Par lettre du 13 janvier 2006, j'ai porté à votre connaissance le rapport d'observations définitives
de la chambre régionale des comptes sur la gestion des exercices 1999 et suivants de votre
commune. Celui-ci a également été communiqué, pour ce qui le concerne, à votre prédécesseur.
La chambre n'ayant reçu aucune réponse audit rapport dans le délai légal d'un mois, ce document
vous est à nouveau notifié tel quel à titre définitif.
En application des dispositions de l'article R241-17 du code des juridictions financières, il vous
appartient de transmettre ce rapport, à l'assemblée délibérante. Conformément à la loi, l'ensemble
doit :
1. faire l'objet d'une inscription à l'ordre du jour de la plus proche réunion de l'assemblée ;
2. être joint à la convocation adressée à chacun de ses membres ;
3. donner lieu à débat.
Vous voudrez bien retourner au greffe de la chambre l'imprimé joint afin d'informer la juridiction de
la tenue de la prochaine réunion de l'assemblée délibérante. Après cette date, en application des
dispositions de l'article R241-18 du code des juridictions financières, le document final sera
considéré comme un document administratif communicable à toute personne en faisant la
demande, dans les conditions fixées par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 modifiée.
Enfin, je vous précise qu'en application des dispositions de l'article R241-23 du même code, le
rapport d'observations définitives et les réponses jointes sont transmis au préfet et au trésorier-
payeur général.
Michel RASERA
Conseiller maître à la Cour des comptes
_____________________________
NOTIFICATION FINALE
DU RAPPORT D'OBSERVATIONS DEFINITIVES
sur la gestion de la commune de TREGASTEL
au cours des exercices 1999 et suivants
EN L'ABSENCE DE REPONSE DANS LE DELAI LEGAL
_____________________________
OBSERVATIONS DEFINITIVES DE LA
CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES DE BRETAGNE
(exercices 1999 et suivants)
SOMMAIRE
Introduction : la place du tourisme à TREGASTEL
I - La taxe de séjour
1.1 l'importance relative et l'évolution de la taxe de séjour
1.2 la perte de recettes
1.3 le suivi de la procédure de collecte
II - Les modalités d'intervention de la commune
2.1 le fonctionnement : le contrôle des régies
2.2 l'investissement : l'opération d'aménagement des entrées de TREGASTEL
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Introduction : la place du tourisme à TREGASTEL
TREGASTEL, station classée "tourisme" depuis le 15 avril 1921, doit une bonne partie de sa forte
fréquentation estivale à une clientèle familiale. Celle-ci est attirée en particulier par la qualité des
eaux de baignade : deux de ses douze plages ont reçu le label "pavillon bleu" en 2003 et 2004,
COZ PORS et la GREVE BLANCHE.
La population est multipliée par cinq l'été, de 2.230 h. permanents à 11.000 h.
Le total des recettes de fonctionnement de la commune de TREGASTEL qui sont directement
liées au tourisme représente, avec le port de plaisance mais hors taxe foncière, près de 77 kEuros
en 2001 et près de 105 kEuros en 2004, soit l'équivalent de 3 % des recettes de fonctionnement
du budget principal. La taxe de séjour en fournit près de 39 %.
I - La taxe de séjour
1.1 l'importance relative et l'évolution de la taxe de séjour
La taxe de séjour, instituée en 1986 à TREGASTEL, est l'une des plus modestes recettes fiscales
de la commune (2 % des impôts et taxes en 2004).
Le produit de la taxe de séjour perçue par la commune de TREGASTEL a, dans l'ensemble,
progressé comme suit au cours des dernières années :
- en 1999, 23.753,54 Euros,
- en 2000, 34.919,43 Euros (malgré le naufrage de l'Erika le 12 décembre 1999),
- en 2001, 38.837,49 Euros,
- en 2002, 36.408,81 Euros,
- en 2003, 40.818,81 Euros,
- en 2004, 40.686,19 Euros.
Sur les années 2000-2004, la progression est de 17 %. Elle atteint 71 % si l'on considère toute la
période 1999-2004, avec l'effet de la revalorisation des tarifs en 2000.
