégeant la carte n’ont pas été élaborés.
La direction de la sécurité sociale (DSS) estime que l’implantation
des certificats d’authentification coûterait pour les cinq premières années
entre 50 M€ et 130 M€ par an
285
. Leur retard s’expliquerait moins par la
284. Une signature électronique sécurisée est propre au signataire et créée par des
moyens sous son contrôle exclusif, comme dans le cas réussi du dispositif de calcul et
de paiement de l’impôt en ligne. Elle garantit la détection de toute modification
ultérieure de l’acte auquel elle s’attache.
285. Le coût des certificats varierait selon la CNAMTS de 0,85 € à 2,2 € par carte et
par an selon leur qualité. S’y ajoute une lourde infrastructure de gestion de certificats
(IGC) (enregistrement de l’identité des personnes, certification, listes de révocation
des certificats), ainsi que le déploiement de ces fonctions sur les postes des PS,
l’envoi postal des codes et le renouvellement triennal du certificat etc. La prochaine
CPS pourrait soulever un problème similaire, mais pour cent fois moins de cartes.
C
OUR DES COMPTES
242
complexité et le caractère récent du projet que par l’absence à ce stade de
téléservices exigeant cette protection et à même d’en financer le coût -en
dehors des expérimentations du DMP. Ce dernier, s’il avait été mis en
service comme prévu en 2007, l’aurait ainsi été avec une sécurité
dégradée ou compliquée à gérer
286
. Il en ira de même pour tout service
de santé en ligne jusqu’à la mise en oeuvre, à une date encore inconnue,
des solutions appropriées. La CNAMTS étudie à la demande de la DSS
leurs impacts techniques, organisationnels et financiers, notamment pour
les cas où le bénéficiaire de l’assurance maladie n’est pas nécessairement
disponible (laboratoires, établissements de santé, pharmacies).
2
–
Les perturbations induites par une photo peu utile
En dépit d’une décennie d’expérience de livraison de plus de 90
millions de cartes Vitale 1, la CNAMTS n’a pu respecter le calendrier,
peu réaliste, de généralisation de la carte Vitale 2, prévu par la loi du
13 août 2004 « à partir de 2006 » et en 18 mois. La généralisation,
amorcée fin 2007, ne sera pas assurée avant plusieurs années. Ce retard
n’aggravera sans doute pas pour les téléservices les effets du problème
évoqué au point précédent, mais il mérite d’être analysé. Il provient
largement du choix de doter la carte d’une photographie du titulaire.
Cette décision politique a été inscrite dans la loi de 2004 (selon
l’article L. 161-31 du CSS, une photographie doit figurer sur la carte pour
identifier le titulaire). Elle l’a été dans le cadre de la lutte contre la fraude,
mais sans étude d’impact et donc en fonction d’un intérêt mal évalué en
termes de réduction des fraudes. Comme divers spécialistes, l’un des
rapporteurs au Sénat l’avait considérée « inopportune car elle aurait pour
conséquence d'augmenter les frais de gestion de la CNAMTS, sa mise en
oeuvre serait source de complexité et elle est inutile dans la mesure où il
suffit (d’une) pièce d'identité pour éviter tout risque d'utilisation
frauduleuse»
287
» (la présentation d'une pièce d'identité avait été prévue
en établissement mais jugée inacceptable juridiquement et déontologi-
quement pour la médecine libérale).
Par comparaison, les cartes bancaires assurent une sécurité
suffisante sans photo, même si elle est en option dans certains pays.
286 . Jusqu’à la mise en oeuvre de certificats logiciels confinés dans une carte,
généralement considérés comme la solution la plus sûre, tout titulaire d’un DMP,
même expérimental ou local, devrait recourir à un mot de passe à usage unique,
renouvelé par courriel ou court message téléphonique (SMS). La lourdeur de cette
procédure risque d’être dissuasive,
287. Sénat, Avis n° 60 (2003-2004) de M. Adrien GOUTEYRON, fait au nom de la
commission des finances, déposé le 12 novembre 2003, p. 103.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
243
Certes, cette comparaison avec les cartes bancaires est jugée non
pertinente par la direction de la sécurité sociale, dans la mesure où, pour
cette dernière, le citoyen serait plus impliqué dans la sécurité de son
compte bancaire que par sa carte Vitale, jusqu’ici perçue comme ne
conférant qu’un droit de tirage sur l’assurance maladie.
Des retards successifs ont d’abord différé la parution en 2006 des
textes instaurant cette « carte d’assurance maladie » avec photographie.
La CNAMTS dut expliquer à la commission nationale de l’informatique
et des libertés (CNIL) que « l’objectif […] est l’appropriation de la carte
Vitale par son porteur et sa personnalisation » et qu’elle définirait
ultérieurement « quel usage nous pourrions faire de cette photo ». Dans le
même temps, l’Etat reportait sine die l’addition d’un volet d’urgence que
la loi de 2004 avait de même fixée « à compter du prochain
renouvellement de la carte », avec facultativement les coordonnées d’une
personne à prévenir en cas de nécessité, ce qui eût été plus utile
.
Malgré le délai de trois ans ainsi créé, la CNAMTS n’a pas
expérimenté la collecte et le traitement des photos, alors que la direction
de la sécurité sociale indique l’y avoir invitée. La caisse n’a pas mis en
place de relance automatique des assurés, considérant qu’elle manquait
encore d’expérience pour ce faire. Elle n’a pas fait homologuer le
formulaire -encore expérimental- par le centre d’enregistrement et de
révision des formulaires administratifs (CERFA) alors que le décret du
18 décembre 1990 l’y oblige. Résultat de ces facteurs, la diffusion
demeurait médiocre au printemps 2008, un an après le démarrage. Sur les
trois millions d’assurés invités en douze mois à envoyer leur photo et une
photocopie de pièce d’identité, 30 % n’avaient pas répondu. Un
cinquième des deux millions de demandes reçues ont été inexploitables,
avec notamment une photo sur 20 hors normes, deux fois plus que
pronostiqué.
Mi-mai 2008, seulement 1,9 million de cartes avaient été délivrées
en un an -guère plus que le 1,5 million de remplacements annuels pour
perte ou vol
288
. Initialement, plus de 50 millions de titulaires devaient
288. L’assurance maladie remplace gratuitement ces cartes déclarées comme volées
ou perdues. Par comparaison, nombre d’entreprises, telles les banques, facturent de
10 € à 20 € un tel remplacement. La direction de la sécurité sociale avait proposé en
2004 de mettre à la charge de l’assuré distrait le remplacement de la carte Vitale
perdue, sauf déclaration de vol auprès des autorités compétentes. Cette mesure n’a pas
été adoptée par le Parlement. Elle permettrait d’économiser de 4 M€ à 12 M€ par an,
selon le pourcentage de vols attestés et l’assiette de facturation (carte seule ou coût
analytique du remplacement).
C
OUR DES COMPTES
244
recevoir une nouvelle carte en deux ans (projet repoussé par la direction
de la sécurité sociale) puis en quatre ans.
Le calendrier du renouvellement en masse des anciennes cartes
demeurait inconnu au printemps 2008 malgré les efforts de redressement
en cours. Nombre d’assurés, notamment parmi les jeunes premiers
demandeurs, demeuraient dépourvus de carte et donc exclus du tiers-
payant comme des téléservices dont l’accès repose sur elle.
La dépense totale prévisible pour la seule photographie sera de
l’ordre de 40 M€ pour les premiers 50 millions de cartes, majorant de
20 % le budget initial de 200 M€ en dépenses directes hors photo. Mais
aucune évaluation de l’impact de la présence de la photo n’a précédé la
décision ni accompagné sa mise en oeuvre. Nulle description positive
d’un quelconque impact n’existe, notamment sous la plume des
professionnels de santé qui en ont reçu la charge, même si un effet
dissuasif vis-à-vis d’éventuelles fraudes peut être intuitivement présumé.
Cela souligne l’absence de focalisation de l’Etat sur la priorité
affichée de développement des accès en ligne, qui n’avait nul besoin de
cette photo et l’absence de méthode dans la définition d’une stratégie de
détection des risques de fraude. Une économie considérable serait réalisée
en renonçant à ce dispositif jusqu’à ce que la nécessité en soit établie.
L’Etat et l’assurance maladie en annoncent un bilan pour l’automne 2009,
délai pendant lequel ce dispositif va donc continuer à grever les finances
de l’assurance maladie sans contrepartie connue.
A l’été 2008, après le contrôle de la Cour, une stratégie de
relance était en cours de définition pour le deuxième semestre 2008, avec
une meilleure information des assurés, notamment par le réseau des
caisses, afin de diminuer le nombre de dossiers non conformes.
B
–
La protection des données
1
–
Le secret professionnel
Deux principes ont été posés, qui doivent être conciliés.
L’obligation de secret professionnel (art. 226-13 du nouveau code pénal
et R. 4127-4 du CSP) a été étendue par la loi de 2002, modifiée en 2004,
à la confidentialité des informations médicales sur support informatique.
De fortes restrictions garantissent la confidentialité des données détenues
par les officines pharmaceutiques, l’assurance maladie, ou sont prévues
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
245
pour le futur DMP
289
, même si à juste titre un rapport de l’IGAS a
récemment suggéré que les médecins du travail puissent, sinon consulter,
au moins renseigner le DMP, ou à défaut un « DMP du travail ».
Le CSP a également prévu que le médecin fournisse à son patient
une information loyale, claire et appropriée sur son état et les soins
proposés. S’agissant du DMP, le choix politique de donner au patient un
accès à son dossier en découle. La loi du 4 mars 2002 (art. L. 1111-7 du
CSP) a ainsi restreint l’application de l’article R. 4127-35 du CSP, selon
lequel un malade peut être tenu dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un
pronostic grave.
2
–
Le masquage par le patient
Le débat perdure sur la possibilité pour l’assuré de masquer toute
information de son choix, voire de masquer ce masquage. Malgré leur
coût, les expérimentations initiales du DMP n’ont pas permis d’élucider
ce point. Cela a contribué à ce que fassent encore défaut les textes
réglementaires indispensables à la finalisation technique du projet. Le
sujet reste à clarifier. On a vu plus haut que dans le cas de l’historique des
remboursements, seuls quelques types de soins sont masqués.
3
–
La limitation des accès et l’identification des assurés
Les conclusions tirées de ces débats par le législateur puis la CNIL
sont hétérogènes. Ainsi, cette dernière a autorisé :
-
l’historique des remboursements sur la base du seul numéro de
sécurité sociale (NIR
290
) ;
-
l’expérimentation du DP sur la base d’un numéro d’identification
individuel qui lui est spécifique ; ce système permet la non inscription
d’un achat par le client mais indique l’existence de celle-ci.
-
l’expérimentation du DMP sur la base d’une « adresse qualité
santé », préfigurant le futur « numéro identifiant santé » (NIS) que
289. Les risques en ce domaine avaient été illustrés par la loi n° 2007-290 du 5 mars
2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur
de la cohésion sociale : elle avait autorisé l’accès aux bailleurs de logement au DMP
« en cas de demande de logement adapté ou spécifique » (art. 35). Cette disposition a
été abrogée fin 2007.
290. Le répertoire national d'identification des personnes physiques (RNIPP) permet
l'attribution du numéro d'inscription au répertoire (NIR) utilisé par la sécurité sociale et
la mise à jour du répertoire national inter-régimes de l'assurance maladie.
C
OUR DES COMPTES
246
devra gérer un tiers de confiance, tous deux déconnectés par précaution
du numéro de sécurité sociale ;
-
la possibilité pour des sites régionaux d’utiliser ou de prévoir leurs
propres numéros spécifiques (cf. la ligne « accès » tableau précédent),
sans que la CNIL ait la certitude d’avoir été saisie par tous.
Le
principe
d’un
« numéro
identifiant
santé »
(NIS)
ou
« identifiant national de santé » (INS) a été adopté en 2007 suite aux
recommandations de la CNIL. Selon le GIP DMP, maître d’ouvrage
délégué par le ministère, il est vraisemblable qu’il serait opérationnel fin
2009. Il réduirait le risque de croisements avec des données autres que de
santé. Il pourrait aussi réduire le risque d’utilisation d’une même carte
(voire d’un même dossier) par plusieurs patients, comme parfois constaté.
Mais il ne constituerait pas un code d’accès et ne dispense donc en rien
d’une sécurisation forte. Là encore, le temps s’écoule sans concrétisation
des intentions.
4
–
L’accès sécurisé aux données dans les établissements
L’introduction du DMP en établissement impliquera la livraison de
centaines de milliers de cartes de professionnel de santé (CPS) et le
financement de terminaux de lecture de ces cartes, probablement « sans
contact » comme l’envisage le GIP CPS à partir de 2009. Cela aussi
exigera plusieurs années avant d’être partout opérationnel.
Le ministère avait souligné en 2007 que « le décret n° 2007-960 du
15 mai 2007 […] indique que ces établissements disposent d’un délai de
trois ans à compter de la publication du dit décret pour utiliser la carte de
professionnel de santé »
291
. En fait, il a simultanément différé, de
manière plus réaliste, cette généralisation à 2013, en passant par une
expérimentation dans une vingtaine d’établissements jusqu’en 2010,
progressivement élargie à 200 établissements jusqu’en 2012.
Du fait de cette programmation tardive, les téléservices ne pourront
pas être généralisés aux prises en charge gérées par les systèmes
d’information hospitaliers. Pour ce qui concerne le DMP, le calendrier
initial aurait dû être reporté de cinq années de ce seul fait (de nombreux
autres retards s’y sont ajoutés). Le décret précité reste à modifier.
5
–
Le faible usage des messageries sécurisées
Les identités du destinataire et de l'émetteur de messages peuvent
être garanties par la CPS que le GIP éponyme délivre en sa qualité
291. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, p. 465
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
247
d’autorité de certification. Mais la sécurisation des messageries peut seule
garantir la confidentialité et l’interopérabilité des messages et documents
échangés entre postes de travail. Sa nécessité fait l’objet d’un consensus,
au-delà des divergences d’intérêts ou de points de vue techniques. Avant
même 2002, le GIP CPS avait élaboré un référentiel d'homologation sur
la base d’un standard international, puis homologué une dizaine de
messageries au fil des ans. Aux quelque 600 000 porteurs de CPS
recensés dans l’annuaire qu’il publie sont systématiquement rattachés
deux certificats (d’authentification et de signature) ; mais moins d’un
millier d’entre eux ont en outre un certificat de confidentialité pour une
messagerie sécurisée
292
: le retard et le potentiel de développement sont
donc considérables.
Quelques éditeurs ont obtenu récemment l’homologation par le
GIP CPS de telles messageries, incluses dans leurs logiciels de gestion de
cabinet. Mais leur intégration dans les postes de travail ne va pas toujours
sans difficulté. Ces facteurs limitent à la fois l’attractivité de l’offre des
éditeurs et la demande des utilisateurs potentiels.
Dans ce contexte, l’usage de la messagerie sécurisée reste
embryonnaire. Faute d’impulsion de l’Etat, les acteurs s’attendent les uns
les autres. Des documents médicaux circulent sur le web sans aucune
protection, ne serait-ce que dans le domaine des expertises. L’effet est de
différer les bénéfices attendus des investissements en ce domaine, alors
que se multiplient les projets de réseaux et de plateformes régionales en
dehors de tout référentiel national de sécurité.
La MISS n’a soumis à ses partenaires son projet de référentiel de
sécurité qu’après l’enquête de la Cour, fin avril 2008 et s’était jusqu’alors
privée de l’expérience du GIP CPS en ce domaine comme du gain de
temps
correspondant.
Elle
n’a
pas
envisagé
que
le
référentiel
d’homologation établi par le GIP CPS pour les messageries sécurisées
soit partie intégrante de ce référentiel. Sans se prononcer sur de tels points
techniques, la Cour considère nécessaire que soit le plus possible
harmonisé l’ensemble du dispositif.
***
L’Etat a annoncé en juin 2008 une réflexion sur la régulation des
systèmes d’information de santé, aux plans tant éthique, que technique et
292. Un certificat peut être délivré sur un support matériel (carte à puce, comme CPS
ou Vitale ou clef USB) ou encore fourni sous une forme logicielle, jugée moins sûre. Le
ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi habilite les prestataires de
certification électronique, tel le GIP CPS, à les délivrer conformément à la norme
PRISV1, seule acceptée pour les téléservices administratifs.
C
OUR DES COMPTES
248
économique. Cette phase de réflexion aurait pu permettre, si elle était
intervenue plus tôt, de faire l’économie des pertes de temps subies faute
de maîtrise de ces sujets et des dépenses inutiles qui en ont découlé.
C
–
Les normes, référentiels et nomenclatures
1
–
La normalisation
a)
Des travaux dispersés
L’absence de références explicites à des normes communes
293
,
évoquée ci-dessus, provient notamment du décalage entre le calendrier de
normalisation et les annonces politiques ou les initiatives locales.
Malgré l’émergence de normes au niveau européen, il n’y a pas
encore de directive fixant des normes européennes, par exemple
d’interopérabilité. La France n’a pas fait exception dans cette cacophonie
en matière de normes et de référentiels techniques et médicaux. Certes, la
DHOS apporte à l’AFNOR pour la commission de normalisation
« informations de santé » (CNIS)
294
37 000 € par an, soit 20 % du coût,
le solde étant financé par 16 autres membres (pour 132 jours de travail en
2007). Mais, jugée peu performante, la commission a, jusqu’à
récemment, été largement désertée par les acteurs publics et les
industriels, en partie au profit d’instances de caractère privé. L’Etat n’a
pas investi de ressources significatives dans un tel effort, alors qu’il eût
été logique de précéder, ou au moins d’accompagner les développements
informatiques susvisés. Ce manque d'implication de l'Etat et un
désengagement passager de la CNAMTS ont été ressentis par l’AFNOR
et par les industriels comme un risque fort que des solutions, certes
d’avant-garde, soient préconisées sans s’appuyer sur des normes.
L’absence d’une politique de l’Etat en tant que donneur d’ordre a ainsi
obéré ces travaux ; les téléservices de santé ont été lancés sans toujours se
293. Une norme est un ensemble de règles communes relatives aux caractéristiques
d’un produit, application ou service, à son mode de fabrication et de mise en oeuvre,
pour assurer leur compatibilité quand de tels produits ou services ont plusieurs sources.
Un référentiel désigne ici non pas les règles générales, mais les informations dont les
applications ont besoin pour fonctionner et évoluer, ou les définitions nécessaires à leur
conception: format, conditions de mise à jour, etc.
294 . Cette commission est chargée de la formalisation d’un consensus et de la
participation française à la normalisation internationale. L’AFNOR publie sur la base
de ses travaux quelques normes nationales chaque année -plus de 80 sont envisagées-
couvrant des sujets non traités dans les instances internationales.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
249
référer aux normes internationales, au risque de dépenses additionnelles
de mise ultérieure en cohérence.
b)
Vers une nouvelle stratégie
Depuis que le GMSIH en a pris la présidence en 2007 avec l’appui
de la DHOS, la CNIS, mieux soutenue par le ministère, élabore une
stratégie 2009-2013. Elle tente notamment d’aboutir à un accord entre les
industriels et les opérateurs publics sur un cadre d’interopérabilité, dans le
contexte des programmes du comité européen de normalisation (CEN) et
de l’organisation internationale de normalisation (ISO)
295
.
Les opérateurs publics ont constitué début 2008 un comité ayant
pour objectif de mettre en commun des composants réutilisables dans des
contextes différents. Ce comité, coordonné par la CNAMTS, prépare un
dictionnaire commun, précisant en français les concepts et les
composants. Qu’un tel vocabulaire n’existe pas encore, quinze ans après
le lancement de la carte Vitale, six ans après la loi susvisée de 2002,
confirme que le dispositif n’est pas encore à maturité.
La DHOS a proposé mi-2008 une répartition des rôles entre les
pouvoirs publics : à la CNIS, la mission de fixation des objectifs et des
priorités ; au GMSIH, la concertation entre industriels et utilisateurs ;
enfin aux autres acteurs (IHE et HL7 France), la remontée des besoins et
difficultés du terrain. Elle a signé en juin 2008 une convention en ce sens
avec l’AFNOR, mais elle souligne à juste titre que manquent non
seulement des experts français mais aussi une maîtrise permanente de la
cartographie des normes et des difficultés de leur mise en oeuvre, ainsi
qu’un dispositif cohérent de vérification de la conformité des produits aux
normes retenues.
Le cheminement de ces travaux apparaît donc encore insatisfaisant.
Manquent une stratégie de normalisation, des priorités et un calendrier
compatibles avec les développements industriels qui sont attendus. Le
ministère n’a pas désigné de responsable à cet effet, alors qu’une telle
mission devrait relever de la MISS. Mi-2008, les principaux acteurs
tentaient de parvenir à un consensus sur une nouvelle stratégie, que
pourrait mettre en oeuvre la future agence évoquée plus haut.
295. Le GIE SESAM Vitale coordonne par ailleurs le projet NETCARDS, avec
26 partenaires de 15 pays européens, afin d’y rendre utilisables les cartes existantes
(Vitale, e-CARD, e-GK...), pour l’identification des assurés, la vérification en ligne de
leurs droits et l’édition d’un formulaire de prise en charge de soins. Ce dispositif
devrait réduire les délais de remboursement comme les risques de fraude.
C
OUR DES COMPTES
250
2
–
Les méthodes de gestion des risques et des systèmes
Dans un domaine aussi novateur et mouvant que les téléservices de
santé, les risques en termes de failles de sécurité, de non fiabilité, de non-
conformité aux normes ou aux objectifs, sont élevés. Le GIE SESAM
Vitale applique des normes (ISO, une partie d’ITIL) et tient à jour un
registre des risques, selon une méthode de la direction centrale de la
sécurité des systèmes d'information (DCSSI, placée sous l'autorité du
secrétaire général de la défense nationale). En revanche, ni la CNAMTS,
évoquée plus loin, ni les GIP précités, ni les services chargés de leur
pilotage ou de leur surveillance au sein du ministère ne sont à un niveau
approprié. L’une des principales méthodes mondiales de maîtrise des
systèmes d’information leur demeure à tous étrangère
296
.
La direction de la sécurité sociale envisage toutefois, suite au
contrôle de la Cour, de mettre ses procédures de pilotage à ce niveau
d’exigence professionnelle. Elle a été rejointe par la direction générale de
la santé. Au regard des enjeux et des budgets en cause, la généralisation
de ces méthodes au sein du ministère, de la CNAMTS comme des
agences concernées s’impose, en dépit de la charge de travail qu’appelle
leur mise en oeuvre.
3
–
Les référentiels et nomenclatures en attente
Le GIP-CPS s’est, en tant qu'autorité de certification, mis en
conformité avec la «politique de référencement intersectoriel de sécurité »
(PRIS) élaborée par la direction générale de la modernisation de l’Etat.
Un référentiel général d'interopérabilité a été prévu.
Par ailleurs, comme le souligne la direction de la sécurité sociale,
la dématérialisation des données doit avoir pour cible des procédures et
des données certifiées, fiables techniquement et juridiquement notamment
pour les agents comptables et au regard de la certification des comptes.
296. Aucun n’applique le référentiel COBIT (Control OBjectives for Information &
related Technology), ou une méthode similaire. Celle-ci est éditée par l’Information
Systems Audit and Control Association (ISACA) depuis 1996. C'est un cadre de
contrôle pour gérer les risques et les investissements. Son approche est fondée sur la
maîtrise de chaque processus : tâches et activités primordiales sont définies en 34
processus, regroupés en quatre domaines et distinguant 318 activités. Le référentiel le
plus répandu pour la gestion de services informatiques (ITIL) n’a pas davantage été
pris en compte (le GIP DMP l’avait toutefois imposé aux candidats à l'appel d'offres
pour un hébergeur de référence, depuis lors abandonné). De même, les audits et
contrôles internes demeurent inégaux.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
251
S’agissant des nomenclatures, une harmonisation de la sémantique
médicale est également fondamentale pour que les bases de données
soient alimentées en des termes strictement identiques. Cela implique
l’usage de centaines de milliers de termes médicaux, pharmaceutiques et
techniques. Cette nécessité continue à se heurter à la difficulté de la
disponibilité et de l’implication indispensables des professionnels de
santé. La CNIS n’a même pas été officiellement tenue informée des
quelques travaux conduits sous l’égide de l’Etat.
Plusieurs années s’écouleront la mise en oeuvre de tels outils, qui
auraient été dès maintenant précieux pour développer les téléservices de
santé.
D
–
Le poste de travail demeure en débat
La loi du 30 janvier 2007, dans son article 25, a prévu la mise à
niveau des postes de travail des professionnels de santé d'exercice libéral.
Ces postes utilisent déjà les cartes CPS et Vitale pour accéder aux
services en ligne. Pour cela, ils doivent être conformes aux standards du
système SESAM Vitale : lecteurs des cartes CPS et Vitale, logiciels de
gestion de cabinet validés par le centre national d’agrément placé sous la
responsabilité de l’agent comptable de la CNAMTS.
Mais ses composants sont techniquement dépassés. Au-delà des
feuilles de soins, les téléservices appellent des évolutions majeures. Alors
que les logiciels de gestion de cabinet sont déjà perturbés par la
succession de versions qu’impose une réglementation sans cesse en
évolution, vont converger sur eux la production et la coordination des
soins, l’aide à la prescription, les réseaux, le futur DMP, la régulation
médico-administrative du parcours de soins, la gestion du risque
(protocoles de soins, prises en charges, ententes préalables…), la veille
épidémiologique et l’alerte sanitaire. S’y ajouteront les services de
confiance et de sécurité (authentification des identités, gestion des droits
et des contrôles d’accès, traçabilité, confidentialité). Or des délais
rédhibitoires de saisie ou de consultation conduiraient à un rejet.
La CNAMTS est le maître d’ouvrage du futur modèle de poste de
travail, sans qu’un accord explicite ait été formalisé pour ce faire entre le
ministère, la caisse et leurs autres partenaires. Les travaux n’ont
commencé qu’en 2007. Le GIE SESAM Vitale, qui a développé une
nouvelle architecture de poste de travail, s’est entouré de solides avis
professionnels et associe ses partenaires au comité de pilotage du projet
(mais pas aux groupes techniques qui en élaborent les composants, au
risque de s’exposer au reproche déjà ancien de manque de transparence).
C
OUR DES COMPTES
252
Les
divergences,
au
demeurant
insuffisamment
explicitées,
perduraient mi-2008 entre ce maître d’oeuvre et d’autres acteurs comme le
GIP DMP. Ce dernier n’a été invité à la commission technique et de
sécurité du projet qu’en avril 2008, réel mais tardif progrès. La pleine
participation des professionnels de santé serait également utile à la
définition et à l’acceptation d’une nouvelle architecture
297
. Elle repose
notamment sur l’union nationale des professionnels de santé (UNPS),
créée par la loi de 2004 et opérationnelle depuis 2006. Mais cette
participation n’est pas pleinement acquise, la CNAMTS n’ayant pas
encore signé ni donc financé une convention exigée par l’UNPS pour
indemniser la participation des professionnels libéraux aux nombreuses
concertations.
A l’été 2008, la recherche d’un consensus se poursuivait,
notamment au sein de l’UNCAM, mais il n’était encore que partiel. Le
GIE testait un nouveau mode d’accès en ligne avec les logiciels de
gestion de cabinet et élaborait un prototype d’accès par les logiciels dits
« navigateurs ». Cependant, la configuration complète comme son mode
de généralisation (majoritairement par le GIE ou par les industriels selon
ses spécifications) restaient en débat. Le nouveau poste de travail ne sera
pas standardisé avant, au mieux, 2009.
Par ailleurs, la feuille de route du GIE n’intègre toujours pas en
2008 les besoins propres aux établissements de santé, bien qu’affichés
comme une priorité de l’assurance maladie. Leurs postes de travail
devront disposer des mêmes accès sécurisés. Mais cela n’est qu’envisagé
par le GIE, sans que le ministère ait assuré un calendrier approprié.
Enfin, la question d’un portail d’accueil commun demeure posée.
Le GIE met en service IMARS. Cette « infrastructure mutualisée d’accès
et de routage sécurisés » protège les échanges entre le poste de travail et
les systèmes auxquels il se raccorde, sans offrir les services d’un portail.
La CNAMTS s’appuie sur elle pour l’historique des remboursements et
recherche au sein de l’UNCAM comme avec la MISS et le GIP DMP une
solution homogène.
***
297 . Il est estimé qu’un tiers seulement des professionnels de santé, hors
établissements, est équipé de manière compatible avec les contraintes des téléservices
sécurisés, un autre tiers étant déjà équipé mais devant être encadré pour en tirer
pleinement parti et un dernier tiers n’étant au mieux ouvert qu’à des applications
légères et sources de gain de temps. Quant aux établissements, l’essentiel de
l’équipement et de l’appropriation de tels outils reste à renouveler ou réaliser.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
253
Ainsi, en termes de confidentialité des données, d’une part, les
cartes Vitale 2 tardent à être imposées comme mode d’accès sécurisé à
tout service en ligne. D’autre part, la sécurisation des postes de travail,
dans les cabinets libéraux, les officines pharmaceutiques et les
établissements n’est pas encore garantie. Plusieurs années s’écouleront
avant d’atteindre et généraliser un niveau de qualité et de sécurité
conforme à l’état de l’art.
III - Le pilotage administratif, juridique et financier
A
–
Un pilotage et une maîtrise d’ouvrage éclatés
Les délais précités témoignent d’une gouvernance informatique
souvent déficiente. Les systèmes d’information de santé annoncés ne
s’inscrivent pas dans un ensemble cohérent qui inciterait à assurer leur
synergie et leur interopérabilité. L’examen porte ici sur les deux
principales structures nationales que sont le ministère et la CNAMTS.
1
–
Le ministère et ses opérateurs
Le ministère chargé de la santé et de la sécurité sociale a été
conseillé par la direction générale de la modernisation de l’Etat, mais il ne
s’est pas doté d’un cadre stratégique cohérent. Il a cessé de convoquer le
conseil supérieur des systèmes d’information de santé (CSSIS) à partir de
2000 (la création d’un Conseil national des systèmes d'information de
santé a été annoncée par la ministre en juin 2008). Créée comme lui en
1997, la mission pour l’informatisation du système de santé (MISS) doit
coordonner ce projet
298
. Elle s’est récemment dotée d'un comité de
pilotage stratégique incluant la CNAMTS. Mais un rapport sénatorial
avait vainement mis en garde en 2005 sur le fait qu’elle « ne dispose pas
des moyens d’assurer une réelle coordination entre les directions »
299
.
Outre des effectifs manifestement insuffisants (entre quatre et huit agents
selon les périodes, saturés par le suivi juridique et technique des
opérateurs et projets en cours) et un budget de fonctionnement inférieur à
20 000 € par an, elle a souffert d’erreurs de gouvernance commises par
298. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, p. 326, cf. aussi infra,
pp. 320 et suivantes.
299. Sénat, Rapport d’information au nom de la commission des finances (…) sur
l’informatisation dans le secteur de la santé, par M. Jean-Jacques JÉGOU, annexe au
procès-verbal de la séance du 3 novembre 2005, p. 17.
C
OUR DES COMPTES
254
les cabinets des ministres successifs, qui la géraient directement jusqu’en
2006.
La direction de la MISS a aussi été marquée par une instabilité peu
propice à la continuité de ses travaux et par l’absence de responsable à
temps plein entre fin 2004 et août 2007. De 2006 à cette dernière date, la
fonction était confiée au directeur général du GIP DMP, à la fois juge et
partie, situation hétérodoxe quels qu’en aient été les avantages.
Le cabinet a ainsi géré directement les dossiers stratégiques, sans
s’être doté d’une capacité suffisante d’expertise et d’intervention. La
DGS, la DHOS
300
et la DSS, qui doit notamment veiller à la coordination
inter-régimes, n’ont elles-mêmes, face à leurs lourdes responsabilités
pour l’ensemble des systèmes de santé, que des bureaux aux effectifs
insuffisants et qui se coordonnent inégalement en matière de téléservices.
De ce fait, les décisions ont souvent été prises dans la précipitation.
La pénurie de moyens au sein du ministère a été compensée par une
relative abondance de moyens accordés, aux frais de l’assurance maladie,
aux opérateurs. De ce fait l’administration centrale continuera à éprouver
quelque difficulté à contrôler ces derniers comme à piloter une stratégie
cohérente si ses capacités de pilotage ne sont pas renforcées.
L’Etat disposait pourtant depuis 2006 avec deux rapports de
l’IGAS d’un robuste ensemble de recommandations
301
. Ces rapports ont
conduit à une réelle prise de conscience par les directions concernées de
la nécessité de mieux coordonner les efforts de l'ensemble des
partenaires. Mais si les directions ont accepté les préconisations des
rapports susvisés en termes d’outils de pilotage et de conventions
d’objectifs et de moyens, elles ne les ont guère mises en oeuvre, deux ans
plus tard. S’agissant du pilotage, notamment des téléservices, la
coordination entre elles et la CNAMTS est ainsi en voie d’amélioration.
L’expérience montre toutefois qu’il y aurait aussi lieu de transformer la
MISS en un pôle de coordination, doté de la légitimité et de l’autorité qui
lui ont jusqu’ici manqué. Les rapports susvisés l’avaient déjà souligné,
comme plus récemment ceux relatifs au DMP.
S’agissant de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’oeuvre,
jusqu’ici dispersées, les observations de la Cour dans le secteur
300. Cf. chapitre IX, II sur les systèmes d’information hospitaliers.
301 . L. GRATIEUX, mission exploratoire sur le recours à un tiers de confiance
numérique pour la mise en place du DMP, Igas, rapport n° 2006 014, février 2006,
82 pages. L. GRATIEUX, R. OLLIVIER, audit de l'organisation et du pilotage des
organismes oeuvrant à l'informatisation du système de santé, inspection générale des
affaires sociales, juillet 2006 ; La Documentation française, Paris, octobre 2007.
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
255
hospitalier et les mésaventures du DMP montrent l’utilité de constituer
des pôles d’excellence à la hauteur des enjeux. Un rapprochement d’une
minorité des missions et agences concernées (cf. chapitre IX) a été
annoncé.
S’agissant du pilotage, la MISS a été rattachée depuis septembre
2006 au secrétariat général du ministère. Elle a entrepris une concertation
relative à un projet de plan stratégique des systèmes d’information de
santé (PSSIS), y compris pour les établissements hospitaliers, qui faisait
jusqu’ici défaut. Mais ce projet très complet, y compris en matière de
téléservices, n’était pas encore adopté mi-2008. Sa crédibilité restait
sujette à caution, faute que la MISS ait les moyens d’une telle ambition
et, jusqu’à l’annonce de leur renforcement en juin 2008, en l’absence de
volonté politique affichée comme de consensus des parties prenantes.
2
–
La CNAMTS
La CNAMTS, établissement public, est maître d’ouvrage du
dispositif SESAM-Vitale et du web médecin ainsi que maître d’oeuvre
pour une partie du premier et la totalité du second. Elle contribue au
pilotage du DMP depuis l’origine. Elle participe aux instances de pilotage
et aux groupes de travail des opérateurs concernés, mais sa stratégie
parait complexe, voire peu lisible. Elle conduit deux chantiers majeurs
pour les téléservices. Il y a d’une part la transition nécessaire de ces
systèmes vers une indépendance, une modularité et une réactivité
modernisées. Le législateur l’a d’autre part autorisée à développer son
propre portail et ses propres téléservices, en soutien de la politique de
« maîtrise médicalisée » des dépenses de santé.
Elle a participé au pilotage du DMP par l’Etat, mais de manière
perçue comme parfois distante. Son fonds d'aide à la qualité des soins de
ville (FAQSV), devenu fonds d’intervention pour la qualité et la
coordination des soins (FIQCS), en finance la totalité, non sans retards et
embûches jusqu’en 2007, au point que le GIP DMP s’est trouvé un temps
en quasi cessation de paiements, au moment où l’Etat demandait
justement à ce dernier de forcer l’allure.
Elle a financé par ailleurs jusqu’ici près de la moitié du coût de
développement et d’expérimentation du DP, en partie via le GIP DMP.
Elle traite enfin au sein de l’UNCAM les aspects relatifs à la politique
conventionnelle, qui pourrait être déterminante quant à l’adhésion des
professionnels de santé aux téléservices publics. A la maîtrise d’ouvrage
de ces différents secteurs, elle consacre plusieurs dizaines d’emplois.
Par sa convention d’objectifs et de gestion avec l’Etat, 2006-2009,
la caisse s’était notamment engagée en août 2006 à :
C
OUR DES COMPTES
256
-
disposer d’un schéma directeur en octobre 2006 : soumis fin 2007 au
ministère, il n’était pas encore adopté en juin 2008 alors qu’il devait
être mis en oeuvre début 2007; le risque est ici d’affaiblir les interfaces
avec les téléservices et leur évolution ;
-
mettre en oeuvre au premier semestre 2006 l’historique des
remboursements : on a vu qu’il ne l’a été qu’en 2007 ;
-
sécuriser la carte Vitale 2 et sa distribution, en respectant les délais de
délivrance : on a vu plus haut ce qu’il en a été ;
-
faire du développement des téléservices une priorité, ce qui a été
effectivement amorcé ;
-
améliorer « l’alignement » des développements, notamment de ceux
concernant SESAM-Vitale, ce qui n’a que partiellement été réalisé ;
-
améliorer la connaissance des coûts de tels projets, ce qui reste à
parfaire s’agissant au moins de ce secteur;
-
identifier les praticiens hospitaliers dans ses fichiers, grâce au
nouveau répertoire partagé des professionnels de santé (RPPS) à
compter du 1er janvier 2008 : son déploiement a commencé en juin
2008 et prendra quelque temps. C’est un préalable à l’ouverture des
services en ligne au secteur hospitalier et à la mise en oeuvre de la
disposition législative obligeant les prescripteurs à indiquer leur
numéro individuel sur les ordonnances dispensées en ville.
La CNAMTS reconnaît, comme mentionnée plus haut, qu’elle
n’est pas « au meilleur niveau de maturité » dans l’application des
normes. La cohérence des choix informatiques de l’ensemble des
téléservices s’en ressent. Des progrès sont toutefois en cours, notamment
avec le comité précité réuni depuis mars 2008 sous la présidence de la
caisse, la constitution d’un dossier de sécurité pour chaque projet et la
vérification par des experts indépendants des protections de ses
téléservices contre les intrusions. Elle s’emploie depuis 2007 à se
rapprocher des référentiels reconnus, à faire certifier progressivement ses
centres et introduire des bonnes pratiques, notamment d’évaluation des
projets.
B
–
Des bases juridiques évolutives
La loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la
qualité des systèmes de santé, a fixé les bases de l'accès aux informations
personnelles détenues par les professionnels et les établissements de santé
et encadré I'hébergement des données de santé à caractère personnel
(article L. 1111-8 du CSP). Le décret du 29 avril 2002 relatif à l'accès aux
informations personnelles détenues par les professionnels et les
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
257
établissements de santé a précisé les précautions à prendre, mais il a fallu
attendre 2006 pour le décret fixant les dispositions relatives à
l’hébergement de ces données (article R. 1111 du CSP). Ces textes
fondateurs ont été, au fil des aléas rencontrés, amendés.
Ainsi, alors que le contrôle par la CNIL des expérimentations du
DMP venait d’en confirmer l’utilité à ce stade, la procédure législative
d'agrément des hébergeurs (article L. 1111-8) a été suspendue pour deux
ans par la loi du 30 janvier 2007, sauf pour le DMP (qui n’en pas fait
usage depuis lors). Ce report a été expliqué par le retard apporté à publier
les référentiels de sécurité et d’interopérabilité permettant aux candidats
d’obtenir une certification auprès d’organismes accrédités. Le décret du
15 mai 2007 en a fixé le cadre, mais il demeurait inappliqué mi-2008,
l’arrêté fixant ces référentiels n’étant pas encore paru. Ces délais risquent
de retarder les logiciels de téléservice ou d’altérer leurs performances.
S’agissant du caractère obligatoire ou facultatif pour un patient de
disposer d’un DMP, la loi du 13 août 2004 qui en a porté création ne
correspond plus à l’état du projet. Elle avait fixé au 1
er
juillet 2007 la date
à laquelle le niveau de prise en charge des soins par l'assurance maladie
pourrait être subordonné à l'autorisation donnée par le titulaire que le
professionnel de santé puisse accéder à son DMP, disposition dont
l’abrogation est maintenant annoncée.
Un enjeu important est celui de la maîtrise d’ouvrage déléguée et
de la maîtrise d’oeuvre du portail du DMP. La loi de financement de la
sécurité sociale pour 2008 a institué (art. L. 161-36-3-1 du CSS) le
principe de ce service unique d’accueil dématérialisé, dénommé « portail
du dossier médical personnel »
302
. Cette disposition est intervenue deux
ans après que la caisse des dépôts et consignations a entrepris, à la
demande du ministre chargé de la santé, de créer un tel portail, sur la base
d’une convention « transitoire » avec le GIP. La pérennité de cet
investissement de 5,7 M€ (20 % GIP sur crédits de l’assurance maladie et
80 % Caisse des dépôts) est fortement compromise, l’Etat ayant
abandonné cet opérateur pour désigner en juin 2008 « l’assurance maladie
comme partenaire stratégique dans la gouvernance du projet, fortement
impliqué dans la construction du portail de confiance et de services ».
302. Un portail comprend une page d’entrée d’un site « Web » offrant des liens
internes ou/et vers d’autres sites. « Ce portail assure des fonctions d’information
générale et un service de gestion permettant aux bénéficiaires de l’assurance maladie
de gérer leur dossier médical personnel et les droits d’accès des professionnels de
santé. Il assure le contrôle et la traçabilité des accès aux dossiers médicaux
personnels. Il produit les données de suivi d’activité nécessaires à l’évaluation de ce
service […] ».
C
OUR DES COMPTES
258
Enfin, l’article L. 161-36-4-2 du CSS a créé le DP parallèlement au
DMP. Une première initiative parlementaire n’avait abouti qu’à prévoir
que le conseil national de l’ordre des pharmaciens contribuerait au DMP
en cours de conception (loi du 19 décembre 2005). Une seconde créa le
dossier pharmaceutique mais en maintenant sa subordination au DMP (loi
du 30 janvier 2007). La version la plus récente (qui est donc la troisième)
a inversé l’ordre de ces deux facteurs, conférant au DP, qui fonctionnait
déjà dans le cadre expérimental autorisé par la CNIL en 2007, son
autonomie (loi du 19 décembre 2007). Le projet de décret d’application,
quant à lui, n’a été soumis par l’administration centrale aux concertations
d’usage qu’en avril 2008, alors que son contenu technique ne soulevait
aucune difficulté. Ces retards ont eu pour effet de ralentir le
développement du DP et d’augmenter son coût rapporté au nombre de
bénéficiaires. Le CNOP n’a par ailleurs pas été toujours associé à la
gouvernance de l’ensemble des projets susceptibles de le concerner.
Cette succession de retards et d’approximations juridiques a reflété
le cheminement sinueux des projets et les divergences à leur sujet. Une
politique publique en matière de téléservices de santé ne ressort pas de
manière cohérente du dispositif législatif et réglementaire actuel.
C
–
L’absence d’objectifs financiers
Des économies de plusieurs milliards d’euros avaient initialement
été évoquées par le ministre de la santé, dans un ensemble conjuguant
médecin traitant, parcours de soins et DMP, mais aucune projection
crédible n’a étayé de telles hypothèses. Ni le ministère ni la CNAMTS
n’ont développé de « modèles économiques » testant des hypothèses
d’économies de gestion et de réduction des dépenses en prestations
redondantes, notamment en fonction de scénarios de déploiement. Cette
abstention, alors qu’il était par exemple envisagé de consacrer un milliard
d’euros au déploiement du DMP, est préoccupante. Le GIP DMP a sous-
traité un tel travail, mais le résultat s’est avéré trop fruste pour convaincre
quant aux possibilités de diminutions de dépenses dues à la baisse des
effets iatrogènes et à celle des actes et prescriptions redondants.
Ce volet économique se heurte de surcroît depuis l’origine à des
clivages qui demeurent irréductibles : des professionnels redoutent que
l’on subordonne leurs choix médicaux à des considérations économiques
grâce aux dossiers surveillés en ligne. La Cour prend acte de l’opposition
d’une partie des professionnels à d’éventuelles initiatives de l’assurance
maladie, comme précédemment à propos des références médicalement
opposables. Mais les enjeux financiers et les incidences sur la qualité de
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
259
soins imposeront tôt ou tard de dépasser un tel clivage. C’est d’autant
plus inéluctable que le financement des accès en ligne repose déjà sur
l’assurance maladie ou les patients, directement ou indirectement.
On ne peut inversement exclure que le secteur privé introduise, à
l’instar de réalisations dans d’autres pays, des téléservices financés par
des abonnements, des recettes publicitaires ou la vente de données
médicales individuelles à des fins commerciales, avec des risques déjà
patents de dérives. Or aucune stratégie publique ne prend aujourd’hui
explicitement en compte la nécessité de prévenir de tels risques.
D
–
La dispersion de l’offre industrielle
La dispersion de l’offre industrielle est un autre handicap. Le
secteur public n’est pas le seul à souffrir d’une fragmentation des moyens
et d’un manque de ressources humaines. De l’avis de maîtres d’ouvrage
publics, le secteur industriel -quelque 300 entreprises, peu d’entre elles
d’envergure internationale- ne dispose pas toujours de conducteurs de
projets compétents en interopérabilité et interfaçages dans le secteur
médical; certaines entreprises seraient particulièrement vulnérables, avec
par exemple un unique spécialiste dans des domaines cruciaux.
S’agissant des postes de travail utilisant la carte Vitale, un
recensement effectué par la CNAMTS à la demande de la Cour a montré
que 182 éditeurs diffusent un nombre plus important encore de logiciels
de gestion de cabinet. Les cinq premiers d’entre eux représentent la
moitié du marché, en nombre de professionnels de santé équipés et les
33 premiers éditeurs en ont équipé 210 882. Aucun des 149 autres
éditeurs, qui n’ont équipé que 31 367 médecins, n’était encore agréé, mi-
2008, pour la version 1.40 de SESAM Vitale, indispensable à l’évolution
vers les accès en ligne sécurisés. Leur fragilité présente un risque.
Ces constats soulignent le handicap que constitue l’absence d’un
centre d’expertise national en informatique de santé, associant tous les
acteurs, industriels compris. Son absence s’est avérée préjudiciable au
développement d’un environnement cohérent en termes de normalisation,
de recherches scientifiques et techniques, d’expertise de la qualité des
solutions, comme d’information des industriels et des opérateurs.
E
–
L’échelonnement des étapes
L’analyse ainsi résumée souligne l’ampleur des contraintes
juridiques et techniques et leur insuffisante prise en compte, du moins
jusqu’à la récente revue de projet pour ce qui concerne le DMP. Cela
appelle une planification commune à tous les intervenants. Les conditions
C
OUR DES COMPTES
260
pourraient en être réunies, une fois concrétisées les mesures annoncées en
juin 2008 : amélioration de la gouvernance des agences concernées,
création de l’agence précitée, du Conseil national des systèmes
d’information de santé, définition d’une stratégie cohérente, renforcement
des compétences et des capacités de la MISS. Les étapes seront
inéluctablement échelonnées sur plusieurs années :
-
un équilibre reste à trouver entre une cohérence nationale -le futur
plan stratégique des systèmes d’information de santé (PSISS)- et la
décentralisation annoncée de la régulation du financement des
producteurs de soins et donc de leurs choix informatiques ;
-
la carte Vitale 2 sera généralisée, mais pas avant plusieurs années ; le
calendrier de ses certificats électroniques, nécessaires à la sécurité de
l’accès aux téléservices sensibles, demeure imprécis ;
-
la généralisation de la CPS dans les établissements, dans sa version
CPS 3 et sans doute « sans contact » (lue à distance), sera assurée vers
2012, si les financements nécessaires sont mis en oeuvre ;
-
le répertoire partagé des professionnels de la santé, indispensable à
un usage fiable de la CPS et le nouveau répertoire mutualisé des entités
sanitaires et sociales sont en cours de mise en oeuvre ;
-
l’ordonnancement
des
normes,
standards,
référentiels
et
nomenclatures médicales applicables aux téléservices appelle un
soutien plus marqué; il portera ses fruits à moyen et long terme ;
-
l’harmonisation de dispositifs tels que la messagerie sécurisée ou les
plates formes de service appelle des moyens appropriés ;
-
l’arrêté d’application du décret « confidentialité » est maintenant
attendu pour 2008 ; il sera conforté par les référentiels généraux de
sécurité et d’interopérabilité - à une date encore imprécise ;
-
le choix d’un portail unique devrait simplifier l’accès aux téléservices
publics, l’horizon 2012 étant désormais évoqué pour sa généralisation ;
-
l’identifiant national de santé demandé par la CNIL pour assurer la
confidentialité des données est annoncé vers 2010, avec la contrainte
d’une application homogène de la jurisprudence.
Les investissements seront, établissements compris, de plusieurs
milliards d’euros et demanderont de longues années. Après les écueils et
les failles évoqués plus haut, cet inventaire montre à quel point les
téléservices de santé n’en sont qu’à leurs débuts.
________________________
SYNTHESE
_________________________
L'un
des
objectifs
premiers
des
téléservices
de
santé
est
l'amélioration de la qualité des soins par l'accès à l'information et par la
coordination. Ce domaine se prêtait bien à la réalisation d’études d’impact
L
’
ACCES EN LIGNE AUX DOSSIERS MEDICAUX
261
préalables. Or, force est de constater l’impréparation et l’irréalisme d’une
partie des décisions. Un désordre onéreux en a résulté.
Un bilan serait prématuré. A ce stade encore préliminaire, les
caractéristiques de l’historique des remboursements ou du dossier
pharmaceutique sont prometteuses, sous réserve de leur intégration
ultérieure au projet de dossier médical personnel. Cinq conditions
essentielles seraient à remplir, alors qu’elles ne l’ont pas été jusqu’ici :
-
une stratégie stable ;
-
une gouvernance et un pilotage conformes aux bonnes pratiques ;
-
dans un environnement juridique et technique garantissant la bonne
mise en oeuvre des objectifs ainsi définis ;
-
des moyens financiers cohérents avec ces objectifs ;
-
et une offre industrielle conforme aux normes internationales.
Le plan d’action désormais annoncé pour fin 2008 pourra utilement
prendre en compte l’ensemble des problèmes évoqués plus haut et des
téléservices publics de santé. Plusieurs années s’écouleront avant que
toutes les composantes nécessaires soient réunies. Ce calendrier à moyen
terme rappelle à quel point celui qui avait été assigné au projet de DMP
était irréaliste. Il conviendrait que le retard important qu’il connaît
n’encourage pas à poursuivre à titre transitoire une dispersion onéreuse et
mal contrôlée des initiatives.
Quant à la gouvernance, le pilotage, les maîtrises d’ouvrage et une
partie des maîtrises d’oeuvre de l’ensemble sont encore très loin des
normes comme des bonnes pratiques généralement admises.
C
OUR DES COMPTES
262
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
La Cour recommande à l’Etat et, pour ce qui les concerne, aux
régimes d’assurance maladie, de :
29.
Planifier dans le futur plan d’action un niveau de ressources
humaines et financières en maîtrise d’ouvrage et en maîtrise d’oeuvre qui
soit cohérent avec la stratégie annoncée et son calendrier de mise en
oeuvre, ainsi qu’avec l’offre industrielle accessible.
30.
Renforcer le rôle et les moyens de coordination de la mission pour
l’informatisation du système de santé ainsi que, en ce domaine, des
agences régionales de l’hospitalisation puis de santé.
31.
Créer une fonction d’expertise nationale et autonome pour la
normalisation et les référentiels en informatique de santé.
32.
Réglementer la procédure d’agrément des logiciels d’officine.
33.
Imposer les certificats des cartes Vitale 2 comme partie intégrante
du mode d’accès à tout service en ligne de données personnelles de santé.
34.
Inciter
à
l’usage
de
messageries
sécurisées
et
pleinement
interopérables par les professionnels et les établissements de santé.
35.
Subordonner le financement de téléservices et de plates-formes de
services à leur conformité aux bonnes pratiques informatiques, aux cadres
nationaux de référence, ainsi qu’à une étude économique détaillée,
comportant des indicateurs de performance et une méthode d’évaluation.
263
Chapitre VIII
Les restructurations hospitalières
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
265
_____________________
PRESENTATION
_______________________
La création des agences régionales de l’hospitalisation (ARH) par
l’ordonnance
n° 96-346
du
24 avril
1996
portant
réforme
de
l’hospitalisation publique et privée a représenté une des innovations
majeures de la précédente décennie dans le pilotage de la politique
hospitalière. Elle s’inscrivait dans un contexte de capacités hospitalières
très excédentaires dans les disciplines dites de court séjour : médecine,
chirurgie et obstétrique (MCO) avec une répartition des moyens très
inégale selon les régions. Les ARH ont eu pour mission d’améliorer la
prise en charge des besoins de santé et d’accélérer la restructuration du
secteur hospitalier, afin de rationaliser l’offre existante et de la rendre plus
efficiente.
La Cour a étudié les restructurations conduites par les ARH dans
trois disciplines : l’obstétrique, la chirurgie et les soins de suite et de
réadaptation. Elle a ciblé son enquête sur trois régions dont le contexte et
la problématique à résoudre étaient différents : une région rurale et
étendue, à faible densité médicale, le Centre ; une région très urbanisée,
industrielle et frontalière, considérée comme sous équipée, le Nord Pas de
Calais ; une région mixte, caractérisée par une forte densité de population
sur le littoral et une faible densité dans l’arrière pays, dont l’offre était
largement excédentaire, la Provence Alpes Côte d’Azur. Ce rapport
s’inscrit ainsi dans la continuité des travaux de la Cour consacrés
successivement aux ARH et aux outils juridiques de la restructuration
303
,
au bilan de la politique de périnatalité
304
et à l’accroissement des
disparités entre les secteurs hospitaliers depuis dix ans
305
.
Grâce à l’analyse préalable du contexte de la politique de
restructuration, les constats de la Cour relatifs aux trois disciplines
étudiées peuvent conduire à des enseignements plus généraux : les ARH
ont accompli en dix ans un travail important, mais encore insuffisant, ce
qui justifie la relance de la politique de restructuration hospitalière.
I - La politique de restructuration des
établissements de santé
En 1996, la restructuration a été définie comme un objectif
prioritaire national. Des outils diversifiés ont été mis à la disposition des
303. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2002, p. 194 et p. 251.
304. Voir le rapport public annuel de février 2006, p. 365 et suivantes.
305. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2006, p. 156 et suivantes.
C
OUR DES COMPTES
266
ARH et leurs pouvoirs ont été renforcés, mais sans qu’un mode d’emploi
opératoire ait été précisé par le ministère de la santé. De fait, la
dynamique initiale a été progressivement ralentie, voire interrompue.
A
–
Un dispositif national en apparence volontariste
1
–
Des objectifs ambitieux
La restructuration de l’offre hospitalière avait été évoquée dans les
rapports qui ont précédé l’élaboration des ordonnances de 1996, comme
le Livre blanc sur le système de santé et d’assurance maladie
306
. Tous les
experts s’accordaient sur la nécessité de rationaliser l’offre existante et
d’adapter l’appareil de soins aux besoins de la population tout en
garantissant la sécurité et la qualité des soins. La création des ARH a été
l’expression de cette ambition.
Pour la première fois, l’Etat confie à une autorité unique le pilotage
régional de l’ensemble du système hospitalier public et privé. Il met fin
ainsi au partage des responsabilités entre les différents services de l’Etat
et de l’assurance maladie. L’ARH, administration légère, a pour mission
de « définir et de mettre en oeuvre la politique régionale d’offre de soins
hospitaliers, d’analyser et de coordonner l’activité des établissements de
santé publics et privés et de déterminer leurs ressources »
307
. L’Etat lui
donne la responsabilité de promouvoir la complémentarité entre les
différents offreurs de soins et une plus grande efficience du système
hospitalier.
Le ministère de la santé en attendait une restructuration
progressive du secteur hospitalier, permettant à la fois la conversion de
l’offre de court séjour excédentaire vers les soins de suite et de
réadaptation (SSR) ou vers les soins de longue durée pour les personnes
âgées, le développement de la chirurgie ambulatoire, ainsi que de
l’hospitalisation à domicile (HAD).
2
–
Des leviers d’action diversifiés attribués aux ARH
L’ARH dispose de deux leviers essentiels pour aménager l’offre de
soins dans son ressort : la planification, avec l’élaboration des schémas
régionaux
d’organisation
sanitaire
(SROS)
et
la
délivrance
des
306. Livre blanc sur le système de santé et d’assurance maladie. Raymond Soubie,
Jean-Louis Portos, Christian Prieur. Commissariat général du plan 1994 ; p. 215
« encourager les restructurations ».
307. Art. L. 6115-1 du code de la santé publique.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
267
autorisations d’activité aux établissements de santé et l’allocation des
ressources aux établissements. Ces dispositifs ont évolué au cours de la
décennie.
a)
La planification
Lors de leur prise de fonction, les premiers directeurs d’ARH ont
dû dresser dans le cadre de la révision du SROS 2 (1999-2004) la liste des
opérations à conduire pour améliorer la répartition de l’offre et supprimer
les capacités excédentaires. Ils ont classé les sites d’urgences, organisé la
structuration des maternités selon les différents niveaux de prise en
charge et coordonné la mise en réseau des établissements pour la prise en
charge des pathologies comme le cancer, le diabète ou la cardiologie.
A partir de 2004, pour la préparation des SROS 3 (2006-2011)
l’objectif prioritaire assigné aux ARH a été celui de la recherche de
l’efficience. Les ARH ont défini par territoire de santé les principales
évolutions nécessaires à la régulation de l’offre. L’accent a été mis non
plus sur la diminution des capacités mais sur l’activité des établissements,
la complémentarité avec la médecine de ville et la qualité des soins.
En réalité, le renouvellement décennal des autorisations intervenu
en 2000-2001 avait surtout permis de supprimer les lits qui n’étaient pas
installés, ce qui n’a produit ni recomposition ni économie budgétaire.
b)
Le dispositif financier
L’introduction de la tarification à l’activité (T2A), intervenue en
2004 pour les cliniques et 2005 pour les hôpitaux, devrait à terme,
conduire les établissements à accélérer leur évolution. Cette réforme s’est
traduite cependant, du point de vue des ARH, par une moindre capacité
d’action.
Jusque là, en effet, les ARH fixaient chaque année la dotation
budgétaire des hôpitaux et signaient un contrat avec les cliniques qui
déterminait le montant de leurs tarifs dans chaque discipline et les forfaits
des plateaux techniques. La mise en place de la T2A a enlevé aux ARH
une partie de cette compétence, car les tarifs MCO sont désormais fixés
au niveau national (sauf pour les MIGAC)
308
.
308. Les missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC) font
l’objet d’une enveloppe financière à part et sont attribuées aux établissements en
fonction de critères particuliers.
C
OUR DES COMPTES
268
3
–
Les pouvoirs du directeur de l’ARH
Le code de la santé publique (CSP) autorise le directeur de l’ARH
à demander à deux ou plusieurs établissements publics de santé de
conclure une convention de coopération, de créer un syndicat
interhospitalier (SIH) ou un groupement d’intérêt public (GIP), ou de
prendre une délibération tendant à la création d’un nouvel établissement
public de santé par fusion des établissements concernés. Il met à la
disposition des établissements un nouvel outil juridique, le groupement de
coopération sanitaire (GCS), qui doit permettre la mise en commun de
plateaux techniques ainsi que l’intervention commune de professionnels
médicaux et non médicaux. Enfin, il organise la fongibilité des dotations
régionales publique et privée de manière à favoriser ce mouvement de
coopération.
Le directeur de l’ARH peut également prononcer la suspension
immédiate, totale ou partielle de l’autorisation d’une activité de soins en
cas d’urgence tenant à la sécurité des patients ou du personnel, ou
lorsqu’il constate que l’établissement contrevient aux lois et règlements
pris pour la protection de la santé publique (article L. 6122-13 du CSP). Il
peut aussi à l’occasion d’une demande de renouvellement d’autorisation
ne pas l’accorder, notamment si le projet de l’établissement n’est pas
compatible avec les objectifs fixés par le SROS, ou s’il ne respecte pas
les conditions techniques de fonctionnement ou d’implantation prévues
par les textes (article R. 6122-34 du CSP).
En l’absence cependant de qualification juridique de la notion de
danger pour la sécurité des patients et de normes d’activité, notamment
pour la chirurgie, ou pour les effectifs de médecins, les ARH ont hésité à
appliquer ces textes, afin de prévenir les risques de contentieux.
4
–
Des outils plus ou moins élaborés selon les disciplines
En complément de ces outils généraux, divers leviers sont
également mis à la disposition des ARH, mais de manière très variable
selon les disciplines.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
269
a)
La périnatalité : des normes contraignantes
L’obstétrique est la discipline pour laquelle les outils de pilotage
ont été les plus élaborés. Les ARH avaient à leur disposition des normes,
une obligation de structuration des établissements, des leviers tarifaires et
enfin des indicateurs de suivi qualitatifs, comme les taux de mortalité
maternelle et infantile.
Entre 1998 et 2000, quatre textes
309
ont fixé les règles d’organisa-
tion de la périnatalité. Elles se fondaient sur le principe suivant : toute
femme doit pouvoir accoucher dans la maternité la mieux adaptée à son
état.
Le décret du 9 octobre 1998 a fixé le seuil de 300 accouchements
pour qu’un établissement soit autorisé à pratiquer l’obstétrique. Un autre
décret du 9 octobre 1998 a déterminé pour toutes les maternités les
effectifs minimaux de sages-femmes affectés en salles de travail en
fonction du nombre d’accouchements et a également fixé les effectifs
nécessaires à la prise en charge des jeunes mères. Ce texte a fixé les
obligations de permanence des gynécologues, des pédiatres et des
anesthésistes. Mais en revanche il n’existe pas de normes pour leurs
effectifs. La seule obligation réglementaire est que l’établissement
remplisse un tableau de garde et d’astreinte qui doit être remis aux
autorités. L’arrêté du 25 avril 2000 a, en outre, fixé les normes
architecturales et les équipements nécessaires au bon fonctionnement de
chaque unité.
Le dispositif est centré autour du réseau de périnatalité : il doit
assurer, dans le cadre d’une graduation de l’offre, la coordination entre
les acteurs en respectant les impératifs de proximité et de sécurité entre
les différents lieux de prise en charge ; il doit permettre d’éviter le risque
d’une médicalisation excessive de l’accouchement. Il organise les
transferts éventuellement en urgence des mères et des nouveau-nés entre
les établissements.
b)
La chirurgie : l’absence de normes
Pour la chirurgie, si des normes avaient été définies pour
l’environnement technique des blocs et la pratique de l’anesthésie, il
n’existait pas jusqu’aux travaux de la mission d’expertise et d’audit
hospitalier
(MEAH)
publiés
depuis
2006
de
référentiel
pour
l’organisation des blocs opératoires, ni de seuil d’activité minimale pour
309. Deux décrets, un arrêté et une circulaire.
C
OUR DES COMPTES
270
les praticiens qui garantisse une compétence chirurgicale
310
. La circulaire
du 5 mars 2004 relative à l’élaboration des SROS 3 cite le seuil de
2 000 actes par an par établissement comme un niveau à atteindre pour
garantir aux patients la sécurité des soins, mais ce seuil n’a pas de portée
obligatoire.
Le ministère de la santé a agi tardivement sur les tarifs pour
promouvoir le développement de la chirurgie ambulatoire : une première
mesure visant à revaloriser la rémunération des séjours d’une journée a
été prise en 2004 lors de la mise en place de la T2A. La circulaire
budgétaire du 3 mars 2008 prévoit une diminution des tarifs de
l’hospitalisation complète pour inciter au développement de la chirurgie
ambulatoire dans les hôpitaux publics. Le nouvel article L. 162-1-17 du
CSS permet quant à lui de subordonner à une procédure d’accord
préalable la prise en charge par l’assurance maladie des prestations
d’hospitalisation, dès lors qu’elles auraient pu donner lieu à des prises en
charge ambulatoire. Bien que des premières décisions aient déjà été prises
en application de ces textes, il est encore trop tôt pour en faire le bilan.
c)
Les soins de suite et de réadaptation : des normes en préparation
Le ministère de la santé n’a donné aux ARH aucune instruction, ni
aucun outil spécifique pour la restructuration des soins de suite et de
réadaptation (SSR). Les axes de sa politique étaient néanmoins connus
des acteurs et partagés. Ils consistaient à augmenter les capacités, réduire
les inégalités géographiques et redéployer la nature des prises en charge
afin de mieux répondre aux besoins des personnes âgées et des patients
sortant du court séjour. L’approche était quantitative et ne tenait pas
compte de la diversité des besoins des patients, ni du niveau de
médicalisation des structures, pour lesquelles il n’existe ni normes ni
référentiels.
Deux décrets du 17 avril 2008 fixent les conditions d’implantation
et de fonctionnement des SSR. Leur parution entraînera la révision des
SROS avant fin octobre 2009. La circulaire d’application demande aux
ARH de réduire les inégalités géographiques et de redéployer les modes
de prises en charge afin de mieux répondre aux besoins des patients.
Sur le plan tarifaire, des travaux ont démarré afin d’étendre la
tarification à l’activité (T2A) aux SSR en l’adaptant à la spécificité du
secteur. Pour la première fois, la circulaire budgétaire de mars 2008
prévoit une dotation spécifique pour les SSR, alors que jusqu’à présent le
310. Pour les autorisations liées à l’activité de traitement du cancer, le décret du
21 mars 2007 définit des seuils d’activité minimale.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
271
renforcement des moyens dans cette discipline provenait des mesures
déployées dans le cadre de plans de santé publique (urgences, plan
solidarité grand âge, plan addictologie et plan Alzheimer).
B
–
Une doctrine ministérielle imprécise
1
–
Une formulation insuffisamment explicite et constructive
Le ministère de la santé n’a jamais défini ou explicité ce qu’il
entendait par une opération de restructuration dans le secteur hospitalier.
Il a utilisé successivement des terminologies différentes : en 1998 le
terme de recomposition a remplacé celui de restructuration, le ministère
de la santé jugeant que le premier avait une connotation moins négative
que le second. Le terme de restructuration est cependant réapparu à partir
de 2004 dans les premiers contrats d’objectifs signés entre la direction de
l’hospitalisation et de l’offre de soins (DHOS) et les ARH. Les deux
termes de recomposition et de restructuration ont été employés de
manière concomitante dans les lettres de mission annuelles adressées par
la DHOS aux directeurs des ARH en 2006 et 2007.
Dans la pratique, le mot de restructuration recouvre un contenu
différent selon les acteurs. Ainsi il est employé aussi bien pour désigner
des opérations qui ont trait à l’activité de soins (regroupement de plateaux
techniques, suppression de maternités, fermeture de services de chirurgie)
qu’à
des
activités
logistiques
(blanchisserie,
achats,
pharmacie,
restauration). Les acteurs ne distinguent pas davantage une opération de
nature administrative sans conséquence sur le partage de leurs activités
médicales (fusion juridique de deux établissements débouchant sur une
seule direction) et une opération ayant un impact direct sur l’outil de
production de soins, comme la fermeture d’un établissement ou d’une
activité et son transfert.
La notion de restructuration et son application à l’hôpital
La notion de restructuration peut recouvrir plusieurs modalités :
- une réorganisation des services (d’obstétrique, de chirurgie…)
pour les adapter en surface, nombre de lits et effectifs à la réduction
tendancielle de la durée moyenne de séjour ;
- une fermeture de services suite au non respect des normes ou à
une activité trop faible. Cette fermeture peut conduire à la disparition d’un
service ou d’un établissement, mais elle peut aussi déboucher sur une
reconversion du site, un transfert d’activité sur un autre établissement ou la
construction d’une structure neuve regroupant les anciennes activités de
plusieurs établissements fermés (ex : création d’une polyclinique de taille
plus importante ou d’un nouveau centre hospitalier sur un site situé à mi-
distance de deux implantations antérieures) ;
C
OUR DES COMPTES
272
- une réorganisation des services pour prendre en compte une
évolution majeure des techniques médicales : développement de la
chirurgie ambulatoire, de l’imagerie en coupe (IRM…), automatisation des
services de biologie. Ainsi la chirurgie ambulatoire demande une
organisation du circuit du patient qui oblige à modifier la disposition des
lieux ;
- le développement de plateaux techniques de plus en plus élaborés
nécessite des investissements qui débouchent sur un accroissement de la
taille minimale des unités de production.
Ce caractère multiforme de la notion de restructuration explique la
difficulté des administrations à en formuler la doctrine ou à en rendre
compte dans leurs évaluations.
Cette absence de formalisation explicite des objectifs a eu des
conséquences dommageables : d’une part elle n’a pas facilité le suivi des
opérations menées par les ARH et l’établissement de leur bilan
économique, d’autre part elle a laissé la place libre aux réactions
défensives.
2
–
Un grave défaut de pédagogie
La fermeture de petits services dans les zones rurales suscite
depuis toujours des débats passionnés, comme le montrent de récentes
polémiques.
