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Parc d’activités La Providence –
Kann’Opé
Bât. D
CS 18111
97181 LES ABYMES CEDEX
Tél. 05 90 21 26 90
Courriel : «
antillesguyane@crtc.ccomptes.fr
»
Site internet : «
www.ccomptes.fr/fr/antilles-guyane
»
RAPPORT D’OBSERVATIONS
DEFINITIVES
ET SA REPONSE
SITUATION FINANCIERE DE LA
COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
Exercices 2015 à 2021
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
1
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................
2
RECOMMANDATIONS
..........................................................................................
3
INTRODUCTION
.....................................................................................................
4
1
UNE SITUATION FINANCIERE INITIALEMENT SOUS TENSION EN
VOIE D’AMELIORATION
.................................................................................
6
1.1
A sa création, la CTG était dans une situation financière tendue
..................
6
1.1.1 En 2015, la collectivité territoriale devait faire face à plusieurs défis
financiers
........................................................................................................
6
1.1.2 Des retraitements sont nécessaires pour apprécier la situation financière de la
CTG
................................................................................................................
7
1.2
La maîtrise des dépenses de fonctionneme
nt, à l’exception majeure des
charges de personnel, et la bonne tenue des recettes ont redonné des marges
financières à la CTG
.....................................................................................
11
1.2.1 Les principaux indicateurs financiers montrent que la situation de la CTG est
satisfaisante à la fin de l’exercice 2021
........................................................
11
1.2.2 La collectivité a abordé 2022 avec de réels atouts
........................................
12
1.2.3 La CTG ne maîtrise pas ses dépenses de personnel
.....................................
20
2
L’ORGANISATION FINANCIERE DE LA CTG N’ES
T PAS
PERFORMANTE
...............................................................................................
25
2.1
Même si la CTG bénéficie de ressources expertes dans certains domaines
clés, elle souffre d’un pilotage budgétaire déficient
....................................
25
2.1.1 Le pilotage des 160
M€ de masse
salariale est un impératif
........................
25
2.1.2 Un pilotage au sein de la direction des affaires financières à renforcer
.......
26
2.1.3
Un besoin d’harmonisation de la gestion des subventions versées et de
centralisation de l’information
......................................................................
27
2.1.4
Une programmation des dépenses d’investissement en décalage avec les
capacités de réalisation de la CTG
................................................................
28
2.2
Malgré des améliorations sur lesquelles s’appuyer, la CTG gagnerait à
réorienter sa stratégie en matière d’exécution financière
.............................
30
2.2.1 La recherche de la qualité budgétaire et comptable doit être mieux structurée
pour être plus efficace tout en allégeant la charge globale des services
.......
30
2.2.2 Une organisation de la chaîne de la dépense non performante
.....................
33
2.2.3
L’organisation relative aux recettes doit être revue
......................................
37
RECOMMANDATIONS
........................................................................................
41
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
2
SYNTHÈSE
Six ans après sa création, la collectivité territoriale de Guyane (CTG) présente fin 2021
une situation financière satisfaisante. Son épargne brute s’est progressivement redressée.
Avec 56,5
M€, elle est à des niveaux conformes aux objectifs affichés avec l’Etat, qui
s’est engagé dans une démarche d’accompagnement particulier de la collectivité depuis
2017. La CTG a su maîtriser ses charges de fonctionnement, à l’exception notoire des
dépenses de personnel, qui ont crû de 3,9 % par an en moyenne depuis 2016. Ses recettes
se maintiennent favorablement malgré le contexte. La collectivité a réalisé plus de
470
M€ d’investissement (subventions d’équipement comprises), co
-financés à un niveau
élevé par l’Union européenne et l’Etat. Son endettement, désormais sécurisé, est de
140
M€. Elle pourrait, en mobilisant l’intégralité de sa capacité d’autofinancement brute
et de sa trésorerie, rembourser sa dette en un peu plus d’un an.
La
gestion budgétaire de la collectivité n’est pas exempte de sérieuses fragilités. Dans un
contexte d’incertitudes et de défis pour la Guyane, l’absence de maîtrise et de pilotage de
la masse salariale (160 M€) constitue une hypothèque sérieuse sur le maintien de la
situation financière. Entre 2016 et 2021, l’effectif a crû de presque 20 % et le montant
des rémunératio
ns versées de 21,9 %. Les modifications de périmètre n’expliquent que
partiellement cette évolution, alors que la fusion aurait dû parallèlement permettre de faire
des économies d’emplois sur les fonctions support
.
De même, le conventionnement et le suivi des subventions versées par la collectivité à
d’autres entités présentent des lacunes significatives. 55
% des dossiers non soldés n’ont
fait l’objet d’aucun paiement depuis 2018 et présentent ainsi une présomption de caducité
pour 12,9 M€. 29,5 M€ resteraient à verser, mais la CTG n’a pas de connaissance précise
du montant à inscrire au budget, le suivi fin des conventions n’étant pas centralisé.
Malgré une trésorerie surabondante, la collectivité ne respecte pas le délai global de
paiement de ses fournisseurs, ni son obligation de paiement des intérêts moratoires. En
février 2022, des factures de plus d’un an d’un montant total de 22,4 M€ n’étaient toujours
pas payées.
La tenue des comptes ne permet pas encore de s’assurer de l’exhaustivité et de la fia
bilité
des informations qu’ils délivrent. Les défauts relevés sont préjudiciables à la situation
financière de la CTG.
Aussi, la collectivité, qui dispose des outils informatiques nécessaires, doit mettre en
place, pour un meilleur pilotage, une organisation interne plus transversale et plus
coopérative entre services. Elle doit également assurer un suivi plus rigoureux et efficace
de l’exécution du budget, en centralisant les opérations et en mettant en place un service
spécialisé pour les recettes. Elle doit enfin veiller à sécuriser ses procédures et limiter le
nombre d’agents intervenant dans son système d’information financier
.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
3
RECOMMANDATIONS
Recommandation n°1 :
Pour répondre aux engagements de l’accord structurel en
matière de gestion des ressources humaines, mettre en place une
organisation
chargée d’établir et de suivre les indicateurs
nécessaires au pilotage des emplois, des effectifs et des crédits
de la masse salariale
Recommandation n°2 :
Organiser le suivi des subventions
d’investissement
versées par
la CTG, en engagement et en exécution
Recommandation n°3 :
Adapter
la
programmation
budgétaire
des
opérations
d’équipement
en
tenant
compte
des
capacités
réelles
d’exécution
Recommandation n°4 :
Pour sécuriser les opérations de dépenses, restreindre les droits
d’accès à
la base des tiers
à un petit nombre d’
agents, distincts
de ceux chargés du mandatement
Recommandation n°5 :
Conformément aux dispositions de l’article L.
2192-13 du code
de la commande publique, verser aux fournisseurs les intérêts
moratoires et les indemnités forfaitaires dus au titre du
dépassement du délai global de paiement
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
4
INTRODUCTION
Le contrôle des comptes et de la gestion de la collectivité territoriale de Guyane (CTG)
portant sur les exercices 2015 et suivants a été ouvert par lettres du président de la
chambre adressées le 26 janvier 2021 à M. Rodolphe ALEXANDRE, président de la
collectivité jusqu’au 1
er
juillet 2021, puis le 27 janvier 2022 à M. Gabriel SERVILLE,
président et ordonnateur en fonctions.
Le contrôle a porté sur la situation et l’organisation financière de la CTG.
Le rapport d’observations provisoires a été communiqué à l’ordonnateur en fonctions,
M. Gabriel SERVILLE, et au précédent ordonnateur, M. Rodolphe ALEXANDRE, qui
en ont accusé réception le 27 juillet 2022.
L’ordonnateur en fonctions a répondu par
courrier du 18 septembre 2022, enregistré au
greffe le 26 septembre 2022
. L’ancien ordonnateur, M. Rodol
phe ALEXANDRE, a
répondu par courrier daté du 26 septembre 2022, enregistré au greffe le 13 octobre 2022.
Après avoir examiné les réponses obtenues, la chambre, dans sa séance du 25 octobre
2022, a arrêté les observations définitives suivantes.
Présentation de la collectivité territoriale unique de Guyane
La création d’une collectivité territoriale unique en Guyane a été approuvée en janvier
2010 par les électeurs de Guyane. Cette collectivité a succédé le 18 décembre 2015 à la
Région et au Département de Guyane.
Aux termes de l’article L.
7111-1 du code général des collectivités territoriales «
la
Guyane constitue une collectivité territoriale de la République régie par l’article 73 de
la Constitution qui exerce les compétences attribuées à un département d'outre-mer et à
une région d'outre-mer et toutes les compétences qui lui sont dévolues par la loi pour
tenir compte de ses caractéristiques et contraintes particulières ».
En outre, «
la
collectivité territoriale de Guyane succède au département de la Guyane et à la région
de Guyane dans tous leurs droits et obligations
» (article L. 7111-2 du CGCT).
L’article L.
7151-1 du CGCT dispose que «
l’
assemblée de Guyane règle par ses
délibérations les affaires de la collectivité territoriale de Guyane.// Elle a compétence
pour promouvoir la coopération régionale, le développement économique, social,
sanitaire, culturel et scientifique de la Guyane et l'aménagement de son territoire et pour
assurer la préservation de son identité, dans le respect de l'intégrité, de l'autonomie et
des attributions des communes.// Elle peut engager des actions complémentaires de celles
de l'Etat, des communes et de leurs groupements et des établissements publics situés dans
la collectivité territoriale.
»
L’assemblée délibérante
est composée de 55 membres élus pour six ans. Sa commission
permanente est composée du président de l'assemblée de Guyane, de quatre à quinze vice-
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
5
présidents et, éventuellement, d'un ou plusieurs autres membres, dans la limite de quinze
(article L. 7123-4 du CGCT). La CTG emploie plus de 3 200 agents.
La Guyane est située au nord-
est de l’Amérique du Sud, entre le Suriname et le Brésil. Sa
superficie est de 83 846 km²
. Selon l’INSEE, la population légale totale de la Guyane en
vigueur au 1
er
janvier 2022 est de 284 000 habitants, dont 33 % de moins de 15 ans. La
population est passée de 240 000 habitants en 2015 à 276 000 habitants en 2021.
Carte n° 1 :
Circonscriptions administratives de la Guyane
Depuis la création de la CTG, plusieurs événements sont intervenus :
-
dans un contexte de tensions sociales en mars et avril 2017, la Guyane dans son
ensemble a bénéficié d’un plan d’urgence. Une convention entre la CTG et l’Etat
relative à la mise en œuvre des dispositions financières du Plan d’urgence pour la
Guyane (PUG) a été signée le 28 octobre 2017. En contrepartie du soutien
financier de l’Etat, la CTG s’est engagée à mener une démarche de pilotage de la
performance ;
-
en application des dispositions de l’article 81 de la loi n° 2018
-1317 du
28 décembre 2018 de finances pour 2019, le financement et la gestion du revenu
de solidarité active en Guyane sont recentralisés au niveau de l’Etat à partir du
1
er
janvier 2019 ;
-
dans la phase de préparation de l’accord structurel entre l’Etat et la CTG, un
accord de méthode a été signé le 28 novembre 2019, octroyant une aide de 5
M€
en contrepartie de la définition d’un plan de performance
; puis un accord
intermédiaire, signé le 27 septembre 2021, permet le versement de 30
M€ compte
tenu des progrès réalisés par la CTG ;
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
6
-
l’accord stru
cturel 2021-2023 a été signé le 18 janvier 2022. Il prévoit la mise en
œuvre du plan de performance en échange d’un appui technique et financier de
l’Etat.
ROD et référé de la Cour des comptes (2019)
En application des dispositions de l’article L.
111-3 du code des juridictions
financières, la Cour des comptes (5
ème
chambre), en lien avec la chambre régionale
des comptes de Guyane, a contrôlé la mise en œuvre des clauses financières du plan
d’urgence pour la Guyane adopté en avril et en octobre 2017. Le c
ontrôle a aussi porté
sur la situation financière de cette collectivité. Il en ressort que l’Etat a pour l’essentiel
respecté ses engagements, mais que
la CTG n’a en revanche pas mis en œuvre, dans
les délais prévus, les obligations de moyens qui lui incombaient. De plus, la situation
financière de la CTG doit être stabilisée par un plan d’économies et de maîtrise des
dépenses.
1
UNE SITUATION FINANCIERE INITIALEMENT SOUS
TENSION
EN VOIE D’AMELIORATI
ON
La chambre a conduit son analyse de la trajectoire financière de la CTG à partir des
comptes 2016.
La CTG dispose d’un budget principal et de trois budgets annexes
: «
Régie des transports
public
», «
Abattoir territorial
» et «
Gestion des fonds européens
». En 2020, l’ensemble
représente un volume de
dépenses totales d’environ 740
M€. Le présent contrôle a porté
sur le budget principal, en raison de son poids budgétaire et des risques qu’il porte. Il
représente 90 % des dépenses de fonctionnement agrégées. Avec 115
M€ de dépenses
totales et 180
M€ de r
ecettes totales, le budget «
Gestion des fonds européens
» est très
excédentaire.
1.1
A sa création, la CTG était dans une situation financière tendue
1.1.1
En 2015, la collectivité territoriale devait faire face à plusieurs défis
financiers
La CTG était confrontée à un premier défi : celui de développer un programme
d’investissement ambitieux
, en particulier en matière de construction de collèges et de
lycées, pour
répondre aux besoins d’une population en forte croissance.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
7
Le deuxième était de supporter un reste à charge
1
important en matière de revenu de
solidarité active : 51,1
M€ en 201
5. Dans son rapport sur les dépenses sociales de la CTG,
la chambre avait souligné qu
e de meilleurs contrôles auraient permis à l’ex
-département
d’économiser entre 44 et 50
M€
2
cette année-là.
Le troisième était
la nécessaire maîtrise d’une charge salariale anormalement croissante.
Le
quatrième consistait à assumer plusieurs dossiers à impact significatif sur l’équilibre
de son budget :
-
plus de trois années de retards de paiement de la compensation du transfert de la
compétence transport à la communauté d’agglomération du Centre Littoral
(30,7
M€
) ;
-
le coût de la charge d’intérêts contractuelle
3
et de la sortie des emprunts structurés
à risque
. L’ex
-région
n’avait pas recouru
au fonds de soutien dédié mis en place
par l’Etat (les dossiers devaient être déposés entre le 1
er
janvier 2014 et le 30 avril
2015) ;
-
l’
accumulation de créances devenues irrécouvrables ;
-
l’existence d’
organismes rattachés
4
peu maîtrisés, parfois coûteux pour la CTG en
matière de subventions versées.
