Compte d’affectation spéciale
Participations financières de
l’État
Note d’analyse de l’exécution
budgétaire
2020
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
3
Compte d’affectation spéciale
« Participations financières de l’État »
Programme 731 – Opérations en capital intéressant les
participations financières de l’État
Programme 732 – Désendettement de l’État et d’établissements
publics de l’État
Graphique n° 1 : Compte d’affectation spéciale « Participations
financières de l’État » - exécution 2020 (CP, en M
€
)
Source : Direction du Budget
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
5
Synthèse
La Cour a analysé l’exécution budgétaire de la mission
« Participations
financières
de
l’État »,
retracée
par
le
Compte
d’affectation spéciale du même nom (CAS- PFE), au titre de l’exercice
2020 marqué la crise sanitaire et les conséquences qui en ont été tirées par
la voie de lois de finances rectificatives.
Les conséquences de la crise sanitaire sur l’exécution
budgétaire 2020
La crise sanitaire a d’abord entrainé la suspension du projet de
privatisation du groupe Aéroports de Paris (ADP), résultant en une
annulation de 6 980 M
€
de crédits par la première loi de finances
rectificative, dont les 2 Md
€
prévus pour contribuer au désendettement de
l’État.
La deuxième loi de finances rectificative a créé au sein de la mission
« Plan
d’urgence
face
à
la
crise
sanitaire »
le
programme
358 « Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État
dans le cadre de la crise sanitaire », doté de 20 Md
€
de crédits. Ce
programme vient abonder le programme 731 du CAS-PFE « Opérations en
capital intéressant les participations financières de l’État » au fur et à
mesure des opérations de soutien des entreprises jugées stratégiques et
fragilisées.
L’aide d’urgence est ainsi venue financer quatre opérations de
renforcement des fonds propres et quasi fonds propres principalement
d’entreprises du secteur des transports, très affecté par la crise.
Les deux premières opérations concernent Air France-KLM,
soutenu par un prêt d’actionnaires à hauteur de 3 Md
€
(complété par un
prêt garanti par l’État de 4 Md
€
) et d’une souscription au fonds Ace Aero
partenaires (150 M
€
) pour le soutien de la filière aéronautique civile.
Deux autres opérations financées dans ce cadre relèvent de
considérations qui ne se limitent pas à l’urgence.
La SNCF ainsi reçu un peu plus de 4 Md
€
dans le cadre d’une
opération complexe associée à un schéma budgétaire faisant revenir les
crédits d’urgence sur un programme classique pour contribuer à financer
les investissements de SNCF réseau. Le soutien de l’État s’inscrit ainsi
dans une stratégie de long terme ou de soutien ne relevant qu’indirectement
ou de façon insuffisamment explicite de l’urgence liée à la crise sanitaire.
6
COUR DES COMPTES
Le financement à partir de ce même programme de la souscription
par l’État à une émission d’obligations convertibles EDF (OCEANE) pour
1 Md
€
en septembre 2020 vise à soutenir la stratégie de développement du
groupe en matière de transition énergétique. Si la crise sanitaire a fragilisé
la situation financière et influé sur les notations de cette société cotée, il
reste difficile de distinguer dans les besoins de financement de l’entreprise
ceux qui sont effectivement liés à la crise et ceux propres à sa situation
générale et à sa stratégie.
Par ailleurs le CAS a versé en 2020 1,9 Md
€
au fonds pour
l’innovation et l’industrie (FII) pour un objet éloigné de la politique de
l’État actionnaire, réduisant d’autant ses marges budgétaires pour exercer
sa mission par ses seules ressources propres.
La poursuite de la perte de substance du CAS PFE
Les conséquences de la crise sanitaire modifient l’équilibre du CAS.
En effet, sur les 10 920 M
€
de recettes enregistrées sur le CAS en 2020,
8 304 M
€
proviennent du programme 358 du budget général. Côté
dépenses, sur les 11 701 M
€
de crédits consommés sur le programme 731,
8 084 M
€
correspondent à des opérations d’urgence en soutien à des
entreprises fragilisées par la pandémie de Covid-19. Ce poids de la crise
sur la gestion 2020 fait du CAS PFE, plus encore que les années
précédentes, un véhicule de dépense alimenté par le budget général et
faiblement par ses ressources propres. En dehors des aides d’urgence, du
programme d’investissements d’avenir (PIA) et du fonds pour l’innovation
et l’industrie (relevant d’une logique propre), les opérations du CAS qui
correspondent à des affectations de recettes propres ne représentent que
5 % des dépenses en 2020.
Le solde du CAS au 31 décembre 2020 s’établit à 2 455 M
€
,
l’exercice de l’année étant déficitaire de 782 M
€
. Ce montant offre une
marges de man
œ
uvre pour financer en 2021 d’autres opérations en capital
que celles d’ores et déjà prévues et censées être couvertes par le report du
programme 358 (11,7 Md
€
).
La crise confirme que l’utilisation du CAS PFE est soumise à des
contraintes de plus en plus fortes. Les marges dont dispose l’APE pour
mettre en
œ
uvre avec cet instrument la politique de l’État actionnaire se
trouvent en réalité très réduites : du côté de l’actif, la situation pour les
années à venir sera largement déterminée par les besoins financiers
nécessaires au redressement d’entreprises fragilisées par la crise ; du côté
du passif, le CAS est largement dépendant des versements du budget
général, ayant vu ses ressources propres réduites à peu de choses sans doute
pour un certain temps. Le portefeuille d’entreprises de l’État sera en sortie
de crise encore plus concentré sur des secteurs fragilisés et surtout sur EDF
(47 % du total de la valeur des participations cotées de l’État début 2021).
L’État est ainsi exposé à un risque de concentration inédit et préoccupant.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
7
L’opération La Poste montre les limites d’une analyse
strictement budgétaire via le CAS PFE
En dehors de l’aide d’urgence, l’exécution 2020 montre deux flux
notables sur le CAS pour lesquels une analyse uniquement budgétaire
apparaît insuffisante. Elle confirme, comme la Cour l’a déjà écrit, que le
CAS, qui n’est qu’un instrument budgétaire, ne suffit pas pour apprécier
correctement la performance de la gestion des participations financières
l’État.
En recettes, la constitution du grand pôle financier public autour de
la Banque postale a conduit l’État, en plusieurs étapes, à réduire sa
participation au capital de La Poste au profit de la Caisse des dépôts et
consignations (CDC), l’équilibre étant désormais de 34 % pour l’État et de
66 % pour la CDC. Cette opération très structurante, qui s’est traduite par
une recette en numéraire pour le CAS d’un peu plus de 1 Md
€
, a reposé en
réalité principalement sur des apports de titres de CNP assurances à La
Poste entraînant, après une augmentation de capital de cette dernière, une
dilution de la part de l’État. Dans cette opération très complexe, la question
principale des valorisations respectives de La Poste et de CNP assurances
(respectivement 7 Md
€
et 13,7 Md
€
) ne peut s’analyser au travers du seul
flux sur le CAS. La NEB comporte une description de l’opération, qui
montre la nécessité de bien apprécier, dans l’examen des opérations sur les
participations financières de l’État, non seulement les impacts budgétaires
– c’est-à-dire en fait en trésorerie – mais aussi les incidences comptables
qui sont en fait plus importants (cf. la suppression de l’écart d’équivalence
sur la participation dans La Poste de 3,8 Md
€
, avec une incidence du même
montant sur les capitaux propres de l’État).
Le deuxième flux, plus modeste, résulte de la cession par l’État à la
CDC de tous ses titres de la SFIL pour 300 M
€
. Ces deux opérations
combinées ont représenté une recette pour le CAS de 1 362 M
€
.
Le constat renouvelé de l’inutilité du Fonds pour l’innovation
et l’industrie
En dépenses, le principal flux hors aide d’urgence est constitué par
un versement du CAS au Fonds pour l’innovation et l’industrie (FII). Ce
versement de 1,9 Md
€
, qui n’avait pu être effectué en 2019, a été permis
par le produit de la privatisation partielle de la Française des jeux (FDJ),
opérée fin 2019. Il a permis à l’APE de reprendre 2 % du capital d’EDF
apporté en dotation au FII à sa constitution en 2018.
Pour la troisième année consécutive, la Cour a procédé à un examen
approfondi du FII, d’où il résulte que cet instrument, dont l’utilité était déjà
contestable, a vu sa viabilité même remise en cause par la crise sanitaire.
8
COUR DES COMPTES
Le modèle de financement du FII reposait sur les privatisations de FDJ et
d’ADP, dont les recettes attendues (de l’ordre de 10 Md
€
) auraient permis
de compléter la dotation en numéraire initiale de 1,6 Md
€
et ainsi de
reprendre les titres EDF et TSA prêtés par l’APE. La suspension du
processus de privatisation d’ADP a rendu le schéma caduc. Le fonds reste
donc majoritairement constitué de titres EDF et TSA, ce qui ne permet plus
de garantir un niveau de recettes proche de l’objectif de 250 M
€
annuels.
L’absence presque totale de dividendes en 2020 a fortement réduit le
rendement du fonds, qui n’a pu mobiliser que 125 M
€
de ressources pour
financer l’innovation, soit la moitié de l’objectif. Confirmant sa position
constante depuis 2018, la Cour recommande de nouveau la suppression du
FII et l’inscription des dépenses dans le budget général.
Une cohérence d’ensemble du CAS PFE et de la mission
budgétaire remise en cause
Depuis plusieurs années, des changements sont intervenus dans
l’environnement de la politique de l’État actionnaire portée par le CAS. La
crise n’a fait qu’accentuer les choses, mettant en lumière l’inadaptation de
la mission budgétaire par rapport à une accumulation d’objectifs et
d’instruments qui poursuivent en fait des finalités différentes de l’objectif
initial assigné au CAS en 2006. La mission se trouve déséquilibrée du fait
de la disparition
de facto
(mais jamais assumée politiquement) du
programme 732 censé désendetter l’État grâce aux recettes du programme
731. Depuis le lancement du PIA 3 et d’autres actions relevant davantage
de la politique industrielle que de la gestion d’actifs financiers, le
programme 731 et le CAS se trouvent utilisés pour des opérations
capitalistiques dont les objectifs, les durées d’investissement, les modalités
de décision, de mise en
œ
uvre et de suivi sont spécifiques. La justification
du CAS PFE comme instrument d’affectation de recettes à des dépenses
dans un cadre d’interventions bien identifié paraît ainsi s’affaiblir. La Cour
recommande dès lors que la justification du CAS PFE soit réexaminée et
que sa structuration en programmes et les conditions de son utilisation
soient adaptées en conséquence.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
9
RECOMMANDATION
Recommandation
(APE, DGE, DB)
:
Substituer au fonds pour
l’innovation et l’industrie un dispositif de soutien à l’innovation
inclus dans le budget général
(recommandation reconduite).
10
COUR DES COMPTES
Sommaire
Introduction
...................................................................................
11
1
LES FAITS MARQUANTS D’UNE EXÉCUTION 2020
HORS NORMES
.......................................................................
13
1.1
Un périmètre de la mission plus large que le périmètre de
l’APE
....................................................................................
13
1.2
Une exécution bouleversée en recettes et en dépenses
.........
15
1.3
L’incidence sur le CAS des cessions de participations dans La
Poste et la SFIL
....................................................................
25
2
LES EFFETS DE LA CRISE SANITAIRE SUR
L’EXÉCUTION 2020 DES PROGRAMMES 731 ET 732
....
29
2.1
La contribution du programme 731 à l’aide d’urgence
........
29
2.2
Un programme 732 vidé de sa substance
.............................
35
3
UNE COHÉRENCE D’ENSEMBLE DU CAS PFE À
RENFORCER
............................................................................
37
3.1
Les constats de 2018 et 2019 sur l’évolution du CAS-PFE
demeurent valables
...............................................................
37
3.2
Le CAS PFE et le programme d’investissements d’avenir
(PIA)
.....................................................................................
39
3.3
Le FII : un instrument critiquable à supprimer
.....................
44
Conclusion
.....................................................................................
53
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
11
Introduction
Les participations financières de l’État sont définies dans la
documentation budgétaire comme les droits qu’il détient sur d’autres entités,
matérialisés ou non par des titres, qui créent un lien durable avec celles-ci et
comportent une contrepartie figurant à son bilan. Leur traitement budgétaire
fait l’objet d’une dichotomie inscrite dans la loi organique relative aux lois
de finances (LOLF) : les opérations patrimoniales sont retracées dans le
compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » (CAS
PFE) tandis que les dividendes en numéraire issus des participations
constituent des recettes non fiscales du budget général de l’État
1
.
Le CAS PFE est traditionnellement présenté comme le support
budgétaire de la politique de l’État actionnaire, exercée par le commissaire
aux participations de l’État, directeur général de l’Agence des participations
de l’État (APE). Celui-ci est à ce titre responsable de la mission constituée
de deux programmes :
- le programme n° 731
Opérations en capital intéressant les
participations financières de l’État ;
- le programme n° 732
Désendettement de l’État et d’établissements
publics de l’État
Le périmètre du CAS est toutefois distinct de celui de l’État
actionnaire car il enregistre aussi des opérations situées hors du champ de
l’APE. Mais ces opérations, jusqu’à récemment, restaient relativement
marginales.
Dans un rapport public thématique relatif à l’État actionnaire publié
en 2017, la Cour recommandait de faire évoluer le cadre budgétaire de la
gestion des participations de l’État. En 2019, la loi PACTE
2
a permis la mise
en
œ
uvre de plusieurs cessions de participations. En 2020, la priorité a été
donnée à la gestion de la crise. Le CAS PFE est devenu à cette occasion,
conformément à l’article 21 de la LOLF, le véhicule de prise de
participations de l’État en soutien aux entreprises subissant les effets de la
crise. Il a été financé pour ces opérations par un programme spécifique créé
par la deuxième loi de finances rectificative
3
au sein de la mission « Plan
d’urgence »,
le
programme
358
Renforcement
exceptionnel
des
participations financières de l’État dans le cadre de la crise sanitaire.