Les défenseurs des services dits de proximité développent toujours
les mêmes arguments : la fermeture du service mettrait en danger la santé
de la population concernée car elle ne pourrait plus accéder en cas
d’urgence à un établissement proche ; l’interruption d’activité de l’hôpital
entraînerait le déclin d’un territoire situé en zone rurale ; un service
public ne devrait pas être fermé pour des motifs d’ordre économique,
enfin les décisions des ARH ne tiendraient pas compte des réalités du
terrain.
Ces
arguments
trouvent
d’autant
plus
d’écho
que
les
établissements de santé ayant une faible activité sont souvent dotés de
services d’urgence. Ceci les a conduits à maintenir des services de
chirurgie avec des équipes médicales et paramédicales sur place et à
ouvrir des blocs opératoires la nuit. Cette pratique, que la réglementation
n’imposait pas
311
, est pourtant coûteuse pour la collectivité. Ainsi, au CH
de Châteaudun, qui accueille plus de 15 600 passages aux urgences par
311 . La réglementation sur les services d’urgence prévoyait qu’un établissement
désigné comme « unité de proximité pour l’accueil et le traitement des urgences »
pouvait passer des conventions avec d’autres services pour prendre en charge les
malades nécessitant des actes chirurgicaux avec anesthésie.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
273
an, le montant du budget des urgences s’élève à 3,5 M€. Cet
établissement n’a réalisé que 17 actes chirurgicaux la nuit par an tout en
mobilisant des praticiens en astreinte. Une meilleure organisation de son
service d’urgence et une diminution des permanences médicales de nuit,
possible grâce à la relative proximité d’autres établissements, permettrait
d’économiser 330 000 € par an, dont 180 000 € au titre des seules gardes
médicales
312
.
En obstétrique, la fermeture de maternités a pu se faire sans
compromettre la sécurité des futures mères. A titre d’exemple, l’ARH du
Nord Pas de Calais a fermé en 2000 la maternité de Saint-Pol-sur-
Ternoise
qui
réalisait
497 accouchements.
Cette
fermeture
s’est
accompagnée d’un accord avec les deux maternités les plus proches qui
se situent à un peu plus de 20 km, soit à Auchel (niveau I) soit à Arras
(niveau III). Suite à cette fermeture les parturientes de St Pol vont
accoucher en priorité à Auchel (le nombre d’accouchements y est passé
de 727 à 1 143).
Le blocage persistant sur la fermeture des petits services est ainsi
largement dû à un défaut de pédagogie et de communication sur la
restructuration : le ministère de la santé n’a pas suffisamment mis en
avant les concepts de qualité et de sécurité des soins, laissant la place
libre à une présentation inquiétante pour la population, alors même que le
maintien de certains services pouvait s’avérer dangereux et que la
population les a déjà désertés comme le montre le taux de fuite constaté
pour ces établissements. La médiatisation de ces cas a été faite de manière
unilatérale, en raison de la difficulté des ARH à défendre les objectifs de
sécurité et d’économie.
Enfin, le discours ministériel s’est surtout focalisé sur la
problématique
des
établissements
de
proximité,
alors
que
la
réorganisation des établissements situés dans des villes plus importantes,
y compris des hôpitaux universitaires (CHU), comporte des enjeux encore
plus importants en termes de qualité des soins et d’économies
potentielles.
3
–
L’absence d’outil d’évaluation
Il n’existe aucun bilan de la politique de restructuration menée
depuis 1996 car l’administration centrale ne s’est pas dotée d’outils
permettant de suivre en temps réel les actions des ARH ; elle ne leur a pas
fixé d’échéances pour rendre compte de leur politique et de leurs
312. Selon l’avenant au contrat d’objectifs et de moyens signé avec l’ARH du Centre
en 2004, relatif à un plan de retour à l’équilibre budgétaire.
C
OUR DES COMPTES
274
difficultés et elle n’a pas adapté les systèmes d’information à l’évaluation
de la politique de restructuration.
L’atlas de la recomposition hospitalière, mis en place par la DHOS
en 1998, était destiné à recenser les opérations engagées par les ARH. Il
ne s’est avéré ni fiable ni opérationnel. Il a été alimenté plus ou moins
régulièrement par les ARH qui remplissaient ses différentes rubriques
selon leur interprétation, faute d’une définition précise de leur contenu
(en cas de fermeture, par exemple, l’ARH n’avait pas à préciser si c’était
une fermeture sèche ou un transfert d’activité). Il n’est d’ailleurs plus mis
à jour par la DHOS depuis août 2006.
a)
Des bilans fragmentaires dans les ARH
Les
sources
d’information
permettant
d’analyser
plus
qualitativement les opérations de restructuration sont limitées ; elles sont
de qualité très inégale selon les ARH et ne sont pas homogènes. Par
ailleurs, il existe rarement un historique et un suivi permettant de retracer
l’évolution des opérations de restructuration, que ce soit au niveau
macroéconomique ou au niveau d’une région.
Quelques ARH, comme celle d’Ile-de-France
313
ou celle du Nord-
Pas-de-Calais ont publié des bilans approfondis lors du départ de leur
premier directeur. Ces bilans ne comportent toutefois pas d’éléments
financiers sur l’impact des restructurations. Les autres bilans ne couvrent
que des périodes partielles (ex : Bretagne, Franche-Comté, PACA).
Enfin, si les études préparatoires à l’élaboration des SROS
contiennent des éléments sur les évolutions intervenues par discipline et
sur les progrès à réaliser, elles sont plus ou moins bien documentées selon
les régions et restent très globales. Il n’existe pas de cadre homogène de
présentation pour les différentes disciplines et chaque ARH conduit ses
travaux comme elle l’entend.
Aucune ARH n’a pu produire de chiffrage de l’impact financier
des opérations qu’elle a conduites. Dans le cadre de l’enquête, une seule
étude a pu être produite : celle de la caisse régionale d’assurance maladie
(CRAM) de Nord-Picardie qui porte sur l’impact de la restructuration sur
l’activité de deux établissements
314
. Elle montre que ces restructurations
ont eu un impact positif sur l’évolution de l’activité, surtout lorsqu’il s’est
313. ARH-IF 2003 1997-2002 Un bilan pour rendre compte. Des propositions pour
avancer.
314. CRAM de Nord-Picardie : étude sur la fusion de la clinique d’Auchel et de la
clinique médicale de Bruay intervenue le 1
er
janvier 2007; reprise de la clinique du
Hainaut par la clinique Saint Saulve en 2004.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
275
agi de mettre en commun des ressources et des compétences
professionnelles en offrant un plateau technique et un hébergement de
qualité à partir de structures anciennes ou en élargissant l’offre de soins.
b)
L’inadaptation des systèmes d’information pour suivre les
restructurations
Les systèmes d’information comme la statistique annuelle des
établissements de santé (SAE) ou le programme de médicalisation des
systèmes d’information (PMSI) n’ont pas été conçus pour recenser les
opérations de restructuration, ni les suivre. Les lacunes que la Cour avait
relevées en 2002 sur le fichier FINESS (fichier national des
établissements de santé permettant de connaître leur adresse, leur statut
juridique et leur activité) n’ont pas été corrigées. La DREES rencontre
toujours des difficultés liées au fait qu’elle ne peut décompter les
établissements d’une région donnée et donc les évolutions qui les
concernent, car il existe des identifiants différents pour les établissements
selon leur statut juridique et leur situation géographique. Ainsi un seul
établissement peut avoir jusqu’à huit numéros FINESS, si son activité est
répartie sur plusieurs sites. Par ailleurs, la SAE ne permet pas de dater le
moment où l’opération est devenue effective ni de qualifier une
opération :
elle
permet
d’observer
un
transfert
d’activité
d’un
établissement vers un autre, mais sans que l’on sache si c’est le résultat
d’une évolution prévue au SROS ou subie.
La DREES reste en fait sur une approche en lits et places qui n’est
plus adaptée aux besoins de suivi des SROS, qui exigerait une
connaissance des sites et un suivi de l’évolution de leur activité. L’étude
publiée en avril 2008 sur les changements d’organisation dans l’offre de
soins pour les hôpitaux et les cliniques, fondée sur une enquête
déclarative auprès des établissements, ne distingue pas non plus la nature
des opérations de recomposition (transfert d’activités de soins ou
d’activités logistiques)
315
.
C
–
Une dynamique de la restructuration
progressivement interrompue
L’analyse des politiques préconisées par l’administration centrale
entre 1999 et 2007 en matière de restructuration montre qu’il n’y a pas eu
de ligne directrice stable. La dynamique de la restructuration s’est
315. DREES, Etudes et résultats n° 633 sur les hôpitaux et cliniques en mouvements,
changements d’organisation de l’offre de soins et évolution de l’attente des patients,
avril 2008.
C
OUR DES COMPTES
276
essoufflée
en
raison
des
signes
contradictoires
donnés
par
l’administration centrale.
1
–
Une mobilisation initiale des ARH
Dès leur création, les ARH se sont mobilisées pour préparer les
SROS2
et
engager
un
mouvement
de
coopération
entre
les
établissements, en utilisant toute la palette des outils juridiques mis à leur
disposition. Elles ont commencé à restructurer les hôpitaux de taille
intermédiaire (inférieure à 90 lits de MCO), situés dans des villes petites
ou moyennes, qui avaient des problèmes de recrutement de praticiens, ou
ceux dont l’existence était menacée par le développement d’un secteur
privé très concurrentiel en chirurgie. Elles ont ainsi notamment incité à la
fermeture des services de chirurgie dans un contexte difficile où la peur
de perdre des emplois et le souci de maintien des services publics de
proximité ont pu contrecarrer leur action.
Les ARH ont réussi à développer des coopérations là où l’avenir
des deux secteurs était compromis : soit le CH et la clinique se
regroupaient, soit leur activité s’effondrait. La réussite de ces opérations
s’est appuyée sur l’élaboration d’un projet médical, permettant le plus
souvent de reconvertir le CH et de maintenir une activité d’accueil
d’urgence pour assurer une permanence des soins. Mais ces opérations
ont été parfois longues à mettre en oeuvre et ont demandé beaucoup
d’accompagnement de la part des ARH.
2
–
Une articulation difficile des réformes
Entre 1996 et 2006, de nombreuses réformes ont interféré avec la
dynamique de restructuration. La mise en place de l’aménagement et la
réduction du temps de travail (ARTT) en 2001 et les multiples plans de
santé publique élaborés au niveau national (urgences, périnatalité, cancer,
prévention des risques sanitaires, plan anti-canicule, maladies chroniques,
prise en charge des maladies rares) ont mobilisé les énergies dans les
établissements et les ARH. Ces priorités nationales ont été accompagnées
de crédits fléchés et ont contraint les ARH à attribuer des moyens
financiers aux établissements de santé sans tenir compte de leur situation
budgétaire et de leur efficience.
Le plan Hôpital 2007, lancé en novembre 2002, avec ses diverses
composantes -la relance des investissements, la mise en place de la
tarification à l’activité, l’assouplissement de la planification et la réforme
de la gouvernance- a fait entrer les établissements dans un mouvement de
réformes très important. L’introduction de la tarification à l’activité
(T2A), qui lie les recettes des établissements à leur activité, devrait en
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
277
particulier conduire les hôpitaux à faire évoluer leur organisation et même
à restructurer leurs services ou leur offre, en faisant apparaître les écarts
entre les moyens disponibles et l’activité effective.
Cette logique tarifaire, cependant, n’est que partiellement efficace,
pour trois raisons : en premier lieu, la prise en compte de la T2A dans les
recettes a été progressive, du moins jusqu’en 2008. En deuxième lieu,
l’attribution des MIGAC a parfois été détournée de son objet, pour
permettre de compenser des surcoûts structurels. Enfin et surtout, les
aides prévues dans le cadre des contrats de retour à l’équilibre (CRE)
316
,
en principe destinées à donner du temps aux adaptations structurelles,
semblent avoir surtout été utilisées pour différer les adaptations.
Dans un rapport récent, l’inspection générale des affaires sociales
(IGAS)
317
a souligné l’échec de ce dispositif. Elle montre notamment que
ces aides, destinées aux établissements les moins productifs, parfois
complétées par d’autres financements, ne leur ont pas servi à réformer
leurs modes de fonctionnement ni à revoir leur organisation interne pour
être plus performants : « tout se passe comme si certains établissements
s’étaient durablement installés dans une culture du déficit ».
Le CHU de Lille illustre pour partie cette problématique
318
.
Le contrat de retour à l’équilibre du CHU de Lille
Le CHU a signé un CRE avec l’ARH le 16 décembre 2004, valable
jusqu’en 2007 qui prévoyait une aide de 10 M€ en contrepartie de laquelle
il s’engageait à restaurer son équilibre financier.
Durant cette période, il a reçu en plus 26 M€ d’aides dont certaines
à titre pérenne. Au total, il a bénéficié de 36 M€.
Fin 2007, malgré toutes ces aides financières successives son
déficit d’exploitation atteint près de 15 M€ et s’est donc aggravé. Même si
ce montant ne correspond qu’à 1,92 % de ses dépenses, soit à la moyenne
constatée de tous les CHU (1,8 %), cette situation est préoccupante.
316. Afin de faciliter le passage à la T2A, la DHOS a mis en place en 2004 une aide
nationale non reconductible de 300 M€ destinée à assainir la situation financière des
établissements les plus endettés. Cette aide a été répartie entre les ARH qui devaient
conclure avec ces établissements un contrat de retour à l’équilibre (CRE) comportant
un plan de redressement économique. L’ARH du Centre a reçu 4,5 M€, celle de
PACA 26,8 M€ et celle du Nord-Pas-de-Calais, 21,2 M€.
317. IGAS : Rapport n° 2007-164P de janvier 2008 sur le contrôle des mesures prises
dans le cadre du contrat de retour à l’équilibre financier (CREF) par des hôpitaux
perdants à la T2A.
318. Cet établissement figurait dans la liste des établissements étudiés à la fois par
l’IGAS et la Cour.
C
OUR DES COMPTES
278
L’IGAS
319
a constaté que son déficit est lié pour partie à « une
difficulté inquiétante à maîtriser les charges de personnel ». Les effectifs
du CHU ont augmenté de 3,8 % entre 2004 et 2007 alors que son activité
en MCO a peu progressé depuis 2005.
L’IGAS a estimé que si le passage à 100 % à la T2A devait lui être
favorable, il ne résoudrait pas toutes ses difficultés et que son
redressement financier nécessiterait une réduction de ses coûts de
production, y compris de personnel.
3
–
Des signaux contradictoires donnés aux ARH
Certaines décisions des ARH ont été désavouées ou contrecarrées
par des interventions de leur ministère de tutelle. Ces désaveux ont jeté un
doute sur la volonté réelle du ministère de la santé de restructurer les
hôpitaux publics et freiné ensuite les initiatives, dans les régions où ces
interventions
avaient
eu
lieu.
Deux
exemples
attestent
de
ces
dysfonctionnements.
a)
Le maintien de la maternité de Pithiviers
La maternité de Pithiviers a été fermée en juillet 1997 par l’ARH
suite au décès d’un nouveau né et d’une parturiente. Au-delà des
responsabilités humaines, l’enquête disciplinaire confiée à l’IGAS avait
montré qu’il y avait des problèmes plus structurels liés à l’organisation
des services de maternité et de chirurgie ainsi qu’aux normes techniques
en vigueur au bloc. La maternité a été rouverte cependant en mars 1998 à
la demande du ministère de la santé, dans le cadre d’un montage avec
l’hôpital d’Etampes situé à proximité.
Alors que le premier directeur de l’ARH s’était prononcé contre
son maintien, l’établissement reçoit depuis 1998 chaque année une aide
ponctuelle nationale de 0,8 M€
320
pour le maintien de sa maternité. Un
diagnostic établi par l’IGAS
321
en 2005 avait mis en évidence une
instabilité des équipes, une fuite importante des parturientes vers les
maternités voisines, due notamment à l’impossibilité de l’établissement
d’ouvrir toute l’année. A cette date, la maternité présentait un surcoût de
fonctionnement annuel estimé à 1,66 M€ par l’IGAS. Selon des données
plus récentes, l’activité de la maternité progresse (566 accouchements en
319. IGAS : Contrôle sur les mesures prises dans le cadre du contrat de retour à
l’équilibre financier par le CHU de Lille, juillet 2007.
320. Rapport d’activité 2006 de l’ARH du Centre, p. 17.
321. IGAS : rapport d’enquête sur le pilotage des dépenses hospitalières ; juillet 2005
Tome 3.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
279
2007), ses équipes sont plus stables et l’établissement ouvre toute l’année.
Toutefois rien n’indique que sa situation financière s’améliore.
b)
Le difficile rapprochement des CH de Hirson et de Fourmies
La ville de Fourmies située dans la région Nord-Pas-de-Calais se
trouve aux confins des départements de l’Aisne et du Nord et de la
province belge du Hainaut. Elle est à 17 km de la ville d’Hirson, située
dans l’Aisne et rattachée administrativement à la région Picardie. Le CH
de Fourmies dessert une population de plus de 66 000 habitants. Pour les
activités de chirurgie, il travaille en coopération avec la clinique de la
Thiérache et a passé un accord avec l’hôpital de Chimay en Belgique,
situé à 20 km, pour partager les praticiens sur l’ensemble des activités. Il
dispose d’un service d’urgence et d’un service mobile d’urgence et de
réanimation (SMUR).
Pour pallier les difficultés croissantes de recrutement de praticiens,
un rapprochement avec le CH d’Hirson a été envisagé. Ce dernier n’a
plus d’activité chirurgicale et obstétrique, mais il a également un service
d’urgence et un SMUR.
Le projet de rapprochement n’a pas pu être encore mené à bien,
suite à des interventions diverses. En novembre 2007, le CH d’Hirson a
obtenu une autorisation d’installation pour un scanner au motif qu’il est
site d’urgence. Le coût d’implantation de cet équipement nouveau est
évalué à 1 M€ et le budget de fonctionnement à 0,5 M€. Plutôt que de
maintenir des moyens identiques dans deux établissements aussi proches,
une mutualisation entre les deux CH s’impose.
II - Le bilan des restructurations
Selon les constats faits par la Cour, fondés sur des éléments
nationaux et régionaux
322
, le paysage hospitalier s’est profondément
modifié en dix ans. Toutefois l’ampleur des restructurations selon les
secteurs hospitaliers et leur impact sur l’obstétrique, la chirurgie et les
soins de suite et de réadaptation (SSR) n’ont pas été les mêmes.
322. Les éléments nationaux sont issus des données de la SAE, du PMSI, de la DHOS
et de la DREES ; les éléments régionaux sont issus des données fournies par les trois
ARH faisant partie du champ de l’enquête et par des chambres régionales des comptes
(CRC).
C
OUR DES COMPTES
280
A
–
Les maternités : une restructuration importante
mais inachevée
Si la restructuration des maternités a été en apparence accomplie,
le bilan est plus décevant lorsqu’on analyse la mise en place des réseaux
et la cohérence de la gradation des prises en charge prévue par les textes.
1
–
La fermeture de nombreuses petites maternités
Les décrets sur la périnatalité ont fourni aux ARH un levier pour
fermer les petites maternités qui n’étaient pas viables ou sûres. D’après le
bilan fourni par la DHOS sur les restructurations hospitalières 1997-2006,
un quart des maternités ont fermé au cours de cette période. Sur 779 sites
autorisés sur le territoire national en 1997, il en reste 576 en 2006. Les
fermetures ont principalement concerné les cliniques dont le nombre est
passé de 331 à 193 (-42 %). Dans le public 65 maternités ont fermé.
Ce constat national est corroboré, avec des nuances selon les
régions, par l’enquête de la Cour. Dans la région Centre sur 7 maternités
fermées, 4 appartenaient au secteur privé, en PACA sur 16 fermetures, 13
ont eu lieu dans le privé et en Nord-Pas-de-Calais, sur 10 fermetures 9 ont
concerné le privé. Parallèlement, le nombre moyen d’accouchements par
maternité a augmenté et l’activité obstétricale s’est déplacée vers le
secteur public. Dans les trois régions étudiées, la Cour a constaté que le
secteur public réalise entre 60 % et 89 % des accouchements. Au niveau
national, d’après la DREES, les hôpitaux publics réalisaient en 2005 près
des deux tiers des accouchements.
Ces restructurations se sont faites selon des modalités différentes.
Par exemple, l’ARH du Centre s’est appuyée sur les normes de sécurité
du décret de 1998 pour fermer les maternités de Châteauroux et de
Nogent le Rotrou. Elle a accompagné la restructuration des maternités de
Blois : on ne compte plus qu’un pôle d’obstétrique privé et public au lieu
de trois. Cette opération a demandé dix ans.
La lecture des SROS3 montre que dans aucune des régions
étudiées la restructuration n’a eu une incidence négative sur les
indicateurs périnataux. Le temps d’accès aux maternités ne dépasse pas
45 minutes, quelle que soit la région étudiée.
2
–
Le maintien de maternités fragiles et coûteuses
Pour autant, il subsiste encore 24 maternités qui effectuent moins
de 300 accouchements par an (elles étaient 75 en 1999). Les deux tiers
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
281
sont dans le secteur public. Dans les trois régions étudiées, seule celle
d’Apt en PACA est concernée par ce seuil.
Beaucoup de maternités réalisent moins de 500 accouchements par
an : 8 en région Centre sur 13, 3 en région PACA sur 26. La région Nord-
Pas-de-Calais fait exception car il ne reste qu’une maternité qui fait moins
de 500 accouchements (CH du Cateau-Cambraisis). L’ARH de cette
région a fermé en 2007 les deux autres maternités fragiles qui restaient.
Les ARH maintiennent ainsi des maternités où les sages-femmes
comme les obstétriciens ont une activité très variable, comme le montre le
tableau ci-dessous. Ces maternités sont souvent confrontées à des
problèmes de recrutement de praticiens à temps plein, ce qui les oblige à
recourir à de l’intérim qui coûte cher.
Une activité variable par obstétricien et sage-femme (2007)
Maternités
Nombre
d’accou-
chements
Obstétriciens
ETP
Anesthésistes*
ETP
Sage-
femmes
ETP
Nombre
d’accouchements
par obstétricien
Nombre
d’accouchements
par sage femme
Apt
294
2
2
8
147
36
Le Blanc
315
2,1
4,8
6,85
150
45
Saint
326
2,2
3
7,22
148
45
Valréas
335
2,8
2,3
8
119
41
Briançon
366
2
0,7 dont 5
qui tournent
12
183
30
Vierzon
456
2,5
3
7,6
152
60
* Les anesthésistes ont une activité chirurgicale
Source :
ARH du Centre et PACA.
a)
L’exemple de la maternité de Vierzon
Les deux exemples contrastés des maternités du Blanc et de
Vierzon, toutes deux situées en région Centre, illustrent cependant la
complexité des débats. L’activité de la maternité du Blanc est plus
réduite, mais il s’agit d’un territoire enclavé. A l’inverse, le CH de
Vierzon est situé à 35 minutes du CH de Bourges et à 30 minutes du CH
de Romorantin.
Le CH de Vierzon dispose de 2,5 gynéco-obstétriciens à temps
plein et de 7,6 sages-femmes. Il a par ailleurs trois anesthésistes temps
plein dont 20 % du coût est imputé à la maternité. Cet établissement a eu
recours jusqu’en 2007 pour un montant élevé à de l’intérim pour le
personnel médical. Même s’il s’efforce de réduire ses coûts, sa maternité
est structurellement déficitaire. L’ARH lui a apporté une aide de 0,3 M€
en 2006, qui correspond à 10 % de son budget. La Cour note qu’une
mutualisation pourrait être recherchée soit avec le CH de Bourges, soit
avec le CH de Romorantin (615 accouchements), même si ce dernier est
C
OUR DES COMPTES
282
situé dans un autre département. Sa maternité a été reconstruite en 2005 et
celle de Vierzon en 2007.
3
–
Une organisation de l’obstétrique mal dimensionnée par
rapport aux besoins
L’organisation d’une prise en charge graduée des femmes
enceintes et des nouveau-nés était le deuxième objectif de la
restructuration des maternités. Les décrets du 9 octobre 1998 et la
circulaire DHOS n° 402 du 8 juillet 1999 ont défini trois niveaux de prise
en charge dans les établissements en fonction de la présence, en plus de
l’obstétrique,
d’une
unité
de
néonatalogie
ou
de
réanimation
néonatale
323
. Les ARH ont classé les établissements selon ces critères
lors des SROS2 (1999-2004).
a)
Une répartition incohérente des niveaux de prise en charge
Alors que la grande majorité des accouchements ne nécessitent pas
une médicalisation particulière, il paraîtrait normal que le nombre
d’établissements assurant les soins de base (niveau I) soit supérieur au
nombre d’établissements chargés de prendre en charge les 20 % de
grossesses pathologiques ou de nouveau-nés ayant des problèmes (niveau
II et niveau III).
L’étude de la répartition des niveaux dans les trois régions montre
que c’est l’inverse. Les établissements de niveau I sont minoritaires et le
pourcentage d’accouchements qu’ils réalisent est faible : 37,2 % des
accouchements en PACA et 23 % dans le Centre se font dans des
établissements classés en niveau I. Dans le Centre sur 13 établissements
de niveau I, huit soit plus de 60 % réalisent moins de 500 accouchements.
A Tours, Orléans, Marseille, Aix en Provence, Avignon, ou Lille intra
muros aucun établissement n’est classé en niveau I. Ce constat est
justement lié à la fermeture de nombreuses petites maternités privées.
323. Le niveau I correspond à un établissement ayant un service de gynécologie
obstétrique. Le niveau II est attribué aux établissements qui possèdent une unité de
gynécologie obstétrique et des lits de néonatologie pour des soins continus (IIA). Si
l’établissement dispense des soins intensifs, il est classé en IIB. Le niveau III est
attribué aux établissements qui disposent d’un service de gynécologie obstétrique,
d’un service de néonatalogie qui comprend l’activité de réanimation néonatale, des
soins intensifs et d’un service de réanimation des mères.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
283
b)
Une organisation des niveaux III à revoir
A l’exception du CHU de Tours, comme le montre le tableau ci-
dessous, les établissements de niveau III qui doivent prendre en charge
les cas les plus lourds en termes de pathologie maternelle et foetale
réalisent plus de 70 % de naissances sans complication. Ces naissances
pourraient être prises en charge dans des maternités de niveau I et
justifieraient que l’on dimensionne les effectifs de ces maternités en
prenant mieux en compte leur activité réelle.
La comparaison des effectifs de sages-femmes présentes dans
toutes ces maternités montre une diversité d’organisations et de pratiques
sans qu’il soit possible d’apprécier leur pertinence et l’efficience qui en
résulte. Ainsi alors même que leurs effectifs ont été normés par les
décrets de 1998, on observe des différences très importantes entre le
nombre de sages femmes présentes et celles affectées en salles de travail
et pour ces dernières des différences d’activité importante. A titre
d’exemple, les maternités de Nice et de Lens réalisent un nombre
similaire d’accouchements, mais la première dispose de presque deux fois
plus de sages-femmes en salle de travail.
Les disparités d’activité et d’organisation des maternités de niveau III
Etablissements
Niveau III
Total
Accouchements
Naissances sans
complication
Sage-femme
en ETP
Sages femmes
en salle de
travail en ETP
Nombre
d’accouchements
par sage femme
CHU Nice
2 450
2 052
83%
60,8
13,5
181
CH Lens
2 893
2355
82%
29
7
413
Marseille
CHU
Conception
2 927
2 178
75,2%
67,5
19,8
147
CHU Tours
3 917
2 255
57%
85,9
18
217
CHR
Orléans
4 027
2 931
72%
60,0
17,1
236
CHU Lille
4 616
3 286
71,9%
112,80
32,5
142
Source :
E-PMSI et SAE 2006.Tableau Cour des comptes
4
–
Une structuration des réseaux plus apparente que réelle
Au détriment d’une véritable structuration, l’attribution par les
ARH des niveaux aux établissements semble avoir été faite plus en
fonction de leur activité (une maternité effectuant plus de 1 000
accouchements avait une probabilité forte d’être classée en niveau II) que
de l’organisation des réseaux (une cinquantaine de réseaux sont
actuellement opérationnels) dans lesquels il devait y avoir une gradation
C
OUR DES COMPTES
284
des prises en charge. L’exemple de la région PACA illustre ce constat. Il
existe deux réseaux de périnatalité peu équilibrés géographiquement : le
premier «Périnat Sud » couvre le sud de la région et 43 000
accouchements, le second « Sécurité naissance», couvre l’est de la région
et 17 000 accouchements. Ces deux réseaux coexistent avec d’autres, dits
« de proximité », organisés de manière informelle à l’initiative des
acteurs de terrain. Selon le service médical de l’assurance maladie de la
région, une telle configuration ne permet pas d’assurer de manière
durable la graduation et la continuité des soins prévues par les textes.
B
–
La chirurgie : une restructuration à deux vitesses
La chirurgie connaît une évolution rapide et profonde. En vingt ans
elle est devenue plus une discipline réparatrice et reconstructrice que
d’exérèse. Son activité est de plus en plus programmée et l’intervention
en urgence est très faible. Les modes de vie et la pression sociale
contribuent par ailleurs au développement d’une chirurgie liée à l’obésité
et à l’esthétique. Toutes ces évolutions ont des conséquences sur
l’organisation de l’appareil de soins. Ainsi le développement de la
chirurgie ambulatoire mobilise moins de ressources humaines et fait
diminuer les durées d’hospitalisation
324
.
Le besoin de restructurations induit par ces évolutions a été traduit
de manière très inégale selon les secteurs : les diverses modalités de
coopération entre secteur public et secteur privé ont permis dans certains
cas de réduire l’offre et d’améliorer les plateaux techniques. Au sein du
secteur privé la restructuration a été rapide et profonde. En revanche, dans
le secteur public on constate un relatif immobilisme.
1
–
Des complémentarités public/privé diversifiées mais peu
développées
Les ARH ont recherché des solutions pour maintenir une offre
chirurgicale dans des villes où son avenir était compromis. Chacune
d’elle a privilégié un outil : l’ARH du Centre a beaucoup utilisé les
concessions de service public, l’ARH de PACA les pôles entre le public
et le privé et l’ARH du Nord Pas de Calais le groupement de coopération
sanitaire.
324 . Une étude de la CNAMTS récente évalue l’économie résultant d’un
développement de la chirurgie ambulatoire à 500 M€.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
285
a)
Les concessions de service public
L’ARH du Centre a éliminé tous les doublons existants entre le
public et le privé, afin de maintenir au minimum une activité chirurgicale
dans les villes de sous préfecture. Elle a utilisé la concession de service
public créée par la loi hospitalière de 1970 pour restructurer les plateaux
techniques chirurgicaux de Chinon ou de Saint-Amand-Montrond. Elle a
constitué un plateau technique unique en faisant installer la clinique sur le
site de l’hôpital ou construire un nouvel ensemble. La clinique a
l’exclusivité de l’activité chirurgicale et coopère aux urgences du CH. Les
chirurgiens et les anesthésistes réanimateurs libéraux sont indemnisés par
l'assurance maladie pour les astreintes qu'ils assurent dans la clinique, qui
accueille des patients 24 heures sur 24 en direct ou venant des urgences
de l'hôpital. Lorsqu'ils sont d’astreinte à la clinique, les chirurgiens
interviennent également aux urgences du centre hospitalier pour donner
un avis.
Ces concessions soulèvent cependant des interrogations quant à
leur viabilité : la maternité du CH de Chinon (400 accouchements par an),
malgré l’appui du CHU de Tours et le CH de St-Amand-Montrond sont
en déficit.
b)
Les pôles publics/privés
L’ARH de PACA a fait le choix de maintenir une activité
chirurgicale dans des villes moyennes en procédant soit à des partages
d’activité entre le public et le privé, soit en laissant le libre choix à la
population lorsque c’était possible. Elle a privilégié le pragmatisme en
confiant l’activité à l’établissement qui la réalisait principalement. Ainsi
elle a créé des pôles public/privé à Carpentras, à Saint-Tropez, où il
subsiste un seul site de chirurgie, la clinique réalisant l’activité
chirurgicale et le CH assurant les activités de médecine et d’obstétrique.
Chaque entité conserve son propre mode de fonctionnement et son
directeur mais il n’y a plus qu’un seul plateau technique, une seule
permanence des soins et une logistique commune. Le bilan dressé par
l’ARH montre que ces pôles rendent service à la population en
maintenant à proximité des activités dont la disparition aurait été source
de difficultés, notamment l’été pour Saint Tropez ; que les taux de fuite
en obstétrique et en chirurgie ont été stabilisés et que l’activité des pôles a
nettement augmenté depuis leur rapprochement ; enfin que les cliniques
ont fortement développé leur activité chirurgicale auparavant en chute.
Fin 2007, l’ARH a diligenté un audit afin de faire un bilan de l’impact de
ces regroupements et d’évaluer la pertinence du modèle à un moment où
elle souhaite étendre cette formule à d’autres établissements et où
C
OUR DES COMPTES
286
l’application de la T2A à 100 % en 2008 modifie le contexte budgétaire.
Toutefois la situation financière entre le public et le privé est
déséquilibrée, la clinique tirant plus partie de son positionnement que
l’hôpital.
Cette politique n’est pas toujours reproductible à l’identique, y
compris dans la même région, comme le montre l’exemple du
rapprochement en cours entre le CH et la clinique de la Ciotat.
Le rapprochement incertain du CH et de la clinique de La Ciotat
Actuellement, l'hôpital et la clinique sont sur deux sites distincts
éloignés qui répondent chacun à leurs propres règles de fonctionnement.
Après des années de discussion, l’ARH de PACA a pu engager la
mise en commun des plateaux techniques du CH et de la clinique de La
Ciotat. Sa commission exécutive a donné à l’unanimité son accord en
février 2005 pour la création d’un pôle de santé public/privé à La Ciotat.
Le projet prévoit la rénovation du bloc opératoire sur le site de l’hôpital
dont les travaux ont démarré en 2007. Le début de réalisation de la partie
privée devrait commencer en 2008. Toutefois le plateau technique sera
partagé entre les deux équipes chirurgicales et sa mise en commun ne
débouche pas sur le partage des activités chirurgicales entre la clinique et
le CH. Seuls certains segments d'activité chirurgicale ne seront réalisés
que par un des partenaires du pôle.
Dans le projet initial, le bloc opératoire a été dimensionné pour
9 000 interventions par an. On peut craindre un surdimensionnement car le
projet a été basé sur une forte augmentation de l’activité (33 % pour le
privé et 20 % pour l’activité publique) et sur la récupération d’un taux de
fuite proche actuellement de 40 %. L’ARH envisage toutefois de
réexaminer la taille du bloc opératoire.
c)
Les groupements de coopération sanitaire
L’ARH du Nord-Pas-de-Calais a été l’une des premières à utiliser
l’outil de groupement de coopération sanitaire (GCS). Elle a constitué de
nombreux GCS dont en 2000 celui de cardiologie interventionnelle entre
le CH de Lens et la polyclinique de Bois Bernard.
L’exemple contrasté du GCS de Lens/Bois Bernard
Le CGS de Lens, qui est détenteur de l’autorisation de chirurgie
cardiaque, est particulier car sa gestion est entièrement mixte. Les locaux
sont sur le site du CH mais ils disposent d’une entrée et d’un bloc dédié ;
le matériel et l’équipement est privé (la clinique paie les appareils de
circulation extra corporelle, de scintigraphie, les sondes…). Le personnel
non médical a un statut public. Les médecins ont un double statut : ils sont
praticiens hospitaliers à temps partiel et exercent à 50 % en libéral sous
contrat avec la polyclinique.
La création de ce GCS a permis d’augmenter l’activité de chirurgie
cardiaque qui est passée de 500 interventions à 625 en 2006.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
287
Néanmoins, cet outil, qui paraissait être le mieux adapté à la
coopération public privé, s’avère au bout de huit ans complexe en termes
d’utilisation, les règles de tarification (T2A) n’étant pas les mêmes pour
les deux secteurs. La clinique perd désormais de l’argent sur cette activité
suite à l’application de la T2A. Par ailleurs, comme elle n’a pas
l’autorisation de réanimation, elle ne peut plus facturer les forfaits liés à
cette activité depuis le 1er mars 2008. Le CH est également en difficulté
financière. La question de l’avenir de ce GCS est donc posée.
2
–
La restructuration importante du secteur privé
Le mouvement de restructuration a surtout concerné en réalité le
secteur privé à but lucratif. Entre 1997 et 2006, 276 services de chirurgie
ont été fermés sur le territoire national : 76 dans le public et 200 dans le
privé à but lucratif. 72 % des restructurations ont eu lieu dans ce
secteur
325
.
Le nombre des cliniques de MCO est passé de 1 070 en 1998 à 660
en 2005
326
. Les petits établissements privés qui n’étaient pas aux normes
ou pratiquaient une activité chirurgicale traditionnelle ont disparu. Cette
restructuration s’est accompagnée le plus souvent d’investissements
immobiliers importants pour la construction d’établissements neufs
mono-site ayant une taille supérieure. En 1985, la taille moyenne des
cliniques était de 70 lits. Elle était de 110 lits en 2005.
Cette restructuration s’est accompagnée de l’émergence de groupes
privés régionaux ou nationaux. En 2007, quatre groupes nationaux
détiennent 124 établissements MCO soit 17,3 % de l’ensemble des
établissements de court séjour et 23 % des lits de l’hospitalisation privée.
Ils réalisent plus d’un million de séjours (23,34 % du total).
La restructuration des cliniques se fait toujours à un rythme
soutenu, notamment dans les villes importantes. A titre d’exemple, dans
la région Nord Pas de Calais, depuis 2006, plusieurs opérations
importantes ont été menées à l’initiative des opérateurs privés : création
du plateau technique de Divion afin de couvrir les besoins de la
population aux alentours d’Arras, fusion de la clinique de la Tamise et de
la Lorraine à Calais avec construction d’une nouvelle clinique, rachat de
la polyclinique Vauban à Valenciennes en septembre 2007 par le groupe
Médi-partenaires qui vient d’acquérir la clinique du Parc à Saint-Saulve à
Valenciennes. En juin 2007, le groupe régional, Lille Septentrion
dénommé « Hôpital privé métropole » (HPM) est devenu le premier
325. Bilan établi par la DHOS en décembre 2007.
326. FHP. Revue Regards n° 50 septembre-octobre 2007.
C
OUR DES COMPTES
288
groupe de santé de la métropole lilloise. Dans la région Centre
d’importants regroupements ont eu lieu également à Blois, Bourges et
Tours et sont prévus au nord d’Orléans.
a)
Une activité de plus en plus concurrentielle vis-à-vis des hôpitaux
Les cliniques privées réalisent près de 60 % de l’activité
chirurgicale dont plus de 70 % des interventions ophtalmologiques, ORL
ou stomatologiques et quasiment les trois quarts de celle réalisée en
ambulatoire
327
. Dans la plupart des grandes villes comme Lille,
Valenciennes, Calais, Marseille, Toulon, Nice et Orléans, les hôpitaux ont
une activité chirurgicale inférieure à celle des cliniques.
A Valenciennes, les deux polycliniques qui appartiennent au même
groupe réalisent deux fois plus d’interventions que l’hôpital. A Calais, le
CH effectue environ 4 300 actes chirurgicaux, la nouvelle clinique des
deux Caps, 6 300. A Lens, le CH est concurrencé par les trois cliniques
locales, à Boulogne, le centre de la Côte d’Opale réalise plus de
9 900 actes chirurgicaux et le CH 6 900. A Tours, les cliniques privées
qui se sont fortement regroupées produisent 32 460 séjours et le CHU
22 340.
b)
Une prise en charge croissante des pathologies lourdes
Lorsque les cliniques se restructurent, on observe qu’elles
améliorent leur plateau technique et augmentent le pourcentage de prise
en charge des pathologies lourdes. La lourdeur de ces prises en charge est
évaluée à partir de l’indicateur proposé par la classification OAP et à
partir du PMSI 2006, seule classification disponible actuellement.
La classification OAP (outil d’analyse du PMSI)
La lourdeur de la prise en charge est un indicateur élaboré à partir
du PMSI. La méthode consiste à analyser l’activité des établissements
selon deux niveaux de regroupements de leur GHM (groupe homogène de
malades). Elle distingue d’une part des pôles d’activité correspondant à
peu près aux différentes spécialités (digestif, orthopédie, cardiologie,
ORL, pneumologie, système nerveux) et, d’autre part, elle différencie à
l’intérieur de ces pôles pour chaque GHM ceux qui ont nécessité le recours
à une expertise médicale ou chirurgicale spécifique ou à un plateau
technique particulier. Par exemple dans la chirurgie digestive, une
appendicectomie sans complication n’est pas considérée comme une prise
en charge lourde alors qu’une affection tumorale ou une maladie
inflammatoire de l’intestin le sera.
327. DREES : les établissements de santé en 2005. Edition 2007.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
289
Cette classification permet pour chaque établissement, à partir d’un
logiciel mis à jour annuellement, de connaître la répartition de ses séjours,
la lourdeur des prises en charge effectuées et de les comparer avec
d’autres.
Une étude du bureau de l’assurance qualité et de l’information
médico-économique de l’hospitalisation privée (BAQIMEPH) faite à la
demande de la Cour montre que dans des agglomérations comme
Marseille ou Nice, les actes lourds dans certaines disciplines comme
l’orthopédie, le digestif et la cardiologie interventionnelle sont réalisés
aussi bien dans les cliniques que dans les CHU. A Marseille, le CHU fait
51 % d’actes lourds en chirurgie cardiaque mais 48 % sont faits dans les
cliniques. Dans le Nord Pas de Calais, le CHU est distancé par le secteur
privé en orthopédie et en cardiologie interventionnelle, mais les hôpitaux
publics (CHU et CH) réalisent 65 % des actes lourds dans le digestif.
Dans le Centre, à Tours, avant que les cliniques ne se restructurent début
2008, la lourdeur des cas traités par l’ensemble du secteur privé était à
peu près égale à celle du CHU sur le viscéral et en chirurgie cardiaque,
supérieure en orthopédie et légèrement inférieure en cardiologie.
Cette situation a conduit les responsables des hôpitaux publics à
prendre conscience de la nécessité de mesures plus volontaristes. Ils ont
évoqué l’adoption d’un plan de sauvetage de la chirurgie publique, tout
en annonçant qu’il y avait 200 à 250 établissements à restructurer sur les
550 existants si on veut garantir une offre publique de qualité
328.
Les
restructurations à mener au sein des établissements plus importants
restent cependant encore peu évoquées.
3
–
La faiblesse des restructurations dans les hôpitaux publics
Les ARH ont rarement réussi à convaincre les établissements
d’abandonner leur activité de chirurgie lorsque celle-ci n’était plus
viable et elles n’ont pas toujours pu résister aux pressions locales.
a)
La fermeture des petits services de chirurgie
L’ARH du Centre a supprimé 20 sites entre 1997 et 2007, dont
plusieurs sites de chirurgie publics. Ces fermetures ont été précédées d’un
protocole d’accord entre les établissements lorsqu’il y a eu partage
d’activité avec la clinique (ex : Saint-Amand Montrond, Chinon en 1998).
328. Claude Evin, président de la FHF. Mars 2007. Dixièmes rencontres des décideurs
hospitaliers organisées par la société Dexia. Propos rapportés dans des articles parus
dans la presse du 28 mars 2007.
C
OUR DES COMPTES
290
Lorsqu’elles ont été décidées par l’ARH pour des raisons de sécurité ou
de qualité, elles se sont faites dans le secteur public dans un climat
difficile (manifestations à Issoudun, création d’un comité de défense,
pétition adressée au président de la République et manifestations à
Vendôme).
L’ARH de PACA a fermé 14 sites de chirurgie dont 4 sites publics
(CH de Saint-Tropez, de Carpentras, de Vaison-la-Romaine et du
Pertuis). Ces fermetures se sont faites selon différentes modalités :
-
fermeture du service de chirurgie du CH et reprise de son activité par
la clinique dans le cadre de la création d’un pôle public/privé avec un
seul site opératoire (ex : Saint-Tropez ou Carpentras) ;
-
reconversion des CH en établissements de soins de suite, comme à
Pertuis et à Vaison la Romaine ;
-
fusion des CH de Gap et Sisteron.
Dans le Nord Pas de Calais, les fermetures n’ont concerné que des
établissements privés.
b)
La fusion entre les hôpitaux publics
Bien que la loi permette au directeur de l’ARH de décider de la
fusion entre CH, y compris contre leur volonté (article L. 6122-15 du
CSP), ce pouvoir a été peu utilisé dans la pratique. Le constat fait par la
Cour en 2000 reste totalement d’actualité en 2007 : les restructurations
des CH sont peu nombreuses et sont laborieuses. Par ailleurs, les ARH
ont rarement utilisé la possibilité qui leur avait été donnée par les textes
de demander dans le cadre d’une opération de restructuration ou de
coopération « la suppression d’emplois médicaux et des crédits y
afférents ainsi que la création d’emplois médicaux et l’ouverture des
crédits correspondants dans les établissements de santé » recevant les
patients des services supprimés ou reconvertis. Les deux exemples qui
suivent montrent comment dans une même région les résultats peuvent se
révéler disparates.
L’exemple de la fusion difficile du CH de Toulon et du CH de la Seyne
Les deux CH ont fusionné sur le plan administratif en 1988 mais en
réalité leur activité MCO reste déployée sur deux sites et ils ont deux
services d’urgence. Ils ont gardé leurs activités propres, qui sont souvent
redondantes. En obstétrique, la maternité de la Seyne, classée à un niveau
inférieur à celle de Font-Pré, réalise plus d’accouchements. Mais la
tentative de rapprochement des deux services d’obstétrique sur le site de la
Seyne s’est heurtée à la résistance du monde politique local et national.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
291
Un projet médical a été approuvé fin 2003 en vue de regrouper les
activités médicales et de préparer la construction d’un nouvel hôpital à
Sainte Musse. Toutefois le site de La Seyne est maintenu pour assurer une
activité de proximité. Ce projet a été adopté avec des réserves portant sur
la nécessité du regroupement sur un seul site des deux services
d’ophtalmologie. Les travaux de construction du nouvel hôpital ont
commencé et devraient s’achever en 2010, malgré les réserves de l’ARH
sur la nécessité d’avoir au préalable un projet médical commun plus
abouti.
L’exemple du CHI des Alpes du Sud issu de la fusion des CH de
Gap et Sisteron montre à l’inverse que la mutualisation des moyens entre
CH peut permettre de fermer progressivement des activités.
La fusion des CH de Gap et de Sisteron
Le CH de Sisteron avait une faible activité chirurgicale avec 1 340
actes en 2005. Il a fusionné avec le CH de Gap en 2006 pour créer un
établissement intercommunal avec une seule équipe de chirurgie. Cette
organisation a permis de supprimer une astreinte de chirurgien pour le bloc
opératoire. Seule subsiste une astreinte de sécurité. 85 % de l’activité
chirurgicale à Sisteron se fait en ambulatoire. Le bloc opératoire est fermé
la nuit et le week-end, les interventions en urgence sont effectuées sur le
site de Gap.
Le CH de Gap récupère progressivement les activités chirurgicales
de Sisteron.
c)
L’échec de la fermeture des services à faible activité
Dans les trois régions étudiées, 14 hôpitaux publics réalisent moins
de 2 000 actes chirurgicaux par an. Sept sont situés dans le Centre, cinq
en PACA et deux dans le Nord. La plupart ont été cités dans un rapport
du Pr Guy Vallancien
329
publié en 2006.
Il existe des projets de restructurations pour la plupart de ces sites,
mais ils sont inégalement avancés. Dans le Nord-Pas-de-Calais, la
fermeture du service de chirurgie du CH d’Hazebrouck est envisagée. En
PACA, la fermeture de la chirurgie à Valréas et sa conversion en SSR en
2008, ainsi que la création d’un pôle public/privé à Menton, piétinent.
Dans le Centre, la réflexion semble moins avancée alors même que
l’ARH constate que les difficultés de recrutement de médecins
spécialistes fragilisent certains de ces petits services de chirurgie.
329. Rapport sur l’évaluation de la sécurité, de la qualité et de la continuité des soins
chirurgicaux dans les petits hôpitaux publics en France, remis au ministre de la santé
en avril 2006.
C
OUR DES COMPTES
292
Les hôpitaux publics réalisant moins de 2000 actes chirurgicaux par an*
Région
Etablissement
Département
Nombre d’actes
PACA
Valréas
Vaucluse
738
Apt
Vaucluse
877
Cavaillon-Lauris
Vaucluse
954
Menton
Alpes maritimes
1201
La Ciotat
Bouches du Rhône
1134
CENTRE
Le Blanc
Indre
913
Nogent le Rotrou
Eure et Loir
1160
Châteaudun
Eure et Loir
1187
Loches
Indre et Loire
1398
Amboise
Indre et Loire
1638
Romorantin
Loir et Cher
1811
Vierzon
Cher
1956
NORD-PAS-DE-CALAIS
Fourmies
Nord
889
*Il s’agit de tous les actes nécessitant un bloc opératoire.
Source :
PMSI 2005 ou 2006 fourni par les ARH des trois régions
d)
Deux exemples de décisions de fermeture différées
Nogent-le-Rotrou
: ce CH a le monopole de l’activité chirurgicale,
la clinique de la ville ayant fermé en 2000. Il a réalisé 1 490 séjours en
2006. Son activité et ses parts de marché se dégradent régulièrement.
74 % des patients résidant dans sa zone de desserte choisissent de se faire
soigner au Mans ou à Chartres.
L’étude de son PMSI 2006 montre que son activité relève de
l’ambulatoire. Le CH réalise 57 actes chirurgicaux par an la nuit alors
qu’il dispose d’un service d’urgence, soit environ un acte par semaine. Le
CROSS a d’ailleurs voté en février 2007 contre le renouvellement de son
autorisation de service d’urgence, considérant que le projet ne respectait
pas les conditions techniques de fonctionnement.
Cet établissement a une gestion coûteuse et son déficit atteint près
de 1,8 M€ en 2007 sur un budget de 16,9 M€ tous services confondus.
L’établissement n’a pas mis en oeuvre le plan de retour à l’équilibre signé
avec l’ARH fin 2004 pour lequel il a bénéficié d’une aide non
reconductible de 0,5 M€. Selon l’ARH, « depuis fin 2006 il a procédé à
un recrutement d’intérimaires excessif, qui concerne toutes les disciplines
et notamment les anesthésistes, ce qui peut poser des problèmes en
matière de suivi post opératoire ».
Suite au décès d’un patient en septembre 2007, l’inspection des
services de l’Etat a « estimé que l’établissement n’était pas en mesure de
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
293
proposer une organisation pérenne compatible avec la reprise immédiate
d’une activité chirurgicale avec hébergement principalement du fait
d’insuffisance de recrutement de personnels médicaux et paramédicaux ».
Le directeur de l’ARH après avoir levé d’abord partiellement la
suspension d’activité pour la seule chirurgie ambulatoire et programmée a
procédé en mai 2008 au retrait définitif de l’autorisation de chirurgie avec
hébergement complet.
Valréas
: Le CH de Valréas est situé à 45 minutes des CH
d’Orange et de Montélimar (qui dépend de l’ARH de Rhône Alpes). 75 %
des habitants de la commune ont choisi de se faire opérer ailleurs. En
2005, l’ARH a annoncé la perspective de la fermeture de la chirurgie
(hors ambulatoire) et le redéploiement de ses moyens vers d’autres types
de prises en charge. Le plan de financement du projet d’établissement
conclu sur cette base a été transmis et validé par le précédent directeur
d’établissement en novembre 2005.
Le CH de Valréas est en déficit depuis de nombreuses années. Pour
accompagner un plan de redressement, l’ARH lui a attribué à titre
pérenne un crédit de 0,5 M€ en 2007. Le CH a bénéficié en plus d’un
contrat de retour à l’équilibre (CRE) pour un montant total de 1,8 M€ sur
la période 2004-2007. Malgré ces soutiens, le déficit de l’établissement
atteint 0,33 M€ en 2007, montant supérieur à celui figurant à l’état
prévisionnel des recettes et des dépenses (ERPD) initial. Une des
conditions posées pour l’attribution d’une partie des crédits non
reconductibles était que la chirurgie soit fermée à la mi 2008. Cette
hypothèse se heurte à la résistance des différents élus qui interviennent
régulièrement auprès du ministère de la santé qui les soutient.
C’est ainsi que, à partir d’août 2007, suite au départ d’un praticien,
la continuité de la sécurité anesthésique dans l’établissement a été assurée
par le recours successif à trois médecins remplaçants. Pour l’ARH, « ce
fonctionnement présente un coût important pour l’établissement et ne
peut constituer une solution durable permettant d’assurer le respect des
normes ».
4
–
La réorganisation tardive et coûteuse des CHU
Les 29 CHU/CHR de métropole (dont l’Assistance Publique-
Hôpitaux de Paris) représentent plus du tiers des dépenses des
établissements publics de santé (EPS) Leur restructuration est loin d’être
achevée et leur situation financière est préoccupante. Le déficit de leur
compte de résultat principal (hors budget annexes) sous réserve de la
C
OUR DES COMPTES
294
fiabilité des comptes
330
, s’accentue lourdement : selon la DHOS, il
atteint 396 M€ en 2007 (353 M€ hors AP/HP) contre 86 M€ en 2006.
Sur les cinq CHU ou CHR compris dans le champ de l’enquête, la
Cour relève que trois d’entre eux (Lille, Marseille, Nice) ont des déficits
élevés. Certains sont soit engagés dans des opérations d’investissement
lourdes, comme Marseille, soit subissent une forte concurrence du secteur
privé, comme Lille.
La situation budgétaire des CHU dans les régions étudiées
En M€
CHU
Montant de
l’EPRD
Compte de résultat
principal 2007
Montant du contrat de retour à
l’équilibre
Marseille
1 042
- 49,7
15
Nice
502
- 36,4
Pas de CRE
Lille
783
- 15
10
Tours
480
- 4,8
2,5 donnés en 2007 par ARH
Source :
DHOS mai 2008 : derniers rapports quadrimestriels des CHU
En valeur relative, le CHU de Nice, avec un résultat de -36,4 M€,
soit 7,5 % de son budget présente la situation la plus dégradée de tous les
CHU.
a)
Des réorganisations tardives et mal engagées
Certains CHU, comme celui de Tours, se sont modernisés et la
restructuration de leur plateau technique est quasiment achevée. A
l’inverse, l’exemple de l’Assistance publique de Marseille montre que ce
CHU a mis de longues années pour s’engager dans une réorganisation et
adopter un plan directeur stratégique. Le montant de ses investissements
prévisionnels s’élève à 1 Md€.
La restructuration coûteuse de l’assistance publique de Marseille
L’AP de Marseille fait partie des trois plus gros CHU. Elle s’est
engagée en 2003 dans le plus vaste programme de travaux qu’elle ait
jamais connu. Ce projet a été très long à aboutir, le conseil
d’administration et la communauté médicale ayant refusé en 1999
d’approuver un premier projet médical qui prévoyait le regroupement des
activités d’urgence. Sous l’impulsion de l’ARH et d’un nouveau directeur,
le projet a été repris en 2002. Huit opérations immobilières d’envergure
330. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007 : la fiabilité des comptes
des hôpitaux, p. 93.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
295
sont prévues, portant sur les quatre sites de l’AP, sur une durée de vingt
ans. Les travaux ont été engagés très rapidement.
L’AP/HM
est
mal
placée
en
termes
d’efficience
médico
économique. Elle est plus chère que la moyenne des autres CHU et elle a
un poids moyen de cas traité inférieur à celui des autres CHU.
L’ouverture partielle de ses lits de réanimation et de soins continus
la conduit à refuser des patients qui vont se faire opérer dans le secteur
privé à but lucratif ou non lucratif.
L’étude des séjours lourds montre par exemple que l’AP/HM
réalise 29 % de la chirurgie digestive lourde et les établissements privés
40 %. En chirurgie cardiaque le rapport est légèrement en sa faveur
(51 %), mais en orthopédie, elle est largement devancée par les
établissements privés qui font 58 % des actes lourds (AP/HM : 26 %).
Dans ce contexte, la montée en charge de la T2A s’est avérée
pénalisante : la situation financière de l’AP/HM est extrêmement
dégradée. Son déficit est passé de 11 M€ en 2004 à 49,7 M€ en 2007. Le
CHU n’a plus de capacité d’autofinancement : il recourt totalement à
l’emprunt pour financer son projet d’investissement. Suite à une analyse
de la mission d’expertise financière placée auprès de la trésorerie générale,
l’ARH de PACA a demandé en février 2008 à l’AP/HM de revoir le
programme financier qui accompagne son projet d’investissement. Les
discussions sont en cours.
Certes, le retard pris pour faire aboutir ce projet est en grande partie
responsable des difficultés financières du CHU. Mais dans un contexte où
les évolutions technologiques et médicales sont rapides, où la concurrence
est
vive,
cette
reconstruction
risque
désormais
d’aboutir
à
une
inadéquation entre les besoins de la population et l’offre future, voire à un
surdimensionnement de l’outil dans certaines spécialités, le mettant encore
plus en difficultés à terme.
C
–
Les soins de suite et de réadaptation : un
développement à organiser
1
–
Une discipline encore peu reconnue
Les soins de suite et de réadaptation fonctionnelle (SSR) sont une
discipline plus récente que l’obstétrique et la chirurgie. Le SSR se
décompose
en
deux
activités
très
différentes :
une
activité
de
convalescence et de cure médicale, d’une part, qui ne nécessite pas un
plateau technique très spécialisé et, d’autre part, une activité de
rééducation et de réadaptation qui requiert un environnement médical et
para médical spécialisé. Le décret du 17 avril 2008 réunit ces deux
activités en une seule dite de « soins de suite et de réadaptation ».
C
OUR DES COMPTES
296
L’activité de SSR a été longtemps associée à la maison de repos ou
de convalescence. Cette image ne correspond plus à la réalité car le SSR
représente aujourd’hui un secteur de l’offre hospitalière qui a vocation à
développer des modes de prise en charge modernes, notamment en
réadaptation et médecine physique. Son importance s’est accrue du fait du
vieillissement de la population et des nouvelles indications de prise en
charge (accident vasculaire cérébral, état végétatif chronique, post
infarctus) et de la diminution de la durée des séjours hospitaliers. Mais les
lits de soins de suite sont occupés, notamment par des personnes âgées
qui ont des difficultés à accéder au secteur médico-social.
Au total, l’offre de soins de ce secteur est peu lisible car les
missions de cette discipline sont floues et mal positionnées, entre les
soins de courte durée et le médico-social. Le niveau des ressources
mobilisées et la qualité du service rendu aux patients sont méconnus.
L’offre en soins de suite et de réadaptation
La DHOS dénombre 1 575 établissements de soins de suite et 488
de réadaptation fonctionnelle, soit une capacité de 90 518 lits et 5 460
places. Les secteurs privés lucratif et à but non lucratif prédominent avec
plus de 58 % des capacités et près de 60 % de l’activité
331
.
L’activité est en progression rapide et les taux d’occupation sont
élevés. La durée moyenne de séjour augmente : dans le secteur privé
lucratif elle est passée de 30,8 jours à 31,2 jours entre 2004 et 2005. Dans
le secteur public elle est de 35 jours. Si toutes les structures font à peu près
la même chose, en revanche, elles ne le font pas avec la même intensité ni
les mêmes moyens : le niveau de médicalisation et la technicité des
plateaux sont très variables.
2
–
Une offre à développer
A l’inverse de la chirurgie, l’objectif de la restructuration n’était
pas de réduire l’offre mais au contraire de l’augmenter et de mieux
l’organiser, car elle était très inégalement répartie sur le territoire et
globalement insuffisante. Le développement de l’offre en soins de suite et
de réadaptation a commencé durant le premier SROS (1994-1999). Les
ARH, à l’exception de la région PACA qui avait des capacités
excédentaires, ont continué ce mouvement en utilisant trois leviers :
-
à l’occasion de la fermeture d’activités de chirurgie ou de médecine,
elles ont reconverti des établissements en SSR. La région Centre a
331. DREES. Etudes et résultats n° 546 sur l’activité des établissements de santé en
2005. Décembre 2006.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
297
mené ce type d’opération dans la plupart de ses départements. Elle a
ouvert des capacités de SSR dans plusieurs cliniques comme celle du
Boischaut dans l’Indre en 2005 et de Velpeau à Tours ou dans des CH
comme Dreux ;
-
elles ont délocalisé des lits là où il y avait, pour des raisons
historiques, une trop forte concentration de l’offre. Ainsi, le Nord Pas
de Calais a transféré des lits et du personnel de Berck sur deux autres
sites situés en dehors du territoire de santé (Fouquières les Lens en
Artois et Bailleul près de Lille) ;
-
enfin, elles ont augmenté la taille des sites déjà existants de manière à
ce qu’ils atteignent une taille critique (30 à 60 lits) permettant une
organisation satisfaisante des soins. La région Centre rencontre des
difficultés pour mener ce type d’opérations, du fait de l’existence de
nombreuses petites structures dans les hôpitaux locaux.
Globalement, entre 1994 et 2006, l’offre en SSR a augmenté de
23 % dans le Nord Pas de Calais, de 20 % dans le Centre.
3
–
Des secteurs à restructurer
Contrairement au cas général, la région PACA bénéficie d’une
offre importante mais très mal répartie : le Briançonnais et le littoral ouest
du Var sont largement excédentaires, alors que l’est du Var et le Vaucluse
sont déficitaires. Par ailleurs, de nombreux établissements sont
insuffisamment médicalisés. Ce constat a conduit à fermer, entre 1996 et
2007, 17 petites maisons de convalescence ou de repos et à regrouper
leurs lits sur des sites existants, à réduire des lits de diététique trop
nombreux, à procéder à la fermeture « sèche » de 3 établissements et à en
délocaliser 6 sur des zones déficitaires comme le Vaucluse. L’ARH a
prévu de poursuivre son action.
En médecine physique et de réadaptation (MPR), dans toutes les
régions, la problématique a été différente du fait du manque de
professionnels (ergothérapeutes et médecins de médecine physique et de
réadaptation). Les ARH ont plutôt eu tendance à optimiser les ressources
médicales et à resserrer l’offre. L’ARH du Centre a ainsi fermé plusieurs
sites de MPR tout en augmentant globalement les capacités dans les villes
concernées comme à Orléans ou Montargis.
4
–
Des difficultés persistantes pour organiser la filière de soins
Les ARH ont d’abord utilisé les autorisations de SSR comme un
levier pour fermer des structures de court séjour. Elles ont peu travaillé
C
OUR DES COMPTES
298
sur deux problèmes majeurs : la coordination avec les structures de court
séjour et le désencombrement des lits occupés de façon inadéquate.
Dans les trois régions étudiées, la Cour constate que l’on manque
encore de lits en soins de suite, mais que tous ceux autorisés ne sont pas
installés (exemple dans le Nord-Pas-de-Calais plus de 520 lits sur 3 971).
Or le besoin de capacités en SSR augmente, du fait de la diminution des
durées moyennes de séjour et des évolutions technologiques. Par ailleurs,
les lits de MPR devraient être de plus en plus adossés aux plateaux
techniques.
Les taux de fuite sont importants, surtout en médecine physique et
de réadaptation, du fait de l’existence de plateaux techniques très
performants, comme en Ile-de-France à Garches, au centre national des
Invalides à Paris et dans la région Nord Pas de Calais à Berck.
5
–
Le manque de coordination avec le court séjour
Les études menées dans le cadre de la préparation des SROS 3 ont
mis en évidence des besoins importants non satisfaits exprimés par les
services de court séjour. Les retards de sortie des malades ont été parfois
chiffrés en journées d’attente ou en équivalent lits. Pour la région Centre
le besoin correspond à 550 lits sur 3 726 lits soit un besoin de 14,6 % de
capacités supplémentaires. Mais il existe peu de conventions entre les
services de court séjour et les soins de suite et lorsqu’elles sont
formalisées elles sont difficilement opérationnelles parce que l’orientation
des patients se fait souvent plus en fonction des places disponibles que de
leur besoin.
Au total, le travail visant à structurer l’offre, plus qu’à la
restructurer, n’est que partiellement engagé.
III - Les conditions d’une relance des
restructurations
Le bilan établi par la Cour fait ressortir des constats différenciés
selon les disciplines et selon les régions étudiées. Pour autant, quelques
enseignements peuvent s’en déduire et conduire à des orientations et des
recommandations.
A
–
Les principaux enseignements
Les ARH ont partout engagé des opérations de restructuration,
mais les résultats sont restés très souvent en dessous des ambitions
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
299
affichées par les ordonnances de 1996, ou des priorités fixées par les
SROS successifs.
La T2A, qui depuis 2008 s’applique à taux plein dans le secteur
MCO, devrait mettre encore plus en évidence l’offre excédentaire par
rapport aux besoins et révéler les établissements ayant une activité
insuffisante. Pour autant il ne paraît pas possible de laisser se creuser les
déficits déjà constatés sans agir. Ainsi, les missions et enquêtes qui se
sont succédé depuis l’automne 2007 sur l’hôpital ont à juste titre montré
la nécessité d’une relance de la politique de restructuration. Compte tenu
des constats posés, elle impliquera :
-
pour l’obstétrique, l’achèvement de la fermeture des petites
maternités, sauf exception justifiée par un enclavement géographique
et surtout la constitution d’un réseau de prise en charge gradué
permettant un maillage plus efficient ;
-
pour la chirurgie, la fermeture des services à faible activité et le
redimensionnement, sous des formes à étudier dans chaque région, des
plateaux techniques dont l’activité est insuffisante.
-
pour les soins de suite, la clarification des objectifs des différentes
structures et l’organisation de la gestion des lits en fonction des
besoins des patients ;
-
enfin, la relance d’une politique de restructuration volontariste
reposant sur un projet médical d’établissement et conduisant, au-delà
d’un
seul
regroupement
juridique
des
établissements,
à
une
réorganisation de l’offre de soins.
B
–
Les pistes d’amélioration
Pour atteindre ces objectifs, les pistes d’amélioration sont
nombreuses et cette enquête ne pouvait en faire un tour exhaustif.
Cependant, les constats faits par la Cour permettent de dégager six
orientations qui, sans être suffisantes, paraissent néanmoins nécessaires.
1
–
Clarifier le partage des rôles entre les différents acteurs
Les gestionnaires des établissements de santé ne peuvent mener à
bien la modernisation permanente de leur outil de production des soins
que s’ils sont encadrés par des règles du jeu claires et durables. Le
ministère de la santé doit donner toute sa place au pilotage par la
performance car il ne peut y avoir de véritable politique hospitalière sans
une articulation constante entre deux leviers essentiels : l’outil de
planification et l’outil de financement. Dans ces deux domaines de
nombreux dispositifs existent. Mais il est nécessaire que le ministère
C
OUR DES COMPTES
300
clarifie sa doctrine, définisse des règles du jeu lisibles par tous et limite
ses interventions de manière à donner aux acteurs du pilotage régional,
qu’il s’agisse des ARH aujourd’hui ou des futures agences régionales de
santé (ARS), la responsabilité opérationnelle de la mise en oeuvre des
priorités fixées.
En matière de restructuration, ce principe de méthode, valable de
manière générale, s’impose particulièrement.
2
–
Valoriser les comportements gestionnaires
Si le directeur de l’ARH dispose depuis 2004 du pouvoir de
notation des directeurs d’établissement, il n’a aucun pouvoir sur l’affecta-
tion d’un directeur, ni sur sa demande de mutation. Les instructions
relatives à la notation
332
et leur mise en oeuvre ne font pas une place
suffisante à la qualité de la gestion et aux résultats économiques des
directeurs d’établissement public. Cette absence de critères d’évaluation a
un effet démotivant sur les meilleurs gestionnaires qui peut les conduire à
reporter des opérations délicates.
L’intégration dans leur évaluation de leur capacité à mener à bien
ces opérations devrait s’imposer, via les ARH.
3
–
Donner la priorité à la recherche de l’efficience
Les outils d’analyse de l’activité des établissements, de connais-
sance de leur environnement, de mesure de leur productivité par pôle ou
par service sont nombreux. S’il n’existe pas de modèle unique en matière
d’organisation hospitalière, en revanche, des améliorations sont possibles.
L’enquête de la Cour a souvent permis de confirmer les constats
établis récemment dans les rapports de plusieurs missions d’inspection,
notamment sur l’action limitée des ARH sur les établissements de santé
en matière de performance et d’efficience. Les nombreux travaux de la
mission d’expertise et d’audit hospitalier (MEAH) sur les blocs
opératoires, les urgences, le temps médical, la comptabilité analytique, la
chirurgie ambulatoire
333
devraient constituer des référentiels exploitables
et accessibles à tous.
332. Circulaire DHOS du 13 août 2007 relative à l’évaluation et à la prime de
fonction des personnels de direction.
