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DEUXIÈME CHAMBRE
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Quatrième section
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Arrêt n° S2019-0567
Audience publique du 8 février 2019
Prononcé du 8 mars 2019
CHAMBRE INTERDÉPARTEMENTALE
D’AGRICULTURE D
E
SAVOIE - MONT-BLANC
Exercices 2013 à 2015
Rapport n° R-2018-1285
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu le réquisitoire en date du 2 mai 2018, par lequel le Procureur général près la
Cour des comptes a saisi la juridiction de charges
soulevées à l’encontre
de M. X, agent
comptable de la chambre interdépartementale
d’agriculture
de Savoie
–
Mont-Blanc, au titre
des exercices 2013 à 2015, notifié le 30 mai 2018
à l’agent comptable concerné ;
Vu
les
comptes
rendus
en
qualité
de
comptable
de
la
chambre
interdépartementale
d’agriculture d
e Savoie
–
Mont-Blanc par M. X, du 1
er
janvier 2013 au
31 décembre 2015 ;
Vu les justifications produites au soutien des comptes en jugement ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60
modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu le code civil, notamment son article 2224 ;
Vu le code de commerce, notamment son article L. 622-17 ;
Vu le code rural et de la pêche maritime, ainsi que les lois, décrets et règlements
sur la comptabilité des établissements publics nationaux à caractère administratif et les textes
spécifiques applicables aux chambres d'agriculture ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances
sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs
relations avec les administrations ainsi que le décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 pris pour
l'application de son article 10, relatif à la transparence financière des aides octroyées par les
personnes publiques ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et
comptable publique ;
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Vu le décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième
alinéa du VI de l’article 60 de la loi de finances de 1963 modifié dans sa rédaction issue de
l’article 90 de la loi n° 2011
-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ;
Vu le rapport n° R-2018-1285
à fin d’arrêt
de M. Jérôme PERDREAU, auditeur,
magistrat chargé de l’instruction
;
Vu les conclusions n° 054 du Procureur général du 31 janvier 2019 ;
Entendu,
lors de l’audience publique du
8 février 2019, M. Jérôme PERDREAU,
auditeur, en son rapport,
M. Serge BARICHARD, avocat général, en les conclusions du
ministère public, et M. X, agent comptable présent, ayant eu la parole en dernier ;
Entendu en délibéré M. Jacques BASSET, conseiller maître, réviseur, en ses
observations ;
Sur la charge n° 1
, soulevée à l’encontre de
M. X, au titre des exercices 2013
à 2015 :
1. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la juridiction
de la responsabilité encourue par M. X
pour l’insuffisance de
s diligences réalisées pour
assurer auprès de deux débiteurs le recouvrement de créances au profit de la chambre
interdépartementale d’agriculture de Savoie
- Mont-Blanc, pour un montant total de 875,51
€
,
dont 800,96 € restaient dus
; qu’au surplus, s’agissant du premier débite
ur, la preuve de
l'exercice de diligences adéquates, complètes et rapides, au regard des obligations incombant
à l'agent comptable au titre des dispositions du code de commerce en matière de procédures
collectives,
n’aurait pas été apportée
; que la preuve de remboursements partiels, pour un
montant total de 74,55
€, n’aurait pas
non plus été apportée ;
Sur le droit applicable
2.
Attendu qu’en application du I de l’article 60 de la loi susvisé
e du 23 février 1963,
«
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du
recouvrement des recettes
[…]
,
de la conservation des pièces justificatives des opérations et
documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils
dirigent
» et «
des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de recettes
»; que leur
responsabilité personnelle et pécuniaire «
se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou
manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée
[…]
» ;
3. Attendu qu
’aux termes des articles 17 à 20 du décret n° 2012
-1246 du
7 novembre 2012, «
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement
responsables des actes et contrôles qui leur incombent
» ; que le comptable public est seul
chargé, dans le poste c
omptable qu’il dirige, notamment «
de la tenue de la comptabilité
générale
; [
…
]
de la prise en charge des ordres de recouvrer
[…]
qui lui sont remis par les
ordonnateurs ; du recouvrement des ordres de recouvrer et des créances constatées par un
contrat,
un titre de propriété ou tout autre titre exécutoire ; de l’encaissement des
droits au
comptant et des recettes liées à l’exécution des ordres de recouvrer ;
[
…
]
de la conservation
des pièces justificatives des opérations transmises par les ordonnateurs et des documents de
comptabilité
» ; que les comptables publics sont tenus d’exercer le contrôle «
de la régularité
de l’autorisation de percevoir la recette
; [
…
]
de la mise en recouvrement des créances et de
la régularité des réductions et des annulations des ordres de recouvrer
» ;
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4.
Attendu qu’aux termes de l’article 2224 du code civil,
«
les actions personnelles
ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu
ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer
»
; qu’en application de
la loi
n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, les créances
nées antérieurement au 19 juin 2008 sont prescrites à compter du 19 juin 2013 ;
Sur les faits
5.