1.1.2
Des retraitements sont nécessaires pour apprécier la situation financière
de la CTG
La qualité de l’information financière et la fiabilité des comptes sont déterminantes pour
apprécier la situation financière.
Dans son rapport sur la mise en œuvre des clauses
financières du plan d’urgence de Guyane, la Cour des comptes indiquait qu’en
«
prolongeant les observations faites en 2013 par la chambre régionale des comptes de
la Guyane sur les comptes 2006 à 2012 des deux collectivités précédentes et reprises sur
les comptes du département en 2017, les travaux réalisés en mars 2019 ont mis en lumière
la persistance de faiblesses et de lacunes comptables
».
1
Le reste à charge se définit comme l’excédent de dépenses au titre de cette politique publique par rapport aux recettes qui
lui sont destinées.
2
Source
: rapport d’observations définitives de la chambre
régionale des comptes de Guyane du 17 juillet 2017 relatif aux
dépenses sociales du conseil général de Guyane puis de la collectivité territoriale de Guyane de 2011 à 2015. En 2018, le reste à charge
s’est élevé à 47,9 M€, avant soutien exceptionnel de l’Etat de 50 M€. Sachant que les versements irréguliers
-donc évitables- étaient
compris entre 55 et 62
M€ en 2018, montants
de 7
M€ à 14 M€ supérieurs au reste à charge, ce dernier n’était nullement une fatalité
en Guyane.
3
Au-
delà du taux d’intérêt légal,
la CTG provisionnait mais ne décaissait pas le montant dû.
4
12 organismes rattachés à la CTG : OPRF (Office public régional de formation), CMDT (conservatoire de musique, danse
et théâtre de Guyane), SDIS (service départemental d’incendie et de secours), MCG (musée des cultures guyanaises), ORSG
(observatoire régi
onal de santé de Guyane), AUDEG (agence de l’urbanisme et de développement de la Guyane), SPLANG (société
publique pour l’aménagement numérique de Guyane), CTG (comité de tourisme de Guyane),
SPNRG (syndicat mixte de gestion du
parc naturel de Guyane), Off
ice de l’eau, GDI (Guyane développement innovation), Etablissement public de coopération culturelle
des arts vivants de Guyane.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
8
Le tableau qui suit présente les principales données financières
5
du budget principal, avant
retraitement de la chambre.
Tableau n° 1 :
Principales données financières extraites des comptes, avant retraitement de la
chambre
en milliers d'€
2016
2017
2018
2019
2020
2021 (*)
recettes réelles de fonctionnement
501 757
503 638
559 753
413 711
376 176
442 937
dépenses réelles de fonctionnement
474 557
518 687
528 291
366 373
372 783
384 132
dont DRF hors RSA
329 604
368 657
364 323
364 229
372 783
384 132
CAF brute
27 201
- 15 049
31 462
47 338
3 393
58 805
CAF nette
10 246
- 32 291
15 884
31 770
- 12 126
46 566
Source : comptes de gestion.
(*) : comptes provisoires.
Les retraitements ci-après se limitent aux opérations qui ont modifié
l’évolution de
l’épargne brute de la collectivité, c’est
-à-dire qui ont affecté la comparaison des recettes
réelles de fonctionnement et des dépenses réelles de fonctionnement sur la période.
1.1.2.1
Le retraitement des rattachements de dépenses et de recettes
En
application du principe d’indépendance des exercices, le rattachement des charges
et des produits de fonctionnement à l’exercice vise à intégrer dans le résultat les
charges ayant donné lieu à service fait et les produits correspondant à des droits
acquis.
Le retraitement des rattachements
6
effectué par la chambre vise à mieux approcher le
niveau de la CAF brute. Il a été effectué compte tenu des informations disponibles et porte
sur :
-
la prise en compte des recettes non titrées et des dépenses non mandatées à la
clôture de chaque exercice
7
;
-
la neutralisation de produits à recevoir non fondés en 2018 et 2019
8
.
5
Recettes réelles de fonctionnement (RRF) = produits encaissables.
Dépenses réelles de fonctionnement (DRF) = charges décaissables.
Capacité d’autofinancement (CAF) brute
= RRF - DRF. CAF nette = CAF brute - annuité en capital de la dette financière.
6
A
titre d’exemple, le montant des charges et produits à rattacher enregistrés par la collectivité ont représenté
respectivement 12,5 % et 5,4 % des dépenses et recettes réelles de fonctionnement en 2020. Le solde des rattachements a dégradé de
26,4 M€ la CAF
brute (
qui s’élevait à 3,4 M€ selon le compte de gestion) et le résultat de l’exercice (d’un montant de
8,1
M€).
7
Comptes 4711, 4713 et 4718 pour les recettes ; comptes 4721 et 4728 pour les dépenses.
8
Considérant, à tort, pouvoir compter sur un soutien
exceptionnel complémentaire de la part de l’Etat dans le prolongement
de la convention du 23 octobre 2017, la CTG a enregistré un produit à recevoir injustifié de 30 M€ en clôture 2018 et de 25 M€ en
clôture 2019 (5
M€ ayant été accordés par l’Etat en 2019 au titre de l’accord de méthode)
.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
9
1.1.2.2
Le retraitement de charges étalées ou omises
Le protocole transactionnel de 2016 avec la
communauté d’agglomération du Centre
littoral (CACL)
fixe le montant annuel de la compensation ainsi qu’un échéancier 2016
-
2020 pour le règlement de l’arriéré
de 30,7
M€
dû par la CTG depuis le transfert de la
compétence transport à l’EPCI, le 1
er
septembre 2012. Le calendrier des paiements a été
respecté,
à l’exception d’une
échéance de 2019 payée en 2020. Les versements ont été
retraités par la chambre.
La CTG maintient dans ses comptes des créances anciennes qui ne seront jamais
recouvrées.
A partir de l’état des restes à recouvrer du comptable, la chambr
e propose
une première estimation des charges qui auraient dû être enregistrées chaque année pour
sortir les montants concernés des restes à recouvrer, pour un total de 9,6
M€ sur la
période.
1.1.2.3
Le retraitement d’opérations exceptionnelles
La sortie des emprunts toxiques a engendré une charge exceptionnelle non précisée par
la CTG, mais estimée en première approche à 31,25
M€
en 2021, montant composé de
16,86
M€ d’indemnité de rupture anticipé (IRA) et de 14,39
M€ de charges d’intérêt en
retard (montant provisionné au cours de la période, donc sans effet sur les dépenses réelles
de fonctionnement comptablement constatées lors des exercices précédents). La charge
comptable de 31,25
M€ qui apparaît au chapitre 66 «
Charges financières
» est donc
retraitée par la
chambre dans le cadre de l’opération d’identification du niveau de la CAF
brute.
En 2019, l’Etat a attribué 5
M€ à la CTG à l’occasion de la signature de l’accord de
méthode.
En 2021, en application des stipulations de l’accord intermédiaire, l’Etat
a versé
30
M€ de subvention exceptionnelle.
Ces montants sont intégrés par la chambre dans le
retraitement de la CAF brute.
En 2022 et 2023, l’Etat versera jusqu’à 40
M€ à la CTG si
elle respecte ses engagements de l’accord structurel.
D’autres enregistre
ments ne sont pas considérés comme exceptionnels par la chambre et
ne sont donc pas retraités :
-
la compensation annuelle par l’Etat du transfert de 27
M€ d’octroi de mer aux
communes de Guyane a été prévue et pérennisée par la loi
9
. Cette dotation par
prélèvement sur recettes ne peut pas être considérée comme un soutien
exceptionnel ;
-
les soutiens de 2017 et 2018 relatifs au revenu de solidarité active (RSA)
s’inscrivaient dans le cadre d’un dispositif législatif national de
compensation du
reste à char
ge des collectivités départementales en matière d’allocations
9
Cf. III de l’article
141 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer :
«
Il est institué un prélèvement sur les recettes de l'Etat compensant les pertes de recettes résultant, pour la collectivité territoriale de
Guyane, de la suppression de sa part de dotation globale garantie. Le montant de ce prélèvement est égal à 18 millions d'euros en
2018
. » La loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 (état A annexé) porte ce prélèvement sur recettes (PSR) à
27 M€.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
10
individuelles de solidarité
10
. Ils doivent être considérés comme des dotations
complémentaires de financement du RSA, s’ajoutant
aux divers financements de
cette allocation qui se sont stratifiés au cours du temps. Leur maintien dans
l’analyse permet une meilleure comparabilité entre les comptes 2017 et 2018,
d’une part, et les comptes 2019 à 2021, d’autre part.
L’ensemble de
s retraitements de recettes et dépenses réelles de fonctionnement est
récapitulé dans le tableau suivant.
Tableau n° 2 :
Synthèse des retraitements de la CAF brute de la CTG
en milliers d'€
2016
2017
2018
2019
2020
2021
CAF brute issue des comptes de gestion
27 201
-15 049
31 462
47 338
3 393
58 805
aides exceptionnelles de l'Etat (hors aide RSA)
0
0
0
5 000
0
30 000
encaissements sans émission de titre
-35 216
2 029
271
-578
-1 973
-966
rattachement de recette à tort
0
0
-30 000
5 000
25 000
0
retraitement des RRF
-35 216
2 029
-29 729
-578
23 027
-30 966
paiements sans mandatement
-586
179
-174
-5
-1
1
absence d'admission en non valeur
1 655
1 410
1 980
830
1 160
2 570
compensation transf compét transport à CACL
1 198
-8 862
-7 665
-2 044
-13 285
sortie emprunts toxiques
0
0
0
0
0
31 252
retraitement des DRF
2 267
-7 273
-5 859
-1 219
-12 126
-28 681
CAF brute retraitée
-10 282
-5 747
7 592
47 979
38 546
56 520
Sources : Collectivité territoriale de Guyane et compte de gestion du comptable public.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE __________________
La CTG a été créée fin 2015 à partir des département et région de Guyane,
présentés comme financièrement fragiles et dont la sincérité des comptes n’était pas
pleinement assurée.
Se
s premières années d’existence sont notamment marquées par le
mouvement de
protestations en 2017 et la recentralisation de la gestion du revenu de solidarité active
en 2019, dont les carences en matière de contrôle des allocataires conduisaient à un reste
à charge important.
Afin d’avoir une vision neutre de la capacité d’autofina
ncement de la collectivité
au cours de la période, des retraitements des recettes et dépenses réelles de
10
Dès 2017, avant même la recentralisation en 2019, le RSA n’a pas constitué un poids pour les finances de la CTG. En
effet, l’Etat est venu abonder par des subventions exceptionnelles (26
M€ en 2017, 44,2 M€ en 2018) le soutien prévu par les
dispositions de l’article L.
131 de la loi de finances rectificative pour 2016 (14 M€) et de l’article 95 de la loi de finances rectificative
pour 2017 (5,8 M€). La CTG a ainsi reçu 50 M€ en 2017 et le même monta
nt en 2018 pour faire face au reste à charge du RSA, que
la chambre estime
à 47,9 M€ en 2018. Le reste à charge de RSA en 2016, qu’il n’a pas été possible de reconstituer de façon fiable
dans le cadre du contrôle, conduit à émettre une réserve de lecture du tableau suivant relatif à la CAF retraitée : dans une logique
comparative pluriannuelle, le montant de l’année 2016 est «
artificiellement » détérioré à due proportion.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
11
fonctionnement sont nécessaires. Ils ont trait au rattachement de charges et produits à
l’exercice, aux charges étalées ou omises, ou encore à des dépe
nses exceptionnelles. A
titre d’illustration, la CAF brute de 2020 se révèle 35
M€ meilleure
que celle déduite des
comptes ; les effets du retraitement sont peu significatifs pour les exercices 2019 et 2021.
1.2
La maîtrise des dépenses de fonctionnement
, à l’exception majeure
des charges de personnel, et la bonne tenue des recettes ont redonné
des marges financières à la CTG
1.2.1
Les principaux indicateurs financiers montrent que la situation de la CTG
est satisfaisante
à la fin de l’exercice 2021
En tenant compte des retraitements précités, les principaux ratios financiers de la CTG
s
’améliorent nettement.
Tableau n° 3 :
Principaux ratios financiers retraités par la chambre
en milliers d'euros
2016
2017
2018
2019
2020
2021
(provisoire)
Moyenne
2016-21
Moyenne
2019-21
CAF brute retraitée
-10 282
-5 747
7 592
47 979
38 546
56 520
22 435
47 682
CAF nette retraitée
-27 237
-22 989
-7 986
32 411
23 027
44 281
6 918
33 240
Encours dette au 31/12
171 697
154 455
138 877
123 309
118 790
139 801
141 155
127 300
Ratio de désendettement
-16,7
26,9
18,3
2,6
3,1
2,5
6,3
2,7
Ratio de désendettement
net de la trésorerie
15,6
17,1
18,6
1,5
1,6
1,1
4,4
1,4
Taux d'épargne brute
retraité
2,2%
-1,1%
1,4%
11,6%
9,7%
13,7%
4,9%
11,7%
Source : chambre régionale des comptes
Ainsi, sans même tenir compte des aides exceptionnelles de l’Etat, la CTG a dégagé une
CAF brute annuelle moyenne retraitée de plus de 20 M€ depuis sa création. Cette
moyenne est de presque 50
M€
pour les trois derniers exercices (2019 à 2021). La CAF
retraitée a toujours été positive depuis 2017. Son érosion en 2020 (-19,7 %) est en ligne
avec l’évolution moyenne des régions et collectivités territoriales uniques (
-21,6 %). La
CAF retraitée atteint 56,5
M€ en 2021 (+46,6
% par rapport à 2020, progression
supérieure au +13,9% de la moyenne des régions et CTU).
Depuis sa création, la CTG a réduit sa dette financière de 40
M€. Son ratio de
capacité de
désendettement (nombre d’années de CAF brute nécessaires pour rembourser sa dett
e)
s’améliore
significativement. Il était de 2,5 ans en 2021, contre 5,7 ans pour la moyenne
des régions et collectivités territoriales uniques. Les nouveaux emprunts prévus en 2022
ne mettent pas la collectivité en risque. Le ratio précité net de la trésorerie implicite,
c’est
-à-dire en ajoutant le solde de trésorerie auquel est décompté le montant des mandats
en instance,
s’établit à
1,1 an en 2021. Dit autrement, l’épargne d’une seule année suffirait
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
12
à la collectivité pour rembourser totalement sa dette nette. Une telle performance est de
nature à lui attirer des conditions de financement intéressantes de la part des banques.