333. La MEAH a ouvert 24 chantiers depuis 2003 et rédigé des recueils de bonnes
pratiques organisationnelles.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
301
En particulier la dernière étude de la MEAH sur l’organisation et le
fonctionnement de 850 blocs opératoires
334
situés dans 351 établisse-
ments corrobore les constats de la Cour. Elle montre notamment que ces
blocs sont sous utilisés et que cette mauvaise gestion engendre des
surcoûts inutiles. L’activité des blocs opératoires est globalement faible
puisque le taux moyen d’ouverture des salles n’est que de quatre heures
par jour et que seuls 21 % des sites examinés atteignent la référence
d’ouverture retenue par la MEAH (38 heures par semaine ce qui
correspond à 70 % d’un temps d’ouverture hebdomadaire de 54 heures
sur la base de cinq jours et demi).
Il conviendrait en outre que les constats les plus critiques, par
établissement ou par territoire, soient assortis de plans d’actions,
décrivant
les
opérations
internes
ou
externes
à
l’établissement
susceptibles de rétablir une bonne gestion.
4
–
Poursuivre l’effort de regroupement des établissements et de
fermeture des plus petits d’entre eux
L’insuffisance de taille critique est à la fois dangereuse pour les
patients et coûteuse. L’effort de restructuration, ralenti ou interrompu,
doit donc être repris. Il ne peut se limiter à une fusion ou à des
regroupements de nature administrative mais doit se traduire par une
réorganisation des activités fondées sur un projet médical de territoire.
5
–
Définir des procédures contraignantes pour les
établissements en déficit
Une procédure complexe a été définie, associant les hôpitaux
publics, les ARH et les juridictions financières.
Le directeur de l’ARH peut saisir la chambre régionale des
comptes (CRC) pour évaluer la situation financière d’un établissement en
difficulté et pour proposer des mesures de redressement. Cette saisine, qui
est en principe postérieure à la définition d’un plan de redressement,
demandé par l’ARH et établi par l’établissement, intervient si son résultat
334 . « Benchmarking des blocs opératoires dans dix régions pilotes. Synthèse
nationale ». Juillet 2008, disponible sur le site de la MEAH.
C
OUR DES COMPTES
302
comptable présente un déficit supérieur à 3,5 %
335
. La CRC dispose de
deux mois pour établir son rapport.
Plusieurs CRC ont été saisies par les ARH. Mais le nombre
potentiel d’établissements concernés par cette procédure est important :
de l’ordre d’une centaine. L’exemple de l’intervention de la CRC Ile-de-
France, pour le SIH de Juvisy-sur-Orge, montre que cette procédure peut
contribuer à faire accepter les décisions difficiles liées à une
restructuration.
L’exemple du syndicat interhospitalier de Juvisy-sur-Orge
Le SIH de Juvisy-sur-Orge est né en 2002 de la fusion du CH de
Juvisy et d’un établissement PSPH géré par la Croix Rouge Française. Ce
CH qui assure un service de proximité présente un déficit d’exploitation
prévisionnel supérieur à 2 M€ en 2007, soit plus de 9 % de ses recettes.
L’analyse faite par la CRC en décembre 2007 montre que cet
établissement est très déficitaire à la T2A et que sa situation financière se
détériore très rapidement. Il a une activité trop faible notamment en
chirurgie : il réalise à peine plus de 2 000 actes par an. Il est peu attractif
car situé dans une zone où il existe trois établissements importants : le CH
de Longjumeau, le CHIC de Villeneuve- Saint-Georges et le CH d’Evry-
Corbeil. Par ailleurs la clinique privée voisine a réalisé trois fois plus
d’interventions que lui en 2006, alors qu’ils avaient une activité similaire
en 2002.
De nombreux problèmes d’organisation interne contribuent à son
déséquilibre financier, comme notamment l’importance des gardes ou la
sous utilisation des blocs opératoires dont le taux d’occupation n’est que
de 62 %.
La CRC a préconisé à court terme un certain nombre de mesures de
redressement comme la suppression des lignes de garde en SSR et en
chirurgie, ainsi que la suspension des interventions après 18 heures ou le
week-end. L’établissement développerait en contrepartie de la médecine
gériatrique, en cohérence avec les données du SROS3. A moyen terme,
afin de les préparer, elle propose la fermeture des services de chirurgie et
d’obstétrique.
Le conseil d’administration de l’établissement a
suivi les
recommandations de la CRC en décidant en juillet 2008 de fermer ses
activités de chirurgie et de maternité.
335. L’article D. 6145-63 du CSP prévoit que la saisine de la CRC est fondée dès lors
que le résultat comptable du compte de résultat principal, calculé par différence entre
les produits et les charges du dernier exercice clos et corrigé des charges et produits
sur exercices antérieurs comptabilisés sur l’exercice en cours, présente un déficit
supérieur à un seuil fixé à 3,5 % du total des produits de l’exercice. Ce seuil est
abaissé à 2,5 % pour les CHU.
LES RESTRUCTURATIONS HOSPITALIERES
303
La procédure ainsi définie peut se révéler utile. Elle gagnerait
cependant à ne pas mettre en première ligne les juridictions financières au
risque de délégitimer les ARH qui doivent exercer pleinement leurs
responsabilités.
6
–
Renforcer le lien entre les autorisations et la qualité des
pratiques
L’article L. 6113-1 du code de la santé publique prévoit que tous
les quatre ans les établissements de santé doivent rentrer dans une
procédure
d’accréditation,
appelée
aujourd’hui
certification.
Cette
évaluation est devenue obligatoire en 2004 et a été confiée à la Haute
autorité de santé (HAS). La loi du 13 août 2004 portant réforme de
l’assurance maladie a prévu également l’évaluation des pratiques
professionnelles (EPP) pour tous les praticiens et a incité les équipes à
risque
336
à rentrer dans une procédure qui permet de montrer qu’elles
font de la gestion des risques sanitaires. Ces indicateurs de qualité et de
compétence devraient être pris en compte par les ARH lors de l’étude des
demandes d’autorisation ou de renouvellement d’autorisation.
________________________
SYNTHESE
_________________________
L’offre de soins hospitaliers s’est profondément modifiée entre 1997
et 2007. Ces changements se sont fait à un rythme très différent selon les
disciplines et selon les secteurs hospitaliers.
La Cour constate que lorsque les ARH disposent de normes
techniques et de fonctionnement, d’indicateurs à atteindre, d’outils de
mesure ou de suivi, elles ont pu utiliser ces leviers pour restructurer l’offre
de soins et améliorer la qualité des prises en charges. Ainsi, en obstétrique,
la diminution du nombre des petites maternités notamment a permis de
mieux sécuriser l’environnement de la grossesse et de la naissance. En
revanche, une attention insuffisante a été portée à la structuration des
réseau de maternités, ainsi qu’aux modes d’organisation des maternités, en
particulier de niveau III, qui restent trop disparates au regard de leur
activité.
En chirurgie, l’absence de seuils d’activité minimale et de levier
tarifaire avant 2004 pour encourager la pratique de la chirurgie
ambulatoire a été peu incitative à la restructuration dans le secteur public.
Le maintien de nombreux services à faible activité et peu attractifs s’avère
coûteux pour la collectivité, alors que la population a, le plus souvent, déjà
336. Décret n°2006-909 du 21 juillet 2006.paru JO du 23 juillet qui fixe 21 spécialités
à risque.
C
OUR DES COMPTES
304
fait son choix en allant se faire opérer ailleurs. Les coopérations entre le
secteur public et les cliniques privées sont peu nombreuses et ont été
difficiles à réaliser. Les cliniques ou les établissements PSPH, soumis à la
sanction économique, contrairement aux hôpitaux publics qui ont eu des
aides financières lorsqu’ils étaient en difficulté, se sont, pour la plupart,
adaptés et ont modernisé rapidement leur outil de production. Dans de
nombreuses villes et dans certaines disciplines, ils concurrencent
désormais plus fortement les hôpitaux, y compris les CHU.
Les adaptations dans le domaine des soins de suite et de
réadaptation ont été plus menées en accompagnement des reconversions
d’établissement de court séjour que dans la perspective de consolider et
développer cette activité médicale, pourtant devenue de plus en plus
indispensable.
Dans un contexte où le secteur de la santé évolue en permanence, où
ces changements ont un impact sur les métiers, l’organisation des soins ou
des plateaux techniques, les gestionnaires des établissements doivent avoir
la capacité de faire évoluer rapidement leur appareil de production. La
Cour recommande que le ministère de la santé clarifie ses objectifs et
stabilise rapidement un cadre règlementaire et financier qui permette à
tous les acteurs d’avoir plus de visibilité et qui soit plus incitatif aux
restructurations.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
36.
Définir un plan de restructuration des plateaux techniques publics
assorti d’un calendrier.
37.
Engager un effort systématique de pédagogie auprès du grand
public sur la nécessité et le bien-fondé de ces opérations.
38.
Valoriser
dans
le
déroulement
de
carrière
des
directeurs
d’établissements la capacité à mener à bien des opérations de
restructuration.
39.
Conditionner l’attribution des aides financières aux hôpitaux
publics en difficulté à la mise en oeuvre d’actions de réorganisation interne
et externe.
40.
Intégrer les critères de qualité et de compétence des équipes et les
résultats de la certification des établissements dans les décisions
d’autorisation d’activité.
305
Chapitre IX
Les systèmes d’information dans les
établissements publics de santé
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
307
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Les systèmes d’information hospitaliers sont au coeur de la réforme
de l’hôpital : vecteur d’amélioration de la qualité des soins, ils sont
également essentiels au perfectionnement de la gestion hospitalière. Depuis
la tarification à l’activité (T2A), les systèmes d’information ne sont plus
seulement un outil au service du progrès technique. Ils sont devenus un
véritable outil de gestion et de management.
La Cour et les chambres régionales des comptes
337
ont réalisé en
2007 une enquête sur les systèmes d’information hospitaliers destinée à
faire le point sur la situation observée dans les établissements publics de
santé, sur le pilotage exercé par la tutelle nationale et régionale, ainsi que
sur l’appui financier et méthodologique apporté par la tutelle aux
établissements de santé.
L’objectif de cette enquête était d’évaluer la capacité des
établissements de santé à répondre aux enjeux organisationnels et
financiers induits par la tarification à l’activité (T2A) et la mise en oeuvre
de la nouvelle gouvernance hospitalière. Dans le contexte du plan Hôpital
2012, cette enquête invite également à réfléchir sur les conditions du bon
emploi des aides à l’investissement promises aux établissements de santé
pour moderniser leurs systèmes d’information (1,5 Md€).
Outre les tâches administratives (budget, comptabilité, ressources
humaines, tableaux de bord…), un système d’information hospitalier
(SIH) doit gérer :
-
la T2A, avec notamment le référentiel national des bénéficiaires de
l’assurance maladie, les tarifs et les procédures de facturation, les
prestations
hospitalières
(admissions,
mouvements,
recueil
automatique ou codage ad hoc des données médicales, contrôles
d’exhaustivité et de qualité) ;
-
l’optimisation de l’usage des moyens techniques : prises de rendez-
vous, brancardage, calendrier des actes, lits, blocs opératoires,
imagerie, circuit des médicaments ;
-
le dossier médical (actes, analyses biologiques et radiologiques,
traitements, comptes rendus, résumés de sortie standardisés), et son
éventuelle interopérabilité avec les réseaux extra-hospitaliers (par
337. Ont participé à l'enquête les chambres d'Alsace, Aquitaine, Bourgogne, Centre,
Champagne-Ardenne, Ile-de-France, Lorraine, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais,
Pays de la Loire, Picardie, Poitou-Charentes, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Rhône-
Alpes.
308
C
OUR DES COMPTES
exemple pour les dossiers communicants cancer), la médecine libérale
et les officines pharmaceutiques de ville ;
-
la confidentialité à tous les stades, avec des annuaires internes, des
habilitations et, rendue obligatoire par un décret du 15 mai 2007 dans
un délai de trois ans, l’authentification des professionnels de santé avec
la carte CPS évoquée par ailleurs dans ce rapport ;
-
à terme, des aides à la prescription médicale.
La situation concrète du SIH des établissements de santé reste mal
connue de la tutelle, qu’il s’agisse des ARH ou surtout de la tutelle
nationale. Les seules enquêtes existantes au niveau national (celles du
groupement pour la modernisation du système d’information hospitalier)
présentent l’inconvénient de ne rassembler que des données déclaratives
fournies par les établissements de santé
338
.
Les observations qui suivent, issues des contrôles réalisés en 2007
par les chambres régionales sur les comptes de 30 établissements de
santé
339
, de tailles et de vocations diversifiées, permettent de dresser un
bilan décevant de l’usage des outils informatiques au sein des
établissements, ce qui conduit à s’interroger ensuite sur les conditions du
pilotage national des SIH.
I - Les constats faits au niveau des établissements
A
–
Le pilotage
Les contrôles des chambres régionales ont permis de mesurer la
mobilisation des directions des établissements sur le sujet des systèmes
d’information hospitaliers (SIH) à partir de plusieurs éléments : existence
d’un schéma directeur des systèmes d’information, d’un comité de
pilotage stratégique présidé par le directeur et associant les médecins,
d’un comité de pilotage opérationnel et de groupes projet…
338. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, p. 322 et suivantes.
339. Ces établissements sont les suivants : les CHU de Tours, Reims, Nantes, Nice et
Toulouse ; le CHR de Metz-Thionville ; les CHS d’Alsace Nord, Henri Ey et le
Centre psychothérapique de Nancy ; les CH d’Agen, Auxerre, Châteauroux,
Charleville-Mézières, Pontoise, Épinal, Pont-à-Mousson, Remiremont, Cahors,
Castres-Mazamet, Villefranche-de-Rouergue, Auch, Albi, Béthune, La Roche-sur-
Yon-Luçon-Montaigu, Nord-Mayenne, Beauvais, Toulon, Grasse, et Annecy.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
309
1
–
Le projet d’établissement
Aux termes de l’article L. 6143-2 du code de la santé publique,
chaque établissement de santé doit définir, dans le cadre de son projet
d'établissement, son système d'information.
Or, sur 23 établissements contrôlés sur ce point par les CRC,
quatre ne disposaient pas d’un projet d’établissement actualisé en 2007
(CH d’Auxerre, Pont-à-Mousson, Epinal).
2
–
Le schéma directeur du système d’information
Le schéma directeur des systèmes d’information (SDSI) doit
décliner et préciser les projets prioritaires définis dans le projet
d’établissement
340
.
Parmi les établissements contrôlés, seuls 14 disposaient d’un SDSI
pour la période en cours. Dans deux établissements, le SDSI était en
cours d’actualisation (CH d’Auxerre, CHR de Metz-Thionville), et six
établissements n’en disposaient pas (CH de Charleville-Mézières,
Remiremont, Pont-à-Mousson, Epinal, Béthune, Pontoise). Au CH
d’Auxerre, le dernier SDSI disponible avait été établi dans le cadre du
projet d’établissement relatif aux années 2001 à 2005, et n’avait pas été
actualisé. Au CH de Remiremont, le projet d’établissement actuel
comprend bien un volet relatif à la planification informatique, avec un
plan pluriannuel d’investissement, mais il n’existe pas de SDSI déclinant
et précisant les projets prioritaires qui y sont définis.
Parmi les établissements disposant d’un SDSI, peu disposent d’une
programmation précise des projets faisant suite à une analyse de besoins.
Les seules exceptions concernent le CH d’Auxerre, dont le SDSI 2001-
2005 avait été élaboré au terme d’une véritable réflexion stratégique au
sein de l’établissement, et le centre psychothérapique de Nancy, pour
lequel le choix des axes stratégiques du volet « système d’information »
du projet d’établissement 2007-2011 s’est fait à partir d’un bilan de
340. Selon la circulaire du ministère de la santé n° 275 du 6 janvier 1989, relative à
l’informatisation des hôpitaux publics, « à partir de l’analyse de son système
d’information, l’établissement définit globalement ses besoins d’informatisation et
établit un programme pluriannuel à moyen terme, périodiquement actualisé, de sa
mise en oeuvre. Ces éléments sont consignés dans un schéma directeur qui en présente
les aspects organisationnels, techniques, économiques et financiers, document de
référence assurant la cohérence et la continuité de l’exécution des différentes phases
de cette informatisation. Sa mise en oeuvre est spécifiée dans les plans d’actions
annuels ».
310
C
OUR DES COMPTES
l’existant, de l’identification et de la hiérarchisation des besoins, de la
définition d’une architecture cible et de la détermination d’un plan
d’action. Les différents acteurs de l’établissement ont été associés à cette
phase d’élaboration. Cette organisation, mise en place sans recours à une
assistance extérieure, traduit une maturité certaine de l’établissement dans
l’approche du pilotage et de la conduite du système d’information.
Enfin, le suivi de la mise en oeuvre du SDSI est généralement
insuffisant. Au CHR de Metz-Thionville, bien que l’élaboration d’un
rapport annuel et le passage devant les instances aient été prévus afin
d’informer sur l’état d’avancement des projets du schéma directeur de
l’informatique hospitalière 2002-2006 et de permettre le contrôle des
engagements budgétaires, aucun rapport n’a été produit. Très peu de
bilans d’étape sur l’avancement du SDIH ont été réalisés. Le bilan
présenté à la commission informatique du CHR lors d’une réunion en
novembre 2005 montre par ailleurs des retards dans certains projets
341
. A
contrario, le centre psychothérapique de Nancy s’est efforcé d’assurer un
suivi de la mise en oeuvre de son SDSI. Ainsi, un bilan d’étape de la mise
en oeuvre du SDIH 2002-2006 a été réalisé en octobre 2005. L’état
d’avancement s’avère globalement en conformité avec les objectifs fixés,
à l’exception du volet relatif à la construction d’outils d’évaluation et
d’aide à la gestion, ainsi que de l’outil de gestion du temps. Le coût du
SDSI a aussi fait l’objet d’un bilan, duquel il ressort que l’enveloppe
initiale a été respectée. Une mise en perspective par rapport à la base de
données des coûts par activité, dite « base d’Angers », a également été
effectuée.
3
–
Le comité de pilotage
Afin d’assurer la mise en oeuvre et le suivi du SDSI, les
établissements doivent se doter d’un comité de pilotage stratégique et
d’un comité de pilotage opérationnel.
Sur 23 établissements contrôlés par les CRC, seuls huit ont
constitué un comité de pilotage stratégique SIH qui s’est effectivement
réuni. Ceux dépourvus de comité de pilotage SIH sont essentiellement des
CHS et des CH, et quelques CHR. L’absence de comité de pilotage est
parfois justifiée par l’existence d’un collège de l’information médicale.
Or, ces deux instances ont des objets différents.
Au CHR de Metz-Thionville, où le comité de pilotage SIH ne s’est
pas réuni, les questions informatiques, jusqu’à l’année 2006, n’étaient de
341. La direction prévoyait, d’ici le dernier trimestre 2007, de mettre en place un
comité chargé du suivi de la mise en oeuvre du SDIH 2007-2010.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
311
plus évoquées que de façon ponctuelle au travers de points inscrits à
l’ordre du jour de séminaires de management, ou encore lors de points
hebdomadaires en réunion de direction. L’insuffisance du pilotage
stratégique a eu pour conséquence l’annulation, le report ou le retard de
certains projets ainsi qu’une absence de connaissance précise du coût
final global du schéma directeur de l’information hospitalière 2002-2006.
Au CH de Pont-à-Mousson, en l’absence de comité de pilotage
stratégique du système d’information, seuls des groupes de pilotage
spécifiques sont constitués pour la gestion et la conduite de certains
projets. Quant au CH d’Epinal, qui ne dispose ni d’un projet
d’établissement actualisé ni d’un SDSI, aucun comité de pilotage n’a été
mis en place, alors même que le projet d’établissement 2001 à 2006
prévoyait la constitution d’un comité de pilotage pluridisciplinaire.
Enfin, même dans les établissements s’étant dotés d’un comité de
pilotage SIH, la composition de ce dernier n’est pas toujours satisfaisante.
Si le président de la commission médicale d’établissement (CME) et le
département d’information médicale (DIM) sont presque toujours
membres du comité de pilotage SIH, la composition de ce comité est très
variable puisqu’elle va de 7 membres (CHU de Reims) à 21 membres
(CH de Charleville-Mézières), ce dernier chiffre apparaissant trop
important pour permettre au comité d’avoir un véritable rôle de pilotage.
B
–
L’informatisation des établissements
1
–
Le système d’information gestion
Les établissements de santé contrôlés par les CRC disposent tous
d’outils informatiques pour la gestion économique et financière et la
gestion des ressources humaines.
Toutefois, la gestion du temps et des plannings, fonction
importante dans les établissements, reste non informatisée dans certains
établissements. Au centre psychothérapique de Nancy, la mise en place
d’un outil de gestion du temps doté d’une interface avec le logiciel de
gestion des ressources humaines prévue initialement dans le SDIH 2002-
2006, n’a pas été réalisée et a dû être reportée.
2
–
Le système d’information patient
Les données recueillies dans le cadre des contrôles des CRC
montrent que la gestion administrative du patient est un secteur très
largement informatisé. En revanche, les besoins restent importants en ce
qui concerne le dossier médical du patient.
312
C
OUR DES COMPTES
Les établissements contrôlés disposent rarement d’un dossier
médical informatisé et commun à tous les services. Le CHS Henri Ey
dispose d’un dossier papier unique pour l’ensemble de l’établissement et
les CH de Beauvais et de Charleville-Mézières d’un dossier papier par
service seulement. Au CHU de Nice, il existe un dossier médical
informatique partagé, mais celui-ci coexiste avec un dossier papier par
service. Il en est de même au CH d’Agen.
Le contenu du dossier patient au CHU de Nice
La CRC a fait expertiser un échantillon de dossiers patient par un
médecin expert. L’examen des dossiers papier a fait apparaître que
l’identification des intervenants, médecins ou soignants, est défectueuse ;
l’information parfois tardive du médecin traitant peut pénaliser le patient
pour la continuité des soins ; et des informations utiles restent au dossier
papier et ne sont pas mutualisées.
En ce qui concerne le dossier patient informatisé, l’examen de
l’échantillon a fait apparaître des doublons d’identité chez les patients, une
confidentialité des données insuffisamment garantie, la non prise en
compte des prescriptions pharmaceutiques, l’absence de validation
formelle des examens biologiques et radiologiques et d’ouverture du
dossier à la médecine de ville, la non utilisation des fonctionnalités
permettant la saisie des consultations privées.
Le contenu du dossier patient au CH d’Agen
En théorie, le dossier patient informatisé comprend les lettres et
comptes rendus de médecins dans les unités d’hospitalisation ou en
consultation externe ; les descriptions synthétiques des actes pratiqués ; les
résultats de laboratoire ; les comptes rendus de radiologie ; les actes et
comptes rendus de passages au service des urgences. Ces données ne sont
toutefois
pas
systématiquement
intégrées
dans
le
dossier
patient
informatisé.
Il peut arriver, en outre, que des comptes rendus opératoires ne
soient pas saisis au niveau du bloc opératoire, mais dans les services, ce
qui peut présenter des risques soit de doublons de saisie, soit de défaut
d’exhaustivité. Les médecins n’intègrent pas systématiquement dans le
dossier patient informatisé leurs observations quotidiennes lors de leurs
visites de malades, ce qui diminue l’intérêt de « l’informatisation au pied
du lit du malade », les observations figurant alors, pour l’essentiel, dans la
lettre de sortie du malade. Par ailleurs, l’intégration des prescriptions
médicamenteuses, du dossier de soins infirmiers et des images de
radiologie dans le dossier patient informatisé n’est pas encore réalisée.
L’absence d’exhaustivité du dossier patient a nécessité le maintien
d’un dossier papier, qui n’avait pas non plus été jugé exhaustif par les
experts de la HAS lors d’une première visite d’accréditation.
Au final, pour ces deux exemples, le dossier médical informatisé
est utilisé en deçà de ses possibilités, ce qui rend nécessaire le maintien
d’un dossier papier sans assurance que les deux supports soient
systématiquement et exhaustivement consultés par les soignants.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
313
Au CH d’Epinal, le dossier patient informatique rassemble les
seules données rattachées à la filière administrative. Les autres données
(comptes-rendus opératoires et d’imagerie, gestion de rendez-vous en
cardiologie, consultations de chirurgie et imagerie, données médicales en
médecine de jour) sont rassemblées dans un autre dossier patient
informatisé, développé depuis 1993 mais non interfacé avec le logiciel de
gestion administrative du patient.
Au CHR de Metz-Thionville, 75 % seulement des unités disposent
d'un outil de gestion des données médicales. A ce stade, l’information
médicale entre services cliniques n’est cependant transmise sous forme
numérique que dans cinq services. Des dossiers patients papier coexistent
donc avec les dossiers informatisés.
Au CH de Cahors, le logiciel permettant la gestion du dossier
patient n’est pas encore totalement déployé. Seuls sont informatisés les
comptes rendus médicaux, ainsi que les comptes rendus de la radiologie,
depuis 2004, et le planning des patients, dans 80 % des services. La
récupération des résultats de biologie, sous forme numérisée, est
opérationnelle depuis avril 2007. L’informatisation du circuit du
médicament et du bloc opératoire reste à mettre en place. S’agissant du
circuit des médicaments, il sera nécessaire de généraliser la dispensation
nominative informatisée qui n’est actuellement organisée que dans le
service du long séjour. Enfin, il convient de souligner que le dossier
médical n’est pas coordonné avec la prescription électronique du
médicament et n’alimente pas le dossier de soins infirmiers.
Aucun des établissements contrôlés par les CRC ne possède un
dossier de soins infirmiers. Quelques uns ont un projet en ce sens. Au
CHU de Nice, le progiciel de gestion intégrée utilisé pour le dossier
patient permet la tenue d’un dossier de soins informatisé mais cette
fonctionnalité n’est utilisée qu’aux urgences.
En ce qui concerne le circuit du médicament, qui comprend la
commande et la gestion des stocks, la prescription par le médecin, la
dispensation par le pharmacien et l’administration par l’infirmier, si la
gestion des stocks est très largement automatisée, en revanche la fonction
de prescription ne l’est quasiment jamais. Cette situation n’est pas
satisfaisante compte tenu des risques de iatrogénie médicamenteuse et du
coût des prescriptions hospitalières (4 Md€, en forte augmentation depuis
dix ans)
S’agissant des activités médico-techniques, l’informatisation des
laboratoires est généralisée, mais celle de la radiologie/imagerie et des
blocs opératoires reste peu développée, ce qui conduit notamment à
refaire plusieurs fois les mêmes examens.
314
C
OUR DES COMPTES
Enfin, en ce qui concerne les urgences, tous les établissements
contrôlés, à l’exception des CHS, ont informatisé leurs services. Mais les
logiciels de gestion des urgences sont rarement communicants avec les
autres logiciels de l’établissement. Ainsi au CH d’Agen, seul le résumé de
passage du patient aux urgences avec les actes pratiqués est à l’heure
actuelle intégré dans le dossier médical d’ensemble.
C
–
Les moyens des établissements
1
–
Les équipes
Dans les établissements contrôlés en 2007, les équipes en charge
des systèmes d’information sont d’une taille très variable. Dans les CHU
et les CHR, le nombre de personnels des directions des systèmes
d’information (DSI) varie entre 66 ETP (CHU Nantes) et 25,5 ETP (CHR
Metz-Thionville), en passant par 30 ETP (CHU de Reims) et 44,6 TP
(CHU Nice).
Dans les 20 CH et CHS de l’échantillon, si les effectifs DSI varient
entre 21,6 ETP (CH Pontoise) et 1 ETP (CH Pont-à-Mousson), les trois
quarts de ces établissements comptent moins de dix ETP dans ce service,
et un tiers moins de cinq ETP. Ainsi dans un de ces établissements,
l’équipe de la direction des systèmes d’information et de l’organisation
(DSIO) ne comprend que trois personnes, la fonction de DSIO étant
assurée par le directeur chargé du suivi de l’activité des soins, de la
clientèle et des affaires financières.
Ces établissements ne disposent pas en interne de compétences
suffisantes pour gérer, sur le plan technique, le système d’information
hospitalier. A fortiori, ils ne sont pas en mesure d’accompagner de
nouveaux projets, faute de compétence dans le domaine de la conduite de
projet, plus particulièrement sur les aspects d’encadrement et de relation
avec les prestataires extérieurs et les fournisseurs.
Seule une mutualisation des compétences nécessaires permettrait
de pallier ces insuffisances.
2
–
La formation dans le domaine SIH
Dans la plupart des établissements contrôlés, moins de 5 % du total
des heures de formation sont consacrées au SIH et moins de 2 % du total
des heures de formation sont consacrées au SIH hors bureautique.
Ainsi,
à
de
rares
exceptions
près
(comme
le
centre
psychothérapique de Nancy), la faiblesse de la formation SIH constatée
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
315
dans les établissements ne contribue pas à placer ces derniers dans des
conditions favorables pour promouvoir, faciliter et accompagner le
changement lié à la mise en oeuvre des nouveaux outils informatiques.
Une formation régulière à l’outil informatique, tant sur le plan du
matériel que des logiciels, permettrait par ailleurs de limiter les erreurs
dans la saisie des données administratives, de gestion ou médicales, avec
des conséquences potentiellement importantes. Cette problématique se
retrouve également dans le domaine de la saisie des données du PMSI.
3
–
Le budget consacré au système d’information
En
2006,
les
dépenses
d’exploitation
consacrées
au
SIH
représentaient généralement moins de 1 % du total des dépenses
d’exploitation des établissements. Quant aux dépenses d’investissement
consacrées au SIH, si elles variaient de 1,6 % (CH Pont-à-Mousson) à
près de 20 % (CH de Grasse), elles étaient en moyenne, d’environ 6 %
dans l’échantillon. Ces chiffres doivent néanmoins être pris avec
précaution, en raison des difficultés mentionnées infra de connaître avec
précision le périmètre des dépenses retenu par les établissements.
4
–
Les outils de gestion du parc informatique
Par ailleurs, les établissements contrôlés ne disposent pas d’outils
suffisants pour gérer leur parc informatique et leurs logiciels. En
l’absence d’inventaire physique et d’outil performant permettant de
suivre les logiciels, leurs mouvements, leur date d’installation et leur
version sur les différents postes de travail, les établissements ne sont pas
en mesure de connaître avec précision l’ensemble des programmes
installés sur les micro-ordinateurs. Il en résulte une incertitude quant au
respect de la réglementation concernant l’usage des licences, ainsi que
des risques sur le plan de la sécurité interne du réseau.
D
–
Le recueil des données relatives à l’activité
médicale
1
–
La place du département de l’information médicale (DIM)
Le DIM, créé par la loi du 31 juillet 1991 sur la réforme
hospitalière, est chargé d’organiser le recueil, la circulation et le
traitement des données médicales. Avec la T2A, la mission exercée par le
DIM doit s’enrichir dans la partie amont du recueil d’activité
(organisation du recueil et accompagnement des services pour améliorer
la production de données) et dans la partie aval de l’exploitation des
316
C
OUR DES COMPTES
données dans le cadre du pilotage médico-économique des pôles et de
l’établissement.
Les contrôles réalisés par les CRC laissent apparaître une grande
diversité dans le positionnement du médecin responsable du DIM par
rapport à l’équipe de direction : la plupart du temps (12 cas sur 20), celui-
ci n’est pas membre du conseil exécutif de l’établissement même s’il y est
parfois invité (CH Pont-à-Mousson).
Le pôle ou le service de rattachement du DIM traduit également
des stratégies différentes selon les établissements. Certains ont fait le
choix de ne rattacher le DIM à aucun pôle ou de le rattacher à la
commission médicale d’établissement. Dans plusieurs établissements, le
DIM est rattaché au pôle médico-technique
Cette diversité traduit la difficulté à définir le rôle du DIM. Au-
delà de sa traditionnelle mission de codage, ses nouvelles missions,
notamment dans le cadre de la T2A, n’ont pas toujours été redéfinies.
Par ailleurs, les établissements sont souvent confrontés à des
difficultés de recrutement de médecins DIM. Ainsi, le CHR de Metz-
Thionville a des difficultés pour pourvoir à la vacance d’un poste de
praticien hospitalier au sein du département d’information médicale. De
même, au CHS d’Alsace Nord, les deux postes de médecins DIM sont
restés vacants plusieurs mois au cours de l’année 2007.
Plus généralement, les équipes des DIM sont, à de rares exceptions
près (CHU, CHR, quelques CH), très réduites, comprenant moins de deux
ETP techniciens de l’information médicale, voire simplement secrétaires
médicales. Ce sont d’ailleurs les établissements déjà bien dotés du point
de vue de l’information médicale (CHU Nice, par exemple), qui ont
recruté des techniciens de l’information médicale destinés à seconder les
DIM et les médecins cliniques dans le domaine du codage.
Enfin, les médecins responsables du DIM bénéficient rarement
d’une formation suffisante en matière d’information médicale.
2
–
Les modalités de recueil
Alors que le codage de l’activité médicale doit être réalisé dans les
services sous la responsabilité des médecins
342
, les contrôles réalisés par
les CRC montrent que dans certains établissements ou certains services,
le codage est assuré par le DIM, pour diverses raisons. Cette
centralisation peut permettre de pallier le refus des médecins de pratiquer
342. Article L. 6113-7 et articles R. 6113-1 et suivants du code de la santé publique.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
317
le codage dans les services ou de combler le retard de certains d’entre
eux. A Auxerre, le codage par le DIM de certaines activités permet
notamment de réaliser des contrôles de cohérence sur les séances de
dialyse et de chimiothérapie.
Dans le cadre de la T2A de nombreux établissements s’orientent
vers
une
plus
grande
professionnalisation
du
codage.
Le
CH
départemental de La Roche-sur-Yon-Luçon-Montaigu procède ainsi à des
reprises de codage des actes et des diagnostics en ciblant les séjours qui
paraissent peu valorisés. Le codage centralisé des diagnostics (celui des
actes restant aux services techniques) pourrait y être prochainement
instauré, sur le modèle de ce qui se fait au CH d’Epinal.
La réalisation du codage par le DIM risque cependant de
l’empêcher de se consacrer à ce qui constitue le coeur de sa mission : le
contrôle de la qualité des données et leur exploitation.
La plupart des établissements ne sont pas en mesure d’apprécier
l’exhaustivité du codage et le temps nécessaire pour atteindre un taux de
100 %. Le retard dans la codification apparaît comme un sujet tabou. Très
peu d’informations sont délivrées au sein des réunions de gestion
associant les directeurs financiers et le DIM, voire les directeurs. Les
établissements préfèrent se retrancher derrière un taux d’exhaustivité (des
données) proche de 100 %, obtenu parfois quelque trois mois après l’acte
ou le soin pratiqué. Le délai moyen nécessaire pour atteindre 100 %
d’exhaustivité varie en effet entre un mois (CHU de Tours, CH de
Charleville-Mézières, CHR Metz-Thionville, CH Pont-à-Mousson, CH
Beauvais, CH Epinal, CHU Reims) et un trimestre (CH Béthune).
E
–
L’utilisation du système d’information comme
outil de pilotage
1
–
Les tableaux de bord et leur utilisation
Le système d’information hospitalier devrait permettre à la
direction et aux responsables des services et des pôles d’avoir une
connaissance fiable et régulière de l’évolution de l’activité et des
ressources de l’établissement, par un rapprochement avec l’état des
dépenses réalisées, afin de pouvoir rectifier les éventuelles dérives. Ces
outils de pilotage sont rendus plus nécessaires encore par la tarification à
l’activité.
Or, tous les établissements contrôlés par les CRC ne disposaient
pas de tableaux de bord d’activité et financiers (CHR de Metz-Thionville,
CHS d’Alsace Nord).
318
C
OUR DES COMPTES
Par ailleurs, dans les établissements où ils existent, les tableaux de
bord ne sont que rarement exploités à des fins de pilotage. Généralement,
les établissements se contentent de les mettre à disposition des directions
et services concernés via l’intranet. Ainsi, au CH d’Epinal, ni le tableau
de bord contenant les indicateurs de production, ni les autres indicateurs
présentés de façon éparse, par exemple dans les rapports d’activité
administratif et médical des différents services, n’étaient, jusqu’à une
période
récente,
analysés
conjointement
par
la
direction,
les
professionnels des pôles et services et les cadres. Au CHD de la Roche-
sur-Yon, les tableaux de bord ne sont analysés en commun que dans les
services
volontairement
engagés
dans
une
démarche
de
contractualisation. De même, au CH de Cahors, les responsables
disposent d’informations pour piloter leur activité, mais aucune procédure
ne spécifie les modalités d’échange des données.
2
–
La comptabilité analytique
La plupart des établissements sont capables de valoriser les coûts
directs. S’agissant de la valorisation des coûts indirects en revanche, seuls
quatre établissements la réalisent dans des conditions satisfaisantes : le
CH d’Auxerre, le CH de Beauvais, le CH de Pontoise et le CHU de Nice,
même si, dans ce dernier cas, certaines charges ne sont ventilées qu'une
fois par an.
Enfin, seuls quelques établissements ont établi des comptes de
résultat analytique (CREA) par pôle : CHU de Nantes, CHU de Nice, CH
d’Auxerre, CH de Beauvais. D’autres le prévoient seulement pour 2008 :
c’est le cas du CHS Henri Ey et du CHU de Tours, qui devait mettre en
place des comptes de résultat par pôle pour l’ensemble des pôles à
compter du 1
er
trimestre 2008, sur les données comptables et d’activité de
l’exercice 2007.
Mais aucun des établissements contrôlés n’a établi d’EPRD par
pôle, et aucun n’est en mesure de connaître le coût par séjour
(comptabilité analytique par GHM) en raison, notamment, de l’absence
d’un circuit du médicament informatisé.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
319
II - Le pilotage national des systèmes d’information
hospitaliers
A
–
Une multiplicité d’acteurs insuffisamment
coordonnés
Le pilotage des systèmes d’information hospitaliers fait intervenir
un grand nombre d’organismes insuffisamment coordonnés.
La direction de l’hospitalisation et de l’offre de soins (DHOS) a
délégué le développement des systèmes d’information hospitalier à
plusieurs structures, et notamment au groupement pour la modernisation
du système d’information hospitalier (GMSIH)
343
, à la mission d’appui à
l’investissement hospitalier (MAINH) et à l’agence technique de
l’information sur l’hospitalisation (ATIH). Or, les missions de ces
organismes ont été insuffisamment précisées par le ministère en charge de
la santé. Le premier contrat d’objectifs et de moyens du GMSIH est en
voie de finalisation. L’intégration de ce GIP dans une future « agence de
l’efficience » (avec la MAINH et la MEAH) devrait permettre d’amplifier
l’appui aux ARH et aux établissements sur les choix techniques,
fonctionnels et les bonnes pratiques de développement informatique et de
déploiement des systèmes d’information médicaux.
Quant à la MAINH, initialement créée pour accompagner le
programme de rénovation du patrimoine hospitalier prévu dans le plan
Hôpital 2007, sa compétence a été étendue aux systèmes d’information
hospitaliers en juillet 2005. Son champ d’intervention a toutefois été
limité à l’accompagnement technique et méthodologique de programmes
nationaux et à la constitution et l’animation d’un réseau de chargés de
mission à compétence SI auprès des ARH. Ce n’est que dans un second
temps, de manière informelle, que la MAINH s’est vu confier un rôle
d’appui au pilotage des investissements SIH.
De son côté, la DHOS, au nom de l’autonomie des établissements
et dans un contexte où le SIH n’était pas une priorité nationale, a
considéré que la maîtrise d’ouvrage ne relevait pas de son ressort mais de
celui des établissements. A la suite du lancement de plusieurs chantiers
(DMP, T2A) et des critiques formulées par de nombreux rapports sur la
faiblesse du pilotage exercé par la DHOS, celle-ci s’est progressivement
réinvestie sur le sujet SIH. Au cours de l’année 2007, le bureau E3
(« Systèmes d’information hospitaliers et PMSI ») a ainsi récupéré la
343. Voir le rapport sur la sécurité sociale pour 2007, pp. 322 à 325.
320
C
OUR DES COMPTES
mission « déploiement » (animation et suivi des programmes nationaux),
qui incombait jusqu’alors au pôle SIH de la MAINH. Ce transfert s’est
toutefois effectué avec des moyens limités : 5 ETP en 2008.
Surtout, le positionnement de ce bureau par rapport aux autres
instances susceptibles de jouer un rôle de coordination, comme la mission
d’informatisation des systèmes de santé (MISS), n’a pas été clairement
défini. La MISS, désormais rattachée au secrétariat général du ministère
de la santé, est en effet censée coordonner la démarche d’informatisation
du système de santé afin notamment de garantir la cohérence des choix
stratégiques et techniques, mais n’a pas disposé, jusqu’à maintenant, de
l’autorité suffisante pour remplir sa mission
344
.
B
–
Une réforme nécessaire mais sans cesse reportée
1
–
La réorganisation des opérateurs
La nécessité de réduire le nombre d’opérateurs des systèmes
d’information en santé et de renforcer le pilotage par la tutelle a été
soulignée par de nombreux rapports, notamment par la Cour dans le
RALFSS 2007 (recommandation 35). Or, la réorganisation des opérateurs
et la redéfinition du pilotage n’ont toujours pas été engagées.
Un projet de fusion de la MAINH, de la MEAH, du GMSIH, de la
mission T2A et de l’ATIH, envisagé en 2007, n’a pas abouti. Le projet de
fusion entre la MAINH et la MEAH, intégré dans le PLFSS 2008, n’a pas
été conduit à terme. Le projet d’agence des systèmes d’information de
santé a été évoqué page 228.
L’incertitude
concernant
l’avenir
des
différents
opérateurs
contribue à affaiblir encore davantage le pilotage du SIH. Ainsi, la
MAINH, n’ayant aucune visibilité sur son avenir, a vu partir quatre de ses
cinq agents du pôle SIH au cours de l’année 2007. Or, si ses missions
dans le cadre du déploiement des programmes nationaux ont été reprises
par la DHOS, elle reste en charge du programme Hôpital 2012 (1,5 Md€
sur le seul volet des SIH).
2
–
La réforme du pilotage des systèmes d’information de santé
Plusieurs acteurs ont été chargés de redéfinir le cadre du pilotage
SIH, mais de manière non coordonnée et peu transparente. Un plan
stratégique des systèmes d’information de santé (PSISS) a été élaboré par
344. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007 p. 325 et suivantes. Cf.
supra p. 253 et suivantes.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
321
la MISS à l’été 2007. Ce projet, qui reste très général sur les questions
relatives au SIH, est soumis à la concertation depuis février 2008.
Dans le même temps, la mission de relance du DMP évoquée plus
haut au chapitre V a été constituée en décembre 2007 afin de traiter
l’organisation et la gouvernance du projet DMP ; la stratégie générale du
projet et l’architecture du DMP ; et l’organisation et la gouvernance des
systèmes d’information de santé, ce dernier axe recoupant directement
celui du PSISS.
C
–
Un accompagnement insuffisant des
établissements publics de santé
1
–
Une source de retards et de dysfonctionnements
Dans plusieurs établissements contrôlés par les CRC, des
difficultés importantes sont apparues lors de la mise en oeuvre de
nouveaux systèmes d’information ou de leur maintenance.
Le CH de Remiremont a rencontré des difficultés lors de la mise en
place de son nouveau système d’information, en cours de déploiement
depuis 2004. Ces difficultés ont notamment induit d’importants problèmes
de facturation. La qualité de l’assistance apportée par le fournisseur,
notamment aux services financiers, est perçue comme étant nettement
insuffisante.
De même, au CHU de Nice, le projet de système d’information
prévu dans le SDSI 2002-2006 a connu un démarrage difficile, avec la
défection du prestataire initialement retenu : bien que le CHU, pour établir
son choix, ait eu recours au centre national d’expertise hospitalière
(CNEH) et à un cabinet d’avocats, le déploiement du projet a rapidement
mis en évidence l’incapacité du groupement prestataire à tenir ses
engagements contractuels. L’établissement s’est alors décidé à acquérir un
autre logiciel, déployé à partir de 2004. Toutefois, le module facturation de
ce logiciel ne donne pas totalement satisfaction, du fait notamment de
délais de mise à jour par le prestataire, dans un environnement
réglementaire très évolutif.
Enfin, le CH d’Epinal n’a pas réussi à faire aboutir son projet de
refonte de son système d’information de production de soins. Le règlement
de consultation élaboré par une société de conseil comportait plusieurs
anomalies, ce qui a conduit à déclarer l’appel d’offres infructueux
en 2006. Aucune nouvelle procédure de consultation relative au même
objet n’a été lancée à ce jour.
Ces exemples montrent que les établissements auraient besoin
d’être davantage guidés dans le choix des éditeurs et des prestataires. De
même, il conviendrait d’aider les établissements à renforcer leurs
322
C
OUR DES COMPTES
compétences en matière d’achat afin qu’ils puissent mieux passer les
marchés de prestations en système d’information. Une telle démarche
devrait s’inscrire dans le cadre du développement de la mutualisation
entre établissements de santé.
2
–
L’insuffisance des aides pour choisir un éditeur et/ou un
produit
Les outils développés par la tutelle sont peu nombreux et
insuffisants par rapport aux attentes des établissements.
Le GMSIH a réalisé une base prestataires/produits destinée à
fournir aux établissements de santé un panorama des prestataires et des
solutions adaptées à leurs besoins dans le domaine des SIH. Cette base, si
elle a le mérite de fournir une information synthétique dans un secteur
marqué par la prolifération des prestataires (408 éditeurs référencés),
reste toutefois incomplète et difficilement exploitable. Les informations
très réduites figurant dans la base sont communiquées par les éditeurs et
ne sont pas certifiées.
Par ailleurs, le GMSIH a réalisé des analyses des offres du marché,
mais ces travaux restent rares
345
, volumineux et prudents quant au juge-
ment porté sur le produit et l’éditeur. La dimension du prix n’est
pratiquement pas abordée. De son côté, la MAINH a réalisé, dans le cadre
du programme urgences, un outil d’aide à la décision pour choisir un
logiciel d’informatisation des urgences. Il s’agit cependant d’une
intervention isolée. En outre, la programmation de cette étude n’est pas
satisfaisante : elle a été réalisée à l’automne 2007, alors que le
programme d’informatisation des urgences touchait à sa fin.
3
–
L’insuffisance des référentiels et des cahiers des charges
Les référentiels et les études du GMSIH sont dans l’ensemble très
approfondis, souvent volumineux et d’un niveau technique élevé, ce qui
les rend difficilement abordables pour certaines directions et équipes
informatiques des établissements, notamment de petite taille. Il
conviendrait par conséquent de faciliter l’appropriation de ces référentiels
par tous les établissements de santé.
345. Analyse de l’offre du marché concernant les logiciels de gestion du temps (RTT)
(décembre 2001), analyse comparative des offres du marché de SI destinées aux
établissements de santé sous OQN (juin 2004), analyse du marché des progiciels de
gestion intégrés (PGI) et modalités d’application dans les établissements de santé
(janvier 2005), systèmes d’information décisionnels dans les établissements de santé :
analyse de l’offre éditeur au 31/07/2007 (août 2007).
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
323
Par ailleurs, le nombre de référentiels réalisés par le GMSIH est
relativement faible par rapport à ses autres travaux et ne couvre qu’un
champ limité des besoins des établissements.
Surtout, ils ne sont pas opposables aux établissements de santé et
aux éditeurs. De fait, les référentiels produits dans le domaine des SIH ne
sont pas appliqués : les établissements de santé et les éditeurs ne les
connaissent pas forcément et/ou ne sont pas en mesure de les décliner au
niveau local.
A l’exception de l’informatisation des urgences, aucun cahier des
charges national n’a été défini, ce qui pénalise les petits établissements,
peu dotés en personnel qualifié, et constitue un risque en matière
d’interopérabilité. Il conviendrait, chaque fois que cela est possible, de
définir des cahiers des charges nationaux.
D’ailleurs, le projet de contrat d’objectif et de moyens du GMSIH,
déjà évoqué, fixe au GIP différents objectifs notamment en matière
d’analyse et d’évaluation de l’offre industrielle et d’adaptation des
référentiels aux différentes catégories d’établissements.
4
–
Une coopération à développer au niveau local
La mutualisation entre les établissements de santé doit être
recherchée. Elle pourrait, au niveau de la maîtrise d’oeuvre, être envisagée
dans le cadre d’une meilleure utilisation des possibilités ouvertes par le
code des marchés publics, notamment en ce qui concerne les groupements
de commandes.
Quant aux structures régionales d’informatique hospitalière
(SRIH), qui exercent aujourd’hui à la fois des activités de coopération et
des activités commerciales (édition et diffusion de logiciels, conseil), il
conviendrait que leur mission soit précisée et que les modalités d’exercice
de leurs activités soient encadrées, de manière à garantir le respect du
droit de la concurrence.
324
C
OUR DES COMPTES
III - L’appui régional aux projets des
établissements en matière de systèmes
d’information hospitaliers
A
–
Une mobilisation inégale des agences régionales de
l’hospitalisation
Les agences régionales de l’hospitalisation (ARH) fournissent un
appui financier et méthodologique aux projets de développement des
systèmes d’information des établissements de santé. Les ARH disposent
du réseau des chargés de mission régionaux SIH de la MAINH. Ces
chargés de mission, placés auprès du directeur de l’ARH, doivent assurer
le déploiement des plans nationaux (DMP, urgences, tarification à
l’activité).
Les tableaux de bord de la MAINH relatifs au degré d’avancement
des programmes nationaux montrent cependant que les régions sont
inégalement mobilisées sur ces dossiers et que les chargés de mission ne
sont pas tous enclins à assurer la remontée d’informations.
Dans certaines régions, les chargés de mission SIH, à la demande
du directeur de l’ARH, se sont mobilisés sur le développement de projets
régionaux, comme les plateformes régionales d’interopérabilité.
Il reste que les ARH disposent rarement d’une vision générale des
systèmes d’information des établissements de leur région. Quelques ARH
ont fait réaliser par un prestataire un état des lieux des systèmes
d’information hospitaliers (ARH Pays de la Loire) ou réalisé elles-mêmes
cet état des lieux (Rhône-Alpes sur le dossier patient). Ces initiatives
demeurent toutefois ponctuelles et minoritaires.
B
–
La mise en oeuvre des plans nationaux : l’exemple
de l’informatisation des urgences
Le
plan
urgences
comprenait
deux
volets
relatifs
à
l’informatisation des services d’urgence.
La mesure 15 prévoyait la mise en place d’un dispositif national de
veille et d’alerte sanitaire, sous la forme d’indicateurs d’activité
disponibles à partir des services d’urgence. Les objectifs chiffrés associés
étaient au nombre de trois : 85 % des passages aux urgences informatisés
fin 2007 ; 100 % des passages aux urgences des CHU informatisés fin
2007; et 100 % des sièges de SAMU informatisés en 2008.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
325
Ces objectifs n’ont pas été atteints. Un état des lieux réalisé par la
MAINH en 2007 montrait que seuls 66 % des passages aux urgences
étaient informatisés, ce taux atteignant 71 % dans les CHU. Au-delà de ce
retard, la Cour note un manque de préparation de ce programme national :
l’urgence du calendrier a conduit les établissements et les éditeurs, en
l’absence d’un cahier des charges suffisamment normalisé, à déployer des
applications non interopérables avec le reste du système d’information
patient. Par ailleurs, ce n’est que tardivement que la MAINH a pu
transmettre aux établissements une analyse de l’offre éditeurs.
La mesure 16 du plan Urgences visait à mettre progressivement en
place un système d’information territorial complet sur les urgences
articulant péri-hospitalier, pré-hospitalier et intra-hospitalier. L’objectif
de cette mesure était d’assurer l’intégrité et la continuité de la chaîne
d’information, et de faciliter le travail des acteurs de terrain.
Dans le cadre de cette mesure, un appel à projets doté d’une
enveloppe reconductible de 1,5 M€ a été lancé en 2005 auprès des
régions. Cette enveloppe a permis de financer 12 projets, qui ont fait
l’objet d’un retour d’expérience dans le cadre d’une « étude sur les
échanges entre structures d’urgence : nomenclatures et normes ». Cette
étude souligne que les principales difficultés rencontrées sont l’absence
de sémantique partagée (normes et nomenclatures) ainsi qu’un besoin
d’appui national sur les chantiers techniques
346
. Aucun plan d’actions n’a
toutefois été mis en oeuvre pour faire suite à ces recommandations.
C
–
Le développement des plateformes régionales
d’interopérabilité
Afin de faciliter le partage d’informations médicales entre les
acteurs de la santé, plusieurs ARH ont pris l’initiative de soutenir le
développement de plateformes régionales d’interopérabilité.
Mais en l’absence d’un cadre de référence commun, il existe autant
de projets que de régions. Les structures portant ces projets sont de nature
très diverse : groupement de coopération sanitaire, groupement d’intérêt
public, établissement public de santé… Dans certaines régions, les projets
de plateformes régionales, lancés depuis plusieurs années, ont déjà
conduit au développement de plateformes opérationnelles, tandis que
346. Plusieurs chantiers sont évoqués : cahier des charges du répertoire opérationnel
des ressources (ROR), suivi des travaux sur les annuaires, réflexion sur la mise à
disposition des SAMU d’une base cartographique, besoin de rationaliser et mutualiser
les cahiers des charges de renouvellement des autocoms.
326
C
OUR DES COMPTES
d’autres régions en sont au stade du lancement de projet. Aucun acteur ne
dispose d’une vue d’ensemble sur ces projets.
Afin
d’éviter
le
développement
de
solutions
régionales
incompatibles, il serait nécessaire de définir au niveau national
l’urbanisation du système d’information de santé. Début janvier 2008, à
la demande du comité de pilotage stratégique des systèmes d’information,
la DHOS et la MISS ont confié au GMSIH et au GIP DMP la réalisation
d’une étude commune devant apporter à l’Etat et à l’assurance maladie
« des éléments leur permettant d’apprécier, dans un état des lieux,
l’ampleur et la portée du développement de ces plates formes de service ;
de connaître la typologie des services qu’elles assurent ainsi que les
divers choix techniques retenus ; d’en mesurer les apports pour les
professionnels de santé ; et d’apprécier la nécessité de faire définir un
cadre de référence pour la mise en oeuvre et le développement de ces
plateformes ». Cette étude devait être remise pour fin mars 2008.
Si cette initiative va dans le bon sens, en dépit de son caractère très
tardif, il convient de souligner que, dans l’intervalle, les ARH, dans le
cadre d’Hôpital 2012, font remonter des demandes de financement
relatives à des projets de plateforme régionale. Ces projets vont donc
continuer à se développer avant qu’un cadre de référence soit défini. Il
conviendrait par conséquent de reporter l’attribution des financements
Hôpital 2012 pour ces projets, dans l’attente de ces travaux nationaux.
D
–
Les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens
Institués par les ordonnances d’avril 1996, les contrats d’objectifs
et de moyens (COM) signés entre les établissements et les ARH, auxquels
ont succédé en 2007 les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens
(CPOM), constituent un instrument de pilotage essentiel pour les
établissements hospitaliers.
Pourtant, le volet SIH n’était que rarement intégré dans les COM
« ancienne génération ». Lorsque le SIH était mentionné, c’était
principalement sous forme d’avenants se limitant à énoncer les moyens
financiers accordés par l’ARH pour financer un projet, dont les modalités
de mise en oeuvre n’étaient pas détaillées. Par ailleurs, certains
établissements ne disposaient même pas de COM.
A la différence des précédents COM, les CPOM mentionnent
désormais systématiquement le SIH. Toutefois, les objectifs assignés aux
établissements dans ces contrats sont généralement peu précis et les
moyens financiers correspondants ne sont pas précisés. En particulier, il
n’existe pas d’articulation systématique entre le CPOM et Hôpital 2012 ni
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
327
entre le CPOM et le schéma directeur des systèmes d’information de
l’établissement.
IV - Le financement du système d’information
hospitalier
A
–
Un financement mal connu
1
–
Le budget consacré au système d’information dans les
établissements
La part du budget des établissements de santé consacrée au
système d’information est souvent estimée à 1,5 %. Le plan Hôpital 2012
devait permettre de doubler ce chiffre.
En réalité, faute d’outil de suivi et de pilotage dans ce domaine, il
n’existe pas de source d’information fiable s’agissant du budget SIH des
établissements de santé. Les données des enquêtes disponibles (GMSIH,
collège des DSIO…), sont partielles et/ou ne portent que sur un
échantillon restreint d’établissements. Les quelques outils de suivi
disponibles au niveau national ont été élaborés selon des méthodologies
différentes et ne donnent pas nécessairement des résultats comparables.
Ainsi, le retraitement comptable et la base d’Angers ne reposent-ils pas
sur les mêmes règles de répartition des charges.
Outre l’absence de remontée d’information sur ce sujet, une
difficulté supplémentaire provient du fait que les affectations des
dépenses sur les comptes budgétaires diffèrent d’un établissement à
l’autre. Par exemple, certains établissements ne dissocient pas les
amortissements
matériels
et
logiciels.
Les
dépenses
de
télécommunications et de ressources humaines (services informatiques)
ne sont pas traitées de la même façon par tous les établissements.
Depuis fin 2006, la DHOS a engagé une réflexion sur les règles
d’imputation budgétaire des dépenses du système d’information. Il est
nécessaire que ce travail aboutisse rapidement, dans le contexte d’un
important soutien financier apporté au titre du plan Hôpital 2012
347
.
347. Des modifications du plan comptable permettant de mieux tracer les dépenses
afférentes à ces activités devraient être mises en oeuvre à compter du 1
er
janvier 2009.
328
C
OUR DES COMPTES
2
–
Les financements affectés au développement des systèmes
d’information
Plusieurs sources de financement ont eu pour objet d’aider les
établissements de santé à financer des projets dans le domaine SIH : des
financements versés par les ARH dans le cadre d’Hôpital 2007, le plan
urgences, une enveloppe ONDAM spécifique en 2006, enfin Hôpital
2012.
Ni la tutelle nationale, ni les ARH ne disposent d’une vision
synthétique des financements accordés à l’ensemble des établissements
de santé pour les systèmes d’information. A fortiori, nul n’est en mesure
de connaître le montant global des aides dont a pu bénéficier chaque
établissement, ni quels sont les éditeurs et les applicatifs qui ont bénéficié
de ces financements.
3
–
Les financements ciblés par projet
Plusieurs aides ciblées ont été octroyées aux établissements de
santé afin de les aider à développer leur système d’information dans le
cadre des projets DMP, urgences et tarification à l’activité. Mais
l’utilisation de ces aides n’a pas non plus fait l’objet d’un suivi rigoureux.
En 2006, une dotation d’environ 30 M€ a été allouée aux ARH afin
de leur permettre de soutenir l’investissement nécessaire à l’adaptation
des systèmes d’information des hôpitaux pour la mise en oeuvre de la
tarification à l’activité et du dossier médical personnel
348
. Au final,
922 projets ont été financés pour un montant total de 25,36 M€. En
réalité, les crédits n’ont pas été toujours employés conformément à leur
objet. Par ailleurs, le ministère, la CNAMTS et le GIP DMP ne tiennent
aucun tableau de bord pour recenser ces financements ONDAM, et ne
rassemblent aucune évaluation de leur usage effectif.
Plus marginalement, le GIP DMP a affecté des crédits dans le
domaine des SIH (ses interventions sont évoquées au chapitre VII).
Enfin, dans le cadre du plan Urgences, un budget spécifique et
reconductible de 4,2 M€ en 2004 a été affecté à l’informatisation des
urgences. Une partie de ces crédits (2,7 M€) a été attribuée aux régions
sur la base d’une répartition forfaitaire, en fonction de l’activité régionale
des urgences. La DHOS, la MAINH et les ARH ne disposent pas, là
encore, d’un suivi de l’utilisation de ces financements.
348 . Circulaire DHOS/F2/DSS/1A n° 2006-81 du 24 février 2006 relative à la
campagne tarifaire 2006 des établissements de santé.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
329
B
–
Les enveloppes généralistes
1
–
Hôpital 2007
Initialement destiné à financer des opérations immobilières, le plan
Hôpital 2007, doté de 6 Md€, a finalement été étendu au SIH, mais de
manière marginale : l’enveloppe consacrée aux projets SIH pouvait
représenter 3 à 5 % de l’enveloppe régionale, mais il n’existait pas
d’enveloppe dédiée au SIH.
Aucun cadre de référence n’a été défini pour préciser les critères
de choix des projets, les priorités fonctionnelles, la stratégie de
financement, la place « réservée » aux logiques de coopération. Dans ces
conditions, les crédits ont été octroyés sur la base du « premier arrivé
premier servi » et dans une logique de saupoudrage amplifié par la
procédure choisie d’appel à projets. Au total, 503 opérations ont obtenu
un financement dans le cadre d’Hôpital 2007.
Le total des aides accordées entre 2003 et 2007 pour financer ces
opérations a représenté 155,76 M€ (44,90 M€ sous forme de subventions
en capital versées par le fonds de modernisation des établissements de
santé
publics
et
privés
et
110,86 M€
sous
formes
d’aide
au
fonctionnement versées dans le cadre l’ONDAM). A cette somme, il faut
ajouter le reliquat des crédits initialement dédiés à l’investissement
immobilier mais non utilisés en 2005 et 2006 et qui a été reporté en 2007
sur les opérations relatives au système d’information. Le montant
prévisionnel de ce reliquat était estimé à 8,5 M€ (4,9 M€ FEMSPP,
3,6 M€ ONDAM). La MAINH ne dispose pas du bilan de ce qui a été
effectivement versé par les ARH.
Par ailleurs, les crédits d’Hôpital 2007 ont été alloués entre 2003 et
2006 sans que le suivi des projets ne soit organisé au niveau des régions
ni qu’aucun bilan financier de l’utilisation de ces crédits soit réalisé. Un
premier bilan a été dressé ex post en 2006, mais il est resté très incomplet.
Toutefois, le bilan global de plan Hôpital 2007, inscrit au programme
2008 de la MAINH, est en cours de réalisation.
2
–
Hôpital 2012
Le
plan
Hôpital
2012,
doté
d’un
budget
de
10 Md€
d’investissements,
doit
permettre
de
financer
la
recomposition
hospitalière dans le cadre des territoires de santé ; de mettre à niveau des
SIH ; et d’assurer une mise aux normes exceptionnelle de sécurité. La
part des crédits consacrés au SIH représente 15 % de l’enveloppe globale,
330
C
OUR DES COMPTES
soit 1,5 Md€. Une première tranche (0,5 Md€) doit être attribuée en 2008,
la seconde (1 Md€) en 2009.
Par rapport à Hôpital 2007, des progrès ont été réalisés : des
enveloppes régionales ont été dédiées au SIH, des priorités fonctionnelles
et des critères d’éligibilité des projets ont été définis, un dossier type a été
fourni aux ARH, des modalités d’instruction ont été précisées.
Pour autant, compte-tenu du montant considérable de l’enveloppe
SIH d’Hôpital 2012, ces améliorations restent insuffisantes : les outils
d’aide à la décision ont été fournis aux établissements et aux ARH trop
tardivement pour permettre le respect du calendrier prévu dans de bonnes
conditions. De même, les modalités d’instruction et de validation des
dossiers au niveau national n’ont été fixées que début 2008
349
.
Au total, le calendrier défini pour l’octroi des crédits apparaît
beaucoup trop resserré compte-tenu de la volonté légitime exprimée par
les acteurs de ne pas reproduire les erreurs d’Hôpital 2007. Il serait par
conséquent opportun de revenir sur la décision qui a été prise de dépenser
un tiers de l’enveloppe SIH lors de la première tranche, soit 500 M€ pour
2008.
Ce
report
permettrait
d’améliorer
l’accompagnement
des
établissements de santé dans le montage de leurs projets et de limiter les
risques
d’une
mauvaise
utilisation
des
crédits.
En
effet,
les
établissements, qui n’ont que rarement les moyens humains nécessaires
pour accompagner les projets, n’ont pas toujours été en mesure de
présenter des projets aboutis. Par ailleurs, le montant important des aides
susceptibles d’être accordées risque d’inciter les éditeurs et les
prestataires à gonfler leur prix. Or, la connaissance par la tutelle régionale
et nationale des prix du marché est pour le moment très limitée. Enfin, les
éditeurs risquent de ne pas être en mesure de répondre à l’afflux des
commandes générées par Hôpital 2012.
349. Trois fenêtres de dépôt de dossiers ont été ouvertes pour la première tranche du
programme en 2008 et la phase de validation nationale des premiers dossiers a débuté
en mars 2008.
LES SYSTEMES D
’
INFORMATION
DANS LES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTE
331
________________________
SYNTHESE
_________________________
Les contrôles réalisés dans les établissements de santé en 2007
soulignent l’inégale mobilisation des équipes de direction dans le
pilotage et le suivi de la politique de développement du système
d’information hospitalier. La couverture fonctionnelle des établissements
reste très insatisfaisante en ce qui concerne le dossier du patient, en
raison notamment de l’absence de dossier médical informatisé unique, et
de l’absence d’articulation entre ce dossier médical, le dossier de soins
infirmiers et la prescription informatisée du médicament.
Les lacunes du système d’information hospitalier sont en grande
partie dues à la faiblesse du pilotage exercé par la tutelle. La volonté de
préserver
l’autonomie
des
établissements
et
l’éclatement
des
responsabilités entre plusieurs structures et opérateurs ont empêché de
développer une véritable politique d’accompagnement des établissements
de santé. Or, ces derniers disposent rarement des compétences et des
moyens suffisants pour pouvoir conduire isolément leurs projets de
développement SIH. Quant à l’appui apporté par les ARH, il est très
inégal selon les régions.
Dans ce contexte, l’appui financier apporté par la tutelle,
notamment dans le cadre d’Hôpital 2012, risque d’être mal employé. Le
calendrier, trop resserré, risque de conduire à ce que soient retenus des
projets insuffisamment préparés.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
41.
Redéfinir le rôle respectif des structures responsables du pilotage
des systèmes d’information hospitaliers.
42.
Assurer un suivi des dépenses réalisées par les établissements dans
le domaine des systèmes d’information.
43.
Elaborer un cadre de référence pour le développement des
plateformes régionales d’interopérabilité.
44.
Redéfinir un calendrier de financement du plan Hôpital 2012
compatible avec les délais d’élaboration de dossiers pertinents.
333
Chapitre X
Les aides à la garde des jeunes enfants
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
335
_____________________
PRESENTATION
_______________________
La branche famille a consacré en 2007 près de 13 Md€ aux aides à
la petite enfance, (10,9 Md€ de prestations soit 28 % du montant total des
prestations légales attribuées et 1,9 Md€ de dépenses d’action sociale). La
prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) constitue désormais la quasi
totalité de cette dépense. Créée par l’article 60 de la loi de financement de
la sécurité sociale pour 2004 en remplacement de différentes prestations
existantes
350
, la PAJE voulait répondre à deux objectifs :
-
simplifier le dispositif d’aide à la garde des jeunes enfants grâce à
une prestation unique et à un allègement de la gestion ;
-
permettre aux parents de choisir librement de garder eux-mêmes leur
enfant ou de le confier à des tiers en diminuant leurs contraintes
financières.
La montée en charge de la PAJE est intervenue dans un contexte de
hausse de la natalité. Déjà perceptible depuis 2000, celle-ci s’est encore
accrue depuis 2003 pour atteindre 816 500 naissances en 2007, chiffre
jamais égalé depuis 25 ans à l’exception de l’année 2006.
Quatre ans après l’engagement de cette réforme
351
, la Cour a voulu
vérifier dans quelle mesure et à quel coût les objectifs précités de
simplification et de libre choix tant d’activité des parents que de mode de
garde des enfants ont été atteints. Rétrospectifs, les constats qui suivent
devraient également permettre de nourrir les réflexions en cours en vue de
la mise en place maîtrisée d’un éventuel « droit de garde opposable ».
I - Un dispositif peu simplifié
A
–
Une prestation à multiples facettes
La PAJE est une prestation globale qui comporte un socle de base
et des compléments. Le socle est composé d’une prime de naissance
(855,25 €
352
) ou d’adoption (1 710,49 €) et d’une allocation de base
(171,06 €) versée mensuellement de la naissance de l’enfant à ses trois
ans. Ces trois allocations sont versées sous conditions de ressources.
350. Désormais codifiée aux articles L531-1 et suivants du code de la sécurité sociale.
351. Evoquée dans le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2007, p. 55 et
suivantes.
352. Tous les montants indiqués sont ceux en vigueur au 1
er
juillet 2007.