Attendu que, s’agissan
t du premier débiteur, les créances visées dans le
réquisitoire
ont fait respectivement l’objet de prescription en recouvrement le 19 juin 2013
(ordres de recette n° 1587, 1391 et 1432), le 21 octobre 2013 (ordre de recette n° 2095), le 25
septembre 2014 (ordre de recette n° 1918) et le 24 septembre 2015 (ordre de recette n°
3199),
faute d’acte interruptif avant ces dates
; que le créancier avait fait l’objet d’une
procédure de redressement judiciaire en date du 18 septembre 2001 ; qu'un jugement du
25 novembre 2011, publié le 31 décembre 2011, a prononcé la résolution du plan de
continuation et la liquidation judiciaire ; que ce jugement a toutefois été réformé par un arrêt
de la Cour d'appel de Chambéry du 28 avril 2012, publié le 5 octobre 2012 ; que les créances
concernées, nées postérieurement à la date d’ouverture de la procédure collective mentionnée
au réquisitoire, auraient dû être déclarées pour bénéficier du paiement par privilège mentionné
à l’article
L. 622-17 du code du commerce ; que le premier acte exécutoire concernant ces
créances n’est intervenu que le 24 novembre 2015, postérieurement à leur prescription
;
6.
Attendu que, s’agissant du second débiteur (ordre de recettes n°
1151),
constitué sous forme de groupement agricole d’exploitation
commune (GAEC), les créances
ont été adressées postérieurement à sa dissolution le 3 mars 2006 ; que l’activité d’élevage
du groupement ayant été reprise par l’un de ses associés, la créance en cause, bien
qu’adressée à un destinataire inexistant, correspo
ndait à une prestation obligatoire
d’enregistrement
des animaux (IPG) et était ainsi bien exigible ; que la créance en cause a été
atteinte par la prescription en recouvrement le 25 septembre 2014,
faute d’acte interruptif
avant cette date ; que le premier
acte exécutoire concernant cette créance n’est en effet
intervenu que le 24 avril 2015 ;
Sur les éléments apportés à décharge par l
’agent
comptable
7.
Attendu qu’en réponse au réquisitoire, l’agent comptable
a fait état de
l’existence de diligences antérieures aux actes exécutoires des 24 novembre 2015 (premier
débiteur) et 24 avril 2015 (second
débiteur), ainsi que de tentatives de saisie par voie d’huissier
en application de ces actes ;
8. Attendu que le comptable a également fait valoir que les montants des créances
en cause devaient être diminués à hauteur des montants facturés au titre de la contribution
volontaire
obligatoire finançant l’équarrissage, que la chambre d’agriculture collecte pour le
compte de l’association
ATM Ruminants ; qu
’en effet,
les conventions conclues à ce titre entre
la chambre d’agriculture et cette association
prévoient qu’en cas d’absence de recouvrement
par la chambre d’agriculture
, la responsabilité du recouvrement de ces contributions est
transférée
à l’association au terme de l’exercice au cours duquel elles ont été facturées
; que
l’agent comptable
a apporté la preuve que les dispositions des conventions conclues avec
l’association ATM
Ruminants en matière de responsabilité du recouvrement des contributions
volontaires obligatoires au titre du service public d’équarrissage
avaie
nt été respectées, et qu’il
était dès lors fondé à procéder à l’annulation partielle des créances concernées à h
auteur des
montants de ces contributions, pour un total de 74,55
€
;
Sur l’existence d’un manquement
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9. Attendu que les relances antérieures aux deux dates dont le comptable fait état
au point 7 ne présentent pas
de caractère exécutoire et n’ont donc pas e
u pour effet
d’interrompre le
cours de la prescription en recouvrement ; q
u’aucune tentative de saisie
attribution n’a notamment été diligentée avant l’acquisition de la prescription en
recouvrement
des créances en cause ;
10. Attendu que la somme totale de 7
4,55 € ayant fait l’objet d’annulations
partielles sur les montants des titres à recouvrer a bien été justifiée par l’agent comptable
;
qu’elle était toutefois déjà retranchée du montant total des titres faisant l’objet de la charge
n°
1, soit 875,51 €, le montant restant dû s’établissant, comme l’indique le réquisitoire
, à
800,96
€
;
11.
Attendu que, faute d’acte susceptible d’interrompre
le cours de la prescription
des créances en cause et, s’agissant du
premier débiteur, de déclaration de la créance auprès
du mandataire judiciaire, les diligences de M. X pour recouvrer ces créances n'ont pas été
adéquates, complètes et rapides
; qu’il a
ainsi manqué à l'obligation qui lui est faite de
recouvrer les recettes et a par conséquent engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire
au titre de l’article 60 de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
12. Attendu que l
e comptable n’
a apporté aucun élément permettant de conclure
que la chambre d’agriculture n’aurait pas pu être désintéressée si
ses diligences avaient été
adéquates, complètes et rapides ; q
ue les saisies par voie d’huissier infructueuses, entreprises
en application des actes exécutoires des 24 novembre 2015 et 24 avril 2015, ont eu lieu entre
un an et trois ans après la date de prescription en recouvrement des créances visées dans le
réquisitoire
; qu’
en conséquence, elles ne permettent pas de prouver que les débiteurs ne
présentaient pas meilleure fortune à la date d’acquisition de la
prescription en recouvrement ;
que les manquements précités ont ainsi causé un préjudice financier, au sens des dispositions
du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février
1963 susvisée, à la chambre
interdépartementale d’a
griculture de Savoie - Mont-Blanc ;
13.
Attendu qu’aux termes du même article,
«
lorsque le manquement du
comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (ou l’État)
[…],
le
comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers
personnels la somme
correspondante
»
; qu’ainsi il y a lieu de constituer
M. X débiteur de la chambre
interdépartementale d’a
griculture de Savoie - Mont-Blanc pour la somme de 323,95
€
au titre
de
l’exercice
2013, 385,43
€
au titre de
l’exercice
2014 et 91,58
€
au titre de
l’exercice
2015 ;
14.