Le
taux d’épargne brute, rapport entre la CAF brute et les RRF et qui est considéré comme
satisfaisant entre 8 et 15 %, se redresse nettement à partir de 2019
: il s’élève à 11,7
% en
moyenne au cours des trois derniers exercices, contre 4,9 % en moyenne au cours de la
période 2016-2018. Il atteint 13,7 % en 2021 et se rapproche donc de la moyenne des
départements (16,4 %) et des régions et CTU (20,3 %).
Le solde de trésorerie, même corrigé des mandats pris en charge par le comptable mais
non encore payés
, est excédentaire. Au 31 janvier N+1, c’est
-à-dire à peu près au moment
où l’ensemble des dépenses de l’année N ont été réalisées,
ce solde duquel sont déduits
les mandats en instance dépasse les 60
M€ en moyenne au cours des 3 derniers exercices,
ce qui représente 2 mois de charges courantes.
Tableau n° 4 :
Trésorerie de la CTG
en milliers d'€
2016
2017
2018
2019
2020
2021
moyenne
2019-21
trésorerie au 31/01/N+1 (yc mandats en instance)
11 484
56 204
-2 091
52 986
57 825
77 524
62 778
en nombre de jours de charges courantes
9
41
-1
53
57
74
61
Sources : comptable public et chambre régionale des comptes.
La forte dégradation ponctuelle du
solde en 2018 s’explique principalement par une
dynamique des dépenses d’investissement cette année
-là (+16
M€), en partie par
rattrapage, sans que les recettes d’investissement ne suivent (
-47
M€ par rapport à 2017,
dont le niveau était particulièrement élevé ; -2,5
M€ par rapport à 2016). Au cours des
années suivantes, la CTG a su mettre en place un programme pluriannuel
d’investissement (
PPI)
globalement solide, avec des recettes d’investissement évoluant
positivement et peu ou prou parallèlement aux dép
enses d’investissement.
Malgré un niveau de trésorerie confortable, les délais de paiement sont anormalement
élevés, ce qui traduit un défaut d’organisation administrative (cf. partie 2.2.2).
1.2.2
La collectivité a abordé 2022 avec de réels atouts
1.2.2.1
Des points forts en fonctionnement
, à l’exception des dépenses de personnel
1.2.2.1.1
La bonne tenue des recettes
Les recettes de la CTG sont dorénavant intrinsèquement plus dynamiques que la moyenne
des autres départements et régions françaises et la collectivité jouit de marges de
manœuvre supérieures
,
y compris pour l’intervention économique
. Elle a ainsi pu réduire
de 3 centimes par litre l’accise sur les gazoles et l’essence pour le mois de mars 2022
(coût estimé par la CTG à 0,4
M€).
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
13
Les évolutions récentes (recentralisat
ion du RSA, basculement d’une partie de la DGF en
fraction de TVA, réforme de la fiscalité locale, transfert de l’octroi de mer aux communes
compensé par une dotation de l’Etat, réforme de la péréquation, etc.)
modifient la
répartition des masses entre la
fiscalité, d’une part, et les dotations, participations et
compensations, d’autre part. Les comparaisons pluriannuelles à maille fine perdent leur
sens
, au profit d’u
n examen des montants globaux de la fiscalité et des dotations.
Par exemple, le seul suiv
i du produit de l’octroi de mer
11
conduit à constater une baisse
des recettes pour la CTG de 20,5 % entre 2016 et 2021, soit - 4,5 % par an en moyenne.
En revanche, en incluant la compensation par l’Etat du transfert progressif de l’octroi de
mer aux commun
es, sous forme d’une dotation, les recettes ont augmenté de 24,3
% sur
la période (+14,6
M€), soit 4,4
% par an en moyenne. La forte dynamique de cet ensemble
est la résultante de facteurs évoluant en sens contraire :
-
les événements de 2017 et la crise cov
id de 2020 ont ralenti l’activité, affectant
les recettes d’octroi de mer
;
-
la compensation fixe, non indexée, à 27
M€ du transfert de l’octroi de mer aux
communes érode la dynamique d’ensemble
;
-
l
e taux de l’
octroi de mer régional (OMR) a été porté de 2,5 % à 3 % en 2020,
avec une
réduction concomitante de 0,5 point du taux de l’octroi de mer reversé
aux communes
. Les recettes d’OMR sont ainsi passées de 36
M€ avant la crise
(2019) à 47,9
M€ en 2021 (+11,9
M€).
Jusqu’à 2020, la CTG percevait une part de
taxe sur le foncier bâti (TFB). Le taux était
élevé (32,92 %, 2
e
rang national après le Gers à 33,85 % ; la Martinique était à 19,49 %,
la Corse à 12,55 % et Mayotte à 3,50 % ; la moyenne nationale était de 16,30 %, soit deux
fois moins que le taux guyanais), laissant à la collectivité peu de marges de progression.
Par ailleurs, comme pour l’ensemble des outre
-mer, la mise à jour des bases foncières est
une entreprise délicate en Guyane, dont les résultats sont souvent inférieurs aux espoirs
initiaux, même si les premiers gains sont relativement élevés. La croissance
démographique, la régularisation des bâtis, le dynamisme des constructions et les règles
législatives de revalorisation de l’assiette au rythme de l’inflation sont des facteurs qui
ont tiré le produit de TFB à la hausse au fil des années : le produit de 2020 était 4,5
M€
supérieur à celui de 2016 (+2,7 % par an en moyenne), avec un taux inchangé. Une
augmentation supplémentaire des bases aurait cependant requis un investissement humain
important de la part des services de la CTG
et de la DGFiP, effort qu’ils peuvent
s’épargner avec la
transformation de la TFB en fraction de TVA.
En effet, la part départementale de TFB a été transférée en 2021 aux communes. La même
année, la part régionale de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) a été
supprimée. Toutes deux ont été compensées par une fraction de TVA nationale. En raison
de la dynamique propre de la TVA, qui évolue peu ou prou au rythme de la croissance du
PIB en valeur, c’est
-à-dire inflation incluse, cette compensation est avantageuse pour la
collectivité. La part départementale de la TFB a représenté moins de 45,2
M€ en 2020
;
11
Octroi de mer (alimentant la dotation globale garantie -DGG- imputée en fonctionnement ; les éventuels surplus
d’encaissements par rapport au niveau annuel fixé de DGG constituent le fonds régional pour le développement et l’emploi
-FRDE-
imputé en investissement) et droit additionnel à l’octroi de mer (aujourd’hui appelé octroi de mer r
égional).
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
14
la fraction de TVA qui lui a succédé a rapporté plus de 46,5
M€ en 2021, soit une
augmentation de 3,0
%. La part régionale de CVAE s’était élevée à 11,1
M€ en 2020
;
alors que le produit de cet impôt
s’est replié de 15
% en Guyane en 2021, effet qui ne se
fait plus sentir que sur la part départementale de la CVAE, la fraction de TVA compensant
la suppression de la part régionale de CVAE a offert en 2021 un montant de 28,2 %
supérieur à celui de 2020. En définitive, en cumulant les parts départementale et régionale
de CVAE (fraction de TVA s’agissant de la part régionale), la CTG a bénéficié d’une
augmentation de recettes de 14,4
% en 2021, au lieu d’une réduction de 15
% : la fraction
de TVA lui a apporté un gain de 4,8 M
€.
La part départementale de CVAE est maintenue, mais l’assiette de cet impôt semble peu
dynamique en Guyane au vu de la série statistique 2015-2019 mise en ligne par le service
statistique ministériel des finances publiques : une érosion continue de son montant (y
compris en faveur du bloc communal) dû par les entreprises implantées en Guyane est
constatée entre 2015 (22,3
M€) et 2019 (17,9
M€), soit un repli de 19,7
% quand, au cours
de la même période, le montant national consolidé progressait de 2,3 %.
La fraction de TVA (hors « DGF Région ») constitue en 2021 la première des ressources
fiscales propres
12
de la CTG avec 60,8
M€, soit 25
% du total (242,9
M€). Elle
augmentera de 4,5 % en 2022 (+2,7
M€).
Les deux autres principales ressources fiscales propres de la CTG sont la taxe sur les
carburants (dorénavant «
accise sur les gazoles et l’essence
» : 52,6
M€, soit 21,6
% du
total
) et l’octroi de mer régional (47,9
M€, soit 19,7
%), deux impôts indirects spécifiques
à l’outre
-mer et assez dynamiques.
Alors que le RSA est recentralisé sur son territoire depuis 2019, la CTG a conservé la
possibilité de fixer le taux des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) à 4,5 % (et non
3,8 %), ce qui lui a conféré une recette supplémentaire cumulée de 5,2
M€ de 2019
à 2021
(1,6
M€ en 2019
, 1,4
M€ en 2020, 2,2
M€ en 2021
). Le produit des DMTO (14,2
M€ en
2021) reste très faible : 51
€ par habitant en 2021, alors que la moyenne nationale était de
185
€ par habitant en 2020.
Les impôts directs locaux n’ont rapporté que
5,9
M€ en 2021, soit 2,4
% des ressources
fiscales propres.
L’extension aux autres départements de la recentralisation du RSA est susceptible de
contribuer positivement aux recettes de la CTG. En effet, le reste à charge des allocations
individuelles de solidarité (AIS) est un paramètre important de la péréquation entre
départements. Or, dans la mesure où la CTG n’a plus le RSA dans son propre panier, son
reste à charge
d’AIS
est actuellement relativement et « artificiellement » faible par
rapport aux autres départements
. La situation pourrait changer à l’avenir.
En définitive, la fiscalité est maintenant plus dynamique et favorable à la CTG. La
prospective financière 2021-
2027 adossée à l’accord structurel signé le 18 janvier 2022
12
Ne sont pas considérées comme des ressources fiscales « propres »
: le fonds de péréquation des DMTO (31 M€), le
FNGIR (6,4 M€) et le fonds de péréquation de la CVAE (1,6 M€), soit un total de 39 M€.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
15
prévoyait 278,8
M€ de rec
ettes fiscales en 2021. Or, les recettes fiscales se sont élevées
à 281,9
M€ en 2021, soit 3,1
M€ de plus. Ce montant est supérieur à la cible 2024
escomptée dans la prospective financière.
Les recettes de dotations et participations se sont élevées à 122
M€ en 2021 (sans les
30
M€ de l’accord intermédiaire), contre 120,3
M€ prévus par la prospective financière.
Là encore, le montant est supérieur à celui envisagé en 2024 dans la trajectoire.
Dans sa réponse aux observations provisoires, l’ordonnateur indique que
«
les recettes de
la Collectivité sont certes en croissance absolue plus dynamiques que beaucoup d’autres
régions et départements mais il faut souligner qu’elles restent globalement tr
ès en
dessous du dynamisme démographique
».
La chambre constate cependant que la fiscalité indirecte spécifique (accise sur le gazole
et l’essence et octroi de mer, y compris les 27
M€ compensés par l’Etat) rapporte de
l’ordre de 180
M€ à la CTG
, son assiette locale est dynamique et la collectivité dispose
d’un «
pouvoir de taux ». Les fractions de TVA, elles aussi dynamiques, représentent
environ 60
M€
; les impôts directs locaux, à 6
M€, pèsent peu dans l’ensemble
.
Aussi la chambre ne partage-t-elle pas
le point de vue exprimé par l’ordonnateur. En effet,
aucun modèle ni aucune expérience pratique (dont celle de la CTG sur la période
contrôlée) ne légitime une évolution des dépenses strictement parallèle à l’évolution de
la population. Le périmètre des c
ompétences importe d’abord, ainsi que les modalités
d’exercice
(organisation,
mutualisations,
économies
d’échelle,
externalisation/internalisation, dématérialisation, etc.) et les facteurs structurels et
contraintes diverses (concurrence effective des prestataires, infrastructures en service à
entretenir, proportion de la population âgée dépendante, etc.). La CTG
dispose d’une
trésorerie abondante
, d’une capacité d’auto
-financement solide -même sans les aides
exceptionnelles de l’Etat
- et
d’un taux élevé
de co-financements qui pourraient permettre
d’accroître ses investissements
.
La collectivité a encaissé moins de 0,6 M
€ de produits de cessions en 2021, moins que
les 1,5
M€ prévus chaque année 2021, 2022 et 2023 dans la prospective financière, avant
de baisser à 0,5 M
€ en 2024 puis à zéro de 2025 à 2027. Selon le plan stratégique
patrimonial élaboré en 2021, la CTG dispose d’un parc immobilier
cessible qui pourrait
lui rapporter jusqu’à 125
M€ au cours de la décennie.
De façon plus anecdotique, un certain nombre de dépenses liées au covid 19 (masques,
capacités de
télétravail, …) ont fait l’objet d’une demande de subvention au titre du fonds
social européen qui devrait rapporter à la CTG une recette supplémentaire
d’1,9
M€
en
2022.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
16
1.2.2.1.2
Une maîtrise des dépenses de fonctionnement, sauf des charges de personnel
Tableau n° 5 :
Evolution des dépenses réelles de fonctionnement de la CTG
en milliers d'€
2016
2017
2018
2019
2020
2021
évol
moy
2016-21
évol
moy
2019-21
DRF retraitées
476 824
511 414
522 432
365 154
360 657
355 451
-5,7%
-1,3%
DRF retraitées hors RSA
331 871
361 384
358 464
363 010
360 657
355 451
1,4%
-1,0%
DRF retr hors RSA et hors perso
198 510
219 834
212 722
213 822
205 336
195 424
-0,3%
-4,4%
Sources : comptes de gestion et chambre régionale des comptes.
Les dépenses réelles de fonctionnement (DRF) retraitées et hors RSA (recentralisé en
2019
) n’ont crû que de 1,4
% par an en moyenne entre 2016 et 2021. Le taux de croissance
annuel moyen est même de -1 % de 2019 à 2021 (-1,4 % en 2021).
Ces résultats sont dégradés
par l’évolution des dépenses de personnel, qui progressent de
3,7 % par an en moyenne de 2016 à 2021 (3,6 % en moyenne depuis 2019). Hors charges
de personnel, les DRF retraitées hors RSA ont baissé de 0,3 % par an en moyenne depuis
2016. C
e rythme s’est accéléré sur la période récente
: -4,3 % en moyenne depuis 2019
(-4,8 % en 2021).