336
C
OUR DES COMPTES
Peuvent s’y ajouter plusieurs compléments accordés en fonction du mode
de garde choisi par la famille :
-
le complément mode de garde (CMG) « assistante maternelle » versé
aux parents d’enfants âgés de 0 à 6 ans faisant garder leur enfant par
une assistante maternelle (de 160 € à 375 € mensuels selon les revenus
pour la garde d’enfants jusqu’à trois ans et moitié moins au delà de cet
âge, montant auquel s’ajoute la prise en charge de la totalité des
cotisations sociales) ;
-
le CMG « garde à domicile », versé aux parents d’enfants âgés de 0 à
6 ans faisant garder leur enfant à domicile par une personne rémunérée,
dont ils sont employeurs directs (de 160 € à 375 € mensuels selon les
revenus pour la garde d’enfants jusqu’à 3 ans et moitié moins au delà
de cet âge, montant auquel s’ajoute la prise en charge de la moitié des
cotisations sociales plafonnée) ;
-
le CMG « structure », allocation forfaitaire versée lorsque les parents
recourent à une entreprise ou à une association prestataire de service
qui met à leur disposition une garde à domicile (montant de
l’allocation variant de 567 € à 784 € selon les revenus) ou une
assistante maternelle agréée (de 432 € à 648 €) ;
-
le complément de libre choix d’activité (CLCA) pour les parents qui
ont arrêté ou réduit leur activité professionnelle pour élever leur enfant
de moins de trois ans. Le CLCA peut être versé dès le premier enfant
sans condition de ressources, mais dans ce cas il est versé pour une
durée maximale de six mois. Le montant du CLCA, pour les parents ne
percevant pas l’allocation de base, est de 530 € mensuels pour le
CLCA taux plein, versé en cas d’arrêt total de l’activité professionnelle
et de montants moindre en cas de travail à temps partiel. Pour les
parents percevant l’allocation de base, le montant du CLCA est réduit
du montant de cette allocation ;
-
le complément optionnel de libre choix d’activité (COLCA) mis en
place le 1
er
juillet 2006 pour les familles de trois enfants : son montant
est plus élevé que le CLCA (759 € pour les parents ne percevant pas
l’allocation de base, 588 € avec allocation de base) mais il est versé sur
une période plus courte. Il est servi sans condition de ressources à l’un
des parents d’au moins trois enfants qui cesse totalement son activité
jusqu’au mois précédant le premier anniversaire de l’enfant ou de
l’adoption. Ce choix est irréversible.
La PAJE n’est donc pas une prestation unique mais une appellation
qui regroupe des prestations de même nature que celles existant
précédemment. Sa création s’est accompagnée d’une évolution des
conditions d’ouverture des droits et d’une revalorisation du montant des
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
337
prestations servies afin de permettre aux familles de choisir plus
librement le mode de garde de leur enfant.
Améliorations induites par la PAJE
Prestations PAJE
Anciennes prestations
Principales différences
Allocation
d’adoption/
naissance
Allocation de base
Allocation d’adoption
(AAD)
Allocation pour jeune
enfant (APJE)
Plafond de ressources relevé de 37 % par rapport à
APJE.
Prime de naissance versée en une seule fois au
7
ème
mois de grossesse.
Suppression de la mécanique différentielle de l’APJE.
CMG-AM
Aide à la famille pour
l’emploi d’une
assistante maternelle
agréée (AFEAMA)
Plafonds de ressources et montants versés fortement
augmentés par rapport à l’AFEAMA : ainsi le plafond
de la première tranche passe de 17 593 € par an à
19 225 €. Le montant versé au dessous de ce seuil
passe de 109,34 € à 374,75 € par mois. Dans les deux
cas il y a prise en charge des cotisations sociales.
CMG- garde à
domicile
Allocation de garde
d’enfant à domicile
(AGED)
Versement d’une aide aux familles comme pour le
CMG-
AM en plus de la prise en charge, comme par
l'AGED, d’une partie des cotisations sociale mais de
façon plus avantageuse
CLCA
COLCA
Allocation parentale
d’éducation (APE)
Comme pour l’APE, pas de condition de ressources.
Contrairement à l’APE, peut être versé dès le premier
enfant (si le parent a travaillé au moins 2 ans dans les
2 années précédentes).
A partir du 2eme enfant, les conditions d’activité
préalables sont plus restrictives que pour l’APE.
Revalorisation du CLCA versé dans le cadre d’un
travail à temps partiel : en cas de travail à 50%, le
versement mensuel passe de 350,92€ pour l’APE à
403,56 € (+15 %) pour la PAJE
Source :
CNAF
La revalorisation du CMG « assistante maternelle » par rapport à
l’AFEAMA, l’augmentation du plafond de ressources pour l’allocation de
base et la prime de naissance/adoption, l’ouverture du CLCA aux parents
d’un premier enfant expliquent en partie la forte augmentation du nombre
des familles bénéficiaires des prestations de la PAJE. L’augmentation de
la natalité y a également contribué, comme le montre le tableau qui suit.
338
C
OUR DES COMPTES
Evolution du nombre de familles bénéficiaires des prestations petite
enfance
2003
2006
Taux de croissance
Prestations d’entretien
- allocation pour jeune enfant
-allocation de base
1 363 000
1 890 072
Compensation pour perte de
ressources
563 000
612 537
+ 10 %
Aide à la garde d’enfants par
assistante maternelle
629 000
743 042
+ 18 %
Aide à la garde d’enfants par
garde à domicile
53 000
58 455
+ 10 %
CMG « structure » *
-
1 352
P.M.
NB : ces chiffres intègrent l’ensemble des enfants de 0 à 6 ans.
*versé à des entreprises ou à des associations.
Source :
CNAF
Conséquence de ces évolutions, le montant des prestations petite
enfance (PAJE et prestations antérieures) est passé de 8,1 Md€ en 2003 à
10,4 Md€ en 2006 et à environ 11 Md€ en 2007.
Montants des prestations petite enfance (tous régimes)
M€
2003
2006
Prestations
Montant versé
Prestations
Montant versé
Allocation d’adoption
4,1
Allocation d’adoption
0,1
APJE
2 815,6
Prime adoption
5,4
APJE
287,9
Prime naissance
614,4
Allocation base
3 445,7
Sous-total
2 819,7
Sous-total
4 353,5
APE
3 033,6
APE
442,1
CLCA
1 974,3
COLCA
0,8
Sous-total
3 033,6
Sous-total
2 417,2
AFEAMA
2 168,1
AFEAMA
838,3
CMG AM
2 623,2
Sous-total
2 168,1
Sous-total
3 461,5
AGED
113,3
AGED
54,4
CMG garde domicile
153,9
Sous-total
113,3
Sous-total
208,3
TOTAL
8 134,8
TOTAL
10 440,6
Source :
Cour des comptes d’après données CNAF
A ces chiffres il convient de rajouter environ 2,6 Md€ en 2007
correspondant à la prise en charge par la branche famille des cotisations
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
339
retraites des parents bénéficiaires d’une allocation de compensation de
perte de ressources (assurance vieillesse des parents au foyer, AVPF)
353
.
B
–
Une réglementation qui reste complexe
1
–
L’impact de la création de la PAJE sur la branche famille
Bien que les différents types de prestations de l’ancienne gamme
soient désormais regroupés sous la dénomination enveloppante de PAJE,
chacune continue d’être régie par ses règles propres, souvent plus
complexes que les règles applicables aux prestations antérieures.
La réforme de la PAJE a fait l’objet d’une préparation en amont
entre l’Etat et la CNAF qui a permis d’adapter à temps la gestion et les
outils informatiques des CAF. Cette démarche partenariale n’a toutefois
pas été étendue à l’ensemble des autres acteurs concernés, comme les
professionnels de la petite enfance au plan local, ce qui aurait permis
d’identifier avant sa mise en place certaines lacunes du dispositif. En tout
état de cause, les règles relatives aux conditions d’accès aux prestations,
au calcul des droits, aux règles de saisie des salaires versés aux assistantes
maternelles et à la fin des versements restent difficiles à assimiler aussi
bien pour les usagers que pour les techniciens conseils des CAF qui ont
dû, au départ, assimiler une circulaire de 90 pages.
Début 2004, la CNAF a cherché à chiffrer l’impact de la création
de la PAJE sur ses coûts de gestion. Elle a évalué à 4,71 M€ les surcoûts
ponctuels liés à la mise en oeuvre de la réforme. En contrepartie, elle a
estimé que les coûts de gestion de la PAJE seraient réduits de 6,38 M€
par an par rapport à ceux des aides antérieures. Cette analyse ex ante est
restée partielle : en particulier, elle n’a pas inclus les investissements
réalisés dans le cadre de PAJE Emploi. Surtout, il n’a pas été procédé à
un bilan ex post. La diminution annoncée des coûts de gestion, qui devait
se traduire par une réduction importante des charges directes des
personnels, n’est pas mesurée.
2
–
La perception de la PAJE par ses bénéficiaires
Des simplifications réelles sont intervenues dans la liquidation et le
paiement des prestations. Les formalités administratives liées au paiement
des assistantes maternelles et des gardes à domicile ont été allégées avec
la mise en place du service « PAJE Emploi » au sein du réseau des
353. La branche famille verse les cotisations à la branche vieillesse pour le compte
des parents percevant l’APE, le COLCA ou le CLCA.
340
C
OUR DES COMPTES
URSSAF. Le nombre de « télé déclarants» est passé de 13 000 en 2004 à
61 500 en 2006, sur un total de bénéficiaires du CMG d’environ 460 000.
Le pourcentage de déclarations de volets sociaux par internet est passé de
12 % dans les premiers mois de 2004 à 70 % en septembre 2007. Les
éléments de paie sont ainsi traités par l’URSSAF, les CAF se concentrant
sur les aides.
A la demande de la CNAF
et en liaison avec la DREES, une
enquête téléphonique a été faite par le CREDOC auprès de 3 000
bénéficiaires de la PAJE en septembre et octobre 2005. Il ressort des
réponses que si la PAJE est considérée comme plus simple pour
beaucoup, pour 21 % «c’est plus compliqué ». D’après l’analyse faite par
la CNAF, ce sont principalement les bénéficiaires du CLCA qui trouvent
cette prestation plus complexe que l’APE.
II - Un dispositif plus coûteux que prévu
A
–
Un surcoût minoré
Le PLFSS 2004 chiffrait le surcoût de la PAJE par rapport aux
prestations antérieures à 800 M€ au terme de la montée en charge du
dispositif. La CNAF, de son côté, prévoyait à cette époque une dépense
supplémentaire à terme un peu plus élevée, comprise entre 1,2 Md€ et
900 M€, ce deuxième chiffre étant obtenu en faisant l’hypothèse que le
resserrement des conditions d’activité antérieures requises pour bénéficier
du CLCA allait réduire le nombre de bénéficiaires, engendrant ainsi une
économie de 150 M€
354
.
La CNAF estime désormais le surcoût de la PAJE par rapport aux
anciennes prestations à 1,77 Md€ pour 2007 et à 2,021 Md€ en 2009 à
l’issue de sa montée en charge (en euros constants c’est-à-dire hors effet
de revalorisation des barèmes, donc à SMIC et à base mensuelle des
allocations familiales -BMAF- constants).
354. Chiffre DREES utilisé par la CNAF.
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
341
Surcoût estimé de la PAJE par rapport aux prestations antérieures
(données tous régimes : BMAF et SMIC 2003)
En M€ constants
2005
2006
2007
2008*
2009*
PAJE Prime, allocation de base,
CLCA, APJE, APE, allocation
d’adoption
380
578
668
720
720
Dont COLCA
1
15
16
16
CMG assistantes maternelles,
AFEAMA
393
808
1 009
1 138
1 168
CMG garde à domicile, AGED
43
82
93
121
133
Surcoût total
816
1 468
1 770
1 979
2 021
Dont coût différentiel hors COLCA
1 468
1 755
1 963
2 004
*Prévisions
Source :
CNAF
Près des deux tiers de ce surcoût concernent les prestations de
garde (CMG assistante maternelle et CMG garde à domicile).
B
–
Des prévisions mal fondées
L’écart entre les prévisions financières de 2007 (2 021 M€ à l’issue
de la montée en charge, en 2009) et celles annoncées en 2003 par le
PLFSS (800 M€) s’explique notamment par le défaut de réalisme des
évaluations initiales :
-
le nombre de familles bénéficiaires de la prime de naissance/adoption
et de l’allocation de base a été sous-estimé. Compte tenu de la
revalorisation de 37 % du plafond de ressources pour l’allocation de
base,
le PLFSS
estimait
à
200 000
le
nombre
de
familles
supplémentaires bénéficiaires de l’allocation de base. Il a été en réalité
de 285 000
355
, soit un surcoût de 250 M€ ;
-
les effets de la restriction des conditions d’activité antérieure pour
bénéficier du CLCA ont été surestimés. Alors que la DREES prévoyait
que ce durcissement réduirait les coûts de 150 M€, celui-ci n’aurait
permis de réaliser qu’une économie de 90 M€ ;
-
en ce qui concerne l’écart de 750 M€ entre les prévisions de dépenses
sur le CMG assistantes maternelles et les dépenses constatées en 2007,
une partie (250 M€) provient de deux éléments mal pris en compte
dans les prévisions : d’une part, les indemnités d’entretien versées aux
355. Le nombre total de familles bénéficiaires est de 435 000 mais 150 000 d’entre
elles bénéficient du CLCA et n’entrent pas dans le calcul du surcoût par rapport à
l’APJE.
342
C
OUR DES COMPTES
assistantes maternelles, qui rentrent depuis la PAJE dans la base du
calcul des aides aux familles, n’avaient pas été intégrées dans les
prévisions de dépenses. Selon la CNAF, cet effet était difficile à
quantifier avec précision faute d’informations solides à l’époque sur le
montant de ces indemnités. D’autre part, la prise en charge des
cotisations sociales assises sur les salaires des assistantes maternelles
(volet cotisations du CMG) a été sous-estimée, du fait de la
progression de la rémunération des assistantes maternelles dans le
contexte de la revalorisation de leur statut via la convention collective
de janvier 2005 et de la meilleure solvabilisation des familles par la
PAJE ;
-
surtout, les chiffrages de 2003 ont été faits en prenant pour hypothèse
un comportement constant des familles, c’est-à-dire sans anticiper les
évolutions que la revalorisation des prestations devait susciter. Ainsi,
ni les conséquences du développement du CLCA à temps partiel,
fortement revalorisé par rapport à l’APE à temps partiel, ni surtout
celles de la forte progression des modes de garde individuels (CMG),
n’ont été correctement appréciées. Le surcoût total de 1,3 Md€ 2003
constaté sur les compléments mode de garde par rapport aux
prestations antérieures (cf tableau supra) est dû, pour 800 M€ 2003, à
un impact mécanique (revalorisation) et pour 500 M€, à des effets de
comportement.
Sans
doute,
l’anticipation
d’une
évolution
de
comportements individuels relève-t-elle d’un exercice difficile ; il n’en
demeure pas moins que le choix de réaliser des chiffrages à
comportement constant est contestable, dans la mesure où l’un des
principaux objectifs de la PAJE était précisément d’inciter les ménages
à recourir à des modes de garde rémunérés ou à conserver un travail à
temps partiel. L’hypothèse d’un comportement constant des familles
conduisait nécessairement à minimiser le surcoût de la PAJE.
Par ailleurs, les prévisions avaient été faites en supposant inchangé
le nombre de naissances, ce qui n’a pas été le cas.
Ainsi, alors que la dégradation de la situation financière de la
branche famille, déficitaire pour la première fois en 2004, était connue
dès la préparation du PLFSS 2004, les promoteurs de la PAJE n’ont pas
cherché à évaluer son coût avec réalisme : les éléments susceptibles de
générer un surcoût n’ont pas toujours été intégrés dans les prévisions au
motif qu’ils étaient difficilement chiffrables. Mais à l’inverse, les
éléments susceptibles d’engendrer des économies ont été trop largement
pris en compte, alors même qu’ils étaient tout aussi difficiles à estimer.
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
343
C
–
L’absence de mesures financières correctrices
Dans le cadre de la préparation des PLFSS postérieurs à la création
de la PAJE, plusieurs pistes d’économies ont été envisagées aux cours des
étés 2005, 2006 et 2007 : le durcissement des conditions d’activité
antérieures pour le CLCA ; la baisse de 20 % du plafond de ressources de
la PAJE ; la suppression des majorations du plafond de ressources pour
enfants à charge ; pour le CMG : la suppression de la prise en charge
partielle de la rémunération pour les familles situées dans la tranche
supérieure des revenus ou l’augmentation du coût pour ces familles.
Ces propositions n’ont pas été retenues par le gouvernement ;
l’unique mesure d’économie décidée a été l’annulation du basculement
dans la PAJE des bénéficiaires de l’AFEAMA et de l’AGED au
1
er
janvier 2007. Cette annulation a permis une réduction des surcoûts de
l’ordre de 190 M€ en 2007, 180 M€ en 2008 et 70 M€ en 2009, au prix de
quelques coûts de gestion supplémentaires (45 % des économies de
gestion prévus dans la COG 2005 2008).
Au contraire, la revalorisation de 50 € par mois du CMG
« assistantes maternelles » pour les familles situées dans la tranche
inférieure de revenus, décidée dans le cadre du PLFSS 2008, devrait
générer une dépense supplémentaire de 37 M€.
III - Le libre choix d’activité
L’un des objectifs fixés à la PAJE était de continuer à offrir aux
parents la possibilité de se retirer temporairement du marché du travail
pour se consacrer à leur enfant, sans toutefois que ce choix réduise
l’employabilité des femmes. Dans le cadre de la stratégie de l’Union
européenne décidée à Lisbonne en 2000, la France doit en effet accroître
le taux d’emploi des femmes.
A
–
Le succès du CLCA à taux réduit auprès des
familles favorisées
Le nombre de bénéficiaires d’une compensation de revenus pour
congé parental (APE puis CLCA) a progressé de 14 % entre 2003 et 2006
(régime général uniquement). Cette augmentation est essentiellement due
à la progression du nombre de bénéficiaires d’un CLCA à taux réduit
versé en cas de travail à temps partiel, le nombre de familles bénéficiant
d’un CLCA ou de l’APE à taux plein étant resté à peu près stable.
344
C
OUR DES COMPTES
L’essor du CLCA à taux réduit est la conséquence directe de la
revalorisation de son montant de 15 % par rapport à celui de l’APE. Il a
surtout profité aux classes moyennes et aisées : parmi les bénéficiaires du
CLCA de rang 1 à taux réduit, 34 % sont des professions intermédiaires,
25 % des ouvriers et 20 % des cadres. En termes de revenus, 41 %
disposent de revenus très élevés, 31 % de revenus élevés et 20 % de
revenus moyens
356
.
Ainsi, le CLCA à taux réduit ne s’est pas développé par
substitution au CLCA à taux plein pour éviter aux femmes de se retirer
totalement du marché du travail, mais a incité d’autres femmes,
principalement dans les familles favorisées, à alléger leur activité
professionnelle. Pour elles, le recours au CLCA à taux réduit constitue un
congé de maternité prolongé, qui leur permet en outre de bénéficier d’une
aide à la garde : 41 % des bénéficiaires d’un CLCA à taux partiel
perçoivent également un CMG.
Au final, le succès du CLCA à taux partiel est dû plus à la
revalorisation du CMG qu’à la majoration du CLCA à taux réduit. La
revalorisation du CLCA à taux réduit a donc manqué sa cible et constitue
à cet égard un avantage important pour les familles les plus aisées.
B
–
Le recours au CLCA à taux plein, un choix
souvent contraint
Parmi les bénéficiaires du CLCA de rang 1 à taux plein figurent
principalement des ouvriers (31 %), des professions intermédiaires
(23 %) et des employés (20 %). L’écart est plus marqué pour le CLCA de
rang 2 : 42 % sont des ouvriers et 50 % disposent de revenus faibles ou
très faibles.
Ainsi, à la différence des parents bénéficiaires du CLCA à taux
réduit, les parents bénéficiaires du CLCA à taux plein sont principalement
des femmes peu diplômées et disposant de faibles revenus. Pour elles, le
retrait du marché du travail est fréquemment un choix contraint.
Selon l’enquête CREDOC précitée, 15 % des allocataires du
CLCA à taux plein avancent le coût trop élevé des modes de garde
payants comme la principale raison de leur choix et 67 % citent cette
raison comme ayant compté dans leur choix. Les bénéficiaires du CLCA
pour une seconde naissance et plus sont particulièrement nombreuses à
évoquer cette raison. Au total, quatre bénéficiaires du CLCA sur dix
356. Source : DREES, Etude et résultats n° 510, août 2006 ; échelle de revenus par
quintile.
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
345
déclarent qu’elles auraient aimé continuer à travailler. Un tiers des
bénéficiaires du CLCA de rang 2 et 23 % des bénéficiaires de rang 1 ne
travaillaient pas avant la naissance, allaient démissionner ou être
licenciées.
C
–
Le maintien des difficultés de retour à l’emploi
1
–
L’échec du COLCA
Mis en place en juillet 2006, le complément optionnel de libre
choix d’activité (COLCA) offre aux familles ayant la charge d’au moins
trois enfants, sous condition d’activité professionnelle antérieure, de
bénéficier d’un congé plus court que le CLCA (un an au lieu de trois)
mais mieux rémunéré.
Ce dispositif, qui était destiné à inciter les femmes à se retirer
moins longtemps du marché du travail, n’a pas eu jusqu’à ce jour le
succès escompté. Au 30 septembre 2007, on dénombrait seulement 2 407
bénéficiaires du COLCA en France métropolitaine alors que les
prévisions
faisaient
état
de
50 000 bénéficiaires.
Cet
échec
est
vraisemblablement dû au fait que la durée du COLCA est jugée trop
courte (du congé de un an doivent en effet être déduits le congé maternité
et les éventuels congés payés) et qu’il est réservé aux familles de trois
enfants.
2
–
Des difficultés de retour à l’emploi mal mesurées et peu
prises en compte
La proportion de femmes retrouvant un emploi après une période
de CLCA ou de COLCA n’est pas mesurée. Cet indicateur, prévu par le
programme de qualité et d’efficience annexé au PLFSS 2008 (indicateur
3.6) ne devrait être renseigné qu’à partir de 2009.
En dehors de la création du COLCA, aucune mesure concrète n’a
été mise en oeuvre pour améliorer le retour à l’emploi des bénéficiaires
d’un congé parental et pour limiter l’éloignement de ces personnes du
marché du travail. Pourtant, la France a un taux d’emploi féminin
inférieur aux objectifs européens fixés à Lisbonne et l’emploi des parents
est le meilleur moyen de prémunir les enfants de la pauvreté.
En conclusion, l’échec du COLCA et la non diminution de la
cessation totale d’activité au profit d’une activité réduite plaident pour
une réduction de la durée du CLCA et le resserrement des conditions
d’activité ouvrant droit au CLCA afin d’éviter l’éloignement durable des
346
C
OUR DES COMPTES
mères du marché du travail
357
. Ces mesures prendraient tout leur sens si
elles se couplaient à une plus grande facilité pour les familles les moins
aisées de disposer d’une offre de garde disponible, à un coût abordable.
IV - Le libre choix du mode de garde
A
–
La revalorisation des aides à la garde individuelle
1
–
Des objectifs insuffisamment précisés
La création de la PAJE visait à permettre le libre choix des familles
en revalorisant les prestations à la garde individuelle, mais sans que cet
objectif ait véritablement été précisé en termes de nombre d’enfants ainsi
gardés
358
.
2
–
La réduction du reste à charge des familles, une donnée mal
mesurée
Il est difficile d’évaluer l’impact de la PAJE sur le reste à charge
des familles. En premier lieu, ni la CNAF ni le ministère ne semblent
disposer de données sur l’évolution des taux d’effort entre 2002 et 2004 :
les données communiquées, qui figurent ci-après, proviennent de deux
sources différentes et doivent donc être interprétées avec précaution
359
.
Par ailleurs, la création de la PAJE a été accompagnée de plusieurs
mesures d’allègements fiscaux, résumées dans l’encadré suivant, si bien
qu’il est difficile de distinguer l’impact de la PAJE de celui de ces
mesures fiscales complémentaires.
357. Cf. RALFSS 2007 : Les aides publiques aux familles, p. 364 et 365.
358. En outre, le programme de qualité et d’efficience (PQE) mentionne un objectif
de « renforcement de la liberté de choix », sans que l’on sache si l’objectif est, à
revenu donné, une meilleure corrélation entre le taux d’effort et le coût pour la
collectivité des différents modes de garde, ou bien, pour un mode de garde donné,
l’harmonisation des taux d’effort selon les revenus.
359. PLFSS 2008 (annexe 1 PQE) pour les années 2004 à 2007, chiffres CNAF cités
dans le rapport du groupe de travail Prestation d’accueil du jeune enfant, remis au
ministre en février 2003 (pp.101 et 102) pour l’année 2002.
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
347
Crédit d’impôt pour garde d’enfant à l’extérieur du domicile
Les frais de garde engagés à l’extérieur du domicile (nets des aides
PAJE reçues) pour des enfants âgés de moins de six ans donnent lieu à un
crédit d’impôt. Alors que l’aide accordée était initialement une réduction
d’impôt, ce qui favorisait les ménages ayant les plus hauts revenus, elle a
été transformée en crédit d’impôt en 2005. En 2006, son taux a été doublé
pour atteindre 50 % des dépenses, limitées à 2 300 € par enfant et par an
(article 200 quater B du CGI).
Le coût de cette mesure était de 260 M€ en 2005 et de 350 M€ en
2006. Le coût prévisionnel de cette mesure était estimé à 800 M€ pour
2007. Ces chiffres concernent tous les enfants de moins de six ans.
Le crédit d’impôt pour l’emploi d’une garde à domicile
Les frais d’emploi d’un salarié à domicile (non diminués des aides
PAJE) ouvrent droit à d’un crédit d’impôt égal à 50 % du montant des
dépenses, retenues dans la limite d’un plafond de 12 000 € (majoré de
1 500 € par enfant à charge dans la limite totale de 15 000 €). Cette mesure
bénéficie notamment aux familles ayant recours à une garde à domicile
pour faire garder leurs enfants. Cette aide, qui était initialement une
réduction d’impôt, a été transformée en crédit d’impôt à compter de
l’imposition des revenus 2007 pour les contribuables qui exercent une
activité professionnelle ou sont inscrits comme demandeurs d’emploi
depuis au moins 3 mois.
D’après les estimations de l’observatoire national de la petite
enfance, le montant total des dépenses fiscales pour emplois familiaux
(garde à domicile, personnel de maison...) des foyers comprenant un
enfant de moins de 3 ans représentait environ 220 M€ en 2005. Parmi ces
dépenses, le montant des dépenses fiscales correspondant à de la garde à
domicile représenterait 83 M€.
Exonération partielle des cotisations patronales
Depuis 2006, la loi du 26 juillet 2005 relative au développement
des aides à la personne a prévu une exonération de 15 points de cotisations
patronales, compensée par le budget de l’Etat, pour les particuliers
employeurs qui acquittent les cotisations sur la base de l’assiette réelle et
la possibilité pour les entreprises d’abonder le CESU au bénéfice de leurs
salariés et de déduire cet abondement au titre du crédit d’impôt famille
créé en LFI 2003.
Enfin, les données sur les restes à charge présentées ci-après
correspondent à des cas types théoriques
360
. En particulier, ils font
l’hypothèse que la rémunération des assistantes maternelles et des gardes
à domicile est restée inchangée, ce qui n’est pas le cas.
360. Les PQE retiennent l’hypothèse de couples parents bi-actifs avec un enfant.
348
C
OUR DES COMPTES
Sous ces réserves, dans le cas d’une garde par une assistante
maternelle, l’effort financier des familles a été sensiblement réduit lors de
la mise en place de la PAJE. Le taux d’effort
361
des familles disposant
d’un revenu égal au SMIC, qui était de 27,5 % en 2002, serait ainsi passé
à 12,3 % en 2004. Celui des familles disposant de trois SMIC et
plus aurait baissé de 9,9 % en 2002 à 7,1 % en 2004. Ces chiffres doivent
être pris avec précaution dans la mesure où ils ne tiennent pas compte de
la forte augmentation du salaire des assistantes maternelles (+36 % en
euros courants contre +26 % pour le SMIC) constatée entre mars 2000 et
juillet 2006
362
, ni des forts écarts constatés
363
.
Taux d’effort en cas de garde par une assistante maternelle
1 SMIC
3 SMIC
6 SMIC
Coût pour la famille
NC
NC
NC
2002
Taux d’effort
27,5 %
9,9 %
NC
Coût pour la famille
130 €
200 €
284 €
2004
Taux d’effort
12,3 %
7,1 %
5,4 %
Coût pour la famille
131 €
208 €
297 €
2005
Taux d’effort
11,9 %
7,0 %
5,3 %
Coût pour la famille
103 €
156 €
259€
2006
Taux d’effort
9,1 %
5,1 %
4,5 %
Coût pour la famille
106 €
161 €
268 €
Prévision 2007
Taux d’effort
9,0 %
5,1 %
4,5 %
NB : hypothèse 20 jours de garde par mois, salaire des assistantes maternelle de 3,5
SMIC horaire/j en 2005.
Source :
PLFSS 2008 – annexe 1 PQE
En comparant dans une étude récente sur l’année 2005 la situation
de deux familles dont l’une bénéficie de la PAJE et l’autre des prestations
antérieures, la CNAF a constaté les mêmes évolutions : une réduction du
taux d’effort de 25 à 13 % pour les familles à un SMIC de revenu et un
taux d’effort constant de 6 % pour les familles ayant 5 SMIC de revenu.
En ce qui concerne les établissements d’accueil de jeunes
enfants
364
(EAJE), on note une même évolution à la baisse du taux
d’effort, non imputable à la PAJE, mais plutôt aux mesures fiscales.
361. Equivalent au pourcentage du reste à charge par rapport au revenu disponible.
362 Les assistantes maternelles en 2005, Etudes et résultats n° 581, juin 2007.
363. Le salaire journalier d’une assistante maternelle, pour une journée de huit heures,
peut varier entre 2,25 SMIC horaire (18,96 € au 1
er
janvier 2008) et 5 SMIC horaire
(42,20 €).
364. Cette dénomination regroupe diverses catégories d'établissements qui ont en
commun d'être spécialement conçus et aménagés pour recevoir dans la journée,
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
349
Taux d’effort en cas de garde en EAJE
1 SMIC
3 SMIC
6 SMIC
Coût pour la famille
NC
NC
NC
2002
Taux d’effort
10,4 %
8,7 %
NC
Coût pour la famille
89 €
218 €
357 €
2004
Taux d’effort
8,4 %
7,8 %
6,8 %
Coût pour la famille
70 €
237 €
364 €
2005
Taux d’effort
6,4 %
7,9 %
6,5 %
Coût pour la famille
49 €
197 €
323 €
2006
Taux d’effort
4,3 %
6,4 %
5,5 %
Coût pour la famille
50 €
206 €
330 €
Prévision 2007
Taux d’effort
4,3 %
6,5 %
5,5 %
Source :
PLFSS 2008 – annexe 1 PQE
En ce qui concerne la garde à domicile, la PAJE n’a pas diminué le
taux d’effort des parents : pour les familles disposant d’un SMIC, le
recours à une garde à domicile, qui était financièrement inabordable en
2002, l’est tout autant en 2004. Pour les familles disposant de trois SMIC,
le taux d’effort serait passé de 36,5 % (hors APJE) en 2002 à 45,5 % en
2004. En revanche, les mesures fiscales de 2005 et 2006 ont permis aux
ménages disposant d’un revenu égal à trois SMIC de réduire leur taux
d’effort de 38,6 % à 25 %. L’emploi d’une garde à domicile reste de fait
utilisé par les familles disposant des plus hauts revenus, leur taux d’effort
étant le moins élevé.
Taux d’effort en cas de garde à domicile
1 SMIC
3 SMIC
6 SMIC
Coût pour la famille
NC
NC
NC
2002
Taux d’effort
Impossible
36,5 %
NC
Coût pour la famille
1 277 €
1 281 €
931€
2004
Taux d’effort
121,3 %
45,5 %
17,6%
Coût pour la famille
1 374 €
1 354 €
1 019 €
2005
Taux d’effort
125,3 %
46,1 %
18,2%
Coût pour la famille
1 210 €
1 191 €
858 €
2006
Taux d’effort
106,2 %
38,6 %
14,7%
Coût pour la famille
684 €
791 €
898 €
Prévision 2007
Taux d’effort
58,4 %
25,0 %
15,0%
Source :
PLFSS 2008 – annexe 1 PQE
collectivement, de façon régulière ou occasionnelle les enfants de moins de 6 ans.
350
C
OUR DES COMPTES
3
–
L’absence de corrélation entre les taux d’effort, les revenus et
le coût pour la société des modes de garde
La dispersion des taux d’effort observée en fonction des revenus et
des modes de garde n’est pas cohérente sur le plan de l’équité : à
l’exception des EAJE, le taux d’effort des familles est d’autant plus
important que les revenus des familles sont faibles. Pour les EAJE, le
taux d’effort augmente quand le revenu du foyer passe de un à trois SMIC
puis il diminue quand il est de six SMIC (impact du barème national
fonction des revenus).
La dispersion des taux d’effort n’est pas non plus cohérente du
point de vue de la bonne utilisation des fonds publics, qui supposerait que
le coût pour la collectivité baisse plus fortement quand les revenus des
familles augmentent.
Coût par enfant des différentes modes de garde en 2007 selon le revenu
de la famille
En €
Assistante
maternelle
Garde à
domicile
Garde partagée
EAJE
Coût mensuel total
863
2 255
1 128
1 372
Couple bi-actif 1 SMIC
Coût famille
106
684
218
50
Coût collectivité
757
1 571
910
1 322
Couple bi-actif 3 SMIC
Coût famille
161
791
271
206
Coût collectivité
702
1 464
857
1 166
Couple bi-actif 6 SMIC
Coût famille
268
898
325
330
Coût collectivité
595
1 357
803
1 042
Source :
PLFSS 2008 – annexe 1 PQE
Le tableau ci-dessus doit être interprété avec précaution : ces
données tendent à minorer le coût total d’une garde par une assistante
maternelle, puisque les avantages fiscaux dont elles bénéficient ne sont
pas intégrés dans le coût pour la collectivité.
Sous ces réserves, ce tableau indique que pour un ménage
disposant d’un revenu égal à un SMIC, le recours à un établissement
d’accueil collectif est le mode de garde le moins coûteux pour la famille,
alors qu’il est coûteux pour la collectivité (1 322 € en 2007). Pour les
familles disposant d’un revenu égal à six SMIC, le recours à une
assistante maternelle permet de minimiser le coût pour la famille (268 €),
mais ces familles ont également intérêt à recourir à la garde à domicile
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
351
partagée (325 €) et à la crèche (330 €), qui constituent des modes de
garde plus onéreux pour la collectivité (respectivement 803 € et 1 042 €).
B
–
Un libre choix qui se heurte à l’insuffisance de
l’offre de garde
La PAJE, qui visait à mieux solvabiliser les familles, laisse entière
la question de l’offre de garde, dont le développement relève d’autres
acteurs et d’autres dispositifs. Le déséquilibre entre l’offre de garde et la
demande a été aggravé par le dynamisme de la natalité observé depuis
2003 et un resserrement de la scolarisation des enfants de 2-3 ans.
Les commissions départementales d’accueil des jeunes enfants
(CDAJE), créées par la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et
médico-sociale, avaient notamment pour mission d’identifier les besoins
et de coordonner le développement de l’offre de garde. Or, ces commis-
sions peinent à se mettre en place et à jouer un rôle opérationnel
365
.
1
–
La garde par les assistantes maternelles
Ce mode de garde est peu coûteux pour la collectivité. Pourtant, le
nombre d’assistantes maternelles agréées, qui avait augmenté au moment
de la mise en place de l’AFEAMA (132 000 en 1990, 338 000 en 2000),
plafonne depuis 2004. Le taux d’exercice de la profession plafonne
également : il est passé de 54 % en 1990, à 69,8 % en 2003 et à 70,2 % en
2005. Enfin, le chômage, perceptible notamment dans certains quartiers
sensibles, est mal identifié : au niveau statistique, le taux de non exercice
recouvre à la fois les assistantes maternelles ne désirant pas exercer et
celles qui sont au chômage. Au total, le nombre de places auprès
d’assistantes maternelles exerçant leur activité, estimé à 689 200 en 2005,
a progressé de 2,9 % par an entre 2003 et 2005, ce qui correspond au taux
de croissance de la natalité entre 2005 et 2006. Le grand nombre de
départs à la retraite prévu dans les prochaines années (environ 80 000
d’ici 2015) va encore aggraver le déséquilibre.
Aucune étude n’a été réalisée pour comprendre les raisons de la
faible progression du nombre d’assistantes maternelles agréées et la
stagnation du taux d’exercice, alors même que la réforme statutaire de
2005 et la mise en place de la PAJE auraient dû conduire à une
augmentation des effectifs de la profession.
365. Elles n’avaient été mises en place fin 2007 que dans 60 départements.
352
C
OUR DES COMPTES
Plusieurs facteurs explicatifs sont néanmoins avancés tels que les
délais administratifs pour l’obtention d’un agrément et les normes de
logement exigeantes qui sont imposées, ainsi que certaines difficultés
d’exercice de la profession ou le caractère plus rémunérateur des
indemnités
chômage
par
rapport
à
la
rémunération
d’assistante
maternelle.
Afin de réduire le chômage des assistantes maternelles, certaines
communes autorisent des rassemblements d’assistantes maternelles dans
des locaux, transformés en crèches familiales « sauvages ». Mais des
solutions pérennes devraient être envisagées telles que l’augmentation des
aides à la mise aux normes des habitations ou la réforme du cadre
juridique des crèches familiales pour permettre la mise à disposition de
locaux à des assistantes maternelles.
2
–
La garde à domicile
Cette solution est de loin la plus onéreuse par enfant gardé. Elle
bénéficie surtout aux familles aisées qui cumulent les allocations PAJE
avec des réductions d’impôts.
Toutefois, le recensement exhaustif du nombre d’enfants ainsi pris
en charge et des personnes qui s’en occupent est difficile en l’absence
d’agrément préalable des gardes et de la méconnaissance du nombre de
familles qui ne perçoivent pas d’aides de la CNAF. En outre, la réduction
d’impôts accordée pour emploi de personnels à domicile ne distingue pas
la population des gardes d’enfants de celle exerçant d’autres types
d’activités.
Les aides directes versées ont augmenté en euros constants de
75 % entre 2003 et 2006 (119 M€ contre 208 M€) et les sommes
moyennes versées à chaque famille par les CAF ont augmenté de 17 %
par an en moyenne (de 2 245€ par an en 2003 à 3 558 € en 2006).
3
–
Les établissements d’accueil des jeunes enfants
Depuis 2000, le soutien au développement de l’accueil des jeunes
enfants a connu une progression avec la mise en place de quatre dotations
spécifiques visant à soutenir l’investissement dans les structures
d’accueil : le fonds d’investissement à la petite enfance (FIPE); l’aide
exceptionnelle à l’investissement (AEI) ; le dispositif d’aide à
l’investissement petite enfance (DAIPE) ; le dispositif d’investissement
petite enfance (DIPE). Le montant total de ces quatre fonds représentait
pour la CNAF une dépense de 822 M€ dont quelque 98 % étaient engagés
mi-2007. A ces sommes, il faut ajouter 129 M€ versés directement par les
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
353
CAF à partir de leurs ressources propres. Les financements totaux
apportés par les différents acteurs sont évalués par la CNAF à 2 252 M€.
Ces quatre plans crèches devaient permettre de créer au moins
75 000 nouvelles places entre 2000 et 2007. Ces objectifs n’ont pas été
atteints : le nombre de places disponibles en garde collective et en crèche
familiale n’a augmenté que de 37 800 sur cette période en métropole,
environ 2 % par an, soit à peine le taux d’augmentation de la natalité.
Cette faible progression est due à plusieurs facteurs :
-
le retard des plans crèches : sur les 75 000 places annoncées, 32 280
ne seront créées que de 2007 à 2011. Le délai moyen d’ouverture au
public après la décision de financement étant de 27 mois, le dernier
plan datant de mi 2005, le nombre des places créées auraient dû être
plus important ;
-
des places, dites nouvelles, sont en fait parfois des places anciennes
rénovées ou « relabellisées » c'est-à-dire appelées places de multi-
accueil au lieu de places en crèches ou haltes-garderies ;
-
le nombre important des fermetures de places en crèche, de l’ordre de
2 000 à 3 000 par an, en particulier pour non respect des normes.
Par ailleurs, les statistiques ne permettent pas de distinguer les
places créées des places réellement ouvertes. Le manque d’encadrement
et de personnels, la difficulté pour les communes ou les associations de
gérer ces personnels dont les horaires sont souvent morcelés ainsi que le
niveau du déficit par place à combler par le gestionnaire de la structure
constituent très souvent un obstacle à l’ouverture effective des places. Il
serait nécessaire d’approfondir les raisons des difficultés de recrutement
rencontrées par un grand nombre d’établissements (formation des
personnels, règles d’accès à la profession, manque de passerelles,
rémunération, etc.) dans un secteur qui constitue pourtant un important
gisement d’emplois. Certaines de ces difficultés perdurent après
l’ouverture des places, de sorte que le taux de remplissage des places
ouvertes, toutes structures confondues, n’est que de 67 % (France
métropolitaine).
Les entreprises de crèche contribuent désormais au développement
de l’offre même si, au départ, toutes les conditions n’étaient pas réunies
pour faciliter le développement de leur activité. L’acceptation culturelle
par les CAF et les collectivités territoriales de cette forme de partenariat a
354
C
OUR DES COMPTES
permis récemment d’accélérer l’implantation de cette offre, qui s’appuie
sur le crédit d’impôt famille
366
.
4
–
La scolarisation des enfants de 2 ans
Le taux de scolarisation des 2-3 ans a diminué de 27 % entre 2003
et 2007 (-29 % dans le public, -18 % dans le privé). Ce sont donc
63 335 enfants qui ont dû être pris en charge par d’autres moyens : ce
chiffre correspond à la quasi-totalité des places créées auprès des
assistantes maternelles et en EAJE depuis 2000. C’est ainsi que dans le
département de la Seine-Saint-Denis, le taux de scolarisation à deux ans
est passé de 22 % en 1999 à 8 % en 2006. A la rentrée 2005, 5 000
enfants étaient en attente de scolarisation en maternelle, dont 300 avaient
plus de trois ans. Au 30 juin 2005, 645 enfants de plus de trois ans étaient
en crèche, faute de place à l’école maternelle.
Cette évolution apparaît peu cohérente au regard de la bonne
utilisation de l’argent public : le coût par enfant est moindre s’il est
accueilli en maternelle plutôt qu’en EAJE (13 368 € en 2006 en EAJE,
contre 4 570 € en maternelle, hors périscolaire
367
).
Quelles que soient les motivations, pédagogiques ou financières,
ayant conduit le ministère de l’éducation nationale à se désengager de la
scolarisation des enfants de deux ans, il conviendrait que les objectifs de
l’Etat soient clairement explicités et que les différents acteurs concernés
par la garde des jeunes enfants (éducation nationale, CNAF, collectivités
territoriales) déterminent conjointement, sous la coordination de l’Etat,
les besoins pour l’avenir et des réponses à apporter.
5
–
Evolution globale
Globalement, face à l’augmentation de la demande due à la
natalité, à celle du nombre des couples bi actifs et à celle du nombre de
familles monoparentales, la forte diminution de la garde en jardin
d’enfants et surtout en maternelle (-105 000 entre 2003 et 2006) n’a pas
366. Ce crédit d’impôt bénéficie aux entreprises passibles de l’IS ou de l’IR imposées
d'après le bénéfice réel qui exposent des dépenses permettant aux salariés ayant des
enfants à charge de mieux concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale. Le
montant de ce crédit d’impôt est égal à 25 % des dépenses engagées au titre de l'année
civile dans la limite d'un plafond de 500 000 € par an. Il présente l’inconvénient de ne
pas dépendre des effectifs de l’entreprise.
367. Coûts incluant les agents territoriaux spécialisés d’écoles maternelles (ATSEM),
mais pas celui des personnels en charge du périscolaire ni de la cantine.
LES AIDES A LA GARDE DES JEUNES ENFANTS
355
été compensée par un accroissement suffisant de l’accueil par les autres
modes de garde (+88 000), si bien qu’au total, le nombre des enfants
gardés par des parents ou des proches a augmenté de plus de 7 %.
Tableau récapitulatif donnant la répartition par type de garde
2003
2005
2006*
Evolution
Nombre enfants 0-3 ans
2 250 000
2 339 000
(2 339 000)
+3,96%
Garde en EAJE
303 100
318 900
327 600
+8,08%
Autres formes de garde
collectives (jardins d’enfants
et surtout maternelles)
289 000
199 000
(184 600)
-36,12%
Garde par assistance
maternelle (aidée)
460 800
514 800
535 000
+16,33%
Garde à domicile (aidée)
27 400
34 000
(37 300)
+36,13%
TOTAL
1 080300
1 066 700
1 085 100
0,44 %
Solde : garde par parents
(indemnisés ou non) et
autres modes de garde
1 169 700
1 272 300
1 253 900
7,20%
*Les chiffres entre parenthèses sont des estimations.
Source :
CNAF, DREES, éducation nationale
Ces évolutions, apparaissent décevantes au regard de l’effort
financier supplémentaire engagé par la branche famille: le coût d’un
enfant gardé par un tiers a cru en effet de 60 % entre 2003 et 2006
368
.
________________________
SYNTHESE
_________________________
La création de la PAJE s’est avérée beaucoup plus coûteuse que
prévue les prévisions faites en 2003 n’ayant pas été suffisamment
réalistes. Par ailleurs, cette réforme ne s’est pas accompagnée d’une
réflexion sur le niveau des aides financières à la garde d’enfant apportée
par la collectivité selon les modes de gardes et les revenus des familles,
en vue d’une plus grande cohérence du point de vue de l’équité ou de
celui de la bonne utilisation des fonds publics.
La PAJE n’a en outre pas permis d’atteindre l’objectif de
permettre aux familles de choisir le mode de garde de leur enfant.
En effet, l’offre de garde par des tiers a été marquée, au cours des
cinq dernières années, par la faible progression du nombre d’assistantes
maternelles en activité et par la forte baisse du taux de scolarisation des
2-3 ans. En outre, en dépit des plans crèches,
le nombre de places
368. En divisant les montants respectifs de 2,3 Md€ en 2003 et 3,7 Md€ en 2006
(montants des prestations versées au titre de la garde des enfants par un tiers) par
1 803 000 enfants gardés en 2003 et 1 085 100 en 2006.
356
C
OUR DES COMPTES
disponibles en garde collective et en crèche familiale n’a augmenté
que de 37 800 entre 2000 et 2007 (environ 2 % par an), soit à peine le
taux d’augmentation de la natalité. Ces évolutions expliquent que le
pourcentage d’enfants de moins trois ans gardés par les parents et
leurs proches ait légèrement progressé entre 2003 et 2006.
Le recours au CLCA à taux plein reste ainsi un choix contraint
pour un grand nombre de femmes. Faute d’offre de garde, la
revalorisation du CLCA à taux partiel, au lieu de permettre à ces
femmes d’éviter une cessation complète d’activité, a principalement
bénéficié aux femmes des classes moyennes et aisées.
La PAJE n’est donc pas parvenue, malgré son coût élevé, à
résorber l’insuffisance globale de l’offre de garde. Ce constat conduit
à s’interroger sur les modalités de mise en oeuvre et la traduction
financière pour les finances publiques du principe de libre choix.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
45.
Renforcer la cohérence des interventions des différents acteurs
concernés par la garde des jeunes enfants (ministère en charge de la
famille, ministère de l’éducation nationale, organismes de sécurité sociale,
collectivités territoriales).
46.
Réduire la durée du CLCA afin d’éviter l’éloignement durable des
mères du marché du travail et envisager de revenir sur la revalorisation du
CLCA à temps partiel.
47.
Mieux corréler le taux d’effort des familles en fonction de leurs
revenus pour chaque mode de garde.
48.
Mieux corréler le coût pour la collectivité et les revenus des familles
de chaque mode de garde en réduisant en particulier l’aide apportée par la
collectivité en matière de garde à domicile.
49.
Analyser les raisons de la stagnation du nombre d’agréments et du
taux d’exercice des assistantes maternelles et développer l’accueil dans un
cadre structuré (crèches familiales) ou plus souple (locaux mis à
disposition).
357
Chapitre XI
Aspects de la gestion des régimes de
retraite
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
359
I - Les outils de pilotage des régimes de retraite
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Dans une précédente insertion relative aux outils de pilotage des
régimes de retraite dans les différents régimes obligatoires
369
, la Cour
avait indiqué que « dans l’ensemble, la situation était assez satisfaisante et
que les progrès nécessaires [...] s’inscrivaient dans la continuité de
l’existant ».
Depuis lors, cependant, la mise en oeuvre de la loi Fillon a modifié
et accru les besoins d’information et d’outils de pilotage, en particulier sur
deux points : différentes dispositions influent sur l’âge de départ en
retraite, ce qui exige une modélisation et une prévision plus exigeante des
comportements ; la détermination de certains paramètres de calcul
nouveaux confirme et renforce le besoin d’indicateurs financiers plus
diversifiés.
Une nouvelle enquête de la Cour auprès des principaux régimes de
salariés et de non-salariés
370
a conduit à mettre en évidence certaines
insuffisances persistantes.
A
–
Des outils de prévision et d’analyse des
comportements encore insuffisants
1
–
Un besoin accru d’information
La généralisation des mécanismes de décote et de surcote, associée
à une augmentation de la durée d’assurance nécessaire pour prétendre à
une pension à taux plein, devrait progressivement conduire à une
augmentation de l’âge moyen des départs en retraite ainsi que de leur
dispersion. Mais l’adaptation des comportements est un phénomène
complexe qui prendra du temps. Et pour évaluer l’impact de la réforme
dans la durée, des progrès dans la modélisation des comportements et les
outils de prévision doivent être réalisés.
369. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2003, p. 315 et suivantes.
370. CNAVTS, ARRCO-AGIRC, IRCANTEC, MSA, ORGANIC et CANCAVA (qui
ont fusionné avec la CANAM pour former le RSI), CNRACL, service des pensions de
l’Etat.
C
OUR DES COMPTES
360
Avant la réforme de 2003, la distribution des âges de départ était
marquée de fait par deux pics importants, à 60 et 65 ans, de sorte que la
population liquidant entre ces deux âges était résiduelle. Les besoins de
prévision fine en étaient réduits et dans les maquettes de projection des
régimes, destinées à évaluer le flux des départs, les comportements passés
étaient le plus souvent reconduits.
Après la loi de 2003, l’analyse des comportements ne peut plus se
fonder sur le seul calcul d’un âge moyen de liquidation puisque les
comportements attendus devraient à l’avenir évoluer et résulter de
facteurs
plus
nombreux :
outre
certaines
données
explicatives
traditionnelles (situation de l’emploi, état de santé, patrimoine accumulé
par les futurs retraités, situations familiales), l’allongement des durées
d’assurance pour prétendre à une retraite à taux plein (qui devrait se
poursuivre), ainsi que la généralisation des décotes/surcotes devraient
progressivement modifier la répartition des âges de liquidation.
2
–
Des progrès
Des réponses ont été apportées à ce besoin d’information accru.
D’une manière générale, sous l’influence des demandes du conseil
d’orientation des retraites (COR), il y a eu une meilleure prise en compte
de la fonction statistique au sein des 36 régimes obligatoires, de base ou
complémentaire, qui constituent le système français des retraites. Certes,
les moyens et l’attention portée restent hétérogènes selon les régimes.
Mais on peut relever des progrès comme la mise en place d’un schéma
directeur statistique
371
dans le régime général à l’été 2007 (avec la
signature d’une convention entre la CNAVTS et l’Etat) ou au sein des
services d’études de la CNAVTS le renforcement des moyens humains
d’une dizaine de personnes depuis 2003.
Un deuxième progrès est lié à l’apparition de modèles dans deux
régimes
importants :
le
régime
général,
avec
le
modèle
de
microsimulation PRISME et la fonction publique de l’Etat, avec le
modèle ARIANE de la direction du budget. Ces modèles permettent de
mieux rendre compte de la réaction des ressortissants face aux modalités
de la réforme. Il faut néanmoins noter que seul le modèle PRISME est en
371. Il prévoit principalement l’enrichissement des chaînes de remontées statistiques,
un accès partagé aux données de chaque service et diverses améliorations du modèle
PRISME.
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
361
mesure de prendre en compte les comportements des différentes
générations de cotisants
372
.
Enfin, s’agissant des outils interrégimes, un troisième progrès est
un peu plus ancien et tient à la constitution, en complément de
l’échantillon interrégimes des retraités (EIR
373
), déjà disponible, d’un
panel, relatif aux cotisants, l’échantillon interrégimes des cotisants (ou
EIC). Cet outil, établi et géré par la DREES, rassemble de nombreux
éléments sur la constitution des droits à retraite (à partir des comptes de
droits quand ils existent
374
, donc à l’exclusion des droits annexes tels que
les bonifications de durée d’assurance liées aux enfants). Il est d’abord
utile pour apprécier la portée des engagements pris par génération, mais
aussi pour apporter une information sur les départs en retraite, dans la
mesure où les droits accumulés constituent l’un des facteurs importants
du choix du moment de liquidation de la retraite.
Il faut souligner que l’EIR est la seule information dont on dispose
sur l’ensemble des retraites des polypensionnés. Quant à l’EIC, ses
potentialités sont importantes : il autorisera une connaissance progressive
des disparités entre régimes, entre générations et à l’intérieur d’une même
génération. En particulier, il fournira des informations relatives à l’impact
de la précarité professionnelle sur les retraites et sur la transition entre
activité et retraite grâce au « raccordement » avec l’EIR.
3
–
Des insuffisances persistantes
Ces progrès restent cependant encore trop partiels. Tout d’abord
parce que de nombreux régimes n’ont effectué que des travaux limités
pour évaluer les conséquences de la loi de 2003, dans la mesure
notamment où leurs moyens demeurent souvent trop peu développés. Par
exemple, d’après l’information fournie par le régime, la MSA se serait
limitée à l’appréciation des effets de la décote et de la surcote.
En l’absence de modèle comportemental de départ en retraite, de
nombreux régimes comme l’ORGANIC et la CANCAVA ou la
372. Le modèle DESTINIE de l’INSEE reste la référence utilisée pour des simulations
tous régimes.
373. L’échantillon inter régime des retraités est un panel d’individus renouvelé tous
les 4 ans dont l’objectif est de reconstituer le montant de la retraite globale (incluant
les retraites complémentaires) ainsi que ses éléments constitutifs. Les données de base
sont collectées directement auprès des régimes. Le premier EIR remonte à 1988.
374. Des difficultés sont apparues pour les fonctionnaires faute de l’existence d’un
compte de droits. Ces derniers ont donc été reconstitués dans l’EIC à partir des
fichiers de paye de la fonction publique.
C
OUR DES COMPTES
362
CNRACL ont utilisé les paramètres rétrospectifs de leurs modèles comme
base de simulation, faisant par là même l’hypothèse d’une permanence
des comportements malgré la réforme. Les travaux dans ces régimes se
sont limités à une analyse des conséquences des modifications législatives
et réglementaires introduites en 2003.
La deuxième lacune majeure, cette fois au plan interrégimes,
concerne les informations sur les périodes non cotisées mais génératrices
de droits qui ne figurent pas toutes dans l’EIC, notamment les
majorations de durée d’assurance et les périodes de service militaire
(connues par les régimes uniquement au moment de la liquidation).
Enfin, des progrès essentiels restent à faire dans les grandes
enquêtes générales (emploi, santé, logement, revenus fiscaux, patrimoine,
etc.), en France comme au niveau européen
375
, pour articuler
l’information sur la population des tranches d’âge les plus élevées avec
les caractéristiques de la retraite.
4
–
La nécessité d’une coordination plus forte des bases de
données
L’enrichissement attendu des bases de données et la multiplication
des
utilisateurs
(notamment
en
raison
des
nouveaux
besoins
d’information
interrégimes)
devraient
impliquer
une
coordination
renforcée au niveau national pour mieux exploiter et développer le
potentiel statistique de chaque régime. Deux aspects de cette coordination
sont particulièrement importants :
-
les systèmes d’information des régimes devraient de plus en plus
communiquer entre eux, qu’il s’agisse du transfert ou de la
consolidation des données de carrière. Cette interpénétration implique
qu’un langage commun soit établi, ce qui suppose une instance de
coordination au niveau national. Placé sous l’égide du COR, un groupe
de travail du conseil national de l’information statistique (CNIS)
pourrait faciliter l’expression des besoins d’information statistique et
préciser les référentiels communs nécessaires.
-
compte tenu du mouvement de transformation des systèmes
d’information, tous les régimes (ou au moins ceux d’une certaine
importance) devraient se doter d’un schéma directeur statistique, à
l’instar de celui qui a été inscrit dans la convention déjà évoquée
signée entre l’Etat et la CNAVTS. La coordination des schémas
375. Une enquête effectuée en 2004 (l’enquête SHARE, Survey of Health, Ageing
and Retirement) vise à établir des comparaisons internationales sur les déterminants
des départs en retraite et les caractéristiques des retraités.
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
363
directeurs statistiques serait ensuite un gage de cohérence dans le
développement des systèmes d’information sur les retraites.
B
–
Des indicateurs financiers encore trop
rudimentaires
1
–
Le besoin accru d’indicateurs actuariels de solvabilité
Outre les informations à caractère statistique, la réforme de 2003 a
provoqué un besoin d’information accru en ce qui concerne les données à
caractère financier. Les régimes devraient être en situation de calculer les
conséquences financières de l’introduction puis de la modification des
décotes/surcotes.
Les données publiées par les régimes, outre celles relatives aux
populations de cotisants et de retraités (le rapport démographique étant le
ratio le plus fréquent et le plus commenté), sont le plus souvent issues des
principaux postes de leur compte d’exploitation. Le résultat est résumé
par le calcul d’un agrégat, le solde technique courant, qui peut ensuite
être exprimé en points de PIB. Or, si cet agrégat est utile pour apprécier
l’évolution des besoins de financement au fil des années, il rend mal
compte des ruptures de tendance et ne renseigne pas sur la contribution
des différents facteurs (démographie, évolution des pensions ou des
cotisations) à l’origine des déséquilibres, ni sur l’adéquation des barèmes
à un fonctionnement équilibré des régimes.
D’une manière plus générale, le principe de rendez-vous
périodiques inscrit dans la loi d’août 2003 et destinés à modifier les
paramètres de gestion en fonction des évolutions intervenues, va dans le
sens d’une meilleure connaissance des conditions de l’équilibre à terme
des régimes. Cette pratique nouvelle exige la production des données
actuarielles nécessaires à l’analyse de la « soutenabilité » financière d’un
régime, en particulier son solde actuariel, qui est un des indicateurs les
plus pertinents pour vérifier si les paramètres du régime sont compatibles
avec son équilibre sur longue période.
Quelques pays étrangers (Etats-Unis, Canada, Suède), ont
formalisé les règles de suivi et d’évaluation de la solvabilité
376
de leurs
376. La solvabilité d’un régime peut être analysée de plusieurs façons :
- en calculant en projection le solde technique (différence entre recettes courantes et
prestations courantes) : le régime est dit solvable quand le solde technique, année
après année, reste positif. Les ressources du régime sont alors suffisantes pour
financer les dépenses sur la période de projection ;
C
OUR DES COMPTES
364
régimes de retraite obligatoires. En particulier les rapports actuariels qui
sont publiés établissent une cartographie des risques (démographie,
revenus, évolution des prestations) susceptibles de détériorer la situation
financière des régimes. Ces exemples pourraient utilement inspirer la
pratique des régimes obligatoires dans notre pays.
L’évaluation du montant des engagements de retraite, au titre des
actifs et des retraités, information produite dans les pays mentionnés
supra, devrait ainsi être régulièrement mise à jour.
2
–
Les indicateurs de rendement
Passant
en
revue
les
multiples
indicateurs
potentiels
qui
renseignent sur le rendement (individuel ou collectif) d’un régime de
retraite et sur les conditions de son équilibre financier, la Cour avait déjà
souligné que « leur mise en oeuvre par les régimes était diverse et
inégale
377
».
S’agissant des indicateurs de rendement relatifs à la situation
individuelle des assurés en matière de retraite, la Cour relève un
regrettable manque d’investigation et rappelle que le taux de remplace-
ment du dernier salaire (ou du dernier revenu d’activité), habituellement
utilisé, est un indicateur imparfait qui ne peut donner une image fidèle de
la situation qu’associé à d’autres indicateurs, notamment de rendement.
Différents indicateurs peuvent être envisagés :
-
le délai de récupération : rapport entre la somme des cotisations et le
montant annuel de la pension ;
-
le taux de récupération : rapport entre la masse des pensions reçues et
la masse des cotisations versées ;
-
le taux de rendement interne, c’est-à-dire le taux qui égalise les deux
flux actualisés de cotisations et de prestations.
Ces trois indicateurs apportent des éléments différents et
complémentaires qui permettent d’affiner le diagnostic sur le traitement
des différentes catégories de retraités.
- en calculant les soldes techniques en projection sur une période donnée. Le régime
est dit solvable sur la période quand le solde actuariel (la somme actualisée des soldes
techniques) est positif, les années de soldes positifs et négatifs se compensant. En fin
de période, le régime aura alors une trésorerie positive ou nulle.
377. Voir le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2003, p. 326.
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
365
3
–
L’absence de cadre incitatif et d’obligation de publication
De manière plus générale, en France, à l’inverse de ce qui se passe
dans de nombreux pays étrangers, les gestionnaires des régimes de base
n’ont, jusqu’à présent, aucune obligation en matière de publication
régulière de rapports évaluant la situation financière et la solvabilité des
régimes. Ils n’ont en conséquence pas été amenés à produire des études
sur ces sujets.
Certes, les travaux du COR, au niveau de l’ensemble des régimes,
permettent de répondre à une partie des questions posées. Mais
l’information disponible dans chaque régime reste trop pauvre.
De même, on constate l’absence de publications sur le rendement
des régimes ou sur leur équilibre actuariel. S’agissant d’indicateurs
pouvant donner lieu à des interprétations trop rapides et susciter des
polémiques, des travaux exploratoires de nature méthodologiques
devraient être au préalable menés sous l’égide du COR. Les difficultés
inhérentes à ce sujet ne peuvent en tout état de cause justifier
l’immobilisme constaté par la Cour.
________________________
SYNTHESE
_________________________
Alors que les besoins d’information sur la retraite s’accroissent,
aucune instance n’a été chargée de réaliser leur recensement systématique
selon la nature des utilisateurs et de proposer une organisation de la
production statistique pour répondre à ces besoins. Il manque un « chef
d’orchestre » en mesure d’identifier les besoins et de coordonner, dans le
cadre du système statistique public, la production statistique sur le sujet.
Par ailleurs, la demande d’une transparence accrue sur les
conditions de l’équilibre des différents régimes devrait conduire à viser, à
terme, une publication obligatoire de paramètres actuariels préalablement
harmonisés.
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
50.
Constituer un groupe de travail du CNIS chargé de définir
l’ensemble des informations communes nécessaires au pilotage des
régimes de retraite.
51.
Doter les principaux régimes d’un schéma directeur statistique.
C
OUR DES COMPTES
366
52.
Permettre au COR de piloter les travaux devant conduire les
régimes à calculer et publier des soldes actuariels et des taux de
rendement.
II - L’adossement des régimes spéciaux aux régimes
de droit commun
_____________________
PRESENTATION
_______________________
L’adossement du régime de retraite des industries électriques et
gazières (IEG) au régime général, réalisé à compter du 1
e
janvier 2005, a
déjà été évoqué par la Cour à l’occasion de l’étude qu’elle a consacrée à
certains régimes spéciaux
378
. Deux autres régimes spéciaux d’entreprises
(RATP et La Poste) ont depuis lors fait l’objet de travaux ou de réflexions
en vue de pérenniser leur financement.
Pour de telles opérations, la loi de financement de la sécurité
sociale pour 2006 a consacré le principe de neutralité financière, posé dès
2004 pour l’adossement du régime des IEG. La même loi a prévu que tout
nouvel adossement devrait être précédé d’une information préalable du
Parlement et qu’un bilan permettant d’apprécier cette neutralité devrait
être établi périodiquement après chaque adossement.
Compte tenu de l’importance des enjeux et de la demande de la
commission des affaires sociales du Sénat, la Cour a analysé les divers
paramètres de l’opération d’adossement du régime IEG, la seule menée à
bonne fin à ce jour, afin d’en retenir des enseignements utiles pour les
éventuels futurs adossements.
A
–
Les caractéristiques d’un adossement
Les normes comptables internationales (norme IAS 19 en
particulier) imposent depuis 2005 (pour les entreprises cotées) ou 2007
(pour les autres) à une entreprise ou à un groupe d’entreprises disposant
de son propre régime de retraite d’inscrire ses engagements dans ses états
378. Voir le chapitre X du rapport sur la sécurité sociale de septembre 2006, les
régimes spéciaux de retraite des industries électriques et gazières, de la RATP et de la
SNCF (P. 307 à 344) ; l’adossement des IEG y est décrit aux pp. 321 à 327.
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
367
financiers. Quand ces entreprises ne sont pas en état de les provisionner,
il devient alors nécessaire de les externaliser.
Par ailleurs, l’ouverture à la concurrence de certains marchés
impose de revoir les modalités de financement de ces régimes pour
permettre aux entreprises concernées de ne pas dégrader leur situation
concurrentielle, tout en ne contrevenant pas aux règles communautaires
concernant les aides d’Etat.
1
–
Les solutions possibles et les précautions à prendre
Pour externaliser les engagements de retraite, plusieurs étapes sont
nécessaires
379
.
a)
La création d’une caisse de sécurité sociale
La première étape réside dans la création d’une caisse autonome de
sécurité sociale qui, contrairement aux entreprises, n’est pas soumise à
l’obligation de provisionnement, son équilibre devant s’opérer par
ajustement permanent des ressources aux prestations en application du
principe
de
la
répartition.
Cette
caisse
portera
l’ensemble
des
engagements de retraite qui seront financés par des cotisations sociales
libératoires pour l’entreprise concernée, par d’autres financements
relevant du droit commun (compensation démographique, concours du
fonds de solidarité vieillesse) et, le cas échéant, par des ressources
affectées ou une subvention d’équilibre. C’est la situation qui prévaut
aujourd’hui pour les régimes de la RATP et de la SNCF. En ce qui
concerne la RATP cependant, des négociations ont été engagées en vue
d’un adossement.
b)
L’adossement
L’opération repose sur deux principes :
-
d’une part, le régime spécial continue à exister, cantonné dans une
caisse de sécurité sociale extérieure à l’entreprise. C’est cette caisse
qui gèrera l’ensemble des flux (cotisations de droit commun, recettes
permettant de financer les droits spécifiques, pensions de droit
379. L’intégration, c'est-à-dire le transfert du groupe démographique concerné dans
l’ensemble formé par le régime général et les régimes complémentaires accompagné
de la disparition du régime intégré, est une solution qui peut également être envisagée.
Elle a été mise en oeuvre à plusieurs reprises dans le passé, mais pour des régimes
ayant de petits effectifs (agents de change, Crédit Foncier de France, Compagnie
Générale des Eaux, CCI de Roubaix et de Paris).
C
OUR DES COMPTES
368
commun et pensions correspondant aux droits spécifiques, etc.).
L’opération est totalement transparente pour les assurés qui conservent
les mêmes droits, servis par une caisse unique et sans modifications de
calcul.
-
d’autre part, une distinction est établie entre les droits de base
accordés par les régimes d’accueil (régime général et régimes
complémentaires), qui sont repris aux conditions des régimes d’accueil
et les droits spécifiques qui doivent faire l’objet d’un financement ad
hoc. Une soulte vient éventuellement compenser les déséquilibres
démographiques et financiers engendrés pour les régimes de droit
commun par l’accueil du groupe adossé.
L’adossement des droits de base à un groupe démographique large
s’analyse comme une mutualisation, propre à offrir au groupe une
garantie de financement de ses retraites. Dans le cas des IEG, la
contrepartie de cette garantie aurait pu être la réforme du régime,
conformément aux principes fixés par la loi de 2003, réforme
recommandée par la Cour dans le RALFSS de 2005. Cela n’a pas été le
cas, les réformes intervenues fin 2007 ayant en fait donné lieu à des
contreparties en faveur des personnels.
2
–
Un principe : la neutralité financière
Ce principe a été posé par l’article 19 de la loi du 9 août 2004
« relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises
électriques et gazières », puis introduit dans le code de la sécurité sociale
par la LFSS pour 2006.
Mais ce principe de neutralité financière
380
n’est défini qu’en
termes relatifs, puisque la loi se limite à indiquer que l’adossement ne
doit pas dégrader la situation des assurés des régimes d’accueil. En
revanche, elle ne précise pas de quelle manière il convient d’apprécier ce
principe.
La technique mise en oeuvre dans le cas de la caisse nationale des
industries électriques et gazières (CNIEG), créée au premier janvier 2005,
est basée sur la comparaison du rapport des charges et recettes, projetées
sur un horizon de 25 ans, entre le régime accueilli et le régime d’accueil.
Tout écart positif entre le rapport charges/recettes du régime accueilli et
celui du régime d’accueil est indicatif d’une absence de neutralité et doit
entraîner le versement d’une soulte, destinée à compenser la surcharge
pesant sur les régimes d’accueil. Elle est égale à la somme actualisée des
380. Article L. 222-7 du CSS : « l’adossement […] respecte le principe de stricte
neutralité financière de l'opération pour les assurés sociaux du régime général ».
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
369
surcoûts engendrés pour le régime d’accueil par l’adossement du régime
accueilli.