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée, «
les débets portent intérêts au taux légal à compter du premier acte de la mise en
jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce,
cette date est le 30 mai 2018, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur la charge n° 2
, soulevée à l’encontre de
M. X, au titre des exercices 2013
à 2015 :
15. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la
juridiction de la responsabilité encourue par M. X
pour l’insuffisance de
s diligences réalisées
pour assurer le recouvrement
, auprès d’un débiteur public,
d
’une
créance au profit de la
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chambre interdépartementale d’agriculture de Savoie
- Mont-Blanc pour un montant de
715,08
€
;
Sur le droit applicable
16.
Attendu qu’en application du I de l’article 60 de la loi susvisé
e du 23 février
1963, «
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du
recouvrement des recettes
[…]
,
de la conservation des pièces justificatives des opérations et
documents de comptabilité ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils
dirigent
» et «
des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de recettes
» ; que leur
responsabilité personnelle et pécuniaire «
se trouve engagée dès lors qu’un déficit ou
manquant en monnaie ou en valeurs a été constaté, qu’une recette n’a pas été recouvrée
[...]
»
;
17.
Attendu qu’aux termes des articles 17 à 20 du décret n° 2012
-1246 du
7 novembre 2012, «
les comptables publics sont personnellement et pécuniairement
responsables des actes et contrôles qui leur incombent
» ; que le comptable public est seul
ch
argé, dans le poste comptable qu’il dirige, notamment «
de la tenue de la comptabilité
générale
; [
…
]
de la prise en charge des ordres de recouvrer
[…]
qui lui sont remis par les
ordonnateurs ; du recouvrement des ordres de recouvrer et des créances constatées par un
contrat, un titre de propriété ou tout autre titre exécutoire ; de l’encaissement des
droits au
comptant et des recettes liées à l’exécution des ordres de recouvrer ;
[
…
]
de la conservation
des pièces justificatives des opérations transmises par les ordonnateurs et des documents de
comptabilité
» ; que les comptables publics sont tenus d’exercer le contrôle «
de la régularité
de l’autorisation de percevoir la recette
; [
…
]
de la mise en recouvrement des créances et de
la régularité des réductions et des annulations des ordres de recouvrer
» ;
18. Attendu qu'aux termes de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la
prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements
publics, sont prescrites au profit de ces débiteurs publics
« toutes créances qui n'ont pas été
payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours
de laquelle les droits ont été acquis »
;
Sur les faits
19. Attendu que
l’ordre de recette n° OR
-2011-BU-74044291, bordereau n° 88,
émis le 31 décembre 2011
par la chambre départementale d’agriculture de Haute
-Savoie à
l’encontre de la région Rhône
-Alpes,
pour un montant de 715,08 €
, est resté impayé ;
20. Attendu que cette créance correspondait à une facture (n° 4291) émise par
cette chambre d’agriculture pour une formation assurée par l’un de ses agents
; que la
chambre interdépartementale de Savoie
–
Mont-Blanc a repris, à sa création, au 1
er
janvier
2013, l’ensemble des biens,
droits et obligations des deux chambres fusionnées, notamment
celle de Haute-Savoie ;
21. Attendu qu
’
à défaut de diligence entreprise pour en assurer le recouvrement,
cette créance a été atteinte par la prescription le 1
er
janvier 2016 ;
Sur les éléments
apportés à décharge par l’agent comptable
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22. Attendu que le comptable ne conteste pas les faits énoncés au réquisitoire,
mais indique qu’aucune diligence n’a été entreprise en raison des difficultés à obtenir
«
un
retour positif
»
; qu’il a précisé à l’audie
nce
n’avoir
pas su
à qui s’adresser
;
Sur l’existence d’un manquement
23.
Attendu que l’agent comptable n’
a apporté aucun élément tendant à démontrer
que la créance n’était pas certaine, liquide et exigible
lorsqu’il l’a prise en charge en qualité de
comptable de la chambre départementale
d’agriculture
de Haute-Savoie ;
qu’il aurait dû, dès
lors, en qualité d’agent comptable de la chambre interdépartementale de Savoie –
Mont-Blanc,
faire toutes diligences po
ur tenter d’obtenir son recouvrement et éviter sa prescription
;
24.
Attendu qu’aux termes de la loi n°
68-1250 du 31 décembre 1968
susmentionnée, la prescription d’une créance sur un débiteur public peut être interrompue par
« toute demande de paiement ou toute réclamation écrite adressée par un créancier à l'autorité
administrative
» ;
que de surcroît, en l’absence de réponse du débiteur,
la créance aurait dû
faire l’objet d’une demande d’inscription ou de mandatement d’office
de la part de l’agent
comptable, en application des articles L. 1612-15 et L. 1612-16 du code général des
collectivités territoriales ;
que dès lors, la circonstance invoquée par l’agent comptable quant
aux difficultés à obtenir une réponse positive
du débiteur n’est pas de nature à l’e
xonérer de
sa responsabilité ;
25. Attendu que,
faute d’acte susceptible d’interrompre le
cours de la prescription,
au plus tard le 31 décembre 2015, les diligences de M. X pour recouvrer cette créance n'ont
pas été adéquates, complètes et rapides
; qu’il
a par conséquent manqué à l'obligation qui lui
est faite de recouvrer les recettes et ainsi engagé sa responsabilité personnelle et pécuniaire
au titre de
l’article 60 de la l
oi n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
26. Attendu que l
e comptable n’apporte aucun élément permettant de conclure que
la chambre d’agriculture n’aurai
t pas pu être désintéressée si ses diligences avaient été
adéquates, complètes et rapides ; que le manquement précité a dès lors causé un préjudice
financier,
au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février
1963 susvisée, à
la chambre interdépartementale d’a
griculture de Savoie - Mont-Blanc ;
27.