Selon la CTG, qui n’a pas précisé le détail de son analyse,
l’effet de la crise covid a été
presque neutre en 2020 (en septembre 2022, elle
n’a
vait pas communiqué à la chambre
l’
éventuel impact sur 2021) :
Tableau n° 6 :
Effet de la crise sanitaire sur les charges 2020 de la CTG
en millions d’€
Chap 011
Chap 012
Chap 65
total
dépenses supplémentaires
4,4
1,5
4,9
10,8
économies
-
4,9
-
5,1
-
10,0
solde sur les charges
-
0,5
1,5
-
0,2
0,8
Source : CTG.
Tableau n° 7 :
Evolution des principaux postes de dépenses selon les comptes de gestion (hors charges
de personnel)
en milliers d'€
2016
2017
2018
2019
2020
2021
évol moy
2016-21
achats et charges externes
59 757
62 526
58 204
58 339
56 433
51 606
-2,9%
contributions obligatoires
33 283
33 494
35 754
34 931
34 052
35 201
1,1%
Subventions
53 117
66 235
67 352
68 090
66 735
49 669
-1,3%
aides à la personne
159 515
165 529
182 547
21 517
23 274
22 214
-32,6%
dont RSA
144 924
150 030
163 954
2 144
-
-
-100,0%
hors RSA
14 591
15 499
18 593
19 373
23 274
22 214
8,8%
frais de séjour et d'hébergement
30 298
28 778
29 888
27 528
26 843
29 057
-0,8%
charges financières
4 488
4 430
3 335
3 090
3 797
32 328
48,4%
Source : comptes de gestion du comptable public.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
17
Selon les données des comptes de gestion, le montant des achats et charges externes a été
réduit de 8,2
M€ depuis 2016, soit
-2,9 % par an en moyenne, avec une accélération au
cours de la période récente : -3,3 % en 2020 et -8,6 % en 2021. L
’opération immobilière
de 2022 et la réorganisation administrative doivent permettre de consolider la maîtrise
des dépenses, notamment en matière de loyers.
En neutralisant le rattrapage du paiement de la compensation du transfert de la
compétence transport à la CACL, les subventions sont orientées à la baisse depuis 2019 :
- 16,4
M€, soit
- 13,3
% par an en moyenne. A titre d’exemple, les subventions aux
chambres consulaires ont été réduites de 2,4
M€ de 2019 à 2021. Les contributions
obligatoires sont maîtrisées : 0,4 % par an en moyenne de 2019 à 2021, soit moins de
0,3 M
€ supplémentaires (mais +2,4
M€ au profit du SDIS).
Les aides à la personne hors RSA,
composées notamment de l’APA (allocation
personnalisée d’autonomie) et de la PCH (prestation d
e compensation du handicap), ont
crû en moyenne de 6,9 % par an de 2015 à 2021, soit une augmentation de près de 50 %
sur la période (49,4 %). Leur évolution est toutefois erratique, avec même une réduction
de 4,6 % en 2021 (- 1
M€). Par ailleurs, leur poi
ds dans le total des DRF retraitées
demeure faible : 6,2 %.
De surcroît, les autres dépenses à caractère social sont globalement stables. Les frais de
séjour et d’hébergement ont diminué de
4,1 % depuis 2016 (29,1
M€
en 2021 contre
30,3
M€ en 2016
).
La CTG est sortie des emprunts structurés à risque en 2021, avec une contribution de
l
’Etat
de 10
M€ au travers de la subvention exceptionnelle de 2021
. L
’opération a permis
de restructurer la dette avec de nouvelles maturités et des taux d’intérêt plus faibles
. De
l’ordre de 2
M€ de charges d’intérêt seront économisés par rapport aux années
précédentes, montant à ajuster dans les années à venir
en fonction de l’augmentation ou
non du recours à
l’endettement.
En définitive, la CTG maîtrise ses dépenses de fonctionnement, sauf ses charges de
personnel. Hors éventuels restes à réaliser, le chapitre 011 «
Charges à caractère
général
» s’élèvera à 52,6
M€ en 2021, ce qui est 11
M€ inférieur à ce que prévoit la
prospective financière annexée à l’accord structurel et pr
esque 5
M€ de mieux que le
montant constaté en 2020. Dans les mêmes conditions, le chapitre 65 «
Autres charges de
gestion courante
» s’élèvera à 139,2
M€ en 2021, soit un montant 21,4
M€ plus faible
que la cible 2021 prévue par la prospective financière.
Sans mener une réflexion prospective au-delà de 2022, certaines charges de
fonctionnement sont appelées à augmenter, en particulier celles en lien avec les
investissements
comme
les
constructions
d’
établissements
publics
locaux
d’enseignement (
EPLE). Pour cette raison, et afin de maintenir de façon autonome une
CAF au niveau souhaité, la CTG devra maintenir son effort de maîtrise des charges et
l’étendre
aux dépenses de personnel
, conformément à l’engagement pris dans l’accord
structurel. Concernant les collèges et lycées, la collectivité dispose de marges de
mutualisation de ses ressources humaines et de son matériel
; en outre, l’augmentation de
la capacité d’accueil des internats
lui
permet de faire d’importantes économies en mettant
fin au dispositif des
familles d’accueil.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
18
La CTG
devra également s’interroger sur son périmètre d’intervention. Une première
étude réalisée au cours du 1
er
semestre 2021 recensait, hors dépenses d’entretien et
manque à gagner en recettes, 7,4
M€ de charges assumées par
elle pour des services
relevant normalement du bloc communal.
1.2.2.2
Même si les défis et contraintes sont nombreux en investissement, la CTG dispose
également de points forts à faire valoir
Tableau n° 8 :
Dépenses d’équipement et subventions d’équipement versées
par la CTG
en millier
s d'€
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Dépenses d'équipement
33 100
30 864
41 912
49 210
80 901
91 330
Subventions d'équipement versées
18 266
15 245
20 759
14 080
36 922
39 011
Source : comptes de gestion du comptable public.
Les contraintes auxquelles la Guyane doit faire face sont connues et réelles : petitesse et
relatif isolement du marché qui renchérissent les intrants, dynamisme de la population
augmentant les besoins en services publics, éloignement et difficulté d’accès à certaines
parties du territoire, problématique foncière, pluviométrie ralentissant le déroulement des
chantiers, etc.
Pour autant, la CTG peut s’appuyer sur certaines particularités.
Ses opérations
d’investissement
sont largement co-financées
, notamment par l’Etat (et ses opérateur
s,
comme l’Agence nationale de rénovation urbaine par exemple) et l’Union européenne.
Le total des subventions d’investissement reçues de début 2016 à fin 2021 rapporté au
total des dépenses d’équipement sur cette même période
est de 70 %, contre 46 % pour
la collectivité territoriale de la Martinique (CTM), créée le même jour, ou encore 56 %
pour la région de la Guadeloupe. Le différentiel de ratio constaté entre la CTM et la CTG
a conféré à cette dernière un avantage de 77,8
M€ en 6 ans.
Par ailleurs, lor
sque les projets d’équipement, comme
la construction de collèges ou de
lycées
, sont envisagés sur des terrains de l’Etat, ce dernier les cède
systématiquement à
titre gratuit, ce qui réduit le coût des opérations concernées sans que cela ne soit retracé
en subvention.
Aux subventions d’investissement, il convient d’ajouter
les recettes du FCTVA, calculées
avec le taux national de 16,404 %, alors que la TVA est à 0 % en Guyane. Par conséquent,
tout co-financement
d’une opération d’équipement
au-delà de 83,6 % fait gagner de
l’argent à la
collectivité guyanaise.
La CTG bénéficie également d’une recette d’investissement propre à l’outre
-mer et libre
d’utilisation
: le fonds régional pour le développement et l’emploi (FRDE), qui est un
excédent de produit d’oct
roi de mer
de l’année précédente
versé en début d’exercice. De
2016 à 2021, son montant moyen s’est élevé à 6,3
M€. Il sera de
9,6
M€ en 2022
,
confirmant le dynamisme de l’octroi de mer
.
Sur la période 2016-
2021, les dépenses d’équipement se sont élevées e
n moyenne à
54,6
M€ par an. Compte tenu des subventions, du FCTVA et du FRDE,
son « reste à
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
19
charge » était seulement
d’1,2
M€ par an.
La CAF brute retraitée moyenne était 18 fois
plus élevée au cours de la même période.
La CTG
dispose d’un
autofinancement élevé et
d’
un endettement assez faible, ce qui lui
donne des marges
de manœuvre et une meilleure réactivité au sein d’un schéma de
financement fondé sur les subventions : la bonne maîtrise de sa section de fonctionnement
lui permet de disposer de la capacité financière de démarrer plus rapidement ses chantiers
ou de les mener à terme pour ensuite récupérer la totalité des subventions accordées, sur
justificatifs de dépense.
In fine
, le PPI est solidifié et peut voir sa masse augmenter.
La dépendance aux co-
financements, plutôt qu’à l’autofinancement et à l’emprunt,
implique en contrepartie une rigueur accrue dans la conduite des opérations
d’investissement
(cf. partie 2.1.4).
Bien que la CTG puisse davantage recourir à l’emprunt si elle maintient la tendance
de
maîtrise des charges de fonctionnement dans leur ensemble, il serait hasardeux d’abonder
son PPI de projets qui n’auraient pas été soigneusement élaborés,
notamment avec un
montage financier validé et convenablement co-financé.
L’article 7 de l’accord
structurel
signé avec l’Etat le 18 janvier 2022
stipule : «
il est fait
l’hypothèse de l’obtention d’un niveau moyen de participations de 60
% pour le
financement des dépenses d’équipement de type grands projets
». Le taux de
subventionnement apparent du PPI est de 63 %, pour un montant total affiché de
722,4
M€
. En réalité, ce montant
intègre quelques anciennes opérations, aujourd’hui
soldées, et surtout toute une série de projets plus ou moins mûrs, avec une incidence forte
sur leur montage financier, ainsi que des opérations pour lesquelles la CTG intervient en
maîtrise d’ouvrage déléguée ou en cofinancement.
Selon l’ordonnateur, «
les grandes opérations qui ne sont pas en maîtrise d’ouvrage CTG
mais qui ont été contractualisées (notamment avec l’Etat da
ns le contrat de convergence
et de transformation) doivent bien également être financées. Le pourcentage de 63 %
donne donc une vision pertinente des fonds propres de la CTG nécessaires à la réalisation
de la totalité des opérations PPI
».
La chambre ne partage pas cette analyse. En mélangeant ainsi dans sa PPI les projets
qu’elle porte et ceux qu’elle subventionne, la CTG
opère une confusion entre elle et la
Guyane et minore artificiellement le taux de co-financement (rapport entre les
subventions perçues et ses dépenses
au titre des opérations d’équipement
). En effet, ce
faisant, elle ne recense aucun co-financement reçu (au numérateur) pour les opérations
qu’elle subventionne
(dépense au dénominateur), alors même que lesdites opérations sont
d’abord financées par d’autres (Etat, Union européenne, collectivités locales, etc.)
.
En ne retenant que les projets en cours qui ont déjà fait l’objet d’un conventionnement et
qui relèvent directement de la CTG (soit 461,5
M€ d’opérations, et non 722,4
M€),
la
chambre maintient que
le taux de subventionnement du PPI s’élève
bien à 77,3 %, et non
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
20
63 %
13
. La cité scolaire à Saint-Georges-de-
l’Oyapock
, opération à 67,2
M€, est
subventionnée à 100 %. Inversement, quelques opérations ont été lancées sans avoir
préalablement
recueilli
l’intérêt
des
cofinanceurs
et
souffrent
de
taux
de
subventionnement faibles, le plus bas constaté étant 24
% pour l’extension d’un centre
médico-sportif.
Pour ce PPI d’un peu plus de 460
M€, conventionné et r
elevant directement de la CTG,
le « reste à charge » (compte tenu du FCTVA
, mais sans intégrer le FRDE dans l’analyse
)
sera d’un peu moins de 29
M€ au total, sur l’ensemble de l’exécution desdites opérations
pluriannuelles d’investissement. Avec
ses autres ressources, notamment sa CAF brute et
le FRDE, la collectivité dispose de marges financières pour renforcer son PPI.
1.2.3
La CTG ne maîtrise pas ses dépenses de personnel
Tableau n° 9 :
Evolution du chapitre 012
14
, des charges de personnel au sens comptable
15
et des
rémunérations
16
en milliers d'€
2016
2017
2018
2019
2020
2021
évol
moy
2016-21
chapitre 012
133 560
141 727
145 796
150 516
156 068
161 502
3,9%
charges de personnel
133 361
141 550
145 742
149 188
155 321
160 027
3,7%
Rémunérations
99 618
102 945
108 308
111 503
117 581
121 412
4,0%
Sources : comptes administratifs et comptes de gestion
De 2016 à 2021, le chapitre 012 «
Charges de personnel
», premier poste de dépenses de
la CTG (45 % des DRF) a crû de 3,9 % en moyenne chaque année, soit une augmentation
de 20,9
% sur l’ensemble de cette période de
5 années.
Cette évolution est confirmée par l’examen des seules rémunérations, c’est
-à-dire
exception faite des cotisations sociales, des impôts liés aux rémunérations et du personnel
extérieur. Cet agrégat permet de cibler l’évolution sous
-jacente des dépenses de personnel
en se prémunissant de facteurs perturbateurs à la comparaison pluriannuelle, par exemple
les évolutions de la législation sociale et fiscale ou encore l
’éventuel
retard dans le
règlement des charges. Son montant a évolué de +3,3 % en 2021, après +5,5 % en 2020.
Les rémunérations ont augmenté de 21,9 % de 2016 à 2021, soit une progression annuelle
moyenne de 4 %. De 2009 à 2021, les rémunérations du département et de la région puis
13
Le volet « enseignement » du PPI (qui rep
résente presque les 2/3 du PPI) est d’ores et déjà subventionné à 78
%, ce qui
-compte tenu du FCTVA- laisse un « reste à charge » de 5,6
% à la CTG. En excluant de l’analyse les projets qui restent à
conventionner, le taux de subventionnement du volet « enseignement
» du PPI en cours s’élève à 80%, laissant un «
reste à charge »
de 3,6 % à la CTG. Le volet « sécurité civile
» du PPI en cours (construction de centres d’incendie et de secours) est subventionné à
97%, ce qui signifie que la CTG va engendrer u
n gain, net de son apport, de 2,9 M€ en construisant les 4 casernes.