1
Les conditions d’utilisation du compte, en recettes comme en dépenses, sont définies à
l’article 48 de la loi de finances pour 2006.
2
Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des
entreprises.
3
Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
13
1
LES FAITS MARQUANTS D’UNE
EXÉCUTION 2020 HORS NORMES
La prévision initiale votée par le Parlement fin 2019 (12,18 Md
€
en
recettes et en dépenses, dont 10,18 Md
€
de dépenses sur le programme 731
et 2 Md
€
sur le programme 732) reposait principalement sur trois
événements structurants déjà connus plusieurs mois à l’avance.
Pour ce qui concerne le portefeuille de participations géré par l’APE,
deux opérations s’annonçaient, au terme de processus engagés depuis
plusieurs années et approuvés par la loi PACTE du 22 mai 2019 :
- d’une part, la cession de la participation de l’État dans ADP, dont le
produit devait servir à abonder le fonds pour l’industrie et l’innovation (FII) ;
- d’autre part, la cession d’une partie de la participation de l’État dans
La Poste dans le cadre de la constitution du grand pôle financier public.
Tout en s’en tenant comme d’habitude à l’indication de montants
notionnels de recettes, l’APE avait avancé dans le projet annuel de
performances (PAP) de la mission, compte tenu des éléments disponibles à
l’époque, un chiffre de produits de cession assez crédible au regard des
estimations qui circulaient déjà dans le domaine public depuis plusieurs mois
sur les valeurs respectives des deux participations. Il convient au demeurant
de souligner cet effort de transparence répondant à un souhait exprimé de
longue date par le Parlement et la Cour
4
.
Le troisième événement bien connu au moment du vote de la loi de
finances
était
le
troisième
versement
au
titre
du
programme
d’investissements d’avenir (PIA) 3, d’un montant de 1,18 Md
€
. Du côté des
emplois du CAS, outre ce reversement des crédits du PIA aux opérateurs
concernés, le plus significatif devait être le versement au FII.
En fait, l’exécution s’est passée en 2020 d’une manière très différente,
du fait avant tout de la pandémie.
1.1
Un périmètre de la mission plus large que le
périmètre de l’APE
Le compte « Participations financières de l’État » retrace les
opérations de nature patrimoniale de l’État liées à la gestion de ses
4
Une estimation proche concernant ADP figurait déjà dans le PAP 2019, la privatisation
étant à l’époque prévue pour 2019 mais ayant été décalée du fait de l’initiative
parlementaire visant à demander un référendum.
14
COUR DES COMPTES
participations financières
5
. Il ne peut donc s'agir que d'opérations réalisées
par l’État actionnaire intervenant en tant qu’investisseur.
L’Agence des participations de l’État, créée par le décret n° 2004–963
du 9 septembre 2004, exerce, en veillant aux intérêts patrimoniaux de l’État,
la mission de l’État actionnaire dans des entreprises dont la liste est fixée par
décret. Ces participations forment le périmètre décisionnel de l’APE même
si l’action du CAS comprend également d’autres opérations. Le périmètre
APE comprend actuellement 85 entités, dont 11 sociétés cotées.
Graphique n° 2 : Principales participations de l’État
Source : Rapport sur l’État actionnaire 2019 – 2020 ; NB : au sein de chaque secteur, la taille des
cercles est proportionnelle à la capitalisation boursière (part de l’État) pour les sociétés cotées
(ronds) et à la valeur des capitaux propres pour les entreprises non cotées (pointillés)
Comme prévu, trois entités sont sorties du périmètre en 2020 :
- CNP Assurances. Depuis l’opération La Poste en mars 2020, l’État
ne détient plus aucune participation dans CNP Assurances ;
- SNCF Réseau et SNCF Mobilités. Les trois établissements publics
industriels et commerciaux (ÉPIC) composant la SNCF (l’EPIC SNCF,
l’EPIC SNCF Réseau et l’EPIC SNCF Mobilités) sont devenus cinq sociétés
5
Les règles de gestion du CAS-PFE sont retracées par l’article 46 de la loi de finances
pour 2006 dans le cadre prévu par l’article 21-1 de la LOLF et précisé par le Conseil
constitutionnel dans sa décision du 29 décembre 2005 (considérants 15 à 33).
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
15
au 1
er
janvier 2020
6
: la Société nationale SNCF SA (société mère), les
sociétés SNCF Réseau, SNCF Voyageurs, Fret SNCF, SNCF Gares &
Connexions. Seule la Société nationale SNCF est détenue en direct et en
totalité par l’État
7
.
Au-delà de ce périmètre de participations gérées par l’APE, le CAS
PFE est utilisé pour des opérations en capital concernant de nombreuses
entités en France et à l’étranger, notamment celles relatives aux banques
multilatérales dont la France est actionnaire. Depuis quelques années, il sert
également pour des prises de participation en fonds propres en soutien de
politiques sectorielles, notamment avec le PIA 3 ou des fonds sectoriels
comme le fonds Definvest (industries de défense) ou, depuis 2020, le fonds
de soutien à l’industrie aéronautique ou le fonds de soutien automobile.
1.2
Une exécution bouleversée en recettes et en
dépenses
1.2.1 Une prévision remise en cause dès le printemps à la suite
de l’abandon de la privatisation d’ADP
Si la procédure de référendum d’initiative partagée a pris fin le
26 mars 2020
8
, la forte baisse de la capitalisation boursière de l’entreprise
dans les jours qui ont suivi le premier confinement rendait irréalisable
l’opération, qui a dès lors été suspendue. Cette perte de recettes a été traduite
au plan budgétaire dans la première loi de finances rectificative pour 2020
(LFR1), qui a annulé 8 980 M
€
de produits de cession attendus et un montant
en dépenses (4 980 M
€
sur le programme 731 et 2 Md
€
sur le programme
732), entrainant une dégradation du solde du CAS, prévu à l’équilibre en loi
de finances initiale, à - 2 Md
€
6
Suite à la loi n° 2018-515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire et à
l'ordonnance n° 2019-552 du 3 juin 2019 portant diverses dispositions relatives au groupe
SNCF.
7
L’entité SNCF Mobilités n’existe plus et l’entité SNCF Réseau est détenue à 100 % par
la Société nationale SNCF.
8
Le Conseil constitutionnel avait annoncé que le nombre de soutiens valables d’un point
de vue légal était de 1 090 570, soit un nombre très inférieur à la proportion d’un dixième
des électeurs nécessaire pour pouvoir poursuivre la procédure.
16
COUR DES COMPTES
Graphique n° 3 : Évolution du cours de bourse d’ADP – en
€
Source : Boursorama
1.2.2 La deuxième loi de finances rectificative et la mise en
place de l’aide d’urgence
via
le programme 358
La loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour
2020 (LFR2) a ensuite apporté un changement important lié à la crise
sanitaire.
Afin de renforcer les moyens financiers d’entreprises stratégiques
jugées vulnérables, le législateur a approuvé la création du programme
« Renforcement exceptionnel des participations financières de l’État dans le
cadre de la crise sanitaire » en le dotant d’un crédit de 20 Md
€
ouvert sur le
budget général
9
. Des crédits ont été ouverts à due concurrence sur le CAS
PFE afin de permettre à celui-ci d’exécuter les dépenses correspondantes
10
.
Les crédits budgétaires ont donc bien été ouverts à hauteur de 20 Md
€
à la
fois sur le budget général et sur le CAS-PFE et le décret n° 2020-479 du
25 avril 2020 vient apporter des précisions sur les programmes concernés
(numéro de programme, ministre disposant des crédits)
11
.
9
État B de la loi du 25 avril 2020 relativement à l’article 9 de cette même loi.
10
État D de la loi du 25 avril 2020, relativement à l’article 10 de cette même loi.
11
Cette double autorisation budgétaire sur un programme du budget général et sur le CAS
PFE s’observe également s’agissant des crédits du PIA 3 finançant les interventions en
fonds propres. Aux 1 180 M
€
ouverts sur le programme 731 (réduits à 1 080 M
€
en
gestion) correspondaient 100 M
€
sur le programme 421, 280 M
€
sur le programme 422,
et 800 M
€
sur le programme 423 (ces trois programmes constituant la mission
Investissements d’avenir du budget général).
0
20
40
60
80
100
120
140
160
180
200
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
17
L’article 22 de la loi du 25 avril stipule que les 20 Md
€
supplémentaires ouverts au titre de l’article 10 (donc sur le CAS –PFE) sont
destinés « à soutenir l'économie en renforçant les ressources des entreprises
présentant un caractère stratégique jugées vulnérables », permettant une
orientation de ces crédits vers les opérations d’urgence.
Une analyse conduite dès le mois de mars par l’APE, le service
d’information stratégique et de sécurité économiques (SISSE) de la direction
générale des entreprises (DGE) et la direction générale du Trésor a conduit
à identifier une vingtaine d’entreprises françaises considérées comme
stratégiques et à tenter de chiffrer leurs besoins de renforcement en fonds
propres. Portant initialement sur les participations de l’APE et de Bpifrance,
l’analyse été élargie aux entreprises figurant dans l’indice SBF 120
12
et à
certaines entreprises non cotées. Elle a été actualisée régulièrement en
exploitant au fil de l’eau l’information financière disponible, dont celle issue
du suivi de la trésorerie des sociétés du portefeuille de l’APE.
Le CAS PFE était déjà apte, avant la crise, à recevoir des recettes
provenant du budget général. La création du programme 358 et son
articulation avec le CAS PFE ne répondaient donc pas à un impératif
juridique, mais procédaient d’une volonté de suivre les opérations liées à la
crise sanitaire.
L’articulation entre les deux programmes, décrite dans le schéma n° 1,
où intervient le contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM),
évite de laisser un montant élevé de crédits en attente d’emplois sur le CAS,
c’est-à-dire hors du budget général. En effet, si ce crédit exceptionnel de
20 Md
€
est ouvert sur le programme 358, il l’est simultanément sur le
programme 731, autorisant ainsi le responsable
13
de ce dernier à engager les
crédits nécessaires, avec dans les faits, un accord préalable du CBCM pour
l’engagement des crédits
14
. Finalement, sur les 20 Md
€
disponibles pour des
interventions d’urgence du CAS PFE, le programme 358 n’a versé sur le
programme 731 que 8,3 Md
€
correspondant aux besoins d’engagements
exprimés en 2020.
12
Regroupant les plus grandes capitalisations boursières françaises.
13
Les programmes 358 et 731 ont le même responsable de programme, à savoir le
Commissaire aux participations de l’État.
14
Hors cette articulation, le CBCM vise déjà tout engagement supérieur à 500 000
€
.
18
COUR DES COMPTES
Schéma n° 1 : Articulation opérationnelle des programmes 358 et 731
Source : Cour des comptes, d’après direction du budget
Au total, les crédits ouverts sur le du CAS PFE en 2020 ont atteint un
montant exceptionnel de 28,44 Md
€
(report de 2019 inclus), mais les recettes
affectées se sont élevées à 10,92 Md
€
, dès lors que seulement 8,3 Md
€
ont
été versés sur le CAS ; le reste des recettes correspond, pour 1,43 Md
€
, à des
produits de cession de participations du périmètre APE, et pour 1,18 Md
€
à
des opérations hors APE (pour l’essentiel, des versements du budget général
pour le PIA 3).
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
19
Tableau n° 1 : Les recettes du CAS PFE en 2020 – en M
€
Opérations relevant du périmètre APE
Budget général (P. 358)
Augmentation de capital de la SNCF
4 050,0
Budget général (P.358)
Avance en compte courant Air France KLM et
appels de fonds du fonds Ace Aéro partenaires
3 150,0
Budget général (P. 358)
Souscription obligations Océane d’EDF
1 104,0
s/s total versement P. 358
8 304,0
CDC
Cession de titres La Poste
1 062,0
CDC
Cession de la SFIL
300,0
SOVAFIM
Cession d'actions SOVAFIM (réduction de capital)
50,0
Consortium de réalisation
Complément de prix SGGP (cession d'actions 2018)
11,0
SOGEPA
Distribution en numéraire suite à réduction du
capital social
10,0
s/s total produits de cession
1 433,0
Opérations hors APE
Budget général (P. 422/P.423)
PIA 3
1 080,0
ADEME
Retour PIA actions « Véhicules du futur »,
« Démonstrateurs
».
40,9
Bpifrance investissement
Distribution fonds national d'amorçage (PIA)
30,0
Bpifrance investissement
Distribution du FFT3 (PIA)
0,8
EPIC Bpifrance
Retour PIA action "Développement de l'économie
numérique", etc.
8,6
CDC
Retour PIA Action « Financement de l’économie
sociale et solidaire » et Action « Capital risque ».
7,8
Budget général (P. 144)
Abondement ministère des armées pour versement
au fonds DEFINVEST.
10,0
Budget général (P. 134 et 185)
Abondement DGT et ministère affaires étrangères
(augmentation de capital SAS INSTEX
15
)
1,3
Budget général (P. 185)
Abondement du ministère aff. étrang. (SAS
INSTEX)
0,2
Mécanisme Europ. de Stabilité
Libération parts transférées à Malte
2,9
s/s total hors APE
1 182,6
Total
10 919,6
Source : APE
15
La société par actions simplifiée (SAS) Instex (
Instrument in support of trade
exchanges
) a été créée en janvier 2019 par la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.
Elle est destinée à favoriser les échanges commerciaux avec l’Iran, sans utiliser le dollar
américain. Son siège social, d’abord situé au ministère de l’économie et des finances
139 rue de Bercy (75012 Paris), a été transféré 25 rue de la Reynie à Paris (75001).