Attendu qu’aux termes du même article,
«
lorsque le manquement du
comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
[…],
le comptable
a
l’obligation
de
verser
immédiatement
de
ses
deniers
personnels
la
somme
correspondante
»
; qu’ainsi il y a lieu de constituer
M. X débiteur de la chambre
interd
épartementale d’a
griculture de Savoie - Mont-Blanc
pour la somme de 715,08 €
au titre
de
l’exercice 2015
;
28.
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée, «
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en
jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce,
cette date est le 30 mai 2018, date de réception du réquisitoire par M. X ;
Sur la charge n°
3, soulevée à l’encontre de M
. X, au titre des exercices 2013
à 2015 :
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29. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la
juridiction de la responsabilité encourue par M. X à raison du paiement de divers mandats
relatifs à des subventions, sans délibération de la session ni, pou
r quatre d’entre elles,
de
convention dont, en application de l'article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative
aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations et de l'article 1
er
du décret
n° 2001-495 du 6 juin 2001, la conclusion était obligatoire dès lors que leur montant annuel
dépassait 23 000
€
;
Sur le droit applicable
30.
Attendu qu’en application du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée
« les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables
[…]
du paiement des dépenses »
et
« des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de
[…]
dépenses
[…]
dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité
publique »
; que leur responsabilité
« se trouve engagée dès lors
[…]
qu’une dépense a été
irrégulièrement payée »
;
31. Attendu
qu’a
vant de régler les dépenses, les comptables
sont tenus d’exercer
les contrôles prévus par
l’article 19 du décret n°
2012-1246 du 7 novembre 2012 susvisé,
notamment le contrôle de la validité de la dette ; qu
’en application de l’article 20 du décret
précité, ce contrôle porte notamment
sur la justification du service fait, l’exactitude de la
liquidation, l’intervention des cont
rôles préalables prescrits par la réglementation et la
production des pièces justificatives
; qu’en
particulier, le comptable doit suspendre le paiement
s’il constate, à l’occasion du contrôle de la validité de la dette, des irrégularités ou des
inexactitu
des dans les certifications de l’ordonnateur
;
32.
Attendu qu’aux termes de l’article D
. 511-54-1 du code rural et de la pêche
maritime (CRPM), «
La chambre d'agriculture, réunie en session, règle par ses délibérations
les affaires de l'établissement. Elle délibère notamment sur :
[…]
11° les subventions
» ; qu
’
aux
termes du même article, «
Dans les limites qu'elle détermine, la session peut déléguer au
bureau les attributions mentionnées aux
[…]
11°
»; qu’il résulte
par ailleurs des dispositions de
l’instruc
tion codificatrice M92
, applicable aux chambres d’agriculture,
que le budget doit
préciser le détail des subventions qu'il est prévu d'accorder, en indiquant le nom des
bénéficiaires, le montant et
les modalités de paiement de chacune d'elles ; que l’état
correspondant doit faire l’objet d’une délibération de l’assemblée des élus ; qu’il résulte
par
ailleurs
des dispositions combinées de l’article 10 de la loi n° 2000
-321 du 12 avril 2000 et de
l’article 1
er
du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 que toute su
bvention d’un montant annuel
supérieur à 23 000 € doit faire l’objet d’une convention ;
Sur les faits
33. Attendu que les mandats suivants, imputés au compte 6585
« Subventions
accordées au titre de la gestion courante »
, ont été pris en charge par M. X :
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Exercice
Mandat
Montant en
€
Observations
2013
Mandat n° 3293 du 30 août 2013
34 000 Paiement de prestations
Mandat n° 4098 du 31 octobre 2013
3 000
Mandat n° 4275 du 22 novembre 2013
2 500
Mandat n° 5223 du 31 décembre 2013
500
Mandat n° 5480 du 31 décembre 2013
3 000 Mandat de charge à payer
Total exercice 2013
43 000
2014
Mandat n° 383 du 20 février 2014
3 000
Mandat n° 1843 du 06 juin 2014
34 000 Paiement de prestations
Mandat n° 2421 du 1
er
août 2014
25 000 Subvention remboursée
Mandat n° 3990 du 12 décembre 2014
7 500
Mandat n° 3991 du 12 décembre 2014
2 200
Mandat n° 3992 du 12 décembre 2014
2 600
Total exercice 2014
74 300
2015
Mandat n° 1686 du 16 juin 2015
500
Mandat n° 2231 du 31 juillet 2015
250
Mandat n° 2233 du 31 juillet 2015
250
Mandat n° 2582 du 16 septembre 2015
1 000
Mandat n° 3429 du 30 novembre 2015
250
Mandat n° 4190 du 31 décembre 2015
3 000
Mandat n° 4268 du 31 décembre 2015
2 300 Mandat de charge à payer
Mandat n° 4271 du 31 décembre 2015
1 500
Mandat de charge à payer
Mandat n° 4421 du 31 décembre 2015
3 500
Mandat de charge à payer
Mandat n° 4423 du 31 décembre 2015
5 330
Mandat de charge à payer
Mandat n° 4425 du 31 décembre 2015
40 000