14
Chapitre 012 «
Charges de personnel et frais assimilés
» : débit du compte 64 (charges de personnel), 621 (personnel
extérieur au service), 631 et 633 (impôts, taxes et versements assimilés sur rémunérations). Nota : les crédits du compte 64
(remboursements de rémunérations et charges sociales) sont budgétairement inscrits dans un chapitre de recettes (chapitre 013
«
Atténuations de charges
»).
15
Charges de personnel au sens comptable du terme : débit et crédit du compte 64 (charges de personnel) et débit des
comptes 621 (personnel extérieur au service), 631 et 633 (impôts, taxes et versements assimilés sur rémunérations).
16
Rémunérations : solde du compte 641 «
rémunérations
».
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
21
de la collectivité territoriale ont augmenté de 73 %, soit une hausse moyenne de 4,7 %
par an.
Dans sa réponse aux observations provisoires
, l’ancien président de la collectivité
territoriale de Guyane, M. Rodolphe ALEXANDRE, souligne la complexité de la fusion
de la Région et du Département, ainsi que «
la nécessaire harmonisation des régimes
indemnitaires (et donc des salaires) qui en a découlé
».
L’actuel ordonnateur
rappelle
qu’u
ne « harmonisation » du régime indemnitaire des agents de catégorie C a été
introduite en octobre 2016. Selon ses éléments, cette opération a conduit à des régimes
plus favorables que ceux des catégories B sans pour autant gommer les écarts au sein des
catégories C ; elle a également été particulièrement coûteuse : les primes des agents de
catégorie C ont augmenté de 43 % fin 2016, ce qui a repr
ésenté +3,5 M€ en année pleine.
Le RIFSEEP adopté en 2021 corrige les disparités dans la durée. Son effet inflationniste
est relativement contenu : +750 000
répartis entre 2021 et 2022.
Le nombre de titulaires, de contractuels et de stagiaires en vue d’une titularisation, est
passé selon la CTG de 2 715 en 2016 à 3 229 en 2021, soit 514 agents supplémentaires 5
ans après la fusion. Cela représente une augmentation de 19 % en 5 ans, soit une
croissance annuelle moyenne de 3,5 %.
L’ancien et l’actuel ordonnateurs en expliquent
une partie par des évolutions de périmètre, notamment les 182 contrats aidés transférés
du rectorat en 2019. Toutefois, la croissance sous-jacente des effectifs stables est
supérieure à 2 % par an en moyenne alors que la fusion aurait dû permettre des réductions
d’emplois
.
L’accord structurel
Le 18 janvier 2022, l’Etat et la CTG ont signé cet accord portant engagements
respectifs des parties de 2021 à 2023. L’accord,
qui contient une trajectoire financière
2021-
2025 ainsi qu’une prospective financière 2021
-2027 annexée, est valable à
compter du 1
er
janvier 2022 jusqu’au 31 décembre 2023.
Un soutien de l’Etat (30
M€ en 2021 au titre de l’accord intermédiaire, 40
M€ en
2022, 40
M€ en
2023, appui de l’AFD, réflexion sur des ressources fiscales nouvelles)
est apporté en contrepartie du respect de plafonds de dépenses de fonctionnement, à
périmètre constant.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
22
Le plafond du chapitre 012 fixé par la prospective financière est le suivant :
milliers d'€
2020
2021
17
2022
2023
2024
2025
2026
2027
Evolution
annuelle
2021-
2027
chapitre
012
156 806
160 845
164 245
167 445
171 145
174 284
177 689
180 206
1,9%
18
évol
annuelle
2,6%
2,1%
1,9%
2,2%
1,8%
2,0%
1,4%
Le respect de la
trajectoire des dépenses de gestion s’apprécie de manière globale,
mais tout dépassement des cibles du chapitre 012 doit faire l’objet d’un accord du
comité de suivi.
La CTG s’engage à mettre en œuvre un plan de performance 2021
-2023. Par ailleurs,
l’objectif d’amélioration de la qualité comptable et budgétaire est réaffirmé, tout
comme celui de la mise en œuvre d’une gestion prévisionnelle des emplois, des
effectifs et des compétences (GPEEC) pour la maîtrise des charges de personnel.
Concernant les charge
s de personnel, la CTG s’engage à
:
-
Baisser les effectifs (hors établissements nouveaux, renforcement de
l’encadrement et politique de l’enfance)
;
-
A périmètre constant et hors fongibilité, limiter au strict minimum (78
nouveaux emplois maximum) les
créations d’emploi affectés dans les
nouveaux collèges et lycées, au renforcement de l’encadrement ainsi que
pour la politique de l’enfance.
Selon l
’accord structurel
: «
Les effectifs, de 2 476 postes fin 2020, sont attendus à
hauteur de 2 554 postes en 2026, hors emplois aidés et assistants familiaux
».
17
Observation de la chambre
: la base de départ 2021 est erronée, l’exécution s’élevant à 161,502
M€, soit 0,657 M€ de
plus que le montant indiqué dans la trajectoire de l’accord structurel, traduisant un dérapage en 2021 qui peut s’expliquer p
ar des
motifs co
hérents avec les stipulations de l’accord structurel.
18
Observations de la chambre : en partant des comptes définitifs de 2020, le taux moyen prévu serait de 2 % par an (et non
1,9 %).
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
23
Tableau n° 10 :
Evolution de l’effectif de la CTG
Année
Titulaires
stagiaires
contractuels
sous-total
effectif stable
occasionnels
autres
Total
2016
1 940
28
747
2 715
47
73
2 835
2017
1 930
46
786
2 762
35
73
2 870
2018
1 936
21
874
2 831
100
75
3 006
2019
1 930
26
920
2 876
109
70
3 055
2020
1 975
29
1 195
3 199
27
65
3 291
2021
1 929
16
1 284
3 229
25
67
3 321
Source : CTG.
Parmi les effectifs stables, la part des contractuels est celle qui a augmenté le plus, avec
une croissance de 72 % en 5 ans (+537 agents contractuels).
La CTG n’a pas été en mesure de transmettre des éléments précis et fiables permettant
d’analyser l’évolution de ses effectifs, ce qui reflète les difficultés qu’elle rencontre pour
suivre ses ressources humaines et dénote une mauvaise maîtrise des informations au
travers de son système informatique de gestion. De façon globale, la collectivité affirme
avoir recensé 317 départs définitifs au cours des cinq années 2016 à 2020, hors départs
volontaires indemnisés. Le nombre de recrutements et leur répartition depuis la création
de la CTG
n’ont pas été communiqués à la chambre
.
Dans sa réponse aux observations provisoires, la CTG annonce une baisse des effectifs
de 37 postes entre janvier
2021 et juin 2022, c’est
-à-
dire après l’achèvement de la période
sous revue. L
a chambre n’a pas pu
le vérifier
, la collectivité n’ayant pas transmis de pièces
attestant de cette évolution.
La collectivité ne remplit pas systématiquement les annexes du budget et du compte
administratif relatives à l’état du personnel. Lorsque des informations sont présentes, elles
ne permettent pas d’effectuer une analyse cohérente de l’évolution des effectifs.
Juste avant la création de la collectivité, une étude révélait que le département et la région
employaient 522 ETP dans les fonctions support, dont 84 agents chargés de la sécurité
des sites accueillant du public. Selon la CTG, leur nombre est de 460 ETP début 2022,
dont 52 dans le service « surveillance et accueil
». Il n’est pas certain que le périmètre de
recensement soit rigoureusement le même, notamment en matière de surveillance et
d’accueil, tout comme il n’est pas sûr que la CTG ait inclus les agents chargés de fonctions
support au sein des pôles « métiers », évalués à 60 fin 2015. En définitive,
il n’est pas
possible de savoir si des gains ont été réalisés
sur les fonctions supports. D’ailleurs, aucun
objectif n’a été fixé en la matière, ni avant, ni depuis la création de la
collectivité.
En prenant une hypothèse théorique de croissance des charges de personnel de 2 % / an à
partir de l’exécuté 2015, ce qui aurait été supérieur au résultat donné par l’application du
« GVT-solde » standard (effets « glissement vieillesse technicité » positif et négatif) sur
un
effectif constant (alors que le nombre d’agents aurait dû être réduit après la fusion), la
masse salariale de 2021 aurait été de 13
M€ inférieure à ce qu’elle est. L’économie
cumulée sur la période se serait élevée à 46
M€. Avec une croissance de 1,2
% par an, le
chapitre 012 «
Charges de personnel
» de 2021 aurait été inférieur de 20
M€ à ce qui a
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
24
été constaté. L
’économie
cumulée aurait été proche de 70
M€. La CTG a fait le choix de
ne pas maîtriser ses dépenses de personnel au détriment de son programme pluriannuel
d’investissement.
L’accord structurel signé le 18 janvier 2022 prévoit de renforcer l’encadrement, mais
aussi de recruter des agents pour l’aide sociale à l’enfance et pour les nouveaux EPLE,
deux catégories à plus faible niveau de rémunération
. Ces recrutements doivent s’inscrire
dans un contexte
: l’obligation légale de travail à temps plein de 1
607 heures par agent
n’est pas encore assurée en 2021 et
la CTG vient seulement de définir une cible
organisationnelle et une prospective par pôle, leviers indispensables pour inverser la
dérive incontrôlée de sa masse salariale.
Dit autrement, les marges de gains sont supérieures aux coûts supplémentaires engendrés
par des besoins de service public.
Une piste consistera, par exemple, à
rationaliser le nombre et la doctrine d’emploi des
adjoints techniques territoriaux des établissements d’enseignement (
ATTEE) et des
techniciens des
centres administratifs d’intervention technique (
CAIT) qui interviennent
également, entre autres, dans les collèges et lycées : une forme de mutualisation est
possible
, ce que confirme l’ordonnateur dans sa réponse
aux observations provisoires.
Selon une analyse effectuée par l’AFD au 1
er
semestre 2021, «
les obligations annuelles
des agents de la collectivité sont inférieures de 81 heures au volume légal de
1 607 heures, soit un déficit de 5 %
». Le badgeage mis en place au 2
e
trimestre 2021 a
des effets positifs sur l’assiduité et le collectif de travail. Toutefois, il ne s’applique pas
aux agents au forfait (sur le « terrain
»), qui constituent l’essentiel de la masse salariale
de la CTG. Pour ceux-ci
, il convient de définir les modalités adéquates d’un contrôle
effectif et tracé, responsabilisant le management de proximité et permettant une correcte
information tant du pôle RH que du pôle métier de rattachement. Actuellement, les
absences et congés ne sont pas systématiquement saisis.
Un dépassement de 0,7
M€ est constaté sur les charges de personnel en 2021 par rapport
à la trajectoire 2021-2025. Toutefois, l
’Etat a accepté les retraitements proposés par la
collectivité concernant une quarantaine de recrutements nécessaires et largement
subventionnés (fonds européens et protection de l’enfance), ainsi qu’une charge de
compte épargne-temps mal rattachée.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE __________________
L
a capacité d’autofinancement retraitée de la CTG se redresse et atteint des
niveaux
conformes aux objectifs affichés avec l’Etat, qui s’est engagé dans une démarche
d’accompagnement particulier de la collectivité depuis 2017.
Fin 2021, cette dernière
pourrait, en mobilisant l’intégralité de sa CAF brute et de sa trésorerie, rembourser sa
dette (139,8 M€) en un peu plus d’un an.
Les recettes de fonctionnement présentent des perspectives de croissance. A
l’exception notoire et pr
oblématique des dépenses de personnel, les charges de
fonctionnement sont maîtrisées. Les opérations
d’investissement sont
en moyenne co-
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
25
financées à hauteur de 70 %. La CTG bénéficie
d’autres ressources
favorables (FCTVA
et FRDE).
Premier poste de dépenses de fonctionnement, la croissance de la masse salariale
est insuffisamment contrôlée. Quelques modifications de périmètre, comme le transfert
de contrats aidés du rectorat en 2019, ont accentué la tendance de la période. Les charges
de personnel ont progressé de 3,7 % par an en moyenne alors que le RSA a été centralisé
et que les fonctions supports du département et de la région ont été fusionnées.
2
L’ORGANISATION FINAN
CIERE DE LA CTG
N’EST PAS
PERFORMANTE
2.1
Même si la CTG bénéficie de ressources expertes dans certains
domaines clés, elle souffre d’un pilotage budgétaire déficient
Au-delà des constats ci-
après relatifs au pilotage de la masse salariale et à l’organisation
de la direction des affaires financières (DAF), une coordination des « fonctions supports »
paraît indispensable pour garantir le parfait bouclage entre trois groupes de
problématiques ayant un impact sur le pilotage financier :
-
la gestion RH, incluant la mise à jour de la base informatique puis le maintien -par
l’application de procédures au
quotidien
de
l’exhaustivité et de la fiabilité de ses
informations ;
-
les finances : arbitrages sur les emplois de chaque pôle et directions, pilotage de
la masse salariale, connaissance des risques pouvant avoir un impact financier ;
-
l’informatique
: arbi
trage des priorités de mise en production et d’évolution des
applications.
2.1.1
Le pilotage des 160
M€ de
masse salariale est un impératif
Les dépenses de personnel sont l’enjeu central de la collectivité et le principal levier de
l’accord structurel.
En 2021, le suivi des 160
M€
de la masse salariale était effectué par
le service du suivi budgétaire et de la gestion de la masse salariale
, composé d’un seul
agent
19
et rattaché au pôle des ressources humaines. Ce service a été dissous au 2
nd
semestre 2021. Ses tableaux de bord et documents produits correspondaient à un suivi de
la consommation des crédits du chapitre 012, effectué
à partir d’extractions issues du
progiciel de gestion, et non
d’une véritable prospective. Le tableau de bord mensuel
présentait la cons
ommation des crédits ainsi que les entrées et sorties d’agent
s en fin de
19
Ce service d’un seul agent
était rattaché à la direction « prospective RH et relations sociales » du pôle RH.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
26
mois. Ces documents
n’étaient
transmis qu’au DGA ressources humaines et à son
adjointe, sans exploitation particulière.
La direction des affaires financière ou le service rémunération
20
du pôle RH suivent
occasionnellement les dépassements de crédits, mais leur
démarche n’est pas anticipatrice
et aucune coordination
n’existe pour un pilotage
budgétaire de la masse salariale.
La collectivité doit mettre en place une organisation pour suivre et piloter les emplois et
les crédits du chapitre 012, notamment en définissant
des indicateurs d’aide à la décision
à destination de la direction générale et en
s’appu
yant sur des relais au sein des pôles.