20
COUR DES COMPTES
Graphique n° 4 : Les recettes ordinaires et extraordinaires des
programmes 731 et 358 en 2020, de la LFI à l’exécution - en M
€
Source : Cour des comptes
Sur les 10,9 Md
€
de recettes rattachées au CAS PFE, plus des trois
quarts proviennent du programme 358 et donc du budget général, 11 % de
recettes diverses hors périmètre de l’APE dont l’origine est aussi, pour
l’essentiel, le budget général ; seuls 13 % des recettes correspondent à des
recettes « propres » résultant d’opérations du périmètre ordinaire de l’État
actionnaire. Ces chiffres montrent que la responsabilité de l’APE sur les
recettes – et sur les dépenses – du CAS PFE est de plus en plus partagée, le
CAS devenant un instrument au service de politiques ne relevant pas
exclusivement de la politique de l’État actionnaire au sens où on l’entendait
depuis la création du CAS en 2006.
Enfin, en vertu de l’article 3 de la LOLF, l’imputation budgétaire des
dividendes des participations financières est différente selon qu’il s’agit de
dividendes en numéraire ou en titres. Les premiers sont inscrits en recettes
non fiscales du budget général alors que les seconds augmentent le nombre
d’actions détenues par l’État dont la valeur est inscrite à son bilan. Or, en
2020, les dividendes versés en numéraire sont de 331,7 M
€
, provenant
principalement du groupe Orange (214 M
€
), mais aucun versement en titres
n’a été effectué.
1.2.3 Des dépenses en hausse, uniquement du fait du plan
d’urgence
Le caractère exceptionnel de l’exécution 2020 se retrouve dans le
niveau de dépenses du CAS PFE puisque les dépenses, dépassant 11,7 Md
€
,
sont presque équivalentes à celles des trois dernières années en cumulé.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
21
Graphique n° 5 : Exécution de la dépense de 2016 à 2020 (CP, en
M
€
)
Source : Cour des comptes
Les dépenses effectives correspondent en 2020 principalement
(8,1 Md
€
) à des dépenses d’urgence couvertes par les versements du
programme 358. En dehors des dépenses d’urgence, les dépenses du
périmètre APE sont de 2,47 Md
€
. Encore faut-il souligner que, sur ce
montant, 1,9 Md
€
ont servi à alimenter le FII en numéraire, en substitution
de titres EDF ; la LFI prévoyait un versement du CAS au FII de près de
7 Md
€
, et la dépense est donc sur ce plan très inférieure à la prévision.
Les dépenses hors financement par le budget général (plan d’urgence
et PIA) et hors FII (relevant d’une logique propre) qui sont financées par des
affectations de recettes du CAS PFE ne représentent finalement que 5 % de
l’ensemble des dépenses de 2020. Il s’agit d’avances en compte courant
d’actionnaire pour LFB SA (221 M
€
) et pour Naval group (76,7 M
€
), de
souscriptions à des programmes d’émissions obligataires pour Safran
(89,8 M
€
et 24,5 M
€
), de libérations de capital pour la Société pour le
logement intermédiaire (SLI) de 49,5 M
€
conformément à la souscription
décidée en 2015, de la 4
e
tranche d’un prêt à la société Le Nickel (10 M
€
),
et de deux augmentations de capital nouvelles décidées en 2020 pour
l’audiovisuel public, l’une de 17,7 M
€
pour Radio France et l’autre de 17 M
€
pour France télévisions
16
. Les dépenses du programme 731 sont constituées
presque exclusivement de dépenses d’opérations financières (titre 7).
16
La LFI pour 2021 attribue par ailleurs une dotation exceptionnelle de 70 M
€
à
l’audiovisuel public pour compenser les effets de la crise sanitaire.
22
COUR DES COMPTES
Les dépenses hors périmètre APE sont assez proches de la prévision
inscrite en LFI : 1 080 M
€
pour le PIA 3, 10 M
€
pour le fonds Definvest,
différents versements correspondant à des augmentations en capital de
banques multilatérales
17
pour un total de 53,9 M
€
, enfin 1,5 M
€
au titre de
l’augmentation de capital de la SAS Instex.
Tableau 1 : Détail des dépenses du CAS PFE, en M
€
Opérations relevant du périmètre APE
SNCF
Augmentation de capital SNCF
4 050,0
Air France/KLM
Avance en compte courant d’actionnaire
3 000,0
EDF
Souscription à l’émission d’obligations Océane
1 027,6
Fonds ACE Aéro
Appel de tranche initiale et 1
er
Appel de fonds
6,5
s/s total dép. Covid
8 084,2
LFB SA
Avance d’actionnaire décidée le 17 mai 2019
221,1
Safran
Souscription à 830 083 Oceanes 2027
89,8
Naval group
Avance en compte courant d’actionnaire
76,7
Imprimerie nationale
Augmentation de capital (arrêté du 13 mars 2020)
65,0
SLI
17
e
à 20
e
libérations (souscription au capital de 2015)
49,5
SAFRAN
Souscription émission d’Oceanes
24,5
Radio France
Augmentation de capital (arrêté du 28 mai 2020)
17,7
France télévisions
Augmentation de capital (arrêté du 18 juin 2020)
17,0
Le Nickel -SLN
4
e
tranche du prêt consenti par l’État en 2016
10,0
CDC
Taxe transactions fin. (achat d’actions EDF à l'Epic
Bpifrance le 20 décembre 2019).
0,2
EPIC Bpifrance
2
e
dotation en numéraire du FII
1 900,0
s/s total périmètre
APE hors Covid
2 471,5
Opérations hors APE
CDC, EPIC
Bpifrance, Ademe
Versement opérations en fonds propres PIA 3
1 080,0
Bpifrance invest.
5
e
appel de fonds du Fonds Definvest
10,0
SAS INSTEX
Augmentation en capital (arrêté du 18 juin 2020)
0,2
SAS INSTEX
nouvelle augmentation de capital (arrêté 30 octobre)
1,3
BIRD
2
e
versement (augmentation
de capital 2018)
52,3
SII
5
e
tranche de l’augmentation de capital de 2015
1,1
BOAD
6
e
libération de l'augmentation de capital de 2010
0,5
s/s total hors
périmètre APE
1 145,4
Total
11 701,1
Source : APE
Les dépenses de titre 3 se montent à 175 207
€
pour l’exercice 2020,
en nette baisse par rapport à 2019 (près de 15 M
€
). Seule une taxe sur les
transactions financières a été payée et aucune commission bancaire n’a par
exemple été payée aux banques conseils sur cet exercice.
17
Banque internationale pour la reconstruction et le développement, Société
interaméricaine pour l’investissement, Banque ouest-africaine pour le développement.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
23
1.2.4 Finalement, une exécution budgétaire proche de la
prévision, mais pour des raisons difficiles à anticiper
En dépit des changements profonds intervenus en raison de la crise
lors des deux premières lois de finances rectificatives (les deux suivantes
n’ont plus apporté aucune modification à la mission), l’exécution de la
dépense (11,7 Md
€
) se situe à un niveau très proche de la prévision en LFI
(12 Md
€
).
Graphique n° 6 : LFI et exécution 2016-2020 - CP, en Md
€
Source : Cour des comptes
1.2.5 Un solde cumulé de près de 2,5 Md
€
, en légère diminution
Avec des recettes de 10,9 Md
€
et des dépenses de 11,7 Md
€
, le CAS
PFE enregistre en 2020 un déficit d’exécution de 782 M
€
. Il s’explique par
un niveau de recettes inférieur de plus de 1 Md
€
par rapport à la LFI, alors
que les dépenses sont proches de la prévision, à 0,3 Md
€
près.
Ce déficit vient diminuer d’autant le solde de fin d’exercice. Partant
d’un niveau relativement élevé de 3,2 Md
€
fin 2019 (du fait du produit de
cession de FDJ de 1,9 Md
€
en attente de versement au profit du FII), le solde
de fin 2020 s’élève à 2,46 Md
€
. Il reste supérieur aux anticipations de besoin
de financement présentées en LFI pour 2021
18
. En l’absence de nouveaux
produits de cession du fait du contexte boursier, le CAS PFE dépendra à titre
18
L’écart entre le solde 2019 et le solde 2020 s’explique essentiellement par une recette
de cession 2020 (La Poste et la SFIL) inférieure d’environ 0,6 M
€
à celle de FDJ.
24
COUR DES COMPTES
principal des versements du budget général, et d’abord de ceux du
programme 358 maintenu en LFI pour 2021.
Graphique n° 7 : Du solde d’entrée au solde de sortie en Md
€
Source : Cour des comptes
En synthèse, l’équilibre général du CAS PFE en 2020 peut être
schématisé ainsi.
Schéma n° 2 : Synthèse de l’équilibre du CAS en 2020
Source : Cour des comptes, d’après direction du budget
Par rapport aux exercices précédents, le solde du CAS est à un niveau
intermédiaire, plus bas qu’en 2015, 2016 et 2017, mais plus élevé qu’en 2018
et même 2019 (après retraitement du produit de cession de FDJ qui était
d’ores et déjà « fléché » vers le FII).
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
25
Graphique n° 8 : Évolution du solde du CAS PFE de 2015 à 2020 –
en Md
€
Source : Cour des comptes
Le solde du CAS hors aide d’urgence est de 2,455 Md
€
mais les
perspectives de recettes propres au CAS (cessions de titres) sont nulles pour
2021 en raison des conséquences de la crise sanitaire. Grâce à ce solde, le
CAS a donc une marge de man
œ
uvre pour faire face aux opérations en
dehors des versements du budget général, mais celle-ci reste limitée au
regard de l’ampleur possible d’opérations associées au plan d’urgence.
1.3
L’incidence sur le CAS des cessions de
participations dans La Poste et la SFIL
Décidées et engagées avant le déclenchement de la pandémie, les
opérations de cession des participations de l’État dans La Poste et dans la
SFIL sont à l’origine de la principale recette du CAS PFE en 2020 en dehors
des crédits d’urgence provenant du programme 358 et des crédits PIA.
1.3.1 Les grandes étapes
Annoncée par le ministre de l’économie et des finances le 30 août
2018, la constitution du pôle financier public visant au rapprochement de
CNP Assurances, filiale de la Caisse des dépôts (CDC) et de La Banque
postale, filiale de La Poste elle-même contrôlée par l’État, a nécessité des
opérations capitalistiques complexes ayant des incidences importantes sur le
patrimoine financier de l’État et sur le CAS PFE. L’opération s’est dénouée
en mars 2020, quelques jours avant le premier confinement et la crise
26
COUR DES COMPTES
boursière qui l’a suivi, et a eu sa traduction budgétaire sur l’exécution 2020.
La seule lecture de l’exécution du CAS PFE est insuffisante pour apprécier
le bilan financier global pour l’État, ce qui renvoie à une question déjà
soulevée dans les précédentes NEB.
Autorisée par l’article 151 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019
relative à la croissance et à la transformation des entreprises
19
, l’opération a
été rendue possible après un avis de l’Autorité des marchés financiers (AMF)
du 25 juin 2019 autorisant le transfert des titres CNP Assurances de la CDC
à La Poste sans exiger d’OPA et la signature d’un nouveau pacte
d’actionnaires entre l’État et la CDC (l’État passant de 74 % à 34 % du
capital, la CDC de 26 % à 66 %). Sur la base des valeurs des titres La Poste
et CNP Assurances validées par la commission des participations et des
transferts (CPT) dans son avis du 13 juin 2019
20
, un contrat d’acquisition
entre l’État et la CDC reprenant toutes les phases de l’opération a été signé
le 19 novembre 2019.
L’opération a comporté trois étapes :
- l’apport le 4 mars 2020 par l’État et la CDC à La Poste de
l’intégralité de leurs titres CNP Assurances, respectivement 1,1 % et 41 %.
La Poste devient l’actionnaire majoritaire de CNP Assurances. Ces apports
ont été réalisés en contrepartie d’une augmentation de capital de La Poste de
82 % ;
- la cession par l’État à la CDC de 7,6 % du capital de La Poste. La
CDC est ainsi l’actionnaire majoritaire de La Poste avec 66 % du capital
tandis que l’État conserve 34 % des titres de La Poste ;
- la cession le 30 septembre 2020 par l’État à la CDC de tous ses titres
de la SFIL. L’État détenait jusqu’alors 75 % du capital de la SFIL, les 25 %
restants étant en la possession de la CDC (20 %) et de La Poste (5 %).
1.3.2 Les conditions de réalisation de la cession de
participation dans La Poste
L’apport de 42 % du capital de CNP Assurances
21
a été rémunéré par
82 % du capital de La Poste, ce qui valorise La Poste à un peu plus de la
moitié de CNP assurances, soit respectivement 7 Md
€
pour la première et
13,73 Md
€
pour la seconde, conformément à l’avis de la CPT du 13 juin
19
Cet article n’a fait l’objet d’aucune contestation juridique par les parlementaires ayant
saisi le Conseil constitutionnel, à la différence des dispositions concernant la cession des
participations de l’État dans Aéroports de Paris (ADP) et dans la Française des jeux (FDJ).
20
Avis relatif à l’augmentation de capital de La Poste souscrite par l’État et la Caisse des
dépôts et consignations par apport de leurs participations dans CNP Assurances.
21
1,1 % provenant de l’État et 40,9 % provenant de la CDC.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
27
2019. La valeur retenue pour La Poste apparaît donc sensiblement inférieure
au montant des fonds propres
22
.
À l’issue de cette première opération, La Poste était détenue
majoritairement par la CDC à hauteur de 58,4 % et minoritairement par
l’État, dont la participation en direct était ramenée de 74 % à 41,6 %.
L’État a ensuite cédé 7,6 % du capital de La Poste à la CDC à un prix
initial de 970,6 M
€
. Cette cession en numéraire constitue une recette du CAS
PFE pour 2020. Ce prix de cession est cohérent avec la valeur de La Poste
après augmentation de capital. Un complément de prix de 91,4 M
€
a été versé
par la CDC à l’État
23
.