On assiste cependant depuis 2003 à une stagnation de cette recette. La municipalité prévoit
d'ailleurs une recette de 37.000 Euros au budget primitif de 2005, comme en 2004.
L'intérêt de la commune pour cette taxe, d'après la délibération du 26 mars 1999, est double :
- elle permet de financer partiellement les équipements touristiques,
- elle contribue au maintien du niveau de la dotation touristique reçue de l'Etat (à noter que
TREGASTEL dispose d'un parc de résidences secondaires qui représente environ 50 % du parc
immobilier d'habitation, ce qui est bien supérieur à la moyenne habituelle pour les communes
éligibles à cette dotation, soit 25 %).
Dans cette perspective, les tarifs de la taxe de séjour, inchangés depuis 1992, ont été revus à
compter de 2000 par délibération du 26 mars 1999. Cette évolution marquée, de 50 % pour le tarif
de base (camping 3 et 4 étoiles et chambres d'hôtes), de 25 % pour les hôtels 3 étoiles, s'est
traduite dans le relèvement de la recette observé en 2000.
Le relèvement suivant opéré en 2003, plus modeste, découle de la concertation menée avec six
autres communes voisines (réunion d'harmonisation du 14 janvier 2003).
1.2 la perte de recettes
Il peut être estimé en première analyse qu'une proportion minimale de 20 à 30 % de la taxe de
séjour n'est pas acquittée (soit de l'ordre de 10.000 Euros par an).
On peut comparer la progression globale de 17 % des recettes de taxe de séjour mentionnées au
compte administratif sur la période 2000-2004 à la progression des recettes par catégorie
d'hébergements, telle qu'elle ressort du tableau suivant des recettes de taxe de séjour et
campings-cars :
A noter dans ces chiffres que le produit des meublés et chambres n'est pas indiqué en 2000. Pour
cette catégorie des logeurs individuels, la progression atteint + 33 % de 2001 à 2004.
Le produit de la taxe de séjour afférente aux logements loués par l'intermédiaire des agences
immobilières évolue à la baisse alors que les autres catégories progressent. Il semble qu'en
réalité une partie des propriétaires ait adopté internet pour mettre en location leurs logements
l'été, alors qu'auparavant ils passaient par les agences : le montant de taxe de séjour
nouvellement perçu sur les meublés et les chambres (soit environ + 1000 Euros) correspond à
peu près au moins-perçu sur les agences (environ -1100 Euros).
Les particuliers louant directement des logements ou chambres s'élèvent à 37 en 1999, 53 en
2004, alors qu'il existe 850 résidences secondaires ; la commune n'est pas en mesure de préciser
le montant de la taxe de séjour optimale qui devrait être collectée sur cette catégorie en raison de
son absence d'estimations même partielles sur la fréquentation, la capacité et le nombre de
nuitées.
Sur la période 2001-2004, la progression du nombre de particuliers déclarés louant en direct est
de 36 % et le montant de la taxe de séjour collectée sur cette catégorie d'hébergements
augmente de 33 %.
1.3 le suivi de la procédure de collecte
L'insuffisant suivi de la taxe de séjour est illustré par :
- l'absence de vérification sur les déclarations prévues à l'article R2333-51 du code général des
collectivités territoriales (location en habitation personnelle),
- l'inexistence de contrôle sur la fréquentation des logements assujettis à la taxe de séjour,
comme le permettent les articles R. 2333-50 second alinéa du code général des collectivités
territoriales (état des personnes logées et des nuitées assujetties) et R2333-55 du même code
(vérification des états par les agents communaux mandatés).
Outre l'optimisation de la recette, un suivi détaillé permettrait notamment de faire coïncider les
données de recettes de la taxe de séjour entre les statistiques de la commune et les données du
compte administratif (retards de paiement notamment). Les réponses de la commune font
apparaître des recettes supérieures à celles du compte administratif en 2002 et surtout en 2003
(moins 1000 Euros dans le compte administratif en 2003). En 2001, le compte administratif
enregistre au contraire un produit supérieur de 5.000 Euros aux données fournies par la
commune.