Toutefois, pour assurer la neutralité de l’opération, les régimes
peuvent, à défaut de soulte, effectuer un abattement sur les droits repris :
c’est le choix qu’ont fait les fédérations d’institutions de retraite
complémentaire AGIRC et ARRCO dans le cas de l’adossement du
régime des IEG, celui-ci n’ayant pas voulu payer la soulte demandée par
l’AGIRC et l’ARRCO.
Afin de mieux garantir le respect du principe de neutralité,
plusieurs dispositions d’ordre procédural ont été adoptées. La LFSS pour
2006 prévoit ainsi une information du Parlement avant toute opération
d’adossement, la publication de rapports annuels établis par la personne
morale en charge du régime adossé et l’établissement d’un rapport quin-
quennal présenté au Parlement sur la neutralité du dispositif.
Deux articles de la LFSS pour 2008, annulés par le Conseil
constitutionnel pour des motifs de procédure, prévoyaient en outre que la
CNAVTS soit consultée et puisse demander lors des prochaines
opérations à bénéficier d’une clause de révision des conditions de
l’adossement. Cette même préoccupation a conduit au dépôt en avril 2008
d’une proposition de loi d’origine sénatoriale.
3
–
Le cadre européen et la question des aides d’Etat
L’opération d’adossement décharge les entreprises concernées de
tout ou partie des engagements de retraite qui leur incombent. A ce titre,
ses modalités pourraient contrevenir à l’article 87 du Traité de Rome
381
.
La question se pose en particulier pour des entreprises opérant sur des
marchés qui s’ouvrent à la concurrence, dont on pourrait craindre qu’elle
serait faussée par la procédure d’adossement.
Le raisonnement doit distinguer ce qui relève des droits de base et
des droits spécifiques. S’agissant des droits spécifiques, on établit une
séparation entre ceux des droits qui ont été acquis avant la libéralisation
des secteurs concernés et ceux qui le seront par la suite. L’argumentation
des pouvoirs publics fait valoir que les droits spécifiques acquis sont une
charge anormale qui a été imposée à des entreprises en situation de
monopole : ils ne résultent donc pas d’un accord collectif de travail et
381 . […] sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles
affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au
moyen de ressources d’Etat sous quelques formes que ce soit qui faussent ou qui
menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines
productions.
C
OUR DES COMPTES
370
pénalisent
des
entreprises
qui
vont
se
retrouver
en
situation
concurrentielle.
Dans son avis
382
, la Commission s’appuie sur la théorie des
« coûts échoués »
383
pour admettre qu’une aide d’Etat finance des droits
spécifiques passés acquis au titre des activités monopolistiques de la
branche (pour les IEG, il s’agit des activités de transport et de distribution
de gaz et d’électricité). Cette aide serait en quelque sorte « le prix à
payer » pour permettre le développement de la concurrence. N’opérant
plus en situation monopolistique, les droits spécifiques futurs sont, quant
à eux, supposés relever uniquement des avantages consentis à leurs
salariés par les entreprises, qui doivent en conséquence en assurer le
financement.
B
–
La perspective de nouvelles opérations
d’adossement
1
–
Les enjeux
D’autres entreprises, opérant dans un cadre totalement ou
partiellement monopolistique en cours de libéralisation, disposant de
régimes d’entreprise à prestations définies et faisant appel public à
l’épargne, sont dans une situation analogue à celle des IEG, notamment
la Poste et la RATP. Des procédures d’adossement de leur régime spécial
sont en conséquence à l’étude avec des enjeux significatifs.
Le régime de la SNCF semble faire l’objet d’un traitement
différent alors que sa situation objective s’apparente à celle de la RATP.
2
–
Les travaux préparatoires déjà réalisés
Selon les entreprises, les travaux sont plus ou moins avancés.
a)
La RATP
Un schéma d’adossement existe déjà pour ce régime de retraite,
qui fait l’objet d’une procédure pour aide d’Etat, engagée le 10 octobre
382. « Décision de la commission du 16 décembre 2003 relative aux aides d’Etat
accordées par la France à EDF et au secteur des industries électriques et gazières »,
notification C (2003) 4637.
383. Cette analyse avance que « des engagements pris au temps du monopole et en
raison du caractère monopolistique de l’activité, peuvent se révéler impossibles à
honorer du fait de l’ouverture à la concurrence ».
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
371
2007 par la commission. On se limitera donc à la description du schéma
envisagé, sans préjuger du résultat des négociations entre les régimes ni
de la procédure ouverte par la commission.
La création et le fonctionnement de la caisse de retraite du
personnel de la RATP (CRPRATP) ont été définis par trois décrets du
26 décembre 2005 qui, d’une part, autorisent la caisse à passer des
conventions financières avec les régimes de droit commun, condition
impérative pour qu’un adossement soit réalisé et, d’autre part, disposent
que des versements de l’Etat permettront de financer les droits
spécifiques passés à la date du 31 décembre 2005 ainsi que les droits
spécifiques futurs postérieurs à cette date, dans la limite d’un plafond
d’emploi de 45 000 personnes.
Les observations de la Commission portent sur deux points
essentiels :
-
le paiement par l’Etat des soultes
384
résultant de l’adossement ;
-
le financement de l’ensemble des droits spécifiques passés et futurs
par l’Etat.
b)
La Poste
Pour ce qui concerne la Poste, la procédure d’adossement ne
concernerait que les fonctionnaires titulaires relevant du code des
pensions civiles et militaires de l’Etat (les agents non fonctionnaires
relevant déjà des régimes général et complémentaires). Un établissement
public national de financement des retraites de la Poste (EPNFRLP) a été
créé par un décret du 19 décembre 2006 qui l’autorise notamment à
passer des conventions financières. Ce qui a été retenu et accepté par la
Commission européenne, le 10 octobre 2007, concerne la réforme du
mode de financement du régime de retraite des fonctionnaires de la Poste,
fondée sur l’instauration d’une cotisation de retraite libératoire (appelée
« taux d’équité concurrentielle ») à la charge de la Poste et calculée de
manière à aligner le niveau des charges sociales de l’établissement sur
celui des personnels de droit privé, employés dans des secteurs proches
de ceux où opère la Poste. Le principe de l’adossement est également
validé par la commission.
La loi de finances rectificative pour 2006 charge l’EPNFLRP « de
négocier des conventions financières […] puis, le cas échéant, d'en
assurer l'exécution » et précise « qu’à défaut de conclusion des
conventions prévues […] dans un délai de deux ans à compter de la
384. La soulte due au régime général serait comprise entre 500 M€ et 870 M€ selon
les hypothèses.
C
OUR DES COMPTES
372
publication
de
la présente
loi
[soit
le
31 décembre
2008],
le
Gouvernement remet au Parlement un rapport qui examine et propose des
modalités alternatives de financement ».
3
–
La SNCF
Le cas du régime de retraite de la SNCF semble différent. Une
caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF
(CPRPSNCF) a été instituée par décret du 7 mai 2007. Ce texte ne permet
pas, en l’état, un adossement du régime puisque la possibilité de conclure
des conventions financières avec d’autres organismes de sécurité sociale
n’y est pas mentionnée. Tout au plus l’article 18 autorise-t-il la caisse à
conclure « en tant que de besoin…des conventions de gestion portant sur
l’exercice de tout ou partie des missions [….]». L’adossement apparaît
donc actuellement exclu des perspectives du régime.
C
–
La nécessaire clarification des conditions
d’adossement
L’examen des différentes modalités de réalisation de l’adossement
des IEG montre des différences de traitement notables entre le régime
général et les régimes complémentaires.
1
–
Le traitement de la neutralité financière et le partage des
risques dans le cas des IEG
a)
Le financement de la soulte
Les régimes complémentaires ont procédé à un abattement de
droits alors que le régime général a repris l’ensemble des droits calculés
selon ses propres règles, en contrepartie du versement d’une soulte de
7649 M€
385
, destinée à compenser la charge supplémentaire que
l’intégration du groupe démographique des IEG lui faisait subir
386
. Les
385. Le montant de la soulte a fait l’objet de l’arrêté du 31 janvier 2005, « fixant les
paramètres de calcul, le montant et le calendrier de la soulte ». La compensation
démographique a été mise à la charge de la CNIEG et les avantages familiaux à la
charge du FSV sans financement supplémentaire pour ce dernier. Ce mode de calcul a
pour effet, sinon pour objet, de réduire le montant de la soulte due. L’irrégularité qui
en a résulté pour le FSV avait déjà été signalée dans le RALFSS pour 2006 (rapport
précité, p. 325).
386 . Cet indicateur (rapport, calculé sur 25 ans, des charges de pension aux
cotisations) ressortait à 1,14 pour la CNAVTS et à 1,63 pour la CNIEG soit un taux
de validation des droits de 1,14/1,63=0,7
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
373
paramètres de calcul de cette soulte ainsi que son montant et le calendrier
de ses versements ont été fixés par un arrêté du 31 janvier 2005. Il y est
prévu que 60 % de la soulte doit être versée sous la forme de 20 annuités
de 287 M€, financées par la contribution tarifaire d’acheminement
(CTA)
387
. Cet étalement dans le temps introduit un élément de risque
pour le régime général dont les régimes complémentaires se sont abstraits
en préférant procéder à un abattement sur les droits passés.
De plus, la loi prévoit que les taux de CTA sont fixés en fonction
des besoins prévisionnels sur cinq ans par les ministres concernés. Cette
disposition ajoute de l’incertitude au financement du dispositif, dans la
mesure où des considérations étrangères au souci d’équilibre de
l’adossement, même légitimes, peuvent conduire à ne pas ajuster les taux
en fonction des besoins prévisionnels.
b)
Le choix du taux d’actualisation
Un point essentiel de toute négociation d’adossement est le choix
du taux d’actualisation employé pour le calcul de la soulte. Toutes choses
égales par ailleurs, plus celui-ci est élevé, plus faible est le montant total
de la soulte dont le régime accueilli doit s’acquitter. Le taux finalement
retenu pour l’adossement au régime général a été de 2,5 % alors que les
taux appliqués aux régimes complémentaires pour le calcul de la
contribution de maintien des droits (CMD due éventuellement en 2010)
ont été fixés à 2,25 %. Cette différence appelle deux remarques:
-
elle introduit une inégalité de traitement entre la CNAVTS et les
régimes complémentaires, au détriment de la première. Cette
différence de 25 points de base représente une minoration de la soulte
due à la CNAVTS de l’ordre de 220 M€ ;
-
elle n’est pas justifiée par un partage des risques plus favorable à la
CNAVTS. Au contraire, c’est l’inverse qui s’est produit, comme on le
verra ci-dessous.
c)
Le risque de projection et la clause de révision
Le principe d’une projection des charges et des recettes sur une
période de 25 ans, qui n’a pas fait l’objet de contestations lors des
négociations d’adossement de la CNIEG, entraîne par nature un risque de
projection : celui de voir les paramètres de la projection, en particulier les
387. La CTA s’est substituée à la part du tarif d’électricité ou de gaz naturel qui
couvrait les charges de retraite.
Pour les 40 %de la soulte gérés par le fonds de réserve des retraites (voir infra page
375).
C
OUR DES COMPTES
374
effectifs et les salaires, diverger du sentier initialement prévu. Sur ce
point, le traitement a également différé entre le régime général et les
régimes complémentaires.
Aucune clause de révision n’a été prévue pour le régime général,
alors que pour faire face à ce risque, les conventions financières passées
entre la CNIEG et les régimes complémentaires (AGIRC-ARRCO) ont
prévu qu’une clause de révision doit jouer cinq ans après la mise en
oeuvre effective de l’adossement, c'est-à-dire au 1
er
semestre 2010. Cette
clause prévoit que les taux de validation des droits passés repris par les
régimes complémentaires seront arrêtés de manière définitive au vu des
éventuels décalages constatés entre prévisions et réalisations des recettes,
pendant ces cinq premières années. Il est en outre prévu qu’au cas où les
taux de validation définitifs seraient inférieurs aux taux initialement
calculés
388
, la CNIEG devra s’acquitter d’une contribution de maintien
de droits (CMD) destinée à compenser la différence. L’incertitude sur le
montant de la CMD obligeant les entreprises de la branche à provisionner
les sommes éventuellement dues en 2010, celles-ci ont été encadrées dans
les conventions financières signées en 2005 entre la CNIEG et les
régimes complémentaires
389
.
d)
Les projections de recettes
Les hypothèses de projection des recettes retenues lors du calcul
sont également différentes dans les deux catégories de régimes. Le régime
général a retenu les hypothèses d’évolution des salaires figurant dans les
projections du COR (soit une évolution du salaire sous plafond de 1,6 %
par an jusqu’en 2010 puis 1,5 % par an par la suite), là où les régimes
complémentaires ont retenu l’hypothèse de leurs commissions paritaires
(soit une évolution du salaire sous plafond de 1 % par an jusqu’en 2010
puis 1,5 % par an par la suite). Ces hypothèses assurent un dynamisme
des recettes plus élevé pour le régime général, ce qui, toutes choses égales
par ailleurs, minore le rapport de charge du régime accueilli relativement
à celui qui a été calculé dans les régimes complémentaires. Cet effet
représente donc un désavantage relatif pour le régime général
comparativement aux régimes complémentaires, puisqu’il augmente en
conséquence le taux de reprise des droits au régime général et diminue
donc à due concurrence le montant de la soulte à verser.
388. Les taux de validation initialement calculés sont de 54,8 % pour l’ARRCO et
94,7 % pour l’AGIRC.
389. C’est ainsi que les taux de validation des droits finalement retenus en 2010 ne
pourront pas être inférieurs à 50,7 % à l’ARRCO et à 91,7 % à l’AGIRC,
correspondant à une CMD limitée à 720,6 M€ à l’ARRCO et 197,4 M€ à l’AGIRC.
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
375
e)
La résultante
L’examen des principales dispositions ayant permis de calibrer
l’adossement montre donc que le régime général a souffert d’un
traitement systématiquement plus désavantageux que celui dont ont
bénéficié les régimes complémentaires. Les premières données de gestion
disponibles pour les trois premières années 2005-2006-2007 font
d’ailleurs apparaître un déficit technique de l’adossement à la CNAVTS,
supérieur aux projections initiales, comme le montre le tableau suivant
qui compare les données figurant dans les rapports d’activité annuels de
la CNIEG à celles qui avaient été estimées en 2004 et qui ont servi pour
calculer la soulte (données en millions d’euros courants).
Comparaison des prévisions et des réalisations
En M€ courant
Cotisations
Prestations
Déficit
Prévues
Réalisées
Prévues
Réalisées
Prévu
Réalisé
2005
879
864
1 335
1377
-456
-512
2006
901
893
1 354
1404
-453
-510
2007
916
900
1 389
1445
-473
-545
Source :
Cour des comptes, comptes CNAVTS pour les réalisations et documents de
travail CNAVTS, pour les prévisions initiales.
Le déficit apparent -prévu et réalisé- ne tient pas compte de la
soulte, versée sous deux formes : une partie (60 %) est versée pendant
20 ans à hauteur de 287 M€ (montant indexé sur l’inflation) ; une autre
(40 %) est gérée par le fonds de réserves pour les retraites (FRR) jusqu’en
2025 et engendre des produits financiers
390
. Il ne prend pas en compte,
enfin, le remboursement par le FSV des majorations pour enfant, à
hauteur de 50 M€ environ par an.
Et sur la période de projection (de 25 ans) on peut craindre que
l’écart apparu entre les prévisions et les réalisations (en moyenne, de
l’ordre de 60 M€) ne conduise à une charge définitive pour la CNAVTS.
2
–
La nécessaire modification des règles d’adossement
L’analyse précédente suggère que, pour les adossements à venir,
certaines modifications doivent être apportées au schéma retenu pour
l’adossement de la CNIEG, en particulier afin de mieux prendre en
compte les intérêts patrimoniaux du régime général :
390. Pour les trois premières années, ces produits financiers potentiels se montent à
743 M€, mais le retournement des marchés financiers intervenu au cours du premier
2008 devrait diminuer ce montant.
C
OUR DES COMPTES
376
-
le
régime
général
doit
bénéficier,
à
l’instar
des
régimes
complémentaires, d’une clause de révision qui lui permette de se
protéger (au moins en partie) du risque de projection, même si la
portée de cette révision doit être encadrée, pour limiter l’exigence de
provisionnement dans les comptes des entreprises. Une disposition
législative devrait affirmer ce principe ;
-
les hypothèses de projection utilisées doivent être identiques entre le
régime général et les régimes complémentaires ;
-
l’opération d’adossement fait peser un risque financier sur les
partenaires de l’opération, risque synthétisé par un taux d’actualisation
qui fait l’objet de négociations. Le choix de ce taux doit être motivé de
la manière la plus objective possible, en tenant compte en particulier
des risques supportés par les différentes parties prenantes à l’opération.
Les régimes complémentaires, prenant acte des conditions dans
lesquelles l’adossement de la CNIEG a été négocié, pour la
détermination du taux d’actualisation, ont imposé le principe d’une
référence de marché
391
. Une disposition analogue devrait être
appliquée au régime général ;
-
en cas de nouvelle sollicitation du FSV pour prendre en charge des
droits non-contributifs, la réglementation relative au FSV devrait être
modifiée et le financement correspondant prévu ;
-
l’article L. 222-7 du CSS fait obligation à « la personne morale en
charge […] de la gestion du risque vieillesse [de présenter] chaque
année dans son rapport public annuel, l’ensemble des informations […]
permettant d’apprécier le respect du principe de neutralité financière ».
Or, l’information fournie par la CNIEG dans son rapport annuel
392
est
aujourd’hui insuffisante pour apprécier le respect du principe de
neutralité, notamment par manque de prévisions concernant les recettes
futures du régime. Afin de juger de l’évolution de l’adossement, on
devrait y trouver également une comparaison systématique, pour
chacun des régimes d’accueil (obligatoire et complémentaires) et année
par année, des réalisations et des prévisions en matière d’effectifs, de
salaires, de prestations et de versements de CTA. Un tel tableau de
bord serait en effet à même d’identifier rapidement les « dérapages »
éventuels.
391. « Principes généraux d’intégration », commission paritaire AGIRC-ARRCO du
2 décembre 2005.
392. « Les données démographiques et financières », rapports annuels 2005 et 2006.
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
377
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
53.
Prévoir une clause de révision encadrée au profit du régime
général lors des prochains adossements.
54.
Calibrer les futurs adossements en partant d’hypothèses de
projection de recettes identiques pour le régime général et les régimes
complémentaires.
55.
Fonder les taux d’actualisation sur des références objectives de
marché notamment et justifier les différences de taux éventuellement
retenues par une analyse circonstanciée du partage des risques entre les
partenaires de l’opération.
56.
Demander que les rapports annuels prévus par l’article L. 222-7
du CSS mettent systématiquement en regard prévisions et réalisations.
III - Les minima de pensions
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Dans les régimes de retraite, il existe un mécanisme qui garantit un
minimum de pension calculé en fonction de la durée d’assurance. Dans le
régime général et les régimes alignés, il s’agit du minimum contributif
(MICO). Instauré en 1983, le MICO assure une forme de solidarité entre
les ressortissants d’un même régime393.
Ce dispositif a été récemment réformé. La loi du 21 août 2003
portant réforme des retraites (dite loi Fillon), dans le même temps qu’elle
fixait comme objectif général d’atteindre en 2008 un montant total de
retraite égal à 85 % du SMIC net pour une carrière complète au SMIC, a
créé un MICO majoré afin de mieux valoriser les périodes travaillées.
La Cour a cherché à apprécier la pertinence, au regard des objectifs
assignés, de ce dispositif qui concerne actuellement plus de 40 % des
pensions liquidées chaque année par le régime général.
393. Un autre mécanisme de solidarité résulte du minimum vieillesse, financée par la
solidarité nationale, qui assure un minimum garanti non contributif à toute personne
âgée vivant en France. Ce dispositif n’est évoqué ici qu’en tant que de besoin et en
fonction de ses liens avec le MICO.
C
OUR DES COMPTES
378
A
–
Un dispositif devenu opaque
1
–
Une pluralité d’objectifs
a)
Un objectif initial clair...
La loi du 31 mai 1983, applicable au régime général et aux régimes
alignés
394
, a posé le principe que la pension de vieillesse ne peut pas être
inférieure à un montant minimum (couramment appelé
395
le « minimum
contributif » ou MICO). Elle introduisait ainsi, au sein même d’une
logique contributive, un élément de solidarité qui devait profiter en
priorité aux salariés ayant eu de longues carrières mais faiblement
valorisées
396
. Pour ce faire, une prestation différentielle individualisée
complète les droits propres acquis par l’intéressé pour les porter à un
montant net de 579,85€ par mois au 1
er
janvier 2008 (qui correspond au
montant entier du MICO).
Cette prestation est automatiquement attribuée dès lors que le futur
retraité remplit les conditions requises : l’assuré doit prétendre à une
pension personnelle de droit propre liquidée au taux plein
397
et inférieure
à ce montant minimum. Dans ce cas, la pension est portée à ce minimum,
proratisé en fonction de la durée d’assurance dans le régime considéré, les
éventuelles majorations ou bonifications s’ajoutant ensuite.
b)
...d’application complexe du fait des polypensionnés
Le calcul d’un tel minimum est rendu plus complexe, dans les cas
d’activités exercées successivement ou parallèlement dans plusieurs
394. Les salariés de la mutualité sociale agricole (MSA) et le régime social des
indépendants (RSI). D’autres minima existent dans le régime des pensions civiles et
militaires de l’Etat et dans les autres régimes spéciaux. Il en est de même dans la quasi
totalité des régimes. Ils ne sont pas étudiés ici.
395. Le terme « contributif » est un abus de langage dans la mesure où, comme nous
le verrons, le dispositif du MICO n’est justement pas contributif, le supplément qu’il
apporte ne correspondant pas à des cotisations versées. La loi n’utilise pas cette
terminologie, entrée dans le langage courant, mais bien celui de « minima de
pension ».
396. Les salariés ayant travaillé pour des salaires peu élevés, au SMIG, pouvaient
ainsi voir leur pension revalorisée, à un niveau voisin de celui permis par une carrière
au SMIC, créé en 1970 et dont le montant relatif avait été sensiblement réévalué.
397. Le taux plein est acquis pour les personnes justifiant d’une carrière complète tous
régimes confondus, d’une inaptitude/invalidité ou pour une liquidation à partir de
65 ans.
ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
379
régimes
398
. Le versement de minima de pension dans plusieurs régimes
de retraite simultanément rend d’ailleurs difficile l’établissement du
nombre de bénéficiaires de ces dispositifs compte tenu de la nécessité
d’éliminer les doubles comptes résultant des polypensionnés, au
demeurant de plus en plus nombreux.
2
–
Une complexité accrue
a)
Par l’incidence croissante des périodes validées
Le dispositif a vu sa signification progressivement modifiée, en
outre, en raison de l’incidence croissante des nombreuses possibilités de
validation de périodes non cotisées
399
au régime général et dans les
régimes alignés, qui ont rendu le dispositif encore moins contributif.
La tendance à l’augmentation de la part des trimestres validés mais
n’ayant pas donné lieu à cotisation pour des générations différentes est
nette : ainsi, dans le régime général, pour les femmes nées entre 1930 à
1944, le nombre des trimestres validés mais non cotisés était, à 31 ans,
inférieur à deux, alors que ce chiffre croît jusqu’à plus de 8 trimestres
pour les générations nées après 1960.
Cela est dû principalement à la montée en charge de l’assurance
vieillesse des parents au foyer (AVPF) et à l’augmentation des périodes
validées mais non cotisées au titre du chômage. Ces deux dispositifs sont
certes anciens mais leur importance commence à croître à partir des
générations nées dans la deuxième moitié des années 1950, générations
qui se caractérisent par des entrées dans la vie active plus tardives et qui
alternent beaucoup plus fréquemment que leurs aînés périodes de travail
(souvent précaires) et de chômage.
398. Une note de la CNAVTS, préparée pour la séance du COR du 27 juin 2007,
explicite l’ensemble des formules de calcul, notamment pour le calcul du MICO de
polypensionnés, quand la durée d’assurance totale dépasse la durée de proratisation
(en cas de double activité, par exemple).
399. La durée cotisée correspond aux trimestres d’assurance ayant donné lieu au
versement de cotisations obligatoires ou volontaires. D’autres périodes pendant
lesquelles l’affilié a conservé son statut d’assuré social mais n’a pas exercé d’activité
salariée (maladie, maternité, accident du travail, chômage, etc.) sont génératrices de
droits à retraite et
validées
au titre de la durée d’assurance prise en compte dans le
calcul de la pension.
C
OUR DES COMPTES
380
Ce trait distingue nettement les bénéficiaires du MICO qui ont en
moyenne de l’ordre de 30 trimestres de durée cotisée en moins que les
retraités non bénéficiaires du MICO. Pour les pensions liquidées en 2005,
la part de la durée cotisée dans la durée d’assurance validée est inférieure
de 11 points pour les bénéficiaires du MICO par rapport aux non
bénéficiaires (73 % contre 84 %)
400
.
b)
Par l’effet de la réforme de 2003
Sans revenir sur les avantages liés aux périodes validées, la loi
Fillon, dans son article 26, a entendu mieux prendre en compte dans la
retraite les périodes travaillées (ou plus exactement les périodes ayant
donné lieu à cotisations à la charge de l’assuré), en instaurant une
majoration de pension (le minimum contributif majoré) au titre des seules
années cotisées. Au 1
er
janvier 2008 la pension portée au MICO majoré se
montait à 633,61 € par mois, soit 53,76 € de plus que le MICO.
Dans l’exposé des motifs de la loi Fillon, le gouvernement s’était
en outre engagé à revaloriser le MICO majoré par une triple augmentation
de 3 % entre 2004 et 2008, afin de contribuer à atteindre l’objectif d’un
taux de remplacement de 85 % du SMIC net lors de la liquidation pour
les
personnes
ayant
eu
une
carrière
complète
au SMIC. Ces
revalorisations ont été faites selon le calendrier prévu.
Complexes dans leurs principes (comme le montre l’exemple
développé ci-dessous), ces dispositifs font cependant l’objet d’une gestion
automatisée et sont transparents pour leurs bénéficiaires.
Exemple de calcul du minimum contributif
Prenons le cas d’un assuré né en 1948 ayant le taux plein au titre de
l’inaptitude et totalisant 120 trimestres au régime général, dont 80 cotisés.
Compte tenu de sa génération, la durée d’assurance pour l’obtention d’une
pension entière est de 160 trimestres. Sur la base d’un MICO entier de
579,85 € et d’un MICO majoré plus élevé de 53,76 €, cet assuré pourra
bénéficier en 2008, d’un minimum contributif calculé de la façon
suivante :
(579,85 € x 120/160) + (53,76 € x 80/160) = 461,77 € par mois
Ce montant est garanti à l’assuré, en fonction de sa durée
d’assurance. Le montant versé au titre du minimum est un différentiel
entre la pension de droit propre et ce seuil calculé. Ainsi, si l’assuré a un
droit personnel mensuel de 300 €, le supplément de pension attribué au
titre du MICO sera de 161,77 € par mois.
Source :
CNAVTS, note Cadr@ge n° 3, juin 2008.
400. Source : note CNAVTS/DPCE n° 07-034, 30 avril 2007, « Logique et incidence
du minimum contributif ».
LES ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
381
B
–
Des bénéficiaires plus nombreux et divers
1
–
La croissance du nombre des bénéficiaires
a)
Un nombre significatif de bénéficiaires
Le tableau qui suit retrace le nombre de bénéficiaires et le montant
des suppléments de pensions versés par le régime général et les deux
principaux régimes alignés, régime des salariés agricoles et régime social
des indépendants (RSI).
Les bénéficiaires et les montants versés par régimes en 2006
En Md€ et effectifs
en milliers
Nombres de bénéficiaires
(polypensionnés inclus)
dont
monopensionnés
Montant
versé
Régime général
3 940
2 033
4,1
RSI
384
ND
ND
Salariés agricoles
1 233
128
0,6
NB : Le système d’information du RSI ne permet pas de faire la distinction entre
mono et polypensionnés, de même qu’il ne permet pas de connaître le montant
différentiel de MICO dans une pension servie par le régime.
Source :
Données fournies par les régimes
Au total, sur la base de ces données (en supprimant les doubles
comptes entre régimes
401
), le nombre de retraités, bénéficiaires du
MICO, pour les trois régimes concernés, peut être estimé à près de
4,4 millions de personnes et le coût total des suppléments versés au titre
des MICO à 4,7 Md€ (hors RSI).
b)
Près de 40 % du total des retraités
Pour le seul régime général la croissance a été particulièrement
forte puisqu’il y avait en métropole 1,3 million de bénéficiaires en 1990
et 2,9 millions en 2000. Au 31 décembre 2007, 4,1 millions de retraités,
dont 70 % de femmes percevaient une prestation au titre du MICO pour le
régime général. Rapporté au nombre total de retraités du régime général
401. On peut considérer que la plupart des polypensionnés sont gérés par le régime
général et qu’ils figurent donc dans ses effectifs. Le total tous régimes implique donc
d’y intégrer en outre les monopensionnés des autres régimes. Cette estimation ne
sous-estime qu’à la marge le nombre réel total, les polypensionnés relevant des deux
régimes des salariés agricoles et du RSI sans relever du régime général étant très peu
nombreux.
C
OUR DES COMPTES
382
ayant des droits propres (10,8 millions en métropole en 2007), le
pourcentage des retraités bénéficiaires d’un MICO ressort donc à 37,5
%.
Ainsi, alors qu’entre 1988 et 1992, le pourcentage de nouveaux
retraités bénéficiaires du MICO variait entre 31 % et 32 % des flux de
liquidants, à partir de 1994 ce pourcentage a augmenté régulièrement
pour atteindre 42,3 % dès 2006. Le graphique ci-après illustre l’augmen-
tation constatée tout au long de ces dernières années.
Part des flux de pensions de droits propres portées au MICO (régime
général/métropole).
30,0%
40,0%
50,0%
60,0%
70,0%
80,0%
90,0%
1985
1987
1989
1991
1993
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
Régime agricole
Régime général
Source :
CNAVTS (départs avant 60 ans exclus), MSA (salariés agricoles).
Le taux est également fort dans les régimes alignés : de l’ordre de
60 % (en stock) pour les salariés agricoles.
Cette augmentation du nombre des bénéficiaires induit bien
entendu une augmentation corrélative des montants qui sont consacrés par
les régimes au paiement du MICO. Une autre cause de ce phénomène
réside également dans la croissance continue depuis 1983 du pourcentage
de minima non proratisés, qui est passé, entre 1983 et 2003, de 5,5 % à
14,5 %
402
.
402. Selon les données de la CNAVTS (Retraite et société n° 32).
LES ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
383
c)
Un accroissement qui va se poursuivre
Cet accroissement résulte d’abord des conséquences de la loi de
1993 qui ne produit ses pleins effets qu’à partir de 2008. Elle a durci les
conditions d’obtention d’une retraite notamment en allongeant la durée de
référence prise en compte pour le calcul du salaire annuel moyen qui sert
à liquider la pension. Par ailleurs l’indexation des salaires reportés au
compte se fait sur la base de l’évolution des prix depuis 1987 et non plus
sur celle des salaires. Cela contribue à diminuer l’actualisation des
salaires entrant dans le calcul du salaire annuel moyen (SAM) individuel
et donc à réduire le taux de remplacement du salaire par la pension. Ces
dispositions affectent en particulier les personnes ayant de faibles durées
cotisées ainsi que des carrières faiblement valorisées, ce qui augmente la
part de ceux qui, ayant de petites retraites, bénéficient du MICO.
Les mutations qui ont été observées, par ailleurs, sur le marché du
travail depuis les années 70 et en particulier l’émergence d’un chômage
massif impacteront également directement les retraites des salariés qui
feront liquider leurs pensions dans les prochaines années. Ces mutations
ont été les suivantes :
-
la tendance à une mobilité du travail accrue. Elle se traduira par une
croissance du nombre de polypensionnés
403
donc par l’augmentation
de la probabilité de validation de durées courtes dans certains régimes.
Ceci
devrait
se
traduire,
à
réglementation
inchangée,
par
l’augmentation de MICO de faibles montants ;
-
la croissance de la part des carrières heurtées et de la précarité
(alternance chômage/emploi) pourrait conduire, dans certains cas, à
une croissance des périodes non cotisées dans les périodes validées ;
-
l’incidence du développement du temps partiel et de l’intérim doit
aussi être soulignée en raison des règles de validation qui prévalent en
ce domaine puisque 200 heures travaillées au SMIC (ce qui correspond
à un temps partiel d’environ 40 % au SMIC) permettent de valider un
trimestre.
Ces
évolutions
conjuguées
devraient
conduire
selon
toute
probabilité, toutes choses égales par ailleurs, à augmenter encore le
pourcentage des bénéficiaires du MICO.
403. Ainsi la génération 1958, qui n’a pas encore terminé sa vie professionnelle,
comptait d’ores et déjà en 2001 un nombre moyen de régimes d’affiliation plus élevé
que les générations 1934 à 1942. Source : DREES/Etudes et Résultats n° 400, mai
2005.
C
OUR DES COMPTES
384
2
–
La diversité des bénéficiaires
a)
Des montants très variables
Dans le régime général, le supplément moyen versé au titre du
MICO a été en 2007 de 91,7 € par mois mais les montants individuels
attribués vont de quelques centimes à plusieurs centaines d’euros.
Ventilation des MICO au régime général
404
MICO inférieur
à 10 € par mois
MICO compris
entre 300 € et 580 € par mois
Monopensionnés
90 680 soit 4,2 % du total
49 788 soit 2,3 % du total
Polypensionnés
150 052 soit 7,4 % du total
10 183 soit 0,5 % du total
TOTAL
240 732 soit 5,8 % du total
59 971 soit 1,4% du total
Source :
Cour des comptes à partir des données CNAVTS
Pour les anciens salariés agricoles, le montant moyen du
supplément au titre du MICO est plus faible : 40,4 € par mois en 2006.
b)
Des catégories diversifiées
Selon une note de la DREES à l’intention du COR
405
, la
population couverte par le minimum contributif (entier ou proratisé) est
extrêmement variée
406
. « On distingue cependant quatre populations
principales permettant de couvrir les trois quarts des bénéficiaires » :
-
les
femmes
monopensionnées
au
régime
général
à
carrière
incomplète (qui représentent à peu près 30% des bénéficiaires) ;
-
les bénéficiaires de pensions attribuées au titre de l’inaptitude ou
d’ex-invalide (environ 20 %);
-
les polypensionnés régime général et régime alignés (près de 20 %
également);
404. Des MICO sont aussi attribués par les régimes alignés mais on ne dispose
d’aucune donnée sur le cumul des suppléments au titre du MICO pour un bénéficiaire
donné.
405. « Petites retraites et minimum contributif : enjeux et coût d’une revalorisation ».
Note DREES n° 33/2007 pour la séance du 19 décembre 2007 du COR.
406. Le régime général est en mesure d’établir dans ses données une distinction
systématique entre les suppléments au titre du MICO attribués aux pensions normales
(2 961 755 retraités), aux pensions d’ex invalides (233 260) et aux pensions
d’inaptitude et assimilées (959 652) au 31 décembre 2007.
LES ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
385
-
les polypensionnés régime général-fonction publique, ayant pour leur
majorité fait l’essentiel de leur carrière à la fonction publique et ne
disposant que de quelques trimestres au régime général qui sont portés
au MICO, bien entendu proratisé (de l’ordre de 4 % des bénéficiaires).
Au total et en raison de ces composantes, la comparaison des
bénéficiaires et des non bénéficiaires fait apparaître pour les premiers un
poids
relatif
plus
important
des
carrières
incomplètes
et
des
polypensionnés.
Caractéristiques des bénéficiaires du MICO.
Bénéficiaires du MICO
Non-bénéficiaires du MICO
Part des carrières incomplètes
69,4%
39,8%
Polypensionnés
43,0%
23,1%
Source :
Calcul Cour des comptes à partir du document DREES pour la séance du
19 décembre 2007 du COR (pensions liquidées entre 2001 et 2004).
C
–
La nécessité d’un meilleur ciblage
1
–
Des bénéficiaires nombreux et hétérogènes
L’examen comparé de la répartition des retraites avec ou sans
MICO met en évidence le défaut de ciblage de ce dispositif.
a)
Un ciblage insuffisant
En
toute
logique,
les
bénéficiaires
du
MICO
devraient
correspondre plutôt à des personnes disposant de faibles retraites.
Or, pour un nombre important de retraités ce n’est pas le cas : en
effet l’observation, à partir de l’EIR, des retraites liquidées (retraites
complémentaires incluses) montre que le pourcentage des « petites »
retraites (inférieures à 700 €)
407
, de l’ordre de 25 %, est beaucoup plus
faible que celui des bénéficiaires du MICO (40 % pour le régime
général).
407. Ce montant correspond à l’un des seuils de pauvreté actuellement utilisé par
l’INSEE qui est de 50 % de la médiane des niveaux de vie (681 € par mois en 2005
soit 703 € en 2007 si l’on actualisait avec l’indice des prix à la consommation). Le
minimum vieillesse, quant à lui, est de 628 € en 2008.
C
OUR DES COMPTES
386
Distribution des pensions complètes des retraités de droits directs
résidant en France en 2004 (carrières complètes et incomplètes, tous
régimes)
Source :
EIR 2004, DREES (extrait du document « Petites retraites et minimum
contributif : enjeux et coût d’une revalorisation » préparé pour la séance du
19 novembre 2007 du COR).
Cette apparente contradiction s’explique par le nombre non
négligeable de retraités polypensionnés ayant eu une carrière complète et
bénéficiaires du MICO. L’EIR de 2004 montre que cette occurrence
concerne 15 % du total des retraités tous régimes confondus ce qui, sur la
base du nombre total de retraités estimé à 13 millions de retraités en 2004
représente prés de 2 millions de personnes.
Le diagramme ci-après présente la ventilation du montant des
retraites de cette sous population en distinguant mono-pensionnés et
polypensionnés.
On constate ainsi que plus de 30 % de ces retraites sont supérieures
à 1 400 € et qu’elles concernent exclusivement des polypensionnés, qui
bénéficient donc d’un effet d’aubaine
408
.
408. Ce constat est d’ailleurs fait également dans un note récente de la CNAVTS :
« dans les conditions actuelles de calcul, le bénéfice du minimum contributif
s’apparente, pour un certain nombre, à un effet d’aubaine et défavorise les
monopensionnés au regard des polypensionnés » (note d’information de 2007 n°2007-
065 DPCE).
0
2
4
6
8
1
0
0
40
0
700
1
0
0
0
130
0
1600
1
9
0
0
2200
2
500
2800
3
100
3
4
0
0
3700
4
0
0
0
4
3
0
1
4
6
0
2
4
9
0
0
en euros mensuel
%
LES ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
387
Répartition des bénéficiaires du minimum contributif à carrière
complète, tous régimes
0%
2%
4%
6%
8%
10%
12%
14%
16%
<
500
600-699
80
0-
99
9
1200-1399
16
00-
1
799
2000-2499
27
50-
2
999
>=3500
Monopensionnés
Polypensionnés
Source :
EIR 2004 et DREES. (Tranches de montants de retraite en euros mensuels
pour des personnes ayant liquidé entre 2001 et 204 une pension au régime général ou
dans un régime aligné et ayant une carrière complète).
Toutefois en application de la réglementation un nombre important
de retraités ayant de faibles pensions ne bénéficie pas du MICO. Selon la
DREES
409
, sur la base d’un seuil conventionnel de 800 €, un peu plus de
1 million de retraités sont dans cette situation.
Cette population est très hétérogène car, pour moitié, elle se
compose de pensionnés ayant liquidé au taux plein à 65 ans ou pour
inaptitude, mais avec des carrières courtes et des salaires relativement
élevés ne permettant pas de satisfaire aux conditions d’accès au minimum
contributif et pour une autre moitié, de pensionnés n’ayant pas liquidé
leurs droits au taux plein.
b)
Des groupes de bénéficiaires non prévus à l’origine
Au-delà du constat d’une distribution statistique élargie, on peut
mettre en évidence la modification des bénéficiaires, par rapport aux
objectifs initiaux.
409. Etudes et résultats n° 639 juin 2008.
C
OUR DES COMPTES
388
Un salarié ayant accompli toute sa carrière en étant rémunéré au
niveau du SMIC bénéficierait d’un supplément au titre du MICO majoré,
pour un montant mensuel de 54,4 €.
Droits propres
579,25 €/mois
MICO simple
579,85 €/mois
(soit un supplément de 0,6 €/mois)
MICO majoré
633,61 €/mois
(soit un supplément de 54,4 €/mois)
On constate que les salariés qui n’ont constitué que des droits
inférieurs, en particulier ceux qui n’étaient qu’à temps partiel
410
,
bénéficient du dispositif de manière beaucoup plus significative. Un
salarié qui n’aurait pu accomplir toute sa carrière à temps plein rémunéré
au SMIC, bénéficierait d’un supplément au titre du MICO majoré de
l’ordre de 340 € par mois.
Or ces salariés ne figuraient pas parmi les cibles privilégiées du
dispositif initial ; et moins encore dans le cadre de la priorité établie par la
loi de 2003 en faveur des carrières travaillées.
On peut dès lors se poser la question d’une réorientation
(éventuellement progressive) du dispositif du MICO.
2
–
Le contexte actuel rend possible une réorientation du MICO
Deux évolutions récentes, la recherche d’une meilleure prise en
compte des périodes travaillées, d’une part, la revalorisation du minimum
vieillesse, d’autre part, contribuent à modifier le contexte.
a)
La recherche déjà engagée d’une valorisation plus marquée des
périodes travaillées
L’article 4 de la loi du 21 août 2003 dispose que « La Nation se
fixe pour objectif d’assurer en 2008, à un salarié ayant travaillé à temps
complet et disposant de la durée d’assurance nécessaire pour bénéficier
du taux plein, un montant total de pension lors de la liquidation au moins
égal à 85 % du SMIC net, lorsqu’il a cotisé pendant cette durée sur la
base du SMIC ». Le MICO majoré contribue à cet objectif et sa
revalorisation programmée, déjà signalée, en était l’instrument privilégié.
410. Une note récente préparée par la DSS pour le COR (séance du 18 juin 2008)
souligne l’importance relative de l’apport du MICO majoré pour les salariés à temps
partiel et indique en contrepartie le très faible développement de la possibilité de
cotisations majorées, pour les travailleurs à temps partiel.
LES ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
389
Pour autant, il n’est pas aisé de vérifier dans quelle mesure cet
objectif est atteint. En effet, les études réalisées mettent en avant la forte
influence des hypothèses retenues sur la réponse à apporter : taux de
cotisation effectifs à l’ARRCO pendant la carrière, taux d’assujettis-
sement à la CSG des revenus de remplacement (existent trois taux
différents variant selon les revenus du foyer), référence du SMIC utilisée,
sont autant de paramètres qui peuvent modifier significativement le taux
de remplacement net au moment de liquider sa pension. Or la loi et les
textes règlementaires sont restés flous sur ces divers points.
En tout état de cause, la garantie d’un niveau global de pension de
85 % du SMIC net au moment de la liquidation suppose une coordination
des régimes de base et complémentaire. Il conviendrait dès lors de
prévenir le risque que les régimes de base, par l’intermédiaire d’un tel
dispositif, n’aient à combler les éventuels retraits des régimes
complémentaires sur lesquels l’Etat n’exerce aucune tutelle. La réflexion
annoncée par le gouvernement a d’ailleurs explicitement évoqué ce
point
411
.
b)
La revalorisation du minimum vieillesse
Des dispositifs très différents
Minimum vieillesse et MICO sont deux dispositifs dont la logique
est différente, voire opposée : minimum de ressources financé par la
411 . Dans le document remis aux partenaires sociaux le 28 avril dernier, le
gouvernement indique qu’il est « disposé à reconduire jusqu’en 2012 un objectif de
minimum de pension pour une carrière complète au SMIC. Mais il souhaite trouver
avec les partenaires sociaux le moyen d’atteindre cet objectif de la façon la plus
efficiente, le minimum contributif avec ses règles actuelles n’étant pas forcément
l’outil le plus approprié pour y parvenir, comme l’a souligné le COR. Par souci de
clarté, il serait souhaitable de définir les responsabilités respectives des régimes de
base et des régimes complémentaires dans le respect de cet objectif. »
C
OUR DES COMPTES
390
solidarité nationale pour l’un
412
et minimum de pension financé par la
solidarité interne au régime pour l’autre. Leurs montants début 2008 sont
de 628 € pour le minimum vieillesse, de 580 € pour le MICO et de 634 €
pour le MICO majoré. A ces montants s’ajoutent, pour les pour les
pensions de base éventuellement portées au MICO, le bénéfice de la
retraite complémentaire, d’un niveau variable et d’un montant de l’ordre
de 200 € par mois pour une carrière au SMIC.
Contrairement au MICO attribué automatiquement par les divers
régimes de base concernés et qui constitue un droit propre individuel,
l’attribution de l’indemnité différentielle individualisée que constitue le
minimum vieillesse implique une demande de la personne concernée et
repose sur une appréciation des ressources de son foyer.
Des bénéficiaires pour partie communs
Dans les faits, de nombreuses personnes ont accès aux deux
dispositifs concomitamment : ainsi fin 2007, le régime général comptait
262 068 personnes bénéficiaires tout à la fois du MICO et du minimum
vieillesse soit près de 45 % des quelque 600 000 bénéficiaires actuels du
minimum vieillesse. Cette population disposait d’un montant moyen de
droits propres mensuels de 173 €, d’un montant moyen de MICO de
118 € et de 251 € au titre du minimum vieillesse.
C’est en particulier le cas des assurés, notamment des femmes, qui
peuvent bénéficier du MICO par l’âge en ayant validé l’essentiel (voire la
totalité) de leurs trimestres d’assurance au régime général sans avoir
cotisé ou seulement sur de faibles durées ou de faibles montants au titre
d’une activité professionnelle.
412 . Constitué auparavant de prestations organisées en deux étages (le premier
permettait de porter les revenus au niveau de l’AVTS grâce à une majoration de
pension et le second complétait les ressources pour les porter au niveau requis), le
« minimum vieillesse » a été réformé par l’ordonnance du 24 juin 2004. L’allocation
de solidarité aux personnes âgées (ASPA), prestation différentielle désormais unique,
permet d’atteindre le montant du minimum vieillesse. Mise en place à partir de janvier
2007 (mais le dispositif antérieur perdure au profit des personnes déjà allocataires),
l’ASPA est servie sous conditions de ressources à compter de 65 ans (60 ans en cas
d’inaptitude ou d’invalidité) à des personnes justifiant d’une résidence stable et
régulière en France. Son niveau est de 628 € par mois en 2008 pour une personne
seule et un peu moins du double pour un ménage. La prestation fait en principe l’objet
d’une récupération partielle sur héritage.
LES ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
391
L’écart entre minimum vieillesse et MICO
Le principe posé lors de la loi de 1983 instituant un minimum de
pension visait à « récompenser » les carrières longues et peu valorisées.
Ce principe de relation avec le revenu et la durée d’activité
professionnelle a été par la suite constamment réaffirmé, en particulier à
l’article 2 de la loi Fillon
413
. Il fallait donc qu’un écart positif existe entre
la retraite obtenue par une personne qui aurait cotisé une carrière entière
sur le SMIC et le minimum vieillesse, c'est-à-dire entre le niveau d’une
pension essentiellement contributive et celui d’un minimum social.
Lors de la création du MICO en 1983, cet écart se situait entre 1,26
et 1,31, compte tenu d’une retraite mensuelle de base au taux plein de
2 200 F, d’une retraite complémentaire ARRCO de 700 F à 800 F et d’un
minimum vieillesse de 2 200 F.
Les évolutions intervenues depuis lors sont retracées dans le
tableau ci-dessous qui compare la situation d’une personne seule sans
enfant qui prendrait sa retraite entre 2001 et 2008, après 40 ans de
carrière au SMIC cotisée au taux contractuel de l’ARRCO, avec une
personne sans droits à retraite qui bénéficie du minimum vieillesse.
413. « Tout retraité a droit à une pension en rapport avec les revenus qu’il a tirés de
son activité ».
C
OUR DES COMPTES
392
Rapport entre une pension (régime général + ARRCO) obtenue après
une carrière au SMIC et le minimum vieillesse pour des liquidations
entre 2001 et 2008
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
*
2008
**
2008
***
2012
1
2012
2
MICO+pension
ARRCO/MV
1,20
1,21
1,22
1,22
1,23
1,24
1,25
1,26
1,23
1,20
1,17
1,09
MICO
Maj+pension
ARRCO/MV
1,25
1,26
1,29
1,30
1,34
1,31
1,28
1,25
1,16
*Minimum vieillesse pris à sa valeur du 1
er
janvier 2008.
**Minimum vieillesse après prise en compte du versement exceptionnel de 200 €
faisant l’objet du décret du 7 mars 2008.
***Minimum vieillesse éventuellement revalorisé de 5 % sur l’ensemble de l’année
2008 (l’hypothèse faite est que le versement exceptionnel de 200 € est un à-valoir sur
une revalorisation de 5 % sur l’ensemble de l’année 2008).
1 Hypothèse d’inflation de 3,5 % par an et revalorisation du minimum vieillesse de
5 % par an d’ici à 2012.
2 Hypothèse d’inflation de 2 % par an et revalorisation du minimum vieillesse de 5 %
par an d’ici à 2012.
Source :
Calcul Cour des Comptes
Compte tenu des évolutions intervenues depuis 1983, ce ratio a été
réduit et atteignait 1,20 début 2000. Il a de nouveau augmenté entre 2004
et 2007 en raison de l’évolution des retraites complémentaires (qui ont
bénéficié des revalorisations du SMIC) mais également de la mise en
place du MICO majoré.
A partir de 2008 les engagements importants pris par le
gouvernement en matière de revalorisation du minimum vieillesse
(versement exceptionnel de 200 € en 2008 et augmentation du minimum
vieillesse de 25 % d’ici 2012) vont à nouveau réduire substantiellement
cet écart, qui en 2012 devrait se situer au niveau le plus bas jamais
constaté (1,09 ou 1,17 selon l’hypothèse considérée).
3
–
Les évolutions envisageables
Un meilleur ciblage des bénéficiaires du MICO doit être recherché.
Deux pistes sont susceptibles d’être combinées.
a)
La prise en compte de l’ensemble des pensions tous régimes de
base confondus
Cette piste vise à ne verser le MICO qu’aux seuls titulaires de
pensions de base, tous régimes confondus, dont le montant total serait
inférieur au MICO.
LES ASPECTS DE LA GESTION DES REGIMES DE RETRAITE
393
La CNAVTS a d’ailleurs déjà exploré cette voie, dans la note
précitée n°2007-065 DPCE, qui indique que « si la pension tous régimes
(pensions versées par les régimes de base uniquement) était retenue, un
certain nombre de polypensionnés ne bénéficierait plus du minimum
contributif […]. Dans l’optique de rétablir l’équité entre les bénéficiaires
et limiter le bénéfice du minimum contributif aux assurés ayant de faibles
pensions, il convient de modifier ses conditions d’attribution en retenant
dans son calcul le niveau de pension de droit propre tous régimes de base
confondus ».
Les simulations faites sur cette hypothèse indiquent que le nombre
de bénéficiaires serait diminué de manière importante (près de 42 % des
polypensionnés n’en bénéficieraient plus, soit 17 % du total des
bénéficiaires actuels). Par contre l’incidence financière serait réduite, en
termes relatifs, puisque l’économie produite serait d’environ 50 M€, soit
1,3 % des flux, pour la première année de mise en oeuvre.
L’économie totale, cependant, serait supérieure, puisqu’il convient
d’ajouter les incidences sur les régimes alignés, où la proportion de
polypensionnés est encore plus importante que dans le régime général.
b)
La concentration des avantages sur les seules périodes cotisées
Dans un contexte de déficits croissants de la branche retraite, en
particulier au sein du régime général, on pourrait envisager de fusionner
le dispositif du MICO et du MICO majoré et de le recentrer sur sa cible
prioritaire initiale. Cette deuxième orientation devrait être à même de
mieux assurer les carrières complètes cotisées en ne retenant pour le
calcul des périodes prises en compte que celles effectivement travaillées,
à l’exclusion des durées validées même cotisées par un tiers (branche
famille pour l’AVPF et FSV pour les périodes de chômage indemnisé).
Certes, une telle réforme pénaliserait en particulier les femmes qui
ne bénéficient de facto, encore aujourd’hui, que de durées cotisées plus
brèves. De ce fait ces populations, sauf pour celles qui appartiennent à
des ménages disposant de ressources suffisantes devraient être prises en
charge par le dispositif de solidarité de droit commun qu’est le minimum
vieillesse.
De même, il conviendrait d’engager une réflexion sur une
proratisation de l’avantage attribué aux carrières à temps partiel
414
.
414. Avantage indirect lié à la possibilité de valider un trimestre complet pour 200
heures travaillées au SMIC.
C
OUR DES COMPTES
394
________________________
SYNTHESE
_________________________
.
Au vu des données caractérisant la population des bénéficiaires du
MICO, la question d’un ciblage plus fin de la prestation se pose. En effet,
une partie importante des bénéficiaires d’une prestation conçue pour des
personnes à « carrières complète faiblement valorisées », n’a ni des
carrières complètes (pour un tiers d’entre elles), ni des carrières
faiblement rémunérées.
Il conviendrait donc de mieux cibler le MICO en revenant à l’esprit
de la loi de 1983 et donc d’en exclure, notamment, les polypensionnés
bénéficiant de pensions « élevées » ainsi que certains bénéficiaires qui
devraient relever du minimum vieillesse
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
57.
Faire masse de l’ensemble des pensions de base dans
l’attribution du MICO.
58.
Expertiser les conséquences d’un recentrage du MICO sur les
carrières complètes travaillées.
395
Chapitre XII
Le suivi des précédentes
recommandations
_____________________
PRESENTATION
_______________________
Dès les premiers rapports sur l’application des lois de financement,
la Cour a formulé des recommandations susceptibles de répondre aux
critiques formulées. Et très tôt également la Cour a procédé à un suivi de
ses recommandations, tantôt de manière sélective, sur des points qui lui
paraissaient présenter des enjeux particulièrement importants
415
, tantôt de
manière globale, en considérant le degré de prise en compte par
l’administration de l’ensemble des précédentes recommandations
416
.
Les deux approches sont ici réunies : dans un premier temps, est
présentée une approche globale du degré de suivi des recommandations
faites par la Cour, à partir de l’examen qu’en font chaque année les
administrations. Trois analyses portant sur de précédentes interventions,
sont ensuite présentées, la Cour considérant que ses recommandations ont
été trop partiellement suivies : la situation des UGECAM, analysée dans
deux précédents rapports, le statut des agents de direction du régime
général, qui avait fait l’objet d’un référé adressé au ministre chargé des
affaires sociales, enfin la gestion des risques accidents du travail et
maladies professionnelles.
I - Le suivi des recommandations effectué par les
administrations
Le « suivi des suites » a pris un tour renouvelé grâce à l’adoption
d’un amendement parlementaire devenu l’article 4 de la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2003 :
« Chaque année, avant le
15 juillet, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport qui présente
les suites données à chacune des recommandations formulées par la Cour
des comptes dans son rapport sur l’application des lois de financement de
la sécurité sociale établi conformément à l’article LO 132-3 du code des
juridictions financières »
.
415. Le rapport sur la sécurité sociale de septembre 2001 analyse ainsi de manière
sélective les suites données à ses précédentes recommandations relatives à la maîtrise
des dépenses de santé.
416 . Les rapports sur la sécurité sociale de septembre 1998 et septembre 1999
procèdent ainsi, respectivement, à un suivi global des recommandations des trois
précédentes années, puis à un suivi des recommandations de la seule année
précédente.
398
C
OUR DES COMPTES
Cinq rapports ont été élaborés, qui passent en revue chaque année
la suite donnée aux quelques 50 recommandations
417
contenues dans le
dernier RALFSS. Ils traduisent un effort indéniable de l’administration
pour expliquer le sort réservé aux recommandations de la Cour.
Pour autant, l’examen auquel a procédé la Cour fait apparaître que
divers progrès sont nécessaires : dans la procédure de transmission, dans
l’objet des analyses produites, enfin dans leur contenu.
A
–
Une transmission au calendrier trop irrégulier
Selon les éléments dont dispose la Cour, les rapports ont été établis
chaque année, mais leur transmission a été irrégulière, sauf en 2007
(même si le délai prévu par la loi n’a pas été respecté, puisque le rapport a
été transmis aux commissions compétentes le 17 septembre et non en
juillet). Les deux premiers rapports relatifs aux RALFSS pour 2003 et
2004, portant respectivement sur l’application des lois de financement
pour 2002 et 2003, ont en effet été transmis ensemble à la présidence des
deux assemblées, en novembre 2005 (à une date qui rendait d’ailleurs leur
utilisation difficile, en vue du débat relatif au projet de loi de financement
pour 2006
418
). Le rapport suivant, relatif au RALFSS pour 2005, portant
sur la LFSS 2004 ne semble pas avoir été transmis.
B
–
Le suivi porte sur des recommandations récentes
L’administration a choisi de faire porter son examen sur les
recommandations du seul RALFSS immédiatement précédent. Dès lors,
le calendrier assez resserré entre la publication du RALFSS, accompagné
de ses recommandations (septembre n) et le suivi qui est effectué par
l’administration (juillet n+1, selon la loi) rend difficile un recensement
suffisamment probant des mesures correctives qui sont souvent
annoncées comme « en cours » ou faisant l’objet de réflexions
complémentaires.
Pour
ne
donner
que
deux
exemples,
en
réponse
aux
recommandations faites dans le rapport pour 2006 sur la réforme des
régimes spéciaux de retraite, le suivi fait par l’administration a évoqué
seulement la réforme du régime spécial de la Banque de France (réalisée
417. Leur nombre varie selon les années, de 50 à 70 : 70 pour le RALFSS 2002, 56
pour le RALFSS 2003, 50 pour celui de 2004, 53 pour celui de 2005, 44 pour 2006,
enfin 57 en 2007
418. On peut d’ailleurs relever que cet envoi n’aurait pas été suivi d’une transmission
à la commission des affaires sociales.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
399
par un décret du 27 février 2007), mais ne pouvait alors inclure la réforme
plus ample des régimes spéciaux intervenue à l’automne 2007.
De même, le suivi effectué en 2006 des recommandations relatives
à la gestion des AT-MP, présentées dans un rapport particulier thématique
de 2002 et reprises par le RALFSS de 2005, a consisté à signaler pour
l’essentiel que les négociations engagées avec les partenaires sociaux
devraient permettre de modifier la situation critiquée par la Cour. Or ces
négociations n’ont partiellement abouti qu’en 2007 (sans d’ailleurs
répondre à toutes les observations de la Cour
419
).
Certes, malgré le délai assez bref qui sépare la remise du RALFSS
au Parlement de la remise du rapport sur les suites, il peut arriver que des
suites soient rapides et parfois même intégrées dans la loi de financement
de la sécurité sociale pour l’année suivante
420
. Tel a été le cas en
particulier pour la recommandation du rapport sécurité sociale de
septembre 2007 de réexaminer ou de plafonner certaines exonérations de
cotisations sociales : en ce qui concerne la plus-value des stock-options,
des mesures ont été décidées dès le PLFSS pour 2008. En revanche,
aucune mesure n’a encore été prise sur les déductions forfaitaires dont
bénéficient certaines professions ou sur les avantages de départ en retraite
et de licenciement.
Mais, le plus souvent les recommandations de la Cour demandent
du temps pour être suivies d’effet, tout particulièrement lorsqu’elles
correspondent à l’évaluation de la mise en oeuvre de politiques
publiques
421
.
Si l’on veut donner sa pleine efficacité au travail de suivi fait par
l’administration, tout en respectant le calendrier prévu par la loi, il
conviendrait de « segmenter » le suivi et de prévoir qu’un premier
examen, en N+1, vise surtout à vérifier que les constats de la Cour sont
partagés et que des plans d’actions ou des mesures correctives ont été
inscrits à l’agenda des administrations.
419. Ce point a paru justement devoir faire l’objet d’une analyse particulière en infra.
420. Ainsi, l’examen des mesures législatives incluses dans le PLFSS pour 2007
montre que sur les 17 articles qui correspondent à de précédentes recommandations de
la Cour, la moitié provenait du RALFSS le plus récent. Voir le rapport public annuel
2008, p. 21 et suivantes.
421. La Cour entend désormais mieux marquer d’emblée ce caractère en précisant si
ses recommandations sont des orientations ou plutôt des recommandations,
susceptibles d’un suivi précis (de même qu’elle indique désormais si ses
recommandations sont réitérées ou présentées pour la première fois).
400
C
OUR DES COMPTES
L’année suivante (soit en n+2) l’examen des suites serait plus
approfondi et permettrait de comparer les mesures mises en oeuvre aux
recommandations, dix-huit mois après leur publication.
On pourrait enfin imaginer que certains points, soit parce qu’ils
font l’objet de divergences, soit parce que les mesures attendues se sont
trouvées retardées
422
, fassent l’objet d’un suivi sélectif en n+3, complé-
mentaire de celui que la Cour continuera à décider, sous la forme
d’enquêtes de suivi.
C
–
L’absence d’appréciation synthétique
1
–
Pour le suivi individualisé des recommandations
Le suivi effectué par l’administration dans son rapport a consisté le
plus souvent à exposer de manière détaillée les plans d’actions souvent
décidés par l’administration, à la suite des recommandations de la Cour,
en signalant notamment les textes parus ou en préparation. Faute d’une
appréciation globale synthétique, il n’est cependant pas aisé d’apprécier
dans quelle mesure l’administration partage (ou non) le point de vue
exprimé par la Cour ni dans quelle mesure les premières mesures
(préparatoires ou déjà d’exécution) correspondent aux recommandations.
Une telle appréciation serait pourtant utile au Parlement, pour lui
permettre de repérer les éventuels points de divergence et de demander, le
cas échéant, qu’ils soient examinés.
2
–
Pour le suivi global
A partir de telles appréciations résumées, pour chacun des points,
la Cour serait mieux à même de donner une première indication
consolidée ou un ordre de grandeur sur le degré de suivi de ses
recommandations,
même
s’il
convient
de
rester
prudent
dans
l’interprétation de données globales.
L’examen auquel a procédé la Cour elle-même, à partir des deux
derniers rapports de suivi, fait apparaître que le taux de recommandations
mises en oeuvre de manière complète était, pour le RALFSS de 2006,
d’un peu moins de 30 % et de celles qui étaient engagées, au moins
partiellement, de près de 35 %. Au total, près des deux tiers des
recommandations étaient au moins partiellement suivies d’effet au bout
422. De multiples réponses font état de textes réglementaires en préparation, mais
dont la préparation est allongée du fait des concertations inter-directions, parfois
interministérielles et très souvent du nombre de consultations préalables obligatoires.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
401
d’un an. L’appréciation que l’on peut tirer du précédent rapport est assez
voisine.
Ces ordres de grandeur sont d’ailleurs assez comparables à ceux
affichés dans le RALFSS pour 1999, qui concluait « que la moitié environ
des recommandations de la Cour sont mises en oeuvre moins d’un an
après qu’elles ont été formulées et 80 % après deux ou trois ans ».
Les recommandations qui ne sont pas ou pas suffisamment suivies
d’effet justifient que la Cour revienne sur ses analyses, en tenant compte
des objections qui lui ont été faites, mais aussi en s’efforçant de mettre en
évidence, autant que possible, les motifs de l’absence de mise en oeuvre.
Les deux exemples qui suivent correspondent à cette situation.
II - La situation des UGECAM
Créées en 1999 pour gérer les établissements de l'assurance
maladie, les unions pour la gestion des établissements des caisses de
l'assurance maladie (UGECAM) rassemblent au niveau régional des
structures qui étaient auparavant gérées par les caisses régionales ou les
caisses primaires d'assurance maladie.
Après huit années de fonctionnement, le bilan des UGECAM
apparaît contrasté. Les UGECAM ont veillé à une bonne intégration de
leurs établissements dans les schémas régionaux d’organisation sanitaire.
Ainsi, elles se sont employées à développer, conformément aux
orientations nationales, les alternatives à l’hospitalisation à temps
complet, la prise en charge des patients lourdement handicapés et
désorientés. Cette offre a notamment été rééquilibrée au profit du secteur
médico-social. La physionomie de l’offre de soins des UGECAM a ainsi
considérablement évolué depuis leur création en 1999.
Pour autant, leurs établissements, dont les capacités d’accueil ne
représentent que 1,12 % de l’offre nationale sanitaire et médico-sociale
(mais 10,7 % de l’offre de rééducation) connaissent de nombreux
problèmes de fonctionnement, qui correspondent notamment à la mise en
oeuvre très partielle des recommandations faites par la Cour dans le
rapport 2003 sur l’application des lois de financement de la sécurité
sociale. Il comportait les trois recommandations suivantes :
-
arrêter des orientations stratégiques nationales sur l’évolution des
unions et de leur périmètre, en particulier pour les établissements à
rattacher et les traduire dans un contrat pluriannuel de gestion ;
-
adapter la classification des emplois aux métiers hospitaliers ;
402
C
OUR DES COMPTES
-
tenir compte des besoins spécifiques des UGECAM dans la
programmation des moyens, notamment financiers et informatiques, de
la CNAMTS.
Sur chacun de ces points, les évolutions, bien que réelles, restent
cependant insuffisantes.
A
–
Des orientations stratégiques non abouties
Si le conseil d’administration de la CNAMTS a suivi les
recommandations de la Cour en adoptant le 7 décembre 2006 des
orientations stratégiques de principe pour les UGECAM (recomposition
de l’offre de soins des établissements, redécoupage du périmètre des
UGECAM et retour à l'équilibre financier des unions et de leurs
établissements), leur déclinaison opérationnelle n’est cependant toujours
pas effective, notamment pour les deux dernières mesures.
Les orientations stratégiques devaient être traduites dans l’avenant
à la convention d’objectifs et de gestion (COG) CNAMTS-Etat pour
2006-2009 et dans les contrats pluriannuels de gestion (CPG) qui
devaient être conclus pour cette même période entre la CNAMTS et
chaque UGECAM. Or cet avenant, qui doit régler notamment les
problèmes de l’équilibre budgétaire des établissements sanitaires et du
financement des sièges des UGECAM, n’a toujours pas été signé. Il en
est de même pour les CPG 2006-2009 qui, bien que déjà préparés, ne
pourront être signés que lorsque l’avenant à la COG aura été conclu.
Par ailleurs, le redécoupage du périmètre des UGECAM n’a pas
abouti. On dénombre actuellement treize UGECAM qui emploient en
siège 286 ETP pour gérer 150 établissements dont 67 médico-sociaux et
83 sanitaires.
Le découpage géographique des UGECAM, arrêté en 1997, a
rapidement montré ses limites et laissé apparaître que les regroupements
régionaux doivent reposer sur une offre suffisante en volume. Pour
autant, les seuls regroupements opérés depuis 1999 ont concerné les
UGECAM d’Alsace et de Bourgogne-Franche-Comté et les UGECAM
du Centre et d’Auvergne-Limousin-Poitou-Charentes qui ont mis en place
une équipe de direction commune en 2003 et 2004, les deux unions
restant cependant distinctes. Chacune de ces quatre UGECAM a ainsi
gardé un conseil d’administration et un financement propre. S’agissant de
l’UGECAM d’Auvergne-Limousin-Poitou-Charentes, la Cour
423
a
423. Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de
septembre 2007.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
403
montré, à la suite d’un nouveau contrôle COREC, que cette évolution
organisationnelle minimale n’avait pas produit les effets escomptés en
raison notamment d’un manque de coordination entre les services de
l’ordonnateur et ceux du comptable. Le redécoupage des UGECAM doit
donc se poursuivre
car seul un regroupement plus fonctionnel permettrait
une réelle mutualisation des moyens et des coûts de fonctionnement.
B
–
L’adoption d’une nouvelle classification des
emplois
La deuxième recommandation de la Cour consistait à adapter la
classification des emplois aux métiers hospitaliers. Si celle-ci a
effectivement eu lieu, son financement est cependant loin d’être assuré.
Le protocole d’accord du 30 novembre 2004 relatif à la
classification des personnels des organismes de sécurité sociale a permis
d’identifier tous les emplois relevant des filières médicale, soignante et
éducative et d’introduire une logique de classification conforme aux
standards des établissements de santé. Le protocole distingue une
cinquantaine d’emplois qui s’articulent autour de quatorze métiers de
référence avec douze niveaux de rémunération.
Le financement de ce protocole a rencontré un certain nombre
d’obstacles au sein des établissements gérés par les UGECAM et plus
particulièrement dans les établissements sanitaires. Cet accord est en effet
plus favorable que ceux applicables dans les autres établissements
participant au service public hospitalier (PSPH) et dans les hôpitaux
publics
424
.
424. Le surcoût du protocole d’accord du 30 novembre 2004 a été mis en évidence en
2007 par l’inspection générale des affaires sociales. L’IGAS a expertisé quatre
conventions appliquées dans les établissements sanitaires privés PSPH : FEHAP
(fédération des établissements hospitaliers et d’assistance privés à but non lucratif),
CLCC (centre de lutte contre le cancer), Croix rouge française et UGECAM. Les
UGECAM relèvent de la convention la plus coûteuse avec un surcoût global de 16 %
par rapport à l’hôpital public.