Mandat de charge à payer
Total exercice 2015
57 880
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Sur les éléments apportés à décharge par l’agent comptable
et par l’ordonnateur
34. Attendu que l
’agent
comptable et l’ordonnateur
ont fait valoir que les
subventions attribuées par la chambre étaient systématiquement inscrites au budget initial de
chaque exercice lorsqu’elles étaient connues et soumises au vote de la session dans ce
cadre ; que l
es subventions accordées en cours d’exercice faisaient l’objet d’une délibération
du bureau adoptée sur le fondement d’une délégation accordée chaque année par la session
dans le cadre de l’article D
. 511-76 du CRPM, autorisant le bureau à procéder à toute
modification du budget d’un montant inférieur à 100 000 €
en cours d’exercice ; que les
subventions accordées dans ce cadre par le bureau faisaient systématiquement l’objet d’une
information à la chambre d’agriculture à la session suivant leur attribution ; qu’une telle
procédure, exécutée de bonne foi par la c
hambre, n’avait soulevé aucune réserve de la part
des représentants des tutelles y siégeant ;
que l’ordonnateur fait valoir en outre qu’une
délibération de la session du 28 novembre 2017 a donné le pouvoir au bureau, «
à compter
de ce jour
», de délibérer
notamment sur l’attribution des subventions inférieures ou égales à
100
000 €, conformément à «
l’article R. 511
-54-1 du code rural et de la pêche maritime
» ;
35. Attendu que le comptable a fait valoir, par ailleurs, que les mandats n° 3293
du 30 août 2013 et n° 1843 du 6 juin 2014,
d’un montant de 34
000 € chacun
, portaient sur
des dépenses relevant de prestations réalisées au profit de la chambre et non de subventions ;
qu’elles avaient ainsi été imputées à tort au chapitre 65, et auraient dû être
comptabilisées au
chapitre 62 «
Services extérieurs
» ; que la subvention payée sur le fondement du mandat
n° 2421 du 1
er
août 2014
, d’un montant de 25
000 €, a fait l’objet d’un remboursement intégral
à la chambre d’agriculture
; que la subvention de 1 50
0 €
payée sur le fondement du mandat
n° 4271
du 31 décembre 2015, inscrite en charge à payer, n’avait pas été versée et avait été
supprimée en cours d’exercice 2016
; que les mandats n° 4268 (2 300
€), n°
4271 (1 500
€),
n° 4421 (3 500
€), n°
4423 (5 330
€
) et n° 4425
(40 000 €)
du 31 décembre 2015 ont été
effectués au titre de charges à payer et n’ont
ainsi entraîné aucun paiement au cours de
l’exercice 2015
;
Sur l’existence d’un manquement
36. Attendu que les mandats n° 4268 (2 300
€), n°
4271 (1 500
€),
n° 4421
(3 500
€), n°
4423 (5 330
€) et n°
4425 du 31 décembre 2015 (40 000
€
) ont été passés en
écritures
au titre de charges à payer et n’ont
donc entraîné aucun paiement au cours de
l’exercice 2015 ;
q
u’ils ont été extournés en début d’exercice 2016, le
s subventions en cause
ayant ensuite été payées sur le fondement
de nouveaux mandats émis au cours de l’exercice
2016 avec les pièces justificatives correspondantes,
à l’exception de celle ayant fait l’objet du
mandat n° 4271, qui a été inscrite à nouveau en charges à payer en 2016, puis supprimée en
2017 ; que les mandats et pièces justificatives correspondant à ces opérations ont été produits
par le comptable au cours
de l’instruction
; qu’il est ainsi établi que M.
X
n’
a pas engagé sa
responsabilité
au
titre
des
exercices
visés
par
le
réquisitoire
pour
ces
cinq
mandats ;
37. Attendu
que
les
pièces
produites
par
l’agent
comptable
lors
de
l’instruction
montrent que le mandat n° 5480 du 31 décembre 2013 (3
000 €) correspond
également à un mandat de charge à payer
n’ayant
entraîné aucun décaissement au cours de
l’exercice 2013
; que le paiement effectif de cette dépense a donné lieu à l’émission d’un
nouveau mandat (n° 383 du 20 février 2014), qui a été
payé au cours de l’exercice 2014
; que
la responsabilité d
e l’agent comptable ne peut donc être engagée au titre de l’exercice 2013
pour le mandat n° 5480 ;
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38. Attendu que le mandat n° 2421 du 1
er
août 2014, payé sans convention au
bénéfice de la FDGEDA pour un montant de 25
000 €, a fait l’objet d’un remboursement
intégral à la chambre d’agriculture
par chèque en date du 5 juin 2015, encaissé le 2 juillet
2015, ainsi qu’en attestent les pièces produites au cours de l’instruction
; que dès lors, la
caisse ayant été rétablie, il convient de considérer qu’il n’y a pas
lieu à charge en ce qui le
concerne ;
39. Attendu que pour tous les autres mandats, à défaut de nomenclature des
pièces justificatives alors applicable aux chambres d’agriculture, l’agent comptable devait
apprécier, au cas par cas, si les pièces fournies présentaient un caractère suffisant pour
justifier
la dépense engagée, notamment si elles étaient, d’une part, complètes et précises et,
d’autre part, cohérentes au regard de la nature et de l’objet de la dépense telle qu’elle a
vait
été ordonnancée ; que ce contrôle pouvait conduire le comptable à porter une appréciation