Grâce à l'informatisation de la quasi-totalité des logeurs professionnels et de la majorité des
logeurs individuels (45 sur 53), une partie des renseignements pourrait du reste transiter par voie
électronique.
La chambre prend acte des décisions de l'actuel ordonnateur de relancer les propriétaires
d'hébergements en vue d'une collecte complète de la taxe de séjour (ce qui aurait commencé à
produire des effets positifs), et de son projet de reverser à l'office de tourisme la recette du parc
de camping-cars aménagé, à l'instar de la taxe de séjour.
La mise en place d'un cahier ou registre des logeurs, notamment pour les particuliers, est à l'étude
pour 2006.
Enfin, pour la coordination intercommunale sur ces dispositifs, un " contrat de station " vient d'être
signé avec deux autres communes de la Côte de granit rose.
II - Les modalités d'intervention de la commune
2.1 Le fonctionnement : le contrôle des régies
Comme il ressort du tableau qui figure en introduction, la commune de TREGASTEL a organisé
plusieurs régies de recettes liées au tourisme. Trois de ces régies : taxe de séjour, camping-cars
et cabines de bains, entrent dans cette catégorie, pour le budget principal. Une quatrième régie de
recettes intervient pour le paiement des emplacements des mouillages des ports est et ouest
(budget annexe du port).
Une cinquième régie de recettes est située à l'office de tourisme, jusqu'alors associatif, transformé
en établissement public industriel et commercial par délibération du 4 avril 2002 et arrêté
préfectoral du 21 juin 2002.
La régie de la taxe de séjour
La perception de la taxe de séjour est l'objet d'une régie municipale créée par délibération du 12
juin 1986, après avis favorable du comptable. Le montant de l'encaisse est fixé à 1524,49 Euros
(10.000 F). Le régisseur doit verser la totalité des pièces justificatives des recettes encaissées
tous les mois, ces versements devant s'effectuer, pour un mois en cours, le 10 du mois suivant
(article 4).
Le régisseur est tenu de verser un cautionnement de 304,90 Euros soit 2.000 F (article 6).
Les recouvrements des produits sont effectués contre délivrance de quittances à souches (article
9).
Les faits survenus en 1999
Lors de l'établissement du compte administratif 1999, les services du Trésor ont indiqué à la
mairie un montant de recettes pour la taxe de séjour de 155.813 F (23.753,54 Euros), nettement
inférieur au montant inscrit au budget sur la base des résultats des années antérieures, soit :
1996 = 196.684 F (29.984,28 Euros)
1997 = 207.024 F (31.560,61 Euros)
1998 = 204.657 F (31.199,76 Euros)
Cette différence s'explique par la " disparition " d'une ou plusieurs enveloppes contenant chèques
ou espèces, le tout enregistré sur 18 bordereaux dûment identifiés. Le montant global de ces
recettes était de 36.757,50 F (5.603,64 Euros) soit : 11.670 F (1.779,08 Euros) en espèces et
25.087,50 F (3.824,56 Euros) en chèques.
Un titre de recettes n°200 d'un montant de 36.757,50 F (5.603,64 Euros) a été émis le 22 juin
2001 par le maire de TREGASTEL, suite à un déficit du même montant constaté dans les
comptes de la régie en 1999.
Le délai entre la disparition de la somme et l'émission du titre s'explique par l'enquête interne qui a
été diligentée à l'époque, et confiée à des élus. Elle a dressé un rapport le
5 février 2001. Celui-ci
met en lumière plusieurs dysfonctionnements dans le recouvrement de la taxe de séjour.
L'insuffisance du contrôle au moment des faits
Il découle de l'instruction codificatrice n° 98-037 du 20-02-1998 relative aux régies d'avances et de
recettes des collectivités locales que l'ordonnateur "s'assure de l'encaissement normal des
produits" sur la base des relevés de recettes qui doivent lui être produits mensuellement par le
régisseur. Il peut également demander au régisseur communication des registres à souches
entièrement utilisés afin de vérifier les recettes en numéraire.