La collectivité a transmis, dans le cadre de sa réponse aux observations provisoires, son
«
rapport annuel de mise en œuvre 2021 de l’accord structurel
». Daté du 20 mai 2022, il
contient les mentions suivantes : «
Il y a
[…]
d’importants doutes sur la fiabilité de la
mesure des indicateurs […] tirés du SIRH. […] On ne peut que constater que le pilotage
reste insuffisant et l’organisation de la RH (gestion des postes et effectifs et indicateurs)
reste un enjeu majeur de l’année 2022.
[…] La base ressources humaines est encore
insuffisamment fiabili
sée. Ces indicateurs de pilotage sont donc aujourd’hui insuffisants
et incohérents.
»
Recommandation n°1 :
Pour répondre aux engagements de l’accord structurel
en matière de gestion des ressources humaines, mettre en
place
une organisation chargée d’établir et de suivre les
indicateurs nécessaires au pilotage des emplois, des
effectifs et des crédits de la masse salariale.
2.1.2
Un pilotage au sein de la direction des affaires financières à renforcer
La DAF est structurée en deux blocs :
-
« Stratégique », avec trois services : budget, fiscalité et gestion financière ;
-
« Comptable », avec trois services chargés de
l’exécution des dépenses
(hors
marchés, sur marché et dépenses sociales) et un service des recettes.
Pas plus que le pôle RH ou que la mission du pilotage et de la performance (MPP), aucun
des trois services « stratégiques » de la DAF ne participe aux dialogues de gestion dans
le cadre de la préparation budgétaire.
La direction des affaires financières
n’effectue pas de pilotage budgétaire
de la masse
salariale, et n
’était pas destinataire des tableaux de suivi réalisés
jusque mi-2021 par le
service du suivi budgétaire au sein du pôle RH.
20
Le service rémunération appartient à la direction « gestion statutaire du personnel », sur un site éloigné du siège de la
CTG et sans relations avec la direction « prospective RH et relations sociales ».
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
27
L’ensemble
« stratégique » de la DAF doit développer des outils de suivi et de
prospectives budgétaires afin d’améliorer le pilotag
e budgétaire
, qui est une œuvre
collective.
L’objectif est de m
ieux articuler et faire vivre le pilotage budgétaire, en
s’appuyant notamment sur les relais renforcés au sein des pôles
métiers, alors que les
agents exerçant des missions financières sont auj
ourd’hui éparpillés dans les pôles
.
2.1.3
Un besoin d’harmonisation de la gestion des subventions versées et de
centralisation de l’information
La CTG co-
finance, avec l’Etat ou l’Europe, des projets d’investissement de collectivités
locales ou d’organismes
rattachés.
Les subventions d’investissement versées s’élèvent en
moyenne à 24
M€
par an, soit un total de presque 145
M€
au cours de la période 2016-
2021. En 2021, elles ont représenté 39,3
M€.
La collectivité a établi un règlement budgétaire et financier qui prévoit, sauf avenant, un
délai d’un
an
à l’attributaire
pour démarrer les travaux. A défaut, elle est censée annuler
la subvention accordée. Le règlement prévoit également un délai de 3 ans pour
l
’achèvement
des travaux, sauf disposition particulière. Un remboursement de la
subvention est prévu au prorata de la réalisation des travaux.
Des pratiques différentes sont constatées selon
les pôles en matière d’élaboration des
conventions, conduisant parfois à des entorses au règlement financier. Certaines
conventions de financement ne présentent pas de conditions au versement du solde de la
subvention.
D’autres
ne fixent pas de limite de durée à
l’achèvement des travaux
pour
permettre ce versement.
L
’élaboration d’une convention
-type est nécessaire. Si une dém
arche d’
harmonisation de
la procédure d
’élaboration et de suivi
des conventions est entamée, sans avoir abouti pour
l’instant, la CTG ne dispose pas d’u
ne vision agrégée et fiable
de l’état d’avancement des
subventions versées et restant à verser. La DAF ne dispose pas non plus de suivi lui
permettant de s’assurer du respect des termes de la convention avant le mandatement. Des
états des paiement effectués existent, mais pas de suivi des échéances.
L’examen d’un fichier transmis par la CTG, partiellement fiabilisé et à l’exhaustivité non
garantie, conduit à constater les ordres de grandeur suivants concernant les dossiers de
subventions d’investissement depuis 2015
:
-
presque 1/3 des dossiers recensés sont en fait soldé ; 20 % le sont depuis 2018 ;
-
55 % des dossiers non soldés
n’ont fait l’objet d’aucun paiement depuis 2018 et
présentent donc une présomption de caducité pour 12,9
M€
; si la caducité est
avérée, la collectivité devrait demander le remboursement de ces subventions ;
-
presque 20
% des dossiers n’
ont jamais donné lieu à un versement, ce qui conduit
à s’interroger sur la qualité de la sélection des demandes de subventions
d’investissement
, voire sur le respect des termes du règlement financier ;
-
un maximum de 29,5
M€ resterait à verser, mais la CTG n’a pas de connaissance
précise du montant à inscrire au budget, le suivi fin des conventions n’étant pas
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
28
centralisé. De ce montant maximum devraient être ôtés quelques doublons et
surtout des opérations caduques qui doivent faire l’objet d’une demande de
remboursement dans les délais de la prescription prévus par la réglementation.
Recommandation n°2 :
Organiser le suivi des subventions
d’investissement
versées par la CTG, en engagement et en exécution.
Les mêmes types d’hétérogénéité des pratiques et de lacunes dans le suivi
des
informations financières sont observées concernant les subventions de fonctionnement
accordées par la CTG aux autres entités, y compris les communes.
Dans sa réponse aux observations provisoires, l
’ordonnateur
indique que «
le logiciel e-
citiz, relatif au portail des subventions, sera déployé au dernier trimestre 2022 dans une
version beta afin de répondre rapidement aux nécessités de centralisation, fiabilisation
et exhaustivité d’enregistrement des demandes des administrés pour les campagnes 2022
-
2023
».
2.1.4
Une
programmation des dépenses d’investissement en décalage avec les
capacités de réalisation de la CTG
Tableau n° 11 :
Taux d’exécution
: consommation des crédits par rapport aux prévisions totales
Catégorie
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Dépenses de fonctionnement
95,0%
93,4%
95,1%
84,7%
88,1%
87,4%
Recettes de fonctionnement
99,4%
92,4%
98,5%
94,4%
89,9%
100,5%
Dépenses d’investissement
66,9%
62,8%
52,4%
53,8%
63,8%
61,2%
Recettes d’investissement
57,5%
81,7%
44,5%
59,1%
61,3%
58,7%
Source : compte de gestion
L’analyse des prévisions budgétaires comprenant les budgets supplémentaires et
décisions modificatives fait ressortir une qualité moyenne. En effet, les taux d’exécution
en section de fonctionnement dépassent les 90 % sur la période, mais ceux de la section
d’investissement
s’élèvent en moyenne à 60
%. En 2018, le taux de consommation des
crédits d’investissement
était de 52,4 % en dépenses et 44,5 % en recettes.
Les adaptations budgétaires permises par le vote des budgets supplémentaires et décisions
modif
icatives ne permettent pas d’ajuster
correctement les prévisions en matière
d’investissement.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
29
Tableau n° 12 :
Taux d’augmentation
des crédits par les budgets supplémentaires et décisions
modificatives
Catégorie
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Dépenses de fonctionnement
3%
7%
7%
9%
7%
16%
Recettes de fonctionnement
4%
7%
7%
9%
7%
16%
Dépenses
d’investissement
9%
-36%
45%
53%
36%
82%
Recettes
d’investissement
6%
-36%
45%
53%
36%
82%
Source : compte de gestion
Les augmentations de crédits réalisées dans le cadre des budgets supplémentaires ou
décisions modificatives sont limitées en moyenne à 8 % en section de fonctionnement
mais sont supérieurs à 30
% en section d’investissement. Cela traduit des difficultés de
prévision de cette section,
ainsi qu’une pratique d’affichage qui consiste à inscrire des
montants de crédits ambitieux sans convenablement prendre en compte les contraintes et
la capacité opérationnelle à les mettre effectivement en œuvre en cours d’anné
e.
Les interlocuteurs du pôle infrastructure chargés du suivi du PPI expliquent en partie le
taux d’exécution relativement moyen de la section d’investissement par
des aléas
juridiques et opérationnels
: occupations illégales, proximité d’une décharge,
forte
pluviométrie, etc. Le
nombre réduit d’entreprise
s de BTP sur le marché guyanais limite
la conduite simultanée de
chantiers d’importance.
Au cours de la période sous revue, la CTG a engagé la construction 7 nouveaux
établissements d’enseignement
21
. Fin 2021, aucun n’était encore livré
; la réception des
travaux est programmée de 2022 à 2025.
Au regard de ces éléments, la collectivité devrait adapter sa programmation pluriannuelle
et ses prévisions budgétaires à ses capacités de réalisation.
Dans sa réponse aux observations provisoires, la CTG déclare «
partage[r] l’analyse de
la [chambre] [sur] la nécessité d’améliorer les taux d’exécution en investissement
».
Ancien
et
actuel
ordonnateurs
insistent
sur
les
contraintes
économiques
et
environnementales de la Guyane soulignées par la chambre. Le président en exercice
reconnaît que le «
marché restreint [du territoire guyanais] a du mal à absorber plus
d’une certaine part de commandes publiques (volume)
».
Recommandation n°3 :
Adapter la programmation budgétaire des opérations
d’équipement
en tenant compte des capacités réelles
d’exécution
.
21
A ces
opérations de constructions s’ajoutent une quinzaine d’extensions d’EPLE.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
30
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE __________________
L’organisation interne de la collectivité territoriale
montre une insuffisance de
coordination et de pilotage dans le domaine des finances et des ressources humaines.
Ce constat est à l’origine de dysfonctionnements qui
, à terme, ont des incidences
financières.
Avec 160
M€ en 2021, les dépenses de personnel sont le principal poste de
charges de la CTG (45 % des DRF). Or, leur pilotage est inexistant ou très insuffisant.
La collectivité n’a pas la connaissance précise de ses effectifs et de l’incidence sur ses
crédits des décisions prises en matière de recrutement. Les effectifs stables ont augmenté
de plus de 500 agents entre 2016 et 2021, soit + 19 %.
La DAF doit étoffer son pilotage budgétaire pour avoir une vision prospective de
la situation financière et fournir des éléments d’aide à la décision.
La CTG a établi un règlement financier qui régit les conditions de versement des
subventions, mais son application n’est pas toujours respectée par les services
instructeurs. Ainsi des versements sont effectués en dépit des règles de caducité prévues
dans la convention. La collectivité doit harmoniser les pratiques, assurer une
centralisation automatisée de l’information et demander le remboursement de la
subvention dès lors que les stipulations de la convention ne sont pas respectées par
l’attributaire.
Sur toute la période de contrôle, le taux d’exécution budg
étaire est correct en
fonctionnement mais faible en investissement, malgré les ajustements effectués par les
budgets supplémentaires. La collectivité doit adapter ses prévisions budgétaires et sa
programmation des travaux en tenant compte des réelles capacités de réalisation.
2.2
Malgré des
améliorations sur lesquelles s’appuyer, la CTG
gagnerait à réorienter sa stratégie en matière d’exécution
financière
2.2.1
La recherche de la qualité budgétaire et comptable doit être mieux
structurée pour être plus efficace tout en allégeant la charge globale des
services
Dans le rapport précité de 2019, la Cour des comptes relevait plusieurs anomalies
significatives, relatives :
-
au nécessaire apurement de certains comptes de bilan : travaux exécutés pour le
compte de tiers défaillants (comptes 454 : solde débiteur de 217,8
M€
) ;
immobilisations en cours (comptes 23 : 520
M€
) ; encaissements en attente
d’émission de titre (comptes 471)
;
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
31
-
à l’obligation d’équilibre de
s opérations sous mandat (comptes 458 : solde
débiteur de 20
M€
) ;
-
au principe de prudence, avec l’obligation de
provisionnement des créances
douteuses et admissions en non-valeur, mais également des risques contentieux ;
-
au respect du principe d’indépendance des exercices, avec la nécessité d’un
enregistrement correc
t des charges et produits à l’exercice
;
-
à la fiabilité du référentiel des tiers (créanciers et débiteurs de la collectivité).
2.2.1.1
L
a tenue des comptes ne s’est
que trop partiellement améliorée
L’apurement des comptes de bilan n’a pas été réalisé. A titre d’exemple, l
e solde débiteur
des comptes de travaux exécutés pour le compte de tiers défaillants (compte 454)
n’a pas
varié depuis la création de la CTG. Il renvoie à des opérations anciennes du département
et de la région. Ces travaux ne peuvent être immo
bilisés à l’actif. Afin d’
équilibrer ces
comptes, la collectivité pourrait apporter un financement complémentaire (subventions
d’investissement au
débit du compte 204) pour solder le compte 454 en utilisant la
terminaison 2 relative aux recettes
. L’opérati
on de régularisation est neutre
budgétairement. Ce surplus exceptionnel de subventions d’investissement devra toutefois
faire l’objet d’un commentaire explicatif dans les analyses financières de la section
d’investissement.
Le montant du solde
d’en
-cours d
’immobilisation ne cesse d’augmenter
: 460
M€ en
2015, 700
M€ fin 2021.
Il
est de l’ordre de celui des immobilisations corporelles nettes
(713
M€)
. Un tel montant ne correspond pas à un rythme de renouvellement normal,
même si plusieurs chantiers importants sont toujours en cours, dans un contexte de
rattrapage du niveau des infrastructures.
Les progrès relatifs à la régularisation des encaissements et des paiements sans émission
préalable d’un titre ou d’un mandat ont été tardifs mais réels
: 36,6
M€ d’encaissements
et 1,1
M€ de décaissements à régulariser en clôture 2015
; respectivement 0,15
M€ et
0,15
M€ en clôture 2021
. Néanmoins, certaines lignes à traiter sont présentes depuis
plusieurs années dans l’état de développement des soldes du comptable
et requièrent
d’être
régularisées.
Les opérations
d’investissement «
sous mandat » doivent être équilibrées. Or, le solde
constaté en 2016 montrait que la CTG avait dépensé 17,7
M€ de plus que les recettes
constatées. Loin de tendre vers une résorption, le
déséquilibre s’est creusé et s’élève à
26,5
M€ fin 2021.
Les créances douteuses n’ont pas été provisionnées.
