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COMMUNIQUÉ DE PRESSE
30 juin 2022
Rapport public thématique
QUEL DÉVELOPEMENT POUR MAYOTTE ?
Dix ans après la création du département, et alors que le Gouvernement a enchaîné les plans
en sa faveur, la situation de Mayotte demeure atypique au sein de la République. En
soixante ans, l’archipel a vu sa population multipliée par 12 et compte aujourd’hui la plus
forte densité de population de la France d’outre-mer, en raison à la fois d’une croissance
endogène très dynamique et d’une immigration clandestine élevée. En parallèle, la période
qui a suivi la départementalisation a vu, malgré un réel rattrapage du niveau de vie de ses
habitants, une forte dégradation des conditions de sécurité et de la qualité de vie
(transports, eau, environnement, logement). La délinquance a atteint un niveau tel, que la
sécurité est devenue la première préoccupation des habitants. En matière d’éducation, le
retard est également difficile à résorber, alors que la moitié de la population ne parle pas
français. Dans le rapport publié ce jour, les juridictions financières (Cour des comptes et
chambre régionale des comptes de Mayotte) soulignent que les services de l’État et du
département ne parviennent pas à apporter les solutions attendues par les mahorais sur les
plans sociaux, économiques et sociétaux. Pour contribuer à mener une réflexion stratégique
sur le développement durable de Mayotte, la Cour formule des recommandations visant
notamment à consolider l’action des pouvoirs publics et à renforcer la lutte contre
l’immigration clandestine.
Face aux défis du développement du territoire, les institutions locales peinent à consolider
leurs actions
Si les institutions locales peinent à asseoir leurs actions de développement, c’est notamment
parce que les services de l’État à Mayotte font état de difficultés de recrutement des cadres
administratifs qui, en outre, ne restent pas en poste suffisamment longtemps pour assurer
correctement la continuité de leurs actions. Par ailleurs, la préfecture ne dispose pas des
moyens et de l’organisation propres à assurer son rôle de pilote et de coordonnateur de l’action
de l’État, car indépendamment des difficultés de recrutement, le contexte d’urgences
récurrentes empêche le service préfectoral d’inscrire son action dans la durée et de bâtir ou de
piloter des projets à la hauteur des enjeux locaux. De son côté le département doit conforter
ses fonctions en matière de ressources humaines, de contrôle de gestion et de systèmes
d’information pour disposer du socle de gestion garantissant la bonne mise en
œ
uvre des
politiques contractualisées. Dans le cadre de précédents rapports, la chambre régionale des
comptes de Mayotte avait formulé des recommandations sur le suivi de la délégation de service
public du port de Longoni, sur le désordre foncier et l’adressage des propriétés, sur le pilotage
par l’État de la départementalisation, ainsi que sur la programmation pluriannuelle de
l’engagement financier de l’État et des équipements publics. Or, ces recommandations n’ont
été que peu ou partiellement suivies par le département et l’État, ce qui a affecté le suivi des
plans de développement et le redressement du département.
Les plans de développement de l’État : des engagements ambitieux, une mise en
œ
uvre
inégale
Alors que le plan de « Mayotte 2025 » de 2014 comprenait une feuille de route consensuelle,
et que celui de 2018 prévoyait des dépenses de l’État à hauteur de 1,3 Md
, certaines des
mesures rapidement engagées ont été interrompues au gré de changements politiques ou de
préfet. Ainsi, le suivi du plan « Mayotte 2025 » s’est interrompu au bout d’un an, et s’agissant
du plan de 2018, il n’existe aucun document de suivi mis à jour ni de données d’exécution de
celui-ci, hormis un tableau renseigné par la préfecture à la demande de la Cour. Dès lors, si les
engagements pris par l’État sont substantiels, il reste difficile d’apprécier le montant de l’effort
additionnel consenti. L’action publique à Mayotte se déploie par à-coups, sans que le chaînage
entre un plan et le suivant soit établi. Car ni la préfecture de Mayotte, ni la direction générale
des outre-mer ne disposent d’équipes se consacrant au suivi de ces plans et, dans ces
conditions, les services déconcentrés et centralisés de l’État ne sont pas incités à produire des
documents de suivi ou à documenter leurs actions.
Les réponses de l’État n’ont pas apporté toutes les solutions attendues
Dans le plan de 2018 pour l’avenir de Mayotte, la majorité des réponses apportées par l’État
aux revendications mahoraises portaient sur l’ordre public. Or, les statistiques relatives à la
délinquance montrent que la situation continue de se dégrader sur ce plan. En outre, les
réponses aux problématiques d’ordre social demeurent lacunaires : l’offre de soins reste
inférieure aux standards nationaux, la construction des logements demeure très en deçà des
besoins (39 % des habitats sont précaires) et des difficultés d’accueil dans les établissements
scolaires persistent (221 d’entre eux étant saturés). La politique d’aménagement du territoire
montre elle aussi d’importantes limites. Seule une action de l’État résolue, dotée des moyens
techniques et financiers nécessaires et pilotée avec constance pourra réduire l’écart avec les
standards
métropolitains.
Sans
remettre
en
cause
la
départementalisation
ni
la
décentralisation, l’État doit renforcer sa capacité à conduire le développement du territoire,
dans une gouvernance associant le département et les autres collectivités. Il doit également
assumer son autorité lorsque c’est nécessaire, ce qu’il fera d’autant mieux que ses propres
engagements auront été tenus.
Lire le rapport
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