404
C
OUR DES COMPTES
Ecarts synthétiques par secteur par rapport à l’hôpital public, sur le
coût total standard et sur les composants du coût, avec la structure de
l’hôpital public
Ecart sur
coût total
Ecart sur
salaire net
Ecart sur contributions
salariales
Ecart sur contributions
patronales
FEHAP
4,0 %
-0,2 %
23,9 %
3,9 %
CLCC
14,3 %
7,9%
41,2%
14,9%
CRF
3,3%
-2,3%
28,4%
3,3%
UGECAM
16,0%
7,1%
20,2%
26,9%
Source :
rapport IGAS avril 2007
Il a ainsi généré un surcoût de l’ordre de 23,9 M€ pour les années
2004 et 2005 dans les établissements sanitaires des UGECAM qui n’a été
couvert qu’à hauteur de 9,6 M€ par les dotations accordées. Il est à noter
que les articles L. 123-1 et L. 224-5-3 du code de la sécurité sociale
complétés par l’article 69 de la LFSS pour 2007 disposent que l’autorité
de tarification n’est pas liée par les conséquences financières des
conventions agréées. Ces accords restent cependant opposables aux
gestionnaires des établissements qui doivent les appliquer à leurs
personnels.
Les
UGECAM
doivent
donc
rechercher,
dans
leur
organisation et leur fonctionnement, les ressources suffisantes pour les
financer.
C
–
Des problèmes persistants pour le financement des
UGECAM et de leurs établissements
La
troisième
recommandation
de
la
Cour
relative
à
la
programmation des moyens, notamment financiers et informatiques, n’a
pas été mise en oeuvre. En effet, huit années après leur création, les
UGECAM continuent à rencontrer des difficultés de fonctionnement liées
au problème de financement des frais de siège et aux difficultés
budgétaires des établissements qu’elles gèrent.
La DHOS s’était engagée, en collaboration avec la CNAMTS, à
régler définitivement et favorablement la question du transfert des frais de
siège au cours de la COG 2004-2007. La question n’est cependant pas
résolue à ce jour et l’objectif initial d’autonomie financière des
UGECAM n’est pas atteint.
Les différents problèmes rencontrés par la CNAMTS pour le
financement des UGECAM et de leurs établissements sont donc
nombreux, difficiles à résoudre et la mobilisent beaucoup, sans résultats
tangibles, ainsi que ses partenaires institutionnels. De fait, la signature de
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
405
l’avenant à la COG Etat/CNAMTS relatif aux UGECAM achoppe
actuellement sur ces difficultés de financement. L’impasse budgétaire qui
résulte des demandes de la CNAMTS, dans le cadre des discussions
relatives à l’avenant, se situe à hauteur de 49 M€, soit plus de 7 % de
l’enveloppe sanitaire des UGECAM (642 M€). Ce montant tient compte
du surcoût non financé du protocole du 30 novembre 2004, mais aussi de
diverses autres mesures dont la justification n’est pas toujours établie
(prise en compte du protocole d’accord du 9 avril 1998, revalorisation des
charges techniques et contentieuses, revalorisation des gardes et astreintes
médicales, soutien exceptionnel à certaines UGECAM…). Compte tenu
des positions divergentes sur ce sujet entre la CNAMTS et les tutelles et
en l’absence d’un arbitrage sur cette question, il est vain d’espérer une
signature rapide de l’avenant à la COG.
La Cour relève également un pilotage déficient du réseau par la
CNAMTS et l’absence d’un schéma informatique national. La CNAMTS
ne fournit par ailleurs aucun référentiel de contrôle interne en matière
comptable. Des premiers travaux ont été réalisés sur la clôture des
comptes mais la caisse nationale pourrait assumer un rôle accru de tête de
réseau en édictant un corps de règles à l’usage des UGECAM.
Pour remédier à ces nombreux problèmes et dysfonctionnements,
la CNAMTS a récemment renforcé le pilotage national des UGECAM
par la nomination d’un directeur dédié à ce réseau et rattaché à la
direction générale.
Devant ce constat, la Cour maintient donc ses recommandations.
III - Le retrait de fonctions des directeurs et agents
comptables des organismes de base du régime
général de sécurité sociale
Suite à un contrôle effectué à la Caisse générale de sécurité sociale
(CGSS) de la Réunion
425
, la Cour avait, par un référé du 27 mai 2003,
attiré l’attention des ministres concernés sur la complexité du régime
juridique encadrant le retrait de fonctions des directeurs et agents
comptables des caisses locales de sécurité sociale au sein du régime
général. En effet, trois procédures coexistaient sans que soit assurée au
dispositif une réelle cohérence :
425. Dans les départements d’outre-mer, les caisses générales de sécurité sociale
couvrent à la fois le régime général et le régime agricole et sont en charge du
recouvrement ainsi que de la gestion des risques maladie, accident du travail et
vieillesse. Seul le risque famille ne fait pas partie de leurs attributions.
406
C
OUR DES COMPTES
-
les sanctions disciplinaires pouvant aller jusqu’au licenciement, à
l’initiative de l'employeur, c'est-à-dire le conseil d’administration de la
caisse locale, elle-même personne morale de droit privé autonome ;
-
le retrait d’agrément par le ou les ministres concernés entraînant,
depuis 1985, « de plein droit cessation des fonctions » et non plus
licenciement
426
; cet agrément accordé par l’Etat est l’une des
conséquences de l’exercice par la caisse d’une mission de service
public ;
-
la décision de fin de fonctions dans l’intérêt du service, prise par les
directeurs des caisses nationales, dispositif créé par l’ordonnance du
24 avril 1996 dans le but de renforcer leur autorité, mais n'ayant jamais
été mis en oeuvre faute d’intérêt des partenaires conventionnels et de
textes d’application.
En conséquence, la Cour recommandait que soit clarifié le cadre
juridique régissant les conditions de retrait de fonctions des directeurs et
agents comptables des caisses locales.
Compte tenu de l’importance des enjeux soulevés en termes de
gouvernance de la sécurité sociale et suite aux constatations faites lors
d’un récent contrôle portant sur l’UCANSS, elle a souhaité revenir sur les
réformes engagées depuis 2003.
A
–
La recherche d’une cohérence entre les procédures
La Cour recommandait que soit « explicitement prévu que le retrait
d’agrément équivaut à une mesure de licenciement ».
1
–
Le droit n’a pas changé
Dans un arrêt du 11 décembre 2001, la Cour d’appel de Saint-
Denis de la Réunion a considéré que le retrait d’agrément n'impliquait pas
obligatoirement la rupture du contrat de travail, qui ne pouvait être établie
sur ce seul motif. Suite à cette jurisprudence, la Cour recommandait que
soient précisées les conséquences juridiques du retrait d’agrément et que
soit clarifiée son articulation avec la procédure de licenciement par le
conseil d’administration.
Dans leur réponse de 2003, les ministres de la santé et des affaires
sociales
s’engageaient
à
mettre
en
oeuvre
rapidement
cette
recommandation par voie législative. Or, depuis, ce dispositif n’a pas été
426. Article R. 123-50 du code de la sécurité sociale.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
407
modifié et ses implications pour le directeur de la caisse nationale et le
conseil d'administration local n’ont pas été clairement énoncées.
S’il n’a pas été donné suite à la recommandation de la Cour, la
procédure de retrait d’agrément n’a plus été utilisée. Considérée comme
très lourde, elle ne semble pas adaptée pour sanctionner des insuffisances
professionnelles. Le ministère chargé de la sécurité sociale, en l'absence
de crise majeure, a souhaité privilégier la gestion par les organismes de
leurs ressources humaines. La Cour ne peut donc que renouveler son
souhait que les conséquences juridiques du retrait d’agrément soient
précisées par la loi.
Parallèlement, le licenciement reste une compétence exclusive des
conseils
d’administration.
Durant
la
période
2002-2006,
quatre
procédures seulement ont abouti, signe que de telles mesures ont rarement
été jugées nécessaires, mais aussi d'une certaine réticence de principe des
caisses et de leurs difficultés à mener à bien, au sein des instances
délibérantes, une procédure juridiquement complexe dans le strict respect
des dispositions conventionnelles et réglementaires.
2
–
Les conséquences dommageables perdurent
A défaut de licenciement, les directeurs à qui on souhaite retirer
leurs fonctions sont encouragés à faire valoir plus rapidement que prévu
leurs droits à la retraite, sont détachés dans d'autres organismes ou
administrations, se voient temporairement confier diverses tâches au sein
de la caisse nationale ou intègrent le « corps de mission » de l’UCANSS
où ils exercent des fonctions de conseil et d’étude. En tout état de cause,
les incertitudes juridiques qui entourent ces mouvements sont à l'origine
d'un certain nombre de recours contentieux et de difficultés réelles de
gestion des ressources humaines.
Les errements constatés lors du contrôle de l’UCANSS
427
et les
observations formulées par la Cour à cette occasion illustrent les limites
de telles pratiques.
427. L’union des caisses nationales de sécurité sociale (UCANSS) se voit confier des
tâches communes sur délégation des caisses nationales, essentiellement en matière de
signature de conventions collectives relatives aux personnels des organismes de
sécurité sociale, de conditions de travail ou d’opérations immobilières.
408
C
OUR DES COMPTES
La gestion de la situation de l’ancienne directrice de l’UCANSS
La réforme des instances de l’UCANSS intervenue en 2002
428
prévoyait notamment de repenser la gouvernance de cette structure et
impliquait de changer sa direction. Faute de pouvoir licencier la directrice,
solution trop coûteuse et difficile à fonder juridiquement, ou recourir à la
décision de fin de fonctions dans l’intérêt du service, procédure non mise
en oeuvre, un poste de directrice déléguée auprès du conseil d’orientation a
été créé pour gérer, de façon transitoire, la fin de carrière de l’intéressée.
Toutefois, les textes ne prévoyant ni cet emploi, ni les conditions dans
lesquelles il devait être pourvu, celle-ci a été nommée selon une procédure
ad hoc par une autorité incompétente, avec l’accord de la tutelle.
Cette ancienne directrice a par ailleurs demandé et obtenu de
conserver sa rémunération antérieure y compris la prime liée à l’exercice
effectif des fonctions d’un directeur d’organisme alors même que ses
nouvelles attributions ne l’occupaient plus qu’à temps très partiel.
Parallèlement, son maintien dans des fonctions à l’UCANSS lui a
permis de bénéficier de responsabilités accrues au sein du fonds
d’assurance formation des organismes du régime général de sécurité
sociale (FAF sécurité sociale)
429
en cumulant ses responsabilités
antérieures de directrice avec celles de directrice administrative. Cette
décision du président et du vice président du FAF a contrevenu au
protocole d’accord portant constitution de ce fonds, en vertu duquel seul
un directeur d’organisme de sécurité sociale peut être nommé à ce poste.
En outre, l’augmentation de rémunération accordée à cette occasion n’a
été soumise ni à l’avis du conseil de gestion du FAF, ni transmise pour
information à l’UCANSS, son principal employeur.
Enfin, l’intéressée a continué à cumuler ses fonctions et
rémunérations à l’UCANSS et au FAF avec celle de directrice de la caisse
de prévoyance des agents de la sécurité sociale et assimilés (CAPSSA). Au
total, elle a ainsi pu percevoir en 2005 et 2006 une rémunération nette
moyenne d’environ 150 000 € par an.
B
–
La définition d’une autorité compétente unique
La Cour estimait que « la loi pourrait confier à une seule autorité
l’ensemble des pouvoirs de nomination et de licenciement des directeurs
et agents comptables d’organismes de base ».
Dans leur réponse, les ministres s’étaient engagés à faire paraître le
texte d’application nécessaire pour mettre en oeuvre les dispositions
législatives de l’ordonnance de 1996 concernant la procédure de cessation
428. Article 75 de la LFSS pour 2002 et décret n° 2002 338 du 6 mars 2002 portant
réforme de l’UCANSS.
429 . Organisme paritaire collecteur agréé chargé de collecter les contributions
obligatoires relatives à la formation professionnelle.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
409
de fonctions dans l’intérêt du service. Ces mesures n’ont toujours pas été
prises et la situation est restée identique dans les branches vieillesse,
recouvrement et famille.
En ce qui concerne la branche maladie, l'article 58 de la loi du
13 août 2004
430
a donné au directeur général de la Caisse nationale de
l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) le pouvoir de
nommer les directeurs et agents comptables des caisses, le conseil de
l’organisme concerné n’ayant plus qu’un pouvoir d’opposition aux deux
tiers de ses membres
431
.
Parallèlement a été réaffirmé le droit du directeur général de mettre
fin à leurs fonctions pour des motifs autres que disciplinaires sous réserve
de reclassement
432
. Toutefois, aucune négociation avec les partenaires
sociaux sur la question du retrait de fonctions n'a encore été ouverte.
Subsistent donc un certain nombre d'incertitudes peu propices à apaiser
leurs réticences et à faciliter l'utilisation d'un dispositif qui n'a toujours
pas été testé. Ce constat doit toutefois être tempéré dans les faits. En effet,
de par son existence même, la nouvelle procédure de retrait de fonctions
s'avère déjà être un élément de gestion efficace, la perspective d’en être
l’objet ne pouvant qu’inciter les directeurs et agents comptables
concernés à accepter une solution de compromis.
Le retrait de fonctions justifié non par l'intérêt du service, mais par
la sanction de fautes de nature disciplinaire, demeure de la compétence
des conseils des caisses locales. C’est le seul pouvoir qu’ils ont conservé
dans la branche maladie sur la carrière des directeurs et agents
comptables dont ils sont employeurs, les autres prérogatives (nomination,
évaluation, individualisation de la rémunération, pouvoir hiérarchique...)
étant exercées par le directeur général de la caisse nationale.
Le dispositif mis en oeuvre dans la branche maladie devrait être
étendu aux autres branches du régime général. Cette évolution ne serait
toutefois pas suffisante pour répondre aux recommandations de la Cour
qui souhaitait que la même autorité dispose des pouvoirs de nomination et
de licenciement.
La Cour recommandait ainsi que « le cadre régissant les conditions
de cessation de fonctions soit revu et clarifié ».
430. Article L. 217-3-1 du code de la sécurité sociale.
431. Pour les organismes locaux ou régionaux entrant dans le champ de compétence
de plusieurs organismes nationaux ce pouvoir est exercé conjointement par les
directeurs des caisses nationales concernées.
432. Les modalités d’application de ces dispositifs ont été précisées par le décret
n° 2004-1075 du 12 octobre 2004, article R. 217-11 du code de la sécurité sociale.
410
C
OUR DES COMPTES
Cette recommandation conserve toute sa pertinence. La cohérence
entre les différentes procédures de retraits de fonctions n’est toujours pas
assurée. Celle-ci implique avant tout une réflexion sur la véritable nature
des liens de subordination entre le conseil de la caisse et son directeur et
par conséquent sur l'identité réelle de l'employeur.
La Cour suivra donc les efforts engagés dans le domaine de la
gouvernance de la sécurité sociale et sera attentive à ce que soit
pleinement prise en compte dans ce cadre la question des retraits de
fonction.
IV - La gestion du risque accidents du travail et
maladies professionnelles
_____________________
PRESENTATION
_______________________
La Cour a publié entre 2002 et 2007 plusieurs rapports analysant
divers aspects de la gestion et de l’indemnisation du risque accidents du
travail et maladies professionnelles.
- En février 2002, un rapport public particulier (RPP) synthétisait
l’état de la gestion du risque accidents du travail et maladies
professionnelles. Ce rapport contenait sept recommandations explicites
433
et beaucoup d’autres moins formalisées mais se déduisant des constats
effectués.
.
- En mars 2005, la Cour a remis au Sénat, en application de l’article
L. 132-3-1 du code des juridictions financières, un rapport relatif à
l’indemnisation des conséquences de l’amiante, financée pour l’essentiel
433
. 1- Réformer
le
CSPRP
(conseil
supérieur
de
prévention
des
risques
professionnels) en élargissant sa composition pour qu’il ait une vue d’ensemble des
risques professionnels.
2- Modifier
les
modalités
d’établissement
des
tableaux
de
maladies
professionnelles, avec notamment la création d’une commission scientifique.
3- Elaborer un contrat d’objectifs et de gestion entre l’Etat et la CNAMTS pour
ce qui concerne les risques professionnels.
4- Prévoir dans le contrat d’objectifs et de moyens de l’Etat avec l’InVs des
dispositions l’incitant à développer son activité son activité en matière de risques
professionnels.
5- Etablir un bilan des diverses modifications réglementaires intervenues ces
dernières années sur l’organisation de la prévention dans le secteur du BTP.
6- Pour la transposition des directives communautaires, prévoir que les arbitrages
interministériels sur les points sensibles interviennent dès le début des travaux.
7- Unifier et rationaliser les instances régionales de coordination.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
411
par la branche AT-MP. La Cour y analysait le fonctionnement des deux
fonds d’indemnisation des victimes actuellement utilisés et réservait ses
critiques les plus sévères au fonds de cessation anticipée d’activité des
travailleurs de l’amiante (FCAATA).
- Enfin, une insertion dans le rapport de septembre 2005 sur
l’application de la loi de financement de la sécurité sociale reprenait de
manière résumée les précédentes recommandations.
Trois ans plus tard, compte tenu du constat d’une trop grande
lenteur dans les évolutions intervenues, la Cour a procédé à un nouveau
bilan qui distingue les règles de base et les dispositions spécifiques
applicables à l’indemnisation des victimes de l’amiante.
Le rapport public de 2002 abordait les différents aspects de la
branche AT-MP : la gouvernance, la tarification des cotisations, la
procédure de reconnaissance, enfin l’indemnisation. Depuis, sont
intervenus deux lois, une convention d’objectifs et de gestion, un plan
santé au travail et plusieurs rapports qui ont conforté les observations de
la Cour et essayé de remédier, dans un certain foisonnement d’initiatives,
à plusieurs des insuffisances constatées. Mais sur les aspects qu’avait
abordés la Cour, les évolutions sont partielles.
A
–
La gouvernance de la branche
Plusieurs recommandations du rapport public de 2002 concernaient
ce que l’on peut appeler la gouvernance de la branche tant au niveau
national qu’au niveau régional.
1
–
Au niveau national
a)
L’autonomie de la branche et la coordination des acteurs
La loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie demandait
aux partenaires sociaux de faire des propositions en matière de
gouvernance de la branche AT-MP et d’indemnisation. Il en est résulté
deux accords entre partenaires sociaux, l’un en matière de gouvernance,
proposant de renforcer l’autonomie de la branche AT-MP (février 2006),
l’autre en matière de prévention, de reconnaissance et d’indemnisation
(avril 2007).
L’autonomie de la branche AT-MP a été en outre confortée par la
signature en février 2005 de la première COG de la branche AT-MP.
L’élaboration
d’une
telle
convention
correspondait
à
l’une
des
recommandations de la Cour, relayée par l’article 56 de la loi de
412
C
OUR DES COMPTES
financement de la sécurité sociale de 2003. Cette convention constitue un
premier progrès : elle reconnaît notamment dans son préambule la
nécessité de moderniser et de simplifier les instruments de la tarification.
Concernant la coordination des acteurs, les avancées apparaissent
plus limitées. Or, face au grand nombre d’instances concernées, une
organisation efficace au niveau national serait indispensable.
L’existence d’une gouvernance partagée entre notamment le
ministère du travail (direction générale du travail, inspection et médecine
du travail, ANACT) et le champ de la santé (DSS, direction des risques
professionnels de la CNAMTS, INRS, ou Eurogip) peut être en effet
source de redondances et crée un besoin de coordination. Elle est en tout
cas à l’origine d’une multiplication de structures et d’initiatives
parallèles. A titre d’exemple, en février 2005 ont été tout à la fois adoptés
le plan santé au travail présenté par le ministre du travail et la COG AT-
MP, préparée par la DSS et la CNAMTS.
b)
L’expertise sur les risques professionnels
Constatant l’insuffisance de l’expertise et l’absence d’instance
susceptible d’exercer un rôle d’alerte, la Cour recommandait de prévoir
dans le contrat d’objectifs et de moyens de l’Etat avec l’institut national
de veille sanitaire (InVS) des dispositions l’incitant à développer son
activité en matière de risques professionnels.
Deux initiatives ont été prises quasi simultanément :
-
la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique
reconnaît dans son article 2 l’importance des conditions de travail dans
la politique de santé publique et place l’InVS au coeur du dispositif de
surveillance épidémiologique des maladies professionnelles ;
-
en février 2005, le plan santé au travail renforçait en particulier les
approches épidémiologiques en élargissant le rôle de l’AFSSE à la
santé au travail. Cette agence devenait l’AFSSET (agence française de
sécurité sanitaire de l’environnement et du travail) et recevait la
mission de fournir une expertise scientifique indépendante sur
l’évaluation des risques en milieu professionnel, notamment en matière
de risques chimiques.
2
–
Le pilotage au niveau régional
La recommandation de la Cour, formulée dans son rapport de 2002
visant à unifier et rationaliser les instances régionales de coordination a
été, elle aussi, partiellement suivie d’effet.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
413
Cette collaboration s’impose en effet. Les pouvoirs très étendus
que la loi confère aux CRAM s’exercent en lien avec les DRTEFP, qui
font office d’instance d’appel, quand ce n’est pas de recours hiérarchique.
En outre, la complémentarité des métiers et des effectifs rend nécessaire
leur coordination
434
.
Le développement de
partenariats
, que ce soit avec les acteurs
institutionnels du champ de la prévention des risques professionnels ou
bien
avec
les
acteurs
du
monde
de
l’entreprise
(organisations
professionnelles, CCI et Chambres des métiers…) est l’une des voies que
la CNAMTS demande aux CRAM de suivre pour démultiplier les actions
et ainsi amplifier leur impact. Les CRAM développent également avec les
services de santé au travail et la médecine du travail des relations,
principalement dans le cadre d’enquêtes sectorielles ou concernant des
bassins d’emploi spécifiques.
La création récente, prévue par le plan santé au travail, des comités
régionaux de la prévention des risques professionnels, devrait formaliser
et intensifier les actions de coopération entre tous les acteurs de la
prévention au niveau régional, en supprimant plusieurs commissions
régionales existantes (commission régionale de médecine du travail,
comités régionaux de coordination) et ainsi en clarifier le pilotage.
3
–
Le suivi statistique
La Cour dans son rapport de 2002 relevait que les insuffisances
statistiques empêchaient une connaissance précise des risques, affectaient
la gestion du risque AT-MP et donc qu’une modernisation de ce système
s’imposait.
Le choix des opérateurs est cependant resté confus. La loi du
9 août 2004 relative à la politique de santé publique a d’abord confié à
l’InVS la mise en oeuvre d’un outil de centralisation et d’analyse des
statistiques et de toutes les autres données relatives aux risques sanitaires
434 . Avec 864 inspecteurs et 2 879 contrôleurs du travail alors que les CRAM
emploient 266 ingénieurs conseils et 516 contrôleurs de sécurité, l’inspection du
travail est un acteur majeur de la prévention et de la répression.
Les statistiques de l’inspection du travail montrent l’importance de son action et
l’ampleur des fraudes. En 2005, 35 % des procès verbaux que l’inspection du travail a
transmis aux parquets concernaient le domaine de la santé et de la sécurité au travail
(3 331 sur 9 629). Ce bilan quantitatif apparemment flatteur doit toutefois être
relativisé. Selon les informations recueillies auprès de la chancellerie, en 2005, les
pénalités infligées aux entreprises pour manquement aux règles d’hygiène et sécurité
du travail n’ont pas excédé 2 M€ dont 46 % ont été recouvrées.
414
C
OUR DES COMPTES
en milieu de travail, « en liaison avec l’assurance maladie et les services
statistiques des départements ministériels concernés ».
Pour autant, dans la COG (point 2-3), la CNAMTS s’engageait à
créer pour la fin 2005 une base de données permettant un suivi exhaustif
des éléments fondamentaux de la sinistralité.
Enfin, une mission commune IGAS-INSEE, en octobre 2005,
proposait de placer l’Etat au centre du dispositif statistique en confiant sa
maîtrise d’oeuvre à la DARES, tout en associant étroitement l’InVS.
Des premiers progrès ont été enregistrés dans la coordination des
opérateurs, notamment à la suite de la signature en février 2007 d’une
convention d’échange de données entre la CNAMTS d’une part et l’État
(DREES, DSS, DARES et DGT) d’autre part, ainsi que l’InVS. Pour la
première fois en 2007, la CNAMTS a transmis aux services statistiques
du ministère une copie des informations qu’elle fournissait auparavant
directement à Eurostat, au risque de centrer les informations AT-MP
françaises sur les seules données relatives au régime général.
B
–
Les modalités de tarification ont peu évolué
Parmi les recommandations moins formalisées du rapport de 2002,
celles relatives à la tarification ont connu des suites modestes. Dans son
rapport de 2002, la Cour proposait de modifier les principes de la
tarification afin de la rendre plus simple, plus lisible et de favoriser la
prévention
435
.
La Cour proposait qu’un système de tarification plus simple et
moins coûteux soit appliqué dans le secteur des services où le risque
professionnel est largement indifférencié, mais qu’en revanche la
différenciation et donc la responsabilisation soient maintenues et même
renforcées dans les secteurs à haut risque.
Depuis aucune réforme n’est intervenue. Cependant, à la suite des
propositions d’un rapport de l’IGAS qui suggérait en 2007 d’abaisser le
seuil de tarification individuelle de 200 à 100 salariés, il serait envisagé
435 . La tarification repose sur un système complexe dépendant de la taille de
l’entreprise. Au dessus de 200 salariés la tarification est individuelle, c'est-à-dire que
le taux brut de la cotisation est fondé sur la sinistralité de l’entreprise. En dessous de
dix salariés le taux est collectif. Entre les deux le taux est d’autant plus individualisé
que l’on se rapproche du seuil de 200 salariés. Au taux brut sont ensuite ajoutées trois
majorations : M1 pour les dépenses liées aux accidents de trajet, M2 pour les frais de
gestion de la branche, M3 pour des dépenses non individualisées. Les dépenses liées à
l’amiante qui sont incluses dans la M3 y occupent une place croissante.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
415
d’abaisser le seuil précité de 200 à 150 salariés. Cet aménagement, en
effet bien venu, ne changerait cependant pas les principes de tarification,
qui restent fondés sur des taux bruts et trois majorations dont les modes
de calcul sont peu lisibles.
La Cour avait préconisé également qu’afin de responsabiliser les
entreprises et de mieux prendre en compte les efforts de prévention soit
menée une politique plus active de cotisations supplémentaires, de
ristournes et d’individualisation des cotisations dans les secteurs de
l’économie qui connaissent les risques les plus importants. En l’absence
d’enregistrement comptable par la CNAMTS des majorations, le suivi de
cette politique n’est pas possible.
C
–
La reconnaissance des maladies professionnelles
La Cour pointait dès le premier chapitre de son rapport de 2002
« le retard dans l’adoption ou la modification des tableaux
436
de maladies
professionnelles, lié notamment aux difficultés de fonctionnement du
conseil supérieur des risques professionnels ». Elle recommandait de
« modifier les modalités d’établissement des tableaux de maladies profes-
sionnelles, avec notamment la création d’une instance scientifique ».
Dans son récent rapport de juillet 2008, la commission d’évaluation de la
sous déclaration des AT-MP
437
a souligné pour sa part que la « la non
reconnaissance de certaines pathologies peut être due à l’état des
connaissances scientifiques les concernant, à la limitation des pathologies
prises en compte dans les tableaux ou à la rigidité de ces derniers (durée
d’exposition, produits pris en compte). »
1
–
Une procédure de révision des tableaux bloquée
a)
Une place excessive des partenaires sociaux dans la procédure
La procédure de révision des tableaux est fixée par l’article L. 461-
2 alinéa 4 du CSS : révisés par des décrets
438
, ils sont adoptés après avis
des partenaires sociaux consultés dans le cadre du conseil supérieur des
436. La liste des maladies professionnelles est recensée dans des tableaux (112 au
total) dont chacun comporte trois éléments : le nom de la maladie, le délai de prise en
charge après l’exposition au risque et la liste limitative des travaux susceptibles
d’avoir entraîné l’affection. Ces tableaux sont annexés au code du travail.
437 Page 47 et suivantes.
438 . L’ordonnance 2005-804 du 18 juillet 2005 relative à diverses mesures de
simplification en matière de sécurité sociale, a remplacé l’exigence d’un décret en
Conseil d’Etat par celle d’un décret simple.
416
C
OUR DES COMPTES
risques professionnels (CSPRP). Cet avis est obligatoire mais pas
conforme.
Une commission des maladies professionnelles, constituée au sein
du CSPRP
439
, est consultée sur les projets de révision des tableaux. Les
partenaires sociaux y disposent de la majorité des sièges, ce qui n’est pas
le cas pour le CSPRP et entendent dès lors lui voir jouer un rôle
décisionnel, alors qu’elle ne s’est vue reconnaître qu’un rôle consultatif.
L’administration peine en conséquence à passer outre à ses avis et
la commission détermine notamment avec une certaine latitude son
programme de travail. Elle dispose également d’une grande marge de
manoeuvre en matière de reconnaissance des maladies émergentes comme
maladies professionnelles.
Pourtant, la quasi automaticité des droits attachés à l’inscription
d’une maladie professionnelle dans un tableau a pour conséquence que
seules les pathologies dont le lien de causalité avec le travail est
solidement établi et argumenté scientifiquement sont inscrites aux
tableaux des maladies professionnelles.
La reconnaissance de maladies émergentes comme maladies
professionnelles est d’autant plus problématique qu’elles sont difficiles à
attribuer à la seule activité professionnelle ainsi que l’illustre les
interrogations sur la prise en charge des risques psycho sociaux
440
qui
dépendent tout à la fois de l’entreprise (les conditions de travail), du
salarié (adéquation de la compétence à l’emploi, du salaire…), de
l’organisation sociale et des conditions d’exercice du travail.
Or, même lorsque de forts indices scientifiques ou des certitudes
existent en ce qui concerne le lien de causalité, ils ne suffisent pas pour
qu’une inscription au tableau ou une mise à jour soient engagées, en
raison de l’imbrication des phases d’expertise technique et de décision
administrative ou politique. Les partenaires sociaux interviennent tant
dans la phase de négociation sociale visant à déterminer ce qui est
susceptible d’entrer dans le champ de la réparation que dans la phase
scientifique permettant de faire l’état des causes d’une pathologie donnée.
La présomption d’imputabilité y relève de la négociation et non de
critères scientifiquement établis.
439. Arrêté du 3 octobre 1984 en application de l’article R. 231-18 du code du travail
qui prévoit la constitution de commissions spécialisées au sein de ce conseil.
440. Les risques psycho sociaux regroupent notamment selon le rapport Amoudru
(août 2007) les dépressions, les troubles anxieux, les chocs post traumatiques, les
troubles du comportement.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
417
En 2006, l’administration avait pourtant essayé de mieux séparer
phases techniques et phases politiques, en confiant à l’InVS le pilotage
d’un travail sur les affections causées par le formol (ou formaldéhyde).
Mais le représentant du MEDEF s’était opposé à cette initiative, au motif
que « cela conduirait à nouveau à mêler science et dialogue social sur la
présomption d’imputabilité, habituellement déterminée par négociation au
sein de la CMP ».
Au final, cette procédure devrait être réformée. Il conviendrait que
les pouvoirs publics priorisent les travaux, en maîtrisent les calendriers et
l'aboutissement et que soient distinguées clairement la phase d'expertise
scientifique et la phase de consultation des partenaires sociaux. Il
conviendrait également de rendre l'expertise scientifique collégiale et
pluridisciplinaire. Elle pourrait être confiée à la Haute autorité de santé
(HAS).
b)
Des conséquences dommageables sur la prise en charge de
nouvelles maladies professionnelles
Même l’application d’un accord européen ou une révision que
l’administration juge prioritaire peuvent être considérablement retardées
par l’absence de consensus entre les partenaires sociaux
La non application à ce jour de l’accord européen sur le stress au
travail
Au niveau européen, les partenaires sociaux ont signé en octobre
2004 un accord sur le stress. Cet accord fournit un cadre général à la
prévention, à l’élimination et à la gestion des facteurs de stress. La
responsabilité des employeurs est bien définie et la participation et la
collaboration des travailleurs et de leurs représentants dans la mise en
oeuvre de mesures anti-stress font partie intégrante de l’accord.
Les signataires prévoyaient une mise en application de cet accord
dans les trois ans. Or les suites réservées à cet accord ont été en France
particulièrement timides.
En décembre 2005, la CMP décidait de créer un groupe de travail
chargé
d’étudier
la
faisabilité
d’un
tableau
concernant
les
psychopathologies
441
. Deux rapports ont été remis au ministre du travail
sur ce thème en août 2007, puis en mars 2008 à sa demande sur les
441. Un représentant des salariés proposait lors de cette séance de commencer les
travaux par les pathologies psychosomatiques dues « aux attaques de banques et au
stress qui peut être induit par ce type d’événement » sujet déjà traité dans un groupe
de travail en 1986 selon le rapport Amoudru d’août 2007.
418
C
OUR DES COMPTES
risques psychosociaux, qui n’ont pour l’heure débouché sur aucune
décision.
L’exemple de la mise à jour du tableau 57
En 2007, la CNAMTS a rappelé à la DGT et à la DSS un courrier
du 17 septembre 1997 par lequel le médecin conseil national de la
CNAMTS attirait l’attention de ces directions sur les imprécisions de
rédaction du tableau n° 57 relatif aux affections périarticulaires
provoquées par certains gestes et postures de travail. Créé en 1972 ce
tableau n° 57 avait été mis à jour pour la dernière fois en 1991 mais les
demandes d’adaptation sont récurrentes.
Cette adaptation apparaît d’autant plus indispensable que le tableau
de maladies professionnelles n° 57 représente 72 % de l’ensemble des
maladies professionnelles reconnues en 2005 dans le régime général et
77 % des indemnités journalières versées en 2005 au titre des maladies
professionnelles, pour un coût total de 228 M€. Il correspond à 65 % de
l’ensemble
des
dossiers soumis
à
la
procédure dérogatoire
de
reconnaissance par les CRRMP (ou C2RMP). Sa mise à jour apparaît en
conséquence
essentielle,
ne
serait
ce
que
pour
améliorer
le
fonctionnement de ces dernières.
Telle n’a pas été toutefois la position des partenaires sociaux. Les
représentants des salariés se sont une nouvelle fois opposés en décembre
2006 à l’inscription au programme de travail de la question de la mise à
jour du tableau 57.
Une révision du tableau 57 apparaît pourtant devoir être mise en
oeuvre rapidement, afin de le mettre en cohérence avec les travaux
scientifiques les plus récents et de permettre, dans la grande majorité des
cas, une prise de décision sans passage par le CRRMP. Cette réforme est
un préalable nécessaire à un recentrage du dispositif complémentaire de
reconnaissance sur les pathologies mal prises en charge par les tableaux,
comme certains cancers ou les troubles liés à la souffrance au travail.
2
–
Les insuffisances de la procédure complémentaire
Une procédure complémentaire a été instituée en 1993 afin de
compenser la rigidité de celle des tableaux. Elle permet la reconnaissance
des maladies listées dans les tableaux mais ne satisfaisant pas aux
conditions fixées par ces derniers (notamment durée d’exposition ou de
délai de prise en charge) et vise à prendre en compte également des
maladies non listées dans les tableaux mais essentiellement et directement
causées par le travail habituel de la victime.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
419
Le premier objectif (alinéa 3 de l’article L. 461-1 du CSS) a
représenté en 2006 93 % des 900 dossiers instruits par les C2RMP et pour
les deux tiers il s’est agi de maladies inscrites au tableau n° 57, dont les
imperfections contribuent ainsi à saturer la procédure complémentaire
(45 % des décisions prises pour ces pathologies ont été favorables).
Le second objectif (alinéa 4 du même article) pourrait constituer
une ouverture notable par rapport au système de présomption
d’imputabilité s’il n’était en pratique réduit à peu de choses. Outre la
démonstration de la cause essentielle et directe, la reconnaissance comme
maladie professionnelle suppose qu’il y ait eu décès ou incapacité
permanente (IPP) au moins égale à 25 %
442
. En 2006, les C2RMP n’ont
prononcé que 150 décisions favorables et les saisines, au nombre de 624,
ont elles-mêmes été 13 fois moins nombreuses que celles intervenues au
titre de l’alinéa 3. La procédure n’a donc pas pris de dimension
significative. Seule une C2RMP (Lyon) a eu à connaître de plus de
20 dossiers en un an ; il y a eu moins de cinq décisions favorables dans
six régions.
Ce dispositif réglementaire n’a donc pas fait la démonstration de sa
capacité à prendre en charge les pathologies émergentes peu adaptées aux
tableaux. Seuls 73 dossiers de psychopathologies ont été instruits en 2006
au titre de l’alinéa 4 et près des trois quarts ont reçu une réponse
défavorable. Il faut que les dépressions, par exemple, atteignent une
particulière sévérité pour satisfaire à la condition des 25 % d’IPP. Il s’en
suit une prise en charge anormale par la branche maladie, une occultation
de l’origine au moins partiellement professionnelle des troubles, une
entrave au développement de la prévention et une augmentation probable
du nombre de maladies chroniques, de la consommation médicamenteuse
et de l’éviction du marché de l’emploi.
D
–
L’indemnisation
En 2002, dans son rapport public particulier, la Cour proposait de
mieux articuler l’indemnisation AT-MP avec le droit commun. Elle
proposait soit de modifier l’indemnisation servie au titre des AT-MP, soit
à défaut de permettre à la victime d’agir dans tous les cas sur le
fondement de la responsabilité de droit commun, afin de mettre fin à une
situation trop complexe et source de différences de traitement entre les
victimes. En 2005, la Cour avait même souligné le risque de voir se
développer des dispositifs spécifiques, si la branche AT-MP persistait à
442. Décret du 28 avril 2002 ; le seuil était auparavant de 60 %.
420
C
OUR DES COMPTES
ne pas modifier les modalités d’indemnisation des victimes d’accidents
du travail et maladies professionnelles.
La relative fixité des règles relatives à l’indemnisation des AT-MP
contraste en effet avec les évolutions positives notées pour l’indemnisa-
tion de droit commun
443
, ou de la réparation des conséquences de
l’amiante
444
, notamment du fait de l’évolution depuis 2002 de la
jurisprudence relative à la notion de faute inexcusable de l’employeur.
A l’occasion de la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance
maladie, le Gouvernement avait souhaité faire évoluer les règles
d'indemnisation en matière d'AT-MP et avait invité les partenaires
sociaux à lui soumettre des propositions de réforme de la branche AT-MP
portant notamment sur la réparation des risques professionnels.
Un accord sur la prévention, la tarification et la réparation des
risques professionnels a ainsi été signé le 25 avril 2007. Il réaffirme le
principe forfaitaire de la réparation des AT-MP, mais propose toutefois
quelques améliorations. Une meilleure prise en charge des dépenses de
soins et d'appareillage est suggérée. Les partenaires sociaux proposent
également de favoriser l'insertion ou la réinsertion professionnelle, en
mettant en place une allocation temporaire de réinsertion professionnelle.
Ils proposent enfin « d’engager un mouvement vers une réparation
forfaitaire améliorée et personnalisée ». Ils subordonnent toutefois ces
quelques propositions à la sécurisation juridique de la mise en oeuvre de
la responsabilité des employeurs, inquiets de l’extension de la notion de
faute inexcusable et de la capacité de la branche à les financer.
Cette dernière condition apparaît toutefois quelque peu artificielle
au regard des règles de financement de la branche. Celui-ci reposant sur
les dépenses constatées durant les trois années précédentes, il est donc
structurellement difficile de dégager les financements nécessaires pour
des mesures nouvelles, sauf à redéployer des crédits ou à augmenter les
majorations M2 ou M3 des estimations de dépenses futures.
443. En matière de réparation de dommages corporels consécutifs à un accident de la
circulation, une loi du 5 juillet 1985, dite loi Badinter, pose le principe de la
responsabilité de l'automobiliste. Les piétons, cyclistes et passagers d'un véhicule sont
intégralement indemnisés des dommages consécutifs à un accident de la circulation,
blessures ou décès, qu'il s'agisse de l'atteinte à l'intégrité physique (frais médicaux,
incapacité temporaire ou définitive...) ou de l'atteinte morale ou économique (perte de
gain pendant l'arrêt de travail...).
444. L’article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 met en
place une indemnisation spécifique qui entend être une réparation intégrale.
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
421
V - L’examen du dispositif spécifique prévu pour
les victimes de l’amiante
La Cour a remis en 2005 un rapport à la commission des affaires
sociales du Sénat portant sur l’indemnisation des conséquences de
l’amiante dans lequel elle analysait les modalités d’indemnisation des
victimes par deux fonds dédiés à cet effet, le fonds d’indemnisation des
victimes de l’amiante (FIVA) et le FCAATA.
Le FIVA assure une indemnisation, majorée par rapport au droit
commun
445
. Le FCAATA, sur lequel la Cour avait concentré ses
remarques critiques avait, quant à lui, pour objectif de contribuer à
compenser la différence d’espérance de vie entre les salariés ayant été
exposés à l’amiante et les autres salariés, en leur servant une préretraite
proportionnelle à leur durée d’exposition à l’amiante.
445 . Le FIVA intervient en complément de la branche AT-MP (83 % des
indemnisations réalisées par le FIVA le sont au titre de maladies professionnelles). La
CPAM, pour une plaque pleurale, indemnise le demandeur à hauteur de 1 745 €. Le
complément qu’apporte le FIVA est tout à fait significatif. Selon son barème une
victime de plaques pleurales âgée de 65 ans recevra 12 862 € au titre de la part
patrimoniale et 15 000 € au titre de la part extra patrimoniale
422
C
OUR DES COMPTES
La Cour constatait le coût très élevé de cette préretraite pour la
branche AT-MP et son caractère inégalitaire, puisqu’elle concerne
essentiellement les salariés de grandes entreprises. Elle dénonçait
l’extension de son champ à des salariés qui n’ont pas réellement été en
contact avec l’amiante et la tentation de recourir au FCAATA comme
instrument de gestion de l’emploi dès lors qu’il constitue l’un des derniers
dispositifs de préretraite existants.
Sur la base de ces constats, le rapport de la Cour formulait
14 recommandations dont la grande majorité n’ont pas été mises en
oeuvre. En effet, seules deux recommandations ont été partiellement
suivies d’effets :
-
la Cour demandait que les indicateurs d’activité du FIVA soient
améliorés. De fait, le suivi de l’activité juridictionnelle du FIVA est
désormais plus précis. Les recours sont maintenant bien distingués,
suivant leur origine et leur objet ; les contentieux indemnitaires, c'est-
à-dire les actions intentées par les victimes contestant le niveau de leur
indemnisation et les recours subrogatoires, c'est-à-dire les contentieux
contre les employeurs dans lesquels le FIVA est partie, sont désormais
suivis distinctement. Le motif des non recours est également
répertorié ;
-
s’agissant de la circulation de l’information entre les tribunaux, elle
devrait bénéficier des travaux relatifs à la nomenclature des préjudices
corporels, qui pourrait constituer un guide pour l’ensemble des acteurs
de l’indemnisation. Cette nomenclature a été bien accueillie par les
différents acteurs (magistrats et avocats notamment), même si son
utilisation n’est en rien obligatoire.
En vue d’unifier des décisions jusque là très hétérogènes, la
chancellerie mène également des travaux pour mettre en place une base
de données jurisprudentielle en matière de dommages corporels. Elle
n’envisage toutefois pas d’aller au-delà d’une meilleure circulation de
l’information entre les tribunaux.
Par ailleurs, allant également dans le sens d’une recommandation
de la Cour, une disposition visant à définir une clé de répartition entre
l’Etat et la sécurité sociale des charges de financement de l’indemnisation
des conséquences de l’amiante avait été prévue par la LFSS pour 2007,
LE SUIVI DES PRECEDENTES RECOMMANDATIONS
423
mais elle a été annulée par le Conseil constitutionnel qui l’a considérée
comme un cavalier social
446
.
Mais, alors que la Cour proposait de recentrer ce dispositif de
préretraite sur les seules victimes malades, les propositions de différentes
commissions compétentes du Sénat et de l’Assemblée nationale
447
tendent plutôt à élargir le champ des bénéficiaires, notamment aux
salariés des petites et moyennes entreprises pouvant prouver une
exposition sans qu’ils aient développé une pathologie
448
. Un tel
élargissement aurait pour intérêt de faire bénéficier de ce dispositif les
salariés des petites entreprises sous traitantes et de remédier à une
inégalité que la Cour avait d’ailleurs relevée. Mais l’accroissement des
dépenses qui pourrait en résulter mériterait d’être chiffré, d’autant que
cette mesure conduirait à ouvrir ce dispositif à l’ensemble des salariés
ayant pu être au contact de l’amiante. Or les dépenses engagées sous le
dispositif actuel ont d’ores et déjà doublé depuis le précédent rapport.
Elles s’élevaient pour l’ensemble des deux fonds à 628 M€ en 2004 ; elles
atteignent 1 224 M€ en 2007 et sont contenues à 1 245 M€ dans les lois
budgétaires 2008 (LFSS et LFI).
446. L'article 117 prévoyait que la dotation de l'Etat au fonds d'indemnisation des
victimes de l'amiante serait portée à 17 % du total de ses ressources en 2008, à 22 %
en 2009 et à 30 % en 2010. Cet article ne concernait pas l'année 2007 et, si le 2° du C
du V de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale permet l'insertion dans une
LFSS de mesures ayant un effet sur les dépenses des années ultérieures, c'est «
à la
condition qu'elles présentent un caractère permanent
», ce qui n'était pas le cas en
l'espèce, puisque l'article 117 ne portait que sur trois exercices (2008, 2009 et 2010)
(cahiers du Conseil constitutionnel n° 22).
447. Rapports d’information au nom de la mission commune d'information du Sénat
relatif au drame de l’amiante d’octobre 2005 et au nom de la mission d’information de
l’Assemblée nationale sur les risques et les conséquences de l'exposition à l'amiante
de février 2006.
448. En 2004, les bénéficiaires de l’allocation de cessation anticipée d’activité des
travailleurs de l’amiante (ACAATA) étaient 10 % à avoir été admis en raison d’une
maladie professionnelle déclarée et 90 % des bénéficiaires étaient admis au titre des
établissements y ouvrant droit. Au 30 janvier 2007, la part des salariés admis au
bénéfice de l’ACAATA au titre d’une maladie professionnelle n’avait que faiblement
augmenté (12,80 % des entrées cumulés depuis 1999). En raison du délai entre
l’exposition au risque et la survenue de la maladie, il est difficile de connaître avec
certitude la proportion des bénéficiaires admis au titre des établissements listés qui
développeront
ultérieurement
une
pathologie
de
l’amiante.
Une
enquête
complémentaire menée par la CNAMTS relève que 7 % des bénéficiaires du
FCAATA ont développé une pathologie due à l’amiante dans les cinq ans suivant leur
admission dans le dispositif (cette proportion comprend l’ensemble des pathologies, y
compris les plaques pleurales).
424
C
OUR DES COMPTES
La contribution mise à la charge des entreprises dont les salariés
sont admis au bénéfice de la cessation anticipée d’activité n’a que
faiblement contribué à l’équilibre financier du FCAATA. Lors de la
présentation de la mesure devant le Parlement, le ministre avait estimé à
120 M€ le produit potentiel de cette contribution soit quatre fois le
montant évalué désormais. Cet écart tient aux exonérations et plafonds
mais surtout à une inadaptation conceptuelle de cette contribution aux
réalités économiques, notamment aux fusions et disparitions d’entreprises
et d’établissements intervenues alors que l’exposition à l’amiante a pu
intervenir plus de trente ans auparavant. Les conditions juridiques de
recouvrement de cette contribution sont d’ailleurs si peu sécurisées
qu’aucune mise en demeure n’avait encore été émise en mars 2008 faute
de pouvoir en assurer les fondements juridiques.
________________________
SYNTHESE
_________________________
Les progrès enregistrés dans la gestion du risque AT-MP depuis
2002 sont réels mais demeurent insuffisants. Le nombre des acteurs n’a pas
été réduit, les modalités de la reconnaissance, de la réparation ou de la
tarification sont peu différentes de ce qu’elles étaient en 2002. Cette
situation amène la Cour à réitérer certaines de ses recommandations
antérieures :
-
rénover l’indemnisation des accidents du travail et simplifier la
tarification ;
-
recentrer le FCAATA sur les départs en préretraite des victimes
malades ;
-
modifier les modalités d’élaboration des tableaux des maladies
professionnelles afin de distinguer les phases d’expertise, de
consultation et de décision.
________________
CONCLUSION GENERALE
__________________
Pour la cinquième année consécutive, les déficits des régimes de
base de sécurité sociale et des fonds de financement ont dépassé dix
milliards d’euros. Un large consensus existe pourtant pour considérer qu’il
n’est pas acceptable de reporter sur les générations futures le financement
d’une partie du coût actuel de la protection sociale. Mais les efforts
engagés pour rétablir la situation financière des régimes et d’abord du
régime général n’ont pas eu les effets escomptés. Le retour à l’équilibre
des comptes publics auquel la France s’est engagée d’ici 2012 suppose des
efforts supplémentaires tant du côté des ressources que des dépenses
sociales.
La bonne tenue des recettes constatée ces dernières années était due
au dynamisme de l’assiette des prélèvements, lequel n’est pas garanti à ce
niveau pour les années à venir. La Cour avait dans son rapport de 2007
quantifié la perte de cotisations due aux multiples réductions d’assiette et
souhaité que sa justification soit réexaminée. Dans ce rapport, elle
recommande de réviser le dispositif des exonérations ciblées et de
resserrer le dispositif des exonérations générales, en définissant en outre
sa limite en euros et non plus par référence au smic.
Du côté des dépenses, les recommandations de la Cour sont
inspirées par le souci d’une plus grande efficacité de la dépense publique
au regard des objectifs qui sous tendent les différentes branches de la
sécurité sociale.
Dans la branche maladie, la réduction des déficits est avant tout due
au dynamisme des recettes. Mais la Cour démontre le caractère artificiel
de la fixation des sous objectifs de l’ONDAM : trop volontariste pour les
soins de ville et trop laxiste pour les soins hospitaliers. Dès lors que les
mesures prévues pour les soins de ville ne sont pas à la hauteur de
l’objectif affiché, il n’est pas étonnant que celui-ci ne soit pas respecté. La
Cour le démontre pour deux catégories de dépenses : les soins infirmiers et
les marges des pharmaciens.
Au terme d’un examen plus général de l’articulation entre
l’ONDAM et les négociations conventionnelles, la Cour met à nouveau en
évidence que le champ ouvert à la négociation n’a pas été suffisamment
cadré en amont et que le suivi en est lacunaire, ce qui contribue à l’échec
relatif des dispositifs de maîtrise des dépenses de soins de ville.
L’analyse des transferts de charges intervenus depuis 2004 entre
l’assurance maladie obligatoire, les assurances maladie complémentaires
et les assurés montre que la rupture annoncée dans la croissance des
dépenses de santé ne s’est pas concrétisée. En outre, ces transferts n’ont
pas porté uniquement sur des soins de confort et la Cour relève que la
protection complémentaire a un coût élevé tant pour les finances publiques,
C
OUR DES COMPTES
426
sous forme d’exonérations fiscales et sociales, que pour les ménages, en
raison notamment du niveau des coûts de gestion d’organismes nombreux
et concurrents. Enfin, ces transferts génèrent des inégalités de traitement
encore mal appréhendées faute d’un système d’information adapté.
S’agissant des dépenses de l’hôpital, la Cour observe que la
politique de restructuration hospitalière est insuffisamment dynamique,
freinée notamment par la distribution d’enveloppes exceptionnelles en
contrepartie d’engagements non respectés et par un souci parfois contraire
à la sécurité sanitaire de maintenir des structures ou services peu
performants.
C’est
pourquoi
la
Cour
préconise d’amplifier
avec
détermination la politique de restructuration engagée par les ARH.
Pour les retraites, dont l’évolution des dépenses est particulièrement
préoccupante, la Cour suggère notamment, dans la ligne des réformes
intervenues depuis quinze ans, d’accentuer leur caractère contributif, en
particulier en ciblant davantage le bénéfice du minimum de pension
(appelé également minimum contributif) sur les petites retraites acquises
en contrepartie de périodes d’activité professionnelle.
Dans la branche famille, enfin, la Cour démontre qu’en dépit de
l’augmentation de l’effort consenti, le nombre de jeunes enfants pris en
charge par un mode de garde aidé est resté stable sur la période. Le coût
par enfant gardé s’est ainsi accru de 50 % entre 2003 et 2006 alors même
que le déséquilibre entre l’offre et les besoins de garde n’a pas été réduit.
Il conviendrait dès lors que ces différents dispositifs soient adaptés en
tenant mieux compte à la fois de leur coût respectif et des ressources des
familles.
Les décisions de maîtrise des dépenses ayant rarement des effets
immédiats, elles doivent être planifiées dans le temps, expliquées et leurs
effets bien expertisés. L’examen par la Cour des retards et des
incohérences qui ont marqué le développement des différents projets de
dossiers médicaux accessibles en ligne et notamment du projet de dossier
médical personnel (DMP), en témoigne. La Cour appelle une fois de plus
l’attention sur la nécessité de disposer de systèmes d’information
performants, indispensables pour comprendre et gérer la dépense, analyser
ses effets et prévoir son évolution. Le présent rapport le démontre
également pour le secteur de l’hôpital et pour les retraites.
A court terme, la Cour insiste sur l’urgence d’adopter des mesures
de redressement volontaristes. Une restructuration de la dette de la
sécurité sociale, actuellement financée pour partie à court terme au prix de
charges d’intérêt croissantes, est devenue inévitable. Mais au-delà, la
priorité doit bien être de revenir rapidement à un équilibre annuel pérenne
des comptes des régimes.
ANNEXE
:
LISTE RECAPITULATIVE DES RECOMMANDATIONS
427
A N N E X E : Liste récapitulative des recommandations
Les recommandations qui suivent devraient, selon la Cour, être
mises en oeuvre dans un délai rapide, de deux ou trois ans au plus. Les
orientations quant à elles, plus générales, visent un horizon plus
lointain (jusqu’à cinq ans).
Les recommandations marquées d’un astérisque avaient déjà été
formulées dans des RALFSS antérieurs et sont dons réitérées (parfois
reformulées)
PREMIERE PARTIE
LA SITUATION DES COMPTES SOCIAUX 2007
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
Chapitre I – Les comptes pour 2007 et leur financement
1.
Améliorer le dispositif de contrôle des comptes des organismes
intégrés aux tableaux d’équilibre (*).
2.
Mettre fin à la pratique de présentation des résultats intégrant des
retraitements sans justification comptable (*).
3.
Accompagner toute communication financière sur les résultats des
régimes de sécurité sociale, antérieure à l’expression des opinions de la
Cour et des commissaires aux comptes, des précautions d’usage.
4.
Recentrer la commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS)
sur ses missions de prévision et modifier sa dénomination en conséquence
(*).
5.
Financer les dettes des régimes par des ressources à long terme
conformes à leur nature.
6.
Réduire les plafonds de ressources non permanentes à un niveau
correspondant à la seule couverture de leurs besoins de trésorerie courants
(*).
7.
Asseoir tout nouveau transfert de dette à la
caisse d’amortissement
de la dette sociale (CADES) sur des ressources pérennes.
8.
Réduire sensiblement la plage actuelle des exonérations générales et
déconnecter leur seuil de sortie des évolutions du SMIC, en l’exprimant en
euros ou en pourcentage du plafond de sécurité sociale.
9.
Réexaminer la composition du panier fiscal affecté en compensation
des exonérations.
C
OUR DES COMPTES
428
10.
Réexaminer les dispositifs d’exonérations ciblées à la lumière de
l’évaluation de leur efficacité et de leur efficience.
Chapitre II –L’objectif national des dépenses d’assurance maladie
11.
Mieux expliciter dans l’annexe 8 au PLFSS le montant prévisionnel
et les réalisations de l’objectif global des dépenses (OGD), ainsi que la
répartition du financement entre l’assurance maladie et la caisse nationale
de solidarité pour l’autonomie (CNSA).
12.
Etablir par région une estimation prospective des besoins de la
population en soins infirmiers techniques d’une part, en soins de nursing
d’autre part.
13.
Redéfinir la contribution optimale des différents intervenants
aux soins de nursing (infirmiers, aides-soignants et auxiliaires de vie) et
en tirer les conséquences en termes d’évolution des modes d’exercice
(libéral et salarié) et d’organisation (en cabinet, en groupe ou en
structure)
[orientation]
.
14.
Améliorer la sincérité de l’ONDAM et du cadrage pluriannuel
annexé à la LFSS, en documentant l’évolution tendancielle des dépenses
d’assurance maladie et les économies sous-jacentes (*).
15.
Instaurer (dans le rapport annuel de l’union nationale des caisses
d’assurance maladie (UNCAM) transmis en juin au Parlement et au
Gouvernement) une obligation d’information sur les résultats de la
maîtrise médicalisée et sur le coût des revalorisations tarifaires.
16.
Tenir compte des résultats de la maîtrise médicalisée pour l’octroi
de revalorisations tarifaires.
Chapitre III – Les programmes de qualité et d’efficience
17.
Décliner les orientations générales des programmes de qualité et
d’efficience (PQE) en objectifs précis et opérationnels, pouvant faire
l’objet d’un suivi.
18.
Décrire pour chaque objectif la contribution de chacun des acteurs
concernés aux décisions et à la mise en oeuvre.
ANNEXE
:
LISTE RECAPITULATIVE DES RECOMMANDATIONS
429
19.
Compléter
les
indicateurs
d'efficacité
par
des
indicateurs
d'efficience qui ne soient pas redondants avec ceux des conventions
d’objectifs et de gestion (COG).
20.
Prévoir une mission d’appui méthodologique pour améliorer les
objectifs et indicateurs des PQE.
Chapitre IV – Les contrôles sous la surveillance de la Cour
21.
Identifier et intégrer dans l’assiette des cotisations sociales les
avantages en nature octroyés au titre des logements de fonction, y compris
lorsque le parc de logements appartient aux collectivités territoriales (cas
de l’enseignement technique agricole).
22.
Concilier la volonté de simplification administrative et les
exigences posées par le contrôle des obligations contributives de l’Etat
employeur
[orientation]
.
DEUXIEME PARTIE
LA GESTION DES RISQUES
___________________
RECOMMANDATIONS
____________________
Chapitre V – Le financement des dépenses de santé : répartition et
transferts de charge entre contributeurs depuis 1996
23.
Améliorer
le
système
d’information
relatif
aux
assurances
complémentaires, en particulier :
-
les
données
générales
et
exhaustives
issues
des
documents
comptables et statistiques qu’elles doivent adresser à l’autorité de
contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) ;
-
le suivi des aides apportées à la couverture complémentaire
(subventions, aides sociales et fiscales) ;
-
l’outil de simulation microéconomique permettant d’évaluer au plus
près les effets de la couverture complémentaire sur les ménages,
ventilés selon leurs caractéristiques socio-économiques.
Chapitre VI – Les pharmacies d’officines et leurs titulaires libéraux
24.
Ajuster les marges en métropole pour accélérer les regroupements
d’officines.
C
OUR DES COMPTES
430
25.
Réviser à la baisse les modalités d’incitation en faveur des
génériques, à l’exception des spécialités pharmaceutiques nouvellement
génériquées.
26.
Ajuster les marges dans les DOM afin de les rendre strictement
proportionnelles à la majoration du prix public local.
27.
Evaluer l’impact de la création des sociétés d’exercice libéral
(SEL) sur les revenus des pharmaciens déclarés à la caisse autonome de
vieillesse des pharmaciens (CAVP).
28.
Inscrire dans la loi le principe d’assujettissement aux cotisations
sociales des revenus mobiliers perçus dans le cadre d’une SEL.
Chapitre VII – L’accès en ligne aux dossiers médicaux
La Cour recommande à l’Etat et, pour ce qui les concerne, aux
régimes d’assurance maladie, de :
29.
Planifier dans le futur plan d’action un niveau de ressources
humaines et financières en maîtrise d’ouvrage et en maîtrise d’oeuvre qui
soit cohérent avec la stratégie annoncée et son calendrier de mise en
oeuvre, ainsi qu’avec l’offre industrielle accessible
[orientation]
.
30.
Renforcer le rôle et les moyens de coordination de la mission pour
l’informatisation du système de santé ainsi que, en ce domaine, des
agences régionales de l’hospitalisation puis de santé.
31.
Créer une fonction d’expertise nationale et autonome pour la
normalisation et les référentiels en informatique de santé.
32.
Réglementer la procédure d’agrément des logiciels d’officine.
33.
Imposer les certificats des cartes Vitale 2 comme partie intégrante
du mode d’accès à tout service en ligne de données personnelles de santé.
34.
Inciter à l’usage de messageries sécurisées et pleinement
interopérables par les professionnels et les établissements de santé.
35.
Subordonner le financement de téléservices et de plates-formes de
services à leur conformité aux bonnes pratiques informatiques, aux cadres
nationaux de référence, ainsi qu’à une étude économique détaillée,
comportant des indicateurs de performance et une méthode d’évaluation.
ANNEXE
:
LISTE RECAPITULATIVE DES RECOMMANDATIONS
431
Chapitre VIII – Les restructurations hospitalières
36.
Définir un plan de restructuration des plateaux techniques publics
assorti d’un calendrier.
37.
Engager un effort systématique de pédagogie auprès du grand
public sur la nécessité et le bien-fondé de ces opérations.
38.
Valoriser dans le déroulement de carrière des directeurs
d’établissements la capacité à mener à bien des opérations de
restructuration.
39.
Conditionner l’attribution des aides financières aux hôpitaux
publics en difficulté à la mise en oeuvre d’actions de réorganisation interne
et externe.
40.
Intégrer les critères de qualité et de compétence des équipes et
les résultats de la certification des établissements dans les décisions
d’autorisation d’activité.
Chapitre IX – Le systèmes d’information dans les établissements
publics de santé
41.
Redéfinir le rôle respectif des structures responsables du
pilotage des systèmes d’information hospitaliers
[orientation]
.
42.
Assurer un suivi des dépenses réalisées par les établissements
dans le domaine des systèmes d’information.
43.
Elaborer un cadre de référence pour le développement des
plateformes régionales d’interopérabilité.
44.
Redéfinir un calendrier de financement du plan Hôpital 2012
compatible avec les délais d’élaboration de dossiers pertinents.
Chapitre XI – Les aides à la garde des jeunes enfants
45.
Renforcer la cohérence des interventions des différents acteurs
concernés par la garde des jeunes enfants (ministère en charge de la
famille, ministère de l’éducation nationale, organismes de sécurité sociale,
collectivités territoriales)
[orientation]
.
46.
Réduire la durée du complément de libre choix d’activité (CLCA)
afin d’éviter l’éloignement durable des mères du marché du travail et
envisager de revenir sur la revalorisation du CLCA à temps partiel.
C
OUR DES COMPTES
432
47.
Mieux corréler le taux d’effort des familles en fonction de leurs
revenus pour chaque mode de garde.
48.
Mieux corréler le coût pour la collectivité et les revenus des familles
de chaque mode de garde en réduisant en particulier l’aide apportée par la
collectivité en matière de garde à domicile.
49.
Analyser les raisons de la stagnation du nombre d’agréments et du
taux d’exercice des assistantes maternelles et développer l’accueil dans un
cadre structuré (crèches familiales) ou plus souple (locaux mis à
disposition).
Chapitre XII – Les aspects de la gestion des régimes de retraite
50.
Constituer un groupe de travail du conseil national de l’information
statistique (CNIS) chargé de définir l’ensemble des informations communes
nécessaires au pilotage des régimes de retraite.
51.
Doter les principaux régimes d’un schéma directeur statistique.
52.
Permettre au conseil d’orientation des retraites (COR) de piloter les
travaux devant conduire les régimes à calculer et publier des soldes
actuariels et des taux de rendement.
53.
Prévoir une clause de révision encadrée au profit du régime
général lors des prochains adossements.
54.
Calibrer les futurs adossements en partant d’hypothèses de
projection de recettes identiques pour le régime général et les régimes
complémentaires.
55.
Fonder les taux d’actualisation sur des références objectives de
marché notamment et justifier les différences de taux éventuellement
retenues par une analyse circonstanciée du partage des risques entre les
partenaires de l’opération.
56.
Demander que les rapports annuels prévus par l’article L. 222-7
du CSS mettent systématiquement en regard prévisions et réalisations.
57.
Faire masse de l’ensemble des pensions de base dans
l’attribution du MICO.
58.
Expertiser les conséquences d’un recentrage du MICO sur les
carrières complètes travaillées.
REPONSES DES MINISTRES
435
REPONSE COMMUNE DU MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS
SOCIALES, DE LA FAMILLE ET DE LA SOLIDARITE
DU MINISTRE DE LA SANTE, DE LA JEUNESSE, DES SPORTS ET DE LA
VIE ASSOCIATIVE
DU MINSITRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA
FONCTION PUBLIQUE
Nous vous remercions de nous avoir communiqué le projet de rapport
au Parlement de la Cour des comptes sur la sécurité sociale. Comme chaque
année, nous avons accordé une grande attention aux analyses et avis formulés
par la Cour.
En préalable, nous tenons à rappeler que malgré la situation de la
branche vieillesse, exposée à des contraintes importantes en termes
d’évolution de dépenses, l’année 2007 a été marquée, notamment, par le
retour à l’équilibre du Fonds de solidarité vieillesse et de la CNAF (avec une
amélioration du solde du premier de 1,5 Md€ par rapport à l’année
précédente et de plus de1 Md€ pour la seconde), et par le versement par
l’Etat de 5,1 Md€ venant apurer définitivement l’ensemble des dettes de
l’Etat vis-à-vis du régime général antérieures à 2007, dont certaines avaient
été contractées il y a plus de 8 ans.
La situation de la branche maladie s’est également améliorée pour la
troisième année consécutive, avec une diminution de son déficit de 1,3 Md€
par rapport à l’année précédente. L’ONDAM a certes connu un dépassement
important mais les dépenses qui entrent dans son champ, comme l’indique la
Cour, évoluent moins vite que le PIB. Le déficit devrait continuer à diminuer
en 2008 pour s’établir autour de 4 Md€. C’est le fruit du supplément de
recettes acquis en 2007 mais également d’une meilleure maîtrise des
dépenses avec les mesures que nous avons prises l’été dernier dans le cadre
du plan d’alerte (1,2 Md€ d’économies en année pleine) et dans la loi de
financement de la sécurité sociale pour 2008.
Nous poursuivrons les efforts pour parvenir à l’objectif de
redressement des finances sociales et d’équilibre du régime général d’ici
2011. C’est un objectif ambitieux mais qui garantira la pérennité de notre
système de protection sociale pour les générations futures. Des mesures de
redressement seront prises dès le prochain projet de loi de financement de la
sécurité sociale, à la fois pour la branche maladie et pour la branche
vieillesse.
Comme le prévoit la loi organique sur les lois de financement de la
sécurité sociale, le Parlement votera dans le prochain PLFSS définitivement
les tableaux d’équilibre pour l’exercice 2007. Ce sera donc au Parlement de
se prononcer sur les demandes de régularisations comptables formulées par la
436
C
OUR DES COMPTES
Cour dans son rapport de certification des comptes du régime général de juin
2008.
En ce sens, nous considérons que le déroulement actuel des opérations
d’arrêté, d’approbation, d’information, de certification et de vote des comptes
de l’exercice clos est pertinent même si des améliorations sont possibles.
Ainsi, sur l’articulation de la Commission des comptes de la sécurité sociale
avec la certification des comptes, pour lever toute ambiguïté dans les
éléments publiés au premier semestre sous l’égide du Secrétaire général de la
Commission
des
comptes,
nous
veillerons
à
ce
que
soit
précisé
systématiquement que les comptes présentés sont tels qu’arrêtés par les
agents comptables des caisses nationales, sans préjudice de l’issue du
processus de certification. Fournir le plus rapidement possible une
information financière sincère sur l’année écoulée est une exigence
démocratique fondamentale à laquelle les publications et réunions de la
Commission des comptes visent à répondre ; retenir cette information jusqu’à
l’été, tout comme supprimer l’analyse rétrospective du passé, indispensable à
la compréhension de la situation actuelle et future des comptes de la sécurité
sociale nous paraîtrait constituer à cet égard une régression peu justifiée.
S’agissant des relations financières entre l’Etat et la sécurité sociale,
nous tenons à rappeler l’action du gouvernement pour clarifier les relations
financières entre l’Etat et la sécurité sociale. Au-delà du remboursement de la
dette de l’Etat vis-à-vis du régime général en octobre 2007 à hauteur de
5,1 Md€ et vis-à-vis du FFIPSA pour 0,6 Md€, un effort particulier a été
engagé pour améliorer la budgétisation des dispositifs d’exonérations de
cotisations sociales et de prestations sociales, qui s’appuie désormais sur les
prévisions pluriannuelles fournies par les régimes, et pour garantir la bonne
exécution des crédits budgétaires et le respect du principe de neutralité
financière.