Toutefois, un progrès est attendu
dans le cadre de
l’accord structurel signé avec l’Etat
:
la CTG s’est engagée à enregistrer
30
M€ d’admissions e
n non-valeur, en les répartissant sur 4 exercices (2022 à 2025) par
tranches de 7,5
M€.
La première partie du présent rapport a montré qu’il existait encore des doutes sur la
fiabilité des rattachements à l’exercice.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
32
La collectivité et le comptable public ne
sont convenus d’un plan de régularisation
comptable
qu’
en avril 2021. Les progrès réalisés depuis sont insuffisants. La fiabilisation
des comptes est un axe prioritaire de l’amélioration de la gestion, afin en particulier de
délivrer aux partenaires une information fiable sur la situation patrimoniale et financière.
Les régularisations d’anomalies comptables et certaines opérations de bilan doivent être
mieux lissées dans le temps, selon un mode opératoire structuré. Parallèlement, ou même
avant le traitement du stock à régulariser,
il est nécessaire d’
instaurer des procédures pour
réaliser les enregistrements comptables adéquats au fil de l’eau
22
.
Dans sa réponse aux observations provisoires, l’ordonnateur cite la convention de service
comptable et financier signée avec les services de la DGFiP. La chambre considère que
les CSCF constituent des cadres de collaboration indispensables, mais qu’il convient de
faire vivre au maximum par des actions permanentes intégrées aux procédures de travail.
2.2.1.2
L’absence de fiabilité de la base des tiers pose un risque d’erreurs et de fraudes
Par ailleurs, dans son rapport de 2019, la Cour des comptes avait pointé la problématique
de la fiabilité du référentiel des créanciers et débiteurs, dite « base des tiers ». Celle-ci a
été créée par
l’agrégation de celles de l’ex
-département et
de l’ex
-région.
Le maintien de plusieurs codes pour un même fournisseur pose des difficultés de gestion,
de suivi et de reporting, et peut même conduire à des situations de double paiement. Le
nombre de lignes de la base des tiers est en hausse : plus de 41 100 lignes selon les
informations communiquées par la collectivité, contre 31 500 lignes constatées dans le
rapport de la Cour précité. Si la création de tiers est un phénomène normal (nouvelle
entreprise, par exemple), les doublons - souvent hérités des collectivités préexistantes-
sont nombreux. Le niveau élevé du nombre de tiers et sa progression à un rythme soutenu
(+30
% en moins de trois ans) est un indicateur d’absence de procédure de
mise à jour
continue.
En mars 2021, la CTG a décidé de centraliser la gestion de sa base des tiers au service
« gestion financière » de la DAF. Cette décision cohérente
s’avère insuffisante dans la
mesure où les habilitations au profil permettant la création et la modification de tiers dans
l’outil informatique n’ont pas été restreintes
: les services « comptables » de la DAF
peuvent toujours modifier un tiers, ce qui n’est pas conforme aux standards de contrôle
interne pour lutter contre les erreurs et fraudes aux virements et ne correspond pas à une
organisation opérationnelle efficiente.
Dans sa réponse aux observations provisoires
, l’ordonnateur considère qu’un contrôle de
cohérence suffisant est effectué dans HELIOS entre le RIB et le bénéficiaire de la
22
Les règles budgétaires et comptables applicables par la CTG (instruction M57) prévoient notamment l’amortissement
prorata temporis
, dès la date de mise en service : rien ne
justifie d’attendre les opérations de clôture comptable pour transférer les en
-
cours d’immobilisations (comptes 23) en comptes d’immobilisations en service (comptes 21). Dès lors, une procédure de travail
convenue entre la DAF et les services métiers doit
permettre de s’assurer que la mise en service comptable est naturellement intégrée
dans l’enchaînement des tâches des agents, sans effort particulier. Il peut par exemple être choisi d’instaurer une base part
agée
(inventaire) dans laquelle la DAF intégrera
it systématiquement la durée d’amortissement applicable et par défaut la date de mise en
service dès la validation du décompte général et définitif, pièce qui figure dans le dossier de mandatement. La DAF communiquerait
ainsi la mise en service au comptable au plus près du fait générateur et la gestion des amortissements serait sécurisée et allégée.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
33
dépense. Or, c
es contrôles ne sont qu’une alerte et une aide
: ils sont « non bloquants » et
ne sont pas infaillibles. Ils ne dispensent pas l'ordonnateur de procéder au contrôle des
nouveaux RIB présentés par les tiers déjà référencés ; surtout, ils ne concernent pas ceux
des nouveaux tiers, dont le contrôle relève exclusivement de
l’ordonnateur
.
Recommandation n°4 :
Pour sécuriser les opérations de dépenses, restreindre les
droits d’accès à
la base des tiers à un petit nombre
d’
agents, distincts de ceux chargés du mandatement.
2.2.2
Une organisation de la chaîne de la dépense non performante
2.2.2.1
Des délais globaux de paiement qui pénalisent le tissu économique
La qualité de la gestion financière d’une collectivité se mesure également à la
performance de la chaîne de la dépense, en particulier au respect des délais de paiement
des fournisseurs.
Les dispositions de l’article R.
2192-10 du code de la commande publique (CCP) fixent
le délai de paiement des fournisseurs à trente jours.
Les articles L. 2192-13, R. 2192-31 et D. 2192-35 du CCP prévoient que le retard de
paiement ouvre droit :
-
à des intérêts moratoires (IM) dont le taux est égal au taux d'intérêt appliqué par
la Banque centrale européenne à ses opérations principales de refinancement,
majoré de huit points de pourcentage ;
-
et à une indemnité forfaitaire (IF) de 40
pour frais de recouvrement.
Alors que la CTG liquide bien les pénalités de retard de ses co-contractants lorsque ceux-
ci ne respectent pas les échéances d’exécution opérationnelle contractuellement prévues,
elle
ne paye jamais d’intérêts moratoires ni d’indemnités forfaitaires pour frais de
recouvrement.
Un examen réalisé le 18 février 2022 sur l
’état d
es factures émises en 2021 donne les
résultats suivants :
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
34
Tableau n° 13 :
Délais de paiement et intérêts de retard des factures reçues par la CTG en 2021
nombre
Montant
(millions €)
% en
nombre
% en
montant
IF dus
(milliers €)
IM dus
(milliers €)
total dû
(milliers €)
factures reçues par la CTG en 2021
19 243
185,4
dont factures payées en 2021 (y
compris journée complémentaire)
17 127
165,9
89%
89%
factures "payées" mais sans date de
paiement
134
7,3
1%
4%
1,3
21,5
22,8
(1)
autres factures payées au-delà du délai
de 30 jours
5 407
63,2
32%
38%
216,3
392,2
608,5
pour info, factures payés au-delà de 60
jours
1 990
16,4
12%
10%
dont factures non payées au
31/01/2022
2 116
19,5
11%
11%
84,6
335,8
420,4
(2)
total hors délai
7 657
90,0
40%
49%
302,2
749,5
1 051,7
Source : CTG
(1) il
s'agit d'un minimum, sous l'hypothèse d'un paiement à la date du mandatement (ce qui n’est presque jamais le cas, de manière
générale).
(2)
il s'agit d'un minimum, sous l'hypothèse d'un paiement au 2 février 2022 (ce qui n’est pas le cas
,
pour tous les cas d’espèce).
Le taux de paiement des factures 2021 hors délai réglementaire est facialement de 32 %
et le délai moyen de paiement des factures 2021 ressort à 32 jours en 2021, ce qui peut
donner le sentiment que la situation est globalement satisfaisante.
Toutefois,
les 32 jours précités ne sont qu’u
ne moyenne qui, en outre, ne prend en compte
ni les factures non payées antérieures à 2021, ni celles de
2021 non encore payées à l’issue
de l’exercice.
En outre, aux factures qui apparaissent clairement en dépassement du délai de 30 jours
dans le logiciel informatique, il convient d’ajouter
:
-
les factures réglées au-delà de 30 jours,
mais dont la date de paiement n’est pas
enregistrée dans
le système d’information financier
, empêchant le calcul
automatisé des intérêts moratoires ;
-
les factures non payées au 31/01/2021 et qui dépassent d’ores et déjà toutes le
délai de 30 jours.
Ainsi, avant même la prise en compte des factures non payées antérieures à 2021, dont le
nombre de jours de dépassement du délai réglementaire sera forcément très élevé, le
montant minimum des intérêts de retard dépasse le million d’euros (1,05
M€). Il s’agit
bien d’un minimum, sous les hypothèses prudentes rappelées en note sous le tableau.
En définitive, près de la moitié (49 %) des montants facturés en 2021 sont payés hors
délais. Ce résultat n’est pas satisfaisant pour la 6
ème
année suivant la création de la CTG
et alors même que la dématérialisation de la chaîne de la dépense est mise en œuvre. Il
traduit une marge de progrès organisationnel encore inexploitée.
Au 1
er
février 2022, le logiciel de suivi des factures recensait 3 850 factures non payées
et comportant une date d’émission ancienne de plus de 30 jours, pour un montant total de
51,2
M€. 1
600 de ces factures ont été émises antérieurement à 2021, donc avec un délai
global de paiement
qui dépasse de plus d’un an le délai réglementaire ; leur montant
représente 22,4
M€. Les plus anciennes datent de 2011
: 7 factures d’un montant total de
80 000
€.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
35
Dans l’hypothèse
où l’ensemble des factures non payées recensées dans le logiciel de la
CTG seraient
effectivement dues, le montant des intérêts moratoires qu’elles ont d’ores
et déjà générés s’élève à plus de 4,6
M€ au 2 février 2022.
Ce montant ne prend pas en
compte tous les intérêts moratoires déjà dus sur les factures antérieures à 2021, payées en
retard, en 2021 ou avant.
Recommandation n°5 :
Conformément aux dispositions de l’article L.
2192-13
du code de la commande publique, verser aux
fournisseurs les intérêts moratoires et les indemnités
forfaitaires dus au titre du dépassement du délai global
de paiement.
Les délais excessifs de
paiement et l’absence de règlement des intérêts moratoires
sont
d’autant plus incompréhensibles que la CTG dispose d’u
ne trésorerie particulièrement
abondante. La désorganisation administrative de la collectivité a ainsi des conséquences
négatives sur le tissu économique local.
La CTG
n’
a pas mis fin au règlement de nombreuses
factures au cours d’exercices
suivants. 28,2
M€ de factures 2020 et 1,2
M€ de factures antérieures à 2020
, certaines
datant de 2015,
ont été mandatées en 2021. L’attention
de la collectivité est attirée sur la
nécessité
d’améliorer le circuit de traitement de ses factures (certification du service f
ait
et mandatement) afin d’avoir une vision la plus exhaustive et contemporaine possible de
son passif circulant.
Les défauts organisationnels rétroagissent sur la qualité de la direction stratégique de la
collectivité. Ainsi,
l’absence d’assurance raisonnable sur l’exhaustivité de la
comptabilisation des dépenses dues empêche la CTG de mobiliser des ratios financiers
classiques comme la trésorerie nette tirée de la soustraction du besoin en fonds de
roulement au fonds de roulement net global.
2.2.2.2
Une organisation interne insuffisamment intégrée en matière de dépense
La CTG a réussi à dématérialiser sa chaîne de la dépense : sauf exceptions, les factures
sont bien déposées sur le portail CHORUS-Pro
23
; les mandats et pièces justificatives sont
dématérialisés ; la signature électronique est effective. Quelques réglages restent toutefois
à opérer : dématérialiser les bons de commande et transmettre les flux informatiques
relatifs aux pièces de marché public avant ou concomitamment
à l’émission des mandats
les concernant.
En dépit du levier de la dématérialisation, les délais de traitement internes à la collectivité,
qu’il s’agisse de la certification du service fait ou du mandatement, ne sont pas bons.
23
Mise en place par l’Etat afin de répondre aux obligations légales en matière de facturation électronique, CHORUS
-Pro
est la solution mutualisée de facturation
, ainsi que de dépôt, de suivi du traitement et d’archivage des factures, pour tous les
fournisseurs de la sphère publique (Etat, collectivités territoriales,…).
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
36
Aux termes des dispositions de l’article 12 du décret n°
2013-269 du 29 mars 2013 relatif
à la lutte contre les retards de paiement dans les contrats de la commande publique, le
délai de traitement par les services de l’ordonnateur, de la réception de la facture jusqu’au
mandatement, doit être inférieur à 20 jours, les services du comptable public disposant de
10 jours pour contrôler et payer le mandat.
Pour respecter le délai réglementaire de 20 jours imparti à l’ordonnateur, il est
généralement admis que la certification du service fait doit se faire en moins de 15 jours
et la liquidation-
mandatement en moins de 5 jours. S’agissant des seules factures 2021 et
pour lesquelles les données de l’extraction du logiciel de la CTG paraissent cohérentes
(environ 17 550 factures concernées), le délai de certification du service fait dépasse
20 jours dans 33 % des cas (environ 5 850 factures) et le délai de mandatement dépasse
10 jours dans 19 % des cas (environ 3 310 factures). Ces pourcentages sont des
minimums : ils ne portent que sur les factures pour lesquelles les données extraites
paraissent cohérentes et ils n’incluent pas les 1
600 factures antérieures à 2021 qui ne sont
toujours pas mandatées.
Au sein de la collectivité, les acteurs de la dépense sont nombreux et éparpillés, avec un
pourcentage de leur temps de travail dédié aux opérations financières qui peut être faible
et ainsi nuire tant à leur professionnalisation qu’à la priorité de ces tâches
:
-
nombre d’agents chargés de préparer le budget et d’en suivre l’exécution
:
68 agents pour 17,8 ETP ;
-
nombre d’agents chargés de l’engagement des AP et du pré
-engagement des CP
dans le logiciel de gestion financière : 105 agents, dont 16 effectuent cette tâche
pour au moins 30 % de leur temps de travail, pour un total de 19 ETP ;
-
nombre d’agents attestant le service fait
: environ 220 agents (
nombre d’
ETP non
connu, cette activité étant accessoire pour les agents concernés) ;
-
nombre d’agents chargés de
saisir la certification du service fait et de liquider les
dépenses dans le logiciel de gestion financière, hors paie : 125 agents, dont 60
effectuent cette tâche pour au moins 30 % de leur temps de travail, pour un total
de 44,2 ETP ;
-
nombre d’agents intervenant au titre de la gestion des factures et du référentiel des
fournisseurs (7 agents), ainsi que du mandatement dans le logiciel de gestion
financière (21 agents), pilotés par le responsable de la direction des affaires
financières : 29 agents, soit 27 ETP, tous à la DAF.