Au moment de la disparition de la recette rappelée plus haut, les conditions de fonctionnement
normales de la régie n'étaient pas contrôlées par l'ordonnateur. En particulier, le respect des
conditions d'application des arrêtés municipaux relatifs à la régie de recettes de la taxe de séjour
n'était pas assuré en ce qui concerne la périodicité des versements en trésorerie.
Le contrôle actuel des régies
Par délibération du 30 août 2002, le conseil municipal de TREGASTEL a approuvé un projet de
convention de mise à disposition auprès de l'office de tourisme d'un agent communal, à raison de
4 heures par semaine, ayant pour mission, sous le contrôle de la directrice de l'office de tourisme :
- de préparer les budgets et comptes de résultat ;
- de saisir la comptabilité
- de contrôler les régies
- d'effectuer les opérations comptables nécessaires au bon fonctionnement de l'office.
La convention, signée le 2 septembre 2002, entérine la mise à disposition auprès de l'office, pour
une durée de 3 ans d'un adjoint administratif principal 2ème classe chargé des finances
communales, pour exercer les fonctions de comptable à compter du 1er octobre 2002. En
application de l'article 4, l'office rembourse à la commune la rémunération et les charges sociales
de cet agent au vu d'un état trimestriel de service.
Il est contraire au principe de prudence que le contrôle de la régie incombe au régisseur titulaire
de la régie de recettes de l'office de tourisme (arrêté n° 02/2002 du 01/10/2002) et de sa régie
d'avances (arrêté n° 01/2002 du 01/10/2002). Cette confusion contrôleur/contrôlé n'est en effet
pas conforme à l'indépendance nécessaire aux fonctions de contrôle, vis-à-vis de l'organisme
examiné.
2.2 L'investissement : l'opération d'aménagement des entrées de TREGASTEL
L'opération d'investissement n° 710 concerne l'aménagement des entrées de l'agglomération. Sur
la période 2001-2004, les dépenses réalisées au titre de cette opération représentent 415.679,80
Euros TTC de travaux, puisque aucun frais d'études payé n'apparaît au cours des années sous
revue.
Ces travaux ne peuvent s'apprécier indépendamment du projet global dans le cadre des règles
des marchés publics :
or, certaines dépenses ont été payées sur simple facture et non dans le
cadre d'un marché.
La jurisprudence antérieure à la réforme du code intervenue en 2004 a été confirmée par celle-ci
sur les points qui nous intéressent.
En définitive, il s'agit d'une opération qui, considérée globalement, dépasse largement les seuils
des marchés formalisés de travaux, y compris après le décret n° 2004-15 du 7 janvier 2004
portant code des marchés publics qui a porté ce seuil à 230.000 Euros HT.
La détermination des seuils, en matière de travaux, ne se fait pas par " ouvrage ", mais par "
opération " (article 27-1 du code des marchés publics). L'opération s'apprécie sur plusieurs
années. Dans la mesure où la commune avait, en l'espèce, déterminé une opération pluriannuelle
dont le montant cumulé dépassait largement les seuils, l'ensemble des travaux concernés aurait
dû faire l'objet de marchés.
Deux dépassements de seuil de marché sont observés suite au fractionnement de cette opération.
Des travaux d'électricité ont été réglés par la commune hors marché, sur simple facture
(commande du 2 mai 2000 d'un montant de 195.820,78 F soit 29.852,69 Euros, facture du 11
décembre 2000 et mandat n°585 de 2001, 195.820,78 F soit 29.852,69 Euros TTC, se substituant
au mandat n°339/01 rejeté). Une entreprise de travaux publics a également bénéficié en 2002
d'un paiement hors marché de 104.650,77 Euros
TTC (mandat n°1309 du 3 octobre 2002).
L'attention de l'ordonnateur est appelée sur le respect des règles de passation des marchés de
travaux dans le cadre d'une opération globale, et sur l'impossibilité de mandater des paiements
sur simple facture dès lors que les règles prescrivent cette dernière procédure.
Délibéré le 29 novembre 2005
M. RASERA
Conseiller maître à la Cour des comptes