1.3.3 La cession par l’État de la SFIL
Six mois plus tard, l’État a cédé à la CDC la totalité de sa participation
dans la SFIL pour 300 M
€
en numéraire. Si l’opération est distincte, elle doit
cependant être appréciée par rapport à l’opération d’ensemble concernant La
Poste.
Créée en 2013 à la suite de la faillite du groupe bancaire Dexia, la
Société de financement local (SFIL) était détenue par l’État (75 %), la CDC
(20 %) et La Poste (5 %). À travers sa participation dans La Poste, l’État
avait en réalité le contrôle sur 80 % du capital de la SFIL Avec une valeur
initiale nulle dans les comptes de l’État, la SFIL était évaluée à 1 172 M
€
en
valeur d’équivalence dans le compte général de l’État (CGE) de 2019, c’est-
à-dire à la valeur de ses capitaux propres. Par arrêté du 29 septembre 2020
du ministre de l’économie, des finances et de la relance
24
, l’État a cédé la
totalité de ses titres à la CDC pour un montant de 300 M
€
.
25
. La SFIL est
désormais détenue directement et majoritairement par la CDC (95 %) et par
La Poste (5 %), à l’exception d’une action ordinaire détenue par l’État.
*
22
9,3 Md
€
conformément à la méthode prévue par le recueil des normes comptables de
l’État. Cette dernière repose sur le principe de la valeur d’équivalence, qui correspond à
la valeur des capitaux propres comptables de La Poste au prorata de la quote-part de
détention directe de l’État (74 %). L’écart entre la valeur initiale et la valeur
d’équivalence, appelé écart d’équivalence, s’élevait à 3,828 Md
€
et à la valeur comptable
retenue dans le CGE.
23
Le protocole d’accord contient des clauses d’ajustement de prix éventuel à la hausse ou
à la baisse au regard des compensations de missions de service public que le groupe La
Poste accomplit.
24
Arrêté du 29 septembre 2020 autorisant l’État à céder une participation au capital de la
société SFIL (journal officiel du 2 octobre 2020). La CPT n’a pas été saisie par le ministre.
25
À l’exception d’une action ordinaire encore détenue par l’État.
28
COUR DES COMPTES
Les cessions de participations dans La Poste et la SFIL ont induit une
recette totale pour le CAS PFE de 1 362 M
€
(1 062 M
€
pour La Poste et
300 M
€
pour la SFIL). La prévision en LFI pour 2020 indiquait pour la seule
opération relative à La Poste un montant de recettes de près d’1 Md
€
.
L’exécution a donc été conforme à la prévision.
Si le budget pour 2020 enregistre une recette de trésorerie
significative, le CGE de 2020 devrait faire apparaître un résultat comptable
plus modeste et une diminution importante du patrimoine financier de l’État.
Les immobilisations financières de l’État passent, pour ce qui concerne La
Poste, de 9,3 Md
€
à 4,56 Md
€
, soit une diminution de 4,7 Md
€
qui provient
non seulement du passage du taux de détention de l’État dans le capital de
La Poste de 74 % à 34 %, mais aussi du changement de méthode d’évaluation
de la participation désormais effectuée en valeur d’acquisition (ou valeur
initiale), ce qui se traduit par la suppression au bilan de l’État de l’écart
d’équivalence de 3,8 Md
€
. Il en est de même pour la SFIL, pour laquelle le
CGE de 2019 indiquait un écart d’équivalence de 1,17 Md
€
. Au total, les
capitaux propres de l’État enregistreront une diminution de 5 Md
€
. Le
compte de résultat, quant à lui, enregistrera une plus-value de 340 M
€
, dont
40 M
€
pour La Poste et 300 M
€
pour la SFIL.
Cette présentation succincte montre que l’équilibre pour l’État des
opérations concernant ses participations financières ne peut être apprécié
uniquement au travers des informations contenues dans le CAS PFE, qui ne
concernent que les entrées et sorties de trésorerie mais ne reflètent en rien les
effets patrimoniaux. Cela illustre le fait que l’analyse du seul CAS, qui reste
un instrument budgétaire, est insuffisante pour apprécier la performance de
la gestion des participations financières de l’État, comme la Cour l’a déjà
relevé dans les deux précédentes NEB, et la nécessité de compléter l’analyse
de l’exécution budgétaire par une analyse fondée sur les données de
comptabilité générale.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
29
2
LES EFFETS DE LA CRISE SANITAIRE
SUR L’EXÉCUTION 2020 DES
PROGRAMMES 731 ET 732
2.1
La contribution du programme 731 à l’aide
d’urgence
Sur les 20 Md
€
inscrits en LFR 2 sur le programme 358 et sur le
programme 731, seulement 8,1 Md
€
ont été dépensés en 2020 via le
programme 731. Le solde non consommé de près de 12 Md
€
devrait être
reporté sur 2021.
2.1.1 Un cadre d’utilisation de l’aide d’urgence qui contribue
à la sous-consommation des crédits
Le calibrage initial de l’aide était volontairement large pour faire face
à toute éventualité de recapitalisation sur 2020 et les années suivantes.
L’assiette
de
sélection
des
entreprises
concernées
a
été
élargie
progressivement, des participations de l’APE aux entreprises figurant dans
l’indice SBF 120 et à certaines entreprises non cotées.
Même en période exceptionnelle de crise, demander explicitement le
soutien de l’État en fonds propres ou quasi-fonds propres n’est pas un signal
anodin, surtout pour une société cotée. Les réserves des entreprises face au
renforcement de leurs fonds propres par l’État s’expliquent ainsi d’abord par
la préférence de ces dernières pour un financement par la dette plutôt qu’une
ouverture de capital.
De plus, cet exercice de prévision budgétaire obéit à un calendrier
différent de celui des entreprises. Solliciter l’intervention de l’État
actionnaire suppose pour une entreprise qu’elle ait auparavant épuisé les
autres ressources venant en renforcement de son bilan ou en soutien de sa
trésorerie, qu’il s’agisse de ressources internes (mesures d’économies,
optimisation de la trésorerie), externes (crédit bancaire ou dette de marché)
ou de dispositifs exceptionnels comme ceux mis en place par l’État (PGE).
Le calendrier financier des entreprises peut donc être à la fois plus long que
celui des dispositifs publics de soutien, nécessairement encadrés par
l’annualité budgétaire, et donc nécessiter une approche pluriannuelle, ou au
contraire être aussi plus rapide – dans le cadre d’un besoin urgent de
numéraire – et connaître des accélérations.
30
COUR DES COMPTES
Un autre facteur explicatif du décalage temporel des demandes est à
chercher dans l’articulation des demandes avec les dispositions européennes.
La Commission européenne a adopté, le 19 mars 2020, un encadrement
temporaire des mesures d’aide d’État visant à soutenir l’économie dans le
contexte de la pandémie de Covid-19. Cet encadrement, modifié ensuite à
cinq reprises (3 avril, 8 mai, 29 juin, 13 octobre, 28 janvier 2021), précise,
par type d’instruments (subventions, prêts, garanties, fonds propres, etc.) les
conditions que la Commission européenne met en
œ
uvre pour autoriser des
mesures d’aides
26
. Sur ce fondement, l’État actionnaire a pu adopter des
mesures individuelles en faveur d’entreprises relevant du portefeuille de
l’APE (Air France par exemple).
Aussi les entreprises identifiées au printemps par l’administration
ont-elles pu différer des demandes d’apports en capital, ce qui ne veut pas
dire que celles-ci n’interviendront pas en 2021 ou 2022.
Par ailleurs, les aides de l’État sont soumises à une conditionnalité
contrôlée par le Parlement. La loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances
rectificative pour 2020 dispose, en son article 22, que «
l'Agence des
participations de l’État veille à ce que ces entreprises intègrent pleinement
et de manière exemplaire les objectifs de responsabilité sociale, sociétale et
environnementale dans leur stratégie, notamment en matière de lutte contre
le changement climatique
»
.
Le Gouvernement devra remettre en avril 2021
au Parlement un rapport sur l’utilisation des ressources attribuées au CAS
PFE, détaillant le bon usage des ressources publiques et l’état de la mise en
œ
uvre des objectifs de responsabilité sociale, sociétale et environnementale
(RSE) dans la stratégie des établissements et sociétés, cotées et non cotées,
contrôlées par l’État, notamment en matière de lutte contre le changement
climatique et de respect de l’Accord de Paris sur le climat. De même, l’article
66 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour
2020 dispose que les entreprises qui bénéficient des aides d’urgence au titre
de l’enveloppe de 20 Md
€
seront soumises à des obligations de déclaration
sur leurs engagements environnementaux, et que les entreprises de plus de
500 M
€
de chiffre d’affaires dans lesquelles l’État prendrait une participation
par l’intermédiaire de l’APE devront prendre des engagements en matière de
réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre.
Au-delà de ces dispositions qui peuvent apparaître plus ou moins
contraignantes, les entreprises peuvent être incitées, compte tenu des
conditions de marché qui restent exceptionnellement favorables, à recourir à
d’autres formes de financement externe, notamment sous forme de dette ou
26
Article 107, §3, c) du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui autorise
les aides destinées « à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État
membre »
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
31
de dette subordonnée, ce qui peut expliquer qu’elles aient pour le moment
différé leur appel à l’État.
2.1.2 Une justification inégale de financements apportés au
titre du plan d’urgence
L’aide d’urgence en fonds propres ou quasi-fonds propres
via
le
programme 358 répond à plusieurs formes de vulnérabilités. Elle peut viser
à diminuer le poids de la dette par rapport aux capitaux propres et à restaurer
la capacité des entreprises concernées à lever les capitaux sur les marchés ;
à aider les entreprises face à des difficultés de trésorerie
via
des avances
d’actionnaires
27
; ou encore à protéger les entreprises stratégiques de prises
de participations hostiles notamment non européennes.
En 2020, l’utilisation des crédits d’urgence des programmes 358 et
731 a concerné essentiellement les entreprises du périmètre APE : une
avance d’actionnaires à Air France/KLM pour 3 Md
€
, un apport en capitaux
à la SNCF pour 4 Md
€
, enfin une souscription à une émission obligataire
d’EDF pour 1 Md
€
. De manière marginale à ce stade, elle a aussi permis à
l’État de souscrire à un nouveau fonds sectoriel aéronautique, ce qui relève
davantage de la politique industrielle que du périmètre de l’État actionnaire
tel que défini dans la dernière liste de 2019 sur les participations financières
gérées par l’APE.
2.1.2.1 Air France/KLM : une opération cohérente avec l’objectif de
l’aide d’urgence
Le 9 avril 2020, le Groupe Air-France KLM a annoncé qu’un besoin
de financement complémentaire était attendu au troisième trimestre 2020,
étant donné l’impact de la crise de covid sur son EBITDA, malgré les
mesures de soutien de trésorerie prises au printemps. L’État, accompagné
d’institutions bancaires, a mis en place une aide composée, d’une part, d’un
prêt garanti par l’État (PGE) de 4 Md
€
et, d’autre part, d’une avance en
compte courant d’actionnaire de l’État pour 3 Md
€
financé par le CAS PFE.
Ce prêt, d’une maturité de quatre ans, avec deux options d’extension d’un an
consécutives et exerçables par Air France-KLM, devra être remboursé de
façon obligatoire et anticipée en cas de survenance de certains évènements
comme la prise de contrôle d’Air France KLM par une autre entité. Ce prêt
d’actionnaire est incorporable au capital de l’entreprise. Celle-ci s’est
engagée à ne pas verser de dividendes tant que les prêts ne seront pas
remboursés.
27
Sur ce point toutefois, d’autres dispositifs ont une finalité proche comme les PGE.
32
COUR DES COMPTES
L’abondement du CAS par le programme 358 est intervenu le 31 août
2020. Les avances ont ensuite fait l’objet de deux tirages de 1 et 2 Md
€
depuis le programme 731, tous deux intervenus en fin d’exercice 2020.
En parallèle, KLM
28
bénéficie d’une aide de 3,4 Md
€
, dont 1 Md
€
sous forme de prêts directs de l’État néerlandais. Cette aide a été validée le
6 novembre 2020 après des discussions avec les syndicats du personnel.
Lors du
Paris Air Forum
le 20 novembre 2020, le secrétaire d’État
aux transports a confirmé la possibilité d’une recapitalisation d’Air France
par l’État, complémentaire de l’aide de 7 Md
€
déjà accordée. Il s’agirait
d’une montée au capital et non d’une nationalisation, celle-ci ayant été
exclue par le ministre de l’économie.
2.1.2.2 SNCF : une aide présentée comme d’urgence mais dont
l’utilisation s’éloigne des principes initiaux
L’État a souscrit via le CAS PFE à une augmentation de capital
réalisée par la SNCF pour un montant de 4,05 Md
€
29
. Autorisée par l’arrêté
du 4 décembre 2020, cette souscription a été effective le 15 décembre, avec
la libéralisation de l’intégralité des fonds à cette date. Mais la SNCF a ensuite
reversé 4,05 Md
€
, soit le même montant, à l’État par le biais d’un fonds de
concours. Cette recette du budget général a donné lieu à une ouverture de
crédits en AE et en CP du même montant sur le programme 203
« Infrastructures et services de transports ». L’APE justifie cette opération
par l’urgence créée par la crise sanitaire.
De fait, la crise sanitaire a eu d’importantes conséquences sur le
groupe SNCF, dont les coûts fixes sont élevés et ceci malgré le maintien des
performances de certaines activités (Fret SNCF, Geodis, etc.). Sur l’année
2020, les conséquences de la crise sont estimées par l’entreprise à - 6,8 Md
€
sur le chiffre d’affaires et - 5,4 Md
€
sur la marge opérationnelle (EBITDA)
30
.