Concernant la construction de l’ONDAM et son articulation avec la
politique conventionnelle de la branche maladie, nous tenons à renouveler
notre attachement au mode de gouvernance mis en place par la réforme de
l’Assurance
maladie
de
2004.
Si
les
négociations
conventionnelles
comportent un volet relatif aux revalorisations, elles font primer avant tout
les économies et l’amélioration des conditions de l’exercice professionnel.
Sur le premier aspect, l’UNCAM a pour sa part déjà prévu de retenir
des engagements de maîtrise médicalisée supérieurs aux revalorisations
accordées. Ceci permet de compenser le fait que dans certains cas, il peut y
avoir des écarts – pas forcément d’ailleurs de la seule responsabilité des
praticiens – entre les engagements et les résultats. En outre cette pratique de
l’UNCAM est confortée par les dispositions importantes adoptées dans la
LFSS 2008 s'agissant de l'entrée en vigueur des revalorisations des tarifs des
professionnels libéraux.
REPONSES DES MINISTRES
437
Sur le second aspect, il faut donner crédit à l’Assurance maladie
d’avoir respecté les thèmes prioritaires pour l’Etat inscrits dans la Convention
d’objectifs et de gestion signée en août 2006 : le développement de la
prévention, l’accompagnement des politiques de santé publique portées par
l’Etat, la contribution à une meilleure répartition des professionnels sur le
territoire.
En ce qui concerne le sujet des dépenses de soins infirmiers, sur lequel
la Cour consacre une partie de son rapport, le Gouvernement est très attaché à
une contribution optimale des différents professionnels de santé dans la prise
en charge des patients à domicile. Des travaux importants ont d’ores et déjà
été entrepris dans ce domaine : une étude sur les patients atteints de
pathologies lourdes et pris en charge par les services de soins infirmiers à
domicile est en cours et doit aboutir à la fin de l’année ; des travaux sur les
indications d’inclusion des patients en hospitalisation à domicile ont été
lancés en parallèle à des réunions sur l’intervention des libéraux en
établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Ce sujet
constituera d’ailleurs un des enjeux de la mise en place des agences
régionales de santé (ARS) : au delà de ce qui a déjà été entrepris, le travail de
prospective et d’évaluation des besoins sera au coeur de l’activité des ARS
auxquelles il est prévu de demander de construire des schémas régionaux de
l’organisation des soins ambulatoires, à visée indicative, afin de rationaliser
l’offre de soins. Les ARS seront en effet responsables sur les champs
sanitaires et médico-sociaux, corrigeant ainsi le fonctionnement en « tuyaux
d’orgues » justement dénoncé par la Cour.
Le rôle des ARS sera également crucial pour la redéfinition de l’offre
de soins hospitaliers. La France est le pays au monde où le nombre
d’établissements de soins publics et privés rapporté à la population est le plus
élevé. L’excellence médicale, les progrès techniques, les normes sanitaires,
mais aussi l’amélioration des moyens de transport et de télécommunication,
conduisent à réévaluer la valeur de la proximité des soins hospitaliers, en
fonction du type de soins. La mise en place des ARS donnera l’occasion de
redéfinir l'offre de soins sur le territoire. Cependant, la seule implication des
ARS ne saurait suffire. Devront être associés l'ensemble des acteurs locaux
du monde hospitalier et en particulier le corps médical. Il conviendra par
ailleurs de mieux valoriser l'implication des directeurs d'établissements dans
la conduite de ces opérations.
Le rapport de la Cour consacre par ailleurs une partie de ses analyses à
la répartition des charges entre contributeurs. Le rapport relève en premier
lieu que des incertitudes entourent la répartition entre ménages et organismes
complémentaires en ce qui concerne l’évolution de la prise en charge des
dépenses de santé. Il faut signaler à cet égard que la DREES s’est livrée en
2008 à une réestimation des prestations versées par les mutuelles à partir des
informations fournies par l’autorité de contrôle des assurances et des
mutuelles. Cette révision ne remet toutefois pas en cause le constat de la Cour
438
C
OUR DES COMPTES
d’une stabilité de la répartition des dépenses par contributeur et du profil
général d’évolution du reste à charge des ménages qui enregistre une baisse
sur moyenne période.
Nous partageons en outre les conclusions de la Cour sur le maintien à
un niveau très élevé de la part prise en charge par le régime obligatoire,
malgré les mesures d’économie conjoncturelles mises en place depuis 2004.
La prise en charge accrue de médicaments innovants ou très coûteux et
l’augmentation du nombre des assurés sociaux bénéficiant d’une exonération
du ticket modérateur en raison, notamment, d’une affection de longue durée
(ALD), expliquent en effet la tendance structurelle d’augmentation du taux
d’engagement de l’Assurance maladie. Cet accroissement mécanique des
dépenses prises en charge par le régime obligatoire est du reste estimé à
environ 3 Md€ sur cinq ans par le Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance
maladie dans son rapport de juillet dernier, soit un niveau sensiblement
supérieur à celui calculé par la Cour.
Le degré de mutualisation des dépenses remboursables n’est donc pas
affecté sur moyenne période, même si les efforts entamés dès 2007 doivent
être poursuivis pour répondre à la préoccupation de la Cour concernant le
rythme de progression très dynamique des dépassements d’honoraires
auxquels sont confrontés les assurés.
Concernant les développements relatifs à la gestion des régimes de
retraite, le Gouvernement partage les analyses de la Cour, et les précautions
exprimées par la commission des affaires sociales du Sénat, au sujet des
opérations d’adossement des régimes spéciaux aux régimes de droit commun.
Dans le même esprit que la réforme des droits, effective au 1er juillet 2008, et
qui vise à mettre tous les Français sur un pied d’égalité en matière de retraite,
le Gouvernement veillera le cas échéant par tous moyens à garantir une
stricte neutralité financière des opérations d’adossement.
S’agissant des minima de pensions, et comme le rappelle la Cour, le
gouvernement a entrepris avec les partenaires sociaux dans le cadre du
rendez-vous 2008 sur les retraites une réflexion sur le ciblage du minimum
contributif et l’objectif de 85% du SMIC pour une carrière complète fixé par
la loi du 21 août 2003. Cette réflexion associe les régimes complémentaires.
Enfin, nous remercions la Cour d’avoir consacré une partie importante
de son rapport aux programmes de qualité et d’efficience (PQE) et nous
sommes sensibles aux propositions faites pour renforcer la dimension de
mesure de l’efficience des politiques de sécurité sociale, notamment en
termes d’articulation avec les conventions d’objectifs et de gestion. Nous
considérons néanmoins que si, comme y invite la Cour, des parallèles doivent
être trouvés entre la démarche de performance de la sécurité sociale et celle
de l’Etat, on ne peut totalement calquer l’une à l’autre.
La démarche des PQE s’inscrit en effet plus dans une échéance
pluriannuelle, où interviennent également des facteurs relevant du contexte
REPONSES DES MINISTRES
439
économique, sanitaire et social. Elle est centrée en outre sur l’impact final des
politiques de sécurité sociale qui sont avant tout transversales, ce qui rend
plus difficile l’identification des leviers d’action dont disposent les
administrations et organismes chargés de leur mise en oeuvre. Ces spécificités
militent pour que soit mis en place un programme d’audit particulier inséré
au sein du dispositif d’évaluation des politiques sanitaires et sociales, en
cours d’élaboration à l’initiative de la DREES et de l’IGAS.
REPONSE DE LA MINISTRE DE L’ECONOMIE, DE L’INDUSTRIE ET DE
L’EMPLOI
Je vous remercie de m'avoir communiqué le projet de rapport au
Parlement de la Cour des comptes sur la sécurité sociale. J'ai naturellement
accordé une grande attention aux observations et recommandations formulées
par
la
Haute
juridiction.
De
nombreuses
analyses
rejoignent
mes
préoccupations. Au delà des remarques techniques qui vous ont d'ores et déjà
été communiquées, je souhaite revenir sur un des points examinés par la
Cour.
Sur le financement de la sécurité sociale, la Cour propose de limiter
les allègements généraux de cotisations sociales aux entreprises de moins de
20 salariés ou à certains secteurs d'activité. Je souhaite souligner que le
problème du coût du travail au niveau du SMIC n'est pas étroitement lié à la
taille de l'entreprise ou à son secteur d'activité. L'introduction d'un critère de
restriction
de
cette
nature
générerait
des
distorsions
économiques
significatives, sous la forme d'effets de seuil importants. Dans la loi de
modernisation de l'économie du 4 août 2008, le gouvernement s'est employé
à réduire ce type d'effets qui nuit beaucoup au développement des PME.
Je partage en revanche l'analyse de la Cour selon laquelle l'existence
de trappes à bas salaires n'est, en l'état actuel du barème des allègements, pas
avérée. Les études disponibles mettent en évidence la complexité des effets
des allégements sur les salaires. Les allègements ont vraisemblablement une
influence positive sur le niveau des salaires dans la mesure où le bénéfice de
l'exonération est partagé entre employeurs et salariés. Par ailleurs, la
dégressivité modérée du barème actuel, en limitant pour l'employeur le coût
d'une revalorisation salariale, permet au dispositif de ne pas peser
sensiblement sur les évolutions salariales.
Enfin, je partage l'appréciation de la Cour sur la nécessité de
poursuivre et d'amplifier les réformes menées en matière de finances sociales
pour ramener la France dans le groupe des pays de l'Union Européenne qui
ont rétabli la situation de leurs finances publiques.
440
C
OUR DES COMPTES
REPONSE DU MINISTRE DE L’AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE
Ce document comporte trois développements qui appellent des
observations de la part de mon département ministériel :
- l'évaluation du dispositif de contrôle interne de la mutualité sociale
agricole,
- l'équilibre du financement de la protection sociale agricole,
- le
contrôle
du
paiement
des
contributions
sociales
par
l'administration centrale du ministère de l'agriculture et de la pêche (sur la
base de l'article 74 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004).
Sur le premier point, le ministère de l'agriculture et de la pêche
partage les préoccupations de la Cour sur la nécessité de mettre en oeuvre une
évaluation des dispositifs de contrôle interne des organismes de MSA par des
audits ainsi que des actions de formation et de sensibilisation des organismes
et de leur personnel.
L'article 102 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008
a renforcé les pouvoirs de la caisse centrale de la MSA sur les caisses locales
et le décret d'application n° 2008-485 du 22 mai 2008 a institué un dispositif
de contrôles périodiques sur les activités des caisses et leur organisation dont
notamment, la comptabilité et le contrôle interne. A cet effet, une équipe
nationale de sept auditeurs a été constituée et une cartographie des risques
ainsi qu'un référentiel de contrôles ont été établis. Les premiers audits sont
programmés en septembre 2008 et en cas de défaillances locales, la caisse
centrale pourra demander la mise en place d'un plan de redressement.
La caisse centrale a, par ailleurs, en projet la création d'un autre
dispositif de contrôles visant à vérifier la réalité des actions des plans de
contrôle interne des caisses et à assister celles d'entre elles qui seraient
confrontées à des difficultés dans le déploiement du dispositif institutionnel.
Les organismes de MSA, appuyés par leur échelon national, doivent
également s'attacher à créer des conditions propices à une appropriation
collective de la culture du contrôle interne et du risque par l'ensemble des
personnels. Celle-ci sera le facteur clé d'une mise en oeuvre aboutie de la
démarche.
S'agissant du second point relatif au financement du régime des non
salariés agricoles, le ministère de l'agriculture et de la pêche rappelle que la
création du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés
agricoles (FFIPSA) par la loi de finances pour 2004 en remplacement du
BAPSA a donné lieu à un changement de sources de financement du régime
qui a installé le régime dans un déficit structurel.
Ce déficit dépassera 2,5 Md€ en 2008, et l'endettement cumulé devrait
atteindre 7,4 Md€ à la fin de l'année.
REPONSES DES MINISTRES
441
Ce déficit n'est pas lié à une mauvaise gestion ou à une dérive
incontrôlée des dépenses des assurés. L'effort contributif des exploitants
agricoles n'est pas non plus en cause.
Le déficit du FFIPSA découle en premier lieu du déséquilibre
démographique du régime : il n'y a qu'un cotisant pour trois retraités et les
3/4 de ces cotisants ont un revenu inférieur au SMIC ce qui nécessite d'autres
recettes que les cotisations dont le produit est inférieur à 18% des charges du
régime.
En second lieu ce déficit structurel résulte de la structure des recettes
autres que les cotisations.
La loi de finances pour 2004 qui a créé le FFIPSA a substitué une
affectation de taxes sur les tabacs (dont le produit décline en 2008 grâce au
succès de la politique de santé publique du gouvernement) aux recettes que
percevait le BAPSA à savoir 0,7 point de TVA sur les 3 taux de TVA (dont
le produit augmentera de 5% en 2008) un abondement de la contribution
sociale de solidarité des sociétés (C3S) et la subvention d'équilibre que lui
versait l'Etat.
Le FFIPSA a recours à l'emprunt pour financer son déficit. Le FFIPSA
a reçu en LFSS 2008 l'autorisation de procéder à des ouvertures de crédit
court terme pour un montant total de 8,4 Md€. Les frais financiers
prévisionnels de cet emprunt sont de 320 M€ sur 2008 (186,3 M€ en 2007).
Le financement du régime est donc, principalement, un enjeu de
solidarité nationale et interprofessionnelle. Le problème de financement est,
pour l'essentiel, que le niveau de la solidarité nationale et interprofessionnelle
est insuffisant.
Certes, ce déséquilibre est financé et il n'existe aucun risque de non-
versement des prestations. Néanmoins, la dette atteindrait rapidement un
niveau qui ne serait pas soutenable si une solution pérenne n'était pas
rapidement mise en oeuvre.
C'est pourquoi, le 3 octobre dernier, les ministres chargés de
l'agriculture et du budget ont signé une lettre au Président du FFIPSA lui
indiquant que «pour la branche vieillesse, qui relève de la solidarité
nationale, l'Etat prendra sa responsabilité en assurant l'équilibre par des taxes
affectées ».
La régulation des dépenses d'assurance maladie relève en revanche de
la protection sociale. Une des solutions examinées par le gouvernement
pourrait être un adossement financier de la branche maladie du FFIPSA à la
CNAMTS, en affectant à celle-ci des ressources supplémentaires et en
définissant des règles de gouvernance respectueuses des spécificités du
monde agricole.
442
C
OUR DES COMPTES
Des travaux interministériels sont en cours pour examiner les
solutions envisageables. Le ministère de l'agriculture et de la pêche considère
comme la Cour des comptes qu'il faut rapidement mettre en oeuvre des
financements
suffisamment
dimensionnés
pour
assurer
durablement
l'équilibre financier du régime des non-salariés agricoles.
Le ministère de l’agriculture et de la pêche veillera cependant à ce que
la solution retenue n'implique en aucun cas de changement dans la gestion
des prestations et le recouvrement des cotisations. Comme c'est le cas pour le
régime des salariés agricoles ou pour les prestations familiales des exploitants
agricoles qui sont respectivement intégrés et adossés financièrement au
régime général, la MSA doit demeurer l'organisme gestionnaire et
l'interlocuteur unique des professions agricoles. C'est un réseau mutualiste
qui a fait les preuves de son efficacité et dont le guichet unique est un
élément essentiel de simplification des relations avec les assurés et de qualité
du service public.
En ce qui concerne le troisième point, le projet de rapport constate que
si la gestion centralisée des personnels et la généralisation de la paie sans
ordonnancement
préalable
(PSOP)
constituent
un
double
facteur
d'harmonisation des pratiques de gestion et de sécurisation du paiement des
contributions sociales par le ministère, il reste au ministère à se doter d'une
véritable politique de contrôle interne : la réorganisation du service des
ressources humaines mise en place par le décret n° 2008-636 du 30 juin 2008
va maintenant en faciliter la réalisation.
Par ailleurs, la Cour observe qu'aucun avantage en nature n'est intégré
par le ministère de l'agriculture et de la pêche dans le calcul de ses
contributions sociales, alors que l'attribution de logements de fonction devrait
rentrer dans ce dispositif. Le ministère en prend acte et, faisant procéder à
l'identification des avantages en nature par les gestionnaires de la paie, entend
mettre en place un dispositif permettant la retenue des contributions sociales
à travers la paie des agents.
REPONSES DES ORGANISMES
445
PREMIÈRE PARTIE – LA SITUATION DES
COMPTES SOCIAUX EN 2007
Chapitre I
Les comptes sociaux
REPONSE DE L’AGENCE CENTRALE DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ
SOCIALE (ACOSS)
En ce qui concerne les analyses de la Cour sur les comptes pour 2007
et leur financement, il apparaît nécessaire, sans préjudice des remarques
techniques formulées par les services de l'Agence centrale dans le cadre de la
procédure contradictoire, de rappeler plusieurs éléments. La neutralité des
relations financières avec l'Etat constitue un objectif de l'Agence centrale.
Elle apporte ainsi une attention particulière en ce qui concerne la
compensation intégrale des exonérations de cotisations et de contributions
sociales. . Deux indicateurs ont été créés pour suivre la neutralité dans les
PQE à l'attention du Parlement. Par ailleurs, la Cour énumère les outils
disponibles afin de pallier les déficits de trésorerie de l'Agence centrale. Dans
ce cadre, il est fait mention du développement de la politique de billets de
trésorerie.
L'émission
de
billets
de
trésorerie
constitue
un
outil
supplémentaire et utile en matière de financement de la trésorerie. Son
utilisation reste limitée au regard des montants avancés par la CDC. Cet outil
est de plus sujet aux fluctuations du marché. Par ailleurs, comme le souligne
la Cour, la Caisse des dépôts et consignations a été amenée à durcir ses
conditions financières à compter de 2008 tant concernant les prix que les
volumes (ce qui fut d'ailleurs déjà le cas en 2004). L'Agence centrale ne
dispose pas des moyens de juger de la capacité de la Caisse à assurer les
financements qui lui sont confiés. Elle n'est pas davantage en mesure
d'analyser la justification des positions prises par celle-ci concernant les
conditions
financières
qu'elle
applique.
L'Agence
centrale
souhaite
néanmoins rappeler que ce durcissement, combiné aux tensions financières et
au déficit actuel de trésorerie rendent particulièrement délicate la gestion
financière à court terme des fonds qui lui sont confiés. Après l'opération
d'apurement des dettes de l'Etat effectué en 2007, l'engagement pris par le
ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique lors de la
dernière commission des comptes de trouver des solutions pour apurer la
dette constitue donc un élément important pour l'Agence centrale, eu égard
aux contraintes auxquelles elle est confrontée.
Enfin, en ce qui concerne l'analyse de la Cour sur les dispositifs
d'exonération, l'Agence centrale souhaite rappeler que la multiplicité des
dispositifs est source de nombreuses difficultés. Leur gestion s'en trouve
ardue, tant en ce qui concerne leur vérification et leur contrôle qu'en ce qui
concerne leur suivi statistique. La multiplicité des dispositifs entraîne en
C
OUR DES COMPTES
446
outre le recours à des mécaniques de compensation souvent distinctes qui ne
permettent pas toujours de garantir la neutralité des relations financières entre
l'Etat et la sécurité sociale. Enfin, la relation avec les usagers n'est pas
facilitée par cette multiplicité voire, parfois, par la succession de dispositifs
ou d'évolution de ces dispositifs. Les organismes rencontrent des difficultés à
expliquer et jouer leur rôle d'assistance aux usagers pour leur permettre
d'exercer leurs droits. De plus, de trop nombreux dispositifs et les évolutions
régulières qu'ils connaissent ne garantissent pas la sécurité juridique des
cotisants. Aussi, si l'opportunité de disposer d'autant de dispositifs peut – du
point de vue de la gestion- être discutée, les différentes réformes envisagées
doivent-elles néanmoins être appréciées eu égard au degré de complexité
qu'elles pourraient représenter pour les usagers. Néanmoins, tout effort de
rationalisation des dispositifs d'exonération ne pourrait qu'être encouragé par
la branche recouvrement, pour des raisons de gestion et de relation avec
l'usager et afin de faciliter la clarification des relations financières entre l'Etat
et la sécurité sociale.
Chapitre II
L
’
objectif national de dépenses d
’
assurance maladie
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAMTS)
En premier lieu, il apparaît que le rapport ne s'intéresse que peu aux
causes du ralentissement important de l'ONDAM constaté depuis 2004. En
effet depuis trois ans, les dépenses d'assurance maladie et de santé évoluent à
un rythme proche de celui de la croissance du produit intérieur brut. Cette
situation pourrait se prolonger cette année. Il est assez rare historiquement
qu'une telle modération soit constatée dans une période pendant laquelle
l'évolution de la croissance a été sensiblement identique à son niveau
structurel.
L'une des raisons de cette évolution tient à la modération des
revalorisations tarifaires accordées aux professionnels de santé, qui ce sont
élevées en moyenne sur la période 2004-2008 à 1,3 % par an.
En second lieu, la CNAMTS conteste l'affirmation du rapport selon
laquelle la négociation conventionnelle tient insuffisamment compte du cadre
de l'ONDAM. A chaque débat du conseil de l'UNCAM et du collège des
directeurs, une réflexion est menée sur la cohérence avec l'ONDAM, comme
le montrent les comptes rendus. Ainsi, la politique conventionnelle s'inscrit
dans le cadre des objectifs de dépenses assignés à l'Assurance Maladie et les
revalorisations tarifaires sont naturellement prises en compte dans les
projections de dépenses pour l'année à venir qui font l'objet d'un dialogue
étroit avec les ministères compétents.
REPONSES DES ORGANISMES
447
A cet égard, la CNAMTS estime à 1,7 milliards d'euros et non à 2,2
milliards d'euros l'impact en année pleine des revalorisations accordées entre
2005 et 2007 et à 2,3 milliards d'euros et non à 2,8 milliards d'euros celui des
revalorisations accordées entre 2003 et juillet 2007. La CNAMTS souligne
que pour la période 2004-2008, l'impact total des mesures tarifaires s'élève à
1,945 milliard d'euros, ce qui équivaut à une revalorisation nette des tarifs
d'actes médicaux et paramédicaux de 1,3 % par an.
La construction de l'ONDAM fait également l'objet d'une précision
accrue grâce à l'exercice, mené pour la première fois pour l'année 2009, de
médicalisation de la projection des dépenses. Cet exercice améliore
sensiblement l'analyse des dépenses et de leur tendanciel.
La Cour note à juste titre l'évolution du sous-objectif de dépenses des
soins de ville : à cet égard, l'exercice de médicalisation des projections de
dépenses a permis d'objectiver, pour l'avenir, une contention des dépenses en
établissement pour les soins délivrés aux personnes en ALD corrélée avec
une progression des soins de ville, à relier avec l'évolution des modes de prise
en charge. Dans ces conditions, une progression différenciée des deux sous-
objectifs apparaît pertinente.
L'appréciation
selon
laquelle
la
prise
en
compte
d'objectifs
conventionnels relatifs à l'organisation du système de soins risque de
subordonner cette organisation aux intérêts des professionnels paraît
excessive et infondée. L'objectif poursuivi par l'UNCAM dans la négociation
conventionnelle consiste au contraire à faire prendre en compte par les
professions de santé des contraintes d'efficience et de meilleure utilisation des
ressources, dont il n'est pas certain que les autres leviers existants puissent
être aussi opérants.
A cet égard, il convient de souligner qu'à la demande des pouvoirs
publics le cycle de négociation en cours permettra de mettre en place, pour la
première fois, des outils de régulation démographique et de rémunération à la
performance. Les négociations ont également permis, comme vous le relevez
à juste titre, d'enclencher des baisses tarifaires pour certains actes de
cardiologie et de radiologie. Dès lors qu'il apparaît inévitable de revaloriser
régulièrement les tarifs de certains services de soins, l'UNCAM jugerait
regrettable de ne pas mettre à profit ces revalorisations pour accroître
l'efficience globale du système de soins.
La Cour souligne que la politique de maîtrise médicalisée n'a pas
atteint la totalité de ses objectifs, mais ce constat ne doit pas masquer
l'ampleur des résultats déjà obtenus sur la maîtrise du tendanciel des
dépenses. Cumulée avec les autres mesures de maîtrise, cette politique a en
effet permis une nette diminution du tendanciel des dépenses depuis 2004: le
déficit atteindrait aujourd'hui près de 15 Md€ si les dépenses s'étaient
poursuivies sur la tendance constatée entre 1998 et 2003, eu égard aux
augmentations de recettes et plus de 20 Md€ sans ces augmentations. Les
C
OUR DES COMPTES
448
outils de reporting plus fins qui sont actuellement mis en place conjointement
avec les ministères concernés permettront un suivi plus précis et une analyse
partagée des résultats.
Chapitre IV
Les contrôles sous la surveillance de la Cour
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES
TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAMTS)
En ce qui concerne l'efficience du réseau, la CNAMTS rappelle
l'ampleur des gains de productivité réalisés par l'assurance maladie : la
productivité (bénéficiaires rapportés aux ETP) a crû de 3,5% pour la seule
année 2007. La politique de remplacement partiel des départs à la retraite
(remplacement d'un départ et demi sur 10 dans les caisses les mieux dotées
en personnel telles que la CPAM de Paris) permet en effet une réduction
importante des effectifs, alors même qu'un investissement conséquent est
réalisé pour améliorer le service aux assurés et développer la gestion du
risque. Cette politique est associée à un plan de rapprochement ambitieux
d'organismes. A cet égard, il est juste de relever comme la Cour l'a fait que
les mutualisations ne sont pas suffisantes pour les caisses du Nord, mais qu'il
faillait mettre en place un mouvement plus ambitieux de fusion de caisses qui
sera effectif le 1
er
janvier 2010.
REPONSE DE L’AGENCE CENTRALE DES ORGANISMES DE SÉCURITÉ
SOCIALE (ACOSS)
Par ailleurs, les démarches de mutualisation entre organismes
analysées par la Cour constituent un moyen pour l'ensemble du réseau
d'optimiser l'utilisation des ressources existantes ou de pallier une
insuffisance de ressources. La démarche conduite actuellement dans le cadre
prévu par la convention d'objectifs et de gestion consiste à assurer ces
mutualisations en prenant en compte les spécificités locales et les
particularités des différents domaines d'application retenus. La branche
poursuivra ces démarches tout en identifiant les bonnes pratiques au sein du
réseau afin d'en assurer la diffusion et la mise à disposition de l'ensemble des
organismes.
La gestion des créances prescrites fait l'objet d'une attention
particulière du réseau du recouvrement. Un traitement informatique
permettant de repérer les créances en voie de prescription a été développé et
est utilisé par les organismes. Les créances prescrites font l'objet d'analyses
lors des audits sur place conduits dans les organismes. Une nouvelle
instruction relative à la prévention de la prescription sera diffusée en 2008 au
réseau dans le cadre des instructions de contrôle interne. Un SPR (standard
REPONSES DES ORGANISMES
449
de pratique recommandée) destiné à la prévention de la prescription des
créances sera diffusé au cours du mois d'octobre 2008.
REPONSE DE LA CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE
PARIS
Lancé début 2006 notre projet d'entreprise a priorisé les chantiers les
plus structurants pour l'amélioration du service rendu à nos publics et il ne
pouvait donc, dès sa première année, produire des améliorations que de
manière embryonnaire sur les résultats 2006 qui servent de socle aux
observations de la Cour.
La tendance générale à l'amélioration de nos résultats a été constatée
par les différentes missions qui se sont succédé en 2007 et début 2008 ;
principalement les missions sur la certification des comptes 2007 diligentées
par la Cour et la CNAMTS.
L'évolution de notre taux d'efficacité du CPG (53.2 % en 2006 ; 59.7
% en 2007) traduit également un niveau de progrès significatif et permet à la
CPAM de Paris de se classer en 2007 parmi les douze premières CPAM en
termes de taux de progression. (...)
La transformation de la CPAM de Paris se poursuit à un rythme
particulièrement soutenu, grâce, notamment, à l'investissement massif du
management et des agents à tous les niveaux, progressivement formés à une
culture de la performance qui n'existait pas antérieurement dans l'entreprise.
Mille personnes sont aujourd'hui directement concernées par une mobilité
géographique ou professionnelle.
C'est pour cela que les appréciations de la Cour, fondées sur des
constats faits en 2006, et publiées en septembre 2008, paraîtront en profond
décalage et très dures au regard de la réalité de l'entreprise, telle qu'elle est
vécue aujourd'hui par son personnel, et l'effort considérable fourni au cours
de ces derniers mois.
REPONSE DE L’URSSAF DU CANTAL
Le projet d'insertion devant figurer dans le prochain rapport annuel de
la Cour sur la sécurité sociale fait état de l'existence d'un problème de coût à
l'URSSAF du Cantal qui devrait se résoudre progressivement.
Je vous informe que la publication des résultats 2007 la concernant
confirme la baisse des coûts attendue sans toutefois en pénaliser ses
performances.
C
OUR DES COMPTES
450
REPONSE DE LA CAISSE CENTRALE DE MUTUALITÉ SOCIALE
AGRICOLE (CCMSA)
Dans le chapitre consacré aux contrôles effectués sous sa surveillance,
la Cour s’appuie, s’agissant du régime agricole, sur les rapports réalisés par
les SRITEPSA chargés d’auditer 22 caisses de MSA. Elle fait un point sur la
mise en place du contrôle interne dans le réseau. Ses observations relèvent de
trois thèmes :
- Pilotage et organisation :
A partir de la date de publication du décret du 26 juin 2003, les règles
de mise en oeuvre du contrôle interne ont progressivement été définies et un
guide méthodologique établi. Cette démarche a été rendue possible par
l’association de l’ensemble des acteurs réunis autour de la caisse centrale.
La Cour émet plusieurs remarques sur des situations particulières:
- Etablissement tardif ou inexistant d’un protocole directeur/agent
comptable.
- Recours dans certains cas à des outils peu performants.
La caisse centrale prend acte de ces remarques, mais note également
que le calendrier de mise en oeuvre des bonnes pratiques a été respecté, ce qui
représente en trois années, 338 processus, auxquels sont rattachés plus de 700
bonnes pratiques. Au 31 décembre 2007, le taux de sécurisation moyen
national se situait à 91,8 %.
Un rappel sera fait aux caisses par la Caisse centrale sur le respect des
recommandations émises en matière de méthodologie (notamment rappel du
protocole-type, diffusé avec la circulaire d’application) et sur l’obligation
d’utiliser l’outil national mis à disposition de tous et constamment amélioré
pour répondre aux besoins des CMSA en matière de gestion.
– Mise en oeuvre des bonnes pratiques :
La Cour relève deux points :
Les caisses, dans certains cas, ont mis en place les bonnes pratiques
définies au plan national, sans avoir procédé au préalable à une analyse de la
situation locale. Ceci diminuerait la portée de la démarche, dans la mesure où
peu de questions ont été soulevées sur la pertinence du fonctionnement en
place.
L’évaluation du dispositif de contrôle interne reste imparfaite, et ne
permet pas de mesurer objectivement les progrès accomplis.
La caisse centrale prend acte de ces deux remarques et note cependant
que la Cour fait mention du respect du calendrier de diffusion et
d’implantation dans les caisses des processus et des bonnes pratiques
associées.
REPONSES DES ORGANISMES
451
Une des options prises à l’origine pour la mise en place du dispositif
de contrôle interne en MSA a été de définir un socle commun susceptible de
sécuriser au mieux les actes de gestion pratiqués, dans un délai maîtrisé (3
ans).
Compte tenu de cette option, il n’a pas été possible, pour certaines
caisses, de mener l’analyse locale souhaitée par la Cour. Notons toutefois que
certaines caisses ont mis en place des bonnes pratiques locales, qu’elles
justifient par un contexte spécifique. C’est dans un deuxième temps que les
Caisses seront invitées à entreprendre systématiquement cette démarche
complémentaire.
De même, si la nécessité d’une évaluation a été relevée dès le début de
la réflexion, aucun outil, hormis la vérification comptable, n’a été adapté à la
situation.
Ceci doit faire l’objet d’une réflexion à partir du 2e semestre 2008, en
vue de mettre en place des outils permettant de mesurer la pertinence du
dispositif mis en place.
– La vérification comptable :
La Cour relève deux points :
Dans les caisses, il n’y a pas de lien clair établi entre les bonnes
pratiques attachées aux processus métiers et les missions confiées à la
vérification comptable. En outre, dans certains cas, l’agent comptable
n’attache pas suffisamment d’intérêt aux travaux des vérificateurs.
Les taux d’erreurs relevés dans le cadre de la vérification comptable
restent élevés et disparates d’une caisse à l’autre.
La caisse centrale prend acte de ces observations. Ce n’est que depuis
le début de la réflexion sur le contrôle interne que le principe consistant à
mener des actions nationales de vérification comptable communes à toutes
les caisses a été arrêté.
Cette décision, prise dans le cadre de quotas globaux de vérification
inchangés, a nécessité de redéfinir les modalités d’application des règles de
vérification comptable : les méthodes de sélection et d’analyse doivent être
harmonisées, et les résultats obtenus doivent être cohérents. Ce n’est pas
encore toujours le cas, ce qui peut être source de disparités dans les taux
d’erreurs présentés.
En outre, les fiches techniques de vérifications comptables envoyées
par la CCMSA précisent la méthodologie de contrôle à pratiquer et
mentionnent obligatoirement les références aux fiches bonnes pratiques des
processus métier.
C
OUR DES COMPTES
452
Enfin, les actions nationales arrêtées concernent des parties de
législation « sensibles », pour lesquelles il est possible de présupposer des
risques d’erreurs importants.
Aussi, les taux relevés au titre de ces actions spécifiques doivent-ils
être interprétés dans leur contexte et ne pas conduire, par extrapolation, à un
jugement global sur le respect de l’application de la réglementation par une
caisse.
En revanche, certains résultats doivent inviter à la réflexion et à la
recherche de solutions telles que celles évoquées par la Cour.
REPONSE DE LA MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE COEUR DE LOIRE
L'importance des retards dans le versement des prestations est
imputable, pour une grande part, à la restructuration de l'entreprise suite à sa
fusion en avril 2005 et à ses conséquences en termes de mobilités
fonctionnelles et de formations nécessaires.
Les résultats 2007 et 2008, sans être encore parfaitement satisfaisants,
ont mis en évidence une nette amélioration.
REPONSE DE LA FEDERATION GRAND SUD
Sur la première observation « le coût net de gestion excessif », il est
ensuite précisé qu’une « diminution a été observée en 2007/2006 dans les
deux cas, mais que le rang de classement n’a pour ainsi dire pas évolué ».
Cette observation et son commentaire appellent une remise en perspective et
deux informations complémentaires.
La reconfiguration du réseau des caisses de MSA en 35 organismes
induit, dans les exercices qui précèdent la fusion des caisses, des charges
supplémentaires, consécutives à la préparation des opérations d’unification
du système d’information, d’unification du système de gestion électronique
des documents, d’installation de la plateforme commune aux deux caisses, de
mise en place des institutions représentatives du personnel, ainsi que de la
simplification de la ligne hiérarchique et enfin de la mise en place d’une
comptabilité unique. (…)
REPONSES DES ORGANISMES
453
DEUXIÈME PARTIE – LA GESTION DES
RISQUES
Chapitre V
Le financement des dépenses de santé : répartition
et transferts de charge entre contributeurs depuis
1996
REPONSE DE L’UNION DES ORGANISMES D’ASSURANCE MALADIE
COMPLEMENTAIRE (UNOCAM)
Les éléments qui autorisent la Cour à conclure de façon définitive que
le transfert de charge de l’assurance maladie obligatoire (AMO) vers
l’assurance maladie complémentaire (AMC) se traduit par : « des coûts de
gestion [sans doute] accrus, une perte de ressources publiques et enfin par des
inégalités de traitement » se fondent à la fois sur des comparaisons très
discutables entre AMO et AMC et sur un certain nombre d’approximations
qu’il sera permis à l’Union de mettre en exergue dans les observations ci-
dessous :
1/ Une comparaison artificielle et illégitime produit une démonstration
biaisée.
La démonstration de la Cour consiste à placer artificiellement AMO et
AMC sur un même plan, renvoyant dos à dos deux systèmes obéissant à des
logiques radicalement différentes : un système obligatoire et monopolistique
et un système facultatif et concurrentiel. Ce faisant, il est alors permis de
«reprocher» à l'AMC de ne pas présenter les mêmes caractéristiques que le
régime obligatoire. De fait, quel serait le regard porté sur la performance de
l'AMO si on la jugeait à l'aune de certaines des caractéristiques propres à
l'AMC telles que la liberté de choix des garanties par le souscripteur ou
encore le respect de règles prudentielles ?
La Cour choisit de comparer les coûts de gestion de l'AMO et de
l'AMC au moyen d'un ratio qui a pour principale vertu d'être très favorable à
l'AMO compte tenu notamment du poids de ses prestations par rapport à
celles des complémentaires. Ainsi, il n'est pas illogique que les coûts de
gestion des AMC soient plus élevés puisqu'elles remboursent une part
minime d'un grand nombre de poste de prestations. Dans certains domaines,
on pourrait sans doute tirer des conclusions totalement différentes. De ce
point de vue, il serait intéressant de comparer le ratio frais de gestion sur
prestations versées par l'AMO sur les dépenses d'optique au ratio des AMC.
Le choix d'utiliser ce ratio est en soi discutable puisque moins
l'assurance maladie agit pour limiter la charge des prestations, plus le ratio est
C
OUR DES COMPTES
454
favorable ! Enfin, il est hautement contestable car il néglige plusieurs des
différences intrinsèques de l'AMO et de l'AMC : les frais d'acquisition sont
par définition nuls dans un contexte obligatoire et les économies d'échelle
permises à un monopole d'Etat sont sans commune mesure avec ce que
peuvent espérer des organismes d'assurance maladie complémentaire qui
assurent une couverture par nature parcellaire. La « gestion » de l'assurance
maladie obligatoire concerne bien sûr des activités très différentes ; ainsi, les
coûts de recouvrement des cotisations sont assurés par les URSSAF. Par
ailleurs, les organismes d'assurance maladie complémentaire (OCAM) ne
peuvent se permettre d'être déficitaires, or le dénominateur du ratio de l'AMO
inclut le déficit. Il n'est pas donc pas comparable avec ceux des AMC. Par
ailleurs, n'y sont comptabilisés ni les frais de gestion hospitaliers ni la dette
déplacée sur la CADES, et encore moins le fardeau du déficit. Dans son
rapport de juin 2007 sur la certification des comptes de la sécurité sociale, la
Cour pointait les insuffisances du contrôle interne de l'assurance maladie.
Elle peut difficilement aujourd'hui citer en exemple la prétendue modestie de
ses frais de gestion. Enfin, faut-il le rappeler, les règles prudentielles
imposent aux organismes assureurs de constituer des provisions importantes,
qui sont bien évidemment un élément non négligeable de l'écart arithmétique
entre les cotisations perçues et les prestations versées.
La Cour pointe le caractère non-redistributif de l'AMC en faisant là
encore une comparaison abusive avec un régime obligatoire.
La Cour retient comme critère d'évaluation de la couverture
complémentaire une capacité de redistribution calquée sur celle de
l'assurance maladie obligatoire (qui constitue « un outil de redistribution des
revenus très puissant » selon la Cour). Cette assimilation est très discutable,
les objectifs de gestion des organismes d'assurance maladie complémentaire,
leurs bases de mutualisation du risque maladie, et leurs règles de
fonctionnement juridiques et financières étant foncièrement différents de
ceux de l'assurance maladie obligatoire. Dans le cadre d'un monopole d'Etat,
on peut pratiquer la redistribution que l'on souhaite. Dans un système
concurrentiel d'assurance, on se doit de préserver les intérêts de mutualités
homogènes d'assurés, dans le cadre des règles fixées par l'Etat. On doit le
faire d'autant plus qu'il faut veiller à l'équilibre des comptes, en majorant si
nécessaire les cotisations, et que l'on n'a pas la possibilité de reporter des
déficits sur les générations futures. Le Président de la République a d'ailleurs
bien marqué la différence qu'il convenait d'opérer entre ce qui relève de la
solidarité nationale et donc de l'AMO et ce qui doit être pris en charge au titre
de la responsabilité individuelle et donc par une assurance complémentaire.
On ne peut, par définition, pas faire jouer le même rôle, en matière de
redistribution, à l'AMO et à l'AMC.
S'agissant des « aides publiques », la Cour néglige d'indiquer que
l'activité d'assurance alimente significativement les ressources publiques. Il
convient en outre de rappeler que les exonérations dont la Cour fait état
REPONSES DES ORGANISMES
455
(exonération de taxe, exonérations fiscales et sociales) ont pour objectif
affiché de favoriser la souscription de contrats complémentaires respectant
des règles voulues par le législateur. En effet, aujourd'hui, pour accéder dans
certains domaines à des soins de qualité, la souscription d'un contrat
complémentaire est nécessaire. La CMUC a été mise en place pour cette
raison.
Si ces exonérations n'avaient pas été instaurées, les souscriptions de
contrats complémentaires auraient été moins importantes et le montant des
« aides publiques » également, puisqu'elles sont liées aux cotisations de ces
contrats. Une couverture, par la sécurité sociale de ce qui est pris en charge
par les complémentaires coûterait beaucoup plus cher en aides publiques. On
notera que la Cour des comptes n'a jamais calculé le coût en aides publiques
voire en déficits de l'assurance maladie obligatoire.
L'UNOCAM regrette que les chiffrages réalisés sur le montant des
« aides » aient fait l'objet d'une telle publicité, avant que ces estimations aient
fait l'objet d'une validation par les directions concernées, puisque de l'aveu
même de la Cour seuls les contrats Madelin sont effectivement suivis par la
direction de la législation fiscale (cf. rapport remis à la MECSS) et que
l'essentiel de l'évaluation repose donc sur de simples hypothèses.
2/ Des approximations pour le moins surprenantes de la part de la
Cour.
S'agissant des transferts de charge, l'UNOCAM remet en question
l'analyse faite par la Cour. L'UNOCAM rappelle qu'elle avait demandé aux
pouvoirs publics, en l'absence d'une évaluation ex ante, une estimation ex
post de ces transferts. Cette demande étant restée sans réponse à ce jour, cela
rend les chiffrages de la Cour d'autant plus intéressants.
La lecture des principaux éléments de chiffrage retenus par la Cour
appelle quelques observations de l'Union :
checkbld
Le chiffrage ex ante des impacts sur les OCAM effectués par la
Cour fait apparaître des montants sensiblement supérieurs
449
à ceux produits
par le Haut conseil pour l'avenir de l'assurance maladie
450
- impact de la T2A sur les tickets modérateurs hospitaliers : 117 M€
pour le HCAAM, 230 M€ pour la Cour ;
- impact de la revalorisation en 2004 du FJH : 100 M€ pour le
HCAAM, 129 M€ pour la Cour ;
- impact du TM forfaitaire de 18 € : 90 à 117 M€ selon le HCAAM,
135 M€ selon la Cour ;
449. Ce qui illustre la fragilité de ces chiffrages.
450. Cf. avis du HCAAM du 27 octobre 2005.
C
OUR DES COMPTES
456
- passage à 15% des veinotoniques : opération « blanche » pour le
HCAAM, 121 M€ pour la Cour ;
- ordonnanciers bizone : le calcul de la Cour (196 M€) retient la
fourchette « haute » de la proposition du HCAAM (200 M€).
checkbld
Les chiffrages effectués dans le domaine du médicament font
apparaître une répartition différente au regard des données disponibles, à
travers notamment la base IMS Health : les mesures de contrôle, de baisse de
taux, de déremboursements et de maîtrise ont permis 1 Md€ d’économies
pour l’AMO, un surcoût de 100 M€ pour les AMC et de 900 M€ pour les
ménages
451
.
checkbld
L'impact de la T2A sur les tickets modérateurs hospitaliers est
estimé à 230 M€. Or, sur la période de référence (2004-2006), l'impact
cumulé de leur hausse pour les seuls EPS représente selon la DGCP plus de
330 M€, auxquels devraient encore être ajoutés ceux des établissements de
santé privés auparavant financés par la dotation globale (PSPH).
checkbld
La méthodologie des calculs pose en outre deux problèmes tout à
fait spécifiques :
-
d'une part, il est pour le moins discutable de retenir pour toutes les
dépenses la répartition de 92/8 entre les OCAM et les ménages : la relative
méconnaissance de la population non couverte et notamment la forte
proportion de personnes très jeunes aurait dû inciter à plus de prudence dans
l'utilisation systématique de ce ratio ;
- d'autre part, l'analyse des dépenses induites sur la période considérée
aurait pu prendre en compte les conséquences des augmentations des
honoraires des professionnels et plus généralement des recettes des
producteurs de soins : ces décisions prises de fait sans concertation
reviennent à une facturation mécanique supplémentaire des organismes
complémentaires et des ménages. L'exemple des soins conservateurs
dentaires est de ce point de vue particulièrement exemplaire. Globalement,
l'UNOCAM estime que pour la période considérée, les revalorisations se sont
élevées à 1,65 Md€ pour l'AMO, et 500 M€ pour les AMC et les ménages sur
la période 2004-2008. Il en est de même lorsque la Cour évoque une
économie de l'AMO de 440 M€ sur le forfait journalier hospitalier puisque
l'AMO ne finance que très marginalement cette prestation. L'augmentation du
FJH si elle peut être assimilée à une recette nouvelle n'est donc pas un
transfert de charge entre financeurs comme le sont la plupart des autres
mesures présentées.
451. La Cour estime, faute de disposer de données détaillées, à 920 M€ l’économie
réalisée par l’AMO, à 400 M€ celle réalisée par les AMC et à 1,3 Md€ la charge
supplémentaire des ménages.
REPONSES DES ORGANISMES
457
checkbld
Le titre du tableau « estimation financière en année pleine des
transferts attendus » est en outre inexact, s'agissant d'impacts cumulés sur
plusieurs exercices pour certains items.
S'agissant des transferts sur la période 2004-2006, la Cour souligne
que « tout se passe comme si le transfert de financement organisé en
direction des ménages avait été pris en charge par les complémentaires sans
que les contrats responsables aient encore été appliqués en 2006 ».
On s'étonne de cette conclusion puisque si l'on se réfère aux données
utilisées par la Cour elle-même, les mesures de « transferts » sur cette période
ne sont en aucune façon liée au contrat responsable : hausse du forfait
journalier hospitalier, déremboursement de médicaments ou baisse de taux,
ordonnancier bizone ou encore T2A… Dans ces conditions, il est tout à fait
logique qu'un transfert de charge « net » ait bien eu lieu de l'AMO vers
l'AMC.
Par ailleurs, cette partie du rapport pourrait laisser croire que les
organismes d'assurance maladie complémentaire n'ont pas appliqué le contrat
responsable. Ceci ne correspond en rien à la réalité comme en atteste
notamment, l'étude de la DREES pour qui en 2006 « 100% des contrats
collectifs modaux et 99% des contrats individuels modaux sont déclarés
responsables »
452
. Il convient en outre de rappeler que le décret fixant le
contenu des « contrats responsables » a été publié au JO du 30 septembre
2005 pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2006 (et partiellement au er
juin 2006).
Les OCAM avaient à cette époque eu à déplorer le peu de temps dont
elles disposaient pour mettre en conformité leurs garanties avec les
dispositions du contrat responsable.
S’agissant
du
chapitre
consacré
au
« coût
élevé
de
la
complémentaire », l’UNOCAM relève des incohérences dans la présentation
relative aux frais de gestion de l’AMO et de l’AMC. Les ratios coûts de
gestion / prestations gérées dans les CNS ont été diffusés à la presse et à la
MECSS alors qu’ils ont manifestement fait l’objet d’erreurs de calculs pour
l’AMO, les institutions de prévoyance, les sociétés d’assurances et les
mutuelles. Il semble par ailleurs, que les périmètres retenus pour l’AMO et
les AMC soient différents : les chiffres comprennent les prestations en
espèces et en nature pour l’AMO et pas pour les AMC.
REPONSE DE L’INSTITUT DES DONNÉES DE SANTE (IDS)
La Cour recommande que des états statistiques identiques soient
rendus
obligatoires
pour
les
trois
familles
d'assurance
maladie
452. Etudes et résultats n°°635, mai 2008, « contrats les plus souscrits auprès des
organismes complémentaires santé en 2006 », DREES, page3.
C
OUR DES COMPTES
458
complémentaire, Elle ajoute que la collecte pourrait en être assurée par
l'autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, et la définition de leur
contenu assurée par l'IDS.
Le Bureau de l'Institut des Données de Santé a décidé que ce dossier
fasse l'objet d'un premier examen au sein de la Commission pour l'Analyse et
la Diffusion d'Informations Statistiques (CADIS) afin d'établir un état des
lieux. Il pourra être suivi, dans un second temps, de la définition du périmètre
des états statistiques.
Afin d'améliorer l'analyse du reste à charge des assurés, les membres
de l'Institut ont souhaité que soit mis en place un échantillon de bénéficiaires
généralistes pérenne et partagé, alimenté par des données de remboursement
de l'assurance malade obligatoire et des assureurs maladie complémentaires.
Pour atteindre cet objectif, l'IDS et l'IRDES ont signé une convention.
L'ESPS 2010, menée par l'IRDES, constitue une phase expérimentale
pour atteindre l'objectif cible. L'IRDES assure l'échantillonnage, la
préparation et production de l'enquête ESPS 2010, ainsi que la coordination
de l'appariement des données de l'enquête, des données de l'échantillon
permanent inter régimes de bénéficiaires de l'assurance maladie (EPIBAM) et
de celles des remboursements effectués par les assureurs
maladie
complémentaires, sur la base du volontariat.
Chapitre VI
Les pharmacies d
’
officine et leurs titulaires libéraux
REPONSE DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES PHARMACIENS
(CNOP)
Le caractère très récent de la réforme des regroupements ne permet
pas d’évaluer à ce jour la pertinence du dispositif. Il est normal que le
nombre des dossiers déposés sur les six derniers mois soit modeste, surtout
compte tenu des fortes incertitudes que les pouvoirs publics laissent peser sur
l’avenir économique des officines (menaces à la fois sur les marges, la
propriété du capital et le monopole sur le médicament). Ces incertitudes ne
peuvent que retarder les décisions d’investissement de la part des
professionnels.
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAMTS)
La Cour estime que le dispositif de rémunération des pharmaciens est
généreux
concernant
les
médicaments
génériques
et
s'interroge
sur
l'opportunité de son maintien. A cet égard, il faut souligner que si un fort taux
de substitution a été atteint, ce résultat ne constitue pas un acquis et que le
REPONSES DES ORGANISMES
459
maintien de ce résultat nécessitera, à l'avenir, que l'implication des
pharmaciens reste soutenue.
Chapitre VII
L
’
accès en ligne aux dossiers médicaux
RÉPONSE DU CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES PHARMACIENS
(CNOP)
Je vous prie de trouver ci-après nos observations sur ce document.
a) L'historique des remboursements :
Il est indiqué, à propos de l'historique des remboursements de
l'assurance
maladie,
qu'il
comprend
« l'ensemble
des
médicaments
remboursés, voire non remboursés si l'information a été saisie ». Or,
l'information sur les médicaments non remboursables, qui est effectivement
saisie par le pharmacien dans son système informatique, n'est jamais
transmise à la CPAM. Elle ne peut donc figurer dans l'historique de la
CNAMTS.
Il faut enfin noter, si l'on compare le DP et l'HR, que ce dernier ne
mentionne un médicament qu'avec un décalage sensible par rapport à sa
dispensation : il faut que le pharmacien ait télétransmis l'information à la
caisse, ce qu'il ne fait pas toujours immédiatement, puis que l'HR soit mis à
jour, ce qui prend environ cinq jours. Le DP, lui, est alimenté en temps réel.
b) Le dossier pharmaceutique
Le déploiement du DP connait une très forte accélération depuis le
début d'avril dernier. Au 24 juin, 1971 officines sont équipées et ont créé 577
115 dossiers. Plus de 10 000 nouveaux DP sont actuellement créés chaque
jour. Au 30 juin, nous devrions donc dépasser 2 000 officines et 600 000 DP.
RÉPONSE DU GIE SESAM VITALE
En anticipation des travaux de maîtrise d’ouvrage, et dans une vision à
l’origine centrée sur les besoins de services en ligne du périmètre SESAM
VITALE, le GIE a conçu et développé une nouvelle architecture de Poste de
Travail. En 2007, à la demande de ses membres, de la MISS et du DMP, le
GIE s’est entouré de solides avis professionnels pour évaluer les solutions
techniques, et valider leur capacité d’ouverture à l’ensemble des besoins du
secteur Santé-Social. Tous ces acteurs sont associés au comité de pilotage de
cette évaluation conduite par GFI.
Les premières conclusions d’ensemble ont été restituées en mai 2008,
tant en comité de pilotage qu’au CD du GIE. En grande synthèse concernant
le poste de travail, les choix ne sont pas remis en cause, mais GFI insiste pour
C
OUR DES COMPTES
460
que le modèle d’administration et de support des composants soit plus
explicitement défini avant toute diffusion de masse. Une pré-étude sur ce
sujet sera publiée en septembre par le GIE.
Au-delà du Poste de travail PS, la mission GFI a évalué
l’infrastructure intermédiaire IMARS, et a recommandé pour l’avenir une
prise en compte plus importante d’éléments standards du marché dans sa
construction.
Enfin, et de manière plus globale, il a été décidé d’un commun accord
que la CTS (commission technique et sécurité traitant tous les choix
techniques transversaux) serait ouverte en avril 2008 au GIP DMP. Cette
ouverture à des acteurs non membres du GIE sera officialisée au CD du 26
juin.
RÉPONSE DU GIP CPS
En ce qui concerne la recommandation n° 2 consistant à "Créer un
centre d'expertise national et indépendant en informatique de santé, chargé
notamment de la normalisation et des référentiels, le cas échéant lors d'une
restructuration des opérateurs".
Cette recommandation me paraît particulièrement pertinente, et rejoint
pour partie la décision récente de constituer une agence des systèmes
d'information partagés (ASIP), prise par Madame le Ministre en charge de la
santé sur la base des préconisations du "rapport Gagneux" de relance du
DMP. A des fins constructives, je souhaite faire valoir ici les capacités de la
structure du GIP-CPS pour héberger cette mission qui consiste à mettre en
place les règles et les outils communs fondateurs du partage et de l'échange
des données de santé.
Tout d'abord, cette mission peut être considérée comme une extension
des fonctions actuelles du GIP-CPS (ce premier point n'a d'ailleurs pas
échappé aux signataires du "rapport Gagneux" qui inclut les activités du GIP-
CPS dans le périmètre de l'ASIP). Le GIP-CPS est en effet en charge
aujourd'hui d'un service rendu à l'ensemble de la communauté des acteurs et
des applications du système d'information de santé, qui concerne la
certification électronique des identités et des qualités professionnelles. Dans
ce périmètre, il assure déjà la publication de normes et de référentiels.
Par ailleurs, les statuts du GIP-CPS et son mode de fonctionnement
sont adaptés à la conception et à la mise en oeuvre d'outils communs et de
services transversaux.
En 15 années d'expérience, le GIP-CPS a acquis un savoir faire de
l'action collective dans la concertation. Il l'a récemment mis à profit dans
l'objectif du déploiement du système CPS dans les établissements de soins.
Pour définir les conditions d'acceptation de ce déploiement, il a su réunir
dans un projet d'étude collectif aux côtés des différentes institutions, aussi
REPONSES DES ORGANISMES
461
bien les représentants des fédérations hospitalières que les industriels du
domaine. C'est ainsi qu'a été conçue la future CPS actuellement en chantier,
qui verra le jour dans le courant du second semestre 2009, qui sera bâtie à
partir d'un composant acceptant le standard IAS (standard pour les cartes
d'identification, authentification et signature), et qui sera dotée de possibilités
de lecture avec et sans contact pour mieux répondre aux besoins des
établissements. Il coopère maintenant avec la DHOS et le GMSIH au
programme
d'accompagnement
pour
la
mise
en
conformité
des
établissements de soins au décret confidentialité.
Il a également tissé des liens avec les industriels du secteur de la santé
dans le but de favoriser le développement d'outils de sécurité fondés sur le
système CPS et l'intégration des fonctions de confiance dans les logiciels
métier.
RÉPONSE DU GIP DMP
Après une lecture attentive, le GIP DMP ne peut que souscrire très
largement à l'analyse faite par la Cour, ainsi qu'à ses propositions. Les
annonces faites le 18 juin 2008 par la Ministre de la santé, de la jeunesse des
sports sur la relance du projet de DMP sont de nature à apporter les réponses
à la plupart des problèmes ou faiblesses soulignées à juste titre par la Cour.
RÉPONSE DE L’AFNOR
Une mission de concertation valorisée au sein d'un environnement
complexe
La Commission AFNOR de normalisation "Informatique de Santé"
-(CNIS) évolue dans un contexte composé d'acteurs et de structures très
différents et souvent concurrents, dont les missions se chevauchent
(organisations professionnelles, groupements d'intérêt public et économique
multiples). Dans un tel contexte, les parties intéressées réunies au sein de la
CNIS ont confirmé sa mission de concertation et son rôle fédérateur qui lui
permettent de dégager une stratégie collectivement partagée par ses membres,
sur les thèmes suivants :
- le circuit du médicament (intra et extra hospitalier),
- les dossiers de données interopérables,
- les terminologies et les concepts (les nomenclatures),
- la qualité, la sécurité et la sûreté de fonctionnement des systèmes
informatiques hospitaliers (SIH) dont l'identification des patients et la
traçabilité.
Pour chacun de ces thèmes, la CNIS est l'interface nationale pour les
travaux de normalisation européenne et internationale dont la finalité est la
C
OUR DES COMPTES
462
mise en oeuvre du volet informatique de la production de soins dans les
établissements de santé et la sécurité des échanges de données médicales et
médico-techniques intra et extra hospitaliers.
Toutefois, l'environnement national complexe de la CNIS fait que son
efficacité a pu être freinée par l'absence d'expression claire des Pouvoirs
publics quant à leur souhait de s'appuyer sur les normes reconnues pour
fournir
un
cadre
optimisant
l'efficacité
et
l'inter-opérabilité
des
expérimentations et projets publics d'informatique de santé.
Un rôle de coordination des acteurs et des travaux dans la démarche
normative française
Son programme de travail est essentiellement international. Sur les
102 projets inscrits, 2 seulement sont développés uniquement au niveau
national
(les
produits
sanguins
labiles
et
les
bases
de
données
médicamenteuses). La mobilisation des experts français et l'attribution de
leurs délégations dans les instances européennes et internationales de
normalisation sont directement effectuées au sein de la CNIS.
Une volonté de clarification des périmètres d'actions et des échanges
associés.
Compte tenu des attentes exprimées sur la clarification des missions et
des responsabilités détenues par les acteurs de ce secteur d'activité, un groupe
d’experts dédié a été mis en place au sein de la CNIS pour l’établissement
d’une cartographie des travaux en 2005. Les travaux préliminaires du groupe
ont mis en évidence la complexité et l’ampleur du travail à accomplir.
Cependant, ce projet de cartographie, pourtant indispensable et admis comme
tel par tous les acteurs, n'a pas encore pu être engagé car aucun organismes et
acteurs membres de la CNIS n'a souhaité investir dans sa réalisation.
Un acteur reconnu pour sa capacité à faire par delà les divergences
Lors de la dernière réunion de la CNIS, le 16 juin 2008, la DHOS et la
MISS ont confirmé que cette commission de normalisation était bien
l'instrument capable de garantir une définition collective de la stratégie de
normalisation dans le secteur des systèmes d'information hospitaliers parce
que cette commission de normalisation permettait de rassembler l'ensemble
de ses membres autour de projets fédérateurs malgré un environnement
complexe. La capacité de la CNIS à donner une vue transversale aux enjeux
de l'informatique de santé en resituant chacune des problématiques au coeur
du réseau d'expertise multisectoriel proposée par AFNOR constitue enfin un
argument d'efficience réel que toute autre structure, isolée ou segmentée, ne
pourra couvrir que partiellement.
REPONSES DES ORGANISMES
463
Chapitre VIII
Les restructurations hospitalières
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER REGIONAL UNIVERSITAIRE DE
LILLE
En ce qui concerne le contrat de retour à l’équilibre du CHU de Lille.
Sur la période 2004-2007, le CHRU de Lille a réalisé 20 M€
d’économies
structurelles
(résultat
conjointement
objectivé
par
l’établissement et l’ARH Nord-Pas de Calais en juin 2008).
Malgré
les
mesures
de
réorganisations
et
d’adaptation
que
l’établissement a engagées dès 2004, l’équilibre budgétaire n’a pu être atteint
sous l’effet conjugué des plans d’économie de l’assurance maladie (31,5 M€)
et de l’insuffisance de financement des mesures salariales (28,4 M€). Les
aides ponctuelles dont il a bénéficié sur la période s’élèvent à 21,8 M€.
L’augmentation de l’enveloppe MIGAC-MERRI (+24,18 M€ entre
2004 et 2007) se justifie par ailleurs, par une sous-dotation historique du
financement de ces missions dans la région Nord-Pas-de-Calais (pour les
MIG : l’écart à la moyenne nationale reste de 10 € par habitant pour plus de 4
millions d’habitants ; pour les MERRI, revalorisation reconnue des MERRI
au regard de la qualité et de la quantité des activités de recherche et des
publications scientifiques notamment).
L’évolution des effectifs ne résulte pas seulement d’une « difficulté
[…] à maîtriser les charges de personnel » mais traduit pour l’essentiel,
l’application de plans de santé publique (cancer, urgences, santé mentale,
périnatalité, Alzheimer…) ou d’accompagnement d’activités nouvelles (ex :
ouverture d’une UHSI de 20 lits). Elle doit s’apprécier relativement à
l’évolution de l’activité : augmentation du nombre de séjours de +9,8% entre
2004 et 2007. La productivité des personnels médicaux et non médicaux a
d’ailleurs été qualifiée de « bonne » par l’IGAS dans son rapport RM 2007-
116A.
Le CHRU de Lille a signé un nouveau CREF avec l’ARH en juin
2008, dans lequel il s’engage à atteindre l’équilibre en 2010 en poursuivant
les restructurations engagées depuis 2004 (restructuration de 196 postes entre
2004 et 2007 et 214 postes prévues entre 2008 et 2010).
En ce qui concerne le résultat d’exploitation.
Le déficit du CHRU de Lille est inférieur à 2% de ses recettes
d’exploitation (-15 M€ en 2007 soit 1.9% de ses recettes d’exploitation) ; ce
niveau de déficit est inférieur à la moyenne des déficits des CHU (hors AP-
HP) qui se situe à 2,1% (le CHRU se situant en 13ème position sur les 31
CHU). L’EPRD 2008 a été voté avec un résultat prévisionnel de -9,9 M€ soit
C
OUR DES COMPTES
464
1.23% des recettes d’exploitation. La poursuite des actions de restructuration
et d’adaptation de l’offre de soins en réponse aux besoins de santé de la
population de la région Nord-Pas-de-Calais, doit permettre à l’établissement
d’atteindre l’équilibre budgétaire en 2010 (objectif défini sur la base des
règles de tarification actuelles).
L’aide de 10 M€ dont le CHU de Lille a bénéficié est à comparer au
montant de 20 M€ d’économies structurelles réalisées sur la période 2004-
2007.
Le CHRU de Lille a engagé des réorganisations profondes dès 2004
qui ne peuvent être qualifiées de « tardives ». Comme les autres CHU, son
activité est de mieux en mieux valorisée dans le cadre de l’affinement
progressif des tarifs, et des financements forfaitaires de ses missions
distinctives ; l’approche par la moyenne appliquée au début de la réforme de
la
tarification
étant
pénalisante
pour
les
établissements
hospitalo-
universitaires.
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE PITHIVIERS
Le taux de fuite qualifié d’important dans le projet de rapport doit être
relativisé, les données disponibles sur la banque de données de fédération
hospitalière de France mettent en évidence un taux de fuite pour l’obstétrique
de 38% en 2006.
Les données 2007 ne sont pas connues mais ce taux de fuite sera sans
aucun doute en forte diminution du fait de la hausse de l’activité.
Je vous précise également que le centre hospitalier de Pithiviers a été
certifié par deux fois par la Haute Autorité de Santé et la seconde fois en
novembre 2006 avec le plus haut niveau (niveau 1).
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE CHINON
En ce qui concerne la maternité du centre hospitalier de Chinon, son
activité s’établit à près de 500 accouchements en 2007 et l’activité du 1er
quadrimestre 2008 fait apparaître une activité supérieure (de l’ordre de 520 à
530 accouchements en rythme annuelle).
Cette maternité qui vient d’être reconstruite et équipée à neuf est en
pleine réorganisation. L’année 2008 va permettre :
- la mise en place d’une permanence pédiatrique grâce à une
coopération renforcée avec le CHU de Tours.
- le renforcement de la couverture anesthésiste grâce à l’intervention
d’assistants du CHU de Tours.
REPONSES DES ORGANISMES
465
- l’arrivée d’un cadre de santé (a pris une vacance de poste de deux
années).
- le recrutement de deux praticiens.
- l’ouverture du plateau technique aux sages femmes libérales.
Par ailleurs, au regard de son activité d’intérêt général, un soutien
financier a été demandé à l’A.R.H. du Centre afin de couvrir l’écart entre le
seuil de rentabilité de cette maternité (seuil qui se situe à près de 900/950
accouchements) et le niveau que cette activité peut atteindre au regard du
bassin de population et du nombre de femmes en âge de procréer et relevant
d’une maternité de niveau 1 (activité estimée à 640/700 accouchements par
an).
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE VALREAS
S’agissant
de
la
sécurité
anesthésique,
je
vous
précise
que
l’établissement
dispose
de
deux
postes
de
praticiens
hospitaliers
d’anesthésiste réanimateur à temps plein, l’un pourvu par un praticien
contractuel depuis 2003, le second vacant depuis septembre 2007. Pour
assurer la sécurité des soins 24h sur 24 en anesthésie réanimation,
l’établissement a eu recours successivement à trois praticiens remplaçants,
mais aucunement stricto sensu à des agences d’intérim médical. Pour
synthétiser les dépenses relatives à ces remplacements, elles se sont élevées
sur quatre mois, en 2007 à 65 796€, soit supérieures de 33 % aux 47 580€ si
l’anesthésiste titulaire était resté, mais inférieures aux 93 900€ de dépenses
théoriques, si nous avions fait appel uniquement aux agences d’intérim
médical.
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE LA CIOTAT
Sur la base d'une étude de besoins effectuée par un cabinet spécialisé,
le projet en cours prévoyait initialement la réalisation de 10 salles d'opération
dans le bloc opératoire commun. Après étude et discussion avec l'ARH, il a
été décidé de ramener à 8 le nombre de salles du bloc opératoire.
Il est à noter que le Centre Hospitalier dispose actuellement d'un bloc
opératoire de 4 salles, alors que la clinique dispose d'un bloc principal de 5
salles majeures et de 2 salles de chirurgie ambulatoire, soit un total de 11
salles d'intervention pour les deux établissements
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER D’HIRSON
La solution se trouve peut-être dans la collaboration entamée avec
l’hôpital de FOURMIES, et la mise en commun prévue des équipes des
urgences et d’autres spécialités, complémentaires et non plus opposées.
C
OUR DES COMPTES
466
Un hôpital de proximité comme HIRSON doit pouvoir jouer le rôle
qui est le sien, en pouvant offrir à la population un équipement de qualité
qu’elle attend depuis longtemps.
Les médecins désertent le secteur et les praticiens libéraux présents
cesseront bientôt, pour un certain nombre, leur activité. L’hôpital constitue
alors un recours d’autant plus nécessaire qu’il correspondra, dans ces
conditions, à un besoin primordial de santé publique.
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE NOGENT LE ROTROU
Le déficit 2006 de l’établissement était de -298 222 € en 2006, il
devient de - 1 631 857 € en 2007.
Cette évolution s’explique par trois composantes principales : le coût
des remplacements médicaux: 509 361 €, l’insuffisante réalisation des
objectifs du plan de retour à l’équilibre (notamment en matière de dépenses
d’examens et de transport) : 416 706 € et l’impact de la suspension d’activité
de la chirurgie sur 4 mois : 332 697 €.
En effet, l’année 2007 a vu son déroulement profondément perturbé,
par la suspension -totale puis partielle- d’activité de la chirurgie à compter du
31 août, et par l’instabilité de la communauté médicale.
La communauté médicale a connu de profondes divergences en 2007,
qui ont conduit aux départs de 7 médecins à temps plein, soit près d’un tiers
de l’effectif médical. Compte tenu de la démographie médicale déficitaire,
l’établissement a temporairement eu recours à des personnels intérimaires, ce
qui s’est avéré coûteux et perturbant. Cette situation est aujourd’hui en voie
de résorption, grâce au recrutement de nouveaux intervenants médicaux
stables.