juridique sur les actes à l’origine de la créance et à leur donner une interprétation conforme
à
la réglementation en vigueur, sans se faire juge de leur légalité ;
40. Attendu que les mandats n° 3293 de 2013 et n° 1843 de 2014, payés au
Comité d’organisation des Savoie au salon de l’agriculture,
ont été justifiés par des factures
(avec TVA pour le second)
; qu’ils
correspondaient,
selon l’agent comptable
, à des prestations
de service,
ce qui tendrait à expliquer l’absence de délibération autorisant
les dépenses et de
convention au sens de la loi du 12 avril 2000 ; que lesdits mandats étaient pourtant intitulés,
le premier,
«
participation au salon de l’agriculture
»
, et le second,
« subv. 2014 salon de
l’agriculture
»
, et ont tous deux été imputés
à l’article 6585
« Subventions accordées au titre
de la gestion courante »
; que
l’agent comptable ne disposait
donc pas, à la date du paiement,
de pièces cohérentes au regard de la nature de la dépense
; qu’il aurait donc dû suspendre le
paiement et demander
à l’ordonnateur de lever cette incohérence
;
41. Attendu que lors du paiement des 13 autres mandats en cause (n° 4098, 4275
et 5223 de 2013, n° 383, 3990, 3991 et 3992 de 2014 et n° 1686, 2231, 2233, 2582, 3429 et
4190 de 2015), l’agent comptable ne disposait pas de délibération de la session ayant autorisé
les subventions ; que le vote de crédits au chapitre
« Subventions »
du budget par la session
n’atteste que de la volonté de la chambre d’agriculture de prévoir des crédits disponibles pour
le paiement éventuel de subventions, et non de leur
attribution effective ; qu’il ne peut dès lors
s’apparenter à une délibération attribuant les subventions en cause ;
que les budgets initiaux
et modificatifs ne comportent
d’ailleurs
aucun élément sur les montants des subventions et
leurs bénéficiaires ;
qu’au titre des exercices 2013 à 2015, aucune délibération de la session
n’a donné au bureau le pouvoir de délibérer sur l’attribution de
s subventions ; que cette
compétence ne lui a été déléguée, en application
de l’article D
. 511-54-1 du code rural et de
la pêche maritime et dans les limites déterminées par la session, que par une délibération
votée le 28 novembre 2017, qui ne pouvait fonder les subventions versées de 2013 à 2015 ;
que cette délibération prévoit d’ailleurs explicitement qu’elle ne s’applique qu’à compter du jour
de son adoption par la session ;
42. Attendu que le ministère public a estimé dans ses conclusions que la
responsabilité du comptable ne pouvait être engagée pour ces 13 mandats sur le fondement
du défaut d’habilitation régulière du bureau puisqu’il «
n’appartient pas au comptable, en
principe, de vérifier la compétence des auteurs des actes administratifs fournis au titre des
pièces justificatives de la dépense
» ;
43. Attendu toutefois que le manquement imputable au comptable ne porte pas
sur la validité de la délégation donnée par la session au bureau,
dans le cadre de l’article
D. 511-76 du CRPM, de
procéder à toute modification du budget d’un montant inférieur à
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100 000 € en cours d’exercice
,
qui était dépourvue de tout lien avec l’attribution des
subventions,
mais sur l’insuffisance
, comme pièces justificatives de la dépense, des
délibérations et décisions dont le comptable disposait
ou dont il a invoqué l’existence
; qu’en
effet, eu égard à leur objet, les délibérations de la session portant sur le budget ne pouvaient
se substituer aux délibérations autorisant chacune des subventions versées ; qu
’en l’absence
de délibération de la session donnant
au bureau le pouvoir de délibérer sur l’attribution de
s
subventions, les décisions prises à ce titre par le bureau ne pouvaient davantage en tenir lieu ;
44. Attendu que, sur le fondement des 13 mandats précités, le comptable a ainsi
payé des subventions
sans s’assurer que les pièces justificatives produites par l’ordonnateur
étaient complètes, précises et cohérentes au regard de la nature de la dépense, telle qu'elle
avait été ordonnancée
; qu’il a dès
lors manqué à ses obligations en matière de contrôle de la
dépense et a ainsi engagé sa responsabilité au titre de l’article 60 de la lo
i n° 63-156 du 23
février 1963 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
45. Attendu que les mandats n° 3293 du 30 août 2013 et n° 1843 du 6 juin 2014,
d’un montant de 34
000
€
chacun, avaient pour objet une prestation de représentation de la
chambre d’agriculture au salon de l’agriculture versée au profit du comité des Savoie, et
qu’elles ne s’apparentaient
donc pas à une subvention mais à une prestation répondant à un
besoin d
e la chambre interdépartementale d’agriculture de Savoie
- Mont-Blanc ; que le
comptable a produit un certificat de service fait
de l’ordonnateur attestant de sa volonté de
souscrire cette prestation et en précisant les composantes ; que le paiement par le comptable
de ces deux dépenses
n’a dès lors pas causé de préjudice financier à la chambre
interdépartementale d’agriculture de Savoie
- Mont-Blanc ;
46.