Dans ce contexte, l’augmentation de capital a visé à soutenir les
investissements de sa filiale SNCF Réseau en faveur de la régénération du
réseau ferré national, du renforcement de la sécurité et du développement
durable de ses activités. S’il s’inscrit dans le plan de relance ferroviaire de
4,7 Md
€
annoncé dans le cadre du plan de relance de 100 Md
€
, cet apport
servira avant tout à sécuriser les investissements de SNCF Réseau. Plus
précisément, selon les indications données par l’APE, 2,3 Md
€
permettront
de régénérer le réseau, 1,5 Md
€
de sécuriser et rendre plus durables les
28
L’État français détient 14,3 % du groupe Air France-KLM, aux côtés de l’État
néerlandais (14 %).
29
Ce montant correspond à l’augmentation de la valeur nominale de chacune des
10 000 000 actions de 100 euros à 505 euros.
30
Source : présentation investisseurs du groupe p.6.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
33
activités du groupe, via par exemple la fin du glyphosate et 250 M
€
de
financer la rénovation de 14 lignes de desserte fine du territoire.
Ces éléments appellent les observations suivantes au regard de
l’orientation des crédits d’urgence vers SNCF Réseau :
- l’État a reçu ces dernières années de SNCF Mobilités des dividendes
sous forme de recettes en fonds de concours qu’il réutilisait pour la
modernisation du réseau. Ces dividendes étaient habituellement de 600 à
700 M
€
par an. La crise sanitaire a entraîné en 2020 une absence de
dividendes que l’État a palliée par ce plan. Les 2,3 Md
€
compensent en fait
l’absence de dividendes et, plus largement, les pertes des autres activités du
groupe qui risquaient de compromettre sa capacité à verser des dotations au
fonds de concours de l’État destiné à financer SNCF Réseau ;
- le lien entre les pertes liées à la crise et les crédits d’urgence n’est
pas explicité pour le complément de 1,5 Md
€
destiné à des investissements
de sécurisation du réseau.
Le soutien de l’État s’est donc inscrit dans une stratégie de long terme
ou de soutien ne relevant qu’indirectement ou de façon insuffisamment
explicite de l’urgence liée à la crise sanitaire.
2.1.2.3 La souscription à l’émission OCEANE d’EDF : un financement
qui ne relève pas seulement de la notion d’aide d’urgence
Début septembre 2020, EDF et l’APE ont annoncé la réalisation
avec succès d’une émission inaugurale d’obligations vertes à option de
conversion et/ou d'échange en actions (OCEANEs vertes) d’un montant total
d’environ 2,4 Md
€
. L'État français, qui détient en partenariat avec l’EPIC
Bpifrance 83,58 % du capital d’EDF, a décidé de souscrire à l’opération à
hauteur de 40 % du montant émis, s’affirmant comme le principal
souscripteur à cette opération.
Le versement du programme 358 sur le CAS PFE est intervenu le
10 septembre 2020, pour une opération effective le 14 septembre. Le
montant de l’abondement réalisé (1 104 M
€
) s’est finalement avéré être
supérieur à la souscription de l’État (1 028 M
€
) ; l’excédent pourra être
utilisé pour une opération de soutien ultérieure.
L’accent a été explicitement mis par l’État, actionnaire majoritaire
d’EDF, sur le soutien qu’il apporte à la stratégie de développement du Groupe
dans le cadre de la transition énergétique. L’objectif affiché de cette émission est
en effet de financer le développement d’EDF dans les énergies renouvelables.
Sa justification ne semble pas
a priori
liée à la crise de Covid-19
31
.
31
Le communiqué de presse d’EDF annonçant l’opération ne mentionne à aucun moment
la crise, mais inscrit cette opération comme une étape clé dans la stratégie Cap 2030
d’EDF, dans la suite des émissions de
Green bonds
réalisées depuis 2013.
34
COUR DES COMPTES
La crise sanitaire a eu des conséquences sur les activités
opérationnelles d’EDF, du fait d’une moindre consommation d’électricité,
de l’arrêt des chantiers et de la diminution de la production nucléaire
entraînée par la réorganisation des plannings de maintenance. Toutefois, si
la crise et les appréciations des agences de notation ont pu fragiliser la
capacité d’appel au marché de cette entreprise cotée
32
, le succès de
l’émission OCEANE n’a pas mis en évidence de vulnérabilité particulière
33
.
Il est ainsi difficile de distinguer entre les besoins de financement de
l’entreprise effectivement liés à la crise et ceux propres à sa situation
générale et à sa stratégie
34
.
2.1.3 La souscription au fonds Ace Aero Partenaires
Le programme 358 a versé sur le CAS PFE un crédit de 150 M
€
le
31 août 2020 en vue de la souscription par l’État au fonds Ace Aero
Partenaires pour le soutien à la filière de l’aéronautique civile fragilisé par la
crise de Covid. Ce fonds a été créé à l’initiative des industriels du secteur
35
.
La dépense effective par le CAS (programme 731) n’a toutefois été que de
6,525 M
€
pour le financement des tranches initiales. Le solde restant non
utilisé est préservé pour les prochains appels de fonds qui interviendront au
titre du fonds. Une fois l’appel de fonds constitué, Ace Aéro Partenaires,
dont la gestion a été confiée à la société ACE Management filiale de Tikehau
Capital, atteindra un montant total de 630 M
€
dont 150 M
€
de fonds apportés
par l’État, 50 M
€
par Bpifrance et 430 M
€
par des grands industriels
donneurs d’ordres de la filière et par Tikehau Capital lui-même.
Le programme 358 a procédé en une seule fois au versement sur le
CAS PFE des 150 M
€
que l’État s’est engagé à apporter, alors que la
dépense, via le CAS, n’a été que de 6,525 M
€
. Ce processus est certes
conforme à l’articulation entre les programmes 358 et 731 (versement en une
fois de l’intégralité de l’opération) mais il immobilise des crédits
budgétaires, la constitution de tels fonds étant toujours très progressive.
32
Moody’s et Fitch ont orienté la perspective de notation d’EDF de stable à négative les
24 et 22 avril dernier et S&P a abaissé sa notation le 22 juin.
33
L’émission a été réalisée à un taux de rendement annuel brut de -1,68% à échéance
2024.
34
L’administration indique d’ailleurs qu’EDF prévoit de verser des dividendes en 2021.
Cf. plus loin 3.3.2.
35
Notamment Dassault, Safran, Airbus, et Bpifrance.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
35
2.2
Un programme 732 vidé de sa substance
Comme la Cour l’a relevé depuis plusieurs années, le programme 732
de désendettement, censé être le « réceptacle » des recettes du programme
jumeau 731 provenant des cessions de participations financières, ne joue plus
ce rôle depuis longtemps et son maintien chaque année en loi de finances est
artificiel. Certes, le contexte de 2020 explique la non mise en
œ
uvre des
objectifs de désendettement inscrits en loi de finances initiale, mais la
situation déséquilibrée de la mission doit être d’autant plus soulignée qu’il
paraît peu envisageable de rétablir à moyen terme sa logique de départ.
De toute façon, les produits de cessions prévues en LFI pour 2020
n’auraient pu contribuer que marginalement aux dépenses du programme
732, la priorité étant alors de les affecter au FII. En raison de la crise sanitaire
et du report des cessions envisagées, la première loi de finances rectificative
du 18 mars 2020 a annulé les 2 Md
€
de crédits destinés au désendettement
de l’État et d’établissements publics ouverts en LFI.
L’exécution du CAS PFE en 2020 ne fait donc que confirmer une
tendance de fonds, non affichée mais néanmoins réelle.
Pour 2021, la prévision très prudente ne semble avoir d’autre but que
de maintenir un programme 732 minimal, avec un montant prévisionnel de
désendettement de 100 M
€
(contre 2 Md
€
les années précédentes)
explicitement conditionné, de surcroît, aux conditions de marché dans
lesquelles seraient réalisées d’éventuelles cessions.
Compte tenu des priorités de politique économique cette année et de
la faible éventualité que des participations financières de l’État puissent faire
l’objet d’une cession à court terme, il est probable que le désendettement soit
de nouveau nul. L’abandon de fait de ce programme continue de poser la
question du caractère mono-programme de la mission budgétaire, le
programme 731 étant finalement le seul en activité puisque le programme
358 ne relève pas de la même mission.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
37
3
UNE COHÉRENCE D’ENSEMBLE DU
CAS PFE À RENFORCER
La Cour continue de faire le constat que le CAS PFE, dont la
justification comme instrument budgétaire contrôlé par le Parlement pour
gérer les participations financières de l’État ne saurait être contestée, est
désormais utilisé pour des objectifs nouveaux et qu’il voit son équilibre
financier dépendre de plus en plus du budget général, faute de ressources
propres. Une réflexion sur les moyens de lui rendre une cohérence et des
marges aujourd’hui disparues semble nécessaire.
3.1
Les constats de 2018 et 2019 sur l’évolution du
CAS-PFE demeurent valables
Dans les deux NEB pour 2018 et 2019, la Cour a souligné que les
conditions d’utilisation du CAS PFE s’éloignaient de plus en plus de la
situation qui prévalait initialement.
Par ailleurs, les participations cotées de l’État sont désormais très
concentrées sur les secteurs de l’énergie, de la défense et de l’aéronautique
et des infrastructures et transports aériens. Si cette situation est le reflet de la
structure historique du portefeuille et des dispositions législatives qui
s’imposent à l’APE
36
, elle a été renforcée par la crise sanitaire.
36
Comme les seuils légaux de détention de capital dans certaines entreprises comme EDF
ou Engie par exemple.
38
COUR DES COMPTES
Graphique n° 9 : Poids des différents secteurs dans le portefeuille
côté de l’État actionnaire à fin 2020
Source : APE
Plus spécifiquement, la bonne tenue de l’action EDF en 2020
(+ 29,9 % contre - 4,6 % pour l’ensemble du portefeuille coté entre le
5 janvier 2021 et le 5 janvier 2020) conduit à renforcer encore le poids de
cette participation dans le total :
de 34,6 % fin 2019, la part d’EDF dans la
valeur totale des participations cotées de l’État est passée à 47,6 %. L’APE
se trouve confrontée à un risque majeur de concentration sur une seule
valeur, qu’elle est tenue de conserver légalement à la différence de la plupart
des autres, et pour laquelle elle ne dispose, avec les seules ressources du
CAS, d’aucune marge réelle pour répondre à ses besoins en fonds propres.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
39
Tableau n° 2 : Évolution de la valeur des participations financières de
l’État entre 2020 et 2021 – en M
€
au 5/01/2021
au 5/01/2020
capitalisation
État
valeur participation État
capitalisation
valeur participation État
ADP
9 802
50,6%
4 963
16 269
8 237
Airbus
70 440
11,0%
7 713
102 369
11 209
AF KLM
2 069
14,3%
296
4 010
573
EDF
40 191
83,7%
33 632
30 942
25 892
Engie
30 721
23,6%
7 262
35 336
8 353
Eramet
1 245
25,6%
318
1 330
340
FDJ
7 019
21,9%
1 538
4 470
979
Orange
26 388
13,4%
3 533
35 568
4 763
Renault
10 815
15,0%
1 623
12 757
1 915
Safran
49 730
11,2%
5 585
59 034
6 630
Thalès
16 263
25,7%
4 176
20 088
5 159
Total
264 683
70 640
322 173
74 050
Source : APE
3.2
Le CAS PFE et le programme d’investissements
d’avenir (PIA)
Comme en 2018 et en 2019, le CAS PFE a été en 2020 l’instrument
par lequel ont transité les crédits du PIA 3 consacrés aux prises de
participation de l’État dans des fonds d’investissement gérés par trois
opérateurs principaux, Bpifrance, la Caisse des dépôts (CDC) et l’Agence
pour l’environnement et la maîtrise de l’énergie (ADEME).
Fixée initialement à 4 Md
€
(sur les 10 Md
€
que représente le PIA 3),
l’enveloppe en fonds propres représente désormais 3,8 Md
€
d’autorisations
d’engagement (AE).
40
COUR DES COMPTES
Tableau n° 3 : Les actions en fonds propres du PIA 3 transitant par le
CAS PFE – en M
€
Actions
Opéra
teur
Progr.
AE
CP versés
CP prévus
37
2018
2019
2020
LFI
2021
2022
2023
sociétés universitaires
et scientifiques
CDC
421
250
50
50
0
150
0
Démonstrateurs
et
territoires
d'innovation
de
grande ambition
Ademe
422
400
50
50
50
100
150
DTIGA
-
volet
territoires
d'innovation
de
de
grande ambition
CDC
422
300
0
50
50
50
50
100
Intégration des SATT,
incubateurs
et
accélérateurs
BPI
422
100
0
0
30
20
50
Fonds national post-
maturation
Frontier
venture
BPI
422
500
100
0
150
150
100
Accompagnement
et
transformation
des
filières
BPI
423
400
0
0
250
130
20
Fonds
national
d'amorçage 2
BPI
423
500
250
0
100
150
Multi-cap-croissance
2 (MC3)
BPI
423
600
200
200
100
100
Fonds
à
l'internationalisation
des PME
CDC
423
100
100
0
Grands défis
BPI
423
150
100
50
Grands
défis
(opérations en fonds
propres hors norme)
CDC
423
500
0
250
50
200
TOTAL
3 800
750
350
1 080
500
920
200
Source : APE-SGPI
L’exécution budgétaire 2020, avec 1 080 M
€
versés, constitue
l’apogée du programme, les versements étant concentrés sur les Grands
défis, le fonds national post-maturation et le fonds d’accompagnement et de
transformation des filières (SPI). L’exercice 2021 devrait se situer à la moitié
de ce niveau.
Comme déjà relevé les années précédentes, l’APE n’assure aucun rôle
dans la décision, le suivi et le contrôle de ces investissements en fonds
propres de l’État. Elle n’a pas de visibilité sur les investissements réalisés
par les opérateurs, estimant que ce n’est pas son rôle. Cette position, dont la
Cour ne conteste pas le bien-fondé, soulève toutefois plusieurs questions.