Sans compter les fractions d’ETP des agents chargés de l’attestation du service fait (hors
outil informatique et à la frontière du « métier »), 433 mandats ont été traités par ETP en
2021, soit moins de 2 mandats par jour travaillé.
La CTG envisage
une mutualisation des opérations d’exécution de la dépense au sein
même des pôles « métiers ». Ces équipes spécialisées récupéreraient les tâches de
mandatement aujourd’hui réalisées par les «
services comptables » de la DAF.
Parallèlement, celle-ci
exercerait une responsabilité fonctionnelle sur l’ensemble des
opérations.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
37
La spécialisation d’agents en matière d’
exécution de la dépense est souhaitable pour
sécuriser
la chaîne, raccourcir les délais et redonner des marges de manœuvre à
l’organisation pour d’autres tâches comme le pilotage budgétaire ou tout simplement les
«
cœurs de métiers
» des pôles. Il apparaît
toutefois qu’en partant de l’existant
administratif, il est plus cohérent, réaliste, efficace et économe de rechercher cette
spécialisation par le regroupement des agents chargés de la gestion des factures et du
mandatement.
Dans ce cadre, la CTG peut s’interroger sur la mise en place d’un service facturier
.
Le service facturier
Le service facturier, ou SFACT, est une organisation de la chaîne de la dépense qui
mutualise les contrôles respectifs des services de l’ordonnateur et du comptable pour
limiter le
ur redondance. Ce dispositif est prévu par l’article 41 du décret du
7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.
Le SFACT est le centre unique de traitement et de paiement des factures. Sous la
responsabilité du comptable public, il fonctionne avec une équipe mixte composée
d’agents issus de la DGFIP et de la collectivité. Sa mise en place ne modifie pas la
séparation
de l’
ordonnateur et du comptable.
Le SFACT permet de professionnaliser et fluidifier la chaîne de la dépense,
d’optimiser l’utilisation des crédits et des délais de paiement, d’améliorer les relations
avec les fournisseurs et de consolider la qualité comptable.
2.2.3
L’organisation relative aux rece
ttes doit être revue
2.2.3.1
Des régies délaissées
Une régie de recettes permet à
un régisseur, nommé par l’ordonnateur, d’encaisser les
recettes énumérées dans l’acte constitutif de la régie
, à la place et pour le compte du
comptable public.
Ce dispositif
permet d’encaisser de façon souple des recettes de proximité et donc
d’abonder rapidement la trésorerie de la collectivité.
Il existe 8 régies de recettes à la CTG, la principale et de loin étant celle des transports
scolaires qui mobilise 19 mandataires (13,5 ETP pour cette régie).
Le responsable actuel de la DAF ne s’est pas interrogé sur le fonctionnement des régies
de recettes de la collectivité
et considère qu’elles relèvent des pôles et directions métiers.
Pourtant, elles sont, de manière générale, des organisations perméables à la fraude. En
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
38
considérant ce risque, l’ordonnateur doit mettre en place et s’assurer de l’effectivité d’un
dispositif de contrôle adéquat
24
.
De plus, la CTG gagnerait à dresser un bilan coûts/avantages de la régie des transports
scolaires. Cette régie encaisse environ 1
M€ par an, ce qui ne permet que difficilement de
couvrir la masse salariale des agents de la régie et ses coûts de fonctionnement
(immobilier, entretien, électricité, informatique, téléphonie, eau). Dit autrement, les
encaissements ne financent pas le service de transport scolaire, mais exclusivement une
fonction support qui ne devrait normalement représenter qu’un petit pourcentage du
montant recouvré. I
l conviendrait de revoir l’organisation et les procédures, dont l’un des
fils conducteurs sera l’incitation à la dématérialisation
des moyens de paiement et des
justificatifs.
2.2.3.2
Une désorganisation de la gestion des recettes préjudiciable à la situation
financière de la collectivité et au recouvrement de celles-ci
En matière de recettes, la collectivité souffre d’une absence
de responsabilités claires, de
pilotage, d’anticipation et de vision d’ensemble.
La DAF comprend un service
« recettes » composé de 4 agents dont son responsable. Elle ne connaît pas les faits
générateurs de recettes, ce qui affecte la prévision, le suivi et l’exécution budgétaire.
Le
défaut
de procédure efficace produit une déperdition d’énergie et de temps pour les agents
de la CTG, notamment lors des recherches d’informations pour la régulari
sation
budgétaire et comptable des encaissements en compte d’attente.
La collectivité
n’émet
que très irrégulièrement voire pas du tout ses titres de recettes en vue du recouvrement
des montant concernés : elle « subit » ses recettes, se contentant de comptabiliser
budgétairement les versements effectués. La perte de ressources est vraisemblable, mais
son amplitude difficile à évaluer.
A titre d’illustration
, plusieurs subventions exceptionnelles, dotations ou compensations
versées par l’Etat n’ont été enregistrées qu’
in extremis
au cours de la période, alors que
les fonds avaient été versés plusieurs mois avant.
Par exemple, les 5 M€ de l’accord
intermédiaire de 2019 n’ont été comptabilisés que le 29 janvier 2020 et les 27
M€ de
compensation de transfer
t d’octroi de mer de 2021 ont été enregistrés le 13 janvier 2022
.
Par ailleurs, les erreurs d’imputation budgétaire
et comptable sont fréquentes. La dotation
globale de fonctionnement versée en 2017 par l’Etat s’élevait à 52
547 418
€.
Or, les
comptes de 2017 affichent 48 387 854 de DGF, soit un écart de 4,2
M€, résultat d’une
probable imputation erronée
; l’écart n’a en tout cas pas été reporté, les montants
comptabilisés budgétairement les années suivantes pour cette dotation étant en ligne avec
les somme
s versées par l’Etat
.
24
Cf
. 1
er
alinéa de l’
article R. 1617-17 du CGCT : «
Les régisseurs de recettes, d'avances ainsi que de recettes et d'avances
ainsi que les régisseurs intérimaires et les mandataires sont soumis aux contrôles du comptable public assignataire et de l'ordonnateur
ou de leurs délégués auprès desquels ils sont placés.
»
En outre, la jurisprudence récen
te de la Cour de discipline budgétaire et financière a rappelé l’importance du contrôle de
l’ordonnateur sur ses régies
: arrêt n° 198-719 du 10 avril 2015, Établissement public de coopération culturelle «
L’Autre canal
» ;
arrêt n° 216-784 du 13 octobre 2017, Opéra national de Bordeaux.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
39
Diverses erreurs ont aussi été identifiées en matière de fiscalité. La somme des écarts de
comptabilisation par rapport au suivi extra-comptable du spécialiste « fiscalité » de la
DAF
s’élève à 88,1
M€
en valeur absolue sur la période (18
M€ en solde).
En raison d’un renseignement défectueux de ses déclarations de FCTVA, la CTG s’est
privée de 5 M€ au titre de cette dotation de l’Etat pour les seules années 2019 et 2020
(respectivement 0,3
M€
non perçus en 2020 et 4,7
M€ en 2021)
.
Ces exemples de dysfonctionnements
dans l’organisation des recettes expliquent la
lourdeur et la fragilité
25
des travaux d’analyses financières rétrospectives et prospectives
que voudrait faire la collectivité. Une remise en ordre des procédures est une condition
indispensable pour parvenir à une assurance raisonnable sur l’exhaustivité et la fiabilité
des montants enregistrés et de leur imputation, donc un préalable à toute prise de décision
stratégique en matière de recettes.
Les directions opérationnelles ont récemment assez bien intégré la nécessité de chercher
des co-financements pour leurs projets.
Toutefois, en l’absence de partage d’information
,
la DAF
n’a aucune vision d’ensemble
sur les recettes possibles et à venir, raison pour
laquelle elle a f
ormulé début 2021 l’expression de besoin d’un espace informatique
partagé dans lequel les services métiers pourraient déposer les conventions ouvrant droit
à des subventions. En complément,
une mission d’
assistance
technique de l’AFD a
proposé la création
d’un «
service financements et recettes », regroupant les acteurs de la
recette pour la recherche de financements, le suivi des conventions et la gestion
comptable.
L
a création d’un service «
financements », spécialisé dans la prospection, le montage des
dossiers et
le suivi des conventions en lien avec la vie des projets d’un point de vue
« métier », doit être encouragée pour sécuriser et mieux gérer les subventions
26
.
Compte tenu de tous les dysfonctionnements observés, la chambre invite la collectivité à
mettre en place un service spécialisé pour la gestion budgétaire et comptable des recettes,
mutualisant les ressources du comptable public et du service « recettes » de la DAF.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE __________________
La CTG
n’a pas complètement tenu compte des observations
du rapport de la
Cour des comptes de 2019.
La collectivité et son comptable public ne sont convenus d’un
plan de régularisation comptable qu’en avril 2021. Les progrès réalisés depuis sont
insuffisants. La
fiabilisation des comptes est un axe prioritaire de l’amélioration de la
gestion, afin en particulier de délivrer aux partenaires une information fiable sur la
situation patrimoniale et financière de la collectivité.
25
Fragilité méthodologique mais également en matière de traçabilité, les agents de la CTG devant élaborer leurs propres
suivis et retraitements extra-comptables sur fichiers Excel, dont la sécurisation, la consolidation et
l’archivage commun ne semblent
pas être assurés.
26
Un tel service serait l’interface des pôles et directions métiers pour la prospective et le pilotage budgétaire. Un
adossement au service chargé du suivi du PPI pourrait être une piste à étudier, surtout s
i le PPI inclut plus systématiquement l’ensemble
des projets d’investissement, au
-delà du seul pôle Infrastructures.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
40
L
’absence de
fiabilité du fichier fournisseurs et la possibilité offerte à des agents
qui, par ailleurs, effectuent les opérations de mandatement d’intervenir dans celui
-ci,
sont susceptibles d’entrainer des erreurs et des fraudes
.
Près de la moitié (49 %) des montants facturés en 2021 sont payés hors du délai
réglementaire de 30 jours. La CTG ne s’acquitte pas des intérêts moratoires dus à ses
fournisseurs. Cette situation est d’autant plus incompréhensible qu’elle bénéficie d’une
trésorerie élevée.
Pour la chambre, la spécialisation d’agents en matière d’exécution de la dépense
est souhaitable pour sécuriser la chaîne, raccourcir les délais et redonner des marges de
manœuvre à l’organisation pour d’autres tâches comme le pilotage budgétaire.
La CTG doit mettre en place un dispositif de c
ontrôle adéquat des régies d’avance
conformément aux dispositions de l’article R.
1617-17 du CGCT. Pour limiter leurs coûts
de gestion, la piste de la dématérialisation (prélèvement, facture/reçu dématérialisé)
devrait être explorée.
Enfin, la gestion déf
iciente des recettes n’est pas sans incidence sur la situation
de la collectivité.
A titre d’exemple, le montant de FCTVA perçu en 2021 est inférieur
d’environ 4,7
M€ à ce que la CTG aurait pu attendre
.
Pour une gestion efficiente et sécurisée des recettes, la collectivité est invitée à
mettre en place un service spécialisé.
SITUATION FINANCIERE DE LA COLLECTIVITE TERRITORIALE DE GUYANE
41
RECOMMANDATIONS
(classées dans l’ordre de citation dans le rapport)
Recommandations (régularité)
Totalement
mis en
œuvre
Mise en
œuvre en
cours
Mise en
œuvre
incomplète
Non mis
en
œuvre
Page
Recommandation n
o
5 :
Conformément
aux
dispositions de l’article L.
2192-13 du code de la
commande publique, verser aux fournisseurs les intérêts
moratoires et les indemnités forfaitaires dus au titre du
dépassement du délai global de paiement
X
35
Recommandations (performance)
Totalement
mise en
œuvre
Mise en
œuvre en
cours
Mise en
œuvre
incomplète
Non mise
en œuvre
Page
Recommandation
n
o
1 :
Pour
répondre
aux
engagements de l’accord structurel en matière de
gestion des ressources humaines, mettre en place une
organisation
chargée d’établir et de suivre les
indicateurs nécessaires au pilotage des emplois, des
effectifs et des crédits de la masse salariale
X
26
Recommandation
n
o
2 :
Organiser
le
suivi
des
subventions
d’investissement
versées par la CTG, en
engagement et en exécution
X
28
Recommandation n
o
3 :
Adapter la programmation
budgétaire des
opérations d’équipement
en tenant
compte de
s capacités réelles d’exécution
X
29
Recommandation n
o
4 :
Pour sécuriser les opérations
de dépenses, restreindre
les droits d’accès à
la base des
tiers
à un petit nombre d’
agents, distincts de ceux
chargés du mandatement
X
33
NOTICE DE LECTURE
SUR L
’AVANCEMENT DE LA MISE EN ŒUVRE DES RAPPELS AU DROIT ET
DES RECOMMANDATIONS
Les recommandations de régularité (rappels au droit) et de performance ont été arrêtées après examen des réponses écrites et des pièces justificatives
apportées par l
ordonnateur en réponse aux observations provisoires de la chambre.
Totalement mise en
œuvre
L
’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre la totalité des actions ou un ensemble complet d’
actions permettant de répondre
à la recommandation, même si les résultats escomptés n
ont pas encore été constatés.
Mise en œuvre en
cours
L
’organisme contrôlé affirme avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires au respect de la recommandation et indique
un commencement d
exécution. L
organisme affirme, de plus, avoir l
intention de compléter ces actions à l
avenir.
Mise en œ
uvre
incomplète
L
’organisme contrôlé indique avoir mis en œuvre une partie des actions nécessaires sans exprimer d’
intention de les compléter
à l
avenir.
Non mise en œuvre
Trois cas de figure :
-
l’
organisme contrôlé indique ne pas avoir pris les dispositions nécessaires mais affirme avoir l
intention de le faire ;
- ou il ne précise pas avoir le souhait de le faire à l
avenir ;
- ou il ne fait pas référence, dans sa réponse, à la recommandation formulée par la chambre.
Chambre régionale des comptes de la Guyane
Parc d’activités La Providence –
Kann’Opé –
Bât. D - CS 18111
97181 LES ABYMES CEDEX
adresse mél. : antillesguyane@crtc.ccomptes.fr
www.ccomptes.fr/fr/antilles-guyane
12/12/2022
0175
CRTC
ANTILLES-GUYANE
GREFFE - ARRIVEE