Attendu qu’aux termes des dispositions du deuxième alinéa du VI de l’article
60 de la loi du 23 février 1963 susvisée, «
lorsque le manquement du comptable
[…]
n’a pas
causé de préjudice financier à l’organisme public concerné, le juge des comptes peut l’obliger
à s’acquitter d’une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances
de l’e
spèce
»; que le décret du 10 décembre 2012 susvisé fixe le montant maximal de cette
somme à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable ;
47. Attendu que le montant du cautionnement prévu pour le poste comptable
considéré était fixé à 110 000
€
à compter du 1
er
juillet 2013
; qu’ainsi le montant maximum
des sommes susceptibles
d’être mises à la charge de M
. X
s’élève à
165
€
au titre de chacun
des exercices 2013 et 2014 ;
48. Attendu que, eu égard aux circonstances, il y a lieu
d’arrêter cette somme à
165
€
au titre de l’exercice 2013 et 165 €
au titre de l’exercice 2014
;
49.
Attendu qu’aucun élément produit par le comptable n’atteste de la volonté de
la chambre
d’agriculture d’accorder les 13
autres subventions en cause ;
qu’à dé
faut de
délibérations explicites de la session, elles
n’étaient pas certaines dans leur principe et
n’étai
ent donc pas dues ; que de ce fait, leur paiement a causé un préjudice financier, au sens
des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée,
à la
chambre interdépartementale d’agriculture de Savoie
- Mont-Blanc ;
50.
Attendu qu’aux termes du même article,
«
lorsque le manquement du
comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné
[…],
le comptable
a
l’obligation
de
verser
immédiatement
de
ses
deniers
personnels
la
somme
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correspondante
»
; qu’ainsi il y a lieu de constituer M
. X débiteur de la chambre
interdépartementale d’agriculture de Savo
ie - Mont-Blanc pour la somme de 6 000
€
au titre
de
l’exercice 2013, 15
300
€
au titre de
l’exercice
2014 et 5 250
€
au titre de
l’exercice
2015 ;
51.
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du
23 février 1963
susvisée, «
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en
jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce,
cette date est le 30 mai 2018, date de réception du réquisitoire par M. X ;
52. Attendu qu
’il n’existait pas, pour la période considérée, de plan de contrôle
sélectif de la dépense à la chambre interdépartementale
d’agriculture d
e Savoie
–
Mont-Blanc ; que cette circonstance fait obstacle à une remise gracieuse totale des débets ;
Sur la charge n°
4, soulevée à l’encontre de M
. X, au titre de
l’
exercice 2013 :
53. Attendu que, par le réquisitoire susvisé, le Procureur général a saisi la
juridiction de la responsabilité encourue par M. X pour défaut de contrôle de la validité de la
dette, lequel porte notamment sur l’exactitude de la liquidation et la production des pièces
justificatives, du fait du versement à son profit
d’une
« indemnité de conseil budget »
de 421,10
€ au titre de l’exercice 2013,
sans qu’aucune délibération de la chambr
e interdépartementale
d’agriculture n’ait déterminé le
montant de cette rémunération conformément aux dispositions
figurant à
l’article D.
511-80 du code rural et de la pêche maritime ;
Sur le droit applicable
54.
Attendu qu’en application du I de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée
« les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables
[…]
du paiement des dépenses »
et
« des contrôles qu'ils sont tenus d'assurer en matière de
[…]
dépenses
[…]
dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité
publique »
; que leur responsabilité
« se trouve engagée dès lors
[…]
qu’une dépense a été
irrégulièrement payée »
;
55. Attendu
qu’avant de régler les dépenses, les comptables sont tenus d’exercer
les contrôles prévus par l’article 19 du décret n° 2012
-1246 du 7 novembre 2012 susvisé,
notamment le contrôle de la validité de la dette ;
qu’en application de l’article 20 du décret
précité, ce contrôle porte notamment
sur la justification du service fait, l’exactitude de la
liquidation, l’intervention des contrôles préalables prescrits par la réglementation et la
production des pièces justificatives ; qu’en particulier, le comptable do
it suspendre le paiement
s’il n’a pas toutes les pièces justificatives requises par la réglementation ou si les pièces
dont
il dispose ne lui permettent pas de vérifier la liquidation de la dépense ;
56.
Attendu que l’article D.
511-80 du code rural et de la pêche maritime (CRPM)
dispose que le comptable perçoit une rémunération fixée par la chambre d’agriculture, dans
les limites arrêtées conjointement par le ministre de l’agriculture et le ministre du budget ;
Sur les éléments apportés à décharge par le comptable
57. Attendu qu
’à l’appui de
sa réponse, le comptable a produit une délibération du
bureau de la chambre départementale d’agriculture de
Haute-Savoie, en date du 14 février
1992,
autorisant le relèvement de l’indemnité conseil budget du comptable à 3
000 francs, soit
457,35
€
;
qu’il indique avoir continué d’appliquer
cette délibération, en toute bonne foi,
jusqu’en 2013, dernière année au cours de laquelle il a élaboré le budget de la chambre
;
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Sur l’existence d’un manquement
58. Attendu que le fait
générateur de l’indemnité en cause étant postérieur à la
création de
la chambre interdépartementale de Savoie - Mont-Blanc, intervenue le 1
er
janvier
2013, la délibération produite
, émanant de l’assemblée délibérante d’une autre chambre
d’agriculture
,
ne saurait s’y appliquer
; que
ni l’article 97 de la loi du 2 mars 1982
, ni le décret
n° 82-979 du 19 novembre 1982 instituant une indemnité de conseil budget, ni le décret du
3 mars 2014 l’étendant aux établissements publics de santé
, ne prévoient son application aux
agents comptables intervenant au profit des établissements publics nationaux ; que le
versement
d’une telle indemnité par la chambre interdépartementale d’agriculture de Savoie
-
Mont-Blanc à son comptable, agent public, était ainsi dépourvue de fondement juridique ;
59. Attendu qu
’en payant l’indemnité en cause sans s’assurer que les pièces
justificatives produites par l’ordonnateur étaient complètes, précises et cohérentes
au regard
de la nature de la dépense telle qu'elle a été ordonnancée, le comptable a manqué à ses
obligations en matière de contrôle de la dépense et a ainsi engagé sa responsabilité au titre
de l’article 60 de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
60.