37
Trajectoire prévisionnelle et ajustée des besoins de CP issus des redéploiements.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
41
Ces investissements ne transitent pas seulement par le CAS, ils sont
aussi inscrits et votés dans le cadre du programme 731. Le Parlement vote
en réalité deux fois les crédits, lors de l’examen des investissements d’avenir
(programmes 421, 422 ou 423), puis lors de l’examen du programme 731.
En théorie, le responsable du programme 731 en est donc également
responsable. Il convient dès lors de se demander qui est réellement
responsable de ces crédits. Sans doute, pour plus de clarté, conviendrait-il
d’isoler ces crédits, d’une nature et d’une finalité différentes de ceux
concourant à l’État actionnaire, dans un nouveau programme
ad hoc
, voire
de les faire transiter par le CAS sans avoir à les inscrire une deuxième fois
dans un programme budgétaire puisqu’ils ont déjà été approuvés.
Le
suivi
des
retours
financiers
des
PIA
et
autres
fonds
d’investissement reste par ailleurs perfectible. Comme la Cour l’a noté dans
les NEB pour 2018 et 2019, les investissements en fonds propres
via
le CAS
dans des fonds d’investissement au titre notamment des PIA donnent lieu à
des retours financiers dont une partie revient au CAS. En 2020, ce dernier a
bénéficié de tels retours à hauteur de 88 M
€
, en progression sensible par
rapport à 2019 mais toujours sous le niveau de 2018.
Graphique n° 10 : Retours financiers des investissements en fonds
propres au titre des PIA – en M
€
Source : ministère de l’économie, des finances et de la relance
Dans le détail, s’il est difficile de rattacher avec précision les retours
aux différents fonds et de les comparer aux investissements initiaux en raison
du caractère incomplet des informations disponibles, les montants constatés
en 2020 apparaissent plutôt en retrait par rapport aux prévisions indiquées
dans les documents budgétaires (cf. tableau n° 4).
0
20
40
60
80
100
120
2018
2019
2020
42
COUR DES COMPTES
Tableau n° 4 : Détail des retours financiers PIA en 2020 – en M
€
opérateur
Action
montant
retours
prévisionnels
rappel des fonds
investis
ADEME
PIA actions « Véhicules et
transports du futur »,
« Démonstrateurs de la transition
écologique et énergétique ».
40,9
démonstrateurs
: en
remboursement
d'avances, 39
M
€
de 2011 à
2019, 44
prévus en 2020
654 M
€
au
30/6/2020 pour
démonstrateurs
PIA 1-2-3, 607
M
€
au 30/6/2020
pour véhicules
du futurs,
Bpifrance
investissement
23
ème
, 24
ème
, 25
ème
,26
ème
, 27
ème
,
28
ème
, 29
ème
et 30
ème
distributions
du FNA
30,0
pas de
prévision
587 M
€
au
30/6/2020
EPIC
Bpifrance
Retour PIA 2 action
"Développement de l'économie
numérique", "Soutien aux
usages, services et contenus
numériques innovants, volet
"Subventions et avances
remboursables", "Usage et
technologies du numérique",
« Programme de soutien à
l’Innovation majeure ».
8,6
22,1 M
€
réalisés de
2011 à 2019,
22,9 M
€
attendus en
2020
837 M
€
pour
soutien aux
contenus et
services
innovants, 212
M
€
pour usages
et technologies
numériques, 69
M
€
pour PSIM
CDC
PIA Action « Financement de
l’économie sociale et solidaire »
et Action « Capital risque ».
7,8
31 M
€
réalisés
sur le volet
économie
sociale et
solidaire, 11
attendus en
2020, aucune
prévision sur
capital risque
80 M
€
au titre de
l'économie
sociale et
solidaire, 598
M
€
au titre du
fonds de capital-
risque FFMC2
Bpifrance
investissement
54
ème
et 55
ème
distribution du
FFT3
0,8
aucune
prévision
Total
88,2
Source : Cour des comptes à partir du jaune budgétaire « investissements d’avenir » annexé au PLF
pour 2021
Comme le reconnaissent l’APE et le SGPI, la qualité et la fiabilité des
données relatives aux retours financiers des PIA sont largement perfectibles.
Un chantier de fiabilisation du niveau d’exécution des retours constatés sur
investissement a été initié par le SGPI en 2020 afin de redéfinir les rôles et
responsabilités de chaque acteur dans le processus de remontée des crédits.
La situation constatée des montants reversés en 2020 par les opérateurs et la
bonne circulation de l’information entre tous les acteurs concernés au sein
de l’État (en particulier entre le SGPI, la DB, la DGFiP et les CBCM
concernés) semblent le signe d’améliorations en la matière. La fiabilisation
des informations fournies par les opérateurs sur une base déclarative (sans
qu’ait été instaurée une procédure de contrôle interne permettant d’en attester
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
43
la qualité) et ensuite constatées dans le budget de l’État devra s’intensifier
en 2021.
Le schéma de répartition des produits financiers entre le budget
général et le CAS PFE dont le cadre a été fixé par un arrêté ministériel de
2014 est resté inchangé
38
.
La direction du budget s’assure, dans les conventions constitutives de
fonds dont elle a connaissance, que ce schéma est bien respecté. Elle est
représentée au conseil d’administration de certains des opérateurs concernés,
en particulier Bpifrance, qui fournissent périodiquement des éléments
relatifs à la gestion des fonds dont ils ont la charge, notamment du point de
vue des retours financiers et de l’utilisation faite des fonds (investissements
réalisés, entreprises visées, montants). La direction du budget estime
toutefois cette information insuffisamment systématique.
La Cour ne peut que réitérer ses observations des années précédentes,
à savoir que :
- le schéma de 2014 est peu formalisé et fondé uniquement sur des
données déclaratives sans assurance sur la qualité des données, alors qu’elles
alimentent ensuite la comptabilité de l’État ;
- le partage auquel il est procédé entre les revenus revenant au budget
général et ceux revenant au CAS est artificiel, car, s’agissant de fonds
d’investissement dans
lesquels la décision d’investir a été prise
indépendamment de toute considération relative à la politique de l’État
actionnaire et où l’APE n’a joué aucun rôle actif, il n’y a aucune raison que
lesdits retours viennent se fondre dans le solde du CAS pour financer des
investissements nouveaux de l’APE ;
- les informations relatives aux retours ne donnent aucune indication sur
les capitaux investis
ab initio
, de sorte qu’il est impossible de savoir quels
sont les investissements rentables, quel a été, lorsqu’ils le sont, le niveau du
retour sur investissement, et
a contrario
quels sont ceux où l’État a perdu
son investissement de départ.
Les informations sur les retours financiers actuellement disponibles
(notamment dans le jaune budgétaire) sont insuffisantes, car elles ne donnent
qu’une vision sur les rentrées de trésorerie. Aucune information ne permet
de connaître la valorisation annuelle des fonds dans lesquels l’État a investi
ni le provisionnement éventuel des pertes latentes.
38
Au budget général remontent les recettes de dividendes, de revenus de prêts et
d’intérêts ; au CAS PFE reviennent les retours sur investissements en fonds propres ou
quasi-fonds propres et les revenus liés à la cession d’éléments d’actifs.
44
COUR DES COMPTES
Il est important de poser de nouveau la question de l’origine de ces
revenus financiers, et de leur éventuelle utilisation pour des emplois en
rapport avec leur objet de départ. Le
statu quo
actuel n’apparaît pas
satisfaisant.
En réalité, il pourrait être justifié de considérer que la totalité des
retours financiers PIA, qui ne constituent pas véritablement des revenus
financiers courants au sens où l’entend la LOLF, puisse être affectée au CAS
PFE
39
. Par leur nature, et plus encore par l’objet des investissements PIA en
fonds propres, ces revenus exceptionnels se distinguent des dividendes
versés par les entreprises publiques. Pour autant, ils ne devraient pas servir,
comme c’est le cas aujourd’hui, à financer de nouveaux investissements
relevant de la politique de l’État actionnaire, car ils sont le résultat
d’investissements d’une autre nature, financés sur des crédits budgétaires
d’autres ministères et où le rôle de l’APE se limite à l’instruction comptable
et à la mise en paiement. Ils devraient être cantonnés pour ne servir qu’à
réabonder la politique en fonds propres des PIA en accord avec les
administrations concernées.
3.3
Le FII : un instrument critiquable à supprimer
La Cour a souligné dans les NEB pour 2018 et 2019 le caractère
inadapté et injustifié du fonds pour l’innovation et l’industrie (FII) et
recommandé sa rebudgétisation. Aucune suite n’a été donnée à cette
recommandation. La Cour revient ici sur les limites et les inconvénients de
cette organisation.
Après un lent démarrage en 2018 et 2019, le FII était appelé à monter
en puissance en 2020. La remise en cause profonde de son modèle de
financement du fait de la pandémie a confirmé non seulement sa complexité
extrême mais aussi, désormais, sa non viabilité, tandis que les dépenses qu’il
a permis d’engager sont restées modestes, pas véritablement nouvelles par
rapport aux programmes classiques financés sur le budget général, et ne
contribuent que marginalement au financement de l’innovation.
L’impossibilité pratique de mettre en place le modèle de financement
du fonds tel qu’il avait été prévu en 2018 et le lancement à l’initiative de
l’État de nouveaux programmes massifs de financement de l’innovation dans
le cadre du plan de relance et du quatrième programme d’investissement
d’avenir (PIA 4) devraient conduire à mettre fin à l’existence du FII.
39
Aux termes du 2
e
alinéa de l’article 21 de la loi organique relative aux lois de finances,
les opérations de nature patrimoniale liées à la gestion des participations financières de
l'État, à l'exclusion de toute opération de gestion courante, sont, de droit, retracées sur un
unique compte d'affectation spéciale.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
45
3.3.1 Un modèle de financement remis en cause par la crise
Le FII a été créé le 15 janvier 2018 par une dotation à l’EPIC
Bpifrance d’un ensemble d’actifs (titres et numéraire) d’une valeur cible de
10 Md
€
, cette dotation non consommable devant engendrer chaque année un
revenu de l’ordre de 250 M
€
fournissant les financements nécessaires aux
engagements pris par le fonds.
Le fonds a été doté au départ d’un apport en numéraire pour 1,6 Md
€
40
placé sur un compte au Trésor rémunéré à 2,5 %, et d’autre part, de titres
EDF et TSA (Thalès) à hauteur de 8,4 Md
€
censés verser chaque année des
dividendes. Initialement, ces titres, prêtés en quelque sorte par l’APE,
devaient ensuite lui revenir au fur et à mesure que les cessions de
participations financières prévues dans la loi PACTE, en l’occurrence celles
de FDJ et d’ADP, permettraient de remplacer les titres par des apports en
numéraire reversés par le CAS PFE.
Ce schéma n’a pu être mis en
œ
uvre qu’en partie. À la suite de
l’introduction en bourse en novembre 2019 de FDJ, il a été procédé comme
prévu au versement au FII du produit reçu par l’État. Ce versement de
1,9 Md
€
effectué à partir du CAS PFE a permis de porter la dotation en
numéraire à 3,5 Md
€
en juillet 2020
41
.
L’interruption du processus de privatisation d’ADP ne permet plus de
doter le FII en totalité en numéraire. L’objectif de disposer de revenus
entièrement sécurisés paraît désormais difficile à atteindre puisque le fonds
devrait rester constitué aux deux tiers de titres n’offrant aucune garantie de
revenus réguliers : avec 3,5 Md
€
rémunérés à 2,5 %, le fonds n’est assuré de
revenus récurrents chaque année qu’à hauteur de 87,5 M
€
. Au regard de la
complexité administrative et budgétaire engendrée depuis trois ans par ce
fonds et de l’impossibilité de l’appuyer sur un modèle de financement
pérenne et abouti, la Cour ne peut que réitérer sa recommandation de le
supprimer et de lui substituer un financement budgétaire classique. Le
maintien d’une partie majoritaire de la dotation en titres ne va pas sans poser
des difficultés pour le fonds lui-même mais aussi pour l’APE qui ne dispose
plus d’aucune marge sur le portefeuille coté pour doter le fonds en numéraire
et reprendre ses titres EDF et TSA.
Certes, la détention de titres EDF a pu être légèrement réduite en
2020, mais le mouvement ne peut être poursuivi. À la suite du versement de
1,9 Md
€
provenant de la privatisation de FDJ, l’APE a pu procéder à une
40
Versé à partir du CAS PFE et provenant de cessions en 2017 de participations dans
Renault, Engie et Safran.
41
Il convient de noter que,
a contrario
, le produit de la cession des 7,6 % dans le capital
de La Poste et de la cession de la SFIL (1,060 Md
€
) n’a pas été affecté au FII.
46
COUR DES COMPTES
reprise partielle d’actions d’EDF comme le lui permet la convention signée
le 15 janvier 2018 avec l’EPIC Bpifrance. Cette opération, décidée le
15 octobre 2020
42
, a concerné 61 millions d’actions (soit 2 % du capital)
pour une valeur de 637 M
€
43
, soit une différence (positive pour le fonds) de
plus de 1,3 Md
€
par rapport au numéraire versé par le CAS. Elle s’explique
par l’émission en septembre d’obligations OCEANE vertes d’EDF évoquée
plus haut. En effet, si l’État détient en direct et
via
l’EPIC Bpifrance 83,58
% du capital de l’entreprise, il n’a souscrit à l’émission Océane qu’à hauteur
de 40 % du montant émis
44
. L’effet de dilution pour l’État, accentué par le
volume élevé de l’émission, aurait pu avoir pour conséquence (effet
maximal) de faire passer l’État seul (l’EPIC détenant 13,3 %) en dessous du
seuil légal de 70 % de détention du capital d’EDF
45
. La reprise par l’État de
2 % des titres a permis de sécuriser ce seuil, mais l’opération illustre les
lourdeurs que le FII crée pour l’APE dans sa gestion des participations
financières,
a fortiori
pour une participation si importante et si sensible à
tous égards que l’est EDF. Or celle-ci se trouve à un moment important où
elle entreprend une délicate réforme de sa structure opérationnelle et
capitalistique avec le projet baptisé
Hercule
. Cette vaste réorganisation
pourrait être rendue plus complexe encore par la rigidité que l’État s’est
imposée en logeant une partie du capital de l’entreprise dans une entité sans
aucun rapport ni avec son objet social, ni avec son intérêt.