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE VIERZON
La Cour note à juste titre la situation géographique particulière du
centre hospitalier du Blanc mais n’applique pas le même raisonnement a
contrario envers le centre hospitalier de Vierzon. Celui-ci dessert un bassin
de population s’étendant au Nord vers le Loir et Cher jusqu’à Salbris et
fortement vers l’Ouest le long de la vallée du Cher. Il bénéficie d’un réseau
exceptionnel de communication autoroutier et ferroviaire qui rend la ville de
Vierzon incontournable. Ce bassin est distinct de celui de Bourges-Sancerre
dont les élus soulignent fréquemment l’enclavement.
En dépit de cet obstacle, le centre hospitalier de Vierzon, dans le cadre
du réseau périnatalité a développé des coopérations et une complémentarité
avec la maternité de niveau 2 située à Bourges.
REPONSES DES ORGANISMES
467
La maternité du centre hospitalier de Vierzon est active, rénovée,
conforme aux normes et dessert un bassin de population important et
spécifique.
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER INTERCOMMUNAL DE
TOULON–LA SEYNE SUR MER
La fusion « administrative » des centres hospitaliers de Toulon et La
Seyne sur Mer en 1988 ne prévoyait pas de regroupement des activités MCO
sur un seul site. Bien au contraire, les pouvoirs publics de l’époque, dans le
contexte des très grandes difficultés industrielles et sociales de La Seyne sur
Mer, ont exigé la reconstruction d’un hôpital complet à La Seyne sur Mer :
celui-ci fut effectivement inauguré et ouvert en 1995.
Il est apparu, très vite, la nécessité de procéder à des regroupements
d’activité, avec un premier échec concernant les deux maternités.
Cependant, la construction du nouvel hôpital Sainte-Musse, qui doit
devenir l’hôpital de référence de l’agglomération toulonnaise début 2011,
offre l’opportunité de concrétiser les regroupements les plus opportuns :
Le site de La Seyne sur Mer doit, certes, garder son service
d’Urgences (35 000 passages par an) compte tenu de la population desservie.
Par contre, une spécialisation de l’hôpital de La Seyne sur Mer,
complémentaire du nouvel hôpital Sainte-Musse est d’ores et déjà initiée :
-
la pédiatrie de La Seyne sur Mer est regroupée avec le service et sur
le site de l’hôpital Font-Pré à compter du 15 octobre 2008. ;
- la rééducation fonctionnelle va être transférée sur le site de La Seyne
sur Mer,
- le futur projet médical 2009-2013 prépare l’ouverture du nouvel
hôpital Sainte-Musse.
La Communauté médicale le proposera, au terme des ses travaux, au
Conseil d’Administration en fin d’année 2008. Il prévoira sans aucun doute
une concentration des services MCO ayant recours à un plateau technique sur
le nouveau site de référence, le futur hôpital Sainte-Musse.
REPONSE DE L’ASSISTANCE PUBLIQUE – HOPITAUX DE MARSEILLE
Les normes imposées par les décrets de 1998 ont accéléré le processus
de restructuration et de fusion-absorption dans le secteur privé
se
traduisant par la disparition de 12 maternités de proximité en PACA.
Ces fermetures de maternité ont eu des répercussions importantes sur
les établissements publics, en général, et les CHU, en particulier, qui ont dû
C
OUR DES COMPTES
468
faire face à un surplus d'activité très important dans des structures dont, ni
l'architecture ni les effectifs de personnels ne se prêtaient à cette évolution.
Le Plan périnatalité
a permis toutefois d'atténuer certaines difficultés
de fonctionnement.
La mise en place de la tarification à l'activité et la valorisation peu
attractive
du
tarif
du
GHS
« accouchement
par
voie
basse
sans
complication » a par ailleurs joué un effet cumulatif aggravant dans cette
dynamique volontariste de désengagement progressif de l'activité obstétricale
par les établissements privés.
La conjugaison de l'ensemble de ces facteurs défavorables conduit
aujourd'hui les deux maternités de l'AP-HM, seules maternités publiques
de l'agglomération marseillaise, à suppléer les carences du secteur privé
et à prendre en charge un nombre disproportionné de naissances sans
complication au détriment de son activité de recours et de référence de
niveau 3 orientée vers la naissance pathologique : cette situation, que
l'APHM gère par défaut, ne peut pas aujourd'hui lui être reprochée.
Le texte n'appelle pas d'observations de l'AP-HM sur le constat global
d'une situation de retard par ailleurs constatée et documentée par l'IGAS (à
laquelle la nouvelle équipe de direction mise en place a tenté de rapidement
porter remède). Cet effort considérable de mobilisation autour d'un projet a
été dans un premier temps favorisé par la relance des investissements initiée
par le plan hôpital 2007. Cependant, cette relance construite sur les
fondements d'un budget global protecteur pour l'institution s'est opérée alors
que simultanément changeaient les règles comptables et de financement avec
la montée en charge de la tarification à l'activité. Le challenge de l'AP-HM
est
désormais
de
réaliser
les
investissements
restructurants
sources
d’indispensables gains de productivité avec un objectif de retour à l'équilibre
en 2012.
Il convient de noter que le 3
ème
CHU de France ne bénéficie pas de la
bonification géographique sur les tarifs accordée notamment à Paris et à l'Ile
de France (+7%) alors que ses charges de personnel (indemnité de résidence
au taux le plus élevé, taxe sur les transports) et l'évolution du coût du foncier
le justifieraient. Une simple correction de 5% remettrait l'institution en
situation d'excédent. La prise en compte dans la tarification des situations
de précarité qui pèsent sur le coût des séjours a été annoncée par les
autorités ministérielles ; elle serait déterminante dans une ville ayant une
population pauvre importante.
Pour être intellectuellement légitime, une analyse des parts de
marché, dans un territoire donné, entre un CHU et les établissements privés
qui l'entourent doit se fonder sur une approche systémique articulant :
- dans un premier temps, les données générales à chaque discipline (ce
que fait le rapport) ;
REPONSES DES ORGANISMES
469
- puis, dans un second temps, pour chaque discipline, les parts de
marché du CHU et des établissements privés ventilées par GHM ou groupe
de GHM.
Ainsi, il sera loisible à tout observateur de remarquer que si sur :
- la cardiologie, l'APHM ne représente globalement que 28% des parts
de marché du territoire, elle en représente 71% sur les cardiopathies
ischémiques et sur 12 autres GHM relevant de la classification OAP
"cardio" ;
- la neurologie, l'APHM ne représente globalement que 58% des
séjours hospitaliers du territoire, elle en représente 92% sur l'ensemble des
maladies cérébro-vasculaires dégénératives ;
- les pathologies digestives, l'APHM ne représente globalement que
'18% des séjours, elle en représente 44% sur l'ensemble des pathologies
tumorales.
Des exemples de ce type énumérables à volonté illustrent le partage
historique du marché de l'offre de soins entre les affections "légères" à DMS
courte (apanage du secteur privé) et les affections réputées lourdes,
traumatiques et tumorales, concentrées plus ou moins dans le secteur public
hospitalier, en général, et dans les CHU en particulier.
Il est à craindre que ce clivage et cette ligne de frontière puissent voler
en éclat à l'aune des mécanismes tarifaires connotés par la T2A, les CHU
étant incités à reprendre des activités de routine pour garantir leur équilibre
budgétaire. A cet égard le travail d'analyse engagé par les services
ministériels et la mission T2A pour déterminer les raisons des surcoûts des
CHU et rechercher une adaptation des tarifs a déjà identifié quelques points
tels que le poids des plateaux techniques, de l'innovation, des gardes lourdes,
l'éventail des spécialités (563 GHM couverts en moyenne dans les CHRU),
l'effet recours, le recours « quaternaire » ou la mauvaise organisation de la
réanimation.
Au total, la mise en place des OQOS (objectif quantifié de l'offre de
soins) et la rédaction par l'ensemble des acteurs du territoire de santé Bouches
du Rhône Sud d'un projet médical de territoire devraient contribuer à limiter
une surenchère d'activité ou d'équipement qui pourrait découler de
l'application pure et dure de la réforme tarifaire.
C
OUR DES COMPTES
470
Chapitre IX
Les systèmes d’information dans les établissements
de santé
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DEPARTEMENTAL LA ROCHE
SUR YON-LUÇON-MONTAIGU
Le centre hospitalier a présenté ses observations sur les différentes
mentions le concernant.
Concernant les tableaux de bord et leur utilisation à des fins de
pilotage
La phrase qui est prévue dans le projet de rapport (« Au CHD de La
Roche-sur-Yon, les tableaux de bord ne sont analysés en commun que dans
les
services
volontairement
engagés
dans
une
démarche
de
contractualisation. ») est assez réductrice et ne traduit pas de façon fidèle la
réalité du pilotage médico-administratif qui est mis en place au CHD.
Les données comptables et d’activité sont largement diffusées au sein
de l’établissement :
- mensuellement
pour
les
données
d’activité
(statistiques
administratives, données PMSI et T2A…) ;
- mensuellement pour les charges directes par UF/service/pôle ;
- quadrimestriellement pour le suivi budgétaire macro ;
- annuellement pour les résultats d’un certain nombre d’outils de
comptabilité analytique (rapport d’activité, comptes de résultat analytique par
service clinique, base d’Angers…).
Il est vrai que l’établissement n’a pas encore organisé des points
périodiques d’analyse des données avec les « producteurs » (…)
Le caractère peu étendu de la contractualisation interne mise en place
par le CHD au tournant des années 2000 avec quelques services volontaires
avait (…) permis l’organisation de réunions périodiques de présentation des
tableaux de bord aux équipes.
Dans le cadre de la nouvelle gouvernance, cette démarche va être
reprise et généralisée dès lors que les contrats de pôle auront été signés, soit
d’ici la fin de l’année 2008. Le directeur adjoint chargé du contrôle de
gestion et de la contractualisation interne est investi de cette responsabilité
d’animer des rencontres trimestrielles avec les équipes de pôle.
REPONSES DES ORGANISMES
471
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE BEAUVAIS
Le Centre Hospitalier de Beauvais a lancé une consultation en 2006
pour mettre en place un dossier médical unique dans ses services.
Il a rejoint une démarche régionale (PHARE – Amiens, Beauvais,
Compiègne) visant à utiliser un outil commun intégrant les impératifs du
DMP. L’outil sera non seulement identique au sein des services, mais
également commun aux établissements de la région, évitant ainsi les
patchworks par la mise en oeuvre de dossiers médicaux orientés métiers ou
spécialités, qui ne communiquent pas entre eux et encore moins avec les
applicatifs administratifs.
Le but d’un SIH hospitalier est de mettre en oeuvre des logiciels
communiquants où l’information n’est saisie qu’une fois et mise à disposition
des utilisateurs autorisés en temps réel.
Informatiser une spécialité n’est pas informatiser le dossier patient
d’un établissement, c’est pourquoi le Centre Hospitalier de Beauvais souhaite
mettre en place un dossier patient unique avec un important tronc commun
entre les spécialités. Les logiciels répondant à cette attente ne sont pas légion
sur le marché.
REPONSE DU CENTRE HOSPITALIER DE CAHORS
Les extraits du rapport relatifs au centre hospitalier de Cahors
n’appellent pas d’observation.
Néanmoins s’agissant du circuit du médicament, le constat a été
effectué en juin 2007 et la situation a, depuis, notablement évolué
(favorablement…) sur ce point.
REPONSE DU GROUPEMENT POUR LA MODERNISATION DU
SYSTEME D'INFORMATION HOSPITALIER (GMSIH)
« Le GMSIH a réalisé des analyses des offres du marché, mais ces
travaux restent rares, volumineux et prudents quant au jugement porté sur le
produit et l'éditeur. La dimension du prix n'est pratiquement pas abordée ».
Réponse : le prix n’est pas abordé car il varie en fonction du cahier
des charges de l’établissement, des fonctionnalités demandées par les
établissements, du nombre de formations (lui-même dépendant du nombre
d’utilisateurs concernés par le projet), du nombre de logiciels existant dans
l’établissement à intégrer ou non, etc. Les critères de fixation du prix sont
donc tellement nombreux et variables en fonction des projets des
établissements qu’une telle information serait trop générique pour être juste.
C
OUR DES COMPTES
472
Quant à la prudence du GMSIH, elle s’explique par le fait qu’un
même produit peut être considéré comme bon par un établissement et
mauvais par un autre. La qualité d’un produit dépend aussi de la qualité du
projet qui accompagne sa mise en place. La qualité du projet dépend elle-
même des personnes en charge du projet tant du côté de l’éditeur que du côté
de l’établissement. Des jugements trop tranchés pourraient avoir des
conséquences économiques et sociales chez l’éditeur alors qu’ils pourraient
apparaître comme injustifiés en fonction du projet étudié.
Le choix du GMSIH est d’apporter aux établissements de santé une
méthode pour les aider à juger d’une offre en fonction des caractéristiques de
leur projet. En complément de ce travail, le GMSIH fournit aux
établissements de santé une offre appelée « Accompagnement ponctuel »
destinée à apporter une aide plus ciblée à tel ou tel établissement qui le
souhaite, notamment quant à l’élaboration de son cahier des charges et de son
projet de système d’information. Une cinquantaine d’établissements y
recourent chaque année en moyenne.
Chapitre X
Les aides à la garde des jeunes enfants
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE DES ALLOCATIONS FAMILIALES
(CNAF)
Le chapitre X du rapport consacré aux aides à la garde des jeunes
enfants appelle de la part de la CNAF les observations suivantes :
La Cour considère que la PAJE s’est révélée beaucoup plus coûteuse
que prévue et n’a pas bien rempli ses objectifs. S’il est indéniable que le coût
de la PAJE a largement dépassé les prévisions initiales, la CNAF souhaite
nuancer les considérations négatives sur l’atteinte des objectifs, tels que
rappelés en début de chapitre : simplification et amélioration du libre choix.
Au sujet de la simplification, la Cour déplore la complexité persistante
de la réglementation. Cependant des simplifications importantes pour la
liquidation de la prestation et les formalités administratives sont très
appréciées des allocataires. Les résultats de l'enquête de satisfaction menée
en 2008 par le centre PAJEMPLOI sont à cet égard très éloquents pour
témoigner de la satisfaction des familles : 98% des bénéficiaires de la PAJE
sont satisfaits par la qualité de service rendu, 82% des cotisants (ex
AFEAMA/AGED) estiment que le dispositif leur a facilité les démarches, 98
% des bénéficiaires de PAJEMPLOI estiment que leurs dossiers sont traités
avec professionnalisme.
Pour ce qui concerne le libre choix d’activité, les appréciations de la
Cour soulignant un « effet d’aubaine » pour le complément libre choix
REPONSES DES ORGANISMES
473
d’activité (CLCA) à taux partiel et le recours toujours contraint pour le
CLCA à taux plein, méritent d’être relativisées.
Il convient tout d’abord de s’appuyer avec précision sur les résultats
de l’enquête auprès des bénéficiaires de la PAJE à laquelle la Cour fait
référence
453
. Pour les familles déclarant que la PAJE a influencé leur choix
de mode de garde le dispositif leur a permis de diminuer voire de supprimer
les contraintes financières qui auraient pesé sur leur choix. C’est le cas de
26% des familles bénéficiant du CMG-assistante maternelle et de 44% des
familles bénéficiant du CMG-garde à domicile, de 62% de celles qui
bénéficient du CLCA de rang 1 à taux plein et de 64% de celles bénéficiant
du CLCA de rang 2 et plus à taux plein.
Ensuite, il est utile de rappeler que la PAJE a induit une légère décrue
du recours à un arrêt de travail total au profit des arrêts de travail partiels et
particulièrement des arrêts de travail correspondant à un temps de travail
inférieur ou égal à un mi-temps
454
. A l’examen, la baisse du recours à la
cessation totale d’activité est surtout imputable aux familles dont les revenus
sont moins élevés tandis que les familles les plus aisées portent
l’augmentation du recours au temps partiel. L’effet report, à savoir le recours
à une cessation partielle d’activité pour des familles qui auraient privilégié
une cessation totale d’activité avec l’ancien dispositif, paraît donc limité, les
publics des différentes prestations étant visiblement assez distincts, comme
l’a relevé à juste titre la Cour. Il importe cependant de lire ces phénomènes
en considérant les autres dispositions de la PAJE. Ainsi, la désaffection des
familles des premiers déciles de revenus pour la cessation totale d’activité
peut s’expliquer par le fait que le recours à une assistante maternelle a été
fortement encouragé par le renforcement de l’aide financière via le CMG,
libérant dès lors une contrainte financière ou d’organisation. Le recours plus
massif à un arrêt de travail partiel au sein des familles plus aisées correspond
pour sa part plus à un effet d’appel qu’à un effet d’aubaine : l’augmentation
des versements a permis à l’allocation de franchir le coût d’opportunité ou
plutôt les coûts de « réserve » de certains individus qui, jusqu’alors, auraient
rejeté cette organisation en raison d’un arbitrage financier.
Au sujet du libre choix de mode de garde, la Cour souligne que la
PAJE n’a pas en soi permis de développer l’offre de garde.
En effet, son objet est en premier lieu de solvabiliser la demande des
familles. La Cour déplore à cet endroit la relative stagnation du nombre
453.
Voir en particulier « La PAJE améliore t-elle le choix des parents pour un mode
de garde ?», François Marical, Jérôme Minonzio, Muriel Nicolas, Recherches et
Prévisions n°88, juin 2007, CNAF.
454.
Pour une étude plus complète, voir « Réduire son activité pour garder son
enfant : les effets de la PAJE », François Marical, Recherches et Prévisions n°88, juin
2007, CNAF.
C
OUR DES COMPTES
474
d’assistantes maternelles agréées entre 2004 et 2005 alors qu’il avait
considérablement augmenté au moment de la mise en place de l’Afeama
(132 000 en 1990, 338 000 en 2000). Au total, indique t-elle, le nombre de
places auprès d’assistantes maternelles exerçant leur activité, estimé à
689 200 en 2005, n’a progressé que de 2,9% par an entre 2003 et 2005. Si la
progression du nombre d’assistantes maternelles est une condition importante
de l’amélioration de l’offre de garde, la CNAF souhaite souligner trois
éléments :
- tout d’abord, on ne pourrait raisonnablement attendre de la PAJE le
même effet sur le nombre d’assistantes maternelles agréées que celui joué par
l’AFEAMA, laquelle a été essentielle pour donner à la profession un statut
propre ;
- ensuite, la seule évolution constatée entre 2003 et 2005 est peu
probante : il est important d’avoir plus de recul pour apprécier dans quelle
mesure la solvabilisation de la demande, et dans le même temps, la
revalorisation du statut des assistantes maternelles peuvent agir sur la
quantité de l’offre. L’exemple de l’AFEAMA auquel la Cour fait référence
s’appuie de fait sur des évolutions couvrant dix années ;
- enfin, il sera utile de bien confronter les données portant sur l’offre
(enquête PMI, qui faute de pouvoir être exhaustive, est en partie extrapolée)
et celles sur la demande. Car les données en provenance de la CNAF relatives
aux bénéficiaires d’une prestation pour la garde d’enfant par une assistante
maternelle retracent des évolutions non négligeables : la progression est de
plus de 10% entre la fin 2003 et la fin 2007. Pour mieux apprécier les
données sur l’offre relative aux assistantes maternelles, la CNAF a obtenu
l’accord de la CNIL pour le transfert de données en provenance de l’ACOSS.
Celles-ci lui permettront d’apprécier plus directement l’évolution du nombre
des assistantes maternelles agrées, leurs rémunérations, le nombre d’enfants
gardés, le nombre d’heures de garde.
Pour
autant,
la
CNAF
est
en
accord
avec
la
plupart
des
recommandations de la Cour.
Il importe de renforcer la cohérence des interventions des différents
acteurs concernés par la garde des jeunes enfants : à ce titre, la CNAF plaide
pour rendre obligatoire l’élaboration d’un schéma départemental d’accueil du
jeune enfant. Elle appelle également de ses voeux une plus grande
coordination avec le ministère de l’Education nationale, compte tenu des
grands objectifs de politique publique.
Eviter l’éloignement durable des mères du marché du travail est
naturellement souhaitable : la réduction de la durée du CLCA peut y
contribuer mais il est également indispensable que des solutions de garde
soient accessibles pour les familles concernées.
REPONSES DES ORGANISMES
475
La CNAF ne peut qu’adhérer à l’objectif de rapprochement des taux
d’efforts suivant les deux principaux modes de gardes : assistante maternelle
agréée ou établissement d’accueil du jeune enfant, en particulier pour les
familles les plus modestes. La PAJE, via la revalorisation du complément
mode de garde, y a puissamment contribué, et la dernière mesure adoptée en
PLFSS 2008 va également dans ce sens.
La CNAF est enfin très attentive au taux d’exercice des assistantes
maternelles et aux perspectives démographiques au sein de la profession. Elle
cherche à cet égard à promouvoir une politique visant à renforcer
l’attractivité du métier d’assistante maternelle : développement de partenariat
avec différents acteurs (ANPE, FEPEM…), promotion des relais assistantes
maternelles qui participent à la professionnalisation et à l’accompagnement,
expertise pour la création d’un diplôme spécifique, prise en charge des frais
de formation dans les zones rurales, implication de la branche Famille dans la
procédure d’agrément, suivi attentif des expérimentations en cours consistant
en des regroupements d’assistantes maternelles.
Chapitre XI
Aspects de la gestion des régimes de retraite
I - Les outils de pilotage des régimes de retraite
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE VIEILLESSE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAVTS)
S’agissant des développements contenus dans la première partie du
projet de rapport concernant les outils de pilotage des régimes de retraite, la
CNAVTS partage les analyses de la Cour selon lesquelles des progrès ont été
réalisés dans le domaine des outils de prévision, et de projection. La
CNAVTS a ainsi conçu et réalisé un modèle de microsimulation dénommé
Prisme, utilisé désormais pour la plus grande partie de ses travaux prospectifs
et de simulation.
Ces nouveaux outils permettent également de produire des indicateurs
prospectifs tels que le montant des engagements de retraite et des indicateurs
de rendement, types de travaux que la CNAVTS effectue (travaux réalisés
dans le cadre de la mission « Pebereau »). Ce type d’approches fera l’objet
d’approfondissements programmés dans la prochaine COG.
Par ailleurs, la caisse nationale s’est attachée à mettre sur pied un
schéma
directeur
statistique.
Aussi
elle
ne
peut
qu’adhérer
à
la
recommandation de la Cour visant à ce que les travaux de même nature
soient réalisés dans d’autres régimes avec le souci notamment de faciliter les
travaux en commun et les échanges de données.
La CNAVTS estime utile de faire valoir que cette intensification des
outils et des travaux a nécessité de densifier les équipes d’experts, ce qui
C
OUR DES COMPTES
476
implique de disposer de marges suffisantes dans le cadre des COG en termes
d’effectifs et de crédits budgétaires.
Comme la Cour, la CNAVTS convient du fait que des progrès restent
à accomplir, en particulier sur l’analyse et la prévision concernant les
modifications de comportements face à des mesures visant à reculer ou
avancer l’âge de départ en retraite, à inciter à prolonger l’activité, par
exemple. Des enquêtes auprès des assurés, plus régulières que celles menées
jusqu’à présent par la CNAVTS sont prévues. Elles devraient apporter un
éclairage complémentaire qui est actuellement insuffisant dans le cadre de
l’établissement des hypothèses retenues pour réaliser les projections à court
et moyen terme.
REPONSE DU PRÉSIDENT ET DU SECRÉTAIRE GENERAL DU
CONSEIL D’ORIENTATION DES RETRAITES (COR)
Je souscris à l’analyse faite par la Cour sur les outils de prévision et
sur la connaissance des comportements, en ce qu’elle met l’accent, d’une
part, sur l’importance des progrès réalisés depuis quelques années -sous
l’influence, notamment, des demandes du COR, comme le fait observer la
Cour- d’autre part, sur des insuffisances persistantes, compte tenu des
moyens relativement limités dont disposent les gestionnaires des caisses de
retraite pour développer des modèles de projection. La Cour pourrait sans
doute
noter
qu’au
delà
des
problèmes
de
moyens,
l’analyse
des
comportements de départ à la retraite se heurte encore aujourd’hui au manque
de recul par rapport à la réforme de 2003, dont la mise en application n’est
que progressive.
Il reste que je partage l’idée que l’enrichissement attendu des bases de
données, en ligne avec la montée en charge de la réforme, ainsi que la
multiplication des utilisateurs devraient impliquer une coordination renforcée
au niveau national. La Cour propose en conséquence de créer une instance de
coordination, chargée d’examiner et de formaliser les besoins d’information
statistique en matière de retraite et de proposer les référentiels communs, qui
serait placée sous l’égide du COR et sous l’autorité du CNIS. La composition
de cette instance de coordination ainsi que les rôles respectifs du COR et du
CNIS
mériteraient
toutefois
d’être
précisés.
J’estime
en
particulier
souhaitable d’associer à cette opération la DREES, qui a la responsabilité des
échantillons interrégimes de cotisants et de retraités, et le GIP Info Retraite,
qui permet d’ores et déjà aujourd’hui une interpénétration des systèmes
d’information des régimes et a acquis une expertise technique sans doute
unique en la matière.
La seconde partie du projet d’insertion relative aux indicateurs
financiers met en avant, à juste titre, la nécessité de développer des
indicateurs de rendement relatifs aux situations individuelles des assurés et
des indicateurs actuariels permettant d’analyser la « soutenabilité » financière
REPONSES DES ORGANISMES
477
d’un régime. Je rappellerai simplement ici la position du Conseil
d’orientation des retraites, telle qu’exprimée dans son quatrième rapport
(« Retraites :
questions
et
orientations
pour
2008 »,
janvier
2007) :
concernant les indicateurs de rendement au niveau individuel, le Conseil juge
intéressant de compléter les indicateurs habituels de taux de remplacement
par des indicateurs qui prennent en compte le caractère contributif du
système de retraite mais « il faut être prudent dans l’utilisation et
l’interprétation de ces indicateurs, qui ont tous des limites » ; concernant les
indicateurs actuariels, « quel que soit l’indicateur retenu, les calculs restent
néanmoins conventionnels. Leurs limites découlent de leur ambition à vouloir
ramener à un indicateur unique l’ensemble des déséquilibres futurs. C’est
pourquoi le Conseil considère qu’ils ne peuvent se substituer à l’examen des
projections plus détaillés des besoins de financement futurs ». Le Conseil
juge toutefois intéressant de pouvoir enrichir la présentation de chroniques de
besoins de financement futurs par des mesures de dette (solde actuariel en
particulier) ou de
tax gap
. C’est dans ce cadre que pourraient être engagés,
comme
le
propose
la
Cour,
des
travaux
exploratoires
de
nature
méthodologique. Il me paraît notamment nécessaire que ces travaux soient
menés sous l’égide du COR, compte tenu de son rôle de coordination dans les
exercices de projections à long terme dont il a la charge.
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE DE RETRAITE DES AGENTS DES
COLLECTIVITES LOCALES (CNRACL)
Dans la partie consacrée aux outils de prévision et d’analyse des
comportements considérés comme encore insuffisants par la Cour, il est
indiqué que la CNRACL comme d’autres régimes, utilise une hypothèse de
permanence des comportements malgré la réforme, notamment en matière de
départs en retraite.
Ce commentaire peut être nuancé. S’il est vrai que la CNRACL ne
dispose pas d’un modèle comportemental de départ en retraite, il convient de
noter que son modèle de projection tient compte des hypothèses
comportementales établies par le COR (recul de l’âge de départ à la retraite
qui
traduit
un
changement
de
comportement
pour
compenser
les
modifications du calcul de la retraite après la réforme). Par ailleurs, en ce qui
concerne la mortalité, la CNRACL applique une méthode de recalage des
tables de mortalité prospectives de l’INSEE qui permet de tenir compte des
différences de calendrier de mortalité, constatées sur le régime par rapport à
la population française.
C
OUR DES COMPTES
478
II - L’adossement des régimes spéciaux aux régimes de droit
commun
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE VIEILLESSE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAVTS)
1 – Le traitement de la neutralité financière et le partage des risques
dans le cas des IEG
a) Le financement de la soulte
La
CNAVTS
estime
utile
de
rappeler
que
les
régimes
complémentaires ont toute faculté de réduire le niveau des droits repris
jusqu’à un niveau d’équilibre absolu de la pesée où aucune contrepartie
financière ne serait nécessaire.
Le régime général peut aussi, dans une moindre mesure, jouer sur le
niveau auquel il reprend les droits et diminuer en conséquence le montant de
la soulte. Il dispose pour ce faire d’au moins deux leviers : le choix du salaire
forfaitaire (exprimé en % du plafond de SS) qui valorise les rentes garanties
(par exemple : 100% du PSS 2004 pour les IEG, 90% du PSS 2005 pour la
CCIP, etc.), la présence ou non dans les droits repris d’un complément de
durée dit « durée d2 » (ce qui a été le cas pour les IEG, à la différence de la
CCIP).
b) Le choix du taux d’actualisation
La différence observée entre les valeurs du taux d’actualisation
retenues pour les opérations d’adossement de la CNIEG par le régime général
(2,5%) d’une part, et par les régimes complémentaires (2,25%) d’autre part,
est pour partie imputable au fait que le champ des négociations et le poids des
tutelles a rendu l’exercice plus contraint pour la CNAVTS, à la différence des
régimes complémentaires.
Consciente de l’importance de ce sujet et suite aux échanges
techniques avec le ministère de l’économie et des finances, la CNAVTS a fait
réaliser en 2005 des études sur la détermination d’un taux d’actualisation
adéquat en recourant à des expertises externes, de manière à être mieux
outillée
en
la
matière
dans
la
perspective
d’opérations
ultérieures
d’adossement.
Au vu de ces différents éléments, la CNAVTS a retenu pour ces
travaux techniques à venir des taux nets d’inflation obtenus en référence aux
courbes de taux zéro-coupon publiées trimestriellement par l’Institut des
actuaires et aux rendements des OATI (« points morts d’inflation »).
La CNAVTS estime enfin utile de faire remarquer que pour aboutir à
une égalité de taux entre le régime de base et les régimes complémentaires
pour les adossements ultérieurs, une négociation tripartite devrait alors être
REPONSES DES ORGANISMES
479
opérée, ce qui pose la question plus vaste des modes de gouvernance
différents entre les régimes de base et les régimes complémentaires.
c) Le risque de projection et la clause de révision (article 19 de la loi
2004-803 du 9 août 2004).
Le texte de la convention financière passée entre la CNIEG et la
CNAVTS précisait dans son article 8 - Modalités de calcul de la soulte - que
conformément au 3° alinéa de l’article 19 de la loi n°2004-83, la contribution
versée à la CNAVTS par la CNIEG (la soulte) avait un caractère
exceptionnel, forfaitaire et libératoire.
Ce qui a exclu tout recours à une clause de révision et dispensait de ce
fait les entreprises de la branche de provisionner la valeur d’une CMD
éventuelle.
En d’autres termes, la CNAVTS a été sur ce point totalement
contrainte par la nature des dispositions législatives adoptées par la puissance
publique en la matière et n’a disposé d’aucune marge d’adaptation possible
sur ce sujet.
d) Les projections de recettes
Pour les travaux techniques préparant l’adossement de la CNIEG par
le régime général, ce sont, en effet, les hypothèses macroéconomiques
d’évolution des salaires à moyen terme retenues pour les travaux du COR qui
ont été utilisées.
Ces hypothèses macroéconomiques étaient à ce moment là des
hypothèses reconnues par tous les régimes qui participaient aux travaux du
COR (dont le régime général, le régime spécial des IEG et les régimes
complémentaires).
Sur le principe, la CNAVTS partage entièrement le point de vue
présenté par la Cour ; elle n’a pas cependant vocation à s’aligner sur les
hypothèses macroéconomiques que les commissions paritaires des régimes
complémentaires auraient jugées plus pertinentes.
En pratique, il conviendrait de disposer d’une instance incontestée
d’arbitrage, fonction qu’à ce jour seul le conseil d’orientation des retraites
pourrait être amené à remplir.
2 – La nécessaire modification des règles d’adossement
a) Au regard des remarques et des analyses critiques faites par la
Cour, la CNAVTS estime utile de rappeler que l’adossement des
engagements de retraite de la CNIEG était la première opération de ce genre
et de cette importance réalisée par la caisse nationale.
En effet, la CNAVTS avait réalisé auparavant des opérations
d’intégration de moindre envergure démographique et financière, et d’ailleurs
selon des techniques de pesée plus rudimentaires (indicateur de charge
C
OUR DES COMPTES
480
instantané) ce qui a nécessité de concevoir courant 2004 de nouvelles
approches dans le cadre de l’adoption d’une méthode prospective avec
projections sur 25 ans, de manière à disposer d’outils conceptuels et
techniques plus adaptés pour appréhender le dossier des IEG.
La mise en application du principe de neutralité financière dans le
cadre d’un adossement réalisé par le régime général (régime à prestations
définies, géré en annuités) a conduit à développer des méthodes de pesée qui
s’inspirent
de
celles
qu’utilisent
(et
utilisaient
déjà)
les
régimes
complémentaires, gérés en points, sans être toutefois identiques ni
entièrement transposables.
Il est rappelé que le cadre législatif définissant les conditions de
l’adossement des IEG excluait que le régime général utilise une méthode de
pesée comportant une clause de révision encadrée.
Si ce type de clause est de nature à assurer une meilleure neutralité
financière, cette possibilité doit néanmoins faire l’objet d’études et de
développements techniques nécessaires à sa mise en oeuvre dans le contexte
de la définition des droits repris, particulière au régime de base. Par ailleurs,
l’incidence d’un tel dispositif sur un provisionnement par le régime adossé
mérite d’être analysée.
Si une disposition législative introduisait le principe de la clause de
révision, le régime général procéderait aux adaptations nécessaires de la
méthode de pesée qu’il emploie actuellement.
b) Il est précisé que l’intervention d’un financement de la charge des
majorations pour enfant par le FSV a été écartée par la CNAVTS pour tous
les dossiers techniques en cours (RATP en particulier) du fait notamment de
la situation financière de ce fonds et de l’ampleur des créances de la
CNAVTS à son égard.
c) Il est précisé enfin que la CNAVTS réalise chaque année des notes
de suivi statistique et un bilan financier de l’adossement de la CNIEG (notes
internes et préparation des réponses au questionnaire des Commissions des
Affaires sociales du Parlement relatif à l’application des lois de financement
de la sécurité sociale). Elle a par ailleurs participé à l’établissement du bilan
financier au 30 juin 2006 produit par la CNIEG.
En revanche la CNAVTS n’a pas l’obligation de produire un rapport
public annuel sur les modalités de mise en oeuvre des opérations
d’adossement.
RÉPONSE DE L’ÉTABLISSEMENT PUBLIC NATIONAL DE
FINANCEMENT DES RETRAITES DE LA POSTE (EPNFRLP)
Dans son projet la Cour écrit que l’accord de la Commission
européenne « ne concerne que la réforme du mode de financement du régime
REPONSES DES ORGANISMES
481
de retraite des fonctionnaires de La Poste, fondée sur l’instauration d’une
cotisation de retraite libératoire ».
Il convient d’observer que la Commission déclare par l’article 1er de
sa décision que «… la réforme notifiée du régime des pensions desdits
fonctionnaires en vertu de l’article 150 de la loi de finances rectificative pour
2006 constitue[nt] des aides d’État compatibles avec le marché commun pour
autant que les conditions prévues à l’article 2 soient respectées », lesquelles
précisent les conditions de calcul des taux d’équité concurrentielle. En
d’autres termes, la Commission valide le principe de l’adossement.
La réforme des modalités de cotisation d’assurance vieillesse de La
Poste au titre de ses personnels fonctionnaires transforme son obligation de
financement des prestations définies à ses fonctionnaires en une cotisation
définie libératoire équivalente à une cotisation de droit commun, la libérant
de tout engagement de retraite.
Les engagements du régime sont transférés de facto à l’EPNFRLP,
même s’ils ne figurent pas à son bilan, comme c’est le cas pour l’ensemble
des organismes de retraite (rappelons qu’aucune caisse de retraite de base ne
provisionne les engagements, comme par exemple la CNAVTS.) Le
financement par l’État de la différence entre le produit des cotisations versées
à La Poste et le coût des pensions est autorisé par la Commission.
Dès lors, l’État sera autorisé, le moment venu, à financer en
complément de La Poste la soulte qu’il conviendra de verser à la CNAVTS,
pour neutraliser, le cas échéant, l’éventuelle différence de rapport de charge
entre les deux régimes à l’occasion de l’adossement du régime de retraite des
agents de La Poste à la CNAVTS.
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE DES INDUSTRIES ELECTRIQUES
ET GAZIERES (CNIEG)
1) Sur le principe de neutralité financière
Il faut simplement remarquer, dans la suite de ce qu'indique la Cour,
que le principe de neutralité financière défini comme le maintien, après
adossement, du rapport de charges (prestations/cotisations) du régime
d'accueil est la stricte application dans ce domaine des règles édictées par les
régimes de retraite du droit commun pour les opérations d'intégration en leur
sein de régimes de retraite.
C'est ainsi qu'il a été conçu et mis en oeuvre de longue date par les
régimes complémentaires de retraite puis, selon des principes identiques, par
le régime général à l'occasion de la réforme du financement du régime spécial
des IEG et de l'adossement dans le cadre de la loi du 9 août 2004.
C
OUR DES COMPTES
482
L'adossement du régime des IEG aux régimes de retraite du droit
commun respecte les règles qui auraient été appliquées si le régime spécial
avait été intégré en leur sein.
2) Sur la clarification des conditions de l'adossement
L'affirmation selon laquelle l'adossement présenterait dans ses
modalités de réalisation des « différences de traitement notables entre le
régime général et les régimes complémentaires », semble devoir être
nuancée.
En effet, sur les principes et sur les règles suivis par les deux types de
régimes, il n'y a pas de différence de fond puisque dans les deux cas ils
reposent sur une pesée prospective des rapports de charge.
3 Plus précisément les points ci après appellent de notre part les
observations suivantes :
a) Sur la pérennité des financements issus de la contribution tarifaire
d'acheminement (CTA), il est clair que les taux devront en être ajustés pour
couvrir la variation des charges de retraites liée à la démographie du régime.
Ce point a été clairement établi et quantifié dès les travaux préparatoires de la
loi du 9 août 2004. S'il n'en n'était pas ainsi risquerait alors de se poser la
question de la déconsolidation des engagements de retraite couverts par la
CTA (21,2 milliards d’Euros à fin 2007) pour les entreprises de la branche
des industries électriques et gazières dont certaines sont cotées en Bourse.
b) Sur le financement par le FSV de la part des majorations de
pensions des retraités ayant eu 3 enfants ou plus, il n'y a du point de vue des
principes de l'adossement, aucune « irrégularité pour le FSV ». En effet
comme nous avons été amenés à l'indiquer à la Cour par courrier du 11 juillet
2006 en observation sur le projet de rapport sur la sécurité sociale pour 2006,
l'adossement repose sur l'application, au plan financier de l'ensemble des
règles des régimes de retraite du droit commun au nombre desquelles figurent
celles touchant à la structure du financement du régime général d'assurance
vieillesse.
A ce titre, la CNAVTS et le FSV prennent en charge la partie des
prestations équivalentes à celles du régime général (c'est à dire la part des
majorations pour trois enfants et plus, égale à la part relevant du régime
général et déterminée selon la réglementation prévue à l'article L. 351-12 du
code de la sécurité sociale).
II y aurait eu rupture du principe de neutralité pour l'adossement du
régime des IEG s'il en avait été autrement.
A cet égard il faut noter que certaines des dispositions de l'adossement
ne correspondent pas, pour le régime des IEG, à l'exacte application des
règles du régime général : ainsi aucune pension de réversion n'est intégrée
dans les « prestations » versées par le régime général pour les «droits
REPONSES DES ORGANISMES
483
liquidés » après le 1er janvier 2005 même si, au niveau des comptes
individuels de l'adossement, les conditions pourraient en être réunies.
c) Sur les différences de taux d'actualisation entre le régime général et
les régimes complémentaires, on peut noter que celles-ci demeurent assez
relatives et qu'in fine la soulte CNAVTS ainsi que ses modalités de calcul ont
été fixées par l'Etat par l'arrêté interministériel du 31 janvier 2005 ;
d) Les écarts concernant les taux d'évolution du salaire moyen par tête
retenus par le régime général d'une part et par les régimes complémentaires
d'autre part n'ont pas d'incidence significative en défaveur du régime général.
En effet le principe du choix dans les deux pesées ( régime général
d'une part et ARRCO-AGIRC d'autre part) de l'évolution du salaire moyen du
« régime d'accueil» fait qu'il y a cohérence des méthodes retenues dans les
deux séries de pesées. Les écarts entre les hypothèses d'évolution retenues par
le régime général et les régimes complémentaires n'ont dès lors pas
d'incidence sur ces pesées, réalisées dans chaque bloc de régimes, et
n'affectent pas leur équilibre, ni la détermination des soultes ou abattements
sur les droits passés repris auxquels elles aboutissent. Ce n'est donc pas un
facteur de pénalisation pour le régime général.
e) Sur la comparaison prévisions / réalisations, la « nécessaire »
modification des règles de l'adossement et les informations annuelles fournies
par la CNIEG il nous paraît nécessaire d'apporter les remarques suivantes :
Il convient tout d'abord de rappeler que la méthode de pesée
« prospective »
par
projection
des
rapports
de
charges
est,
méthodologiquement, source de garantie sur le plan actuariel puisqu'elle
conduit à estimer les équilibres futurs à partir des prévisions de charges et de
recettes. C'est en effet à un horizon moyen / long terme que doit être apprécié
l'équilibre actuariel. Ainsi la mesure de l'équilibre actuariel ne peut être
réduite à la seule mesure des cotisations apportées par le régime adossé en
regard des prestations perçues mais implique une comparaison sur le moyen /
long terme des rapports de charges des deux séries de régimes et de
l'ensemble des déterminants de leur évolution.
Enfin c'est dans cet ensemble que la CNIEG produit, au travers de son
rapport annuel conformément à l'article 19 de la loi du 9 août 2004, les
éléments de flux (cotisations et leur assiette, prestations, effectifs) permettant,
en toute transparence, de mettre à disposition les données de réalisation sur
l'adossement. Toutefois comme indiqué ci-dessus, ces données ne sauraient, à
elles seules, sans traitement complémentaire rendre compte dés à présent de
l'équilibre actuariel de la réforme.
REPONSE DE L’AGIRC - ARCCO
Je relève que la recommandation pour les opérations d'intégration ou
d'adossement, à retenir des hypothèses de projection de recettes identiques
3/3
C
OUR DES COMPTES
484
pour le régime général et les régimes complémentaires, ne doit pas conduire
ces derniers à se voir imposer des éléments exogènes dont ils n'auraient pas la
maîtrise.
Sous cette réserve, je vous confirme que le document transmis
n'appelle pas de remarque de ma part au titre des informations concernant les
régimes AGIRC et ARRCO.
III - Les minima de pensions
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE VIEILLESSE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAVTS)
En ce qui concerne les recommandations formulées par la Cour, la
CNAVTS observe que l’exclusion, dans le calcul du montant du minimum
contributif, des périodes cotisées au titre de l’assurance vieillesse des parents
au foyer (AVPF) et des périodes assimilées réduirait de façon importante le
différentiel attribué aux bénéficiaires de ce dispositif.
Cette réduction concernerait essentiellement les femmes. Les périodes
assimilées au titre du chômage, par exemple, ont pour objectif de compenser
certains aléas de carrière, en permettant de valider des trimestres et d’avoir
éventuellement accès au minimum contributif par obtention du taux plein à la
liquidation de la pension. La proposition de l’exclusion de l’AVPF remettrait
également en question l’articulation avec la politique familiale qui cherche à
concilier vie familiale et vie professionnelle pour les femmes. Ce dispositif
est un des éléments qui ont participé à maintenir en France un taux élevé de
fécondité, taux de fécondité participant à l’équilibre des régimes de retraite.
Exclure l’AVPF reviendrait ainsi à pénaliser les femmes en réduisant leur
droit propre et à contrecarrer ainsi l’objectif même de ce dispositif
455
.
Par ailleurs, les conditions d’attribution de l’allocation de solidarité
aux personnes âgées (ASPA) et du minimum contributif étant différentes, un
durcissement de l’attribution du minimum contributif aux seuls assurés ayant
des carrières complètes cotisées ne ferait pas basculer automatiquement tous
ceux qui ont des carrières incomplètes vers l’ASPA. En effet, les personnes
qui ne rempliraient ni les conditions d’attribution de l’ASPA (moins de 65
ans, non reconnues inapte au travail, ressources supérieures au plafond, pas
de résidence en France), ni celles du minimum contributif constitueraient une
troisième catégorie de retraités dont le niveau de retraite serait inférieur au
minimum vieillesse.
Enfin, concernant la proposition de fusionner le minimum contributif
et la majoration du minimum au titre des trimestres cotisés « en ne retenant
455. Pour rappel, parmi les nouveaux retraités de l’année 2007, la pension moyenne
versée par le régime général est, pour les femmes, inférieure de 21 % à celles des
hommes. La prise en compte des retraites complémentaires accroît cet écart.
REPONSES DES ORGANISMES
485
pour le calcul des périodes prises en compte que celles effectivement
travaillées, à l’exclusion des durées validées mêmes cotisées par un tiers
(branche famille pour l’AVPF et FSV pour les périodes de chômage
indemnisé) », il convient de rappeler que les trimestres retenus, d’une part
pour déterminer le taux plein (conditions d’ouverture du droit au minimum
contributif) et ceux retenus, d’autre part, pour calculer le minimum
contributif et la part majoré de ce minimum contributif ne sont pas les
mêmes. L’AVPF et les périodes assimilées au titre du chômage, notamment,
sont retenues pour déterminer la durée prise en compte pour le taux plein et la
durée pour calculer le minimum contributif, mais elles ne le sont pas pour le
calcul de la part majorée de ce minimum contributif.
Chapitre XII
Le suivi des précédentes recommandations
II – La situation des UGECAM
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAMTS)
S'agissant des précédentes recommandations relatives aux UGECAM,
il semble utile de souligner l'ampleur des améliorations engagées depuis le
précédent rapport. La création d'une direction nationale et le resserrement du
pilotage devrait en effet permettre d'accélérer les processus engagés :
finalisation de l'avenant à la COG, révision du périmètre des UGECAM,
amélioration de la gestion.
La CNAMTS a très fortement porté l'utilisation de la méthodologie
d'élaboration des dossiers de clôture des comptes applicables aux autres
organismes et des plans de maîtrise socles s'appliquant aux fonctions support,
tout en enrichissant le dossier de clôture. Elle a également engagé une
analyse systématique des projets d'activité et des projets immobiliers des
établissements, ce qui a d'ailleurs conduit à la fermeture d'une maternité.
Cette politique s'exerce dans le cadre de tarifs qui sont en moyenne
inférieurs à ceux des autres établissements privés non lucratifs, les tarifs des
hôpitaux publics étant en moyenne supérieurs de 52% à ceux des
établissements du groupe UGECAM.
C
OUR DES COMPTES
486
III - Le retrait de fonctions des directeurs et agents
comptables des organismes de base du régime général de
sécurité sociale
REPONSE DE L’AGENCE CENTRALE DES ORGANISMES DE SECURITE
SOCIALE (ACOSS)
Tout d'abord, s'agissant des modalités de nomination et de retrait de
fonctions des directeurs et des agents comptables des organismes de base, il
apparaît nécessaire de clarifier le droit et les procédures applicables. La
direction de l'Agence centrale partage les analyses de la Cour concernant
l'extension des dispositions applicables à l'assurance maladie à l'ensemble du
régime général. Elle ajoute que celles-ci doivent également être analysées en
ce qu'elles permettraient une gestion plus forte des dirigeants de la sécurité
sociale. Les changements envisagés devraient ainsi permettre de construire
des parcours professionnels pour ces cadres dirigeants et la conduite, par les
caisses nationales, d'une politique active de gestion des ressources humaines
pour ces catégories spécifiques d'agents au bénéfice à la fois de la
performance des institutions et du développement professionnel des agents.
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE VIEILLESSE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAVTS)
La CNAVTS adhère à la recommandation de la Cour concernant la
nécessité de clarifier le cadre régissant les conditions de cessation de fonction
des directeurs et agents comptables et, plus largement, de mener une
réflexion approfondie sur la nature des liens de subordination concernant ces
catégories de personnel.
Concernant la gestion des directeurs d'organismes, l'extension de la
portée de l'article L.217-3-1 du code de la sécurité sociale aux trois autres
branches serait une première étape, qui permettrait aux directeurs de la
CNAF, de l'ACOSS et de la CNAVTS de pouvoir procéder directement au
choix et à la nomination, ou à la cessation d’ activité le cas échéant, des
directeurs de leur réseau, ce qui implique en outre pour la CNAVTS une
coordination étroite et une unité de vue avec la CNAMTS, qui dans les faits
ne pose pas de problème particulier, comme l’atteste la bonne coopération
des deux Caisses nationales sur ces sujets.
La CNAVTS partage la position de la Cour sur le fait que la question
de l'attribution du pouvoir disciplinaire devrait être réexaminée de manière à
rendre cohérente la gestion des personnels concernés.
Concernant les agents comptables, la situation est sans doute plus
complexe. En effet, si leur nomination relève aujourd'hui des mêmes
mécanismes
que
celle
des
directeurs,
leur
gestion
(évaluation,
REPONSES DES ORGANISMES
487
individualisation des rémunérations) fait l’objet depuis le protocole de 2005
d'une approche partagée entre le directeur de la caisse nationale et le directeur
de l'organisme. La prise en compte de ce dernier acteur dans le cadre de la
réflexion sur la gestion des cessations de fonction complexifie encore la
problématique, mais serait nécessaire.
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAMTS)
La CNAMTS partage le point de vue exprimé par la Cour des comptes
sur le manque de cohérence de procédures juridiques liées sur la cessation de
fonction, le retrait d’agrément ou le licenciement des directeurs et agents
comptables des organismes.
En effet, il convient de noter que la loi du 13 août 2004 relative à
l’assurance maladie confie désormais d’importantes prérogatives au directeur
général de la CNAMTS en matière de nomination des directeurs et des agents
comptables des organismes du réseau, comme de fin de fonction. Aussi, il
serait sans doute utile de préciser les compétences du directeur général
nécessaires pour engager l’ensemble des mesures disciplinaires à l’encontre
des directeurs d’organismes, y compris la mise en oeuvre d’une procédure de
licenciement.
IV - La gestion du risque accidents du travail et maladies
professionnelles
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAMTS)
S'agissant de la gouvernance de la branche AT-MP et de la
coordination entre acteurs nationaux, s'il est vrai qu'en 2005, un plan santé au
travail et une convention d'objectifs et de gestion pour la branche ont été
adoptés de manière concurrente, l'Etat et la CNAMTS ont bien pour objectif
d'améliorer la coordination, notamment grâce à la COG ATMP 2009-2012.
En ce qui concerne le niveau régional, la COG ATMP doit prévoir des
objectifs communs aux DRTEFP et aux CRAM. Par ailleurs, la CNAMTS
développe une politique dont le but est d'amener les CRAM à étendre et
enrichir des partenariats opérationnels avec les services inter-entreprises de
santé au travail, les organismes de formation professionnelle et les réseaux
d'IPRP (Intervenants en prévention des risques professionnels).
Le projet de rapport évoque enfin la création des comités régionaux de
la prévention des risques professionnels. L'articulation de ces nouvelles
structures avec les Observatoires régionaux de santé au travail (ORST)
mériterait certainement d'être approfondie.
C
OUR DES COMPTES
488
En terme de suivi statistique, et suite à la convention d'échange de
données entre la CNAMTS, l'Etat et l'INVS, des progrès ont également été
enregistrés dans la coordination des opérateurs.
En matière de tarification, je vous confirme ma volonté de passer de la
réflexion à la mise en oeuvre d'une simplification de la tarification actuelle
pour la rendre plus incitative à la prévention. J'insiste sur la nécessité de
sécuriser sa gestion au vu du développement des contentieux du fait
d'employeurs qui contestent les procédures ayant abouti« à des imputations
sur leur compte.
S'agissant de la réparation, je partage l'avis formulé par le projet de
rapport de la Cour selon lequel les modalités de révision des tableaux
mériteraient d'être revisitées.
Le tableau 57, « affections péri-articulaires », principal tableau des
troubles musculo-squelettiques (plus de 70% des maladies reconnues),
n'ayant fait l'objet d'aucune modification significative depuis les années 1990,
est générateur de difficultés de mise en oeuvre dans le réseau et source
d'iniquité de traitement.
C'est la raison pour laquelle, le directeur des risques professionnels de
la CNAMTS a insisté auprès des directions du ministère pour mettre au
programme de travail de la commission ad hoc du conseil supérieur de
prévention des risques professionnels (CSPRP) la révision de ce tableau. La
modification du tableau 57 permettrait, comme le souligne la Cour, au
système complémentaire de reconnaissance de dégager les ressources pour
assurer l'instruction de pathologies non décrites par les tableaux (alinéa 4).
En ce qui concerne l'indemnisation, le renforcement de la capacité du
réseau (CPAM, service médical, service social, services prévention) à repérer
les personnes susceptibles d'éprouver des difficultés sérieuses de retour à
l'emploi est une priorité qui fait, dés à présent, l'objet d'expérimentations et
qui suppose quelques modifications de textes dont j'ai saisi le Directeur de la
sécurité sociale.
REPONSE
DE L’INSTITUT DE VEILLE SANITAIRE (INVS)
II nous semble que le projet de rapport ne rend pas suffisamment
compte de l'avancement des travaux réalisés pour permettre l'élaboration d'un
outil centralisateur, notamment ceux menés par l'INVS, ni des dernières
conclusions de la missions IGAS-INSSE établies lors de la réunion d'une
commission des suites.
Pour répondre à la mission que lui a confiée la Loi relative à la
politique de santé publique du 9 Août 2004, (Article 15, alinéa 6), l'INVS a,
dans un premier temps, réalisé un état des lieux des systèmes d'informations
existant dans les principaux régimes de sécurité sociale et des besoins en
REPONSES DES ORGANISMES
489
informations relatives aux risques sanitaires en milieu professionnels des
acteurs potentiels de la réparation et de la prévention.
Dans une deuxième étape, l'INVS a initié une étude test portant sur
des échantillons de données individuelles des trois principaux régimes
disposant d'informations centralisées : régime général, régime agricole et
régime spécial des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers. Des partenariats
ont été formalisés par des conventions signées ou en cours de signature et les
fichiers ont été fournis par les régimes de sécurité sociale fin 2007.
Par ailleurs la commission des suites précitée s'est réunie le 15 avril
2008 en présence de tous les acteurs, dont l'INVS. Elle s'est félicitée de
l'amélioration des collaborations établies et des synergies qui en ont résulté.
A
l'issue
de
cette
commission
il
est
apparu
que
certaines
des
recommandations du rapport de la mission IGAS-INSEE, en particulier les
différentes pistes préconisées, demandaient un approfondissement.
V - L’examen du dispositif spécifique prévu pour les
victimes de l’amiante
REPONSE DE LA CAISSE NATIONALE D’ASSURANCE MALADIE DES
TRAVAILLEURS SALARIES (CNAMTS)
S'agissant des conséquences des expositions professionnelles passées
relatives à l'amiante, la Cour souligne à juste titre la nécessité de veiller à
l'équité des dispositifs spécifiques mis en place (FCAATA, F1VA) et à leur
soutenabilité financière.
En outre, l'importance de l'amiante mis en oeuvre par le passé justifie
encore des actions de prévention qui constituent des priorités pour le réseau
des Caisses régionales et de contrôle pour les DRTEFP.
491
GLOSSAIRE
AAD
Allocation d’adoption
AAH
Allocation aux adultes handicapés
ACAATA
l’allocation de cessation anticipée d’activité des
travailleurs de l’amiante
ACOSS
Agence centrale des organismes de sécurité sociale
ADELI
Automatisation DEs LIstes
AEI
Aide exceptionnelle à l’investissement
AIS
Actes infirmiers de soins
AFEAMA
Aide à la famille pour l’emploi d’une assistante
maternelle agrée
AFSSAPS
Agence française de sécurité sanitaire des produits de
santé
AFFSET
Agence française de sécurité sanitaire de
l’environnement et du travail
AGED
Allocation de garde d’enfant à domicile
AGIRC
Association générale des institutions de retraite des
cadres
AIS
Acte infirmier de soins
ALD
Affection de longue durée
ALS
Allocation de logement à caractère social
AMI
actes médicaux infirmiers
AMO
Assurance maladie obligatoire
ANACT
Agence nationale pour l’amélioration des conditions de
travail
ANPE
Agence nationale pour l’emploi
APE
Allocation parentale d’éducation
APE
Actifs à part entière
APJE
Allocation pour jeune enfant
AP-HM
Assistance publique – Hôpitaux de Marseille
APL
Aide personnalisée au logement
APU
Administration publique
ARH
Agence régionale de l’hospitalisation
ARRCO
Association des régimes de retraite complémentaire
ASIP
Agence des systèmes d’information de santé partagée
ASPA
Allocation de solidarité aux personnes âgées
ASSEDIC
Associations pour l’emploi dans l’industrie et le
commerce
ATIH
Agence technique de l’information sur l’hospitalisation
ATSEM
Agent territorial spécialisé d’écoles maternelles
AT-MP
Accidents du travail – maladies professionnelles
C
OUR DES COMPTES
492
AVPF
Assurance vieillesse des parents au foyer
BAP
Bénéficiaire actif pondéré
BAPSA
Budget annexe des prestations sociales agricoles
BMAF
Base mensuelle des allocations familiales
BT
Billet de trésorerie
BTP
Bâtiments et travaux publics
CADES
Caisse d'amortissement de la dette sociale
CAF
Caisse d'allocations familiales
CAMIEG
Caisse d’assurance maladie des industries électrique et
gazière
CANAM
Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des
travailleurs non salariés des professions non agricoles
CANCAVA
Caisse nationale de compensation d'assurances
vieillesse des artisans
CAPSSA
Caisse de prévoyance des agents de la sécurité
sociale et assimilés
CASF
Code de l’action sociale et de la famille
CAVIMAC
Caisse vieillesse invalidité maladie des cultes
CCAM
Classification commune des actes médicaux
CCI
Chambre de commerce et d’industrie
CCMSA
Caisse centrale de mutualité sociale agricole
CCNE
Comité consultatif national d'éthique
CCSS
Commission des comptes de la sécurité sociale
CDAJE
Commission départementale d’accueil des jeunes
enfants
CDC
Caisse des dépôts et consignations
CDD
Contrat à durée déterminée
CEN
Centre européen de normalisation
CEPS
Comité économique des produits de santé
CERFA
Centre d’enregistrement et de révision des
formulaires administratifs
CESU
Chèque emploi service universel
CGI
Code général des impôts
CGSS
Caisse générale de sécurité sociale
CH
Centre hospitalier
CHD
Centre hospitalier départemental
CHR
Centre hospitalier régional
CHS
Centre hospitalier spécialisé
CHSCT
Comité d’hygiène et de sécurité et des conditions de
travail
CHU
Centre hospitalier universitaire
CIAP
Comité interministériel d’audit des programmes
GLOSSAIRE
493
CLCA
Complément de libre choix d’activité
CLCC
Centre de lutte contre le cancer
CMCAS
Caisse mutuelle complémentaire et d’action sociale
CMD
Contribution de maintien des droits
CMD
Catégorie majeure de diagnostics
CMG
Complément mode de garde
CMP
Commission des maladies professionnelles
CMSA
Caisse de mutualité sociale agricole
CMU
Couverture maladie universelle
CMUC
Couverture maladie universelle complémentaire
CNAF
Caisse nationale des allocations familiales
CNAMTS
Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs
salariés
CNASEA
Centre national d’aménagement des structures des
établissements agricoles
CNAVTS
Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs
salariés
CNEH
Centre national d’expertise hospitalière
CNIEG
Caisse nationale des industries électriques et gazières
CNIL
Commission nationale de l’informatique et des libertés
CNIS
Conseil national de l’information statistique
CNOP
Conseil national de l’ordre des pharmaciens
CNRACL
Caisse nationale de retraite des agents des collectivités
locales
CNSA
Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie
COG
Convention d'objectifs et de gestion
COLCA
Complémente optionnel de libre choix d’activité
COM
Contrats d’objectifs et de moyens
COR
Conseil d’orientation des retraites
COREC
Comité régional d'examen des comptes des organismes
de sécurité sociale
CPAM
Caisse primaire d’assurance maladie
CPG
Contrat pluriannuel de gestion
CPN
Commission paritaire nationale
CPOM
Contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens
CPRPSNCF
Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la
SNCF
CPS
Carte de professionnel de santé
CRAM
Caisse régionale d'assurance maladie
CRC
Chambres régionales des comptes
CRDS
Contribution au remboursement de la dette sociale
C
OUR DES COMPTES
494
CRE
Contrat de retour à l’équilibre
CREA
Compte de résultat analytique
CREDOC
Centre de recherche pour l'étude et l'observation des
conditions de vie
CREPS
Centre régional d’éducation physique et sportive
CRPRATP
Caisse de retraite du personnel de la RATP
C2RMP
CRRMP
Comité régional de reconnaissance des maladies
professionnelles
CSA
Contribution de solidarité pour l’autonomie
CSBM
Consommation de soins et de biens médicaux
CSG
Cotisation sociale généralisée
CSI
Centre de soins infirmiers
CSPRP
Conseil supérieur de prévention des risques
professionnels
CSS
Code de la sécurité sociale
CTA
Contribution tarifaire d’acheminement
C3S
Contribution sociale de solidarité des sociétés
DAIPE
Dispositif d’aide à l’investissement petite enfance
DARES
Direction de l’animation de la recherche et des études
statistiques
DDASS
Direction départementale de l’action sanitaire et sociale
DDJS
Direction département de la jeunesse et des sports
DDTEFP
Direction département du travail, de l’emploi et de la
formation professionnelle
DG
Dotation globale
DGCP
Direction générale de la comptabilité publique
DGDDI
Direction générale des douanes et droits indirects
DGEFPD
Délégation à l’emploi et à la formation professionnelle
DGF
Dotation globale de financement
DGFAR
Direction générale de la forêt et des affaires rurales
DGFIP
Direction générale des finances publiques
DGI
Direction générale des impôts
DGS
Direction générale de la santé
DGT
Direction générale du travail
DHOS
Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des
soins
DIM
Département de l’information médicale
DIPE
Dispositif d’investissement petite enfance
DMP
Dossier médical personnel
DMS
Durée moyenne de séjour
DOM
Département d’outre mer
DP
Dossier pharmaceutique
GLOSSAIRE
495
DRASS
Direction régionale de l’action sanitaire et sociale
DRDJS
Directions régionale et départementale de la jeunesse et
des sports
DREES
Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et
des statistiques
DRTEFP
Direction régionale du travail, de l’emploi et de la
formation professionnelle
DSI
Démarche de soins infirmiers
DSIO
Direction des systèmes d'information et de
l'organisation
DSS
Direction de la sécurité sociale
EIC
Echantillon interrégimes des cotisants
EDF
Electricité de France
EAJE
Etablissements d’accueil de jeunes enfants
EIR
Échantillon inter-régimes des retraités
EHPAD
Établissement hébergeant des personnes âgées
dépendantes
ENC
Echelle nationale des coûts.
EONIA
European OverNight Index Average
EPNFRLP
Etablissement public national de financement des
retraites de La Poste
EPRD
Etat prévisionnel des recettes et des dépenses
ESMS
Établissements et services médico-sociaux
ETP
Équivalent temps plein
FAF
Fonds assurance formation
FAQSV
Fonds d’aide à la qualité des soins de ville
FCAATA
Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs
de l’amiante
FEHAP
Fédération des établissements hospitaliers et
d’assistance privés à but non lucratif
FFIPSA
Fonds de financement de la protection sociale agricole
FIPE
Fonds d’investissement à la petite enfance
FIVA
Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante
FMESPP
Fonds pour la modernisation des établissements de
santé publics et privés
FNI
Fédération nationale des infirmiers
FOREC
Fonds de financement de la réforme des cotisations
patronales de sécurité sociale
FRR
Fonds de réserve pour les retraites
FSE
Feuille de soins électronique
FSV
Fonds de solidarité vieillesse
GHM
Groupe homogène de malades
C
OUR DES COMPTES
496
GHS
Groupe homogène de séjours
GIE
Groupement d’intérêt économique
GIP
Groupement d’intérêt public
GMSIH
Groupement pour la modernisation du système
d’information hospitalier
HAD
Hospitalisation à domicile
HAS
Haute autorité de santé
HCAAM
Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie
IDE
Infirmiers diplômés d’Etat
IDEL
Infirmier diplômé d’Etat libéral
IEG
Industries électriques et gazières
IFSI
Institut de formation en soins infirmiers
IGAS
Inspection générale des affaires sociales
IGF
Inspection générale des finances
INRS
Institut national de recherche et de sécurité
INSEE
Institut national de statistique et des études
économiques
InVS
Institut de veille sanitaire
IR
Impôt sur le revenu
IRCANTEC
Institution de retraite complémentaire des agents non
titulaires de l'État et des collectivités publiques
IRDES
Institut de recherche, d’étude et de documentation en
économie de la santé
IS
Impôt sur les sociétés
ISO
Organisation internationale de normalisation
ITAF
Impôts et taxes affectés
IVG
Interruption volontaire de grossesse
LAM
Loi relative à l’assurance maladie
LFI
Loi de finances initiale
LFR
Loi de finances rectificative
LFSS
Loi de financement de la sécurité sociale
LOLF
Loi organique relative aux lois de finances
LOLFSS
Loi organique relative aux lois de financement de la
sécurité sociale
LPPR
Liste des produits et prestations remboursables
MAINH
Mission nationale d’appui à l’investissement hospitalier
MAP
Ministère de l’agriculture et de la pêche
MCO
Médecine, chirurgie, obstétrique
MCP
Mission comptable permanente
MEAH
Mission d’expertise et d’audit hospitalier
MEDEF
Mouvement des entreprises de France
GLOSSAIRE
497
MICO
Minimum contributif
MIGAC
Mission d’intérêt général et d’aide à la
contractualisation
MISS
Mission d’informatisation des systèmes de santé
MOC
Méthode ouverte de coordination
MSA
Mutualité sociale agricole
ODD
Objectif de dépenses délégué
ODAM
Objectif des dépenses d’assurance maladie
ODMCO
Objectif de dépense de médecine et de chirurgie
obstétrique
OGD
Objectif global de dépenses
OND
Objectif national des dépenses ?
ONDAM
Objectif national de dépenses d’assurance maladie
ONP
Opérateur national de paie
ONSIL
Organisation nationale des syndicats d’infirmiers
libéraux
OQN
Objectif quantifié national
ORGANIC
Caisse nationale du régime d’assurance vieillesse,
invalidité, décès des non salariés de l’industrie
PAJE
Prestation d’accueil des jeunes enfants
PAP
Programme annuel de performance
PCUOSS
Plan comptable unique des organismes de sécurité
sociale
PGT
Paierie générale du trésor
PIB
Produit intérieur brut
PMS
Plan de maîtrise socle
PMSI
Programme de médicalisation des systèmes
d'information
PQE
Programme de qualité et d’efficience
PSISS
plan stratégique des systèmes d’information de santé
PSOP
Paie sans ordonnancement préalable
PSPH
Participant au service public hospitalier
PSSIS
Plan stratégique des systèmes d’informations de santé
RALFSS
Rapport annuel sur la loi de financement de la sécurité
sociale
RAP
Rapport annuel de performance
RGPP
Révision générale des politiques publiques
RPP
Rapport public particulier
RG
Régime général
RMI
Revenu minimum d’insertion
ROR
Répertoire opérationnel des ressources
RSI
Régime social des indépendants
C
OUR DES COMPTES
498
RTT
Réduction du temps de travail
SDIH
Schéma directeur de l’informatique hospitalière
SDSI
Schéma directeur des systèmes d’information
SEL
Société d’exercice libéral
SIH
Système d’information hospitalier
SLI
Section locale interministérielle
SLM
Section locale mutualiste
SMIC
Salaire minimum interprofessionnel de croissance
SNIIL
Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux
SNIR
Système national inter régimes
SNV2
Système national version 2
SPR
Standard des pratiques recommandées
SRIH
Structure régionale d’informatique hospitalière
(SRIH)
SRITEPSA
Service régional de l'inspection du travail, de l'emploi et
de la politique sociale agricoles
SROS
Schéma régional d’organisation sanitaire
SSIAD
Services de soins infirmiers à domicile
SSR
Soins de suite ou de réadaptation
T2A
Tarification à l’activité
TCAM
Taux de croissance annuel moyen
TEPA (Loi)
Loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et
du pouvoir d’achat.
TFR
Tarif forfaitaire de responsabilité
TVS
Taxe sur les véhicules de société
UCANSS
Union des caisses nationales de sécurité sociale
UGECAM
Union pour la gestion des établissements de caisse
d’assurance maladie
UNCAM
Union nationale des caisses d’assurance maladie
UNEDIC
Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans
l’industrie et le commerce
URCAM
Union régionale des caisses d’assurance maladie
URSSAF
Union pour le recouvrement des cotisations de sécurité
sociale et d’allocations familiales
USLD
Unité de soins de longue durée