Attendu qu’un paiement irrégulier effectué à un tiers n’entra
îne pas de
préjudice pour l’organisme public lorsqu’il correspond à une dette exigible (échue, certaine,
liquide, non sérieusement contestée dans son principe ou dans son montant) de cet organisme
; que dans le cas d’espèce,
la d
ette n’était attestée, ni dans son principe, ni dans son montant,
faute de délibération de la session de la chambre interdépartementale et de base législative
ou réglementaire ; que le paiement
de l’indemnité n’était
donc pas dû et a causé de ce fait un
pr
éjudice financier, au sens des dispositions du troisième alinéa du VI de l’article 60 de la loi
du 23 février 1963 susvisée, à la chambre
interdépartementale d’agriculture de
Savoie - Mont-Blanc ;
61.
Attendu qu’aux termes du même article,
«
lorsque le manquement du
comptable
[…]
a causé un préjudice financier à l’organisme public concerné (ou l’État)
[…],
le
comptable a l’obligation de verser immédiatement de ses deniers personnels la somme
correspondante
»
; qu’ainsi il y a lieu de constituer
M. X débiteur de la chambre
interdépartementale d’agriculture de Savoie
- Mont-Blanc pour la somme de
421,10 € au titre
de l’exercice 2013
;
62.
Attendu qu’aux termes du VIII de l’article 60 de la loi du 23 février 1963
susvisée, «
les débets portent intérêt au taux légal à compter du premier acte de la mise en
jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics
» ; qu’en l’espèce,
cette date est le 30 mai 2018, date de réception du réquisitoire par M. X ;
63. Attendu qu
’il n’existait pas, pour la période considérée, de plan de contrôle
sélectif de la dépense à la chambre interdépartementale
d’agriculture d
e Savoie
–
Mont-
Blanc ; que cette circonstance fait obstacle à une remise gracieuse totale du débet ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Au titre de l’exercice 201
3 (charges n° 1, 3 et 4)
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Article 1
er
.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc, au titre de la charge n°
1, pour la somme de 323,95 €
,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
Article 2.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc, au titre de la charge n° 3, pour la somme de 6
000 €,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
Les paiements
n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de
règles de contrôle sélectif.
Article 3.
–
M. X
devra s’acquitter d’une somme de
165
€
, au titre de la charge n°
3 (mandat n° 3293), en application
du deuxième alinéa du VI de l’article 60 de la loi
n° 63-156 du 23 février 1963
; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en
vertu du IX de l’article 60 précité.
Article 4.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc au titre de la charge n° 4, pour la somme de 421,10
€,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
Le paiement n’entrait pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de règles
de contrôle sélectif.
Au titre de l’exercice 2014 (charges n°
1 et 3)
Article 5.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc, au titre de la charge n° 1, pour la somme de 385,43
€,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
Article 6.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc au titre de la charge n° 3, pour la somme de 15 300
€,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
Les paiements
n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de
règles de contrôle sélectif.
Article 7.
–
M. X
devra s’acquitter d’une somme de 165 €, au titre de la charge n°
3 (mandat n° 1843), en application du deuxième alinéa du VI de
l’article 60 de la loi
n° 63-
156 du 23 février 1963 ; cette somme ne peut faire l’objet d’une remise gracieuse en
vertu du IX de l’article 60 précité.
Au titre de l’exercice 2015 (charges n°
1, 2 et 3)
Article 8.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc, au titre de la charge n° 1, pour la somme de 91,58
€,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
Article 9.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc, au titre de la charge n° 2, pour la somme de 715,08
€,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
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S2019-0567
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Article 10.
–
M. X est constitué débiteur de la chambre interdépartementale
d’agriculture de Savoie –
Mont-Blanc, au titre de la charge n° 3, pour la somme de 5 250
€,
augmentée des intérêts de droit à compter du 30 mai 2018.
Les paiements
n’entraient pas dans une catégorie de dépenses faisant l’objet de
règles de contrôle sélectif.
Article 11.
–
La décharge de M. X pour sa gestion au titre des exercices 2013 à
2015
ne pourra être donnée qu’après apurement des débets
et des sommes à acquitter fixés
ci-dessus.
Fait et jugé en la Cour des comptes, deuxième chambre, quatrième section, par
M. Louis VALLERNAUD, président de section, président de la formation ; MM. Gilles MILLER
et Jacques BASSET, conseillers maîtres ; Mme Michèle COUDURIER, conseillère maître ;
M. Paul DE PUYLAROQUE, conseiller maître.
En présence de Mme Stéphanie MARION, greffière de séance.
Stéphanie MARION
Louis VALLERNAUD
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de
justice, sur ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux
procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d’y tenir la main, à tous
commandants et officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront
légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142
-20 du code des juridictions
financières, les arrêts prononcés par la Cour des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en
cassation présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État
dans le délai de deux mois à compter de la
notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une
ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce
dans les conditions prévues au I de l’article R. 142
-19 du même code.