Cette opération n’est pas neutre pour le FII lui-même car elle a conduit
à sortir 61 millions d’actions valorisées à 637 M
€
alors qu’il les avait reçues
en janvier 2018 à une valeur d’environ 676 M
€
46
.
Malgré une cible de 10 Md
€
à sa création, la dépendance durable du
FII aux cours boursiers le contraint à subir d’importantes variations en
valeurs de marché
47
..
42
Décision du 15 octobre 2020 relative à la reprise partielle de la dotation d'actions EDF
de l’EPIC Bpifrance.
43
Source : EPIC Bpifrance.
44
Le 8 septembre 2020, EDF effectue une levée de dette record de 4,5 Md
€
au travers de
deux instruments : 2,4 Md
€
d'obligations convertibles vertes (dites Océane) dont 40 %
souscrites par l'État, et 2,1 Md
€
d'obligations hybrides. Les obligations hybrides sont
considérées à 50 % comme des fonds propres par les agences de notation. Les
investisseurs ayant souscrit aux émissions convertibles vertes d'EDF, y compris l'État,
pourront les convertir en actions dès le 14 décembre 2020, avec prime de conversion de
32,5 %.
45
Seuil fixé à l’article 111-67 du code de l’énergie.
46
Source : EPIC Bpifrance.
47
Bpifrance réalise des exercices de valorisation des participations d’EDF et de TSA
selon une méthodologie et des conclusions qui sont soumises aux commissaires aux
comptes pour validation. Pour l’année 2020, le résultat de ces travaux n’est pas disponible
avant le mois de février 2021 et n’a donc pu être fourni aux rapporteurs. Les titres EDF
et TSA sont enregistrés à la valeur d’utilité pour la comptabilité sociale de l’EPIC
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
47
Le graphique n° 11 confirme les fortes variations de valeur auxquelles
le FII est exposé.
Graphique n° 11 : Valorisation du FII en valeur de marché de
janvier 2018 à janvier 2021 – en M
€
Source : Cour des comptes, d’après informations réglementées EDF et Thalès, site Boursorama pour
les cours de bourse (dernier cours du mois)
À partir d’une valorisation légèrement supérieure à 10 Md
€
au
moment de sa création en janvier 2018, le FII est monté jusqu’à 14,4 Md
€
fin septembre 2018 et est descendu à 8,4 Md
€
fin avril 2020, soit une
amplitude de 6 Md
€
48
.
Du fait de sa conception et d’une dotation constituée majoritairement
de titres cotés ne pouvant garantir des revenus stables, le FII ne peut être un
instrument adapté au financement régulier et assuré d’une politique publique
de soutien à l’innovation.
Bpifrance et à la valeur du cours de bourse au 31 décembre 2020 pour la comptabilité
consolidée.
48
La remontée au-delà de 10 Md
€
au deuxième semestre 2020 provient principalement
du versement en numéraire de 1,9 Md
€
en juillet. Sans cela, la valeur du FII serait de
11 Md
€
à fin décembre 2020, et de 9,9 Md
€
à fin janvier 2021.
48
COUR DES COMPTES
3.3.2 Des recettes dont la stabilité n’est pas garantie
Si l’objectif de recettes du FII a pu être atteint en 2018 et en 2019, ce
n’est pas le cas en 2020 où elles ont été réduites de moitié, pour partie en
raison de la crise sanitaire. Les revenus du FII proviennent, d’une part, des
dividendes EDF et TSA (Thalès) et, d’autre part, des intérêts du compte
rémunéré au Trésor.
Graphique n° 12 : Revenus du FII – en M
€
Source : ministère de l’économie, des finances et de la relance
Concernant les dividendes, la volonté qui a majoritairement prévalu
pour les entreprises ayant une participation de l’État de ne pas verser de
dividendes a privé le FII d’une source importante de revenus en 2020. TSA
a versé 66 M
€
de dividendes sur les résultats de 2019 et antérieurs, mais
aucun au titre des résultats de 2020
49
; EDF n’a rien versé. L’incertitude
actuelle sur les résultats des entreprises pour les prochaines années conduit
à s’interroger sur la stabilité des recettes à venir. La prévision de recettes de
dividendes pour 2021
50
conduirait à l’inverse à un dépassement de l’objectif
de 250 M
€
annuels sur la base de laquelle la représentation nationale avait
approuvé la création du FII.
Concernant les intérêts sur la partie en numéraire déposée au Trésor,
l’article 3 de l’arrêté du 7 août 2018
51
fixe la rémunération du compte du
Trésor à 2,5 %. Une clause de réexamen en 2023 prévoit toutefois, si le
49
Le dividende TSA perçu par l’EPIC en juin 2020 se compose de 33 M
€
correspondant
à l’acompte sur dividende 2019 que TSA a perçu de Thalès (il n’y a pas eu de versement
de solde sur dividende au titre de l’année 2019 à TSA par Thalès), et de 33 M
€
correspondant à des réserves de résultat des exercices antérieurs.
50
244 M
€
selon l’EPIC Bpifrance (en dépit de la situation d’EDF qui avait justifié selon
l’APE un financement d’urgence de 1 Md
€
en septembre 2020), soit un total de recettes
attendues de 331 M
€
.
51
Arrêté relatif à l’ouverture d’un compte rémunéré au nom de l’établissement public
Bpifrance dans le cadre de la constitution du FII.
0
50
100
150
200
250
300
2018
2019
2020
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
49
rendement de l’obligation assimilable du Trésor (OAT) à 50 ans est inférieur
à ce taux, que la rémunération du compte sera ajustée à la baisse pour l’avenir
et que le trop-perçu des années 2018 à 2022 sera repris
52
. Or, la crise sanitaire
et les actions des banques centrales ont contribué à maintenir très basses les
courbes de taux souverains, une grande partie de la courbe française étant
toujours en territoire négatif
53
. Ces conditions risquant de se maintenir au
moins sur 2021, il est aujourd’hui envisageable que le taux de l’OAT 50 ans
soit inférieur à 2,5 % d’ici fin 2022, enclenchant ainsi le mécanisme de
révision.
Le modèle économique du FII pourrait ainsi se trouver compromis.
3.3.3 Une
utilisation
du
fonds
peu
convaincante
voire
discutable
En 2020, le FII a poursuivi sa montée en charge, à un rythme
sensiblement ralenti du fait de la crise sanitaire, en soutenant pour l’essentiel
des programmes déjà lancés à un autre titre les années précédentes et
bénéficiant de financements budgétaires.
De 2018 à 2020, sur un montant total de revenus perçus de 662,7 M
€
et un montant total d’engagements programmés de 662,4 M
€
, le FII n’a
engagé que 582,1 M
€
et décaissé que 295,9 M
€
; les disponibilités non
utilisées depuis 2018 atteignent 367 M
€
à fin 2020.
Tableau n° 5 : L’utilisation du FII de 2018 à 2020 – en M
€
Année
2018
2019
2020
Total
Programmation des engagements
250,0
250,0
162,4
662,4
Engagements
206,5
213,2
162,4
582,1
Décaissements
127,2
98,8
69,9
295,9
Disponibilités non utilisées au 31/12
149,7
311,3
366,8
Source : ministère de l’économie, des finances et de la relance
52
Cette reprise serait imputée sur les intérêts à venir à partir de la révision le 1
er
janvier
2023 et lissée sur 50 ans. Cf. article 2 de la convention du 6 septembre 2018 entre l’État
et l’EPIC BPIFRANCE établie en application de l’article 3 de l’arrêté du 7 août 2018.
53
Pour l’OAT à 30 ans, maturité la plus élevée pour laquelle la Banque de France publie
chaque jour les taux indicatifs, le taux est à 0,4180 % au 26 janvier 2021. L’AFT a émis
le 19 janvier 2021 une OAT à 50 ans à un taux de 0,593%.
50
COUR DES COMPTES
Au moment de la mise en place du confinement en mars 2020, la
programmation d’engagement était de 750 M
€
sur trois ans. La révision à la
baisse des revenus attendus en 2020 a conduit à la fin de l’année à réduire la
programmation de l’année à 162,4 M
€
, en s’ajustant par rapport aux
engagements réellement pris.
Les dépenses bénéficient surtout à des programmes déjà engagés et
financés par ailleurs sur crédits budgétaires, comme le montre le tableau
suivant. Le FII joue en fait un rôle de complément de financement pour des
actions bénéficiant par ailleurs de subventions ou d’avances remboursables
au titre des PIA (l’EPIC Bpifrance étant aussi l’opérateur de l’État). Sa
valeur ajoutée ne consiste pas en un effet de levier mais s’inscrit plutôt dans
un
continuum
de financements
54
(surtout publics) ; le financement des
actions repose en définitive d’abord sur des crédits budgétaires
55
. Un crédit
de 82,6 M
€
a ainsi dû être ouvert sur le programme 192 en LFR 3 pour
compenser la baisse des recettes du FII.
54
Cf. à cet égard la présentation faite lors du premier conseil de l’innovation le 18 juillet
2018
enjeux/innovation/dossier-presse-conseil-innovation.pdf). Il était alors indiqué que le
plan
Deep tech
bénéficierait de 70 M
€
par an.
55
Ce qui, au demeurant, ne figure pratiquement jamais dans la communication de
Bpifrance (cf. les pages web sur la
deep tech
par exemple).
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
51
Tableau n° 6 : Les actions financées par le FII – en M
€
Programme
Engagés
Décaissés
Commentaire
Grands défis
0
0
Également action du PIA 3 avec une dotation de
700 M
€
en LFI 2017 (programme 423) ramenée à
500 M
€
en LFR 3 2020
Nano 2022
25
25
Également action du PIA 3 avec une dotation de
98 M
€
en LFI 2017 (programme 422)
Deep tech
–
volet BFTE
56
13,2
2,3
Le plan
deep tech
prévoyait 10 M
€
par an sur ce
volet
Deep tech
–
volet concours
d’innovation i-
lab
9
0
Le plan
deep tech
prévoyait 15 M
€
par an sur le volet
concours d'innovation, notamment sur le concours i-
lab. Par ailleurs, le PIA 3 (programme 423)
comprend une action concours d'innovation
Bpifrance pour 372 M
€
et une action concours
d'innovation Ademe pour 136 M
€
Deep tech
–
volet concours
d’innovation
croissance
6
2,2
Deep tech
–
volet aide au
développement
41,8
40,4
Le plan
deep tech
prévoyait en 2018 des aides
individuelles pour 45 M
€
. Par ailleurs, l'action
"intégration des SATT, incubateurs et accélérateurs"
du PIA 3 (progr. 422) prévoit 50 M
€
de subventions
pour la
deep tech
Plan batterie
67,4
0
Volet introduit en 2020 dans l'action
« accompagnement et transformation des filières »
du PIA 3 (335 M
€
inscrits au progr. 423)
Total
162,4
69,9
Source : Cour des comptes, d’après ministère de l’économie, des finances et de la relance, jaune
budgétaire Investissements d’avenir annexé au PLF 2021, Bpifrance
Enfin, le FII a servi à régler des dépenses de fonctionnement. Si les
commissions de gestion (0,3 M
€
) payées à Bpifrance ne soulèvent pas de
difficulté puisqu’elles sont prévues dans la convention entre l’État et l’EPIC
Bpifrance, il n’en est pas de même en ce qui concerne les dépenses du
secrétariat général pour l’investissement (SGPI) prises en charge par le fonds
à hauteur de 1,087 M
€
en 2020 (salaires des directeurs des grands défis, frais
de communication ou charges indirectes, notamment des quotes-parts
d’immobilier de bureau
57
). Si ce versement du FII à un fonds de concours
des services du Premier ministre a été autorisé par le conseil d’administration
de l’EPIC
58
, la convention de création du FII du 15 janvier 2018 exclut que
56
Bourses
French tech emergence
.
57
550 000
€
avaient déjà été versés en 2019, soit un total de 1,637 M
€
(dont 66 % de
masse salariale selon le SGPI, 80 % selon l’EPIC) ; sur ce montant, 1,287 M
€
étaient
consommés au 31 décembre 2020 (source : SGPI).
58
Décision du 25 juin 2020, sur le fondement d’une convention signée avec le Premier
ministre le 19 mars 2019 aux termes de laquelle le SGPI assure une mission « d’assistance
52
COUR DES COMPTES
le fonds puisse être utilisé pour d’autres dépenses que le financement de
dispositifs de soutien à l’innovation et le paiement des frais de gestion
associés (explicitement définies comme les commissions de gestion d’actifs
de l’opérateur Bpifrance
59
). L’assimilation de dépenses administratives
réglées par les services du Premier ministre à un soutien à l’innovation pose
question.
*
Au vu de ces constats, la Cour réitère sa recommandation de
supprimer du FII et de réintégrer les dépenses correspondantes dans des
programmes du budget général. La pluriannualité des crédits, justification
des PIA depuis l’origine, de même que leur exemption des dispositifs de
mise en réserve offrent des garanties suffisantes pour des financements
exigeant une certaine stabilité tout en permettant à la représentation nationale
d’exercer son pouvoir d’autorisation périodique. Le FII ne présente pas
d’avantages
tels
qu’il
puisse
justifier
une
absence
d’intervention
parlementaire sans limite de durée une fois donnée l’autorisation initiale de
2018.
Recommandation
(APE, SGPI)
: Substituer au fonds pour
l’innovation et l’industrie un dispositif de soutien à
l’innovation inclus dans le budget général
(recommandation
reconduite).
administrative » pour le compte de l’EPIC (par exemple pour présenter les décisions
prises par le conseil de l’innovation ou préparer le budget, les décisions et le rapport
annuel du fonds). L’administration en charge des PIA se trouve ici dans une relation
d’exécution par rapport à l’un des opérateurs des PIA..
59
Cf. article
4.2. Emploi des revenus
de la convention État-EPIC Bpifrance du 15 janvier
2018 ainsi que l’article
6.2 Frais de gestion
.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
53
Conclusion
Si elle ne conteste pas son utilité
60
, la Cour a déjà eu l’occasion de
relever les contradictions auxquelles le CAS PFE était exposé du fait de
l’éloignement croissant entre son objet initial, son mode de fonctionnement,
et les usages qui lui ont été conférés avec le temps. Dans la note d’analyse
de l’exécution budgétaire de 2019, elle estimait que le CAS offrait un cadre
de moins en moins adapté à la gestion des participations financières de l’État,
que son utilisation pour les besoins des PIA soulevait des interrogations, que
de nouveaux instruments et de nouveaux acteurs étaient apparus dans les
politiques de prise de participation financières de l’État et que l’abandon
de
facto
de l’objectif de désendettement vidait de sa substance la mission
budgétaire.
L’examen de la gestion 2020 conduit à renforcer ces constats.
La logique d’affectation de recettes résultant de la gestion active des
participations financières à des dépenses destinées à améliorer l’actif net de
l’État par le désendettement et par de nouveaux investissements en fonds
propres s’est progressivement perdue au cours de la décennie écoulée. C’est
la justification même d’un compte d’affectation spéciale qui se trouve
fragilisée, d’une part, par un affaiblissement des perspectives de produits de
cession et, d’autre part, par une rigidité croissante de ce patrimoine
(cantonnement de titres sur le FII, risque de concentration sur EDF) ôtant
toute marge de man
œ
uvre à l’État.
De plus, la multiplication des interventions en fonds propres
via
le
CAS PFE entraîne une dispersion des responsabilités et une confusion des
objectifs. À côté des interventions « traditionnelles », le CAS est utilisé (cf.
supra
) pour des prises de participations notamment au travers des PIA mais
aussi directement dans un objectif de politique industrielle, de soutien à un
secteur déterminé ou de soutien à l’innovation. La question de l’articulation
entre les politiques, les finalités poursuivies, les durées d’investissement et
les
acteurs
(APE,
SGPI,
EPIC
Bpifrance,
Bpifrance
SA,
fonds
d’investissement, etc.) se pose. Si ces politiques nouvelles utilisent le CAS
PFE comme support budgétaire, elles obéissent à des objectifs et des
conditions de mise en
œ
uvre spécifiques, et ne peuvent pas être jugées à
60
Cour des comptes,
Les finances publiques : pour une réforme du cadre organique et de
la gouvernance
, rapport public thématique, novembre 2020, p. 115 (chapitre III – Assurer
l’unité, l’universalité et l’efficience du budget de l’État).
54
COUR DES COMPTES
l’aune des mêmes critères de performance que la politique de l’État
actionnaire traditionnelle
61
.
Il convient de rappeler que l’Union européenne (à partir du budget
européen ou
via
la Banque européenne d’investissement et le Fonds
européen d’investissement) intervient aussi de façon croissante par des
instruments en fonds propres pour des montants non négligeables en suivant
des objectifs et des cibles souvent comparables et en s’appuyant sur les
mêmes opérateurs publics et privés. Ces questions, déjà soulevées par la
Cour dans les NEB pour 2018 et 2019
62
, prennent une acuité renforcée avec
le plan de relance, l’État ayant décidé dans le PIA 4 d’accroître encore ce
type d’interventions.
Si la structure actuelle du CAS a le mérite de la simplicité, le compte
porte en fait des opérations d’objets et de natures variés. La bonne
connaissance et la maîtrise des risques sur cet ensemble hétéroclite et sans
cesse croissant de participations financières constituent une autre
préoccupation, car c’est en définitive sur l’État que repose l’intégralité des
risques. Mais les documents budgétaires à la disposition de la représentation
nationale ne permettent pas d’apprécier ces participations financières dans
leur ensemble, ni les risques qui en résultent. La délégation d’une partie
importante de la gestion d’actifs à des opérateurs publics et même privés
désormais devrait de même conduire à être attentif aux dispositifs de contrôle
interne indispensables pour s’assurer des conditions d’exécution et de
compte-rendu de la gestion. Or rien de tel n’existe.
Ces constats mettent en lumière la perte de cohérence du CAS PFE,
qui ne remplit plus son rôle d’affectation de recettes à côté du budget général,
et ne permet plus de relier avec clarté l’autorisation et le contrôle
parlementaires avec la multitude d’interventions en fonds propres dont aucun
dispositif exhaustif et coordonné de suivi et de contrôle interne ne rend
compte
63
.
Une réflexion de fond sur l’avenir du CAS, indissociable d’une
appréciation globale sur l’État actionnaire et le nouveau contexte créé par la
crise actuelle, semble donc devoir être engagée.
61
Les interventions à partir du programme 358 font d’ailleurs l’objet d’indicateurs de
performance spécifiques, distincts de ceux du programme 731.
62
Ainsi que dans son référé de 2019 sur
La mise en
œ
uvre en France du plan
d’investissement pour l’Europe
.
63
À l’exception des informations comptables du CGE.
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
55
Annexe n° 1 : liste des publications récentes de la Cour des
comptes en lien avec les politiques publiques concernées par
la NEB
L’État actionnaire
, rapport public thématique, janvier 2017,
Le programme d’investissements d’avenir
, rapport public thématique,
décembre 2015,
dinvestissementsdavenir
Le budget de l’État, résultat et gestion 2018
, NEB CAS PFE,
financieres-Etat.pdf
Le budget de l’État, résultats et gestion 2019
, NEB CAS PFE,
financieres-Etat.pdf
Certification des comptes de l’État de 2019
, mai 2020
de-letat
56
COUR DES COMPTES
Annexe n° 2 : Suivi des recommandations formulées au
titre de l’exécution budgétaire 2019
N°
Recommandation
formulée au sein de la
note d’exécution
budgétaire 2019
Réponse de l’administration
Analyse de la Cour
Appréciation
par la Cour
du degré de
mise en
œ
uvre*
1
Distinguer explicitement,
dans le PAP, les
opérations prévues sur le
CAS PFE, en recettes,
selon qu’elles relèvent ou
non du périmètre de
l’État actionnaire
Selon la Direction du budget, ce point fait
désormais l’objet d’une documentation claire et
suffisante dans le cadre des Projets Annuels de
Performance et des Rapports Annuels de
Performance.
L’APE précise que la distinction demandée par
la Cour sera faite à partir du PAP 2022, étant
donné que dans le contexte actuel de la crise
sanitaire, la majorité des recettes indiquées à
titre prévisionnel dans le PAP 2021 relève
principalement des abondements du budget
général..
L’information du PAP 2020
détaillait des opérations prévues
sur le CAS PFE côté recettes.
Étaient notamment signalées la
suspension de la privatisation
d’APD et la perspective de la
formation
du
grand
pôle
financier public.
La perspective d’une adaptation
à la recommandation en 2022
comme explicitée par l’APE fera
l’objet d’un suivi par le Cour.
Mise en
œ
uvre en
cours
2
Mener à son terme la
dissolution de la CGMF.
La Direction du Budget recommande une étude
approfondie des implications financières d’une
dissolution de la CGMF, notamment du point
de vue des frais de gestion courante, les
engagements repris par la CGMF devant
toujours être assumés d’une manière ou d’une
autre.
La CGMF n’a pas encore été
dissoute. L’Etat avait souscrit à
une augmentation de capital en
2017 à hauteur de 15M
€
dont
4,49M
€
reste encore à
débloquer d’ici 2022.
Mise en
œ
uvre en
cours
3
Fournir au Parlement une
information complète et
documentée sur
l’ensemble des
investissements en fonds
propres réalisés sur
décision de l’État et de
ses opérateurs et sur les
retours financiers
correspondants.
La Direction du Budget s’inscrit en faveur de la
recommandation
de
la
Cour.
Les
investissements prévus puis réalisés dans de
tels fonds sont détaillés autant qu’il est possible
dans les PAP et les RAP du CAS PFE.
Néanmoins, un inventaire précis du stock, en
complément du détail fourni par l’APE sur les
flux annuels d’investissement, pourrait être
fourni dans ces deux documents.
Selon l’APE, l’agence n’a pas de
visibilité sur les investissements réalisés par les
opérateurs, ce n’est pas son rôle, qui ont leur
propre obligation d’information du Parlement.
La recommandation telle que formulée ne peut
pas être mise en
œ
uvre au niveau de l’APE dont
le rôle n’est pas de consolider l’information
concernant l’ensemble des investissements
publics.
L’APE
a
renforcé
sa
communication sur le sujet en
précisant dans le RAP 2019 le
montant et la provenance des
retours financiers du PIA. Ce
travail
d’information
du
Parlement doit être poursuivi
lors de la rédaction du RAP pour
2020 ; il peut certainement être
encore approfondi et précisé.
Mise en
œ
uvre
partielle
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
57
4
Substituer au fonds pour
l’innovation et l’industrie
un dispositif de soutien à
l’innovation financés par
le budget général
Cette recommandation recueille le soutien de la
Direction du Budget qui s’emploie à valoriser
auprès
des
diverses
parties
prenantes
impliquées, les alternatives au fonds pour
l’innovation et l’industrie pouvant être mises en
œ
uvre
.
Le fonds pour l’innovation et
l’industrie est maintenu
Refus partiel
58
COUR DES COMPTES
Annexe n° 3 : Comparaison internationale des pratiques
de gestion des participations publiques – source OCDE
Dans le document
Organising the State Ownership Function
64
, l’OCDE
détaille les différents modèles existants d’organisation des participations
financières des États dans 32 pays ayant répondu à l’organisation, en se
focalisant sur les entreprises détenues majoritairement par l’État ou
minoritairement si l’État a d’autres moyens d’exercer un contrôle de fait.
Elle distingue six modèles, allant du plus centralisé au plus décentralisé
suivant le tableau suivant.
Modèle
Exemples de
pays
Un
seul
département
ministériel
ou
entité
détient
l’actionnariat et ne s’occupe que de cela – centralisation et
spécialisation
Italie, Corée du
Sud,
Nouvelle
Zélande…
Un portefeuille centralisé principal en parallèle d’autres
participations complémentaires disséminées, dont le nombre
peut être important
France,
Autriche, Pays-
Bas…
Un nombre restreint d’entités gérant les portefeuilles
séparément
Belgique,
Turquie
Une entité coordinatrice mais avec des participations
détenues
formellement
par
d’autres
départements
ministériels ou institutions. Cette entité coordinatrice peut
avoir un rôle défini de conseil et/ ou de mesure de
performance par exemple.
Royaume-Uni,
Lituanie,
Lettonie…
Une détention « duale », par deux institutions ou ministères
se partageant les missions et responsabilités (opérations vs
mesures de performance par exemple)
Suisse,
République
Tchèque, Brésil
Une détention dispersée où un nombre plus importants
d’entités interviennent sans coordination
Allemagne,
Mexique, Japon
Le niveau de centralisation des décisions varie donc fortement d’un pays
à l’autre. Sur les 32 pays ayant répondu à l’étude, 47% ont un processus
centralisé avec ou sans exceptions, 16% ont mis en place une agence de
coordination, 18% ont un modèle reposant sur une dualité et 19% pratique
une dispersion complète.
64
OECD
(2020),
“Organising
the
State
Ownership
Function”,
COMPTE D’AFFECTATION SPÉCIALE
PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L’ÉTAT
59
Au Royaume-Uni, un système partiellement centralisé
Concrètement, le système britannique s’organise principalement autour
d’une entité détenue par le Trésor britannique, le
UK Government
Investments
, qui, selon l’OCDE, supervise les participations de l’Etat dans
16 entreprises et mène les cessions importantes et les privatisations. Le
UKGI a avant tout une mission de coordination et de conseil via les
compétences qu’il réunit à destination des ministères responsables des
entreprises publiques.
En termes de transparence, il est intéressant de noter que le UKGI ne
produit pas de rapport donnant une vision agrégée des activités et des
performances des entreprises dans lesquelles l’Etat est partie prenante.
Toutefois, un document comptable succinct est fourni depuis 2017.
En Allemagne, une organisation très décentralisée, fondée sur une
gestion des participations financières divisée entre ministères
Le ministère fédéral des finances a un rôle coordinateur dans la politique
fédérale de participations financière sans avoir en parallèle de fonction de
supervision ou de pouvoir de décision des entreprises détenues, qui
relèvent directement des ministères spécialisés.
Le ministère des finances fédéral joue tout de même un rôle central dans
la politique gouvernementale de participations financière dans la mesure
où il définit le cadre général de ces participations dans le document
«
Principles of Good corporate Governance for Indirect or Direct
Holdings of the Federation »
et le transmet ensuite aux ministères
concernés. Concrètement, ces derniers, lorsqu’ils veulent vendre ou
acheter des participations, doivent le faire par l’intermédiaire du ministère
des finances. En effet, tout ce qui impacte le budget fédéral et les finances
publiques doit passer par le ministère des finances. Conséquence de cette
organisation, dans le rapport allemand sur l’Etat actionnaire, les
participations sont réparties par ministère responsable.
Deux points complémentaires doivent être notés qui viennent renforcer
cette décentralisation:
Les Länders ont eux aussi une capacité de prise de participations ;
La KfW (Kreditanstalt für Wiederaufbau -Établissement de crédit
pour la reconstruction) peut également intervenir dans ce
domaine.